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IN TME CUSTODY Or TME
BOSTON PUBLIC LIBRARY.
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ADAMS
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ENCYCLOPEDIE,
OU
DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES,
DES ARTS ET DES MÉTIERS.
TROISIEME EDITION'
TOME HUITIEME.
ENCYCLOPÉDIE,
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DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES,
DES ARTS ET DES MÉTIERS,
PAR UNE SOCIÉTÉ DE GENS DE LETTRES.
Mis en ordre & publié par M. DIDEROT i & quant à la Partie
Mathématique, par M. D'ALEMBERT.
Tantàm ferles junUura^ue poîUt ,
Tantîtm de medio Jumptis aued'u honoris / HoRAT.
TROISIEME ÉDITION.
T O M E h1j ÏTI ËM E.
A G E N E V E,
Chez Jean-Léonard Pellet , Imprimeur de la République,
A NEUFCHATEL,
Chez la Société Typographique.
KBMaHtiiuueuBu^saiski^-JuuA.M'ii. ■âiXssisje.saasBummm
M. D C C. L X X ri I L
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ENGYCLOPÉDÎE,
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DICTIONNAIRE HAISONNÉ
DES SCIENCES .
DES ARTS ET DES MÉTIERS-
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^^
CHU
■^^ HULULA, (Ge'og.) ville
^^3^ de l'Amérique feptentrio-
nal e dans la nonvelle Efpa-
gne,présdu lacdeMéxique.
CHUMPI, {Hijlnat.
Miner alog. ) Alonzo Bar-
ba donne ce nom à . un
minéral ou pierre fernigineufe, qui a beau-
coup de rapport avec l'émeril , & dont la
couleur efl: grife, d'un brillant un peu obfcur,
réfraûaire , & très-difficile à mettre en fu-,
fion. On la trouve au Potofi , ùc. Elle eft
Ibuvent mêlée aux mines d'argent. ( — )
CHUNDA, f. m. ( HiJ}. nat. Botjn. )
cfpece de folamim , morelle du Malabr.r ,
uès-bien gravé avec la plupart de fes d^-
Tome VIIL
CHU
taiîs pnr Van-Rheede , dans fon ITortus
Malaharicus ,vol. II, plane. XXX VIL p.
69. Les Brames l'appellent doLri. C'eft le
folanum fpïnofum MaLbaricum de Jean
Commelin.
C'eft une plante annuelle qui s'élève
fous la forme d'un buiflon fphéroïde de
trois pies' de diamètre ; à racine ligneufe
brune , de fix lignes environ de diamè-
tre , longue de quatre à cinq pouces , ra-
mifiée; à tige cylindrique, moelleufe au
centre , ramifiée , à fix pouces au-delTus
de fon origine , en plufieurs branches al-
ternes ouvertes fous un angle diê 45 de-
grés , rouge - obfcurcs , veloutées, cou-
vertes de poils épais étoiles , & hérilTées
A
1 CHU
d'épines coniques droites vertes, longues
de trois 'lignes , une fois moins larges,
lemées"'à 'des diflances de fix lignes Qti—
Viron.^ , ^ . '
Les 'feuilles fbiir alternes , difpof^éscir-
jtulairement au nombre de cinq à fept le
long des branches , elliptiques ,^pôintùes
*aux deux bouts , longues de trois à quâ-
^tre pouces , une fois moins larges , mar-
'quees de deux à trois ondes fur leurs bords,
'couvertes de poils ^pais , comme les ti-
^gés", \rerd-foncé deflus, plus claires def-
fous , relevées d'une côte épailfe ramifiée
de trois paires de nervures rougeâtres fe-
mces de quelques épines coniques comme
! celles des tiges , & portées fur un pédicii-.
'le cylindrique , une à deux fois plus court
'qu'elles , hérifïe de poils & d'épines comme
les tiges.
Sur le côté de l'aifTèlle des feuilles fu-
périeures fort'une fleur une fois plus courte
qu'elles , bleu - clair , ouverte eh étoile
d'un bon pouce de diamètre , & portée
fous un angle de 45 dégrés, fur un pédun-
cule de cette longueur , un peu renflé vers
fon extrémité & fans épines.
Chaque fleur eft hermaphrodite, mo-
nopétale ) régulière , pofée au defTous de
l'ovaire Elle confifte en un calice verd
d'une feule pièce , à tube court évafé peir-
fiftent, à cinq divifions triangulaires , ou-
vertes inégalement , une â deux fois plus
longues que larges , femées de quelques
ëpines ; en une corolle bleu-clair^ mono-
pétale , prefque une fois plus longue que
le calice , â tube court evafé horizontale-
ment, partagé prefque jufqu'à fon milieu
en cinq divifions égales triangulaires, une
fois plus larges que longues. A la bafe de
ce tube font attachées cinq étamines une
fois plus courtes que la corolle, à anthè-
res, longues prefque fefTiles jaunes, rap-
prochées en un cône qui enveloppe entiè-
rement l'ovaire. Celui-ci eft fphéroi'de ,
■ porté fur un difque jaune avec lequel il
fait corps , & furmonté par un ftyle mé-
diocre cylindriaue , couronné par un fti-
*gmate hémifphérique , velouté & traverfé
par un fdlon.
L'ovaire en muriftant devient une baie
fphéro'-de d'u i pouce de diamètre , lifîè
d'abord verte defiôus &' blanche deflus ,
CHU
enfui te jaune^clair , à chair vefée,fu<icu -
lente , ne Vouvrant point , partagée -en
deux loges qui contiennent chacune 'tine
centaine de graines lènticulairôs , td'ùne
ligne de diamètre-, blanches d'abord ,
enfuite jaunes , -attachées vehicalerrient
par deffous leur tranchant , & implantées
dans la chairdu placenta qui eft *àtcaché
■au centre du fruit dont il remplit k plus
grande partie.
Culture. Le cliiinda Crôîf*âii ■^îatabar
dans les terres fablonneufes.
Qualités. Toute la p}arite^'"¥trfe%<!eur
fauvage & une faveur légèrement -âere ,
fur-toùt dans fes fruits.
Ufages. Sa racine pilée&: bue' dàhs le
vin à la dofe de deux onées , purge les
humeurs pituiteufes ; à moindre dofe ,
elle fe boit dans le vin pour arrêter le
vomiffement. Sa décodion & celle de
toutes fes autres parties fe boit dans les
fièvres caufées par l'abondance du phle-
gme & des humeurs, pour aider la di-
geftion, & l'on y joint le miel pour la
toux & la pefanteur d'eftomac. ( . M.
An AN SON. )
CHUNG-KiNG , ( Géogr. ) grande
ville de la Chine , dans la province de
Suchuen.
CHUPMESSAHITES, f. m,
plur. ( Hifl. mod. ) fede de mahométans
qui croient que Jefus-Chrift eft Dieu >
le vrai Meffie, & le Rédempteur du genre
humain ; mais qui n'ofent lui rendre
aucun culte public , ni l'adorer ouverte-
ment. Ricaut aflbre que cette feâe très-
nombreufe eft compofée fur-tout de per-
fon nés de marque , & qu'elle a des par-
tifans jufque dans le ferrail. (G)
CHUQUELAS ou CHERCOLCES ,
( Co/nmerce. ) voye^ CherconnÉES.
CHUR - WALDEN , ( Géogr. ) pe-
tite ville des Grifons , fur la rivière de
Raba.
CHUS ou CUOAy {Bljl. anc.) en
grec x^^'^i de x^ -IV répandre j mefure de
liquides chez lès Grecs. Les auteurs né
s'accordent point fur la quantité de liqui-
de que le chus contenoit ; les uns préren-
dent qu'il tenoit quatre feptiers , fexta"
rios ; \es autres fix , ou un congé , congiùm.
Fabri dit neuf livres d'huile ,/ dix de tia^
G H U
&; treize livres quatre onces de miel. Pi-
tifcus , dans fon didionnaire , eftime que
le chus contient fix feptiers attiques ou
douze cotyles ; que cette mefure pefoit
pleine d'huile fept livres & demie , &
huit livres & un quart d'eau ou de vin.
En générai , rien de plus obfcur que ce
qui regarde les mefures des Grecs & des
Romains, leur variété en divers temps &
en différents pays , leur inftabilité, les mê-
mes dénominations employées pour expri-
mer des chofes différentes , ont jeté fur
ce fujet la plus grande confufion. Faut-il
eti être furpris ? les mêmes inconvéniens
ne fe rencontrent-ils pas dans les poids
& \qs mefures des modernes ? Nous n'a-
vons rien à reprocher aux anciens ; & les
nations européennes ont un befoin jour-
nalier d'avoir perpétuellement là-deffus
un tarif à la main pour faire leur com-
merce non-feulement chez l'étranger , mais
encore dans les diverfes provinces d'un
même royaum.e. Cependant ceux qui dé-
lireront les détails ou les conjedures de
nos littérateurs fur le chus & fur le congé ,
que quelques - uns prétendent être une
même mefure , pourront confulter les
mémoires de V académie des Infcriptions ;
Stuchiusdans fes œuvres in-fol. L. B. 1695.
Eifenfchmid , Beverinus , & tant d'autres
Jivres fur les poids & les mefures anti-
ques, qui ne prouvent que trop l'incer-
titude qui règne ici. Cet article ejl de M.
le Chevalier DE JaucOURT.
CHUS y ( Hiji. facr. ) premier fils de
Cham , & père de Nembrod , fut le fon-
dateur des Ethiopiens ou des Abyffms ,
dont le, pays ell défigné dans V Ecriture
par le nom de terre de Chus. Nous ne
connoiffons dans les livres faints qu'un feul
homme du nom de Chus ; mais on trou-
ve pluGeurs pays qui portent ce nom ,
foit que le même homme ait demeuré en
plus d'un endroit > foit qu'il y ait eu qiiel-
qu'autre Chus qui ne nous foit pas connu.
Les interprètes traduifent ordinairement
Chus par l'Ethiopie j mais il y a plufîeurs
paflàges où cette traduûion ne peut avoir
lieu. Chus fur le Géhon ne peut être tra-
duit pax l'Ethiopie , parce qu'il faudroit
que le Géhon fignifiât le Nil , & que ce
dernier fleuve ell trop éloigné de l'Eu-
C H U 3
phrate & du Tigre , pour que l'on puifle
dire qu'il fortoit , comme eux, du paradis
terreilre; ainii Chus fur le Géhon n'eft
antre que l'ancien pays des Scythes fur
l'Araxe. Le terre de Chus dans l'Arabie
pétrée , frontière de l'Egypte , d'où Tha-
raca & Zara firent irruption dans la Ju-
dée , ne peut non plus être entendue pat
l'Ethiopie. Ainii voilà deux pays de Chus
marqués dans V Ecriture , que les inter-
prètes confondent avec l'Ethiopie propre-
ment dite , qui eft au midi de l'Egypte.
(■!-)
C H USAI, {Hift. facr.) l'un des
plus fidèles ferviteurs de David , qui , ayant
appris la révolte d'Abfalon , alla trouver
le roi , la tête couverte de poufïiere , &
les habits déchirés. David l'ayant engagé
de feindre d'entrer dans le parti d'Abfa-
lon , pour pénétrer fes defîèins , & s'op-
pofer aux confeils d'Achitophel , Chufaï
alla à Jérufalem , gagna la confiance de
ce prince rebelle , & détourna par fa
prudence le confeil que lui donnoit Achi-
tophel de pourfuivre David , qu'il fit aver-
tir de ce qui fe tramoit contre lui. Ce
fervice fut le falut de ce malheureux roi ,.
qui paflà promptement le Jourdain pour
le mettre en fureté. An du monde 2081.
(■!:)
CmJSmyRafathaim, ( Hift.facr. )
Ethiopien , roi de Méfopotamie , fit la
guerre aux Ifraélites , & \qs réduifit en
fervitude : Dieu le permettoit ainfi pour
les punir de leur idolâtrie. Ils demeurè-
rent dans cet efclavage huit ans , à la fir^
defquels , Dieu touché de leur repentir ,
fe fervit d'Othoniel pour les remettre eij
liberté. An du monde 2.593. ( + )
CHU SI, [Hifl. facr.) offici.ç.r de
David y qj^i porta à ce prince la nouvellQ
de la mort d'Abfalon. C'étoit encore Iç
nom du père de Sophonie le prophète.
Saul eft ainll appelle à caufe de fa mé-
chanceté & de l'acharnement avec lequel
il pourfuivoit David. Chufi , qui fignifig
Ethiopien , peut défigner un homme mé-^
chant. (-}-).
CHUSISTANoM KURISTAN,
( Géogr. ) province d'Afie dans la Perfe ,
entre le pays de Fars & celui de Balïbra ,
dont la capitale eft Soafter.
A2
4 CHU
CHUTE, f. f. en Phyfiquc, efl le che-
min que fait un corps pefant en s'appro-
chant du centre de la terre. Voye\ DES-
CENTE.
Galilée eft le premier qui ait découvert
la loi de l'accélération des corps qui tom-
bent; favoir, qu'en divifant tout le temps
de la chute en inftans égaux , le corps fera
trois fois autant de chemin dans le fécond
inftant de fa chute que dans le premier ,
cinq fois autant dans le troifieme, fept
fois autant dans le quatrième , ^c. & ainfi
de fuite , fuivant l'ordre des nombres im-
pairs. Voye\ un plus long détail fur ce fu-
jet à Vuniclt ACCÉLÉRATION. Pour la
caufe de la chute des corps , poye^ PESAN-
TEUR.
Pour les loixdela chute des corps , poye\
Descente. ( O)
Chute de Vanus ou fonde ment ^ {Chir.)
c'eft un accident qui confiée en ce que
quand le malade va à la felle , l'inteitin
redum lui fort fi considérablement, qu'il ne
peut plus rentrer dans le corps , ou que
s'il y rentre , il retombe. Voye:^^ Regtum.
C'eft quelquefois une maladie chroni-
que , fur- tout quand elle vient de paraly-
fie : fes caufes font le relâchement des fi-
bres du redum ou du mufcle fphinder; ou
bien la conftridion du ventre , la diarrhée ,
la dyfTenterie , ou le tenefme.
On en guérit difficilement quand elle
eft accompagnée d'hémorrhoïdes. Les mé-
dicamens les plus propres pour la cure ,
font les aftringens. Il eft befoin auHi d'une
opération manuelle pour faire rentrer l'in-
teftin , qui , expofé à l'air, ne manqueroit
pas de fe tuméfier & de fe mortifier , s'il
ne l'eft pas déjà.
Il arrive fouvent qu'il retombe aux en-
fans , après qu'on l'a fit rentrer , princi-
palement lorsqu'ils crient ; & dans le cas
cù il y a diarrhée il eft bien difficile de
le contenir en dedans.
M. Suret , maître chirurgien de Paris ,
a imaginé un bandage pour la chute du
xeûum , qui eft très-ingénieux , & qui a
mérité l'approbation des plus grands maî-
tres de l'art. Il doit le préfenter à l'aca-
démie royale de Chirurgie , & fa découverte
fera rendue publique dans la fuite des mé-
moires que ceue académie domiera. Le
CHU
grand avantage de cet inftrument eft de
contenir les parties au même degré de
compreiïlon ; dans quelque attitude que
puifte prendre le malade , debout , cou-
ché , afîis &c. le bandage comprime tou-
jours également. Ceux qui feront dans le
cas d'en éprouver les effets , fentiront tout
le prix d'un pareille invention.
Chute de la mjtrice , de la defcente de
cette partie en-embas , caufée par le relâ-
chement des ligamens deftinés à la retenir
dans fa place. Voye\ UTERUS.
Si la matrice eft tombée dans le vagin ,
de manière qu'on en fente l'orifice avec
les doigts en dedans des lèvres de la vulve,
ou qu'on le voie des yeux en dedans , cela
s'appelle un abaijfementde matrice. Si elle
eft tout-à-fait tombée , de forte qu'elle
traîne pendante en dehors des lèvres ,
mais de forte qu'on n'en voie pas plus le
dedans que l'orifice , cela s'appelle chute
de matrice. Si étant defcendue elle eft re-
tournée de manière que le dedans forte
par les lèvres , & qu'il pende une efpece de
fac charnu avec une furface inégale , cela
s'appelle renverfement de matrice.
Ces défordres peuvent procéder de mou-
vemens violens, de toux , d'éternument ,
de fleurs blanches. Ils arrivent le plus fou-
vent auxfemmens groftes , en conféquence
du poids qui porte & preflê fur l'utérus \
mais principalement fi le fœtus eft mort,
s'il eft dans une mauvaife pofture , ou qu'il
ait été tiré par force.
Le renverfement de matrice eft ordi-
nairement la fuite immédiate de l'extrac-
tion d'un placenta , adhérent au fond de
cet organe : dès qu'on s'apperçoit de ce,t
accident & qu'on a réufti à détacher l'ar-
riere-faix , il faut faire promptement la
rédudion. Si Pon ne peut pas y réuftir \
la vie de la malade eft dans un grand dan-
ger par la mortification qui eft l'effet de
l'étranglement du fond de l'utérus par
l'orifice.
Après avoir replacé la partie , il faut
employer les aftringens , tels que ceux dont
on fait ufage dans les diarrhées , les liémor-
rhoides , la gonorrhée fimple , érc. & re-
tenir la matrice avec un pefîaire. Voye\
Pessaire.
Cliûte de la luette , eft la defcente ou le
CHU
relâcherr'ent de la luette ou des amygdales.
Vojei LVETTE. {Y)
Chute , en Archneâure , eft un orne-
ment de bouquets pendans , compofés de
fleurs ou de fruits qu'on place afTez fouvent
dans les ravalemens des arriere-corps de
chambranles , de pilaftres de pierre , ou
panneaux de menuiferie. (P)
Chute, terme d' Horlogerie. 'LoT^c^xi^xmQ
des dents de la roue de rencontre eft par-
venue à l'extrémité de la palette qui lui
répond ^ fon oppofée tombe avec accélé-
ration fur l'autre palette , & lui donne
un petit coup ; c'eft ce coup , & l'efpace
que la roue parcourt , qu'on nomme chute.
Elle eft néceflaire pour éviter les accro-
chemens qui naîtroient infailliblement du
jeu des pivots dans leurs trous , de l'ufure
des parties , & de l'inégalité des dents de
la roue de rencontre. Voye^ AccROCHE-
MENT.
S'il faut abfolument donner un peu de
chute à un échappement , c'eft en même
temps une chofe fort préjudiciable à la
montre ou pendule où il eft appliqué,
de lui en laifïèr trop ; les inconvéniens
qui en réfultent font , beaucoup moins de
liberté dans les vibrations du régulateur ,
plus d'ufure de fes pivots , des trous dans
îefquels il roule , des pointes de la roue ,
& de l'endroit des palettes fur lequel elles
tombent.
Dans un échappement bien fait , la
chute eft égale fur chaque palette ; on par-
vient à cette égalité par le moyen du nez
ou du lardon de la potence. Voye\ Nez ,
Lardon , Potence.
Ciiûte fe dit aufti dans un engrenage ,
an petit arc parcouru par la roue , quand
une de fes dents quitte l'aile du pignon
dans lequel elle engrené , & qu'une autre
tombe fur la fui vante. Cette chute devient
confidérable dans les pignons de bas nom-
bre ; mais elle eft peu fenfible dans ceux
qui ont huit , dix , ou douze ailes , tsc.
Quand un engrenage eft trop fort ^ il y a
beaucoup de chute , ce qui occafionne
des précipitations dans le mouvement des
roues. Voye\ ENGRENAGE. ( T)
Chute d'EAU, {Hydraul. ) On dit
qu'un ruifleau , qu'une rigole , qu'une
petite rivière vient former uue chiite d'eau
CHU 5
fur la roue d'un moulin, ou bien qu'el'e
tombe en cafcade dans quelque baflin.
Chute de TERREIN , ( Jardin. ) fe
dit d'un terrein inégal & rampant , dont il
faut ménager la chute en le coupant par
différentes terrafl'es , ou en adouciftànt
la pente de manière qu'elle ne fatigue
point en fe promenant. {K)
Chute de voile , ( Marine. ) c'eft la
longueur d'une voile. ( Z )
Chute , ce mot eft encore employé dans
un fens moral , comme la chute d'Adam.
( Voye\ Péché originel. ) la chute
de l'Empire romain , ^c.
Il y a des auteurs qui prétendent que
Platon a eu connoifTance de la chute
d'Adam, & qu'ill'avoit apprife par la lec-
ture des livres de Moïfe. Eufebe , de pré-
parât, evangel. lih. XII. cap. xj. cite une
fable àQsSympos de Platon , dans laquelle
toute cette hiftoire eft rapportée d'une
manière allégorique. (G)
CHUTE , ( Mufiq.) agrément du chant
& des inftrumens , qui ne diffère de l'ac-
cent qu'en ce qu'il fe fait d'une note à
une autre plus haute ou plus baffe : on
marquoit ci- devant cet agrément par un
petit crochet. Fbyq la marque & l'effet
de la chute , fig. 5 , pi. VIII de Muf,
Suppl. des planches.
D'Anglebert divife la chute _,
^ i^. En chute far une note ^ qui eft celle
ci - deffus.
2° En chute fur deux notes. Voye\ fa
marque & fon effet, /^. 6. plane lie VIII
de Mufiq. Suppl. des planches,
3^*. En double chute â un tierce. Voye\
la marque & l'effet, fig. i. pi. IX de
Mufiq. Suppl.
/if. Enfin , en double chute fur une note
feule. Voye\ la marque & l'effet, fig. 2>
même pi. ,
Les chûtes y n^. 2 &c 3 , ne peuvent fer-
virque fur le clavefîin ou fur l'orgue , &
dans quelques cas fur les inftriunents à
corde , car les notes dont la queue eft en
bas , & qu'on a exprès faites plus groffes ,
doivent être tenues tout le temps de leur
valeur, pendant qu'on achevé la chute.
Mais Loulié , dans fes Elemens de Mu~
fique f décrit ainfi cet agrément : « La
6 Ç H U
fy chute eft une inflexion de la voix , d'uit
>i fon fort ordinaire à un petit fon plus
V bas ».
Voye^pl. IX de Mufiq. Suppl. des plan-
ches , la marque & l'effet de la ctiûte ,
fuivant Loulié , & remarquez que la
dernière mefure que j'ai exprès marquée
d'un a , paroît la feule où la liaifon foit
bien placée , & que peut-être il y a une
faute d'imprefîion aux autres , ce qui eft
d'autant plus vraifemblable , que n'ayant
pas pu avoir les traités originaux , j'ai co-
pié ces exemples d'un ouvrage Allemand ,
qui ajoute qu'à ne confulter que le mot ,
la chute de Loulié paroît plus conforme
au nom que les autres. La marque de cet
agrément n'eft plus d'ufage ; on le note
tout du long quand on le veut. (F.D. C. )
CHUTEENS, {HiJlSacr.) peuples
de Perfe qu'Afar-addon envoya dans la
Samarie en la place des dix tribus qu'il
avoit tranfportées en Aflyrie. On croit
qu'ils étoient ainfî nommés , parce qu'ils
furent tires d'une province nommée Chuta,
à caufe du fleuve Chut. L'Ecriture re-
marque que les Chuteens étant arrivés dans
ce nouveau pays , continuèrent à y adorer
les Dieux qu'ils adoroient au-delà de
TEuphiate ; Or il arriva qu'au commen-
cement qu*ils habitèrent là y ils ne révé-
rèrent point V Eternel y & l'Eternel envoya
contr'eux des lions qui les dévoraient. 2.
RoisXJ^II.i^. Le roi d' Aflyrie inftruit
de la caufe de cette punition , manda
un àcs prêtres du Dieu d'Ifrael pour leur
enfeigner le culte du Seigneur. C'étoit
fans doute un des prêtres qui avoient
fèrvi les veaux d'or ; car tous ceux de
la race d'Aaron , depuis le fchifme des
dix tribus, s'étoient réunis au royaume
de Juda , pour fervir dans le temple de
Jérufalem. La crainte rendit ces peuples
dociles aux inftruûions qu'on leur donna ;
Èiais croyant p^^oir allier leurs ancien-
nes fuperftitions avec la loi de Moïfe ,
qu'on les forçoit d'embrafler, ils adop-
tèrent le culte du Dieu d'Ifrael , fans re-
noncer â celui de leurs idoles ; & par un
mélange monftrueux , ils partagèrent leurs
adorations entre le Dieu , créateur de
î*univers , & de viles & impuifl^antes créa-
tuie$. Ces peuples, au temps d'Efdras, 1
C H Y
pratîquoient encore ce cuke mélangé ; ils.
avoient des temples confacrés aux fauflèst
divinités ; ^ais ils n'en avoient pas encore
élevé au Dieu d'Ifrael , puifque du tempsr
de Zorobabel , lorfqu'on travailloit à re^
bâtir le temple de Jérufalem , ils témoi-
gnèrent beaucoup d'empreffem-ent pour
être aflbciés à l'ouvrage. Ce ne fut qu'an
temps d'Alexandre le Grand , qu'ils bâ-
tirent un temple au Seigneur fur la mon-
tagne de Garizim , où ils faifoient le fer-
vice de Dieu comme à Jérufalem. Ils pré-
tendoient l'oppofer au temple de cette
dernière ville , ce que les Juifs ne pou-
voient fouflrir; & de-là venoit principa-
lement l'antipathie entre les Juifs & le&
Samaritains. (-{•)
ÇHWASTOW, ( Géogr. ) ville peu con-
fidérable de la petite Pologne , daiis le Pa-
latinat de Kiow. (D.G.)
C H Y
CHYLAAT , f m. ( Jfiji. mod. ) eA
pece de robe de deflus, que les Turcs
nomment plus communément caftan : 1q
grand-feigneur la donne par diftindion
aux miniftres , bâchas , ou autres Officiers
de la Porte, lorfqu'ils entrent en charge ,
pour récompenfe de quelque fervice ex-
traordinaire , ou même pour quelque agréa-
ble nouvelle.
Les courtifans du fultan diftinguent
trois fortes de chylaat : le premier efl: le
chylaat-fagire y qu'on ne donne qu'aux
vilirs , aux bâchas à trois queues , &
comme une faveur fignalée , à quelques
ambaflàdeurs étrangers : le fécond fe
nomme chylaat - ala ^ c' eu la robe qu'on
accorde aux bâchas du commun , aux
princes mahométans & chrétiens , & aux
ambaflàdeurs . de ceux - ci : le troifiemQ
s'appelle cu\athy c'eft-à-dire, moyen, ou
edua , moindre ; on l'accorde aux officiers
& autres perfonnes d'un rang inférieur.
Tous ces chylaats ou caftans font d'une
étofle plus ou moins riche, 6c bordés &
doublés de fourrures plus ou moins pré-»
cieufes , félon leur degré & la dignité des
peifonnes à qui le grand-feigneur en fait
préfent. Guer. mœurs des Turcs y torne^
IL (G)
•C -H V
'■ C'H YiL^E , ( Anat. ■Phyfiol) Bans
l'économie animale , fuc blanchâtre
dans lequel les alimens fe changent
âmmédiatement par la digeftion , ou ,
pour parler plus proprement , par la chy-
ïification , qui eft la première partie de
la digeftion. Voyei ChilificatiON ,
Digestion , &c. Ce mot vient du grec
XfAof , fuc.
Le dodeur Drake obferve que le chyle
n'eft autre choie qu'un mélange des par-
ties huileufes & aqueufes de la nourriture
incorporées avec des parties falines , qui
pendant qu'elles reftent dans l'eftomac
mêlées avec des parties plus groflieres , y
•forment une mafle épailîë , blanchâtre ,
"'& en partie fluide , qu'on nomme chyle ,
laquelle aufli-tôt qu'elle eft réduite à une
-confiftance aftez déliée pour pouvoir obéir
â la preftion & au mouvement périftalti-
• que de l'eftomac , eft pouffée par degrés
tpar le pylore dans le duodénum , où elle
cm^
1
lange ; que le feldu chyle eft porté dans
le fang veineux , & qu'il entre avec lui
dans le cœur ; qu'il en fort en l'état de
chyle comme il eft entré , par la pulfation
continuelle des artères ; qu'autant de fois
qu'il entre dans les artères émulgentes , il
y laifte après lui fa liqueur faline ou fon
urine , & qu'il perd par conféquent de fa
couleur ; & que lorfqu'il eft aftez purgé de
fes fels il devient lymphe : cette lymphe
ne femble être autre chofeque le léfvdu du
chyle qui n'eft pas encore aftez converti
en fang , parce qu'il n'eft point encore
aftez purgé de fes particules falines. Voyei
Lymphe. (Z)
^ CHYLIDOQUES , adj. pi. ( Anat.)
epichete des vailfeaux qui portent le chyle.
On les nomme encore chylijeres ou veines
laclées. Fo/^îj ChyLE à VeINES LAG'
TÉES. (Z)
CHY LIFERE. -adj. ( Anatomie. )
Les vailfeaux chilit'eres font ceux qui por-
commence à prendre le nom de chyle. • tent le chyle. On les nomme au fti (?/;>'/«•-
Ainfi le chyle commence à fe former j doquis ou veines lactées. Voye^ à l'article
dans l'eftomac
il fe perfedionne dans
'les inteftins par le mélange de la bile &
du fuc pancréatique , enfuite il entre dans
^ les veines ladées , qui le portent dans le
; réfervoir de Pecquet ; de-là il pafte dans
'le canal thorachîque , qui aboutit à la vei-
' ne fous-claviere gauche : c'eft dans cette
' veine que le cnyle commence à fe mêler
avec le fang , dans lequel il fe convertit
• enfuite par l'adion qu'on nomme fanguifi-
' cation. V^. SaNG & ChYLIFICATiON.
Les anciens croyoient que le chyle fe
'changeoit en fang dans le foie ; d'autres
ont cru que c'étoit dans le cœur : les mo-
dernes penfent , avec pli s de raifon , que
ce changement fe fait par le fang lui-mê-
me dans toutes les parties du corps. Voye\
Samguification.
Il y a des auteurs qui prétendent que
le chyle eft la matière immédiate de la
nutrition.
Le dodeur Lifter penfe que dans la di-
'geftion des nourritures il fe fait une fépa-
Vaisseaux Chyliferes, les découver
tes importantes faites depuis quelques an-
nées fur ces vaifteaux.
CHYLIFICATION, (P/iy/o/.')
en grec yy^-'^^-^ X'.'^^'^°ti'^'^ j rédudion
des alimens en chyle.
Comme on vient d'expofer la nature du
chyle , &: qu'on trouvera fous chaque mot
la defcription anatomique àes organes qui
le forment, nous en fuppoferons ici îa con-
noiflànce , & nous nous bornerons feule-
ment à indiquer la manière dont fe farit
dans le corps humain l'opération admira-
ble de la chylificacion.
Idée de l'élaboration du chyle. Les pertes
continuelles que notre corps fouffre , tant
par l'infenfible tranfpiration que par \qs
autres évacuations , nous obligent de cher-
cher dans les alimens de quoi les réparer.
Les réparations que les alimens reçoivent
pour opérer ce remplacement , fe peuvent
réduire à trois principales ; la premiere-fe
fait dans la bouche ; la féconde dans Je
'ration ou folution des fels urineux , de vcr.tricule , & la troifieme dans le premier
même que dans la pourriture des plantes
ou des animaux ; que le chyle eft fort im-
'prégné de ces fels ; qu'il doit fa blancheur
à la fermeiitation qu"*!! acquiert par ce me-:
des inteftins grêles.
Les alimens font divifés dans la bouche
pendant la maflieation , tant par l'adion
des -dents -çue' par -leur mê-lar:ge avec*4a
8 CHY
falive ; ils'paflent enfuite dans le pharînx ,
où la langue en s'élevant & fe portant en
arrière , les oblige d'entrer ; par ce mou-
vement l'e'piglotte eft abaifTée , & la glotte
fermée.
La cloifon du palais ou valvule du gofier
empêche en s'élevant que les alimens n'en-
trent dans les fofTes rafales , & la luette
fait palier fur les côtés ceux qui fe portent
diredement vers la glotte.
Les alimens qui ont été pouffes dans le
pharinx , font obligés de fuivre la route de
i'œfophage , d'où ils dcfcendent dans l'ef-
tomac ; & cela moins par leur propre
poids , que par les comprenions fuccellives
qu'ils reçoivent , tant de la part du mufcle
œfophagien qui eft au commencement de
ce conduit , que par les fibres circulaires
de fa tunique charnue. Voye\ DÉGLU-
TITION.
Les alimens ayant féjourné quelque
temps dans le ventricule , y font réduits
en une pâte molle , de couleur grisâtre , &
dont le goût & l'odeur tirent ordinaire-
ment fur l'aigre.
L'opinion la plus généralement reçue de
la caufe de ce changement , eft celle où
l'on prétend qu'il dépend non feulement
de la falive qui coule continuellement par
l'œfophage , mais encore de la liqueur
gaftrique fournie par les glandes de l'efto-
mac. L'expérience prouve que ces liqueurs
ne font pas fimplement aqueufes , mais
chargées de parties adives & pénétrantes ,
dont l'adion ne fe borne pas aux molécu-
les ou parties intégrantes des alimens ; elle
s'étend encore plus loin , & va jufqu'aux
parties eftentielles ou principes mêmes qui
les compofent , & dont elles changent l'ar-
rangement naturel. Par cette décompofi-
tion les alimens changent de nature , &
ne font plus , après la digeftion , ce qu'ils
étoientj auparavant. On ajoute , avec rai-
fon , que l'adion de ces liqueurs fur les
alimens a befoin d'être fécondée de la cha-
leur du ventricule , de la contradion douce
de fes fibres charnues , de l'adion fuccef-
llve du diaphragme & des mufcles du bas-
ventre. Voyei Digestion.
A mefure que la divifion des alimens
augmente dans le ventricule , ce qui s'y
trouve de plus atténué s'en échappe par le
CHY
pylore pour entrer dans le duodénum ; la
fortie des alimens par le pylore fe trouva
favorifée par la fituation oblique de l'efto-
mac , & par la douce contradion de fa
tunique charnue.
Cette pâte molle & grisâtre en laquelle
je viens de dire que les alimens font chan-
gés dans l'eftomac , étant dans le duodé-
num , s'y mêle avec là bile , le fuc incefti-
nal & pancréatique qu'elle y trouve : par
ce mélange elle acquiert une nouveMe
perfedion ; elle devient blanche , douce ,
liquide ; étant prefTée par le mouvement
vermiculaire des inteftins , & roulant len-
tement dans leur cavité à caufe des valvu-
les qui s'y rencontrent , elle laifle échapper
dans les orifices des veines ladéesce qu'elle
contient de plus fubtil & de plus épuré, fa-
voir , le chyle , qui doit fervir à réparer a
que nous perdons par les évacuations.
On conçoit aifément que la matière de
la nourriture ou cette pâte alimentaire ,
ayant parcouru toute l'étendue des intef-
tins grêles , & s'étant dépouillée dans tout
ce chemin de ce qu'elle contenoit de plus
fluide & de plus épuré , elle doit devenir
plus épaifte à mefure qu'elle paflè dans les
gros inteftins ; ce n'eft plus alors qu'un*
matière grofliere , que l'on peut regarder
comme le marc des alimens , & qui lui
laifTe échapper dans les veines ladécs qui
répondent au cœcum & au colon , le peu
de chyle qui lui refte.
La valvule qui eft au commencement
du colon empêche cette matière groftiere
de rentrer dans les inteftins grêles ; la lon-
gueur , la courbure , & les cellules de cet
inteftin , lui permettent de s'y amafler en
quantité , afin qu'on ne foit pas oblige
d'aller trop fréquemment à la felle. Quant
à la lymphe fournie par les glandes foli-
taires des gros inteftins , elle facilite le
paflage de cette matière groftiere dans leur
cavité ; & le fphinder qui ferme l'extré-
mité du redum , empêche qu'elle ne s'é-
vacue continuellement. En effet , elle ne
s'échappe que lorfque ce reftbrt le trouve
forcé , non feulement parle poids des ex-
crémens , mais plus encore par la contrac-
tion de la tunique charnue du redum ,
jointe à celle des mufcles du bas - ventre
& du diaphragme.
te
C HY
Le cîiyle , que j'ai dit être fourni paf la
matière alimentaire dans les veines lac-
tées , s'inlinue dans les orifices de ces
vaiifeaux , qui répondent , fuivant M. Hel-
vetius , dans les mammelons fpongieux
de la tunique veloutée , ou bien au bord
flottant des valvules conniventes , félon
les oblèrvaiions de M. Duverney ; con-
tinuant fa route dans ces vaiflfeaux , il
va le rendre dans les glandes conglobées
répandues par toute l'étendue du me-
{èntere.
Le chyle , après avoir traverfé ces glan-
des , enhle la route des veines laétées fe-
condaires , pour fe décharger dans le ré-
fèrvoir de Pecquet , de-là dans le canal
tliorachique , & fe rendre enfin dans la
veine fous-claviere , où s'étant mêlée avec
le fang qui y circule , & circulant avec
lui , il en acquiert peu-à-peu le caractère
& les propriétés , en un mot , fe convertit
en véritable fang. Ce fang , après plufieurs
circulations réitérées , doit changer encore
de nature , & former les différentes hu-
meurs qui s'en féparent , je veux dire la
lynaphe nourricière , la bile , la falive ,
&c.
On concevra aifément la caufc qui fait
avancer le chyle depuis les inteflins juf-
qu'à la veine fous-claviere , lorfqu'on fera
attention i°. que tous les vaiffeaux qu'il
parcourt dans cette route font munis d'ei-
pace en efpace de valvules ou foupapes ,
dont la iFrudure favorife le tranfport de
cette liqueur vers cette veine : 2,°. que ces
vaifïeaux font avoifmés par des organes
qui font fur leurs parois des compreiiions
légères , mais réitérées ; tels font les artè-
res méfentériqucs par rapport aux veines
ladées , & l'aorte par rapport au canal
thorachique & au refervoir de Pecquet ; à
quoi on doit ajouter Je diaphragme , qui
comprime à chaque inipiration le réfer-
vt)ir ; fans compter l'adion des mufcles
du bas- ventre , dont on fait que les con-
trarions fuccedcnt à celle du diaphragme ,
fi l'on en excepte le temps des efforts. On
doit obferver enfin que les vaifïeaux lac-
tées ne font jamais vuides , la lymphe y
pafïant toujours , foit avec le chyle , foit
qu'il n'y en ait point.
Détails particuliers fur la chylification
Tome VIIL
CH Y 9
Après la formation du chyle dans Teflomac
& les intefiins grêles , il entre , comme on
l'a remarqué ci-deffus , au moyen du mou-
vement périftaltique & des valvules conni-
ventes , dans les vaiffeaux laâées du pre-
mier genre.
Ces vaifl'eaux ladées fortent de toute la
circonférence des inteftins comme de pe-
tits fyphons , & s'ouvrent obliquement
dans leurs cavités : ils s'anaftomolènt en-?^
fuite ; ils forment fous la membrane com-
mune une efpece de réfeau très-remarqua-
ble , & fe ghfîent enfin dans la duplica-
ture du méfentere; le chyle qui s'y infi-
nue eft pouffé par le chyle qui vient après ,
par l'adion àQs inteflins , par la prefGon
du diaphragme & des mufcles de l'abdo-
men : s'il n'y avoit pas de valvules dans:
ces petits vaifî'eaux , le chyle feroit pou fîe
également en haut & en bas ; mais com-
me il n'ert pas pofiible qu'il revienne lur
Çts pas , la prefïion externe l'obligé à mon-
ter vers les lombes ; les valvules fémi-
lunaires qui s'ouvrent au nouveau chyle,
fe ferment à celui qui a paffé ; les artères
méferaïques qui battent continuellement ,
le fouettent encore , & le poufl'ent dans
le refervoir.
Comme par une précaution admirable
de la nature , les ouvertures des veines
ladées font très-petites , très - fubtiles , &
pas plus grandes que des artères capillai-
res , fuivant la remarque de Derham , il
n'y a que la portion du chyle la plus fiuide
& la plus fubtile qui puifîe s'y infinucr.
l^ts veines laâées qui ont des orifices
que nos yeux ne fauroient découvrir , pa-
roifîent afîèz grofïés dès qu'elles font for-
ties de la membrane muiculeufe , & qu'el-
les font fous la tunique externe \ elles s'u-
nifîènt enfuite , & forment les unes avec
les autres àzs angles aigus ; elles fe fépa-
rent après cela pour fe réunir encore dere-
chef , après ces unions & ces divifions ,
elles deviennent toujours plus grofîes : tous
ces divers accroifTemens fervent à rendre
le chyle plus fluide.
Ces vaifTeaux , après plufieurs anafto-
mofes & plufieurs divifions , qui forment
comme de petits îles dans tout l' efpace du
méfentere , aboutifTcnt à des glandes dont
la ûruâure n'eff point encore connue , &
B
lo CHY
qui font répandues entre les deux htnes
qui le forment ; ils les environnent , ils
s'y infinuent ; ils en fortent moins nom-
hreux , mais plus interrompus par des
valvules.
D'où il eu confiant que rien ne fe lepare
du chyle dans o^s glandes , mais au con-
traire qu'il y cû délayé ; ce qui paroîtra
d'autant plus évident , fi l'on confidere
que CCS glandes caverneufcs font arrofées
par pluiieurs artères qui fe dillribuent en
haut & en bas , rampent ici d'une façon
t<^)ut-à-fait fmguliere , & ne font point
pliées en peloton : d'ailleurs ces mêmes
glandes reçoivent la lymphe de pluiieurs
vilceres abdominaux , qui pénètre dans la
iubfîance de ces glandes , & délaie davan-
tage le chyle ; & peut-être que ces arté-
rioles exhalent par leurs dernières extré-
mités leur humeur la plus tenue dans les
petites cavités de ces glandes ; car , félon
Cowper , le mercure pafîe de ces artères
dans les vaiffeaux laftées : le chyle féjour-
nant donc dans ces glandes , y efl fouette,
délayé , & peut-être mêlé avec les efprits
des nerfs qui s'y diflribuent.
Après que le chyle a palfé par ces glan-
des , il en fort par les vaifîeaux laélées du
fécond genre , qui font moins nombreux,
mais plus gros & plus unis : ces vaiiTeaux
vont fe rendre à la citerne laâée ou au
réfervoir chyleux , fi connu fous le nom
de réfen-'oir de Pecquet, qui l'a mis en évi-
dence en 165 1 : là fe décharge une grande
quantité de lymphe qui vient de prefque
toutes les parties fituées fous le diaplirag-
me , & qui eft apportée de toutes parts
par les vaifTcaux lymphatiques. En effet
les valvules, les ligatures , les maladies
de la lymphe , nous apprennent que telle
cil la route de cette humeur.
Ce n'efl pas ici le heu de décrire le
réfervoir du chyle , qui eft une véliçule
dont la figure & la grandeur varient beau-
coup dans l'homme même : nous dirons
feulement que le concours des veines lac-
tées qui font en grand nombre , deman-
doit qu'il y eût un réfervoir qui- reçut le
chyle; fans cela ce fluide auroit foufîèrt
des retardemens dans le méfentere • , ou
bien il auroit fallu qu'il marchât avec
ime grande rapidité dans le caoal thora-
CHY
chique , lequel n'a pas une flrudure pro-
pre à réfifler à un fluide pouffé avec force,
& qui coule avec beaucoup de vîteffe.
Le chyle ayant été délayé par la lym-
phe dans le réfervoir de Pecquet , efl porté
au haut de ce réfervoir qui forme un ca-
nal particuher connu fous le nom de canal
thorachique. ( Voyei CanaL THORACHI-
QUE , ) & les valvules dont ce canal ell
rempli facilitent la progrelfion de cette
hqueur.
Le chyle eft déterminé de ce canal dans
la fous-claviere par le fecours de deux val-
vules , qui en fe rapprochant forment une
fi petite fente , qu'il ne peut entrer dans
cette veine qu'une petite quantité de chyle
à la fois , & qu'il n'en peut influer dans
la canal thorachique.
On ne fauroit donc douter que la plus
grande partie du chyle ne monte à la
veine fous-claviere ; mais on peut douter
s'il n'y en a pas une portion , lavoir , la
plus tenue , qui fe rende au foie par les
veines méféraïques , après avoir été pom-
pée parles tuyaux ablorbans qui s'ouvrent,
dans la tunique veloutée des inteflins..
Cependant tout femble lever ce doute.,
1®. Le nombre, la grandeur de ces tu-
yaux abforbans , leur ftruclure, leur na--
ture qui n'efl pas diflPérente de celle que
les veines ont communément , le fang
veineux qui de -là coule dans la veine-
porte comme dans une artère, la nature
de ce fang , la grande quantité d'humeurs,
qui- abordent- aux inteflins , tout cela fait
foupçonner que la partie la plus lympha-s.
; tique du chyle efl portée dans la veine-^-
porte, où elle efl délayée pour fervir en-,
fuite de nouvelle matière à la fecrétion
de la bile, l^^ On peut apporter une
autre raifon de cette- opinion , tirée
de l'anatomie comparée des ovipares ,,
qui n'ont point de vaiffeaux labiées , mais ,
dans leiquels il fe trouve un paflàge de la,
cavité des inteflins. aux vaiflèaux mé-.
féraïques. Bilfius . a fait voir que fi on lie.-
les artères du méfentere dans un chien qui
vient de manger beaucoup , on trouve les
veines méféraïques remphes d'une hqueur
cendrée. On s'efl plaint que Bilflus n'avoit-
pas détaillé la manière dont il faifoit fon.
expérience; mais Glilïpn ne s'efl pni dif-r
CH Y
peiifé de la donner. Swammerdam a con-
firmé l'opinion de Biliius par d'autres
exemples de l'anatomie comparée : il efl cer-
tain que dans les oifeaux il y a un pafTage
aux veines méféraïques.
Mais fi l'on doir Ibupçonner que le chyle
plus tenu pafîe du méfentere dans les
veines méféraïques , ne doit-on pas pen-
fer la même choie au liijet du ventricule ?
Les parties les plus fubtiles des alimens
ne peuvent -elles pas être ablbrbées par
des tuyaux veineux ? L'adion des cor-
diaux ne paroît - elle pas en être une
preuve ?
On demandera préfentement quelles font
les eau fes qui concourent à poufTèr
le chyle de bas en haut ^ qui le font mon-
ter li aifément , même lorfqu'on eft de-
bout , dans des tuyaux tels que le réfer-
voir de Pecquet & le canal thorachique ,
tuyaux grêles , comprimés > perpendicu-
laires y & qui s'afFaiflent aifément.
Je réponds que ces caufe font en grand
nombre , & fe préfentent d'elles-mêmes ,
pour peu qu'on fafîè attention i®. à la
force avec laquelle les intcftins fe con-
tradent , & aux caufes qui concourent à
chafïer le chyle des intcftins : 2°. aux
valvules des vaifleaux laclées & à celle
du réfervoir thorachique , qui facihtent
beaucoup la progreffion du chyle : 3®. aux
battemens des artères méféraïques , qui
font parallèles aux vai fléaux laâées , ou
les croifent : 4°. à la forte adion du dia-
phragme fur le réfervoir : 5°- ^ux puif-
fantcs caufes qui compriment le péritoi-
ne , lequel forme cette fine membrane
du méfentere où les vaiffeaux ladées font
renfermés : 5°. à la propre contradion
àzs membranes qui forment la paroi &
le canal de Pecquet ; contradion qui efl
encore forte après la mort : 7°. aux fortes
pulfations de l'aorte , qui eft voifine du
canal thorachique : 8°, au mouvement
même des poumons & du thorax.
Tandis que toutes ces forces agifTent,
le chyle monte donc nécefTr.irement dans
le réfervoir , dans le canal thorachique ,
& fe jette dans la veine fous-claviere gau-
che ; car les liqueurs fe porteH;it vers les
iieux où elles trouvent moins de réfiflan-
cc : or les valvules des veines ladées offrent
C H Y II
un fpedacîe infurmontable ; le chyle doit
donc fe déterminer vers la veine fous-cla-
viere ; là il fouleve Fefpece de valvule , ou
pour mieux dire , la digue qui ferme le
canal thorachique , empêche que le fnng
n'entre dans le canal , & permet le pafTage
au chyle : dès qu'il efl entré dans la veine
fbus-claviere , iipafîè par fon conduit dans
la veine cave , dans le finus veineux ,
dans l'oreillette droite , & dans le pre-
mier ventricule du cœur ; où ayant été mêlé
avec le fang , divife , fouetté par l'adion
de ce vifcere,il efl pouffé dans l'artère pul-
monaire , & y acquiert toutes les qualités du
fang.^
Héfumons en peu de mots co.^ merveil-
les. Le chyle qui a été préparé dans la bou-
che , broyé , atténué dans l'eflomac, élaboré
dans les inteflins , féparé dans les vaifïeaux
ladées , délayé dans les glandes du méfen-
tere , plus délayé encore & plus mêlé dans
le canal thorachique , mêlé au fang dans les
veines , dans l'oreillette , & dans l'antre
droit ; là plus exadement mêlé , diffous ,
broyé , atténué , étant fort prefîë poflérieu-
rement , & latéralement repoufTé dans les
vaifïêaux coniques & cylindriques artériels
du poumon , doit prendre la forme des
parties folides &: fluides qu'il y a dans tout
le corps.
Il eff encore très-exadement mêlé dans
les veines pulmonaires; peut-être eft-il
délayé dans les mêmes veines par la lym-
phe. Il acquiert principalement dans le
poumon la couleur rouge , qui cfl la mar-
que efTèntielle d'un fang bien condition-
né : fa fluidité & fa chaleur fe confervent
par fa circulation , & c'efl ainfi qu'il pa-
rcît prendre la forme qui efî propre à
nourrir. Cet effet efl produit parl'adion
continuelle du poumon , des viiceres , &
des vaifîêaux. Cette adion change infen-
fiblement le fang chyleux en férum , lui
procure divers changemens femblables à
ceux que la chaleur de l'inCubation opère
fur le blanc-d'œuf ; car c'eft la même
chaleur dans l'état fa^n , & cela continue
jufqu'à ce qu'une partie du férum fbit fub-
tiliice autant qu'il le faut pour produire
la nutrition : cependant cette partie du
f.rum ainfi iubtihfée , fe confumant per-
pétuellement par les circulations réitérées ^
Bz
ri CHY
demande femblableraent à êti'e réparée. B
eft donc nécefTairc pour cette réparation
de renouveller le chyle , & par conléqucnt,
de reprendre de nouveaux alinlens & de
nouvelles boiiTons.
On conçoit bien que les humeurs qu'on
a perdues ie féparent , quant à la matière,
par les alimens , la boiiTon , & l'air ;
mais quant aux qualités requifes , cette
opération s'exécute par le concours àtts
actions naturelles du corps , dont l'expo-
jîtion fait une des grandes & des belles
parties de laPhyliologie.
Fautes hypothefes fur la chylification.
Comme par le détail qu'on vient de lire ,
tout ce qui arrive aux alimens depuis
leur préparation dans la bouche jufqu'à
kur dernière fubtiliiation , qui produit
la nutrition des parties du corps humain ,
eft une Itiite évidente de la fabrique &
de l'adion des vaifleaux , de la nature
connue des humeurs , démontrée par des
raifonnemens méchaniques ; falloit - il ,
pour en donner l'expHcation , avoir re-
cours à des fuppofitions obicures oudou-
teufes , & également contraires à la rai-
fon & à l'expérience ? falloit - il enfanter
tous ces fyftemes extravagans en méde-
cine , fi long - temps à la mode , & fi juf-
tcment méprifés aujourd'hui ? Je parle des
fyfiêmes de la chaleur coûrice du ven-
tricule , de fon âcreté naturelle & vitale ,
de l'archée de Vanhelmont , de la bile
alkaline qui change le chyle acide en
alkalefcent falé & volatil , d'une préci-
pitation qui purifie le chyle, des fermen-
tations , des eft'ervefcences du fang dans
le ventricule droit y du. nitre aérien qui
le change en rouge dans le poumon ? que
fais - je , d'une infinité d'autres hypothefes
chimériques , qui pour comble de maux,
ont eu une influence pcrnicieufe fur la
pratique de leurs auteurs. Cet article efi
de M. le Chevalier DE Jaucourt.
CHYLOSE , f. f. en Médecine , l'ac-
tion par laquelle les alimens fe tournent
en chyle ou chyme dans l'eflomac , Ùc.
foit que cela arrive par une fermenta-
tion qui fe pafle dans l'eftomac , foit par
la force de contradion de ce vifcere ,
îbitpar ces deux moyens tout-à -la fois. V^oy
Chylification & Digestion, (i)
CHY
CHYME, f. m. ( Anat. Fhyfrolog. >
fuc animal qui efl le même que celui
qu'on appelle ordinairement chyle. Voye:{
Chile.
Il y a cependant àts auteurs qui dii-
tinguent entre le chyme & le chyle , &
qui rcftreignent le mot chyme à fignifîer
la mafle de nourriture telle qu'elle eib
dans l'cilomac , avant qu'elle ioit affez.
atténuée & fiquéfiée pour pouvoir fran-
chir le pylore , paiîèr dans le duodénum ,
& de là dans les veines ladécs , pour s'y
diflbudre davantage & s'y imprégner du
lue pancréatique : après quoi elle com-
mence à être dans l'état de chyle. D'autres
prétendent toutîe contraire.
CHYMIE ou CHIMIE , f f. ( Ord,
encyc. Entend. Raifon. Flillof. ou Science.
Science de la nat. Phyjique. Phyjiq. géné-
rale. Phyjiq. particul. ou des grands corps
& des petits. Phyjiq. des petits corps ou
Chymie.) La Chymie eft peu cultivée parmi
nous ; cette fcience n'eft que très-médio-
crement répandue^ même parmi les fa-
vans , malgré la préteiition à l'univer—
fahté de connoilîànces qui fait aujourd'hui
le goût dominant. Ces Chymiiîes forment
encore un peuple diflind, très- peu nom-
breux ,. ayant fa langue , {ts loix , {^s
myfleres , & vivant prefque ifolé au>
milieu d'un grand peuple peu curieux de
ion commerce , n'attendant preique rrea
de fon induftrie. Cette incwiojité , foit
réelle , foit fimulée , efl toujours peu phi-
lofophique , puifque elle porte tout - au-
plus fur un jugement hazardé; car il efl
au moins poffible de fe tromper quand on
prononce fur des objets qu'on neconnoio
que fuperficiellement. Or comme il efl
précifément arrivé qu'on s'efl trompé ,
& même qu'on a conçu plus d'un préjuge
fur la nature & l'étendue des connoii^
fan ces chymiques , ce ne fera pas une
affaire aifée & de légère difcuflion ,. que
de déterminer d'une manière incontef-
table & précife ce que c'efl que la Chymie.
D'abord les perionnes les moins inf^
truites ne diflinguent pas le chymifle du
fouffleur ; l'un & l'autre de ces noms efl
également mal-fonnant pour leurs oreilles,
.Ce préjugé a plus nui aux progrès , du
moins à la propagation de l'art , que des.
C HY
imputations plus graves prifes dans le
fond même de la chofc , parce qu'on a
plus craint le ridicule que l'erreur.
Parmi ces perfonnes peu infiriiites , il
en eft pour qui avoir un laboratoire, y
préparer des parfums , des phofphores ,
des couleurs , des émaux , connoître le
gros du manuel chj'mique & les procédés
les plus curieux & les moins divulgués ,
en un mot , être ouvrier -d'opération &c
pofîèfîeur d'arcanes , c'efî: être chymille.
Quelques autres , en. bien plus grand
nombre , reiîreignent l'idée de la Chymie
à fes ufages médicinaux : ce font ceux qui
demandent du produit d'une opération ,
de quoi cela guérit-il ? Ils ne connoifient
la Chymie que par les remèdes que lui doit
la médecine pratique , ou tout au plus
par ce côté & par les hypothefcs qu'elle
a fournies à la médecine théorique des
écoles.
Ces reproches tant de fois répétés : les
principes des corps ajjignés parles Chymiftes
font des êtres très-compofes ; les produits
de leurs analy fes font des créatures du feu;
ce premier agent des Chymiftes altère les
matières auxquelles on l'applique y & con-
fond les principes de leur compojition y
IGNIS MUTAT RES : ces reproches ,
.dis-Je , n'ont d'autre fource que les méprifes
dont je viens de parler , quoiqu'ils femblent
fùppoier la connoifîance de la dodrine &
des faits chymiques.
On peut avancer affez généralement
que les ouvrages des Chymiftes , des maî-
tres de l'art , font prefque abfolument
ignorés. Quel phyficien nomme feule-
ment Bêcher ou Stahl ? Les ouvrages
chymiques ( ou plutôt les ouvrages fur des
fujets chymiques , ) de favans , illuftrcs
d'ailleurs , iont bien autrement célébrés.
C'eft ainft , par exemple , que le traité
de la fermentation de Jean Bernoulli , &
la dode compilation du célèbre Boerhaave
flir le feu , font connus y cirés , & loués;
tandis que les vues fupéricures & les chofes
uniques que Stalil a publiées fur l'une &
l'autre de ces matières „ n'exiftcnt que
pour quelques chymiftes.
Ce qu'on trouve de chymique chez les
phyftciens proprement dits , car on en
trouve chez plufteurs_, & même des fyf-
témes généraux , des principes fonda-
mentaux de dodrine : tout ce chymique ,
dis- je , qui eft le plus répandu, a le
grand défaut de n'avoir pas été difcuté
ou vérifié fur le détail & la comparailon
des faits; ce qu'ont écrit de ces matières
Boyle , Newton , Kcil , Freind , Boer-
haave , Ùc. eft manifeftement marqué au
coin de cette inexpérience. Ce n'eft donc
pas encore par ces derniers fecours qu'il
faut chercher à le former une idée de la
Chymie.
On pourroit la puifcr dans plufieurs
des anciens chymiftes ; ils font riches en
faits , en connoilïânces vraiment chymif-
tes^ : mais leur obfcurité eft réellement
effi-ayante , & leur enthoufiafme décon-
certe le fage & grave maintien de la phi-
lofophie des fens. Ainfi il eft au moins
très - pénible d'apercevoir la faine Chy-
mie ( dans l'art par excellence , ) l'art facré,
l'art divin , le rival & même le réforma-
teur de la nature des premiers pères de
notre fcience.
Depuis que la Chymie a pris plus parti-
culièrement la forme, de fcience , c'eft - à --
dire depuis qu'elle a reçu les fyftêmes de
phyfique régnans , qu'elle eft devenue
fucceflîvement cartéfienne , corpufcu-
laire y newtonienne , académique ou expé-
rimentale , diftérens chymiftes en ont
donné des idées plus claires , plus à portée
de la façon de concevoir dirigée par la-
logique ordinaire des fciences ; ils ont
adopté le ton de celles qui avoient été
répandues les premières. Mais ces chymif'
tes n'ont - ils pas trop fait pour fe rappro-
cher ? ne doivent - ils pas être plus jaloux
de conlerver leur manière propre & indé-
pendante ï n'avoient - ils pas un droit
particulier ? cette liberté , droit acquis
par la pofTefîîon & juftifié par la nature
même de leur objet ? la hardiefle ( on a
dit la fohe ) , l'enthoufiafme des Chy-
miftes diffère -t- il réellement du génie
créateur de l'efprit fyftématique ? & cet
efprit fyftématique le faut - il profcrirc à
jamais , parce que fon effor prématuré
a produit des erreurs dans des temps moins
heureux ? parce qu'on s'eft égaré en s'éle-
vant ; s'élever eft - ce néccffairement s'é-'
garer ? l'empire, du génie que les grands-
î4 C HY
liommes cïc notre temps ont le courage
de ramener , ne feroit-il rétabli que par
une révolution tunefîe ?
Quoi qu'il en foit , le goût de fiecle ,
Tefprit de détail , la marche lente , cir-
confpefle , timide des (ciences phyiiques ,
îi ablolument prévalu jufque dans nos livres
élémentaires , nos corps de dodrine. Ces
livres ne Ibnt , du moins leurs auteurs
eux - mêmes ne voudroient pas les
donner pour m.ieux que pour des col-
lerions judicieufement ordonnées de faits
choilîs avec foin & vérifiés iévérement,
d'explications claires , fages , & quel-
quefois neuves , & de corredions utiles
dans les procédés. Chaque partie de ces
ouvrages peut être partaite , du moins
cxade ; mais le nceud , l'enfemble , le
fyftême , & fur-tout ce que j'oferai appeller
une iJTue par laquelle la Chymie puiife
s'étendre à de nouveaux objets , éclai-
rer les autres fciences , s'agrandir en un
mot ; ce nœud , dis-je , ce (yilême , cette
ifTue manquent,
C'efl principalement le caradere de
Tnédiocrité de ces petits traités qui fait
regarder les chymiites , entr'autres faux
iifpeds , comme de limples manœuvres ,
ou tout au plus comme des ouvriers d'ex-
périences. Et qu'on ne s'avife pas même
de foupçonner qu'il puifîè exifler une
Chymie vraiment philofophique , une
Chymie raifonnée -, profonde , tranfcen-
dante ; des chymiftes qui ofent porter la
■vue au delà des objets purement fenfibles ,
qui afpirent à des opérations d'un ordre
plus relevé , & qui , fans s'échapper au
delà des bornes de leur art , voient la route
du grand pliylique tracée dans (on en-
ceinte.
JBoerhaave a dit expreflement au com-
mencement de fa Chymie , que les objets
chymiques étoient fenfibles , grofliers ,
coercibles dans des vaifTêaux , corpora fen-
Jibus patiila y vel patefaciendj, vajii coer-
tenda , &c. Le premier hiflorien de
l'académie royale des Sciences à pro-
noncé le jugement fuivant à propos de
!a comparaifon qu'il a eu occafion de
faire de la manière de philofopher de
deux favans illuflres , l'un chymiflc ,
& l'autre phyficien. i, La Chymie^ par
C H Y
,^ des opérations vifibles , r^rout letf
,, corps en certains principes grofCers &
„ palpables , fèls , foutre , ^c. mais la
„ Phyfique , par des fpéculations déli-
„ cates , agit lijr les principes comme la
„ Chymie a fait fur les corps ; elle les réfout
„ eux-mêmes en d'autres principes encore
,, plus fimples , en petits corps mus & fi-
,, gurés d'une infinité de façons: voilà la
,, principale différence de la Phyfique & de
,, la CA7/7z:>....L'efpritde C/zj/tz/c efl plus
,, confus, plus enveloppé ; il refîemble
,, plus aux mixtes , où les principes font
„ plus embarrafTés les uns avec les autres :
„ refJDrit de Phyfique efl plus fimple , plus
„ dégagé , enfin il remonte jufqu'aux pre-
^, mieres origines , l'autre ne va pas juf^
,, qu'au bout. ,, Mém. deVacad. des Scien."
ces, iS^g.
Les chymifles fèroient fort médiocre-
ment tentés de quelques-unes des préro-
gatives fur lefquelles efl établie la préémi-
nence qu'on accorde ici à la phyfique ,
par exemple , de ces fpéculations délicates
par lefquelles elle réfout les principes
chymiques en petits corps mus & figurés
d'une infinité de fliçons ; parce qu'ils ne
font curieux ni de l'infini , ni des romans
phyfiques : mais ils ne pafîèront pas con-
j damnation fur cet efprit confus , enve-
I loppé , moins net , moins fimple que celui
1 de la Phyfique ; ils conviendront encore
moins que la phyfique aille plus loin que
la Chymie ; ils fe flatteront au contraire
que celle-ci pénètre jufqu'à l'intérieur de
certains corps dont la Phyfique ne con-
noît que la furface & la figure extérieure ;
quam & boves Ù ajini difcemunt , dit peu
poliment Bêcher dans fa phyjiq. foute rr.
Ils lie croiront pas même bazarder un pa-
radoxe abfolument téméraire , s'ils avan-
cent que fur la plapart des queflions qui
font défignées par ces mots , elle remonte
jufqiHaux premières origines y la Phyfique
n'a fait jufqu'à préfent que confondre des
notions abfîraites avec des vérités d'exif^
tence , & par conféquent qu'elle a man-
qué la nature nommément fur la compo-
fition des corps fenfibles , fur la nature de
la matière , fur fa fenfibilité , fur fa pré-
tendue homogénéité , fur la porofité des
corps , fur Fefïènce de la fblidité , de la
C H Y
fluidité , de la moUeflê , de l'élaflicité ,
iur la nature du feu , des couleurs , des
odeurs , fur la théorie de l'évaporation^
&c. Les chymiftes rebelles qui oferont mé-
connoître ainfi la Ibuveraineté de la Phy-
fique, oferont prétendre auffi que la Chymie
a chez foi de quoi dire beaucoup mieux fur
toutes les queftions de cette claiîè, quoi-
qu'il faille convenir qu'elle ne l'a pas dit
aflez diilinâement , & qu'elle a négligé
d'étaler tous its avantages ; & même ,
( car il faut l'avouer , ) quoiqu'il y ait des
chymiftes qui foupçonnent li peu que leur
art puiffe s'élever à des connoifîances de
cet ordre , que quand ils rencontrent par
hazard quelque chofe de femblable , foit
dans les écrits , foit dans la bouche de
leurs confrères , ils ne manquent pas de
le profcrire avec hauteur par cette for-
mule d'improbation , cela efi bien phyfique;
jugement qui montre feulement qu'ils n'ont
une idée aflez Jufte ni de la Phyfique à
laquelle ils renvoient ce qui ne lui appar-
tiendra jamais , ni de la Chymie qu'ils
privent de ce qu'elle feule a peut-ltre le
droit de pofleder..
Quoi qu'il en foit dé nos prétentions
tefpedives , l'idée que les Phyficiens avoient
d'eux - mêmes & des Chy milles en 1669 ,,
cit précifément la même qu'en ont aujour-
d'hui les plus illullres d'entr'eux. C'efl cette
opinion qui nous prive des fufirages dont
nous ferions le plus flattés ,, & qui lait à
la Chymie un mal bien plus réel , un dom-
rpage vraiment irréparable , en éloignant de
l'étude de cette fcience , ou en confir-
mant dans leur éloignement plusieurs de ces
génies élevés & vigoureux , qui ne fauroient
fe laifler tramer de manœuvre en manœu-
vre-, ni. fe nourrir d'explications maigres ,
féches, foibles, ifolées ; mais qui auroient
été néceflairement des chymifles zélés , 11
un feul trait de lumière leur, eût fait entre-
voir combien la Chymie peut prêter au
§énie , & combien elle peut en recevoir
à fon tour..
Il efl très-difîicile fans doute de détruire
ces imprefllons défavorables. Il efl clair
que la révolution qui placeroit la Chymie
dans le rang qu'elle mérite , qui la met-
troit au moins à côté de la Phyfique cal-
Ciliée. ; que cette réyolutiQn 3 dis- je , ne ,
C H Y
'T
peut être opérée que par un chvmifîe
habile , enthoufiafle , & hardi , qui fe-
trouvant dans une pofition favorable , &-
profitant habilement de quelques circonf-
tances heureufès , fauroit réveiller l'at-
tention des favans , d'abord par une os-
tentation bruyante, par un ton décidé 6c
affirmatit, & enluite par ôiQs raifons ^
fi fes premières armes avoient entamé le
préjugé.
Mais en attendant que ce nouveau Para-
celfe vienne avancer courageufement , que
toutes les erreurs qui ont défiguré la Phyfique.
fiont provenues de cette unique fource ; [avoir ^
que des hommes ignorant la Chymie,, /e/o/ir
donné les airs de philofopher & rendre rai fon-
des chofies nature lies y que la Chymiepunique-
fondement de toute la Phyfiique y était feule
en droit a expliquer y ikc. comme Jean
Keill'a dit en propres termes de la Géo-
métrie , & comme M. Defaguliers vient,
de le répéter dans li^préface de fon cours,
de Phyfique expérimentale ; en attendant ,.
dis - je ,. ces utiles déclamations , nous al-
lons tacher de préfenter la Chymie fous un
point de vue qui puifle la rendre digne
des regards des Philolophes , & leur faire
appercevoir qu'au moins pourroit-elle de-
venir quelque chofe entre leurs mains.
C'efHleur conquête que nous nous atta—-
cherons principalement , quoique nous lâ-
chions fort bien que ce n'ell pas en mon-
trant la Chymie par fon côté philofophique ,
qu'on parviendra à la mettre en honneur ,
à lui faire la fortune, qu'ont mérité, à la
Phyfique les machines élégantes , l'opti-
que , & l'éledricité : mais comme il efl
Àqs chymifîes habiles déjà en poiïeflion de
l'efîime générale ,. & très en état de pré--
fenter la Chymie au public par le côté qui"
le peut attacher , fous la forme la plus pro-
pre à la répandre , nous avons cru devoir-
nous repofer de. ce. fom fur leur zele.&: fur.-
leurs talens..
Mais pour donnerde la Chymie générale.
philofophique que je me propofe d'annon-
cer , ( je dis exprefîément annoncer ou iadi"
quer , & rien de plus , ) l'idée que je m'en^
fuis formée ; pour expofer dans- un jour:
fufîifant fa méthode , fa doârine y reten-
due de l'on objet , & fur-tout fes rapports,
avec les autres fciences £hyfiques, ra£-
i6 C H Y
ports par lefquels je me propofe de la faire
connoître d'abord ; il faut remonter^ juf-
qu'aux confidérations. les plus générales
fur les objets de ces fcieiices.
La Phyfique , prife dans la plus grande
étendue qu'on puifîe lui accorder , pour
la fcience générale des corps & des affec-
tions corporelles , peut être divifée d'a-
hord en deux branches primitives elTen-
tiellement diftindes. L'une renfermera la
connoiiTance des corps par leurs qualités
extérieures , ou la contemplation de tous
les objets phyfiques confidérés comme fim-
plement exiftans , & revêtus des qualités
fenfibles. Les fciences comprifes fous cette
divifion font les différentes parties de la
Cofmographie & de THifloire naturelle
pure.
Les caufes de l'exiftence des mêmes ob-
jets , celles de chacune de leurs quahtés
fenfibks , les forces ou propriétés internes
des corps, les changemens qu'ils fubifTent ,
les caufes , les loix , l'ordre ou la fuccefTion
de ces changemens , en un mot , la vie de
la nature : voilà l'objet de ^ la féconde
branche primitive de la Phyfique.
Mais la nature pjsut être conlidérée ou
comme agifiànt dans fon cours ordinaire
félon des loix confiantes , ou comme étant
contrainte par l'art humain ; car les hom-
mes favent imiter , diriger , varier , hâter ,
retarder , fupprimer , fuppléer, &c. plu-
sieurs opérations naturelles , & produire
.ainfi certains effets , qui , quoi que très-na-
iurels , ne doivent pas être regardés comme
dwi à des agens limplement obéiffms aux
loix générales de l'univers. Delà une divi-
fion très - bien fondée de notre dernière
branche en deux parties , dont l'une com-
prendra l'étude des changemens entiére-
înent opérés par des agens non-<ntelligens,
& l'autre celle des opérations &: des expé-
riences des hommes , c'efl-à-dire , les con-
noiflânces fournies par les fciences phyfi^
ques pratiques , par la Phyfique expé-
rimentale proprement dite , & par les difîé-
rens ai-ts phyliques. Les Chymiftes ont cou-
.tume de défigner ce double théâtre de
leurs^éculations par les noms de labora-
toire çle la nature & de laboratoire de Part.
Tous les changemens qui font opérés
4i^as les corps , foit pax la natute , foit pai"
CHY
l'art , peuvent fe réduire aux trois clafïês
fuivantes. La première comprendra ceux
qui font palfer les corps de l'état non-or-
ganique à l'état organique , & réciproque-
ment de celui-ci au premier , & tous ceux
qui dépendent de l'économie organique ,
ou qui la conflituent. La deuxième ren-
fermera ceux qui appartiennent à l'union
& à la féparation des principes conflituans
ou des matériaux de la compofition des
corps fenfibles non-organiques y tous les
phénomènes de la combinaifon & de la
décompofitioH des chymifles modernes. La
troifieme enfin embrafîera tous ceux qui
font paiîer les maifes ou les corps agré-
gés du repos au mouvement , ou du mou-
vement au repos , ou qui modifient de
différentes façons les mouvemens & les
tendances.
Que les molécules organiques & les
corps organifés fojent fournis à des loix ef^
fentieilement diverfès , ( au moins quant à
nos connoiflances d'à préfent , ) de celles
qui règlent les mouvemens de la matière
purement mobile & quiefcible, ou inerte:
c'efl une afîertion fur l'évidence de laquelle
on peut compter d'après les découvertes
de M. deBufFon (ï^qyf.^ ORGANISATION,)
& d'après les erreurs démontrées des mé-
decins qui ont voulu expliquer l'économie
animale par les loix méchaniques. Par con-
féquent les phénomènes de l'organifation
doivent faire l'objet d'une fcience elîen-
tiellement diftinde de toutes les autres par-
ties de la Phyfique. C'eft une conféquencô
qu'on ne fauroit nous conteffer.
Mais s'il eff vrai aulH que les afïèdions
des principes de la compofition des corps
foient efïèntiellemçnt diverfès de celles des
corps agrégés ou des mafîês, l'utiHtc de
notre dernière divifion fera démontrée
dans toutes fes parties. Or les Chymifles
prétendent qu'elles le font eij efïèt : nous
allons tâcher d'éclaircir & d'étendre leur
dodrine fur ce poiiiit; car il faut avouer
qu'elle n'efl ni claire > ni précife , ni pro-
fonde, même dans ceux des auteurs de
Cfiymie dont la manière ed la plus philofo.-
phique , & qui paroiffent s'être le plus at-
tachés aux objets de ce genre ; que Stahl
lui-même qui plus qu'aucun autre a le dou-
ble caradejrc que ûous veuoo^ de défigner ,
Si
C H Y
& qui a très-exprcifément énonce cette dif-
férence , ne l'a ni afîez développée , ni
poufTée aflez loin , ni même confidérée fous
fon vrai point de vue. Vqye:^ fon Prodro-
mus de ini^^efiigaùone chymico-phyjiologica ,
& fou obfervation de différencia mixti _,
texn ^ agregati , individui.
J'appelle maffe ou corps agrégé , tout
aflêniblage uniformément denfe de parties
continues , c'efl-à-dire , qui ont entr'elles
un rapport par lequel elles réliftent à leur
dilperiion.
_ Ce rapport , quelle qu'en foit la caufe ,
je 1 appelle rapport de maffe.
La continuiré efTentielle à l'agrégé ne fup-
pofe pas nécelTairement la contiguité de
parties; c'eft-à-dire , que le rapport de
malle peut fe trouver entre des parties qui
ne le touchent point mutuellement ; quelle
que lojt la rnatiere qui conftitue leur nœud ,
peut-être même fans qu'il foit néceflaire que
ce nœud fbit matériel.
Le rapport de maffe fuppofe dans l'agrégé
1 homogeneifé ; car un affemblage de parties
hétérogènes ne confîitue point un tout dont
les parties foient liées par ce rapport : ainfi
une liqueur trouble , un morceau d'argile
rempli de petits caillous , chacun de ces
corps étant pris pour un tout unique , ne
dnt pas des agrégés , mais de fimples mé-
langes par confulion , que nous oppofons
'dans ce Çtns A l'agrégation.
11 elt évident par la définition , que les
•tas ou amas de parties fimpiement conti-
guis , ^ tels que les poudres , ne font pas des
m^g^s , mais qu'ils peuvent feulement être
•des amas d'agrégés.
Qtiand nous n'aurions pas exprefTcment
abandonne les corps organiques , il eft
clair aui^ par la même définition , qu'ils
lont ablolument exclus A(^ la clafTe des
ument exclus de
^f Pa^fies de l'agrégé font appellées
^'^""/T j ^'^^^^^"^ modernes molécJes ou
majjes de la dernière compofition ou du
Uernier ordre , corpufcuies dérivés , Ùc.
6^: beaucoup plus exadement par des Phy-
iic.ens antérieurs , parties intégrantes , ou
iiraplement corpif/ca/f'j- : Je dls^plus exacte-
ment, parce que c'efl gratuitement, pour
ne rien dire de plus , que les premiers ont
iQUtenu que les corpufcuies, qui parleur
Tome VIII,
C H Y 17
réunion forment immédiatement les corps
fenfibles , étoient toujours des malTes.
Les corpufcuies coniidérés comme maté-
riaux immédiats de l'agrégé , font cenfés
inaltérables ; c'efl-à-dirc , que l'agrégé ne
peut perfifler dans fon être fpécifique qu'au-
tant que Çqs parties intégrantes font iiialté-
rées : c'efl par-là que les par:ies intégrantes
de l'étain décompolees par la caicination ,
ne forment plus de l'étain , lors même que
par la fufion on leur procure le rapport de
mafîe , ou qu'on en fait un feui agrégé , le
verre d'étain.
J'admets des agrégés parfaits & des
agrégés imparfaits. Les premiers font ceux
qui font afïèz exadement dans les termes
de la définition, pour qu'on ne puifîe dé-
couvrir par aucun moyen phyfique s'ils
s'en écartent ou non. Les imparfaits font
ceux dans lefquels on peut découvrir quel-
que imperfedion par des moyens phyfiques.
Mon agrégé parfait efl la mafîe fimiliaire
que M. WolfFa dcfinie , ( Cofm. §. z^g , )
dont il a nié l'exiflence dans la nature y
( §- fuiv. ) & que le même philolophe pa-
roît admettre fbus le nom de textura. Cof-
molog. nat.*^. j ^.
L'imperfedion de l'agrégé efl toujours
dans le défaut de denfité uniforme.
Les liquides purs , les vapeurs homogè-
nes , l'air , les corps figés , comme les ré-
gules métalliques , les verres ; quelques
fiibflances végétales & animales non organi-
fées , telles que les huiles végétales & ani-
males , les beurres végétaux & animaux ,
les baumes liquides , ùc. les cryflaux des
fels , les corps mous aiFdilîes d'eux-mêmes y
Ùc. font des agrégés parfaits. Les pierres
dures , les terres cuites , les concrétions
pierreufes compades , les corps mous iné-
galement prefTés , les métaux battus , tirés ,
les extraits , les grailfes , Ùc. font des ag-é-
gés imparfaits.
Je me forme de tout agrégé parfait ,
l'idée par laquelle Newton a voulu qu'on
fe repréfentat l'expanfibilité & la com-
prellibilité de l'air , ( voye\ Opt. qiiejh
xxxj. ) idée que M. Defaguliers a plus pré-
cifément exprimée , ( pojeifa deuxième dif-
fertation fiîr l'élévation des vapeurs , dans
fon cours de phyjique y lef. xj. ) c'efl-à-
dire , que je regarde tout agré^.é partait y
i8 C H Y
excepté la niafie abfblument denfc , fi elle
exille dans la nature , comme un amas de
corpufcules non contigus , dirpofés à des
dilîances égales. Je ne m'arrêterai point
à établir ici ce paradoxe phyfique , parce
qu'il peut auiii bien me fervir comme lup-
poiîrion que comme vérité démontrée , 6i.
que je prétends moins déterminer la difpo-
fiiion intérieure ou la comporition de m.on
agrégé, c^ue repréfenter Icn état par une
image lènlible.
Les parties intégrantes u'un agrégé ,
confidérées en elles-mêmes , & folitaire-
apnent , peuvent être des corps fur.ples, éié-
inentaires , des atomes , ou des corps for-
més par l'union de deux ou plulieurs corps
fimples de nature différente , ce que les
chymilles appellent des mixtes ; ou des
corps formés par l'union' de deux ou de
plulieurs diiiérens mixtes , corps que les
chymiiles appellent compofés ; ou enfin par
quelqu'autre ordre de combinailbn , qu'il
ciî inutile de détailler ici.
Une mafîe d'eau ell un agrégé de corps
llmples ièmblables ; une maflè d'or eit
un agrégé de mixtes femblables ; une
amalgame eft un agrégé de compofés
icmbiableo. Nous difons à defTein fembla-
bles y pour énoncer que l'homogénéité de
l'agrégé fubiilîe avec la non - iimplicité
de Tes parties intégrantes , & qu'elle ell
«biblument indépendante de l'homogénéi-
té de celles-ci , de même que fa denfité
uniform.e eft indépendante du degré de
denfité , ou de la diverfe porofité de fes
parties.
Ce n'eft pas ici le lieu de démontrer
toutes les vérités que ceci (uppofe ; par
exemple, qu'il y a plufieurs élémens ef-
ientiellement difiérens , ou que l'homo-
généité de la matière eft une chimère- ;
que les coips inaltérables , l*^u , par
exemple , (ont immédiatement compo-
{•es d'élémens ; & que le petit édifice Ibus
rimage duquel les Corpufculaires & les
Newtoniens veulent nous faire concevoir
une particule d'eau , porte fur le fonde-
ment le plus ruineux , fur une logique
très-vicieufe. Aufli ne propofons-nous ici
que par voie de demande ces vérités , que
nous dédurions par voie de conclufion ,
û au heu d'en compofer un article de
C H Y
cfiâionnalre , nous avions \ en faire les
derniers chapitres d'un traité général &:
fcientifique de Chymie. Les faits , les opé-
rations , les procédés, les vérités de détail
qui rempliifent tant d'ouvrages élémentai-
res , lerviroient de fondement à ces notions
univerfelles & à celîe^ qui fuivront , & qui
perdant alors le nom à.efiLppojitLons ) pren-
droient celui d'axiomes.
Ce petit nombre de notions peut fervir
d'abord à didinguer exadement dans un
corps, quelconque ce qui appartient à La
partie intégrante.
Il cil évident , par exemple , par le feul
énoncé , que les propriétés mcchaniques
des corps leur appardennent comme malîè ;
que c'eft par leur maffe qu'ils poujfeiit ,
qu'ils pefent ^ qu'ils réjifiçnt , qu'ils exer^
cent y dis-je , ces aélions avec une force
déterminée , ( car il ne s'agit pas ici
des propriétés communes ou efîentielles
des corps , de leur mobilité , de leur
gravité , ou de leur inertie abfolue ; ) en
un mot , que leur figure , leur grandeur ,
leur mouvement &: leur fituation , con-
fidérés comme principes méchaniques ,
appartiennent à la maffe. Car quant au
mouvement , quoique les Phyficiens efti-
ment celui d'un tout par la lomme de^
mouvemens de toutes f.s parties , ils n'en
conviennent pas moins que dans le mouve-
ment dont nous parlons , toutes ces parties
font en repos les unes par rapport aux
autres.
Tous les changemens qu'éprouve un;
agrégé dans la difpofition & dans la vicinité.
de fes parties , eft auili , par la force des
termes , une affedion de l'agrégé. Que
la rarefcibiliré , l'élafticité , la divifibilité y.
la dudihté , ^c. ne dépendent uniquement
que de l'aptitude à ces changemens, fans
que les molécules intégrantes éprouvent .
aucun changement intérieur , du moins:
qu'il y ait des corps dont les parties inté--
grantes font à l'abri de cçs changemens :_
& quels font ces corps ? ce font des quef^
fions particulières qu'il n'eft pas polîibîe-
d'examiner ici. Que toutes ces propriétés
puilfent avoir entièrement leur raifon dans -
les deux caufes que nous venons d'affigner y-
quoique la raifon du degré fpécifique de.^'
chacune de ces propriétés le trQuvejévideoit—
C H Y
ment dans la conftitudon intérieure ou l'ef-
fènce des parties intégrantes de chaque agré-
gé , c'cft un fait démontré par la feule ob-
fervation des corps intérieurement inaltéra-
bles , dans lefquels on obferve toutes ces
propriétés, comme dans l'eau, p.^.r exem-
ple , l'air , l'or , le mercure , 6v.
Nous pouvons aflîirer la même chofe de
certains mouvemens inteftins que pluiieurs
agrégés peuvent éprouver ; par exemple ,
de celui qui- conftitue l'elîénce de la liqui-
dité , lèion le fentiment de Defcartes , &
le témoignage même des fens. Je dis félon
le témoignage des fens, parce que le mou-
vement de l'ébulUtion , qui afllirément efl
très-iènfible , ne diffère de celui de la li-
quidité que par le degré ; & qu'ainfi , à
proprement parler, tout liquide, dans fon
état de liquidité tranquille , eft un corps
infenfiblement bouillant , c'eft-à-dire ,
agité par un agent étranger , par le feu , &
non pas un corps dont les parties foient
néceflàirement en repos , comme plus d'un
newtonien l'a avancé fur des preuves ti-
rées de vérités géométriques. Les vérités
géométriques- font aiTurément très-refpec-
tables ; mais les Phyiiciens géomètres les
expoferont mal adroitement à 1 irrévérence
des Pbyficiens non géomètres , tomes les
fois qu'ils mettront une démonflration à la
place d'un fait phyfique , & une fuppoii-
tion gratuite ou fauffe , foit tacite , Toit
énoncée , à la place d'un principe phynque
que l'obrervation. peut découvrir , & qui
quelquefois elt fenfible , comme dans le
cas dont il s'agit : ce que n'a point balancé
d'aifurer M. d'Alembert , que j'en croirai
lA-defîIis auffi volontiers que j'en crois
Sthal décriant la tranfmutation. Lorfque
M. Defîiguliers , par exemple , pour éta-
blir que toutes les parties d'uii fluide ho-
mogène font en repos , a démontré à la ri-
gueur , & d'une façon fort fimple , qu'un
liquide ne fauroit bouillir ; il ne l'a fait ,
ce me femble , que parce qu'il a luppoié
tacitement que les parties d'un liquide font
libres , fui juris , au lieu qu'une obferva-
tion facile découvre aux fens mêmes que
le feu les agite continuellement , & qu'il
Ti'eft point de liquidité fans chaleur ; ce
q.;e prefque tous les Newtoniens femblent
adorer ou oublier , quoique leur maître
C H Y i^
l'ait exprefîement avancé. Voye^ Optiq.
quefî. xxxj. Pour revenir k mon llijet , je
dis que le mouvement de liquidité , 6c
celui d'ébullition qui n'en efl que le degré
extrême , peuvent n'appartenir qu'à la
maffe , & que ce n'eft qu'à la maflê qu'il?
appartiennent réellement dans l'eau , &
dans plufieurs autres liquides.
Les qualités fenfibles des corps peuvent
au moins ne pas appartenir à leurs partie*
intégrantes ; un corps fort fouple peut être
formé de parties fors roides , comme on
en convient afîez généralement pour l'eau ;
il feroit ridicule de chercher la raifon du
fon dans une modification intérieure des
parties intégrantes du corps fonore; la cou-
leur fenfible d'une mafTe d'or , c'eff-à-
dire , une certaine nuance de jaune , n'ap-
partient point à la plus petite particule qui
efl or , quoique celle-ci foit nécefïairement
colorée , & que des faits démontrent même
évidemment qu'elle l'eiî: , mais d'une façon
difîérente de la mafTe. Ceci eft fufceptible
de la preuve la plus complète. ( Voye\
la doctrine chymique fur les couleurs , au
mot Phlogistique : ) mais , je le ré-
pète , ce n'eft pas de l'établifTement de
CGA vérités que je m'occupe à préient ; il
me fuftit d'établir qu'il eft au moins pof^
fible de concevoir une maiïé formée par
des particules qui n'aient aucune des
propriétés qui fe rencontrent dans la ma-iè
comme telle ; qu'il eft très-facile de fc
repréfenter une maifc d'or , c'eft-à-dire ,
urt corps jaune, éclatant, fonore, dudi-
le, compreiiible, divifible par des moyens
méchaniqués , rarefcible jufqu'à la fluidité ,
condenfiible , élafiique / pefanr dix- neuf
fois plus que l'eau ; de fe repréfenter un
pareil corps , dis-je , comme formé par
l'affemblage de parties qui font de l'or ,
mais qui n'ont aucune des qualités que je
viens d'expofer : or cette vérité découle
fi nécefTairement de ce que j'ai déjà pro-
pofé , qu'une preuve ultérieure tirée de l'ex-
périence me paroît aufli inutile , que l'ap-
pareil de la Phyfique expérimentale A la
démonftration de la force des leviers. Si
quelque Icdeur eft cependant curieux de
ce dernier genre de preuve , il le trouvera
dans ce que nous allons dire de l'imitatioa
de l'or.
Ci
20 C H Y
Toutes ces qualités , Je les appellerai
extérieures ou phyfiques , & j'obfèrverai
d'abord qu'elles font accidentelles y félon le
langage de l'école; qu'elles peuvent périr
fîms que le corpufcule foit détruit , ou celle
d'être un corps tel ; ou , ce qui eft la même
chofe , cju'elles font exadement inutiles à
la fpécificarion du corps , non feulement
par la circonflance de pouvoir périr fans
que l'être fpécifique du corps foit changé ,
mais encore parce que réciproquement
elles peuvent fe rencontrer toutes dans un
corps d'une elpece différente. Car quoi-
qu'il foit très-difEciie de trouver dans deux
corps intérieurement différens un grand
nombre de qualités extérieures femblables ,
& que cette difficulté augmente lorfqu'on
prend l'un des deux corps dans l'extrême
de fa claife , qu'il en efl , par exemple , le
plus parfait , comme l'or dans celle des
métaux; cependant cette reflemblance ex-
térieure ne répugne point du tout avec une
différence intérieure effenticlle. Par exem-
ple , je puis difpofer l'or , 6c un autre corps
qui ne fera pas même un métal , de façon
qu'ils fe relfembleront par toutes leurs qua-
lités extérieures , & même par leur gravite
fpécifique ; car s'il efl difficile de procu-
rer à un corps non métallique la gravité
fpécifique de l'or , rien n'efl fi aifé que de
diminuer celle de l'or : celui qui aura porté
ces deux corps à une reflemblance exté-
rieure parfaite, pourra dire de fon or
imité , en aurum Phyjicorum ^ comme Dio-
gene difoit de fon coq plumé , en homin^
Platonis.
Omtt toutes ces propriétés que j'ai ap-
pellées extérieures^ ou phyfiques y j'obferve
dans tout agrégé des qualités que j'appel-
lerai intérieures y de leur nom générique ,
en attendant qu'il me foit permis de les
nppeller chymiaues ;, & de les diilinguer
].ar cette dénomination }xirticuliere ^cs
autres qualités du même genre y telles que
:^bnt les qualités très-communes des corps ,
l'étendue , l'impénétrabilité ^ Tinertie , la
mobilité , Ùc. Celles dont il s'agit ici font
<\qs propriétés intérieures particulières; elles
fpécifient proprement le corps , le conffi-
tuent un corps tel , font que l'eau , l'or ,
le nitre , &c. font de l'eau , de l'or,, Au
nitrç j Ùc. ù. non pas d'autres flibflances ;
C H Y
I telles font dans l'eau la fimplicîté , la vola-
tilité , la faculté de difîbudre les fels , &
de devenir un des matériaux de leurs mix-
tion , &c. dans l'or , la métallicité , la fixité ,
la lolubilité par le mercure & par l'eau
régale , &c. dans le nitre , la ialinité neutre y
la forme de fes cryfîaux , l'aptitude à être
décompolé par le phlogifHque & par l'aci-
de vitriolique , &c. or ces qualités appar-
tiennent toutes effentiellcment aux parties
intégrantes.
Toutes ces qualités font dépendantes
les unes des autres dans une fuite qu'il eu
inutile d'établir ici , & elles font plus ou
moins communes : l'or , par exemple ,
efl foluble par le mercure comme métal ;
il efl fixe comme métal parfait ; il efi fo-
luble dans l'eau régale en un degré d'affi-
nité fpécifique comme métal parfait teU
c'efl-ci-dire , comme or.
De ces qualités internes , quelques-unes,
ne font eflentielles aux corps que relati-
vement à notre expérience , à nos con-
noilîances d'aujourd'hui : la fixité de l'or ,,
la volatilité du mercure , l'inarnalgabili-
té du fer , &c. font des propriétés inter-
nes de ce genre : découvrir les proprié-
tés contraires , voilà la fource des problê-
mes de la Chymie pratique la moins vul-
gaire.
Il efi d'autres propriétés internes qui font
tellement inhérentes au corps , qu'il ne-
fauroit fubfifler que par elles : ce font rou-
tes celles qui ont leur raifon prochaine'
dans l'être élémentaire , ou dans l'ordre de
mixtion des corpufcules fpécifiques de clia-
que corps ; c'efi ainfi qu'il efl effenticl an
nitre d'être formé par l'union d^ l'acide
que nous appelions nitreux ^ & de l'alkalt
fi.xe; à l'eau, d'être un certain élément y
&c.
Toutes îes diflindions que nous avons
propofées jufqu'à préfent , peuvent n'être
regardées ^que comme des vérités de préci-
fion analytique , puifque nous n'avons con-
fidéré proprement dans les corps que des.
qualités ; nous allons voir que les drftërences
qu'ils nous préfenteront comme agens phy-
fiques , ne iont pas moins remarquables.
I". Les mafles exercent les unes fiir les
autres des aôions très-diflindes de celles
qui font propres aux corpufcules , & cela
C H Y
félon des loix abfolument diiîerentcs de
celles qui règlent les afFedions mutuelles
des corpufcules. Les premiers fe cho-
quent , fe preiTent , fe réiiilent , fe divifent ,
s'élèvent , s'abaillent , s'entourent , s'en-
veloppent , fe pénètrent , Ùc. les unes les
autres à raifon de leur vitcfîe , de leur
mafle , de leur gravité , de leur confiflnnce ,
de leurs figures relpcdives ; & ces loix font
les mêmes , foit que l'adion ait lieu entre
des maiîes homogènes , foit qu'elle fe pafîe
entre des mafTes Ipécifiquement différentes.
Une colonne de marbre , tout étant d'ail-
leurs égal , foutient une mafTe de marbre
comme une mafTe de plomb ; un marteau
d'une matière convenable quelconque ,
chafTe de la même façon un clou d une
matière convenable quelconque. Les ac-
tions mutuelles de corpufcules ne font
proportionnelles à aucune de ces qualités ;
tout ce que les dernières éprouvent les unes
par rapport aux autres , fe réduit à leur
union & à leur féparation agrégative , à
leur mixtion, -X leur décompofition & aux
phénomènes de cq^ afFedions : or il ne
s'agit dans tout cela ni de chocs , ni de
preflions ;, ni de frottemens , ni d'entrela-
cement , ni d'introdudion , ni de coin , ni
de levier , ni de vîtefîe , ni de grofî'eur, ni
de figure , 6'c. quoiqu'une certaine grof-
feur & une certaine figure foient apparem-
ment eflentielles à leur être fpécifique. Ces
adions dépendent àts qualités intérieures
des corpulcules , parmi lefquelles l'homo-
généité & l'hétérogénéité méritent la pre-
mière confidération , comme conditions ef-
fenticlles : car l'agrégation n'a lieu qu'entre
des fiibflances homogènes , comme nous
l'avons obfervé plus haut ; l'hérérogénéité
des principes au contraire efl efTèntielle à
l'union mixtu'e. Voye^ MiXTION , DÉ-
COMPOSITION, Séparation.
l**. Toutes les mafîes gravitent vers un
centre commun , ou font pelantes ; elles
ont chacune un degré de pefinteur connu
& proportionnel à leur quantité de matière
propre fous un volume donné : la gravité
rbfoîue de tous les corpufcules n'efl pas
démontrée , ( voye^ PRINCIPES ô' PhlO-
CISTIQUE; ) leur gravité fpécifique n'eff
pas connue»
" 3°. Les mafTes adhèrent entr'elles à
C H Y 21
raifon de leur vicinité , de leur grofTeur , &
de leur figure : les corpufcules ne connoif-
fent point du tout cette loi ; c'efl à raifoa
de leur rapport ou affinité que fe font leurs
unions , ( J'ojf;^ RAPPORT ,j & réciproque-
ment les mafîes ne font pas foumilés aux.
loix des affinités ; l'adion menfiruelle fup-
pofe au contraire la deflruclion de l'agréga-
tion, ( 7'oj^^Menstrue ; ) & jamais de
l'union d'une mafîe à une mafie de nature
difiérente , il ne réililtera un nouveau corps
homogène.
4°. Les corpufcules peuvent être écartés
les uns des autres par la chaleur , caufè
avec laquelle on n'a plus befoin de la
répulfion de Newton ; les mafTes ne s'éloi-
gnent pas les unes des autres par la chaleur.
KojqFEll.
5^' Certains corpufcules peuvent erre
volarili{és , aucune mafîe n'efî volatile»
Voye^ Volatilité.
Juiqu'à préfent nous n'avons oppofé les
corpulcules aux agrégés , que par la feule
Circonflance d'être confidérés fohtairement ^
& nous n'avons eu aucun égard à la confli-
tution intérieure des premiers : ce dernier
aiped nous fournira de nouveaux earaderes
difundifs. Les voici :
3°. Les agrégés (ont homogènes , &;
les corpufcules ou font fimples , ou font
compofés de matériaux efTentiellemenr dif-
férens. La première partie de cette propo-
rtion eft fondée fur une définition ou de-
mande ; la féconde exprime une vérité du
même genre ; & elle a d'ailleurs toute
l'évidence que peut procurer une vafîe ex-
périence que nous avons ^ ce fujet. Voye-;^
Mixtion.
2°. Les matériaux âcs corpufcules com-
pofés , différent non feulement e itr'eux ,
mais encore du corpufcule qui réfulte de
leur union , & par conléquent de l'agrégé
formé par TafTemblage de ces corpufcules :
c'efl ainii que l'alkaU fixe & l'aciac nitreux
différent efîèntiellement du nitre & d'une
mafîe de nitre ; & fi cette divifion eft
poufïée jufqu'aux élémens , nous aurons
toute la différence d'une maflé à un corps
fi m pie Voye\ notre doctrine fur les élé-
mens y au mot Principe.
3 . Les principes de la mixtion ou de la
, compofition des corpulcules , font unis
22 C H Y
entr'eux par un nccud bien diffîrent de
celui qui opéré l'union agrégative ou le
rapport de mafîe : le premier peut être
rompu par les moyens méchaniques, aullî
bien que par les moyens chymiques ; le
fécond ne peut l'être que par les derniers,
favoir , les menfîrues &c la chaleur , & dans
quelques lujets même ce ncEud eft indif-
loluble , du moins par les moyens vul-
gaires : l'or , l'argent , le mercure & un
très -petit nombre d'autres corps, font
des mixtes de cette dernière claflè. Vqye^
Mixte.
Les bornes dans lefqu elles nous fommes
forcés de nous contenir, ne nous permettent
pas de poufier plus loin ces confidérations;
les proportions qu'elles nous ont four-
nies , quoique fimplement énoncées pour la
plupart , prouvent , ce me femble , fuffifam-
ment que \qs aiFcdions à^s maffes , & les
afleâions àts dlflerens ordres de principes
dont elles font formées , peuvent non ièu-
lemcnt être difîinguées par des confidéra-
-tions abftraites , mais même qu'elles dif-
férent phyiiquement à plufieurs égards :
•& l'on p^eut au moins foupçonner dès-à-
préfent que la phyfique des corps non
organifés peut être divifée par ces diffé-
fenccs en deux fciences indépendantes
Tune de l'autre , du moins quant aux
objets particuliers. Or elles exiHent , ces
^eux fciences , la divilion s'eft faite d'elle-
même; & l'objet dominant de chacune
remplit fi exaftement l'une des deux
claflès que nous venons d'établir , que
ce partage qui a précédé l'obfervation
raifonnée de fa' néceiUté , eft une nou-
velle preuve de la réalité de notre difîinc-
îion.
L'une de ces fciences efl la Phyfique
ordinaire , non pas cette Phyfique univer-
lèlle qui efl définie à la tête des cours de
Phyfique , mais cette Phyfique beaucoup
moins vafie qui eft traitée dans ces ou-
vrages.
La féconde ed la Chymie.
Que la Phyfique ordinaire , que je n'ap-
pellerai plus que Phyjique , fe borne aux
iifïcdions ôits mafles , ou au mciins que ce
foit là fon ob}ét dominant , c'efl un fait
<que tout lecleur peut vérifier , i°. fiir la
0^\p ôf.s chapitres de tout traité de
C H Y
Phyfique ; 2°. en fe donnant la peine de
parcourir les définitions des objets géné-
raux qui y font examinés , & qui peuvent
être pris dans différentes acceptions , par
exemple , celle du mouvement , & en-
fui;e de voir dans quels corps hs Phyficiens
confiderent le mouvement ; 3°. enfin en
portant la vue fur le petit nombre d'objets
particuliers dont s'occupe la Phyfique ,
& qui nous font comimuns avec elle , tels
que l'eau , Fair , le feu , Ùc. Ces recher-
ches lui découvriront que c'efl toujours
des mafîes qu'il efl quefîion en. Phyfique;
que le mouvement dont le Phyficien s'oc-
cupe principalement , eil le mouvement;
propre aux maffes ; que l'air efi pour lui
un fiuide qui fe comprime & qui le réta-
blit aifément , qui fe met en équilibre
avec les hquidcs qu'il foutient à de certai-
nes hauteurs , dans de certaines circonf-
tances , dont les courans connus fous le
nom de vents , ont telle ou telle vîteflê ,
qui eft la matière des rayons fbnores ; ea
un mot , que l'air du Phyficien n'efi uni-
quement que l'air de fatmofphere , &
par conféquent de l'air agrégé ou ea
maffe ; que fon eau efî un liquide humide ^
incorapreiiible , capable de fe réduire en
glace & en vapeurs , fournis à toutes les
loix de l'hydraulique & de l'hydrofiatique ,
qui efl la matière des pluies & des autres
météores aqueux , Ùc. or toutes ces pro-
priétés font évidemment des propriétés de
mafle , excepté cependant l'humidité ;
aufli efl-elie mal entendue , pour l'oblèr-
ver en palTànt : car je demande qu'on me
montre un fcul liquide qui ne foit pas hu-
mide , fans excepter même le mercure ,
& je conviendrai que l'humidité peut être
un caraélere fpécial de quelques liquides.
Quant au feu & à la qualité efl'enticlle
par laquelle Bocrhaave , qui eft celui
qui en a le. mieux traité phyfiquement ,
caraûérife ce fluide ; favoir , la faculté
de raréfier tous les corps : c'efl évidem-
ment à àts mafîes de feu , ou au feu
agrégé , que cette propriété convient ; aufîî
le traité du feu de Boerhaave , à cinq ou
fix lignes près , efl-il tout phyfique. La
lumière , autre propriété phyfique affez gé-
nérale, du feu , appartient uniqueniem sai
feu agrégé.
C HY
La plupart des objets phyfiques font
fcnfibles ou en eux-mêmes , ou au moins
par leurs effets immédiats. Une mafie a
une figure fenfible ; une maffe en mouve-
ment parcourt un efpace fenfible dans un
temps fenfible , elle ell retardée par des
obflacles fenfibles , ou elle ell retardée
fènfiblement , &^c. une malTe élaflique eft
applatie par le choc dans une partie ff'nli-
ble de fa furface , &c. cette circonflaacc
fbumet à la précifon géooiétrique la
détermination des figures , des forces ,
des mouvemens de ces corps ; elle
fournit au géomètre des principes fen-
fibles , d'après leiquels il b^itit ce qu'il
appelle des théories , qui depuis que Ip
grand Newton a fait un excellent ouvrage
en décorant la Phyfique du rJiel: de ces
fublimes connoiflances , font devenues la
Phyfique.
La Phyfique d'aujourd'hui efl donc
proprement la colLdion de toutes les
fciences phyfico - mathématiques : or jui-
qu'à prêtent on n'a calculé que les forces
& les effets des maffes : car quoique les
plus profondes opérations de la Géométrie
tranfcendante s'exercent fur des oh'](!ts
infiniment petits , cependant comme ces
objets pafTent immédiatement de l'abifrac-
ficn à l'état de mafîe , qu'ils (ont des mafîes
figurées , doués de forces centrales , &c.
dès qu'ils font confidéré.s comme êtres phy-
fiques , les très-petits corps du phyficien
géomètre ne font pas les corpufcules que
nous avons oppofés aux malles ; & les
calculs faits fur ces corps , avec cette fa-
gacité & cette for.ce de génie que nous
admirons , ne rendent pas les caufes &
les effets chymiques plus calculables , du
moins plus calculés jufqu'à préfent.
Les Phyficiens font très-curieux dé ra-
mener tous les phénomènes de la nature
îiux loix méchaniques , & le nom le plus
honnête qu'on puifïe donner aux caufes
qu ils aiiignent , aux agens qu'ils mettent
en jeu dans leurs explications , c'efl de
les appeller méchaniques.
La Phyfique nous avouera elle-même
^as doute fur la nature des objets que
nous leur attribuons , & d'autant plus que
«ous ne lui avons pas enlevé ceux qu'elle
a^ufurgés fur nous, & dont la propriété
C H Y 15
pouvoit la flatter ; nous avons dit feulement
que fon objet dominant étoit la contem-
plation des mafles.
Que la Chym'ie au contraire ne s'occupe
e0ènriellement que des afFeéiions des dif-r
férens ordres de principes qui l^orment
les corps iênfibles ; que ce foit là fon but,
fon objet propre , le tableau abrégé de la
Chymic , tant théorique que pratique, que
nous allons tracer dans un moment , le
montrera lufïîfamment.
Nous oblerverons d'avance , pour ache-
ver le contrafle de la Phyfique & de la
Çhymic :
I*. Que tout mouvement chymique efl
un mouvement inteflin , mouvement de
digefîion , de fermentation , d'effervefr»
ccnce , Ùc. que l'air du chymifte efl \in
des principes de la compofition des corps ,
fur-tout des corps foiides , s'unifTant avec:
des principes di|-férens félon les loix d'o/^-
Jinité j, s'en détachant par des moyens chy-
miques , la chaleur &. la précipitation ;
qu'il efl fi volatil , qu'il paflè immédia-
tement de l'état folide à l'expanfion vapo-
reufc , fans refier jamais dans l'état de
liquidité fous le plus grand froid connu i.
vue nouvelle qui peut lauver bien des peti-r
XeHes phyfiques; que l'eau du chymiiîe elt'
^n\ élément ou un corps fimple , indivifi-»
ble & incommutable , contre le fentiment
de Thaïes , de Van-Helmont , de Boyle ,.
& de M. Eller , qui s'unit chymiquement-
aux fels , aux gommes , ùc. qui efl un des ■
matériaux de ces corps , qui efl l'infiru-
mcnr immédiat de la fermentation , ùc.
que le feu, confidéré comme obj-et chy-p
mique particuher , , efl un principe capable '
de combinaifon & de précipitation , conf-
tituant dans difFérens mixtes dont il efl lé'
principe , la couleur , l'inflammabilité , la
métallicité , ^c. qu'ainfi le traité du feu ,
connu fous le nom des trecenta de Stahl ,
efl rout chymique.
]Nous avons dit le feu confidéré comme'
objet chymique particulier y parce que le feu '
agrégé , confidéré comme principe de la
chaleur , n'efi pas un objet chymique , mais
un infirument que le chymifte- emploie dans ■
les opérations de l'art , ou un agent uni--
vcrfel dont il contemple les effets chymi*-
ques dans le laboratoire de la. nature. -
i4
En gênerai
C f 1 Y
quoique le Chymifle
ne
traire que des agrcgés , puifque les corps
ne fe prélentent jamais à lui que fous
cette forme , cqs agrégés ne font Jamais
proprement pour lui que des promptuaria
de fujets vraiment chymiques , de corpus-
cules ; & toutes les altérations vraiment
chymiques qu'il lui fait efîiiyer , fè rédui-
Icnt à deux. Ou il attaque diredement i^es
parties intégrantes , en les combinant une
à une , ou en très-petite quantité numé-
rique avec les parties intégrantes d'un
autre corps de nature différente , & c'eft
la diflblution chymique ou la fyncrefe.
Voyei MeNSTRUE, SynCRESE , & la
fuite de cet article. Cette diliolution eft
le feul changement chymique qu'il puille
produire fur un agrégé d'élémens. Ou il
décompofe les parties mtégrantes de l'agré-
gé , & c'eft là l'analyfe chymique ou la I
diacrefe. F"ojq DiaCRESE , ANALYSE ,
VÉGÉTALE , au mot VÉGÉTAL , Ù la
fuite de cet article. En un mot , tant qu'il
ne s'agit que des rapports des parties inté-
grantes de l'agrégé cntr'elles , le phéno-
mène n'efl pas chymique , quoiqu'il puiiîe
être dû à des agens chymiques ; par exem-
ple , la divifion d'un agrégé , pouflee même
jufqu'à l'unité individuelle de fes parties ,
n'efl: pas chymique ; c'eft ainfi que la pul-
vérifation même phiiofophique ne l'ell point
quant à fon effet ; la diacrefe , pour être
chymique , doit féparer des parties fpéci-
fiquement difîêmblables.
Il faut obferver pourtant que quoique
certains changemens intellins que la cha-
leur fait éprouver aux corps agrégés , ne
foient chymiques à la rigueur que lorfque
leur énergie efl telle qu'ils portent jufque
fur la conftitution intérieure des corpufcu-
les , il faut obferver , dis-je , que cts chan-
gemens n'étant en général que des effets
gradués de la même caufe , ils doivent être
conlidérés dans toute leur extenfion comme
des objets mixtes , ou comme des effets
dont le degré phyfique même eft très-fami-
lier au chymille. Ces effets de la chaleur
modérée , que nous appelions proprement
phyjiques , font la raréfaéiion des corps ,
leur liquéfaftion , leur ébullition , leur va-
poration , l'exercice de la force élaflique
dans ks corps comprimés , Ùc. AufC les
C H Y
chymifles font-ils de bons phyficlens fur
toutes ces quefîions; du moins il me paroît
que c'efl en pouriijivant fur ces effets une
analogie conduite de ceux où la caufe agit
le plus manifeflement , ( or ceux-là font des
objets familiers au feul chymille , ) à ceux
où fon influence efl plus cachée , que je
fuis parvenu à rapprocher plufieurs phéno-
mènes qui font généralement regardés
comme très-ifolés , à découvrir , par exem-
ple , que le méchanifme de l'élaflicité eft le
même dans tous les corps , qu'ils font tous
fufceptibles du même degré d'élaflicité , &
que ce n'efl que par àts circonflances pu-
rement accidentelles que les diflérens. corps
qui nous environnent ont des différences
fpécifîques à cet égard ; que l'élaflicité n'efl
qu'un mode de la rareté & de la denfité ,
& qu'au premier égard elle efl par confé-
quent toujours due à la chaleur auffi bien
que tous les autres phénomènes attribués à
la répulfion newtonienne , qui n'eil jamais
que la chaleur. Voye^ Feu , RAPPORT.
2,'. Les objets chymiques n'agiffent pas
fenfiblement. L'effet immédiat du feu &
celui des menflrues , qui font les deux
grands agens chymiques , font infenfibles,
La mixtion fe fait dans un temps incom-
menfurable , in inftami ; aufîi ces adions
ne le calculent-elles point , du moins n'a-t-
on fait là-defTiis juiqu'à préfent que des
tentatives malheurcules.
3°. Les chymifles ne s'honorent d'au-
cun agent méchanique , & ils trouvent
même tort fingulier que la feule circonf-
tance d'être éloignés fouvcnt d'un feul
degré de la caule inconnue , ait rendu
les principes méchaniques il durs à tant
de philolbphes , & leur ait fait rejeter
toute théorie fondée immédiatement fur
les caufes cachées , comme fi être- vrai
n'étoit autre chofe qu'être intelligible , ou
comme 11 un prétendu principe méchani-
que interpofé entre un effet & fa caufe
inconnue, les raffuroit contre l'horreur de
ï inintelligible. Quoi qu'il en foit , ce n'efl
pas par le goût contraire , par un courage
affedé , que les Chymifles n'admettent
point de principes méchaniques , mais
parce qu'aucun des principes méchaniques
connus n'intervient dans leurs opérations ;
ce n'çfl pas auffi parce qu'ils prétendent
que
C H Y
que leurs ngens font exempts de m^chanif-
me , mais parce que ce méchanifme eu
encore inconnu. On reproche aufii très-
injullement aux Chy'T^iftes de ie plaire
dans leur obrcuriré ; pour que cette impu-
tation fur railbnnable , il faudroit qu'on
leur montrât des principes évidcns & cer-
tains : car enfin ils ne feront pas blâmables
tant qu'ils prtléreront robfcurité à l'erreur;
& s'il y a quelque ridicule dans cette ma-
nière de philofopher , ils font tout réfolus
à le partager avec Ariiliote , Newton , &
cette foule d'anciens philofophes dont M.
de Buffon a dit dans fon hifloire naturelle
qu'ils avoient le génie moins limité , &
la philofophie lu plus étendue ; qu'ils s'éron-
noient moins que nous des faits qu'ils ne
pouvoient expliquer ; qu'ils voyoient mieux
la nature telle qu'elle eft ; & qu'une fvm-
pathie , une correlpondance n'étoit pour
eux qu'un phénomène , tandis que c'ed: pour
nous un paradoxe , dès que nous ne pou-
vons le rapporter à nos prétendues loix de
mouvement. Ces hommes tavoient que la
nature opère la plupart de (es effets par des
moyens inconnus ; que nous ne pouvons
nombrer fes reflburces ; & que le ridicule
réel , ce leroit de vouloir la limiter , en la
réduifant A un certain nombre de principes
d'adion & de moyens d'opérations ; il leur
fuffifoit d'avoir remarqué un certain nom-
bre d'effets relatifs & de même ordre ,
pour conlHtuer une caufe. Les chymifles
îont-ils autre chofe ?
Ils recevroient avec empreflement &
reconnoiflance toute explication méchani-
que , qui ne feroit pas contredite par des
faits : ils feroient ravis , par exemple , de
pouvoir fe perfuader , avec J. Keill &
Freind , que le méchanifme de fefiervef-
cence & de la fermentation confilte dans
Faétion mutuelle de certains corpufcules
fohdes & élafHques , qui fe portent avec
force les uns contre les autres , qui réjail-
liflent proportionnellement à leur quantité
de mouvement & à leur élafticité , qui fè
choquent de nouveau pour rejaillir encore ,
&c. Mais cette explication , auffi ingénieufé
?iu'arbitraire , efl démentie par des faits qui
ont voir clairement que le mouvement
d'effervefcence & celui de fermentation
Q}ïlt dus au dégagement d'un corps fubtil ,
Tome VJIL
C H Y 25
& expanfible , opéré par les lolx générales
des affinités , c'ell-à-dire , par un principe
très-peu méchanique. Voye^EF^EKYES"
CENCE ù Fermentation.
Plutôt que de s'avouer réduits à énoncer
fimplement qu'une difîblution n'eft autre
cholê que l'exercice d'une certîmie ten-
dance ou rapport par lequel deux corps
mifciblcs font portés l'un vers l'autre ,
n'aimeroient-ils pas mieux fe figurer une
difî'olution fous l'image très-fenfible d'un
menflrue armé de parties roides , folides ,
malîives , tranchantes , &c. d'un côté , fous
celle d'un corps percé d'une infinité de
pores proportionnés à la maiîê & même
à la figure des parties du menilrue , de l'au-
tre ; & cnhn lous celle de chocs réuérés
des parties du menilrue contre la mafle
des corps à difîbudre , de leur introduâion
forcée dans i'es pores , fous celle d'un édi-
fice long - temps ébranlé , & enfin ruiné
jufque dans fes derniers matériaux : images
fous lefquelles les Phyficiens ont repréfenté
ce phénomène. Ils l'aimeroient mieux
fans contredit , parce qu'une exphcatiorî
eu une richeffe dans l'ordre des connoif-
fancc; ; qu'elle en groiîit au moins la
fomme ; que le relief que cette efpece de
faite favant procure , n'eft pas un bien
imaginaire; &* qu'au contraire un énon-
cé tout nu décelé une indigence peu ho-
norable. Mais fi l'explication dont il s'agit
ne fuppofe pas même qu'on fe foit douté
des circonftances elîentielies du phénomè-
ne qu'on a tenté d'expliquer ; fi cette del-
truéiion de la malîê du corps à diiîbudre,
dont on s'ell mis tant en peine , ei\ pure-
ment accidentelle à la dilfolution qui a
heu de la même façon entre deux hqueurs;
& enfin fi cette circonfiance accidentelle
a fi tort occupé le théoricien , qu'il a abfo-
lument oubhé la cir confiance efi'entielle
de la dillblurion, favoir, l'union de deux
lubltances entre lefquelles elle a eu lieu ,
il n'elt pas polîlble de fe payer d'une mon-
noie de fi mauvais aîoi. Boerhaave lui-
même , que nous fommes ravis de citer
avec éloge lorfque l'occafion s'en préfente ,
a connu parfaitement le vice de cette expli-
cation , qu'il a très - bien réfutée. Voyei^
Boerhaave , de menfiruis , Elément, Chy-
miiVf pan, JJ. ■' '
D
1^ C HY
Nous voudrions bien croire encore avec
Freind que la JifTolution eft de toutes les
opérations chymiques celle qui peut être
ramenée le plus facilement aux loîx mé-
ckaniques , & en admettre avec lui ces deux
caufes fort limples , favoir , la plus grande
légérel!^ du dilTolvant , procurée par le
mélange d'une liqueur moins pefante , &
l'afiiiiion d'une liqueur peiante qui , en
defcendant avec effort , entraîne avec elle
les particules du corps diflbus , Ùc. Mais
trop de faits démontrent évidemment le
chimérique de ces {iippolitions 11 gratui-
tes d'ailleurs en foi. Ver fez tant d'efprit-
de-vin qu'il vous plaira dans une diflolu-
tion la plus faturée d'un fel neutre déli-
quefcent , par exemple , de la terre foliée ,
vous n'en précipiterez pas un atome ; un
corps difîbus dans l'acide vitriolique le plus
concentré , n'en fera que plus conftamment
foutenu , fi vous ajoutez de l'eau à la dif-
folution , Ùc. Faites tomber avec telle
vîtefïe que vous voudrez , la liqueur la plus
pefante de la nature , le mercure , dans telle
dilTolution d'un fel neutre à bafe terreufe
Gu faline qu'il vous plaira, & vous n'en dé-
tacherez rien.
Nous voudrions Bien admettre avec
Boyle que les conditions efï'entielles pour
\a fixité^ font la grofTeur des parties conf-
tituantes- du corps fixe , la gravité ou la
folidité de ces corpufcules , & enfin leur
inaptitude à V avolanon ^nk de leur figure
rameufe , crochue, courbe, irréguliere en
un mot,, & s'oppofiint à ce qu'elles puif-
fent fe débarraffer les unes des autres ,
comme étant entrelacées, Ùc. & faire dér
pendre la volatilité des qualités contrai-
res , &c. mais les faits dérangent toutes
ces idées : des corps acquirent de la vo-
latilité en acquérant de la grofîeur , com-
me la lune cornée. Que fi Boyle me dit ,
& il n'y manquera pas, que l'acide marin
lui donne àts ailes , en étendant fa fur-
facç , je lui répondrai que cela même de-
vroit nuire à Ja troifieme condition y en
a 'gmentant l'irrégularité de figure propre
à entrelacer , Ùc. Des corps pefans ou fo-
lides font volatils , 1 ^ mercure ; àes corps
légers ou rares font fives , l'alkali fixe , 6v.
En un mot , quant à ces figures , ces en-
treiacemens de parties , ces /pires fi chères
C H Y
A Boyle , & fi ingénieufes , il faut l'avoueir ,
nous les regrettons réellement ; mais les
phénomènes des mixtions , des précipita-
tions , des rarcfaâions , des coagulations ,
&c. nous démontrent trop fenfiblement
que toute union de petits corps ne fe fait
que par juxtapofition , pour que nous puif-
fions nous accommoder de C(is méchanif^
mes purement imaginaires. Mais la dodri-
ne de Newtop , pofiérieure fur ce point à
celle de Bêcher , comme je l'obferve ailleurs,
les a décredités affez généralement , pour
qu'il foit inutile d'infifter fur leur réfutation..
En un mot , les adions méchaniques dont
il s'agit ici , font mifes en jeu fans fonde-
ment; nous ofons même défier qu'on nous
préfente une explication d'un phénonacne-
chymique fondée fur les loix méchaniques»
connues , dont nous ne démontrions le faux
ou. le gratuit.
Il ell clair que deux fciences qui confi—
derent des objets fous deux afpeds fi dif-
férens , doivent non feulement fournir
des connoiflances particulières , difiindes ,.
mais même avoir chacune un certain
nombre de notions compofées , & une;
certaine maqiere générale d'envifager &
de traiter (es fujets , qui leur donnera un»
langage , une méthode & Aes moyens dif--
férens. Le phyficien verra des mafles, des-
forces , des qualités ; le chym.ifie verra;
de petits corps , àts rapports , dès princi-
pes. Le premier calculera rigoureufement ,,
il réduira à des théories des effets fenfibles.
& des forces , c'efi-à-dire , qu'il foumet-
tra ces effets & ces forces au calcul , ( car-
c'efi U la théorie du phyficien moderne )>,.
& il établira des loix que les expériences
confirmeront à peu-près j je dis à-peu-prêsy ,
parce que les mathématiciens conviennent
eux-mêmes que l'exercice des forces qu'ils
calculent fuppofe toujours un modo nihil'
obfiet ^ & que le cas où rien s'oppofe,.
n'exifte jamais dans k nature Les théo-
ries du fécond feront vagues & d'approxi-
mation ; ce feront àts expofitions clai-
res de là nature , & àes propriétés chy-
miques d'un- certain corps , ou d'un cer-
tain principe confidéré dans toutes les com-
binaifons qu'il peut fubir par la nature &
par l'art ; de (es rapports avec les corps
ou les principes d'une certaine ckifle,, ôc
l»ftfin des. modifications qu'il éprouve ou
qu'il produit à raifon de ces combinai-
jfons & de ces rapports , le tout poié fur
des faits majeurs ou fondamenraux , dé-
couverts par ce que j'appellerai un pref-
femiment ex périme ntiil , lur des indices
d'expériences vagues ou du tritonnement ,
jDais jamais fournis immédiatement par
ces derniers fecours. VhyeT^ PhloGISTI-
QUE , NiTRE , Sel Marin , Vitriol,
^c. En un mot , le génie phyiicien porté
peut-être au plus haut degré ou l'humanité
puiflè atteindre , produira les principes
mathématiques de Newton , & l'extrême
correfpondant du génie chymide , Icfpeci-.
rnen becherianum de Stahl.
Tant que le chymiile & le phyficien
philofophtront , chacun à leur manière ,
îlir leurs objets rel'pedifs , qu'ils les ana-
îyferont , les compareront , les rapproche-
ront , les composeront , & que fur leurs
objets communs ce fera celui qui aura
le plus vu qui donnera le ton , tout ira
tien.
Mais {i quelqu'un confond tout ce que
cous avons diftingué , foit parce qu'il n'a
pas foupçonné l'exifîence & la néceffité
de cette diilindion , à caufe de fà vue
courte , ou parce qu'il l'a rejetée à force
tie tête : fi le chymifie fe mêle des objets
phyfiques , ne fâchant que la Chymie , ou
il le phyficien propofe des loix à la Chy^
■raie , ne connoifîânt que les phénomènes
phyfiques : fi l'un applique les loix àt^
maffes aux afFeéiions des petits corps , ou
fi l'autre tranfpone les afleâions des pe-
tits corps aux adions des mafiés : fi l'on
traite more chymico les chofes phyfiques ,
<& les chymiques more phyjico ; fi l'on veut
tiiflbudrc un fel avec un coin , ou faire
tourner un moulin par un menflrue , tout
àra mal.
Le fimple chymifte ou le fimple phyfi-
cien a-t-il embrafïe lui feul la fciçnce gé-
nérale des corps , & a-t-il prétendu afïîi-
jettir à fes notions particulières , des pro-
priétés communes ? la fcience générale
fera défedueufe & mauvaife , lerfqu'il lui
î^rrivera de defcendre par la fynthefe : de
ces principes qu'il prendra pour généraux ,
& pour des données fur lefquelles il peut
^^oraptcr , il faudra nécefTairement qu'il s'é-
c H r 17
gare. Or toutes les mctaphyfiques-phyfi-
ques , ou pour me fervàr de l'expreiiioa
de Wolt , toutes les Cofmologies que je
connois font qqs ouvrages de phyficiens.
Quelques-unes marqueront , fi l'on veut ,
les plus grands eflbrts du génie ; je con-
fens même qu'il y cri ait qu'il foit impol-
fible de détruire & de réfuter , parce que
ce (ont <\qs enchamemens de notions abl^
traites & de définitions nominales , que
le métaphylicien a déterminées & circonf*
crites à la fantaifie ; mais la fcicnce gé-
nérale des propriétés des corps rt'en exif-
tera pas pour cela plus folide & plus réelle ;
quand je dis la fcience générale des corps ,
j'entends des corps phyfiques , tels que
noiis les obfervons dans la nature , avec
toutes leurs conditions , & non des corps
dépouillés , & prefque anéantis par de«
diilradions.
Nous pouvons afTurer de 1^ plupart des
prétendues vérités générales qui fervent
de bafès aux fyfi:êmes généraux fubfifians ,
lans en excepter les fameux principes de
Leibnitz , ce que M. Merian a dit du
Spinofifm€ dans un mémoire fur l'apper-
ception , hifl. de l'acad. de PruJJe^ t j\s;
que c'elè dans le paffage de l'abfiradion.
« la réalité que ces vérités trouvent leur
terme fatal , & qu'il n'y a qu'à tenter ce
paffage pour voir s'écrouler de foi-même
le colofîe qu'elles foutenoient.
C'efl des différentes fources que nous
venons d'indiquer , que font forties mille
erreurs , à propos defquelles nous pour-
rions dire à ceux qui les avancent avec
le plus de confiance , en parodiant le cé-
lèbre bon mot d' Apelle , ParlcT^ plus bas ;
vous ferie\ rire nos porteurs de charbon y
s'ils vous emendoient. Le catalogue exaâ
de toutes les erreurs de ce genre qui font
venues à notre connoifîânce , fèroit fans
doute très-important à l'intérêt de la vé-
rité & au progrès de la bonne dodrine ;
mais il feroit infini. Il mérite bien d'être
donné dans un ouvrage qui pourroit avoir
pour titre Inflitmions de Phyjique-Chy-
mique , & où l'on fe propoferoit exprefîë-
ment de fubfiimer des vérités à ces er-
reurs. Nous prierons le lecteur de fe con-
tenter en attendant de celles que n ;us
avons eu occafion de citer, & de quel-
i-S
C H Y
q ::<? nutres qui fè préfenteront encore. Je
IX- connois aucun chymille d'un certain
rom qui ait ofé faire des excurfions fur
les terres de la phyfique ; s'il en efl , com-
me nous les jugeons aufli mal avifés &
auiîî téméraires que les phyficiens qui fe
font répandus fur les nôtres , nous les blâ-
mons & nous les abandonnons.
La Chymie efl une fcience qui s'occupe
des féparations & àts unions des principes
conflituans des corps , foit opérées par la
nature, foit opérées par l'art , dans la vue
de découvrir les qualirés de ces corps , ou
de les rendre propres à divers ufagcs.
Les objets particuliers de la Chymie font
tous les phénomènes , foit naturels , fait
artificiels , qui dépendent des féparations
& des unions des principes des corps. Les
naturels font la maturation des fruits , la
formation des gommes , des extraits , à^s
réiines , des fèls végétaux , &<:. l'élabora-
tion & les diverfes altérations, des alimens
des animaux, & de leurs diverfes humeurs ;
la génération des métaux , des pierres , des
cryfîallifations naturelles , des tels foflîles ,
du foufre , des bitumes , &<:. l'imprégna-
tion & la chaleur des eaux minérales , l'in-
flammation des volcans , la nature de la
lioudre & des autres feux allumés dans
l'atmofphere , Ùc. en un mot , tous les
phénomènes de la Botanique phyfi-
que , excepté ceux qui appartiennent à
l'organifation des végétaux ; tous ceux qui
appartiennent à cette branche de l'écono-
mie animale qui efl fondée fur les afïèc-
tions des humeurs ; tous ceux qui confîi-
tuent l'économie minérale que Bêcher a
appellée phyfique fomerraine y ou qui font
dus aux changemens chymiques furvenus
dans ces corps , & enfin ceux que préfen-
tent" dans l'atmofphere certaines matières
détachées des végétaux , des animaux , ou
des minéraux.
Les phénomènes chymiques artificiels
font tous ceux qui nous font préfentés par
les opérations chymiques , & ceux qui
conflituent la théorie de ces opérations
elles-miêmes.
Nous appelions ope'rations , tous les
ttîoyens particuliers employés à faire fubir
uux fujets de l'art les deux grands change-
lïiens énoncés dans la définition de la Chy-
C H Y
mîe y c'efî-à-dirc , à efFeduer des- fépara-
tions & des unions.
Ces opérations ou font fondamentales &
efTèntiellement chymiques, ou elles font
fimplement préparatoires & méchaniques.
Ko)'q Opérations Chymiques.
Les deux c^cts généraux , primitifs , &
immédiats de toutes les opérations chymi-
ques , favoir, la féparation & l'union des
principes , font plus connus dans l'art fous
le nom de diacre fc & de fyncrefe. La pre-
mière ti\ appellée aufTi par plufieurs chy-
mifîes analyfe _, décompojuion ^corruption y
folutioriydefiruBion^^ la féconde^ mixtion^
génération) fymhefe, combinai fon, coagu^
îation, & même confufion par quelques-uns:
chacune de ces exprefîions elt prife dans
un fens plus ou moins général par divers
auteurs , & même en différens fèns par les
mêmes. Lemotdem/xf/on, dans ladodrine
de Bêcher & de Stahl , fignifie , par
exemple , tantôt V union de diffe'rens princi^
pes en général , & tantôt V union des élémens
en particuher , ou celle qui conflitue les
mixtes proprement dits. Voye\ MiXTION.
Les Homs les plus ufités parmi les Chy-
mifles françois , font ceux Ci analyfe & de
décompofition poqr le premier efiét générai ,
& ceux de combitiaifon & de mixtion pour
le deuxième.
Il efî très-peu d'opérations chymiques
qui ne produifent qu'un de ces effets , ou
qui appartiennent exactement à la diacrefc
ou à la fyncrefe : la plupart au contraire
font mixtes , c'efl-à-dire , qu'elles produi-
fent des féparations & àts unions qui font
entre elles dans un rapport de caufe &
d'effet. Voyei DiACRESE , SyNCRESE ,
Opérations chymiques.
Les opérations chymiques s'exécutent
par deux agens généraux , la chaleur &
les menftrues.
L'adion de ces deux caufes fe compli-
que diverfcment dans les différentes opé-
rations , félon le petit nombre à^s loix
fuivantes.
i**. La chaleur feule opère rarement des
féparations pures ; & les corps réfifîent
d'autant plus à fon aftion difîbciante ,
qu'ils font d'un ordre de mixtion moins
compofé. Nos corps ■ fimples & nos mixtes
parfaits font inaltérables par la chaleur
C H Y
feule, du moins par le plus haut degré
de chaleur que nous fâchions leur appli-
quer dans les vaiffeaux fermés , c'eit-à-
dire , dans le concours de l'air , de l'eau ,
& du feu menftrue ; plufieurs compofés
même éludent abiolument cette adion.
Tels font le tartre vitriolé , le fel ma-
rin , &c.
2®. La chaleur efl nécelTaire à toute
adion menllruelle , au moins comme
condition efîentielle ; car il eft impof-
fible , du moins il eft très-rare que cette
dernière adion ait lieu entre deux corps
folides ou gelés , ( ce qui efl proprement la
même choie, ) & elle ne peut être exercée,
que l'agrégation de l'un des deux corps
ne foit très-lâche : or cette laxité (uffilànte
ne fe trouve ordinairement que dans l'état
de liquidité , qui efl effentieliement dépen-
dant de la chaleur. C'efi fur ctito. obfer-
vation qu'eft foridé l'axiome chymique ,
menfirua non agunt nijifint foluta.
3°. Non feulement tout menltrue doit ,
pour agir , ctre fécondé d'une chaleur
abfolue , mais même fon adivité efl pro-
portionnelle au degré de chaleur dont
il ell animé ; ou , pour parler fans figure ,
à fon degré de rareté ou d'expanfion : car,
comme nous l'avons- déjà obfervé , &
comme nous le prouverons au mot Mens-
TRUE , le méchanifme de la diffolution
ne confifle point du tout dans le mouve-
ment du menflrue ; & cette divifion du
corps à diflbudre , par laquelle on fe figure
ordinairement fon adion , n'en donne
qu'une faufle idée. Voye^ MenSTRUE.
4°. La chaleur appliquée à un corps
compofé, non feulement délu«it fès dif-
férens principes , mais même les met ordi-
nairement en jeu , & favorife par-là de
nouvelles -combinaifons. L'extrait d'une
plante , par exemple , eft une fubflance très-
compoiée , portant en foi des principes de
réadion , ces principes dégagés de leurs pre-
miers liens par un feu flifHfànt , exercent
l'adion menÛruelle , en opérant àts préci-
pitations qui fuppofent des dégagemens &
des combinaifons nouvelles. Voje^ DISTIL-
LATION , Précipitation , Mens-
TRUE ; l'oyei ANALYSE VÉGÉTALE ,
au mot VéGÉT'AL ; voye^ Feu.
Ces dégagemens & ces nouvelles com-
C H Y 2p
binaifons font affez mulripli-cs pour qu'on
n'ait dû avoir que des théories très-fauifes
des opérations qui les produifoient , tant
qu'on n'a pas fu qu'elles les produifoient
en effet , ou qu'on n'a pas été en érat de
les eflimer. C'efl parce que quelques
anciens chymifles ont ignoré les vrais
effets de la chaleur fur les principes des
corps , qu'ils ont tant abufé de ce moyen
chymique ; c'efl parce que les détradeurs
de la Chymie ont ignoré c^u'on pouvoit
prévenir ces changemens ou les évaluer
exadement , qu'ils ont combattu par de
mauvaifes raifons l'analyfe par le feu
feul , qui étoit l'unique qui fût connue de
leur temps , & par conlequent la Chymie
qui n'étoit pour eux que l'art d'exécuter
cette analyfe , (r'O)'^;^ dans l'hiflorique qui
terminera cet article , ï endroit de Boy le ; )
c'eH parce que les chymiffes modernes
ont découvert une meilleure méthode ,
(avoir l'analyfe menllruelle , qu'ils ont
abandonné l'analyfe ancienne ; & c'cfl
enfin parce que l'art efl affez avancé
aujourd'hui pour évaluer exadement le
jeu de tous les réadifs excités par la cha-
leur dans le corps le plus compofé , que
l'on pourroit les examiner par fon feul
lecours, c'efl-à-dire , par la diftillation à la
violence du feu , fans autre inconvénient
que de fe propofer, à la façon des Géomè-
tres & avec le même degré d'utilité , ua
problênae chymique très-compliqué.
Les chymifles emploient dans leurs
opérations divers inflrumens : fourneaux ,
vaiffeaux , luts , intermèdes , & autres
uflenfiles , qui tous enfemble font le
fuppellex chymica y les meubles d'un labo-
ratoire. Voye\ InstrUMENS DE ChY-
MiE , Fourneau, Lut , Intermède,
Laboratoire, Ù les articles particuliers.
Nous n'admettons pas l'inutile diflinc-
tion de ces inflrumens appelles particuliers
& artificiels par la plupart èits. chymifles ;
de ces inflrumens , dis-je , & des inflru-
mens appelles par les mêmes chymifles
naturels & généraux , favoir , le feu , l'air ,
l'eau , & la terre : i°. parce que lorfque
ces derniers corps agiflent par leurs qua-
lités intérieures , & qu'ils éprouvent maté-
riellement les changemens chymiques ,
ils ne font plus des inflrumens, mais des
30 C H Y
menftrues ; l'air agit comme menflnie
dans la calcination , le feu dans la réduc-
tion , l'eau dans la fermentation , & la
ferre dans certaines fixations ; l'oy. Mens-
TRUE : 1°. Parce que le rapport ou la qua-
lité commune par laquelle ces quatre lub^-
tances , confidérées comme agens mé-
diats ou méchaniques, font clailëes fous
le nom commun ^ infirumens naturels ,
n'exifte point.; car quoi de plus forcé ,
que d'établir une certaine identité entre
le feu confidéré comme caufe de chaleur ,
la terre fourniflant des cornues & des
fourneaux ; l'eau un intermède , & l'air
Un courant qui anime le teu de nos four-
fteau)(? 3^. Parce que deux de ces pré-
tendus inflrumcns naturels , la terre &:
i'eau , agiilant comme fecours éloignés ,
par leur mafïè , ne diiferent en rien d'ef-
fentiel de i'inltrument le plus méchânic^ue
& le plus particulier ; que l'eau d'un bam-
marie , par exemple , n'efl qu'un inter-
mède plus commmode , dans diverfes opé-
rations , qu'un bain de fable , de cendre ,
de limaille , &c. & non pas un infiniment
vraiment diftind &: nécclTairement requis
dans certaines opérations , ainfi que fe
le perfuadent quelques manœuvres qui
regarderoient uae diftiliation faite à feu
nu ou au bain de fable , comme très-
eflentiellement différente d'une diflilla-
rion faite au bain-marie , par la feule
circonilance d'être faite à feu nu ou au
bain de fable. Ainfi il faudroit au moins
îibandonner ces deux prétendue inilru-
tnens naturels ; quant à l'iîir , la propriété
d'exciter le feu lui eft aflêz particulière
pour le diftinguer par-là , au moins dans
la. pratique ; mais cet agent efl fi peu
chyraique à cet égard , comme l'on voit ,
.que ce n'efl pas la peine d'en taire un
ihftrument chymique diftinâ , & encore
moins un inftrument général. Ce fera donc
proprement au feu feul ou à la chaleur ,
<3ue le nom ^ inftrument naturel & général
conviendra : mais nous aimons mieux lui
iaiffer celui à^ agent ou de caufe y par lequel
nous l'avons défigné jufqu'ici.
L'explication {uffilâmment détaillée de
Fadion de nos deux grands agens , du
fecours que nous tirons de nos inftrumens ,
Ik théorie des opérations ôc des phéno-
C H Y
Itienes chymiques , voilà l'art chymique ^
ou fon {yftême d'inflrumcns & de règles.
Un vrai traité de Chymie pratique , ua
traité élémentaire , des inffitutions prati-
ques , dcvroient embralîèr ce fyliéme.
Or ce traité n'cxide point ; prefque tous
nos livres de Chymie font des hilteires pra-
tiques des trois règnes de la nature , & ne
peuvent guère être comparés qu'à no3
cours de Chymie, où , fuivantun ordre fore
arbitraire & allez indifférent , on enfeignc
à des commcnçans ce qu'il faut en efièc
commencer de favoir , l'hiffoire dts pro-
priétés chymiques d'un certain nombre de
corps de différentes claiTes & de divers
genres,^ eipeces, Ùc. hifloite qu'il n'efl
pas poflible de faire fans offrir en même
temps la manière de procéder aux opéra-
tions particulières , & de fe lèrvir des
inllrumens. Cette étude dilpolé l'œil & la
main à une expérience qu'il eil de la
dernière importiince d'acquérir , par la
facilité qu'on en obtient pour la vérifica-
tion de ces propres idées , & pour faifir
certains phénomènes fugitifs & folitaires ,
qui gerrnent toujours dans l'entendement
du philofophe , mais qui n'y peuvent être
jetés que par des fens exercés.
Malgré l'utilité & la néceflîté de cta
connoifïànces particulières , le chymifle
qui les poffédera ne fera encore qu'un
manœuvre , s'il ne les a combinées fous
la forme fcientifique d'un fyftêrae ; forme
fous laquelle nous achèverons de les préfen-
ter dans ce Dictionnaire. Va)'e\ les dif-^
férens articles y CalcINATION , ClMEN-
TATION , Distillation , Mixtion ,
Opération , Instrument , ^c.
Les trois règnes de la nanire dont nous
venons de faire mention , font trois gran-
des divifions dans lefquelles nous avons
diflribué les fùjets chymiques ; les miné-
raux , les animaux , les végétaux , remplifîenc
Cts divifions. V, AnIMAL , VÉGÉTAL ,
& Minéral.
Les corps de chacun de ces trois règnes
font difhngués entre eux par leur fimpHcité ,
ou par leur ordre de mixtion ; ils font àts
corps fimples , des mixtes , des furcom--
pofés , Ùc. caradere effentiel relative-
ment aux moyens par lefquels le chymifle
doit procéder à leur examen. V\ MiXTiON,
CH Y
L'anal}^ de tous les corps conipofes
nous a appris que chacun de ces corps
pouvoir fe réfoudre immédiatement en
d'autres fubilances eflentieilement diffé-
rentes ; qu'on pouvoit divifer celles-ci en
d'autres fubflances différentes auiîi en-
tr'elles , qui pouvoient être encore ou
iimples ou corapofees , & ainfi de fuite ,
jufqu'à ce qu'on fût arrivé par ordre jus-
qu'aux élémens qui ne conftituoient cuî^-
mêmes le premier ordre de compofition
que réunis plulieurs enfembie , & différens
en nature.
Ces différens corps dont nous venons de
parler , confidérés comme matériaux d'au-
tres corps plus compofés , les chymiftes les
ont appelles en général principes , & ils ont
donné le nom de premiers principes aux
corps fimples , qu'ils ont appelles aufïî e'ie-
mens ; & celui àe principes fecondaSres ou
principes principie'sy à ceux qu'ils pouvoient
décompofer ultérieurement. Voye:{ la doc-
trine des principes des Chymiftes y Vhiftoire
des erreurs fur cette matière de plujieurs
d'entr'eux y & celle des erreurs plus grojjîe-
res encore des Pk^^Jrciens qui les ont com-
battues y au mot Principe.
Si le Chymifte réuflit à réunir par ordre
tous les principes qu'il a féparés par ordre ,
& à recompofer le corps qu'il avoit analyfé ,
il parvient au complément de la démonllra-
tion chymique : or l'art a atteint ce degré
de perfeclion fur plufieurs objets efïentiels.
Voyei SynCRESE.
L'ufage , l'emploi des menfîrues dans
les opérations chymiques , nous a décou-
vert dans Its petits corps une propriété que
je généralife îbus le nom de folubilité ou
mifcibilité , {voye\ MiSCIBILITÉ , ) &
que je mets à la place de l'attradion de
. cohéfipn àes Newtoniens ; attradion qui
ne fauroit avoir lieu entre ces corps confi-
dérés comme matière , puifque la ma-
.riere , le fujet des propriétés des corps n'eft
qu'un être^bflrait , {i'oye\ PRINCIPES , )
& que les corps mifcibles ne s'attirent
entr'eux que félon certains rapports , qui
fùppoiènt néceflairement l'hétérogénéité ;
en un mot, par une propriété relative , &
nullement par une propriété zhÇoiue. Voye\
Rapport.
le puis démontrer auiTi que cette. folifc
CHY 3,
bilité en a(9:e ^ on l'union chymique , ( aulîî
bien que l'union agrégative ou l'attrac-
tion phyfique ) , cil fans celle contre-ba-
lancée par la chaleur, & non pas alternée
par la répulfion. Ainfi Je diffère des New-
toniens fur ce point à deux égards ; i°. parce
que je connois la caufe de la répulfion ,
qui eft toujours le feu ; 2". parce qiî"e je
confidere la cohéfibilité &la chaleur cofnme
deux agens qui fe contre-balancent & qui
peuvent fe furmonter réciproquement ; au
lieu que les Newtoniens confiderent l'at-
tradion & la répulfion comme deux phé-
nomènes ifolés, dont l'un commence quand
l'autre finit- Voyei Feu , MiSCIBILITÉ ,
Rapport.
Les rapports & la chaleur que nous avons
fubfi:itués à l'attradion & à la répulfion àes.
phyficiens modernes , font les deux grands
principes de tous les phénomènes de la
Chymie.
Voilà les premiers linéamens de ce qu'on
peut appelier ,/a/>zf /rria chymica. Quelques
demi-philofophes feront peut-être tentés dé
croire que nous nous fommes élevés aux
généralités les plus hautes ; mais nous favons
bien au contraire , que nous nous en fom-
mes tenus aux notions qui découlent le plus
immédiatemeht des faits & àes connoilîàn-
ces particulières , & qui peuvent éclairer de
plus près la pratique.
En effet , il ne feroit pas impoffible de
faire difparoître toutes ces diflindions que
nous avons tant multipliées ; tous ces
afpeds différens fous lefquels nous avons
confidéré les corps , en jetant là-defîiis un
de ces coups-d'œil lupérieurs , dans lefquels
on montre d'autant plus d'étendue dans le
génie, qu'on identifie davantage les caufes
& les effets. Mars ces efforts nuiroient à
la fcience pratique dans fous ceux qui n'au-
roient ni cette capacité de vue qui fait em-
braffer & les plus grandes chofes &: les
plus petites , ni cette aptitude qu'ont cer-
tains hommes extraordinaires de concen-
trer dans les méditations les plus abfîraites
toutes leurs facultés inteltedueîles , & de
fortir de cette efpece de léthargie philofo-
phique , où tous leurs fens font , pour ainfi
dire , fufpendus , pour en reprendre l'ufage
avec plus de vivacité , les difperfer avec
avidité- fur tous les objçts qui les environ-
32 C H Y
nent, & fe pafïîonner de l'importante &
curieuie minutie des détails.
Ce qui peut avoir quelque refîemblance
éloignée avec ces hautes contemplations ,
dans ce que nous avons expofé plus haut ,
n'efl qu'un fimple rél'umé de réflexions Cug-
gé^Qs par l'exercice immédiat des fens ;
ce n'efl que l'expérience de l'ouvrier , dé-
corée du vernis de la fcience. Exemple :
dans une opération chymique on a toujours
l'agrégation à rompre , &: quelquefois la
mixtion de certains corps à ménager ; donc
une des premières diilindions indiquées
par l'habitude du laboratoire , c'ell celle
qui établit les caraderes refpedifs de Y agré-
gation & de la mixtion ; deux expref-
îions premières & fondamentales dans
l'idiome chymique , qui fourniront feules
de quoi énoncer fcienrifiquement , c'eft-à-
dire , par leurs caufes prochaines , tous
Its effets de la chaleur employée dans le
traitement des difFérens corps. Ainfi la ma-
nœuvre dit : un certain degré de i'cu fond
l'or , diflîpe l'eau , calcine le plomb , fixe
le nitre , analyfe le tartre , le favon , un
extrait , un animal , &c. Et la fcience dit :
un certain degré de feu lâche l'agrégation
de l'or , détruit celle de l'eau , attaque la
mixtion du plomb & la compofition du
nitre , excite des réadifs dans le tartre ,
le lavon , un extrait , un animal. La ma-
nœuvre & la fcience ont pareillement leur
langage dans l'expoiition des phénomènes
de l'adion des menftrues. La manœuvre
dit ; l'acide nitreux trop concentré n'atta-
que point l'argent , mais étendu d'une cer-
taine quantité d'eau & excité par un certain
degré de chaleur , il le difibut. La fcience
dit : l'union agrégative de l'acide concen-
tré efl (îjpérieure à fon rapport avec l'ar-
gent , & l'eau ajoutée au menftrue relâche
cette agrégation que la chaleur relâche da-
vantage encore , Ùc. La manœuvre ne
générahfera jamais ; mais la fcience dira
plus généralement ici : dans tout ade de
difîblution , la tendance à l'union mixtive
furmonte l'union agrégative.
La Métaphyfique n'a rien dit d'une ma-
nière abllraite dans tous les principes que
nous avons pofés plus haut , qui ne puilîê
être traduit pour les objets particuliers en
C H Y
'de l'exécuter dans ces exemples , & réci-
proquement , ^c.
Mais fi la Chymie a dans fon propre corps
la double langue , la populaire & la fcienti-
fîque, elle a entre les autres fciences natut
relies , fa manière de concevoir ; comme
il efî: évident par ce que nous avons expoië
ailleurs fort au long , & par ce que nou$
nous étions réfervé d'ajouter ici pour ache-
ver le tableau de la Chymie par ce qu'elle
a de plus diftingué ; c'elt que la plupart des
qunl'tés des corps que la Phyfique regarde
comme des modes , font des fubffances
réelles que le chymifle fait en féparer , &
qu'il fait ou y remettre , ou porter dans
d'autres ; tels font entr' autres , la couleur ,
le principe de rinflammabiUté , de la faveur,
de l'odeur, ôv.
Quefi-ce que le feu , dit le Phyficien ?
n'eji-ce pas un corps échaujfe'à un tel point ^
qu'il jette de la lumière en abondance ? car
un fer rouge 6' bridant , qu^efi-ce autre chofe
que du feu .? Ù qu'efi-ce qu'un charbon ar-
dent ^Ji ce n'ejl du bois rouge & brûlant .?
Newton, Opt. quœft. 9. Cependant un
charbon embrafé efl: aufli peu du feu ,
qu'une éponge imbibée d'eau ell de l'eau ;
car le chymifle peut auffi bien enlever an
charbon , & montrer à part le principe
de l'infîammabilité , c'efî-à-dire , le feu ,
qu'exprimer l'eau d'une éponge & la rece-
voir dans un vailTeau. -
La couleur confidérée dans le corps co-
loré eft , pour le phyficicn , une certaine
difpofition de la furface de ce corps , qui
le rend propre à renvoyer tel ou tel rayon ;
mais pour le Chymifîe , la verdure d'une
plante efl inhérente à un certain corps réli-
neux verd , qu'il fait enlever à cette plante;
la couleur bleue de l'argile efl due à une
matière métallique qu'il en fait auffi féparer;
celle du jafpe , qui femble li parfaitement
une avec cette fubflance foffile , en a pour-
tant été tirée & retenue , félon la fameufè
expérience de Bêcher. *
Une obfervation qu'il efî à propos de
faire , c'efl que dans l'expofition des phé-
nomènes de la couleur , le Phyficien & fe
Chymifle difent feulement des chofes dif^
férentes , mais non contradidoires. Le
Chymifle fait feulement un pas de plus ;
Jgngage de manœuvre , comme nous venons . & il en fera un fécond , fi , quand vous
lui
Cy Y
lui demanderez en quoi confiée la cou-
leur dans cette réfine verte de la plante ,
ou dans cette fubftance métallique de l'ar-
gile ; il n'en ei\ pas encore réduit dans
fa réponfe à recourir à une certaine dif-
pofition occulte , & s'il connoît un corps ,
un être phyfique , une fubllance particu-
lière qu'il puiffê afligner comme le fujet
ou la caufe de la couleur : or il connoît
ce corps , favoir , le phlogiftique ; en un
mot , tant qu'il eft queflion des propriétés
des mixtes , le Chymide en trouve la
raifon dans leurs principes ou dans la mix-
tion même ; & il ne s'arrête jamais dans
cette efpece d'analyfe que quand il en eft
aux élémens , c'eft-à dire, à ces corps qu'il
ne fait plus décompofer. J^qy. PhlOGTS-
TiQUE , Feu , Inflammable, Sa-
veur , Odeur , &c.
Nous avons regardé jufqu'à préfent la
Chymie comme la fcience générale des
petits corps , comme une varte fource de
connoifTances naturelles ; l'application
particulière qu'on en a faite à dilférens
objets , a produit les diverfès branches de
la Chymie & les différens arts chymiques.
Les deux branches de la Chymie qui ont
été cultivées le plus fcientifiquement , &
qui font devenues par-là la bafe du tra-
vail , le vrai fonds d'expériences du chy-
lîiille philofophe , en même temps qu'elles
ont été les deux premiers arts chymiques ,
font l'art de préparer les médicamens ,
( voyei Pharmacie , ) & celui de traiter
les mines & de purifier les métaux , foit en
grand , foit en petit. Voye^ MÉTALLUR-
GIE é DOCIMASIE.
Les connoillances que la Chymie a four-
nies à la médecine rationnelle , peuvent
faire regarder auffi la théorie médicinale
tirée de ces connoifTances , comme une
branche de la Chymie , branche rrès-né-
cefîaire au médecin dans l'état préfent de
la médecine , foit pour l'admettre , foit
pour la rejeter avec connoifîànce de caufe ,
puifqu'elle eft principalement fondée fur
de prétendus changcmens très-chymiques
des alimens & des humeurs. Nous avoue-
rons cependant , quoiqu'à regret , que
ces connoifTances font bien moins éten-
dues , & fur-tout bien moins utiles à là
médecine-pratique , que ne l'a prétendu
Tome VIII.
Boerhaave , ( poyc^ xri ,f, ^^^^ jj
ujus chymice in medendo , } chez lequu
on retrouve toujours le dangereux projet
de déduire toutes les vérités vraiment mé-
dicinales des connoifTances phyfiques.
Voye\ Médecine.
C'efl: à defïcin que nous ne parlons pafi
ici de l'Alchymie. Foye^ PHILOSOPHIE
HERMÉTIQUE.
Le verrerie ; la manufadure de por-
celaine ; l'art àts émaux ; la peinture fur
le verre , qui n'efl pas un art perdu , mal-
gré l'opinion publique ; la poterie ; la
zimotechnie , ou l'art de difj^ofer certaines
fubflances végétales à la fermentation ^
qui comprend l'art de faire les vins , l'art
du brafîeur , & celui du vinaigrier , la
halotechnie , ou l'art de préparer les fets ;
la pyrotechnie ^ ou l'art àts feux d'arti-
fice ; celui du tanneur ; la manufadure
du favon ; l'art des vernis ; celui de gra-
ver à l'eau-forte ; la teinture ; la prépa-
ration des cornes, des écailles, & àz^
poils des animaux ; l'art du diflillateur ,
celui du confifeur,& celui du limonadier,
qui font proprement trois branches de la
pharmacie ; l'art du boulanger , panifi-
cium ,' la cuifine , Ùc. font àt?. arts tout
chymiques. Voyei^ ces articles particuliers.
Outre ces arts dont nous venons de par-
ler , & qui s'occupent efïèntiellement à
exécuter certaines opérations chymiques ,
il efl d'autres arts dont les opérations fon-
damentales ne font pas chymiques , mais
auxquels la Chymie fournit des fecours
effentiels. C'efl dans les produits chymi-
ques que la méchanique trouve Çts prin-
cipes de mouvement les plus efficaces : la
poudre à canon , dont tout le monde con-
noît l'emploi', la valeur de l'eau dans la
pompe à feu , Oc. les couleurs les plus
éclatantes & les plus durables qu'emploie
la Peinture, font des préfens de la CAj-.
mie\ &c.
La branche la plus curieufe & la plus
magique de la magie naturelle , efl celle
qui opère fes prodiges par les agens & fur
les fujets chymiques. Les phofphores , l'in-
flammation des huiles par les acides , les
poudres fulminantes , les èfFervefcenceî
violentes , les volcans artificiels , la pro-
duction , la deflrudior» & le changement
E
34 C H Y-
foudain ûes cpul--- ;^- -«iainc. Hqueurs ,
]^^ j,. j^?pirntions & les coagulations inel-
pér<^cs , &c. en négligeant même les pré-
tentions apparemment ehimériques fur la
divine pierre , les rajèuniflemens , le petit
homme .de "Paracelfe , les miracles de la
palingénéfie , &c. tontes ces merveilles,,
dis-jé , peuvent dans-cellecle éclairé même ,
étonner bien des gens , au moins les amufer.
iJ^qye^ RÉCRÉATIONS GHYMIQUES-
Les arts chymiques étant liés àhChy-
V'TiV générale comme à an tronc commun,
il fe prélente ici deux quellions trè , -im-
portantes , ce mefemble. i^. Jufqu'à quel
point chacun de ces arrs peut-il être cor-
rigé & perfedionné par la icieiice chymi-
que ? 2**. Combien la fcience phyiique
peur-eîle- être avancée à Ton tour par les
connoifîànces particulières , puifées dans
l'exercice de chacun de ces arts.
Quant à la première quefîion , il efl
évident que le chymifle le plus éclairé , le
plus inffi'uit , dirigera , réformera , per-
ieclionnera un art ebymique quelconque,
«ivec un avantage proportionnel à ies con-
jioifîances générales , à fa Icience ; à con-
dition néanmoins que fur l'objet particu-
lier de cet art il aura acquis cette faculté
de juger par fentiment , qui s'appelle coup-
A\œil chez l'ouvrier , & que celui-ci doit
« ritabitude de manier fon lujet ; car au-
cun moyen fcientifique ne fauroit fuppléer
à cette habitude : c'efr un fait , une vérité
d'expérience.
Quant à la féconde , la néceffité de le
Tciidre familiers tous les procédés,, toutes,
les opérations, toutes les manœuvres des
^rts chymiques , félon le confeil & l'exem
lAs. du grand Sthal ; elle nous paroit ab-
iolument indifpenfable pour 'le chymiffe
<]ui àfpire à embrafîêr fon art avec quel-
que étendue ; car nonrfeulement c'eft un
jpedacle trèsr curieux , très-philofophique ,
q.ie d'examiner combien les moyens chy-
Tviiques font variés & combinés' dans leur
application à des ulages particuliers , &
foiis". quelle forme le génie fe préfente chez
les ouvriers , où il ne s'appelle que bon
fens j mais encore les leçons de ce bo.;
i^tas , & i'induftrie , i'aifance » l'expérience
de l'ouvrier , lont des biens qu'il ne doit
pas négliger \ en us mot , il faut être
C H Y
artifle , artîfle exercé ^rompu , ne Çui-ce
que pour exécuter , ou pour diriger les
opérations avec cette facilité , cette abon-
dance de réflources , cette promptitude ,
qui en font un jeu , un délaflement , un
fpectacle qui attache , & non pas un exer-
cice long & pénible , qui rebute & qui dé-
courage néceffairement par les nouveaux
oblîacles qui arrêtent à chaque pas , &
fùr-tout par l'incertitude des liiccès. Tou>
ces phénomènes ifolés , ces prétendues bi-
zarreries des opérations , ces variétés des
pronuits , toutes cts fingularités dans les
refultats des expériences , que les demi-
chymilles mettent fur le compte de l'art ,
ou des propriétés inconnues des matières
qu'ils emploient , peuvent être attribuées
afïez généralement à l'inexpérience de l'ar-
tifte , & elles fe préfentent peu aux yeux:
du chymiile exercé. Il n'arrivera que très-
rarement à celui-ci , peut-être même ne lui
arrivera-t-il jamais d'obtenir un certain
produit : & de ne pouvoir jamais parvenir
à le retirer une féconde fois Ats mêmes
matières. L'artifie dont nous parlons ne
s'avifera jamais d'eflimer les degrés de cha-
leur qu'il emploie par le moyen des ther-
momètres , ou la flicceffion àcs gouttes
dans une diilillation , par la pendule à fé-
condes ; il aura , comme dilent très-fen-
fément les ouvriers , fon thermomeiie au
bout àts doigts , & fon horloge dans la
tête ; en un mot , il (e dirigera dans toutes
les manœuvres ordinaires , dans les- opé-
rations journalières , fur les indices grofîiers
&: fenfibies , qui font toujjurs préférables
à caufe de leur commodité , tant qu'ils
font fuffifans. Or- on parvient par l'ha-
bitude à eflimer avec beaucoup de pré-
cifion , par leur feul fccours , la plupart
des phénomènes chymiques ; & toutes les
mefures artificielles qu'on voudroit leur
iubftituer , font d'un emploi très-difîicile ,
pour ne pas dire impoflibie , & notam-
ment les thermomètres ^ aufîi ridicules
dans le tablier d'un chymilk manœu-
vrant , que dans la poche d'un médecin
vifitant fes malades. Mais ce n'eft pa;^ à
cet ava ifage que fe borne l'utilité de l'ha-
bitude du travail , c'efir dans les phénomè-
nes qui ea naiifenr à chaque pas , que le •
ch.ymiUe qui fait voir , puife les connoi(T
c H y
'fances les plus lumineufes , &: fouvent m.e-
TP.e les plus valles ; c'ef}-là qu'on trouvera
de ces phénomènes dont parle le chance-
lier Bacon , qui ne font rien en eux-mê-
mes & pour eux-raâmes , mais qui peu-
vent fervir de fondement ou de_ germe , de
point de partance à une théorie importante ;
exciter le génie du chyniifle , comme la
chute d'une poire détermina la méditation
de Newton, qui produifit Ion magnifique
CyûèmQ de la gravitation univerfelle. Au
relie , ce n'eft que pour ceux qui n'ont
jamais mis la main à l'œuvre , ou qui
n'ont jamais fu évaluer le mérite du chy-
mifle , formé par l'exercice , par les ades
répétés, qu'il efl: nécefîàire de célébrer les
avantages de l'expérience; car. quiconque
a vécu iix mois parmi les fourneaux , ou
qui fâchant ce que c'eft que la Chymie , a
été à portée d'entendre difcourir fur l'art ,
le plus profond fpéculatif &: l'aj-tiile expé-
rimenté , ne fauroit fe méprendre à la fapé-
riorité abfolue du dernier.
C'efl la néceiïlté de toutes ces connoif-
fances pratiques , les longueurs des expé-
riences chymiques , l'afliduité du travail
^ de l'obfervation qu'elles exigent , les
dépenfes qu'elles occalionent , les dan-
gers auxquels elles expofent , l'acharne-
ment même à ce genre d'occupation qu'on
rifque toujours de contracter , qui ont tait
dire aux Chymilles les plus fenlés , que le
goût de la Chymie étoit une paillon de tou.
Bêcher appelle les ChymiOes , cenum quod^
dam genus hominum exceniricum , hecero-
€litum , heterogeneum ., anomalum\ quipoi-
fedc en propre un goût fort fmgulier , qiio fa-
nîtas y pecunia y tempus Ù vita pcrdunmr.
Mais en prenant l'utilité abfolue des Sciences
pour une donnée, d'après laquelle l'opinion
générale nous autorife à railonner , ces diffi-
cultés & ces inconvéniens-là même, doivent
fîiire regarder les Savans qui ont alTez de
courage pour les braver, comme des citoyens
qui méritent toute notre reconnoiflâncc.
Mais cette paflion , quelque idée qu'il
faille en avoir , les hommes en ont-ils été
tourmentés de bonne heure ? A quel temps
faut-il rapporter la nailTance de la Chymie ?
C'eil un fait qu'il ne fera pas aufii facile de
mjiétermincr , que le degré de confviération
qVeîle lïiérite.
^.6 'H Y 3 5
IL Y A PEU D'ARTS dont les com-
mencemens foient plus obfcurs que ceux
de la Chymie. Les Chymiiles entêtés de fou
ancienneté , loin de nous inftruire fur. fon
origine & lur les premiers .progrès, parla
profondeur & l'immenfité de leurs recher-
ches , ne font pa-rvenus qu'à rendre tous
les témoignages douteux, à- force d'abufer
de cette, critique curieulement allomman-
te y qui confill? à enchaîner des atomes de
preuves à des atonies de preuves , & à en
former une maflè qui vous entraîne ou qui
vous effi-aie , '& contre laquelle il ne relie
que la reffource , ou de la raéprifer , ou de
la briler comme un verre , uno icïuy ou d'y
fuccomber en la difcutant.
Il vaudroit mieux fans doute fubflituer à
ces énormes toiles que l'érudition a'fi labo-
rieufement tilTues , quelque lylfême philo-
fôphique où l'on vît l'art lôrtir comme d'un
germe , s'accroître & prendre toute là
grandeur. Il eft au moins certain que fi ce
lylfême ne nous rapprochoit pas davantage
de la vérité , il nous épargneroit des recher-
ches dont l'utilité ne frappe pas tous les
yeux. Il eft cependant une lorte de curio-
fîté qui peut fe faire un amulèment philo-
fophique des recherches de l'érudition la
plus frivole , du férieux & de l'intérêt qu'on
y a mis ; & ce fera dans cette vue , autant
qu'il nous fera pofiible d'y entrer , que nous
allons expoler aux autres & nous reprélen-
ter à nous-mêmes le labyrinthe des anti-
quités chymiques.
Nos antiquaires chymiffes ne le font pas
contentés de fouiller dans tous les recoins,
de l'hifloire fainte & de l'hiffoire profane ;
ils fe font emparés des fables anciennes ;
& c'elî une chofe curieule que les efforts
prodigieux & les luccès fmguliers avec lef^
quels ils en ont quelquefois détourné le
fens vers leur objet. Leurs explications
font-elles pkis ridicules, plus forcées, plus
arbitraires , que , celles des Platoniciens
modernes , de Voiiius , dé Noël le Comte ,.
de Bochart , dé Kircher , de Ma",sham ^
de-Lavaur, deFourmont, & autrçs inter-
prètes de la Mythologie , qui ont vu dansi
ces fables la théologie des ancien^ , lei k
affronomie, leur phyfîque, leur agricul-
ture, notre hifloire faintç défigurée? Philpa
deBiblos , Euiebe, & d'après ceux-cfquel-
E 1
5^
C H Y
ques modernes , ont-ils eu plus ou moins f
de raifon que les premiers auteurs , de pré- ]
tendre que ce n'étoient que des faits hifto-
riques déguifés , & de reprocher aux Grecs
leur goût pour l'allégorie ? Qui font les plus
fous ou de ceux qui difcernent dans des
contes furannés la vraie Théologie, la Phy-
fique , & une infinité d'autres belles- cho-
ies ; ou de ceux qui croient que , pour y
retrouver des procédés chymiques admi-
rables , il ne s'agit que de les développer
& que de les dégager de l'alliage poétique ?
Sans rien décider là-defllis , je crois qu'on
peut affurer qu'en ceci, comme en beau-
coup d'autres cas , nous avons fait aux
anciens plus d'honneur qu'ils n'en méri-
toient: comme lorfque nous avons attaché
à leurs loix , à leurs ufages , à leurs infli-
rutions fuperftitieufès , des vues politiques
qu'apparemment ils n'ont guère eues. A
tout moment nous leur prêtons notre finef-
fc , & nous nous félicitons enfuirede l'avoir
devinée. On trouvera dans les fables an-
ciennes tout ce qu'on y cherchera. Qu'y
dévoient chercher des Chymilles ? des pro-
cédés ; &-ils yen ont découvert.
Qu'étoit-ce , à leur avis , que cette toi-
fon d'or qui occafiona le voyage des Ar-
gonautes ? Un livre écrit fur des peaux ,
qui enfeignoit la manière de faire de l'or
par le moyen de la Chymie\ Suidas l'a dit ;
mais cette exphcation eii plus ancienne
que Suidas : on la rencontre dans le com-
mentaire d'Euflhate fur Denis lePeriegete ;
celui-ci la rapporte d'après un Charax,
cité plufieurs fois dans un traité d'Herma-
lalis de Bifanee , dédié à l'empereur Jufti-
n"en ; & Jean-François de la Mirandole
prétend que le fcholiafle d'Apollonius de
Rhode , & Apollonius lui-même , y ont
fait allufion ; l'un dans cet endroit du fé-
cond livre de fes Argonautiques \ l'atitre
dans fon commentaire..
Ecfy.îietf. Hermès la fit d^er.
Le fcholiafte dit fur ce paflâge , hiyiiAt
^çva-ovv : on dit qu'Hermès la changea en
er en la touchant. Conringius , incrédule
en antiquités chymiques , ofe avancer-
qu'il n'efr pas clair dans ce? paflàges qu'il
C H Y
Si Ton a vu l'art de faire de Vor dans \m
fable des Argonautes , que ne pouvoit-on
■ voir dans celles du ferpent tué par Cadmus,
dont les dents femées par le confeil de-
Pallas, produifent Aqs hommes qui s'en-
tre-tuent ; du facrifice à Hécate , dont
parle Orphée ; de Saturne qui coupe les
tefticules au Ciel fon père, & lesjette dans
la mer , dont l'écume mêlée avec le fang de
ces teflicules coupés , donna naifîànce à
Vénus ; du même qui dévore fes enfans à
melure qu'ils naiffent , excepté le roi & la
reine , Jupiter & Junon ; d'Efculape qui
revLi'ifie les morts; de Jupiter tranfmué tvt
pluie d'or ; du combat d'Hercule & d'An-
thée ; des prodiges de la lyre d'Orphée ,,
de Pirrha & de J3eucalion ; de Gorgone
qui lapidifie tout ce qui la voit ; de Midas ,.
à qui Bacchus accorda le don fatal de con-
vertir en or tout ce qu'il touchoit; de Ju-
piter qui emporte Ganymede au ciel, fous;
la forme d'un aigle ; de Dédale & d'Ica-
re ; du nuage fc)us lequel Jupiter enveloppé
jouit d'Io , & la dérobe à la colère de Ju-
non ; du Phénix qui renaît de fa cendre ;^
du rajeuniflement d'^fon , ^c. auili Ro-
bert E)uval , R. Vallenfis , prétend-il dans-
un traité intitulé de veritate Ù antiquitate-
artis Chymicv , imprimé en 1602, qu'il n'y
a aucune de ces allégories dont on ne trou-
ve la véritable clet dans les procédés de la!
Chymie,
En effet , qiiel efl le vrai chymiffe , le
chymifle un peu jaloux de ce qui appar-
tient à fon art , qui pût fe defî'aifir fans vio-
lence de la fable àts travaux d'Hercule ;
de l'enlèvement àts pommes du jardin Aqs
Hefpérides, après la défaite du dragon qui
les gardoit ; de la deilruûion du lion de-
là forêt de Némée: de la biche aux pies:
d'airain, tuée fur le mont Menale , è'c.
Oh , fi les Chymiites avoient été plus éru*
dits, ou plutôt \qs érudits , (Kirchêr par
exemple ) plus chymiftes , quelle moiflba
d'interprétations à faire n'auroient-ils pas;
trouvée dans les fentences de Zoroaftre ,
les hymnes d^Orphée , les iymboles de
Pythagorej les emblèmes, les hiérogly-
phes, les tables myfiiques , les énigmes >:
les gryphcs , les paramies , & tous les au-
tres inllrumcns de l'art de voiler la vérité
foit queftion de l'art de faire de l'or, l dont on fe fervoit dans les temps où elle
*^
C H Y
^toit autant refpeaée qu'elle mérite de
l'être , où le peuple bien apprécié étoit jugé
indigne de la connoître, où l'on croyoit
que c'étoit la proftituer que de l'expofer
toute nue aux yeux du vulgaire , & où le
philofophe jaloux d'élever une barrière
entre lui & le refte des hommes, étoit
moins à blâmer de la manie qu'il avoit
de la cacher , que de celle de faire croire
qu'il la cachoit ; car on peut regarder la
première comme infiniment meilleure que
cette indifcrétion qui l'a divulguée depuis
par tant de collèges , tant de facultés , tant
d'académies plantées , comme difoit le
moine Bacon , in omni cafiro & in omni
burgo. Les douze clalTes ou chefs d'expli-
cations dans lefquels Kircher a divifé Ton
gymnajîum hieroglyphicum , le feroient ré-
duites par quelques connoifl'ances de la
Chymie , à la dixième feule , où il auroit
encore été infiniment moins court & plus
hardi. Si M. Jablonski avoit été chymifle ,
il le (croit bien gardé de voir dans la fa-
meufe table d'Ilis , fi heureufement fauvée
par le célèbre cardinal Pierro Bembo , du
fac de Rome par le connétable de Bourbon,
la fuite des fêtes célébrées en Egypte durant
toute l'année ; (i'ojei Mifcel. Berolin , tom.
VI.) mais bien au lieu d'un almanach
de cabinet égyptien , un table-au du procé-
dé divin de la tranfmutation hermétique.
Au refte , ceux qui feront curieux de favoir
comment les Chymifles l'emportent fur
les fimples érudits , comme interprètes de
l'hiftoire & de la fable , peuvent confulter
principalement Majeri arcana arcanorum
omniujn arcanijjlma ) & plufieurs ouvrages
de B. J. Fabre de Caflelnaudari , {Faber
Caftnnovidarienjis ,) médecin de Montpel-
lier , fur-tout ion Panchymicum , (on Her-
cules Piochymicus, & fon j4lchimifta chrif-
tianus.
Au lieu de ce^étaîl , voici une de ces
explications qui pourra récréer quelques
ledeurs ; elle efl: du célèbre Blaife Vigenere.
Cet auteur prétend qu'il faut entendre ,
par la fable de Prométhée puni pour avoir
dérobé le feu du ciel , que " les dieux en-
w vicrent le feu aux hommes y. pour ce que
» par le moyen d'icelul ils font venus à
» pénétrer dans les plus protonds & cachés
7> lècrets de la nature , de laquelle on ne
CHY p
ti peut bonnement découvrir & connoître
y) les manières de procéder , tant elle opère
>j ratiérement , fmon que par fon contre-
» pié , que les Grecs appellent S'iAKv<Tt% ,
» la réfolution & féparation des parties
» élémentaires qui fe fait par le feu , dont
« procède l'exécution de tous les artifices
» prefque que l'efprit de l'homme s'efl in-
» venté. Si que les premiers n'avoient au-
» tre inflrument & outil que le feu , com-
» me on a pu voir modernement èsdécou-
» vertes des Indes occidentales ; Homère ,
» en l'hymne de Vulcain , met qu'icelui
« affiflé de Minerve , enfeignerent aux hu-
» mains leurs artifices & beaux ouvrages ,
» ayant auparavant accoutumé d'habiter en
» des cavernes & rochers creux à guife àcs
» bêtes fauvages. Voulant inférer par Mi-
»> nerve la déefle des Arts & Sciences ,
» l'entendement & induffrie , & le feu
» par Vulcain qui les met à exécution.
» Par quoi les Egyptiens avoient coutume
» de marier ces deux déités enfembje ,
« {^mariage refpeclable ,) ne voulant par-
T> là dénoter autre cholê , finon que de
»> l'entendement procède l'invention de
» tous les Arts &: Métiers ; que le feu
» puis après eflèdue , & met de puifîance
» en adion ; nam agens in toto hoc mun"
» do y dit Johancius, non ejî aliud quàm
jy ignis & calor y
fy quePallas & Vulcain allumèrent, exci-
» terent , dit Homère ; qui fut la caufe ,
)j comme on peut voir dans Philoftrate ,
» en la naifîance de Minerve , qu'elle
» quitta les Rhodiens , parce qu'ils lui ia-
» crifioient fans feu , pour aller aux Athé-
» niens.n
Le chymifle le moins curieux des anti-
quités de fon art , ne pourra s'empêcher
de recourir à Philoflrate fur la citation de
Vigenere , & le moins enthouiiafk ne
pourra fe refufer à l'application qui le
préfentera à ion efprit de l'allégorie de
Minerve quittant les Rhodiens pour les
Athéniens , parce que ceux-là lui facri-
fioient fans feu. Sacrifier à Minerve fans
feu , dira-t-il avec tranfport , c'eff évidem-
ment s'appliquer aux recherches phyii-
3R C H Y
que.s , en négligeant les fecours de k Chy^
mis ; &: combien , en effet , continuera-
t-il , de facrifices- modernes faits fans feu
à Minerve phyficienne , portent le carac-
tère d'offrandes rejetées par la déeiîe ?
Quelques auteurs , ( à la tête defquels
on peut placer ce Fabre de Cafielnaudari
que nous avons cité plus haut,) dont la
manie de voir en tout & par-tout les hié-
. roglyphes de la Chymie^ ne s'ell pas épui-
iée fur les tables greques, égypti:i nés &
phéniciennes , le font encore Jetés & fur
les ouvrages allégoriques de l'ancien & du
nouveau Teflament, comme le Cantique
des Cantiques, & l'Apocalyple ; & furies
livre.it de fhillorique le plus poiifif:, tels
que le pentateuque , & les Evangéhftes :
travers dans lequel on ne fait s'il y a plus
d'irréhgion , que de fohe. Au refte , li
c'eft folie plutôt qu'irréligion , il faut
avouer que la manière figurée propre aux
■Orientaux , ne pouvoit guère manquer de
mettre en jeu des imaginations fi voifines
du dérèglement.
Mais de tous les auteurs qui ont écrit
en faveur de l'antiquité de la Chymie , nul
jie s'eft montré plus profond, plus férieux,
plus avide de témoignages, & plus adroit
à ourdir ces longs tifîlis , ou à accrocher
entr'eux ces atomes de preuves dont nous
avons fait mention au commencement de
ces confidérations hiiloriques, que le cé-
lèbre chymifle Olalis Borrichius , dans fon
traité de ortu & progrejju Chymiûe. Il fe dé-
clare , fans héfiter , pour l'opinion de ceux
qui font remonter l'origine de l'art juf-
qu'aux temps qui ont précédé le déluge.
Il eft dit au quatrième chapitre de la Ge-
nefe , de Tubalcain , qu'il fut malleator &
faber in cuncia gênera, œris Ù ferri. Tubal-
cain fut donc un chymifte ; " car Tubal-
« cain n'a pu inventer , forger , perfcc-
» tionner ces ouvrages , fans l'art de trou-
» ver les mines , de les tirer , de les gril-
« 1er , de les fondre ; toutes choies dont la
») découverte ne peut appartenir qu'à un
» elprit divin , bien qu'un fimple manœu-
» vre puifîé les exécuter, une fois qu'elles
») font trouvées.... Des ouvriers peu inl-
» truits de la Chymie peuvent , à la vérité,
« traiter des mines fous la conduite d'un
M diredeur : mais le premier inventeur a.
C H Y
» dû être chymifle, ce dlredeuf ne peut
»> le paflér de cet art.... Le premier brû-
)j leur de charbon préparera maintenant
>j la poudre à canon : mais (on procédé
» a coûté de profondes méditations , foie
j> à Barthold Swartz, foit à Roger Bacon. .
» C'ell au chymifle Cornélius Drebbel ,
» qu'on doit l'ufage du thermomètre & la
» découverte de l'écarlate , que les ou-
>j vriers les plus ignorans préparent au-
« jourd'hui ii parfaitement Ce n'eft
)j qu'après avoir conlumé leur vie à des
» expériences de toute efpcce , que les in-
>j venteurs parviennent à établir les arts
» fur des fondemens folides & invaria-
» blés.) Donc le malleatorTuhzlc^m étoic
un grand chymifle. Le Vulcain des an-
ciens & le Tubalcain de l'Ecriture , font
alfez unanimement reconnus pour un feu!
& même perfonnage : comment fe relufer
fur cela à l'autorité de Voffius , -A celle
de Bochart , & à la relîèmblance des
noms ? Or l'antiquité païenne a attribué
à Vulcain l'invention des ouvrages en
1er , en airain , en or & en argent , &
des autres opérations qui s'exécutent par
le moyen du feu. L'hilloire profane &
l'hifloire facrée font donc évidemment
d'accord fur l'exiftence de la Chymie anté-
diluvienne.
On fe doute bien que Borrichius n'a
négligé ni l'or de la terre d'Hevilat du
quatrième chapitre de la Genefe , ni les
témoignages de Diodore de Sicile : d'Ho-
merè , de Pindare , Ùc. ni celui de Philon
de Biblos : félon ce dernier , le Chryfor
ou Chryfaor , fixieme fucceflèur du Pro-
togonos de Sanchoniathon , ou de l'Adam
de l'Ecriture fainte , eft le même que Vul-
cain ; mais quel fcntimerît de reconnoiA
fance , le chymifte Borrichius n'auroit-ii
point eu pour un littérateur de fon temps ,
s'il s'en étoit rencontré quelqu'un d'affez
inflruit fur l'origine & la fucceflion des
anciens peuples , pour lui annoncer ,
alnfi que M. de Fourmont l'a fait depuis ,
que ce Chryfiior exifloit trois générations
avant Tubalcain , à qui il prétend que
V Ecriture n^attribiie pas en propres termes
r invention des ouvrage s enfer j mais feule-
ment de s'être mêle du métier plus qu'un
autre ^Ù d'iivoir été un illujlre propagateur
CHY
des ouvrages enfer.Vi. de Fourmont qui re-
connoîr clairement dans rEcriture tous les
perfonnages du fragment de Sanchonia-
thon , n'y retrouve point le Chryfaor ;. il ne
fait fi c'étoit ou non le même que celui
d'Hefiode : mais n'importe ,Borrichius vous
dira qu'il n'en fut pas moins chymifle ;
car , félon l'étymologie phénicienne de fon
nom , propofce par Bochart & adoptée par
M. de Fourmont , il fignifie celui qui tia-
r aille ou au feu ou dans le feu; ou félon M.
Leclerc ( rem. fur Hefiode , ) celui qui garde
le feu. Or la qualité de chymifte eft égale-
ment attachée à l'une ou l'autre de ces fonc-
tions ; car que peut-on avoir à faire au feu ,
cans le feu , ou autour du feu , finon de la
Chymie ?Donc , &<:. C- q. f. d.
Après cette démonllration fondée fur
les pafîages de la Geneie , que nous avons
rapportés ci-deffus , Borrichius a recours
à des autorités qu'un auteur célèbre a mifes
à Lnjr jufte valeur dans un difcours hil-
toii ue très-eilimé , fur l'origine & les
progrè.s delà Chymie. " L'utilité , les con-
" noifîances curieufes & étendues, voilà ,
» di cet auteur , le mérite d'une fdience.
}) Mais ce n'efl pas adèz pour les Chymif-
>J tes : ils font remontes dans les temps les
» plus reculés , pour y chercher l'origine
» de la Chymie ; jaloux , comme les autres
» favans , de leurs contemporains , ils
>' diminuent toujours la gloire qu'ils ne
" peuvent leur enlever ; prodigues à l'égard
'>' des anciens , ils leur tranfportent l'in-
»' vention&la perfedion de leur fcience :
n ils fcroient , ce femble ;, moins elHma-
?v blés il des anciens n'avoient penfé com-
r me eux.
» Dans ces idées , ils ont fouillé dans
>)■ les ficelés qui ont précédé le déluge.
» Moïfe dit dans la Genefe , que les enfans
» de Dieu s"^ allièrent auxfillesdes hommes :
» là-de(fus Zofime Panopolirc parle ainfi ;
?> il efl: rapporté dans les Livres faints qu'il
>r y a des génies qui ont eu commerce avec
»- les femmes ; Hermès en fait mention
» dans fes livres fur la nature : il n'efl
f) prefque point de livre reconnu ou
» apocryphe y où l'on ne trouve des vef-
» tiges de cette tradition. Ces génies
>r aveuglés d'amour pour les femmes ,
>/' leur découvrirerit les merveilles de la
CHY 39
« nature ; pour avoir appris aux hommes
w le itial & ce qui étoit inutile aux âmes ,
» ils furent bannis du ciel : c'efl dê^ ces
>y génies que font venus les géans. Le livre
jj où furent écrits leurs fecrets , fut inti-
yy tulé kema , &c de-là efl forti le nom de
» Chymie.
>i Voilà un des plus anciens écrivains
» chymifles , félon le témoignage de Con-
>5 ringius : ce qu'il avance ell appuyé d'un
t) auteur beaucoup plus ancien. Ajoutons,
» dit Clément d'Alexandrie dans (es tapi!'-
« feries , que les anges choilis pour habiter
w le ciel , s'abandonnèrent aux plaifirs de
» l'amour : alors ils découvrirent aux fem-
» mes des fecrets qu'ils dévoient cacher ;
yy c'efl d'eux que nous vient la connoif-
« fance de l'avenir , & ce qu'il y a de plus
)> relevé dans les Sciences. Il ne manque
yy à ce témoignage , ajoute Borrichius ,
» que le terme de Chymie. Mais la Chymie
yy n'efl-elle pas comprife dans ce qu'il y a
)j de plus relevé dans les Sciences ? Ce* qui
« embarraflé cet auteur , c'efl la fource
?j d'où Clément & Zofime ont tiré ce
» qu'ils avancent : il décide cependant
w qu'il y a apparence qu'ils ont lu cesfairs
« dans les fragmens des livres d'Enoch.
" Comment douter de cela ? Les anges ,
>j dit Enoch, au rapport de Sincel , ap-
» prirent aux femmes & aux hommes des
» enchantemen-s & les remèdes pour leur
>> maladie. Exael , le dixième des premiers
» anges , apprit aux hommes l'art de fa-
>j briquer dts épées , des cuirafTes , les
» machines de guerre, les ouvrages d'or
>j & d'argent qui peuvent plaire aux fem-^
>> mes , l'ufage des pierres précieufes & du
yy fard. Sincel , félon Borrichius , efl un
)j auteur très-digne de foi : plufieur:> faits
» hifloriques font venus jufqu'à lui de
)î Manethon , de Jule Africain , d'Eufebe ;
>> d'ailleurs le pafTàge qu'on vient de lire ,
>' n'efl-il pas foutcnu de l'autorité de Ter-
>j tullien ? Les anges qui ont péché , dit ce
») Père , découvrirent aux hommes l'or ,rar-
» gent , l'art de les travailler : d'orner les
yy paupières , de tendre la laine : c'cf'lpour
»> cela que Dieu les condamina , comme le
»j rapporte Enoch.
» Borrichius regarde ces paffagcs com-
?y me des témoignages authentiques : il dit
40 C H Y
» cependant qu'Enoch s'ei^ trompd. d:^
» anges dont il parle ne font pas de véri-
« tables anges ; ce n'eil que les defcen-
t) dct^s de Scih & de Tubalcain , peu
» dignes de leurs pères, Ils fe livrèrent aux
» plaiiirs honteux avec les femmes qui
>y deicendoient de Caïn : c'eft parmi ces
» voluptcs qu'ils divulguèrent les lècrets
» que Dieu leur avoit confiés. Après cette
» découverte , Borrichius laifle paroître
» un remords ; ce n'efl pas fans peine
r) qu'il reconnoît que la Cliymie ne vient
» pas des anges : un pafTage de l'Exode le
» confblc. Dieu dit à Moïfe : j'ai choifi
>5 Befeléel , de la tribu de Juda , je l'ai
» rempli de l'efprit du Seigneur & de fa-
» gefle pour travailler fur l'or , l'argent ,
t) le cuivre , le marbre , les pierres précieu-
V Tes , le bois. » Nouveau cours de Chymie^
félon les principes de Newton , 6" de Stahl ,
Difc.prélim.
Borrichius , après avoir un peu repris
couriige , ajoute une réflexion qui eft d'un
digne & zélé chymille , c'efl que cet art
de traiter les métaux , loin d'être contrai-
re à la volonté de Dieu , " a été infpiré
w par le foufHe immédiat de Ton efjprit
>j divin : & cela , non à un vilain de la
» tribu de Gad ou de Zabulon ; mais à
?■) un noble cerveau de la tribu de Juda : »
Non plebeio alicui Zabulonitœaut Gciditce\
fed nobili , exftirpe regiâ y ex Judce tribu ,
cerebro. Il efl certainement beaucoup plus
raisonnable & plus chrétien d'ennoblir
Ion art par une confidération telle que celle
de l'honnête Borrichius , que de crier
avec l'acariâtre Hecquet , que les miné-
raux préparés chymiquement, & nommé-
ment le kermès minéral , font des remè-
des pernicieux ; parce que les opérations
chymiques troublent les arrangemens in-
troduits dans les corps par la main du Créa-
teur y les pervertijfent y les altèrent , ou les
changent ; & qu'ainji la Cymie efl un art
diabolique , qui va à mettre la créature à la
place du Créateur ou de fes ouvrages.
Borrichius prend un intérêt fi chaud A
l'état de la Chymie ante-diluviennc , qu'il
fe feroit un forupule d'en avoir fiir la réa-
lité des monumens qu'il accumule : il n'a
pas le moindre doute fur l'authenticité des
livres de Manethon de Sebennys y prêtre
CH Y
d'HélopoIis , dédiés à Ptolémée Phlla-
delphe. Il efl convaincu que l'hifloire de
cet ancien auteur égyptien a été drefTée
fur de très - bons mémoires , tels , par
exemple , que les regiftres facrés & les
colonnes pubnques. Euiebe , ( Eufebius
Pamphili y) afîure, d'après les fragmens
de cet auteur , que Jule Africain nous a
confervés , que le premier Thoït , ou
Mercure égyptien , traça fur âts colon-
nes l'hifioire des fciences qui fioriffoient
avant le déluge. Certainement la Chymie
en étoit , dit Borrichius ; les caraderes
de Thoït furent hiéroglyphiques , & il
employa la langue (acrée ,* après le dé-
luge là dodrine fut traduite en grec ;
Agathodsmon ou le fécond Mercure ,
peie de Tat , l'écrivit dans des hvres :
mais encore en lettres hiéroglyphiques.
Les critiques ont apperçu dans ce pafTagc
une certaine bizarrerie , qui le leur a fait
rejeter avec mépris. Conringius & Stil-
lingfleet ont trouvé contradidoire que
Hermès eût écrit dans une certaine lan-
gue en caraderes hiéroglyphiques ; parce
que , félon ces auteurs , les caraderes hié-
roglyphiques peignoient les chofes , &
non des mots. L'auteur de l'efîài fur les
hiéroglyphes des Egyptiens , a rétabli la
leçon de ce pafTage , & fauve par - là la
contradidion : il a dit lettres [acrée s y au
lieu de caractères hiéroglyphiques ; &: il a
conclu delà que toute la bizarrerie du
pafî'age ne devoit plus réfider déformais
que dans la grande antiquité attribuée au
fait : car les lettres alphabétiques dont il
s'agit , dit cet auteur , furent en ufage
afTtz tard parmi les Egyptiens ; & une
dialede facrée fut introduite encore plus
tard parmi eux. Au relie , que les colon-
nes de Thoït aient pu réfifler aux eaux
du déluge , & fubfifler plufieurs fiecles
après cet événement qui changea la face
entière de la terre , Borrichius le prouve
par l'exemple des fameufes colonnes de
Seth , <lont une refloit encore debout dans
la terre de Seriad au temps de Jofeph
qui en fait mention , liv. I. ch. iij. des
antiq. judaïq. Quant à la tradudion >
Borrichius fe croit oMigé d'avouer qu'elle
pourroit bien n'être pas du fécond Mer-
cure > père de Tat , dont la naifîance
précé<j|f»
C H Y
précéda^felon lui , celle de la langue grec-
que ; mais du cinquième Mercure , ou
du dernier de Cicéron , que perfonne ,
ajoute fièrement Borrichius , ne prouvera
être mort avant la naiflànce de la langue
grecque Un Urlinus , & le lavant Con-
ringius , beaucoup plus connu que le pre-
mier , s'étoient déjà élevés contre les co-
lonnes , & avoient jeté des doutes lur la
bonne foi de Manethon : auiîi Borrichius
fe met- il fort en colère contre ces incré-
dules , qu'il traite cependant avec une
politefle qui n'écoitpas commune- dans les
favans de ces temps , iur-tout quand ils
avoient tort. Ceux qui feront curieux des
détails de cette difpute importante des fa-
vans que nous venons de citer, & qui
prendront quelque intérêî: aux colonnes de
Téioïc , n'ont qu'à recourir à Borrichius,
de ortu i!^ progrejDu Cliymiœ , & au traité
d'Hermanus Conringius , de hermeticâ
^gyptiorum l'etere , 6" P ar ace l forum no-
va doclnnâ. Au refte , ce premier Thoït^
ouïe Mercure ante-diluvien de Manethon,
pourroit bien être le Seth de l'Ecriture, &
l'hiftoire ou la fable des colonnes deThoït
& de Seth , ne regarder qu'un même fait :
on le prendra aufli, fi l'on veut, avec le
P. Kircher , pour l'Enoch de l'Ecriture.
Voilà le précis des preuves fur lefquelles
on établit la grande ancienneté de la. C/iy-
mie : il eft allez indifférent de les admet-
tre ou de les rejeter; & nous n'en parle-
rions pas davantage , fi elles ne nous fug-
géroienr une obfervation plus dans notre
^enre , & plus du goût général de notre
liecle, que la critique hiitorique que nous
en ferions : c'eft qu'il faut bien diftinguer
dans tout ce qui précède, les faits, des
indudions ; le pofitif , du raifonnement.
Convenons , avec Borrichius, qu'on a tra-
vaillé les métaux avant le déluge ; mais
n'allons pas en conclure que ces premiers
métallurgiftes fuflènt des chymiftes. Le
panijicium eft certainement du relfortde
Ja Ciiymie , ( voye\ FERMENTATION ;)
la cuiline eft une efpece de Chymie domel-
tique : cependant Adam eût' été plus avan-
-cé dans ces arts que nos meilleurs boulan-
gers & que nos plus parfaits cuifiniers ,
queiene lui donnerois pas le titre de chy-
mifie. Rien n'eft plus faux que toute in-
Tome VIII.
C H Y . . 41
vention foit le réfultat d'une vraie fcierice;
quelque difpolîtion que nousayions à taire
honneur aux favans des découvertes utiles,
nous lbmn.es forcés de convenir qu'on les
doit prefque toutes à designorans : & pour
tirer nos exemples de la Chymie y ce n'eft
point un chymifte réfléchiftant fcientifi-
quement fui les propriétés des corps, qui
a découvert la Teinture , la Vénerie , la
Poudre à canon, le Bleu de Pruflb, l'imita-
tion des pierres préeieufes, ô'c. ces inven-
tions nous viennent de manœuvres non
chymiftes ou de chymiftes marœuvrans.
Combien d'autres procédés curieux font
dans les mains de (impies ouvriers , & ref-
teront peut-être toujours ignorés des
grands maîtres. Les chymiftes profonds ,
les hommes de génie , font écartés par une
efpece de fatalité de toute recherche im-
médiatement applicable aux arts utiles; la
chaîne fcientifiquedes vérités les entraîne
à leur infu : occupés à en rapprocher les
chaînons , ils reftent indifférens & froids
furies objets moins intelltduels, & furies
recherches ifolées; & ce font ces recher-
ches qui produifent des arts: elles demeu-
rent en partage à des têtes heureufement
étroites , que le fenfible feul touche & fa-
tisfait. Le tranfcendant , le curieux, l'ou-
tré, le fubîime, l'abus de la fcience, en
un mot, eft feul capable de fatisfaire le
goût malade de ces génies prefque fupé-
rieurs à 1 humanité : tant pis fans doute
pour une fociété d'hommes, tant pis mê-
me pour leur propre bonheur ;" mais quoi
qu'il en foit , le fait eft tel , & l'expérience
eft pour moi.
Ce quiconftate^ félon les hiftoriensde
la Chymie^ le renouvellement ou plutôt la
naiflancede la Chymie peu de temps après
le déluge, c'eft qu'on trouve dès-lors des
arts chymiques exiftans ; qu'il eft parlé
dans quelques auteurs de l'art de tranfmuer
les métaux ; que d'autres en ont écrit ex-
preffément; & qu'on apperçoit dans plu-
fieurs ouvrages des veftiges épars descon-
noiftànces alchymiques.
La Métallurgie a été exercée dans les
temps les plus reculés, ce fait eft sûr; les
monumens hiftoriques les plus anciens
parlent de cet art , &: d'arts qui le fuppo-
fent ; l'ancienneté de l'ufage des remèdes»
F
4i C II Y
tirés des Tubilances métalliques, eft mani-
fefle par les écrits d'Hippocrate , deDiû(^
coride ^ de Pline , ùc. Les chroniques des
mines d'Allemagne en font remonter les
premiers travaux jufqu'aux temps fabu-
leux. Les mines des pays du Nord paroif-
fent encore plus anciennes, à en juger par
l'idiome de l'art , dont les mots employés
aujourd'hui par les Mérallurgiftes alle-
mans, font tirés des anciennes langues du
Nord. D'ailleurs les peuples du Nord ha-
bitant des contrées peu propres à l'agri-
culture , il étoit naturel qu'ils fe tournaf-
lent de bonne heure du coté à^s mines ;
c'eft une obfervation de l'auteur de l'ef-
prit des loix. L'art des embaumemens, qui
eft certainement trés-chymique , exifte
chez les Egyptiens dès l'antiquité la plus
reculée. Agatarchis & Diodore de Sicile
parlent de leurs mines. La Zimothecnie
^anaire ù vinaire , ou les arts de faire du
pain avec de la pâte levée , & de mettre
€n fermentation les fucs doux , font des
temps qui fuivent immédiatement le dé-
luge. Les arts de la Teinture , de la Ver-
rerie , celui de préparer les couleurs pour
la Peinture, & raéme d'en compofer d'ar-
tificielles , tel que le bleu faûice d'Egypte
dont il eft parlé dans Théophrafte ^ font
très-anciens. Il en eft de même de la con-
noiftance des mordans. Voici à ce fujet un
pafïàge de Pline qui eft très-remarquable :
Pingunt 6" rejies in Egypte inter pauca
mirabili génère , candida vêla pqftquam
attrivere illinentes y non colorihus^Jedco-
lorem forbentibus medicamentis. Hoc y
cîim fecere y non apparet in velis ; fed in
coninam pigmenti ferventis merfa pofi
momemum extrahuntur piBa : mirumque
cîimfit unus in cortinâ colory exillo alius
atque alius fit in vefie accipiends y medi-
camenti qualitate mutatus; ncc poftèâ ab~
lui poteft, Ità cortina non dubiè confufura
coloresyfipicios acciptretydigericex uno,
pingitque dum coquit : & adujîce veftes ,
firmions fiuntquàmfi non i/r^rf /imr.Pline,
nat. hift. lib. XXXV. cap. xj. Il eft auffi
fait mention dans les plus anciens auteurs
d'opérations halotechniques. Ariftotedit
cjue l'extraûion des fels de cendres eft en
wfage parmi les payfans de l'Ombrie ; &
y arron , chez certains peup^s des bord^ du
C H Y
Rhin. Pline parle d'un verre malléable
offert à Néron. Le même auteur décrit
aftez bien la manière de retirer l'or &
l'argent des vieux habits par le moye'n de
lamalgame. Cette opération a été décrite
auffi par Vitruve , &c.
Mais nous ferons fur ces preuves du re-
nouvellement de la ChymiâylQs mêmes ré'
flexions que nous avons faites fur celle de
fon exiftence avant le déluge ; nous dirons
que ces arts ne fuppofent pas la fcience.
La théorie de la Teinture eft bien pofté-
rieure à l'art. Onfondoit les métaux à tra-
vers les charbons , long-temps avant que
Stahl donnât l'admirable théorie de cette
opération. Ce n'eft pas d'après les princi-
pes de fon excellente \imotechnie , qu'on a
fait le premier vin. Ces fpéculations^quand
elles font juftes , peuvent fournir des vi||s
pour perfedionner les arts , & les étendre
à un plus grand nombf e d'objets. On cor-
rigera les vins ; on fongera à mettre en
fermentation des fubftances nouvelles.
Mais quant à l'invention direûe & fyfté-
matique des arts, de ceux fur-tout qu'on
peut regarder comme chefs , loin de con-
venir qu'elle foit due aux fciences , c'eft
une queftion de favoir ft elle peut l'être.
Mais en attendant qu'on la décide , nous
pouvons affurer qu'elles ont paru tard;&
qu'il y avoit des arts depuis long-temps ,
lorfque les progrès de la raifon, ou peut-
être les premières erreurs de l'efprit com-
binées , ont donné naiftànce aux fciences.
Quant à l'art de tranfmuer les métaux,
ou à r Alchymie, on peut le regarder com-
me ayant toujours été accompagné d«
fcience , & ne pas féparer le fyftêmede la
pratique alchymique. Le titre de philofo-
phe,defage, ambitionné en tout temps
par les chercheurs de la pierre divine ; le
fecret , l'étude , la manie d'écrire , ùc.
tout cela annonce les favans , les gens â
théorie. Les plus anciens livres alchymi-
ques de quelque authenticité,contiennen£
une théorie commune à la Chymie fecrete
ou Alchymie , &: à la Chymie pofitive ; &
quelque frivole qtf'on la fuppofe , elle n'a
pu naître que chez des favans , des philo-
fophes , àes raifonneurs , Oc.
Que TAlchymie doive fa naiflance à
1 E>jypre, cee na-w coranxis dsifciea-
CHY
ces , & qu'elle ait été cultivée parles hié-
rophantes ou prêtres de la nation ; c'eft un
fait qu'on avoue unanimement. En voici
les preuves les plus fortes: i''. L'étymolo-
;gie la plus naturelle du mot Chymie , eft
tirée de celui que PEgypte portoit en lan-
gue facrée, C/iem/a, félon Pîiitarque. Des
commentateurs prétendent à la vérité qu'il
faut dire Chamidy terre de Cham, premier
—fils de Noé , qui s'établit dans cette con-
trée après le déluge ; & les Septante l'ap-
pellent. C/iarn , (pf'il lO).) du mot hcbreu
kam : mais on lit dans Bochart , que les
Cophtes l'appellent encore aujourd'hui
Chemi. iS. Les écrivains les plus anciens
que nous ayons fur la Chymie^ font origi-
naires d'Egypte; tels que Zofîme de Chem-
nis ou Panopolis , Diofcorus , Comarius ,
Olimpiodore, Etienne, Sinefius, & autres
dont nous parlerons ailleurs. 3^. La maniè-
re dont on a écrit de la Chymie^ totafcri-
bendi & docendi ratio ., eft entièrement
dans le goût égyptien ; c'eft une didion
tout-à-fait étrange & éloignée du tour ordi-
naire , un ftyle énigmatique & annonçant
par-tout des myfteres facrés ; ce font des
caraderes hyéroglyphiques , des images
bizarres , des fignes ignorés , & une façon
de dogmatilër tout-à-fait occulte : or per-
fonne ne parte pour avoir gardé plus fcru-
puleufement cette circonfpedion que les
Egyptiens. Ces peuples fe font plus parti-
culièrement à envelopper leurs connoif-
fances dans des voiles ténébreux ; & c'eft
-delà qu'ils ont pafte dans les ouvrages des
Chymiftes. L'ufage des anciens auteurs de
Ctiymie d*apoftropher le ledeur cornme
fon propre enfant , jili mi , a bien l'air de
venir d'Egypte , où les fcicnces ne fe
tranfmcttoient que des pères aux enfans.
Mais quand il feroitplus clairement dé-
montré que l'Egypte a été le berceau delà
Chymie , il n'en feroit pas plus facile de
fixer la date de fa naiftance. L'adoption
générale chez tous les Chymiftes , d'Her-
mès pour l'inventeur & le père de la Chy-
mie , eft tout-à-fait gratuite. L'exiftence
même d'un Hermès égyptien, n'eft pasen-
cpre bien tirée au clair : il y a eu en Egypte
dix à douze Taut , Thor , Theut , Thoyt,
Thout : pour toi> ces noms , les Phéni-
ciens li'en avoient qu'ui» , Taaut i les
CHY 41
Grec«, quiîermès ; ceux d'Alexandrie, que
Thoor ; les Latins, que Mercure ; les Gau-
lois , que Teautates, qui tire fon origine
de l'égyptien Taautes , qui étoit très-évi-
demment Hermès ou Mercure : car ftloi\
Cfclar, Bell. gai. lib. VU. les druides des
Gaulois deum maxime Mercurium coluntf
hune omnium artium autoremferunt. Les
Rabbins l'appellent Adris y les Arabes
Idrisy un certain arabe Johanithon, &i\Qs
Barbares , ( ainfi qualifiés par un rabbin, )
Murcolis. Kircher fort en peine du nom
à^Idris , a découvert enfin dans l'arabe
Abenephi que c'étoit le même qu'Ofiris ,
que les Perfes appellent Adras. Nous
avons parlé plus haut d'Agothodemon.
Ce n'eft rien que la confufion de ces
noms , en comparaifon de celle qui naîd
de la multiplicité des perfonnes auxquelles
ils ont été appliqués. Sanchoniathon
compte deux Taaut ou Hermès ; la plupart
des anciens mythologiftes y trois ; quel-
ques-uns quatre ; & Cicéroncinq. Kircher
obferve , d'après plufieurs auteurs grecs ,
juifs & arabes , qu'un très- ancien Her-
mès , qu'il regarde comme l'Enoch fils de
Jared de la Genefe , s'étant illuftré parmi
les hommes , .ceux de fes fucceffeurs qui
ambitionnèrent la réputation de réforma-
teurs , d'inventeurs , de légillateurs , ^c.
prirent tous fon nom , & fe firent appel-
îer Hermès trois fois grand , trifmégijie ;
& que Zoroaftre , Ofirb & d'autres , fu-
rent tentés de ce titre.
Les Chymiftes fe font généreufement
départis de ce premier Hermès , placé
avant le déluge par ceux qui le métaraor-
phofent en Enoch ; & après le déluge ,
par Sanchoniathon & quelques autres.
L'auteur de Va/clepius, qu'on attribue à un
Mercure poftérieur à cet Hermès , recon-
noît lui-même qu'il a eu un aïeul plus
grand que lui , confilii pater y omniumque
dux ; c'eft cet aïeul , ce premier Hermès
dont il n'étoit pas permis de prononcer le
nom facré , quem nef as erat nominare. Le
vrai trifraégifte des Chymiftes n'eft poiïiC
cet ineffable ; ils fe font rabattus fur un des
féconds Mercures, & ils ont eu beau cham^
à le rendre phénicien avec Sanchonia-
thon , Phi Ion , Eufebe , & P»i, de Four-
mont \ égyptien avec Diodore de Sicile |
Fi
44 . C W Y .
Strabon , Kircher , Borrichius , ^c. greô
avec Cicéron , dont il fera le cinquième,
ou celui qui tua Argus , avec tous les
Mythologiltes grecs , & la plupart des
rnychologiiles modernes qui en ont bien
plus difcouru que d'aucun autre , quoique
grâce à l'habitude qu'avoient les Grecs de
voler à leurs voilins leurs héros , il foit le
moins réel de tous ; & enfin latin avec la
chronique d'Alexandrie : dans ce dernier
cas, il s'appellera Janus. Us ne fe font pas
trouvés moins à leur aife fur les qualités
dont il pouvoit leur convenir de le déco-
rer : il n'a tenu qu'à eux d'en faire un roi
d'Egypte ; puis un dieu du même pays , un
miniftre , un confeiller intime ou facré
d'Ofuis ; Oiiris même , un pédagogue
d'ifis , un Sii>hoas prince poftérieur ; Cha-
naan très-antérieur; Zoroailre que Kir-
cher prend pour Cham , & Borrichius
pour Mifraïm , le même que le fécond
Vulcain , le Vulcain égyptien d après le
déluge ; Eliézer intendant d'Abraham ,
avec M. de Fourraont, (car le Chronos ou
Saturne de Sanchoniathon étant évidem-
ment Abraham, félon M. deFourmont ,
il eft clair que le fécond Mercure ou le
Mercure de ce Sanchoniathon , eft Elié-
zer, ) un Melchifedech roi de Salem , de
la famille de Chanaan ; Jerhro beau-pere
de Moïfe : Moïie même ; quoique Con-
ringius dife qu'on ne fait (i ce Mercure fut
un homme ou un diable , ce qui met en
fureur Borrichius. Quelle fource dedifler-
tations ! il y a là de quoi occuper la vie de
dix mille littérateurs, & de quoi fournir
im ample fujet à lexclamation philofophi-
que : O curas hominum ! &:c. Mais les rê-
veries du philofophe feront-elles plus ef-
fentiellesaux yeux du littérateur ? hélas ,
Jion ! Iiu'icem prcvbemus crurafagittis; &
nous prêtons le flanc de bonne grâce: per-
fuadés que s'il peut y avoir quelque frivo-
lité dans nos occupations, elles n'en feront
pas moins philofophiques pour cela , pour-
xw que nous fâchions les eftimer nous-
mêmes leur jufte valeur. D'ailleurs la mi-
nutie de l'objet n'ôte rien à la fa^acité de
celui qui s'en occupe. Celui qui fatisfait
à une queftion très-obfcure & très-fuper-
flue , a montré une force de génie qui efl
jjn DKH abfolu ; & cette confidération
C H Y
doîtpaffer fans doute avant cellede notre
petit intérêt , dans le jugement que nous
portons fur le mérite des hommes.
Mais il eft toujours fort plaifantdevoir
nos chymiftes antiquaires s'abimer dans
des difculhons , & chercher parmi tous
ces vrais ou faux Hermès un inventeur à
la Chymie i tandis que de tous les anciens
écrivains , à l'exception de l'auteur de la
chronique d'Alexandrie, qui attribue à fon
Mercure 1 honneur d'avoir découvert l'or
& d'avoir fu le travailler, il n'y en a pas
un qui ait parlé de fon Hermès comme
d'un chymirte. Sanchoniathon n'en die
pas un mot. Diodore de Sicile , c ui s'efl
tort étendu fur les connoifTances d Her-
mès , ne parle point de cityràe. Rien ne
feroit donc plus gratuit que l'honneur que
nous lui ferions de l'agréer pour premier
patron. Il n'y a point de fcience à laquelle
il n'ait beaucoup plus de droit de donner
fon nom. C'efl" à propos de lien que notre
art s'eft appelle Xart hermétique. Pour
trouver des titres au fécond Hermès, Bor-
richius emploie le fecret avec lequel il en
cherchoitp.u premier. Rencontre-t-il quel-
que part qu'Hermès a inventé les arts & les
fciences , & qu'il a procuré aux hommes
des connoidànces miles? & pas conféquent
la Ciiymie , ajoute- t-il : puis il fe met à
quereller d'avance tous ceuxquipourroient
avoir du doute fur la folidité de cette con-
féquence. Cependant , n'en déplaife à Bor-
richius , la vérité eft que ce Mercure , quel
qu'il foit , ne nous appartient pas plus qu'à
aucune autre fcience, & que nous l'aban-
donnons à quiconque en fera rente. La fa-
hle d'érnerdade, Xafcleptus^ \q pœmandcr
en quatorze chapitres, qui font autant d'ou-
vrages différens ; le Mineri^a mundi) Vlu'
Lromatkematici , les fept chapitres de la-
pidis pnilofopnici ou p,'iy /ici fecretOy im-
primé dans le tneatrum cnymicum , ont
beau porter fon nom , on convient afîez
généralement aujourd'hui qu'ils ont été
forgés les uns plutôt, les autres plus tard,
àc qu'aucun de ces livres n'eît antérieur
aux premiers fiecles du ChriiHanifme.
Ceux qui font mention de la Cnymie foss
le nom de x'/j»'] .'«.«, font même les moins
anciens. V^oye\ là-de^Tus les aup. iy. *',
l'j. de la favante difïertation de Conrin-
CHY
gius far la médecine hermétique ancii^n-
ne & moderne. Cet auteur a tiès-bien ce'-
montré la fuppofition , le caractère & les
dates : rien n'eil plus vraifemblable que
les conjeclures par lefquellesil prouve que
l'un a été écrit par un platonicien , l'au-
tre par un chrétien , celui-là par un femi-
chiétien, celui-ci parunfemi-platonicien.
Au refta , qu'on s'en rapporte à l'incrédule
(]onringius, ou au crédule Borrichius, il
n'y a rien à tirer de ces ouvrages ni pour
laPhyfique, nipourlaC^j'w/^. Quant aux
36525 livres , qui font attribués à Hermès
par Jamblique, qu'Urfinus littérateur al-
lemand & homme qui croit peu aux fa-
vans très-anciens , traite peu poliment de
menteur impudent, foit qu'on prenne ces
livres pour des verfets ou pour des apho-
rifmes , comme l'explique Bochart , il n'e^,
eU rien parvenu jufqu'à nous que le renom
dans quelques auteurs affez anciens , &
fur-tout dans Clément d'Alexandrie qui en
donne les titres , & qui les réduit à qua-
rante-deux ; ce qui n'empêche pas Conrin-
gius d'en avoir toute aulîi mauvaife opi-
nion que de ceux qui nous relient. Mais
nous favons , pour la confolation des chy-
mifres , qu'aucun ne traitoit des chofes
chymiques , à moins qu'on ne prétende que
des fjx livres fur la médecine , le quatriè-
me où il étoit parlé des remèdes , ne con-
tînt des procédés chymiques.
Le minerpa mundi queConringius trou-
ve , quoique fuppofé ^f rugis ccgypùacœ ve-
teris fané plenus , attribue l'mvention de
la Cnymie à Afclepiusfilsd'Imuîh ; & c'eft
apparemment en vénération de la profon-
de fcience de cette Imuth inconnue , &
en reconnoifTance des grands avantages
dont la C/zy/72/V a gratifié le genre humain ,
queZozime le Grand a décoré fon livre
far la Cnymie du nom ^ Imuth.
C'eft dans le Mineri^a mundi que la
Ciiymie eft appellée ttoihIikh ; ce qui peut
avoir donné lieu aux anciens chymiftes ,
aux premiers philofophes ou adeptes , de
s'appeller K'x.r''i^îyj,T> yroinlctiy ouvriers par
excellence ; & de donner à leur art , ainfi
que le favantifïime Xhom^s Reinefius
iious l'afTure , variaram lecl. l. II. c. v. le
nom de -my^o-iç , que Kircher a traduit lit-
téralement '^zTpo'éfiei mais nous ne te-
C H Y ^ 45
nons pas tellement à cette qualité , que
nous ne puiifions la céder aux Poètes fans
coup férir. Si la Ciiymie perd le nom d'arf
par excellence , elle trouvera de quoi s'en
dédommager dans un autre qui lui a été
donné dès les commencemens, & qu'elle
mérite bien de conferver , celui dTspaf
;^\ /myAKtji Ti)yj>\? , d'arf grand &
facré.
Les prétendus veftiges de chymie , ap-
perçus dans les ouvrages de Moïfe & de
quelques philofophes & poètes grecs qui
avoient voyagé en Egypte , ou qui avoient
du moins vécu avec des voyageurs revenus
de ce pays , font tels que pour y voir notre
art _, il faut y être bien réfolu avant que
de les ouvrir. Ce fait de calcination du
veau d'or , par Moïfe, qui a donné lieu à
une diflertation de Stahl , où la partie
critique n'a fervi que de prétexte à la par-
tie phyfique , ne prouve nullement que
Moïfe fût chymifte ; une limple connoif-
fance ou fecret d'ouvrier fuffifoit pour
l'exécuter.Cependant Borrichius apperçoit
àQs traces très-évidentes de chymie dans
Orphée , Homère , Héfiode , Pindare ,
Sapho, Kippocrate, & Platon. Ctlui-ci ,
dit-il , n'a pas ignoré le grand principe
de l'art , conccrs concordi adhixret , dif-
cordia rebellant. Il trouve dans cette fen-
tence du Banquet le fondement folide de
toute la dodrme chymique , & la théorie
de toutes fes opérations, o\uoiov 0 f^ai et
ctit 'TTihci^ii , les femblables s'approchent
toujours des femblxbles ; la bafe de l'art
le trouve encore , félon lui , dans cette
autre fentence apportée par Démocrite
d Egypte , où elle étoit gravée dans le
fanduaire de Memphis , « ipyV/f Tn <pu(rn
riç'Tz-t'ia.i , lu nature aime la nature j 9 (p-Scrti
T«V (pjo-tv viKA , Il nature furmonte la
njture ; n (p-Jcri^ v.'i' (pJcnv Kpcinty la na^
tu:e commxnde à la nature. Il jureroit fur
la foi de Michel Pfellus, que Démocrite
d'Abdere fut initié aux myiî:eres égyptier s
avec les autres prêtres, par le grand Of-
thanes , & que les ouvrages qu'il compofd
fur la teinture du foleil & de la lune , ftr
les pierres précieufes & fur la pourpre ,
ont été le fruit de cette initiation. Diogene
Laerce , qui nous a laifTé une li^e qui pa-
roît exaéle des ouvrages de Démocrite ,
4(5 cnY ^
ne dit pas un mot des précedens ; mais
n'importe , Borrichtus a pour lui Diodo-
re de Sicile & Pfellus. On croit , dit
Diodore de Sicile , que pendant les cinq
ans que Démocrite pallà en Egypte , il
y profita beaucoup dans l'aftrologie. Ific
ne alLucinemur , dit Borrichius , à pro-
pos d^ ce pafTige , intuendam AJirologiam
jamolim diiplicemjaijfe fiiperiorem ilUm
exfiellarum cceleftium deportatis in terras
radiis penfant; inferiorum autem ex luctrt-
tibas illis magnœ matris telluris fyderi-
hiis , hoç ejl yfplendidis memllorumglebis
derivatam. Et hoç efiquod modo ex Ffello
ohfevatum nobis, Democritumfcripjrlfe de
tinclura folis à lunje y idejiy ut expref-
Jîori nomen elatum reddam defubtili co-
loratoqiie ex au.ro argentoque liquore. Et ,
pour achever ce tableau de la logique de
Borrichius & des littérateurs , il déduit de-
là l'ancienneté de l'ufagedes mêmes noms
pour les planètes & pour les métaux ; in-
dudion au fecours de laquelle il appelle
& les myfteres de Mitra , rapportés par
Celfe chez Origene , & Philoftrate , qui
raconte qu'AppolIonius de Thiare ayant
philofophé fecrétement avec le Brachmane
larchas , en reçut en préfent fept anneaux ,
fieîlarurn feptem nomimbus inf^nitos ,
qu'il mettoitfi Tes doigts félon les jours de
Ja femaine , & que Borrichius afl'ure , de
fonchef, avoir été faits de divers métaux,
qui portent aujourd'hui les noms de planè-
tes, & Platon & Manilius, ^c.
Borrichius finit cette difcuilion fur la
Chymie des anciens Grecs par un aveu qui
n'eft point de tout à fa manière , & qui lui
a échappé je ne fais comment. Il croit que
}es anciens Grecs ne s'entendoient pas eiu:-
mémes , & qu'ayant pris à la lettre ce que
les Egyptiens leur avoient délivré fur le ton
d'oracle , ils l'avoient r«j^sndu fans y rien
comprendre ; il lui pa'oît que ces Grecs
libajfe tantumartem chymicam ^non hhu-
Jiffe yfipaucifjlmos excipias;fed quantum
in praxi chymica profecerit yfve Demo-
€ritis^Jiye Homerusyfit Pitagorasyfive
Pindavusyfive denique primus Orpheus,
non difputantibusy contemi infcriptis eo-
rumdem manifejh{ce nianifejia eft admira-
i>Je ) Chymidcfpfâare vefiigia ipfisforfan
aueqri^Hs ^14^^ ab JEg)'ptiif audierant non
, C H Y
fatis quandoque imelUcla. Il ne ferolt pas
impoflible abfolumentque Borrichius n'eût
raifon; le foupçondu merveilleux fuffifoit
pour dét-erminer les poètes grecs à orner
leurs compofitions des logogryphes égyp-
tiens : ce ^alimathias une fois introduit
dans la poélie s'y eft perpétué ; telle eft peut-
être l'origine du rameau d'or deVirgile qui
a l'air très-chymique , qui eft chanté d'un
ton très-chymique , mais où le poète n'a
apparemment rien entendu de tout ce que
les Borrichiens y voient.
Au refte , ces oracles chymiques de l'E-
gypte , tranfmis juîqu à nous de poètes
en poètes, ne forment pas une tradition
afièz fûre pour prouver feulement que la
chymie exiftâten Egypte au temps ou Dio-
dore de Sicile , & tous ces Grecs dont on
ipouve le catalogue dans Diodore de Sici-
le, y voyagèrent. Ni cet hiftorien , ni
Diofroride fon contemporin , & médecin
de la fameufe Cléopatre , n'ont rien dit de
relatif à c^t art. Si d'un côté ladiftblution
affez prompte d'une perle confidérable ne
pouvant s'exécuter fans un menftrue dent
la préparation femble fuppofer des con-
noiftancesde C/iy/7z/e pratique, puifque le
vinaigre n'opère point cette diflblution ;
fi cette diflôlution , dis - je , fuppofée
vraie , prouve dans Cléopatre ou dans fon
médecin , quelque progrès dans l'art : d'un
autre coté , il eft difficile de comprendre
comment les Romairs fefont rendus maî-
tres de ces contrées;& comment les Grecs
y ont voyagé devant & après cette con-
quête , fans rien rapporter de cet art , &
qu'ils aient même ignoré qu'il y exiftâr.
Nous pourrions conclure de-îà que la
Chymie n'étoit pas encore enEgypte ; mais
nous laiftbns ce point indécis. Pour en
Grèce , c'eft un fait démontre ; car il n'en
paroît pas l'ombre dans les anciens au*
teurs , foit médecins , foit pharmacologif-
tes , tels que Théophrafte , Diofcoride ,
Galien , ni dans ceux du moyen âge que
nous appelions Medicince principe s. Qovn-'
ment un art qui promettoit tout en naiifant
de dévoiler aux hommes les fecrets les plus
cachés de la natu e , auroit-il pu exiftcr à
l'infu des philofophes ? Comment n'eft-i^
pas arrivé alors ce qui eft de tous les temps,
<Sc cç qui fe rtmarque il feniiblemçnç dé
C H Y
nôtre, que l'oftentation des connoifTances
n'en ait pas répandu quelques mots techni-
ques attrapés au hafard dans les compoii-
tions des poètes , des orateurs, des roman-
ciers? les hommes anciens n'étoient-ils
donc pas comme ceux d'aujourd'hui ? Les
écrivains n'employoient-ils que les termes
dont ils fentoient toute la force ? Ne cher-
choic-on point le relief des connoifTances,
foie réelles , foit apparentes? Maiili l'on
ne rencontre dans ces temps aucun mot de
Chymle bien ou mal appliqué; fi ce qui fait
dire aujourd'hui tant de fottifes n'en a
point fait dire plutôt ; s'il n'y a pas une
expreflîon chymique ni dans Pline , ni
dans Lucrèce , ni dans Celfe , n'eft-ce pas
que les Romains ont dû ignorer ce que
les Grecs leurs maîtres ne favoient pas en-
core ? Car il faut compter pour rien ce
que Pline dit de l'or que Caligula retira de
l'orpiment ; ce peut n'être qu'une opéra-
tion de Métallurgie fur un orpiment natif
mêlé avec de for.
On fonde une dernière preuve de la
Chymie des Egyptiens , fur l'immenferi-
chefTe de ces peuples. On prétend qu'ils fe
Tétoient procurée par la tranfmutation des
métaux , par l'œuvre divin ; comme s'il
n'y avoir que cette voie d'accumuler des
richedès , & que l'extrême difficulté de
cette opération , pour ne rien dire de plus,
ne dut point entrer dans le calcul de la
certitude d'un fait dont l'authenticité n'eft
point hiftorique. L'anecdote rapportée par
le feul Suidas , que Diociétien fît brûler
tous les livres de Chymit des Egyptiens,
parce qu'ils tiroientde cet art des moyens
de fe révolter , efl de l'invention de quel-
que chymifle du temps , j doux de l'origine
de fon art , qu'il ne pouvoit reculer au-
delà du règne de cet emper^îur , fans quel-
que fuppofjtion telle que celle qu'on nous
cbjeâe. Rien nous empêche donc de pro-
noncer que les antiquités chymiques font
pleines d'obfcurités & de conjedures j-uf-
qu'au commencement du quatrième fie-
cle ; qu'elles n'offrent aucun monument
important , & que le nom de l'art ne fe
trouve dans aucun auteur.
Julius Maternus Firmicus, qui écrivoit
au commencement du quatrième fiecle ,
ell le premier qui ait fait mention exprei-
e H Y 47
fe de X^iChymU^ il en parle comme d'une
chofe connue , Uh. III. de fa mathemat*
{Alathefeosj) encore Boerhaav^cdoiite-t-
il de 1 intfcgiité du texce dans cer endroit.
Sur la fin du même fîecle , JEnea^ Ga-
zeus s'explique clairement , & fur l'exif-
tence de l'art, & fur l'objet qu'il avoir
alors, favoir la tranfmutation des métaux;
ecium apudnosy dit-il, qui maceriœ péri-
dam habeiit^ argemum t^fiaimum capiunty
acpriorefpecie dbolitdyin augujiius ^prr-
tioftus coin'enUiu , aurumque puîcherri"
mum conficiunt. Il ne s'agit pas ici du
fait , qui peut être faux, mais du témoi*
nage qui efl vrai.
11 y a dans plufieurs bibliothèques de
l'Europe un corps d'ouvrages chymiques,
publiés fous les noms de Platon , d'Arif-
tote , de Mercure , de Jean Pontife^ de
Démocrite , de Zozime , d'Olimpiodore
le GratKl , d'Etienne le phiîofophe y le
Sophar Perfs^ , de Synefius , de Diofcorus
prêtre du grand Serapis à Alexandrie ,
d'Hoflanés appelle VEgypden , quoique
fon nom foit perfe , dfe Comarius égyp^
tien , de Marie , de Cléopatre , de Por-
phire , de Pebecius , de JPelage , d'Aga-
thodemon , de l'empereur Héraclius y de
Théophrafle , d'Archelaîis , de Petafius ,
de Claudien _, de Panferus , de Sergius ,
de Memnon le philofoohe, ^c. Il eft écrie
en note à la fin de cette lifte ,.dans lema-
nufciit de la bibliothèque du Roi ; Voilà
les maîtres fameux acuméniques & les
nouveaux interprètes de Platon ^ d'Arif'*
I tote. Pour les pays dans lefquels en vient
à bout de perjeclLonner cet œuvre divin ^
j ce font VEgyp.e, la Thrace, Vifiede Chy*
, pre ^Alexandrie ^(3 le temple de Memphis*
\ Au refle , ce manufcrit de la bibliothèque
I royale eft d'une main affez moderne.
Les bibliographes chymifles comptent
encore entré les auteurs œcuméniques un
Heliodore , un Anepigraphus , un Michel
; Pfellus, un Nicephore Blemmidas , dont
la plupart font de xj. fîecles , comme
Pfellus & quelques-uns même plus mo-
dernes. Maie ils mettent à leur titQ Moïfe
& Alexandre le Grand, dont ils ont des
ouvrages. Il eft vrai qu'on les regarde gé-
néralement comme des produdions mo-
dernes attribuées par des auteurs inconnus
48 C H Y
aux hommes les plus illuftres de l'antiqui-
té, tels que Démocrice, AriftoteiScPiaton;
Borrichius lui-même les abandonne com-
me desreflourcesdela ehailatannerie àes
aftrologues _, des auteurs de magie , des
alchymilèes , pour donner du lultre & de
l'cmtiquiré à leurs rêveries. Le fentiment
des littérateurs les plus iages, eft que ces
écrits ont été fabriqués ew dilFJrens temps
à Alexandrie & à Conltanrinopîe , par des
moines 6i. autres lavans , raliemblés enfuite
en un corps & portés en Italie, d'où ils
ont pafî'é en France , par les favans qui
fe répandirent dans l'Europe depuis le
commencement du '^v. fiecle jufqu'à la
prife de Conftantinople.
Ceux qu'on peut foupçonner d'avoir
réellement écrit les ouvrages qui portent
leur nom , tels que Synetius , Héliodore,
iiteur du roman de Theagene & Cha-
riclée , où l'on trouve une defcription du
grand œuvre , & quelques autres, font au
moins poitérieurs au règne de Conftantin
le Grand , & la plupart plus voilms en-
core de nos temps. Au refte , c'ell de I al-
chymie pure qu'on trouve.danscesauteurs,
i^ à prerd:e le mot même d'aic/iymie dans
fa plus mauvaife fignificarion. N'ayons
donc aucun regret à ce qu'ils foient incon-
nus & enterres /72a/iz//cT/fj dan ^ les biblio-
thèques; le petit nombre de ces écrits inin-
telligibles même pour les philofophes ,
qu'on a traduits (mal traduits) & impri-
més , n'ont fervi de rien , 6c il n'en a été
fait mention que ad pompim , & pour le
relief de férudition, témoins Boerhaave
& Agricola. Le premier s'écrie du fécond,
fiui ne fera frappé d'étonnement , quis
fdmperetab admirutiorie,quQ cet auteurqui
a écrit fon admirable ouvrage de re me-
tMicâ , il y a plus de deux cents ans , ait
ieu connoiffance de tous ces écrivains ?
Boerhaave exalte là très-mal adroitement
I érudition d'Agricola. Agricola n'avoir
jamais vu que lalifte de leurs noms, non
plus que Boerhaave lui-même ; car plu-
lieurs de ces auteurs ont écrit en ver5^
& Agricola dit qu'ils font en profe.
Il importoitde réduire ici l'autorité de
Boerhaave &d' Agricola à leurjuftevaleur,
jie fut-ce que pour empêcher que fur ces
Ifrands noms quelque littérateur, Chymif-
C H Y
te ou non , n'en entreprît une traduélio»
avec note & comm.encaire , projet qu'eut
autrefois un Léon Allatius , qui heureu-
fement étoit trop vieux pour l'exécuter,
mais dont l'inexécution n'en a pas été
moins déplorée par plufieurs philofuphes
modernes.
Voilà ce que nous avions à dire fur l'état
auciendela cuymie ; ceux qui trouveront
que nous nous fommes trop étendus, &
que nous nous fommes livrés avec excès à
cette curioiité , dont nous avons fuit l'é-
log'e en commençant cette hilloire, peu-
vent aifément nous abréger , en ne lifant
de tout ce qui précède que ce qui leur
conviendra : s'il y en a au contraire qui
penfent malheureufement pour eux que
nous avons été rrop courts , ils peuvent
voir la bibliothèque grecque de Jean-
Albert Fabricius^ les ouvrages de Conrin-
gius & celui de Borrichius , que nous
avons déjà t2intc\tés,\Q confpeclus fcripto-
rum Chymije celebriorwn du dernier, &
fa dilTèrtation contre Conringius. Ceqiift
concerne les premiers chymiftes y ell trcs-
dodement & très-prolixement difcuté. Au
refte , l'ennemileplus déclaré des antiqui-
tés chymiques , Conringius convien»- mal-
gré qu'il en ait , que cet art a exillé avant
le quatrième liecie ; que plufieurs ouvra-
ges qui en ont été écrit peuvent fe rappor-
ter au moins au cinquième ; & qu'il fut
enfuite cultivé par les Grecs pendant quel-
ques liecles , jufqir'à ce que les lettres &
les arts celferent chez eux par la prife de
Conftantinople, l'an 14) 2 ou 53. Et nous
ajouterons à cela que tout ce qu'il y a à
favoir fur ces auteurs grecs , c'efl qu'ils
ont éxifté, & que la chymie a été cultivée à
Conflantinople & dans les provinces de
l'empire, jufqu'à la prife de Conftantino-
ple par les Turcs , qui nous fit hériter , nous
autres occidentaux y des fciences & ^os
lettres auparavant plus fioriftantes dans ce
pays que chez nous : d'ailleurs on n'y
trouve rien qui ait pu fervir a l'établifîe-
ment de la chymie dogmatique , raifon-
née , n i mcn>e à l'art pratique. Ce ne font
pour nous que des artiftes occupés d'un
objet particulier , ( de la tranfmutation
des métaux , ) dont nous ignorons & la ma-
nière de procéder , & les inflrumens.
G'efl
C H Y
CeÛ cependant chez eux que s'efl inf-
truit Geber, dit Arabe ou More , apparem-
ment parce qu'il a écrit en arabe , mais
que les critiques les plus éclairés prétendent
grec ou perlan , & dont quelques auteurs
ont fait un roi. Il étoit né chrétien , & il
iè fit enfuite mahométan , félon Léon Afri-
cain. C'cil ce Geber qui a porté dans le viij
ûeclelac/iymie chez les Arabes, dans le temps
que ceux-ci adoptèrent les lettres avec le
mahoraétifme , un liecle après Mahomet.
Geber eil proprement le père de la chymie
écrite , le premier auteur , ou plutôt le pre-
mier coUedeur ( car tous ces premiers au-
teurs ne font que coUcdeurs ) des dogmes
chymiques , le premier qui ait rédigé en corps
de dodrine ce qu'on favoit avant lui : il ne
fé donne lui-même que pour un rtdxcleur ;
& \e proemium de Çonfummaperfeclionls ,
&c. commence ainii : Totam noftram fcien-
tiam quam ex diclis antiquorum abbrei'iai'i-
mus compilatione diverfa in nojîris volumi-
nibus y Sec.
Mais il a tout le frappant de ces inventeurs-
colledeurs. La fin alchymiqueà laquelle il di-
rige toutes fes opérations peut être chiméri-
que , ou pour le moins ne peut pas être rem-
plie par la plus grande partie de fes ledeurs ,
les moyens derniers ou prochains n'étant
point révélée; mais il n'en eft pas moins pofi-
tif fur les opérations fondamentales , qu'il
décrit avec une exaditude admirable, & dans
un (wère méthodique , &: qu'il accompagne
de confidérations très-raifonnéesfurleseiiets
particuliers des diverfes opérations , & fur
kurs ufages immédiats ; eniorte que relati-
vement à la (:/2//;2/f-pratique , & même à
une fuite deconnoiilances liées & ordonnées
dans, un rapport fcientifique fur les miné-
raux, les plus illuftreschymiil-es qui l'ont (uivi
jijfqu'aux HoUandus & à Bafile Vahntin ,
n'ont fait aucun progrès confidérable , fi
ce n'ell la découverte des acides minéraux
qu'évidemment Geber ne connoilîbit pas
C'efî donc à Geber que commence pour
nous la chymie philofophique ou raifonnée.
Ce que nous avons de lui palî'e pour n'être
qu'une médiocre partie de (es ouvrages.
Les Arabej ont continué de cultiver la
chymie après Geber. On trouve des traces
des connoiflànces chymiques de cette nation ,
dans des écrits traduits en latin & imprimes ,
Tome VIIJ.
V .
C H Y 49
de leurs médecins , de Rhafès , d'Avlcenne ^
de Bulchafim, de Méfué , de Rabby Moy-
fe, d'Averroës, d'HaU Abbas , d'Aliàravius.
Les ouvrages non imprimés de plulieurs au-
teurs qui ont écrit exprellément fur la chy-
mie , & dont Robert Du val donne une lifte ,
fontà-peu-près du même temps. Mais nous
obfèrverons fur tous ces auteurs ce que nous
avons déjà obfervé ilir les chymiftes grecs ,
que le fait hiftorique , la connoiffance iié-
rilc de leur exiftence , ci\ la feule chofe que-
nous puiilions en employer ici ; leurs ou-
vrages n'ont point contribué aux progrès de
l'art en foi ; enforte que de Geber juf--
qu'aux chymilles européens dont nous allons
parler, nous ne trouvons rien pour la fcien-
ce , pas même des copiftes de Geber. Il eft-
bon de (avoir que c'elt de la chymie phar-
maceutique qu'il eft toujours queiHon dans
les écrits des auteurs arabes traduits que nous
venons de nommer. Nous n'avons point le li-
vre qu'Avicenne avoit écrit fur l'alchymie
( qui de ce temps-là étoit la même chofe que la
chymie) , félon Sorfmus fon difciple , qui a
écrit lîi vie , & dont Albert le grand a fait
mention. Celui qui efl imprimé Ibus le nom
de célèbre médecin arabe dans la bibliothè-
que chymique de Menget , a été regardé par
les bons critiques comme fijppofé. Au refîe
ce font évidemment les médecins arabes qui
les premiers ont appliqué les préparations
chymiques aux ufages de la médecine , ou
qui font auteurs de la chymie pharmaceuti-
que. Fbyf;^ PHARMACIE. Nous ne parlerons
plus que de la chymie philofophique , fon-^
damentale , générale , nous réfervant de trai-
ter Ces diderentes branches dans des articles
particuhers ; & c'efl pour fuivre cet ordre
que nous omettons ici quelques auteurs pu-
rement alchymiftes de la même nation, tels
que Calid , Morien dit le Romain , &c. K.
Philosophie hermétique.
Vers le commencement du xiij^ fiecle ,
la chymie pénétra enfin en Europe , (bit que
le commerce que lescroif-^des avoient oc-
cafioné entre les Orientaux & les Euro-
péens eût tranfmis à ceux-ci les connoi(ran-
ces des premiers , ou que la tradudion que
l'empereur Frédéric II lit faire dans ce temps-
là , de plufieurs livres arabes en latin , les eût
mis à portée de puifer dans ces livres. Bien-
tôt le petit nombre de fa vans qui exi(toieut
5© C H Y
«lors , h reçurent avidement , comme chofe
nouvelle , & qui en promettoir de grandes ,
les richeffes & la fanté. Albert le grand ?
& Roger Bacon , tous deux moines , le pre-
mier dominicain , & le fécond cordelier y
font les plus diltingués de (qs premiers fec-
lateurs.
Ces deux hommes appartiennent à toutes
lesfciences, & fur-tout Roger Bacon. Ils
vivoient dans àcs temps où l'ignorance la
plus profonde régnoit autour d'eux ; ils pof-
fëdoient cependant une univerfaiité de con-
rtoillânces fi peu commune dans notre fie-
cle éclairé , qu'ils pafîeroient encore aujour-
d'hui pour des prodiges. On diroit au pre-
mier coup-d'œil , à voir la hauteur furpre-
cante à laquelle ils s'étoient élevés au-defllis
de leurs contemporains , ou qu'ils étoient
d'une autre organifation qu'eux , ou qu'ils
avoient eu d'autres moyens & d'autres oc-
cafions de s'inftruire ; mais la vraie raifon de
cette différence , c'eft que c'étoient d eux hom-
mes de génie , dont la lumière plus forte que
les ténèbres environnantes, s'échappoit en
tout (ens , par l'impoûibilité de demeurer
étouffée ; mais elle n'en étoit que plus of-
tenfante pour les autres hommes , dont elle
alloit frapper & bleller les yeux dans l'obf-
curité. Le propre du génie eff de marcher
par écarts ; ils en firent de tous côtés ; ils
s'élancèrent dans prefque toutes les régions
de la connoiïîànce humaine : & la chymie
fut un des principaux théâtres de leurs excur-
lions. Ils n'eurent garde d'àffeder pour cet
art cette efpece de mépris fi peu philofophi-
que que nous avons reproché , au commen-
cement de ctt article , à quelques philofo-
phes; mépris que n'eut pas non plus (pour
l'obferver en pafTant, à propos de la confor-
mité de nom , de patrie , & d'univerfalité) le
célèbre chancelier Bacon, qui, s'il ne fut pas
im chymiile commeRoger , peut pafler pour
un amateur dîffin^ué , & dont nous ne vou-
ions pas manquer de nous honorer.
Albert parle en phyficien inil.iiit par des
moyens chymiques , de la connoiflance des
fubffances métalliques , dans fes livres fur
les minéraux, & en homme qui connoif-
fbit les alchymiftes , leurs opérations , &
leurs livres ,& qui penfoit qu'on pouvoircn
tirer des connoiflances utiles A la phyfique
des minéraux. On lui a attribué un livre iur
C H Y
la chymie qui eff imprimé dans le feconcî
volume du théâtre çhymique , mais ce livre
n'eft pas plus de lui que les fecrets du petit
Albert.
Roger Bacon naquit en 12,14 j il ^^ fit
cordelier , les uns difent en Angleterre , d'au-
tres à Paris. Il mit Ariffote à l'écart pour
étudier la nature par la voie de l'expérience.
C'eft une obfervation prefque générale dans,
tous les temps , que ceux qui ont eu le cou-
rage de s'affranchir de la fervitude des mé-
thodes , des opinions , des moyens adoptés ,
fe font particulièrement diftingués par leurs
progrès. Il s'appliqua à la philofophie , lors
même qu'elle étoir profcrite comme une
fcience dangereufe. Celle d' Ariffote com-
mençoit à fe répandre par les verfions de
Michel Scot, de Gérard de Crémone , d'A-
lured Anglicus, d'Hermand Alemannus ,
de Guillaume Flemingus , mais avec toutes
les erreurs de ces mauvaifes traduâions y.,
erreurs par lefquelles Bacon ne palïà point.
Il mépriibit ces tradudeurs autant qu'il effi—
moit l'original , qu'il regardoit comme la
bafe de la icience. Il diftinguoit dès-lors le-
faux péripatéticifme qui a duré 11 long- temps , ,
de la vraie dodrine d' Ariffote. Pour voir,
combien il s'étolt élevé au-deflus de fon fie-
cle , il ne- faut que jeter les yeux fur le ju-
gement qu'il en portoit. Nunqwam , dit-il ,
fuit.tanta apparentiafapientiiSy nec tantum>
eaercitiumfiudii in totfacuhatibus, in tôt re—
gionibus ... .ubique enim doclores funti^dif-
pirjiy in omni civitate , €? in omni caflro , &
in omni bitrgo , qiiod non accidit niji à qua-
draginta annis vel circiter , citm tamen nun^-
quamfuit tanta. ignorantia y tantus error. A
cela près que nous fommes dans le chemin de
l'expérience, voilà un fiecle qu'on pourroit.
trouver reflembler un peu au notre. Bacon,
ajoute, pour finir la peinture de fon fiecle >,
apparemiaquidem fola tenet eos , & non cad-
rant quid fciant , fed quid, videantur fcire
coram multitudine infenfata.
Bacon fit des découvertes furprenantes
dans l'affronomie, dans l'optique, la chymie , ,
la médecine , & le? méchaniques. Il conçut'
la première idée de la réformation du calen-
drier juhen , & cela fur le plan même qu'on
fuivit fous le pape Grégoire XIII , plus de
300 ans après lui. Il a décrit exadement
les lunettes , la chambre ôbfcure , les tékf-
C H Y
copes , les miroirs ardens , Ùc. Quant à la
</îy /?:/>, notre objet particulier, l'honneur
de l'aVoir introduite en Europe lui eft dû
félon Freind ; mais contemporain d'Albert
1? grand , il elt au moins un des premiers qui
l'aient cultivée en occident. Bacon diloit de
fon temps , qu'il n'y avoit dans tout le
monde que trois hommes qui y entendifîènt
quelque cliofe ; Pierre de Marnarncourt étoit
un àts trois ; il l'appelle dominas experimen-
torum. Bacon parle de ptefque toutes les
opérations que nous taifons aujr)urd'hui. Il
a connu ou inventé la poudre à canon.
Freind foupçonne qu'il en avoit pris la notion
dans un manulcrit intitulé liher ignium , &
compofë par un grec nommé Marc ; manui^
crit que Freind avoir vu dans la bibliothèque
du dodeur Richard Mead , & que j'ai trouvé
auflî à la bibliothèque royale. La recette de
la poudre à canon n'eft pas moins claire dans
ce manufcrit que dans Bacon.
Le continuateur de Bayle prétend qu'il ne
Tortit point du couvent de Paris , quelque
plainte qu'il eût à taire des perfécutions qu'il
efî'uyoit de la part de Tes confrères ; & qu'il
ne retourna dans fa patrie que peu de temps
avant fa mort, qui arriva en 1392.. Cepen-
dant on montre vis-à-vis d'Oxford , fur
l'autre rive de la Tamife , une maifon qui
lui fervit d'afyle , lorfque l'ignorance & la
barbarie le contraignirent de fe fauver.
Le dodeur Jebb a donné Çon opus majus
à Londres , en 1733- Cet ouvrage efl bien di-
gne d'être lu par ceux qui veulent connoître
tout ce dont efl: capable i'efprit humain aban-
donné à (es propres forces.
Le célèbre difciple d'Albert le grand , S.
Thomas d'Aquin , a connu auffi la chymie ;
on trouve des vefliges de ces connoiflfances
dans ceux de fes ouvrages qu'on ne fàuroit
lui contefler.
En un mot la plupart des auteurs de ce
(iecle qui ont écrit fur la philofophie natu-
relle , ont au moins décoré leurs livres de
quelques mots chymiques , ou de jugemens
favorables ou défavorables à cette fcience.
On trouve fur-tout dans les auteurs de mé-
■decine de ce fiecle quelque remède chymi-
que. Voye-{ PHARMACIE.
Le plus célèbre d''entre ces médecins efl
Arnauld de Villeneuve , dont on ne fait pas
exadement la patrie , mais qui étoit vrai-
c H y ,t
femblaWement de la petite ville de Ville-
neuve fituée en Languedoc fur le Rlidne»
vis-i\-vis d'Avignon , où Borrichius prétend
avoir vu un baron de Montpefar , l^ de«
dcfcendiins d'Arnauld de Villeneuve , qui
lui donna des preuves de fon habileté héré-
ditaire en <:/iy/«i>. Le temps de fa naiffanec
qui n'efè pas certain , peut être fixé vers le
milieu du xiij° ûecle. On fait qu'il étudia
vingt ans la médecine à Paris , & dix ans
à Montpellier , & qu'il employa dix ans 3
vifiter toutes les univerfités d'Italie.
Arnauld de Villeneuve pafîe pour avoir
eu la pierre philofophale , & pour avoir con-»-
vaincu de la réalité de la tranfmutation Rai-
mond Lulle , auparavaat fort incrédule , par
une expérience faite devant lui. V. PHILO-
SOPHIE HERMÉTIQUE.
Arnauld de Villeneuve efl un ^ts méde-
cins chymifles qui a été le plus célébré ,
comme poffédaut un grand nombre de re-
mèdes admirables , & bien fupérieurs à ceux
qu'on préparoit par les opérations vulgaires:
c'efl lui qui a répandu le premier l'uiage de
l'eau-de vie j dont il a vanté les vertus mé-
dicinales ; mais dont il n'a pas donné la pré-
paration , qui étoit , dit-il , connue de plu-
fleurs aulli-bien que {^"s vertus , & dont tî-r
fedivement Taddée Florentin avoit fait
mention avant lui. Foy^^ PHARMACIE. Au
relie la chymie philolophique ne doit à Ar-
nauld de Villeneuve que fon célèbre difci-
ple Raimond Lulle.
Celui-ci né dans l'île de Majorque d'une
famille des plus nobles en 12.35 , & mort
en Afrique en 13 15 , efl un des philofophes
qui a fait le plus de bruit , & dont les aven-
tures , les moeurs , & la fcience , ont le plu$
de fingulariîés : on en a fait un hérétique ,
un martyr ; on l'a érigé en père de toutes
les fciences ; on a extrait de fès écrits un^
logique , une rhétoriqi^e , & une cfpece d'f /»-
cy dope die ; il {ait cependant fur-tout une
figure finguliere dans Fhifloire de la phi-
lofophie hermétique , ( J'qye;^ PHILOSOPHIE
HERMÉTIQUE ) & dans la chymie médici-
nale , par la prétendue médecine univert-
fèlle qu'il a propofée le premier. Voye^
Pharmacie.
Quant à la chymie pofitive , fon tefiamen-
mm novijfimum Car. régi dicatiim , efl plein
de coxinoilîànces , de préceptes, de règles
G 2
51 C H Y
•poiitives, principalement fur l'anal) Te du vin ,
la difîihition & la rcdification de l'elprit-
de-vin. Son traité intitulé expérimenta^ eu
rempli de faits intéreiîans. Il a beaucoup
employé dans tous Çqs procédés l'efprit-de-
vin , & divers menftrues tirés des végétaux
qu'il a beaucoup traités , & fur les fels dti-
quels il a des prétentions fmgulieres , & des
procédés fort bien entendus. Il a connu &
employé avec intelligence l'eau forte , dont
il décrit ex profejjo plufieurs préparations,
dans fon traité intitulé Clavicula ou aperto-
rium ; & cela par des intermèdes qui ren-
dent ces procédés très-dignes d'être répé-
tés par les chymilles qui lavent être curieux ;
jl s'eft fervi atilii de l'eau régale , dont l'u-
fage n'a été commun & appliqué aux tra-
vaux fur les métaux que près de cent ans
ïiprès ià mort. V. DÉPART. Il annonce dans
fon elucidatioteftamemi , l'athanor, cujiis in-
terpretatio , dit-il , efi immonalis ignis , & il
en célèbre l'ulage & l'avantage qu'il pro-
cure d'avoir un feu toujours égal. La deC-
cription de ce fourneau a été donnée dans
Je fiecle iuivant par Jean de la Roquetailla-
de , cordelier alchyraifte , plus connu fous
le nom de RiipeciJJa , à qui la chymie n'a
que cette obligation. En un mot les ouvra-
ges de Raimond Lulle font, après ceux de
Geber, le premier tréfor pour la chymie
philofophique , & contiennent des maté-
riaux précieux pour l'établiflement de la théo-
rie. Au refîe ce bon efl: mêlé à beaucoup de
fatras alchymique , quoique peu confondu ,
^ ramafTé en pelotons alTez dillincts.
Bafile Valenrin ç{\ regardé communément
comme un moine bénédidin de l'abbaye
d'ErfFort , dans l'éledorat de Mayence ,
quoiqu'on ait dit depuis qu'il n^y avoit ja-
mais eu une abbaye de bénedidins à ErfFort ,
& qu'évidemment quelque chymifte avoit
Toulu fe cacher fous ces deux noms , Tun
tiré du grec & l'autre du latin ; mais Jean
"Maurice Gudenus , c-ms fon hijîoire de la
yille d'ErJfcn , le réclame à fa patrie , en
afllirant que Bafile Valentin avoit été moine
dans l'abbaye de S. Pierre , & qu'il s'étoit
.diftingi?^ par une- connoifîànce profonde
de la médecine & de la nature. Nous avons
fous le nom de Bafile Valentin , quel qu'il
i(>it, plufieurs ouvrages qui annoncent un
chymilte tiès-laborieux & trçs-verlë dans
C H Y
la pratique de la chymie pofitive , & dirigé
dans ihs opérations par une méthode rai-
fcnnée. La plupart des procédés connus fur
l'antimoine font exactement décrits dans le
traité fur ce minéral , qui porte le titre de
currus triumphalis amimonii , qui a donné
lieu à plufieurs commentaires , entre lefquels
on eflime fur-tout celui de Pierre- Jean Fabre
de Caflelnaudari , & celui de Théodore
Kerkringius ; mais il efl tombé dans un qxccs
dangereux lorfqu'il a attribué des vertus mé-
dicinales à toutes les préparations qu'il a
tirées de l'antimoine. C'efî fon autorité qui
a fondé la vogue qu'eurent les remèdes an-
timoniaux que les charlatans employèrent
indiflindement & fans précautions , & par
conféquent avec toutes les fuites funcftes de
la témérité , jufqu'à ce qu'enfin la fameufe
guerre élevée dans le fein de la faculté de
Paris à l'occafion de ce demi-métal , toute
ridicule qu'on efl contraint de la trouver,
occafiona un examen plus férieux des pré-
parations antimoniales , étouUa les préju-
gés , & détermina la valeur réelle de ceux
de ces remèdes dont nous tirons le plus de
fecours , aujourd'hui que nous avons appris à
les manier. T'-^.MÉDECINE 6'PhARMACIE.
Bafile Valentin paroît être l'auteur des trois
principes chymiques ; mais on ne fait pas
afîéz jufqu'à quel point il partage cette dé-
couverte avec les HoUandus dont on ne con-
noît pas exadement le temps , non plus que
celui de Bafile Valentin. On peut pourtant
placer le dernier vers la fin du quinzième
fiecle , lorfque les maladies vénériennes com-
niençoient à être connues ; car il indique des
remèdes contre cette maladie.
Kàac & Jean-Ifaac Hollandas ou le hol-
landois , natifs de Stolck , petite ville de Hol-
lande , & que l'on regarde comme à-peu-
près contemporains de Bafile Valentin , ont
été de célèbres artifles y comme le prouvent
leurs difFérens ouvrages , dont les plus habi-
les modernes , M. Stahl lui-même , & fur-
tout Kunckel , ont fait un cas lingulier. Ils
ont particulièrement travaillé fur les mé-
taux, & c'efl à eux qu'efl due la manière
de procéder à leur znzlyÇç. par la réverbé-
ratioa de la flamme, que les chymiftes Ic^
plus intelligens ont regardée comme une voie
de procéder dont on pouvoir fè promettre
les avantages les plus marqués* V. RÉYER-*
C H Y
BERE. Ces chyraiftes paroilTent avoir eu des
notions fort diftindes de deux des princi-
pes de Bêcher. Ifaac & Jean-Ifaac Hollan-
dus , qui palTent pour père & fils auprès de
quelques-uns , ne font regardés que comme
un feul & même arrille par quelques autres.
C'eil: évidemment de ce ou de ces Hollan-
dus & de Baille Valentin , que Paracelie a
tiré une partie de les connoilîances chymi-
ques , & fur-tout fa fameufe dodrine des
trois principes.
Paracelfe efl un àts plus finguiiers per--
fonnages que nous prélente Thifloire litté-
raire : viiionnaire , fuperrtitieux , crédule ,
crapuleux , entêté des chyraeres de l'aliro-
logie , de la cabale , de la magie , de tou-
tes \t^ fcienccs occultes, mais hardi, présomp-
tueux , enthoufiafîe , fanatique , extraordi-
naire en tout , ayant fu fe donner éminem-
ment le relief d'homme pafîionné pour l'é-
tude de fon art ( il avoit voyagé à ce def-
fein , confultant les favans , les ignorans ,
les femmelettes , les barbiers > £"c. ) & s'arro-
geant le finguHer titre de prince de la mé-
decine , & de monarque des arcanes , ^c.
Il a été l'auteur de la plus grande révolution
qui ait changé la face de la médecine ( i'oye\
Médecine & Pharmacie) ,& il a fait
en chymie la même figure qu'Ariliote a fait
en philofophie. C'ell Paracelfe qui a été le
propagateur de la fameufe dodrine des trois
principes qui ont pris fon nom , dont tant
de chymiftes manoeuvres ont abuié , que tous
les chymilles-philofophes ou les vrais chymif-
tcs ont toujours rellreinte & redifiée, &
que les phyficicns ont toujours li mal com-
battue. Voye\ Principes. Les écrits chy-
miques & phyfiques de Paracelfe font , ex-
cepté fon manuel & un petit nombre d'au-
tres qui ne lontpas encore fort clairs , ab-
fblument inintell gibles , tant à caufe des ex-
preflions barbares & purement arbitraires
dont il s'eft fait un jargon particulier , qu'à
caufe du fatras, du défordre, de l'inconfé-
quence , & des fréquentes contradidions
Si la fublimité que ce ton pe«t préienter à
certaines têtes , & liir-tout a des têtes chy-
milîes , a dû lui faire un grand nombre de
partifans ou de fujets (il s'appelloit monarque^
&des chymifîes l'ont appelle leur monarque
ou leur roi) , elle n'étoit pas fi propre , ce
femble , à lui faire de célèbres ennemis ; à
CHY 5,
niluftrer magnis odiis. Il a eu pourtant aulîî
cette iource de célébrité. Sondifciple Opo-
rinus, Eraflus ion compatriote &: prcfquc
fon contemporain , Libavius , le favant Con-
ringius plus récent que Paracelfe d'un fiecle
entier, & pluheurs autres , ont été fes en-
nemis déclarés parmi les chymiftes ( car il a
été encore plus en butte aux médecins ; ) &:
ils l'ont traité même affez injuftement à quel-
ques égards.
Philippe Auréole Théophrade Paracel-
fe , Bomball: d'Hoheneim ( car cci\ ainfi
qu'il le faifoit appeller) , naquit en 1493 ^
Éinfiedel, près de Zurich en Suifiè , &
mourutàSaltzbourg dans un cabaret en 1 541.
Quel que foit le mérite réel de Paracelfe ,
il ell évident que c'efl à lui qu'efl due la
propagation & la perpétuité de la chymie.
C'efî le goût pour les remèdes préparés par
les fecours de la chymie , que Paracellè a
finguliérement répandus & accrédites , qui
a fait pafTer cet art chez les médecins com-
me étude élémentaire ; ce qui a produit une
quantité confidérable de traités de chymie
pharmaceutique & médicinale , qui ont été
pendant un fiecle les livres élémentaires &
clafîiques de la chymie^ & fur-tout tant qu'elle
n'a été que l'art de préparer des médicamens
plus agréables , plus falutaires, & plus lûrs ,
comme le définit Béguin , un des plus anciens
difciples de Paracelfe.
Les chaires établies dans les écoles de
médecine vers le milieu du dernier liecle ,
ont rendu l'étude de la chymie plus propre
encore aux médecins ; & fi cet événement
l'a trop circonfcrite , & l'a même expofée
à une théorie arbitraire & gratuite , par la
licence d'expliquer trop ordinaire aux méde-
cins , il faut convenir aufli qu'il a été utile
pour la chymie philofophique , qu'elle tom-
bât en partage à des gens de lettres munis
de toutes les reifources que les études élé-
mentaires peuvent fournir pour fe diriger
avec goût & intelligence dans l'étude des
fciences. Auffi faut-il rendre aux médecins
cette julfice : tous les progrès éclatans de la
chymie leur font dûs , ainfi que laperfedion
où font portées aujourd'hui \qs deux bran-
ches les plus avancées de l'hifloire naturelle,
l'anatomie & la i)Otanique. Ce n'eil même
que depuis que les fciences fè font répandues
comme par une forte de débordement >
54 C H Y
que la chymie philofophique efl fortie du
fein de la médecine , où font encore au-
jourd'hui le plus grand nombre des artiftes ,
les vrais gens du métier : les autres ( exxepté
hs dircdeurs des grands arts chymiqucs,
clafîe qui ne peut fournir qu'un ou deux chy-
mifîes à chaque nation ) n'étant proprement
qu'amateurs.
Quant aux avantages que la chymie fon-
damentale & élémentaire peut tirer de toutes
ces c:/iy/;7/>i' pharmaceutiques & médicinales
dont nous venons de parler , il eft clair que
les introdudions dont la plupart font pré-
cédées font infuffifantes aujourd'hui , du
moins par leur brièveté , & quelques-unes
même parce qu'elles ne font pas chymiques ,
où qu'elles font en très-grande partie une
fuite d'erreurs chymiques , & que le fond
même de ces ouvrages eft un recueil de pro-
cédés fans (liire & fans liaiion. Ces traités
de chymie pharmaceutique peuvent cepen-
dant diriger utilement les commençans dans
!e manuel d s opérations , dont ils contien-
nent ks principaux exemples , toujours plus
utiles dans rmîHtution à la pratique des arts
que les règles générales , ou du moins qui
les doivent précéder : ils peuvent encore grof^
iir la récolte de faits y à laquelle le chymifte
formé cft fi attaché , & dont il fait tant de
cas ; car on trouve d^s procédés particuliers ,
des obfervations importantes, des découver-
tes de détail dans quelques-uns de ces au-
teurs j parmi lefquels nos françois , Béguin ,
Lefevre , Charas , & Lemery le père , tien-
nent un rang difîingué , & particulièrement
Xefevre , grand réformateur en pharmacie.
VcA^e:^ Pharmacie.
Pour revenir aux temps qui fuivirent im-
médiatement Paracelfe , trois chymiftes cé-
lèbres qui ne doivent rien à Paracelfe , la-
voir , George Agricola , Lazare Ercker , &
Modeftin Fachs , iilullrerent une branche
de la chymie des plus étendues & àzs plus
utiles , je veux dire la métallurgie : le
premier peu d'années après la mort de Pa-
racelle ; Ercker & Fachs lui ont fuccédé
d'affez près. Voye^ MÉTALLURGIE 6"
DOCIMASIE.
Il exifta , dans le même temps que ces cé-
lèbres métallurgiftes , un homme véritable-
ment fmguHer : Bernard Palifly , Sainton-
j^pois ;, c^ui a pris 4 la tête de lès ouvrages
C H Y
imprimés à Vm$ , 1580 , le titre à^ïnvenunr
des ruftiquesfigulines du roi & de la reine fa
mère. Cet homme qui n'étoit qu'un fimplç
ouvrier , fans lettres , montre dans Ççs dif-
férens ouvrages un génie obfervateur , ac-»
compagne de tant de fagacité & d'une mé-
ditation fi féconde fur les obfervations , une
dialedique fi peu commune , une imagina-.
fion fi heureuie , un fens 11 droit , des vues
li lumineulès , que les gens les plus formés
par l'étude peuvent lui envier le degré même '
de lumière auquel il eft parvenu làns ce
fecours ; & cette tournure d'efprit qui l'a
fait réfléchir avec fuccès, non-feulement
iur les arts utiles & agréables , tels que l'a-
, griculture , le jardinage , la conduite des
eaux , la poterie , les émaux , mais même
fur la chymie , l'hiftoire naturelle , la phyfi-
que. La forme même des ouvrages de Pa-
lifCy annonce un génie original. Ce font des
dialogues entre théorique è^ pratique:, & c'eft
xoU]ouY s pratique qui inftruit théorique , éco-
here tort ignorante , fort indocile & fore
abondante en (on fens. Je le crois le pre-
mier qui ait fait des leçons publiques d'hif-
toire naturelle ( en 1 575 à Paris ) ; leçons qui
n'étoicnt pas bornées à montrer des mor-
ceaux curieux dont il avoit une riche col-
leéiion , mais à propofer fur la formation
de tous ces morceaux des conjedures très-
raifonnables , & dont la plupart ont été vé- v.
rifiées par des obfervations pollérieures. Les
auditeurs de Pahfîy étoient des plus docles &
des plus curieux^ qu' il avoit ajfèmblés, dit-il,
pour voir Ji par leur moyen il pourrait tirer
quelque contradiâion qui eût plus d^ajjurance
de véritéque non pas les preuves qu'il/nettoie
en avant i fâchant bien que s'' il mentoit , il y
en avoit de grecs & de latins qui lui refifte^
roient en face , &c. tant àcaufe de récuqu^il
avoit pris de chacun , que pour le temps qu^il
les eût amufé ^ &c. Je n'héfite point à mettre
cet homme au nombre ét^ chymiftes , non-
feulement à caufe des faits intéreffans qui font
répandus dans fes traités pratiques fur les
terres , fur leurs ufages dans la conftrudion
des vaiffeaux , fur la préparation du fel com-
mun dans les marais falans , fur les glaces ,
fur les émaux , & fur le feu ; mais encore
pour fes railbnnemens fur l'alchymie , les
métaux , leur génération , leur compofi-
tion , la nature de leurs principes , & fur les
CH Y
propriétés chymiques de plufieurs autres
corps , de l'eau , des fels , &c. toutes matiè-
res îur lefquelles il a eu à^s idées très-raines.
La fin du même fiecle vit paroître les
ouvrages d'André Libavius , calledeur labo-
rieux & intelligent, & défenfeur zélé de
l'alchymie contre les clameurs des \oiles an-
ti~chymifles de fou temps ( Libavius s'efi
battu contre quiconque a témoigné de l'incré-
dulité en fait de chymie ). C'eft à ce favant
que nous devons , outre beaucoup de con-
noifl'ances particulières furies minéraux {voy.
Minéraux 6' Métallurgie ) le pre-
mier corps d'ouvrage de diymie que nous
ayons ; ouvrage d'autant plus précieux , que
les matériaux dont il l'a formé étoient épars
& noyés dans un fatras fi rebutant en foi , &
fi révoltant , fur-tout pour le goût philofo-
phique d'aujourd'hui , que notre ficelé lui a
particulièrement une obligation infinie , lui
qui accueille fi favorablement des compila-
tions de compilateurs. Le traité de Libavius
intitulé alchymia ( titre qui lui a nui fans
doute ) , & le commentaire Iur ce traité qui
le fuit immédiatement , contiennent une
chymie vraiment fondamentale , divifée
d'une façon très-naturelle , & diftribuée en
fès difîerentes branches dans un ordre très-
fyfiématique ; un tableau très- bien ordonné ,
des vues , des opérations , & des produits ou
efpeces chymiques ; un dénombrement com-
plet des inilrumens néceflaires & même
curieux ; & un vrai fyfiême de connoiffances
liées, difcutées avec alfez de dialectique , &
propoiées même d'un ton affez philofophique
pour les temps où Libavius écrivoit. Enfin
quoique Libavius ait adopté expreflement
cette vue chimérique , ou pour le moins
très-mal entendue , d'exalter , de purifier ,
de perfectionner tous les fujets des opérations
chymiques , que les chyrailles fe propofoient
toujours ; quoiqu'il admette plufieurs êjres
imaginaires ; qu'on puifîê lui reprocher quel-
que obfcurité & quelque licence ^'expfiquer;
on ne lui a pas moins d'obligation- d'avoir
préfenré la chymie fous fon afped le plus
général ; de l'avoir donnée pour une fcience
phyfique fondamentale ; d'avoir redifié la
dodrine des trois principes ; d'avoir même
Kconnu & rejeté toutes ces erreurs , ces
ttaches de la dodrine chymique que Boyle
attaqua d'un ton H vidorieux fokante ans
après , comme on peut le voir principalement
dans le traité de Libavius intitulé Commenta'
rium alchymiœ , & dans la défenfe de l'al-
chymie contre la cenfure de la faculté de
médecine de Paris qui fert de proœmium à ce
commentaire. On peut voir dans les ou-
vrages de Libavius que nous avons cités ,
, que dès ce temps les chymifies avoient fur la
compoiition des corps des idées plus faines
que la phyfique n'en a jamais eu ; que les
vaincs fubtilités fcholafiiques , l'abus de la
dodrine d'Ariftote , ou n'a pas pénétré chez
elle , ou en a été plutôt chafîé ; que le goût
des expériences dirigées à la découverte des
vérités générales a exifté en chymie avant
qu'il fe foit établi en phyfique ; en un mot
que fur les objets communs à la phyfique & à
la chymie , & en général fur la bonne manière
de philofopher , la chymie efl d'un demi-
fiecle au moins plus vieille que la phyfique.
Trente-fix ans après la mort de P araceîfe ,
en 1577 > naquit à Bruxelles , de parens
nobles , le célèbre Jean-Baptifie Vanhel-
mont , qui tient un rang fi difiingué parmi
les chymifîes. Cet auteur a beaucoup de
conformité avec Paracelfe ; comme ce der-
nier il évalua les vertus des médicamens par
certaines facultés occultes , magnétiques ,
féminales , fpirituelles , fymphatiques , ^c.
Il célébra une médecine univerfelle , & \ç,s
remèdes chymiques qu'il regardoit comme
fouverainement efficaces : comme lui il fe
fit un jargon particulier ; comme lui fur-tout
il ambitionna le titre de réformateur. Van-
helmont fut ennemi déclaré du galénifine , de
l'arifiotélifme , des écoles & de la dodrine
phyfique & médicinale de Paracelfe lui-
même, duquel il différa eflentiellement par
une fcience profonde & réelle , par une
imagination- brillante & féconde, par un
goût décidé pour le grand , & en beaucoup
de points même pour le vrai ; en un mot par
tous les caraderes' du vrai génie , qui ne
l'empêche pourtant point de débiter férieu-
fement , ce femble , mille abiiirdirés , qui
doivent nous faire admirer comment les
extrêmes qui paroiflent \ts plus éloignés
peuvent s'allier dans les mêmes xtifi , mais
non pas nous faire méprifer colledivement
les ouvrages marqués au coin d'un pareil'
conrraffe. En efièt, rien n'empêche que les
inepties les plus riiibles ne fe trouvent A côté
5< CHY
des idées les plus lumineufes ; & Ton peut
mcme avancer aiîèz généralement qu'il eft
•plus railonnable d'elpérer du très-bon fur la
loi de ces écarts qu'on a tant reprochés à
Vanhelmont ( quoique ces écarts ne conlîi-
tuent pas le bon en foi ) , que d^être épou-
vanté par cette marche , fouvent peu phi-
lolophique : car un original , comme Van-
helmont en a le vrai caraclere , n'a pas les
beautés toifces d'un compilateur , cette uni-
formité , figne prefque univoque de la mé-
diocrité. Il efl vrai que par-là même il doit
n'avoir que peu de partifans; la vue tendre
de ces demi-philofophes qui ont befoin d'un
milieu qui brife l'adivité des rayons primi-
tifs , ne iauroit s'accommoder des éclairs de
Vanhelmont : mais auflî n'eft-ce pas à de
pareils juges qu'il taut s'en rapporter. On a
cru devoir cette efpece d'apologie à un
homme qui a été déprimé, & condamné
avec tout l'air avantageux que s'arrogent les
petits Juges des talens fupérieurs, & tout
récemment encore dans un difcours hiito-
rique & critique fur la pharmacie , imprimé
à la tètQ de la nouvelle édition angloife de la
pharmacopée de Londres.
Mais quoi qu'il en foit de l'idée qu'on doit
avoir de la perlonns de Vanhelmont & du
critérium fur lequel il mefuroit le degré d'é-
vidence de (es connoifïances , il n'en efl pas
moins vrai qu'il s'efl: élevé avec une force
furprenante contre une toule d'erreurs & de
piéjugés qiii défiguroientla théorie & la pra-
tique de la médecine ; qu'il a au moins ou-
vert une carrière nouvelle aux plus grands
génies qui ont expliqué l'économie animale
après lui , aux Stahl , aux Baglivi ; qu'il a
jeté les tondemens de cette dodrine qui efl
fur le point de prévaloir aujourd'hui , & qui
ne rcconnoît pour agens matériels dans l'éco-
nomie animale , que des organes efîentielle-
ment mobiles & fenfibles , au lieu de pures
machines mues par un principe étranger , des
humeurs ou àes eiprits. Voyc\ MÉDECINE .
La phyfique lui doit la proicription , ou du
moins des cris contre le péripatétiime, dont
il a fenti tout le vuide ; & le renouvellement
M'une hypothcfe plus ancienne & plus plau-
fible , celle de Thaïes de Milet fur l'eau
donnée pour élément ou premier principe de
tous les corps ; fur-tout la méthode , nouvelle
alors (du moins quant à l'exécution , car le
CHY
chancelier Bacon l'avoit célébrée &*con-
feillée ) d'établir les opinions phyliques fur
àcs expériences ; & enfin ces expériences
elles-mêmes, qui quoiqu'inutiles au but
pour lequel elles étoient faites , qui quoi-
qu'ayant fourni de fauffes conléquences à
Vanhelmont & à Boyle , qui a été fon dif-
ciple en cette partie , ne nous en ont pas
moins appris des vérités très-intérefîantes
fur la végétation. Voye-^ VÉGÉTATION.
On n'a qu'à lire le traité de Vanhelmont
fur les eaiix de Spa , & fur-tout fon ouvrage
de lithiaji , traités qu'il a donnés lui-même ,
pour appercevoir combien il étoit riche en
connoifîànces chymiques , & combien il
méritoit le titre qu'il fe donnoit de philofophe
par le feu. On trouve dans (es ouvrages
(avec quelques erreurs il efl vrai) des con-
noiffances très-pofitives & très-lumineufes
fur la théorie de la coagulation & de la difîb-
lution , qui font , lorfqu'on les confidere en
général , les deux grands pivots fur lefquels
roulent tous les changemens chymiques tant
naturels qu'artificiels ; beaucoup de connoif^
fances de détails fur les phénomènes chy-
miques les plus intéreffans , & fur les prin-
cipaux effets de quelques opérations , de la
redification fur les huiles animales , par
exemple , &c. plufieurs faits importans ; une
analyfè de l'urine aufli complète & aufïï
exade que celle qu'on pourroit faire aujour-
d'hui , & qui a mené l'auteur aulTi loin que
nous fbmmes ; fans compter fes prétentions
fur les vertus de fon difTolvant univerfel ,
qui , s'il exifloit réellement , fourniroit le
moyen le plus efficace pour parvenir à la
connoifîance la plus intime de la nature des
corps compofés.
Cet homme véritablement fingul.er mou-
rut à la fin de l'an 1644.
Jean Rodolphe Glauber , allemand , fixé
en Hollande , étoit né vers le commencement
du dernier fiecle : c'eft un des plus infatigables
& des plus expérimentés artilles qu'ait eu la
chjmie ; aufiî l'a-t-il enrichie d'un grand
nombre de découvertes utiles , & d'un amas
de faits & d'expériences , que Stahl , qui
juge d'ailleurs Glauber très - févérement ,
appelle très-beau ; & qui eu non-feulement
précieux par l'ufage immédiat qu'on en peut
faire pour la pharmacie , la métallurgie , &
les autres iffts chymiques , mais même par
les
C H Y
les matériaux qu'il fournit à l'^tabliflement
de la bonne théorie chymique. C'efl à ce
chymifte que nous devons la première idée
de mettre à profit mille matières viles &
mutiles , & employées moins utilement , tel-
les que le bois mort des grandes forêts , en
en retirant du falpetre par des moyens faci-
les &peu difpendieux , ou de faire des mines
de fàlpêtre ; la méthode de concentrer les
vins ou plutôt le moût & les décodions des
femences farineufes , pour les faire fermen-
ter en temps & lieu ; le foufre artificiel ;
l'invention de deux fels qui portent fon
nom , favoir le Tel fecret ammoniac & le Tel
admirable ; la méthode de difiiller le nitre &
te fel marin par l'intermède de l'acide vitrio-
lique ; la redification des huiles par les aci-
des minéraux ( c'eft celui du fel marin qu'il
employoit) ; beaucoup de choies importan-
tes fur la corredion des vins , & lur tous
les travaux de la Zimotechnie , & mille ob-
fervations , réflexions , & méthodes utiles
pour la préparation de plufieurs remèdes.
yqy. Pharmacie. C'elt Glauber qui a le
premier démontré le nitre tout formé dans
les plantes , qu'il a regardé comme la princi-
pale fource de tout celui que nous connoii-
fbns , & notamment de celui que nous re-
tirons des animaux ; opinion que je regarde
comme démontrable , quoique l'auteur de la
dilîêrtation fur le nitre , qui a remporté le
prix à l'académie de Berlin en 1/47 » n'ait
-pas même daigné la difcuter.
Glauber efl fur-tout admirable dans l'in-
duflrie avec laquelle il a réufli à abréger plu-
iieurs opérations , & en diminuer les frais ;
vue très-naturelle à un travailleur. Son traité
des fourneaux philofophiques , efl: plein de
ces inventions utiles : la diftillation immé-
diate fur les charbons , l'uiàge des vaiflêaux
diftillatoires tubulés , celui des récipiens
ouverts par leur partie inférieure , le four-
neau de fufion (ans foufïlets , la façon de
chauflTer un liquide contenu dans des vaif-
feaux de bois par le moyen d'une boule ou
poire de cuivre creufe adaptée à la partie in-
térieure & latérale de ces vaifTeaux , font des
învenrions de ce genre ; en un mot cet auteur
rne paroîr être de tous leschymiftes celui où
l'on trouve plus défaits & de procédés neufs
qui font fouyent utiles en foi & abfolument ,
& qui au moins conduifcnt à des recherches
Tome VIIL
irnpof tantes , & par conféquent un de ceux
qu'on lit avec le plus de profit : j'oferois
même dire celui dont doit faire fon étude
la plus afiidue le chymifte fuffifamment
muni de bonnes connoiflances fondamenta-
les , qui feul eft en état de juger , & par
conféquent de lire. C'eft un àes auteurs dont
la ledure fert le plus efficacement à guérir
de la haute opinion qu'on s'eft formée, avant
de fouiller dans les fources , des connoil^
lances lupérieures de plufieurs chymiftes
modernes. Il faut lire Glauber tout entier ,
parce que plufieurs vérités importantes font
diipcrfées par lambeaux dans (qs divers ou-
vrages.
Une lifte d'arcanes non expliqués , &
dont l'exiften^e eft feulement annoncée à la
findefes fourneaux philofophiques , préfente
aux chymiftes une ample matière de travail ;
& la plupart de ces arcanes ont un caraûere
de poflîbilité , qui rend l'entrcprife de ces
travaux très-raifonnable.
M. Stahl lui a reproché avec raifon
d'avoir obfcurci des notions fort claires que
fes expériences fourniflént , par la manie dé
les diriger aux vues chimériques de l'alchy-
mie , dont il a été autant entêté que per-
fonne , auflî-bien que de la confiance aux
vertus des aftres , des fignatures , des noms,
Ùc. qu'il a défendu dans des traités fiiits
exprès ; & de n'avoir tiré aucun parti de ces
expériences pour les progrès de la fcieiice po-
fitive , àtscuriofités phylico-^hymiques y &
d'être par conféquent ( en comptant ces
vues & ces explications alchymiques pour
rien ) très-verle in luoii, dans le fait , &
fort peu avancé in rœ J'ioti y dans le pour-'
quoi. Il faut reconnoître cependant , pour
rendre juftice à Glauber , que Sthal a pré-
cifément donné dans le vice qu'il lui reproche
ici, lorfqu'il a embarrafle dans Une hypothele
fort recherchée l'origine du nitre , que'
Glauber avoir expofée d'une manière fc)rt
fimple , & prouvée par des raifonnemens
fort bien déduits Aqs obfervations ; & que
Stahl a manifeftement mal évalué , ou du
moins trop généralifé l'effet de la putréfaâion
pour la génération du nitre , fur l'aâion de
laquelle , foit erreur , foit vérité , Glauber
Ta encore précédé : en forte que Glauber
& Stahl ont pris réciproquement leur ma-
nière fur cette queftion auffi intéreifante
H
-5^ C H Y
pour (ôtï utilité que piquante par la curiofite.
Voyei NiTRE.
On lui a reproché encore , avec la rnême
jufîice , d'avoir vanté avec la plus grande
emphafe , & fans la moindre circonfpec-
tion , tous fcs prétendus arcanes ; ce qui a
attiré du mépris fur l'art , Tes promeïîès n'é-
tant pas toujours {uivies de l'effet. Glau-
ber eft bien effedivement le plus inconlîdéré
prometteur & le plus outré louangeur de
fès fecrets , de tous les charlatans qui font
ou qui furent : cette manière paroît iijr'tout
dans les titres de Tes ouvrages , toujours
écrits pour le falut du genre humain, pour
la conîblationde plufieurs milliers d'affligés ,
pour le foulagcment des foufFrans , la prof-
périté de fa patrie , qui feront comme une
chandelle allumée mife fur le chandelier ,
Ùc. C'eftdans ces défauts que les chymifles
{qs co'nteraporainsles plus illuflres, tels que
Bêcher , Borrichius , & le célèbre Stahl qui
a commencé à courir la même carrière peu
de temps après la mort de Glauber , ont
trouvé des prétextes pour le déprimer ; quoi-
que Stahl lui-même , qui parle toujours de
Glauber comme d'un manœuvre , n'ait pas
dédaigné de fe parer de quelques-unes de fes
idées philofophiques , que véritablement
Glauber n'avoit jamais été en état de mettre
en œuvre comme Stahl.
Glauber a beaucoup célébré une médecine
univerfelle ( voy. MEDECINE ) , & undil-
folvant univerièl qu'on croit être le nitre ,
©u plutôt les deux principes de fa compofi-
tion employés féparément ; ce qui n'ell plus
remplir la condition du problême qui fup-
pofe un feul corps , auxquelles conditions
d'ailleurs ni l'acide du nitre , ni le nitre fixe
pe peuvent fatisfaire. Fbj. Menstrue.
Glauber a continué d'écrire jufqu'en 1667.
Une époque confidérable pour la chymie ,
c'efî la conquête qu'elle fit vers le milieu du
dernier fiecle , de la théorie de la médecine ,
ou la naiffance de la fede chymique des
médecins ^ dont les chefs & les propagateurs
les plus connus font le célèbre profelfeur
François Delcboe Sylvius , Otto Tachenius
qui s'eft tait un nom dans la chy mie-pratique
par quelques procédés particuliers fur la pré-
paration des fels ; & l'ingénieux Thomas
Willi.'; , ?.uteur d'un traité fur la fermenta-
tion fo'rt eilimable , 6c inventeur des deux
Ç H Y
principes' pafîifs , ajoutés au tertiaire dé
Paracelfe. Voye'{ MÉDECINE.
Il n'ell pas ailé de décider fi cette conquête
futplus funefle à la médecine qu'à Inchymie:
car fi d'un côté la chymie médicinale deve-
nue phyiiologique & pathologique , remplit
bientôt d'hypothefes monflrueufcs la théorie
de la médecine dont elle avoit enrichi la pra-
tique tant qu'elle n'avoit été que pharma-
ceutique , on peut avancer aufli que (es nou-
veaux fujets ( les médecins théoriciens ) qui
bientôt donnèrent le ton , traitèrent la chym
mie avec cette licence de raifonnement ,
cette exondance d'explications qu'on leur a
tant reprochée & à fi juite titre , & qu'entre
leurs mains la théorie chymique fut bientôt
auffi gratuite que celle de la médecine. La
dodrine qu'on enfeigna dans les chaires qui
furent étabhes après dans les plus fameufcs
univerlités , fe relient de cette manière arbi-
traire de philofopher , & a fubliflé dans les
écoles pendant tout le règne de la {eô.Q
chymique des médecins , & long-teinps
même après fa profcription chez plufieurs
nations , cultivanîd'ailieurs kslciences avec
fuccès ; notamment chez nous , où leilahlia-
nifine n'a pénétré que long-temps après la
réforme de Stahl , & où il faut même con-
venir qu'il n'eft pas encore afîèz générale-
ment répandu.
Enfin dans le temps même où la chymie
efTuyoit l'efpece d'échpfe dont nous venons
de parler , parut l'illufire Jean Joachim
Bêcher , né à Spire vers l'an 162.5 , d'abord
profefTeur de médecine & médecin de l'élec-
teur de Mayence , enfuite médecin de l'élec-
teur de Bavière , dans le laboratoire duquel
il travailla beaucoup; après cela fixé auprès
de Tempefeur , de la cour duquel il fut
obligé de s'éloigner par des manèges de cour-
tifans ; enfin voyageur en Hollande & en
Angleterre , &c. homme d'un génie véri-
tablement grand , d'un jugement exquis, &
très-verfé dans prefque toutes les fciences ;
le vrai Hermès de la chymie philofophique ;
le père , le créateur du dogme chymique de
cette chymie y que )'ai donné au commence-
ment de cet article comme la bafe de l'étude
de la nature. Sa phyfique fouterraine, que
malheureufement nous n'avons pas com-
plète , contient au moins le germe de toutes
les vérités chymiquGS & du fyflême qui les
C H Y
raflemble en corps de dodrine , te elle a
{Ij. chymie) dans cet ouvrage tous les carac-
tères par lefquels nous l'avons oppofée à la
phyiique ordinaire. Il faut avouer cependant
que Bêcher , en cela plus heureux qu'Aril-
tote , a l'obligation à Stahl Ton commenta-
teur , d'avoir expliqué & peut-être redifié
plufieurs de Tes dogmes , & que c'efl: dans le
fpecimen Becherianum de Stahl , que la
phyfîque de Bêcher mérite les éloges les plus
éclatans , dont tout connoilîeur ne peut
s'empêcher de la combler. Qç. fpecimen efl
le code de la chymie y l'euclyde des chymif-
tes, (S'c. Les éloges de Stahl , le meilleur juge
qu'on puilTe trouver fur ces matières , nous
tiendront lieu du jugement que nous avons
à porter fur cet auteur : îllud noflrumfaci-
miis , dit-il dans la préface qu'il a faite pour
la phyfîque fouterraine de Bêcher , Beche-
rum in phyjîcâ hâc/ubterranea itafolidis
theorisjdrgumentis, experimemis ufum ejje;
eâfcientiây induflriâ y perituîy conflantiâ y
conneckndi & concludendi circumfpectione
in hoc argumenta ufum atque potitum effe
quam nemo alius neque ante ipfum , neque
pofi ipfum y imo nequidem per ipfum in ho-
diernum ufque diem. Le même auteur ,
Stahl , qui n'efl pas prodigue d'éloges , ap-
pelle le môme ouvrage , opusjine pari y pri-
mum hxclenus ac princeps ; & ailleurs , liber
undique Ù undique primus : & nous pouvons
dire qu'il l'eft encore de nos jours, du moins
parmi les originaux, c'eft-à-dire parmi les ou-
vrages faits pour les chymiftes légitimes , les
maîtres de l'art. Je fais bien que Bêcher ,
quoiqu'écrivain exad, méthodique, & même
élégant , quoique fertile en préceptes & en
expériences qui doivent être du goût de tous
lesledeurs , & en éclairs qui doivent frapper
tous les yeux , ne fauroit faire fupporter au
plus grand nombre , en faveur de ces qua-
lités , tout ce qu'on trouve dans cet ouvrage
pour établir l'exiflence de la tranfmutation
des métaux & de la mereurlfication , qui efl
la prétention favorite de notre auteur ; ni
cette efpece de commentaire phyfique fur
l'hifloire de la création , par lequel fon ou-
vrage débute ; ni en général quelques obf-
curités , & un afTez grand nombre de notions
vagu;s &: tout au plus métaphoriques , qu'il
a mêlées aux vérités les plus pofitives & les
jçnieuxliées : car j'aime mieux croire que c'eft
C H Y 55
par ces défauts , ou plutôt par cet épouvan-
tail , que l'incomparable ouvrage dont nous
parlons n'eft ni connu , ni par conféquent ef-
timé des phyficiens , que de dire avec Stahl,
que cela vient de ce que les aflertions fonda-
mentales de l'auteur font vraies. La dodrinc
de Bêcher , outre les notions générales fur la
mixtion & fur lafolutiofl , qui font la bafede
la méthode chymique , eft fur-'out connue
par l'expoiition des principes de la compofi-
tion ou des matériaux des corps , & princi-
palement des minéraux ; principes qu'il a
fixés au nombre de trois , & que nous con-
noifîons en chymie fous le nom des trois ter^
res de Bêcher. V. PRINCIPES , MINÉ-
RAUX , Substances Métalliques, fir
Terres. Les autres ouvrages chymiques de
Bêcher (ont pour la plupart purement alchy-
miques : tels font les fupplémens à fa phyjî-
que fouterraine y fa concordance chymique y
tous {ts opufcules : à l'exception du labora-
torium portatile y qui contient, outre un ta-
bleau abrégé des connoiffances pratiques ,
un précis très- exad delà doctrine chymique
de l'auteur; fa morolbphie & ion œdipe chy-
mique , le plus obfcur de tous fcs ouvrages ,
malgré fon titre. Au reflc ces divers ouvrages
alchymiques (ont de la clafTe de ceux que le
chymifle qui penfe & qui efl aflez patient ,
lit toujours avec profit , tant pour les vues »
\t^ idées lumineufes qu'un chymifle tel que
Bêcher doit nécelTairement répandre dans
tout ce qu'il a traité , que pour les faits , les
obfervations , les expériences fecondaires ,
& même pour certains procédés qu'on peut
regarder comme utiles , même quant au fond
ou airx produits que l'auteur promet. Ses
prétentions fur fa fameufe mine de fable per-
pétuelle , palTent , par exemple , pour très-
fondées aujugement de plufieurs grands chy-
miffes. On retrouve toujours Bêcher dans
ceux-ci , c'eft-à-dire l'homme finguliérement
maître de fon fujet , ^c. Voy. TRANSMU-
TATION. Sa métallurgie paîTe pourtroppeu
travaillée : Bêcher a d'ailleurs été un très-fer-
tile écrivain fur des fujets de médecine , de
belles-lettres , de grammaire , de politique ,
de théologie , de mathématique , de mécha-
nique , ^c. Il mourut à Londres en 1682.
Le célèbre phyficien Robert Boyle,contem-
porain & ami de Bêcher , eft ordinairement
compté parmi les chymifles ; & il a cffedive-
H 2
^o C H Y
ment beaucoup écrit iur h chymie : mars il
cftfrop exadementphylicien corpufculaire-
méchanicien , ouphyUcien proprement dit ,
tpl que nous l'avons mis en contrafte avec le
chymilte au commencement de cet article ,
pour qu'il ait pu travailler utilement pour la
dodrine chymique , dont on peut dire qu'il a
entrepris la réforme fans être muni àts con-
noilîances fuffirantes pour exécuter ce del-
fein , & même fans avoir aiîez d'érudition
chymique pour favoir ce que c'étoit exade-
ment que cette dodrinc qu'il fe propofe de
redifier. En effet Boyle paroît n'avoir connu
que le peuple des chymiiîes ; car il a com-
battu des principes que les bons chymiifes
ne prenoient point du tout dans le fens dans
lequel il les confidere , & il a , par une fiiite
de cette mauvaife acception , ou réfuté des
erreurs qui n'exifloient point chez les vrais
maîtres de l'art , ou attaqué des dogmes que
quelques ancêtres de ces lavans avoient réel-
lement établis, mais que les chy milles pollé-
rieurs , tels que Libavius, Folfinck , Van-
helmont , Rub^us , Billich ; & plufieurs
autres , entre lefquels nous n'oublierons pas
de compter notre Palifî'y , avoient réfutés
avant lui ; en forte qu'il n'a fait qu'étendre
les réfutations bien ou mal fondées de ces
auteurs , & les appuyer quelquefois d'expé-
riences précieufes en foi , mais prefque tou-
jours mal appliquées , & fournifïant conf-
tamment à l'auteur des confequences très-
précaires & très-mal déduites.
Boy le paroît avoir jugé Vanhelmont , par
exemple , fur le fimple titre que ce chymifte
fe donnoit de philojophe par le feu y lorf-
qu'il l'a accufé d'être un des chymiftes qui
avoient mal ellimé l'aéfion du feu dans la dé-
compofition des corps , & d'avoir adopté
la doctrine des principes dans le fens où Boyle
la prend , & où elle efl réellement vicieufe ;
cai- Vanhelmont efl: diredement oppofé à
cette opinion.
Sonchymiflafcepticus où l'auteur n*a point
douté , ( ce que Bêcher lui a reproché dans
le même endroit de fa physique foute naine y
où il tourne en ridicule la forme fpirale des
particules de l'air , par laquelle Boyle expli-
quoit le refTort de ce fluide ; ee que je re-
marque en pafîant , pour faire voir que les
chymiiles ont avant les newtoniens fenti !
riiiLTuffifance de ce méchanifme } , & où on |
C H Y
ne trouve point les paradoxes annonces paf
le titre de la dernière partie de cet ouvrage,
eft exadement caradérilé par l'idée que
nous venons de donner de la manière géné-
rale de Boyle. Il s'efl peint de la même
façon dans fon ouvrage intitulé de imperfeciâ
chymicorum circà qualitates docirinâ. L'on
voit d'ailleurs évidemment en Boyle l'étran-
ger dans les chofes chymiques , par le man-
que abfolu de l'art d'élaguer l'expofé de fès
expériences, qu'il charge fou vent de circonf-
tances inutiles , tandis qu'il évalue fort mal
Jes efï'entielles ; notamment dans fon f^/y«r
les parties dunitre y où il paroît croire que
l'air hbre opère matériellement dans les cryf--
tallifations des fels , foit par fa propre fiibf^-
tance , foit par àss exhalaifons terreflres ou:
même céleffes , & où il a connu fi peu l'efïèt
de l'évaporation dans la produdion de ce
phénomène , qu'il témoigne à propos des.
mêmes expériences beaucoup de regret de .
n'avoir point tenté fi une difTolution denitre-
enfermée dans un vaifTeau exadement bou-..
ché , ne fourniroît pas aufli-bien des cryl-
taux qu'une pareille diffolution expofée à,'
l'air libre. L'inconféquence ou l'inutihté de.-
(ts expériences pour les points à l'appui def^
quels il les rapporte , eft frappante dans fon^
livre de producibilitate principiorum chymi'-
corurriy où l'on trouve pourtant des faits im-.
portans en foi ; la produdion d'un foufre >
artificiel , par exemple , mais qui avoit déja>
été exécutée par Glauber , qui ne fe trom-
poit pas plus que Boyle , lorfqu'il croyoit
l'extraire des charbons , au lieu que le phy- .
licien croyoit le féparer de l'huile de vitriol. ,
Nous pouvons oblerver à propos.de ce fait
même , qui eft un des plus intéreffans de
tous ceux qui font rapportés dans ce traité ,
que Boyle efl fort peu circonfped à con-^
dure de ^^s expériences chymiques ; car-
celles-ci ne préfentant , félon lui-même ,
qu'une extradion ou une féparation du fou-»
fre , ne fait rien , ce femble , à l'établifTe-
raent de fa prétention que le foufre eft
réellement producible ; car il a bien défini :
fa producibihté & l'a effèntiellement diflin-*
guée de la féparation.
Ses efTais phyfiologiques contiennent
quelques avis aux chymifles , qui font réel-
lement utiles , mais point neufs , d'ailleurs
rien que. des obfejrvations 6ç des confidéri-*
C HT
îïons communes & de peu d'importance.
Ses expériences fur la pondérabilité de
la flamme font faites avec peu d'exaditude
& mal comprifes, maie imeUecla; l'auteur
n'a connu la nature de pas un des maté-
riaux qu'il a employés , & n'a point du tout
entendu les changemens qu'ils lubifToient;
la combinaifon réelle du feu ou de la flamme,
qu'il a très-difl:indement articulée , eft pour-
tant très - chymique. : quelque peu précife
que foit cette aflertion , on ne fauroit refufer
à l'illuflre phyflcien l'éloge qu'il mérite pour
cette connoilîance, toute particulière & abfo-
lument ifolée qu'elle foit reftée chez lui.
• Quant à la dodrine que Boyle a voulu
fubflituer à celle qu'il a combattue avec
une efpece d'acharnement & de. haine trop
peu philofophique , j'ai déjà obfervé que
c'étoit précifément celle que j'ai mife en
oppofition avec la dodrine que j'ai appellée
chymique : elle eft éparfe, cette dodrine chy-
mico-méchanique , dans tous fes ouvrages
chymiques ; & l'auteur avoit commencé en
i66^ de la rédiger en un corps fous le ti-
tre de Chymie philofophique , dans le temps
que Bêcher achevoit la fienne (fa phyfique
fouterraine ). Outre le motif de.cpnfolation
fur l'inexécution de ce projet , que nous
fournit la phyfique fouterraine de Bccher ,
nous pouvons en trouver encore un plus di-
reddans les expériences & les remarques de
Boyle , fur l'origine & la produdion mécha-
nique de la fixité , de la volatilitéi , de lacor-
rofivité, ^c. qu'on peut regarder comme un
échantillon de cette. Chymie philofophique.
Pour toutes ces raifons , en rendant à
Boyle toute la juftice qu'il mérite , comme
un illuflre propagateur , & même comme
le père de la phyfique expérimentale; comme
s'étant exercé lui-même avec un zèle intati-
gable, une. induflrie , & une fagacité peu
communes fiir plufieurs branches importan-
tes de cette fcience ; comme en ayant d'ail-
leurs bien mérité , en encourageant & en
aidant même le talent des travailleurs
indigens , &c. en reconnoiflant , dis - je ,
toutes ces obligations que lui a la phyfique >
l'intérêt de la vérité & le bien même de la
cho(è exigent que nous déclarioas que
Boyle ne fauroit avoir un rang parmi les
chymiflies , mais feulement parmi les pby-
fiçiefis. v.erba nojîra .CQnad%^
C H Y ëi
Jean Kunckel , contemporain de Boyle
& de Bêcher , fut un travailleur très-appli-
qué , & un obfervateur fur la fagacité & fur
la fincérité duquel on peut compter. Il fur
long-temps à la tête d'une verrerie; ce qui lui
fournit non-feulement la commodité d'ajou-
ter au traité de Néri les remarques qui ont
tait de cet ouvrage un corps complet de
verrerie , mais même de profiter du feu con-
tinuel qu'il avoit fous la main , pour faire
plufieurs expériences des plus curieufes ,.
principalement fur les métaux parfaits. V.
Substances Métalliques, & Calci-
NATION. Kunckel s'étoit fait furie feu &
fur les matières inflammables , une théorie-
aujQl ridicule que font précieux les faits qu'elle.^
noie dans (on laboratorium expérimentale ^^
où elle efl principalement mife en œuvre..
M, Stahl s'efl donné la peine de la réfuter ■
dans fon traité dufoufre , dont cette réfuta- -
tion forme une grande partie. .
Enfin immédiatement après \ts trois der--
niers, auteurs que nous venons dénommer ^
parut le grand George Ernefl Stahl , né à
Anfpach en 1660 , premier médecin du duc
de Saxe Weymar en 1687 , profefïeur eai
médecine dans l'univerfité de Hall en 1^94 ,,
où il fe fit une très-grande réputation,. &
profefïà jufqu'à l'année 171^' , qu'il alla à;
Berlin où. le roi de Pruffe l'avoit appelle pour ■
être fon premier, médecin , pofle qu'il ai
rempli jufqu'en 1734 ,, année de fa mort..
Génie vafle , pénétrant , précis , enrichi par
les connoiflances élémentaires de toute e{^
pece; tout ce qu'il a écrit efl: marqué au coi^^
du grand, & fourmille en ce genre d'ima-.
ges qui s'étendent au-delà de l'objet fenfible,,
& qui finiflent , pour ainfi dire, par un long
fillon de lumière qui brille aulfi loin que la;
vue dé l'efprit peut le fiiivre. Il a marché
en médecine dans une carrière nouvelle
[l'oyei Médecine ) , , & il a porté la doc-
trine chymique au point où elle efl aujour^-
d'hui:, & j'olè dire à un état de perfedion ,
où , maniée par d'habiles mains, ellcpourroit
faire changer de face à la phyfique , la prér-
fenter fous un jour nouveau. Outre le Be-
cherianifme qu'il s'eft rendu véritablement
propre , qu'il a revêtu de la forme philofo-
phique dans \e fpecimen Becherianum dont
nous avons déjà parlé , il a enrichi l'art dô:
plufi^eurs traités particuliers j fervant tous Icl:
èx C H Y
plus immédiatement à l'établiflement & à
ï'extenlion de la théorie générale dont il a
perfedionné une branche entière des plus
étendues , & qui a dû paroître la plus diffi-
cile à ordonner ; favoir les combinaifons du
phlogiftique , du feu , de la deuxième terre
de Bêcher. Son traité de zimotechnie me
paroît un chef-d'œuvre. Les vrais fondemens
àt^ opérations métallurgiques n'étoient pas
même foupçonnées avant qu'il eût donné
fon admirable traité intitulé dijjenatio
Metallargiœ pyrotechnies , Ù DocimaJiiX
metallicce fundamenta exhibens. Les élé-
mens de chymie que nou' avons de Stahl ,
ibusle titre àc fundamenta chymice dogma-
.ticœ experimentalis y qu'il avoit di&és dès
1684 , & qui font fesyw^'f /2/7/a^ ne font un
ouvrage médiocre qu'en comparaifon des
ouvrages plus travaillés du même auteur.
Stahl a écrit en général d'un ftyle dur ,
ferré , embarralTé , & plus barbare , du
moins en Litin , que la qualité d'écrivain mo-
derne ne le comporte. L'obfcurité que ce
ftyle répand Hir les matières d'ailleurs abs-
traites & conlidérées très-profondément , a
été reprochée à Stahl par quelques amateurs,
& a été regardée comme très-avantageufe à
l'art par quelques autres ; par ceux qui n'ont
Vu qu'avec regret que l'art a proilitué aux
profanes , (es myfîeres divulgués , publiés
tn langue populaire , ou furie ton ordinaire
des fciences ( ce qui leur a paru la même
ichofe ) ; ton qui n'a commencé proprement
qu'aux maîtres de Stahl , Barner & Bohn ;
ou par ceux qui ont penfé plus philofophi-
quement que ce degré de clarté , d'ordre , de
liaifon , qui met les fciences à la portée de
tous lesledeurs, & même de tous les gens de
iettreSjétoit nuifible en foi-même aux progrès
de ces fciences ; & que le bien de leur pu-
blicité n'étoit préconifé qu'en conféquence
<^'une de ces opinions adoptées fans examen ,
& par-là même fi profondément enracinées ,
que l'opinion contraire a tout l'olîènl'ant
d'un paradoxe. Ce paradoxe eft pourtant
une vérité très- réelle , lorfqu'on l'applique
^n particulier au cas de la chymie; (i elle de-
vient connue au point que les faifeurs de
feuilles , de romans , Içs poètes , les écri-
vains , veuillent orner leurs ouvrages du
fiam_ de Srahl , comme ils fe décorent de
celui de Newton , Ùc. û la chymie devient
C H Y
à la mode , elle ne fera plus que petite ,^mi^
nutieufe , jolie , élégante ; les chymiftes au-
ront le public à fatisfaire au lieu des con-
noiflèurs , ils voudront plaire à ce public ;
réciproquement ce fera ce pubhc qui déci-
dera du mérite des auteurs , & le médiocre
fera fur le trône de la fcience.
Si cette obfcurité relative que nous avons
reconnue & prefque approuvée dans Stahl
n'eft pas blâmable , nous pouvons alîurer
avec plus de confiance , qu'on ne peut lui
reprocher aucune obfcurité ablblue , & qu'il
n'efl pas un de fes écrits profonds , tels que
ionfpecimen Becherianum^ fa zimotechnie y
& {es trecenta y qui ne puifle avoir julqu'à"
cinq ou fix leûeurs dans chaque nation fa-
vante.
Stahl a formé un grand nombre de dif-
ciples 5 parmi lefquels Meuder & Neuman ,
tous deux enlevés par une mort précoce ,
fc font particuhérement diflingués.
Jean Frédéric Henckel , un peu plus mo-
derne que Stahl , efl admirable dans les con-
noilTances particuHeres , toujours profondes
& liées , qu'il nous a données principale-
ment fur les minéraux dans fa pyrotologie ,
& dans (zflorafaturnifans y & par la doc-
trine chymique tranfcendante qu'il a expo-
fée dans fon apprôpriatio.
Frédéric HofFman , le rival de Stahl ,
auquel il fuccéda dans la place de premief
médecin du roi de PrufTe , a voulu join-
dre le rehef de la chymie à la gloire qu'il
s'étoit juflement acquife par fon habileté
dans la pratique & dans la théorie de la
médecine. On prétend qu'il n'eut d'autre
vocation à la chymie y que la célébrité de
Stahl dans cette partie; quoi qu'il en foit,
il n'efl pas chymillc ; (es obfervations tou-
tes petites & ifblées , ne font pas neuves
pour la plupart ; & (es diflertations fur les
eaux minérales , qui ont été fort admirées
& fort copiées , ne font qu'un mauvais
ouvrage bien fait.
Lemery , qui paroit abfolument avoir
ignoré Stahl , nous donna au commence-
ment du fiecle plufieurs ouvrages chymi-
ques , entre lefquels fa chymie lui a fait lur-
tout une réputation conlidérable , même
chez les Allemands , qui l'ont traduite mal-
gré leur richefTe en ce genre. Cet ouvrage
efî enèâiveHient eiliraable par l'exaûituda
C H Y
âès opérations , & les obfei'vations fré-
quentes & judicieufes de manuel. Il fe
dillingue du commun des chymilles phar-
maceutiques dans la clafîe deiquels nous
Tavons rangé , par une certaine théorie de-
micorpurculaire , dont il a orné ou chargé
fes opérations. Il a été le feul proprement
claffique & élémentaire en France , jufqu'à
ce qu'en 1723 le nouveau cours de chymie y
félon les principes de Newton & de Stahl ,
»ous apporta le flahlianifme , & fit la même
révolution dans notre chymie y que les ré-
flexions fur l'attradion que publia M. de
Maupertuis dans Ion difcours fur les dif-
férentes figures des affres , ont opérée dans
notre phylique , en nous faifant recevoir
le newtonianifme.
Dans le même temps , trois grands au-
teurs adaptèrent aux principaux phéno-
mènes chymiques , la théorie de l'attrac-
tion ; Newton , fur la fin de fa carrière ,
Jean Keil , qui en difputa modeflement la
gloire à fon maître ; & le célèbre Freind ,
qui les copia & les gâta tous deux : nous
avons déjà parlé de leurs fuccès. Cette théo-
rie qui règne en Angleterre , comme il pa-
roît par les ouvrages chymiques de M.
Haies , n'a jamais été adoptée chez nous.
V. Attraction.
: Si je ne fais pas connoître pluiîeurs fa-
vans illu/lres , qui cultivent aujourd'hui la
chymie avec le plus grand fuccès , (L^Çi
que je n'ai pas cru qu'il me fût permis de
leur affigner de rangs.
. Le corps , le fonds de dodrine chymique ,
tel qu'il exilîe aujourd'hui , efî connu dans
les tables de Junker , ouvrage précieux ,
trop peu cité , & principalement tiré de
Stahl. Nos tréfors de faits font les mémoires
des académies , & fur -tout de celles de
Paris , de Prufîe & de Suéde. C'eff dans ces
riches coUedions que font renfermés les ma-
tériaux les plus précieux de cette phyfique
chymique , vraiment fondamentale , dont
j'ai tâché de faire preffèntir les avantages
& d'infpirer le goût. C'eft aufïi dans ce
vafle fonds qu'on doit fe pourvoir d'un nom-
bre fufïifant de^connoifîances chymiques
particulières ,, qui font en foi une richeffe
réelle , & qui doivent au moins nécefîaire-
ment devancer les notions compofées &
générales, toujours aufïi inutiles , comme
C H Y 6^
fource d'inflrudîons , que précieufes & re-
commandables , comme étant le complé-
ment, le faire , le degré fuprême àfi (cienccs.
Mais tout le fruit qu'on peut tirer des
meilleurs ouvrages des chymilles , toutes
les inflrudions écrites ne peuvent être d'au-
cun ufage , comme étude élémentaire &:
première des commencemens : ce n'efi pas
dans les livres qu'on peut prendre de chy-
mie ; cette Icience doit, comme toutes les
fciences pratiques , être d'abord démontrée
aux fens ; nous l'avons déjà obfervé , & oa
en efl affez généralement convaincu.
Cette première inflitution , cette étude
vraim.ent élémentaire, cette inilruclion com-
mençant par l'exercice des fens , on la doit
nécelîaîrement chercher dans les leçons pu-
bliques , & dans les cours particuUers que
àts chymiftes zélés pour les progrès de leuf
art ont ouverts depuis quelques années dans
les principales villes de l'Europe.
Les cours que M. Rouelle fait à Paris
depuis quinze ans , lont , de l'aveu même
des étrangers , ce qu'il y a de mieux en ce
genre. L'ordre dans lequel les objets parti-
culiers y font préièntés , l'abondance & le
choix des exemples , le foin & l'exaditudc
avec lefquels les opérations y font exécu-
tées , l'origine & la liaifon des phénomènes
qu'on y fait exadement obferver , les
vues neuves , lumineu fes , étendues ; qui
y font iiiggérées , les exccUens préceptes de
manuel qui y font enfeignés ; & enfin , la
bonne , la faine dodrine qu'on y réfume de
toutes les connoiflànces particulières ; tous
ces avantages , dis-je , font du laboratoire
de cet habile chymifle une fi bonne école ,
qu'on peut en deux cours , avec des dil-
pofitions ordinaires , en fortir afîez infiruit
pour mériter le titre d'amateur diflingué y
ou d'artifle capable de s'appliquer avec
fuccès aux recherches chymiques. Ce juge-
ment efl confirmé par l'exemple de tous
les chymifles françois , dont le premier
goût de chymie efl pofférieur aux premiers
cours de M. Rouelle.
Je n'ai pas cru pouvoir mieux finir cet
article , que j'ai uniquement defliné '\ exci-
ter le goût de la chymie y qu'en indiquant
au ledeur à qui j'aurai pu l'infpirer , la
fource dans laquelle il pourra le fàtisfaire
avec le plus d'avantage. ( ^ J .
^4- C H Y
CHYMOSE , f. f. l'aôion de faire ou
-préparer lacliymie. V. Chymie.
CH YNDONAX , ( Hifi. anc. ) c'eft le
nom d'un de ces pontifes appelles chez les
Gaulois grand Druide you chef des Druides.
Son tombeau fut découvert auprès de Dijon,
en 159^' ^^ y trouva une pierre ronde &
creufè qui contenoitun vafe de verre orné de
plufieurs peintures. Autour de cette pierre,
on lifoit en ^rec l'infcription fuivante :
UçivvctfyjDya i^vTViCti ccrry^'X}! y hvTionKÔvtvopayt.
w Dans le bocage de Mithra, ce tombeau
fy couvre le corps de Chyndonax , chef des
w prêtres. Impie , éloigne-toi : les (Dieux)
7j libérateurs veillent auprès de ma cendre. »>
Le bocage de Mithra , dont parle cette
^pitaphe , étoit confacré à Apollon que les
Gaulois appelloient Mithra , lorfqu'ils le ,
confidéroient comme le foleil. ( -+- )
CHYPRE ou CYPRE, {Géog.) en latin
Cjprus.
Le premier efl le nom moderne , & le
fécond eft le nom ancien. Une des plus
grandes îles de la Méditerranée , fur la
cote d'Afie , entre k Cilicie au nord & la
Syrie A l'orient.
La fable l'avoit confàcrée A Véniis ; &
comme elle y plaçoitle lieu de la naiflance
de cette déefle , on l'y honoroit d'un culte
particulier. C'eft dans cette île que font
les lieux célèbres d'Amathonte , de Paphos ,
de Cythere , & de la forêt d'Idalie , fi van-
tés par les poètes.
Sa fertilité , fes vins & {es mines , Pont
rendue en tout temps fi confidérable que
les Grecs lui donnèrent le nom de marca-
ria y c'efl-à-dire fortunée ; mais il s'en faut
bien qu'elle mérite ce beau titre , par les
malheurs qu'elle a eflûyés fucceiîîvement
en paflant fous des dominations étrangères.
Cet article ejl de M. le Chevalier DE JaU-
COURT.
* CHYTRES (FÊTE des) , Hifl.anc.
Myth. troifieme jour des Anthifleries. On
offroit à Bacchus & à Mercure toutes for-
tes de légumes cuits dans des marmites ,
pour les morts. Deucalion pafïbit pour l'a-
voir inftituée & célébrée.
CHYTRINDA, {Hifi.anc.) jeu d'en-
£ms j dans lequel il y en a un ai&s à terre
C HY
au milieu des autres qui courent aufour , îe
pouifent , lui font des niches , jufqu'à ce
qu'il en ait attrapé un qui prend fa place.
CHZEPREG, (Géog.) petite ville de
la baife Hongrie, dans le comté de Sapron,
iiir la rivière de Stop.
C I
* CI , adv. ( Gramm. ) abréviation de
ici , par exemple , celui-ci.
CIALIS , ( Ge'ogr.) royaume d'Afie dans
la Tartarie , borné au nord par le royaume
d'Eluth , au midi par le Thibet ; à l'occi-
dent par le Turqueftan. La capitale s'appelle
aulîi Cialis fur le Kincker , autrement dit
l'Yuidz.
CLAMPA , ( Ge'og. mod.) petit royaume
d'Aiis dans les Indes ; il a au midi & à
l'orient la mer d'Orient ; au nord , le défert
de la Cochinchine; à l'occident, le royaume
de Camboge.
CIANDU , ( Géog. ) ville confidérable
d'Afie tau nord de la Tartarie.
• CIANGLO , ( Géog ) ville de la Chine ■
dans la province de Folkien , fur la rivière
de Si.
CIARTIAM , (Géog.) province d'Afie
dans la Tartarie , dépendante du grand Kan
ou Cham , dont la capitale porte le nom.
^ CIAUL, (Géog.) ville forte d'Afie dans
l'Inde, au royaume de Decan,aux Portugais.
CIBAUDIERE; f. {. terme de Pêche ,
c'efi: le nom qu'on donne fur les côtes de
Flandre & de Picardie aux filets , que dans
d'autres lieux on appelle folles , & dont ils
font une efpece. On en difl:ingue de deux
fortes, les cibaudiere s flottées & les non-flot-
tées. Les cibaudieres flottées ont le fond du
filet à la mer, & l'ouverture du côté de
terre ; on amarre aux deux bouts du filet de
grofles pierres , que les pêcheurs nomment
cabliercs : on en met auflî fur la tète quel-
ques-unes , pour que le filet ne fe puiflè éle-
ver par le moyen des flottes , qu'autant qu'il
efi nécefîaire. Ce filet fait une groffe foliée
dans laquelle fe trouvent pris les poifTons
qui retournent à la mer avec le reflux : ces
fortes de filets font de difFérens calibres &
de fils de diverfes grofTeurs , ils prennent
indiflindement des poifïbns des genres plats
& ronds , au lieu que les folles n'en pren-
nent que du genre des plats.
La
C I B
La maille de la cibaudiere efl d'environ
vingt-une lignes en quarré , & d'un fil rrès-
delié ; dans les lieux où les pierres font rares,
on amarre aux deux extrémités du filet des
torches de paille que l'on enfouit dans le
fable, ce qni afîujettit le filet auûi bien que
feroient les groffes pierres dont on a parié
ci-devant.
La Cibaudiere non-fîottée dilîere de celle-
ci en ce qu'au lieu d'être garnie par le haut
de flottes de liège, dont Fulage cil de faire
tenir le filet à-plomb dans l'eau , elle elt
tendue fiir des perches , ce qui produit le
mûme effet , en ce cas elle ne diffère pas
beaucoup des bas parcs. V^oyei PAP^CS.
CIBIN , ( Ge'ogr. ) rivière du royaume de
Hongrie , dans la Tranfylvanie & dans la
partie de la province Saxone , que l'on ap-
^dl^Aidand. Elle fe jette dansl'Aluta, après
avoir baigné les murs entr'autres de la ville
d'Hermanflad , qu'elle fait appelier en latin
Ciblnium , & en hongrois Sy^ebeni. {D. G.)
CIBOIRE, f. m. {Hift. ecclefiajiiq. &
prof. ) vafe facré où Ton garde les hoifies.
Ocû un vaiffeau en forme de grand cahce
couvert , qui fert à conferver les hoflies
confacrécs pour la communion des chrétiens
dans l'églife catholique.
On gardoit autrefois ce vafe dans une
colornbe d'argent , fulpendue dans les bap-
tifleres & fur les tombeaux des martyrs
ou fur les autels , comme le P. JNiabiilon
l'a remarqué dans fa liturgie de l'églife gal-
licane ; le concile de Tours a ordonné de
placer le ciboire fous la croix qui étoit au
haut de l'autel.
Chez les anciens écrivams , Iclon le dic-
tionnaire de Trévoux , ce mot le diibit
de toutes fortes de confiruâions fr.ires en
voûtes portées fur quatre piliers. Chez les
auteurs eccléfiafèiques , il défigne un petit
dais élevé & fufpendu fur quatre colonnes
fur le maître autel. On en voit dans quelques
églifes à Paris & à Rome, ce qui prouve
que c'efl la même chôiè que baldaquin ;
aufli les Italiens appellent-ils encore ciborio
uïi tabernacle iiblé.
Les connoifîeurs ne peuvent fapporter que,
fousune coupole comme celle du Val-de-G ra-
ce , par exemple , qui eff d'une beauté fupé-
rieure , on voie au delfus de l'autel une petite
clpece de eiboire qui efl mal conçu ^ écrafé ,
Tome VIIL
C I B ^5
enterré , recoigné contre la muraille, & qui
n'ajoute rien à la fplendeur de fon dôme.
Le mot de ciboire vient originairement des
Egyptiens. Ces peuples donnèrent d'abord
ce nom à une efpece de fève de leur pays >
f3.ba aegyptia , dont la gouffe s'ouvroit par
le haut quand le fruit étoit mûr. Ils ont
enlbite tranfporté ce nom à cette goufîè
même qui leur iervoit de coupe. Cette gouflê
efl fort ouverte par le haut , & fort pointue
par le bas. Les Grecs &: les Romains appel-
èrent ciboria , cibsires y toutes les coupes
de quelque matière qu'elles fuffent , dans
iefqueiles on verloit des liquides , & en
particulier le vin que l'on bnvoit dans les
repas, Horace a employé ce terme dans ce
dernier fens :
Obliviofo levia Majjico
Ciboria expie. Lib. II , od. vij.
yy Vuidez les coupes de cet excellent vin de
« Mailique ; il efl fouverain pour dilliper
') les foucis. »
Enfin l'églife romaine a retenu ce mot poul-
ies vafes où l'on mer les hoflies , & qui refient
conf'acrées à l'ufige de la communion. Art.
de M. le cheralier DE JauCOUR-T.
CIBOLA, ( Gt'og. ) province de l'Améri-
que feptentrionale au nouveau Mexique , ha-
bitée par des fauvages. Long. z66 ^ lat. 55.
CIBOULE, f. f. plante qui doit être rap-
portée au genre oignon. V. OiGNON. (/)
Ciboule, Ciboulette, cfj3z//a,(/a/--
dinage. ) eil une plante bulbeuie qui fe feme
cependant , & qu'on peut replanter fur
des planches en tirant des lignes au cor-
deau ; c'efl une efpece d'oignon qui , au
lieu de faire une bulbe en terre , s'allonge
& fait beaucoup de montans , avec des
feuilles allongées & rampantes ; chaque pie
forme un montant en boule remplie de
graine que l'on feme tous les mois de l'année
dans de bonne terre : on leur donne fouvent
t]-j l'eau. Il y en a trois efpeces , une vivace
qui ne produit point de graine ; celle qui
graine &: la troifieme eil la cive , civette ou
ciboulette. (K)
Cicatrice , f f ( CJùrurgie. ) c'efl la
marque de la plaie qui refle après la guéri-
fon , & qui par fa bhmcheur , fon liflê , fon
luifant, fait diffôrer cette partie des tégumens
où étoit l'ouverture de la plaie , de la peau
voiline.
u
C I c
Formation de la cicatrice. Le dernier pé-
riode d'une plaie guérie efl celui de la cica-
trice ; les fucs qui ont réparé la perte de la
Xubilance , fe répandent , fe defîechent lur
la rui>erficie de la plaie, & formen*- cette
petite pellicule calleufe app^llée cicatrice y
qui, iàns être de la même efpece que les
îégumens emportés , fupplée à leur délaut.
Les extrémités tendres & pulpeufes Aqs
vaifTeaux rompus dans une plaie , s'allongent ,
fe joignent , s'unilfent enfemble par les loix
tie la nature , pour réparer ainfi la (ubOance
perdue du corps , & pour former l'incarna-
tion ; cnliiiteles bords de la plaie qui étoient
précédem nent rouges & enfiés , s'abailfent
€galemcac : ils acquièrent une cculeur d'un
blanc tirant fjr le bleu , femblable à celle
à.ts perles ; c'eft de cette manière ^ue com-
mence à naître la cicatrice vers les bords ,
&: qu'elle augmente peu-;\-peu vers le cerk-
tre , jufqu'a ce que la plaie foit entièrement
refermée.
S'il n'y a pas eu beaucoup de fubflance de
perdue , »Sc qu'il n'y ait pas eu non plus beau-
coup de pahnicule adipeux, & de la peau
<:onlommée par une trop forte fuppuration ,
tout fe conlolide de façon , qu'à peine pa-
roît-il quelque différence entre l'endroit de
la plaie & la peau voifme i & à peine cela
peut-il s'appeller cicatrice.
Mais lorfqu'il y a une grande partie de
chair d'enlevée , ou qu'il y a beaucoup de la
inembrane graiïîêufe c^ui ell defTous, decon-
iômmée par la (ùppuration , l'endroit de la
plaie parottra pour lors plus tirant furie bleu.,
plus folide , & fouvent plus enfoncé que la
p eau voifine ; & c'eft-Ll ce qu'on appelle pro-
f rement cicatrice , laquelle ne tranfpire
point, & paroît plus lifie que le ref:e de la
p?au. Cela fe voit encore mieux lorfqu'il s'eit
formé une large cicatrice après l'abceflion
d'un grand morceau de chair , comme dans
l'extirpation de la mamelle ou d'un grand
iléarome ; la lupcriicie de la pièce confoiidée
fe montre alors luiiante ,. immobile , iden-
ti'iée avec les parties qui font deflous.
Signes de la cicatrice naijjànte. Les bords
de la plaie ou de l'ulcère qui doit fe confoli-
der, ccxnmencent a blanchir & à devenir ■
plus termes; & cette blancheur s'avance in-
i^nfibiement de tout le contour de la plaie
vers ion centre ; cependant il com:iience à
C I c
naître ça & là dans la fuperfîcie ouverte de
la plaie une pareille blancheur , qui , fi elle
s'étend également dans toute la liiperficie &
fur le bord des lèvres , forme une bonne ci-
catrice ; la plaie pure précédemment humide
dans tous les points de la fuperfitle , fe feche
dans les endroits où l'on découvre cette blan-
cheur , principe de la cicatrice. C'efl pour-
quoi les renïedes appelles cicatrifans ou epu-
lotiqiies les plus recommandables , font ceux,
qui deifechent modérément & qui fortifient..
De-là vient qu'on applique ordinairement
avec tant de f iccès les emplâtres faits de,
plomb ou des différentes chaux de ce métal ,.
les poudres impalpables de colophone , d'o—
liban , de farcocoUe , &c. fur une plaie ou;
fur un ulcère qui tend à fe cicatrifer.
La beauté de la cicatrice que le chirurgien»
doit toujours tacher de procurer, dépend'
particulièrement des trois- conditions fuivan—
tes : i°..fî l'on a foin que les parties fe trou-
yevït , étant réunies ,. daris la même fiaiation-,
où elles étoient avant la bleifure ; 2.°. fi la-
cicatrice ne furmonte pas l'égale fuperfîcie de
la peau voifine ; 3°. fi elle ne cave pas.
Moyens de procurer une belle cicatrice. On
fatisfera à cette première condition , li l'on
fait enforte , foit par le moyen d'emplâtres,
tenaces,, de futures , ou d'un bandage con-
venable, que les lèvres de la plaie foient
l'urLe par rapport à l'autre dans la même li-
tuation où elles étoient ta état de fanré. On-
fatisferaà la féconde , fi par une preflîon mo-
dérée on fupplée à celle de la peau qui efl.
détruite , de crainte que les vaiffeaux privés,
de ce tégument , étant diflendus par leurs:
liquides , ne furmontent la fuperfîcie de lai
peau ; car lorfqu'on néglige de le faire , ou;
qu'on applique lùr la. plaie des remèdes, trop-
émolliens , ce bourrelet faillant fait unt cica-
trice ditiorme. 3,**. On empêchera que la ci-
catrice ne cave ,. en procurant une bonne
régénération. Or la cicatrice devient ordi-
nairement cave , parce que la preflîon de la
peau voifme noufiele pannicule adipeux dans
l'endroit de la plaie , & V fait élever ; après-
quoi dégénérant en chair fongueufe , i»l efî
confumc pas la ilippuration ,. & ne renaît
plus enfuite..
On vo4.t par-là que fouvenr on ne peut pas;
empêcher qu'il ne refte une cicatrice cvQnfQ':
& profonde ^ fi La caufe vulnérante , ou Hi
C I c
une fuppuration confidérable qui s'en eu en-
fuivie , a détruit la graille. Dès qu'un abcès ,
dit Hippocrate , aph. ^^ , feâ. vij , de quel-
que elpece que ce puifle être, dure un an &
davanrage , l'os apofthume , & il fe fait des
cicatrices fort creufes. Combien font difibr-
mes & profondes les cicatrices que laiflènt
après eux les ulcères vénériens , lorfqu'ilsont
confumé le pannicule adipeux qui éroit au
^eflbus !
On comprend aifément par ce qu'on vient
de dire , la rail'on pour laquelle le chirurgien
doit éviter les caulïiques, les flyptiques , [ts
aftringens , s'il veut procurer une bonne cica-
trice ; car tous ces remed-es ou détruilènt les
vaifTeaux vivans , ou les refTerrent de façon
qu'ils n€ tranfmettent plus de liqueur- Or les
•extrémités des vailîêaux , mortes ou obf-
truées , fe fépareront nécefîairement par la
fuppuration ; ce qui caufera une perte de ûibl-
tance , la confomption de la graifTe , & for-
mera une cicatrice plus ou moins cave.
On voitauflien même temps combien peut
contribuer à la beauté de la cicatrice une
égale preflk)n qui empêche que les vaifleaux
trop diflendus ne s'élèvent. On ne doit pas
néanmoins pour cela détruire la chair fon-
gueufè chaque fois qu'elle bourfouifle , mais
feulement its bords près è^s extrémités de la
peau ; on y parviendra par de doux efcaroti-
ques , tels que la charpie trempée dans une
légère difToIution de vitriol, ou le plus (buvent
par l'ufage fculde la charpie {èche & un ban-
dage ferme ; ce qui fuffira pour réduire au
niveau la cliair fongueufè , fi on l'applique
-avant qu'elle ait acquis trop d'accroifïêment.
Obfervations de pratique. Dans les gran-
des plaies il efl inutile d'appHquer les remèdes
corrofifs fur toute leur furface , parce que la
^hair fongueufe ne s'élève qu'à une certaine
hauteur , lorfqu'elle eft abandonnée à elle-
même , & qu'elle s'y élevé Ibuvent , malgré
le fréquent uiàgc des corrofifs qui la détrui-
(ènt. Or comme tout l'avantage qu'on peut
recueillir de tels remèdes , eft uniquement ,
pour procurer une belle cicatrice ^ d'applanir
les bords de la plaie , on en viendra égale-
ment à bout en iè contentant de les tenir
aflfujettis ; & on évitera beaucoup de peine
que donneroit la répétition continuelle à&s
tfcarotiques.
Il eft remarquable que la perte d'une par-
G I C ^7
tie du cofps ne fauroit être réparée que par
les fluides qui font propres à cette partie ;
& comme dans un os caflé, le calus eft pro-
duit par les extrémités de la fraûure , ainfi
dans une plaie la cicatrice vient du bord de
la circonférence de la peau. C'cft pour cette
raiibn qu'il eft néceflaire de maintenir la fur-
face de la plaie unie par des bandages cora-
preflils , afin que l'élévation des chairs ne
réfifte pas aux fibres des vaifleaux de la peau
qui tendent k recouvrir la plaie. Quand je dis
que la perte d'une partie du corps doit néccl^
lairement être réparée par les mêmes fluides
qui compofeient auparavant cette part'e ,
j'entends cela dans la fuppoiition que la
nouvelle formation foit de même (ubftance
que la partie bleflee , comme le c.lus eft par
rapport à l'os , & la cicatrice par rapport à la
peau : car généralement parlant , un vuide ne
fè remplit que d'une efpece de chair , quoi-
qu'il y eût dans cet endroit , avant la blel-
fure , diftérentes (brtesde fubftances ; favoir
de la membrane adipeulè , de la membrane
des mufcles , & celle du mufcle même.
On voit par les détails précédens combien
eft vaine la promefl'e de ceux qui le vantent
de pouvoir guérir toutes lortes de pkies fans
cicatrice. Les chirurgiens prudens & expéri-
mentés n'ofent jamais , après une grande
perte de fubftance ou une longue fuppura-
tion , afTurer que la cicatrice ne fera pas dif-
forme , & ils doivent toujours en avertir le
blefle , dans la crainte que l'on n'attribue à
la négligence du chirurgien la diffbrmité de
la cicatrice.
N'oublions pas de remarquer qu'il eft à
propos de fomenter fou vent la cicatrice avec
l'efprit de romarin , de matricaire , ou
autres fèmblables ; car tous ces efprits ont la
propriété d'aftermir les parties animales. Cet
endroit refte long-temps plus débile , cou-
vert feulement d'une pellicule mince , &
plus aifé par conféquent à être oliénfé que
les parties voilines. De-là vient qu'il eft quel-
quefois néceffaire d'appliquer long-temps en-
core fur cet endroit , quoique déjà confo-
lidé , un emplâtre doux préparé avec le
plomb ou une peau mollette , de peur que
le frottement des habits , l'air , ou quelque
accident ne renouvelle la plaie.
On trouve à ce fujet une obfervation eu»
rieufe dans les mémoires d'Edimbourg ^
I 2
6S ^^-'-^'^ C I c
tom. II y fur une portion du cerveau poufle^
par les efforts d'une toux violente , hors du
crime , à travers la cicatrice d'une piaie à la
tête oime fille âgée d'environ treize ans. Le
chirurgien , après avoir guéri la plaie , avoit
eu foin de recommander à la malade de por-
ter toujours fur la cicatrice une comprefle de
linge , & fur la compreife une plaque de
plomb percée aux quatre extrémités d'autant
de trous , où feroient pafîés des rubans de fil ,
deux defquels fe iicroient fous la mâchoire
inférieure , & les deux autres derrière la tête.
La malade fjivit l'ordonnance pendant deux
mois ; mais enfiiite elle cefla de fe fervir de
cette plaque , & continua àfe bien porter pen-
dant fept autres mois , après lequel temps elle
fut attaquée d'une toux convuliive avec tant
de violence dans le cours d'une nuit , que la
cicatrice de fa plaie fe déchira , & que le cer-
veau fut forjeté hors des tégumens ; ce qui
lui eau fa la mort au bout de cinq jours.
La cicatrice refie toujours. Concluons qu'il
€ft nécefl'aire de confoiider la cicatrice ; mais
quand une fois la cicatrice eft bien certaine-
ment confolidée , ne pourroit-on pas alors ,
par le fecours de fart , la corriger , l'effa-
cer , la détruire , & rendre cette marque
blanche qui refle dans l'endroit de la plaie
guérie , entièrement pareille à la peau voi-
iine ? Ce font les dames qui font cette quef-
tion : je leur réponds que cette marque blan-
che efi ineffaçable , & qu'elle reflèmble aux
effets de la calomnie , dont après que les
plaies qu'elle a faites font refermées , les
cicatrices demeurent toujours. Cet article efi
de M. le Chevalier DE JaucoURT.
CICERO , f. m. ( Fond, en caraco, ) hui-
tième àes corps fur lefquels on fond les ca-
raderes d'imprimerie : l'a proportion eff de
deux lignes mefure de l'échelle. Son corps
double eff la palefline , & il efl: le double de
la nompareille : c'efl-à-dire qu'il eft une fois
j^lus grand que ce caradere , & une fois plus
petit que la palefline.
Le cicéro eft le caraétere le plus en ufàge
a-l'imprimerie. Voye\ l'exemple du cicéro à
Part. Caractères d'Imprimerie , où
nous fommes entrés dans le détail fur la
grandeur des différens caraôeres.
CICÉRONE , f m. ( Hifi. mod. ) c'eft
ainft qu'on appelle en Italie ceux qui con-
jioiirent les chofes dignes de la curiofité des
C I D
étrangers qui peuvent être dans une ville , &
qui les conduii'ent dans les lieux où elles lont.
CiCLUT , ( Ge'og. mod. ) fort de la Dal-
marie. Lon?,. 55 , A^ ,- lat. 4.^ , 2.5.
CICUTAIRE, 1. f. ( Hijl nat. bot. )
cicutaria 5 genre de plante à fleurs en roie ,
difpofécs en ombelles. Les pétales font lou-
tenues par le calice , qui devient dans la
fuite un fruit , compolé de deux femences
renflées , longues , voûtées , faites ù-peu-près
en forme de croifîànt , & cannelées proton-
dément. Ajoutez aux caraderes de ce genre ,
que les feuilles font femblables en quelque
manière à celles de la ciguë". Tournefort ,
infl.reilierh. Fbyf;(PLANTE. (/)
CIDAMBARAM , ( Géog. ) ville d'Afie
dans les Indes , au royaume de Gingi , liir
la côte de Coromandel.
* CÎDARIS ou CITT ARIS , f m. ( Hijh
anc. ) bonnet pointu qu'on portoit autrefois
en Perfe & en d'autres contrées de l'Orient.
Les rois de Perfe le couvroient d'un ruban
bleu & blanc , marque de la dignité royale ;
la pointe en étoit ou droite ou courbéç en
devant. Chez les Hébreux les prêtres por-
toient aufll de ces bonnets ; mais celui du
grand-prêtre étoit plus haut que les autres,
& il avoit une lame d'or appellée lamina co~
ronœ fancfitatis , qui alloit d'une oreille à
l'autre en paflânt fur le front : cette lame
étoit attachée au bonnet avec des fils de cou-
leur hiacinthe , & on y hfoit , kedefck Jeho-
vce y fanctitas Jehovœ. Voyez hed. lex.
\ CiDA YE , ( Géog. ) ville d'Afie dans
l'île de Java , au royaume de Surubaya.
* CIDRE , f. m. ( Econom, rufi. j ho'iC-
fon que l'on tire de la pomme. Elle eft trçs-
ancienne ; les Hébreux rappelloientyrc/iar,
que S. Jérôme traduit parTzcera ^ d'où nous
avons fait cidre. Les nations poftérieures
l'ont connu ; les Grecs & les Romains ont
fait du vin de pomme. Parmi nous il eft
très-commun , fur-tout dans les provinces
où l'on manque de celui de raiim."
Li Normandie eft pour le cidre y ce que
font la Bourgogne & la Champagne pour
le vin ; & de même que le vin n'eft pas égale-
ment bon dans tous les cantons de ces pro-
vinces , tous les cantons de la Normandie ne
donnent pas du cidre de la même qualité. Il
s'en fait en abondance , & d'excellent , fur-
tout dans le pays d'Auge & le Beflin , ou
C I D
les environs d'Ifigny. Le fruit À couteau n'y
vaut rien. Le cidre fe tire de pommes rulli-
ques de plufieurs efpeces , dont il faut bien
connoitreies fucs , afin de les combiner con-
venablement , & de corriger les uns par les
autres. On élevé àcs pépinières de pommiers
de cette espèce de pommes , on les greiFe
en fente , on les plante en quinconce ,
ou on en drelîe des allées. Il y a peut-être
plus de trente fortes de pommes à cidre ,
qu'on cueille en difrérens temps à mefurc
qu'elles paroiflent mûres; & elles mûrif-
fent plus "ou moins promptement , félon
que les années font plus ou moins avancées.
On les diftribue en trois dafles dilférentes ;
dont on fait la récolte fuccefïîvement. On
"donne le nom de pommes tendres aux deux
' premières clalîes , & celui de pommes dures
à la troifieme. En effet les pommes de la
troifieme clafTe font dures , & mûrifîent
tard & difficilement. Une règle générale
pour la récolte , c'eft de choilîr un temps
{<ec , pendant lequel les pommes foient
e^uyées de toute humidité.
Ce jour-là efl ordinairement vers la fin
de feptembre ou le commencement d'oc-
tobre ; on fe tranfporte vers les arbres ; &
comme il y auroit trop d'ouvrage à cueillir
les fruits à la main , on les abat , loit à coups
de gaules , foit en fecouant les arbres : on
les ramafîe , on les porte fur le grenier : on
les y met en tas fuivant leur clalîe : là ils
s'échauffent , ils fuent , & ils achèvent de fe
mûrir.
S'il y a un point de maturité à choifîr
pour la récolte des pommes , il y en a un
autre qui n'efl pas moins important à con-
r»o]tre pour les piler : on laifTe palTêr aux
pommes qu'on appelle tendres y de beaucoup
le temps de la- plus grande maturité , avant
que de les piler pour les' cidrer; les pom-
mes dures au contraire fe pilent vertes. On
juge du progrès de. la maturité des pom-
mes entaÔées dans les greniers , par l'accroif-
■fement de l'odeur qu'elles exhalent ; quand
cette odeur a pris un degré de force que la
ièule expérience apprend à connoître , il eff
temps de faire le cidre ^ & de porter le fruit
à la pile.
Voici la conflrudion de la pile : imagi-
nez une auge circulaire de pièces de bois
rapportées à deux meules de bois femblables
C r D ^9
à celles d'un moulin à blé , mais différem-
ment pofées ; celles du moulin à blé font
horizontales, celles de la pile à cidre font
verticales dans leur auge : elles font appli-
quées contre une pièce de bois verticale ,
mobile fur elle-même , & placée au centre
de l'efpace circulaire de l'auge ; un long
eiiieu les traverfe ; cet eflîeu efl afîemblé
avec l'axe vertical ; fbn autre extrémité
s'étend au delà de l'auge ; on y attelé un
cheval ; ce cheval tire l'eflieu en ifiarchant
autour de l'auge , & fait mouvoir en même
temps les meules dans l'auge , où les pom-
mes dont on l'a remplie font écrafées. Lorf-
qu'on les juge convenablement écrafées ,
c'eli-à-dire afîèz pour en pouvoir tirer tout
le jus , on les prend avec une pelle de bois ,
& on les jette dans une grande cuve voifine.
On écrafe autant de pommes qu'il en faut
pour faire un marc.
Les meules de bois font meilleures que
celles de pierre. Il faut que l'auge Ibit bient
clofe , & que les pièces en foient bien afîèm-
blées , pour que rien ne fe perde. Ceux qui
n'ont pas de grandes piles à meules tour-
nantes , fe fervent de pilons & de maliûes ,
dont ils pilent le fruit à force de bras.
Alors on travaille à afTeoir le marc fufv
l'émoi du prefîbir., Le prefîbir eft compofé
d'un gros fbmmicr de bois qui s'appelle Ici
brebis , de vingt-quatre à vingt-huit pies de
longueur , pofé horizontalement fur le ter-
rain , & d'un arbre appelle le mouton ^ de
pareille figure , & élevé parallèlement fur
la brebis : le mouton eft foutenu au bout
le moins gros par une forte vis de bois ,
dont l'autre extrémité fe rend pareillement
au bout le moins gros de la brebis. Au mi-
lieu de la longueur de ces deux arbres il y
a deux jumelles , i& à leur gros bout deux
autres jumelles ; ce font quatre pièces de
bois plates , arrêtées fixement par le bout
d'en bas à la brebis , & par en haut à des
traverfes qui les tiennent fblidement unies ,
& les empêchent de s'écarter. Le mouton
haufTe & baiiTe entre les quatre jumelles ,
& toujours à-plomb fur la brebis. On a une
traverfe que l'on met à la main ibusie mou-
ton dans les jumelles du côté de la vis , où
on les a difpofées à la recevoir & à la fou-
tenir : à l'aide de cette traverfe on fait hauf^
fer & baifîèr en bafçule le gros bout du ajotf»
70 Cl D
ton. Pour les jumelles de derrière oh a des
morceaux de bois qu'on appelle des ; ces
clés fervent foit à tlipporter , Toit à faire
preffer le mouton.
On établit entre les quatre Jumelles fur
la brebis un fort plancher de bois qu'on
appelle le chajjîs d'émoi ; ce plancher a un
rebord de quatre pièces de bois qu'on nomme
rofeaux d'émoi ; ce rebord contient le jus
de la pomme ; il ne peut s'écouler que par
un endroit qu'on appelle le beron , d'où il
tombe dans une petite cuve.
On élevé perpendiculairement fur l'émoi
le marc des pommes , par lits de trois ou
quatre pouces d'épaifleur, féparés par des
couches de longue paille ou par des toiles
de crin , jufqu'à la hauteur de quatre à cinq
pies. Le marc ainfi difpofé a la forme d'une
p}Tamide tronquée & quarrée.
Quand le marc eft mis en motte de cette
forme, il y a au deilbus dû mouton un
plancher qui lui eft attaché , qui ti\ de la
grandeur de celui qui porte le marc , &
qu'on nomme le hec : par le moyc n de la
vis qui eft au bout de la brebis & du mou^
ton , on fait defcendre le mouton ; le hec eft
fortement apphqué fur le n^arc , & la preiïion
en fait (brtir le jus.
On laiflê quelque temps la motte ajBfàiflee
fous le hec avant que de le relever : quand le
jus n'en coule plus guère , on defferre le
prefîbir , on taille la motte quarrément avec
le couteau à prefîbir , qui eîl un grand fer
recourbé & emmanché de bois ; on charge
les recoupes fur la motte , & l'on continue
A preffurer , recoupant & chargeant jufqu'à
ce que le marc foit épuifé.
Au bas de la vis du prefîbir il y a un bâti
de bois placé horizontalement fur la brebis,
& cmbrafîânt la vis ; ce bâti efl une efpece
de roue dont les bras font des leviers ; il y
a des chevilles fur la gente de cette roue ;
on prend ces chevilles à la main, on tourne
la vis ; le mouton defcend d'autant plus , &
prefîè le marc d'autant plus fortement.
A mefure que la petite cuve qui efl fous
Je beron de l'émoi fe remplit , on prend le
cidre & on l'entomie. L'entonnoir eft garni
d'un tamis de crin qui arrête les parties grof-
fieres de marc qui fe font mêlées au cidre.
On ne remplit pas exadement les tonneaux ,
Gn y kifTç k hauteur de quatre pouces de
C I D
vulde ; on les defcend dans la cave , où oii'
les lailîe ouverts , car la fermentation du
cidre eu violente : là le cidre fermente & fe
clarifie ; une partie de la lie efl précipitée au
fond , une autre efl portée à la flirface ; celle*
ci s'appelle le chapeau.
Si l'on veut avoir du cidre fort , on le laifîê
repofer fur fa lie , & couvert de fbn cha-.
peau : fi on le veut doux , agréable & dé-
licat , il faut le tirer au clair lorfqu'il com-
mence à gratter doucement le palais ; ce cidre
s'appelle cidre paré. Pour lui conferver fâ
qualité , on lui ajoute un fixieme de cidre
doux au fbrtir de l'émoi ; cette addition ex-^
citç une féconde 'ferme ntation légère, qui
précipite au fond du tonneau un- peu "de He ,
& porte à la flirface de la liqueur un léger
chapeau,
Quand on a tiré le jus du marc qui efl
fiir l'émoi , on enlevé le marc , & on le
remet à la pile avec une quantité fufîifante
d'eau ; on broie le marc avec l'eau , & l'on
rapporte le tout à un prefToir où il rend le
petit cidre , qui efl la boiiTon ordinaire du
menu peuple. Le premier fuc s'appelle le
gros cidre.
Le petit cidre efl d'autant meilleur que le
marc a été moins prefiuré. Il paie ordinai-
rement les frais de la cucillete. Le marc
de quatre gros muids de cidre donne deux
muids de petit cidre. Il y a donc du profit
à avoir à foi un preffoir , parce que le marc
refle au propriétaire du prefToir , avec le
prix qu'on fait par motte quand on pref^
fure chez les autres. Quand le marc efl
toutrà-fait fec, il fert encore d'engrais aux
cochons & aux arbres , ou on le brùie.
Quand le cidre a féjourné afîéz long-temps
dans les futailles pour y prendre le goût agréa*
ble qu'on lui veut , on le colle çomrne le vin ,
& on le met en bouteilles.
Le bon cidre doit être clair , ambré ,
agréable au goût & à l'odorat , & piquant.
Il y en a qui fe garde jufqu'à quatre ans.
Les cidres légers ne pafîènt guère la pre-
mière année.
Il faut communément trente fîx boifleaux
ou fix mines de pommes , pour faire un muid
de cent foixante-huit pots de cidre. Qn dit
que les meilleurs cidres font fujets à la cappe ,
ou à une efpece de croûte qui fe forme à
leur furface ; & qui venant à fe brifer quand
C I E
k tonneau efl a la barre , met tout le réile
du cidre en lie. Cette croûte ne Te brifant
ue quand le tonneau eft à la barre , il y a
e l'apparence qu'il faut attribuer cet acci-
dent à l'extrême fragilité de la cappe , & à
ïa diminution de la furface horizontale du
tonneau : à raefure que le tonneau fe vuide ,
la furface horizontale de la Uqueur augmente
depuis la bonde jufqu'à la barre ; depuis la
barre jufqu'au fond , cette furface diminue
en même proportion qu'elle avoit augmenté.
Qu'arrive-t-il? c'eft que , pafTé la barre , la
cappe appuie contre les parois du tonneau ,,
& refleroit fufpenduj en l'air fans toucher
à la furface du cidre qui feroit plus baffe
qu'elle , fi elle en avoit la force ; mais
comme elle eft foible , elle fe brifè , (qs frag-
mens tombent au fond , fe difîblvent & trou-
blent tout le refte du cidre. Il me femble que
Àts vaifîèaux quarrés ou des tonneaux placés
debout , remédieroient à cet inconvénient ; la
cappe defcendroit avec la liqueur par un
efpace toujours égal , & toujours foutenue
par-tout , fans qu'on pût appercevoir aucune
occafion de rupmre-
On fait avec les poires ruiliques Iq cidre
poiré , coiTvme avec les pommes ruftiques le
cidre pommeWoye'^V OlKt.,
On tire encore àts cormes un cidre qu'on
appelle cor/77^'. Kq>'e;jCoRME.
On tire du cidre pommé une ean-de-vie
dont on ne fait pas grand cas ; & l'on peut
en tirer un aigre , comme on fait un aigre
de vin.
Le cidre pafle en général pour pedoral ,
apéritif, humedant & rafraîchiflant. L'ex-
cès en eft très-nuifible. On prétend que quand
on n'y eîl pas fait de jeunelTe , il donne des
coliques , qu'il attaque le genre nerveux ,
& qu'on ne guérit de ces incommodités
qu'en quittant cette boiflon & changeant
de climat.
CIEL , f. m. ( Phyjiq, ) fe dit vulgaire-
ment de cet orbe azuré & diaphane qui envi-
ronne la terre que nous habitons , & au de-
dans duquel paroillent fe mouvoir tous les
corps céleffes. V'oyeT^ TERRE , Ùc.
C'efl là l'idée populaire du ciel; car il
faut obferver que ce mot a divers autres
fens dans le langage des philofophes , des
théologiens & des agronomes , félon loi-
quels on peut établir plufisurs fortes dç àçux^
C I E 71
comme le ciel empyrée ou le cielfupérieur ^
la région éthérée ou le ciel étoile , & le ciel
planétaire.
Le ciel des afîronomes , qu'on nomme
aufli le ciel étoile ou région éthérée , eil cette
région iramenfe que les étoiles , les planè-
tes & les comètes occupent. V. ETOILE >
Planète, ùc
C'eff ce que Moyfè appelle X^z firmament y,
lorlqu'il en parle comme étant l'ouvrage du
fécond jour de la création , ainfi que quel-
ques interprètes renient cet endroit de la Ge-
nefe , quoiqu'en cela ils fe foient écartés un
peu de fon vrai fens pour favorifer l'ancien-
ne opinion fur la folidité des deux. Il efi
certain que le mot hébreu lignifie propre-
ment étendue , term;^ dont le pror)hete s'efl
fèrvi avec beaucoup de jufîefTe pour expri-
mer l'impreflion que les deux font fur nos
ïer\s,. C'efl ainfi que dans d'autres endroits
de l'écriture fainte le ciel eff comparé A ua
rideau , à un voile , ou à une tcnre drcfïée
pour être habitée. Les feptante furent les
premiers qui ajoutèrent à cette idée d'éten-
due , celle àe fermeté ou àe folidité , en
rendant le mot hébreu par çi'^^aij.et , con-
formément à la philofophie de leur temps ;
& les tradudeurs modernes les ont fuivis
en cela-
Les affronomes ont dîflribué le ciel étoile
en trois parties principales ; favoir , le zodia-
que qui efl la partie du milieu & qui ren-
ferme douze conifellations ; la partie fepten-
trionale , qui renferme vingt-une conflella-
tions; & la partie méridionale qui en ren-
ferme vingf-lèpt , dont quinze étoient con-
nues des anciens , & douze n'ont été connues
que dans ces derniers temps , parce qu'elles
ne font point vifibles fur notre hémiîjphere.
Foyf:[ Constellation.
Les philofophes modernes , comme Def^
cartes , & plufieurs autres , ont déir o itré
facilement que ce ciel n'efl point folide.
Chambers.
II n'ell pas moins facile de réfuter cent
vieille opinion des fedateurs d'Ariffote ,
qui prétendoient que les deux étoient in-
corruptibles, & de faire voir qu'elle efl
abfolument faufîê & dénuée de raifons.
P-ut-être qu'étant trop prévenus en faveur
de tous ces corps lumineux qche nous voyons
dausJieaW, ils fc font laiffé entraîner à dke
7i C I E
qu'il ne pouvoit jamais y arriver de chan-
gement ; & comme il ne leur en coûtoir
guère plus de multiplier les avantages ou les
propriétés des corps célcftes , ils ont enfin
pris le parti d'afîlirer que la matière des
deux eft tout-à-fait différente de celle dont
la ferre ei\ formée ; qu'il flalloit regarder la
matière terrcffre , non-feulement comme
fujette A fe corrompre , mais encore comme
étant propre à prendre toutes fortes de
configurations ; au lieu que celle dont les
corps céleilcs ont été formés , étoit au con-
traire tellement incorruptible, (ju'ils dévoient
nous paroître perpétuellement ibus une même
formé , avec les mêmes dimenfions , fans
qu'il leur arrivât le moindre changement.
Mais les obl'ervations nous apprennent
que dans le foleil ou les planètes il fe forme
continuellement de nouvelles taches ou amas
de matières très-confidérables , qui fe dé-
truifent ou fe corrompent enfuite ; & qu'il
y a des étoiles qui changent , qui dilpa-
roiflenr ou qui paroifTent tout-à-coup. En
un mot oh a été forcé depuis l'invention des
lunettes d'approche , de reconnoître divers
changemens dans les corps céleffes. Ainli
c'eff une chofe certaine que dans les planè-
tes , fur la terre , & pamii les étoiles , il fe
fait des changemens continuels : donc la
corruption générale de la matière doit s'éten-
dre à tous les corps ; car il y a par-tout l'uni-
vers un principe de génération & de corrup-
tion. Infi. afir.
Les cartéfiens veulent que le ciel foit plein
ou parfaitement denfe , fans aucun vuide ,
& qu'il foit compofé d'un grand nombre de
tourbillons. Voyei Etiier , CartÉSIA-
:NISME , Ùc.
Mais d'autres portant leurs recherches plus
'loin , ont renverfé le fyltême non-feu!ement
de la folidité , mais auffi de la prétendue plé-
nitude des deux.
M. Newton a démontré que les deux font
à peine capables de la moindre rélifl:ance ,
& que par conféquent ils font preique dé-
pourvus de toute matière ; il l'a prouvé par
les phénomènes des corps céleftes , par les
moivemens continuels des planètes , dans
la vîtefie delquels on ne s'apperçoit d'aucun
ralcntifïèment ; & par le pafTage libre des
comètes vers toutes les parties At?i deux p
quelles que puiiTent être leurs diredions.
C lE
En un mot les planètes , félon M, New-
ton, fe meuvent dans un grand vuide, fi
ce n'efl que les rayons de lumière & les exha-
iaifbns des difFérens corps célefles mêlent utr
peu de matière à àcs elpaces immatériels
prefque infinis. En effet on prouve que le
milieu où fe meuvent les planètes peut être
fi rare , que fi on en excepte la maflè des
planètes & des comètes , aufîi bien que leurs
atmofpheres , ce qui refle de matière dans
tout l'efpace planétaire , c'eff-à-dire , depuis
le foleil jufqu'à l'orbite de faturne , doit être
fi rare & en fi petite quantité , qu'à peine
occuperoit-elle , étant ramaflée, plus d'ef^
pace que celui qui efl contenu dans un pouce
d'air pris dans l'état où nous le refpirons. La
démonfiration géométrique s'en trouve dans
les ouvrages de MM. Newton , Keiil &
Grégori : mais celle qu'en a donnée Roger
Cotes , dans i^Qs leçons phyjiques , paroît
plus fimple , S>i plus à la portée des com-
mençans. V. RÉSISTANCE, PlanetE ,
Comète , Tourbillon , ùc Infl. aftr.
de M. le Monnier.
LeaV/étant pris dans ce Çqvis général pour
fignifîer toute l'étendue qui efl entre la terre
que nous habitons & les régions les plus éloi-.
gnées des étoiles fixes , peut être divifé en
deux parties fort inégales , félon la matière
qui les occupe ; favoir , l'atmofphere ou le
ciel aérien , qui elt occupé par l'air ; & la
région éthérée , qui efl remplie par une ma-
tière légère , déliée & incapable de réiif-
tance fenfible , que nous nommons e'ther.
Voyei Atmosphère , Air , Ether.
Chambers. (O)
Ciel , dans Vaftronomie ancienne _, fi-
gnifie plus particulièrement un orbe ou une
région circulaire du ciel e'théré. V. OreE.
Les anciens aflronomes admettoient au-
tant de deux difFérens qu'ils y remarquoient
dt difîerens mouvemens, ils les croyoient
tous folides , ne pouvant pas s'imaginer qu'ils
puiîènt , fans ztxit folidité , foutenir tous les
corps qui y font attachés : de plus ils les fai-
foient de cryffnl , afin que la lumière pût
pafîèr à travers ; & ils leur donnoient une
forme fphérique , comme étant celle qui
convenoit le mieux à leur mouvement.
Ainfi on avoit fept deux pour les fèpt
pknetes ; lavoir , le ciel de la Lune , de
Mercure , de Vénus , du Soleil , de Mars ,
de
C ÎE
de Jupxîter, de Saturne. Kbj. PLANETE, 6v.
Le huirieme , qu'ils nommoient le firma-
ment^ étoit pour les étoiles fixes. V. ETOILE
ù Firmament.
Ptolomée ajouta un neuvième aV/, qu'il
appella /)r//72w/;2 mobile , le premier mobile.
VoyeT^ Mobile.
Après Ptolomée, Alphonfe roi deCaftilie
ajouta deux a>z/x cryftallins, pour expliquer
quelques irrégularités qu'il avoit trouvées
dans le mouvement des deux. On étendit
enfin fur le tout un ciel empyrée , dont on
a fait le féjour de Dieu , & ainfi on compléta
le nombre àQAoMzt deux. Voy. EmpyréE,
ùplus bas Ci-EL DES Théologiens.
On fuppofoit que les deux deux cryfiallins
étoient fans aftres , qu'ils entouroient les
deux inférieurs , étoiles & planétaires , &
leur comrauniquoient leur mouvement. Le
premier ciel crylkllin fervoit à rendre compte
du mouvement des étoiles fixes , qui les fait
avancer d'un degré vers l'orient en (oixante-
dix ans ^ d'où vient lapréceiiion de l'équi-
noxe. Le fécond ciel cryllallin lêrvoit à
expliquer les mouvemens de libration par
iefquels on croyoit que la fphere célefîe fait
des balancemens d'un pôle à l'autre. Voye'{
Précession, Libration, ùc.
Quelques-uns ont admis beaucoup d'autres
■deux ^ félon leurs différentes vues & hypo-
theies'. Eudoxe en a admis vingt-trois ; Ca-
îippu^, trente; Régiomontanus , trente-
trois ;'Arjffote , quarante-fept , & Fracaflor
en comptoit julqu'à foixante-dix.
Nous pouvons ajouter que iesaflronomes
ne fe mettoient pas fort en peine fi les deux
■qu'ils admettoient ainfî étoient réels ou non ;
il leur fufEfoit qu'ils pufîènt fervir à rendre
railon des mouvemens célefles , & qu'ils
f ufîent d'accord avec les phénomènes, l^oy.
Hypothèse, Système, Phénomè-
ne , &c. Chambers. ( O )
Parmi plufieurs rêveries des rabbins , on
lit dans le talmud qu'il y a un lieu où les
deux & la terre fe joignent ; que le rabbin
Barchana s'y étant rendu , il poià fon cha-
peau fur la fenêtre du ciel , & que l'ayant
voulu reprendre un moment après , il ne le
retrouva plus , les aVi/xl'avoient emporté; il
faut qu'il-attende la révolution des orbes pour
le rattraper.
ÇiEL , {Théolog.) le ciel des théologiens ,
Tome Vni.
C I E 7^
qu'on nomme auffi fe ciel empyrce ^ cil le
féjour de Dieu & des efprits bienheureux ,
comme des anges & des âmes des juiles
trépafîés. Voye^ Dieu , Ange , &c.
Dans ce fens ciel eft l'oppofé de V enfer*
Fb>r:(ENFEPv.
C'elt ce ciel empyrée que l'écriture fainte
nomme fouvent le royaume des deux ^ le
ciel des deux , & que S. Paul , félon quel-
ques-uns , appelle le troijume ciel , quel-
quefois le paradis , la nouvelle Jérufalem ,
&c. Voye-{ EmpirÉE , &c.
L'on fe figure ce ciel comme un endroit
fitué dans quelque partie bien éloignée de
l'efpace infini , où Dieu permet qu'on le
voie de plus près , & d'une manière plus
immédiate ; où il manifefîe fa gloire plus
fenfiblement ; où l'on aune perception de
\^Qs attributs plus adéquate qu'on n'en peut
avoir dans les autres parties de l'univers,
quoiqu'il y foit également préfènt. î^oye:^
Univers , Ubiquité , ùc
C'efl auili eii cela que confifle ce que les
théologiens appellent vijjon b'éatifique. Voy.
Vision. Quelques-auteurs ont nié fort légè-
rement^ (on ne fait pas pourquoi ) la réalité
d'un iemblabie ciel local.
Les auteurs infpirés, & fur-tout le pro-
phète Ifaïe , &S. Jeitn l'évangélille , font de
fuperbes defcriptions du ciel, de (affrufîure,
de fcs ornemens & embeiliffemens , & de la
cour qui Thabitc.
Le philofophe Platon dans fon dialogue fur
rame , parle du ciel dans des termes fi fem-
blables à ceux de l'écriture fainte, qu'Eufébe
n'héfite pas de le taxer d'avoir emprunté
delà ce qu'il en dit , de prœpar. evangel. lib.
XI f cap» x: XI' ij.
Les anciens Romains , dans leur lyfîême
de théologie ^ avoient une forte de <:/>/ qu'ils
nommoient c/ia/TT/jj- élifées y elyfum. Voye^
Champs Ei.ysées.
Le ciel ou le paradis des mahométans efl:
une fidion très-groiliere, conforme au génie
de leur religion. Voye^ AlcorAN é? Ma-
HOMÉTISME. {G)
Ciel, (Décor, théat.) on donne ce
aux plafonds de l'opéra , lorique le théâtre
repréfente un heu découvert comme on dit
le ciel d'un tableau. Lorfque le ciel eu bien
peint, qu'on'y obferve avec foin les gmda-
tiens nécefTaires , & qu'on a l'attentionjdè
K
74 C I E
ie bien éclairer , c'eft une des plus agréables
parties de la décoration. L'effet feroit de la
plus grande beauté , fi on y faifoit fervir la
lumière à rendre aux yeux du fpedateur les
diverfes teintes du jour naturel. Dans la re-
préfentation d'une aurore , d'un jour ordi-
naire ) ou d'un couchant , ces teintes font
toutes différentes , &pourroient être peintes
à l'œil par le feul arrangement des lumières.
Les frais ne feroient pas plus coniidérables,
peut-être même feroient moindres. Cette
beauté ne dépend que du loin & de l'art.
Les plafonds changent avec la décoration
parle moyen du contrepoids. V. DÉCORA-
TION , ChangemENS, PLAFONDS. {B)
Ciel de Carrière , eil le premier
banc qui fe trouve au deffous des terres en
fouillant les carrières , & qui fert de plafond
à mefure qu'on les fouille.
CIEKANOW , ( Géog. ) petite ville de
Pologne en Mafovie , dans le palatinat de
Czersko , capitale du Caftellanio de même
nom.
CIEME , ( Géog. ) ville de la Chine dans
la province de Xantung. iaf. 56'. 5.J.
CIERGE ÉPINEUX , {Hifl. nat. bot.)
plante qui doit être rapportée au genre ap-
pelle melocaBus. Voy. MeloCACTUS. (/)
Ce cierge s'appelle encore cierge du Pe'rou^
flambeau du Pérou, cereus Peruvianus.
James a manqué de goût en omettant
dans Ion ouvrage la belle & bonne delcrip-
tion que M. de Jufiieu a donnée en 17 16 du
cierge du Pérou, [mém. d.e Vacad. des Se.
tj z6, in-4.^. pag. 14^? avecfig.) ; je me
garderai bien de la fupprimer dans un didion-
naire où la botanique exotique , qui efî: la
moins connue , doit tenir fa place.
Defcription du cierge épinzux du jardin du
Toi. Deux fortes de gens , remarque d'abord
M. de Juilieu, nous ont parlé du cierge épi-
neux ,\es uns en voyageurs , les autres en
botanifles : ceux-là frappés du peu de reflèm-
blance qu'ils ont vu de cette plante à toutes
celles de l'Europe ,fe font plus attachés dans
l:urs relations à étonner leurs lefteurs par le
inerveilleux du récit qu'ils en ont fait , que
par le vrai qu'ils n'étoient pas en état de rap-
porter , faute d'avoir quelque teinture de
botanique : ceux-ci ne nous en ont décrit
que des elpeces différentes de celles dont il
s'agit ici ; ou H l'on prétend que ce foit la
C i E
même qu'ils aient décrite , on ne pourra re-
garder leurs defcriptions que comme impar-
taites.
La plus exade doit donc être celle gui
fera d'après la nature même , & fur les obfer-
vations qu'aura permis de faire la commo-
dité du lieu où on a pu la voir en toute forte
état.
Cette plante , qui fut envoyée de Leyde
au commencement du llecle par M. Hotton,
profelfeur en botanique au jardin de cette
ville-là , à M. Fagon , premier médecin de
Louis XIV & lùrintendant du jardin du
roi , y fut plantée , n'ayant alors que trois
à quatre pouces i'ur deux & demi de dia-
mètre.
Depuis ce temps-là , on a obfervé que
d'une année à l'autre , elle prenoitun pié &
demi environ d'accroilîément;, & que la crue
de chaque année fe diflingue par autant d'é-
tranglemens de fa tige ; en forte qu'elle étoit
déjà parvenue dans l'année 17 16 à 2,3 pies de
hauteur fur fept pouces de diamètre, mefurée
vers le bas de fa tige. -
La figure droite & longue de la tige de
cette plante par laquelle elle reffemble à un
cierge , lui en a fait donner le nom ; on pour-
ront même dire qu'elle auroit encore plus de
rapport à une torche par les côtes arrondies,
dont elle eff relevée dans toute l'étendue de
(a. longueur.
Ces côtes , qui font au nombre de huit,
& faillent d'environ un pouce , forment des
cannelures d'un pouce & demi d'ouverture ,
lefquelles vont en diminuant, & augmentent
en nombre à proportion qu'elles approchent
du fbmmet de la plante terminée en cône.
Des toupets , compofés chacun de fept,
huit , ou neuf épines écartées les unes des
autres en manière de rofetre ,, couleur châ-
tain , fines , fort affilées , roides, & dont les
plus longues font de près de neuf lignes ,
fortent d'efpace en efpace à un demi-pouc«
d'intervalle y de petites pelottes coronneufes,
grisâtres , de la grandeur & figure d'une len-
tille ordinaire , & placées fur toute la lon-
gueur de ces côtes.
Son écorce eft d'un verd gai ou verd de
mer , tendre , lifîe, & couvre «ne fubffance *
charnue , blanchâtre , pleine d'un fuc glai-
reux , qui n'a qu'un goût d'herbe , & a»
milieu de laqueiie lé trouve un corps ligneux
C I E
de quelques lignes d'épailTeuf , auflî dur que
le cnêne , & qui renterme une moelle blan-
châtre pleine de fuc.
Onze ans après que ce cierge fut plante ,
& étant devenu haut de dix-neuf pies, envi-
ron , deux branches forcirent de fa tige à
trois pies & quelques pouces de (a naiffance.
A la douzième année , il poulîa des fleurs
qui fortirent des bords fupérieurs des pelo-
tons épineux répandus fur ces côtes. Depuis
ce temps jufqu'en l'année 1716, \q cierge a
tous les ans jeté de nouvelles branches qui
font en fout femblables à la tige , & a donné
des fleurs qui naiiïent ordinairement en été
de diftérens endroits Ats côtes de cette tige,
quelquefois jufqu'au nombre de quinze ou
feize. Il elt actuellement très-haut.
La fleur commence par un petit bouton
verdàtre , teint à la pointe d'un peu de pour-
pre ; il s'allonge jufqu'à un demi-pié , &
groilit un peu plus que du double à fon
extrémité , laquelle s'cpanouiflant , forme
une efpece de coupe de près d'un demi-pié
de diamètre.
Elle efl compofée d'une trentaine de péta-
les longues de deux pouces fur un & demi de
largeur , tendres , charnues , comme cou-
vertes de petites gouttes de rofée blanchâtre
à leur naiflànce , lavées de pourpre clair à
leur extrémité , qui efl pointue & légèrement
dentelée.
Une infinité d'étamines longues d'un
pouce & demi , blanchâtres , chargées
d'un fommct jaune de foufre , partent* par
étage des parois intérieures d'un calice de
couleur verd gai , épais de .deux lignes ,
d'une lubflaiice charnue , verdàtre , viîqueu-
fe ,& d'un goût d'herbe , cannelé (iir fa f.ir-
face extérieure & compofée de plufieurs écail-
Ie*s longues, épailîes , étroites , vertes, teintes
de pourpre à leur extrémité , & appliquées
les unes fur les autres fucceflivemcnt ; en
lorte que les intérieures qui font jointes à la
naiflànce du calice , fouticnnent les fupé-
rieures,lefquellesfe divifent , s'allongent, &
s'élargifl'ent à proportion qu'elles approchent
Àqs pétales de la fleur , dont elles ne £e dil-
tinguentque parce qu'elles font les plus extç-
rieures, plus charnues , d'un verd jaunâtre
vers le milieu , & plus arrondies vers leur
extrémité j quieft lavée d'un rouge-brun.
Cette fleur qui a peu d'odeur , cil portée
CIE 7,
fur un jeune fruit coloré d*un même verd
que l'eil le calice à fa naifl*ance , auquel il
lert de bafe , & lui efl fi intimement joint ,
qu'ils ne font cnfemble qu'un même continu-
La furfacede ce fruit gros alors comnie
une petite noix , efl cannelée , hflé , & fans
épines. Son intérieur renferme une chair
blanchâtre , dans le milieu de laquelle efî
une caviré qui contient plufieurs ièmences.
\Jn piflil long de trois pouces & quel-
ques lignes fur un & demi de diamètre ,
blanchâtre , divifé à là partie fupérieure en
manière de pavillon , découpé en dix laniè-
res étroites, longues de fi>x lignes, prend
fa naiflànce au centre de ce fruit , que nous
n'avons pas vu mûrir ici , & s'élève de fa
partie fupérieure , enfile le calice de la fleur,
& en occupe le centre ; là , il efl environné
de toutes les étamines , qui s'inclinent un
peu de fon côté fans le furpafler &: fans en
être touchées.
Obfervations fur cette plante, Les obfer-
vationsauxqueHcs la defcription de ce cierge
peuvent donner lieu , lônt:
i"^. Que cette efpece âe cierge n*a durap*
port qu'à celle dont Tabernomonranus don-
ne une figure , qui a été copiée par Lobel ,
Delechamp , & Swertius. C. Bauhin l'a
nommée , cereiis Perui'ianus -tfpinofus^fru-
clu ruhroy iiucis magnitudine. Lin. 4.58.
2-". Que cette efpece efl différente de cel-
les rapportées par M. Herman & par le P.
Plumier, parce que celle-ci jette àcs bran-
ches , & que le pifîil de fà fleur efl de ni-
veau aux étanimes ; au lieu que celles-là
n'ontqu'une feule tige fans branches, & que
celle dont parle le P. Plumier , poulîe du
milieu de fa fleur un piflil qui la furpafl^
de beaucoup.
3°. Que quoique l'examen de la fleur &
du truit des plantes ait été jugé propre pour
en établir le caractère , on peut néanmoins le
faire fans ce fecours y & par la feule inf^
pedion de la figure extérieure d'une plante
qui a quelque choie de particulier ; ce qui
iè vériiie à l'égard de celle-ci , qui efl afîez
rcconnoilTable par la longueur de fès tiges
& par leurs cannelures, dont les côtes font
hériflées de paquets d'épines placées d'ef-
pace en ef]iace ; en forte que comme il ne
porte des fleurs que fort tard , & que cette
fleur pafTe très-vite , & n'efl: bien en état .q«c
K2
-j^ CIE
la nuit & vers le matin , elle devient'à ''égard
du botanirte comme inutile pour juger du
genre dans lequel la plante qui la porte doit
ctre placée.
4°. Que le cierge par la flrudure de {es
fleurs , par celle de fon fruit & par fes pa-
quets d'épines , a beaucoup de rapport à la
requette , ou opuntia , & n'en diffère que
p;irce que les tiges de celle-ci ne font point
cannelées ; & que ce qui eil: merveilleux
dans la végétation de l'une &" de l'autre de
ces plantes , efl qu'elles puiffent pouffer un
jet fi haut , Il charnu , &: durer auffi long-
temps avec des racines fi courtes & avec auiil
peu de terre.
Ce que l'on a obfervé d'irapartant pour la
culture de ce cïer^^e par rapport au lieu où l'on
doit le placer , c'ell qu'il faut qu'il ait une
cxpofition favorable qui le mette à l'abri du
nord , & où il puiffe recevoir route la cha-
leur du foleil , de laquelle il ne peut jamais
être endommagé.
Que \ts pluies , la trop grande fécherefTè ,
& la gelée , font fes ennemis mortels ; que
pour l'en garantir , on doit le tenir fermé
dans un vitrage couvert pardeflus , & qui
puiffe être élevé à mefureque ce cierge croît.
Par rapport aux (oms que l'on doit avoir
de cette plante , fexpérience a appris qu'il
cilnéceffaire d'entourer de fumier fec l'ex-
térieur de la boîte vitx^ée quiTenferme , & en
même temps d'avoir la précaution de mettre
intérieurement tous \qs foirs , une poêle de
feu pendant les froids les plus rigoureux
Enfin on a trouvé que pour multiplier le
Cierge , il faut en couper pendant les plus
grandes chaleurs les jeunes branches , & les
laiffer fanner deux à trois jours , en les ex-
pofant à l'ardeur du foleil auparavant que
•de les mettre en terre.
Après avoir tranfcrit la defcription du
beau cierge épineux qui eft dans le jardin du
roi , la botanique exige de caractérifer cette
plante , quelque connoiffible qu'elle foit par
ion port , & d'en indiquer les efpeces /ou-
tre que j'ai quelques remarques particulières
à y joindre.
Les caractères du cierge épineux. Sa. racine
eft vivace , petite en cajnparaifon de la plan-
te , & très-iibreufe. ^.a plante n'a point de
feuilles ; elle eft garnie de piquans , & eft
ajû^uieuiè. Les angics des ajj.es toAt attachés à
CIE
des épines, qui partant du centre des rayons ,
forment comme une efpece d'étoile. La par-
tie interne de la tige eft ligneufe : celle de
dehors eft blanche , fongueufe , & couverte
d'une membrane femblable à du cuir. Le
calice eft long , écailleux , &: fa partie fu-
périeure eft garnie de longs rayons qui en-
tourent le fommet de l'ovaire. La fleur qui
fort de l'extrémité du fruit , eft corapolée
d'un grand nombre de pétales qui s'élargif-
fent à mefure qu'ils s'éloignent de leur ba—
fe ; elle eft ornée de plufieurs étamines, &
d'un trts-beau piftil. L'ovaire qui eft à l'ex-
trémité du pédicule , forme le corps du ca-
lice: il eft muni d'un tube , & fe change
en un fruit femblable à celui du poirier fau—
vage , charnu , couvert d'une membrane ve-
lue & vifqueufe , lequel contient un nom-
bre infini de lemences.
Ses efpeces. Boerhaave en compte treize
diftérentes efpeces.
1 ^ . Ce re us e reclus , a ItiJJim us , Syrinamen."
fis, Fark. Bat. ii6 , fpinis fufcis. H. R. D.
2^. Cereus ereclus yaltijfimus^ Syrinamen--
fis, Park. Bat. ii6 , fpinis albis. H. R. D-
3^, Cereus maocimus , fructu fpinefo y
ruhro y Dadu5. Far. Bat. 113.
4^. Cereui ereclus ^fruâu rubro , fpinofo^
Par. Bat. 114.
5^. Cereus ereBus^fruclu ruhro , nonfpï—
nofo , lanuginofus , lanugine flivefcente^
Par. Bat. 115.
6, Cereus eveclus , craffffimus , maxime
angutofus y fpinis albis , pluribus , longiffi-
mis y lanugine fiavâ.VL. R. D.
7^. Cereus. erecius y gracilis y fpinofifji—
mus y fpinis fiai'is y polygonus y lanugine
albâpallefcente.
8^. Cereus erecius y gracilior , fpinofijji—
mus y fpinis albis y polygonus. H. R. D>.
9^. Cereus erecius y quadrangulus , cofîis
alaruminfiar affurgentibus. Ind. 181.
10^. Cereus fcandens y minor , trigonusy.
articulatusjfruchifuapififlmoVax. Bat. 118.
n^. Cereus fcandens y minor y polygonus y
articuh:us.Târ. Bat. 120.
12^. Cereus mimmus y articulatusy poly^
gonusy fpinofus, H. R. D.
13^. Cereus erecius y polygonus y fpino-^
fus y per inter-yolla comprejfus qua/i in
.irtiahs. H. R. D. Boerhaave ^ index alter
piajuarum ^Yo\,l*
C I E
Remarques fur ces efpeces & leur culture. 1
Voilà le catalogue des diverfes efpeces de
cierges du Pérou. Le meilleur moyen de les
conferver, eftdelesencaiiferdans des boîtes
vitrées ,- & de les tenir toujours à l'abri de
l'humidité dans une ferre ouverte en été ,
& fermée en hiver. Il y a bien peu de ces
efpeces qui produifent des fleurs dans nos
climats. L'on ne compte guère que celles du
jardin royal à Paris, & des jardins de bo-
tanique de Leyde & d'Amllerdam , qui
aient eu ce bonheur.
Les deux premières efpeces font les plus
communes en Europe ,•& Ton peut même
les conferver pendant les chaleurs de l'été
dans les jardins , pourvu qu'on ait foin de
les garantir des vents du nord , du froid ,
de la pluie , & de l'humidité , qui font les
plus grands ennemis des plantes de l'Amé-
rique.
Les trois , quatre , cinq , fix , fept , huit ,
& neuvième efpeces, (ont plus tendres , &
requièrent plus de chaleur. On les doit te-
nir avec foin dans des boîtes vitrées , & les
placer dans un lieu choifi de la ferre , à une
chaleur réglée par le thermomètre ; elles
demandent très-peu d'arrofement pendant
l'hiver.
La dixième efpeceeft cultivée par les ha-
l)itans des Barbades , attenant leurs maifons,
par amour pour fon fruit qui efl de la grof-
feur d'une poire de bergamote , & d'une
odeur délicieufe.
Ces dixième & onzième efpeces exigent
encore plus de chaleur pour leur conferva-
tion , que les précédentes. Si on les place
contre les murs d'une ferre, elles y poude-
ront des racines , & s'élèveront à une grande
hauteur : pourvu qu'on \qs attache à la mu-
raille , on les portera jufqu'au haut de la
ferre, où elles feront un trè.s-bel effet à la vue.
La onzième efpece parvenue à un cer-
tain âge , produira de larges & belles fleurs
d'une odeur admirable; mais ces fleur fem-
blables à celles des autres efpeces , demeu-
rent à peine un jour évanouies; &: ii elles font
une fois fermées , elles ne s'épanouiront pas
de nouveau.
On multiplie cette plante par boutures :
pour cet eftèt il faut couper de ^es tiges à
la hauteur qu'on voudra , les mettre dans
ua lieu fec ; les y laUfer quinze jours gu
. . c 1 E 77
trois fcmaines pour confolidei- leur bleflure.
Ces boutures doivent être plantées dans de
petits pots remphs d'une terre légère & fa-
blonneufe, avec un mélange de décombres
de batimens. On arrangera au fond des pots
quelques petites pierres, poreuiés, pour boire
l'humidité : enfuite on placera c.&<. pots dans
un lit chaud de tan ou de fumier y pour
aider au développement des racines , & on
les arrofera légèrement une feule fois par
femaine.
La meilleure faifon pour ce travail efl: au
mois de juin ou de juillet , afin de leur don-
ner le temps de prendre la racine avant l'hi-
ver. A la mi-août on comoiencera par leur
procurer de l'air par degrés, pour les endur-
cir contre le froid prochain ; mais il ne faut
pas les expofer entièrement à l'air ouvert ou
au (oleil. Au mois de fepterabre , il faut les
reporter dans lalérre pour y paiîèr l'hiver ,
pendant laquelle faifon on ne les arrofera
que très-rarement.
Quand vous avez coupé les fbmmités de
quelques-unes de ces plantes pour les mul-
tiplier , leur tige pouffera de nouveaux re-
jetons de leurs angles qui , quand ils au-
ront huit ou neuf pouces de long , pourront
fervir à former de nouvelles plantes , & de
cette manière les vieilles plantes fourniront
toujours de nouveaux jets.
Comme les cierges du Pérou font pleins
de fuc , ils peuvent fe conferver hors de
terre. Ceux donc qui voudront en appor-
ter des Lides occidentales , n'ont autre chofè
à faire que de les couper , de les laiiîêr fé-
cher quelques jours , les renfermer enfuite
dans une boîte avec du foin lèc ou de la
paille , \ts empêcher de fe toucher de peur
qu'ils ne s'entre-déchirent par leurs épines,
& les préferver de l'humidité : de cette ma-
nière ils loutiendront deux ou trois mois de
voyage, (j^. M. Aà^nÇon ^famille des plan-
tes vol. lljpag. Zj^z. Cet habile naturaliffea
placé le cierge dans la i^. fedion de la famille
des pourpiers. V. PÉROU.*) Anicle commu-
niqué par M. le chevalier 'D'E JaUCOURT.
Cierge , f. m. chandelle de cire que l'on
place fur un chandelier , & que l'on brûle
(îir les autels aux enrerremens & autres cé-
rémonies reiigieufes. Vcye\ Chandelle.
On fait àts cierges de différentes gran-
deurs ^ . figures. En Italie , ils font c> lin,-
7§ CIE
clriques;dans la plupart des auffes paj's > en
France , en Angleterre , &c. ils font coni-
ques : l'une & l'autre efpece font creux à la
partie inférieure ; c'eft-là qu'eft reçue la
pointe du chandelier. Foy. CHANDELIER.
L'ufagedes cierges dansles cérémonies de
religion efl fort ancien. Nous favons que
les païens le fervoient de flambeaux dans
leurs lacrifices , fur-tout dans la célébration
des myfleres de Cérès , & ils mettoient des
cierges devant les flatues de leurs dieux.
Quelques-uns croient que c'efl: à l'imita-
tion de cette cérémonie païenne ;, que les
cierges ont été introduits dans l'églife chré-
tienne ; d'autres lou tiennent que les chré-
tiens ont (uivi en cela l'ufage des juifs. Mais
pour en trouver l'origine, ileft inutile d'avoir
recours aux fentimens des uns & des autres.
Il n'efl" pas douteux que les premiers chré-
tiens ne pouvant s'aflembler que dans des
lieux fouterrains y ne fuiTent obligés de le
fervir de cierges & de flambeaux : ils en eu-
rent même befoin depuis qu'on leur eut per-
mis de bâtir des églifes ; car elles étoient
conflruites de façon qu'elles ne recevoient
que très-peu de jour , afin d'inlpirer plus de
refpeâ: par l'obfcurité.
C'efl-là l'origine la plus naturelle qu'on
puiile donnera l'ufage des cierges dans les
églifes. Mais il y a déjà long - temps que
cet ufage introduit par la néceffité , eft de-
venu une pure cérémonie. S. Paulin qui vi-
voit au commencement du cinquième fiecle,
obferve que les chrétiens de fon temps ai-
moient li fort les cierges , qu'ils en repréfen-
toient en peinture dans leurs églifes.
Ceux qui ont écrit des cérémonies de l'é-
glife , ont remarqué que l'ulàge d'allumer
des cierges même en plein jour , a une fîgni-
lication myflique ,qui ell d'exprimer la joie,
là charité, & la lumière même de la vérité ,
découverte aux hommes par la prédication
de l'évangile. C'eft le fentiment de S. Jé-
rôme contre l'hérétique Vigilance. JPer to-
tas Orientis ecclejias , dit ce père y accen-
duntur lum inaria ,fole jam rutilante , non
iitique adfiigandas tenebras , fcdadjignum
Icetitiœ demonflrandum. . . Ut fub typo lu-
minis corporalis illa lux oftendatur de quâ
in pfaherio legimus : lucerna pedibus meis
verbumtuum j Ù lumen femitis meis. S.
Jérôme , tom. IV. part. I) pag. 2.^4.
CIE
II y a deux manieras de faire des cierges;
l'une à cuiller , & l'autre à la main.
Voici la première. Les brins des mèches
que l'on fait ordinairement moitié coton &
moitié filalfe , ayant été bien commis &
coupés de la longueur dont on veut faire les
cierges , on en prend une douzaine à dillan-
ces égales , autour d'un cerceau de ïer, per-
pendiculairement au delfus d'un grand bal^
lin de cuivre plein de cire fondue : alors
on prend une cuiller de fer qu'on emplit
de cette cire ; on la verfe doucement fur les
mèches , un peu au delîbus de leur extré-
mité fupérieure , &*on les arrofe ainli l'unô
après l'autre : de forte que la cire coulant du
haut en-bas (lir les mèches , elles en devien-
nent entièrement couvertes , & le furplus de
la cire retombe dans le ballm , au delTous
duquel efl un brafier pour tenir la cire en
fufion, ou pour empêcher qu'elle ne fe fige.
On continue ainfi d'arrofer les mèches
dix ou douze lois de fuite , jufqu'à ce que
les cierges aient pris i'épailTeur qu'on veut
leur donner. Le premier arrofement ne fait
que tremper la mèche; le fécond commence .
à la couvrir, & les autres lui donnent la for-
me & l'épaiflèur. Pour cet effet , on a foin
que chaque arrofement qui fuit le quatriè-
me , fe falîe de plus bas en plus bas , afin
que le cierge prenne une figure conique. Les
cierges étant ainfi formés , on les pofe pen-
dant qu'ils font encore chauds , dans un lit
de plume pour les tenir mous : on les en
tire l'un après l'autre, pour les rouler fur une
table longue & un'C avec un inlîrument
oblong dé buis , dont le bout inférieur eît
poli , & dont l'autre cil garni d'une anfe.
Après que l'on a ainfi roulé & poli les cier-
ges y on en coupe un morceau du côté du
bout épais , dans lequel on perce un trou
conique avec un inlîrument de buis , afin
que les cierges puiiîent entrer dans la pointe
des chandeliers.
Pendant que la broche de buis efl en-
core dans le trou , on a coutume d'emprein-
dre fur le côté extérieur le nom de l'ouvrier
& le poids du cierge , par le moyen d'une
règle de buis fur laquelle on a gravé les
caraéteres qui expriment ces deux choies.^
Enfin on pend les cierges à des cerceaux ,
pour les fécher, durcir , & expofèr en vente.
Manière défaire des cierges à la main. Les
C I E
mèches étant difpofées comme ci-defTus , on
commence par amollir la cire dans de l'eau
chaude & dans un vaifTeau de cuivre étroit
& profond : enfuite on prend une poignée
de cette cire , & on l'applique par degrés à
la mèche qui eft attachée à un crochet dans
le mur par le bout oppofé au collet , de forte
que l'on commence à former le cierge par
fon gros bout ; on continue cette opération
en le faifant toujours moins fort à mefure
que Ton avance vers le collet.
Le reile fe fait de la manière ci - defîlis
expliquée , fi ce n'eft qu'au lieu de les met-
tre dans un lit de plumes , on les roule fur
la table aufli-tot qu'ils font formés.
Il y a deux chofes à obferver par , rapport
aux deux elpeces de cierges ,• la première ,
eft que pendant toute l'opération des cierges
faits à la cuiller , on fe (ert d'eau pour mouil-
ler la table , & d'autres inrtrumens , pour
empêcher que la cire ne s'y attache : & la
féconde , que dans l'opératioH des cierges
faits à la main , on fe fert d'huile d'olive ,
pour prévenir le même inconvénient.
Cierge PASCHAL, dans VégUfe romai-
ne , efliungros cierge auquel un diacre appli-
que cinq grains d'encens , dans autant de
trous que l'on y fait en forme de croix ; il
allume ce cierge avec du feu nouveau , pen-
dant les cérémonies du famedi-iaint.
Le pontifical dit que le pape Zofime a
inftitué cette cérémonie, mais Baronius pré-
tend que cet ufage eft plus ancien , & pour
le prouver , il cite une hymne de Prudence.
Il croit que ce pape en a établi feulement
l'ufàge dans les églifes paroiflîales , & qu'au-
paravant l'on ne s'en fervoit que dans les
grandes églifês.
Le père Papebroch parle plus difhnde-
mentde l'origine du aVrg-fpacAa/, dans fon
conatus chronico-hijîoriciis. Quoique le con-
cile de Nicée eût réglé le jour auquel il fid-
loit célébrer la fête de pâque , il iemble
qu'il chargea le patriarche d'Alexandrie d'en
faire un canon annuel & de l'envoyer au
pape. Comme toutes les fêtes mobiles fè rè-
glent par celle de pâque , on en faifoit tous
les ans un catalogue que l'on écrivoit fur un
cierge , & on béniflc^it ce cierge dans l'églife
avec beaucoup de cérémonie.
Ce cierge , félon l'abbé Châtelain , n'étoit
pas de cire , ni fait pour brûler , il n'avoit
C I G 79
point de mèche , & ce n'étoit qu'une efpece
de colonne de cire , faite pour écrire deiïùs
la lifte des fêtes mobiles , cette lifte ne de-
vant fubfifter que l'efpace d'un an : carlorf-
qu'on écrivoit quelque chofe dont on vou-
loit perpétuer la mémoire, les anciens avoient
coutume de le faire graver fur du marbre
ou fur de l'acier : quand c'étoit pour long-
^temps , on l'écrivoit fur du papier d'Egypte;
& quand ce n'étoit que pour peu de temps,
on le contentoit de le tracer fur de la cire.
Par fuccefllon de temps on commença à
écrire la lifte des fêtes mobiles fur du papier;
mais on l'attachoit toujours au cierge paf chai ^
& cette coutume s'obferve encore de nos
jours dans l'églife de Notre-Dame de Rouen,
& dan^ toutes les églifes de l'ordre de Cli.ni.
Telle eft l'origine de la bénédidion du cierge
pafchal. Voye\fur ï article ClERGE les
Dicl. de Trei^ouXy ducommer. & Chambers^
^ Cierge , ( Hydraulique.) Ce font àc^
je"ts élevés & perpendiculaires , fournis fur la
même hgne par le même tuyau , qui étant
bien proportionné à leur quantité , à leur
louche & à leur fortie , leur conferve toute
leur hauteur. On a un bel exemple des cier-
ges ou grilles d'eau au haut de l'orangerie de
Saint-Cloud.
On prétend que les cierges d'eau font plus
éloignés les uns des autres que les grilles. {K)
CIFUENTES, ( Géog. ) village d'Efpa-
gne dans la Caftille vieille , d'ans un comté
de même nom.
CIGALE, f. f cicaday {Hifl. nat, infect.)
efpece de mouche très-connue par le bruit
qu'elle fait dans la campagne , & que l'on
prend communément y mais mal-à-propos ,
pour une forte de chant. La tête de cet in-
fede eft large & courte ; a deux yeux à
réfeaux , qui font placés l'un à droite &
l'autre à gauche , près du boutpoftéricurde
la tête , & qui ont un grand nombre de fa-
cettes ; entre ces deux yeux il s'en trouve
trois autres qui ibnt liffes & rangés en trian-
gle. Les cigales ont un corcelet compofé de
deux pièces, ou plutôt deux corcelets pres-
que au.fti larges que la tête ; ils font pour
ainfi dire fculptés , principalement l'anté-
rieur , fur lequel on voit , entr'autres figu-
res , une forte de triangle. Les ailes font au
nonobre de quatre , poi'ées en talus comme
ks deux pans d'un loit , traniparentes , &
8o C l G
attachées au fécond corcelet ; les deux du
defTus font placées tort près du premier ; leur
étendue eft plus grande que celle des deux
autres ailes ; elles ont de fortes nervures qui
iburiennent un tifîù mince. Le corps eil com-
poie de huit anneaux écailleux , y compris
la partie oblongue & conique qui le termine y
& qui efl d'une feule pièce dans les femelles;
Je premier anneau elî le plus large , chacun
des autres diminue de largeur julqu'au fep-
tieme , qui elt au moins auffi large que le
(ècond. Les cinq premiers ont chacun à-pcu-
près le même diamètre ; le refle du corps
forme une pointe qui eH plus allongée dans
la femelle que dans le mâle.
On dillingue des cigales de trois gran-
deurs différentes ; les grandes , les moyen-
nes & les petitc^s. Celles de la grande efpece,
étant vues par-defllis , font les plus brunes;
elles ont le corps d'un brun luifant prefque
noir ; la couleur des corcelcts , fur-tout du
premier , efl mêlée d'une teinte de jaune.
Les cigales de l'efpece moyenne ont plus de
jaune ; celles de la petite efpece , que l'on
nomme cigalons aux environs d'Avignon ,
ont moins de jaune que celles de l'efpece
moyenne , & on voit fiir quelques-unes une
teinte rougeâtre. Toutes les petites cigales
ont les ailes jaunâtres , tandis que celles des
autres font d'une couleur argentée. Les gran-
des cigales ont le ventre d'une couleur jau-
nâtre , fale & pâle , excepté deux bandes
brunes qui font près des bords ; ces bandes
font formées par les extrémités âts arcs écail-
leux qui recouvrent le delTus du corps , &
qui fe replient -de chaque côté fous le ven-
tre , où ils aboutiflent chacun à une lame
écailleufe au moj^en de laquelle chaque an-
neau eu complet. En écartant ces lames les
unes des autres autant qu'on le peut , en
allongeant le ventre de l'infede , on décou-
vre des fligmates ; il y en a deux entre deux
lames , un de chaque coté , placé tout près
de la jondion d'une lame , avec l'arc écail-
leux qui lui correfpond.
En regardant les cigales par defTous , on
apperçoit deux petites antennes qui n'ont que
quelques lignes de longueur , & qui font po-
lécs près des yeux à réfeaux. Il y a au bout
de la tête une pièce triangulaire qui refTem-
ble en quelque façon à un menton , qui re-
couvre le deffus de la tçte , & qui s'étend
CIG
plus loin ; la bafe eff en avant , & le fommet
en arrière : il forme une pointe dont fort la
trompe avec laquelle la cigale tire le fuc des
feuilles & des branches d'arbres. Le four-
reau de la trompe tient à des parties mem-
braneufes qui fe trouvent au deflbus du men-
ton , vis-à-vis de fon milieu. Ce fourreau s'é-
tend au-delà de la pointe du menton, comme
un fil de la groffeur & de la longueur d'une
petite épingle. Lorfqu'on levé la pointe du
menton , la trompe fort de fon étui , & elle
y rentre lorfque cette pointe fe remet dans
fa pofitlon naturelle ; quelquefois la trompe
entraîne fon fourreau , lorlque l'infede le
fait mouvoir. II eft fait en forme de gout-
tière , le long de laquelle on voit une légère
fente , lorfqu'on regarde la cigale par def-
fous. Cette fente s'élargit quand la trompe
fort : on peut la tirer de Ion fourreau avec
la pointe d'une épingle , & la diviièr en trois
filets écailleux. Les organes dont vient le
bruit que l'on appelle le chant de la cigale^
font placés dans fon ventre ; on ne les trouve
que dans les mâles , car les femelles ne font
aucun bruit. Il y a fur le ventre des cigales
mâles de la grande efpece , deux plaques
écailleufes qui font aflez grandes , qui tien-
nent au fécond corcelet , & qui s'étendent
prefque jufqu'au troiiieme anneau ; elles font
pofées de façon que l'une recouvre un peu
l'autre. On peut foulever ces plaques par
leur extrémité fupérieure ; mais elles font
arrêtées par une. efpece de cheville faite «n
forme d'épines , dont chacune tient par l'une
de Ces extrémités à la partie delà jambe pof^
térieure qui s'articule avec le corcelet , &
appuie par l'autre extrémité fur l'une des pla-
ques. Ces épines empêchent que les plaques
ne foient trop foulevées , & les remettent en
fituation. Lorfqu'on a relevé les plaques, on
trouve dans la partie antérieure du ventre
une cavité qui elt partagée en deux loges ;
le fond de chacune de ces loges eff luifant
comme un miroir ; il y a une membrane
tendue & tranfparente comme le verre , fur
laquelle on voit toutes les couleurs de l'arc-
en-ciel , lorfqu'on la regarde obliquement.
Si on enlevé la partie fupérieure du pre-
mier & du fécond anneau , & fi on met à
découvert du côté du dos l'endroit qui cor-
relpond à la cavité où font les miroirs , on
y trouve deux mufcles qui font compofés
d'un
C I G
d'un grand nombre de fibres droites: ils for-
ment , en s'approchant , un angle aigu fur
les revers de la pièce triangulaire dont il a
déjà été fait mention. Ces mufcles aboutif-
fent aux organes qui produifent le bruit de
la cigale ; ils font fitués dans deux réduits
dont les deux orifices communiquent de
chaque côté dans la grande cavité où font
les miroirs. On trouve dans chacun de ces
réduits une membrane plifîee raboteufe , &
contournée en forme de timbale. Elles font
placées de chaque côté , fous une partie trian-
gulaire du premier anneau delà cigale y qui
eft plus élevée que le refle ; fi on enlevé cette
partie , on met la membrane à découvert.
Dès qu'on la touche elle réfonne comme un
perchemin fec , & même comme une mem-
brane , encore plus fonorc ; celle dont il .
i'agit rend des fons , lorlqu'après avoir été
enfoncée dans quelques endroits elle fe relevé
par ion refTort. Les mufcles dont on vient de
parler aboutifîênt à la furface concave de ces
membranes , & en l'attirant en dedans par
leur contradion , ils la mettent en état de
réfonner, lorfqu'elles fe rétabliflent par leur
^lafticité , en même temps que le mufcle fe
relâche. Ce fon pafïe au dehors par les orifices
de deux réduits qui communiquent dans la
grande cavité , & peut être modifié par les.
volets écailleux , les miroirs , & toutes les
difîerentes parties qui fe trouvent dans les
cavités. Les c/Va/^j de la petite efpece& de
i'efpece moyenne ont à-peu-près les mêmes
organes &: font prefque le même bruit.
Le dernier anneau du corps des cigales
femelles efî plus allongé que dans les mâles ,
& il renferme une partie à laquelle on a don-
né le nom de tarière , parce que les cigales
s'en fervent pour faire des trous dans de pe-
tits morceaux de bois où elles dépofent leurs
œufs. Les mâles n'ont pas CQZtt tarière , qui
efl: fort apparente dans les femelles , puif-
qu'elle a environ cinq lignes de longueur
dans celles de la grande efpece. Elle ell ren-
ferrnée dans un étui dont on peut Ig faire
fortir en comprimant légèrement le ventre
de l'infede ; elle eft à-peu-près de même
grofîeur fur toute fa longueur , & terminée
à fon extrémité par une pointe angulaire qui
refîemble à un fer de pique dont les bords
feroient dentelés. La liibilance de cette par-
tie efl de la nature de l'écaillé ou de la corne ,
Tome VI IJ.
C IG 8i
àiifG folide & auflî dure qu'aucune autre
qui fe trouve dans les infedes. En l'exami-
nant de près on reconnoît qu'elle efl com-
pofée de trois parties , c'efl pourquoi on a
été tenté de changer le nom de tarière que
l'on avoit donné à cette partie , & on a
mieux aimé dire qu'elle ell compofee de
deux li/nes & d'un /apport , limes ou tarière,
n'importe du nom. La partie dont il s'agit efl
compofee de trois pièces , dont deux font
pofées à côté de la troifieme , & font engre-
nées en façon de coulifîc avec cette pièce
du milieu , de manier-e qu'elles gliffent tout
le long fans s'en écarter , & elles peuvent
être mues alternativement ; par ce moyen ,
les deux rangs de dents qui font fur les bords
de la pointe angulaire , dont nous avons
déjà parlé , avancent & reculent , parce
qu'ils tiennent à chacune des pièces des cô-
tés. Ce qui caufe ce déplacement , c'efl
qu'elles font repliées en dehors & en avant
par leur extrémité antérieure , relativement
à l'infede. Des mufcles , en augmentant ou
en diminuant cette courbure par leur con-
tradionou leur relâchement , font glifîerea
avant ou en arrière la pièce latérale , & par
conféquent mettent en jeu les dents qui font
à chaque côté de la pointe , qui efl faite en
forme de fer de lance , & compofee de trois
pièces. Les dents font pofées obliquement ,
& dirigées du côté de la pointe du fer de
lance , de fbrtequ'elles déchirent ce qui leur
fait obflacle , dans leur mouvement , lorf-
que la cigale fe fert de cette partie pour
faire des trous dans le bois où elle dépofô
{qs œufs.
Les cigales femelles font toujours ces trous
dans de très-petites branches de bois qui efl
fec & qui a de la moelle. On les reconnoic
par des fibres qui ont été foulevées à l'en-,
droit de ces trous ; ils font rangçs par files
afîèz régulièrement pour l'ordinaire ; ils ont
chacun trois lignes & demie ou quatre lignes
de longueur. Ces trous peuvent contenir huit
à dix œufs , & il y en a au moins quatre ou
cinq dans chacun ; ils font blancs , oblongs ,
& pointus par les deux bouts. Laponreell
fort abondante , puifqu'on a compté jufqu'à
fept cents œufs dans les ovaires. Il fort de
chaque œuf un ver blanc qui a fix longues
jambes , & qui femble en quelque façon
à une puce pour la figure. Lorfqu'ils ont
8x C I G
abandonné le trou où ils font écîos , ils |
fe logent dans la terre , & enluite ils
fe transforment en nympKes , qui mar-
chent & qui prennent des aliraens & de l'ac-
croiffement. Ariilote les a nommées r^^/i-
gometres oi mères cigales y elles ne différent
pas beaucoup du ver qui eft forti de l'œuh
Ces nymphes peuvent pénétrer dans la terre
Jufqu'à deux ou trois pies de profondeur.
On les trouve ordinairetnent auprès des
racines des arbres. Lorfque le temps de leur
métamorphofe approche , elles fortent de
terre , montent fur ks arbres , & s'y accro-
chent pendant les chaleurs de l'été. C'efl
dans ctt état qu'elles parviennent à quitter
leur fourreau de nymphe ou de chryfalide ,
pour paroître fous la forme de civile. Mé-
moires pour fefvir à Vhifloire des inftâ.
tom. V.{I)
Cigales f J. {Hifi. mod.) Les Efpa-
nols de l'Amérique nomment ainfi un petit
rouleau de tabac de la grolîèur du petit doigt
au plus , & long de cinq à fîx pouces au
rnoins. Ce rouleau eft compofé de plufieurs
brins de tabac parallèlement dilpofés à côré
les uns à&i autres , & affujettis enfemble
par une large feuille qut leur fert de robe
ou d'enveloppe. On allume une des extré-
mités de ce rouleau , & l'autre fe met dans la
bouche , au moyen de quoi on fume fans
pipe. Nos infulaires , qui font un grand ufage
de ces cigales , les nomment liraplement
bouts de tabac.
Il n'eft pas hors de propos d'ajouter ici
que les Caraïbes Aq^ îles Antilles ont une
finguliere façon de tumer : ils enveloppent
des brins de tabac dans certaines écorces
. d'arbres très-unies , flexibles , & m.inces
comme du papier ; ils en forment un rouleau,
l'allument , en attirent la fumée dans leur bou-
che , ferrent les lèvres , & d'un mouve-
ment de langue contre le palais , font paflèr
la fumée par les narines. Art. communiqué
par M. DE Saint-Romain.
CIGOGNE , f f cicoiiia y ( Hijl. nat.
Ornithol. ) oifeau dont les pattes , le cou &
le bec font fort longs. La cigogne dont M.
Perrault a donné la defcription dans le r^-
cueil de Vacad. des fciences , avoit qua-
tre pies de longueur depuis le bout du bec
jufqu'à l'extrémité des pies. Celle du bec
étoit de quatre trentièmes parties de celle de
C I G
tout le corps ; les pies n'avoient que trois
trentièmes , le cou cinq trentièmes , & les
jambes onze depuis le ventre jufqu'à terre.
Le cou étoit beaucoup plus gros par le bas
que par le haut. Cet oifeau avoit cinq pies-
d'envergure. Le plumage étoit d'un blanc
fale & un peu roulîâtre prefque par-tout le
corps & noir au bout des ailes. Il y avoit
aufli des plumes noires, longues & larges
furies deux côtés du dos & à la racine des
ailes. Le cou étoit revêtu fur fa partie infé-
rieure , jufqu'au tiers de fa longueur , par
des plumes longues de fix pouces , larges de
dix lignes , &. terminées en pointe. Elles
étoient entourées à leur racine par un duvet
très-blanc , dont chaque petite plume avoit
un tuyau de la groffeur d'une petite épingle ,-
qui (è partageoit en cinquante ou foixante
autres plus petits que des cheveux , dont cha-
cun étoit encore garni des deux côtés de peti-
tes fibres prefqu'imperceptibles. Cette cigo^
gne n'avoit iur le haut de la véritable jambe-
que de petits filets de plumes fort rares. L'a—
lentourdes yeux étoit dégarni de plumes ,
en n'y voyoit qu'une peau fort noire. Cet
oifeau avoit le bec droit , pointu , & d'un;
rouge pale , tirant iur la couleur de chair^
Le bas des véritables jambes étoit rouge , &
avoit plus de quatre pouces de longueur ^,
la partie du pié , qui s'étend depuis le talon.
jufqu'aux-doigis , étoit de couleur grife , &
le refte àcs pies & la jambe de couleur rou-
ge. Il avoit des écailles en forme de table*
fur les extrémiités des doigts. Les trois de
devant étoient joints enfemble à leur com-
mencement , par des peaux courtes. & épaif»
Çts. Il avoit le doigt d. derrière gros &. court,,
les ongles blancs , larges , & courts à-peu—
près comme ceux de l'homme. La cigogne
fe noiirrit de lézards, de ferpens , de gre-
nouilles , & n'a point de ventricule comme
les oifeaux de proie , mais feulement un géfier.-
Elle mange aufli des vers , des araignées ^
& d'autres infedes. Mémoires pour fen^ir
a rhifioire des animaux y tome III y troi"
fie me partie. ( J)
CiGOGNENOIRE, ciconianigra , oifeau'
de la groffeur de la cigogne oï^\nii\re , ou mê-
me un peu plus petit. Le cou , la t^iQ , le dos
& les iales font d'un noir luifant ou mêlé
devcrd ; le ventre , la poitrine & les côtés.
l font blancs \ le bec efl verd ^ ks pâtes, fouir
C I G
^e cette couleur , & dégarnies de plumes
jufqu'à l'articulation du genou ; la mem-
brane qui tient les doigts unis enfcmble ,
s'étend jufqu'à la moitié de la longueur du
doigt du milieu, feulement du côté extérieur.
V. Wiilughby, ornith. F". OiSEAU. (7)
Cigogne , ( Mac. médic. ) Les parties
<ie cet oifeau dont on fe fert en médecine ,
font , outre l'oifeau entier , la véficule du fiel ,
le fiel , la graiflè , la fiente & le jabot. Cet
animal eftun grand alexipharmaque , &pafre
pour un excellent remède contre toutes for-
tes de poifons , &: fur-tout contre la pefte ;
on en ufe aulli dans les aftedions des nerfs
& des jointures. Son fiel «ft recommandé
dans les maladies des yeux ; fa grailfe en lini-
ment dans les affedlons goutteules & le trem-
blement des articulations ; fa fiente prife dans
de l'eau , dans l'épilepfie & dans les maladies
de la tête ; fon ventricule ou fon jabot defic-
ché & pulvérifé , pafTe pour un ipécifique
admirable conrre plufieurs poifons. Die}, de
médecine , Dale , Schroeder , Ùc. (/>)
CIGUATEO , ( Géogr. ) île de F Améri-
>que feptentrionale dans la mer du nord ,
l'une des Lucayes ou de Bahama.
CIGUË , f f. ciciitj y ( Hifl. nat. bot. )
genre de plante à fleurs en rofe , difpofées
en ombelle , compofées de plufieurs pétales
en forme de cœur , inégales & foutenues par
im calice qui devient un fruit prefque rond ,
dans lequel il y a deux petites femences ren-
flées & cannelées d'un côté , & plates de
l'autre. Tournefort , injîit. rei herb. Voyc^
Plante. (/)
La cicuta major C. B. cfl une de celles
•qu"'on range parmi les véninieufes , & la plus
renommée de fon genre. La mort de Socrate
a feule fuffi pour en immortalifer les effets.
Comme on ne lit point fans attendrifîê-
ment dans le Plie'don de Platon , l'hidoire
circonftanciée de ce qui précéda la mort de
ce philofophe, qui avolt palîe fa vie à être
utile à {à patrie , & à la fervir de tous {ts
talens ; qui ne fe démentit jamais dans fa
conduite ; qui témoigna jufqu'au dernier
foupir une grandeur héroïque , émanée de
la fermeté de fon ame & de la confiance d?ns
fon innocence ; il réfulte néceiTairement de
cette leâure , que tout ce qui regarde la fin
tragique d'un homme fi refpedable , devient
wtéreffant , jufqu'à la plante même qui finit
c I G Sj
\çs jours. Le nom de cette plante fe joint
dans notre efprit avec celui de Socrate. Nous
là cherchons dans nos climats , nous voulons
la connoître par nos yeux , ou du moins
nous en hfons la defcription avec avidité.
Defcription de notre ciguë. Sa racine eft
longue d'un pié , grofle comme le doigt ,
partagée en plufieurs branches folldes. Avant
que de pouffer fa tige , cette racine eft cou-
verte d'une écorce mince , jaunâtre , blanche
intérieurement , fongueule , d'une odeur
forte, d'une faveur douceâtre ; de plus, cette
racine efl creufe en dedans quand elle poufîe
fa tige. Cette tige efl filiuleufe, cannelée,
haute de trois coudées , hffe , d'un verd gai ,
parfemée cependant de quelques taches rou-
geâtres ,%omme la peau des ferpens. Ses feuil-
les font ailées , partagées en plufieurs lobes ,
lifîês , d'un verd noirâtre , d'une odeur puan-
te , approchant de celle du perfil. Szs fleurs
font en parafol au foramet (\ts tiges , en rofes
compofées de cinq pétales blancs en forme de
cœur , inégaux , placés en rond , & portés fur
un calice qui fe change , comme on l'a dit , en
un truit prefque f'phérique , compofé de deux
petites graines convexes & cannelées d'un
côté , applaties de l'autre , d'un verd pâle.
Elle croît dans les lieux ombrageux , dans
les champs , au bord des haies , dans les
décombres , & fleurit en été. Elle vient dans
les environs de Paris à l'ombre.
Toute cette plante a une faveur d'herbe
falée, & une odeur narcotique & fétide;
fon fuc rougit très-peu le papier bleu ; d'où
l'on peut conclure qu'elle contient un fei
ammoniacal enveloppé de beaucoup d'huile
& de terre. Ces principes fe trouvent à-peu-
près dans l'opium.
Elle n'fft point aujji venimeufe qiî'en
Grèce. Prefque tout le monde convient que
cette plante prife intérieurement efl un poi-
fon , & perfonne n'ignore que c'étoit celui
Aes Athéniens ; mais quelles que fuflent les
qualités mortelles de la ciguë dont ils fe fci -
voient , il efl certain que celle qui croît dans
nos contrées n'a point ce même degré dé
malignité. On a vu dans nos pays des pe"-
f'onnes qui ont mangé une certaine quantiré
de fa racine & de fes tiges fans en mourir;
Ray rapporte dans fon hijhire des plantes ,
d'après les obfervatlons de Bowle , que la'
poudre des racines de ciguë y do-nce à Ia
L 2
84 C I G
dofe de vingt grains dans la ficvre quarte ,
avant le paroxyfrae , eft au deflus de tous
les diaphorétiques. M. Reneaume , médecin
de Blois ( obferi^. 5 & 4 , ) , diten avoir fait
prendre , avec beaucoup de fuccès , une
demi d'ragme en poudre dans du vin, &
jufqu'à deux dragmes en infiifion pour les
skirrhes du foie & du pancréas : mais ce mé-
decin n'a jamais guéri des skirrhes , & fi Ton
obfervation ëtoit vraie , elle prouveroit feu-
lement que la racine de cigué n'efl pas tou-
jours nuifible.
Nous croyons cependant avec les plus
lages médecins , que le plus prudent eft de
s'abftenir dans nos climats de l'ufage interne
<le cette plante. Elle y eft alTez venimeufe
pour fe garder de la donner intérieurement ;
car elle caufe des ilupeurs & autres accidens
fâcheux. Son meilleur antidote eft le vinai-
gre en guife de vomitif, avec de l'oximel
tiède en quantité fufEfante , pour procurer
& faciliter le vomiiTement.
Elle ne pajjoit point pour venimeufe à
Rome. Ce qui efl néanmoins fingulier, &
dont il faut convenir , c'eft que la ciguë ne paf-
foit point à Rome pour un poifon , tandis qu'à
Athènes on n'en pouvoit douter ; à Rome au
contraire on la regardoit comme un remède
propre à mod-érer & à tempérer la bile.
Perfe , fatyre V y vers 14.^ , ditlà-deiTus ;
hilis
Jfitumuit , quàm non extinxerit urna clcutce.
Horace en parle auffi comme d'un remède ,
dans fa féconde épîtrc, liv. II y vers 55 :
Sedquod non dejit habentem
(^dçe poterunt unquàm fatis expurgare ci-
cutce ?
iV/ meliùs dormire putem quàm fcribere
r'erfus.
» Préfentemcni que j'ai plus de bien qu'il
i-> ne m'en faut , ma folie ne feroit-elle pas à
?) l'épreuve de toute la cigué ^ fi je n'étois
3J periuadé qu'il vaut mieux dormir que de
yj faire des \tx^. »
Pline , liv, XlV, chap. xxij , vante la
c/^wépour prévenir l'ivreffe , & prétend qu'on
en peut tirer plufieurs rem. des. Lefcale rap-
porte quelque part , qu'en voyageant en Lom-
bardie , on lui fervit de la (alade où'ûy avoit
de la ciguë, ce qui l'étgûna fort ; mais qu'il
C I G
revint de fa furprife quand il fut que les gens
du pays enmangeoient , & qu'ils n'en étoienr
point incommodés. Les chèvres en broutent
la racine , &c les oifeaux en mangent la graine
fans inconvénient ; mais les etfets des plantes
fur les animaux ne concluent rien pour
l'homme , & toutes les autorités qu'on vient
de citer ne fauroient contre-balancer le poids
de celles qu'on leur oppofc. Il relie toujours
certain , par le grand nombre d'exemples
funeftes rapportés dans les Tranfact. philof.
dans les Mém. de Vacad. des Se. dans Wep-
fer & ailleurs , que toutes les efpeces de ciguë
font venimeufes.
Nous remployons exte'rieurement.On doit
donc fe contenter de s'en fervir pour l'appli-
cation extérieure , & de cette manière on en
fait ufage avec fuccès. Ses feuilles font adou-
ciffantes & réfolutives ; bouillies avec da
lait , on les applique fur les hémorrhoïdes &
fur les endroits où la goutte fe fait fentir. Le
cataplafme de feuilles de ciguë pilées avec des
limaçons , & malaxées avec les quatre fari-
nes réfolutives , eft vanté pour l'inflamma-
tion des teflicules , les douleurs de goutte &
de fciatique. Henri d'Hecr , obfer. j , les
recommande bouillies dans l'eau de fleurs
de (lireau avec un peu de camphre , pour Fin-
fiammation & la tumeur de la verge qui
vient d'échaufïèment. En général , les feuilles
& les racines font eflimées pour amollir les
tumeurs skirreufes des parties externes &
des vifceres du bas-ventre , fur-tout du foie
& de la rate. C'efl dans le même but que
nos apothicaires préparent un emplâtre de
ciguë y qui palTe pour un bon fondant. On
emploie aufîi la ciguë dans, l'emplâtre diabo-
tanum de Blondel.
Defcription de la petite ciguë. Il y a une
autre efpece de ciguë , cicuta minor ojfîc.
qu'on fubflitue à la précédente dans les bou-
tiques pour l'ufage externe ; & elle ne diffère
de la première qu'en ce qu'elle eft plus petite ,
que fa tige n'efl point marbrée de. taches rou-
geâtres, & que fon odeur n'eft poinr auffi
forte ; du reflc elle a les mêmes propriétés ,
mais moindres. On a nommé cette dernière
efpece de ciguë , le perjil des fous , par la
grande refTemblance de fes feuilles à celles
du perfil : refîemblance qui a trompé quel-
ques perfomies , & les a prefque empoifon-
iûée«.
C I G
Ohfervatlonfur la coupe de ciguë que but
Socrate. Lorfque le bourreau d'Athènes vint
préienter à Socrate la coupe de Tue de ciguë,
il l'avertit de ne point parler , pour que le
poifon qu'il lui donnoit, opérât plus promp-
tement. On ne voit pas comment les dîets
du poifon pouvoient être accélérés par le
filence de la perfonne qui le prenoit : mais
que ce fût un fait ou un préjugé, le bour-
reau n'agilToit ainfi que par avarice , & dans
la crainte d'être obligé , fuivant la coutume ,
de fournir à fes dépens une nouvelle dofc
de ce breuvage; car Plutarque remarque
dans la vie de Phocion , tome VI de Dacier ,
page 4-0^ , que comme tous Ces amis eurent
bu de la ciguë , & qu'il n'en reftoit plus pour
ce grand homme , l'exécuteur dit qu'il n'en
broieroit pas davantage , fi on ne lui don-
noit douze drachmes ( aujourd'hui , 1777 ,
environ neuf livres dix fous de notre mon-
noie ) , qui étoit le prix que chaque dofè
coûtoit : alors Phocion voulant éviter tout
retard , fit remettre cette fomme à l'exé-
cuteur ; " puifque , dit-il , dans Athènes il
>j faut tout acheter jufqu'à fa mort, y) Article
de M. le chevalier DE Ja uco UR T.
Emplâtre de ciguë de la Pharmacopée de
Paris y édition de i y ^z: If poix-réfine 28
onces ; cire jaune 20 onces ; poix blanche 14.
onces ; huile de câpres 4 onces ; de la ciguë
écrafée 4 hvres ; faites cuire le tout félon
l'art, jufqu'à la confommation de l'humi-
dité ; pafîez par un linge , en exprimant
fortement l'expreffion ; étant un peu refroi-
die , délayez-y une livre de gomme ammo-
niac , auparavant diflbute dans du vinaigre
fcillitique & du fuc de ciguë , & à laquelle on
aura donné par la deilîcation une confillance
emplaftrique ; ce qui étant exadement mêlé,
l'emplâtre fera fait.
CiGUE AQUATIQUE , (Bot.) cicuta
aquatica vel palujîris ^ phellandrium ojf'.
Cette efpece de ciguë poulïe une tige
ëpaifTe , creufe , cannelée , & pleine de
nœuds , moins haute que celle de la ciguë
ordinaire , divifée en plufieurs branches ,
d'où fortent des feuilles ailées , plus minces
& plus tendres que celles de la ciguë. Sqs
fleurs naiflent en parafols , & font fort petites
à proportion de la plante; elles font blan-
ches, avec un œil rougeâtre. Sa racine eft
compofée d'un grand nçmbie de fibres , qui
C I G 8î
partent à^s nœuds qui Te trouvent au bas de
la tige. Lu ci.guë aquatique croît dans les
fofles & les étangs , & fleurit au mois de
juin. Elle paflè pour être de la même nature
& avoir les mêmes qualités que la cv^z/ë ordi-
naire ; mais on l'eflime beaucoup plus veni-
meufe , ce qui fait même qu'on l'emploie
rarement dans les boutiques.
Les obfervations fournies par le hazard ont
juftifié que fes effets font mortels , & quel-
quefois promptement ; du moins M. Jaugeon
a rapporté à l'académie Aqs fciences , que
trois foldats allemands , partis d'Utrecht au
commencement du printemps de 17 14,
moururent fubitement tous trois en moins
de demi-heure pour avoir mangé de la cicu-
tariapalufiris ) qu'ils prenoient pour le cala-
musaromaticus y propre à lOrtifierreftomac.
Il y a en effet une elpece de phellandrium ou
ciguë aquatique y à feuille d'ache fauvage ,
qui efî odorante , aromatique , & qui trom-
peroit des gens plus habiles que ne le font
communément des fôldats. On trouva à l'un
de ceux-ci les membranes de l'ertomac per-
cées d'outre en outre ; & aux deux autres
feulement corrodées. Dans tous l'eftomac
étoit plein d'une écume blanchâtre ; le reftc
des vifceres du bas-ventre peu altérés ; les
poumons & les mufcies du cœur flafques &
flétris ; & les vaifleaux pleins d'un fang tout
fluide. Wepfer ( Jean- Jacques ) rapporte
aufli plufieurs exemples , moins prompts à
la vérité , mais également funefles , des effets
de cette plante.
Comme nous avons de cet auteur un traité
complet fur cette matière , imprimé d'abord
à Schaftôuze en '^^J^ , //z-4°. à Leyde en
1733 , z/2-8°. & qui efl entre les mains de
tout le monde ^ nous .nous difpenferons
d'entrer dans de plus grands détails. l^oye\
Poison. Article de M. le chevalier de
Jaucovrt.
Nous ne croyons pourtant pas pouvoir
nous difpenfer d'indiquer les fecours les plus
efKcaces contre ce poifon , d'après le traite-
ment du même Wepfer , dont le fuccès a
été confirmé par plufieurs expériences pol^
térieures.
Cet auteur recommande d'abord d'éva-
cuer le poifon qui fe trouve dans l'eftomac
par la voie la plus abrégée & la plus fure ,
c'eit-à-dire , par le vorailTement , qu'il pe
î$ CIL
trouve pas contre-incîiqiié dans ce cas par
une efpece crépilcpfie , qui ef} un fymptome
afî'ez ordinaire du venin de la ciguë.
Lorfqu'on a en aflé la a'^wè' des premières
voies au:ant qu'il eft poflible , il ne s'agit plus
qye de remédier aux i npreffions qu'elle a pu
faire fur ces parties , & à raalquer ra(3;ion
de quelques reftes de ce poifon qui peuvent
avoir échappé au vomilièment.
On remplit cette double indication par
tous les adouciilàns gras & huileux , comme
le beurre, l'huile d'olive, celle d'amendes
douces , le bouillon gras , &ç. le laitage
& les émulfions , les farineux délayés dans
de l'eau , comme la crème de riz , l'orge
jiiondé, v-r^'c
Les alexipharmaques , les cordiaux , le
mouvement & les autres reflburces contre
la coagulation des humeurs , font des fecours
auili peu réels que la caufe qui les a fait ima-
giner ; le venin de la ciguë répurc froid &:
coagulant prefque jufqu'au temps deWcpfer,
a été enfin reconnu pour irritant & caufti-
que , & il eft rentré par conféquent dans
la claiTede ceux qu'on ne combat qu'en
f)révenant ou en mafquant leur adion fur
es premières voies. (3)
CILIAIRES , adj. en amitomie , fe dit
de difFérenres parties de l'œil : glandes cil iai-
res , procès ciliaires , ligament çiliaire ^ les
nerfs ciliaires. Voye\ (E I L .
Les glandes ciliaires font des grains fitués
dans le tiflîi cellulaire des paupières ; Mei-
bonius décrivit leurs conduits en 1666 ,
trois ans après les avoir découverts.
Procès ciliaires , ell le nom que Ruyfch a
donné aux fibres de l'uvée. V. UvÉE. {L)
ClLIAlRE {ligament) appartient à l'œil,
& a été ainli appelle à caufe de la reflem-
blanee qu'il a avec les cils ou poils des pau-
pières. ;^oye;^ Ligament.
Des fibres un peu épaifTes partent de la
choroïde prefque une ligne plus en arrière
que le cintre orbiculo ciliairc , derrière l'uvée,
au commencement de laquelle elle a fa par-
tie moyenne. Elles vont de toutes parts trani-
verfalement à la circonfirence du cryflallin ,
blanches quand on a lavé leur couleur ,
mêlées pareillement de tuyaux grands &
vermiformes ; taifant un arc qui s'accom-
mode au cryflallin ; convexes en devant ,
couchées fijrl'humçur vitrée, enfuite fur le
C I L
cryflallin , à la partie antérieure duquel elles
s'infèrent au dedans du plus grand cercle ;
tenant raanifeflement dans le bœuf à la cap-
lule vitrée , à celle du cryllallin , & à la
rétine ; plus légèrement à la vitrée dans
l'homme.
Delcartes a dit , dans fa dioptrique , que la
contradion des ligamens du cryflallin lui
donnoit un mouvement par lequel il deve-
noit plus convexe pour voir , diopt. ch. iij ;
& il a confirmé cette opinion par quelques
expériences. Grew , dans fi cofmolog. fac.
CoiWeï. p. ^o6\ Parifinus, dijfecl. deVourfe^
p. m. j Qi Bidloo , de oculis y qui affirme ,/'.
30 y qu'on voit vifiblement ce changement
de figure dans les oifeaux , ont fuivi ce grand
philofophe. Bourdelot, fuivant J3enis , con^
fer. 4 y dit que la pupille s'étant retrécie k
caufe de la proximité des objets , le cryflal-
lin prenoit plus de convexité en fon milieu
pour mieux voir les objets trop proches.
Cependant Molinetti , /?. « 47 ; BrifTeau , p.
y J ; Bohn , p.^GS, veulent au contraire
que l'adion du corps çiliaire Coït d'applarir le
cryflallin. D. Phelippeaux , fuivant Stenon ,
can. carch. diff.p. i 04 ; Wintringham , p.-
40 / , & en dernier lieu Santorini , ont em»
braffé le même fyflême ; ce dernier ayant
vu des flries fur le cryflallin d'un aveugle ,
& comme les vefliges du ligament çiliaire,
Ch. iv , n. Zy
Porterfields , l. c.p. iSj ^ fuiw. con-
tefle ce changement de la figure du cryflal-
lin : en effet l'extrême mollelîe du ligament
n'efl pas faite pour furpaiî'er la ftrudure
denfe & élaflique de la cap fuie : de plus , on
peut objeder l'arc que font ce^ ligamens ou
leur diredion , qui fait au cryflallin un angle
fort obtus ; ce qui ne peut favorifèr le chan-
gement. Hall. (L)
^ Çiliaire , couronne çiliaire. ( Anatc-
mie. ) C'efl la face intérieure de la choroïde
continuée ; elle efl orbiculaire , mais un peu
plus étroite vers le grand angle ; il s'élève fiir
cène face , avant que l'iris fe (épare de la face
antérieure, des plis qui s'élèvent peu à peu ,
& dont deux jufqu'à quatre concourent pour
faire un filet de la couronne; cqs plis ont
une cellulofité entre les deux lames dont ils
fontcompofés : une membrane fine les unit *
il fe form.e de ces mêmes plis un anneau qui
pofe fur la couronne muqueufç ; ils abandon-^
C I L
nenr la clioroïde à l'origine del'uvee , paiTent
le petit vaîlon entre le cryfla'lin & le vitré ;
po!ent fur fa face antérieure , & finilTent fans
s'y attacher.
La couronne ciliaire ne tient au cr} flallin
que par la mucofiré d'un brun-foncé , dont
elle elî abreuvée aufli bien que l'uvée. Dans
un œil confervé ^ cette mucofité fe fond,
rend l'humeur aqueufe noirâtre , & le cryf-
tallin , pr.vé de fon appui , roule & perd
fa place.
Les poilTons n'ont pas de couronne ciliaire,
ïl> ont à fa place une cloche qui part de la
choroïde , & qui s'attache au cryftallin par
un filet ; d'autres poiffons ont une anfe qui
pcrt de la même membrane , & foutient le
cryflaliin.
Chaque filet de ctixt couronne eft dou-
ble ; il fe replie fur le cryftaUin , & fait une
^r\Çfd : toute la furtace de ces filers efl cou-
verre d'une villofité vafculaire de la plus
grande beauté : les troncs font fupportés par
la convexité du filet : dans le porc , ce réleau
efî percé à mailles quarrées , & formé par
une cellulofité blanchâtre : ces mailles quar-
rées fe retrouvent dans le canard fauvage.
Il n'y a certainement rien qui annonce
une ftrudure mufculairc dans la couronne
ciliaire d'aucun animal , le microfcope ne
découvre qu'une villofité qu'on peut injeder.
( H. D. G. )
CILICE , f. m. ( Hiji. anc. & mo<L) vête-
ment fait de poils de chèvre ou de bouc ,
dont l'ufagjc eil venu des anciens Ciliciens
qui portoient de ces fortes de robes y parti-
culièrement les foldats & les matelots.
I^ec minus int r^a barbas , incanaque mcntaj
C nyphii îendznt hirci ; feîafquc cornantes ,
Ufum in cajlrorum, 6? miferis velamina nantis.
Géorg. liv. IIL
Peut-être le vrai fens de cts vers e/î:-il
qu'anciennement les foldats & les matelots '
fe fervoient de ces tiffus de poil de chèvre
pour en fa^e des tentes & des voiles ; & c'eft '
ce que fembîe infmuer Afconius Pedianus ,
dans une remarque fur la troifieme verrine y.
cù il dit : Cilicia. tenta in cajlrorum ufum
atque nautarum. {G) \
* CILTCIE , f f. ( Géog. anc. & mol ) '
pays de l' Afie mineure , berné au nord-oueft ,
par une longue chaLie du mont Taurus ; au
C î L ?7
ncrd par îa féconde Cappr.d'cc€ & la féconds:
Arménie ; à l'orient par la Comagene ; au
midi par laSyre & la mer Méditerranée ; &:
au couchant par laPamphilie. On la divifoir
en champêire & en montagncufè , la monta-
gncufe s'appello^t chc?: IcsGr.cs Trachcrorisy.
& fcs habitans Trachéotes , & on la parta—
geoit en Sélénide & en Céride. Il paroît par
les villes que cette contrée comprenoit ,
qu'elle étoit tiTS- peuplée. La CiUcie fc'it
maintenant partie de laCaramanie. Les Cili-
ciens av oient inventé une fc-rte d'étofïè de poil
de chèvre , dont on faifoit àts habits pour les
matelots & les foldats. Comme elle étoit groA
fiere & d'une couleur brune , les Hébreux
s'en fervoient dans le deuil &: dans îa è\Ç~
grâce. Ils étoient différens de ceux que l'eC-
prit de pénitence a inventés depuis , & qui
font tout de crin. Ariftote dit qu'en Cilicte
on tondoit les chèvres , comme on tond
ailleurs les brebis.
CiLIClE {terre de) , Hifi. nat. c'efî, fùî-
vant Théophraile , une efpeee de terre qui
fe trouvoir en Cilicie. Cet auteur dit qu'en
la faifant bouillir dans de l'eau elle devenoit
vifqueufe & tenace : on s'en fervoit pour
en enduire les ceps de vigne , & les garantir
èQs vers & des autres inlèdes. M. Hiil
penfe avec raifon que cette terre étoit une
terre bitumineufe , d'une confidance folîde y
que la chaleur de l'eau bouillante rendoit
affez molle pour pouvoir s'étendre , & qui
par fa quaUté tenace & vifqueufe ^rrê toit
\qs infedes , ou les chafibit par fon odeur
forte. ( — )
CILINDRE ù CILINDRIÇUE, voye^
Cylindre à Cylindrique.
CILLEMENT , f m. [Anat.^ PhyfwL )
en latin niclatio y mouvement vif, alternatif
& fynchronique èiÇ,s paupières.
Elles ont , comme on iàir , un très-prompt
mouvement , & la paupière fupérieure dans
l'homrne en a beaucoup plus que la paupière
inférieure. Ce mouvement ii^s paupières fe
fait quelquefois volontairement , fouvenr
auiîi fans y penfer , & toujours par une extrê-^
me vîrefTe.
Les cillemens qui arrivent de moment en
moment , d.ins les uns plus , dans les autres
moins , (^ font à la paupière fupérieure alter-
nativement par le releveur prop^^e , & par
la portion palpébrale fupérieure du mufcle
88 CIL
orbiculaire : ils fe font auffi alternativement
& en même temps à la paupière inférieure,
par la portion palpébrale inférieure du muf-
cle orbiculaire , mais très-peu , à caufe du
petit nombre des fibres palpébrales infé-
rieures.
On voit déjà qu'il y a deux mufcles qui
fervent au mouvement des paupières ; mais
pour mieux entendre leurs cUlemens , il faut
fe rappcller la Ifrudure de ces deux voiles
qui font tendus fur les yeux : or \qs deux
paupières étant formées de membranes min-
ces , prefquetranfparenres, à petits plis, très-
vafculeufes , remplies d'une grande quantité
de papilles nerveufes à la furface interne ,
toujours unies , & bordées d'un large car-
tilage en forme d'arc , on comprend qu'elles
peuvent fe toucher mutuellement , s'éloigner
enfuite , s'abaifler &: fe rouvrir alternative-
ment. Le mufcle élévateur de la paupière
fiipérieure , né par un petit principe charnu
du fond de l'orbite oÂTeufe , fe dilperfe en
petites fibrilles tendineufes très-fines , & va
s'inférer à toute la partie fupérieure du tarfe
de cette paupière , elle doit donc s'élever
fans rides par le mouvement de ce mufcle.
Pour le mufcle orbiculaire qui prend fon
origine du grand os du nez , & va parfe-
mant fes fibres par les deux paupières , il n'a
qu'à fe contrader, comme il fait , en forme
de fphinder , pour unir doucement les pau-
pières l'une à l'autre : s'il fe contrade plus
fortement , il exprime les larmes , en arrofe
la furface interne de l'œil , en nettoie les
ordures , & le lave. La paupière inférieure
s'ouvre par la contradion fpontanée des
fibres mufculaires diftribuécs dans la joue.
Mais de peur que les paupières , à torce
de ciller & fe joindre l'une à l'autre fans cefle,
ne s'excorient , la nature a placé fur le bord
cartilagineux de l'une & de l'autre de petits
grains glanduleux , où fe filtre une humeur
qui fe décharge par des orifices ouverts , &
fert de Uniment au bord des paupières. Ces
orifices ne font autre chofe que les extrémités
des petits vaifleaux qui vont ferpentant en
cet endroit , & naiffent continus avec les
artérioles qui y font diflribuées , fans flruc-
ture glanduleufe.
Ainfi dans les paupières douées d'une peau
flexible , de fibres nerveufes , mufculeufes ,
d'une msmbrane adipeufe , & d'une tunique
C I L
interne très-lifïê , parfemée de vailTeaux fan-
guins & de glandes qui l'abreuvent fans cefîe,
& entretiennent la cornée tranfparente , tout
concourt à l'exécution des cillemens alterna-,
tifs de ces rideaux de la vue , comme Cicé-
roii mC-me l'a remarqué dans fon ouvrage
de la nat. des dieux ^ L II, c. Ivij. Palpe-
brœ , dit- il , funt mollijfimœ taBu , ne lœde^
rem aciem, Ù aptijfimce faclce ad claudendas
ac aperiendas pupillas ; idque providit na-
tura , ut identidem fieri pojjit cum maximâ
celeritate. " Les paupières lont douées d'une
»» furface douce & polie , pour ne point blef^
» fer les yeux : foit que la peur de quelque
» accident oblige à les former , foit qu'on
» veuille les ouvrir , la nature les a faites
» pour s'y prêter ; & l'un & l'autre de ces
» mouvemens s'exécute avec une prodigieufè
« vîtefTe. »> C'efl en effet une chofe admira-
ble que la promptitude des cillemens , leur
' répétition fuccellive , perpétuelle pendant le
cours de la vie , fans dommage , fans ufe-
ment du voile ni de l'œil contre lequel il
frotte , & prefque toujours fans volonté.
Il arrive pourtant quelquefois que ce cille'
ment , ce clignotement des paupières , efl
non feulement involontaire ; mais li prompt
ou fi lent qu'il fatigue & chagrine beaucoup
ceux qui en font attaqués , & qu'il fait de la
peine à ceux qui les regardent. Cette efpece
de trefîaillement efl une vraie maladie , un
mouvement convulfif des voiles de l'œil , pen-
dant lequel les fibres motrices du mufcle or-
biculaire deviennent tendues , roides ; & la
paupière après avoir demeuré un infiant fer-
mée , fe relevé l'inftant fuivant , en forte que
les malades jouifïent ou font prives de la lu-
mière par intervalles ; ce qui n'a pas heu dans
les cillemens ordinaires & naturels. II femble
donc que la caufe de cette convulfion efl un
mouvement irréguHer des efprits animaux ,
qui fe portant avec trop de rapidité dans les
fibres du mufcle orbiculaire , empêchent
pendant un temps l'adion du mufcle releveur.
On guérit ce trefTaillement plus ou moins
difficilement , fuivant fa fréquence & l'an-
cienneté du mal. Quand il efl léger , deux
moyens peuvent fervir à fa guérifon ; le pre-
mier , de fe faire éternuer pendant l'accès ;
le fécond , de frotter doucement avec la
main le tour de l'orbite & des paupières »
ou plutôt d'employer des fridions fur les
paupières
CIL
paupières & aux environs avec <^es eaux fpîrî-
tueufes , ou des huiles nervines mêlées de
quelques gouttes d'efprit volatil huileux ,
dont on répétera l'application plufieurs fois
dans le jour. Lorfque ces deux moyens ne
fuffifent pas pour empêcher les récidives de
la Gonvulfion , il faut y joindre prompte-
raent les remèdes internes , parmi leiquels
je ne connois rien de raiejx que les antimo-
niaux , pris long-temps & en petite quantité.
Ceft ainfi , par exemple , qu'il convient de
traiter les enfans qui clignotent perpétuelle-
ment les yeux , pour avoir été trop expofés
au grand jour , en forte que leur fréquent
cîllement fe tourne en habitude incurable,
li l'on n'a l'attention d'y remédier de bonne
heure.
Il ne faut pas confondre le cillemem des
paupières avec leur clignement. Voye\ ce
mot. ( M. le chei'cilier de Ja ucour t. )
CILLER , ( Maréchall. ) on dit qu'w/z
cheial cille y quand il commence à avoir les
fourcils blancs, c'efl-à-dire quand il vient
fur cette partie environ la largeur d'un liard
de poils blancs , mêlés avec ceux de la cou-
leur naturelle ; ce qui eft une marque de
vieilleffe. Voye^ Age & Cheval.
On* dit qu'un cheval ne cille point avant
l'âge de quatorze ans , mais toujours avant
l'àge d« lèize- Les chevaux qui tirent fur
l'alzan & ceux qui font noirs , cillent plu-
tôt que les autres.
Les marchands de chevaux arrachent or-
dinairement ces poils avec des pincettes^
mais quand il y en a une H grande quan-
tité que l'on ne peut les arracher iàns ren-
dre \ts chevaux laids & chauves , alors ils
leur peignent les fourcils , afin qu'ils ne pa-
roifTent vieux. Chambers.
■ CILLEY , (Géog.) petite ville d'Allema-
gne au cercle d'Autriche dans la Carniole,
l'ur la Saan , capitale d^un comté de même
nom. Long, j j ;, zo ; lat. ^6 , z8.
CILS, f. m. (Anai.) fontles poils dontle
bord des paupières eu garni, fur-tout celui des
lupérieures , qui efl plus gros & plus épais
qu'à celles d'en-bas. Voye\ PauPTERE.
Leur ufage eft vraifemblableraent de rorn-
pre Timpreilion trop vive Aes rayons de
lumière , & de garantir l'œil des petits
infeftes volans & (Iqs atomes qui pourroieiu
y nuire.
Tome VIII
C I M ^f
Ces cifs prennent leur origine d'une petite
rangée de glandes dont efl: couvert un car-
tilage mince & tendre qui borde chaque
paupière , & qui fert comme de tringle ou
d'anneau pour les approcher l'une de l'autre.
(L)
CIMBERS , (Geogr.) lieu d'Allemagne ,
dans le cercle d'Autriche & dans le comté
du Tirol , au quartier de l'Adige : c'eft un
des plus habités du vallon de Fleimbs , &
l'un de ceux où pafîèrent & fejournerenc
autrefois les Cimbres, lors de leur expédition
en Itahe. (D. G.)
CIMBRES , f m. pi. {Geogr. ancien. &
mod.) ancien peuple le plus feptcntrional
de l'Allemagne. Ce font les plus anciens
habitarts qu'on connoifîé à la prefqu'île de
l'Holifeen , du Slefwig , èc du Judand ;
& c'eft d'elle qu'elle a pris le nom de Cher^
fonnefe cimbrique. Les Grecs les ont quel-
quefois confondus avec les Cimmériens.
Après leur défaite par les Romains , ils fe
répandirent en difFérens endroits , quelques-
uns s'arrêtèrent dans les Gaules , s'unirent
aux Saxons , & furent confondus avec eux.
CIME , f. f. fe dit de la partie la plus
élevée des grands arbres.
CIMENT, f. m. (Architec7.) dans un
fens général , efî une corapofition d'une na-
ture glutineufe & tenace , propre à lier ,
unir & faire tenir enfemble plufieurs pie-^
ces diflindes.
Ce mot vient du latin cœmentum , dérivé
de cœdoy couper , hacher, broyer. M. Feli-
bîen obftrve que ce que les anciens archi^
tedesappelloient<:(r;72e/2fu/72,étoittouteautre
chofe que ce que nous appelions ciment.
Par ciment ils entendoient une efpece de
maçonnerie, ou une manière de pofer leurs
pierres, ou bien la qualité même àes pier-
res qu'ils employoient ; comme lorfqu'ils
faifbient des murs ou des voûtes de mot-
ion ou de blocage. En effet il y avoit une
coupe de pierres propres pour ces fortes
d'ouvrages , pour lefquels on ne les faifoit
point quarrés ni uniformes: de forte que
cœmema proprement étoient àes pierres au-
tres que ce qu'on appelle p/err^J" de taille.
Le mortier , la foudure , la glu , Ùc. font
des fortes dt ciment. V. MoRTIER , SOU-
DURE jGlU, ^c. Le bitume qui vient
du Levant, fur, dit-on, le ciment qu'oa
M
^o C I M
employa aux murs de Babylone. Voye\
Bitume.
Un mélange de quantités égales de verre
en poudre, de fel marin & de limaille de fer ,
mêlés & fermentes enlêmble, fournit te meil-
leur ciment que l'on connoifle. M. Perrault
aiTure que du jus d'ail eif un excellent ciment
pour recoller des verres & de la porcelaine
caflec.
En terme it architecture y on entend par-
ticulièrement par ciment, une fort^ de mor-
ti|^ liant y qu'on emploie à unir enfemble
àçs briques ou des pierres pour faire
quelques moulures ou pour faire un bloc
de briques , pour des cordons & des cha-
piteaux , &c.
Il y en a de deux fortes ; le ebaud qui
e(} le plus commun ; il eft fait de réfine,
de cire, de brique broyée , & de chaux,
bouillies enlêmble. Il faut mettre au feu
les briques qu'on veut cimenter , & îès ap-
pliquer toutesrouges l'une contre l'autre avec
du ciment entre deux.
On fait moins d'ufagc du' ciment froid ;
il efl: compofé de fromage, de lait >. de chaux
vive & de blanc d'ccuf.
En 1774 , il parut un mémoire fur l'art
de bâtir , imprimé par ordre du gouverne-
ment; il annonçoit une découverte inté-
refïânte , qui Irappa tous les efprits : effec-
tivement , le Sr. Loriot qui en eil l'auteur ,
lembloit avoir deviné & démontré le pro'-
cédé fimple qu'ont employé les Romains
dans des conllrudions qui atteftent encore
par leur durée la parfaite compofition des
cimens qu'ils y employoieiit.
Les expériences faites par l'auteur &■ rap-
pellées dans fon mémoire , fembloient jul-
tiiier complètement la vérité de fon afTer-
tion. \Jn grand nombre ne douta plus,
qnp le nouve-AU ciment ou mortier n'eût
toutes les qualités énoncées, & que le nou-
veau ciment ne Ht époque dans la pratique
■de i'architcciure, lur-tout par la facilité de
le corapoier & de l'employer..
. ^Eû. effet , tout eonfiife à introduire dans
.le mortier ordinaire , loriqu'rl eil prêt à être
employé , une certaine portion de.chaiix-
•vive , mile en poudre, déhyée & am'al-
gsmée par un mouvement aflêz prompt
pour avoir le temps de ie fiifir & de le
;inettre- en ufage , car riruroduction. de la
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chaux-vive Cç fàture rapidement de toute
l'eau du mélange , en forte que le nouveau
mortier exige feulement dans fon emploii
toutes les précautions qu'il faut prendre dans,
celui des gipfes ou des plâtres.
La quantité de chaux-vive à introduire ,
doit être fuivant les obfervations , & luivant
les degrés de force de la chaux , à-peu-près-
d'un quart en firs des matières feches em-
ployées dans la chaux , éteinte d'abord dans
l'eau ; les matières feclies ne font autre -
chofs que le fable, la brique pilée, le mâche-
fer, ÊTc. en général tous lès corps intermédiai»
res employés dans le mortier ordinaire.
LTn procédé aulii fimple étoit aifé à effayer ;.
auffi une foule d'expériences faites par les
gens de l'art, lliivirent immédiatement la pu-
blication du mémoire; on. attendit pour pro-
noncer , que quelques failons, & l'hiver iur-
tout-, eufl'ent éprouvé les difïerens emploie
qu'on en avoit fiiits. La qualité fupéricure
promifè par le mémoire , & fans doute la
piusintércfrante,étoitla refiffance aux gelées;
mais ilfallut renoncera ce précieux avantage,
fur-tout pour les enduits dont l'ufage pro»
mettoit de fi grandes commodités ; tous fe.-
trouverent altérés, décompofés, feuilletés ou
foufflés-par l'aâion du dégel: le décou-
ragement a nécefî'airement été une fuite dô
ce malheureux résultat; mais on a {^t-être
conclu trop rapidement que la découverte
étoit nulle & fans uiage.
Elle en a un au moins démontré par l'ex-
périence,, &c dont l'emploi habituel peut êtr&
de la plus grande, utilité, dans des cas affez
multiphés.
Toutes les fois que ïè ciment fera bien fait -
& employé à l'abri de l'effet des gelées , oa;
peut s'attendre qu'il devient impénétrable ai
l'eau , lorlqu'on auraeu foin de l'errer. & po—
lirfa furface avec ailbz d'exaélitude dans les
premiers momensde l'emploi. Les plafonds
des baflirus , les parois des. citernes & des rér-
ièrvoirs , la fiirlace des murs intérieurs adol^
fés contre des terres , celle, de ceux des caves
qui infiltreroient des eaux incommodes ou ;
mal-faines , fi toutes ces p;irties font endui-
tes d'une couche du nouveau ciment , feule-
ment de plufieurs lignes , on doit en attendre
le plus grand fuccès.
On peut aufîi dans les pays qui manquent
déplâtre, le remplacer a\ antageufement par
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le CçmI mélange de§ deux chauîf fans au-
cun intermède , pour les enduits intérieurs ,
les platonds , &c.
Ce fera probablement les feuls aviantages
■que l'on retirera d'une découverte qui pro-
niettoit d'abord une applicatkm générale ,
jnais qui effectivement Te réd(Bf à quelques
emplois particuliers , dont pourtant la pra-
tique de l'art peut faire un uiage habituel &
économique. {Cet article- efi de M. DE LA
Jamariere p capitaine au corps royal
du Génie,)
Le ciment des orfèvres, desgraveurs, met-
teurs-en-œuvres , dit un compofe de brique
mife en poudre & bien tamifée , de réiine &
de cire : ils s'en fervent pour tenir en état les
ouvrages qu'ils ont à graver , ou pour rem-
plir ceux qu'ils veulent cifeler.
Ciment des chymiftes , voye\ CemeNT.
CIMETIERE, f. m. terme d' Architectu-
re'^ l'on entend tous ce nom une grande place
découverte , Cilîez généralement entourée de
charniers {Voye-^ CharnIERs), où l'on
enterre les morts , & -où l'on élevé quelques
fépultures ornées de croix , obéliiques &
autres monumens funéraires. (P)
Cimetière, (/i^ri/}?.) chez les Ro-
jnains , tout endroit où l'on inhumoit un
mort , devenoit un lieu religieux & hors
du commerce. Voye\ aux inflitut. de rerum
divijione , & au di(^efi. liv. I y tit. viij ; l.
6 , §. 5 ,• ^ liv. Il, tit. vj ;1.6, %fin.
Parmi nous , il ne fùflit pas que quelqu'un
ait été inhumé dans un endroit pour que
ce lieu devienne religieux & hors du com-
rnerce , aucun parnculier ne pouvant de fon
«utorité privée imprimer ce caradere à un
héritage ; il faut que l'autorité du fupérieur
çccléiiaftique intervienne, que le lieu ait été
béni & coniàcré avec les folemnités accou-
tumées , & deftiné pour la fépulture des
fidèles.
Autrefois les cimetières étoient hors lesvil-
îes & lur les grands chemins : il étoit défendu
(Tenterrer dans les églifes ; cela fut changé
par la novelle 820 de l'empereur Léon ,
qui permit d'enterrer dans les villes &même
dans les églifes.
Les cimetières tiennent ordinairement aux
églifes paroiffiales : il y en a néanm.oins qui
font féparés ; les uns & les autres Ibnt tiors
du commerce.
C I M 9r
\ II arrive néan'moins quelquefois que l'on
change un cimetière de place , ou que l'on
en retrancha quelque portion pour l'élar-
gilTement d'un grand chemin ; auquel cas ,
avant dé remettre l'ancien cimetière dans le
commerce , il faut que , du confentemenc
du curé & de l'évêque diocéfain , & par
permifllon du juge royal, les ofi'emxensfoient
exhumés & portes au nouveau cimetière.
Un ancien cimetière où perlonne n'au-
roit été inhumé depuis long-temps , pour-
rait être prefcrit fans titre par une longue
poiTeffion , parce qu'elle feroit préfumer
que le fonds a changé de nature.
Il efl dérendu aux feigneurs , aux curés ,
& à tous autres , de permettre àes dan-
fes dans les cimetières , d'y tenir àes foires
& marchés , & d'y commettre aucune, in-
décence. LoHqu'un cimetière a été poilu par
effufion de fang ou par quelque autre fcan-
dale , il faut le réconcilier. Les canons qui
regardent cette cérémonie font cités par
Jean Thaurnas , dans fon didionnaire au
mot cimetière. Voye;^ le trai té de mortuis cœ-
meterio refiitiiendis^ perLaurentium Delum
romanum ; l'hifi. des empereurs de M. de
Tillemond , tom. III , p. zS z ; les me'm.
du clergé y édir. de i/i^;, t. III, p. 2^24.
Bouvot , t. II j wQvho églife, queft. 7. Fran-
cifc. Marc. tom. I , quefi.^SS. Auzanet
fur Paris, tit. des ferricudes^Ù enfes arrêts y
ch. lix. Jovet, \txho fépulchre, n. z G; Fer-
rer , tr. de Vahus , l. IV , ch. viij, n. z 7.
Les perfonnes de la religion prétendue
réformée ont àes cimetières particuliers qui
leur font affignés par le juge royal. Voye\
Filleau, décijions^o, 33 ? 3^^ 3 3Bp 4^-
Barder y t. II , l. II, ch. />. (A)
Cimetière , (Médecine.) La putréfac-
tion s'empare de nos corps dès qu'ils celï'ent
d'être animés par le principe vital.
Ce mouvement inteflin détruit leur tifîîi ,
& par lui les cadavres deviennent autant de
foyers d'où s'exhalent desmiailnes déleterres
capables de produire les plus lunefîes effets ,
en infeâ:ant l'air que nous refpirons & qui
nous environne. V. AiR & PUTRIDITÉ.
C'eft pour prévenir les fuites de cette in-
feâioQ qu'on donne la fépulture aux morts.
Si des motifs particuliers ont fait abandon-
ner l'ufage de les brûler , & ont fait pren-
dre le parti de rendre nos corps à ia terre
M 2.
5>2 C I M
d'où ils font fortis , on ne les fouflrnit pas
à la putréfadion en les lui confiante La cou-
«;he terreufe , qui les recouvre , rend feule-
ment cette putrétadion plus lente •, & com-
me la terre efî perméable , les émanations
cadavereufes la percent & fe mêlent nécef-
jairement à l'air qui touche la furface des
lieux confacrés à l'inhumation. L'infedion ,
qui en réfulte , eft infiniment moins grande
qu'elle ne le feroit , û les cadavres pourrii-
foient à l'air libre , mais elle peut avoir affez
d'inrenfité pour devenir pernicieufe ; & l'on
ne doit pas perdre de vue cette vérité , lors-
qu'il eil queîHon de conilruire un cimetière.
Faire enforte que l'air n'y foit jamais affez
infedé pour erre dangereux , ou que l'infec-
tion , lorfque l'on intenfi té eft inévitable, ne
puifi'e y caufer aucun funefle accident ;
voilà ce que l'on doit fepropofer. Par quels
moyens réuflira-t-on à empêcher que cette
infedion n'acquière une infeniité redouta-
ble ? C'ed ce qu^on découvrira en ie ren-
dant raifon de F effet de la terre fur les éma-
nations cadavereules , de la formation des
vapeurs qui réiultent du mélange de ces
émanations avec l'air , ôc de l'adion de l'air
lur ces vapeurs.
Quoique la terre foit perméable , & que
dans les cimetières le feu central, de concert
avec la fermentation putride , faffe exhaler
de Çon iein les fubllances volatiles qu'elle
renferme , il eft certain que , par leur den-
fité , les parties intégrantes de la terre gê-
nent CQtlQ exhalation , & qu'agiiîant comme
un filtre , elles fubtiliient les écoulcmens ca-
davéreux en s'oppolant à fémanation des
molécules animales les plus grolileres.
Mais il eft également certain que les fub(^
tances qui font volatilifées , partant de tous
\ts points de la furface des cadavres , s'é-
chappent dans différentes diredions , &
^jrtent de terre fous des angles plus ou moins
aj^us , de manière que fi plufieurs cadavres
font rapprochés les uns des autres, les rayons
d'écoulement fe réuniront nécefïairement.
Ilfiiitde-Uque les exhalations cadavereu-
les auront d'autant moins de denfité , que
ks cadavres feront plus profondément en-
fouis , mais que pouvant en acquérir par
If ur reunion , elles feront encore d'autant
moins denfes , qu'il y aura plus de diliance
«ûtre ces foyers putrides.
C I M
Ces émanations au fortir de terre fe mê-
lent à l'air fous forme de vapeurs , & cel-
les-ci font d'autant plus fenlibles , qu'elles
ont plus de denfîté.
L'air eft-il fec & tient-il en difTolution
peu de molécules aqueufes , il abforbe avec
facilité les èwkinations cadavereufes , & les
difibut fi complètement , que leur divi-
lion , portée auifi loin qu'il efî pofîible ,
les fait échapper aux fèns. Elles fe conden-
fent & deviennent fenfibles fi l'air eft hu-
mide , & elles le font même d'autant plus,
que ce fluide étant plus chargé d'eau, l'union
de (qs molécules avec celles des émanations
fe fait plus difficilement.
Le volume de l'air influe également fur
le peu de denfité des vapeurs. C'ell en cédant
à la force attradive des molécules aériennes
& en fe logeant dans leurs interfHces qus
les corpufcules , exhalés du fein de la terre ,
forment ces vapeurs. Les molécules aérien-
nes font-elles très-nombreufes , eu égard
aux corpufcules expofés à leur adivité , elles
fe les partagent & les divifent de forte que ,
répandus dans une mafle confidérable, ceux-
ci ne s'uniffent a celles-là qu'un à un , &
les vapeurs raréfiées afRdent foiblement les
fens. Le contraire arrive, li la mafîè aérienne
efl moins volumineufe , chaque molécule,
d'air efl forcée de fe charger de plufieurs
corpufcules cadavéreux , ^ la denfité des
vapeurs efi d'autant plus grande , que le
volume d'air eft moindre.
Mais c'efl dans les couches inférieures
que fe fait d'abord cette union ; & la pefan-
teur des fubflances qui pénètrent ces cou-
ches , faifant continuellement obflacle à leur
élévation , leur difperiion dans un grand
volume d'air ne peut avoir lieu qu'autant
que les couches fùpérieures ou collatérales
viendront fuccefilvement prendre la place
des inférieures. Si l'air efl flagnant & im-
mobile , les couches inférieures leront bien-
tôt faturées des corpufcules exhalés , & les
vapeurs qui réfulteront de cette diffolution ,
acquerront une denfité confidérable.
Ce ne feroit pas afîêz que l'air des cou-
ches inférieures fût quelquefois renouvelle »
il faudra encore que l'agitation de la mafîe
aérienne , capable de produire cet eflfet , foit
continuelle , ou du m.oins très-fréquente.
Les vapeurs réunies & condenfées par ^
C I M
iâurée de la flagnation des couches inférieu-
res, ne feroient pas alîez promptement dlvi-
fées par le mouvement momentané qui leur
feroit communiqué ; & ces vapeurs , pouf-
fées alors en maflè, pourroient devenir d'au-
tant plus pernicieufes , que ce mouvement
feroit plus fubit & plus rapide.
Cet inconvénient fera cependant bien fou-
vent inévitable , parce que l'humidité , oc-
cafionée par les pluies , donnera néceffai-
rement de la denfité aux vapeurs , en s'op-
Çofant à leur diifolution ; parce que la raré-
radion , caufee par la chaleur , nécefîitera
cette denfité , en rendant l'air immobile &
flagnant ; parce qu'enfin la réunion de ces
différentes cau(ès condenfera ces vapeurs.
Ainfi l'air des cimetiereSyparVcfftt des pluies
& de la chaleur , ou par leur concours , de-
viendra louvent capable d'infecler ceux qui
le refpireront , foit dans le heu même , foit
dans le voifinage , fuivant la diredion &
la véhémence des vents.
Enterrer profondément les cadavres , &
mettre entre eux une diftanca confidérable ;
placer les cimetières dans des e^idroits où
l'air foit le moins humide qu'il eft poflibJe ,
& jouiiîe d'une liberté qui puilfe favorifer
le mouvement de toutes les couches ; voilà
donc les moyens d'empêcher que les écou-
lemens cadavéreux ne forment des vapeurs
d'une denfité dangereufe , & que l'air dans
les cimetières ne foit jamais afïez infedé pour
être pernicieux.
Mais comme cette infedion eft louvent
inévitable , il faut encore que -les cimetières
foient fitués de façon que les vapeurs infec-
tes qu'ils fournifîcnt ne puiilênt être portées
fur des heux habités, qu'ils en foient aflez
éloignés pour qu'elles aient le temps d'être
diffoutes avant d'y arriver , & que la na-
ture des vents , capables de les charier ,
favorife leur dilToIution.
A quelle profondeur faut-il enterrer les
morts? Quel efpace doit-on affigner à chaque
fépulrure ? La folutlon de ces problêmes eft
encore néceflaire pour pouvoir déterminer
les conditions que doit avoir un cimetière ,
afin que la deftrudion des morts ne nuife
pas aux vivans.
Il eft impoffible de calculer l'adion des
couches terreufes fur les écoulemens cada-
véreux , &: la réfradion des rayons que ^r-
C I M 5)3
meront ces écoulemens en fortant de terre.
Heureuferaent que l'exaditude mathémati-
que n'eft point néceflaire en cette occafion ,
& qu'on peut fe permettre des fuppofitions ,
pourvu que les obfervations les autorifent.
Or , il eft conftant que les couches ter-
reufes fubtilifent les émanations , & que
celles-ci font d'autant moins dénies , que
les autres font plus épaifïês & plus compac-
tes. L'expérience a démontré qu'une cou-
che de terrain d'un pié & même de deux
pies d'épaiftéur, laifïbit aux émanations afîez
de denfité pour fe rendre fenfibles par leur
fétidité.
Il eft également conftant qu'en traverfànt
un milieu denlè, les rayons de matière, quelle
qu'elle foit , s'approchent de la perpendicu-
laire ; & qu'en pafîant d'un mifieu denfe
dans un qui l'eft moins , ils s'en éloignent
d'autant plus que la différence des denfités
eft plus confidérable.
Il fuit de-là , premièrement , qu'il faut
au moins recouvrir les cadavres de trois ou
quatre pies de terre , & même de beaucoup
plus , fi la nature du fol le permet , pour
diminuer autant qu'il eft pollible la denfité
des écoulemens cadavéreux.
Secondement , que fi en traverfànt la cou-
che terreufe , les rayons d'écoulemens, par-
tis des différens points du cadavre , fe rap-
prochent de la perpendiculaire , de m.aniere
à devenir prefque parallèles entre eux au ior-
tiV de la terre , lorlque cette couche a quatre
pies d'épaiffèur , ils s'en éloignent dans l'air
à raifon du peu de denfité relative de ce mi-
lieu , & divergent de façon que l'on peut ,
fans crainte d'exagération , fiippofer que la
ligne , tirée du foramet du rayon fur le ter-
rain , tomberoit alors à trois ou quatre pies ;
qu'ainfi les écoulemens des cadavres, qui ne
feroient diftans que de deux , trois , quatre ,
même de fix & fept pies , fe confondroient
les uns avec les autres. Que pour prévenir
les inconvéniens qui réfulteroient de ce mé-
lange , il faudroit mettre entre chaque ca-
davre un intervalle de fept à huit pies , &
confacrer à la fépulture de chacun d'eux un
efpace de terrain proportionné. Mais les
émanations qui fe feront des pies & de la
tête étant beaucoup moins confidérables que
les autres , il ne fera pas néceffaire que l'in-
, tôrvaile foit par-tout égal , & Ton pourra le
5)4 C I M
réduire à la moitié pour les côtés de la tête
^ des pies.
. Dès-lors en donnant à chaque cadavre fix
pies de longueur & deux pies & demi de
largeur , & y ajoutant deux pies du côté de
la tèzc & autant du coté des pies , en -ajou-
tant pareillement à leur largeur quatre pies
de chaque côté, on aura un elpace quarré
<le dix pies d'une face, & de dix pies & demi
«le l'autre , dont la l'urface fera de cent cinq
pies quarrés. Réduire reîte furface à la moi-
tié , ce feroit pi'obablement foire une réduc-
tion trop forte ; mais , en s'y aflreignant pour
réparer autant qu'il fera poflible l'erreur où
pourroit^ expofer une évaluation trop forte
de la divergence des rayons d'écoulemens ,
il reliera pour certain que l'on doit évaluer
au moins à une furface de cinquante-deux
pies & demi quarrés , le terrain néccifaire
pour la fépulture de chaque cadavre.
Cela pofé , quelle doit être l'étendue du
cimetière ? La réponfe à cette queftion for-
tira des remarques à faire fur le nombre des
morts , qu'année commune on lera dans le
cas d'y dépofer , & fur le temps que dure la
«kflruâion complète des cadavres.
Si les émanations cadavereufcs font capa-
bles de produire les plus funefles effets , en
perçant en détail une couche de terrain de
trois à quatre pies d'épaifleur, elles le feroient
beaucoup plus encore , fi , en ouvrant la
terre avant qu'elles n'eufîènt été épuifées ,
on les expofoit à for tir en mafle. Le mal-
heur arrivé à Montpellier en 1744 à l'ou-
verture d'un caveau fépulcral de l'églife No-
tre-Dame , & raconté par M. Haguenot ,
profeffeuf en médecine de l'univerfité de
cette ville (a) ; la mort récente d'un foP-
foyeur , qui dans le cimetière de Montmo-
renci , au rapport de M. Cotte , prêtre de
l'Oratoire , a été caufée par la vapeur qui
Ibrtit d'un ondavre inhumé depuis treize
mois , & près duquel il ouvroit une nou-
velle folle [b) , font des faits qui rendent
la danger trop fenfible pour ne pas engager
& prendre à ce fujet les plus grandes pré-
cautions.
M. Petit, doreur-régent de la faculté de
C T M
médecine de Paris & anatomifle s mV 91^
furé qu'ayant été fouvent dans le cas d'en»
fouir dans fon jardin des dépouilles des ca-
davres qui avoient fervi à fes difledions , il
avoit reconnu que cts parties animales n'é-
toient détruites qu'au bourde trois à quatre
ans. M. Cotte , que j'ai déjà cité plus haut ,
m'écrivoit que depuis fept ans qu'il efl char^
géà Montmorenci des fondions pallorales ,
il A fait conilamment la même remarque.
Ce n'eft donc qu'après quatre ans qu'on
peut rouvrir fans inquiétude de nouvelles
îofiès ; & pour qu'un cimetière foif le moins
dangereux qu'il ell poflible, il faut donc qu'il
ait quatre fois autant d'étendue qu'en exi-
geroitle nombre des morts année commune ;
& comme il ell nécefîaire de confacrer 4
l'inhumation de chacun d'eux un efpace
de cinquante-deux pies & demi quarrés , il
faudroit pour quarante cadavres un terrain
qui eût deux mille cent pies quarrés de fur-
face : mais , eu égard à la nécefflré de rei-
ter quatre ans fans ouvrir les mêmes fofîes ,
un cimetière defliné- pour la dcflérre d'une
^ paroifTè fur laquelle année commune il mour-
roit quarante perfonnes , doit avoir huit à
dix mille pies quarrés de frj-face , mais ja*
mais moins de huit mille quatre cens.
Dès qu'il eftdonc évident que les cimetiè-
res pourroient devenir des foyers d'une pu-
tridité dangcreufe , fi leur étendue n'étoit pas
proportionnéeau nombre des cadavres qu'on
y enrerreroit , & à la durée de leur deitruc-
tion , fi Its morts n'y étoient pas enfouis de
quatre pies au moins, fi l'humidité s'yop-
pofoità la difTolution des écoulemeps cada-
véreux , fi l'air ne s'y renouvelloit pas avec
facilité , & fi les vapeurs , formées par le
mélange de ces écoulemens dans l'air , pou-
voient être portées en raafle fur des lieux
habités , il fcut qu'on regarde comme un
devoir indifpeniàble d'obhger les foffoycurs
à donner aux fofîes au moins quacre pies
de profondeur , à fouler la terre avec le»
pies pour la rendre compaâe , & à ne jamais
rouvrir des fofîes anciennes avant quatre
ans. Il faut que le terrain defliné pour \qs
fépultures , ait beaucoup de profondeur ,
' /«J Le mémoire dans lequel M. Haguenot a configné cet ëvénement , a été lu dans une féance
jpubliquede la fociété littéraire de Montpellier ,le z^ décembre i746,&imprimten 1747 chez Mdiiei.
Çk) Voyez les Oi/fervution} ^hyfi^uti de M. i'4bbé dç Roïier , aanéç i-py^y , vol. J,^. iP>.
C I M
qn'iî ne Toit point humide , que Ton étendue
folt proportionnée au nombre des morts , &
quatre fois plus grande que ne l'exige l'ei-
pace ordinaire pour l'inhumation de chaque
cadavre ; que tous les vents , mais fur-tout
ceux du nord & de l'efl y abordent avec
facilité , qu'aucun arbre ne s'y oppolè au
jeu de l'air, que les murs , dont on l'entoure ,
n'aient que très-peu d'élévation , & que
les cimetières foient toujours hors des lieux
habités, & fitués au nord & à l'ert , parce
que ces vents, ^ordinairement fecs & froids ,
& paroilî'ant fouffler de bas en haut , élè-
vent les vapeurs & les dilperfent , tandis que
ceux du fud & de l'oueA , prefque toujours
humides & chauds, les rabairtént , s'^op-
pofent à leur difîolurion & à leur difperfion ,
& peuvent \qs porter en malîè fur les lieux
voilins.
La fituation des cirjietieres hors des villes
a été de tout temps , chez les peuples poli-
cés , un efïet de leur attention à écarter tout
ce qui pouvoit altérer la fanté àes hommes.
Les Grecs & les Romains en avoient fait
une loi exprefle ; Se cette loi , fouvent re-
nouvellée par les empereurs , même du bas
empire ,, fut long-temps fuivie par les chré-
tiens. Ils portoie.it le refpeâ pour cette loi
jufqu'à ne pas permettre qu'on coniîruisît
des églifes dans les endroits où des morts
avoient été enterrés ; on peut voir à. ce fujer
les lettres de fàint Grégoire & la colle ciion
éts conciles par les pères Labbe&Hardouin.
Ce ne tut que dans le commencement du
IV ^. liecle que Tuiagc d'enterrer dans les
villes commença à s'introduire , & fi cet
abus s'efi: tellement multiplié , qu'il eff de-
venu prefque univerfel , qu'on s'ed même
oublié jufqu'à profaner les temples, jufqu'à
fouiller le fanduaire par d&s lépultures ,. il
faut elpérer que les cris de l'humanité , qui
de toutes parts s'élèvent contre cet abus., le
feront ceiîèr , & que devenus plus fenfibles
îtu bonheur de la fbciété qu'à de vains hon-
neurs que la raifbn réprouve , nous verrons
cefier l'ufage d'enterrer dans les éghfes &
dans les villes, & former des cimetières
d'après les vues que l'on vient d'expofer.
m- M)
CIMIER , f. m. [An Herald.) la partie
la plus élevée dans les ornemens de i'écu , &
qui efl au-deffus du cafc^^ue à fa (#ime.
C I M pj
Le cimier efl l'ornement du timbr e,comme
le timbre efl celui de I'écu. L'ufage en efi
de l'antiquité la plus reculée , & l'on fait
d'ailleurs que les cimiers ont fervide fonde-
ment à plufieurs fables de la mythologier
Geryon pafla pour avoir trois têtes , parce
qu'il portoit un triple cimier , dit Suidas,-
Hérodote en attribue l'invention auxCariens.
Diodore de Sicile parlant desEgyptiens, diî
que leur roi portoit pour cimier des têtes de
bon , de taureau ou de dragon. Plutarque a
décrit le cimier de Pyrrhus, dans l'éloge qu'il
a fait de ce prince. Enfin Homère , Virgile,
le Talfe ,,. & l'Ariofle , ont fait dans leurs
poèmes la defcription de plufieurs cimiers.
C'étoit autrefois en Europe une plus-*
grande marque de noblefîè que l'armoirie ;
parce qu'on le portoit aux tournois , où on
ne pouvoit être admis fans avoir fait preuve-
de nobleffe. Le gentilhoram.e qui avoit alîiifé
deux fois au tournois folemnel , éroit fufti-
famment blafonné & publié , c'efl:-à-dire
reconnu pour noble , & il portoit deux
trompes en cimier (ur Ion cafque de tournois:
de-là vient tant de cimiers à deux cornets ,
que plufieurs auteurs ont pris mal-à-propos
pour Àts trompes d'éléphant.
Le cimier de plumes a été adèz univerfel-
leraent reçu de tous les peuples. On ne s'en ^
fertplus dans les armées, & nous n'avons vu <
que M. le maréchal de Saxe qui en ait re-
nouvelle l'ulage dans la dernière guerre ,
mais feulement pour les dragons volontaires
de fon nom , qui portoient fur le fommet de
leurs calques des aigrettes de crinde cheval ,
flottantes au gré des vents. Le cimier neû
aujourd'hui qu'un ornemerit de- blafon de
quelques particuliers. Le ledeur trouvera
dans le P. Meneftrier , homme confommë
dans l'art héraldique, tous les détails polïibles
fur ce fjjet. (M. le cheu. nEjA uco urt.)
Cimier, (Boucherie.) cciïâlnïiqii^ on.
appelle une portion de la cuifTe de -bœuf.
Cette portion fe divife en plufieurs tranches ;
& chaque tranche contient trois morceaux-,
dont le premier s'appelle la piece^dnde , le
fécond ï^i femelle y & le troifieme \c tendre..
On donne le nom de culotte au cimier^ à le
prendre depuis les tranches juiqu'à la queue.
Cimier , ( Vénerie.) c'efl la croupe du
cerf, du daim & du chevreuil, qui dans la
curée fe donne au maître de l'équipage. - ,
5)^ C I M
CIMMÉRIENS, f. m.plur. {Géo^. anc.
& mod.) peuples anciens qui habitèrent les
environs des palus Méotides & du Bofphore
Cimmérien, Les Grecs en avoient une fi
faulFe idée , que le croyant couvert d'ê-
paifles ténèbres , ils le plaçoicnt fur les con-
fins de l'enfer.
Il y eut en Italie dans la Campanle , un
autre peuple du même nom ; un troifieme
en Afie, vers la Géorgie & la merCafpienne;
un quatrième en Alie , où eft à prélènt Sy-
nope.
*ClMMÉRlENS, {Géog. anc.) Ho-
mère dit qu'Ulyfle alla au pays des Cimmé-
riens. Quel eft ce pays ? Un favant Anglois ,
GeorgeCarJeton, prétend que par le pays des
Cimmériens , il laut entendre l'Angleterre :
pour le prouver , il établit ces trois princi-
pes ; 1°. que les Scythes venant d'Afie ,
chaflerent les Cimmériens ou Cimbres de
leurs pays , & qu'il y en eut qui pafl'erent en
Angleterre ; 2**. que ces peuples étoient fort
adonnés à la magie ; 3°. que Pline & Céfar
ont dit que les anciens Bretons avoient les
mêmes inclinations. Cela étant , Homère
qui avoit deiîéin de conduire fon héros dans
les enters , ne pouvoit rien inventer de plus
à propos que de le faire aller chez ces peu-
ples qui , par leur art magicfue , pouvoient
lui fournir les moyens de taire ce voyage :
les avis que Circé donne à Ulyfîe, font très-
propres à confirmer cette conjedure ; elle
lui dit qu'il faut qu'il voyage fur l'Océan ,
& qu'il fe ferve du vent nommé Bocias ,
c'eft-à-dire , à-peu-près de celui que nous
nommons nord- tfi y & qui ert tout propre
pour voguer de l'Itahe vers le détroit de Gi-
braltar. Homère dit enfuire qu'Ulyfle ayant
navigué fur l'Océan occidental, il arriva à
une ville des Cimbres , habitée par des an-
ciens peuples, & couverte de perpétuels nua-
ges , lans que les rayons du ioleil y pénè-
trent jamais: il s'agit de favcir qui il faut en-
tendre par ces peuples. Il eft vrai que les
Cimbres fe font établis en pkifieurs endroits
de l'Europe ; mais on ne peur entendre ni
ceux d'Eipagne , ni ceux des Gaules , parce
que pour aller d'Italie en Efpagne ou dans
les Gaules, il n'eft pas nécefTaire d'entrer
dans l'Océan: on dira peut-être qu'on peut
entendre par ces Cimbres , ceux qui fe font
établis dans quelques endroits d'Allemagne:
C I M
maïs quelle apparence qu'UIyife venant d'I-
talie , ait paffé devant les îles Brytanniques ,
pour aller en Allemagne , fans s'y arrêter,
puifqu'il pouvoit y trouver ce qu'il eherchoit?
d'ailleurs il y a dans Homère deux circonf-
tances qui femblent prouver que par les Cim-
bres dont il parle , il faut entendre ceux qui
s'établirent en Angleterre, i °. Il efl dit que ces
peuples habitoient à l'extrémité de l'Océan ,
{m TrtifctraàKiAvvio) ce que ce poète dit par
rapport au lieu d'où étoit parti Ulyfl'e , &
qui convient fort bien à la fituation de
l'Angleterre; 2.°. Homère dit que ce*
peuples font couverts de perpétuels nuages ,
ce qui convient encore parfaitement à l'An-
gleterre qui ne jouit que de très-peu de jours
clairs & fereins : c'eil delà que le favant dont
nous parlons , croit qu'eft venu le proverbe,
tenebrœ cimmeriœ , pour dire des ténèbres
épaifles. EuHathe qui accufe Homère de
s'être trompé en plaçant les Cimmériens k
l'occident, au lieu de les placer vers le nord,
fe trompe lui-même , & juge des chofes
du temps d'Homère , par ce qui étoit de
fon temps.
Il y a encore une difficulté fur ce fujet dans
le même poëte : il dit dans le livre XI de
VOdyJJe'e , qu'Ulyfle s'en retourna fur le
fleuve Océan. Hérodote n'a pu comprendre
ce que c'étoit que ce fleuve , & il avoue qu'il
n'en connoît aucun de ce nom.
Voici la conjecture de notre auteur fur ce
fujet: il fuppofe d'abord que l'Angleterre &
les pays voifins n'étoient connus des anciens
que par les relations des marchands Grecs
qui , pour faire leur négoce , pénétroient
dans rOcéan, le plus avant qu'ils pouvoient,
& qui ont établi des colonies en Efpagçie &
dans les Gaules : c'efl de ces marchands
qu'Homère & Hérodote ont appris tout ce
qu'ils ont écrit de ces peuples : on lait qu'ils
avoient pafle les colonnes d'Hercule, & qu'ils
avoient pénétré jufqu'en Angleterre , mais
en côtoyant toujours le rivage , (elon l'an-
cienne manière de naviguer ; or ces mar-
chands pouvoient avoir rapporté qu'entre le
pays des Cimmériens Anglois & celui des
Celtes , l'Océan fe retréciflibit fi fort , qu'à
peine avoit-il la largeur d'un grand fleuve:
cela étoit vrai , fur-tout dans ce temps-là,
puilqu'on eft très-perfuadé que la mer a de-
puis gagné beaucoup fur la terre , & queje
canal
CIM
canal d'Angleterre ell beaucoup plus large
aujourd'hui qu'il ne l'étoit autrefois c'efl ce
canal , A peu près de la largeur d'un fleuve ,
qu'Homère appelle {tfleiwe Océan : un en-
droit Aqs commentaires de C</ar peut appuyer
cette conjedure ; après avoir parlé d'Angle-
terre , il ajoute ; Neque enimtemerè prâc
ter mercatores illb adit qiiifquam : neque lis
èpjis quidquam , praeter oram maritimam
atque eas regiones qiiiefunt contra Galliam ,
notum efl. Il n'y a guère que des marchands
qui ne connoîfl^nt que la côte , & ces pays
qui font vis-à-vis de la Gaule.
On remarque , en paflant , que les peuples
qu'Hérodote nomme tf^vvira.i , peuvent bien
être les mêmes que ceux de la province de
Kent , c'e{l-«-dir€ , ceux qui habitent fur la
Manche , vis-;\-vis des côtes de France , &
que Céfar nomme Cantios.
CIMOLEE ( Terre ) , ffifl. nat. Miné-
ralog. efpecede terre dont parlent les anciens
caturaliftes : ils en diflinguoient de deux
efpeces ; cimolia alba , la terre cimolée blan-
che ; àc cimolla purpurafcens y terre clmolee
rougedtre. Son nom lui venolt de l'île Cirao-
l-us que l'on appelle aduellement Argentaria^
l'une des îles de l'Archipel. Tournefort ,
dans Ton voyage du Levant , dit que la terre
cimolée desanciens n'efl: qu'une craie blanche
afîez pefante , infipide , friable , & mêlée
^e fablon ; qu'elle ne s'échauffe point lorf-
qu'on l'arrofe avec de l'eau , feulement
^u'elle s'y diflout & devient affez gluante ;
à folution n'altère point la teinture de tour-
oefol , & ne fe remue point avec l'àulle de
tartre : mais il y a effervefcence lorfqu'on y
verfe de l'efprlt de fel ; d'où il conclut qu'il
n'y a aucune différence entre la terre cimolée
& la craie ordinaire , finon . qu'elle eft plus
grafTe & plus iàvonneufe. Aulil les habitans
du pays s'en fervent- ils pour blanchir le linge
& les étoffas ; ce qu'ils pratiquoient mên^e
du temps de Pline. On s'en fervoit encore
dans la médecine , & on lui attribuoit la
l'ertu de réfoudre les tumeurs , Ùc, Voye^
Pline , hlfl. nat. llv. XXXV y cap. xvlj. Cet
fiuteur l'a aufli regardée comme une efpece
de craie ; cependant tous les naturaliftes ne
font point du même fentiment : il y en a
plufieurs qui penfent que la terre clmollenne
étoit une armle. M Hill dit que c'efl une
terre marneule ; ilpenfeque c'cfj: mal-à-pro-
Tome VIII.
C I N
5)7
l
pos que quelques-uns l'ont confondue avec 1»
terre à foulons , &: prétend que de tous les
fofliles que nous connoiiîbns , il n'y en a
point avec qui la terre cimolienne ait plus de
rapport que U fiéatite. Le même auteur
ajoute qu'en Angleterre on entend par cimo-
lia alba , la terre dont on fait des pipes ; &
par clmolla purpura/cens , la terre dont on fc
fert communément pour fouler les étoffes.
Wallerius, dans Ca minéralogie y fait de la
cimolée blanche une efpece de marne , à qui
il donne le nom de marne â foulons. Dans
un autre endroit il infinue que ce pourroit
être une marne crétacée. ( — )
* CLVÎOSSE , W f. en italien clmojpz ,
( Manufacl. en foie. ) liîiere pratiquée par les
Génois à certains damas pour mjuble , les
plus parfaits en ce genre. Cette lifiereeil faite
en gros-de-tours , non en tafetas , & fou
travail eft très-ingénieux. Nous en parlerons
àrar//(:/f DAkAS. Fb/f:^ Damas.
CINABRE , voye\ CliMNABRE,
CINALOA , ( Géog. ) province de l'A-
mérique feptentrionale , flir la côte de la mer
àe Californie , habitée par des nations fau-
vages & idolâtres.
CIN AMOME , f. m. ( Comm. ) ce font
les jeunes pouffes de l'arbre cannelier , qui
donnent le vrai clnamome , tel que nous le
recevons de nos jours , & les vieilles bran-
ches font celles qui donnent la caiîe , qui eff
plus dure & ligneufe , ■ dont les anciens fai-
iôientufa^e, & que nous rejetons àpréièjit. Il
efl vrai qu'il y a auffi d'autres fortesde can-
neliers , & une efpece entr'autres , qui donne
la cafîè , que les anciens , ians doute , re-
cevoient des Arabes , & dont ils faifoient
ufage ; mais ils font tous du même genre.
Le clnamome^ qui efl donc la cannelle d'au-
jourd'hui , qui ne vient , comme il a toujours
fait, que d'un feul endroit des Indes , & feule-
ment des jeunes branches de l'arbre qui le
porte , étoit beaucoup plus rare & plus pré-
cieux dans les anciens temps ; les grands
feigneurs d'alors , qui le recherchoient & le
retenoient en le confervant dans des ton-
neaux , peur leurs ufages les plus fomptueux,
le rendoient encore plus cher , & d'un prix
au-defïus de la portée du commun. C'efl ce
quLdonnoitlieu de fe fèrvir fouvent des dif-
férentes efpeces de cafîe ligneufe , quiétoienc
les moindres cannelles , parce qu'elle étoit
N
€>n ciN
plus commune dans les lieux des Unies , où
elle croiflbit , & qu'elle étoit moins recher-
chée des princes.
Aujourd'hui que les circonftances font
changées & devenues plus favorables pour
avoir la meilleure cannelle , qui eu le vrai
cinamome , ce dont nos boranifles modernes
habiles font convainais , nous pouvons dire
le contraire des anciens , que nous la con-
noiflbns beaucoup mieux quelacafïe ligneufe
qu'on apportoit fi communément autrefois.
Les Hollandois ont foin de faire toujours
rrier la cafle , dans leurs magafins de Co-
lombo , à l'île de Ceylan , lorfque par acci-
dent ou par mégarde , il s'en trouve demê^ae
avec la bonne cannelle , enduite delà récolte.
Ce triage fe fait en préfence de plufieurs
perfonnes , établies fous ferment pour cela ,
lefquelîes veillent à ce que les ouvriers ou
autres n'en ghffent à l'écart-pour en faire du
profit. Cette cannelle de rebut ou cafi'e , qui
efi la plus grofliere , la plus épailTe & la plus
afrringente , parce qu'elle vient de quelques
branches de canneliers un peu trop vieilles ,
que les écorceurs ou féparateurs de cannelle
ont dépouillées mal-à-propos , eft toujours
brûlée avec loin fous les yeux des furveillans ,
& autres officiers infpedeurs de la cannelle.
Or celle qu'on brûle n'efî autre chofe qu'une
el'pece de celle que les anciens appelloient
cajjîalignea. D'où nous devons conclure que
nous la voyons plus rarement , & que nous
la connoiiîbns moins que le cinamome. V.
Cannelle, (-f-)
CINAN , ( Géog.) ville confidérable de
la Chine dans la province de Chanton. Zo/z^.
l3A-y 50; lat. 57.
CINCENELLE , f. f. terme de rivière y
corde dont on fe fert fur les rivières pour
monter les bateaux.
CINCHEU , ( Géog. ) ville de la Chine
dans la province de Quangfi : il y a une autre
ville de ce nom en Chine , dans la province
de Xantung.
CINDIADE, adj. f. furnom de Diane.
Polybe raconte de fa ftatue un prodige bien
fingulier ; c'efl: que quoiqu'elle fût à l'air , il
ne pleuvoit ni ne ncigeoit point deflus. Cre-
dat Jiidœus Appella.
'^CINÉRAIRE, f. m.(ffifl.anc.)ào-
meftique occupé chez les Romains à frifèr
les cheveux des femmes , & à préparer les
C I N
cendres qui entroient dans la poudre dont
elles fe fervoient. Il étoit appelle cinerarius ,
de ces cendres , ou de celles dans lefquelîes
il faifoit chauffer fon fer à frifer.
_ CINER ATION ,[.(.{ Chymie. ) réduc-
tion du bois ou de toute autre matière com-
buftile en cendres , par le moyen du feu.
K. Cendre , Calcination , ùc Quel-
ques auteurs fe fervent du terme c/W—
faciion. {M)
CÏNETMIQUE , f f. la fcience du mou-
vement en général , dont la méchanique
n'eft qu'une branche.
CINGLAGE ou SINGLAGE , f. m.
( Mar. ) on entend par ce mot le chemin que
fait le vailTeau.
Cingler ou Jingler j fe dit d'un vaiffeau
qui fait route , & marche fous voiles. (Z)
CINGOLI , {Géog. l ville d'Itahe de
l'état de l'églife dans la marche d'Ancone ^
fur la Mufonc.
CING UL UM , ( Géog. anc. ) ancienne
ville d'Itahe dans le Picenum , bâtie aux dé-
pens de Labienus , un des premiers lieutenans^-
de Céfar , dans les Gaules. Avant Labienus >.
c'étoit un petit bourg d'où la famille de La-
bienus étoit originaire ; fa fituation fur une
montagne efcarpée , près de la rivière de
Mufone , lui avoir fait donner le nom de
Cingula S axa , fuivant Silius Italiens , dans
ionPoëme de la deuxième guerre punique. La-
bienus employa une partiedefes richefîes ac-
quifes dans les Gaules , à augmenter l'enceinte
de Cingulum, à y faireconftruiredesmaifons,
& à la clorre de murs & d'ouvrages capables
d'en défendre l'entrée : ce heu devint alors une
ville confidérable , dont Labienus fut le fon-
dateur : Phne en nomme les habitans Cingu-
lani ; Frontin fait mention de leur territoire ,
Cingulanus ager: Paul Merula , célèbre cof-
mographe , aflùre avoir vu une médaille d'ar-
gent de Labienus , frappée à l'occafion de la
fondation de cette ville de Cingulum _> dans le
cabinet de 'l'illuftre Horlsus fon ami ; mais
les bons connoifîêurs regardent cette mé-
daille comme fauife & fuppofée.
Cette ville eft aujourd'hui Çingoli , dans
la marche d'Ancone fur la Mufonne , à neuf
milles de Jefi & de San-Severino , & à li
d'Ofimo , dans l'état de l'églife. Voye^^
Mém. Acad. infcrip. toni. XIX y in-12. y
p. lOO. (C)
C I N
CINNABRE , ou CINABRE , f. m,
f Hifi. nat. minéralogie & chymie, ) On en
ciftingue de deux efpeces ; l'un efl naturel ,
•& Te nomme cinnabaris natiya ; l'autre cil
artificiel , cinnabaris faclitia.
Le cinnabre naturel efl un minéral rouge ,
très-pefant , plus ou moins compare ; il
n'aflede point de figure déterminée â l'exté-
rieur : cependant on le trouve quelquefois
fous une forme Iphérique ; intérieurement il
^eft ou folide , ou grainelé , ou ilrié. Sa cou-
leur efl plus ou moins vive , à proportion de
la quantité des parties terreflres ou hétéro-
gènes avec lelquelles le cinnabre efl mêlé ;
c'efl ce qui fait qu'il y en a d'un rouge très-
"vif , de pâle , d'un rouge mat comme la bri-
que , & d'un brun pourpre au rougeâtre
comme la pierre hématite.
Le cinnabre nafurei efl une combinaifon
faite par la nature , du mercure avec une
portion de fouire ; ou c'efl une iublimation
de ces deux fubflances opérée par là chaleur
du feu fouterrain , qui produit une union fi
.-étroite , qu'il faut avoir recours à l'adion du
feu pour les lépar^r ; c'efl ce qu'on fait en
jnettant le cinnabre dans une cornue , pour
léparer le mercure d'avec fon foufre : mais
comme cts deux matières font volatiles , on
efl obligé d'y joindre un intermède , fans
quoi le foutre fe fublimeroit avec le mercure
-& formcroit un nouveau cinnabre. L'inter-
mède dont on fe fert efl ou de la limaille de
fer , ou de cuivre , du régule d'antimoine ,
de la chaux , ou enfin du fel alkali fixe ; l'on
a la précaution de bien mêler & de triturer
l'une de ces matières avec le cinnabre avant
que de les mettre en diflillatipn. hç cinnabre ,
quand il efl bien pur , contient yàg de mer-
cure , contre îouj de foufre. H n'efl point
befoin de récipient dans cette diflillation'; il
iufîîtpour recueillir le mercure , que le bec de
îa cornue trempe dans un vaifîeau plein <3'eau.
Cette opération s'appelle revivification.
M. Henckel dit que [qs matrices dans lef-
quelles \t cinnabre fe forme , font aulTi variées
<iue celles des autres métaux. On en trouve
dans le quartz , le ipath , le mica , la pierre
calcaire , le grès , la mine de fer , la mine
de plomb en cubes ou galène , la blende , la
mine de cuivre , &: dans les mines d'or &
^'argent , comme on le peut voir dans celles
d£ Chmnitz & de Kremnitz en Hongrie. Ce
C I N ^ ^9
favant ti-iinéralogîfle dit qu'il a a point ob-
fervé s'il s'en '^rouve dans les mines d'étain »
de colbalt , & d'antimoine.
Le cinnabre a aufli des fiions qui lui font
particuliers ; on en trouve dans plulieurs en-
droits. Les principales mines qui en four-
ni (îent , font celles de Kremnitz en Hon-
grie , Hydria en Efclavonie , Horowitz en
Bohême : la Carinthie & k Frioul en don-
nent beaucoup de la meilleure efpece ; au
Pérou il y a la mine de Guancavehca ; en
Normandie il s'en trouve prèvS de Saint-Lo ,
mais la plus riche mine de cinnabre efl celle
d'Almaden en Efpagne , dans la Manche ,
fur la frontière de l'Eflramadure ; elle étoic
déjà célèbre du temps des Romains , &: Pline
en parle , liv. XXXIII ^ ch. vij.
M. de Juiïieu après avoir été fur les lieux,
a donné en 17 19 à l'académie des fciences ,
un mémoire très-circonflancié fur cette fa-
meufe mine ,& fur la manière dont on y
tire le mercure du cinnabre. Comme cette
méthode efl très-ingénieufe , nous allons en
donner un précis d'après le mémoire de ce
favant naturalifle.
Les veines de la mine de cinnabre ^K[-
maden font de trois efpeces. La première qui
efl la plus commune, efl une roche griiâtre ,
entremêlée de nuances ou de veines rouges ,
blanches & cryflallines ; on brife ces pierres
pour en tirer la partie la plus rouge ,
qui fait la féconde efpece ; la troifieme
efl dure , compad-e , grainelée , d'un rouge
mat comme celui de la brique. Quand
on a fait le triage de ces morceaux de mi-
ne , on les arrange dans des fourneaux qui
font joints deux à deux , & forment un
quarré à l'extérieur ; 'intérieurement ils ref-
femblent à des fours i chaux, & font ter-
minés par une voûte ou dôme. On y place
les morceaux de mine , en obfervant de laiiî'er
un vuide d'un pié & demi ; on allume le
bois qui efl fur la grille du foyer , & l'on
en bouche exadement l'entrée. Le fourneau
efl adofîë contre une terraffe qu'il excède
d'un pié & demi ; & dans cette partie du
fourneau qui déboi'de , il y a feize ouver-
tures ou foupiraux placés horizontalement
les uns à côté des autres , ils ont fept pou-
ces de diamètre. La terrafïè a cinq toifes
de longueur ; elle aboutit à un petit bâti-
ment , dans lequel ily aaufïï i^ ouverturef
Ni
7CO C I N
i|ui répondent h. celles qu'on a dit être à la
partie poftéricuredu fourneau ; cette terrafle
vk en pente en partant du côté de la partie
poftérieure du fourneau & dé celui du petit
bâtiment ; ce qui lui donne la figure de
deux plans inclinés qui fe toucheroient par
leurs angles les plus aigus. Cette terraffe eft
faite pour foutenir des aludels ou vaiflèaux
de terre , percés par les deux bouts , qui s'a-
daptent les uns dans les autres , & répondent
d'un côté à Tune des i6 ouvertures du four-
neau ; & de l'autre, aune de celles du pe-
tit bâtiment qui eu à l'autre bout de la ter-
rafle , & qui fert comme de récipient au
mercure qui va s'y rendre , après avoir païïé
en vapeurs par un grand nombre d'aludels
qui , en s'enfilant les uns les autres , forment
une eii:>ece de chapelet. La rigole qui efl: au
•milieu de la terraffe , n'eft que pour ralTem-
bler le mercure qui pourroit s'échapper des
aludels lorfqu'ils ne font pas bien luttes. Lorf-
que le feu a été une fois allumé , on le con-
tinue pendant treize ou quatorze heures ;
après quoi on laiffe refroidir les fours pen-
dant trois jours ; au bout de ce temps , on
xalFemble tout te mercure revivifié qui efl
dans les aludels. Une feule cuite , fuivant
M. de Juflïeu , peut donner depuis vingt-
cinq jufqu'à foixante quintaux de mercure.
Cette manière de traiter le cinnabre eft
très-ingénieufè , elle a des avantages réels ,
& elle eft moins pénible que celle qui fe pra-
tique au Pérou , où l'on ne fe fert que de
petits fourneaux , & où l'on eft obligé de
mettre de l'eau dans les aludels , & de les
arrofer extérieurement pour les rafraîchir
pendant Topératron , afin de condenfer les
vapeurs mercurielles. Cette méthode efl auffi
beaucoup phjs abrégée que celle qui efl en
wfage dans le Frioul , où l'on efl obligé de
tirer le mercure du cinnabre par de longues
triturations dans l'eau , & par des lavages
réitérés. Outre cela , dans la manière de
diftiller qui s'obfei*ve à Almaden , on n'a
point befoin d'intermèdes , ceii la pierre
elle-même qui en fert; elle fuffit pour retey-
nir les particules fulfureufes qui fè font
minéralyfées avec le mercure ; ce qui dif-v,
penfe d'employer la limaille de fer & les
autres matières communément ufitées. On
pourroit en attribuer la caufe à ce que cette
jRttr\iere e]ft calcwe \ ainlx on ^e doit point
C I N
fe promettre de réufîir en travaillant le c/n-
nabre à la façon d'Almaden, à moins qu^ilne
fût mêlé à de pierre calcaire , comme celui
de cet endroit.
M. de Juflieu indique dans le même mé-
moire dont nous venons de donner le pré-
cis , la manière de s'alTurer fi un minéral
contient du mercure , ou dl un vrai cinna-
bre. Il faut en faire rougir au feu un petk
morceau ; & lorfqu'il paroît couvert d'une
petite lueur bleuâtre , le mettre fous une clo-
che de verre , au travers de laquelle on re-
garde fi les vapeurs fe condenfent fous la
forme de petites gouttes de mercure , en
s'attachant au verre ou en découlant le
long de Çq^ parois. Ce favant naturalifle nous
donne auffi un moyen de reconnoître fi le
cinnabre a été falfifié ; c'efl par la couleur de
fa flamme , lorfqu'on le met fur àts char-
bons ardens ; fi elle efl d'un bleu tirant fur
îe violet & fans odeur , c'efl une marque
quele c:i/2/2aèr<?efl pur ^ fi la flamme tire W
le rouge , on aura lieu de loupçonner qu'il
a été faliifié avec du minium ; fi le cinnabre
fait une efpece de bouillonnement fur les
charbons , il y aura lieu de croire qu'on y a
mêlé du fang-drdgon.
Les anciens connoifîoient auffi-bien que
nous deux efpeccs de cinnabre , le naturel
& Tartificiel : y>^t cinnabre naturel , ils en-
tendoient la même fubflance que nous ve-
nons de décrire ; ils lui donnoîent le nom
de minium. Pline dit qu'on s'en fervoit dans
la peinture ; aux grandes fêtes on en frottoit
le vilage de la flatue de Jupiter y & \ts
triomphateurs s'en frottoient tout le corps ,
apparemment pour fe donner un air plus,
fànglant & plus terrible. Par cinnabre arti-
ficiel , ils entendoient une fubflance très—
différente de celle à qui nous donnons ac-
tuellement ce nom ; c'étoit , fuivant Théo—
phrafle , un fable d'un rouge très-vif & très-
brillant , qu'on trouvoit en Afie mineure ,
dans le voifinage d'Ephefe. On enféparoit par
des lavages faits avec foin la partie la plus
déliée.
Les anciens médecins ont encore donné
le nom de cinnabre à un fuc purement vé-
gétal , connu parmi nous fous le nom de
fang-dragon; ilsrappelloient>c./i'i«tf;tp/lV<f/;ccv ^
cinnabre des Indes. Cependant il paroît par
un paiïage de Diofcoriidie , qu'ils connoiif»
C I N
foient parfaitement la différence qu'il y a
entre cette matière & le vrai cinnabre.
Aujourd'hui , par cinnabre artificiel , on
entend un mélange de mercure & de foufrc
fublimés enfemble par la violence du feu ;
cette lubdance doit être d'un beau rouge
foncé , compofé d'aiguilles ou de longues
ftries luifantes. Il faut avoir foin de l'acheter
en gros morceaux , & non en poudre , parce
que quelquefois on falfifie le cinnabre avec
du minium ; ce qui peut en rendre l'ufage
très-dangereux dans la médecine.
En Angleterre , à Venife , & fur-tout en
Hollande, on travaille le a/2/2a3r£ en grand ;
il y a tout heu de croire qu'on obferve dans
cette opération des manipulations toutes
particuheres , & dont on fait un fecret ,
attendu qu'on ne vend pas le cinnabre artifi-
ciel plus cher que le mercure crud , quoiqu'il
n'entre que fort peu de foufre dans fa com-
pofition» Les livres font remplis de recettes
pour faire le cinnabre artificiel , dans lefquel-
les les dofes varient prefque toujours. Il y
en a qui dilènt de prendre parties égales de
mercure & de foufre ; de bien triturer ce
mélange , & de mettre le tout dans des vaîf-
feaux fublimatoires , en donnant un degré
de feu atîêz violent. D'autres veulent qu'on
prenne trois onces de foufre fur une livre
de mercure , &c. On fait de ce mélange de
l'éihiops minéral , foit par la fimple tritura-
tion du mercure & du foufre , foit par le
moyen du feu. Voye^ F article Etk10?S
MINÉRAL.
Voici la manière de faire le cinnabre arti-
ficiel fuivant Stahl. On fait fondre une par-
tie du foufre dans un creufçt ou dans un
vailTeau de verre , à un feu très-doux ; lors-
que le foufre eft bien fondu , on y met
quatre parties de mercure , qu'on pafîè au
travers d'une peau de chamois , & on a foin
de bien remuer le mélange jufqu'à ce qu'il
forme une maiTe noire ; on la retire de deÛiis
le feu pour la. triturer bien exadement ; on
met eniulte le mélange dans une cucurbite
au bain de fable , pour en faire la fublima-
tion : fur quoi Stahl obferve que fi au com-
mencement de l'opération on donne un feu
très-doux , le foufre fe fublime d'une cou-
leur jaune très-belle, quoique la mafTè ait
été très-noire ; lorfque toutes les fleurs fe
font fublimées , fi on poufife fortement le feu, ,
C I N ^ lor
on aura un cinnabre d'une très-belle couleur;
parce que fi on a la précaution de donner
un feu modéré au commencement , le fou-
fre fuperflu fe fépare ; au lieu que fi on dé-
butoit par un degré de feu trop violent , le
cinnabre qu'on obtiendroit feroit noir , parce
qu'il feroit trop furchargé de foutre.
Le même auteur dit que pour faire le cin-^
nabre en grand , on prend parties égales de
foufre & de mercure ; on fait fondre le fou-
fre dans un creufet fur des charbons ; lorf^
qu'il eff fondu , on y met le mercure , &
on remue pour l'incorporer exadement avec
le foutre , jufqu'à ce que le mélange ait la
confifbnce d'une bouillie épaifiè ; on laiflè
la flamme fe porter defTus le mélange, afin
qu'elle confume le foufre qui efl de trop ;
mais lorfque le mélange commence à rou-
gir , & que le foufre fuperflu efl confuraé ,
on éteint la flamme avec une fpatule & cuil-
ler de fer , de peur que le mercure ne foit
emporté : alors on fait fublimer le mélange
à grand feu , & par ce moyen l'on obtient
un cinnabre d'une très-belle couleur. Stahl
dit que pour que le cinnabre foit exaftemenc
faturé , il faut qu'il ne contienne qu'enviroa
une partie de foufre fur huit parties de mer-
cure. ( — )
Cinnabre artificiel , ( Chymie ,
pharmacie , & matière médicinale. ) Le a'/i-
nabre natif & le cinnabre artificiel ont été
recommandés pour l'ufage médicinal par
difFérens auteurs ; il s'en eft trouvé même
plufieurs , & il efl encore aujourd'hui même
quelques médecins qui préfèrent le cinnabre
natif ou naturel au cinnabre tadice ; mais on
peut avancer fans héfiter que toutes les rai-
ions de préférence apportées en faveur du
premier , font abfolument chimériques , &
que celles qui l'ont fait rejeter enfin par la
faine partie des médecins , portent fur un
fondement très-folide ; favoir , fur ce qu'on
a obferve aflez communément quelques par-
ties arfenicales qui rendoient ion uiàge très-
fijfpeâ:.
Le cinnabre fadice donc , auquel nous
accordons la préférence avec jufte raifon,
efl recommandé intérieurement, principale-
ment pour certaines maladies de la peau ,
pour répilepfie & les autres maladies con-
vulfives , pour les vertiges , la palfion hyf^
térique j l'althmc cç^nvulfîf ^ ^c>
lot C I N
Mais fon utilité dans ces cas n*e{I pas dé-
montrée par afTez d'obfervarions pour détrui-
re une opinion afTez plaufibie, qui conclut de
ion infoîubilité & de fon inaltérabilité parles
humeurs digelHves , & de fon inlipidité ab-
folue , qu'il ne lauroit ni pafler dans la fti^û'e
des humeurs & en altérer la conflitution
{^crajis ) , ni faire aucune impreffion fàiutaire
lur le fyilême nerveux , par fon adion im-
médiate iur les organes de la digeflion. Son
utilité la moins équivoque efî celle qu'il pro-
cure employé en fufFumigation , foit dans
le traitement général de la maladie véné-
rienne , foit dans le traitement particulier
de quelques - uns de les fymptomes exté-
rieurs , comme chancres , porreaux , &c.
V. SUFFUMIGATIOK Ù VÉROLE.
Le cinnabre entre dans pluneurs prépara-
tions officinales , à la coloration defquelies
ion utilité paroît fe borner. Voye^ COLO-
RATION, (b)
CINNUS , ( Diète. ) V. Cyceon.
CINNYRE , ( Mufiq^. inftr. des Béhr. )
Voye-^ KiNNOR, [Mujiq. inftr. des Hébr.)
( F. D. C. )
I CINQ, r. m. {Arithmét.) nova de nom-
bre. Tout nombre terminé par 5 eft divifible
|)ar ') ; & tout multiple de 5 fe termine par 5
ou par zéro , la démonflration «n efl facile à
trouver.
Cinq, [jeux de carte.) efl une carte mar-
quée de cinq points. Le point eft ou cœur ,
<yv\ pique , ou trèfle , ou carreau. Ainfi il y a
quatre cinq dans le jeu.
CiNQ-HUITIEMES , f. m. pi. ( Drap. &
Comn:.) efpece de petits camelots qui fe
fabriquent à Lille. Ils doivent avoir onze
tailles & demie de large en blanc , & onze
tailles en couleur, fur trente-fix & cinquante-
quatre aunes de longueur. V^oyei les régle-
mens du commerce y part. III ^ & Us art^
Draps & Camelot.
Cinq-ports , f. m. pi. ( Géogr. mod.)
en anglois cinque-ports ; ce font cinq villes
maritimes d'Angleterre avec ports de mer ,
fur la côte qui regarde la France ; à favoir
Hartings , Romney , Hythe , Douvre &
Sandwich : au premier des cinq appartien-
inent auffi Winchelfca & Ryc. Ces villes
ont de grands privilèges ; les députés qu'elles
^-envoient au parlement {ont appelles barons
^es cinqrports, Phimb&rs. ' ^
C I N
Cinq-quarts, f m. pi (Drap, ô
Comm. ) el'pece de ferge demi-foie , croifée
d'un c6:é , à vingt-buhots , à cinquanterune
portées , à trois quartiers moins deux pouces
& demi de largeur enTe .çleux gardes^ à
vingt-une aunes & demie de long hors de
l'ételle , pour revenir apprêtée , à vingt aunes
un quart ou vingt aunes & demie. V^qyei les
re'glem. du commerce y tom. Il, p. Z^'j ^
les art. DrAP & SeRGE.
CINQUAIN , f m. ( Art. milit. ) efl um
ancien ordre de bataille corapofé de cinq
bataillons ou de cinq efcadrons. On les dé-
tache en ^vant-garde , bataille , & arrière-
garde. Quand ils arrivent au champ de ba-
taille , on les place fur une même ligne fai-
fant même front.
Pour les mettre en état ^e combattre , on
fait avancer les féconds bataillons des ailes
pour l'avant-garde , les deux bataillons ou
efcadrons des ailes pour la bataille , &: celui
du milieu fait l'arrierc-garde. Lafontaine ,
doctrine militaire^ ( Q)
CINQUANTËNIER , f. m. (Police.)
officier qui exécute les ordres delà ville qu'il
reçoit du quartinier , pour les faire favoir
aux bourgeois. Chaque quartinier a fous lui
deux cinquante nie rs. Il y a dans Paris foi-
xante-quatre cinquameniers. V. le Tréi', &
le traité de la police de Lamare.
CINQUANTIEME , H m. ( Jurifpr. )
efl une Impofirion qui a été levée dans cer-
tains temps pour les befoins de l'état.
En 12.96, Phi lippe-le-Bel leva le cinquanr-
tieme fur les eccléiiafliques, pour la conquête
de la Guienne & la guerre contre les Fla-
mands. Duhaillan, tom.. lyp. §S^' Meze-
ray , tom. J, p. 6*77. Voyez la féconde des
lettres fur le clergé ( ne rcpugnate )y P-J ^ 2 .
Il paroît que nos rois ont levé en divers
temps for leurs fujets une impofition , qui
étoit tantôt du centième , & tantôt du ci/z-
quantième. En eftet , on voit dans des lettres
du roi Jean , du mois de novembre 135°»
portant confirmation des privilèges que Phi-
lippe-de-Valois avoit accordés en 1337 aux
généraux maîtres des monnoies & aux ou-
vriers du ferment de France , qu'ils étoient
exempts de tous droits de centième , cin-
quantième , & autres impofirions.
Par une déclaration du 5 juin 17^5? regif^
tfée le 8 du même mois, le roi ordonna la
C I N
îev^e du cinquantième des revenus de l'état
fur tous Tes fujets laïques ou eccléfiaftiques
pendant douze années , à commencer du
premier août de la même année. Il ne fut
cependant pas perçu en VJl') , parce que la
récolte étoit trop inilante : on ne commença
à le percevoir qu'en 1726.
Il devoit êtr-j perçu en nature de fruits ;
mais par une déclaration du 21 juin 1726 ,
il fut converti en argent : & par une autre
déclaration du 7 juillet 1727 , il tut révo-
qué & fupprimé , à compter du premier
janvier 172B. {A)
CINQUIEME , f. m.{Jurifpr.) ellune
împolition qui a été perçue en différentes
occafions pour les beloins de l'état.
Nous lifons dans la Genefe, ch. xlvij ,
v.^6j que l'on payoit le cinquième en Egypte.
Philippe-le-Bel , fuivant des lettres paten-
tes du 10 odobre 1305 , leva une double
décime , ou le cinquième fur toutes les églifes
de fon royaume. Voye^ Patru, mém.farles
ajjemblées du clergé , art. j, les lettres ne
repugnate yfec. lett. p. zo8.
l.t cinquième eil: auiïî en quelques endroits
un droit de champart agrier ou terrage , qui
{k perçoit au profit du ièigneur fur les fruits
en nature : quelquefois c'ell un droit de mu-
tation qui fe paie pour un héritage , foit en
îief ou en roture ; ce qui dépend de la cou-
.turnç' & des titres. En matière de fiefs , ce
droit s'appelle ordinairement quint ou droit
de quint. Voye^ DÉCIME , ChAMPART ,
LODS ET VENTES, QuiNT. {A)
CINTHIA , nom que ks poètes donnent
à Diane , du mont Cinthies dans l'île de
Délos , où elle avoit un temple.
CINTRE oM CEINTRE, f m. {Archit.
& coupe des pierres. ) On. a donné dans le
tome précédent de cet ouvrage , la définition
& diftindion du cintre en fait de charpen-
terie & coupe des pierres. V^. Ceintre.
Les curieux qui voudront approfondir
cette matière , & favoir comment on peut
Gonnoître & calculer la force des cintres , &
même de tout ouvrage de charpente , re-
courront au mémoire géométrique de M.
Pitot, qui efl dans les me'm. de Vacad. dts
Sciences ) année i j zGyp. zi 6 y dont voici
l'extrait par M. de Fontenelle.
Le cintre que les Italiens nomment arma--
tura^ eit un alTembla^e de charpente propre
C I N io|
à foutenir tout le poids de la maçonnerie
d'une voûte , avant que la clé foit pofée.
On fent par-là que rien n'efi: plus impor-
tant en fait de conflrudion de grandes voû-
tes ^ dômes , ponts de pierre , que de faire
d^s cintres affez torts pour porter tout le far-
deau de la maçonnerie ; & qu'on doit
admirer dans ces grands ouvrages hardis ,
les cintres dont on s'eil lèrvi pour les conf-
truire : car fi malheureufement ils fe trou-
vent trop foibles , on voit dans un moment
périr tout l'ouvrage , & quelquefois plufieurs
mallieureux ouvriers.
Nous n'entreprendrons pas la defcription
des cintres, & d'autant moins qu'on les conf^
truit de mille façons diflSrentes , félon le
génie ou les habitudes des artiftes. Mathurin
Jouffe en donne trois defiins : la plupart
des architedes en ont voulu inventer de par-
ticuliers , mais- quelques-uns font tombés
dans des défauts très-dangereux. Il paroîc
que M. Blondel n'a rien voulu propofer du
fien fur cette matière; il s'eft contenté de
donner dans fon cours d'architedure les
deifins d'Antonio Sangallon , dont Michel-
Ange s'efl fervi pour conflruire la voûte de
S. Pierre de Rome.
Maisfansentrer dans l'examen delà forme
la plus parfaite qu'on puifTe donner aux cin-
tres , ni dans le détail de l'aflemblage des
charpentes- qui les compofent , nous nous
contenterons de dire en général que ce font
des pièces de bois qui ayant à Ibutenir le
poids de la voûte dont elles font prefTées &
pouffées en en-bas , doivent être difpofées
entr' elles de façon qu'elles s'appuient les unes
les autres , fe contre-butent & ne puilTent
céder : cela dépend de la force abfolue des
bois«& de la pofition des pièces.
Une pfece de Bois étant pofée verticale--
ment , fi on attache à (on bout inférieur un*
poids dont l'efïèt fera de tirer ks fibres en
en-bas , & de tendre à les féparer les unes
des autres , de façon que la pièce rompe ,
elle foutiendra un très-grand poids avant
que cet effet arrive. La longueur de la pièce
n'y fait rien , il n'y a que fa grolîêur ou bafe.
M. Pitot a éprouvé que le bois de chêne-
foutient environ foixante livres par ligne
quarrée de la bafe ; & c'efi le bois de chêne
dont on fe fert le plus fou vent dans la char-
pente, M. de Buffon a pouffé ces expériences-
104 C î N
beaucoup plus loin. Les pièces dont un
cintre elî corapofé, n'ont pas à fou tenir un
effort qui les tire de haut en bas ; mais au
contraire un effort qui les poufle de haut
en bas , &. tend à les écraier ou à les faire
plier. M.Pitot a trouvé qu'elles tont encore
une réfiftance un peu plus grande à ce fécond
efïbrt , & ne prend les deux réfiftances que
pour égales ; car il vaut toujours mieux fe
tromper en (lippofant trop peu de force au
cintre.
Quant à la pofition des pièces , dont la
plupart font nécefl'airement inclinées , ce qui
modifie & affoiblit leur réfiftance abfolue ,
félon que les angles d'inclinaifon font difFé-
rens ; M. Pitot en fait le calcul par la théorie
des mouvemens compofés , ou , ce qui efî
la fhême chofe , par les diagonales de M.
Varignon. Ces diagonales font en nombre
d'autant plus grand , & fe compliquent d'au-
tant plus, les unes avec les autres , qu'il y a
plus de pièces dans le cintre. Au moyen de
cette théorie , la pefanteur de la voûte étant
toujours connue ; fi de plus les grolfeurs &
les pofitions àes pièces du cintre , c'efl-à-dire
fi la conftrudion du cintre , ou plutôt le
cintre même ell donné , on trouvera le rap-
port de fa force à celle de la voûte'; &: cela
tant pour la voûte demi-circulaire que pour
la furbaiflee. Voye^ SURBAISSÉ.
Le ledeur verra par le mémoire même &
l'extrait entier de M. de Fontenelle , com-
bien la certitude & la précifion que M. Pitot
a mifes dans cette matière , l'emportent fur
de fimples ufages toujours incertains & fou-
vent faux , que fuivent Ls ouvriers & même
les maîtres. {M. le ch. de Ja u court.)
Cintre , ( Décorât, théatr. ) On donne
ce nom à la partie du plancher de la falle
de l'opéra qui eft fur l'orcheftre. La partie
du cintre qui eft la plus près du théâtre ,
n'eil compofée que de planches qui tiennent
l'une à l'autre par des charnières ; on la levé
pour aider le paflage des vols qui fe font
au milieu du théâtre ou de fa partie la plus
éloignée , & qui vont fe perdre dans le cin-
tre. Une baluftradc de bois amovible fépare
cette partie de l'autre ; on y place de gros
lampions pour éclairer le premier plafond.
C'eft lur le cintre que font les grands treuils
avec lefqueis on fait les vols , la defcente
des chars. Voye\ ces mots.
C I Q
On y a pratiqué quatre petites loges , deux
de chaque côté , qui fc louent à l'année ; elles
n'ont vue que fur le théâtre en plongeant, &
n'ont aucune comrriunication avec la falle.
La toile qui ferme le théâtre fè perd dans
le cintre lorlqu'on la levé. V. VoiLE. ( B )
CINXIA ,{Myth. ) furnom que les Ro-
mains donnoient à Junon , & fous lequel
ils l'invoquoient en faveur des jeunes rha-
riées , lorfqu'on leur ôtoit la ceinture de vir-
ginité la première nuit de leur noce. Cinxia
vient de Cingo.
CIOT AT , ( Ge'ogr. mod. ) ville mariti-
me de France en Provence , viguerie d'Aix.
Long, zj , ? 5 ; lat. 4 j ^ t o.
CIPPE , f. m. ( Hijl anc. ) parmi les an-
tiquaires , c'eft une petite colonne peu haute
qu'on élevoit dans les* grands chemins ou
ailleurs , & fur laquelle on mettoit des inf^
criptions , foit qu'elle fût deflinée à appren-
dre les chemins aux voyageurs , foit qu'elle
le fût à fervir de borne ou à conferver la
mémoire de quelque événement , & en par-
ticulier de la mort de quelqu'un.
Les cippes qui fe mettoient fur les routes
pour la commodité des voyageurs , s'appel-
loient plus proprement colonnes milUaires»
V^oycT^ ce mot.
Hottinger a fait un traité exprès àzs cippes
des Juifs , de cippis Hehr-œcrum , où il
prend le mot cippus pour un tombeau de
pierre. Voye\ ToMBEAU.
Cippe étoit aulli dans l'antiquité , un inf^
trument de bois qui fervoit à tourmenter les
coupables & les efclaves : c'étoient des
efpeces d'entraves ou de ceps qu'on leur
, mettoit aux pies.
On appelloit encore cippes y des pierres
élevées qu'on» plaçoit d'efpace en efpace fur
le terrain où l'on marquoit avec la charrue
l'enceinte des murs d'une nouvelle ville ;
on facrifioit fur ces pierres , & il y a appa-
rence que l'on bâtiflbit enfuite les tours
aux mêmes endroits où fe rencontroient les
cippes. (G)
CIQUES ou CAXAS , f. m. pi. ( Hifi,
nat. Miner. ) nom que les mineurs donnent
au Potofi à des pierres qui fe trouvent unies
aux minerais ; elles font peu compades &
folides , ne contiennent que très - peu ou
même point de métal. Toye^la métallurgie
d'Aloiizo Barba. ( — )
* CIR ,
C I R.
CIR (saint-) , Géog. mod. village de
France , diocefe de Chartres , il une petite
lieue de Verfailles : il eft célèbre par une
communauté fondée par Louis XIV. Les
religieules font un quatrième vœu ,.c'eftde
veiller à l'éducation de 250 jeunes perfon-
nes, qui ne peuvent y entrer que fur la preuve
de quatre degrés de noblefle du côté pater-
nel , & qu'après l'âge de fept ans & avant
celui de douze.
CIRAGE , f. m. on appelle ainfl les ta-
bleaux de couleur de cire jaune. L'on fe
ièrt très-peu de ce terme , & ces fortes de
tableaux doivent être regardés comme des
camayeux , dans la clafîc defquels ils font en
effet. Fojt:; CamaYEU. { R)
CIRAN (Saint-) , Ge'og. mod. petite
ville de France , diocefe de Bourges en Berri ,
fur la Claife.
CIRCASSIE, (Gf'og-.) grand pays d'Afie
fitué entre le Wolga & le Don ou Tanaïs ,
borné par le Dagheltan , le royaume de
Caret , la Mingrelie & la mer Noire. Les
habita ns profeflènt une religion moitié chré-
tienne & moitié mahométane. Une partie
de ce pays cfl foumife à la Ruffie , l'autre efl
indépendante. Le commerce principal de la
CircaJJ}^ confifle en peliffes & fourrures , &
en femmes qu'ils vendent aux Turcs & aux
Peri'ans ; elles ont la réputation d'y être
plus belles qu'en aucun pays de l'Afie.
CIRCEE , f f. circxa, {Hifi. nat. bot.)
genre de plante dont la fleur eft à deux pé-
tales , foutenus par un calice qui efl à deux
feuilles. Lorfque la fleur efl paflée , ce ca-
lice devient un fruit en poire divifé ordi-
nairement en deux loges , qui renferment
chacune une femence un peu longue. Tour-
nefort , inflitunones rei herbariiX. Voye\
Plante. (/)
CIRCENSES, {Hifl. anc.) les jeux
circenfes ou les jeux du cirque y terme géné-
rique fous lequel on comprenoit tous les
combats du cirque , de quelque nature qu'ils
fuifent ; à pié , à cheval , fur un char , à la
lutte , à coups d'épées , de dards , de piques ,
de flèches , contre des hommes ou des ani-
maux , dans l'arène ou fur de grands réfer-
voirs d'eau , tels que les naumachies ou re-
préfentatiqns de batailles navales : mais
dans leur origine cts jeux n'étoient que dif-
férentes fortes de courfes, auxquelles on joi-
Tom€ VIIL
C I n loj
gnlt enfuite les autres combats athlétiques.
Ceux &ts gkdiateurs étoient les plus ufi-
tés y & il n'y avoit guère que des nommes
vils & mercenaires qui donnaflent ce plai-
fir au peuple : les honnêtes gens auroient
cru fe déshonorer en faifant le perlbnnage
d'adeurs dans ces exercices.
La plupart des fêtes des romains étoient
accompagnées de jeux du cirque , & les ma-
giflrats donnoient ibuvent ces fortes de fpec-
tacles au peuple : mais les grands jeux , nom-
més proprement circenfes y duroient cinq
jours, & commençoient le 15 feptembre.
L'empereur Adrien ordonna que ces jeux
ferolent célébrés à perpétuité le XI des calen-
des de mai. Voye\ liiji. Aug. ex nummis par
le P. Hardouin , in-fol. page 700, Le même
empereur inventa de nouveaux jeux du cir-
que qui furent nommés jeux plébéiens ; mais
\ts auteurs qui nous en apprennenf le nom ,
n'expliquent point s'ils étoient corapofés
d'exercices difterens de ceux des jeux ordi-
naires. Voye^ Cirque. ( G )
CIRCESTER ou CIRENCESTER ,
( Géog. mod. ) ville d'Angleterre en Glo-
Ceftershire^ furie Schurn. Long, t S y 47 y
lat. Cl y 2.4.
CIRCOLOMEZZO , ( Mufiq. ) On ap-
pelloit dans lamufique des fiecles précédens
circolome^^o , un agrément du chant ou di-
minution de quatre notes de même valeur ,
qui alloient par degrés conjoirrts , en formant
à-peu-près la figure d'un demi-cercle , d'où
cet agrément a tiré fon nom ; il y avoit deux
fortes de circolome\-{o , l'un en montant ,
& l'autre en defcendant. Voy.fig. 7 6' 5,
planche V III du fuppl. des planches. Au-
jourd'hui le compofiteur note lui-même cette
figure , s'il la veut. ( F. D. C. )
CIRCONCELLIONS ou SCOTOPI-
TES , f m. pi. ( Théol. ) feâe de donatif-
tes en Afrique dans le vj^ fiecle , ainfi nom-
més parce qu'ils rodoient autour àts mai-
fons dans les villes & dans les bourgades ,
où fe donnant pour vengeurs publics des in-
jures & réparateurs des injufliccs , ils met-
toient en liberté les efclaves fans la permif-
fion de leurs patrons , dé^roient quittes les
débiteurs comme il leur pàifoit , & com-
mettoient mille autres infolences. Maxide
& Fafer furent les premiers chefs de cts bri-
gands enthouiiafles. Ils portèrent d'abord
O
ic^ C I K
des barons qu'ils nommèrent bdions d^Ifraët,
pnr alliifion à ceux que la loi ordonnoit de
Tenir en main dans la cérémonie de la man-
ducafion de l'agneau pafchal. Ils fe fervi-
rent enfuite d'armes contre les catholiques.
Donat les appelloit les chefs des faims ^ &
ôxerçoitpar leur moyen d'horribles vengean-
ces. Un faux zèle de martyre les porta à fe
donner la miOrt ; les uns le précipitèrent du
haut des rochers , ou fe jetèrent dans le feu ;
d'autres fe coupèrent la gorge. Les évêques
ne pouvant par eux-mêmes arrêter ces excès
de fureur , furent contraints d'implorer
l'autorité des raagiflrats. On envoya des fol-
dars dans les heux où ils avoient coutume
de fe répandre les jours de marchés publics :
il y en eut plufieurs de tués , que les autres
honorèrent comme de vrais martyrs. Les
femmes perdant leur douceur naturelle , fe
mirent à imiter la barbarie des circonccllions;
& l'on en vit qui , fans égard pour l'état de
grolfeife où elles fe trouvoient , fe jetèrent
dans des précipices. S. Auguftin , her. 6^.
Baronius, A. C. 331 y n. ^ ^ faiv. 348,
72. zff,zj,&cc. Pratéole, Philaflre, &c. (G)
CIRCONCISION , f. f. {TheoL ) céré-
monie religieufe chez les juifs & les maho-
métans. Elle confifte à couper le prépuce des
mâles qui doivent oli veulent faire profef-
lion de la religion judaïque ou mufulmane.
V. Prépuce.
La cirœncijion a été & efl encore d'ufage
parmi d'autres peuples , mais non comme
un aâe de rehgion : ces nations la prati-
quent pour des fins & par des raifons dif-
férentes , comme nous le dirons après avoir
parlé de cette cérémonie chez les juifs &
chez les mufùlmans.
La circoncifion a commencé au- temps
d'Abraham à qui Dieu la prefcrivit comme
le fceau de l'alliance que Dieu avoit faite avec
ce patriarche. Voici le paBe que vous obfer-
vere-{)\mà\t le Seigneur, ( Genefe , chap.
ocvij ) verf lO)) entre moi & vous y & votre
pofiérité après vous. Tous les mâles qui
font parmi vous feront circoncis y afin que
cela foit une marque de V alliance entre moi
^ vous. L'enfqm de huit jours fera circon-
cis y tant les en/ans libres Ù domefliques y
que les efclaves & les étrangers qui feront
à vous. L'enfant dont la chair ne fera
pas circoncife y fera extermine' de mon peu-
C I R
pie parce qu*ila rendu inutile mon alliance.
Ce fut l'an du monde Z108 qu'Abraham
âgé pour lors de quatre-vingt-dix-neuf ans
reçut cette loi y en conféquence de laquelle
il fe circoncit lui-même , & donna à fon fils
Ifmaël , & à tous les efclaves de fa maifon
la circoncifion y qui depuis ce temps a été
une pratique héréditaire pour Çqs defcendans.
Dieu en réitéra le précepte à Moyfe ( Exod.
xijy44y 48, & Lévitiq. xij y v. 3) y & la
circo/zcri/zo/z tut depuis comme la marque dif-
tinâive des entans d'Abraham d'avec les
autres peuples, que les juifs appelloient par
mépris incirconcis y comme n'ayant point de
part à l'alliance que Dieu avoit faite avec
Abraham. Tacite , hifi. liv. Vy reconnoîe
expreflément que la circoncifion étoit une
efpece de fiigmate qui difiinguoit les Juifs
des autres nations. Genitalia^ dit-il, circum-^
cidere inftituêre y ut diverfitate nofcantur.
C'efI auffi ce que témoignent plufieurs au-
teurs eccléfialfiques , & entr'autres faint
Jérôme fur l'épître aux Calâtes : ne fobolcs
dilecîi Abraham cœteris nationibus mifcere^
retur y & paulatim familia ejus fieret in^
certa y gregem Ifraëliticum quodam circum^
cifionis cauterio annotavit.
' Celfe & Juhen qui cherchoient à détruire
le chriftianifiTie en fappant les fondemens
de k révélation judaïque , objeftoient qu'A-
braham étoit venu de Chaldée en Egypte,
où il avoit trouvé l'ufage de la circoncifion
établi , & qu'il l'avoit emprunté des Egyp-
tiens , & par conféquent qu'elle n'étoit pas
le figne diflindif du peuple choifi de Dieu..
Le chevalier Marsham & M. Leclerc onc
reflufcité ce fyllême, fondés fur quelques
paflages d'Hérodote & de Diodore de Sicile.
Le premier de ces hiftoriens , liv. Jly chap.
XXV 6" xxvjy dit que les Egyptiens reçoivent
la circoncifion y coutume qui n'eft connue
que de ceux à qui ils l'ont communiquée
(c'eft-à-dire des Juifs) : ilajoute que les en-
fans de la Colchide l'ayant reçue des pre-
miers , l'avoiem tranimife aux peuples qui ha-
bitent les rives du Therraodoon & du Par-
thenius , & que les Syrien-s & les Phéniciens
la tenoient auffi des Egyptiens. Diodore de
Sicile dit à-peu-près la même chofe.
Mais pourquoi tous ces peuples n'auroient*
ils pas au contraire pratiqué la circoncifion y
à l'iiniiation des Juifs, quoique ce ne fut
C IR
^as pour la même fin ? car i*. h témoignage
d'Hérodote fur les antiquités égyptiennes ,
eft très-fufped ; & Manethon , auteur égyp-
tien , lui reproche bien des faufletés k cet
égard ; l'autorité de Moyfe , en qualité de
(impie hiftorien , vaut bien celle d'Hérodote
& Diodore de Sicile. 2<*, Abraham qui
avoit voyagé & fait quelque féjour en Egypte,
en ibrtit fans être circoncis ; ce ne fut que
par un ordre exprès de Dieu qu'il pratiqua
îùr lui-même & fur fa famille ïacirconcijionf
& l'on a plus de vraifemblance à aflùrer
que les Egyptiens reçurent la circoncijion des
entans de Jacob & de leurs delcendans , qui
demeurèrent long-temps en Egypte , qu'à
le nier , comme fait Marsham , lûr la feule
autorité de deux hiiloriens très-poflérieurs à
Moyfe , & qui dévoient erre infiniment
moins bien inîlruits que lui des coutumes
d'Ee,
;;>'Pte ;
mais Marsham vouloit trouver
toute la religion des Juifs dans celle des
Egyptiens , & tout lui paroiiïbit démonfira-
tif en faveur de cette opinion ab{urde &
ruinée depuis long-temps. 3^- Heft certain
que la pratique de la circoncijion étoit fort
différente chez les Juifs & chez les Egyp-
tiens ; les premiers la regardoient comme
un devoir efîêntiel de religion & d'obligation
étroite pour les mâles feulement, fur lefquels
on la pratiquoit le huitième jour après leur
naiffance , Iqus les peines portées par la loi ;
chez \qs autres , c'étoit une affaire d'ufage ,
de propreté , de raifon , de fanté , même ,
félon quelques-uns , de néceffité phyfique;
on n'en faifoit l'opération qu'au treizième
jour , louvent beaucoup plus tard , & elle
étoit pour les filles aulS-bien que pour les
garçons. 4°. Enfin l'obligation de circoncire
tous les mâles n'avoit jamais pafîe en loi
générale chez les Egyptiens : St. Ambroife ,
Origene , S. Epiphane & Jofeph atteflent
qu'il n'y avoit que les prêtres, les géomètres,
les aitronomes , les ailrologues & les favans
dans la langue hiéroglyphique , qui fufîent
afîreints à cette cérémonie , à laquelle , fui-
vantS. Clément d'Alexandrie, ^roma;. Z/V.
/, Pythagoreen voyageant en Egypte voulut
bien fe foumettre , pour être initié dans les
myfîeres des prêtres de ce pays , & appren-
dre les fecrets de leur philofophie occulte.
Mais ce qui ruine entièrement le fyflême
de Marsham , c'eft qu'Artapane cité dans
C I R V07
Eufebe , préparât, évangél. Ui/, IX, chap.
xxviij , afiure que ce fut Moyfe qui commu-
niqua la a/ro/2c://zo/z aux prêtres égyptiens.
D'autres penfent encore , avec beaucoup de
vraifemblance, qu'elle ne fut en ufage parmi
eux que fous le règne de Salomon. Du reflc
ni alors , ni même long-temps après , le'
commun du peuple n'étoit pas circoncis
parmi les Egyptiens , puifque Ezéchiel ,
chap. XXX j j V. z 5 ," & XXX ij y v- 1 9 ; ^
Jéréraie , chap. ixp v. Z4. Ù ZA , comptent
ce peuple parmi les nations incirconcifes.
Abraham n'a donc point emprunté d'eux
l'uliige de la circoncijion.
Chez les anciens Hébreux la loi n'avoit
rien prefcrit de particulier , ni fur le miniff re ,
ni fur l'inflrument de la circoncijion : le perc
de l'enfant ou un autre parent , ou un chi-
rurgien , quelquefois même un prêtre , pou-
voit faire cette cérémonie. On fe fervoit
d'un rafoir ou d'un couteau. Séphora femme
de Moyfe , circoncit fon fils Eliézer , avec
une pierre tranchante, Exod. iv , v. z^.
Jofué en ufa de même envers les Ifraélites qui
n'avoient pas reçu la circoncijion dans le dé-
fert, Jofué V. , v. z. C'étoit probablement
de ces pierres faites en forme de couteaux ,
que les Egyptiens fe fcrvoientpour ouvrir les
corps des perfonnes qu'ils embaumoient.
Les galles ou prêtres de Cybele fe mutiloient
avec une pierre tranchante ou un têt de pot
caiïe , ne le pouvant faire autrement fans
fe mettre en danger de la vie , fi l'on en croit
Pline , hijl. nat. liv. XXXV, ch.xij.
Chez les Juifs modernes le père doit faire
circoncire Ion fils au huitième jour , & non
auparavant; mais bien après fi l'enfant efl
infirme ou trop foible pour fupporter l'opé-
ration. Voici les principales cérémonies qui
s'y pratiquent. Il y a un parrain pour tenir
& ajufler l'enfant fur ks genoux pendant
qu'on le circoncit , & une marraine pour
le porter de la maifon à la fynagogue , &
pour le rapporter. Cehii qui le circoncit
s'appelle en hébreu mohel , c'efî-à-dire aV-
concifeur ; & cette fonâion efl un grand
honneur parmi \qs Juifs. On reconnoîr ceux
qui l'exercent ordinairement parce qu'ils ont
les ongles des pouces fort longs , pour l'u-
fage dont nous parlerons bientôt. Le père
de l'enfant fait quelquefois l'office du mohel,
& même dans fa maifon , car il n'ell pas
0 ^
io8 C I R
toujours ^e nécefîlté qu'on aille à la fyna-
gogue. Quand la cérémonie fe fait dans ce
dernier lieu , au jour indiqué on place dès
le matin deux fieges avec des carreaux de
foie ; l'un de ces fieges efl pour le parrain
qui tient l'enfant ; l'autre demeure vuide ;
éc eft deftiné au prophète Elie , qui , comme
fe l'imaginent les Juifs , afllfte invifiblemcnt
à toutes les circoncijions . Le mohel apporte
les inftrumens néceflaires ; favoir un plat , un
rafoir , des poudres aftringcn tes , du linge ,
de la charpie, & de l'huile rofat, & quelque-
fois une écuelle avec du fable , pour y metn-e
le prépuce coupé. On chante quelque can-
tique en attendant la marraine qui apporte
l'enfant fur les bras accompagjiée d'une
troupe de femmes , dont aucune ne pafïê
la porte de la fynagogue. C'eft-là que la
■marraine donne l'enfant au parrain , & aufll-
tot tous les iiiîiftans s'écrient baruth-haba ,
le bien venu. Le parrain s'aliîed & ajufïe
l'enfant fur fes genoux ; le mohel prend le
rafoir , & dit : Béni foye^-i'ous y Sei-
gneur ! qui nous ape:[ commandé la circon-
cijion. En prononçant ces mots il prend
avec des pinces d'argent ou avec {qs doigts
la groffc peau du prépuce, la coupe, puis
avec \cs ongles il déchire une autre peau
plus déliée qui refle : il fuce deux ou trois
fois lefang qui abonde, & le rejette dans une
taiîé pleine de vin , enfuite il met fur la plaie
du fang-dragon , de la poudre de corail , &
d'autres drogues pour étancher le fang ; puis
il applique des compreifes imbibées d'huile
Tofàc , & il enveloppe le tout. Il reprend
enfuite la tall'e , bénit le vin mêlé de fang ,
en m.ouille les lèvres de l'enfant', en difant
ces paroles d'Ezéchiel , ch. xvj , z-', ^ ; Et
j'ai clic : vis en ton fang. Il prononce une
autre bénédidion pour l'enfant , auquel il
impofe le nom qu'on fouhaite. On récite après
cela le pfeaume 128 , & l'on reporte l'enfant
à la maifon de fes parens. R. Léon de Mo-
denc , des cérém. des Juifs. Voye\auffile
grand diclionnaire de la bible de M. Simon,
•au mot circoncifion ; Ù le dictionnaire de la
•bible du P. Calmet , fur U même mot.
La circoncijion , dans l'amiquité , n'étoit
•ccrémcnie religieufe que pour les Juifs: mais
iorfque d'autres peuples qui la pratiquoient
.pour d'autres fins & d'autres raifons, comme
oiousJ'avons dit, vouloient embralTej: leju-
C I R
daïfme , la réitéroit-on ? Dom Caîmet aflure
que quand les Juifs recevoient un profélyte
d'une nation où la circoncijion étoit en
ufage , comme un famaritain , un arabe ,
un égyptien , s'il avoit déjà reçu la circon-
cijion y on fe contentoit de lui tirer quel-
ques gouttes de fang de l'endroit où l'on
donne la circoncijion ^ & ce fang s'appelloic
lefang de l'alliance. Il ajoute que trois té-
moins aflifloient à cette cérémonie , afin de
Ja rendre plus authentique , qu'on y béniflbic
Dieu , & qu'on y récitoit cette prière :
O Dieu ! faites-nous trouver dans la loi les^
bonnes œuvres, & votre protection y comme
vous ave:^ introduit cet homme dans votre
alliance.
Les juifs apoflats s'efforçoient d'eifacer
en eux-mêmes la marque de la circoncijion.
Le uxtt du premier livre des Macchabées ,
chap. j y V. îG y l'infinue clairement : Fe^
cerunt Jibi prceputia , & recefferunt à tefla-
mento fanclo ; & S. Paul dans la prem.
aux Corinth. chap. vij , v. z 8 y lémble
craindre que les juifs convertis au chriffia-
niiiTie n'en ufaiîènt de même : Circumcifus
aliquis vocatus ejî, non adducat prœputium.
S. Jérôme , Rupert & Haimont nient la
pofîibihté du fait , & croient que la marque
de la circoncijion eft tellement incfiaçable,que
rien n'eit capable de (upprimer cette marque
dans la chair du circoncis. Selon eux , ce
qu'on ht dans les Macchabées doit s'entendre
des percs qui ne vouloient pas donner la ar-
concijion à leurs enfans. Saint Jérôme donne
d'ailleurs une cxphcation forcée du pafîàge
de S. Paul, qu'on peut voir dans le P. Lami ,
IntroduB. à V écrit, f aime , liv. I^chap. 7 ,
pag. y : mais , ajoute ce dernier auteur , fi
l'autorité de l'écriture & de Jofeph , liv.
Xll y chap. vj y de antig. jud. ne fufîifoit
pas , on pourroit ajouter celle àcs plus fa-
meux médecins , qui prétendent qu'on peut
effacer les marques de la circoncijion. En
efîet Celfe & Gaiien ont traité exprès cette
matière ; & Bartholin , de morb. biblic. cite
^ginetcôi Fallope , qui ont enfèigné le fc-
cret de couvrir les marques de cette opération»
Buxtorf le fils , dans là lettie à Bartholin ,
confirme ce fait par l'autorité même des Juifs.
Quoi qu'il en foit, la circoncijion telle qu'on
la recevoit ^__ f.voic pour effet naturel de dif»
tinguerles Juifs des autres peuples ; mais
C 1 R
outre cela elle avoir divers eîfcts moraux ; I
elle fervoit à rappeller aux Juifs qu'ils def-
cendoient du père des croyans , du père du
Meflle félon la chair ; elle fervoit à les ren-
dre imitateurs de la foi de ce grand homme,
& à croire au Meflîe qui lui avoit été promis;
elle étoit un fymboie de la cireoncifion du
cœur, félon Moyfe , Deme'ron. xxx , r , 6" ,
& même félon Philon , de circumcijjone ,
elle obligeoir le circoncis à l'obfervation de
toute la loi , Galat. chap. Vy verf. j ; enfin
elle étoit la figure du baptême. Mais mal-
gré les éloges exceffifs que lui donnent les
rabbins, M. Fleury, àànslts moeurs des Jfraé-
lite's , obferve que les Juits n'avoient point
de lentiment unanime far la ncceiiité de la
cireoncifion ; les uns la regardant comme
un devoir eflentiel , les autres comme un
fimple devoir de bienféance.
Les théologiens la confiderent comme un
facrement de l'ancienne loi , en ce qu'elle
étoit un figne de l'alliance de Dieu avec la
poilérité d'Abraham : Propter hoc, dit faint
Thomas, in lib. IV^. /entent, difi. i , qucefi.j^
art. z y adv. iv , qiuvfî. quia in Abraham
fides primo habuit quaji notabilem quamita-
tem, ut propter fidei religionemab aliisfepa-
raretur\ ideoeijignaculum^jivefacramentum
■fidei determinatum fuit y fcilicet circumcijio.
Mais quelle grâce ce facrement conféroit-il ,
& comment la conféroit-il ?
S. Augufrin a prétendu que la cireoncifion
remettoit le péché originel aux enfans. Voici
Ïqs paroles , lib. IV p de nuptiis Ù concupif.
cap. ij. Ex quo injiituta efl circumcifio in po-
pulo De if quoderattuncfignaculum juJîitiiX
fidei adjjgnificationem purgationisvalebaty^
parvulis orginalis veterifque peccati. C'efl ce
■qu'il répète dan5 fes hvres contre Pelage &
■Cîleftius , contre Julien & contre la let-
tre de Petilibn. Saint Grégoire le grand n'efl
-pas moins formel dans fes traité? de morale
fur Job : Q^uod apud nos valet gratia baptif-
•matis p dit-il , lii>. IV y chap. iij , hoc egit
apud l'eteres velpro pari'ulis fola fides y vel
.pro majoribus virtus facrificii , vel pro iis
•qui ex Ahrahic fiirpe prodierunt myflerium
circumcifi.onis.LQ vénérable Bcde, S. Ful-
gence, S. Profpcr , embrafTent la même
dodrine , ainfi que plufieurs théologiens
•diilingués , tels que le maître des fentences,
oqui dit exprefléraent ifuit cirçumcifionis fa-
C I R 1C9
cramentum dem conferens remedîum contra
peccatumy quodnunc baptifmus prœfiat. Ale-
xandre de Halès , Scor , Durand, S. Bona-
venture & Eftius , penfent de même : ces
deux derniers ont même été jufqu'à avancer
que la cireoncifion conféroit la grâce ex opère
operato , comme parle l'école , c'ell-à-dire
de la même manière que la confèrent les
facremens de la loi nouvelle.
Quelque rcfpedables que foient toutes ces
autorités, elles ne font cependant pas infailli-
bles; & le fentiment le plus commun des théo-
logiens efl, après S. Thomas , que la circon-
ci/ion n'avoit point été inftituée pour fervir
de remède au péché originel, i^. Le texte de
la genelé cité au commencement de cet arti-
cle , ne donne la circoncijion que comme un
figne d'alliance entre Dieu & ion peuple , &
nullement comme un remède à la tache ori-
ginelle. 2°. S. Paul écrivant aux Romains ,
enfeigne exprelTément qu'Abraham reçut le
figne de la cireoncifion , qui étoit comme le
fceau de la juftice qu'il avoit eue avant que
d'être circoncis : Et figniim accepit cir-
çumcifionis jufiiticv fidei y quœ efl in prœpu-
tio.Rom. iv y verf. z z. 3*^._Tousles p:?res ,
avant S. Auguflin , ont foutenu unanimement
que la cireoncifion n'avoit point la vertu d'ef-
facer le péché originel : Abraham , dit S.
Juflin, dans fon dialogue avec Tryphon , c/r-
ciimcifionem accepit injignum non adjufii-^
tiam^ qiiemadmodum (3 fcripturœ &resip-
fcv nosfateri cogunt.... 6' quodgenus mulie-
bre cirçumcifionis carnalis capax non efi, fa-
tis idoflendit infignum datam circumcifio-
nemiftam^ non utjuflitiœopus. S. Ircnée,//^'.
iVjch. xvj, s'exprime ainfi: Circumcifionem
non qucifijuftitije confummatricem^fedinfi-
gno eam dédit Deus^ ut cognofcibile perfeve-
retgenus Abrafiœ. Et Tertullien dans fon ou-
vrage contre les Juifs , cfi. ij. Si circum.cifio
purgat hominem , Deus Adam incircumci
fum cum jaceret^ ciir eum non circumcidit ;
velpofiquam detiquu^ fi purgat circumcifio}
S. Cyprien , Uv. I , contre les Juifs , ch,
viij ; faint Chryfbfiome , homélie xxvij,
fur la Genef. S. Ambroife y épît. jz;
S. Epiphane , Jiéref viij. Théodoret ,
Theophilade , (Ecuménius , enfin une foule
de commentateurs & de théologiens , font
de ce fentiment : les principales raifons dont
ils l'appuient i'ont i^. que le péché Oiigind
lïo C I R
étant commun aux deux fexes , il n'eût été
ni de la fagefTe ni de la bonré de Dieu de
priver le fexe féminin du remède à ce péché :
2*^. pourquoi les Juifs auroient-ils interrom-
pu l'ufage de la. ci rconci/ion pendant les qua-
rante ans qu'ils voyagèrent dans le déiert ,
où il efl: probable que plufieurs moururent
fans l'avoir reçue ? pourquoi eût-il fallu atten-
dre au huitième jour, les enfans ne pou-
voient-ils pas être furpris par la mort dans
cet intervalle ? 3°. ni Philonle juif, ni les
rabbins anciens & modernes qui afFedent
d'exalter la aV<:o/2c//ro/z , ne lui ont jamais
attribué la vertu d'effacer le péché originel.
L'autorité de S. AuguHin n'eil donc ici
d'aucun poids : il lifoit ou dans les leptante
ou dans l'ancienne vulgate : tout enfant mâle
dont la chair n'aura pas été circoncife le hui-
tième jour y fera exterminé de fon peuple ,•
parce quil a viplé mon alliance. Alais ces
mots y le huitième jour y nt fe hfent ni dans
l'hébreu ni dans notre vulgate qui ell faite fur
l'hébreu. 2**. S. Augultin croyoit que ces
mots , fera exterminé de fon peuple , iigni-
fiokm fera condamné à P enfer ; & dans l'u-
fage de l'écriture , & félon le fenriment com-
mun àcs interprètes , ils fignifient fimple-
ment, ou être puni de mort^ ou être enlevé de
ce monde par une mort précipitée ^ ou être
féparé du corps des Ifraëlites y ou être prive
des grâces 6" des prérogatives attachées à l'al-
liance de Dieu avec Abraham. 3**. C'efl: de
cette dernière alliance qu'il s'agit uniquement
. dans ces mots^ ilaviolémon alliance , & non
de celle que Dieu avoit faite avec nos premiers
pères , & que nous avons tous violée dans la
la perfonne d'Adam , comme fe le perfuadoit
S. Auguflin , faute d'attention au texte du
chap. XV ij de la Gen. où le mot paclum^ al-
liance^ eit répété jufqu'àhuit fois , mais tou-
jours relativement aux engagemens que Dieu
impofoit à A braham.
Quoique la circoncifion ne remit pas le
péché originel , elle contéroit quelques grâ-
ces , mais moins abondantes , moins effi-
caces que les grâces de la loi évangélique.
Elle ne les conféroit pas néanmoins par fa
propre force , mais par les mérites & \t^
bonnes difpofitions de ceux qui la recevoient
ou qui l'adrainiflroient , ex opère operantisy
comme on parle dans l'école , & non pas
ex opère operato , ainfi que ceux de la loi 1
c I a
■ nouvelle ; c'efl la doârine du concile de Flo-
rence & du concile de Trente. V. la differtat,
deT)QTQ.Qd\.\x\tx.furlés effets de lacircon-^
cijion y à la tête de fon commentaire fur l'épi"
tre aux Romains.
' L'origine & l'ufage de la circoncifion chez
d'autres peuples que les Hébreux , eft facile
à démontrer ; mais tous l'ont tirée d'Abra-
ham & de (qs delcendans. Ifmaël chaffc-
de la maiion de ce patriarche , la commu-
niqua au peuple dont il fut le père, c'efl-à-
dire aux Ilrnaélites & aux Arabes ; & de
ceux-ci elle a été tranfmife aux Sarrafins ,
aux Turcs , & à tous les peuples qui profef-
lent la dodrine de Mahomet. Les Phéni-
ciens & les Syriens la pratiquoient aulîi.
Sanchoniathon ciré par Eufebe , préparât,
evangél. liv. /, dit que Saturne qui efl nom-
mé Ifmaél par les Phéniciens , n'ayant qu'un
fils nommé Jeud , l'immola fur un autel
qu'il avoit adrefle à fon père dans le ciel : &
qu'ayant pris la circoncifion , il contraignit
tous (qs foldats d'en faire de même. Delà
eiî venu parmi les Phéniciens la coutume
qu'avoient les princes d'immoler leur fils
dans les plus prenantes néceiiités de l'état ;
& delà vient aufli apparemment l'uiàge de
\z circoncifion parmi ce peuple. Ce récit ef!
viliblement l'hilioire d'Abraham altérée par
des fables , comme on en rencontre beau-
coup de femblables dans les fragmens de
Sanchoniathon, qu'Eufebe nous a confervés.
Les Iduméens , quoique defcendus d'Abra-
ham & d'Laac, ne fe firent circoncire que
depuis que Jean Hircan \qs eut fubjugués
& forcés à recevoir la arco/ici^o/z , comme
Jofeph le raconte, antiq.jud. liv. XIII y
ch. XV ij.
\^ts Turcs ont une manière de circoncire
diiférente de celle des Juifs ; car après avoir
coupé la peau du prépuce , ils n'y touchent
plus , au lieu que les Juifs déchirent en plu-
lieurs endroits les bords de la peau qui res-
tent après la circoncifion : c'eft pourquoi les
Juifs circoncis guériflênt plus facilement que
les Turcs. Ceux-ci avant la circoncifion prêt
(ènt auffi la peau à plufieurs reprifes avec
de petites pinces ,|)our l'engourdir & dimi-
nuer la douleur : ils la coupent eniuite avec
un rafoir , puis ils mettent fur la plaie quel-
ques poudres qui la guérifient. Mais comme
ils ne croient pas cette cérémonie néceliàire
au fsliu , ils ne h font à leurs çnCms. que
quand ceux-ci ont atteint l'âge de 7 ou 8
ans. On voit dans les mémoires de rétoile
fous l'année 1581, qu'Amurat III voulant
faire circoncire fon fils aiaé âgé d'environ
quatorze ans , envoya un ambaffadeur à
Henri III pour le prier d'affiikr à cette cé-
rémonie , qui devoit fe célébrer à Conflan-
tinople au mois de mai de l'année fuivante.
Les ligueurs, & fur-tout leurs prédicateurs,
prcnoient occalion de cette ambafîàde d'ap-
peller Henri III le roi turc , & lui repro-
choient qu'il étoit parrain du fils du grand-
feigneur. ♦
Les Perfans ne circoncifent leurs enfans
qu'à treize ans , ainfi que les Arabes , en
mémoire d'Ifmaël qui ne fut circoncis qu'à
cet âge. Ceux de Madagafcar coupent la
chair à trois différentes reprifcs , & font
beaucoup fouifrir les enfans : celui des pa-
ïens qui fe faiilt le premier du prépuce cou-
pé , l'avale. Herrera parle d'une elpece de
circoncifion en ufage chez les Mexicains ,
quoiqu'ils n'euffent aucune connoiflance du
Judaïfme ni du mahométifme : elle confif-
toit à couper le prépuce & les oreilles aux
enfans fi-tôt qu'ils étoient nés. En réchap-
poit-il beaucoup de cette opération ?
A l'égard de la circoncijion des femmes,
elle n'a jamais été en ulage chez les anciens
Hébreux , non plus que chez les Juifs mo-
dernes , mais feulement chez les Egyptiens ,
& dans quelques endroits de l'Arabie & de
laPerfe. S. Ambroife, tib. Il, de Abraham,
cap. xj. avance indéfiniment que les Egyp-
tiens donnent la circoncifion aux hommes &
aux femmes au commencement de la quin-
zième année ; & Strabon, liv. XVII y dit
aulfi que les femmes égyptiennes reçoivent
la circoncifion. M. Huet dit à ce fujet des
chofes allez curieufes , dans une note latine
fur Origene que nous tranfcrirons ici : Cir-
camcifio fœminanim fit refeclione T«f fOjajjK
(;imo clitoridis), quce pars in Aufiralium
prœfertim mulieribus ita excrefcit y.utferro
fit ccercenda. Ita tradunt medici infignes y
Paulus j^ginetay lib. VI y cap. Ixx. Aetius,
retrab. ii-'yjer. 4^ ciij, quorum hic itapergit.
Quapropter ^gyptiis vifum eft , ut ante-
quam exuberet (pars illar*corporis) ampute-
tur y tumprxcipuè cum v irgine s nubiles funt
dlocandce Qitod igiturnecejfitate.primum
CIR Tir
inventitm r/?, religioni pofimodum ufurpa-
twnfuit : quod & aliqui de virili circumci^
fione opinati funt. Porro hanc confuetudi"
nem circumcidendarum mulierum hodieque
retinere ^gyptios , ferunt ii qui regiones
nias luflraverunt y ignemque adcompefcen-"
dam partis hujus luxuriem adhiberiy fcrihit
Bellon. lib^ Illyobferi'. cap. xxi'iij. Morem
hune fe ri' are fœ minas in Perfiây & Cophtas
etiam in AEthiopiâ , Chrifii licèt nomeit
profeffas. Léo Africanus^ lib. VIII y nar~
rat. Mahummedi lege idprœfcribiy quamvis
in JEgypto tantum Ù Syriâ obtineac ; mu^-
nufque id obire vetulas quafdam per picos
Cairiminifierium fuuni penditantes,
Paul Jove & Munfler difent que la ar^
concifion cÇt en uf^ge chez les fujets du Prête-
Jean ou les Abyflins , même pour les fem-
mes ; que c'efl pour elles une marque de
noblelîè ; mais qu'on ne la donne qu'à celles
qui prétendent defccndre de Nicaulis reine
de Saba , celle qui vint vcnr Salomon. Il eft
fort probable que c'eft des anciens Egyptiens
ou des Arabes que les peuples d'Afrique ont-
reçu la circoncifion..
l.Qi Juifs modernes ne font point recevoir
cette marque à leurs filles ; mais au com-
mencement du mois , après que la mère efl
relevée de fes couches , elle va à la fyna-
gogue ; là le chantre dit une bénédidion en
faveur de la petite- fille , & lui impafe le nom
que le père- ou la mère défirent. Chez les
juifs d'Allemagne cette cérémonie ne fe fait
point à lafynagogue , mais au logis de Fac-
couchée ,011 le chantre fe rend pour cet
effet. (G)
Circoncision de notre-Seigneur Je^
fus-Chrifl y fête qui fe célèbre dans l'égHfe
romaine en mémoire de la circoncifion du
' Sauveur , qui n'étant pas venu , comme il le
dit lui-même , pour enfreindre la loi , mais
pourl'accomplir, voulut bien s'y foumettre
en ce point.. On croit communément que ce
fut dans Bethléem , & félon fa'mt Epiphane^
dans la- grotte où il étoit- né. Il reçut dans
cette cérémonie le nom de Jefus , c'ell-à-
dire , Sauveur. Luc ^ ch. xj y v. z i .
On appelloit autrefois cette fête VoBavt
delà nativité y & elle ne fût établie fous le
nom àz circoncifion que dans le vij^. fiecle ,
& alors feulement en Efpagne. En France ,
Iç premier dejanvier, jour auquel elle tombej^
111 C I R
ëtoit un 'jour de pénitence & de jeûne ,
pour expier les fu perftitions & les dérégle-
mens auxquels on (e livroit en ce temps - là ,
& qui étoient un refte du paganifme. A ces
divertifîèm ens profanes qui turent, entière-
ment abolis , fuivant l'avis de la faculté de
théologie de Paris , en 1444 ^ on a fubilitué
une fête folemnelle qu'on célèbre par toute
l'églile , & qui ell aufli la véritable fête du
nom de Je fus. (G)
CIRCONFÉRENCE, fubfî. fém. fe dit
dans les élémens de géométrie , de la ligne
courbe qui renferme un cercle ou un efpace
circulaire , & qu'on nomme aufli quelque-
fois j5m/>/îm>. J^oyf;[ Cercle. Ce motefl
formé du latin circum , environ & à^feroy
je porte.
Toutes les lignes tirées du centre à la cir-
conférence du cercle, & qu'on appelle rayons ,
ibnt égales entr'elies. V. RAYONS.
Une partie quelconque de la circonférence
s'appelle arc ; une ligne droite tirée d'une ex-
trémité de cet arc à l'autre , s'appelle la corde
de cet arc. V. Arc 6" Corde.
\.A circonférence du cercle ef^ fuppofée di-
vifée en 300 parties égales , qu'on appelle
degrés. V. De G RÉ.
L'angle à la circonférence eft fous-double
de celui qui eft au centre. Voy. Angle 6"
Centre.
Tout cercle eft égal à un triangle redi-
iigne , dont la bafe efl égale à la circonfé-
rence & la hauteur égale au rayon. Voye\
Triangle.
Les circonférences font entr'elies comme
leurs rayons. Voye^ RayoN,
De plus , puifque la circonférence de tout
cercle efl à fon rayon comme celle de tout
autre cercle efî au fien , la raifon de la cir-
conférence au rayon ell donc la môme dans
fous les cercles.
Archimede donne pour raifon approchée
du diamètre à la circonférence , celle de 7
à 22. Cette propofirion d' Archimede eft
démontrée dansl a géométrie du P. Taquet.
D'autres qui approchent plus de la vé-
rité , la font de iooooooooooooocx)o à
31415926^35897932.
Dans l'ufage , Viette , Huyghens , fi'c.
donnent la proportion de 100 à 314 pour
despetits cercles, & celle de loooo, à 3 14 15
pour les grands cercles ; mais la proportica 1
cia
la plus jufte en petits nombres eft celle de
Merrius , favoir de 113 à355. Voy, DIA-
METRE.
D'où il fuit que le diamètre d'un cercle
étant donné , on ji auiîi fa circonférence ,
laquelle multipUée par le quart du diamè-
tre, donne l'aire du cercle. Voye\ AiRE..
Chambers.
Circonférence, fe dit aufTi en général
du contour d'une courbe quelconque. VoyeT^
Courbe. {E)
CIRCONFLEXE, adj . en terme de gram-
maire y ^cc^m circonflexe. Voy. AcCENT.
CIRCONLOCUTION, {.(.(Belles-^
Lettres. ) C'eft une courte définition qui
s'emploie à déligner la chofe qu'on ne peut
ou qu'on ne veut pas nommer.
Cemonflre à voix humaine, aigle y femme
& lion. (Vol.)
Cet art ingénieux ,
De peindre la parole & de parler aux yeux.
( Brebeuf. )
. . Rudis indigeflaque moles,
Etmalèjunciarum difcordiafemina rerum.
( Ovid. )
La circonlocution annonce la pauvreté
d'une langue , mais elle y lupplée avec avan-
tage , & fait elle-même la richeffe du ftyle ,
par les idées qu'elle ralTemble ou qu'elle ré-
veille en palTant; elle contribue aufli quelque-
fois à l'élégance & à la noblefle , en évitant
le voilinage des idées bafîes ou rebutantes
que le terme propre rappelleroit. Voy. dans
Sémiramis , comme Tidée des médicamens^
ell ennoblie :
Ces végétaux puiffans qu*en Perfe on
voit éclore ,
Bienfaits nés dans fon fein de Vafire.
qu^elle adore.
On emploie fouvent la circonlocution à la
place des termes que l'habitude & le préjugé
ont avihs : qu'(Enone eût dit à Phèdre : //
y a trois jours que vous nave-{ bu ni
mangé ; cela feroit ignoble.
Et le jour a trois fois chaffé la nuit obfcure
Depuis que votre corps languit fans
nourriture.
Voilà comment la même idée ell ennoblie
par un détour : c'eft le befoin qui a inventé
la circonlocution.
Indiciifque in rébus egefias.
Et
C I n
Et il en cil des orneraens du flyle comme
de ceux de l'afcbitedure.
Quodqiie olim ufus inops reperit , nunc
ipfa voluptas
Pofiulat.
Ainii la circonlocution y qui fut d'abord un
figne de pauvreté dans une langue , eu deve-
nue dans la fuite un ornement de luxe dont
on a fouvent abulé.
Le grand ufage de la circonlocution eu
dans les chofes de délicatefïè , de finefïè ou
de décence ; car ces trois caraderes de la
penfée tiennent aux foins qu'on a de la voiler
à demi par une expreffion myftérieufe , &
d'éviter par un détour la trop- grande clarté
du mot jufte & précis. V. FiNESSE , DÉ-
LICATESSE , DÉCENCE, Esprit , {M.
Marmontel. )
^ CIRCONPOLAIRE , adj. ( Aflron. )
étoiles circonpolaires y ce font celles qui font
lîtuées près de notre pôle boréal , qui tour-
nent autour de lui fans fe coucher jamais
par rapport à nous , c'eft-à-dire , fans s'abaif-
fer jamais au deflbus de notre horizon. Il eft
bien aifé de déterminer la partie du ciel qui
renferme les étoiles circonpolaires , par exem-
ple pour Paris. Comme Paris eft éloigné de
î'équateur de à^^ 5*^' > or^ n'a qu'à prendre
depuis le pôle ar6i:ique de part & d'autre
de ce pôle 48^ 50' , & toutes les étoiles
qui feront renfermées dans cette zone de
49^ 40' , ne fe coucheront jamais à Paris.
V. Etoile , Pôle , Coucher.
Toutes les étoiles comprifes dans l'hémil^
phere boréal ou feptentrional , font circon-
polaires pour les habitans du pôle ardique ,
c'eft- à-dire , ne le couchent jamais pour
eux. (O)
^ CIRCÇNSCRIPTION, f. f. {Géomét)
c'efl l'action de circonfcrire un cercle à un
polygone , ou un polygone à un cercle , ou à
toute figure courbe. V. CIRCONSCRIRE.
La circonfcription des polygones ne con-
fiée que dans l'art de tirer des tangentes ;
car tous les côtés d'un polygone circonfcrit
à une courbe , font des tangentes de cette
courbe. V. Tangente. {E)
CIRCONSCRIRE , en géométrie élé-
mentaire y c'efl décrire une figure régulière
autour d'un cercle , de manière que tous fes
cotés deviennent autant de tangentes de la
Tome VIIL
C I R
115
circonférence du cercle. Voye\ CeRCLE ,
Polygone , &c.
Ce terme fe prend aufîî pour la defcrip-
tion d'un cercle autour d'un polygone , de
façon que chaque côté d'un polygone foit
corde du cercle ; mais dans ce cas , on dit
que le polygone eft infcrit y plutôt que de
dire que le cercle eft circonfcrit.
Une figure régulière quelconque ABC
D E {PL de Géomét.fig. z^.) infcrite dans
un cercle , fe réfoud en des triangles fèm-
blables & égaux , en tirant des rayons du
centre -F du cercle , auquel le polygone ell
infcrit , aux difFérens angles de ce polygo-
ne , & fon aire ell égale à un triangle rec-
tangle , dont la bafc feroit la circontérence
totale du polygone , & la hauteur une per-
pendiculaire F H tirée du centre du polygo-
ne fur un de fes côtés , comme A 3.
On peut dire la même chofe du polygone
circonfcrit ab cd e {fi.g. z8. ) , excepté que
la hauteur doit être ici le rayon FR.
L'aire de tout polygone , qui peut être
infcrit dans un cercle , elt moindre que celle
du cercle ; & celle de tout polygone , qui
y peut être circonfcrit y eu plus grande. Le
périmètre du premier des deux polygone*
dont nous parlons , eft plus petit que celui
du cercle , & celui du fécond eft plus grand,
V. PÉRIMÈTRE , &C.
C'eil de ce principe qu'Archimede efl
parti pour chercher la quadrature du cercle,
qui ne confifle etFedivement qu'à déterminer
l'aire ou la furface du cercle. V^, QUA-
DRATURE.
Le côté de l'exagone régulier eft égal au
rayon du cercle circonfcrit. V. ExAGONE.
Circonfcrire un cercle d un polygone régu-
lier donné y AB C DE {fi.g. z8.) y Ù réci-
proquement. Coupez pour cela en deux par-
ties égales deux des angles du polygone , par
exemple A &c B ; &: du point F y où les
deux lignes de fèdions fe rencontrent , pris
pour centre , décrivez avec le rayon FA un
cercle.
Circonfcrire un quatre autour d'un cercle.
Tirez deux diamètres^ ^, D E {fig. 3t •) y
qui fe coupent à angles droits au centre C ;
& par les quatre points où ces deux diamè-
tres rencontreront le cercle , tirez quatre
tangentes à ce cercle , elles formeront par
l leur rencontre le quarré demandé.
114 C I R
Circenfcrire un polygone régulier quelcon-
que , par exemple un pentagone autour d'un
cercle. Coupez en deux parties égales la corde
A E dt l'arc ou de l'angle qui convient à ce
polygone {fig. 3.8.) y par la perpendiculaire
FO partant du centre , & vous la continue-
rez jufqu'à ce qu'elle coupe l'arc en g. Parles
points A yT y tirez des rayons A E , EF -^
& par le poinrg" une parallek h A E y qui
rencontre ces rayons prolongés en a y e ;
alors a e fera le zoû du polygone circonfcrit.
Prenez la corde A B = A E ; tirez le
rayon F B y &c prolongez-le en b jufqu'à
ce que Fb foit égal à Fe ; tirez enfuite ab y
ce fera un autre côté du polygone y & vous
tracerez tous les autres de la même manière.
Tnfcrire un polygone régulier quelconque
dans un cercle. Divifez 360^ par le nombre
des côtés , pour trouver la quantité de l'an-
gle EF D ; faites un angle au centre égal
à celui-là , & appliquez la corde de cet
angle à la circonférence , autant de fois
qu'elle pourra y être appliquée ; ce fera la
figure qu'il falloit infcrire dans le cercle.
Chambers. (E)
Circonscrit , adj. {Géomét.) On dit ,
en géométrie y qu'un polygone eft circonfcrit
à un cercle , quand tous les côtés du polygo-
ne font des- tangentes au cercle; & qu*"un
cercle efl circonfcrit à un polygone , quand
la circonférence du cercle palîè par tous les
lommets des angles du polygone» J^^ CIR-
CONSCRIRE. (£)
Hyperbole circonscrite , dans la
h^ute géométrie ^ efl une hyperbole du troi-
fîeme ordre , qui coupe fes afymptotes , &
dont les branches renferment au dedans
d'elles les parties coupées de ces afymptotes.
Telle eu la courbe ou portion de courbe
C Ey DH{fig. 5^ , Analyfe. ) , dont les
branches C E y D H y font chacune au de-
hors dé leurs afymptotes refpedives A E y
A G. Voyei CoURBE. (O)
CIRCONSPECTION , RETENUE ,
CONSIDÉRATION, ÉGARDS, MÉ-
NAGEMENS , fynonym. (Gramm.) Une
attentioQ réfléchie & mefurée fur la façon
de parler , d'agir & de fè conduire dans le.
commerce du monde par rapport aux au-
tres , pour y contribuer à leur fatisfadion
plutôt qu'à la fienne , eft l'idée générale
que ces. cinq mots préfentent d'abord ,.fui-
C I R
vant la i-emarque de l'abbé Girard. Il me
paroît que voici les différences qu'on y peut
mettre.
La circonfpeclion eft principalement dans
le difcours : la retenue eft dans les paroles
comme dans les adions , & a pour défaut
oppofë r impudence : la conjidération , les
égards & les ménagemens font pour les per-
fonnes , avec cette différence , que la conji-
dération & les égards font plus pour l'état ,
la fituation & la qualité des gens que l'on
fréquente ,,& que les ménagemens regardent
plus particulièrement leurs inclinations &
leur humeur.
La conjidération femble encore indiquer
quelque chofe de plus tort que ks égards ,*
elle marque mieux le cas qu'on fait des per-
fonnes que l'on voit , l'eflime qu'on leur
porte en réalité , ou feulement en apparence ,
ou un devoir qu'on leur rend. Les égards
tiennent davantage aux règles de la bien-
féance & de la politeffe.
Toutes ces qualités , circonfpeclion y rete-
nue y conjidération y égards y ménagemens y
font uniquement les fruits de l'éducation,
& l'on peut les pofleder éminemment fans-
etre plus vertueux ; mais comme on ne re-
cherche guère dans la fociété que l'écorce ,
on a mis à ces qualités, bonnes en elles-,
mêmes , un prix fort {îipérieur à leur va-
leur. Les gens du monde n'ont pardeflûs
\ts autres hommes qu'ils méprifent , qu'un;
peu de vernis qui les couvre , & qui cache
à la vue leur médiocrité . leurs défauts &
leurs vices. Article de M. h chevalier de
Jaucourt.
* CIRCONSTANCE , CONJONC-
TURE , f f. {Gramm.) CirconflAnce efî re-
latif à l'adion ; conjonclure cfl relatif au mo-
ment. La circonflance eft une de fes parti-,
cularités ; la conjoncture lui çfl étrangère ;;
elle n'a de commun avec l'adion que la con-^
temporanéité.C'efl un état de» chofes ou des
perfonnes coexifîant à l'adion , qu'il rend;
plus ou moins fâcheux.
CIRCONVALLATION , {. {.en terme
de la guerre des fie ge s y efl une ligne formée
d'un fofré & d'un parapet , que les afliégcans
font autour de leur camp , pour le défendre
contre les fècours qui peuvent venir aux
aflîégés. F". Ligne.
Ce mot eft formé du htlacircum ^ autour ,
C ï R
^ vallum y vallée ou élévation die terre.
On doit obferver dans la diipofition de la
circoni'allation :
1*. D'occuper le terrain le plus avantageux
des environs de la place , foit qu'il fe trouve
un peu plus près ou un peu plus loin : cela
ne doit faire aucun fcrupule.
2°. De fe pofler de manière que la queue
des camps ne Toit pas fous la portée du canon
de la place.
3°. De ne point trop fe jeter à la campa-
gne , mais d'occuper précifément le terrain
nécelTaire à la fureté du camp.
4°. D'éviter de fe mettre fous les com-
mandemens qui pourroient incommoder le
dedans des camps &: de la ligne par leur
ilipériorité ou par leur revers. Lorfque ces
détauts fe rencontrent , il vaut mieux occu-
per ces commandemens , foit en étendant
les lignes jufque-là , foit en y faifant de
bonnes redoutes ou de petits forts , que de
s'y expofer. On doit auflî faire lervir à la cir-
convallacion , les hauteurs , ruilîeaux , ravi-
nes , efcarpemens , abattis de bois , buifîons ,
& généralement tout ce qui approche de fon
circuit , & qui le peut avantager.
La portée ordinaire du canon , tiré à-peu-
près horizontalement ou fur un angle d'en-
viron dix ou douze degrés , peut s'eftimer
A-peu-près de noo toifes. Cette portée ,
fuivant les épreuves de M. Dumetz, rappor-
tées dans les mémoires de Saint-Remi , eft
beaucoup plus grande ; mais dans ces épreu-
ves le canon a été tiré à toute volée , c'eft-à-
dire fous l'angle de 4') degrés. Sous ces an-
gles , (ts coups font trop incertains ; ainft on
doit établir pour règle générale , que la queue
des camps des troupes qui campent dans la
circonvallation , doit être éloignée de la
place au moins de iioo toifes. La profon-
deur de ces camps eft d'environ 3*^ toifes ,
& la diilance du front de bandiere à la ligne ,
de 120; d'où il fuit que la circonvallation
doit être dirigée à-peu-près parallèlement à
la place , à la diftance au moins de i3>o
ou 1400 toifes. Elle eft flanquée de diftance
en diftance par des angles faillans qu'on
appelle redans. V. Redans.
La mefure commune des lignes de cir-
convallation y quant au plan , doit être de
120 toifes d'une pointe du redan à l'autre.
On doit obferver de placer les redans dans
CI R rry
les lieux les plus érainens , ôc jamais dans
les fonds ; comme auffi que les angles des
redans foient toujours moins ouverts que le
droit , afin que fes faces fe préfentent moins
à l'ennemi. V'oye^ le trace' des lignes , plan-
che XIII de fortification.
L'ouverture du foflé de la circonvallation
doit erre de 15 , 16 ou 18 pies, iur 6 Xy Se
demi de profondeur , taluant du tiers de la
largeur.
De cette façon le fofte aura 18 pics de
large à fon ouverture ; fa largeur au fond fera
de 6 pies , ce qui donne 12 pies de largeur ,
réduite fur 7 pies & demi de profondeur,
revenant par toife courante A deux toifes
cubes & demie ; c'eft l'ouvrage qu'un payfan
peut faire en fept jours fans beaucoup fe
fatiguer.
Sur ce pié-là , on peut propofèr les rae-
fures des fix profils fuivans pour toutes for-
tes de circonvallation. On ne doit en em-
ployer ni de plus forts , ni de plus foibles.
Premier profil.
pies pOttCi
O
O
6
Largeur du fofle à l'ouverture , . . 18
Largeur du même fur le fond , . 6
Sa profondeur , 7
Contenu du fblide de fon excava-
tion , >. . 15 o
Le temps nécefTaire à fa façon , . . Jjours^
Second profil.
Largeur du fofTé à l'ouverture , . . i^
Largeur du fond du même , . . . 5
Sa profondeur , 7
Contenu du folide de fon excava-
tion par toife courante , .... 12
Le temps néceflaire à fa façon , . . 6jours^
Troisième profil.
Largeur du fofîë à l'ouverture , . . 14 o
Largeur du même fur le fond , . . 48
Sa profondeur , 6 6
Contenu du folide de fon excava-
tion par toife courante , .... 10 o
Le temps néceflaire à fa façon , . . ^joursi
Quatrième profil.
Largeur du fofte à l'ouverture , . . 12 o
Largeur du même fur le fond ,..40
Sa profondeur, 6 q
Contenu folide de l'excavation par
toife courante , . . 8 2,
11^ C 1 R
Le temps necefîaire pour achever , ^ fours.
Cinquième profil.
Largeur du fo fTé à l'ouverture , . . lo o
Largeur du même fur le fond , . . 3 4
Sa profondeur , • -, • • ^ ^
Contenu folide de l'excavation par
toife courante , 5 7
Le temps neceflaire à fa façon , . . 2 jours
& demi.
Sixième profil.
Largeur du fofle à l'ouverture, ..80
Largeur du même fur le fond , . . 20
Sa profondeur , 5 ^
Contenu folide de l'excavation par
toife courante , 4 ^
Le temps néceffaire à fa façon , . . 1 jour s.
L'épaifl'eur du parapet du premier profil
efl de 8 pies , du fécond de 7 pies , & ainfi
de fuite en diminuant d'un pie. Pour la hau-
teur totale , elle eft de 7 pies & demi. La
banquette a 4 pies & demi de largeur , & 3
de hauteur. Le bord de la contrefcarpe du
fûffé efl un peu plus élevé que le niveau
de la campagne , & il forme une efpece de
glacis qui cache à l'ennemi le pié du parapet ;
en forte qu'il ne peut le battre ou le ruiner ,
lorfqu'il en eft éloigné. V. ces diffère :is pro-
fils y PI XlV^defonification.
Pendant la confîrudion des lignes, les
ingénieurs fe partagent entr'eux leur éten-
due , pour avoir foin que les mefures foienr
auin exadement obfervées qu'il eft pofCble.
La diligence du travail ne permet pas , au
moins en France , qu'on y apporte grande
attention ; mais il faut cependant faire ob-
ferver les talus des fofîes , & les profondeurs
portées aux profils ; autrement cet ouvrage
fera très-imparfait.
On failoit autrefois des épaulemens dans
l'intervalle des hgnes & de la tête des camps ,
environ à vingt toifes de cette tête, & de
trente-cinq ou quarante toifes de longueur ,
principalement dans les parties expofées à
quelque commandement des dehors. Ils
etoient difpofes par alignement , & paral-
lèles à la tête des camps : ils avoient neuf
pies de haut fur dix ou douze d'épaifî'eur,
mefurés au fommet. La cavalerie des affié-
. geans fe mettait derrière , quand on atta-
quoit les lignes. Cette méthode ne fe pra-
tique plus à préfent. On fortifioit aulfî alors
C I R
les lignes de circonvallation par des forts &
par de grandes redoutes palilladées ; ce qui
ne fe pratique plus guère , la brièveté de nos-
fieges n'exigeant point tant de précautions.
Voye-^ M. le maréchal de Vauban , attaque
des places.
On peut fraifer les lignes , & on le fait
quand on prélume qu'elles dureront quelque
temps , & que les environs de l'efpace qu'el-
les occupent , fournifTent du bois propre à
cet ouvrage.
On fait encore quelquefois un avant-fofîe
devant les lignes, de douze ou quinze pies
de largeur par le haut , &: de iix ou lépt de
profondeur. Il fe fait environ à douze
ou quinze toifes du fofîé de la ligne. Son
objet cfl d'arrêter l'ennemi lorfqu'il vient
attaquer les lignes , & de lui faire perdre
bien du temps & du monde en le paifant..
M. le maréchal de Vauban en défapprou-
voitl'uiage , fur ce que l'ennemi étant arrivé
à ce fofïé , fe trouve , en fe jetant dedans ,,
à couvert du feu de la circonvallation. Mais
quelque déférence que l'on doive à ce grand
homme , il femble néanmoins qu'on peut
dans plulieurs cas fe fervir avantageufement
de cet avanr-fofîi. Il arrête néceifàirement
la marche de l'ennemi , & il l'expofe plus
long- temps au feu de la ligne : aufii a-t-oa
fait en dirîérenresoccafions , des avant-foûés'
aux lignes , depuis M. de Vauban , & no-
tamment a la circonvallation de Philisbourg,
en 1734. • _ ,
Cette circonvallation étoît encore fortifiée,
par des puits d'environ neuf pies de diamè-
tre à leur ouverture , & de fix à fcpt de pro-
fondeur. Ils étoient rangés en échiquier , &
affez près les uns des autres pour empêcher
de paffer dans leurs intervalles. Les Efpa-
gnols avoient pratiqué quelque chofe de pa-
reil au fiege d'Arras en 1654 : lenrcircon-
vallation étoit défendue par des efpeces de
petits puits de deux pies de diamètre fur un
pié & demi de profondeur, dans le milieii
defquels étoient plantés de petits pieux qui
pouvoient nuire beaucoup au paffage de la
cavalerie. Voye^ le plan & le profil d'une
partie de la circonvallation de Philisbourg ,,
PI. XV de fortification y fig. première.
Cette circonvallation des Efpagnols paroîr
avoir été copiée de celle de Céfar à Alexia.
• Voici en quoi confiûoit cette dernière»
C I R
« Comme les foldats ctoient occupés en
ti même temps à aller quérir du bois &
9i des vivres aflez loin , & à travailler aux
7} fortifications , Céfar trouva à propos d'a-
» jouter quelque chofe au travail des lignes ,
9) afin qu'il fallût moins de gens pour les
» garder. Il prit donc des arbres de médio-
}> cre hauteur , ou des branches fortes qu'il
?3 fit aiguifer ; & tirant un fofle de cinq pies
7> de profondeur devant les lignes , il les y
>j fit enfoncer & attacher enlèmble par le
9j pié , afin qu'on ne pût les arracher. On re-
7y couvroit lefoflé de terre , enforte qu'il ne
7J paroifToit que la tête du tronc , dont les
9) pointes entroient dans les jambes de ceux
}> qui penfoicnt les traverfer : c'efl pourquoi
77 les foldats les appelloient des ceps ; &
7i comme il y en avoit cinq rangs de fuite qui
77 étoient entrelacés , on ne les pouvok évi-
77 ter. Au devant il fit des f ofTes de trois pies
7) de profondeur , un peu étroites par le haut,
77 & difpofées de travers en quinconce : là-
97 dedans on fichoit des pieux ronds de la
97 groflêur de la cuifTe , brûlés & aiguifés
77 par le bout, qui fortoient quatre doigts
» feulement hors de terre ; le refle étoit en-
» foncé trois pies plus bas que la profondeur
» de la fofTe , pour tenir plus ferme , & la
97 fofTe couverte de broufîailles pour fervir
» comme de piège. Il y en avoit huit rangs
>> de fuite , chacun à trois pies de diflance
» l'un de l'autre , & les foldats les nom-
» moient des lys , à caufe de leur refTem-
» blance. Devant tout cela il fit jeter une
y^ efpece de chaufl'e-trapes , qui étoient des
» pointes de fer attachées à des bâtons de
97 la longueur d'un pié , qui fe fichoient en
w terre ; tellement qu'il ne fortoit que ces
w pointes , que les foldats appelloient des
97 aiguillons y & toute la terre en étoit cou-
97 verte. » Comment, de Céfar , par
d'Ablancourt.
Les lignes de circenvallation ayant peu
d'élévation, elles n'ont pasbefoin de bâfrions
pour être flanquées dans toutes leurs par-
ties comme l'enceinte d'une place ; les re-
dans qui font d'une conflruftion plus fim-
ple & d'une plus prompte expédition , font
fufîîfans : on fait feulement quelques baf-
tions dans les endroits où la ligne fait des
angles , qu'un redan ne défendroit pas auffi
avaatageufement. H arrive cependant qu'on
CIR 1,7
fe fert auffi quelquefois des baflions pour
flanquer la ligne , principalement lorfqu'elle
a peu d'étendue : car les baftions augmen-
tent confidérablement fa circonférence. La
plus grande partie de la circonvallation de
Philisbourg en 1734-, en étoit fortifiée.
On élevé des batteries à la pointe des re-
dans , pour tirer le canon à barbette par-
defîîis le parapet. On le tire de cette ma-
nière par-tout où on le place le long de la
circonvallation.
\.Qs lignes de circonvallation exigent de
très-fortes armées pour les défendre. Si l'on
fuppofe une circonvallation dont le rayon
foit de 1700 toifes, ce qui efl la moindre
diftance du centre de la place à la circon-
vallation ^ on aura au moins 12000 toifes
pour fa circonférence , en y comprenant les^
redans & les détours ; ce qui fait à-peu-près
cinq lieues communes de France.
Si , pour border une ligne de cette éten-
due , on donne feulement trois pies à cha-
que foldat , il faudra 24000 hommes pour
un feul rang ; & pour trois de hauteur 72000,
lans rien compter pour la féconde ligne ,
pour les tranchées & les autres gardes y
qui demanderoient bien encore autant de
monde pour que tout fût fùffifammenr
garni. Où trouver des armées de cette force ?
& quand on dégarniroit la moitié des lignes
les moins expolées , pour renforcer celles-
qui le feroient le çlu^ , on ne parviendroir
pas à les garnir fuffifamment à beaucoup
près ; d'autant plus que fi les places afïîé-
gées font un p>eu confidérables , la circon-
vallation deviendra bien plus grande que
celle qui cfl ici fuppofée : ce qui éloigne
encore plus la poflibilité de les bien garnir.
Cette confidération a partagé les fentimens
des plus célèbres généraux, fur l'utilité dé-
cès fortes de lignes. Tous conviennent qu'il
*^ a des cas où l'on en peut tirer quelque
utilité, fur-tout lorfqu'elles font ferrées &
qu'elles n'ont qu'une médiocre étendue ;.
mais lorfqu'elles embrafîent beaucoup de
terrain , il efl bien diflScile de les défendre
contre les attaques d'un ennemi intelligente
Lorfque l'ennemi fe difpofe pour attaquer
les lignes , il y a deux partis à prendre : le
premier de lui en difputer l'entrée , & le
fécond de laifîer une partie de l'armée pour
la garde des travaux du liege , & d'aller avec
îiS C I R ^
le refîe nu devant de rennemi pour le com-
battre. Ces deux partis ont chacun leurs par-
tifans parmi les généraux : mais il femble que
le dernier ell le plus généralement approuvé.
L'inconvénient qu'on trouve d'attendre
l'ennemi dans les lignes , c'cft que comme
on ignore le côté qu'il choiiira pour Ton at-
taque , on eft oblige d'être également fort
dans toutes les parties de la ligne , & que
lorfqu'elle eft fort étendue , les troupes fe
trouvent fort éloignées les unes des autres
pour oppofer une grande réfiftance à l'enne-
mi du côté de fon attaque. La plupart des
lignes de circonvalladon qui ont été atta-
quées , ont été forcées : ainii le raifonnement
& l'expérience femblent concourir également
à établir qu'il faut aller au devant de l'ennemi
pour le combattre , & pour ne point le laifTer
arriver A portée de la circonvallation.
Cependant fans vouloir rien décider dans
une queftion de cette importance , il femble
que lorlqu'une ligne peut être raifonnable-
ment garnie , on peut la défendre avanta-
geufement.
Il eft inconteftable que ft le foldat qui
défend la ligne , veut profiter de tous (es
avantages , il en a de très-grands & de
très-réels fur l'affàillant. Celui-ci eft obligé
d'efluyer le feu de la ligne pendant un el-
pace de temps aflêz confidérable , avant de
parvenir au bord du foilë. Il fafut qu'il com-
ble ce folié fous ce même feu , ce qui lui
fait perdre bien du monde , & qui doit dé-
ranger nécelTairement l'ordre de Çts troupes.
Efl-il parvenu à pénétrer dans la ligne , ce
ne peut être que fur un front fort étroit ;
il peut être chargé de front & de flanc par
les troupes qui font dedans, lefquelles en
faifiint bien leur devoir , doivent le culbu-
ter dans le folîc.
Suppofbns qu'il parvienne à faire plier
la première ligne d'infanterie qui borde la'
ligne , la cavalerie qui eft derrière , peur ( &
elle le doit ) tomber fur l'infanterie ennemie
qui a pénétré dans la ligne ; & comme elle
ne peut y entrer qu'en dcfordre , il eft aife à
cette cavalerie de tomber defïïis & de la
culbuter.
^ Malgré des avantages fi évidens , l'expé-
rience, dit M. le chevalier de Folard, démon-
tre que le foldat eft moins brave & moins
réfolu- derrière un retranchement qu'en rafe
C I R
campagne. Il met toute fa confiance dans ce
retranchement ; & lorfque l'ennemi , pour
éviter d'être trop long-temps expofé au feu
de la ligne , fe jette brufquement dans le
foffé , & qu'il tâche de monter de là fur le
retranchement , le foldat commence à per-^
dre confiance ; & il la perd totalement lorf^
qu'il le voit pénétrer dans la ligne. " On
» croit , dit cei auteur , le mal fans remède ,
" loriqu'il n'y a rien de plus aife que d'y
j> en apporter , de repoulier ceux qui font
» entres , & de les culbuter dans le fofîé :
»> car outre qu'ils ne peuvent pénétrer en
« bon ordre , ils font dégarnis de tout leur
»> feu ; cependant l'on ne fait rien de ce que
'î l'on efè en état de faire : l'ennemi entre en
»j foule , fe forme , & l'autre fe retire ; &:
» la terreur courant alors dans le long de la
» ligne , tout s'en va , toutfe débande , ians
>) favoir fouvent même où l'on a percé. »
On peut conclure de là , que lorfque le
foldat connoîtra bien tous les avantages que
lui procure une bonne ligne , qu'il fera dif-
pofé à s'y bien défendre , que toutes les par-
ties pourront également en être foutenues,
& enfin qu'on prendra toutes les précautions
nécefîaires pour n'y être point furpris ; il
fera bien difficile à l'ennemi de la forcer.
On en a vu un exemple au fiege de Phi-
lisbourg en 1734. Les bonnes difpofitions
de la circonvallation empêchèrent le prince
Eugène , après qu'il l'eut bien reconnue ,
d'en faire l'attaque. Il fut fimple fpeâateur
de la continuation du fiege , & il ne jugea
pas à propos , dit l'hiftorien de fa vie , d'ef^
fayer de forcer nos lignes , tant elles lui
parurent redoutables & à l'abri de toute in-
fulte. En effet leur peu d'étendue les mettoit
en état d'être également défendues.
Lorfqu'on fe trouve dans des fituations
femblables , on peut donc attendre l'ennemi
tranquillement : mais lorfque la grandeur de la
circonvallation ne permet pas de la garnir
également, le parti le plus sûr eft d'aller au
devant de l'ennemi , comme le fit M. le ma-
réchal de Tallard à Landau en 1703 , & M.
le duc de Vendôme à Barcelone en 1704*
Tout le monde fait qu'au fiege de Turin
en 1705 , feu M. le duc d'Orléans propofa
de prendre le même parti ; & que pour ne
l'avoir pas pris , l'armée françoife fut obli-
gée de lever le fiege , parce que les lignes
C I R
n'étolent pas également bonnes par-tout:
rennemi pénétra d'un c6té qui avoit été
Fiégligé , il força les troupes , & fecourut la
ville.
M. le chevalier de Folard prétend que fans
aller au devant de l'enn€mi , il étoit aifé de
l'empêcher de forcer les lignes , en ne fe
négligeant point fur les attentions néceflaires
pour les foutenir ; que pour cela il falloit
envoyer affez de monde pour les défendre
du coté que le prince Eugène les attaqua :
qu'elles ne valoient abfolument rien de ce
côté , qui n'avoit pour défenfe que la feule
brigade de la marine , qui fut obligée pour
le garnir , de fe ranger fur deux de hauteur,
& qui dans cet état repoufîa pourtant l'en-
nemi : mais que pendant l'attaque le prince
Eugène ayant remarqué une partie de la ligne
fur la droite , où il n'y avoit qu'une com-
pagnie de grenadiers , & où on pouvolt aller
à couvert d'un rideau ou élévation de terre,
il y fit aller cinquante hommes , lefquels en-
trèrent par cet endroit. On s'imagina d'abord
qu'il y étoit entré un corps beaucoup plus
confidérable ; ainfi ce pofle qui n'étoit pas
afiez garni de monde pour rélifîer , ayant
été emporté , l'épouvante fe communiqua,
par-tout , & fit abandonner la ligne. M. de
r olard ajoute que fi M. d'Albergotti , qui
étoit à portée d'envoyer un iecours confidé-
rable au pofte dont on vient de parler ,
l'avoit fait ; l'entreprife du prince Eugène
fur les lignes échouoit infailliblement.
L'exemple de l'attaque des lignes de Turin
entendu & exphqué de cette manière , ne
prouve point que des lignes bien défendues
foient toujours forcées indubitablement; il
montre feulement que lorfqu'il y a eu quel-
que négligence dans la circonvallation y
qu'elle n'eil pas également bonne de toute
part, & que l'ennemi peut avoir le temps
d'y forcer quelques quartiers avant qu'ils
puifîent être fccourus des autres , il ne faut
pas s'y renfermer ; mais qu'on le peut lorf-
qu'elle renferme alïez de troupes pour l'abor-
der de toute part. Attaque des places y par
M. Leblond. (O)
CIRCONVOTSIN , adj. on dit , mphy-
fiqiie y les corps circoni'oijins, pour défigner
les corps qui en environnent un autre , ou
qui en font proche. (O)
CIRCONVOLUTION ,. f, f. l'aftion
C I R ÏÎ5,
de tourner autour , du latin circumvoh'ere ^
tourner à Tentour. Il fe dit , en architeclure ,
de la ligne fpirale de la volute ionique. V,
Volute ù Colonne. ( R )
CIRCONVOLUTION , f f terme de
Plain-chant. C'efl une forte de périélefe qui
fe fait en inférant entre la pénultième & la
dernière noce de l'intonation d'une pièce de
chant , trois aurres notes ; favoir , une au
delTus & deux au deffous de la dernière note ,
lefquelles fe lient avec elles , & forment un
contour de tierce avant que d'y arriver ;
comme fi vous avez ces trois notes , mifix
mi pour terminer l'intonation , vous y inter-
polerez par circonvolution ces trois aurres ,
fa re re y & vous aurez alors votre intona-
tion terminée de cette forte , mi fa fa re re
mi , &CC. V. PéRIÉLESE {Mufiq.) {S)
^ * CIRCUIT , f m. ( Gram. ) fe dit dans,
l'ufage ordinaire , par oppofition au chemin
le plus, court d'un lieu dans un autre , de
toute autre manière d'y a^rriver que par la^
ligne droite. Ce terme a été tranfporté par
métaphore du phyfique au moral.
Circuit, c'eft l'enceinte, le contour
ou le périmètre d'une figure ou d'un corps..
Voje^ Périmètre. (E)
Circuit ,, en Droit _, eft uneprocédure
longue & compliquée , qui pourroit être
fiippléée par une plus fimple ; comme fi dans
le cas où il y, a lieu à la compenlation entre
deux perfonnes qui font refpedivement dé-
biteurs & créanciers l'un de l'autre , on com-
mençoit par condamner celui qui a été
adionné le premier , & par faire exécuter la
condamnation avant de faire droit fur la
demande incidente qu'il forme pour fa dé-
fenfe ^tandis qu'on peut par un feul & même
jugement ftatuer fur les demandes refpeélives
des deux parties. (H)
Circuit , {Hifi. mod. d'Angl. ) on en-
tend par ce mot , en Angleterre , les diyerlès
provinces où les juges vont rendre la jullice
au peuple deux fois par année.
C'efi vers fan 117^ que Henri II, ce
prince qui ne fut jamais raiTafié de biens ni
d'amour , & qui travailloit continuellement
à corrompre le beau fexe & à étendre fes
états , partagea l'Angleterre en fix parties
ou circuits y qui furent affignés à autant
de juges, pour y aller en certains temps
. tenir les i^h , c'efl-à-dire rendre la jufbee, ,
110 C I R.
au peuple. C'cft ce qui fe pratique encore
aujourd'hui.
Immédiatement après le terme de S. Hi-
laire & de la Trinité , le chancelier envoie
douze juges dans les diverfes provinces ou
circuits qui leur ont été affignés , pour y
rendre la juftice.-Ces douze juges vont aux
circuits deux à deux , d'où les aflifes qui ne
font tenues que deux fois l'an , font appellées
afjifes de carême & ajjifes de Vété. Voye\
mpin , Tindal , ^c. Art. de M. le cheva-
lier DE JaUCOURT.
CIRCULAIRE, adj. ( Géom. Aftron.
Navig. &c. ) fe dit en général de tout ce
qui appartient au cercle ou qui y a rapport:
ainfi on appelle mouvement circulaire , le
mouvement d'un corps dans la circonféren-
ce d'un cercle ; arc circulaire y un arc ou
portion de la circonférence d'un cercle. V.
Cercle , Arc , ^c
Les aftronomes modernes ont prouvé que
les corps céleiîes ne fe mouvoient pas d'un
mouvement cnculaire y mais elliptique. V.
Orbite , Planète , ^c.
Nombres circulaires : ce font ceux dont
les puiiTances finiflent par le caraftere même
qui marque la racine , comme cinq , dont
le quarré eft 2.5 , & le cube 125. Voye\
Nombre. Charniers.
Navigation circulaire : c'eft celle qui fe
fait dans un arc de grand cercle. V'oye\
Navigation.
La navigation circulaire eft la plus courte
de toutes ; & cependant il y a tant d'autres
avantages à naviguer fuivant les rhumbs ,
xju'on prékre généralement cette dernière.
Vqyei RhUMB.
Vitejpe circulaire y en agronomie , ligni-
fie la vîtefTe d'une planète ou d'un corps qui
tourne , laquelle fe mefure par un arc de
cercle ; par exemple par l'arc A B { tab.
afiron.fig. îo.) décrit du centre S , autour
xluquel le corps cft fuppofé tourner , de forte
que la vitefîe circulaire ert d'autant plus
grande, que l'arc AB parcouru dans un
temps donné par la planète , efl plus grand
ou contient un plus grand nombre de de-
grés ; ou ( ce qui eft encore plus exad ) que
l'angle AS B ti{ plus grand. Car comme
les planètes ne décrivent pas réellement des
cercles , elles ne parcourent pas , à propre-
ment parler , âiQs arcs de cercle tels que A Bp
C I H
mais elles parcourent ou décrivent les an-
gles AS B mefùrés par cqs arcs ; de forte
que leur vîtefïè circulaire pourroit fe nom-
mer avec plus de juftefle , vîtejfe angu-
laire. (O)
Lettre circulaire , efl une lettre adreffce
à plulieurs perfonnes qui ont intérêt dans
une même affaire , comme pour une convo-
cation d'afTemblée , Ùc.
* CIRCULATION , ï.ï. { Gram. ) fe
dit en général de tout mouvement pério-
dique ou non , qui ne fe fait point en ligne
droite : on dit que le fang circule y que Vef-
pece circule y &c.
Circulation du sang , ( Phyfwl. )
La circulation du fang eft un mouvement
naturel du fang dans un animal vivant , par
lequel cette humeur eft alternativement por-
tée du cœur à toutes les parties du corps
par les artères , & rapportée de ces mêmes
parties par les veines. Voye-{ Sang.
Le principal organe de cette fonélion vi-
tale efl le cœur , qui eil un mufcle creux aux
cavités duquel toutes les veines viennent
aboutir , & toutes les artères prennent leur
naifîance , & qui a en même temps une
adion de dilatation ou de diaftole , & de
contraction ou de liftole. Voye:^ C(EUR,
S1ST0LE & Diastole.
Or l'effet naturel de ce inouvement alter-
natif, c'eft que le cœur reçoive & chalîè le
fang alternativement : le fang chaiTé du ven-
tricule droit doit être porté par l'artère pul-
monaire qui en fort dans les poumons ,
d'où il doit être rapporté par les veines pul-
monaires à l'oreillette gauche , & de-là au
ventricule gauche : après y avoir été rap-
porté , il ell poulfé par la contradion de
ce ventricule , dans l'aorte qui le diftribue
dans tout le refle du corps , d'où il efl ra-
mené enfuite dans l'oreillette droite par la
veine-cave qui achevé la circulation. Voyei^
Vaisseaux pulmonaires , veine-
cave ù Aorte.
On a attribué généralement la décou-
verte de la circulation du fang à Harvey
médecin anglois , & on en place finven-
tion en 1628. Il y a cependant des auteurs
qui la lui difputent. Janflbn d'Almeloveen ,
dans un traite' des inventions nouvelles y im-
prime en t 684. y rapporte plufieurs endroits
d'Hippocrate , pour juftilier qu'il l'a connue.
Walleus ,
C I R -
"V^alleus , epifl. adBarth. prétend qu'elle n*a
pas été feulement connue d'Hippocrate, mais
encore de Platon & d'Ariftote. On dit en-
core que les médecins chinois i'enfeignoient
quatre cents ans avant qu'on en parlât en
Europe. Il en efl qui remontent jufqu'à Sa-
lomon , croyant en trouver des vertiges dans
le chap. xijde VEcclejiafi. Bernardin Genga,
dans un traité d'anat. en italien , rapporte
des paflages de Réaldus Columbus & d'An-
dré Céfalpin , par lefquels il prétend mon-
trer qu'ils admettoient la circulation long-
temps avant Harvey. Il ajoute que Fra-
Paolo Sarpi , ce fameux vénitien , ayant
exadement confidéré la ftruâure des valvules
dans les veines , a inféré dans ces derniers
temps la circulation , de leur conftrudion &
de plufieurs autres expériences. K. Aris-
TOTÉLisME , Valvule & Veine.
Léoniceus ajoute que Fra-Paolo n'ofa
point publier fa découverte de peur de l'in-
quifition , & qu'il communiqua feulement
ibn fecret à Aquapendente , qui après fa
mort mit le livre qu'il en avoit compofé
dans la bibliothèque de S. Marc , où il fut
long-temps caché , & que Aquapendente
découvrit ce (ecret à Harvey , qui étudioit
fous lui à Padoue , lequel le publia étant
de retour en Angleterre , pays de liberté ,
& s'en attribua la gloire : mais la plupart
de ces prétentions font autant de fables.
M. Georg. Ent a fait voir que le P. Paul reçut
la première notion qu'il avoit de la circu-
lation du fang y du livre que Harvey avoit
fait fur ce fujet^ lequel fut apporté à Ve-
nifc par l'ambafladeur d'Angleterre en cette
république , & montré par le même am-
bafladeur à Fra-Paolo ; que celui-ci en ayant
fait quelques extraits qui parvinrent après (à
mort entre les mains de fes héritiers , cela
fit croire à plufieurs perfonnes que la décou-
verte dont on trouvoit hifloire dans fes pa-
piers lui appartenoit. V. Douglas , bibliogr.
anat. fpec. p. zzj^ e'dit. z 754,- fi? le traité
du coeur, de M. Senac. V. AnatomiE.
La circulation du fang fe prouve par les
obfervations fuivantes. i**. Si l'on ouvre une
des granules artères d'un animal vivant , tout
le fang s'en va bientôt , & avec beaucoup
de force , par la blefTure , comme on le voit
aux boucheries, Ùc. il s'enfuit de-là que le
Ung a un paffage de chaque partie du corps
Tome VIII.
C I R. m
animal dans chaque artère; & que fi tou:e
la maffe du fang fe meut dans cette occa-
fion , il faut évidemment qu'elle fe mût aufïï
auparavant.
2". La grande quantité de fang que le
cœur poufîè dans les artères à chaque pul-
fàtion ; puifque fans cela il faudroit fuppo-
fer dans le corps de l'homme une beaucoup
plus grande quantité de fang qu'aucune
obfèrvation ou aucune expérience n'y en fait
voir. V. Sang.
3**. Telle artère qu'on .voudra étant liée
avec un fil , s'enfle & bat entre la ligature
& le cœur ; mais elle s'applatit & devient
fîafque entre la ligature & les extrémités du
corps.
Si l'on coupe enfuite l'artère entre la hga-
ture & le cœur , le fang s'en va jufqu'à la
mort ; fi on la coupe entre la ligature & les
extrémités du corps, elle ne rendialors qu'une
très-petite quantité de fang.
Le fang vital coule donc dans les artères ,
& la diredion de fon cours efl du cœur aux
extrémités du corps : ce cours a lieu dans
tous les points des corps internes ou externes,
& il va toujours de vaifîêaux plus grands à
de plus petits , du tronc aux branches.
V. Artère.
Si on lie avec un fil une des grofTes vei-
nes , elle s'enflera entre les extrémités du
corps & la ligature , mais fans battre , &
elle s'aflàifîera & deviendra flalgue entre la
ligature & le cœur : fi on l'oiifre dans le
premier endroit , elle donnera du fang juP
qu'à la mort , & dans le fécond , à peine
fliignera-t-elle. Le fang coule donc vive-
ment de chaque partie du corps dans cette
veine , & la diredion de fon cours tend des
extrémités du corps vers le cœur , des plus
petits^aifTeaux aux plus grands , des bran-
ches au tronc. V. Veine.
De tout cela il fuit évidemment que tou-
tes les artères du corps portent continuel-
lement le fang du ventricule gauche du cœur
par le tronc des artères dans les branches ^
de CCS mêmes artères & par ces branches
dans toutes les parties du corps intérieures
ou extérieures ; & qu'au contraire toutes leS'
veines , excepté la veine-porte , rapportent
continuellement le fang des plus petites par-
ties du corps dans les plus petites branches ,
pour pafîer enfuite dans de plus grandes ^
Q
122 C I R
puis dans les troncs , puis dans la veine-
cave , & enfuire par le finus veineux ou le
tronc de cette veine , qui finit à la cavité
de i'orcillette droite , dans le cœur.
Lorique le lang y eft arrivé, voici comme
fa circulation fe continue.
Les oreillettes du cœur étant des mufcles
creux , gaj-nis d'un double rang de fibres
qui vont en fens contraire à deux tendons
oppofés , dont l'un eft adhérent au ventricule
droit & l'autre au finus veineux , ainfi que
d'un nombre infini de veines & d'artères ; la
force de contradion de ces oreillettes pouffe
èç chafle vivement le fang dans le ventricule
droit , qui eft dii'pofé à le recevoir , & le
remplit. V. C<SUR.
Or fi le ventricule droit rempli en cette
manière de fàng , eft prefle de nouveau par
la contradion de {ts fibres , le fang faifant
effort contre les parois élèvera les valvules
tricufpidales , qui font tellement liées aux
colonnes charnues , qu'elles permettent le
pnffage du fang de l'oreillette au ventricule ,
& en empêchent le retour de ce ventricule
à cette même oreillette : le fang les élèvera
donc vers l'oreillette droite , julqu'à ce que
s'y étant joihtes elles ferment parfaitement
le paffage du fang , & empêchent qu'il ne
revienne dans l'oreillette ; par conféquent le
fang fera pouffé dans l'artère pulmonaire ,
& pretfera les valvules femi-lunaires qui font
placées à fprigine de cette artère , & les
appliquera cbntre (ts parois , en forte qu'elles
ne s'oppoferont pas à fon pafîage.
Àinfi le fang veineux , c'efl-à-dire le
fang de tout le corps , efl porté du finus
ou du tronc de la veine-cave par l'oreil-
lette droite dans le: ventricule droit , d'où
il efl: porté dans l'artère pulmonaire par
un cours continuel , & dont il ne fauroit
s'écarter.
Le fang porté par cette artère dans les
poumons , & difiribué dans fes branches
dans toute l'étendue de leur fubflance , efl
d'abord reçu dans les extrémités de la veine
pulmonaire, qui s'appelle artère veineufe y
d'où paîTant dans quatre grands vaifîeaux
qui aboutiffènt à un même point , il efl porté
au finus veineux gauche ou au tronc At&
veines pulmonaires , qui par fa firuéïure
mufcileufe efl capable de le chafîêr , & le
chaffe en elièt dans le ventricule gauche ,
C I R
lequel fe trouve alors relâché , & par con-
féquent difpofé à le recevoir ; d'autant que
les valvules mitrales fituées entre le ventricule
gauche & l'oreillette du même côté , laiffent
au fang un paffage libre de l'oreillette au ven-
tricule , & l'empêchent de refluer dans cette
oreillette. Le fang pouffé par le ventricule
gauche paffe donc de ce ventricule dans
l'aorte , à l'orifice de laquelle fe trouvent
trois valvules femi-lunaires , fituées de façon
que le fang ne puiffe refluer de cette artère
dans le ventricule.
Voilà comme fe fait la circulation ; tout
le fang efl envoyé dans les poumons , & reçu
enfuite dans le finus veineux , l'oreillette gau-
che & le ventricule gauche , d'où il efl en-
fuite pouffé continuellement dans l'aorte ,
qui au moyen de ^ts ramifications le répand
avec force dans toutes les parties du corps.
Ce mouvement efl accompagûé dans les
animaux vivans des phénomènes ou circonf^
tances fuivantes. i°. Les deux finus veineux
font remplis & fe gonflent en même temps
l'un & l'autre : 2». les deux oreillettes s'af-
faifîênt & fe remplilfent en même temps du
fang que la force contraâive du finus vei-
neux mufculaire correfpondant y poufl'e ;
3''. chaque ventricule fe contracte & fè vuide
de fang dans un même temps ^ & les deux
grofîes artères fe remplilfent & fè dilatent
auffi en même temps : 4^*. auffi - tôt que le
fang a été chaffé par cette contradion , les
deux ventricules étant vuides , le cœur de-
vient plus long & plus large , & par confé-
quent plus flafque & d'une plus grande capa-
cité : 5"' ^es fibres mufculaires des deux
finus veineux fe remplifîènt alors , & expri-
ment le fang qu'elles contiennent dans les
ventricules du cœur : 6°. les finus veineux
fe, remplilfent en même temps de nouveau
comme ci-defîus , & les oreillettes revien-»
nent en leur premier état : 7®. ces chaage-
mens alternatifs continuent jufqu'à ce que
l'animal commence à languir à l'approche
de la mort , temps auquel les oreillettes & le
finus veineux font plufieurs palpitations pour
une contraâion du ventricule. C'e^ ainlî
que le fang dans fon cours de chaque point
tant interne qu'externe du corps , efl pouffé
par chaque point du cœur & de fes oreillet-
tes dans le ventricule droit , de-là dans les
poumons , puis dans le ventricule gauche ,
C I R
& enfin dans toute l'érendue du CQJ"ps , d'où
il revient enfuite au cœur.
Quant à la manière dont le fang pafle des
artères dans hs veines pour pouvoir revenir
au cœur , il y a là-defîùs deux fenrimens.
Suivant le premier , les veines & les artè-
res font fupporées s'ouvrir les unes dans les
autres , ou être continues au moyen d'anaf-
Tomoles ou inofculations de leurs extrémités.
Foyq Anastomose.
L'autre fuppofe que les dernières artères
capillaires dépofent le fàng dans les pores de
la fubjftance de leur partie , où une portion
s'emploie à leur nourriture, & le relie efl reçu
dans [qs bouches des veines capillaires.
On doit reconnoître que ie palTage du (kng
des artères capillaires dans les veines capil-
laires , fe fait de Tune & l'autre de ces deux
manières: en effet on voit dans quelques-uns
des grands vaifleaux des anallomofes dont
on ne fauroit douter , par exemple , celle
de l'artère de la rate avec la veine du même
vifcere ; ce qui a fait conclure à plulieurs
auteurs que la même ftruâure avoit lieu dans
de plus petits vaifîèaux , même dans les plus
petits filets des extrémités du corps , où
cependant l'œil ne le découvre point.
La féconde opinion efl: fondée fur ce que
fl une portion du fang ne fe perdoit pas dans
la fubflance des parties , ces parties ne pour-
roient pas s'en nourrir ; car tant que le fang
efl dans les vaiffeaux, il porte à la vérité de
la chaleur dans les parties où ces vailleaux
pafTent , mais non la nourriture ; les vaif-
feaux eux-mêmes ne tirant pas leur nourri-
ture du fang qui palfe dans leur cavité , mais
des vaifîèaux qui compofent leur propre
fiibflance.
Leuwenhoek fembloit avoit mis cette opi-
nion hors de doute au moyen de Ces raicrof -
copes , qui lui ont découvert des inofcula-
tions ou des continuations des extrémités des
veines & des artères dans les poifîbns , dans
les grenouilles ^ &c. mais il y a des auteurs
qui doutent toujours qu'il y ait une pareille
inofculation entre les extrémités des veines
& des artères du corps huma.n , & de ceux
des quadrupèdes ; les animaux où on l'a juf-
qu'ici obfervée étant ou des poifîbns ou des
animaux amphibies , qui n'ont qu'un ven-
tricule dai^s le cœur , & dont le fang cfî
troid ; à quoi il faut ajouter que dans cette
C I R iî5
elpece d'animaux le fang ne peut circuler
avec la même rapidité que dans ceux qui ont
deux ventricules.
Cette différence dans les organes de la
circulation a donné occalion à M. Cowper
de faire des expériences -lur d'autres ani-
maux , dont les parties ont la même flruc-
ture que celles de l'homme : il a vu dans
Vomemiun d'un chat le fàng fe mouvoir vive-
ment à travers les inofculations, & il a trouvé
la même chofe dans Vomentum , & mieux
encore dans le méfentered'un chien. Il ajoure
que la diminution des diamètres des extrémi-
tés des vaifîèaux ne fuit pas les mêmes pro-
portions dans difïerens animaux.
Il a fouvent obfervé dans la queue d'un
têtard , entre les veines & les artères, plu-
lieurs communications , à travers chacune
delquelles deux globules pouvoient pafîer de
front. Dans de jeunes poifîbns , & en parti-
culier dans les petites anguilles , la branche
communicante efl li petite , qu'un globule
de fang y peut à peine pafïèr en une féconde
de temps.
Il refleroit ici bien des queflions à exa-
miner fur les valvules des veines , la diflri-
bution d^s vaifîèaux lymphatiques , la vîtefîè
du fang , fa circulation dans le toie & dans
quelques autres vifceres ; mais nous ren-
voyons tout cela aux mots VeINE , AR-
TERE , Sang , Foie , &c.
Les ifarties qui fervent à la circulation ne
font pas tout-à-fait les mêmes dans le'fœtus
que celles que nous venons de décrire ; la
cloifonqui fépare les deux oreillettes du cœur
efl pei'cée d'un trou qu'on appelle le trou
ovale ; le tronc de l'aroere pulmonaire , peu
après qu'elle efl fortie du cœur , jette dans
i'aorte defcendante un canal que l'on appelle
canal de communication ; le fœtus étant ne ,
le trou ovale fè ferme peu - à - peu , & le
canal de communication fe delîèche , &
devient un fimple ligament. Voye\ TroU
ovale, Ùc.
Ce méchanifme une fois connu , il efl aifé
d'en appercevoir les ufages \ car tandis que
le fœtus efl enfermé dans le fèin de fa merc ,, .
i\s poumons ne peuvent s'enfler &: fc defen- ,
fler comme ils feront après fà naifîance , & .
après l'entrée libre de l'air : ils demeurent
donc prefque afîàifîes & fans mouvement;
car leurs vaifîèaux font comme repliés ea -
114 C I R
eux-mêmes , & ne permettent pas que le fang
y circule ni en abondance ni avec facilité.
La nature a donc dû épargner aux poumons
le palïàge de la plus grande partie de la
mafle du fang : pour cela elle a percé le trou
ovale , afin qu'une partie du fang de la veine
cave reçu dans l'oreillette droite , pafsât dans
l'oreillette gauche , & par-là fe trouvât, pour
ainfi dire , auffi avancée que 11 elle avoit tra-
verfé le poumon.
Ce n'ell pas tout : car le fang de la veine
cave qui de l'oreillette droite tombe dans le
ventricule droit , étant en trop grande quan-
tité pour aller dans le poumon où il ell poufle
par l'artère pulmonaire , le canal de com-
munication en intercepte une partie en che-
min , & le verfe immédiatement dans l'aorte
defcendante. Kqyq FCETUS , &c.
Tel eft le fentiment de Harvey, de Lower,
& de plufieurs autres anatomilles : mais M.
Mery , de l'académie royale des fciences , y
a fait une innovation.
Il donne un autre ufage au trou ovale ,
& il foutient que de toute la mafîê du fang
qui efl portée par la veine cave au ventri-
cule droit , une partie paflè comme dans les
adultes dans l'artère pulmonaire , d'où une
partie ed: enfuit e portée par le canal de com-
munication dans l'aorte defcendante , fans
circuler par le poumon , & la partie qui
traverfc le poumon revient enfui te dans
l'oreillette gauche, fe partage encore en deux;
dont l'une pafle par le trou ovale dans le
ventricule droit, fans avoir circulé par l'aorte
& par tout le corps ; l'autre efl poulîée à
Fordinaire par la contradioii du ventricule
gauche dans l'aorte , & dans tout le corps
du fœtus.
Toute la queftion fè réduit donc à favoir
fi le fang qui paiTe par le trou ovale , paflè
du côté droit du cœur dans le gauche, félon
l'opinion commune , ou du gauche dans le
droit , félon M. Mery.
M. Duverney s'étoit déclaré pour l'ancien
fyftême ; il foutenoit qu'au trou ovale il y
avoit une valvule difpolée de façon à s'ou-
vrir lorfque le fang eft chafle dans le ventri-
cule droit , & A fe former exadement lorf-
qu'il eft poufle dans le gauche : mais M.
Mery nie l'exiftence d'une pareille valvule.
De pîu> , da.i3 l'adulte l'aorte devant rece-
voir tout^k fang de la veiae pulmonaire ,,
C I R
fe trouve de même grolTeur que celle-ci ;
mais dans le fœtus l'artère pulmonaire &
l'aorte rccevoient des quantités inégales de
fang dans les deux fyftêmes.
Selon l'opinion ordinaire , l'aorte qui re-
çoit plus de fang que la pulmonaire , devroit
être la plus grofle des deux ; fuivant le fen'i-
ment de M. Mery , l'aorte pulmonaire doit
être au contraire la plus grande des deux ,
parce qu'il penfe qu'elle doit recevoir une plus
grande quantité de fang.
Pour juger lequel des deux fyftêmes eft le
vrai , il n'y a donc qu'à voir lequel de ces
deux vaifîeaux , l'aorte ou l'artère pulmo-
naire , a le plus de capacité dans le fœtus.
M. Mery trouva toujours que le tronc de
l'artère pulmonaire étoit environ moitié plus
gros que celui de l'aorte.
Et d'un autre cote M. Tauvry , élevé de
M. Duverney , fit voir deux fujets dans lel^
quels l'artère pulmonaire étoit moindre que
l'aorte , & les faits fiarent examinés des deux
côtés par l'académie.
M. Tauvry ajoute que quoique l'artère
pulmonaire foit plus groflè que l'aorte , cela
ne prouve pas péanmoins qu'il pafle plus de
fang dans la première que dans la féconde
de ces artères , puifqu'on peut attribuer cette
ftrudure à la preflion du fang qui eft plus
forte vers les poumons , qu'il a de la peine
à pénétrer , & qui par cette raifon diftend
les parois de cette artère , & l'élargit très-
facilement.
M. Littre en diflequant un adulte dans
lequel le trou ovale étoit toujours ouvert, &
mefurant les capacités des vaifl!eaux de cha-
que côté , fe déclara pour M. Mery. Ainfi
la queftion eft fort indécife.
Quant à la caufe de la circulation du fang
dans le fœtus , les anatomiftes font encore
divifés là-deflus. L'opinion commune eft
que pendant la grofl^fTe les artères de la
matrice verfent leur fang dans le placenta ,
qui s'en nourrit ; le furpluy de ce fang
entre dans" les racines de la veine ombili-
cale , qui fait partie du cordon ; de-là il
eft porté au foie du fœtus dans le tronc de la-
veine-porte , d'où il pafte dans la veine-cave'
& dans le ventricule droit du cœur ^ & fe'
diftribue comme ci-deflus. De plus , le fang
qui fort des artères iliaques du fœ'ras entr«
dans le cordon par les artei-es ombilicales j.
C I R
(îe-là dans le placenta, où il efl repris par
les veines de la matrice qui le reportent à la
mère , & peut-être aufli par les racines de
la veine ombilicale , qui le remêlent avec
de nouveau lang de la mère. Selon ce fyi~
terne , c'eft uniquement le fang de la mère
qui nourrit le fœtus , qui n'elt ici regardé
que comme un membre particulier de la
mère : le battement de Ton cœur lui envoie
une portion de fon fang , qui conferve le
degré d'impulfion qu'il faut pour entretenir
cette circulation languiflante dont le fœtus
jouit , & qui lui donne probablement cette
foible pulfation qu'on obferve dans le cœur.
D'autres anatomiftes prétendent que le
fœtus ne fe nourrit que du chyle qui lui eft
fourni par les glandes de la matrice , qui eft
encore plus travaillé , fe change en fang dans
les vaifleaux du fœtus , & y circule fans
autre communication avec la mère ; ils
n'admettent de circulation réciproque qu'en-
tre le placenta & le fœtus.
Mais la première opinion paroît la plus
plaufible ; car quand le placenta fe détache
de la matrice , en quelque temps que ce fbit
de la grolîelîe , il ne fort que du fang , &c
jamais de chyle. Outre que M. Mery a mon-
tré que la matrice n'a point du tout de glan-
des pour en fournir , deux autres obferva-
tions de M. Mery , rapportées au même en-
droit, appuient encore le fyftême commun.
La furface intérieure de la matrice eft revê-
tue de veines ; d'ailleurs la furface externe du
placenta n'eft revêtue d'aucune membrane ;
& comme c'eft par ces deux furfaces que le
placenta & la matrice font en quelque forte
collés enfemble , ilparoît qu'elles ne l'ont fans
membranes que pour une communication
immédiate des vaiffeaux fanguins.
Ajoutez à cela un tait dont M. Mery a
été témoin oculaire. Une femme groflê qui
touchoit à fon terme , fe tue d'une chute
très-rude prefque fur le champ. On lui trouve
fept à huit pintes de fang dans la cavité du
ventre , & tous les vaiiTcaux languins entiè-
rement épuifés. Son enfant étoit mort , mais
fans aucune apparence de bleiîure , & tous
fes vaifleaux étoient vuides de fang aufli
bien que ceux de la mère. Le corps du pla-
centa étoit encore attaché à toute la furface
intérieure de la matrice , où il n'y avoir au-
cun fang extravafé. Par quelle route tout le
C I R ,1^
fang de l'enfant pouvoit-il s^être vuidé dans
la cavité du ventre de la mère ? Il falloît
néceiîairement que ce fût par les veines de la
matrice , & par conféquent ces veines rap-
portent à la mère le làng de l'enfant ; ce
qui feul établit la néceflltc de tout le refte
du fyftême commun. Si la circulation ne fe
faifoit que du fœtus au placenta , & non pas
auiC à la mère , l'enfant mort auroit eu tout
fon fang.
Déplus, le fang des poumons du fœtus
ne jouit d'aucun des avantages de l'air ou de
la refpiration ; ce qui lui étant cependant
néceflTaire , la nature prend fans doute foin
qu'il en reçoive quelques portions mêlées
avec tout le fang de fa mère , lefquelles lui
font tranfrnifes par les vaifleaux ombilicaux
pour fe répandre dans fon corps.
Ce qui confirme cette conjedure, c'eft
que fi le cordon ombilical éft trop ferré ,
l'enfant meurt comme un homme étranglé
ce qu'il paroît qu'on ne peut attribuer à d'au-
tres caufes qu'à la privation de l'air ; joignant
fur-tout à cela qu'auffi-tôt que la mère cefl^
de refpirer , le fœtus expire.
Quant à la vîtefl^ du fang qui circule , &
au temps que demiande une circulation , on
afaitlà-deflùs plufieurs calculs. Selon le doc-
teur Keil , le lang eft chafîe du cœur avec
une vîtefle capable de lui faire parcourir cin-
quante-deux pies par minute ; mais cette
vîtefle eft toujours diminuée à travers toutes
les nombrélifes divifions ou branches des
artères, de façon qu'elle l'eft infiniment avant
que le fang arrive aux extrérnités du corps.
Le même auteur , d'après un rapport qu'il
calcule des branches des artères à leur, tronc,
prétend que la plus grande vîtefl"e du fang,
eft à la plus petite dans une proportion plus
grande que looco, 00000,00000,00000
00000, 00000, 00000, OOGOO à I.
L'efpace de temps dans lequel route k'
maflr du fang fait ordinairement fa circula^
tion y fe détermine de différentes manières..
Quelquefois des auteurs modernes s'y pren-
nent pour cela de cette forte ; ils fuppofenc
que le cœur fafle 2oco pulfations par heure ,,
& qu'à chaque pulfation il chaflé une once
de fang ; comme la raafle totale du fang n'eft:"
pas ordinairement eftimée à plus de vingt-
quatre livres , ils en concluent qu'il fait fepc:
à huit circulations par heure. Vo^c^Skiîlg*'.
ii6 C I R
Vqyei le traité du cœur , <1e M. Senac , où
tous les calculs font analyfës & appréciés.
On doit eonlulter le même traité , pour
prendre une idée de la néccflité & des ulàges
de la circulation pour la vie , de ceux que ià
connoifTançe nous fournit pour le diagnoflic
& le traitement des maladies , & de l'avan-
tage qu'elle donne aux médecins modernes
fur \&s anciens. {L)
JJousnous contenteronsd'ajonterici, que
pcrlbnne n'a encore mieux décric & mieux
prouvé la circulation que Harvey lui-même ;
Ion traire efi: un chef-d'œuvre. Il ne faut
cependant point oublier qu'on tire un argu-
ment invincible en faveur de la circulation ,
de ce qu'on a dit depuis Harvey , fur la tranl-
fufion; j'. Transfusion ^Injection,
Ê'/a$-7;zofj- Pouls & Inflammation; où
bien des quellions qui ont un rapport fingu-
lier avec la circulation , font examinées.
Nous n'avons prétendii en faire ici qu'une
expolition fimple , qui peut luffire à ceux
qui n'en ont point d'idée; les queftions qu'on
peut propofer à l'égard de ccitQ fondion ,
tiennent ;\ toute la médecine , qu'il auroir
fallu parcourir dans toutes {qs parties pour les
examiner ; ce qui nous auroit mené trop loin.
M. le baron de Haller acru devoir ajouter
â cet article quelques ohfervations fur la cir-
culation qui a lieu dans le cœur du fœtus, £'
fur la circulation de la mère au fœtus.
Le fœtus n'a , dans les premiers mois de
fori exiftence, qu'une oreillette ,c'efl la gau-
che ; la droite eft alors très-petite , le iàng
pafîé avec trop -de facilité par le trou ovale ,
qui eft extrêmejnent ouvert à cet âge.
Cette obfervation fuffit pour décider la
famcufe queftion quia partagé l'académie. Si
l'oreillette droite eft extrêmement petite dans
les premiers temps du fœtus , le fang de la
veine-cave n'y refte donc pas; s'il s'y arrêtoit,
il dilateroit proportionnellement cette oreil-
lette: à cet âge, il efi donc évident que le (àng
pafle de droite à gauche ; pour qu'il renveriât
fa diredion, & qu'il allât de gauche à droite,
il faudroit que M, Mery fût trouver une rai-
fon qui caulât une révolution aufll éton-
nante , & il léroit impoflible de la trouver ,
le poumon refiant compare & oppofant au
fâng la même réfiilanQe pendant tout le
temps de la grolîêfïè , & ne devenant plus
açceffible au i'ang que par la refpiration.
C I R
II y a plus ; de nouvelles recherches ont
démontré que le ventricule droit elt invilible
& par conféquent très-petit pendant près
d'un tiers de l'incubation : le fang de la veine
cave ne s'y porte donc pas , & l'oreillette &
le ventricule gauche ne recevroient point de
lang du tout , s'il n'en pafïoit par le trou
ovale depuis iDreillette droite : le poumon
pendant tout ce temps ell invifible & ne
reçoit que des vaifTeaux invifibles comme lui.
Il relie à trouver une réponfe à la feule
objedion valable quefaifoit M. Mery. Dans
k fœtus adulte & parfait, l'artère pulmonaire
efi plus grande que l'aorte au fortir du cœur ;
elle reçoit donc plus de fang: or fi le fang
de l'oreillette droite pafîbit par le trou ovale
à l'oreillette gauche , le ventricule gauche
recevroit plus de fang, & le calibre de l'aorte
(èroit plus grand ; s'il efi plus petit , c'eft
parce que l'oreillette gauche renvoie une
partie de fon fang à la droite ; le ventricule
gauche en reçoit d'autant moins de fang ,
& l'aorte efi nécefîairement d'un plus petit
diamètre.
On a voulu répondre à cette objeâ;ion ,
en niant le fait & en avançant que l'aorte eft
plus fimple que l'artère pulmonaire dans le
fœtus prêt à naître.
On ne devoit pas nier un fait avéré , &
qui d'ailleurs concourt à établir l'opinion
reçue: dans le fœtus prêt à naître, l'oreillette
droite & le ventricule de ce côté efi déve-
loppé ; il efi pour le moins aufîi grand que
celui du coté gauche; mais le fang que reçoit
le ventricule droit , ne parvient qu'en partie
à l'aorte , l'artère pulmonaire donne à la
vérité des branches au poumon ; le fang que
Qcs branches y portent paiTe par le poumon ,
& revient au ventricule gauche , mais ce
fang n'efl pas la moitié de celui que l'orifice
de l'autre pulmonaire a reçu; fon tronc qui ,
fous le nom àt conduit artériel , s'ouvre dans
l'aorte fous la grande arcade , efi plus -grand
que les deux artères qui vont au poumon : fà
lumière efi à la fomme des lumières de ces
deux branches , comme 184.9 '^ ^34^ •
l'aorte ne doit donc pas être plus grande quç
dans l'adulte , puiiqu'elle ne reçoit qu'une
partie du fang de l'artère pulmonaire , & que
dans l'adulte , elle reçoit ce fang eii entier.
Mais l'aorte reçoit cependant le fang qui
pafic par Iç trou ovalç , ôc dans l'adulte , il
C I R
ne le reçoit pas : cette objeiJlion n'cft d'au-
cun poicls. Dans l'adulte , tout le làng de
l'oreillette & du ventricule droit , pafîe à
Taorte : il elt indifférent pour le calcul de la
lumière de cette artère , q»e ce fang y vienne
par le poumon ou par le trou ovale.
Pour le fœtus toute la quellion fe réduit à
des mefures : fi le trou ovale eil: aulli grand
que le conduit artériel, l'aorte doit être égale à
l'artère pulmonaire : celle-ci perd la quantité
qui paflè par le trou ovale , & l'aorte perd la
quantité qui pafî'e par le conduit artériel ; or
ces quantités font égales.
Mais fi le conduit artériel eu plus ample
que le trou ovale , l'aorte doit être plus petite
que l'artère pulmonaire : l'aorte gagne à la
vérité fur fartere pulmonaire le fang qui
pafle par le trou ovale , mais elle perd une
quantité plus confidérable , qui palfe par le
conduit artériel : or le conSuit artériel eit
beaucoup plus ample que ne l'efH'ouverture
du trou ovale , il la furpafle dans la propor-
tion de 525 à 249.
La (uite nécefîaire de cette différence entre
les gains de faorte & (es pertes , c'efi: qu'elle
doit être plus petite que l'artère pulmonaire.
Circulation delamere aufœtus.Ced
une des quelHons les plus difficiles de la phy-
fiologie , il efl vrai qu'en gros cette circula-
tion efl démontrée: le fœtus qui va naître eu à
celui qui vient d'être conçu comme dix livres
à une très-petite partie d'un grain : tout ce
que le fœtus pefe de plus , il l'a reçu de fa
mère , & n'a pu le recevoir que d'elle.
Mais la difficulté eft de connoître les routes
par lefquelles cette nourriture parvient de
l'uférus au fœtus : comme le placenta & le
chorion touchent feuls l'utérus , c'eft par
Fune de ces parties , ou par l'une & l'autre,
que l'aliment doit venir de la mère au fœtus.
La matière fluide injedée dans l'utérus,
paffe certainement dans le placenta ; elle a
pafîe , quoique rarement , jufques dans le
fœtus : les artères de l'utérus & de fa mem-
brane intérieure , attachée au placenta , s*ou-
vrent dans cette partie de Târriere-fai-x ; elles
nagent dans le fang ; des veines du placenta
y pompent ce fang épanché ; d'autres veines
qui appartiennent à l'utérus, y reprennent
une partie du fang des cellules.
Il y a deux circulations dans l'utérus &
deux dans le placenta ; les artères de l'utàus
C I R 127
communiquent avec fes veines , mais d'au-
tres de ces artères communiquent avec le
placenta , en dépofant leur fang dans fes.
cellules , & d'autres veines de l'utérus
repompent une partie du fang de ces mêmes
cellules.
Dans le placenta , les branches des artères
ombilicales communiquent avec les vemes
du même nom , & des veines du placenta
repompent le fing de la mère, que les artères
de l'utérus ont dépofé dans les cellules du
placenta.
Il y a tout lieu de croire , malgré les ob-
jedions de quelques modernes, que cette cir-
culation de la mère au fœtus , & du fœtus à
la mère, fait paiî'er de l'un des deux à l'autre,
du véritable fang.
Non-feulement le fing coule en abon-
dance , quand le fœtus & le placenta fe dé-
tachent de l'utérus; mais on a vu, & plu-
' fleurs fois , le fœtus perdre tout fon fang par
les hémorrhagies de la mère, & la mère per-
dre le ficn , quand le placenta efl relié dans
l'utérus, &; qu'on a négligé de lier le cordon.
Il ne paroît pas qu'on puifîc expliquer autre-
ment la vie des fœtus , afîez nombreux , qui
ont crû & qui font parvenus à leur maturité ,
làns avoir de cœur: cet accroiflement fuppofe
un moteur que l'on ne peut trouver que dans
la mère.
Un autre chemin par lequel le fang de la
mère communique avec le fœtus , c'eft le
chorion : la membrane interne de l'utérus ,.
remplie de vailfeaux rouges , s'unit au cho-
rion , & Ces vailïêaux communiquent avec
ceux du chorion.
Circulation, fe dit en parlantd^ la
fève. Foyq SevE Ù VÉGÉTATION.
Circulation ^ {Chym.) La circulation
eff une opération chymique qui^ confifte à
appliquer un feu convenable à des matières-
enfermées dans des vaiffeaux difpofés de.
façon que les vapeurs qui s'élèvent de la ma-
tière traitée , foient continuellement conden-
Çées , & reportées fur la maiîc d'où elles ont
été détachées.
Les vaiffeaux defîinés à cette opération,
font les cucurbites & les matras de rencon-
tre , les jumeaux & le pélican. Voye-{ ces
articles particuliers.
Les ufages de la circulation font les mêmes
que ceux de la digejftion , dont la circulation
iiS C I R.
n'efl: proprement qu'un degré, t^qyei DIGES-
TION ; & fa théorie efl la mcme que celle de
la diflillation. Voyei DISTILLATION. (/?)
ClRCVLATlO^ yCnG^ome'trie.L. P. Gul-
din , jéfuite , appelle l'oie de circulation la
ligne droite ou courbe que décrit le centre
de gravité d'une ligne ou d'une furface , qui
par Ton mouvement produit une furface ou
un folide. Voye^ à V article CenTROBARI-
QUE l'ufage de la voie de circulation pour
déterminer les furfaces & les folides , tant
curvilignes que redilignes. Cette méthode
fort ingénieufe en elle-même, n'efl prefque
plus d'ufage depuis la découverte du calcul
intégral , qui fournit des méthodes plus aifées
pour réfoudre tous les problêmes de cette
efpece. V. Centre de gravité. (O)
CIRCULATOIRE , {chym?) ed le vaif-
feau où on met le fluide auquel on veut faire
fouiîj-ir l'opération de la circulation. Voye:^
Circulation. Il y a deuxefpecesdear-
culatoires , favoir le pélican & les jumeaux ,
qui font deux vaifl'eaux qui n'ont chacun
qu'une ouverture, par laquelle ils fe com-
muniquent. Des vailfeaux de rencontre font
circulatoires: des vaifleaux de rencontre font
par exemple deux matras , dans l'un defquels
eft la liqueur qu'on veut faire circuler , &
l'autre matras efl renverfé , de façon que fon
bec entre dans celui d'en bas, qui eît pofé
dans le bain de fable. V. PÉLICAN. {M)
CIRCULER , V. n. fe dit proprement
<îu mouvement d'un corps ou d'un point qui
décrit un cercle ; mais on a appliqué ce mot
au mouvement des corps qui décrivent des
courbes non circulaires; par exemple au mou-
vement des planètes , qui ne décrivent point
autour du folell des cercles, mais des ellip-
(qs. Fbjfi^ Plan ETE. On l'a appliqué aufiî
au mouvement du fang , par lequel ce fluide
efl porté du cœur aux artères , & revient au
cœur par les veines. Fbj'f:{ CIRCULATION
Ê? Circuler (C/zy/;zz>.) En général ce mot
circuler peut s'appliquer par analogie au mou-
vement d'un corps , qui fans fortir d'un cer-
tain efpace , fait dans cet efpace un chemin
quelconque , en revenant de temps en temps
au même point d'où il efl parti. (O)
C I R
Circuler, {Chymie.) y. ^et. il fe dit en
chymie , du mouvement des vapeurs d'une
matière tenue fur un feu doux , & enfer-
mée dans .des vailîèaux fermés , de forte
que les vapeurs qu* s'élèvent foient obhgées
d'y revenir , ne trouvant point d'ifllie ; & le
feu continuant d'agir , de s'élever de nou-
veau , & de revenir encore , & ainfi de fuite.
V. Circulation 6" Circulatoire..
[Chymie^
CIRCUMAMBIANT, adj. {Phyfique.)
eik la même chofè c^ environnant : c'elî une
épitliete (peu en ufage) qui fe dit d'une chofe
qui en entoure une autre. V. AMBIANT.
Nous difons Vair ambiant ou circum^
ambiant. Fbj'f;^ AiR, ATMOSPHERE, d'c.
Ce mot eft formé des mots latins ambio ,
j'entoure, & circiim , autour. (O)
CIRCUM-INCESSION , {.l terme de
Théologie , par lequel les fcholafliques expri-
ment l'exiflence intime & mumelle des per-
fonnes divines, l'une en l'autre, dans le myf-
tere de la Trinité. Voye^ PERSONNE.
Les théologiens de l'églife latine ne font
pas les premiers inventeurs de cette exprcf-
fion , S. Jean Damafcene qui vivoit dans le
viij^fiecle, s'étant fervi du mot Têfocupej-zf ,
qui fignifîe précifément la même chofe ,
pour expliquer ces paroles , ego in pâtre , &
pater in me eft. Joann. c. xiv.
Cette circum-incejjlon des perfonncs divi-
nes vient de l'unité de leur nature , qui a fait
dire à Jefus-Chrifl: ego épater unum fumus.
Quelques théologiens diflinguent deux fortes
de circum-incejjions , l'une parfaite & l'autre
imparfaite. La première efl celle par laquelle
deux choies exiflent inféparablement , de
telle manière que l'une n'efl nulle part hors
de l'autre. La féconde efl -celle où de ces
deux chofes co-exiflantes , l'une a cepen-
dant une exiflence plus étendue que l'autre.
Telle eft la circum-incejjion que quelques
pères & théologiens admettent entre la nature
divine & la nature humaine dans Jefus-
(vhrifl. Vuitajf. de Triait, part. Il , quœfi,
l'iij , art. iv. (G)
CIRE , f. f. {Hifi. nat.) (a) matière tirée
des végétaux , & élaborée dans le corps
(a) De quelque poids que doivent être , en fait d'hiftoire naturelle , l'autorité de M. de Reaumur,
tour<»c qu'il a dit fur l'origine de la cire eft regardé comme erroné par divers auteurs, qui oppofent
aux obfcrvations alléguées par M. de Reaumur des difficultés & des obfervarions coiuraires. D'aboid
«n a peine à concevoir comment la cire cjyi\ , félon iui, fe façonne dans le ffcond eftomac , peut en
V d'un
C I R
d'un animal. Les abeilles transforment en
cire les pouflieres des étamines des plantes \
car les pelotes qu'elles forment avec cette
poufîlere , & qu'elles rapportent dans îa
ruche , comme il a été dit à V article de l'A
BEILLE 5 &que l'on appelle de la cire Brute,
n'eftpas de la vraie cire; elle ne fe ramollit
ni ne Ce fond lorfqu'elle ett échauffée ^ elle
tombe au fond de l'eau , au lieu de furna-
ger , &c. Il faut , pour que cette matière
devienne de la vraie cire , que les abeilles la
mâchent , l'avalent , & la digèrent. On a
vu à ïarticle AbeiLLE , que ces infeétes ont
une bouche , des dents , une langue & un
eftomac , c'eft-à-dire des organes propres à
toutes CQ5 opérations. Lorsqu'une abeille
arrive à la ruche avec des pelotes de cire bru-
te , elle la mange quelquefois avant que d'en-
trer , mais pour l'ordinaire elle va fur les gâ-
teaux en battant des ailes. Alors trois ou qua-
tre autres abeilles viennent auprès de celle
qui arrive , ôc mangent les pelotes dont
elle eft chargée. On prétend les avoir vu dif-
tinôement mâcher & avaler ^ mais ce qui
eft encore plus certain , c'eft qu'on a trouvé
dans leur eftomac & leurs inteftins , de la
cire brute bien reconnoiffabîe par les grains
de la poufîiere des étamines dont elle eft
compofée. Lorlque les abeilles apportent
plus de cire brute qu'elles n'en peuvent
manger , alors elles la dépofent dans des al-
véoles , où il ;î'y a ni ver ni miel ^ & dès
qu'un de ces infeâes y a fait tomber les deux
pelotes dont il étoit chargé , i[ en vient un
autre qui les étend dans l'alvéole , & quel-
quefois c'eft le même qui les a apportées.
Non feulement ils les rangent , mais encore
ils les pétrifient, & les imbibent d'une liqueur
qui paroît être du miel , parce qu'après cette
opération la cire brute en a le goût j c'eft
peut-être ce qui la conferve iàns altération.
C I ïl 119
On tronv2 dans les ruches à^s parties de
gâteaux aflèz grandes , dont les cellules font
toutes remplies de cire brute. II y en a auffi
qui font difperfées ou placées entre d'autres
cellules , qui contiennent du miel ou des vers.
Enfin les abeilles mangent îa cire brute lors-
qu'elles l'ont apportée dans la ruche , où elles
la dépo/ènt dans des alvéoles pour la man-
ger dans un autre temps j mais on croit qu'il
faut qu'elles la digèrent pour la convertir en
vraie cire ^ qu'une partie fert à la nourriture
de rin{è<^e , qu'une autre fort par l'anus en
forme d'excrémens , & que le refte revient
par la bouche , & eft employé à la conftruc-
tion des alvéoles , vojfç Alvéole. On a vu
mie liqueur mouflèufe , ou une efpece de
bouillie , fortir de la bouche dans le temps
que l'abeille travaille à faire une cellule ^
cette pâte (è ièche dans un inftant ^ c'eft de
la vraie cire. On prétend que les abeilles ne
peuvent plus employer la cire àhs qu'elle eft
entièrement feche. Aufli lor{qu'on leur en
préfente auprès de leur ruche , elles ne s'en
chargent pas , mais elles recherchent tout
le miel qui peut y être mêlé 3 elles hachent
quelquefois la cire par morceaux , & ne
l'abandonnent que Ior(qu'elles en ont enlevé
tout le miel ^ & s'il n'y en avoit point , elles
ne toucheroient pas à la cire. Lorsqu'on
fait pafter des abeilles dans une nouvelle
ruche entièrement vuide , & qu'on les y
renferme au commencement du jour , avant
qu'elles aient pu ramaft!èr de la cire brute ,
on trouve le fbir des gâteaux de cire dans la
nouvelle ruche. Il y a tout lieu de croire que
lac/>^ dont ces gâteaux font formés eft venue
de la bouche de ces infeftes ^ en ftippofant
qu'ils n'ont point apporté de cire brute atta-
chée à leurs jambes.Cette matière éprouvedes
changemens dans l'eftomac , puifque la cire
à^s alvéoles eft blanche , quoique les pelotes
reflortir fans entraîner avec elle ce qui fe irouveroit de miel dans le premier eftomac , & fans s'al-
térer & fe jaunir par ce mélange. L'objeftion qu'on tire de ce que la cire donne à l'anatyfe des princi-
pes plus analogues à ceux des marieres animales , qu'à ceux qui compofent les matières végétale» , nous
paroîc très-foible : mais voici des faits qu'on donne pour avoir été vérifiés par plufieurs obfervations.
M. Homboftel palTe pour les avoir annoncés le premier dans la Bibliothec^ue de Humbourg^ & plufieurs
amateurs d'abeilles en Allemagne ont dit les avoir vérifiés par leurs obfervations. Selon eux , la cire eft
une matière animale qui fort du corps des abeilles par unefécrétion analogue à celle de la tranfpiration,
ou plutôt à celle de la cire des oreilles des grands animaux : les écailles du ventre fe couvrent dans le
temps du grand travail, & dans ceux où les abeilles ont une nourriture abondante , d'une couche
mince de f/re qui en tranfude, & qui forme ainfi fous le ventre fix lames blanches & très-minces ,
que les abeilles enlèvent avec beaucoup de célérité. Voyet, fur cela les Mémoires de la fociéié de
Luftice f en allemand , & Schirach , Sachfifcher Bienenvatter , &c. (D)
Tome VIIL R
I30 C I JL
de cire brute que les abeilles apportent dans
îa ruche foient de différentes couleurs blan-
ches , jaunes , orangées , rougeâtres, vertes.
Les alvéoles nouvellement faits font blancs ,
& ils jaunifTent avec le temps & par diffé-
rentes caufes , mais lor/qu'ils font nouveaux
la teinte efl à-peu-près la même dans toutes
les ruches -^ s'il s'en trouve de jaunâtres , on
peut croire qne cette couleur vient d'une
jnauvaifè digeftion de la cire brute , que l'on
a attribuée à un vice héréditaire que toutes
les abeilles d'une ruche tiennent de leur mère
commune. Ce qu'il y a de certain , c'eft que
toutes les cires ne font pas également pro-
pres à recevoir un beau blanc dans nos blan-
chiiferies. Mém, pour fervir à thijîoire des
infecles , tome V, (I).
Cire , {Hiji. anc. & mod,) Les hommes
détruifent les cellules pour avoir la cire qui
les forme , & l'on ne fauroit dire à combien
d'ufages ils l'ont employée de tout temps.
Autrefois on sqïï fer\'oit comme d'un meule
pour écrire , invention qu'on attribue aux
Grecs. Pour cet effet , on faifoit de petites
planches de bois , à-peu-près comme les
feuillets de nos tablettes , dont les extrém.ités
tout à l'entour étoicnt revêtues d'un bord
plus élevé que le refte , afin que la cire ne
pût pas s'écouler. On répandoit enfuite flir
ces tablettes de la cire fondue , on l'appla-
niffoit , on l'cgalifoit , & Ton écrivoit fur
cette cire avec un poinçon. C'eft pourquoi
Plante dit, duvifcribo expier i totas ceras qua-
tuor. Les teftamens mêmes'écrivoient fur de
la cire ainfî préparée, De-là vient qu'où leur
donnoit auffi le fimple nom de cera , cire. V .
Suétone dans la vie de Céfar , chap. Ixxtviij^
ù dans la vie de Néron , chap.. xvij. On fè
fervoit encore de la cire pour cacheter des
lettres , & empêcher qu'elles ne fuffentluesj
c'eft ce qui paroît par ce joli vers d'Ovide ,
iib. 1 5 amor..
Coûtera fert blanda cera rtotata manu..
L'on donnoit à cette cire à cacheter toutes
fortes de couleurs, V. Hein, de Jigill, veter,
page I y cap.vj.
Aujourd'hui les particuliers fè fervent de
lacque , voyei CiRE A CACHETER ^ mais les
princes , les magiibats , les grands fèigneurs,
& tous ceux qui ont droit de fceller , font
encore uf^ç de la «W d'abeille pour impri-
C I R
mer les fceaux , & les attacher aux ordon»
nances & arrêts qu'ils publient , comme
auflî à toutes les patentes & expéditions en
chancellerie , que l'on fcelle de cire jaune ,
rouge , verte , dont la confommation à cet
égard eft très-confidérable. V. CiKE,juriJpr»
Chauffe-cire, (S'c.
La cire a autrefois aufTi fervi dans la pein-
ture , en lui donnant telle couleur que l'on
vouloit , & on en faifoit des portraits qu'on
endurciffoit par le moyen du feu j mais il n'y
avoir chez les Romains que ceux qui avoient
exercé des magiftratures curules qui eufîbnt
le droit des images. Seneque nom/neces for-
tes de peintures cereas apellineas. Plus les
grands pouvoient étaler de tels portraits dans
leur veftibule , plus ils étoicnt nobles. De là
vient que les poètes fe moquent de cette
noblefiè empmutée.
Nec te decipiant vête ri ci n cl a atria eera.
dit Ovide, Iib. i ^amor ,eleg. VÏII, 6$. Et
Juvenal encore mieux.
Tota licetveteres exornent undique cerœ
Atria : nobilitas fola ejî atque unica virtus»
Satyr. VIII , 19.
Cet art a été pouffé fort loin de nos jours.
Tout le monde connoît le nom du fleur
Benoit , & l'invention ingénieufè de ces
cercles compofés de perfornages de cire y
qui ont fait fi long-temps l'admiration de
la cour & de. la ville. Cet homme, peintre
de profeftion , trouva le fecret de former
fur le vifage des perfonnes vivantes , même
les plus belles &: les plus délicates, fans aucun
rifque ni pour la fànté , ni pour la beauté ,
des moules dans lefquels il fondoit des maf-
ques de cire auxquels il donnoit une efpece
de vie , par des couleurs & des yeux d'émail,
imités d'après le naturel. Ces figures Te\é~
tues d'habits conformes à la qualité des
perfonnes qu'elles repréfentoient , étoicnt fi
reffemblantes , que les yeux leur croyoient
quelquefois de la vie ^ mais les figures ana-
tomiques faites en cire par le même Benoît y
peuvent encore moins s'oublier que la beauté
de fes portraits.
Les modernes ont tellement multiplié les
ufages de la cire , qu'il feroit difficile de les
détailler.
Us commencent avant toutes chofes pou*
- C I R
s'en fervir , à la féparer du miel par expref^
fion , à la purifier , à la mettre en pains
que vendent hs droguiftes. Elle eil alors
allez folide , un peu glutineufe au toucher ,
& de belle couleur jaune , qu'elle perd un
peu en vieillilTant.
Pour la blanchir on la purifie de nouveau
en la fondant , on la lave , on l'expofe à
l'air & à la rofée ^ par ces moyens elle ac-
quiert la blancheur , devient plus dure ,
plus cafTante , & perd prefque toute fon
odeur. Sa fonderie & fon blanchllFage requiè-
rent beaucoup d'art ^ les Vénitiens ont ap-
porté cet art en France, f^oyei Blanchir.
On demande dans le Ménagiana ( tome
///, page iio) pourquoi les cires de Châ-
teau-Gontier ne blanchiffeut point du tout.
C'eft parce que le fait n'eft pas vrai. On
propofe en phyfique cent queftions de cette
nature. Le blanchiment de Château-Gon-
tier eft précifément le premier de tous , &
les cires de ce blancliiment font en confc-
quence choifies pour les plus beaux ouvrages.
11 en faut croire Pomet & Savary.
En fondant la cire blanche avec un peu
de térébenthine , on en fait la cire jaune
molle , qu'on emploie en chancellerie. On
Ja rougit avec du vermillon ou la racine
d'orcanette ; on la verdit avec du verd-de-
gris , on la noircit avec du noir de fumée :
ainfi on la colore comme on veut , & on la
rend propre à gommer avec de la poix gralïè.
Il eft certain que cette fubftance viiqueufe
réunit diverfes qualités qui lui font particu-
lières. Elle n'a rien de défagréable ni à l'odo-
rat ni au goût ^ le froid la rend dure & pref-
que fragile , & le chaud l'amollit & la dif-
fout : elle eft entièrement inflammable , &
devient prefque auftî volatile que le camphre
par les précédés chymiques. F'. Cire en
chymie , pharmacie , matière médicale.
Elle eft devenue d'une fi grande nécefiîté
dans plufieurs arts , dans plufieurs métiers ,
& dans la vie domeftique , que le débit qui
s'en fait, eft prefque incroyable \ fur-tout
aujourd'hui qu'elle n'eft plus uniquement
réfèrvée pour l'autel & pour le louvre, &
que tout le monde s'éclaire avec des bougies ,
l'Europe ne fournit point affez de cire pour
*le befoin qu'on en a. Nous en tirons de Bar-
barie , de Smyrne , de Conftantinople ,
d'Alexandrie , & de plufieurs îles de l'Archi-
C IR i3t
peî , particulièrement de Candie , de Chio
& de Samos \ & l'on peut évaluer dans ce feul
royaume la confommatioude cette cire étran-
gère à près de dix mille quintaux par année.
Auiîi le luxe augmentant tous les jours en
France la grande confommation de la cire
àts, abeilles , quelques particuliers ont pro-
pofe d'employer pour les cierges & les bou-
gies , uac cire végétale de Mifiiiripi que le
hazard a fait découvrir , & dont on a la
relation dans les mém. de tacad. des Se. aru
1722 & 1725. Voici ce que c'eft.
De la cire de la Louifiane. Dans tous leS
endroits tempérés de l'Amérique feptentrio-
nale , comme dans la Floride , à la Caroline ,
à la Louifiane, fi'c. il y a un petit arbriffeau
qui croît à la hauteur de nos cerifiers , qui
a le port du myrte , & dont les feuilles
ont aufiî à-peu-près la même odeur. Ces
arbres portent des graines de la groifeur d'un
petit grain de coriandre dans leur parfaite
maturité , vertes au commencement , enfuite
d'un gris cendré , ces graines renferment
dans leur milieu un petit noyau ofTeux , alTez:
rond , couvert d'une peau verte chagrinée ^
& qui contient une fèmence. Ce noyau efi
enveloppé d'une fubftance vifqueufe , qui
remplit tout le refte de la graine ou fruit :
c eft la cire dont il s'agit. Cette cire eft lui-
fante , feche , friable , difpofée en écailles
fiir la peau du noyau.
Il eft très-aifé d'avoir cette cire : il n'y a
qu'à faire bouillir des graines dans une
quantité fiifîifànte d'eau , & les écrafèr
groffiérement contre les parois du vaiffèau
pendant qu'elles font fur le feu ^ la cire fe
détache des graines qui la renfermoient , &
vient nager fur la fuperficie de l'eau. On la
ramafl^e avec une cuiller , on la nettoie en
la paiTant par un linge , & on la fait fondre
de nouveau pour la mettre en pain.
Plufieurs perfonnes de la Louifiane ont
appris par des efclaves fauvages de la Caro-
line,qu'on n y brûloit point d'autre bougie que
celle qui fè fait de cette cire. Dans les pays fort
chauds où de la chandelle de fuif fè fondroit
par la chaleur , il eft fans comparaifon plus
commode d'avoir de la bougie j & celle-là fè-
roit à bon m.arché , & toute portée dans les
climats de l'Amérique qui en auroient befoin.
Un arbriffeau bien chargé de fruits , peut
avoir en fix livres de graines & une Ih re die
Ri
132 C I R
fruit , un quart de livre de cire. Il eft diffi-
cile de déterminer au jufte combien un
homme pourroit ramaffer de graines en un
jour , parce que ces arbres qui croilTent fans
culture & faus art , fout répandus çà & là ,
tantôt plus , tantôt moins écartés les uns
des autres , félon que différens hazards les
ont fèmés : cependant l'on juge à-peu-prcs
qu'un homme ramalferoit aifément en un
jour feize livres de graines , ce qui donne-
roit quatre livres de cire. Cette grande faci-
lité , qui deviendroit beaucoup plus grande
par des plantations régulières de ces arbres,
& le peu de frais qu'il faut pour tirer la
cire , fèroit fort à confidérer fi cette ma-
tière devenoit un objet de commerce.
La cire qui fe détache par les prem.ieres
ébullitions eft jaune , comme celle qui vient
de nos abeilles j mais les dernières ébullitions
la donnent vette , parce qu'alors elle prend
la teinture de la peau dont le noyau eft cou-
vert. Toute cette cire eft plus feche & plus
friable que la nôtre. Elle a une odeur douce
& aromatique aflez agréable.
Nous avons vu à Paris des bougies vertes
de cette cire , que le miniftre avoit reçues
du Miflifîîpi , & qui étoient fort bonnes.
Le temps nous apprendra il l'on regarde
la matière de ces bougies comme un objet
aflèz confidérable de commerce , pour nous
diipenfèr de tirer des cires des pays étran-
gers , autant que nous le faifons pour notre
confomraation de cierges & de bougies.
De la cire des îles Antilles. On trouve
aux îles Antilles dans des troncs d'arbres
une cire aflez fînguliere , formée en mor-
ceaux ronds ou ovales de la groifeur d'une
noix mufcade. Cette cire eft l'ouvrage d'abeil-
les plus petites , plus noires & plus rondes
que celles de l'Europe. Elles fè retirent dans
le creux des vieux arbres , où elles fe fabri-
C I R
quent des eljjeces de ruches de la figure
d'une poire , dans le dedans defquelles elles
portent toujours un miel liquide de couleur
citrine , de la confiftance de l'huile d'olive ,
d'un goût doux & agréable. Leur cire eft
noire , ou du moins d'un violet foncé.
Nous n'avons pas pu parvenir au fecret de
la blanchir, de la foire changer de couleur ^
de la rendre propre à la fabrique des
ni
bougies , parce qu'elle eft trop molle. Les
Indiens après l'avoir purifiée , s'en fervent à
en faire des bouchons de bouteilles : ils en
font auflî de petits vaifteaux dans lefquels ils
recueillent le baume deTolu,quand il découle
par incifion des arbres qui le répandent.
De la cire de la Chine. La cire blanche de
la Chine eft différente de toutes celles que
nous connoiftbns ,, non feulement par fa
blancheur que le temps n'altère point, mais
encore par fa texture : on diroit qu'elle eft
compofée de petites pièces écailleufes , fem-
blables à celles du blanc de baleine , que nous
ne fàurions mettre en pains aufll fermes que
les pains Aecire delà Chine. Autre fîngularité
de la cire blanche de la Chine , c'eft qu'elle
n'cft point l'ouvrage des abeilles : e\\e vient
par artifice de petits vers que l'on trouve
fur un arbre dans une province de cet em-
pire. Ils fe nourrilTent fur cet arbre j on \qs
y ramalfe, on les fait bouillir dans de l'eau ,
& ils forment une e^ece de graiife , qui
étant figée , eft la cire blanche de la Chine ,
fur laquelle il nous manque bien des détails.
Art. de M. le chevalier DE Jaucourt.
Cire , {Chymie , Fharm. 6» Mat. médic.\
La première confidération chymique ftir la
cire , c'eft la théorie de fbn blanchiftage ,
fondée fur la folubilité par la rofée ou par
l'eau de la partie colorante qui peut être aufli
détruite ou volatilifëe par les rayons du £q^
leil & par l'air. ( a )
(«) On peut retiier delà lavande & du romarin de la cire pure, & on peut appercevoir cette
fubftance fur les feuilles de ces plantes, à l*aidedu microfcope. C'eft ce qui fait voir l'erreur de ceux
qui croient qu'on ne peut retirer de la cire que des étamines oa des pétales de la fleur.
L'eau de la reine d'Hongrie , dont le principal ingrédient eft h lavande , a une odeur bien marquée
de cire : ce qui prouve clairement que la tire eft une fubftance végétale , & non point uns
animale.
La chymie ne fait point d'autre opération fur la tire , que de féparer fon huile de fon phlegme &
de fon Tel. Cette huile qui vient à la première diftillation, & fe congelé au col de la retorte , eft
appeilée beurre de cire , & au moyen de la cohcbation , on la réduit en huile belle Se coulante-..
Le moyen employé à fa préparation , eft de couper la cire par petits •morceaux , de la faire
fondre doucement dans une retorte de verre jufqu'à ce que le vaiffeau foit à moitié plein , de le
iea>|>U]; enfuite avec du fable biea fec losx lutte un iccipient^ 6c on diftilleàla chalcar du. bai»
C I R
La cire diftillée fans intermède , fè ré fout
en une matière huileufe qui fe fige à mefure
qu'elle tombe dans le récipient , & qui eft
connue fous le nom de beurre de cire , & en un
acide allez fort : ces produits ont une odeur
très-forte & très-défagréable. Le beurre perd
une partie de cette odeur & fa confiliance ,
par des reâ:ifications réitérées qui le portent
enfin à l'état de fluidité des huiles ordinaires j
on fépare de ce beurre par chaque reélifica-
tion , une petite portion d'acide ; d'où l'on
peut conclure que c'eft à la préfence de ce
principe que le beurre de cire doit (à con-
îiftance. La cire blanche diftillée fans inter-
mède , ne laiffe prelque point de réfidu j
c'eft le charbon de la matière qui colore la
rendu de la
C I R
cire jaune , qui augmente le
diftillation de cette dernière.
On peut déduire aifez raifonnablement
de cette obfervation feule, que la cire eft uii
compofé d'huile & d'acide ^ ce qui la fait
rapporter par quelques chymiftes à la claffe
des matières balfamiques <k réfineufes , dont
elle diffère pourtant par fon infolubilité dans
i'efprit-de-vin , & par l'odeur defes produits.
La cire diftillée avec le fable ou avec tout
autre intermède terreux , préfente des phé-
nomènes bien dilférens de ceux de la diftilla-
tion fans intermède de la même fubftance.
Cette différence a été peu obfèrvée par les
chymiftes , qui n'ont décrit la plupart que
l'un ou l'autre de ces procédés. Lémeri , qui
de fable par un feu gradué. Il s'élève d'abord un efprit acide d'une fort mauvaifc odeur & d'un
mauvais goût, enfuite en augmentant le feu, il fort un corps huileux , comme du beurre qui fe
congelé au froid , & qui paroît ordinairement blane : on doit remarquer en paflant que tous les
fels des corps mélangés font naturellement acides , l'alkali n'étant qu'une altération du fel naturel
par le feu.
Il n'y a point de terre dans la cire , de manière que (i on la diflille feule dans une retorte , elle
ne perdra rien de fa fubflance dans la diftillation. On lui adjoint donc du fable, du bol ou des
cendres, afin qu'étant étendue & raréfiée, fes principes foienc féparés plus aifément.
L'huile ou le beurre de cire , a cela de fingulier , qu'elle ne perd rien par les diftillations répé-
tées : elle devient feulement plus fine & plus limpide, fans dépofer aucune fece. Les autres huiles
au contraire deviennent conftamment plus épaifTcs , & lailTent toujours des particules de terre
dans la cohobation.
La confiftance folide de la cire vient d'un mélange proportionné d'eau , de fel volatil & d'huile.
Sa folidité fe détruit donc félon que ces principes foufFrent une féparation. On peut obferver cela
dans les redifications ; car dans chaque diftillation il fe fépare une quantité confidérable d'eau, &
l'huile devient plus claire.
De 31 onces de cire , on tire dans la première diftillation juftement le même poids de liqueur;
favoir , ti onces d'cfprit phlegmatique acide , & zo onces de beurre.
De cette manière la cire , dans fon état concret, eft une humeur onftueufe qui fort des pores
des végétaux , & logée en petite quantité fur la furface de leurs feuilles , où le foleil î'épaiftît ,
& où les abeilles la ramaflent pKjut leur ufage particulier. Ces infe£les la tranfportent dans. leurs
ruches avec leurs pattes , fans la faire paffer dans leurs corps , comme ils font du miel. Sem-
blable au camphre , elle ne laiffe point de fèces dans la diftillation , mais elle eft tout-à-fait
volatile , & fe blanchit en la faifant bouillir dans plufîeurs eaux.
On découvre , en examinant avec attention , une efpece de camphre fur les feuilles de fauge
& du thym : de-là le foulagement que procurent quelquefois ces végétaux , lorfqu'on les applique
en cataplafme fur les parties artè£lées de goutte ,. lors de la douleur.
Il eft évident que les végétaux contiennent des baumes ou des huiles que la diftillation peut
leur enlever, fans que les parties qui entrent en leur compofition foient fépaxées tout-à-£ait; c'eft
ce qui nous inftruit plus particulièrement de la nature du camphre. D'un autre côté, ces huiler
peuvent être contenues dans les végétaux , de différentes façons.
Quant aux ufages médicinaux , le beurre de f/« fait un onguent extrêmement doux & anodin ^
ëmollient& relâchant , très-agréable aux nerfs , & il eft d'une grande utilité , lorfqu'on l'emploie
en onôion fur des membres qui font contractés. C'eft un très-bon liniment pour les hémorrhoïdes,
dont il calme les douleurs d^une manière prompte & furprenante.
L'huile de cire a de plus une vertu fînguliere pour la cure des tendons contraftés , & pour rendre
aux parties retirées & defTéchées leur flexibilité naturelle. On l'emploie avec fuccès pour réfoudre les
engelures, pour les coliques néphrétiques , les ulcères dans les reins & dans la vedîe , la rétentioa
d'urine , & lorfqu'il s'agit d'atténuer les phlegmcs, La doiè eft de£uis deux gouttes jufqu'à dix dan»
du via blanc , ou dans q^uelq^ue eau diftillée.
134 C I K
fait mention des deux , ne l'a pas apperçue
entièrement. En un mot , la théorie de la
diftillation de la cire & des différences que
les intermèdes & que les autres circonftances
abfolument indéterminées jufqii'à préfènt
portent dans les produits de cette opération j
cette théorie , dis-je , n'a pas été donnée
jufqu'à préfènt. J^oye^ INTERMEDE.
Le beurre & l'huile de la cire font em-
ployés extérieurement avec fuccès pour les
engelures , les crevalTes & les gerflires du
fèin 5 des lèvres , des mains , pour les dar-
tres vives , & fur-tout pour les brûlures.
Les ufages pharmaceutiques delà cire font
très-étendus j elle entre dans la plupart des
onguens & des emplâtres , dans quelques
baumes : c'efl la cire qui fait la bafe des
cérats , qui font des préparations auxquelles
elle donne fou nom. royei Ce RAT. ( â )
* Cire a cacheter. Foyei Cirier.
Cire du roi , ( Jurifpr. ) dans les an-
ciennes ordonnances , fignifie le fceau ou
ï émolument du fceau. F'oyei Telfereau, AiJ}.
delà chancellerie , tom. I. Nos rois ont hérité
de la cire jaune de la féconde race, aufll
bien que du droit de l'empire. Ils fcellent
en cire rouge comme les anciens barons ,
aux droits defquels ils font pour certaines
feigneuries , telles que la Provence & le
Dauphiné. Traité de la pairie ^ pag. 12 1.
Les lettres de conceflion à perpétuité doi-
vent être fcellées de cire verte ^ celles de con-
ceflion à temps , fcellées de cire blanche.
Préface du III tome des ordonnances de la
troifteme race , pag. 8. Voye[ ScEAU.
Suivant une ordonnance de Philippe V ,
du deux juin 1 3^9 , de toutes les ventes de
bois que faifoient les maîtres particuliers ,
les marchands dévoient payer entre autres
chofes une livre de cire ; & toute la cire
provenant de ces ventes , étoit deftinée pour
l'hôtel du roi & celui de la reine. Ce droit a
été révoqué par l'ordonnance des eaux &
forêts , fit. XV , art. 1 5. ( y^ )
Cire des Églises ,{ Jurifpr. ) c'eft à la
fabrique des églifes paroifliales à fournir
toute la cire néceffaire pour la célébration de
l'office paroifîial , & des melTes & fsrvices
de fondation. Au défaut des revenus de la
fabrique , c'eft au gros-décimateur , chargé
de la portion congrue , à fournir la cire né-
ceiikire.
C I R
Les cierges que l'on allume â Tautel, ceux
que l'on porte à l'offrande , que l'on met
fîir les pains bénits , & que l'on met autour
des corps aux enterremens & pompes funè-
bres , appartiennent au curé , à moins qu'il
n'y ait quelque ufage ou accord contraire ,
pour les partager entre le curé & la fabrique.
Les parens ne peuvent remporter la cire
qui fèrt aux convois & pompes funèbres ,
à moins qu'il n'y ait ufage & pofTeflîon con-
traires.
Le curé doit fournir la cire ncceffaire
pour les mefîes de dévotion , que la fabrique
n'eft pas chargée de faire acquitter. Voye[
la déclaration de 7,0 juin \6ç)0 fur les por-
tions congrues y èi. le diâionn. de Brillon ,
au mot cire. (A) .
Cire , (Fonderie ^foit enfîatue équejl.foit
de cloch. ) Les fondeurs en bronze font un
modèle de leur ouvrage en cire , tout- à-fait
fembiable au premier modèle de plâtre. On
donne à la cire l'épaiffeur qu'on veut donner
au bronze : car lorfque dans l'efpace ren-
fermé par ces cires , on a fait l'armature de
fer & le noyau , & qu'elles ont été recou-
vertes par-deffus du moule de potée & de
terre , on les retire par le moyen du feu qui
les rend liquides , d'entre le moule de potée
& le noyau \ ce qui forme un vuide que le
bronze occupe. Voye\ Fonderie.
Les anciens ne prenoient point la précau-
tion de faire le premier moule de plâtre, par
le moyen duquel on donne à la cire une
épaiffeur égale; après avoir fait leur modèle
avec de la terre à potier préparée , ou du
plâtre , ils l'écorchoient \ c'eft-à-dire qu'ils
en ôtoient tout autour l'épaiffeur qu'ils von-
loient donner au bronze , de forte que le
modèle devenoit le noyau : & après l'avoir
bien fait cuire , ils le recouvroient de cire
qu'ils terminoient , & fiir laquelle ils fai-
foient le moule de potée dans lequel le mé-
tal devoit couler. On fe fert encore quelque-
fois de cette méthode pour les bas-reliefs
& les ouvrages dont l'exécution n'eft pas
difficile j mais quoiqu'elle foit plus expé-
ditive , elle jette pour les grands ouvrages
dans, plufieurs inconvéniens.
La cire qu'on emploie pour le modelé ,
doit être d'une qualité qui ayant affez de
confifi:ance pour fe foutenir & ne pas fe fon-
dre à la grande chaleur de l'été , ait cepeu-,
C I R
dant afTcz de douceur pour qu'on la paiflè
aiféinent réparer. On met fur cent livres de
cire jaune dix livres de térébenthine com-
mune , dix livres de poix graiTe , & dix
livres de faindoux. On fait fondre le tout
enfemble à un feu modéré , obfervant de
ne pas faire bouillir la cire , ce qui la ren-
droitécumeufe & empécheroit de la répa-
rer proprement. F^oyei pour la manière
d'etnployer cette compofition , ies mou
Bronze , Cloche , &c.
Cire des oreilles , { Anatom. ) en latin
cérumen auns , & par les anciens mé-
decins , aurium fordes ; efpece de glu na-
turelle qui fe trouve & s'amalTe dans la
partie antérieure &: cartilagineufe du con-
duit de l'oreille.
Dans la partie du conduit auditif collée
aux tempes , dans les fiffures , & depuis la
partie qui eft couverte d'un cartilage jufqu'à
la moitié du canal , & félon Morgagni , fur
la convexité fupérienre de la membrane ,
rampe un réfeau réticulaire , celluleux , fort,
fait d'aréoles , où eft le (îege des glandes
jaunes , prefque rondes , ou ovales , félon
Duverney & VieuiTens , le/quelles glandes
percent par de petits trous la peau du canal.
Ceft donc par ces orifices que fort cette
elpece de cire nommée cire de l'oreille , jaune,
huileufe, d'abord fluide, enfùitc plus iblide,
plus épaiffe , amere , & qui prend feu lorf-
qu'elle eft pure.
Duverney n'eft pas le premier qui ait fait
mention des glandes cérumineufes de l'oreil-
le j Stenon &: Drelincourt en avoient dit
quelque chofe avant lui : mais Duverney en
adonné une defcription il claire & fiexa£te,
qu'il paffe, avec aiîéz de raifon , pour en être
l'inventeur. Valfalva en a dépeint la figure ;
on les trouve aufli repréfentées dans l'anato-
mie de Drake.
Les phyficiens cherchent à deviner les
iifages de la matière cérumineufè que filtrent
ces glandes , & qu'elles envoient dans le
conduit auditif f, mais leurs recherches fe bor-
nent uniquement à favoir que cette cire fert
à arrêter les ordures extérieures & les infec-
tes, qui en entrant dans l'oreille ne manque-
roient pas d'y nuire.
Lorfqu'il s'amaife trop de matière céru-
mineufè dans l'oreille, les poils dont lacroif
lance eft empêchée , le plient ôt irritent la
C I R 135
membrane du canal , dont la démaugeaiibu
force à le nettoyer.
Quelquefois cette humeur gluante s'y
amalîè en trop grande abondance , s'y épaif-
fit par fon féjour, & empêche que les trem-
blemens de l'air ne parviennent jufqu'à l'or-
gane immédiat de l'ouie, ce qui produit l'ef-
pece de liirdité la plus commune & la plus
guéri/fable ^ c'eft même prefque la (ëule que
les gens habiles ôc finceres entreprennent de
traiter.
Ils expofent pour la connoître l'oreille du
malade aux rayons du foleil ^ & quand ils
découvrent le conduit bouché par l'épaifTif-
fèment de la cire , ils Ce fervent d'un inf
trument particulier pour l'enlever , & font
enfaite des injections d'eau dans laquelle ils
ont fondu un peu de fèl & de favon : ils iè
fervent aulîi d'injeftion d'eau tiède aiguifce
par quelques gouttes d'efprit-de-vin ;, par ce
moyen ils nettoient à merveille le conduit
auditif, & guériffent parfaitement cette
furdité.
Si cette humeur huileufe & fluide de (à
nature pèche par fon abondance accompa-
gnée d'acrimonie', non feulement elle caufè
des démangenifons importuucs, mais encore
le mal d'oreille : alors elle peut prendre dif-
férentes couleurs , acquérir de la fétidité ,
& former un petit ulcère par fon fëjour ,
ià dégénération , & fa quantité j ce qui
cependant eft rare : en ce cas toutefois il
faut traiter ce mal accidentel par des injec-
tions déterfives , antiseptiques , & par des
tentes imbibées de légers balfamiques.
Quelquefois cette cire fe pétrifie ^ c'eft
alors qu'elle caufe une furdité prefque incu-
rable , en bouchant exactement le conduit
ofièux & le conduit cartilagineux , comme
Duverney dit l'avoir obf^rvé dans plufieurs
fujetf. L'on conçoit aifément la pétrifica-
tion de la cire des oreilles , parla conformité
de fa nature avec celle de la bile qui le pé-
trifie fi fouvent dans la véficule du fiel.
Mais fi l'abondance & la pétrification de
cette glu cérumineufè font nuifibles , la pri-
vation de fà fecrétion dans les glandes pro^
duit à fon tour quelquefois la furdité , prin-
cipalement dans la vieillefie , fiiivantles ob-
fervations de Duverney , de Morgagni &:
de Valfalva.
Les anciens anatomiftes, & Bartholiu
13^ CI R
entre autres ( Anat. liv. III , cA. ix, ) , ont
pris la are des oreilles pour un excrément
du erveau. Rien de plus abfurdc, outre
qu'on ne connoît aucun pafTage par où cette
humeur étant feparée du cerveau , pourroit
venir dans le conduit auditif.
Quant au goût de cette cire , CafTerius
^apporte des exemples de quelques animaux
chez qui elle eft d'une faveur douce : dans
rhom.me , Schelhammer y trouve peu de
douceur, & beaucoup d'amertume j & Der-
ham , un goût infipide mêlé d'amertume ;
ces dirtërences doivent varier félon le temps ,
les fujets , l'âge , &c.
Tout ce qu'on dit des vertus de la cire des
om//c5 eflm-ifcrable: Paul Eginctte lavante
pour la guérifon des crevalFes de la peau
qui fe forment autour de la racine des on-
gles j Pline la loue contre la morfure de
l'homme, des ferpens ôcdes fcorpions^ Van-
helmont , dans les piquures des nerfs j Et-
muller , dans les bleilures des parties nerveu-
fcs^ Serenus Sammonicus , pour la cure des
furoncles ^ d'autres en recommandent l'ufage
interne pour la colique j Agricola en fait un
onguent pour les tumeurs des jointures &
les abcès , &c.
Les éphémérides des curieux de la nature
lie font remplies que de niaiferies de cette
e/pece. Parlons vrai : cette humeur des glan-
des qui paroït par fa confiftance & fon ainer-
tume un compofé de cire & d'huile , peut
avoir quelque médiocre qualité favoneufe ,
abftergente , déterfive ^ mais manquons-
nous d'autres remèdes en qualité & abon-
dance mieux choifis , & qui répondront aux
mêmes intentions ? Prenons de la cire com-
mune , de l'huile , du favon '-, voilà des fe-
cours que nous avons fous la main pour une
infinité de cas , & n'allons pas puifer nos
recettes dans le bizarre, le merveilleux, dans
les contes des géans & des bonnes-femmes.
Papinius (Nicolaùs) a écrit un petit livre
latin fur l'ufage de la cire des oreilles , im-
primé à Saumur en 1648 , in- ii. On peut
juger par ce que nous venons de dire , du
cas qu'on doit faire de cet ouvrage. Cet ar-
ticle eft de M. le chevalier de J au court.
CIRENZA ou ACERENZA, (Géog.)
ville d'Italie au royaume de Naples , capi-
tale de la Bafîlicate , fur la rivière de Bran-
àuaoi Long, 3 j , 40 j lac, 40 ^ 48.
GI R
CIRIE , ( Géog, ) ville d'Italie au Pié-
mont , fur la Sture.
CIRIER , f. m. ouvrier qui travaille en
cire. Les abeilles forment leur cire avec la
poufîiere des étamines des fleurs qu'elles
recueillent,
Lorfque ces infeétes ont fait ces récoltes ,
on s'en empare. Les uns font mi trou en
terre , ils y mettent brûler du fbufre , & ils
préfentent les ruches fur le trou pour faire
périr les mouches & recueillir enfuite avec
facilité leur cire &leur miel. Ceux qui fui-
vent cette méthode entendent peu leurs inté-
rêts ; ils perdent un nombre immcnfe d'ou-
vrières qui auroient donné le jour à un gra^nd
nombre d'autres. Une méthode mieux en-
tendue efl de prendre un panier vuide , de
l'aboucher fur une ruche pleine de mouches
& de provifions , & de faire paffer les mou-
ches dans le panier vuide. De cette manière
on profite de la récolte des mouches , on les
conferve , & elles travaillent de nouveau.
Lorfque le pays n'eft pas affez abondant en
fleurs , on peut ne leur enlever qu'une partie
de leurs provifions : cette fage économie eft
des plus avantageufès.
Aufîi-tôt qu'on a enlevé les gâteaux des
ruches , on met à part les plus beaux , on
paffe légèrement un couteau fur ces gâteaux
pour rompre les couvertures des alvéoles ,
& emporter le miel épais qui , fe trouvant
immédiatement fous ces couvertures de cire ,
empêcheroit le miel liquide de s'écouler : on
rompt enfiiite les gâteaux en plufieurs mor-
ceaux ^ on les met fur des corbeilles , fur des
claies d'ofîer, ou fur une toile de canevas
tendue fur un chafîis , & on place deffous
un vafe bien net : le miel qui en découle
naturellement , & qui efl k plus blanc , le
plus parfait , fe nomme miel vierge. Cette
efjjece de miel fe grumele de lui-même j &
lorfqu'il eft d'une bonne efpece , il devient
grené comme le miel de Narbonne qui ,
comme on fait , efl le plus elHmé à caufe de
fa faveur aromatique produite par les fleurs
odorantes, &fiir-tout par les fleurs de roma-
rin , fur lelquelles les abeilles le recueillent.
Quand on a retiré le premier miel , on
brife les gâteaux avec les mains fans les pétrir,
& on y joint ceux qui font un peu moins
parfaits. Le tout enfemble produit du miel
de moindre qualité , dont la couleur jaune
efl
C I R
cft càuf^e par une petite partie de cire hrute ,
mêlée d'utn peu de miel dont pkfieurs alvéo-
les fe trouvent remplis : ce miel eft encore
afîcz bon.
On met ces dlfFérens miels diins des pots
que l'on tient dans des lieux frais fans être
humides : la poufliere des étamines , ou le
peu de cire qui peut fè trouver mêlé avec le
miel , fumage par fa légèreté , & on enlevé
avec une cuiller ces lûbftances étrangères.
Enfin les gâteaux les moins beaux , qui con-
tiennent du miel avec beaucoup de cire
brute , fonvmêlés enfemble ; on les pétrit , &
on retire par expreJSion le miel qu'on appelle
miel commun. Fbye;^ PURIFICATION DE
LA Cire.
Lorfqu'on a ôté le miel que les gâteaux de
cire contenoient , on met la pâte de cire dans
de Teau claire , & on a foin de la remuer
de temps en temps pour laver la cire , & dif-
foudre le peu de miel qui y refte adhérent.
On prétend que la cire qui a été ainfi trem-
pée dans de l'eau refte plus graffe que celle
qu'on tient bien fëchement : c'eft par cette
raifon que quelques perfonncs , pour démê-
ler la cire , retendent prés des ruches au
fortir de la prefle : un nombre prodigieux
d'abeilles s'alfemblcnt fur cette cire , la
réduifent en petites parcelles comme du fon ,
&: en fucent tout le miel , iàns enlever la
moindre quantité de cire.
La féconde & la plus importante prépara-
tion de la cire s'exécute eri h failant fondre
pour la pafler dans un hnge qui retient les
corps étrangers. On mêle enfemble toutes les
cires qu'on a recueillies , la blanche , la
TJaune & la noire ; car il faut obferver que ,
iorfque les gâteaux font nouvellement faits ,
les uns font d'un jaune clair & ambré , &:
les autres font blancs , mais ils jaunifîènt
tous avec le temps , & même ils noirciffent ;
«fFet occafioné par les vapeurs qui régnent
dans la ruche. Le blanchiment dont nous
allons parler, ne fait que ramener la cire Vi
fa première blancheur ; car celle qui originai-
rement n'étoit pas blanche , ne peut 1-e deve-
nir. On met enfemble tous ces gâteaux de
cire dans une grande chaudière de cuivre ,
que l'on remplit au tiers d'eau ; l'eau , en
bouillant , fait fondre cette cire que l'on a
■foin de remuer avec. une fpatule de bois ,
•afin d'empêcher qu'elle ne s'attache au bord
Tome VIIL
CIK 137
de la chaudière , où elle pourroît fe brûler.
Lorfque la cire eft bien fondue , on la veric
avec l'eau fur laquelle elle nage , dans des
facs de toile forte & claire , qu'on a fait
tremper dans l'eau bouillante pour empêcher
l'adhérence de la cire , & à l'inftant on les
met fous une prelîe : la cire qui coule efl
reçue dans des vaiés , où il efl bon de mettrf
de l'eau chaude pour que les ordures fe pré-
cipitent.
Il faut avoir foin de ne pas beaucoup cuire
la cire , parce qu'elle deviendroit trop feche »
cafTante & brune ; cette couleur efl d'autant
plus fâcheufe qu'elle ne peut être enlevée nî
parle foleil , ni parla rolée. Il ne faut pas s'in-
quiéter fi on ne rcnre pas toute la cire par la
première fonte. Celle qui relie dans le marc »
qui efl compofé pour la plus grande partie
des dépouilles des nymphes , n'efl pas perdue.
On remet ce marc tremper dans de l'eau pen-
dant quelques jours, on le fait fondre de
nouveau , & on en exprime encore un peu
de cire ; fi on mettoit ce marc fondre tout
de lliite on en retireroit moins de cire , on
obfervera à cette occafion que , fi l'on prend
un rayon récemment formé par les abeilles ,
& dans lequel il n'y a point encore eu de
miel , on en peut retirer par l'eau , & encore
mieux par jiefprit-de-vin , une fubflance
fucrée & mielleufe. Quand cette fubflance
a été retirée de la cire , elle en devient plus
maniable : il efl probable qu'en mettant la
cire dans l'eau , on lui enlevé cette partie
étrangère.
La cire en tombant dans l'eau fè îigt &
fumage ; on l'en retire par morceaux , & on
enlevé avec la lame d'un couteau les ordu-
res & les pouflîeres d'étami nés qui font adhé-
rentes au defîbus de ces morceaux ; ces
crafîès qui peuvent contenir un peu de cire
font rejetées dans les autres fontes.
Pour former des pains de cette cire , on la
fait fondre de nouveau dans une chaudière
avec de l'eau ; lorfqu'elle efl fondue & qu'elle
a été écumée , on la verfe dans dts terrines
ou autres vaiffèaux dans lefquels on. met un
peu d'eau , dont on afperge auffî \t5 parois •:
ces vailîêaux doivent être plus larges par le
haut que par le fond. La cire fe fige en fe
relroidifîânt , & elle fe moule en gros pains ,
tels qu'on voit la cire jaune expolée en vente
chez les épiciers.
13S C ï R
Dans cette féconde fonte , on doit encore
plus ménager le feu que dans les précéden-
tes : & mouler la cire auffi-tôt qu'elle eft
fondue ; car c'efl une règle générale que la
cire brunit à chaque fonte : & fi on la lailfoit
trop long-temps expofée à l'aûion du feu ,
au lieu d'être ondueufe , elle deviendroit
ieche & caffante , ce qui eft réputé au moins
un grand défaut dans les bonnes manufac-
tures ; quoique , dans quelques blanchifferies
où on fait de la cire, commune , on préfère
cette cire parce qu'elle fouiïre mieux le mé-
lange de la graifîe.
On reconnoît que la cire jaune en pain a
été fophilHquée par le miêlange de graifle ,
ou à la faveur , ou en la mettant fous la
dent. Après avoir mordu la cire ^ li , eu
féparant les dents , on entend un petit bruit ,
c'eft figne que la cire n'ert point alliée de
graifîe , & le contraire fait juger qu'on y a
introduit de la graiflé.
La cire jaune efl employée par les menui-
fiers èc'lts ébéniiies pour donner du luftre à
leurs ouvrages , auffi bien que par les trot-
teurs des planchers des appartemens. On en
fait auffi des bougies pour la marine , parce
que dans les pays ch*uds , le (ùif devient
trop coulant. C'eil: cette cire^^jaune qu'on
emploie pour faire différens onguens , des
cérats & des maffics ; les fculpteurs en font
une corapofition mêlée de graifîe pour faire
leurs modèles.
Plufieurs de nos provinces nous fbur-
nifîént de la cire jaune , favoir , la Cham-
pagne , l'Auvergne , l'Anjou , le Bourde-
lois , la Normandie , la Bretagne ,. la So-
logne , mais on efl encore obligé d'en tirer
de l'étranger : on en tire du Levant. & du
Nord.
Comme la plus grande partie de la cire ne
s'emploie qu'après avoir été blanchie ,, nous
allons préfenter l'idée de cette opération.
Les pratiques employées pour blanchir
la cire jaune font à-peu-près les mêmes dans
foutes les blanchifferies du royaume.. S'il y
a des cires plus feches les unes que les au-
tres , c'eil parce que ceux qui les blanchif-
lent les allieçt avec moins de fuif , ou qu'ils
Ti*y en mettent point du t-out : s'il y en a
de plus blanches & de plus tranfparentes
les unes que les autres , .c'efl que les blan-
^hiiîewrs entendent mieux leur art 3 & qu'ils
C I R
apportent plus d'attention à leur travaiî ^
& encore parce qu'il fe trouve des cires
jaunes qui blancl^ffent mieux & plus faci-
lement les unes que les autres.
Les cires de pays de vignobles ne blan-
chifTent que très-difîicilement , & même
elles ne blanchiroient pas fi on ne les al-
lioit avec du fuit , qui , par fa blancheur ^
fait diiparcître le jaune : on y mêle ju(-
qu'à vingt-cinq & trente livres de luif fur
un quintal de cire. Comme il y a aux en-
virons de Rouen quelques manufadures de-
bougies où l'on ne travaille que des cires
de cette efpece , on connoît à Paris des ci-
res communes & mélangées fous le nom
de cires de Rouen ; on les reconnoît aifé-
ment en ce que la cire eft d'un blanc mat j,
& n'efî jamais fi claire ni fi tranfparente
que les belles bougies. On les acheté à
meilleur marché que les bougies faites de
bonne cire ,. mais elles ne font pas le même
profit , parce qu'elles fe confument plus
promptement. Il n'y .a qiae quelques célè-
bres blanchiiTeries où l'on fabrique la cire-
fans aucun alliage. On ajoute d'ordinaire
dans les autres une petite quantité de graifîe
à la fonte de la cire jaune : le mieux eft
d'employer le fuif de mouton le plus ferme ,
celui qui efl auprès des rognons ; pour le
préparer à ce mélange y on le fond & on le_
bat avec du vinaigre.
La cire ne doit fa couleur jaune qu'à.
une fubflance grafTe : la preuve en efl que
la cire jaune efl plus ondueufe que la blan-
che. Cette huile colorante efl moins fixe^
que la vraie cire , car la rofée & princi-
palement le foleil l'enlèvent. On s'attache
feulement à divifer la cire , de manière à
prcfenter le plus de furtace pofEble ; pour
cet effet , on la fait fondre dans une grande
chaudière ; lorfqu'eile efl fondue , on la
fait couler dans une cuve de bois , élevée
de cinq à fix pies de terre , que l'on cou-
vre avec un couvercle qu'on enveloppe
avec des couvertures ; on la laiffe pendant
quelques heures dans.cct état pour que les
craffes fe dépofent au fond ; on fait en-
fuite couler la cire fondue par un robinet
de bois , on la reçoit dans une paffoire cri-
blée qui., en la laiffant échapper par (es
trous , retient toutes les ordures. La cire
tombe delà pailbire dans la gr^'/oirtf , qui efl
cm
Xiht auge longue & étroite percée par le fond
d'une cinquantaine de petits trous , rangés
fur une même ligne , & féparés par un efpace
€gal. La cire diftribuée par ces trous , &
formant cinquante fils dans fa chute , va fe
rendre fur un cylindre de buis ou de quelque
autre bois dur & bien uni. Le diamètre de
ce cylindre efl environ d'un pié. Il plonge de
la moitié de fbn épaiflbur dans l'eau d'une
longue baignoire , au bout de laquelle un
■enfant la fait tourner avec une manivelle.
Chaque fil de cire fondue fe fige & s'applatit
en arrivant fur le tour qui trempe dans l'eau
froide : le cylindre tournant , c'efl une né-
ceffité que toutes les gouttelettes de cire étant
fuccellîvement refroidies & applaties , il fe
forme un lacet mince qui fe détache par l'ac-
tion de l'eau en y entrant. La furface de l'eau
fe trouve couverte en un inftant de ces cin-
ijuante rubans jaunes qui fe forment & qui
filent fans interruption delîus le tour. On les
enlevé avec une grande fourche de bois en
manière de trident : & dc-là on va les étendre
fur de longs chaffis élevés à deux pies de
terre & garnis de toile , où le tout bien épars
reçoit les impreflions de la rofée & du foleil ;
on a foin de les retourner afin de préfènter
au Ibleil les furfaces qui étoient d'abord en
deflbus.
Lorfque la cire a acquis le premier de-
gré de blancheur , on la relevé de defîîis
les toiles pour la porter dans le magalin ;
on l'y met en tas & on l'y laifîe pendant
un mois ou lix femaines pour lui donner
le temps de fermenter ; elle forme alors
une mafîe affez folide pour qu'on foit obligé
de fe fervir de pioches lorfqu'on veut la
retirer.
On refond de nouveau cette cire qui a
perdu fon premier jaune ; on réitère la même
opération que la première fois , on la met-en
ruban , on l'expofe au foleîl & à la rofée fur
les toiles ; cette féconde opération fe nom-
me le regre'lage. On laiffe la cire huit ou
quinze jours fur la toile , fuivant le temps
qu'il fait , & la qualité de la cire : on la
retourne comme on a fait la jaune ; & lorf-
que la cire a acquis fon blanc , on la relevé
pour la porter au magafm.
On refond cette cire pour la troifieme & .
dernière fois : cette opération fe nomme
e'culer ; elle confifle à mouler la cire en pe-
C I R. 13^
tîts pains. En la faifant fondre , queliques
blanchifleurs ajoutent trois à quatre pintes
de lait fur un miUier de cire ; ce lait occa-
fione à la vérité un dépôt ou un déchet
au fond de la cuve , d'environ deux livres
par cent de cire , de plus que lorfqu'on n'en
rner pas ; mais il paroît que ce dépôt conli-
dérablerend la cire plus parfaite & plus pure.
Lorfque la cire eft fondue & repofée,
on la fait couler fur une table toute percée
de petits enfoncemens ronds de la forme
des pains de cire blanche que vendent les
marchands épiciers-ciriers , ayant aupara-
vant mouillé les moules d'eau fraîche &
nette , pour qu'on en puifîe plus facilement
retirer la cire ; après quoi , on l'expofe en-
core à l'air fiir les toiles pendant deux jours
& deux nuits. Pour lors elle eft en état
d'être employée pour faire les cierges & là
bougie.
Il y a deux manières de faire des cierges :
l'une à la cuiller , & l'autre à la main.
Voici la première : l'on coupe les brins des
mèches que l'on fait ordinairement moitié
coton & moitié filafîe , obfervant qu'ils
foient de la longueur dont on veut faire les
cierges : on en pend une douzaine à diftances
égales autour d'un Cerceau de fer perpen-
diculairement au deffus d'un grand baflîn
de cuivre plein de cire fondue. Alors on
prend une cuiller de fer qu'on emplit de
cette cire , on la verfe doucement fur les
mèches au deffous de leur extrémité fupé-
rieure , de forte que , coulant du haut en
bas fur les mèches , elles en deviennent
entièrement couvertes , & le furplus de la
cire retombe dans le baflin , au deffous
duquel eft un brafier pour tenir la cire en
fufion , & empêcher qu'elle ne fe fige. On
arrofe les mèches dix ou douze fois de
fuite jufqu'à ce que les cierges aient pris
l'épaifleur qu'on leur veut donner. Les cier-
ges étant formés , on les pofe , pendant
qu'ils font encore chauds , dans un ht de
plume pour les tenir mous. On les en tire
l'un après l'autre pour les rouler fur une
table longue & unie , avec un inftrument
obi on g de buis , dont le coté inférieur eft
poli , & dont l'autre eft garni d'une anfè.
Après que l'on a ainfi roulé & poli les cier-
ges , on en coupe un morceau du côté du
bout épais , dans lequel on perce un trou
Si
^4© C I R
conique avec un inftrumcnt Je huis , afin
que les cierges puiiTent entrer dans les chan-
deliers. Enfin on pend les cierges à dt-s cer-
ceaux pour les fécher , durcir & cxpo(er en
vente.
Pour faire les cierges à la main ; lorique
les mèches font difpofées comme ci-dcflijs ,
en amollit la cire dans de l'eau chaude ,
& dans un vaifTeau de cuivre étroit & pro-
fond ; enfulte , on prend une poignée de
cette clrd , & on l'applique par degrés à la
mèche qui cil attachée à un crochet dans
le mur par le bout oppofé au collet , de
forte que l'on commence à former le cierge
par fon gros bout ; on continue cette opé-
ration en le faifant toujours moins fort à
mefure que l'on avance vers le collet. Le
refîe fc fait de la manière ci-defTus expliquée ,
fi ce n'efî qu'au heu de les mettre dans un
lit de plumes, oa les roule fur la table
aufli-tôt qu'ils Ibnt formés.
Il faut obferver que , pendant toute l'o-
pération des cierges laits à la cuiller , on fe
fert d'eau pour mouiller la table , afin d'em-
pêcher que la cire ne s'y attache ; & que ,
dans l'opération des cierges faits à la main ,
on fe lert d'huile d'olive pour prévenir le
iTiême inconvénient.
La bougie de table ne fe fait guère autre-
■rnent que les cierges à la cuiller : on fait des
C I R
â^tt're travaillée. Enfulte , on la retire d'entre
les draps ; on répand un peu d'eau fur une
table bien unie & bien propre ; on la roule
fur cette table avec le rouLoir qui eit ordi-
nairement un outil de buis , plat & uni pai»-'
defTous , plus long que large , ayant une
poignée pardefllis , & dont la forme , quoi-
que plus grande , eft à-peu-pVès fembla-
ble à ces morceaux de marbre taillés que
l'on met fur les papiers dans les cabinets.
Après l'opération du rouloir , on coupe la
bougie du côté du collet ; on ôte le ferret ;
on lui forme la tête avec un couteau de bois »
& on l'accroche par le bout de la mèche qui
eft découvert , à un autre cerceau garni fur
fa circonférence de cinquante crochets de
fer. Quand le cerceau elf garni de bougies y
on leur donne trois demi-jets par en bas ^
puis des jets entiers , qu'on continue jufqu'à
ce qu'elles aient le poids qu'on defire. Après
le dernier jet , on décroche la bougie ; on la
remet entre \ts draps fous la couverture ; on
l'en retire pour la repafTer au rouloir ; on 1^
rogne par le bas avec un couteau de buis ;
on l'accroche derechef à des cerceaux de
fer , & on la lailîe fécher, La bougie de
table eft de différentes grofîeurs ; il y en a
depuis quatre jufqu'à feize à la hvre.
C'eil de cette qualité du coton & de la
proportion de la mèche , que dépend en par-
mèches moitié coton , moitié fil blanc j tie la bonté de la bougie. Le coton ne îau-
&; fin ; on les tord un peu ; on les cire avec
de la cire blanche , afin de les égalifcr fur
toute leur longueur ; & on les enferre par k
bout avec un petit ferret de fer blanc placé
vers le collet de la bougie ; ce ferret couvre
l'extrémité de la mèche , & empêche la cire
de s'y appliquer. Quand les mèches font
enferrées , on les colle chacune féparément ,
par le côté oppofé au collet , à des bouts de
iicelle qui font attachés autour d'un cerceau
iufpendu au ^effus.de la poêle où l'on tient
là cire en fufibn pour coller. Quand toutes
les mèches font appliquées autour du cer-
veau , on les ^ette l'une après l'autre , jufqu'à
t e que la bougie ait acquis environ la moitié
de fbn poids ; c'efî-à-dire , qu'on verlè de
la cire deffus \ts mèches , comme on le pra-
tique aux cierges faits à la cuiller. Puis on
retire la bougie du cerceau , & on Ja met
entre deux draps avec une petite couverture
^ardeffus.^ pour la jcenir moUe & en état
roit être trop beau y trop égal , ni trop bien
épluché , lans quoi , il fait couler la bou-
, gie , ainfi que lorfqae la mèche n'efl pas alfez-
groffe ; car , pour lors , cette mèche ne con-
fumant pas allez de cire , elle s'extravafchors
du godet qui fe forme autour de la mèche,.
Il efl des cas où une bougie , même très-
bonne y. peut couler ; comme , par exem-
ple, lorfqu'elle efl agitée par un courant
d'air , ou expofée trop près du feu.
La bonne cire doit être d'un blanc clair y
un peu bleuâtre , & fur-tout traniparente ;
les cires alliées de graifî'e peuvent être fort
blanches , mais elles font toujours d'un blanc
mât& farineux ; on n'y trouve point , quand
on les touche , la féeherefîe de la cire pure ;
elles ne font point afièz tranfpar entes ; elles
ont une mauvalfe odeur qui fe fait fentir
fur-tout lorfqu^on éteint les bougies qui en
font faites.
. ; On reçonnpit a^^^^ii gp^t 4c. feus les
C I R
dents la cire alliée. Un moyen de s'aflurer
fi on y a mêlé de la graifTe , c'eit d'en faire
tomber une goutte fondue fur un morceau
de drap ; loriqu'elle eil bien refroidie &
figée , on verfe deflTus un peu d'efprit de
vin , puis , en frottant l'étoffe , la cire doit
fe détacher entièrement ; & quand l'humi-
dité de l'efprit de vin eft diffipée , il n'y doit
refter aucune tache. Il faut auffi rompre les
bougies pour connoître fi la cire intérieure
efl de même qualité que celle de deflus.
Pour faire la bougie filée , on dévide d'a-
bord les écheveaux de coton fur des tour-
nettes , en nouant d'un nœud plat , qui n'cft
pas beaucoup plus gros que le fil , les bouts
àts uns avec ceux des autres ; elle (è file à-
peu-près comme le fil d'archal , par le moyen
de deux gros rouleaux ou cylindres de bois
qu'on nomme tours , qui font placés de tra-
vers fur des pies folides , & que l'on fait tour-
ner avec des manivelles ; ce qui fait pafTer ,
en allant & venant plufieurs fois de fuite , la
mèche dans la cire fondue qui eft dans une
baflîne ou poêle de cuivre , & en même temps
par les trous d'une filière auffi de cuivre , atta-
chée à l'un des bouts de la bafline ; enforte
que , petit-à-petit , on donne à la bougie
telle groileur que l'on veut , fuivant les dif-
férens trous de filière par lefquels on la fait
pafTer. Cette bougie ell blanche ou jaune ,
îelon le prix qu'on fe propofe de la vendre :
on la phe en petits pains ronds , ou de telle
forme que l'on veut , & on la peint quelque-
fois de diverfes couleurs , fùr-tout celle qui
a la forme d'un livre.
Les bougies quarrées , qu'on nomme auffi
lougies d^huijjiers , parce que ce font les
huiffiers des appartemens du roi qui les por-
tent devant Sa Majcllé quand elle paffe d'un
appartement à un autre , fe font différemment
des bougies rondes : eifes vont en. diminuant
par le haut.
Pour les faire , on jette la cire fur la mè-
che du haut en bas , jufqu'à ce qu'elles foient
à leur groffeur. Lorlqu'un ouvrier en a roulé
une , un autre ouvrier la prend pour y for-
mer , avec le gravoir , qui efl un infîrument
de buis qui fevt à tracer les filets ï^v les cier-
ges , quatre cannelures qui lui donnent la
terme de quatre cierges foudés enfemble.
On colore aufli la cire & on la prépare
pour divers ufages. La cire blanche cft M-
C I R 141
ceptible de prendre toutes fortes de couleurs.
Pour la teindre , on broie d'abord à l'huile
la couleur que l'on defire ; enfuite on fait
fondre de là cire blanche en pain , & lorf^
qu'elle efl en fufion , on délaie dedans la
couleur broyée à l'huile ; après quoi , on la
remet en petits pains , comme à la troifieme
fonte du blanchifTage : lorfqu'on a befoin
de l'employer , on la fait fondre de nouveau.
C'efl avec cette pâte attendrie avec de
l'efTentede térébenthine, qu'on peut pein-
dre les tableaux auffi facilement qu'avec les
couleurs broyées à l'huile.
Pour le fceau de la grande & petite chan-
cellerie , l'on fait ufage de cire jaune , rouge
ou verte : la jaune- eft telle qu'elle provient
des ruches ; la rouge efl coloriée avec du ver-
millon , & la verte avec du verd-de-gris. La
cire de commifTaire cfl auffi coloriée avec
du vermillon ou cinnabre très-fins , qu'on a
jeté dedans lorfqu'elle étoit en fufîon , & à
laquelle on a allié de la poix grafTe qui la tient
toujours molle ; de forte que pour l'employer,
il eft inutile de la faire chaufïèr , ou de la
mettre dans l'eau chaude comme la cire du
fceau.
On prépare auffi de la cire pour tirer les
empreintes des pierres gravées : on prend
pour cela , par exemple , une once de cire
vierge & un gros de fucre candi broyé très-
fin : on fait fondre le tout , & on y ajoute
une demi-once de noir de fumée , & deux
ou trois gouttes de térébenthine. Lorfque
ce mélange eff un peu refroidi , on en forme
de petits pains. Quand on veut tirer une em-
preinte , on pétrit cette cire entre les doigts
pour l'attendrir ; on mouille un peu la pierre
gravée , en y appliquant la langue , &: on
l'appuie fur la cire pour en tirer l'empreinte
qui fe trouve fake avec beaucoup de préci-
fion.
Cet art a été pouffé loin de nos jours. Le
fîeur Benoit , peintre de profeifion , a trouvé
le fecret de former fur le vifàge des per-
fonnes vivantes , des moules dans lefquels il
fondoit àts mafques de cire qu'il animoit en
quelque façon par des couleurs &: à^s yeux
d'émail imites d'après le naturel. Ces figu-
res , revêtues d'habits conformes à la qua—
Hté
àts perlbnnes qu'elles repréfenfoient ,
étoient fi refî'eniblantes qu'on les prenciic
I fouvent pour les perloones mem^s»
prens^ç
i4i C I R
Les figures anatomiques de cet artifle , ne
Vont pas moins rendu célèbre que la beauté
de Tes portraits. -^
On ne donne pas d'autres préparations à
la cire blanche dont on veut faire des figu-
res ou des fruits , que de la faire fondre ,
&: de la verfer dans le moule après l'avoir
bien huilé ; enfuîte on la colore au pinceau.
Les ciriers font du corps de l'épicerie , qui
eft le deuxième des fix corps des marchands
de Paris : Voyey^ EPICIER.
Il y a au fil des officiers ciriers de la chan-
cellerie qui furent fupprimés fous Charles IX
en 15^1 , fous Louis XIII en 1632, , mais
qui ont été rétablis fous Louis XIV par une
déclaration confirmative de leurs privilèges ,
dontileft fait mention dans plufieurs ades
de 1689 & 1697.
Les cires blanches venant de l'étranger
paient vingt livres de droits d'enwée fuivant
l'arrêt du 3 février 1^88 , & quatre hvres
de droits de fortie , conformément au tarif
de i6<)^ : \qs droits d'entrée pour la cire
jaune font de cinq livres , &. ceux de fortie
fix livres par cent pefant.
Comme on peut donner le nom de ciriers
à ceux qui fabriquent la cire d'Efpagne , nous
allons expliquer ici en quoi conftfie leur
travail.
Fabrique de la cire d^Ef pagne , ou à cacheter.
On fabrique des cires à cacheter de plu-
fieurs couleurs. Pour faire la cire rouge , on
prend une demi-once de gomme-laque ( qui
efl une vraie réfine inflammable ) de téré-
benthine deux gros , de colophane deux
gros , de cinnabre & de minium de chacun
une drachme. On fait fondre fur un feu doux
dans une chaudière bien nette la gomme-
laque & la colophane , on ajoute alors la
térébenthine & enfuite peu à peu le cinnabre
& le minium. On agite le tout enfemble
pour le bien mélanger. On varie fouvent le
mélange & la proportion des matières qu'on
emploie ; mais il faut toujours pour bafe les
fubflanccs réfincufes inflammables. Lorf^
qu'on veut que la cire foit odoriférante , on
y ajoute un peu de mufc en la roulant en
bâtons. Lorfqu'on veut faire de la cire jaune
d'or , on prend deux onces de poix-réfine
blanche , de maftic & de fandaraque une
once , de fiiccin une demi-once , de gom- \
C î R
me-gutte deux gros. Si au lieu de mafîic
& de fandaraque on prend de la gomme-
laque , & qu'on omette la gomme-gutte ,
on aura une cire brune , dans laquelle on
pourra mêler de la poudre d'or. Si c'eft de
la cire noire que l'on veut faire , on fubfli-
tue au cinnabre le noir d'Allemagne. On
retire de dedans la chaudière la matière de
la cire à cacheter , & lorfque fa chaleur efl
un peu diminuée , une femme la divife par
morceaux & la pefe dans à^s balances afin
de les donner à l'ouvrier pour en faire des
bâtons de poids égaux.
L'ouvrier qui forme les bâtons de cire à
cacheter fe place devant une table quarrée ,
percée dans fon milieu d'une large ouvertu-
re , laquelle eil: recouverte d'une plaque de
fer ou de cuivre bien unie. On tient fous
cette plaque du feu allumé , & quand la
plaque a pris une chaleur convenable , on
l'arrofe avec de l'huile d'olive , on y porte
la matière de la cire à cacheter toute pré-
parée ; on la roule avec la polijjoire qui efl
une planche bien hfTe , & on en forme des
bâtons. Plus on la travaille fur la plaque ,
plus on la rend compade & de bonne qua-
lité. On rend les bâtons de cire luifans en
les expofànt à un feu modéré fur un réchaud.
Il y en a qui au lieu de préparer la cire de
cette manière , la jettent dans des moules
d'où les bâtons foi'tent tout polis.
En conféquence du tarif de 1664 , & de
celui de la douane de Lyon pour l'ancienne
taxation , la cire d'Efpagne paie neuf li-
vres cinq fous par cent pefant pour droit
d'entrée.
§ CiRIER , f. m. {Hijl. nat. Botan. )
Plukenet avoit publié , en 1691 , deux figu-
res , l'une d'un individu à fleurs mâles , Tau-
tre d'un individu à fleurs femelles à h. planche
XL VIII , de fa Phywgraphie .n'^.S Ù s >
le mâlevz". 8 , fous le nom de myrtus Bra-
' h amie œ accède ns Af ricana , baccis ,carens j
conifera , ex America etiam infulâ Bermu-
denji allata , ubi laurus odora vulgo nuncu-
patur\ & la femelle /2°. S > ^o"s celui de rnyr-
tus Brabanticce fimilis Carolinienjis y bacci-
fera , fruclu racemofo fejjili monopyrene ,
forte ambulon Scaligeri ex infulâ aruchet €?
lychno chrodryophoros. Almag. page z6o»
Catesbi en a publié auffi fous le même nom
une figure enluminée à la planche XIII &
C I R
LXlXàu volume de fon Hifioire naturelle
de la Caroline. En 1767 , M. Linné à hpage
6 ^ l , de la dernière édition de fon Syftema
natume , l'appelle myrica z y cerifera yfoliis
lanceolads fubferratis , caule arborefcente.
Cet arbrifleau s'élève à la hauteur de cinq
à fix pies feulement , fous la forme d'unbuif-
fon fphéroïde à branches menues , longues ,
aflez rares , & écartées.
Ses feuilles font alternes , elliptiques ,
pointues aux deux bouts , longues de trois
pouces , trois à cinq fois moins larges , mar-
quées de trois à cinq dentelures de chaque
c6ié feulement vers leur extrémité , relevées
en deflous d'une côte ramifiée en cinq à lix
paires de nervures alternes & portées pref-
que horizontalement fur un pédicule cyhn-
drique lix à dix fois plus court qu'elles.
Les fleurs mâles font féparées des femel-
les fur des pies ou des individus différens.
Dans les unes & les autres , c'eft une efpecc
d'épi ovoïde feffile, for tant de l'aiffelle de cha-
que feuille, quatre à fix fois plus court qu'elle,
compofé de vingt à trente fleurs fefîiles.
Chaque fleur confifle en une écaille fans
corolle , contenant dans les mâles depuis deux
jufqu'à hx anthères réunies par leurs filets en
une colonne cylindrique. Dans les fleurs fe-
melles , au Heu des étamines , c'efl un ovaire
fphéroïde ,. furmonté de deux flyles veloutés
llir leur face intérieure. •
L'ovaire devient , en mûriflant , une ef^
pece de baie fphérique verte d'abord , en-
fuite gris-cendré , d'une ligne un tiers de dia-
mètre , à chair femblable à une graifîè gris-
verdâtre , ferme , écailleufe , peu liée , lui-
fante , friable , à une loge contenant une
feule graine en oflelet fphéroïde verdâtre»
Culture. Le cirier croît communément
dans l'Amérique leptentrionale , aux îles
Bermudes „ mais plus particuhérement A la
Louifiane , dans les plaines humides & ma-
récageufes , où l'eau féjourne & pourrit pour
ainn dire fans écoulement.
Qualités. Cet arbrifleau répand une odeur
aromatique afTez agréable.
Ufages.. Les naturels de la Caroline ne
brûlent pas d'autre bougie que celle qu'ils
tirent de fon fruit. Un cirier bien chargé de
fruit en porte environ fept livres , dont fix
pour fa graine , & une pour fa chair , qui
irsûd environ un quarteron en cire,. Pour dé-
C I R 143
tacher cette cire de la graine Qu'elle enveloppe
il fuflît de faire bouillir ces Truits dans l'eau ;
alors elle fe fond , & fumage à la furface de
l'eau , d'où on la retire au moyen d'une cuil-
ler. On la nettoie enfuke en la faifant paf-
fer à travers un linge , puis on la fait fon-
dre de nouveau pour la mettre en pain. La
cire qui s'élève la première pendant l'ébul-
htion , efl jaune ; celle qui vient enfuite ell
vene : elle a une odeur aromatique douce y
aflez agréable. Elle efl plus feche , plus fria-
ble & plus tranfparente que la cire des abeil-
les. La bougie que l'on en fait efl d'abord
plus blanche que celle de la cire des abeil-
les ; mais enfuite elle jaunit , & finit par de-
venir grife-terne & comme moifie ; elle efl
plus caffante , elle éclaire moins , & fera
toujours d'un fervice inférieur chez les na-
tions qui ont l'ufage ordinaire de la bougie
de cire d'abeilles & de la chandelle de fuif
ou de graifles animales.
Remarque. On ne peut voir fans une cer-
taine peine la confufion que M. Linné ré-
pand (ùr les diverfes parties de la botanique ^
en s'efForçant de changer tous les noms an-
ciens ; & le gale en efl un exemple bien ,
fenfible : ce nom efl celui que les Ecoflbis
donnent A l'efpece d'curope , & M. Linné
a jugé à propos de lui fubflituer le nom de
myrica , que les Grecs donnent au tamaris.
Le gale efl un genre dé plante qui fe
range naturellement dans la' féconde fedion
de là famille des piflachiers , où nous l'a-
vons placé. Voye-{ nos Familles des plantes,
volume II , page 34 £. {M. Adanson. )
Il y a deux efpeces de cirier très-curieu-
fes : l une croît à la Louifiane , où on l'ap-
pelle arbre de cire ; & l'autre efpece , qui
efl petit , croît dans la Caroline & dans
r Acadie , où on trouve de femblablcs ar-
brifleaux ; ils font plus petits. Il y en a
aufli dans le Canada , fur la frontière de Vh-
cadie ; on les y nomme lauriers faur âges. Ils
ont encore une autre marque qui fert à les
diflinguer de ceux de la Louifiane : c'efl:
que leurs feuilles font plus larges , & pro-
fondément dentelées. Miller en indique cinq
efpeces , MM^ Van-Hazea fept , & M^
Linné cinq.
Quoique ces arbrifîêaux {oient aquati-
ques , ils ne laiflent pas de bien venir
. dans \qs terrains fecs j à l'ombre d'autres
144 C T R
arbres , comme au foleii & dans les pays
chauds , ainfi que dans les froids. Ils pro-
fitent cependant mieux dans des climats
chauds : & l'on remarque qu'au deflus du
trente-neuvième degré de latitude , ils ne
font pas aufE beaux que dans une latitude
moindre.
On alTure qu'à la .Caroline & à la Loui-
lîane ils le multiplient aifément de drageons
enracinés. Les bonnes graines venues de
l'Amérique lèvent très-bien en Fr?incc &
même en SuifTe. Il faut les femer dès qu'elles
Ibnt arrivées , dans des terrines ou dans
des caifîes : la graine ne levé que l'année
fuivante. On laifle les pots dans le jardin
en bonne expofition , on les couvre d'un
peu de paille contre la rigueur du froid.
Lorfque le printemps efl venu , on les met
en couche pour faire lever la graine. On
tranfplante enfuite les plantes dans un ter-
rain humide , où elles fupportent le froid
le plus rigoureux de nos hivers. C'ell ainfi
que la culture s'en fait en SuifTe. Les fleuri!^
tts françois renferment les jeunes arbres dans
les orangeries , car nos hivers leur font très-
Buifibles. Quand les tiges font un peu grof-
fes , on ne rifque rien de les mettre en pleine
terre dans un lieu humide , avec la pré-
caution feulement de les couvrir d'un peu
de htiere pendant le froid. Quand ils y ont
pafle quelques années , on peut compter qu'ils
y fublifleront , & le naairaliferont avec le
loi & le climat. Il y en a eu ainfi en An-
gleterre & à Trianon , qui étoient chargés
de fleurs & de fruits.
Celui de l'Acadie ne craint pas le froid.
Celui de la Louifiane foutient afTez bien nos
hivers lorfque , lailîant fa tête fe former en
tête de faule , on l'ébranche avant l'hiver
pour couvrir tout le haut avec de la litière.
Au refte , ces arbrifîeaux ne rapportent
prefque point jufqu'à ce qu'ils aient cinq ans ;
mais enfuite leur produit va toujours en aug-
mentant ; enforte qu'après quelques années ,
chacun d'eux peut fournir 25 à 30 livres
de graine. Les martinets , qui font en grand
nombre à la Louifiane , en mangent beau-
coup : c'eft ce qui fait qu'au lieu de trente
livres , on n'en recueille guère que fept à huit^^
Le principal ufage du cirier , eft l'efi^ece
de cire que l'on recueille de fes baies. Sept à
feuit livres rendent environ une livre de cire.
C I R
Quand la cire eft enlevée , on appefçoîc
à leur furlace une couche d'une matière qui
eft couleur de laque : l'eau chaude ne la
dilTout point , l'efprit-de-vin en extrait une
teinture , & l'on croit qu'elle pourroit être
de quelque utilité pour les arts.
Manière de tirer la cire des haies. Les
ayant fait bouillir dans de l'eau , il fumage
une liqueur graflé qui fe fige , & qu'on re-
cueille jufqu'à ce qu'il n'en paroilîè plus.
Avant que la liqueur fe refroidifle , on ôte
les baies & leurs queues avec une écumoire.
Ce qui a furnagé eft d'un gris-verd. Les
bougies que l'on en fait ne rendent qu'une
lumière Ibmbre & trifte. Au refte cette cire
blanchit plus vite que la cire des abeilles.
Depuis quelque temps on a pertedionn*
cette méthode , & l'on a réuifi à taire que
cette cire fût d'abord blanche ou jaunâtre.
Ce nouveau procédé confifte à mettre pre-
mièrement les baies & leurs queues dans
une chaudière, où on les couvre entière-
ment d'eau bouillante. Au bout de quelques
minutes , on tire cette eau dans un baquet ,
où la cire fe fige en refroidiflant , & eft
d'un "jaune-pâle ; mais fix ou fept jours d'cx-
pofition au ferein fuffifent jpour la blanchir
entièrement. L'ayant ramaffée , on rejette
l'eau fur les baies , & on les fait bouillir à
difcrérion julqu'à ce que l'on juge que toute
la cire foit dillbute. Cette cire eft beaucoup
plus verte que fi l'on n'eût pas retiré celle
qui eft jaune.
Si l'on met avec la féconde cire qui eft grof^
fiere & verte, à-peu-près un tiers de fuif,
& qu'on les jette dans une chaudière qu'on
remplit d'eau très-chaude & prefque bouil-
lante , au bout de vingt minutes qu'on re-
tire l'eau ce fuif a pris avec la cire une con-
fiftance prefqu'égale à celle de la cire pu-
re, mai« eft très-verd. Les bougies qu'on
en fait éclairent aufli bien que la chandelle ,
& durent le double.
On attribue la grande verdeur de la fé-
conde cire au noyau que l'ébullition atten-
drit afîez pour qu'il teigne la matière grafîe.
M. le Page croit que la queue y contribue
auffi , & il confeille de la féparer avant
d'expofer les baies à aucun procédé.
La cire de ces baies , de quelque manière
qu'on la tire , eft lèche , & fe réduit aifé-
ment entre les doigts en poudre grafTe. C'efl
pourquoi
C I R
pourquoi les bougies quel'on en fait durent
beaucoup plus que celles de la cire des abeil-
les. Auilî les préfcre-t-ondans 1^ iles où
la chaleur du climat amollit nos bougies ,
enforte qu'elles coulent comme des chandel-
les. D'ailleurs ces bougies de la Louifiane
répandent une odeur d'anis en brûlant.
M. Duhamel a mêlé un peu de cire ordi-
naire , & une petite portion de iuif , avec la
cire réfmeufe de l'arbre dont nous parlons ,
& en a fait faire des bougies qui ont un peu
blanchi fur le pré , beaucoup moins cepen-
dant que la cire. Elles ont auffi donné une
odeur agréable.
Les égouttures de la cire d'arbre , fur-tout
de celle qui n'eft pas verte , ne tachent
point les étoffes. On les enlevé par écailles ,
& en frottant , elles s'en vont comme de la
boue feche.
L'eau qui a bouilli avec cette fubftance
réfineufe , eft fort aflringente : elle arrête les
diarrhées ; & l'on dit qu'en faifant fondi-^
du fuif dans cette eau , il acquiei^t prefque
autant de coniiftance que la cire.
Pour blanchir la cire d'arbre , il y a des
curieux qui l'expofent en plein air , fufpen-
due en paflilles de deux à trois lignes d'épaif-
ièur. Elle blanchit ainfi parfaitement , mais
cette pratique ell longue.
Une autre , plus aifée & plus expéditive ,
cft de hacher la cire en petits morceaux vers
la fin de mars , la mettre dans des vafes de
terre bien unis , & l'expofer de la forte au
foleil à l'abri du vent & de la pluie. En
fondant à cette chaleur , la cire devient en
état d'être mife en paflilles d'environ un
demi-pouce d'épaifleur : moins elles font
épailTes , plutôt elles blanchiffent. On les
lailTe alors expoiees au ferein , & le lende-
main on les retourne pour qu'elles fondent de
nouveau. Ce procédé fe recommence dix
à douze fois ; après quoi cette cire cfi paf-
fablement blanche , & l'on fe contente ordi-
nairement de l'employer en cet état. Il y
a lieu de préfumer qu'en continuant cette pra-
tique, on ameneroit la cire au point de la
plus grande blancheur.
On en fait de la bougie après l'avoir fait
fondre au bain-marie , enforte qu'elle ne
chauffe pas trop , car elle jauniroit ; on la
coule. dans les moules à travers un linge bien
Jfin, fur lequel on met encore quelquefois
Tome VI IL
C I R i4î
un peu de coton bien carde , afin de la puri-
fier entièrement : car moins^ elle efl pure ,
^ plus la lumière qu'elle jette eft fombre.
Quand la bougie cfl tirée des moulés , on
achevé de la blanchir en la tenant fufpen-
due en plein air & au foleil , ayant atten-
tion de ne la laifler adofféc contre quoi que
ce foit , ftnon elle fondroit. On la retourne
tous les jours , pendant environ un mois ,
afin qu'elle blanchifîe également de tous
côtés. Plus on la laifîe long-temps dans cette
pofition , plus elle devient blanche & belle.
Il faut obferver que le foleil auquel on l'ex-
pofe ne foit pas trop ardent.
Cette cire , mêlée avec un tiers de fuif,
toute compenfation faite , peut donner une-
lumière dont la dépenfe ne fera que dou-
ble de la chandelle : & cts bougies brû-
lent une fois moins vite que les chandelles
ordinaires. Ainfi il n'en coûteroit pas réelle-
ment plus pour les unes que pour les autres.
Les arbres de cire peuvent être cultivés
en quelques pays , fur-tout dans les méri-
dionaux. M. Duhamel en a vu en Angle-
terre & à Trianon qui étoient chargés de
fleurs & de fruits : & il efl probable qu'en
fcmant des graines de cet arbre dans des
caiflès placées dans des orangeries jufqu'à
ce que les plantes fuflènt fortes , & les ac-
coutumant peu à peu à notre climat , on
réufliroit à les établir dans des pays plus
froids ; car il y a diverfes efpeces de plan-'
tes qu'on trouve dans- les pays chauds &
dans les parties froides de la zone tempérée.
Telle efl l'épine blanche & une efpecfe de
piment royal , arbufle odoriférant qui fc
trouve en Eipagne , en Canada , en France ,
en Portugal & en Suéde. Or on trouve des
ciriers à Fombre des autres ; on en voit qui
font expofés au foleil , d'autres dans des
lieux aquatiques , d'autres dans des terrains
Çtcs. Enfin on en trouve indifFéremmenf
dans les pays chauds & dans les pays froids.
Il croît auffi à la Chine une efpece d'ar-
bre de cire , mais qui y eft très-rare : on l'y
nomme pe-la chu. ( •+- )
CIRIMANAGE, f. m. {lurifpr.) ou
CIRMANAGE ^même SIRIMENAGE,
eft en Béarn un cens qui eft dû aux feigneurs
par chaque habitation. Il en cil fait mention
dans une charte de Gafton de Moncade , de
l'an 1^84. , rapportée par M. de Marca en
14^ C î R ^
fon hifl. de Béarn , Uv. VII ^ chap. xv , n,
/\- yp. 6xj y & dans [ç.^ preuves du chap.
xxviij y du liv. V y de fon hifl. p. 44^ y
col. z . Cenfum totius villœ y quod pocatur
rulgariter cirimanage. {A)
CIRITA , f. m. ( Hlfi. nat. Botaniq. )
Les Brames donnent ce nom & celui de ciri-
tamari ou de negunda à un arbrifleau du Ma-
labar , très-bien gravé , avec la plupart de
fes détails , par Van-Rhecde dans fon Hortus
Malabaricus _, volume V y planche XLIX y
pag. gj . Les Portugais l'appellent nochil y
les HollandoisM'a/<rr-X:wyj--^oo/n ; Ray dans
fon Hiftoria generalis plantarum^p. i ^y^y
& J. Commelin l'appellent bacc'ifera Mala-
baricafruclu oblongo tetracocco calyculato.
C'eit un arbriilèau qui sVleve à la hauteur
de lix pies , fous la forme d'un builTon fphé-
roïde , compofé de nombre de branches
alternes & oppofées cylindriques , à écorce
d'abord purpurine y luifantc^ cnfuite cendrée.
Sa racine ell ramifiée à bois blanc y re-
couvert d'une écorce jaunâtre.
Ses feuilles font oppofées deux A deux &
trois à trois , elliptiques y pointues aux deux
extrémités , longues d'un pouce & demi ,
une fois moins larges , épailTes y entières ,
lifîes , relevées en deffous d'une côte lon-
gitudinale , ramifiée de trois à cinq paires de
nervures alternes , & portées horizontale-
ment fur un pédicule demi-cyhndrique très-
court , attaché aux branches à des difîances
d'un à deux pouces.
De l'aifTelle de chacune des feuilles fu-
périeurcs fort un corymbe une fois plus long
qu'elles , compofé de deux à cinq fleurs blan-
ches , longues d'un pouce & demi à deux
pouces , fefliks au haut d'un péduncule com-
mun une fois pkis court qu'elles , mince &
purpurin.
Chaque fleur efl hermaphrodite , mono-
pétale y irrégulieredans fa corolle & ks éta-
mines , & poiée au delTous de l'ovaire. Elle
confifte en un calice verd-purpurin , per-
iiflant , conique , renverfé , d'une feule pie-
ce , oblong , couronné de cinq dents ; en
une corolle blanche , monopétale à tube
tcès-long , très-menu y partagé en cinq divi-
fions deux à trois fois plus courtes que lui ,
elliptiques , obtufes , concaves y prefque
ëgales , une fois plus longues que larges ; &
en quatre étamines une fois plus longues
C I R
qu'elles , prefque égales , rapprochées par
paires , à anthères jaunâtres arquées; L'o-
vaire efl porté fur un petit dilque jaunâtre ,
élevé fur le fond du calice , & furmonté
d'un ftyle cyhndrique , rougeâtre , terminé
par deux ftigmates coniques à la hauteur des
étamines.
L'ovaire , en mûrifîant , devient une baie
ovoïde , longue de cinq à fix lignes ; d'un
tiers moins large , verte d'abord , enfuite
purpurine y luifante , marquée de quatre fil-
ions & à quatre loges , fe féparant en qua-
tre quartiers , dont chacun forme une efpece
de pépin , obtus au fommet, pointu en bas ,
une fois plus long que large , convexe par
le dos , à deux cotés plats , couverts de chair
pâteufe , cendré-verdâtre & contenant une
amande blanche , longue de trois hgnes ,
deux à trois fois moins large , verticale , atta-
chée par fa partie inférieure.
Culture. Le cirita croît au Malabar , fur-
tout autour de Cochin , de Porca & de Pa-
roe dans les terres humides qui bordent les
rivières , & au Sénégal fur la côte maritime
dans les terres fablonneufes , voilines de l'ilc
de Corée. Il eft toujours verd , toujours
chargé de fleurs & de fruits.
Qualités. Toutes ces parties ont une faveur
amerc , un peu acre & une odeur forte.
Vf âges. Ses feuilles féchées & pulvérifées
fe donnent tous les jours à petites dofes
dans l'eau de riz , infufées avec le fucre , pour
guérir les maladies vénériennes. Ces mêmes
feuilles cuites & pilées avec un jaune d'œuf
forment un cataplafme qui s'applique utile-
ment fur des bubons vénériens. La décoc-
tion de Çts racines & de fes feuilles fe prend
en bain dans la manie , la phrénéfie & fem-
blables afFedions de la tête. L'huile dans
laquelle on a fait cuire fa racine , s'emploie
en liniment pour frotter les parties attaquées
de la goutte.^—
Remarques. Le cirita n'a encore été dé-
terminé par aucun botanifle. Van-Rheede
s'eft trompé en lui attribuant cinq étamines
au lieu de quatre. Il forme un genre nouveau
voifindu volkameria dans la famille des ver-
veines. Voye'{ nos familles des plantes y
vol. II ^ page zoo. (M.Adansoj^.)
CIRKNITZowZIRKNITZA , {Geog.)
bourg d'Allemagne , dans lé cercle d'Au-
triche, & dans la partie du duché de
CI R
Carniole , appcllée la moyenne ou du milieu.
De très-hautes montagnes l'environnent , &
le fameux lac dont on va parler en tire Ton
nom. Ce bourg eft de la feigneurie de
Haasberg ; il a le droit détenir marché , & il
eft le grand entrepôt des Tels que la cour de
Vienne fournit au pays.
Le lac de Cirknit\ , en langue Carnienne ,
Z irknisku-Jeferu , remarquable par des fin-
gularités dont on s'étonne de loin , & dont
on profite de près , peut avoir un bon mille
d'Allemagne d'occident en orient , & demi-
mille du (eptentrion au midi. Il eft au cen-
tre de monts & de rochers très-élevés &
très-arides au pié defquels fe trouvent , de
îbn côté , & tout à la ronde , deux châteaux
habités , neuf villages & vingt églifes. Sa
profondeur en général , & indépendamment
de celle des creux & crevaflfes dont il eft per-
cé , & dont la plupart ont des fonds très-
bas , eft d'une roife au moins , & d^ quatre
toifes au plus. Il contient trois ilcs & une
prefqu'île, dont les agrémens champêtres
contraftent , dit-on , merveilleufement avec
l'air rude & fauvage que le refte de la con-
trée préfente. L'une de ces îles fe nomme
Vornek , & renferme un village avec un tem-
ple ; les deux autres , appellées Velka-Go-
rit^a & Mala-Goritia _, font uniquement
plantées d'arbres. Dorvofche\ ou Dervof-
chek y c'eft le nom de la prefqu'île , femble
toucher à Vornek , mais elle en eft féparée
par un canal. Les eaux de huit torrens , grands
& petits , entrent dans ce lac ; & de fon fein
s'élèvent , de diftance en diftance , des mon-
ticules en aflez grand nombre. La defcrip-
tion que l'on donne ici eft tirée des œu-
vres ciu célèbre D. Bufching : l'on /ait com-
bien peu l'on erre en géographie , quand
on fuit les pas d'un tel guide. Ce favant
homme nous dit que le lac de Cirknit'{ , fi
fameux par des defféchemens , qui font
quelquefois que dans le courant d'une an-
née l'on y prend du poifibn , Ton y fauche
du foin, l'on y femc & moifTonne du mil-
let , & l'on y chafTe au fauve & au gibier ,
que ce lac , dis-je , eft affez irréguHer dans
(es écoulemens ; qu'il eft des temps où fon
delTéchement n'arrive que de loin en loin ,
de trois en trois ans , de quatre en quatre ,
& même de cinq en cinq ; & d'autres où
cephénomencalieudeux & jufques à trois '
C I R 1 4y
fois dans un an. Que , foit en été , foit en
hiver , mais plus communément en été ,
dans les mois de juin & de juillet , cet écou-
lement ne s'opère jamais que par une cer-
taine fuite de jours fecs. Que deux grandes
cavités , ouvertes au niveau du lac , dans
des rochers qui font à fon nord-oueft , don-
nant effor à Çqs eaux de l'autre coié de la
montagne , forment , quand il eft plein >
^Qs débouchés ordinaires ; mais que , fùjec
à des écoulemens inopinés qui devancent
le temps où il eft comblé , & lui luppofent
d'autres canaux de fortie que ces deux cavi-
tés du nord-oueft , alors ce font les creux
ou crevafîes dont il eft percé , & dont le
nombre eft de dix-huit , qui forment (es
débouchés extraordinaires. Que de ces l8
creux , il en eft cinq que l'on peut confidé-
rer comme fes principaux entonnoirs , &
comme contribuant le plus à fon defîeche-
ment , vu que dans les temps d'écoulement
réglés , ils fevuident régulièrement les uns
après les autres , chacyn en cinq jouis , &
qu'ainfi dans rcfpace de 25 , tout le fond
du lac eft à fec. Qu'au premier indice d'é-
coulement qu'en ont les pêcheurs du voifi-
nage , au moyen d'un lignai que leur don-
nent \ts habitans du revers de la montagne ,
l'on voit des filets par multitude fe jeter avec
emprefTement , mais cependant avec ordre
& méthode , dans les divers endroits où
l'eau s'engoufre , & que là fè pèchent en
abondance de gros brochets , des tanches ,
6'c. Que le droit d'y pêcher appartient à fix
feigneuriesdes environs ; favoir , à celles de
Haasberg , de Steegberg , d'Auersberg , de
Laas , de Schneberg & du monaftere de
Sittick ; que la feigneurie de Haasberg cède
le fien à la chartreufe de Freudenthal ; &
que moins les defîechemens de ce lac font
fréquens , & meilleure en eft la pêche. Que
l'entonnoir nommé Rihes-Cajama s'allonge
obhquement en forme de caverne fouter-
rainc , dans laquelle un homme peut defcen-
dre & marcher à fon aife : que les creux
nommés Narte & Piaule ne font jamais
entièrement à fec , maisdejneurent fangeux ,
& deviennent , au départ des eaux du lac ,
l'afyle d'une multitude de fangfùes & des
poiffons échappés aux filets des pêcheurs.
Cette dernière circonftance eft remarqua-
ble ; elle explique naturellement la difficulté
T 2
148 C I R
qui pourroit fe préfenter à l'efprit au fujet
du prompt repeuplement du lac à Ton re-
tour : l'on voit que par la réiidence du poif-
fon dans ces deux creux conftamment hu-
mides , il fe fait un dépôt & un entretien
de frai , fécondé & répandu par les eaux
dès qu'elles reviennent à fourdir. M. Buf-
ehing dit encore que s'il arrive au lac de
fe deflecher de bonne heure dans l'année,
c'eft alors que fes merveilles fe déploient ,
c'efl alors que l'herbe y croît en vingt jours,
qu'on la fauche y qu'on la cueille , & que
préparant enfuite le terrain avec la char-
rue , l'on y feme du millet ; mais que tou-
tes les années ne font pas également favo-
rables à cette double récolte , les eaux fe re-
tirant quelquefois trop tard pour que l'on
ait le temps de femer ; & d'autres fois re-
venant trop tôt pour que Ton ait le temps
de moiffonner. Qu'enfin dans les années où
l'abfence des eaux eft de quelque durée ,
la métamorphofe du lac eft complète , en
ce que la place eft alors le rendez-vous
général du fauve y du gibier & des chafTeurs
de la contrée. Relativement au retour des
eaux du lac de Cirknif{ , l'illuftre géographe
iait obferver que de la quantité de pluie ,
plus ou moins grande , qui tombe à la fois
dans le canton , dépend ordinairement la
vîtefle ou la lenteur de ce retour : pleut-il
beaucoup , & le tonnerre fe fait-il enten-
dre en même temps avec un bruit dont la
terre tremble , alors de toutes les crevafles
du lac , fans exception , jaillifîènt à gros
bouillons des eaux qui , dans 20 à i^ ligu-
res , en ont abfolument rempli le baflin :
la pluie au contraire n'eft-elle que petite ou
modérée , les nues ne font-elles que mé-
diocrement épaifTes , ou foiblement agitéees ,
alors ce n'ed que par quelques-unes des bou-
ches méridionales que les eaux fortant de
terre , viennent de nouveau former le lac :
& un fait confiant dans l'un & dans l'au-
tre des cas , c'eft que le lac une fois bien
rempli , l'on en voit la furface incelfamment
couverte d'oies fauvages , de canards fau-
vages , & de plufieurs autres efpeces d'oi-
feaux aquatiques. Un autre fait de ce gen-
re , & qui ne doit pas être omis dans l'énu-
mération des fingularités de ce lac , c'efl
la multitude de canards gras , fans plumes ,
aveugles & tout noirs que les. ouvertures
C I R
■â^^tWkQS S ékadulie & Uralnajammay dè^
gorgent en automne avec leurs eaux , lors-
qu'il furvient quelque grand orage : ces deux
ouvertures font au midi du lac , & un peu
au deflus de fon niveau ; elles ont chacune
à leur entr-ée une toife de largeur & une
toife de hauteur , & fon peut en temps fec
fe promener dans leur enceinte , & y pé-
nétrer affez loin : en temps humide & à la
bruyante époque du retour des eaux avec
éclairs & tonnerres , il faut les fuir ; le lac
n'a pas de bouches aufli terribles par l'a-
bondance des eaux qu'elles jettent , & fur-
tout par l'impétuofité qui les accompagne ;
les flots fortant de leurs cavernes , s'élancent
à cinq toifes loin de l'entrée , & fe préci-
pitant au fond du lac , font tout le bruit
& produifent toute l'écume des plus gran-
des catarades ; c'eft donc par ces deux bou-
ches que viennent alors au jour ces canards
extraordinaires ; ils naiflent comme au fein
du fracas , & fe montrent d'abord foue l'ap-
pareil le plus hideux; mais bientôt leur nudité
difparoît avec leurs ténèbres , & dans l'ef-
pace de quinze jours , fi les chafleurs les
laiflent vivre , ils ont des plumes & voient
clair- L'on finira cet article en ajoutant
qu'en hiver les eaux du lac de Cirknit\ s'élè-
vent ordinairement au point d'inonder la plu-
part àes campagnes adjacentes. ( D. G.)
CIRLE ou ZIRL , ( Geog.) village d'Al-
lemagne , dans le cercle d'Autriche & dans
le comté du Tyrol , au quartier du haut
Innthal, feigneuriedeHertenberg. C'efl dans
fon voifmage que s'élève le roc efcarpé ap«
pelié Maninfwand , au fommet duquel les
chroniques du xv^ liecle nous difent que
l'empereur Maximilienl pourfuivant un cha-
mois , fe trouva fort imprudemment grim-
pé , fans favoir comment en defcendre :
elles ajoutent que pour fe tirer de ce mau-
vais pas , il fallut qu'un ange même vînt
prendre ce prince par la main , & le rame-
ner au bas du rocher ; & qu'en mémoire &
en reconnoifîàncc de ce fecours furnaturel ,
Maximilien fit ériger fur la place une croix
de 40 pies de haut , auprès de laquelle il
fit placer en grandeur naturelle les ftatues
de l'apôtre S. Jean & de la vierge Marie.
Quelque fabuleufes que paroifî'cnt la plu-
part des circonftances Je cet événement ,
les auteurs du grand théâtre hiftorique
C I R
n'ont pas dédaigné d'en donner la repré-
fcntation dans les figures de leur ouvrage.
{D. G.)
CIROENE , f. m. ( Pharmac.) eu un
emplâtre réfolutif, fortifiant, où on fait
entrer la cire & le fafran. Lemeiy.
On appelle plus communément clroene
un grand emplâtre, c'efl-à-dire un grand
morceau de toile fur lequel on étend un
emplâtre quelconque, & qu'on defiine à
couvrir une grande partie du corps , comme
les reins, la cuiflè, bc. V. EMPLATRE, {b)
CIRON , f. m. ( Hifi. nat. ) ciro , fyro
acarus , infcde fi petit qu'on le prend lou-
vent pour objet de comparaiibn , lorfqu'on
veut donner l'idée du petit volume d'une
choie prefque imperceptible. On donne auifi
vulgairement le nom de ciron à tous les in-
fèdes les plus petits. En effet on a peine à
appercevoir un ciron fans l'aide du microf-
cope : ce n'efi que par le moyen de cet inf-
trument que l'on peut diftinguer les diflTéren-
tes parties de cet infede , & que l'on recon-
noît qu'il reflemble à un poux. Son corps eu
rond , blanchâtre ; le dos efi couvert d'é-
caille : il y a fur la tête deux taches qui
marquent , à ce que l'on croit , l'endroit des
yeux , parce que Tinfede fe détourne lorf-
qu'on luioppofe la pointe d'une épingle con-
tre ces taches. Les cirons ont fix partes noi-
râtres , trois de chaque côté, dont deux iont
placées auprès de la tête : c'efl avec ces deux
paires de pattes qu'ils creufent dans la peau ,
ordinairement à la paume de la main & à
la plante du pié , & qu'ils y font de longs
filions , comme les taupes en font dans la
terre. C'efi: par cette manœuvre que ces in-
feâes caufent une grande démangeaifon ,
& des puftules auxquelles on a auifi donné
le nom de ciron. Il y a auffi de ces inledes
dans la cire & dans les fromages qui ont été
gardés pendant long-temps. Voy. aB. eru-
dit. ann. 1682.; pag. 32 y. Mouffet.'
theat. infect. Voye^ CiRON, {Médet.)
Voyei^ auffi INSECTE. (I)
Ciron , {Me'd.) il s'ouvre quelquefois
partage entre la peau & l'épidermc , & il
caufe alors des démangeaifons incommodes:
on le rencontre quelquefois dans les pufiules
de la gale , & dans celles qui font occafio-
nces par la vérole ; on en a même trouvé
dans les dents cariées. Les remèdes huileux,
C r R. 149
le foufre , & toutes les odeurs fortes enne-
mies des infectes en général, détruifent cette
incommode vermine.
Leuwenhoeck a obfervé que la vapeur de
la noix mufcade que l'on faifoit brûler, les
fufïoquoit très-promptement.
Il y en a une autre efpece en Amérique ,
nommée nigas , qui ell plus incommode
encore que le ciron de notre pays. Voye^
NiGAS. Rieger. {b)
* CIRQUE, f. m. {Hift. anc.) grand
bâtiment toujours plus long que large , où.
l'on donnoit difterens fpedacles : un des
bouts , le plus étroit , étoit termiiié en ligne
droite ; l'autre étoit arrondi en demi-cercle,
les deux côtés' qui partoient des extrémités
delà face droite , & qui alloient rencontrer
les deux extrémités de la face circulaire,
étoient les plus longs ; ils fervoient de bafe X
desfieges ou gradins placés en amphithéâtre
pour les fpedateurs ; la face droite & la plus
étroite étoit compofée de douze portiques
pour les chevaux & pour les chars; on les ap-
pelloit carceres; là il y avoit une ligne blan che
d'où les chevaux commençoient leurs cour-
Ces. Aux quatre angles du cirque, fur le pour-
tour des faces , il y avoit ordinairement qua-
tre corps de bâtimens quarrés , dont le haut
étoit chargé de trophées; quelquefois il y en
avoit trois autres dans le milieu de ce pour-
tour , qu'on appelloit meniana. Le milieu de
l'efpace renfermé entre les quatre façades
dont nous venons de parler, étoit occupé par
un maffif d'une maçonnerie très-forte, de 12.
pies d'épaifïèur fur fix de haut ; on l'appelloit
fpina circi. Il y avoit fiir la fpina des autels ,
des obélilques, despyramides, des flatues, &
des tours coniques : quelquefois les tours co-
niques étoient élevées aux deux extrémités
fur des maffifs de pierre quarrés , & féparés
par un petit intervalle de h fpina , enforte
qu'elles partageoient chacun des efpaces des
extrémités de la/}? //7a aux façades intérieu-
res du cirque en deux parties , dont la plus
grande de beaucoup étoit entre la façade &
les tours. Au deflous des gradins en amphi-
théâtre placés fur les façades du cirque , on
avoit creufé un large fofTé rempfi d'eau , &
deftiné à empêcher les bêtes de s'élancer fur
les fpedateurs ; ce fofTé s'appelloit euripe.
Les jeux, les combats, les courfes, Ùc. fe fai-
foient dans l'efpace compris de tout côté
150 C I R
entre l'euripe & la fpina circi\ cetefpace
s'appelloit area. A l'extérieur le cirque étoit
environné de colonnades, de galeries, d'édi-
fices , de boutiques de toutes lortes de mar-
chands , & de lieux publics.
Lesbâtimens qu'on appelloit cirques à
Rome, s'appeiloient en Grèce hippodromes.
Voy. Hippodrome. On en attribue l'inf-
titutionàRomc à Romulus , qui les appella
eonfualia , nom pris de Corifus , dieu des
conleils, que quelques-uns confondent avec
Neptune l'équellre.Lesjeux qui fe célébroient
dans les cirques fe taiibient auparavant en
pleine campagne, enfuite dans de grands
enclos de bois , puis dans ces iûperbes bâti-
mens dont nous allons parler.
On célébroit dans les cirques des courfes
de chars, aurigatio (voje^^^CiiAK <& COUR-
SES) ; des combats de gladiateurs à pies ,
pugna pedeflris {i^oyei GLADIATEURS) ;
des combats de gladiateurs à cheval , pugna
equeflris (^'oyf;( GLADIATEURS); la lutte,
lu^a {voye'{ Lutte) ; les combats contre
les bêtes, venatio {voye^ BÈTEs) ; les exer-
cices du manège par de jeunes gens ; ludus
Trojcc, jeux de Troye ; les combats navals ,
naumachia. Voye-{ NaumaCHIES.
On comptoit à Rome jufqu'à quinze cir-
ques ; mais ilsn'étoient pas tous de la même
grandeur ni de la même magnificence. Il
y avoit :
Le cirque d'Alexandre. Il étoit dans la
neuvième région, où efl aujourd'hui la place
Navonne. On en voit la figure lur quelques
monnoies d'Alexandre Sévère. On l'appcl-
loit aufli le cirque agonal , parce qu'on y
«voit célébré les jeux de Janus Agonius. On
prétend que c'efi par corruption d'Agonius
qu'on a fait le nom -ATavo/zntf . On dit qu'on
découvrit des reftes de ce cirque en crei^fant
les fondemens de l'églife de fainte Agnès.
Le cirque d'Antonin Caracalla, ou peut-
être de Galien. Il étoit dans la première ré-
gion, à l'endroit où efl aujourd'hui la porte
S. Sébaflien, anciennement appellée la porte
Capene. On croit en voir des reftes entre
réglife S. Sébaftien & le çapo dit Bove. Le
pape Innocent X fit ériger fon obélifque
fur la magnifique fontaine de la place Na-
vonne. Uaire en eft aduellement une prai-
;fie de 2,23 cannes de long , fur 33Î de large.
Le cirque d' Aurélien. Il étoit dans la cin-
C I R
quieme région , mais il faut plutôt l'appeller
cirque d'Eliogabale , parce qu' Aurélien ne
fie que le réparer. Voye\ plus bas le cirque
d'Eliogabale.
Le cirque Caflrenfis. Il étoit devant la
porte LubicclnaouàtVrçv\ti\.& y aujourd'hui
la porta Maggiore , non loin de l'amphi-
théâtre Caftrenfis , derrière fainte-Croix en
Jérufalem. On prétend qu'il n'étoit qu'à l'u-
fage des foldats , & que c'eit auffi le même
que celui d'Eliogabale.
Le cirque de Domitia. Il étoit dans la
quatorzième région. Il y a lieu de conjedu-
rer que c'étoit le même que celui d'Adrien.
Le cirque d'Eliogabale. Il étoit dans la
quinzième région. Son obélifque ell regretté
àts favans ; il étoit chargé d'hiéroglyphes ;
on en voit les morceaux dans la cour du
cardinal François Barbarin. Il reftoit en-
core il n'y a pas long-temps des vediges
du cirque.
Le cirque de Flaminius. Il étoit dans la
neuvième région , dans des prés appelles
alors prataFlaminia. Il fut bâti l'an 5 30 par
Cneius Flaminius cenfeur , le même qui fut
défait par Annibal près du lac Thrafiraene.
Il avoit une double galerie de colonnes co-
rinthiennes. Il étoit hors de la ville. C'étoit
là que commençoit la marche des triom-
phes. On y donnoit la paie " aux foldats. On
y célébroit les jeux Appollinaires & les nun-
dines. Quand il étoit inondé du Tibre , la
célébration des jeux fè transféroit au mont
Quirinal. On croit qu'il fut ruiné dans la
guerre des Goths &de l'empereur Juftinien;
& l'on prétend qu'en i^co on en voyoit
encore d^s veftigesà l'endroit où eft aujour-
d'hui l'églife de «S". Nicolo aile Calcare.
Le cirque de Flore. Il étoit dans lafixie-
me région , en un enfoncement, entre le
Quirinal Se le Pintius. C'éroit-là qu'on cé-
lébroit les jeux Floraux. On prétend que ce
fut un théâtre. Il s'appelle aujourd'hui la
pia\\a Grimana.
Le circus intimus. Il étoit dans la vallée
Murcia ; mais comme le grand cirque s'y
trou voit auffi , on les confond.
Le cirque de Jules-Céfar. On prétend qu'il
s'étendoit depuis le maufolée d'Augufle juf^
qu'à la montagne voifine ; mais il y a du
doute même ilir fon exiftence.
Le grand cirque. Il étoit dans TonziecM
C I R
i-égion. On l'appellolt le grande parce qu'on y
cëlébroit Icsgrands jeux , ou jeux confacrés
diis magnis , ou parce qu'il étoit le plus
grand des cirques. Il étoit dans la vallée
Murcia, entre les monts Palatin & Aventin.
Il fut commencé fous Tarquin le vieux. Les
fénateurs & chevaliers s'y faifoient porter des
Banquettes de bois appellées fori , qu'on
remportoit à la fin des jeux. Il fut dans la
fuite orné, embelli &renouvellé fous plufieurs
empereurs, mais fur-tout fous Jules-Céfar.Sa
longueur étoit de troij ftades & demie, ou de
ii8o pies ou environ, & fa largeur de quatre
arpens, ou de 970 pies. Il pouvoit contenir
150000 hommes , félon quelques-uns
aèoooo, ou même 380000, félon d'autres. Sa
façade de dehors avoir deux rangs d'architec-
ture à colonnes, au deffus defquels il y avoit
un plus petit ordre. A fon extrémité circulai-
re il y avoit trois tours quarrées , & deux à
l'autre extrémité. Dans les derniers temps ces
tours appartenoient à des fénateurs & paf-
foient à leurs enfans. Le bas de ce cirque en-
dehors étoit un rang de boutiques ménagées
dans les arcades les plus baflês. Son euripe
avoit dix pies de largeur , fur autant de pro-
fondeur. La première rangée des fieges étoit
de pierre , les autres de bois. L'empereur
Claude fit mettre en marbre les carceres ou
endroits d'où partoient les chevaux & les
chars , & dorer les bornes , & défigna une
place fur la^pi/ia pour les fénateurs. Les car-
ceres hioitxsx. à la petite façade du côté du
Tibre , au nombre de douze. La première
chofe qu'on trouvoit en s' approchant de la
fpina par ce côté, étoit le petit temple appel-
lé (^des Murciœ, ou autel dédié à Vénus.
Vers ce temple étoit celui du dieu Confus\ il
touchoit prefque les trois pyramides rangées
en ligne droite qu'on appelloit metce^ les bor-
nes. Il y en avoit trois autres à l'autre bout, ce
qui ne faifoit quefix , quoique le roi Théo-
doric en ait compté fept. "L^. fpina étoit con-
tenue entre ces trois bornes d'un côté , & les
trois autres bornes de l'autre. Il y avoit d'a-
bord fur h fpina l'autel des Lares ^ puis Vara
potentiunty l'autel des dieux puiffans ; deux
colonnes avec un fronton formant comme
l'entrée d'un temple; un autre morceau fem-
blable dédié à Tuteline avec un autel ; une
colonne portant la fiatue de la Viâoire ;
quatre colonnes dont rarchitrave , la frife ,
C I R ,51
la corniche , étoient ornés & furmontés de
dauphins : elles formoient une efpcce de
temple à Neptune ; la fi:atue de Cybele aflife
fur un lion ; au pié du grand obélifque , vers
le centre du cirque, un temple du Soleil ; un
trépié à la porte de ce temple ; une ftatue de
la Fortune fur une colonne; un bâtiment à
colonnes couronné de pierres rondes, oblon-
gues & dorées , qu'on appelloit les œufs des
courfes , ova curriculorum , & qu'on ôtoit
pour compter le nombre des courfes ; des
temples, des colonnes, des flatues, Ùc. une
flatue de la Vidoire fur une colonne; l'autel
des grands dieux; un obélifque plus petit que
le précédent j confacré à la Lune ; enfin les
trois autres bornes, metae. Augufte fit fubfti-
tucr un obéh(que à un grand mât qui étoir
dreiîé au milieu du cirque^ & qui lui donnoit
l'air d'un vaiflèau. L'empereur Confiance y
en éleva un fécond plus haut que le premier ;
celui-ci eft maintenant a la porta del Popolo',
l'autre eft devant l'églife Latéranne. Aux
façades du cirque en-dedans, il y avoit,
comme aux amphithéâtres {poye:^ AMPHI-
THÉÂTRE) , le podium ou places des féna-
teurs , au deflus les fieges des chevaliers ro-
mains ; plus haut une grande galerie régnant
tout autour du cirque ; au deffus de cette
galerie de nouveaux gradins continués les
uns par ordre au defïîis des autres jufqu'au
haut de la façade , où les derniers gradins
étoient adoffés contre l'extrémité du petit
ordre d'architedure dont nous avons parlé.
Dans les jours de jeux on jonchoit l'arène de
fable blanc. Caligula & d'autres empereurs
y firent répandre par plus de magnificence
jàu cinnabre , du fuccin , & du bleu. On y
avoit pratiqué un grand nombre de portes.
Il fut brûlé fous Néron , & il s'écroula fous
Antonin le pieux ; mais on le releva toujours
jufqu'à ce qu'il fut rafé entièrement fans
qu'on fâche à quelle occafion. Il n'en refle
plus que des veiliges à l'endroit appelle i^alle
di cherchi.
Le cirque de Néron. Il étoit dans la qua-
torzième région de la ville, entre le Janiculc
& le Vatican, où efi aujourd'hui l'églife de
S.Pierre de Rome, devant laquelle Sixte-
quint fit placer fon obélifque.
Lecirque de Salulle. Il étoit danslafixiemc
région , près de la porte Colline , vers le
Quirinal & le Pintius. Il en refle des vefliges.
152 C I R
quoique la plus grande partie en Toit comprifè
dans les jardijisLudoviiiens , où l'on en voit
i'obélifque.
Le cirque Vatican. C'eft le même que celui
de Néron.
Quoiqu'il y eût flx prifons , carceres , à
chacun des côtés du cirque , les courfes ne
pouvoient commencer que de l'un des côtés.
De ces fix prifons il n'y en avoit que quatre
dont on ouvrît les portes , pour les quatre
i'adions , jufqu'à ce que Domitien ajouta
deux nouvelles faftions , afin qu'il en pût
fortir lix à la fois , & qu'il ne reftat pas deux
portes fermées. Ceux qui concouroient à la
courfe , avoient toujours à gauche hfpina
en partant.
Les fadions ctoient difîinguées par la cou-
leur de leur habit : il n'y avoit dans le com-
mencement que la blanche &la rouge; on y
ajouta la verte & la bleue , enfuite la dorée &
la pourprée, qui ne durèrent pas long-temps.
Les factionnaires étoient ou des efclaves , ou
des affranchis , ou des étrangers : cependant
quelques enfans de famille , des fënateurs ,
& même des empereurs , ne rougirent pas
dans la fuite de faire la fondion vile d'aurige.
Ces fadions divifoient le peuple ; les uns
étoient pour une couleur ; les autres pour
une autre; ce qui cauiafouvent des émeutes.
Voyei Hippodromes, Courses, Lut-
te^ &c. Voy. Antiq. exp. Hed. lex.
CIRQUINÇON , f m. {Hifl. nat. qua-
druped.) efpece de taton , dont l'origine eit
devenue comme douteufe depuis que M. de
Buffon a travaillé fur l'hiffoire des animaux
de ce genre , dont il attribue l'origine à
l'Amérique. Belon eft le premier qui ait parlé
de cet animal , dont il pouvoit avoir vu
deux efpeces vivantes dans fon voyage en
Turquie, favoir le czr^M/'/Zj^o/z G" l'armadillo ,
qui tous deux y font apportés du pays du
Sénégal , comme il le fait aiTez entendre en
difant "pour ce que l'animal dont nous
>y avons ci-devant parlé , qu'on nomme
« taton y s'eff trouvé entre leurs mains, le-
» quel tor.tefois efl apporté de la Guinée &
» de la Terre-Neuve , dont les anciens
« n'ont point parle , néanmoins nous a fera
« blé bon d'en bailler le portrait. » Obfer-
vmlons de Belon y Paris 1 5 5 5 ) P^S^ 2.z z y
fiS'P'^S^ ^O^. Mais la figure qu'il donne
fl'olî pas celle du cirquinfon ; c'eft celle de
C I R
l'armadillo à treize bandes. Le P. d'Abbe-
ville dans {es MiJJîons au Maragnon, impri-
mées en i6i^y page z^8 , l'appelle taton
ouinchiim. Grow, dans ion Mufœum regium
focietatis Londinenjis y publié eni68i, le
nomme the wejlhe headed armadillo ^ pages
ZS Ù 2.O. C'eft le tatu muftelinus de Ray ,
dans fon Synopfis quadrupedium, p. 2.5 ^j
le cataphraclus fcuto unico cingulis oclode^
cim.. armadillo de M. Brillbn, règne animal^
publié en 1756 , p. 57 ,• & le Dafypus t
unicenetus tegmine tripartito pedibuspenta-
dach/lisy de M. Linné, dans (onfyflemanatu-
rccy édition 12, imprimé en 1706, ;j. ^j.
Il a le corps long de dix pouces depuis les
épaules jufqu'à l'origine de la queue ; la tête
de trois pouces , la queue de fept , les jam-
bes de deux à trois pouces de hauteur, les
oreilles longues d'un pouce , le devant de
la tête large & plat , les yeux petits ; {es qua-
tre pies ont chacun cinq doigts , de grands
ongles longs aux trois doigts du milieu , &
des ongles plus courts aux deux autres.
Son corps eff: entièrement couvert d'é-
cailles , comme dans les autres efpeces de
taton ; mais ces écailles font féparées d'une
manière différente. L'armure du cou forme
un collier d'une feule pièce formée de petites
écailles quarrées. Celle des épaules forme
un bouclier d'une feule pièce & compolé de
plufieurs rangs de pareilles petites écailles
quarrées , contiguës & unies fermement les
unes aux autres. Tout le reffe du corps de-
puis le bouclier des épaules julqu'à la queue,
eff couvert par dix-huit bandes ou anneaux
mobiles unis enfemble par une membrane
fouple ; les premiers de ces anneaux \es plus
voifins des épaules font les plus larges y &
compofés d'écaillés quarrées oblongues; les
poftérieurs font faits de pièces dont les unes
font quarrées & les autres rondes; enfin l'ex-
trémité de l'armure du corps près de la queue
eff de figure parabolique. La moitié anté-
rieure de la queue eff environnée de fix an-
neaux dont les pièces font compofées de pe-
tits quarrés : fa moitié pofférieure jufqu';\
l'extrémité qui eff pointue , eff couverte d'é-
caiiles irrcgulieres. Sa poitrine, fon ventre,
& {es oreilles font nues comme dans les au-
tres efpeces. Les parties génitales du mâle
font grandes & très-apparentes au dehors.
M(xws, Le çirquin^çn eff commun au
Sénégal
C I R.
"Sénégal dans le pays de Zequinchor ou Sif-
Icinjon près de Gambie , d'où il a vra-fem-
blablement tiré Ton nom , comme l'autre
efpece , qui ell particulière au Cap- Verd ,
a donné Ion nom efpagnol armadilLo à la
pointe la plus avancée de ce cap ; car il
n'eit pas aulli certain que le tatou oum-
chum vu au Maragnon par le père d'Ab-
be ville , foit le cirquinpvn d'Afrique , qu'il
ell certain que c'eil celui décrit &: figuré d'a-
bord par Belon , eniuite par Grew &: Ray.
Au relie , il feroit encore pofEble que ce
même animal fe trouvât au Brefil & en mê-
me temps au pays de Gambie , dont le cli-
mat ,* le terram & les produâions en tout
genre font il analogues. Nous avons vu
cette efpece de tatou & l'armadille dans ces
pays du Sénégal, & nous avouons que nous
iommes très-étonnés que M. de Bufion ,
qui d'ailleurs a mis beaucoup d'exadifude
dans les recherches , ait voulu , malgré
l'autorité de Belon & celle du rédadeur de
Seba , l'attribuer à l'Amérique exclulive-
ment , fondé fur ce que le plus grand nom-
bre des efpeces de tatou fe trouve en Amé-
rique , fur ce que ces animaux étoient incon-
nus avant la découverte de cette partie du
monde , enfin fur ce qu'aucun voyageur
moderne (excepté Belorï & nous) ne dit
en avoir trouvé en Afie , ni en Afrique.
Les terrains qu'habite le cirquinçon au Sé-
négal font argileux & pierreux , fur des co-
teaux peu éloignés des eaux , & <^çs forêts.
îl y creufc , comme le lapin , àts terriers
très-profonds , d'où il ne fort que la nuit
jpoxir: chercher fa fubfiflance ; il y relie mê-
me enfermé dans un fommeil léthargique
pendant les mois de décembre , janvier ,
février , mars & avril , qui font les mois
d'hiver & de féchereflfe au Sénégal , pen-
dant iefquels il (ort très-rarement.
Le cirqiùnçon' m^rc\\& allez vite à pies
alternes , mais (ans pouvoir courir , ni grim-
per fur les arbres , ni fauter à pies joints , ^^ ^ . , ...^ _ _,
iembiable en cela au hériflbn , dont il a"^Pws grande partie de l'hiver. Les ferpens
d'ailleurs toutes les autres facultés , de forte
que pour échapper à la pourfuite de fes
-ennemis , il eft forcé de fe retirer dans fon
terrier dont il s'éloigne fort peu , ou de s'en
creuler un nouveau quand il en ell trop
éloigné. Mais quoiqu'il fouille la terre aufli
pxoraptement que la taupe , on l'atteint fou-
Tome VIIL
€ ï R 155
vent , & fi on le prend par la queue avant
qu'il s'y foit entièrement enfoncé , il sy
cramponne avec une telle force que rica-
ne peut vaincre là réfillance , & que fou-
vent on lui calTe la queue fans en amener
le corps. Dans ces cas , pour les prendre
fins les mutiler , les Nègres enfoncent leur
couteau ou un bâton au-devant de leur tête
pour les empêcher de pénétrer plus avant»
& les enlèvent en dégradant la terre qui
les environne.
Cet animal , quoique couvert d'un têt
écailleux & extrêmement dur , eil d'une
fenfibilité étonnante au moindre contad ;
alors il fe contrade en rond , & forme une
efpece de boule au moyen de fa cuiraiîé ,
dans la cavité de laquelle fa tête & fa queue
fe trouvent logées en rempliilànt les fentes
qu'elle laifle fous le ventre. Dans CQt état ,
il ne craint que l'homme ou le finge , qui
peuvent l'emporter ou le rouler comme une
boule , ce qui à la fin l'étourdit au point
qu'il ell oblige de fe développer. Lorfqu'il
efl une fois au foild de fon terrier , il ell
rare que la fumée ou l'eau , dont on le
remplit , le faflè forrir ; il réfille à ces deux
agens , & les chiens n'ont aucune prife fur
fon têt lorfqu'il ell une fois roulé en boule.
Le feul moyen de lui faire la chalî'e avec
avantage , cil <ie le furprendre avec àts lé-
vriers , qui , àh'i qu'ils le voienthors de fon
trou , le devancent , l'empêchent d'y ren-
trer , & le harcèlent pour le faire plier en
boule & donner au chaiTeur le temps de
l'enlever. On ne le force à s'ouvrir fu'en
l'approchant du feu , ou en le tenant long-
temps plongé fous l'eau , ou en le roulant
vigoureufement comme une boule iur un
terrain pierreux ou très-dur.
Le cirquinfon multiplie beaucoup dans
certains cantons ; mais il n'ell pas probable
que la femelle produife quatre petits chaque
mois , comme Gumilla le dit, page 3.z^ ^
de celui de l'Orenoque , puifqu'il dort la
fe retirent fouvent dans leurs terriers avec
eux pendant cette faifbn. Ses excrémens font
moulés en petites crottes ovoïdes, pointues,
rouflâtres", à-peu-près comme celles du
hériflbn.
Qualités. Cet animal efl très-gras , fiir-
tout au commenoement de l'hiver & de
V.
fon repos léthargique. lia, comme le hé-
riflon , la chair blanche , tendue & em-
preinte d'une légère odeur de mufc.
Ufages. Les Nègres mangent le cirquin-
fon au Sénégal , comme le tatou fe mange
en Amérique. Quelques-uns fe fervent de
fon têt antérieur comme des taffes de coco
pour boire. Ils en prennent intérieurement
la poudre , comme celle de l'os de l'oreille
du lamjmtin , pour s'exciter les lueurs dans
les maladies vénériennes. Les Américains
prétendent que l'os de la hanche du tatou ,
ainli pulvérifé , a la même vertu , & que
le premier os de la queue , appliqué fur l'o-
reille , fait entendre les fourds : il pourroit
entrer dans ces derniers effets un peu de
merveilleux. Ils emploient fon têt à divers
«utres ufages , ils le peignent de diverfes cou-
leurs, ils en font des corbeilles, des boîtes, &
autres petits vaifTeaux aufli légers que folides.
Remarques. Le cirquinçon ou Jirkinjon
cft , comme l'on voit , une efpcce de tatou ,
qui forme: un genre particuher d'animal dans
la famille des hérilîbns , dont il a la plupart
des mœurs &: des facultés.
Les gens lettrés & autres favans nous de-
mandent tous les jours pourquoi nos natu-
ralises modernes changent les noms reçus
de tous les êtres , pourquoi le tatou & le
cirquinçon y 11 connus ibus ce nom depuis
plus de 2CO ans , ont reçu , par MM. Klein
& Briffon , le nom grec de cataphraclus _,
qui appartient à un poilTon , & par M. Lin-
né celui de dafypus ^ que les Grecs donnent
dej^is Ariftote au lapin , cuniculus. {M.
Adanson.)
CIRSAKAS, (Co/77OT.>étofFedes Indes,
foie & coton , mais où le rapport de la foie
au cotcn t'}. très-petit.
CIRSOCELE, f m. terme de chirurgie ,
fignifie une multitude de varices aux telli-
cules , qui en augmentent prodigieuferaent
la groffeur , & empêchent que la femence ne
s'y prépare convenablement ; à quoi oïùÊêi^
peut pas quelquefois remédier autreniOTr
qu'en en venant à la caiiration. C'efî: la même
ehoiè que ce qu'on appelle Aeni/e variqueufe.
Voyei Varicocele.
Ce mot vient du grec, x/ps-o? , varice , &
**■>« hernie. VoyeT^ HernIE.
M. Petit a fait plufieurs fois l'opération
d'emporter les vaifleaux variqueux en con-
C I S
fervant le tcfllcule. On verra des obfèrvatîorvj
dignes de ce grand praticien , fur la cure de
cette maladie , dans un traité de chirurgie
qui doit bientôt paroître au jour. Qts obfer-
varions fe trouveront au chapitre du varico-
cele. ( Y)
CISALPIN , adied. {Géog) qui efl en
deçà des Alpes. Ce mot eft formé de la pré-
pofitionm, en deçà, & Alpes. Quoique le
mot Alpes déiigne proprement les monta-
gnes qui féparent l'Italie de la France, il s'efl
dit aufii cependant de quelques autres mon-
tagnes. C'eft ainli qu'Aufone appelle lef
Alpes, proprement dites, les Pyrénées, l'A-
pennin , &c.
Les Romains diftinguerent la Gaule & le
pays qu'on nomme maintenant Lombardie ,
en Gaule cif alpine & en Gaule tranf alpine.
Celle qui étoit cif alpine à l'égard deRome,
eft tranfalpine à notre ég^rd. Chambers.
CISAILLE, f f. {Artméch. en métaux.^
C'eft un outil dont on fe fert pour couper la
tôle , le cuivre , le fer & autres métaux ,.
quand ils font minces. C'eft une forte de
cifeaux très-forts , à l'ufage des chauderon-
niers, ferblantiers, orfèvres, chaînetiiws, Ùc^
Une des branches de la cif aille eft recourbée
par le bout ; cette partie recourbée s'infère
dans un trou pratiqué à un bloc. Par ce
moyen la cifaille eft tenue ferme , un peu
inclinée à l'horizon, & d'un ufage très-com-
mode pour l'ouvrier y qui met entre {ts lames
la matière à couper, & n'a plus qu^à appuyer
de la main, dont l'eftbrt eft augmenté du
poids & de la vîtefle de tout le corps , fur
l'autre branche qui eft droite , élevée au-
defîûs de la branche recourbée par le bout.
Quant à la conftrudion de ce cifeau , les
lames en font courtes , larges & épaiffes ; &
les branches fortes & longues. On peut le
regarder comme un levier du premier genre.
Le point d'appui eft au clou qui unit les
deux branches , & par conféquent entre la
puilîance & la réfiftance ; d'où il s'enfuit que
plus le fommet de l'angle que forment en-
tre elles les lames en s'ouvrant le plus qu'il eft
poffible , eft voifin du clou , & que plus en
même temps les branches font longues , plus
la puifîànce a d'avantage. Il faut pourtant
obferver pour la fohdité & la durée de fa
cifailhy qui eft expoféeàfupporterdegrands
efforts, de ne pas trop afîbiblirla diftance
C I s
^e Touv-eraire du clou, au fommct de l'angle
de l'ouverture des lames.
CISAILLES , f. f. pi. à la monnoie y ce
font les relies d'une lajue d'or, d'argent ou de
billon, dont on a enlevé les flancs pour faire
des pièces de monnoie. On met les cifailles
en pelotes pour les jeter dans le creufetplus
facilement. Voye^ MONNOYAGE.
CISAILLER, à la monnoie, c'eft couper
avec des cifailles les pièces de monnoie dé-
fedueufes , de poids léger , ou mal mar-
quées, afin d'empêcher qu'elles n'aient cours
dans le commerce. Ce font les juges-gardes
qui cifailUm les pièces de rebut pour être
remifes à la fonte.
A la monnoie , au défaut de cifailles ^
comme dans les bureaux,Qn cifaiUe les pièces
de rebut ou faufles , avec un marteau très-
pointu , dont on les frappe fur une plaque de
plomb.
* CISEAU, f. m. {Anméch,) Il ya
deux efpeces d'inftrumcns de ce nom , d'une
conflrudion très-différente. L'une efl d'un
ufage prefque général dans les arts & dans
l'économie domeflique ; l'autre né fcrt guère
qu'aux ouvriers en bois & en fer. Ce font les
couteliers qui font la première j ce font les
taillandiers qui font la féconde.
Pour faire le cifeau à divifer les étoffes ,
prenez une barre de fer plus ou moins forte ,
lèlon la nature des cifeaux que vous voulez
forger. Commencez par l'entailler à fon ex-
trémité , & par y former une tête femblable
â celle d'un piton , ronde , plate , mais non
percée. Coupez enfuite ce piton, en y laiiïànt
une queue plus ou moins longue , félon la
longueur que vous vous propolez de donner
«u cifeau. Allongez cette queue en pointe ;
puis plaçant cette enlevure fur le quarré
de l'enclume , obliquement, faites-y entrer,
d'un coup de marteau fortement appliqué ,
l'arête de l'enclume. Vous formerez ainli
l'embafe du cifeau , qui doit être égale à l'é-
pailfeur de la lame. Par ce moyen , lorfque
les deux embafes ieront appliquées l'une fur
l'autre , vous n'aurez que la même épaifîêur.
Percez le piton fur l'enclume avec un poin-
çon. Agrandilfez & formez l'anneau à Ja
bigorne, ^près quoi faites recuire ces bran-
ches. Pour cet effet , mettez-les dans un feu
decharbon de bois , que vous laifTerez allu-
mer &. éteindre feul ; ce recuit les attendrit.
CI S 15^
Donnez-leur cnfuite à la lime la figure k
plus approchée du cifeau. Trempez , émou-
lez , & polifléz à l'ordinaire. Clouez les
branches enfemble. BrunilTez les anneaux
& les branches, puis vos cifeaux feront faits.
On ne s'attend pas que nous parlions ici
de tous les cifeaux qui font employés dans
les arts ; ces inftru'mens fcrelïèmblent fi fort
que nous ne ferions que nous répéter lans
cefle. Nous renverrons là-deflus aux diffé-
rens articles des arts , où nous expofons les
manœuvres qui exigent leur ufage.
Pour faire le cifeau à couper le bois, prenez
un morceau de fer , & tirez-le en long , plus
ou moins fort , plus ou moins plat , plus ou
moins large ; que la partie de ce morceau
que vous appellerez la tête , foit à-peu-près
quarrée \ que celle que vous appellerez le
tranchant, foit très-mince & très-plate. Acé-
rez cette partie mince avec du bon acier ;
rendez-la tranchante à la lime & à la meule;
il faut qu'elle foit bien trempée , & vous
aurez un cifeau à couper le fer. Quelquefois
le tranchant eft en bifeau ; d'autres fois ,
au lieu de tête , on y pratique une foie qui
efl reçue dans un manche de bois. En un
mot , cette forte de cifeau varie prodigieu-
fèment , félon l'ufage , la matière à couper ,
les formes à faire. Il y en a , & de la plus
petite grandeur , & de la plus grande force-
Vcye-{ la fuite de cet article.
Ciseau , inflrumem de chirurgie y com-
pofé de deux branches égales en longueur ,
tranchantes en-dedans , & jointes enfemble
par un clou. Il faut avoir des cifeaux qui ne
fervent qu'aux appareils , pour couper les
linges qui fervent à faire les bandes , com-
prefîês & autres pièces.
Les chirurgiens doivent avoir ^ioutre des
cifeaux à incifion ; les uns font droits , & \z%
autres courbes ; il faut qu'ils foient conffruits
avec toute l'attention poflible. Les pointes
doivent être moufles , pour qu'en opérant
on ne foit point oblige de changer les anneaux
des doigts , pour mettre la branche bouton-
née dans la plaie , lorfqu'elle ne s'y préfente
pas naturellement. V. chirurgie ^pl.I^fig. z.
Les cifeaux courbes fervent à faire des.
inciiions dans des eiKlroits un ptu caves ; il
faut que leur courbure foit. petite & douce \
qu'elleprenne du milieu même de l'entablure,
6c qu'augmentant prefque infènfiblcment j-
V 2
^
1^6 CîS
la pointe sVcarte à peine cTe cinq lignes Je
l'axe des ci/eaux. Cette ftrudure rend les
ci/eaux courbes , non-feulement propres -k
toutes les opérations qui demandent la cour-
bure âes lames , mais ils font fi commodes
& fi dégagés , qu'ils peuvent exécuter celles
qui femblent exiger l'ulage des a/f'^war droits.
Voye^ la figure I,pi. III. M. de Garengeot
a traité fort au long , dans Ton livre d inl-
trumens , de la coniîrudion des cifeaux.
M. Petit a imaginé des a/faua: particuliers
pour l'opération du filet. K.FlLET, & lafig.
4, pi. XIX. {Y)
Ciseau d'embas, morceau de fer acéré
par le bout tranchant , à l'ufage de ceux qui
travaillent à l'ardoife. Voye^^ ARDOISE.
Ciseau à Vufage des arquehujiers . Ils en
ont de plufieurs fortes, parmi lefquelles on en
diilingue quatre particulièrement : le cifeaii
à bride y le cifeau à chaud y le cife^u de
côté y le cifeau à e'bancher.
Le cifeau d bride eft un petit morceau
d'acier long de fix ou huit pouces , quarré ,
de l'épaifieur d'une ligne & demie en tout
lens. Ce morceau d'acier eft reployé aux
deux tiers , quarrément , & fe reploie encore
en devant , d'un petit bec de la grandeur
d'une ligne. Ce bec eft fort tranchant , les
arquebufiers s'en fervent pourvuider & net-
toyer une entaille ou une mortaife dans un
bois de fufil.
Le cifeau à chaud e(ï un morceau de fer ou
d'acier quarré , d'environ huit pouces , gros
de deux, peu tranchant, & fervant à l'arque-
bufier pour partager un morceau de fer en
deux , ou pour y faire des entailles-.
Le cifeau de côté eu fait à-peu-près comme
le bec d'ane , poyei Bec d'ane ; il eft plus
plat ; fo# tranchant eft en bifeau ; il ne
coupe proprement qu'en un fens. L'arquc-
tufîer s'en fert pour graver des ornemens.
Il en a de très-petits & très-déliés...
Le cifeau à ébaucher reiTemble au fermoir
des menuifiers , l'oye'^ FERMOIR, & fert à
Farquebufier pour ébaucher un bois de fufil,
& commencer à lui faire prendre fa forme.
Ciseau des cartiers y ce font de grands
•cifeaux compofés de deux lames fort gran-
des & fort tranchantes , jointes par unclou
à vis , qui fe ferre au moyen d'un écrou. Ces
lames ont à leur extrémité oppofée , l'une un
■anneau pour palTer une partie de la main.,
C I S
& celfe-cî eft mobile ; & l'autre un morceau
de fer recourbé qui s'attache fur l'établi , au
moyen d'un crochet qui paffe à travers la
table , & eft rendu immobile par un écrou
qui ferre fortement la vis de ce crochet. Les
cifeaux fervent à couper & rogner les cartes
quand elles ont été liflées. C'eft la dernière
façon que l'on donne aux cartes pour les
fabriquer.
Ciseau , outil de charron y morceau de
fer de la longueur de deux pies ou environ ,
rond par en haut , de la grofléur d'un pouce
& demi , large , plat & acéré par en bas ,
de la largeur de deux pouces & demi , &
épais de deux à trois lignes , qui fert aux
charrons à former & élargir les mortaifes.
Ciseau a un biseau de charpentiers.
Il reflêmble au précédent , & fert à drefler
les murtaifes , les tenons , Ùc.
ClSEAV des cloutiers. C'eft un inftrument
dont ils fe fervent pour couper les clous à
mefure qu'ils les fabriquent. Il eft de fer ,
acéré , pointu par un bout par où on l'en-
fonce dans le bloc ; il a environ cinq pouces
de hauteur & trois de largeur ; il eft applati
& tranchant par le haut. Pour couper le clou,
l'ouvrier applique fa baguette de fer fur le
cifeau précilément à l'endroit où il doit être
coupé , & en la frappant d'un coup de mar-
teau, le clou fe fépare du refte de la baguette.
Ciseau des cordonniers. Ils font en tout
ièmblables à ceux des tailleurs.
Ciseau de doreur fur bois:, c'eft uncifeau.
or jinaire de fculpteur. Les doreurs s'en lér-
vem à lever les ornemens de fculpture cou-
verts par le blanc.
Ciseau de ferblantier. Cet outil eft en
tout lèmblableà celui des ferruriers.
Ciseau de fourbiffeur. Ce font de forts
cifeaux qui n'ont rien de particuHer , & qui
fervent aux fourbiffeurs pour rogner le haut
des fourreaux quand ils lont trop longs, -
CrSE AU de gainier : ils font faits exade-
ment comme ceux des couturières , & fer-
vent au gainier à couper le bois pour fes
ouvrages. li-en a d'autres qui font en forces.
Ces cifeaux font beaucoup plus grands ; ils
ont les lames rondes: ils reflémblent aux
forces des tailleurs. Ils iervent aux gainiers
à couper & tailler les peaux & cuirs dont ils
couvrent Lurs ouvrages.
Clseau. de Jardinage. Ils lont de-
C I s
beaucoup plus forts & plus longs que ks ci-
feaux ordinaires. îls ont deux mains de bois,
ce qui facilite la tonte des buis & autres
arbriffeaux.
Ciseau de maçon ou de tailleur de pier-
re ; c'ert un ouril de fer , acéré , long , de la
forme d'un clou fans tcte , appiati & tran-
chant par le bout. Il fert à commencer le
lit ou la taille de la pierre.
Ciseau des menuijiers\ c'efl un outil de
fer & acéré par le tranchant ; il a un bifeau
& un manche de bois ; il fert à nettoyer les
mortaiies , faire les tenons , 6'c.
Ciseau d'orfèvre, voyez les CiSEAUX
'du ferrurier.
Ciseau de perruquier, voyez le premier
article ou le Cl SEAU . e chirurgien.
Ciseau de relieur j\oyt:^le premier arti-
cle CiSEAU.
Ciseau de fculpteur en marteline, voy.
Marteline.
Ciseau, {ferrurier.) Ces ouvriers ont le
cifeau à chaud : ceû un gros cifcau à deux
bifeaux, qui fert à couper le fer chaud. Sa
forme n'a rien de particulier : c'eft la même
que celle d'un burin gros & long. On obfer-
ve feulement de le jeter dans Teau quand
on s'en eil: fervi , & de le retremper quel-
quefois. On lui donne le nom de cifeau à
chaud, parce que ce cifeau n'a pas plutôt
lervi à la forge , qu'il s'amollit en (e détrem-
pant, & qu'il ne feroit plus en état de. cou-
per du fer froid.
Cifeau à froid -^ c'ejflun a/fOu qui ne dif-
fère du précédent qu'en ce qu'il eft moins
long , & qu'il ne fert jamais fur le fer
chaud.
Cifeaux à ferrer ; ce font des cifeaux à
deux bifeaux , mais dont le taillant eft très-
mince , ainfi que toute la partie qui le pré-
cède ; leur ufage n'efl qu'à couper du bois ,
& préparer les endroits des fiches , ferrures ,
ClSEAU^<? tailleur, roy&z le premier ar-
ticle Ciseau.
Ciseau à tondre, (Econom. ruftiq.) i>oy.
i*art.Toi^I>RE Scie premier, an. Cl SEAU.
Ciseau de verrerie; voye\ VERRERIE,
& le premier article Cl SE AU.
CISELER, V. aâ. {Artm/ch. en métaux?)
c'eft former fur l'argent telle figure qu'on
veut : on fc fert pour cela non de- burin ,
C I S Ï57
mats de cifelets. K.ClSELETS&ClSELURE.
On ciieie les pièces de rehef comme celles
qui ne le font point ; fouvent même ces der-
nières en acquièrent autant que les autres ,
parce qu'on repoufle leur champ en dehors,
aux endroits qu'on veut cifeler. Cette ma-
nière de cifeler eil plus commune : f-putrc
demande trop d'épailîèur & trop de raatierp.
On iè len encore du terme cifeler , pour
réparer les pièces qui ont été moulées , mais
dont les delîins n'ont pu fortir du moule
parfaitement marqués , ou fuÉùfamment
terminés.
Cifeler unt pièce en ce fens , tû prefque la
mcmechofe que retouchemu burin en gravure.
OISELETS , f. m. ce font de petits mor-
ceaux d'acier , longs d'environ cinq ù fix
pouces, & de quatre à cinq lignes de quarré,
dont un des bouts eft limé quarrément ou en
dos-d'ane , & l'autre fert de tête.
Leur partie trempée eft quelquefois poin-
tillée; mais leur ufage en général eft pour
cifeler l'ouvrage en rehef. Dans les différen-
tes occafions , entr'autres celles où il s'agit
défaire paroître des côtes concaves, oniC'
fert alors d'un des ounls dont nous venons
de parler : fi ces côtes doivent être unies , on
le lert d'un cifelet uni : fi l'on veut qu'elles
foient matées, on fe fert du a/<r/ef pointillé.
Pour pointiller un cifelet, on prend un
petit poinçon ; & fijr la partie qui doit être
trempée, on pratique de petits trous prefîés
les uns entre les autres , en frappant avec un
poinçon. Quand ces trous font pratiqués,-
on enlevé toutes les balevresque le poinçon
a faites, &cle cifelet eft pointillé.
J3'autres fe fervent pour pointiller , de
petits marteaux dont la tête eft taillée en
pointe de diamant', qui font la fondiondu'
poinçon. La tête de ces marteaux a un demi-
"pouceen quarré, & les pointes de diamant
y ont été fonnées. a égale diftance ; & très- -
ferrées , par le moyen d'une petite fime en
tiers-point avec laquelle on a partagé la tète '
du marteau comme en échiquier : mais •
comme la lime eft en tiers-point , toutes les -
petites divifions quarrées deviennent en >
pointe de diamant.
Ces outils font à l'ufage du ferrurier, du^
cifeleur, de Forfevre , du graveur, de l'ar- ■
quebufier, du bijoutier, du metteur-en"-
c&uvrc, du damafquineur , .&Cr ils prean^nt *
158 c I s
difterens noms, fuivant leurs formes & leurs
ufages : on les appelle bouges, trafoirs , per-
loirs , planoirs y &c. Voye-^ ces mots à leurs
articles.
CISELURE , f. f. c'eiirart d'enrichir &
d'embellir les ouvrages d'or & d'argent &:
d'autres métaux , par quelque deflin ou
fculpture qu'on y repréfente en bas-relief.
V. Sculpture /ur/w métaux. V. Re-
lief.
Pour cifeler les ouvrages creux & de peu
d'épaifleur, comme font les boîtes de mon-
tres,pommes de cannes, tabatières, étuis, ©"c.
on commence à defliner fur la matière les fli-
jets qu'on veut rcpréfenter, & on leur donne
le relief tel qu'on le defire, en frappant plus
ou moins le métal, en le chalTant de dedans en
dehors, pour relever & former les figures ou
ornemens que l'on veut faire en relief fur le
plan ou la furface extérieure du métal. On a
pour cela plufieurs outils ou bigornes de dif-
férentes formes , fur les bouts ou fommets
defquels on apphque l'intérieur du métal, ob-
fervant que les bouts ou fommets de ces bi-
gornes, répondent précifément aux lignes &
parties auxquelles on veut donner du relief.
On bat avec un petit marteau le métal gue la
bigorne foutient : il cède, & la bigorne tait en
dedans une imprelllon en creux qui forme en
dehors une élévation lur laquelle on ciiele les
figures & ornemens du delïln ^ après qu'on a
rempli tout le creux avec du ciment. V. CI-
MENT.
On emploie quefquefois les cifeleurs à ré-
parer les ouvrages de métal au fortir de la fon-
te; commefigures de bronze , mortiers , ca-
nons; toutes fortes d'ornemens d'églife & do-
meftiques, comme chandeliers, croix, ^c.
feux, bras de cheminée, 6'c. V. BroNZE.
Les outils dont ils fe fervent, font les cife-
lets de toutes grolfeurs , les matoirs , les
rifîoirs de toute fojte de taille , rudes &
doux; les difïerens burins, les cifeaux plats
& demi-ronds, les marteaux gros & petits ;
le tout fuivant l'ufage qu'ils traitent.
CïSMAR, {Géog) petite ville d'Allema-
gne dans ja baffe S,axe, au duché d'Holflein,
près de la rrjer Baltique.
CISMONE, (Géog.) rivière d'Italie qui
f>rend là fource dans le Trentin, & qui fe
réunit à la Brente dans h. marche Trevifane.
jCISQIRLS , {An médian, en métaux.)
CI s
ce font de gros cifeaux à manche attaché &
monté en pié , dont la branche fupérieure
garnie d'une menote de fer , fert à la lever
plus facilement ; & par le poids & l'effort
du levier , couper d'un feul coup des mor-
ceaux de métal fort & épais. Ces outils font
à l'ulàge des bijoutiers , des orfèvres , des
ferblantiers , des chauderonniers , des ou-
vriers de la monnoie , &c.
ClSSOIDE,f f. (Géom.) courbe algé-
brique qui a été imaginée par Dioclès , ce
qui l'a fait appeller plus particulièrement la
ciffoïde de Dioclès. V. CoURBE.
Voici comme on peut concevoir la for-
mation de la cijfoïde. Sur le diamètre A È
{pi. d'anal, fig. ^) du demi-cercle A O B,
tirez une perpendiculaire indéfinie B Cj tirez
enfuite à voloi^é les droites A H , A C y
dans les deux quarts de cercles O B y O Ay
ôciâkes A m ^= IH' , & dans l'autre quart
de cercle LC=AN, Sicks points m &c L
feront à une courbe Am O L^ qu'on appelle
la cijjoïde de Dioclès.
Propriétés de la cijjoïde. Il s'enfuit de fa
génération , 1°. que fi on tire les droiteâ
K I y p m ^ perpendiculaires àABjOn aura
A p : K B : : A m : I H y mais A m =
///",& par conféquent^ /) =iK B ; d'où
il s'enliiit que A K =p By &i: p m = I K,
2.**. Il s'enfiiitaufîi que la cijjoïde A m O
coupe la demi-circonférence A OBen deux
également au point O.
3°.Bep\usAK:KI::KI:KB,eeû-
à-dire que A K : p N::p N : A p ;
d'ailleurs A K : p N: : A p : p m ; donc
p N : A p : : A p : p m -^ &c par confé-
quent^ K^p N yAp, &p m , font qua-
tre lignes en proportion continue ; & l'on
prouvera de la même manière que Ap,p m,
A K j &c K L font en proportion continue.
4*^.. Dans la cijjoïde , le cube de l'abfcifîc
A p eu égal à un folide formé du quarré
de la demi-ordonnée/? m , &c du complé-
ment p B âu diamètre du cercle générateur.
Et par conféquent lorfque le point p
tombe jîn 5 , & qu'oa a p B = o , on a
y =— > & par conféquent o : i : ; a' :
o
y ; c'ef!-à-dire que la valeur dey devient
infinie : & qu'ainfi la cijjoïde A m O L,
quoiqu'elle approche continuellement & de
plus près (jue to.wte dijftance donnée de 1»
C I s
droite JB C y ne la rencontre cependant
jamais.
<i°. B C eu donc rafymptote de la cif-
foïde. Voye\ ASYMPTOTE.
Les anciens faifoient ufage de la cijfoîae ,
pour trouver deux moyennes proportion-
nelles entre deux droites données. En effet ,
fuppofons qu'on cherche par exemple deux
moyennes proportionnelles entre deux hgnes
données égales à ^ iC & à i? m , il n'y a qu'à
fuppofer la cijjoïde tracée ; puis prenant fur
l'axe A B une portion = ^ X , & tirant
l'ordonnée de la ciJ[Joïde== p m , on trouvera
les moyennes proportionnelles/? iVôc-^/».
Fbyf;^ Proportionnelle.
On trouve dans la dernière feâion de
X application de l'algèbre à la géométrie par
M. Guifnée , les propriétés principales de la
tijfoïde expliquées avec beaucoup de clarté.
M. Newton a donné dans ïes opufcules
la longueur d'un arc quelconque de la cif~
foïde. Ce problême fe réfout par le calcul
intégral. (O)
^ CISSOTOMIES , f. f. plur. {Mythol.)
fêtes qu'on célébroit en l'honneur d'Hébé ,
déefle de la jeunefle. Elles étoient ainfi
appellées , des feuilles de lierre qu'on y cou-
poit. Ant. expl. tom. II y pag. zi^,
CISTE, r. m.ciflus, {Hift.nat.bot.)
genre de plante à fleurs en rofe. Le piftil fort
du calice , & devient dans la fuite un frurt
arrondi & terminé en pointe. Ce fruit s'ouvre
par le fommet : il eft compofé de plufieurs
cap fuies , & il renferme des femences ordi-
nairement fort petites. Tournefort , infi. rei
herb. Voyei PLANTE. (/)
§ Ciste , {Botanique.) en latin c//?"^ ^
en anglois y rock-rofe , en allemand ^ cijlen-
Toejlein.
Caractère générique.
Un calice formé de cinq feuilles inéga-
les foutîent cinq pétales , minces , larges ,
étendus & arrondis. Au milieu fe trouve
une houpe d'étamines déliées à fommets
fphériques : elles entourent un crabryon
arrondi qui fupporte un ftyle obtus terminé
en trompe. Cet embryon devient une cap-
fule tantôt à cinq , tantôt à dix cellules , où
cft renfermé un gra«d nombre de femences
très-menues.
M. Linnscus a feparé de ce genre le le-
dum , parce qu'il n'a que dix étamines.
159
C ï s
Efpeces.
r. Cifie en arbrilîèau à feuilles ovales,
afîifes, velues & rigides des deax côtés ,
à fleurs terminales.
Ciflus arbore f cens , foliis ovatis _, fejji-
libus y utrinque villojis y rugojis y floribus
terminalibus. Miil.
Rock- rofe with aval le ave s ^ &c.
2. Cifie en arbriifeau à feuilles alîîfes ,
velues & rigides des deux côtés , dont les
inférieures , jointes par leur bafe , font ova-
les , & les fupérieures flgurées en lance.
Cifius arborefcens^ foliis fejjîlibus, utrin-
que villofiSy rugofisf inferioribus, ovatis bafi
connatis y fummis lanceolatis. Hort. Cliff.
Rock-rofe with the under leaves ovaland
joined at their bafe , but the upper fpear
shap^d , &c.
3. Cifie y en arbrifTeau à feuilles ovales en
lance , jointes par leur bafe , velues ,
rigides , & dont le pédicule des fleurs eft
très-long.
Cifius arbore fcens ^ foliis ovato-lanceola"
tis y bafi connatis y hirfutis y rugofis y pe-
dunculis fiorum longioribus. Mill.
Rock-rofe with longer foot-fialks to ths,
flowers y &c.
4. Cifie en arbrifîèau à feuilles ovales y
obtufes , velues , nerveufes & âpres par-
defïbus , à grandes fleurs.
Cifius arboref cens foliis ovatis ^ obtufis ,
villqfis y fubtiisnervojisyrugofîsj floribus am*
plioribus. Mill.
Rock-rofe vith ovalobtufe leaves ^nervous
and rough on their under Jide y &c.
<y. Cifie y arbrifleau velu , à feuilles en
lance , d'un verd décidé , jointes par leur
bafe, à fleurs afllfes, latérales & terminales^
à calices aigus.
Cifius arborefcens, villof us, foliis lancée-
latisy viridibusy bafi connatis y fioribus ala^
ribus y Ù terminalibus fefjîlibus y calicibus
• acutis. Mill.
Hairy rock-rofe with greenfpear^shapedt
leaves y &g.
6. Cifie y arbriiîêau à feuilles en lance ^
unies par-deiïûs , à pétioles joints par leur
bafe en forme de gaines.
Cifius arboref cens y foliis lanceolatis fuprâ
ïœvibusy petiolis bafi coalitis vaginantibus^
Hort. C'Cif.
Rock-rofe withfpear-shapsdleavesy Sec
1^0 C I s
7. Ciflej arbrifîeau à feuilles oblongues , |
velues , blanches & cotonneufes , jointes par
leur bafe , douces & unies en-dellus , mais
ncrvcufes par-defTous.
Ci/fus arborefcensfoliis oblongls^ tomen-
tofis , incanis, bajî connatis^ fuprâ Ixi'ibus
infernè nervofis.
Rock-rofe with hairy le ai' es 3 &c.
8. Cijîe buifïbnnant , à raineaux diver-
gens , à feuilles ovales , pétiolées , & dont
le pédicule des fleurs cù. nu.
Cifius frmefcens y ramïs pitulis , foliis
d'iitis p petiolatis , kirfuds, pedu/iculis nu-
dis. Mill.
Shrubby rcck-rofe , &c.
9. Cifie , arbrifîêau à feuilles ovales en
lance, velues, ondées par les bords, à fleurs
:terminales.
Citons arbore fcens , foliis ovato^lanceola-
tisy hirfatis , margiritx undulatis , floribus
terniinalibus. MiH.
Rock-rofe with le ares wave don their bor-
ders y &c.
10. CiJIe buiiîonnant à feuilles très-étroi-
tes en lance, velues, aflifes & à fleurs ter-
minales.
Cifliisfrmicofas , foliis lineari-lanceola-
tiiy hirfutisp' fej/ilibus }fl)ribus terminali-
biis. Mil].
Shrubby rock-rofe with narrow leaves^ ècc.
11. CiJIe , arbrifîêau à feuilles en lance ,
-unies par-deiTus , à pétioles joints par Jeur
:bale en [orme de gaines.
Ci (lus arborefcens y foliis lanceolatisyfu-
prà lœribusj petiolis baji coalitisj vaginan-
tibns. Linn. Sp. pi.
Rcck-rofe with fpear shaped leaves.,
12. C{/?tf à feuilles obiongues , cordifor-
mes, unies, à très-longs pétioles & à tige
iigneufe.
Cifius foliis oblonga-cordatis y glabris y
j>etiolis longioribusy caule fruticofo.
Rock-rofe with heart-shaped leaves y &c.
13. Cifie , arbrifleau à feuilles en lance ,
allifès , velues à.Q,s deux côtés , à trois ner-
vures & à aifîêlles nues.
Ciflus arborefcens y foliis lanceolatis y
fcfflibus y utrlnque villofis y trinerv.iis y
.a'is nudis. Hort. Clijf.
Rcck-rofe with tree nen-'^d hairy leaves ,
^4« CiJle , arbrilïèau à feuilles très-étroi7
C I s
tes en lance , blanches par defTous , à trois
nervures , à pétales arrondis.
Cifius arborefcens y foliis lineari-lanceo^
latis y fiibtiis incanis y trinerviis y petaîis
fuhrotundis. Mill.
Rock-rofe u it/i narrow fpear shaped lea^
ves y &c.
i<). Cifie à feuilles en lance , unies par-
deflus , blanches par-deflous , à trois ner-
vures , ondées par les bords , à tiges
ligneufès.
Cifius foliis lanceolatis fupernê glabris y
infernè incanis , trinerviis y margine undu-
latis y coule fruticofo. Mill.
Rcck-rofe with fpear shaped leaves wav^d
on their borders y &c.
16. CiJIe y arbrifîêau à feuilles cordifor-
mes , unies , pointues & foutenues par des
pétioles.
Cifius arborefcensfoliis cordatis y loevi-
bus acuminatis. Linn. Sp. pi.
Rock-rofe with heart-shaped pointed
leaves.
17. Cifie à. feuilles ovales , blanches, dont
les inférieures ont des pétioles ,& les lùpérieu-
res font jointes par leur bafe, à tige ligneufè.
Cifius foliis ovatisj incanis^ infernèpetioi-
latis, fupernê coalitis^ aiule fruticofo. Mill.
Yellow Jîowering rock-rofe y &c.
18. Cifie à feuilles en lance très-érroites 4
blanclîcs , aflil;s , à fleurs en grappes , u
tige Iigneufe.
Cifius foliis Une ari-lancealatis y incanis^
fefjilibus y floribus racemoJiSy caule fruticofo^
Roch-rofe withflovers growing in clufiers,
Miller dit qu'en Angleterre , tous ces cif"
tes , à l'exception du dernier , peuvent ré-
fifleren plein air , au froid des hivers com-
muns : nous avons trouvé à cet égard une
grande diftéi-ence dans le climat des Evê-
chés. Nous avons eu les cifies y n°. z & n'°.
^,, en pleine terre , à une excellente expo-
fition pendant deux ans , & le troifieme
hiver , qui n'étoit pas fcrt rigoureux , les
a entièrement détruits.
Les cifies y n*. 2. , n^. 7, & /i^. / Oy ont
pafié i'hiver de 1772 en pleine terre, à une
bonne expofition parée. de tous \qs vents par
des bolquets d'arbres verds ; ils étoient
encore allez verds en mars , mais la neige de
ce mois , & les gelées tardives ont achevé
I de les ruiner ,; nous . avons eflayé de les
jCQuyjir
CI s
coTivrir avec des pailles ; mais à moins qu'on
ne leur donne beaucoup d'air , ils Ce pour-
riflent fous ces couvertures : la privation
d'air les contrarie fort aulfi , quand on les
place dans les orangeries , & fur-tout dans
îfô lèrres qui ne font pas éclairées ; mais
ils réuiïiflent parfaitement (bus les chaiïis
vitrés,.
Les efpeces n°. iz , n°. 14, & ii°. 25 ,
qui font les plus belles , (ont auflî celles
qui réiiftent le mieux en plein air. Le r^.
14 s'appelle ordinairement cifle à feuilles de
peuplier ; j'en ai un pié qui, depuis qua-
tre ans, n'a pas encore fouffert fenfible-
ment , & qui fuit afïèz de progrès.
Une coque bien mûre de chaque efpece
de cijle , futfit prefque toujours pour les
multiplier en abondance , par la prodigieufe
quantité de femences qu'elle contient. Fai-
tes votre femis en mars dans des cailles
emplies de terre légère 5 vos graines ger-
meront au bout de quinze jours. Les pe-
tits cijies auront cinq ou fix pouces de haut
pour le mois de juillet : alors vous en tranf-
planterez la plus grande partie , chacun
dans un petit pot j vous les placerez dans
un lieu légèrement ombragé j ulqult la par-
faite repriiè , & les arrolerez de temps à
autre. Ces pors doivent pafîcr l'hiver dans
une caillée vitrée , aufïi-bien que les cijîes
qui font reftés dans la petite caille , &: qu'on
tranfplantera vers la mi-avril avec les mê-
mes précautions. Letroifieme printemps on
pourra en lever quelques-uns de chaque
eipece avec leurs mottes , pour les fixer
en pleine terre , à de bons abris j mais il eft
bon d'en laiflér quelques individus en ré-
ferve dans des pots que l'on enterrera l'été
dans les bofquets parmi d'autres arbrif-
feaux , avec lefquels ils formeront une va-
riété très-agréable.
Les phrafes donnent une idée fuififante
du feuillage des ciJles ÔC de leur port ; nous
allons les fiire connoître par d'autres parti-
cularités.
Le premier s'élève à trois ou quatre pies
de haut , & forme un buiflbn touffu ; fa
fleur eft aflèz grande & de couleur de pour-
pre. Le fécond porte de plus grandes ffeurs ,
& d'un pourpre plus pâle. Celles du troi-
fieme font attachées à de plus longs pédicu-
hsy elles iint plus petites de d'un pourpre
Tome VIIL
CIS i^i
plus foncé. Les fleurs du quatrième font très-
grandes & d'un pourpre très-clair.
La cinquième efpece s'élance moins que
les précédentes : elle eft très-rameufe. De
chaque nœud par une branche menue qui
porte une feule fleur femblablc à celles du
n°. î y Se les branches principales font ter-
minées par trois ou quatre fleurs afïifès,
c'eft-à-dire , fans pédicules.
Le/2°. 6' parvient à la hauteur de cinq ou
fîx pies ; les fleurs naiffent au bout des bran-
ches & font femblables à celles du n°. 4. Le
n°. y a des branches droites , velues Se blan-
châtres j les fleurs font grandes & d'un pour-
pre brillant. Le n°. 8 n'atteint jamais qu'à la
hauteur de deux pies, il a des branches
menues & divergentes; les fleurs fortentde
1 aillèlle des feuilles : elles font blanches Se
un peu moins grandes que celles des efpe-
ces précédentes.
Le fP. 9 croît de lui-même en Corfe &
dans les iles de l'Archipel. C'eft le cijîe lada-
nifere ; il s'élève à trois ou quatre pies de
haut j les fleurs^ naiflent à l'extrémité des
branches ; elles font d'un poupre foncé Se
à-peu-près de la largeur d'une rofe fimple.
Le /2°. z o ne s*élance guère qu'à la hau-
teur de quatre pies ; fes feuilles font étroi-
tes, d'un verd obfcur, légèrement velues,
glutincufes , ainfî que les tiges. Se mar-
quées pardeffus d'un long fillon formé par
la cote inférieure qui la partage Se qui
faille en deflbus ; les fleurs font d'une cou-
leur de fbufie pâle.
La onzième efpece parvient à cinq ou
fîx pies de haut; les fleurs naiflent à l'ex-
trémité des branches , fur des pédicules
longs Se nus , qui fe divifent en petits pédi-
cules , fupportant chacun une grande fleur
blanche , dont le calice eft velu ; les feuilles
font très-glutineufes dans les jours chauds.
Le ciJîe n?. îx , s'élève à quatre ou
cinq pies fur des branches, dont l'écorce
eft brune Se unie ; les feuilles ont de longs
pédicules &: font unies des deux côtes;
les fleurs naiflent à l'extrémité des branches ;
elles font blanches Se ont d'aflèz longs
pétioles.
Le n°. zj n'atteint qu'à la hauteur de
trois ou quatre pies; les feuilles font en
lance d'un verd très-oblcur : pendant le
chaud ilenexfude une fubftance glurineufe
X
1^1 C I s
& fuave i les fleurs font Hanches Se tmC-
fent plusieurs enfemble à l'extrémité des
branches fur de longs pédicules nus.
Le «°. ^4 s'élève fur une tige ligneufe à
cinq ou (ix pies ; les branches font unies
ôc couvertes d'une écorce brun-rouge , gar-
nies de feuilles en lance , étroites , blan-
châtres en delîbus, &c d'un verd obfcur en
defliis, à trois nervures ; les fleurs nailfent
à l'extrémité des branches fur de petits pé-
tioles : elles font compofées de cinq péta-
les ffès-largess arrondis, marqués à leur
bafe d'une grande tache de couleur de pour-
pre ; il exfude de cette plante une fubfl:ance
glutineufe Se très-aromatique qui parfume
Pair au loin. Il y a une variété de cette
efpece dont la fleur eft entièrement blanche.
La quinzième efpece s'élève auffi haut
que la précédente : elle n'en diiîere que
par fes feuilles qui font plus courtes , plus
larges, plus blanches pardeflbus, plus rap-
prochées , ôc d'une coniiftance épaifle , par
les branches latérales qui font plus courtes ,
p.^r les fleurs qui font plus grandes, & la
iublknce glutineufe qui eft plus abondante
fur route la plante.
Le /2°. 26* parvient à la hauteur de (îx
ou fept pies , les feuilles font larges , cor-
diformes, minces &c d'un verd clair; les
fleurs font blanches, & deviennent de cou-
leur de foufre pâle en fe fanant.
Le n°.. ij s'élance fur un tronc droit Se
rameux à quatre ou cinq pies, &: forme
un buiflbn touffu ; les branches font, can-
nelées & velues : les pédicules des fleurs qui
naiflènt au bout des branches , ont un pié
de long , & donnent naiffance à deux ou
quatre petits pédicules latéraux qui foutien-
nent chacun trois ou quatre fleurs attachées
par de petits pétioles \ les fleurs font gran-
des & d'un jaune brillant , mais elles ne
durent guère que deux ou trois heures.
La dernière efpece atteint ordinairement
à la hauteur de trois ou quatre pies ; les
feuilles font étroites , figurées en lance &
velues : de l'aiflelle des feuilles fortent des
branches menues garnies de deux ou trois
paires de petites feuilles , qui font terminées
par dse grappes de fleurs d'un foufre fale.
Cette efpece veut toujours être confervée
dans les ferres, & ne peut foutenir la ri-
gueur de lamauvaife faifbn.
C IS
On vient de voir dans cette belle fa-
mille la plus charmante variété : il feroic
très-agréable de la raflembler en maffe dans
quelques parties des bofquets d'été; leurs-
fleurs paroiflent au mois d'août ; elles l'ont
ordinairement fanées le foir , mais elles fè
fuccedent long-temps ; elles s'épanouiflent
dès le grand matin : c'efl un vrai plaiiir
que d'aller contempler alors le brillant hom-
mage qu'elles rendent au foleil levant , en
étendant leurs larges pétales chîirgcî ue glo-
bules de ro^éc : ces pétales font d'une con-
fiftance fî légère , que dans certaines cfpe-
ces ils confervent toujours les plis dont ils
ont contraélé l'habitude , étant renfermés
dans le bouton.
Les ci^es à feuilles de peuplier , c'eft-à—
dire , les n°.î4&c i^ , peuvent figurer dans
les bofquets d'hiver : ceux à feuilles blan-
ches & quelques autres y ajouteroient de la
variété , s'ils pouvoient braver la mauvaiie-,
fàifon ; tous ont un feuillage hivernal. Quel-
ques efpeces , qui ne frudbifient pas dans,
les climats froids , peuvent être multipliées,
de boutures faites en été dans des pots fur;
des couches ombragées.
Il nous refte à parler de la manière donf,
on recueille le ladanum dans les îles de l'Ar-
chipel fur le cijlc «°. q. On. a un inftru-
ment femblable à un râteau fans dents,,
appelle ergajîiri , d'oii pendent plufîeurs
lanières de cuir verd que l'on pafle douce-
ment fur les buiflbns de ce cijîe : la fubi^
tance glutineufe, mais liquide , s'attache
à fes lanières, ôc on la racle d'après avec
un couteau. Cet ouvrage efl très-pénible ,
il fe fait dans les jours caniculaires fur les
montagnes, dans un climat brûlanr. AulB
n'y a-t-il que les moines Grecs qui s'en,
chargent.
Le ladanum ou labdanum fc recueille
encore, en raclanr d'après la barbe des
chèvres cette fubflancs qui s'y eft attachée ,
tandis qu'elles broutoient les cijîes. Ce la-
danum eft fort impur.
En Efpagne on fait bouillir les feuilles
des cijîes dans l'eau , le ladanum y fuma-
ge, &: on l'enlevé avec des cuillers ; celui-
ci n'eft moins bon que les autres. On fe fert
.peu du ladanum .intérieurement; cepen-
dant Ces teintures extraires par le moyen
I de l'efprit de viu bien rectifie , pavent fè
C I T
><3onner cle vingt à trente gouttes , comme
•céphalique , fortifiant , ftomachique. L^u-
(agc externe du ladanumen maflè eftplus
commun; il entre dans les emplâtres forti-
"lians & neuritiques, & dans les paftilles odo-
rantes; fa réfine fait partie de la théria-
-que célefte. Le Codex de Paris fait entrer
cette gomme-réiine dans le baume hyftéri-
-que, l'emplâtre contre les hernies, Se l'emplâ-
tre ftomacal. (M. le baron de Tscjwudi.)
CISTERCIENS , religieux de l'ordre de
Citeaux. FojcifCiTEAux.
CISTERNA , ( Géog. ) petite ville d'Ita-
lie en Piémont, fur les confins du marqui-
fatdV.m.
CISTOPHORE , f. m. ( Antiq. ) c'eft
ainfi qu'on appelle les médailles ou plutôt
les monnoies anciennes où l'on voit des cor-
beilles; ces monnoies étoient fi communes ,
que la levée des tributs fe nommoit quel-
quefois levée du cijîophore. Antiq. expl.
CISTRE , {Mufiq. inflr. desanc.) inftru-
ment de mulique des Egyptiens.
" C'eft un inftrument à cordes fort ufité
•€n Italie : il a prelque la figure du luth ,
■Triais Ton manche eft plus long , &- divifé
en dix-huit touches. Il a quatre rangs de
'Cordes qui ont chacun trois cordes à l'u-
îiiflon, à la réferve du fécond rang qui
lî'en a que deux. Ses cordes font ordinai-
Temeut de laiton , & fe touchent avec un
-petit bout de plume comme celles de la
mandore. Son chevalet eft auprès de la
îofe , & fes cordes ibnt attachées au bout de
la table à un endroit qu'on nomme le;?e/-
gne. Ses touches (ont de petites lames de
laiton fort déliées. Il y a aulTi des cijîres
à fix rangs .de cordes. Les Italiens Rappel-
lent cyihara. On tient qu' Amphion a été î'in-
^venteur du chai^i avec le cijire. »> ( F. D. C. )
ÇITADELLA , ( Géog.) petite ville forte
avec un poit , capitale del'ile de Minorque ,
•qui eft aux Anglois. Long. %i , ^f8;lat^^,^S.
CiTADELLA , ( Gécg. ) petite ville d'Ita-
lie dans le territoire de Padoue , près de la
trente.
CITADELLE , f. f. on appelle ainfi dans
la Fortification , un lieu particulier d'une
place , fortifié du côté de la ville & delà
•campagne , qui eft principalement deftiné
a mettre des foldats pour contenir dans le
devoir les habitons de la place.
C I T 1(^3
Les c/V^^c//e50ntordinaircment quatre ou
cinq baftions , & au plus fix ; elles font
preique toujours de figure régulière, à
moins qu'elles ne foicnt conftruites fur des
lieux qui ont peu d'efpace , ou qui Ibient
fortifiés par des fituations inaccelïibles, com-
me la citadelle de Befançon : elles font pla-
cées fur l'enceinte de manière qu'une partie
eft dans la ville , & l'autre dans la campagne.
La ville n'eft peint fortifiée du coté de la
citadelle , afin que les habitans n'aient rien
qui les mette à couvert de fbn canon , ôc
qu'elle puilïè commander par-tout dans la
ville : c'eft pourquoi elle doit être encore
fortifiée avec plus de foin ; parce que fî elle
étoit plus foible , l'ennemi comm^enceroit
par l'attaquer ; & lorfqu'il en feroit le maî-
tre , il le feroit aufti de la ville : au lieu
qu'étant obligé de commencer fbn attaque
par celle-ci , il faut après fa prife faire un
fécond fiege pour s'emparer de la citadelle.
Entre la ville & la citadelle on laifîè un
grand efpace vuide de maifons dans l'é-
tendue delà portée du fufîl , que l'on nom-
me Vefplanade. Cet efpace fert à empêcher
qu'on ne s'approche de la citadelle fans ch
être découvert.
On ne fait point de citadelles aa milieu
des villes , parce qu'elles ne pourroient être
fecourues dans le cas de rebeUion. On en
conftruit quelquefois entièrement hors des
villes ; mais elles y ibnt jointes par quel-
ques lignes ou quelque ouvrage de commu-
nication.
La citadelle doit être placée dans le ter-
rain le plus élevé de la ville , afin qu'elle
en commande routes les fortifications. On
la place auffi de manière qu'elle puiflè difl
pofer des eaux de la ville , de forte que l'en-
nemi après s'être emparé de la ville, ne
puifTè les lui ôter.
Pour donner une idée de la manière dont
on peut tracer le defTîn d'une citadelle , fbient
( Plan^. IV de Fortificat.fig. 6. ) les baf-
tions i, Ey N, le côté ou la partie de
l'enceinte où l'on veut placer la citadelle.
Ces baftic«is ne feront point mis au trait
dans le plan , mais au crayon , parce qu'il
faudra en détruire un pour faire entrer la
citadelle dans la place. Soir le baftion E
qu'on fe propofe de détruire.
On prolongera fa capitale indéfiniment
Xz
î^4 C I T
vers la campagne &z vers la ville. On choi- '
lira un point D fur certe capitale plus ou
moins avancé vers la ville , lelon la polition
qu'on voudra donner à la ciiadclle-^ on élè-
vera fur ce point D une perpendiculaire A
S , fur laquelle on prendra D A èc D B
chacune de 90 toifes , afin d'avoir le côté
A 5 de 180.
Préfenrement fi l'on veut que la citadelle
foit un pentagone régulier , on cherchera
par la trigonométrie ou autrement le rayon
du pentngone , dont le côté eft de 1 80 toi-
Tes , on le trouvera de 1 51. On prendra aVec
le compas ce même nombre de toifes fur
.téchellei puis des points A êc £ pris pour
centre & de cet intervalle, on décrira deux
arcs qui fe couperont dans un point C qui
fera le centre de la citadelle.
Du point Con décrira un cercle du rayon
C ^ , on portera le coté A B cinq fois fur
la circonférence , & l'on aura le pentagone
que doit former la citadelle , & qu^on for-
tifiera comme on Ta enfeigné dans les conf-
tru6tions de M. de Vauban. Voye^l'article
Fortification, E le mens de fortification ,
par M. Leblond.
Les citadelles ne doivent avoir que deux
portes j Tune pour aller delà citadelle dénis
la ville , &c réciproquement de celle-ci dans
k citadelle ; Pautre pour entrer de la cam-
pagne dans la citadelle : cette porte ne s'ou-
vre que pour recevoir dufecours du dehors ,
& pour cet effet on la nomme porte du
fecours.
Les citadelles font jointes aux villes de
plufieurs manières fuivant la difpofition de
la ville & de la citadelle; mais celle-ci doit
être toujours placée de manière que la ville
n'ait aucunouvrageou aucun flanc qui puiflè
battre la citadelle , ni aucun ouvrage qui la
commande. On joint l'enceinte de la place
à la citadelle par des efpeces de murs qui
aboutiflent fur les capitales des baftions de
la citadelle , fur celles des demi-lunes , ou
enfin fur le milieu des courtines. Cette der-
nière difpofition eft la meilleure. Ces murs
ont un rempart jufqu'à la diftance de 40 ou
50 toifes de la citadelle ; on les nomme lignes
de communication : elles ne font autre chofe
dans cet efpacc qu'un mur de maçonnerie
(de quatre ou cinq pies d'épailïcur , & de
niême hauteur que le rempart de la place.
C I T
Sur la partie fupérieuredece mur on élève
un garde-fou de deux pies d'épaifleur 6c de
Cix pies de hauteur ; on le perce de crenaux
pour découvrir dans la campagne.
Qiiand on conftruit des citadelles aux
villes maritimes , on les difpofe de manière
qu'elles commandent la ville , le port & la
campagne. Celle du Havre de Grâce eft
placée de cette manière : elle peut fervir
de modèle pour la polition de ces fortes de
citadelles.
Les villes maritimes , outre les citadelles,
font encore quelquefois défendues par des
châteaux qui commandent au port. Dâiis
ces fortesde villeson conftruit ordinairement
des jetées , qui Ibnt des efpeces de digues ,
de fortes murailles, ou chaullées, qu^on
bâtit auffi avant qu'on le peut dans la mer ,
en y jetant une très-grande quantité de gros
quartiers de pierres. A leur extrémité , on
établit des forts dont le canon empêche que
les vaiflèaux ennemis ne s'approchent du
port, &parconféquentdcla ville. La figure
de ces forts n'a rien de déterminé : on leur
donne la plus propre à leur faire comman-
der tous les cotés par on l'ennemi peut le
préfenter.
On conftruit aulïi quelquefois des réduits
dans les villes, qui ont le même objet que
la citadelle. Voye^ Réduit. ( Q)
CITAMBEL , f. m. ( Hijl. nat. Botani^
que.) efpece de nénuphar du Malabar,
très-bien gravée fous ce nom , avec la plu-
part de fes détails , par Van-Rheede , dans
Ion Hortus Malabar icus, vol. II. pi. XXVII,
pag2 £2' Les Brames l'appellent cafiuri ca^
malla , 8cJ. Commelin , dans fes Notes, la
défigne fous le nom de nymphéea Malaba-
rica minor folio ferrato.
Elle diffère du nénuphar commun & de
Pambel par les caraéleres fuivans. 1°. Elle
eft plus petite , haute feulement d'un pié.
2°. Ses feuilles ibnt arrondies , entières ,
fans dentelures, longues de trois pouces &
demi, d'un quart moins larges , fendues
jufqu'au tiers à leur origine , & portées
fur un pédicule cylindrique trois fois plus
court , & d'une ligne & demie de diamètre.
3°. Ses fleurs font d^abord rouges , enfuitc
violettes , puis bleues , ouvertes en étoile
de deux pouces de diamètre , &c compo-
fécs de feize feuilles difpofées fur quatre
CI T
rangs , dont les quatre extérieures font prcf-
qu une fois plus grandes que les autres ,
triangulaires , deux fois plus longues que
larges , & imitant un calice ; le pédicule qâi
les porte eft aufTi long que celui des feuilles.
Culture. Cette plante eft commune au Ma-
labar comme au Sénégal , dans les mares
d^eau d'un pié de profondeur qui reftent
fur les fables pendant la faifon des pluies.
Ufages, La décodion de fes fleurs pilées
fe boit dans les difficultés d'uriner ; en y joi-
gnant du fucre , elle arrête le vomiflèment,
adoucit l'âcreté de la toux. Ses graines fe
mangent avec le fucre.
Remarques. Jean Commelin fe trompe
quand il dit que les feuilles du chamùel (ont
dentelées. Cette plante , étant du genre du
nénuphar , doit fe ranger avec lui dans la
famille des ariftolochcs qui eft la onzième
de nos Familles des plantes , volume II ,
page j6. {M. Ad AN SON.)
CIT-AMERDU , f. m. {HJ(l. nat. Bo-
tanique. ) nom que les Malabares donnent
à' une efpece de cocculus , très-bien gravée ,
avec la plupart de fes détails , par Van-
Rheede , dans fon Hortus Malabaricus , vo-
lume VU, planche XXI, page ^^. Les Bra-
mes l'appellent amerdu-valli.
D'une racine ligneufc , cylindrique , lon-
gue de deux à trois pies , fur un pouce de
diamètre , brune , s'élève une tige cylin-
drique longue de 50 à 60 pies du diamè-
tre d'un pouce , flexible , s'entortillant au-
tour des arbres \ à bois blanc , jaunâtre ,
peu épais , plein de moelle aux deux tiers
de fon centre , recouvert d'une écorce ver-
re , d'abord veloutée de poils blancs, en-
fuite cendrée extérieurement &, verte au-
dedans , peu ramifiée.
Les feuilles-lbnt alternes , difpofées cir-
culairement le long des tiges , taillées en
cœur de deux à quatre pouces de diamè-
tre en tout fens , entières , mais échan--
crées d'un fixieme à leur origine , minces ,
molles , veloutées finement , & relevées en-
defl'ous de cinq cotes rayonnantes , & por-
tées horizontalement ou pendantes fur un
pédicule c/lindrique égal à leur longueur.
De l'aiflèile de chacune des feuilles fu-
périeures fort un épi égal à leur longueur ,
compofé de 40 à f o fleurs , verd-blanchâ-
tres , ouvertes en étoiles de deux lignes &
CI T
16
T
demie de diamètre , portées fur un pédicule
cylindrique deux fois plus court.
Ces fleurs font toutes mâles fur certains
individus , & femelles fur d'autres où elles
font pofées au-deflous d'un difque qui fup-
porte l'ovaire. Elles confiftent en un calice
verd à ilx feuilles , en une corolle blanchâ-
tre plus petite , à fix pétales , & en iix éta-
mines blanchâtres plus courtes à anthères
jaunes. Les femelles n'ont pas d'étamines ,
ni mêm.e d'apparence de filets , mais trois
ovaires pédicules ou portés chacun fur un
dilque cylindrique , & couronnés par un
ftyle cylindrique qui part du fommct de
leur côté intérieur , &: velouté à fon ex-
trémité.
Chaque ovaire devient , en mûriflànt ,
une baie ovoïde , obrufe , longue de cinq
lignes , de moitié moins large , écartée ho-
rizontalement , verte d'abord , cnfuite jau-
ne , puis rouge de corail , luifànte, charnue ,
vifqueufe , à une loge contenant un ofle-
let ovoïde un peu échancré en rein d'un
côté , long de quatre lignes , une fois
moins large, ridé, mince,, rendre, fragile,
blanc d'abord , enfuite noirâtre , à amande
blanche.
- Culture. Le cit-amerdu fe trouve au Ma-
labar autour de Warapoli & de Clouta , Se
au Sénégal , dans les terres argileufes , brû-
lées & pierreufes. Il eft toujours couvert
de feuilles , de fleurs & de fruits.
Sa racine ou fes branches , même dé-
pouillées de feuilles , fuipendues en l'air ,
croiflent , comme font les plantes grafles ,
fleuriflent &: frUdifient.
Qualités. Ses fleurs n'ont point d'odeur.
Ufages. Sadécodion fe boit dans les fiè-
vres ardentes , la goutte , & la jauni iTè.
Son fuc , uni à celui du coluppa & du tiru-
tali , fournit avec le lait , un bain anti-
(pafmodiquc. Ses jeunes feuilles pilées avec
celle de l'émacciam & le lait , s'emploient
en liniment pour les phlegmons & les éré-
fipeles. Son fuc , uni à celui du mulunti
du tsjerapuUa & del'ulinja , eft un puiflànt
maturatif& un vulnéraire excellent pour
guérir les ulcères. Le fuc exprimé de (ts,
tiges, dépouillées de leur écorce , cuit avec
du lait & de l'eau , puis évaporé à ficcitc »
& mêlé avec l'huile des feuilles d'enfermo ,
fournit un liniment fouverain dans les
i6€ C 1 T
douleurs de la goutte i bu avec le fucre ou
le poivre long , il diflipe la cachexie , la
pituite ôc les humeurs goutteufes.
Remarques, htcit-amerdu eft pne efpece
du cocculus des boutiques , appelle co/z/ci-
du Lèvent , 5c forme un genre particulier
voifin du menirpermam dans la famille des
anones qui eft notre 46*. ; Ôc il eft étomianc
que M. Linné, qui doit avoir vu fleurir
le menifpermum , l'ait confondu avec lui ,
.<S<: qu'il ait attribué feize étamines à fes fleurs
ftériles , & huit aux fleurs ferdles , tandis
que toutes n'en ont que fix ; enfin qu'il l'ait
placé dans ladifeciedodecandrie, puifque
Ces fleurs font toutes hermaphrodites avec
des étamines & des ovaires , mais de ma-
nière qu*il en avorte un grand nombre.
Voye-^ nos Familles des plantes , volume II,
pape ':JG4XM. AdANSON.)
CiTATION , r. {.{Gramm.) c'eftl'u-
ùge & Papplication que Pon fait en parlant
ou en écrivant, d'une penfée ou d'une ex-
preffîon cm^ployéc ailleurs, le toutpourcon-
firmerfonraifonnementparuneautoritéref-
pedable , ou pour répandre plus d'agrément
dans Ton difcours ou dans facompofltion. :
Dans les ouvrages écrits à la main , on
fculigne les citations pour les diftinguer du
-corps de l'ouvrage. Dans les livres on les
^ift:i:gue , foit par un autre caractère , foit
par des guillemets. Foje;(_ Guillemets.
Les citations doivent être employées avec
jugement ; elles indifpofent quand elles ne
iont qu'oftentation : elles font blâmables
-quand elles font faufles. Il faut mettre le
jcdeur à portée de les vérifier. En matière
^rave , il eft a propos de citer l'édition du
livre dont on s'eft fervi.
Quelquesmodernes-fè font fait beaucoup
rd'honneur en citant à propos lesplus beaux
inorceaux des anciens , & par-là ils ont
trouvé l'art d'em.bellir leurs écrits à peu de
frais. Nos prédicateurs citent perpétuelle-
,mcnt l'écriture & les pères, moins cependant
.qu'on ne faifoit dans les iîecles partes. Les
proteftansnecitentguerequel'écrittire.Quoi
-qu'il en foit , s'il eft d'heureufes citations , s'il
^ft des citations exades , il en eft auffi beau-
cou p d''ennuyeufes, des faufles, & d'altérées
,ou par l'ignorance ou par la mauvaife foi des
iCcrivains , fouvent aufîi par la négligence de
fpix qui citent de mémoire. La mauvaife ,
CI T
foi dans les citations eft univerfellement ré-
prouvée ; mais le défaut d'exaditude Se d'in-
telligence n'y eft guère moins repréhenlîble ,
ôc peut être même de conféquence fuivant
l'importance des fujets.
LeprcjiCit ampullas 6c fefquipedalia verBa
d'Horace , de même que Xtjcire tuum nihil
efl de Perfe , font cités communément dans
un fens tout contraire à celui qu'ils ont dans
l'auteur. Cette application détournée qui
n'eft pas d:?ngereu{è en des fujets profanes
peut devenir abuiive quand il s^agir des
pafliiges de l'écriture , Se il en peut réfuker
des erreurs confidérâbles. En voici entr'au-
tres un exemple frappant , &: qui mérite
bien d'être ob'!ervé.
C'eft le multi vccnti , pauci vero elccfi
{Mat. ch. xx.')y paflage qu'on nous cite à
tous propos com.me une preuve déciiîve du
grand nombre des damnés & du petit nom-
bre des élus ; mais rien , à mon avis , de plus
m?î entendu ni de plus mal appliqué. En
efftc, à quelle occafion Jefus-Chrift dit-il.,
beaucoup d^ appelles , tnais peu d'élus ? C'eft
particulièrement dans la parabole du père
de famille qui occupe plulieurs ouvriers à fà
vigne , où l'on voit que ceux qui n'avoient
travaillé que peu d'heures dans la journée,
gagnèrent tout autant que ceux qui avoient
porté le poids de la chaleur &C du jour ; ce
quioccaliona les murmures de ces derniers,
lefquels fe plaignirent de ce qu'après avoir
beaucoup fatigué , on ne leur donnoit pas
plus qu'à ceux qui n'avoient prefque rien
foit. Sur quoi le père de famille s'adreflàiit
à l'un d'eux , lui répond : Mon ami ^ je rie
Vous fais pbint ds tort ; n'étes-vous pas con-
venu avec moi d'un denier pour votre jour-
née ? Prene:^ce qui vous appartient , & voiis
en allcT^. "Pour moi je veux donner à ce dernier
autant qu'à vous. Ne m'eji-il pas permis àe
faire des libéralités de mon bien , & faut^il
que votre œil foit mauvais , parce que je fuis
bon ? C'ejf ainjî , continue le Sauveur , que
les derniers feront les premiers , & les premiers
les derniers , parce qu'il y en a Beaucoup d'ap»
pelles , mais peu d'élus. '
J'obfèrve d'abord lur ces propofitions du
texte. Sic erunt noviffmiprimi & primi novif-
fimi , multi ENIMfunt vocati , pauci ver^
e/ec7/; j'obfèrve , dis-je , qu'elles fontabfblu-
ment relatives à la |)arabole ; jSc c'eft ce <ju6
CI T
Von voit avec une pleine évidence par ces
conjonâ;ions connues^c , enim , qui mon-
trent il bien le rapport nécellaire de ces pro-
pofirions avec ce qui précède : elles font
comme le réfukat ik. le fommaire de la pa-
rabole ; & fi elles ont quelque obfcurité ,
c cft dans la parabole même qu'il en faut
chercher leclaircilîement.
J^ dis rlr».-»^ q-^(. Iq^ éms dont il s'agit ici,
ce (ont les ouvriers que le père de flimille
trouva fur le foir fans occupation, & qu'il
envoya , quoique fort tard , à fa vigne : ou-
vriers fortunés , qui n'ayant travaillé qu'une
heure , furent payés néanmoins pour la jour-
iiée entière. Voilà , dis-je , les élus , les fa-
voris , les prédeftinés.
• Lesfimples appelles que la parabole nous
jMréfente , ce font tous ces mercenaires q ue le
pcre de famille envoya dès le matin à fa
vigne , & qui après avoir porté toute la fa-
tigue du jour j forent payés néanmoins les
derniers , & ne reçurent que le falaire con-
venu , le même en un mot que ceux qui
avoient peu travaillé. Ce font tous ceux-là
qui , fuivant la commune opinion , nous
ngurent les non-élus , les prétendus ré-
prouvés.
Mais que voit-on dans tout cela qui fup-
pofe une réprobation ? Le traitement du père
de famille à l'égard des ouvriers mécontens ,
a-t-il quelque chofc de cruel ou d'odieux ,
& trou ve-t-on rien de trop dur dans le dif-
cours fage &c modéré qu'il leur adrefïè ?
Mon ami , je ne vous fais point de tort ; je
vous donne tout ce que ]e vous ai promis : je
veux faire quelque gratification à un auire^
' pourquoi le trouve:^-yous mauvais ?
On ne voit rien là qui doive nous faire
fécher de crainte , rien qui fente les horreurs
d^une réprobation anticipée. J'y vois bien
de la prédilection pour quelques-uns ; mais
je n'y apperçois ni injuftice ni dureté pour
les autres : nul n'éprouve un fore funefte ;
ceux même qui ne font qu'appelles fans être
élus , doivent être fatisfaits du maître qui
les emploie, puiiqu'il les récompenfe tous,
& qu'il les traite avec humanité. Mon ami ^
dit-il , je ne vous fais point de toit ; appelle
au travail de ma vip:ne , yous aveT^ reçu le fa-
laire de vos peines ; & quoique vous a: foye^
pas du nombre des élus eu des favoris , vous
fl'^ve;^ pourtant pas fujet de vous plaindre.
CIT 1^7
Paroles raifonnables , paroles même affec-
tueufes , qui me donnent de l'elpoir , &c
nullement de l'épouvante.
Je conclus de ces réflexions fi fimples,-
que le multi vocati , pauci vero eleâi , dont
il s'agit , eft cité mal à propos dans un fens
finiftre , de qu'on a tort d'en tirer de.> •»--,
""17'^7Z va^.Ciperantes; puifqu'enfin ce paf-
fage bien entendu & déterminé comme il
convient par les circonftances de notre pa-
rabole, inlpirera toujours moins d'enroi que
de confiance en la divine bonté , &c qu'il-
indique tout au plus les divers degrés de
béatitude que Dieu prépare dans le ciel à
les ferviteurs: erunt novijjimi primi , ùprimi
novijji mi. ihid.
Le multi vocati , pauci vero elecfi, fe trouve'
encore une autre fois dans l'écriture jc'eH: au"
xxij chap. de S. Matthieu , mais il n'y a rien
là de plus finiftre &: de plus concluant que-'
ce qn'on a vu ci-deflus.
J*âi aulTî un mot à dire fur le fameux 6
alîitudo de St. Paul , & je montrerai (ans
peine que l'on abufe encore de ce palïige
dans les applications qu'on en fait : on le cite
preîque toujours en parlant du jugement de
Dieu , & il femble que ce foir pour cou-
vrir ce qui paroît trop dur dans le m.yftere
de la prédciVinatioTL, ou pour calmer les
fidèles eifrayés àz^ celeftes vengemces. Mais
ce pafiage , au fens qu'il eft cité , loin d'é-
clairer ou de calmer les efprits , inlpire au
contraire une frayeur rénébreufe , & nous
montre un Dieu plus terrible qu'aimable. •
Néanmoins admirez ici le mal-entend-.i»
de cette citation : ce pafiàge fij)eu fatisfai-
lanr de-la manière qu'on le prélente , eft vé- ■
ritablem^ent dans le texte facré un fujet d'ef-
pérance ôc de confolation , puifqu'il expri-
me le ravillement où efl l'apôtre à la vue
des tréfors de fageiTe & de miléricorde que
Dieuréferve pour tous les hommes.
Dieu , dit S. Paul aux Romains , a per-
mis que tous fufiènr enveloppés dans l'in-
créduliié , pour avoir occaficn d'exercer fa
miféricorde envers tous. Conclufii enim Deus
omnia ininzrédulïtate , ut omnium mifereatur.
Sur quoi l'apôtre s'écrie tranfporté d'admi-
ration: " O profondeur des tréfors de la
y' lagelîe & de la fcience de Dieu ^ que fes
» jugemensfont impénétrables, &fes voies
.» incompréhenfibles 1 «
1^8 C I T
s. Paul par conféquent , loin de nouS an-
noncer ici la rigueur des j ugemens de Dieu ,
nous rappelle au contraire les effets ineffables
de fa bonté. O ahitudo divitiarum fapientice
ùfcitntiœDti ! Le dogme de la prédeftina-
rion n'a donc rien d'effrayant dans ce paf-
fiigc de S. Paul.
Quoi qu'il en foît , certains prédicateurs
abufant de ces exprelfions , & outrant les
vérités évangéliques , n'ont que trop fou-
vent abrmé les consciences , & jeté la ter-
reur , le défefpoir , où ils dévoient infpirer au
contraire les plus tendres fentimensdelare-
connoillance pour le Disu des miféricordes.
Mais hélas , que ce prétendu zèle , que ce
zelc outré a caulé de maux !
Les auditeurs épouvantés , méconnoif^
fant leur créateur & leur père dans le Dieu
foudroyant qu'on leur prêchoit , ont fe-
coué pour la plupart le joug de la foi , &
fe font livrés à l'incrédulité ; difpofition fu-
ncfte qui fappe le fondement des vertus &
qui allure le triomphe des vices. Art.de M.
Faiguet , maître depenjîon a Paris.
Citation , ( Théolog.) LescitationsCont
la bafc de la théologie. Les citations de l'an-
cien teftament qu'on trouve dans le nou-
veau , ont donné lieu à des doutes , des
difputes , &c des obje«5tions fpécieufes de
la part des ennemis de là religion chrétien-
ne. Julien , Phorphyre , les Juifs 5c les ef-
prits-forts modernes, reprochent aux chré-
tiens que les apôtres citent fouvent des paf-
fiiges de l'ancien teftament , Se des pro-
phéties comme accomplies dans la perlbnne
de Jefus-Chrift 5 que cependant il arrive
fréquemment , ou que ces paftàges ainfi
cités ne fe trouvent point dans l'ancien
teftament , ou ne font point employés dans
le fens Httéral ôc naturel qu'ils femblent
préfenter dans l'ancien teftament j ce qui
paroît évidemment , ajoute-t-on , par ce
partage de S. Matthieu , chap. i] ,f. i j" ,
£x ^gypto vocavijilium meum , qui pris à
la lettre fe rapporte à la fortie des Ifraéli-
tes d'Egypte.
Cette difficulté a paru infurmontable à
quelques auteurs ; d'autres pour la réibudre
ont pris différentes routes. Quelques-uns
ont recours à un double accompliflèment ,
& prétendent que quoique les prophéties
aient été accomplies une première fois dans
CI T
certaîns événemens , elles peuvent l'être
encore une fois dans la perfonne du meffie.
Mais d'autres rejettent ce double accompUf-
fement , à moins que le prophète lui-même
ne le déclare , rendant par ce moyen toute
la prophétie inutile.
Entre ces deux extrémités prefque éga-
lement vicieufes, quelques-uns ont cmbrafîe
une opinion fort raifonnablc , & qui
paroît fondée , c'eft de dire qu'il y a des
prophéties typiques fur le Meflîe , lefquel-
les ont deux objets j l'un prochain & im-
médiat , qui eft comme l'ombre ou la fi-
gure du Meflie contenue dans l'ancienne
loi , & qui a eu un accomplilTement im-
parfait &: commencé ; l'autre éloigné , mais
principal , favoir le Mellie , en qui ces pro-
phéties ont eu leur plein &: entier accom-
pliflèment : le premier n'étoit que le type
du fécond , ôc par conféquent celui-ci étoit
le principal ; & de ce genre eft le paflàge
cité dans l'objedion , qui pour avoir été
accompli en figure par la fortie des ifraéli-
tcs d'Egypte , n'en a pas moins été une
prophétie bien appliquée & pleinement ac-
complie dans le retour de J. C. d'Egypte
après la mort d'Hérode.
Pour lever le refte de la difficulté , on
obfervequeles Juifs rabbins prennent beau-
coup de libertés en citant ou en interpré-
tant les écritures , & l'on fuppofe que les
apôtres ont fuivi la même méthode dans
leurs citations ; mais cette fuppofition n'eft
pas fondée : en effet , les apôtres inftruits
immédiatement par J. C. & infpirés par le
S. Efprit , n'avoient aucun befoin de re-
courir aux règles des dodeurs juifs dans
leurs citations.
Néanmoins en conféquencc de cette fup-
pofition , M. Surenhufîus , profefleur en hé-
breu à Amfterdam , a tâché de retrouver
ces règles perdues depuis fi long-temps , &:
a donné à cet effet un favant traité inti-
tulé fepkerhamechawe , ou BIBA02 KATAA-
A ATH2, in quofecundùm veterem theologorum
hebrceorumformula mallegandiù modos inter*
pretandi , conciliantur loca ex veteri in novo
tejlamento allegata. Il y remarque d'abord
quantité de différences qui fe trouvent dans
les différentes manières de citer ufitécs dans
les écritures ; comme // a ké dit ; // efl
écrit f afin que ce qu'ont dit Us prophète^
fût
C IT
fût accompli , V écriture dit , V(yyf{ ce qui
efldit ^V écriture a pré dit ^ iln^eft pointait ^
&c. II ajoute que les livres de l'ancien tef-
tament ayant été arrangés différemment en
divers temps & fous difFérens noms , c'eft
pour cela qu'un livre ou un auteur font fou-
vent confondus avec un autre.
Pour ce qui regarde les règles de citation
& d'interprétation pratiquées par \qs rab-
bins , il en rapporte dix , qu'il a recueil-
lies , après une étude profonde du tamuld
& des anciens dodeurs juifs , dont il donne
des exemples tirés des écrits des apôtres ;
& par cts règles il tâche d'expliquer & de
JLiflifier toutes les citations de l'ancien tef-
tament employées dans le nouveau. Ces
règles font i®. de lire les mots , non pas
fuivant les points qui font placés au-defîbus ,
mais fuivant d'autres .qu'on leur fublli-
tue , comme ont fait S. Pierre , aâ. ch.
^ij > y- 3- St. Etienne , ac?. chap. viij , v.
4.J i & S. Paul , l Corinth. chap. xv ,
t'. -5:4 ; &c z Corinth. chap. viij y v. i 5.
La ièconde eft de changer les lettres, comme
a fait S.Paul , Kom. ch. ix -, v. JJ ,* /
Corinth. ch. z z , p. ^ ; &c chap, x , r. 5 ,'
& S. Etienne ,ac7. l'ij^v. 4J. Latroilieme d\
de changer les lettres &: les points , comme
a fait S. Paul. acf. ch. xiij y v. 4Z ; &c 2.
Corinth. ch. viij , v. z ^. La quatrième
efl d'ajouter quelques lettres & d'en retran-
cher d'autres. La cinquième eftde tranfpofer
les mots & les lettres. La fixiemc ell de
partager un mot en deux. La (èptieme ,
d'ajouter d'autres mots pour rendre le
fens plus clair. La huitième , de changer
l'ordre des mots. La neuvième , de changer
l'ordre des mots & d'en ajouter d'autres :
c'efl ce . qu'ont fait les apôtres , dit M.
Surenhulius , par rapport aux deux der-
nières règles. Et la dixième enfin , c'efl de
changer l'ordre des mots , d'en ajouter
quelques-uns , & d'en retrancher d'autres ;
& c'efl félon le même auteur la méthode
que S. Paul a fuivie fort fouvent.
D'autres auteurs y comme l'évêque Kid-
der , M. Leclerc & M. Sike , lèvent la
difficulté d'une pianiere fatisfaifante à cer-
tains égards , mais dangereufe à d'autres.
Selon eux , cette forme ordinaire de cita-
tion dont fe fervent les. évangélifles , afin
que ce que les prophète^ ont annoncé fût ac-
Tome VIIL
C I T i€^
compli , ne fignifie rien de plus qu'une ma-
nière d'adapter les pafîages des prophètes
au cas préfent par un fens d'accommoda-
tion : principe trop général , & qui demande
des exceptions ; on en verra un exem-
ple ci-deflbus. Le raot'^7^Hf«9^( , accompli ^
ne nous détermine pas , ajoutent-ils , à un
tel fens , comme fi les évangéliUes avoient
dcffein de dire que la prédiâion des évé-
nemens futurs efl: accomplie ; mais il expri-
me feulement qu'on a ajuflé les termes qu'on
a cités. Si cent raifon avoit lieu , il n'y a
point de prophétie qu'on ne put nier avoir
été accomphe à la lettre dans Jefus-Chrifl.
Mais pour la faire palîèr , l'évêque Kidder
remarque qu'on peut dire que l'écriture efl
accomplie en deux manières ; proprement ,
comme quand lachofè prédite arrive ; &
improprement , dans un l'ens d'accoaimoda-
tion , comme quand il arrive dans' quelque
heu à quelqu'un quelque choie qui ell
déjà arrivée quelque temps auparavant ail-
leurs & à une autre perlonne. C'cft ainfi ,
ajoute-t-il , que S. Matthieu dit à l'occafion
du maflîicre des Innocens , qu'alors fut ac-
compli ce qui avoit été dit par le prophète
Jérémie : Une voix fe fit entendre dans
Rama , &c. L'exemple eil bien choilî ,
mais le principe cft trop vague , & n'eil
pas applicable aux prophéties littéralement
accomphes dans Jellis-Chriil , & il s'ea
trouve un très-grand nombre de cette et
pece dans l'évangile.
Cette interprétation de l'évêque Kidder
efl confirmée par M. Leclerc , qui remar-
que que les Juifs ont coutume de dire dans
leur langue , qu'un pafTage de l'écriture efl
accompli toutes les fois qu'il arrive une cho-
fe à laquelle on peut l'appliqua" : de forta
que S. Matthieu qui étoit hébreu , & qur
écrivit ( comme on le fuppofe communé-
ment ) en cette langue , ne vouloit dire au-
tre chofe dans le paiîage qu'on vient de ci-
ter , finon qu'il étoit arrivé une chofe k
laquelle on pouvoit apphquer ce que Jéré-
mie avoit dit dans une autre occaiion. M.
Sike abufant du principe de M. Leclerc ^
avance qu'en citant ce paffage d'Ifaïe , une
Vierge enfantera. , &g. les évangéhfles ne
fe propofent que de rapporter ces mots du
projDhete , qui conviennent fort bien, à la
naifiance de J. C. mais non comme unô
lyo C I T C I T
prophétie de fa naifTance. Ce fentimcnt | où font contenues les preuves , on ajoute
de M. Sike n'efî pas nouveau ; Grotius l'a- ■ in c. ce qui fignifie in corpore articuli.
voit imaginé , & M. Richard Simon l'a \ Si le paffage eft pris de la réponfe aux
:foutenu ; mais M. BoflTuet en a pleinement objeftions , on cite ad z . c'eil-à-dire à la
démontré la faufïeté , auffi-bien que le P. . réponfe ;\ la première objedion ; ainfi de la
Balthus jéfuite , dans le favant ouvrage deuxième objedion , de la troilieme , &c»
fntkulé defenfe des prophéties , qmpurmea] A l'égard de la deuxième partie de la
1738 , & auquel nous renvoyons le ledeur. i (bmme de S. Thomas , comme elle ell di-
■On peut encore conlûlter à ce fujet Maldo- ' vifée en deux parties , fi le palFage eft tiré
nat , dans (otl commentaire fur le {ècond ; de la première partie , on met un i & un
'chapirre de S. Matthieu , où il donne quatre ' 2. c'eû-ii-d\re'inprimd parte fecundœpartis.
règles pour juger des citations &"difcerner Si le paflfage eu tiré de la féconde partie
les prophéties accomplies httéralement dans : de cette féconde partie , on met //. z. c'eft-
Jefus-Chriil , d'avec celles qui n'y ont été [ à- dire f ecundâ fecundce ^ dans la iubdiviiion
ou deuxième partie de la deuxième partie de
accomplies que dans un fens d'accommo-
.dation : règles iimples , beaucoup plus
5Ûres & moins équivoques que celles des
irois derniers auteurs proteflans dont nous
-venons de parler. (G)
Il ne fera pas inutile de rapporter ici quel-
w[ucs ufages en matière de citations , foit
théotogiques , foit de jurifprudence.
. Parmi les livres fapientiaux de l'écriture
fainte , il y en a un qui a pour titre Vec~
cléjmjle , »xjtA>iT/j<r»' , concionator , & un
autre appelle ï e'ccle^iajiique , ikkmjiccçikôî ,
tcclefiafiicus y concionalis : quand on cite
le premier , on met en abrégé eccle. au lieu
que quand on rapporte un paffage du fécond ,
on met eccli. eniliitc on ajoute le cha-
pitre & le verfet.
- Commelafomme de S. Thomas eft Ibu-
vent citée par les théologiens , il faut ob-
ferver que cette fomme contient trois par-
ties , & que la deuxième partie eft divifee
en deux parties , dont la première eft ap-
pellée la première de la deuxième , & la
deuxième s'appelle la deuxième de la deuxiè-
me. Chaque partie eft divifée en queftions ,
chaque queftion en articles ; chaque article
commence per les objedions , enfuite vient
k corps de l'article , qui contient les preu-
ves de l'alTertion ou conclufion , après quoi
viennent les réponfes aux objedions , &
cela par ordre , une réponfe à la première
objedion , Ê'c. Il eft facile maintenant de
comprendre la manière de citer S. Tho-
mas : il s'agit d'un paffage de la première
partie , après avoir rapporté le pafîàge , on
met par ex. /. p. q. i . a. j. c'efî-à-dire pri-
mâ parte , qucejîione prima , articula primo.
Si le paffage eft tiré du corps de l'article
la fomme de S. Thomas. (/')
Citations de Droit , {Jurifpmd.)
font les textes de droit que l'on indique pour
appuyer ce qui eft avancé.
Les citations fréquentes en plaidant fur
rent introduites fous le préfident de Thou.
Pafquier , en parlant des avocats de ce
temps , dit que erubefcebantjine lege loqui :
ils citoient non-feulement des textes de droit,
mais auffi les hiftoriens , les orateurs ,' les
poètes , & la plupart de ces citations étoient
fouvent inutiles & déplacées.
Les jurifconfultes du xvj^ fiecle font tom-
bés dans le même excès par rapport aux
citations ; leurs écrits en font tellement char-
gés , que l'on y perd de vue le fil du diicours ,
& l'on y trouve beaucoup plus de citations
que de raifonnement.
Quelques-uns tombent préfentement dans
un autre excès , foit en plaidant , foit en
écrivant ; ils ont honte de citer , & fur-tout
des textes latins , qui femblent être aujour-
d'hui moins familiers qu'autrefois. Ce genre
d'érudition eft regardé par certaines gens
comme un bagage d'antiquité dont on ne
doit plus fe charger : c'eft une opinion que
l'ignorance a enfantée , & que la pareffe
nourrir. On ne doit pas recourir à des cita-
tions peu convenables au fujet , ni s'arrêter à
prouver ce qui n'eftpas contefté ; mais il efl
toujours du devoir de l'avocat &du jurif-
confulte de citer les loix & autres textes qui
établiffent une proportion tontroverfée ; il
doit feulement ufer modérément des cita--
tions , ne pas en flircharger fon difcours , &
faire choix de celles qui font les plus pré-
cifes &lesj)lus frappantes.
C I T
Comme les citations de droit font ordi-
nairement écrites en abrégé , nous les allons
cxpofèr ici pour en donner l'intelligence.
Citations du droit civil.
jip. /z//?z/z.ou//z/?/fiir.{îgnifieauxiLnflitutes.
D. ou^auxdigelles.
Code ou c. au code.
Code the'od. au code théodofien.
Code repet. pialeâ. repetitx prcclediones.
Authent. ou aiith. dans l'authentique.
Leg. ou /. dans la loi.
$. ou parag. au paragraphe.
Novel. dans la novelle.
Noi'el, Léon. N ovellcsde l'cmpereurLéon.
Argiim. leg. par argument de la loi.
Glof. dans laglolè.
H. t. en ce titre.
Eod. tit. au même titre.
. In p. ou in princ. ail, commencement.
Jnf.àhûh.
Citations du droit canon.
C. ou can. au canon.
Cap. au chapitre. I
Cauf. dans une caufc de la féconde partie
du décret de Gratfen.
Deconf. dans latroifîeme partie du décret
qui traitt- de la confécration.
De pan. au traité de la pénitence qui eft
dans la féconde partie du décret.
Difl. dans une diftinâion du décret de
GratiJiu
Ex. ou extra, c'eft dans les décrétales de
Grégoire IX.
A p. Greg. IX. dans les mêmes décrétales.
Extrai'. Joan. dans une des extravagantes
ou conftitutions de Jean XXII.
Extrav. comm. dans les extravagantes
communes. '"•' .
In fexto. ou in 6. dans la colledion de
Boniface VIII appellée lefexte.
Ap. Bon. ou appendix Bonifacii y dans
lefexte.
Q. q. ou quœfl. queftion.
"j/". ou verf. au verfet. {A)
Citation en Jugement , {Jurifp.)
que l'onappelloit chez les Romains injusvo-
catio^ re\ enoit à-peu-près à ce que l'on appelle
parmi nous ajournement ou ajjignation. Oi
ne voit point de quelle manière fe faifoieni
ces fortes de citaùons du temps des rois &; '
C I T i7r
des premiers confuls ; mais on voit que par
la loi des douze tables il étoit ordonné au
défendeur de fuivre le demandeur lorfqu'il
vouloit le conduire devant le juge. Dans la
fuite cette procédure changea de forme ; car
long-temps avant Judinien il n'étoit plus
permis de citer verbalement fon adverlàii-e
en jugement ; il falloit dès-lors que l'afllgna-
tion fût libellée , comme cela s'obferve parmi
nous , & l'on convenoit du jour auquel on
devoit fe préfenter devant le juge.
Il n'étoit pas permis de citer en jugement
toutes fortes de perfonnes , on en exceptoit
les magiftrats de Rome , fur-tout les con-
fuls , Its préteurs , le préfet de la ville , &
autres qui étoientqualifiés magijiratasurbani.^
Il en étoit de même des magiftrats de pro-;
vince tant qu'ils étoient en charge , d'un
pontife , & des juges pédanées , pendant
qu'ils exerçoient leurs fonctions ; de ceux qui
gardoient quelque lieu confacré par la reli-
gion : ceux qui recevoient les hoiMaeurs du
triomphe , ceux qui fe marioient , ceux qui
faifoientles honneurs d'une pompe funèbre ,
ne pouvoient être inquiétés pendant la céré-
monie ; enfin ceux qui étoient fous la puif^
fance d'autrui , ne pouvoient être cités en
jugement, qu'ils ne fufî'ent jouiffans de leurs
droits.
Les pères , les patrons , les pères & les
en Fans des patrons , ne pouvoient , fuivaric
le droit natuiel , être cités en jugement par
leurs enfans ou leurs afïî-anchis , fans une
permilïion du juge ; autrement le deman-
deur étoit condamné à payer cinquante {e{-
terces.
Il falloit même , fuivant le droit civil ,
une fèmblable permilïion du préteur pour
cirer en jugement quelque perfonne que ce
fût , fans quoi le défendeur avoit adion k
ceTujet contre le demandeur ; mais fi le pré-
teur autorifoit dans la fuite la citation , il n'y
avoit plus d'aûion contre le demandeur.
La citation en jugement étoit quelque chofê
de plus fort qu'une fimple aâ.ion. VoycT^ le
titre du dig. de in jus pocando ; le tréfor de
Brederode , au mot cnare ; Phi fi. de lajurif-
prud. rom. par M. Terralfon , pp. S 4- 6" ^ $•
Citation , ( Junfp jeitauiii un ajour-
nement qui fe donne par un appariteur , pour
comparoître devant un juge d eglife.
lu^cications générales font abufives ; elk*
y 2.
17» . Ç I T
doivent être libellées, & les caufes expri-
mées.
Un laïque cité devant un juge d'églife , pour
une caulê qui n'eft pas de fa compétence,
peut interjeter appel comme d'abus de la
citation. Voye^ APPARITEUR 6* IVG^
p'ÉGLISE ; Tournet , let. c y n. 75.Stok-
mans , décif. z i6. Bibliot. de Bouchel ,
ïiux mots appellations , citations , violences ^
& roi des ribauds. Biblioth. canoniq.tom. I,
pag. ^^O y col. z ;& 2,6'^ y col. z. Dufail ,
liv. I y chap. cxcvj. BafTet , tom I, liv. I , tit.
S y chap.j. & il). Filleau , IV^ part, qmvjl.
49; le dixième plaidoyer de Gautier, tom. II.
Les fujcts du roi ne peuvent être cités en
cour deRome. Mémoires du clergé y première
tdit. tome ly part. / , p. $08. Bouchel , au
mot (:/f3rVc»/2. Tournet , let. c , n. j/^ , tomel;
des preuves des libertés , chap. ix yn.8.{A)
*CITÉ , r. f. {Politiq. ) eft la première
des grandes fociétés de plufieurs tamilies ,
où les aâfes de la volonté & l'ufage des forces
font réfignés à une perfonne phyiique ou à
un être moral , pour la fureté , la tranquillité
intérieure & extérieure , & tous les autres
avantages de la vie. Voye^ SOCIÉTÉ & FA-
MILLE. La perfonne phyfique , ou l'être mo-
ral dépofitaire des volontés & des forces , ell
iWtc commander ; les perfonnes qui ont réli-
gné leurs volontés & leurs forces , (ont dites
^ohéir. L'idée de cité (iippofc donc le rapport
d'une perfonne phyfique ou d'un être moral
public qui veutfeul , à des êtres ph)^ques
privés qui nom plus de volonté. Toute cité^i
deux origines , lune philolôphique , l'autre
hiftorique. Quant à la première de ces ori-
gines , il y en a qui prétendent que l'homme
eft porté par fa nature à former . des cités ou
fociétés civiles ; que les familles tendent à fe
réunir , c'crt-à-dire à réfigner leurs forces &
leurs volontés à une perfonne phyfique y ou à
un être moral : ce qui peut être vrai , mais
ce qui n'eft pas facile à prouver. D'autres la
déduifent de la néceflité d'une fociété civile
povrr h. formation & la fubfiftance des
moindres fociétés , la conjugale , la pater-
nelle , & l'hérile ; ce qui eft démontré faux
par l'exemple d*s patriarches qui vivoient en
tamilles libres & féparées. Il y en a qui ont
recours ou à l'indigence de la nature hu-
itaine , ou à fa crainte <iu mal , ou -A un
«ppétit violcat <ies commodités de la vie ,
C I T
ou même à la débauche ; ce qui fufîiroit
bien pour rafîèmbler les familles en fociété
civile , & pour les y maintenir. La première
ville ou c/Vf'fijt conitruite par Caïn. Nemrod,
qui tut méchant , & qui aficda un des pre-
miers la fouveraineté , fut auffi un fondateur
ào. cités. Nous voyons naître & s'accroître la
corruption & les vices , avec la naiflance
& faccroiiïèment des cités. L'hiftoire & la
philofophie font donc d'accord fur leurs
origines. Quelles que foient les loix de Incité
où l'on s'en retiré , il faut les connoître , s'y
foumettre , & les défendre. Quand on le
repréfente en efprit des familles s'affemblant
pour former une cité , on ne conçoit entre
elles que de l'égaHté. Quand on fe les repré-
fente aflemblées , & que la réfignation des-
volontés & des forces s'ell faite, , on conçoit
de la fubordination , non-feulement entre
les familles , mais entre les individus. Il faut
faire le même raifonnement par rapport aux
cités entre elles. Quand on fe repréfente en
efprit les cités ifolées , on ne conçoit que de
l'égalité entre elles ; quand on fêles repréfente
réunies , on conçoit la formation des empires
& la fubordination des cités , foit entr'^elics ,
foit à quelque perfonne phj^fique , ou à quel-
que êtremoral. Que n'en peut-on dire au-
tant des empires ! Mais c'eft par cela même
qu'il ne s'eft point formé de combinaison des
empires , que les fouverains abfolus reftent
égaux , & vivent feuls indépendans & dans
l'état de nature. Le confentementqui afïure ,,
ibit la fubordination des familles dans une
cité , foit celle des cités dans un empire , L
une perfonne phyfique , ou à un être mo-
ral , ell démontré par le fait ; & celui qui
trouble l'ordre des familles dans la cité efl.
mauvais citoyen ; & celui qui trouble l'ordre
des cités dans l'empire eft mauvais fujet ; &c
celui qui trouble l'ordre des empires dans,
le monde , eft mauvais fouverain. Dans utt
état bien ordonné , une cite' peut être regar-
dée comme une feule perfonne , & la réunion
des cités comme une lèule perfonne , &
cette dernière perfonne comme foumife à une
autorité qui réfide dans un individu phyfique ,
ou dans un être moral fouvera-n , à qui il ap-
partient de veiller au bien des cités en gé-
néral & en particulier.
Le mot cité défignoit anciennement un.
état ,. un peuple, avec toutes les
C I T
dépendances, une république particulière.
Ce nom ne convient plus guère aujourd'hui
qu'à quelques villes d'Allemagne ou àcs
cantons Suiiîes.
Quoique les Gaulois ne fuflent qu'une
même nation , ils étoient pourtant divifës
0n plufieurs peuples , formant prefqu'autant
d'états réparés , que CéHir appelle cités , ciiù-
tates. Outre que chaque cité avoit Tes aflem-
blées propres , elle envoyoit encore des dé-
putés à ÔlQS aifemblées générales , où l'on
difcutoit les intérêts de plufieurs cantons.
Mais la cite\ ou métropole , ou capitale , où
fe tenoit l'aflemblée , s'appelloit par excel-
lence cii'itas. Les Latins difoient civitas
JEdaorum y civitas Lingonum , cii'itas Se-
nonum ; & c'eft fous ces noms qu'Autun ,
Langres & Sens font défignées dans l'itiné-
raire d'Antonin.
Dans la (ùite on n'appella cité que les
villes épifcopales ; cette diltindion nefubfifle
plus guère qu'en Angleterre , où le nom de
cité n'a été connu que depuis la conquête ;
avant cette époque , toutes les villes s'appel-
loient bourgs. Chafîane , fur la coutume de
Bourgogne, dit que la France a 104 cités ,
& il en donne pour raifon qu'elle a 104 tant
évêchés qu'archevêchés. Quand une ville
s'efî agrandie avec le temps , on donne le
nom à.Qcité à. l'efpace qu'elle occupoit pri-
mitivement ; ainfi il y a à Paris la cité &
l'univcrfité ; à Londres , la cité & les faux-
Ibourgs ; & à Prague & à Cracovie , où la
ville eft divifëe en trois parties , la plus an-
cienne s'appelle cité. Le nom de cité n'eft
plus guère d'ufage parmi nous qu'en ce der-
nier fens ; on dit en toute autre occafion, ou
ville , ou fauxbourg , ou bourg , ou pillage.
'yoje'[ ces articles.
Cité {Droit de ) , Jurifprud. eft la qua-
lité de citoyen ou bourgeois d'une ville , & le
droit de participer aux privilèges qui font
communs à tous les citoyens de cette ville.
Chez les Romains, le droit àtcité^ c'eft-
à-dire la qualité de citoyen romain , fut con-
fidéré comme un titre d'honneur , & devint
un objet d'émulation pour les peuples voifms
qui tîîchoient de l'obtenir.
Il n'y eut d'abord que ceux qui ëtoient
réellement habitans de Rome qui jouirent
du titre & des privilèges de citoyens ro-
mains. Romulus communiqua le droit de
CIT ,75
cité aux peuples qu'il avoit vainais , qu'il
amena à Rome. Ses fuccefîeurs firent la même
chofè , jufqu' à ce que la ville étant affez peu-
plée , on permit aux peuples vaincus de refter
chacun dans leur ville ; & cependant pour
les attacher plus fortement aux Romains , on
leur accorda le droit de aVou de bourgeoi-
fie romaine , enforte qu'il y eut alors deux for-
tes de citoyens romains ; les uns qui étoient
habitans de Rome , & que l'on appelloitc/Wj
ingenui ; les autres qui demeuroient dans
d'autres villes , que l'on appeiloit municipes.
Les confuls & enfuite les empereurs , com-
muniquèrent les droits de cité à différentes
villes & à difiérens peuples foumis à leur
domination.
La Loi 7 » au code de incolis , porte que
le domicile de quelqu'un dans un endroit ne
lui attribue que la quahté d'habitant , mais
que celle de citoyen s'acquiert par la naif^
fance y par l'atFranchifïèment , par l'adop-
tion , & par l'élévation à quelque place ho-
norable.
Les droits de cité confiftoient chez lej
Romains y 1°. à jouir de la liberté ; un
eklave ne pouvoir être citoyen romain , &
le citoyen romain qui tomboit dans l'efcla-
vage , perdoit les droits de cité : 2*. les ci-
toyens romains n'étoient point foumis à la
puifTance des magillrats en matière crimi-
nelle ; ils arrètoient leurs pourfuites en difanc
cipis romanusfum ; ce qui riroit fon origine
de la loi des douze tables y qui avoit ordonné
qu'on ne pourroit décider de la vie & de l'état
d'un ciK)yen romain , que dans les comices
par centuries : 3**. ils avoient le droit de
fufîrage dans les affaires de la république :
4°. ils étoient les feuls qui eufîènt fur leurs
enfansia puifîânce telle que les loix romaines
la donnent : 5®. ils étoient aufîi les ieuls qui
pufTent exercer le facerdoce & la magiflra-
ture , & avoient plufieurs autres privilèges»
Le droit de aVfe perdoit, 1°. en fè fai-
fam recevoir citoyen d'une autre ville ; 2°. en
commettant quelque aâion indigne d'un
citoyen romain , pour laquelle on encouroit
la grande dégradation appellée maxima ca^
pitis diminutio , qui ôtoit tout à fa fois le
droit de c/V & la liberté; 3°. la moyenne
dégradation , appellée média capitis dimi"
nutio , ôtoit auffi le droit de cité : telle étoit
la peine de ceux qui ëtoient ef]&cés du t^
174 ^ ^ "^^
des citoyens romains , pour s'être fait infcrire
fiir le rôle d'une autre ville ; ceux qui étoient
exilés ou relégués dans une île , foufiroient
aufll cette moyenr>e dégradation , & con-
fequemment perdoient les droits de cité.
V. rhifl. de lajurifp. rom.parM- Terrafîbn.
Parmi nous il n'y a que la naiflance ou les
lettre? du prince qui atfribuent les droits de
cité. On confond quelquefois le droit de cité
avec celui de bourgeoifie ; cependant le droit
de citétû plus étendu que celui de bourgeoi-
fie , il comprend auiii quelquefois l'incolat ,
& même tous les t&ts civils.
En effet , celui qui eft banni d'un lieu ne
perd pas feulement le droit de bourgeoifie , il
perd abfolument les droits de cité , c'efl-à-
dire tous les privilèges accordés auxhabitans
du lieu ; & fi le banniffemcnt efl hors du
royaume , il perd tous les ç^qis civils.
On peut perdre les droits de cité fans per-
dre la liberté , comme il arrive dans celui qu;
eft banni ; mais la perte de la liberté emporte
toujours la perte des droits de cité, voye^
Furgole , ces teflamens , tome I , page z^8.
Dunod , traité de la main-morte , p. j^ , au
mot Bourgeoisie. {A)
CITEAUX ou CiSTEAUX , ( Hifl. des
ordres relig.)C ijleriumou Cijhricum, Cifiel-
lence monaperium , célèbre abbaye , chef
d'ordre en Bourgogne , dans le Dijonois ,
diocefe de Châions , bailliage de Nuits , fon-
dée par faint Robert , abbé de Moleme ,
des libéralités de Raynal , vicomte de Beau-
ne , & d'Eudes , duc de Bourgogne.
Cet ordre a donné quatre papes à l'églife , \
Eugène III , Grégoire VIII , Céleflin IV ,
Benoît XII, & quantité de cardinaux &
de prélats.
L'abbé de Citeaux a la jurifdidion ordi-
naire fur les quatre premières abbayes appel-
lées fes quatre filles , qui font la ferté-fiir-
Grone dans le diocefe de Chàlons ; Ponrigni
dans celui d'Auxerre ; Clairvaux & Mori-
montdans celui de Langres.Les quatre abbés
font les premiers pères de l'ordre.
L'abbé de Citeaux eft le chef & lûpérieur
général de tous les monafleres de fon ordre ,
qui étoient , avant la prétendue réforme ,
au nombre de 1800 d'hommes & de 1400
de filles, & auffi des ordres militaires de
Calatrava, d'Alcantara , & de Monteze en
Elp^gnc , d'Avis^ de Çhrifî çn Portugal. '
CI T
Il a droit de convoquer le chapitre général
de fon ordre à Citeaux : il y prélide , & dans
l'intervalle il en a tout le pouvoir. Il efl con-
ieiller né du parlement de Bourgogne.
La bibliothèque renferme plufieurs ma-
nu fcrits précieux , celui entr'autres d'une
Bihle portée au concile de Trente par l'abbé
Louis de Belfey , qui fervit à en donner une
bonne édition.
L'églife , très-belle , efl ornée de tom-
beaux d'éveques , d'abbés , de grands fei-
gneurs. On difîingue ceux de Gui de Ro-
chefors , chancelier de France fous Charles
VIII & Louis XII; de Philippe Pol , gou-
verneur de Bourgogne ; de quatre fires de
Vergi , de deux Seigneurs de Mont-Saint-
Jean , trois de Vienne. Sous le portail on
voit le tombeau du fondateur de l'abbaye &
des autres ducs de la première race fes fuc-.
cefîeurs ; enfin on compte trente princes ou
princefïes de Bourgogne inhumés à Citeaux..
Le cœur du p?ipe Calixte II , mort en 1126 ^
eff derrière 1 autel.
Alain , lurnommé le docteur univerfel , fut
inhumé à Citeaux en 1294.
Innocent IV , n'étant que cardinal de
Fiefque , fut l'ami de l'empereur Frédéric ;
devenu pape, il fiit fon mortel ennemi, &
fiiivit les traces de l'orgueilleux Grégoire IX;.
obligé de fuir la colqre de l'empereur, il fe
retira à Gènes fa patrie : étant averti que le
roi làint Louis devoit le rendre â Citeaux ,
ce pape écrivit au chapitre général une lettre
étudiée , par laquelle il prioit tous les abbés
qui s'y trou voient de conjurer le roi à mains
jointes & à genoux , de le prendre ^ fuivant
l'ancienflc coutume de France, fous fa pro-
tedion, & de le défendre contre Frédiric
qu'il nommoit fils de fatan : de plus il leur
infinuoit qu'ils lui feroient plaiiir , s'ils en-
gageoient le roi a le recevoir dans {ts états.
Louis s'avançoit en effet vers Citeaux.
Tous les abbés & la communauté , qui éroit
de 5^9 moines, ayant appris fon arrivée,
allèrent proceffionnellement au-devant de lui
pour le recevoir & le conduire à leur monaf-
tere. Le roi ayant été introduit dans le cha-
pitre , après s'y être afiis au milieu des abbés
& des feigneurs , fe recommanda aux priè-
res des religieux ; alors tous à genoux , les
mains jointes & avec larmes, lui firent la
prière que le pape kur avoit prefcpite.
C I T
le roi s'étant mis à genoux devant eux
( que les i-ois font grands iorfque la piété les
' engage à le rabaifler ! ) , leur dit : >> Si je
puis fans blei'ier l'honneur de ma dignité , me
prêter à ce que vous me demandez , je dé-
fendrai le pape coritre l'empereur Frédéric ,
& je lui donnerai même , pendant fon exil ,
un afyle dans mes états , pourvu que mes
barons me le confeillent , parce qu'un roi de
" France ne peut fe diipenler de luivre leurs
avis ». ( Parole remarquable. )
Louis aflfembla donc les feigneurs de fon
royaume pour les confulter : ceux-ci bien
^convaincus que la cour de Rome efl toujours
à charge à fes hôtes, répondirent qu'ils ne
foufFriroient point que le pape vînt s'établir
dans le royaume. C'eft ainli que fous le gou-
vernement d'un prince jeune & pieux , la
fagefîê & la prudence vigilante des grands.,
conferve au roi la fplendcur de la majeiîé
fans aucun mélange de l'éclat d'une puiflance
étrangère, & aflbre à l'état fa tranquillité.
Conformément à l'avis des lèigneurs , le
roi fit entendre au pape qu'il ne devoit pas
compter fur la France. Tout le monde crai-
gnoit de le pofîéder ; il avoit auffi demandé
en même temps au roi d'Aragon la permif-
fion de venir en (es états : cette permilîion
lui fut également refufée : dans fon embar-
'ras , le pape fongea à l'Angleterre , où il ne
fut pas plus heureux : » J3ieu nous garde de
la préfence du pape , répondirent les barons ,
il ne viendroit lui-même que pour piller les
biens de l'églife & du royaume, w
On raconte que le pontife s'écria dans un
tranfport de colère : » Il fiut venir à bout
"de l'empereur , ou nous accommoder avec
lui ; après avoir écrafé ou adouci ce grand
dragon , nous foulerons aux pies fans crainte
les petits ferpens. n
Ainiî Innocent , refufé par-tout , fe déter-
mina à venir à Lyon , ville neutre , dont
l'archevêque étoit feigneur : c'eft là où il
tint un grand concile, où il excommunia
Frédéric ; coup d'éclat qui eut de terribles
fuites. Hiftoire des entreprifts du clergé ^
féconde partie^ page zo, l?-) ^7^7-
Boileau , étant à la' (l/ite de Louis XIV ,
au voyage que ce prince fit à Strasbourg ,
paflà à Citeaux , où les moines le reçurent
avec beaucoup de diftindion. Quand ils lui
çuieat fait voir leur couvent /Tua d'eux lui
GIT .75
demanda qu'il leur montrât donc le lieu oi\
logeoit la mollefîe , comme il l'avoit avancé
dans fon lutrin.
» Montrez-la moi vous-mêmes , mes
pères , leur répondit-il en riant , car c'eft
vous qui la tenez cachée avec grand foin. «
Récréât, lut. Lyon , 1765 , en 4 vol. in-fol.
On voit à Citeaux une bible corrigée par
les foins de St. Etienne troifieme abbé ,
précieux monument du zèle que ce St. abbé
avoit , afin que les religieux puifaflent la
fcience du falut dans les fources les plus
pures. Cet exemplaire corrigé de la bible ell
de 1109. Il aflembla les abbés & prieurs
de l'ordre en 11 19. ( déjà 12 abbayes. )
C'eil le fécond chapitre général. II y
forma des ftatuts appelles Chanacharitatis ^
approuvés par une bulle du pape Calixtc II ,
datée de Saulieu en 11 19. Avant {a mort,
arrivée en 1134, il établit 100 monaileres,
13 par Çts mains , le refte par celles de (ts
difciples. Il choifit , avec le chapitre , Gui
pour lui lùccéder : c'étoit un hypocrite qui
fut dépofé un mois après , & Rainauld ,
difciple de faint Bernard , mis à fa place.
La Charte de charité elî un ouvrage digne
de la piété de faint Etienne & des premiers
abbés de Citeaux. Cet écrit ne refpire que la
charité , prefcrit les moyens de la conferver,
& réunit entr'eux tous les monafleres pour
n'en faire qu'un corps fous un même chef.
Le chapitre , compofé de 10 abbés ,
approuva cette charte de 30 articles , adreffée
à tous les abbés. En 1226 il y avoit déjà,
plus de éo abbayes en France , puilque Louis
VIII , dans fon teftament , fait des legs à 60
maifons de l'ordre de Citeaux.
Je me fouviens , dit l'abbé d'Olivet dans
une lettre de 1732 , à M. le préfid. Bouhier ,
d'avoir lu que l'ordre de Citeaux , alîemblé
capitulairement au XIV ^ fiecle , fit un ftatut ,
par lequel il fut ordonné que , vu le grand
nombre de leurs religieux qui avoient été 'mÇ-
crits au catalogue des faints , ils n'en feroient
plus canonifer, & cela : Ne multitudine fancli
vdefcerent in or dine. Préface de la viedupere
Vincent Caraffe, imprimée àLyonen 1^52.
« C'efipar le même motif, obferve l'abbé
à&s Fontaines , Tome V de fes jugemens y
page zj^ , qu'un faint fut lùpplié autrefois
en Italie de ne plus faire des miracles. »
rojei Réforme.
17^ C I T
CITER, {Jurif.) c'efl afllgner quelqu'un
devant un juge d'églife. voyei^ ci-dej-'ant
Citation. {A)
CITERNE , f. f. {Arch, ) rëfervoir fou-
terrain d'eau de pluie fait par art pour les di-
vers befoins de la vie. On ne fauroit s'en paf^
fer dans plujlieurs pays maritimes , dans plu-
fieurs endroits de l'Afîe , & d'autres parties
du monde. Comme l'eau de toute la Hollande
efl faumache, toutes les maifons ont des
citernes , & il y en a qui font conflfuites
avec ur)i foin , un goût & une propreté admi-
rables, ^îais on dit que la plus belle citerne
qu'il y ait au monde , fe trouve à Conftanti-
nople. Les voûtes de cette citerne portent fur
deux rangs de 2. 1 2. piliers chacun ; ces piliers ,
qui ont deux pies de diamètre , font plantés
circulairement , & en rayons qui tendent à
celui qui eft au centre.
Ainfi un des plus grands avantages qu'on
puifîê tirer de l'eau de pluie , c'eft de la ra-
maffer dans des réfervoirs fouterrains qu'on
appelle citerne , où quand elle a été purifiée
en pafïant au travers du fable de rivière , elle
fe conferve plufieurs années (ans fe corrom-
pre. Cette eau eft ordinairement la meilleure
de toutes celles dont on peut ufer, folt pour
boire, foitpour l'employer à plufieurs ufages,
comme pour le blanchilTage & pour les tein-
tures , parce qu'elle n'ert point mêlée d'aucun
fel delà terre , comme font prefque toutes les
eaux des fpntaines, & même les plus ef Hmées.
Ces citernes font d'une très-grande utilité
dans les lieux où l'on n'a point d'eau de four-
ce, ou bien lorfque toutes les eaux de puits
font mauvaifes.
Dans ce cas , ceux qui font curieux d'avoir
de bonne eau , obfervent foigneufement de
ne laifTer point entrer l'eau des neiges fon-
dues dans la cite nie y ni celle des pluies d'ora-
ges. Pour ce qui eft des neiges fondues , on
a quelque raifon de les exclure àss citernes y
non pas à caufe des (els qu'on s'imagine qui
font enfermés & mêlés avec les particules de
la neige , mais feulement parce que ces neiges
demeurent ordinairement plufieurs jours , &
quelquefois des mois entiers fur Içs toits des
maifons , où elles fe corrompent par la fiente
des oifcaux & des animaux , & plus encore
par le féjour qu'elles font fur les tuiles y qui
font ordinairement fort fales.
Cependant les HoUandois parent i ces
C I T
deux derniers inconvéniens , en entretenant
leurs toits avec propreté , en en éloignant les
animaux , & en filtrant leur eau par des
pierres ou des fontaines fablées.
Ce feroit ici le lieu de parler de la conflruc-
tion de leurs citernes , de leur maçonnerie ,
de leur revêtement de marbre , de leur cou-
verture , de leur propreté , du choix des
matériaux qu'ils y emploient : car ce n'efl
pas afïêz pour former une citerne , que d'a-
voir un lieu qui tienne bien l'eau , que les
pierres & le mortier dont elles font jointes
ne puilTent communiquer aucune qualité à
cette eau qui y léjourne pendant un temps
confidérable ; il faut encore de l'art dans la
forme , dans lallrudure , dans lestondemens
d'une bonne citerne ; mais ce détail me me-
neroittrop loin , & feroit prefque inintelligi-
ble fans les figures.
Comme toutefois ce n'eft pas feulement
dans des pays tels que la Hollande que Ïqs
citernes font néceffaires ; qu'il y a quantité
de villes, de lieux , de châteaux dans toute
l'Europe , & dans ce royaume , où des ci-
ternes feroient d'une très-grande utilité ; que
d'ailleurs l'on ne peut douter par toutes les
épreuves qu'on a faites , que l'eau de la pluie
qui a été purifiée dans du fable de rivière ,
ne foit la meilleure de foutes celles qu'on
puiffe employer : M. de la Hire a imaginé ,
& a communiqué au public ( mem. de Vacad.
des Sciences , z 705. ) les moyens fuivans ,
pour pratiquer en tout ^^ysd^s citernes qui
fourniroient à chaque maifon afîez d'eau
pour l'ufage & \ts befoins de ceux qui y
demeurent.
Premièrement , il eft certain qu'une mai-
fon ordinaire qui auroit en fuperficic 40
toiÇts , lefquelles feroient couvertes de toits ,
peut ramaffer chaque année 2,160 pies cubi-
ques d'eau, en prenant feulement 18 pouces
pour la hauteur de ce qu'il en tombe , qui eft
la moindre hauteur que l'on obferve com-
munément. Mais ces 2160 pies cubiques
valent 75600 pintes d'eau ^ à raifon de 3Ç
pintes par pié, qui eft la jufte mefure pour
la pinte de Paris. Si l'on divife donc cp
nombre de pintes par les 365 jours de l'année,
on trouvera 2.00 pintes par jour. On voit
par-là que quand il y auroit dans une mai-
Ibn , comme celle qu'on fuppofe , vingt-
cinq perfonnes, elles auroient huit pintes
- d'eail
C ï T
tTcau cKacune à dépenfèr , ce qui eft plus
que (uliîlknt pour tous les ufages de la vie.
Il ne faut pas négliger un avis de M. de
la Hire , fur le lieu & lur la manière de conf-
çruire ces iortes de citernes dans les mailbns
particulières. On voit dans pluliCiin; villes
de Flandre, vers les bords de la mer, où
toutes les eaux des puits font ialees & anie-
res , à caule. que le terrain n*eft qu'un iable
léger au travers duquel l'eau de la mer ne fe
purifie pas , que l'on fait des citernes dans
chaque maifon pour fon ufage particulier.
Ces citernes ont lans doute de grands avan-
tages , & elles font enterrées. Ce font des
elpeces de caveaux où l'eau fe conferve mieux
qu'à l'air ; car il eil vrai que l'eau , & fur-
tout celle de pluie , ne le confervepas àl air ,
à cauie du limon dont elle efl remplie ,
qu'elle ne dépofe pas entièrement en pafî'ant
par le fable ; qu'elle le corrompt , & qu'il
s'y engendre une efpece de moullè verte
qui la couvre entièrement.
C'eli: pourquoi M. de la Hire voudroit
qu'on pratiquât dans chaque maifon un petit
lieu dont le plancher feroit élevé au-defîùs
du rez-de-chaufTée de 6 pies environ : que
ce heu n'eût tout au plus que la quarantième
ou cinquantième partie de la fuperficie de la
maifon , ce qui feroit dans notre exemple
d'une toife à-peu-près. Ce lieu pourroit être
élevé de huit à dix pies , & bien voûté , avec
des murs fort épais. Ce feroit dans ce lieu
que l'on placeroit un réfervoir de plomb ,
qui recevroit toute l'eau de pluie après qu'elle '
auroit pafTé au travers du fable. Il ne fou-
droit à ce lieu qu'une très-petite porte bien
èpaifïè , & bien garnie de nattes de paille ,
pour empêcher que la gelée ne pût pénétrer
jufqu'à l'eau. Par ce moyen on pourroit dif-
tribuer facilement de très-bonne eau dans
les cuifines & les lavoirs. Cette eau étant
bien renfermée ne fe corroraproit pas plus
que fi elle étoit fous terre , & iie geleroit
jamais. Son peu d'élévation au-deiîùs du
rez-de-chaufî"èe ferviroit afiez à la commo-
dité de fa diflribution dans tous les lieux du
logis. Ce réfervoir pourroit être placé dans
un endroit où il n'incomraoderoit pas par
fon humidité , autant que ceux d'eau de fon-
taine qui font dans plufieurs maifbns.
Enfin il y a plufieurs autres endroits où
de femblables réfervoirs artiftement conf-
Tome Vin,
fruits fuppléeroicnt aux befoins de la vie ,
par la pofition où l'on efl: de manquer d'eau
& par l'éloignement où l'on fe trouve des
fources & des rivières. Souvent nous laifTons
perdre les bienfaits de la nature , faute d^
connoifTances pour en fivoir tirer parti. Art.
de M. le chevalier de Jaucourt.
CITHARE , . f. f. ( Hift. anc. & Luth. )
infiniment ancien , que quelques auteurs
croifnr avoir été le mên:e que la lyre à fept
ou neuf cordes ; & que d'autres regardent
comme un inflrument difterent , mais fans
en afiigner la ditierence.
Selon les anciens monumens &: les témoi-
gnages des Grecs & des Latins , elle étoit
formée de deux côtés recourbés , «& imitant
les cornes du bccut. Le bout des cornes ou
le haut écoit tourné en dehors , & le btis ou
l'origine des cornes , en dedans ; le tnilieu
ou la partie compriie entre les extrémités
recourbées , s'appelloit le hras ; les côtés ou
montans étoient fycés fur une bafe creufè ,
deflinée à fortifier le fon des cordes. Ils
étoient afîèmblés par deux travcrfes ; les
cordes étoient attachées à la traverfe d'en-
bas , d'où elles ailoient f e rendre fur des che-
villes placées à la traverfe d'en-haut. La a-
thare avoit une bafe plate & pouvoit fe tenir
droite fur cette bafe\ c'étoit Uinffrument de
ceux qui fe difputoient les prix dans les jeux
pithiens ; ils s'en accompagnoient en chan-
tant le fujet de leur chant , donné par les
amphi<9;ions au renouvellement des fêtes cé-
lébrées en l'hohneur d'Apollon , & en mé-
moire de la défaite du ferpent Pithon. Il
étoit divifé en cinq parties. La première étoit
un prélude de guerre ; la "féconde, uiji com-
mencement de combat ; la troifieme , un
combat ; la quatrième , un chant de vidoire ;
& la cinquième , la mort de Pithon & lesr
fifflemens du monfîre expirant. Il paroît
que la cithare & lef airs deftinés pour ct^ inf-
trument , font plus anciens que la flûte & les
airs de flûte. Les airs étoient en vers hexa-
mètres. Terpandre plus ancien qu'Arch;'-
loque , joua de la cithare par excellence :
il tut vainqueur quatre fois de fuite dans les
jeux pithiques. Il y en a qui prétendent que
notre mot guitare ' vient du mot cithare y
quoiqu'il n'y ait aucune reflemblarKe entra
ces iiiflrumens. voye\ GuiTARE , LyRE,
1 & les mànoires des Infcript.
178 C I T
CITHARÎSTIQUÉ, f. f. (Mw/^î/^-.)
'genre de mufique & de poéfie , approprié à
Vaccompagnement delà cithare. Ce genre,
dont Amphion , fils de Jupiter & d'Antiope,
flit l'inventeur , prit depuis le nom de lyri-
que. (S)
CITHAROIDE,(y>A^/: dsanc.) chanfon
qu'on-accompagnoitde la cithare, ou même
un air propre ? cetinftrurr.enr. {F. D. C. )
CITHERON , {Myth.) roi de Flatëe en
JBéotie , pafToit pour l'homme le plus fage de
ion temps : il trouvi^i le moyen de réconcilier
Jupiter & Junon. Cette dcef^e , piquée de
quelques galanteries de fon mari , voulut
rompre entièrement avec lui par un divorce
public. Citheron y confulté iùr les moyens
de faire revenir la déeiîè , confeilla à Jupiter
de faire femblant de vouloir s'engager dans
vn nouveau mariage ; le confeil fut fùiri &
reuilir parfaitement. ( -h )
CÎTIA , f. m. {Hit^. nat. hot.) Les Bra-
mes appellent de ce nom ^ de celui decnia
tiuvadi une plante du Mahbar , affez bien
gra^»ée, avec la plupart de Çqs détails, par
Van-Hheede , au vol. VIÎT , plane. LIX y
page ? 7 7 de fon Honus Malabaricus. Jean
Commelin , dans fes notes fur cet ouvrage ,
l'appelle betx folio Malabarica , femine
lappaceo. Les habitans de Ceylan la nom-
ment uaal-karal litxbo ; c'eft le centaurium
cillare minus , circece foîiis firmiorihus fpi-
catis florihus ê maderafpaian , gravé en
p:tit par Pîukenet , au n^. z delà planche
LXXXII de fa pychographiè ; le Rachiar-
pagophora de Vaillant ' le blluim fcandens
ftuclu lappaceo , gravé par M. Burmsnn ,,
plane. XVIII y n". 2 ;, de Ion Thefanms
•Zeylanicus ; &: Vaehy rames 4 lappaeea y
caule fruticcfo dijfufoyfpicd interruptajiof-
culis lateralibus utrinque fafcieulo fetarum
ancinato y de M. Linné , dans fon Syfiema
natwûe y édit^ 2 Zy impî-imé en ^7^7, pag.
Cette plante efl vivace , à racine lignetife ,
de quatre lignes de diamètre , & forme un
buifîbn ovoïde pointu , haut de trois pies ,
tme fois moins large , à tige ramifiée de bas
en haut de branches oppofées en croix , cy-
lindriques , verd - rougeatres aux nœuds ,
luiiàiues» aiïcz ierrées, écartées ious un angle
4e trente, degrés au plus d'ouverture.
Ses feuilles font oppoiées deu::: ideux en
C I T
croix , elliptiques , entières , pointues au?é
deux extrémités , longues de trois à quatre?
pouces , prefque deux fois moins larges,
aflêz épaiffes , mais molles , lilîes , luifantes ,
rougeatres d'abord , enfuite verd-brunes ,
relevées des deux côtés d'une côte longitu-
dinale rougefître , ramifiée de fix à huit paires
de nervures alternes , & portées prçfqu'hori-
zontalement fur un pédicule demi-cyhndri-
que , fix à huit fois plus court qu'elles.
■Chaque branche ell terminée par un épi ,
une à trois fois plus long qu'elles , portant
quinze à quarante paquets de fleurs lèflilcs ,
vcrd-rougeâtres , fphériques , de trois à qua-
tre lignes de diamètre , difpofées d'une ma-
nière tort lâche fur toute fa longueur , &
accompagnées chacune d'une écaille cadu-
que , une fois plus courte qu'elles , chaque
paquet ell compofé de trois fleurs ouvertes
en étoile de quatre lignes de diamètre ;
lorfqu'il n'efl qu'en bouton il efl d'abord
rouge , enfuite verd. .
Chaque fleur efl hermaphrodite , polypé-
tale , incomplète , a étamines réunies , &
pofée autour de l'ovaire \ elle confifle en un
calice de fept à huit feuilles elKptiques ,
pointues , concaves , vertes , une fois plus
IcTngues que liirgzs , dont deux extérieures
font ciliées de crochets en hameçans rougea-
tres , fans corolle , & en cinq étamia es-
rouges , réunies par la moitié inférieure de
leurs filets en une membrane cyhndrique
qui environne & touche immédiatement un
petit ovaire fphéroïde , terminé par un flyle
& un fligmate tronque , velu.
L'ovaire en mûrifîant devient une cap-
fuie ov(,ïJe , verdâtre , longue d'une ligne
&: demie , membraneufe à une loge , ne
s'ouvrant point , & contenant une. feule
graine lenticulaire lifîe, brun-noire, luifante,
attachée verriciilementaufond delà capfùle ^
chaque caplule efl enveloppée & cachée en-
t éremcnt par k calice , dont les cro/chets
en hameçon font écartés , de manière qu'ils
form.ent de petites tctes , femblables à cel-
les de la bardane , lappa y & qui s'accro-
chent aux poils & laines à.QS animaux qui
les touchent , ce qui fait apptller cette-
plante du nom de coufin.
Culmre. Le citia croit au Malabar & au
Sénégal dans les terrr.ins fablonneux.
Qualités, Il n'a ni faveur j ni odeur» -
C I T
JJfa^es, Sa racine piiée dans le petit lait '
s'applique fur les hëmorrhoïdes : ia poudre
fe prend dans les coliques inteflinales.
Remarques. Cette plante eft une efpece
de pupal , & doit former un genre difiércnt
du cadelari , du fclierubula &. del'ouret du
Sénégal , toutes plantes que M; Linné a
confondues ious le nom <ïachyrantes , nom
de nouvelle fabrique , qui n^^ s'entend gutre ,
mais par lequel cet auteur a voulu défigner
une plante pailleufe , ou à paillettes & écail-
les , toutes idées qui ne fe préientent point
en voyant cette plante à laquelle nous avons
cru devoir laifler fon nom de pays.
Le pupal forme un genre particulier dans*
la première feclion de la famille des amaran-
thes , près du cadelari , oxl nous l'avons
placé. T^oje\T\os familles des plantes y i>oL
II y page z€8.
La figure de M. Burmann mnrque fur la
tige de cete plante , au deiîbus de l'épi de
fleurs , des épines en crochets pendans en
bas , qui n'exificnt nullement , & qu'il faut
fupprimer. ( M. Adanson. )
CITOCT^ , f. m. {Hifi. nat. bot. ) les
Brames appellent de ce nom & de celui
^iindi y une efpece de ca/a/'j du Malabar ,
très-bien gravé , par Van-Rheede , dans fbn
Uonus MalahancusyV. iV, pi. XXX IX ,
page 8 z y fous le nom de tsjeroif ponna y
c'efl-à-dire , petit ponna. Les Portugais l'ap-
pellent ponnaca pequeno ; les -Hollnndois
cleyne geele gom appelen. J. Commciin dans
ùs notes fur ÏHortus Malabaricus y le con-
fond avec le kina de Ceylan. M. Burmann ,
dans fon Thefaurus Zeylanicus y imprimé
en 1737 , le diflrngue eu kina y le regarde
comme le hinkina de Ceylan, qu'il croît être
le cornus Malaba) ica foliis nymphéas de
Ray. Hifi. plantarum y page 2 ^JJ i le
calaha citri folio fplendente de Plumier »
noporum generum , page j^, pi. XXIII y
& le kalophyllodendron indicum folio Ù
fruâu minore de Vaillant', Mtmoires de
l'académie , année lyii , page z8^ y &cn
donne une bonne figure, mais incomplète ,
planche IX ^ pag. t JO y fous la dénomina-
tion nourelle d*inophyllum Jîore quadrifdo.
Inophylbim lignifie feuille (Iriée parallele-
vatm & d'une manière ferrée comme dfi
fibres mufcuîaires. M. Linné , dans fbn
^pecies plantarum j imprimé en 1753 1 P'^ë-
C î T T79
$14 > ^ ^^^^ fon Syfiema nat. éc^ii'on 12 ,
imprimé en 17^7 , paj. "^Sz . adopte fidc<-
lement toutes les citations de M. Bunr.anivy
& défigne cette plante par le nom de cj/o-
phyllutn y z calaba y foïiis cvatis oh tufs.
Le citoSi cfc un arbre qui s'élève à la
hauteur de 80 à 90 pies , à trône cylindri-
que de douze pies de diamètre , fur 3c à 40-
piés de longueur, couronné par une cime
fphérique, compofée de nombre de bran-
ches alternes , C} lindriques , couries , épri-
^ts , écartées fous un angle de 45 degrés d'a-
bord , enfuite ouvertes horizontalement , à
bois rougeâtre très - dur , recouvert d'une
écorce épaifiè lifi'e, d'abord verte-, 'enfuite
noirâtre.
Sa racine a le bois brun , recouvert d'nneï
écorce jaune dedans, & rougeatre au-dehori.
Les feuilles font oppo^^es deux à deux
en croix , elliptiques , obtufcs à leur extré-
mité , pointues à leur origine , longues de
deux A trois pouces , une fois moins larges ,
entières , épaiilcs , luifantes , verd - noires
deflîis , plus claires dcfibus , jaune doré dans
leur contour, relevées en-deuoas d'um^ore
longitudinale , des deux côtés de laquelle
partent 30 à 40 paires de nervures , comme
oppofées , artachées d'abord fous un angle
de 45 degrés d'ouverture , enfuite horizon-
taL^nent fans-aucuo pédicule , à des diflances
d'un pouce au plus , au nombre de deux à
quatre paires au pjus fur chaque branche :
chaque paire eff accompagnée de deux grands
flipules concaves , elliptiques , qui tombent
au moment de leur épanouilïêment.
De l'aiflelle de chacune des feuilles fijpé-
rieures , fort un épi oppofé aufC long qu'el-
les , compoie dans fa moitié fupérieure de
trois ou quatre paires de fleurs oppofées ,
avec une impaire terminale , blanches , ou-
vertes en étoile, de fix à fept Hgnes de dia-
mètre , & portées horizontalement fur un
pédicule menu de cette longueur.
Chaque Heur eft hermaphrodite, caduque»
polipétale , régulière , à étamines très-nom-
breulès , & pofée autour de l'ovaire; elle con-
fifle en un calice à 4 feuilles & 4 pétales
blancs orbiculairec ou hémiiphériques con-
caves , & en cent étamines une fois plus
courtes , vertes , à anthères jaunes , rappro-
chées en une tête fphérique , envelopp;lut
& cachant l'ovaire qui cil petit , fprtiérique ,
Ci 2i
i8c C î T
furmonté d'un %Ie blanc , égal aux^tâmi-
nes , & terminé pfir un fligmatc Iphérique.
L'ovaire en mûriflant devient une baie
ovoïde , obtule , ailez lerablable à une cor-
nouille , longue de fept à huit lignes , de
moitié moins large , liffe , verte d'abord ,
enluite rougeâtre , à chair ferme ,. en écorce,
à une loge , ne s'ouvrant point , & conte-
rant un oflelet ou noyau dur , ovoïde,
poinru par un bout , long de cinq lignes ,
& prefque de moitié moins large , à amande
b?anc-jaunâtre.
Culture, Le citocîï croît au Malabar y {\xt-
tout auprès d'Arogattl , dans les terr.es fa-
blonneufes ; il eft toujours verd , vit très-
long-temps, porte pendant plus de trois cents
ans une fois par an , lîivoir , en août & {èp-
tembre.
Qualités. Sa racine a une odeur forte &:
iine fayeur aftrirîgente ; fes feuilles ont une
faveur acide , & (ts fleurs une odeur fau-
vage fans faveur ; (ts baies une douce aci^
dite , & fes amandes une laveur douce
d'abord , enfuite amere. L'écorce de i^ts
racines , de fes branches & de fon fruit ,
bleil^ , rend une liqueur vifqueufe , te-
nace , jaune, citrlne, qui Je, coagule bien-
tôt en réline.
Ufages. Ses baies fe mangent & fonttrès-
aflringentes ; de fes amandes féchées , on
tire par expreffion , une' huile qui fe brûle
dans les lampes; fès autres parties ne font
d'aucun ufage en médecine.
Remarques. D'après cette- defcription
bien çirconflancié du ci tocHi y il cû facile de
voir combien J. Coramehn , M. Burmann
& M, Linné , fe font éloignés de- la vérité ,
en confondant cet arbre ; le premier ,, avec
le kina de Ceylan , & les derniers avec le
kinkina de Ceylan & le calaba de TAmé-
rique.
D'abord le kina ou kine y apporté de
Ceylan par Hermann , n'eft pas , comme le
penfe J. Commelin , la même efpece que
le citocti ; car, lélon M. Burmann , ce kina
ciî la même chofe que le bintangor , gravé
par Rumphe , à la planche LXXI y page
Zi6 y du volume II de fon Herbarium
'Amboinicum y & que le ponna , gravé à la
planche XXXVIII y du volume IV de
ÏHonus Malabaricus. Or, le bintangor a,
î®, les feuilles obtufes aux deux extrémités ,
OIT
mais; davantage k leur origine , longues de
huit pouces',, une fois moins larges , de
plus de cent paires de nervures , & portée?
fur un pédicule cylindrique , dix à douze
fois plus court qu'elles ; 2.°. fes épis de fleurs
font une fois plus courts que les feuilles,;
3". fes fruits font fphériques , de deux pon-
ces de diameiTé , jaunes , à noyau fphéri^
que , à une pointe d'onze à treize lignes de
diamètre , jaunâtre.
Le ponna du. Miilabar ne lui efl: pas pk^s
fèmblable & diflere encore du bintangor. ,
comme une autre efpece ; car, i°. fes feuiir
les , quoique de même grandeur que celles
du bin ranger , font, ordinairement plus lar-
ges à proportion , c'efl-à-dire , à peine de
moitié, plus longues que larges, plus étroites
à.lçur origine qu'à l'extrémité ; 2". fes épis
de fleurs l'ont égaux à la longueur des feuille^;
3^*. fes fruits font i'phériques , d'un pouce,
& demi de diamètre , rou0tres , à noyau-
fphérique ,. blanchâtre , avec une pointe ,.
mais de huit à dix lignes de diamètre.
Si le arhor indica mali medicce ampjiorir-
bus foliris Maderafpatana.y forte ponna feu
ponnamaram horti Malabariti y voluminf
IV y tabula 38 y cujus lacryma refinofa
an fit fpecies guttœ gambi quaeritur à /,
Commelino in notis y gravé par Plukenet ,
dans ia Photographie y planche CXL VII y
n^. J y fans fleurs & fans-fruits , efl exaéle-?
ment defllné ; quoique Plukenet & M,
Linné le croient la même efpece que Iç
ponna , il fera encore d'une autre efpece qui
endifférera 1°. par fes branches quarrées ;
2°. par fes feuilles également pointues aux
deux bouts, & une fois & demi à deux fois
plus longues que larges.,
Le kinkina de Ceylan , que M.Burmana.
compare au citocli y en diffère beaucoup..
1°. Ses feuilles font également pointues aux
deux extrémités , de moitié feulement plus
longues que larges , flriées.ds cent paireç,
de nervures & portées fur un pédicule cy-
lindrique , cinq à. huit fois plus court qu'el-
les. 2°. Ses épis de fleurs font une foisplu$
courts que les feuilles. 3**. Sts branches font
quarrées.
Enfln , le calaba de l'Amérique , gravé
par Sloane , à la planche CC y n°. z >
de fon Hifioire de la Jamaïque y fous Is
nom de Terebinthus folio fingulari non
Cï T
aîato y romndo y fucculento y flon tetra-
petalo pdllidè luteo y fruclu majore mono-
ipyrenno y ne lui refîèmble pas davantage ;
car , 1°. fes feuilles ,, quoique de même
forme & de même nombre de nervures ,
difpoféesde même , ont depuis trois jufqu'à
iix pouces de longueur ^ & un pédicule cy-
lindrique de huit à dix fois plus court ; 2°.
fes fleurs font jaunes ; 3**. (ts fruits ont l'of-
felet'fphéroïde , de fix à fept lignes de dia-
mètre & jaunâtre.
•Le citoc^L efl donc une efpece particulière
de calaba , différente de toutes celles avec
lefquellcs les botanifles l'ont confondue ; &
les noms rnodernes kcilophyllodendron y ca~
lophyilum , & inophyllum y doivent être
fupprimés comme luperflus , cette plante
ayant , comme fes congénères , un nom de
pays plus fimple , plus facile à prononcer ,
& fous lequel elles font mieux connues que
par les botanifles de l'Europe, qui n'en ont
jamais vu que des morceaux ou des efquifTes
très-imparfaites. Le calaba le range natu-
r'^Uement dans la famille des cifles où nous
l'avons placé.^ roye\ nos Familles des
plantes y volume II y page /}.J^G. ( M.
Adanson. )
CITOLE , ( Luth. ) efpece d'inflrument
de mufique , dont le fon devoit être fort
agréable, puifque Guillaume Guiart, poëte
du XIII^. fieclè ,. dit ,.
Qui le Roi de France à celé erre
hnveloppafi de paroles
Plus douces que fons de citoles. {F.D. C.)
* CITOYEN, f. m. {Hifl. anc. mod.
Droit publ.) c'efl celui qui efl membre d'une
fociété libre de plufieurs familles , qui par-
tage les droits de cette fociété , & qui jouit
de (qs franchifes. VQye\ SOCIÉTÉ , CiTÉ ,
Ville franche , Franchise.. Celui
qui réfide dans une pareille fociété pour quel-
que affaire , & qui doit s'en éloigner, fon af-
faire terminée , n'eft point citoyen de cette,
fociété ;. c'en efl feulement un fujet momen-
tané. Celui qui y fait fon fé jour habituel ,
mais qui n'a aucune part à Çts droits & fran-
chifes , n'en efl pas non plus un citoyen.
Celui qui en a été dépouillé , a cefféde l'être.
, On n'accorde ce titre aux femmes, aux
jeunes enfans , aux ferviteurs , que comme
à de.s membres de La faiîiillsd'un citoyen
C I T j^î
proprement dit , mais ils ne font pas vrai-
ment citoyens.
On peut diffinguer deux fortes de citoyens y,
[qs originaires & les naturalifes. Les origi--
naires font ceux qui font nés citoyens. Les
naturalifes , ce font ceux à qui la fociété
a accordé la participation à Ces droits & à,
fçs franchifes, quoiqu'ils ne foient pas né^
dans fon fein.
Les Athéniens ont été très - réfervés ;V
accorder la qualité de citoyens de leur ville
à des étrangers ; ils ont mis en cela beau—
coup plus de dignité que les Romains : le
titre àc-citoyen ne s'eft jamais avili parmi eux;;
mais ils n'ont point retiré de la haute opi-
nion qu'on en avoit conçue , l'avantage le;
plus grand'peu;_-être , celui de s'accroître da-
tous ceux qui l'arabitionnoient. Il n'y avoit
guère à Athènes de citoyens y que ceux quv
étoient nés de parens citoyens. Quand urii
jeune homme étoit parvenu à l'âge de vingç
ans , on l'enrégiffroir fur [e^ii^tsipyii(.ov y^stf.-
fy.a.Tîiov ; l'état le comptoit au nombre de fes
membres. On lui faifoit prononcer dans ceuG
cérémonie d'adoption , le ferment fuivant à
la face du ciel. Arma non de kone/iabo ; nec
adfïantem y quifquis ille fuerit y focium
relinquam; pugnabo quoque profocis Ù aris:
folus Ù cum multis;patriam nec turbabo^nec
prodam ; navigabo contra quamcumque def*
tinatus fuero regionem ; folemnitates per--
petuas obfervabo ; receptis confuetudinibus-
parebo y Ù quafcumque adhuc.populus pru*
àenter Jhituerit y amplecfar ; ùji quis leges,
fufceptas fujîulerit y nifi comprobai'erit y^
non permittam ; tuebor denique y folus Ù:
cum reliquis omnibus y atque patria facra
colam. DU Cognitores y. Agrauli y. Ènya-,
lius y Mars y Jupiter y Floreo y Augefca
duci./Plut. in pe rie. VoWX un prudenter
qui ,, abandonnant à chaque particulier Is
jugement des loix nouvelles , étoit capable
de caufer bien àes troubles. Du refle , ce
ferment efl très-teau & très-fage.
On deverioit cependant citoyen d'Athènes
par l'adoption d'un citoyen y & par le con*
fentement du peuple-:, mais cette faveur
n'étoit pas commune. Si l'on n'étoit pas
cenfé citoyen avant vingt ans , on étoit cenfé
ne l'être plus lorfque le grand âge empêchoît
de vaquer aux fondions publiques. Il en
étoit, de même des exilés & des banoii , à
i8i CIT CTT
moins que ce ne fut par rodracifme. Ceux? fujet & le citoyen ; ce qui c{[ vraî , en pre-
qui avoient fubi ce jugement , n'ctoienr
qu'cloignés.
Pour conftituer un véritable citoyen ro-
main , il falloir trois chofes : avoir fbn do-
micile dans Rome , erre membre d'une des
trente -cinq tribus , & pouvoir parvenir
aux dignités de la république. Ceux qui
nant le terme de fujet dans Ton acception
llride ; & celui de citoyen dans Ion accep-
tion la plus étendue ; & en confidérant que
celui-ci efl par rapport aux lolx feules, ce
que l'autre efl: par rapporta un fouverain. Ils
font également commandés , mais l'un par
un être moral , & l'autre par une perfonnc
n'avoient que par concelilon & non par fphyfique. Le nom de a/q/f/i ne convient nia
naifiance quelques-uns des droits du cicoyen,
n'étoient , à proprement parler , que des
honoraires. K. CiTÉ, JURISPRUDENCE.
Lorlqu'on dit qu'il le trouva plus de qua-
tre millions de citoyens romains dans le dé-
nombrement qu'Augufle en fit faire , il y a
apparence qu'on y comprend & ceux qui
ceux qui vivent fubjugués , ni à ceux qui vi-
vent ifolés ; d'où il s'cniuit que ceux qui
bfolurrrent dans l'état de nature .
vivent a
comme les
les fouverains ; & ceux qui ont par-
faitement renoncé à cet état , cpmme Ici
eljlaves , ne peuvent point être regardes
comme citoyens i à moins qu'on ne prétende
rélidoient aâuellement dans Rome , & ceux \ qu'il n'y a point de lociété raifonnable où il
qui répandus dans l'empire , n'étoient que
des honoraires.
Il y avoif une grande différence entre un
citoyen & un domicilié. Selon la loi de in-
colis y la feule naifiance taifoit des citoyens,
& donnoit tous les privilèges de la bourgeoi-
iie. Ces privilèges ne s'acquéroient point par
le temps du féjour. Il n'y avoit fous les con-
fuls que la faveur de l'état , & fous les em-
pereurs que leur volonté qui pût fuppléer en
ce cas au déftiut d'origine.
C'étoit le premier privilège d'un citoyen
romain , de ne pouvoir être jugé que par le
peuple. La loi Ponia défendoit de mettre à
mort un citoyen. Dans les provinces mêmes,
n'y ait un ^tre moral , immuable, & au-
I deiiiis de la perlonne phylique , louveraine.
! Puliendorff', fans égard à cette exception ,
j a divilé (on ouvrage des devoirs en deux
parties , l'une des devoirs de l'homiùe , l'au-
tre des devoirs du citoyen.
Comme les loixd.s fociétés libres de fa-
milles ne font pas les mêmes par-tout , &
comme il y a dans la plupart de ces fociétés
un ordre hiérarchique conf f itué par les digni-
tés , le citoyen peut encore être conlidére &c
relativement aux loix de la lociété , & re-
lativement au rang qu'il occupe dans l'ordre
hiérarchique. Dans le fécond cas , il y aura
quelque ditlërence entre le citoyen magif-
il n'étoit point foumis au pouvoir arbitraire irat & le citoyen bourgeois ; & dai s le
d'un proconlul ou d'un propréteur.' lue.ai-'is
fum arrêfoit fur le champ ces tyrans fubalte|-
nes. A Rome , dit M. de Monrefquieu ,
dans fon livre de Vefprit des loix , liv. XI ,
c/ijp. xix y ainfi qu'à Lacédémone , la liberté
pour les citoyens & la fervitude pour les ef-
claves , étoient extrêmes. Cependant malgré
les privilèges , la puiffance & la grandeur de
ces citoyens , qui faifoient dire k Cicéron
( or. pio M. Fonteio ) an qui amplijjimus
Ga li,v cum infimo cipe romano comparan-
■ dus efi ? il me femble que le gouvernement
de cette république étoit fi compofé , qu'on
prendroit à Rome une idée moins précilé du
citoyen , que dans le canton de Zurich.
Pour s'en convaincre , il ne s'agit que de
pefer avec attention ce que nous allons dire
dans le refle de cet article.
Hobes ne met aucune différence entre le
premier , entre le citoyen d'Amllerdam &
celui de Bâle.
Arilfote , en admettant les diffinâions de
fociétés civiles & d'ordre de citoyens dans
chaque fociété , ne reconnoît cependant de
vrais citoyens que ceux qui ont part à la"
judicarure , & qui peuvent fe promettre de
palier de l'état de fimples bourgeois aux pre-
miers grades de la magillratui: ; ce qui ne
convient qu'aux démocraties pires. Il faut
convenir qu'il n'y a guère que celui qui jouit
de ces prérogatives , qui foit - vraiment
homme public ; & qu'on n'a aucun caradere
dillindif du fujet & du citoyen , linon que
ce dernier doit être homme public , & que
le rôle du premier ne peur jamais être que
celui de particulier , de quidam.
Puffendortf, en rellreignant le nom de
citoyen à ceux qui par une réunion première
C I T
de familles ont fondé l'état , & a leurs f
fuccefleurs de père en fils , introduit une
diitindion frivole qui répand peu de jour
dans ion ouvrage, & qui peut jeter beau-
coup de trouble dans une foacté civile , en
diftinguant les citoyens originaires des naru-
ralifés, par une noblelîe mal entendue. Les
citoyens en qualité de citoyens y c'efl-à-dire
dans leurs fociétés , font tous également no-
bles ; la noblefîe fe tirant non des ancêtres ,
mais du droit commun aux premières digni-
tés de la magiflrature.
I/être moral (buverain étant par rapport
au citoyen ce que la perlonne phyfique de{
potique efl: par rapport au fujet , & l'efclave
Je plus parlait ne transférant pas tout ion
être à fon fouverain ; à plus forte raifon le ;
citoyen a-t-il des droits qu'il fe réferve , & |
(dont il ne fe départ jamais. Il y a des occa- j
lions où il fe trouve lur la mcme ligne , je \
ne dis pas avec les concitoyens , mais avec
Fêtre moral qui leur commande à tous. Cet
ctre a deux caractères , l'un particulier , &
l'autre public : celui-ci ne doit point trouver
de réfiftance ; l'nutre peut en éprouver de la
part des particuliers , & fuccomber même
dans la conteilation. Puifque cet être moral
a des domaines , des engageraens , des fer-
mes , des fermiers, &c. il faut, pourainii
dire , difîinguer en lui le fouverain & le fujet
de la louveraineté. Il eft dans ces occafions
juge & partie. C'eft un inconvénient fans
dpute ; mais il eu de tout gouvernement
en général , & il ne prouve pour ou contre ,
que par fa rareté ou par fa fréquence , & non
par lui-même. I! eft certain que les (ujets ou
citoyens leront d'autant moins expofcs aux
injuftices , que l'être iouverain phyfique ou
moral fera plus rarement juge & partie dans
les occafions où il fera attaqué comme par-
ticulier.
Dans les temps de troubles , le citoyen
s'attachera au parti qui eft pour le (yflerae
établi; dans les difîblutions de fv'ftêmes , il
ftiivra le parti de fa cité , s'il efl uniinime ;
& s'il y a divifion dans la cité , il embrafTera
telui qui fera pour l'égalité des. membres &
la liberté de tous.
Plus les citoyens approcheront de l'égalité
de prétention & de fortune , plus l'état fera
tranquille : cet avantage paroît être de la
démocratie pure j exdulivexnem à tout autre
C I T 185
gouvernement ; mais dans la démocratie
même la plus parfaite ,-fentiere égalité entre
les membres eu une chofe chimérique , &
c'ell peut-être là le principe de diflolution de
ce gouvernement , à moins qu'on y remédie
par 'outesles injullices de l'oflracifme. lien
efl d'un gouvernement en général , ainfi que
de la vie animale : chaque 'pas de la vie efl
un pas vers la mort. Le meilleur gouverne-
ment n'cil pas celui qui eft immorrel , mais
celui qui dure le plus long-temps & le plus
tranquillement.
CITROENVISCH , Cm. (Hif}. nat.
Ichtkyolog. ) poiflbn des îles Mojuques ,
aflêz bien gravé fous ce nom , par Ruyf ch ,
planche VI y 72®. 7 y page z z de fa collée--
tion nouveUe des poij/ons d^Amboine,
Coyett l'avoit fait graver & enluminer plus
de quinze ans auparavant , au «®. t 7 S de
la féconde partie de ion recueil des poijjons
d'Amboine , fous le nom de citron de la
côte VAlforeefe.
Ces deux auteurs lui ont attribué des na-
geoires ventrales qui font de trop ; il a Je
corps fphéroïde , pointu aux deux extréini*
tés , long de deux à trois pies , du poids dé
qumze a vingt livres , heriî^'é de cinquante
à foixante épines coniques , longue^ , droi-
tes , la fête & \es yeux petits , la bouche
conique pointue.
Ses nageoires font au nombre de cinq y
favoir , deux peflorales médiocres , rondes \
une dorfale extrêmement longue , régnant
le long du dos , plus baffe devant que der-
rière, une derrière l'anus fon longue ; celle
dé la queue triangiilaire tronquée. De ces
nageoires il n'y a que celle du dos qui foit
épmeui'è dans fcs neuf premiers rayons. ,
Son corps eft jaune-citron, entouré c'e fix
lignes bleues circulaires , entre le^uclles on
voit de chaque cote un rang de cinq épines
bleues coniques ; les nageoire.^ font vertes ,
excepté la dorfale , dont la partie antérieure
épirs'iuiè a fa membrane rouge ; la xeie eft pa-
reillement rouge ; le bec jaune , la prunelle
des yeux noire , entourée d'un iris, jaune.
Moeurs. Ce poiflbn ie pêche dans la mer
d'Amboine, autour de la cote d'Alforeelè ,
mais il n'y eft pas commun.
Vfagk. Il a le goût de l'alofe : on te fume
ordinairement coiutne du fauœoa j & oa
le mange.
iS4 CIT.
Remarque. Le curocnvifch approche beau-
coup du cofre orbis y mais il en ditlère adèz
par la longueur de la nageoire . dorlale pour
en être diitingué. (AT. Adanson.)
CITRON, f. m. voy. Citronnier.
CITRONNIER , f. m. citreum , ( Hijl
hat. bot. ) genre de plante à fleur en rore.
Le pilHl fort du calice , & devient dans la
fuite un fruit ordinairement oblong', qui a
une chair ferme qui eft divifée en plulieurs
loges remplies de fuc & de vélicuîes. Ces
cellules renferment aulfi des ièmences cal-
leufes : ajoutez au caradere de ce genre, que
les feuilles font fimples. Tournefort , infi.
Tel herb. Voye^ PLANTE. (I)
Citronnier, {Jardin.) du latin c/-
treurri} citrumy malus medica. Plin. Virgil.
Définition.
Jllivfum retineîcitrus aureafrondis honorem;
Malaquejloriferii hcereiu pendentia ramis ,
Vcris & autumni pukherrima dona.
C'eft en effet cet arbre admirable , toujours
verd , que le printemps confondu pour ainli
dire avec l'automne , préfente à nos yeux
chargé de fleurs & de fruits , dont les uns
tombent par la maturité , tandis que d'autres
commencent à mûrir , & d'autres commen-
cent feulement à paroitre. Rival de l'oran-
ger , & méritant peut-être la préférence , il
n'en diffère que par fon fruit & par {q^ feuil-
les , qui font larges & roides comme celles
du laurier , mais fans talon.
Jpfa ingens arbos ^ faciemque fimillima
lauro :
Etfi non alium latè jaBaret o dore m ,
Laurus erat : folia haud ullis labentia
vends :
Flos apprimè tenax : animas & olentia
Medi ~ .
Orafovent iîlo y Ù fenibus medicautur
anhelis.
Virg. IL Geog. v. i,^t.
5> L'arbre dont je parle , originaire de la
» Médie , s'élève fort haut, & refTemble au
y> laurier. Si l'odeur qui répand n'étoit pas
>j différente , on pourroit aifément le con-
w fondre avec le laurier. Ses feuilles féflf^
>5 tent au fouffle des aquilons , & fa* fleur efl
» fort adhérente aux branches où elle eff
n attachée. Les Medes s^a fervent pour
C IT
' »> mettre dans la bouche une odeuf agréa-
M ble , & pour fortifier 'les vieillards aflh-
M mariqu.s.»
I *S a defcription ( Geofroi , mat. méd. ) H
' eff médiocrement haut dans nos jardins. Sa
racine elt branchue , & s'étend en tout fens :
; elle eff ligneulé , & couverte d'une écorce
jaune en dehors , blanche en dedans. Son
tronc n'eif pa^ tort gros^ ; fon bois efl blanc
& dur ; ion écorce eft d'un verd pâle. Ses
branches font npmbreules , longues , grêles
& fort pliantes ; les plus vieilles font d'une
couleur verte jaunâtre , & garnies de poin-
tes blanchâtres : celles qui font jeunes ,' l'ont
d'un beau verd gai ; i^extrémite des bran-
ches & des feuilles efî fort tendre , & d'ua
rouge brun.
Ses feuilles approchent de la grandeur de
celles du noyer ; elles font fouvent moufles ,
quelquefois pointues , & prefque trois fois
plus longues que larges ; plus vertes en
delfus qu'en delfous , légèrement dentelées
en Idur bord , garnies de veines^qui viennent
de la côte épaifiè qui elldans le milieu , quel-
quefois ridées & comme bofTelées ; elles (ont
en grand nombre , & durent pendant tout
l'hiver, d'une bonne odeur, ameres : .elles
paroifîent percées de trous , ou plutôt par-
femées de points tranfparens quand on les
regarde au foleil , de. même que celles du
millepertuis. La plupart des fueilles ont une
épine contiguë à laj)artie fupérieure , & voi-
fine du bourgeon ; . a pointe de cette épine
efl rougeâtre , verte c'ans le refle , fort roide ,
& afTez longue.
Sts fleurs font en grand nombre au fbm-
met des rameaux , où elles forment comme
un bouquet ; elles font en rofe , cornpofées
le plus fouvent de cinq pétales charnus , dif-
polés en rond & réfléchis , parfemés de
rouge en dehors , blancs dans tout le refle ;
fbutenus par un petit calice verd , découpé
en cinq quartiers , renfermant beaucoup de
filets d'étamines blanchâtres ; & furmontés '
d'un fommet jaune. Ces fleurs ont une odeur
foible , & font d'abord douceâtres , eniuite
ameres : les unes font fertiles , ayant au mi-
lieu à^s étamines , un piffil longuet , qui
eff" l'embryon du fruit ; & les autres font
ffériles , étant fans pistil : celles-ci tombent
bientôt , & les autres fubfîflent. *
■ Ses fruits font fouvent oblongs , quelque-
fois
C IT
fois /phérîqiies , d'autrefois pointus à leur
ibmmet , quelquefois moulTes j leur fuper-
ficie eft ridée &L parfemée de tubercules :
fouvent ils ont neuf pouces de longueur , &
quelquefois davantage j car ils varient en
grandeur & en pefanteur. Quelques-uns pe-
ïènt jufqu'à fix livres.
Leur écorcc extérieure eft comme du cuir,
mince , amerc , échauffante , verte dans le
commencement , de couleur d'or dans la
maturité , d'une odeur pénétrante. Leur
écorce intérieure ou la chair , eft épaiffe &
comme cartilagineufe , ferme , Llanche ,
douçàtre, un peu acide , & légèrement odo-
rante , partagée intérieurement en plufieurs
loges pleines d'un fuc acide contenu dans
des vélicules mcmbraneufes.
Enfin chaque fruit contient beaucoup de
graines. Quelques-uns en ont plus de cent
cinquante , renfermées dans la moelle véCi-
culaire. Elles ibnt oblongues , d'un demi-
pouce de longueur, ordinairement pointues
des deux côtés , couvertes d'une peau un peu
dure & membraneulè, amere , jaune en
dehors, cannelée , & renfermant une amande
blanche , mêlée d'amertume & de dou-
ceur.
Son origine, he citronnier., comme le prou-
Tent fès noms latins , a été d'abord apporté
de l'AlIyrie & de la Médie en Grèce , de-là
«n Italie & dans les provinces méridionales
de l'Europe. On le cultive en Sicile, en Por-
tugal , en Efpagne , en Piémont , en Pro-
vence , & même dans quelques jardins du
nord , où il donne des fruits , mais bien in-
férieurs à ceux des climats chauds. On cul-
tive encore cet arbre à la Chine , aux Indes
orientales & occidentales , & en Amérique ,
au rapport du chevalier Hans-Sloane. -Fbya^.
ja la Jam. tom, II , pag. ij6,
, Ses efpeces. Les botaniftes en diftinguent
une dixaine d'efpeces principales , quoiqu'ils
n'ignorent pas que les jardiniers de Gènes ,
qui en eft la grande pépinière pour l'Europe ,
font fi curieux d'étendre cette variété , qu'ils
l'augmentent tous les jours.
L'efpeee de citronnier la plus eftimée eft
celle de Florence., dont chaque citron fe vend
à Florence même cinquante fous de notre
jnonnoie : on en envoie en prélènt dans les
«différentes cours de l'Europe, Cette efîjece
particulière ne peut venir dans fâ perfeîiion
Tenu FIIL
C I T ,î?y
que dans la plaine qui eft entre Pife & Li-
vourne ^ & quoiqu'on ait transporté ces for-
tes de citronniers du lieu même en divers au-
tres endroits choifis d'Italie , ils perdent tou-
jours infiniment de cet aromate , de cette
fineffe de goût que leur donne le terroir de
cette plaine.
Son ufage cke-^ les Romains. On ne man-
geoit point encore de citron du temps de
Pline j &: Plutarque rapporte qu'il n'y avoit
pas long-temps qu'on en faifoit ufage en qua-
lité d'aliment loriqu'il vint au monde. Au
rapport d' Athénée , on regardoit alors les
citrons comme une chofe d'un très-grand
prix ^ on en enfermoit avec des hardes pour
les garantir des teignes , & leur donner en
même temps une odeur agréable : c'eft de-
là fans doute que vient le nom de veftis ci-
trofa. On mangeoit déjà le citron du temps
de Galien , & Apicius nous a confervé la
manière dont on Taccommodoit.
Comme le citronnier eft enfuite par-tout
devenu très-commun , on trouve dans les
ouvrages des modernes un nombre immeniè
d'oblêrvations fiir \^s vertus de cet arbre Sc
de fbn fruit , dont plufieurs parties font d'u-
fage en médecine. Voye^^ Citron [Ckymie.)
Il y a des citrons qui font en même temps
oranges , c'eft-à-dire que certain nombre; de
côtes ou plutôt de coins ibiides , continués
jufqu'à l'axe du fruit , font d'orange , & les
autres de citron : ce nombre de côtes eft
non feulement différent , mais quelquefois
différemment mêlé en différens fruits. Eft-
ce un effet de l'art , ou font-ce des efpeces
particulières ? ( Hijî. de tacad\ des Se. 1711
& 171 2. ) Si c'eft un effet de l'art , feroit-ce
par des pouflîeres appliquées à des piftils
étrangers que cette merveille arrive ? On
pourroit le fbupçonner fur des exemples ap-
prochaus qui s'en trouvent chez quelques ani-
maux , fi l'analogie du règne animai au végé-
tal étoit recevablc en phyfique. Ce feroit
bien-là une manière élégante d'avoir de nou-
velles efpeces de fruit : mais il faut attendre
les expériences avant que de prononcer.
Il eft parlé dans les éphémérides d'Alle-
magne ( Ephém. N. C. dec. I , ann. 9 , oBf..
3 ; de'c. 1 , ana. 1 , oif. i i.j de citrons monf-
trueux en forme de main ; t)(.leP. Dentre-
colles ( Lett. édifiant, tome XX , page 301. j
a envoyé de la Chine la figure d'un citrou
Aa
iS^
C l T
nommé main de Dieu par les Chinois , 5c
dont ils font grand cas pour fa beauté &
pour fon odeur. Ce fruit eîl tel par fa forme ,
qu'on croit voir les doigts d'une main qui
fe ferme \ & fa rareté a engagé les ouvriers
chinois à imiter ce fruit avec la moelle du
tong-ftao , qu'ils tiennent en raifon par di-
vers fils de fer qui figurent les doigts. Le
citron des curieux d'Allemagne venoit-il des
fcmences de celui de la Chine ? ou fa forme
venoit - elle de caufes particulières qui
avoient changé ion efpecc ?
Voici une autre fingularité , ou plutôt
monftruofité bien plus étrange, dont parlent
quelques auteurs. C'eft d'un citron qui naît
enferme dans un autre , citrum in citro :
inais d'abord il faudroit l'avoir vu ^ & peut-
être quand on l'auroit vu , en abandonner
l'explication : car il ne s'agit pas dans le
fa.it d'un fruit double ou gémeau , & qui
fe forme accouplé , lorfque deux boutons
naifîent d'une même queue fi près l'un de
l'autre , que les chairs fe confondent à caufe
de leur trop grande proximité. C'eft ici ,
dit-on , un citron qui fort du centre de
l'autre , ou plutôt c'eft ici peut-être un fait
mal vu & mal rapporté. Ceux ^i en don-
nent l'explication par l'abondance de la fevc ,
n'expliquent point le phénomène , parce
qu'on ne com.prend pas que la force & la
fécondité de la fève produifent de foi un
citron contenu dans un autre , fans l'entre-
mifè de fa queue , de fa fleur , & de tous
ks organes dans lefquels la matière de la
produâ:ion ordinaire du fruit eft préparée.
Du Bois de citronnier des anciens. Il me
refte à parler du bois de citronnier des an-
ciens , qui étoit très-rare & très-eftimé à
Rome. Il falloit être extrêmement riche &
magnifique pour en avoir feulement des
lits , des portes , ou des tables ^ c'eft pour-
quoi Pline a écrit : on emploie rarement le
bois de cet arbre pour les meubles , même des
plus grands feigneurs. Cicéron en avoit une
table , qui avoit coûté deux mille écus.
Afînîus PoUio en avoit acheté une trente
mille livres , & il y en avoit de plus de
quarante mille écus ^ ce qui faifoit cette
différence de prix , c'étoit ou la grandeur
des tables , ou la beauté des ondes & des
nœuds. Les plus eftiinées étoieat d'un feul
nœud de racine» J
C IT
La promeffe qu'Horace fait à Vénus de
la part de Maximus , lib. IV , od. j,
Albanos prope te lacus
Ponet jnarmorccm fub trabe citrea,
» Il vous dreffera une ftatue de marbre dans
)i un temple de bois de citronnier près du
» lac d'Albe « : cette promeffe , dis -je ,
n'eft pas peu confidérable ; car un temple
boifé de citronnier devcit être d'une prcdi-
gicufc dépenfe. Ce temple de Vénus n'au-
roit pourtant pas été le premier où ïoii
auroit employé de ce bois : on n'a qu'à
lire pour s'en convaincre Théophrafte , /.
V, ch. V ; & Pline A XII , cA. xvj.
Nous voyons par ce détail que je dois
au P. Sanadon , qu'il ne s'agit pas icfdu
bois de notre citronnier ; mais nous igno-
rons quel arbre étoit le citrea d'Horace , nous
ne le connoiffons plus.
11 eft parlé dans l'écriture du bois almM-
gim. ( III liv. des Rois , ch. :r , v. xj. ) ,
qui a aufîi exercé tous les favans ;, les uns
prétendent que c'eft le fabinier , d'autres
l'acacia , & d'autres enfin entendent par
almugim , des bois gras & gommeux : mais
puifq-je c'étoit un bois rare que la flotte
clHiratn apporta d'Ophir , &: qu'on n'avoit
jamais vu jufqu'à ce jour-là , l'opinion la
plus vraifemblable eft. que c'étoit du bois
de thuya , comm.e l'a traduit la vulgate ,
c'eft-à-dire du bois de cèdre d'Afrique j
parce que fiiivant toute apparence , le pays
d'Ophir étoit la côte de Sophala en Afri-
que. Ainfi peut-être que le bois almugim
ou le cèdre d'Afrique , pourroit bien être
le bois de citre d'Horace , fi rare , fi re-
cherché par fa bonne odeur , fes belles vei-
nes & fa durée.
Auteurs anciens. Les littérateurs peuvent
confulter ici Diofc. l.I^c. cxxxj. Théophr.
hift. plant, liv, IV ., ch. iv. Athénée , liv»
III, ch. vij, viij. Pall. R. R. liv. IV ^ tit,
X ; liv. VIII, tit. iij. Plin. XII , iij ; XV ,
xiv, XXV iij ; XVI , XXV j ; XVII , x ., XVIII ,
vj. Geop. liv. X , c. vij , viij , jx. Macrob.
// , faturn. xv. Paulus , lib. I , cap viij ;
l. VII , c. iij , V. Sol in. c. xlvj ; falma^i
exercit. Plin. 666. Apicius , /. / , c. xxj.
Auteurs modernes. Et parmi les modernes,
Commelinus ( Joh. ) in Hefperidibus Bel-
gicis, Aug. Vindet i6j6 , foL en Jbollaadoi%
C I T
Ferrarius ( Joh. Bap. ) Hefperides. Romce ,
1646 y foi. cum. fig. belle impreflîon , figu-
res encore plus belles , ouvrage excellent ,
édition originale.
GcofFroi , Mat. méd.tom. F7, très-bon.
Grube ("Herman ) analyfîs mali citrei.
Hafniœ^ 166% , //z-8°. Ham. i6j/\. , 1/1-4°.
compilation des plus médiocres.
Jovianus ( Joh. ) Aoni Hefperidum , lib.
II, Bafiiece, 1538, //z-8^
Lanzonus ( Jofèph. ) citrologia Ferra-
ri cj^ ^ 1690 , in-ii. Ce petit traité fe re-
trouve dans le recueil de fès ouvrages.
Nati ( Pétri ) obfervatio de malo limo-
nia citratâ aurantiâ , vulgo la bifarria dicla.
Florent. lôj^^ in-4°.figur.
Steerbeek ( Franc. ) citri cultura Antverp.
168 2 5 iti-^. en flamand , avec de belles
figures.
Wolcliammer ( Jof. Chriftoph. ) Uefpe-
ridummorib.lib. IV ^'Noriberg. 171 3 7 in-fol.
C'eft ici la traduction latine de l'ouvrage
de cet auteur , qui fut d'abord publié en
allemand, & imprimé à Nuremb. en 1708
in-fol. bon.
On peut confulter Hoffman ( Frider. )
dans fes ouvrages fiir l'utilité du citron en
fanté & en maladie.
Ferrari , entr'autres bonnes chofes , a trai-
té avec beaucoup d'érudition 8c de connoif-
fance , de la culture du citronnier , qui in-
térefTe la botanique pratique. Cette culture
demande à- peu-près les mêmes foins & la
même méthode que celle de l'oranger , com-
me le remarque Miller. Voye[ Oranger.
Nebelius a donné l'anatomie du citron :
& Seba, le fquelette de la feuille de l'arbre.
Ther. t. I , pi. 4. D'un autre côté M. Geof-
froi , maître dans fon art , a enièigné le
procédé de tirer le fel elTentiel du citron ,
en faifant évaporer le fuc jufqu'à confiftance
de firop clair. Il a aufTi trouvé une troifieme
manière de tirer l'huile effentieile du ci-
tron , qu'il met au deffus des deux métho-
des dont nous avons parlé. Foyf:( les mém.
de tacad. des fcienc. ann. 172 1 & 1738'
( M. le chevalier de Jaucovrt. )
Citron NIER. ( Câym. Diète. Mat. méd.
Fharmac. ) la pulpe ou la chair & le flic
du citron , fes pépins & fon écorce , four-
jaifFent différens remiCdes à la médecine.
Le fuc de citron doit être rapporté à la
CIT 1S7
cîalTe des fubftances végétales , muqueufes ,
& au genre de ces fubftances qui contien-
nent un excès d'acide qui les rend peu pro-
pres à fiibir la fermentation vineufe lorf-
qu'on les y expofe fans mélange , mais qui
peuvent fervir très-utilement à corriger des
liibftances de la même clafle , qui pèchent
au contraire relativement à l'aptitude à la
fermentation vineufe par un défaut d'acide :
le fuc de citron eft même un extrême dans
cette efpece. Voye^ MuQUEUX , VlN , 6*
ZiMOTECHNIE.
Le fiic de citron eft employé à titre d'a-
cide & comme précipitant dans certaines
teintures ^ par exemple , dans celle qui eft
faite avec le fafranum , dont la partie colo-
rante eft extraite par un alkali fixe. Le fuc
de citron fèrt encore dans le même art à
arriver ou exalter certaines couleurs. Voye[
Teinture.
Ce fuc a des ufages plus étendus à titre
d'aliment & de médicament j il fournit ua
afîkifonnement falutaire &c fort agréable,
que les Allemands fur-tout emploient dans
prefque tous leurs mets , foit exprimé , foit
plus ordinairement avec la pulpe qui le con-
tient , & même avec l'écorce , & dont
l'einploi eft beaucoup plus rare dans notre
cuifine.
C'eft avec le fuc de ce fruit étendu danf
une fliffifante quantité d'eau , & édulcoré
avec le fuc , qu'on prépare cette boillon fi
connue fbus le nom de limonade , qui efl
fans contredit de toutes les boiiTons agréa-
bles celle qui peut être regardée comme le
plus généralement falutaire. V. Limonade,
Le fùc de citron eft rafraîchiffant , diu-
rétique , ftomachique , antiputride , anti-
phlogiftique, regardé comme très-propre 3
préfèrver des maladies contagieufes ^ quoi-
qu'il faille avouer qu'à ce dernier titre il eft
moins recommandé que le citron entier ^
qui eft cenfé opérer par fon parfum. L'u-
tilité médicinale la plus évidente du fiic de
citron confifte à prévenir les incouvéniens
de la chaleur extérieure, dépendante des cli-
mats ou des faifoHs. Les habitans des pays
très-chauds retirent de fon ufage des avan-
tages conftans , qui fourniffent une obfêr-
vation non équivoque en faveur de cette
propriété : celle de calmer efticacement les
fièvres inflammatoires & putrides , n'eft pas
Aa z
i«8 C 1 T
il conflatéc à beaucoup près. Voye^ FiEVRE.
Le icorbut appelle fcorbut de mer , eil
guéri très-promptemeut par Tufage des ci-
trons : toutes \(^?, relations de voyages de
long cours donnent pour un fait confiant
la guérifon prompte & infaillible des ma-
telots attaqués de cette maladie , même au
dernier degré , dès qu'ils peuveat toucher
à un pays où ils trouvent abondamment
é.e.% citrons, ou autres fruits acides de ce
genre , comme oranges , ùc. Mais jufqu'à
quel point cet aliment médicamenteux ope-
re-t-il dans cette guérifon ? Ne pourroit-on
pas l'attribuer a plus jufte titre aux viandes
fraîches , & à toutes les autres commodi-
tés que ces malades trouvent à terre , à l'air
de terre , & fès exhalaifbns même , félon la
prétention de quelques obfervateurs ? Tout
cela neparoît pas affez décidé. V. Scorbut.
Les apothicaires gardent ordinairement
du flic de citron dans les provinces où ils
ne peuvent pas avoir commodément des ci-
trons dans tous les temps de l'année. Ce fuc
le confervefort bien fous l'huile, étant tenu
dans un lieu frais : il fubit pourtant une
légère fermentation qui le dépure & le rend
très-clair , mais qui altère un peu fon goût ^
Ce qui eft évident par l'impofîibilité de pré-
|>arer avec ce fuc ainfi dépuré , une limo-
jfiade aufTi agréable que celle qu'on prépare
jJtvec le fîic de citron récemment exprimé.
C'eft avec le fùc de citron dépuré qu'on
prépare le fîrop appelle firop de limon ; car
on ne diflingue pas le citron du limon dans
4es ufàges pharmaceutiques : on fe fert
4nême plus ordinairement du premier ,
.parce qu'il efl plus commun.
Pour faire le fIrop de limon , on prend
une paitie du fuc de citron dépuré par le
léger mouvement de fermentation dont nous
venons de parler , & deux parties de beau
fucre blanc qu'on fait fondre dans ce fuc ,
à l'aide d'une chaleur légère, au bain-oia-
rie , par exemple , dans un vailfeau de
faïence ou de porcelaine. N, B. i°. qu'on
peut employer un peu moins de flicre , parce
que la confiftance exadsrement fîrupeufe
n'efl pas néceffaire pour la confèrvation des
fucs acides des fruits , 6c que cette moin-
dre dofc fournit la commodité de faire fon-
dre plus aifément le fucre fans le fecours
«le la chaleur j avantage ^ui n'efl pas à né-
C I T
gliger pour la perfeâion du firop : i*'. qu'on
gagneroit encore du côté de cette perfec-
tion , pour ne perdre que du côté de l'élé-
gance de la préparation , fî l'on employoit
du fuc non dépuré Se récemment exprimé ,.
au lieu du fuc dépuré qui ne peut être récent.
Les médecins allemands &: les médecins
anglois emploient affez communément l'a-
cide du citron combiné avec différentes ma-
tières alkalines : les yeux d'écreviffes citrés,
\gs alkalis fixes faoulés de fuc de citron ,
font des préparations de cette efpcce. Mais
nous ne connoifTons par aucune obfervatioii
fuffifante les vertus particulières de ces fèls
neutres , qui ne font d'aucun ufage dans la.
médecine françoife : le premier paroît fort
analogue au fèl de corail , quoiqu'il ne faille
pas abfolument confondre l'acide végétal
fermenté avec l'acide végétal naturel : & le
fécond a précifément le mêmie degré d'ana-
logie avec la terre foliée de tartre.
Le médecin , en prefcrivant le iîic ou le
firop de citron dans les mélanges, ne doif
pas perdre de vue fa qualité acide , qui le
rend propre à fe combiner avec les matiè-
res alkalines , foit terreufes , Ibit falines ,.
& à coaguler le lait & les émulfions \ il
doit fe fouvenir encore que les chaux d'an-
timoine , l'antimoine diaphorétique lui-
même, font rendus émétiques par l'addi-
tion des acides végétaux.
Meuder recommande , dans fon traité-
des teintures antimoniales , celle de CQS tein-
tures qu'il appelle vraies , qu'on peut tirer
de ce demi-métal par le moyen des acides
végétaux , & particulièrement celle qu'on
prépare avec le fuc de citron. Voy. Anti-
moine.
L'écorce jaune de citron a un goût amer y
vif & piquant , dépendant principalement
de la grande quantité d'huile effentielle
qu'elle contient dans de petites véficules
très-fenfibles ^ & en partie aufîî d'une ma-
tière extraélive foluble par l'eau. Cette
écorce , fbit fraîche , foit féchée ou confite ,
efl cordiale , flomachique , antiliyflérique ,,
carminative , vermifiige , &€. on en fait un
firop connu dans les boutiques fous le nom.
de firupus flavediimm citrei. En voici la
préparation.
Prenez des zeflcs de citron ou de limon ,
cinçr onces j de l'eau bouillaiite;^ une livre : fai-
C I T
tes macérer pendant douze heures au bain-
marie dans un vailTeau fermé , & ajoutez
à la colature le double de fucre fin , fur le-
quel on prendra environ une once pour en
faire un eUofaccharum avec l'huile eilcntielle
du citron \ eUofaccharum qu'on fera fondre
au bain-marie avec le reile du fucre , &
votre firop fera fait.
Ce iîrop ne participe que bien foiblement
de la vertu de lecorce jaune de citron.
On tire l'huile elfentieile de citron par
des procédés fort fim.ples, &: par là même
fort ingénieux. V. HuiLE ESSENTIELLE.
L'huile elTentielle de citron polTede émi-
nemment les vertus que nous avons attri-
buées à fon écorce. La plupart de ces pro-
priétés font communes à toutes les huiles
elîéntielles \ mais celle-ci par la douceur &
le gracieux de fbn parfum , fournit à la phar-
macie une matière très-propre à aromatifer
certains médicamens. On l'emploie dans
cette dernière vue fous la forme d'un eko-
faccharum. Voyez Eleosaccharum.
Boerhaave dit qu'on einploie avec beau-
coup de fuccès l'huile des écorces de citron
dans les palpitations du cœur , qui dépen-
dent d'une humeur aqueufe-froide , & d'un
muqueux inaâif , ab aquofo frigido , ù inerti
mucofo ; caufès qui figurent on ne peut pas
mieux, pour l'obferver en pafîant , avec le
vifqueux , ou l'alkali Ipontané , l'acrimonie
méchanique , &c. Le même auteur célèbre
beaucoup aufli l'eau retirée parla cohobation
des écorces de citron , contre les vents , les
fyncopes , les langueurs , & les mouvemens
irréguliers du cœur.
On tire aufll des zeiles de citrons, parle
moyen de la diftillation , une eau fimple &
une eau fpiritueufe , connue fous le nom
à'efprit de citron. Voye[ Eau DISTILLÉE j
yoyei aujji EsPPaT.
Cette eau aromatique fpiritueufe , fi con-
nue fous le nom ^eau fans pareille , n'eft
autre cliofè que de l'efprit-de-vin chiirgé
«d'une petite quantité d'huile eflentielle de
citron , que l'on difTout goutte à goutte &
en tâtonnant , jufqu'à ce qu'on ait atteint au
à&%Té de parfum le plus agréable.
L'autre partie de l'écorce de citron , qui
cft connue fous le nom à'écorce Blanche ,
-palTe pour vermifuge & litjiontriptiq^ue j
C I T 1^5?
mais Ton peut douter de ces deux propriétés,
fiir-tout de la dernière.
Voici ce qu'on trouve fur les graines de
citron , dans la matière médicale de M. Geof^
froi. « On croit que les graines de citron font
alexipharmaques ; on les emploie dans quel-
ques conférions alexiteres : elles font mou-
rir les vers de l'ellomac & des inteflins : qWqs
excitent les règles, diiTipent les vents , atté-
nuent & divifènt les humeurs vifqueufes. On
en fait des émulfions vermifuges & cordia-
les , dans les maladies d'un mauvais carac-
tère & peflileiitielles. »
On fait entrer ordinairement le citron
entier coupé par tranches dans les infufîons
purgatives , connues dans les boutiques fous
le nom de tifannes royales. V. PuRGATIF.
« On vante beaucoup , dit M. Geoffi'oi ,
les citrons dans la pefte & les maladies con-
tagieufes , pour détourner la contagion 3 on
porte continuellement dans {ç.s mains un
citron feul , ou percé de clous de girofle ^ on
le flaire & on le mord de temps en temips :
mais il faut avouer , ajoute cet auteur, qu'on
ne détourne pas tant la contagion par ce
moyen , qu'on appaifë \q% naufées & \^% en-
vies de vomir qui viennent des mauvaifes
exhalaifbns des malades , ou de l'imagina-
tion qui eft bleifée j ce qui afFoiblit l'eltomac
& corrompt la digeflion. n
Les différentes confitures de citron , telles
que les petits citrons entiers , les zefles &
l'écorce entière , font d'affez bons analepti-
ques , ou des alim.ens légers , ftomachiques
& cordiaux , que l'on peut donner avec fuc-
cès aux eonvaiefcens & aux perfonnes qui
ont l'efloraac foible , languilfant , & en
même temps peu fenfible. Il faut obfèrver
pourtant que cette écorce de citron verte ,
très-épaiffe, qu'on nous apporte toute confite
de nos îles , doit être regardée non feule-
ment comme polFéciant à un degré très-infé-
rieur \&s qualités que nous venons d'attribuer
aux autres confitures de citron , qui font
pks aromatiques que celles-ci , mais même
comme fort indigefie , au moins pour les
eflomacs foibles.
On trouve dans \^^ boutiques àii apothi-
caires un élc£i:uaire iblide , connu fous le
nom ^élicluaire ou à^ tablettes purgatives de
citron. Voici comme elles font décrites tUiiiS
la pharmacopée de Paris» •
i^o C I T
Prenez écorce de citron confite , confèrve
de /leurs de violette , de biiglofe , de chaque
dc:rii-oiice , de la poudre diatragacanthe
froide nouvellement préparée , de la fcam-
monée choifîe , de chaque demi-once j du
turbith , cinq gros , du gingembre , un
demi-gros -^ des feuilles de fcné , fix gros ^
de la rhubarbe choiiie , deux gros & demi ^
des girofles , du fantal citrin , de chaque un
fcrupule : faites du tout une poudre félon
l'art j après quoi vous ferez cuire dans de
l'eau de roies dix onces de beau fucre en
conlîftance requilë pour former avec les con-
ferves & la poudre , des tablettes que l'on
confervera dans un lieu fec , parce qu'elles
font fujettes à attirer l'humidité de l'air , à
iè moifir.
Ces tablettes purgent aflez bien à la dofe
d'une demi-once ;, on peut même en donner
fix gros aux perfonnes robuftes. Mais l'ufage
de ce purgatif a été abandonné , apparem-
ment parce qu'il eft fort dégoûtant, comme
toute préparation pharmaceutique qui con-
tient beaucoup de poudre , & qu'on ne peut
faire prendre que délayée dans de l'eau j
mais on devroit au moins le prefcrire aux
perfonnes à qui leur fortune ne permet pas
d'être fi difficiles ; car ce remède coûte très-
peu , il purge très-bien , & avec auffi peu
de danger que les médecines magiilralcs un
peu aciiives.
Le citron entier , fon écorce jaune , fon fiic ,
Ùl pulpe , Tes graines , fon eau diftillée , fon
e/prit , &c. entrent dans un grand nombre de
préparations pharmaceutiques officinales, (fi)
CITRON VISCH , f. m. {H//, nat. îchthyo-
log. ) Ruyfch a fait graver encore fous ce
nom , au /z° 8 de la VI*. planche de fa col-
leclion nouvelle des poijfons cTAmboine , un
autre poifîbn des mêm.es mers , qui diffère
du précédent-, en ce que , i*^. fon corps n'a
pas d'épines j 2°. fa nageoire dorfalc eft plus
haute devant que derrière , & n'a que deux
épines à fa partie antérieure 3 3°. fà nageoire
anale à deux épines au devant ^ 4°. fa queue
€ft fourchue jufqu'aux trois quarts de fa lon-
gueur j 5°. fon corps eft jaune , marqué de
chaque côté de trois bandes obliques bleuâ-
tres , bordées de verd.
Remarque. Ce poiffon fait encore un genre
différent du précédent dans la même famille
^es cofres, M. ADAHsoti, )
C I T
CITROUILLE, f f ( Bot. ) plaate eu-
curbitacée , en latin citrullus 6c anguria ojf,
& en françois connue fous le nom de pafleque.
Ses racines font menues , droites , fiijrées ,
& chevelues : elle répand fur terre des far-
mens fragiles , velus , garnis de grandes
feuilles découpées profondément en plufieurs
lanières rudes & hériffées. Il fort desaiffelles
des feuilles des vrilles & des pédicules qui
portent des fleurs jaunes, en cloche, évafées,
divifées en cinq parties , dont \<&s unes font
fliériles &lcs autres fertiles *, ou appuyées fur
un embryon qui fe change en un fruit arron«
di , fi gros qu'à peine peut-on l'embraffer.
Son écorce eft un peu dure , mais liffe , unie ,
d'un verd-foncé , & parfemée de taches blan-
châtres , ou d'un verd gai. La chair de la
citrouille ordinaire eft blanche ou rougeâtre ,
ferme , & d'une faveur agréable. Sa graine
eft contenue dans une fubftance fongueufè
r|ui eft au milieu du fruit : elle eft oblongue,
large , applatie , rhomboïdale, jaunâtre , ou
rougeâtre , ridée , garnie d'une écorce un peu
dure , fous laquelle fè trouve une amande
blanche, agréable au goût , comme cellede
la courge. On cultive la citrouille dans le»
potagers ^ fa chair eft bonne à manger.
On mange la chair de citrouille cuite , &
on la prépare d'une infinité de manières
dans les cuifines : on fait même du pain
jaune avec la pulpe de citrouille & la farine
de froment.
La citrouille croît fans culture dans les
pays chauds , tels que la Fouille , la Calabre ^
la Sicile , & autres contrées méridionales.
On la fem.e dans les pays du Nord , & elle y
porte du fruit \ mais il arrive rarement à une
parfaite maturité. Les jardins d'Egypte font
remplis de citrouilles^ qui varient beaucoup,
& différent les unes des autres : c'eft dom-
mage qu'ellesnepuiffentpas réuffir enFrance.
Profper Alpin en parle. Belon fait mention
de quelques-unes dont les fruits font extrê-
mement gros. M. Lippi y en a auffi obfervé
plufieurs e/pcces fort particulières. Mais il
n'y a point d'endroits où la citrouille profite
mieux qu'au Bréfil , & où fa pulpe foitplu*
douce & plus fùcculente.
On appelle à Paris citrouille ^\t pepo oblon*
gus^ de C. Bau. & de P. Tournef. c'eft pour-
tant une autre plante cucurbitacée , différente
de celle qu'on vient de décrire j mais il (\d*
C I T
ïïfa d'indiquer ici les cara6lercs. S-s fleurs
font monopétales , découpées en forme de
clocihe , évafées au fommet , & échaiicrées
en cinq parties ^ les unes font mâles & les
autres femelles : les femelles croilî'ent au
fommet de l'embryon , qui devient enfuiïe
un fruit ilicculent , long- ou rond , revêtu
d'une écorce rude , inés^ale , raboteufè , lil-
lonnée , couverte de nœuds & de verrues ,
divifée fouvent en trois loges qui renferment
àes graines applaties , & comme bordées
d'une manière d'anneau. Ce:te plante elt
devenue très-commune dans nos jardins ,
& même il n'y a pas de plante potagère
dont la (èmence levé plus aifëment , ik fe
conferve plus long-temps avec la faculté de
fructifier. (M. le chevalier de Javcovrt. )
Citrouille, {Mat. méd.) la femence
de la citrouille , qui cil la feule partie de
cette plante qui foit en ufage en médecine ,
eft une des quatre femences froides majeures.
Voyei SExVIENCES FROIDES.
L'Jiuile qu'on retire des graines de ci-
trouille paffe pour amollir la peau , la ren-
dre unie 5 & en effacer les taches.
Citrouille, {Diète.) quelques perfbn-
iics mangent toute crue la chair de citrouille
qui efl fous l'écorce \ mais le plus fouvent
on ne la mange que quand elle eft cuite,
tlle donne très-peu de nourriture : elle pro-
duit un fang aqueux qui adoucit les inflam-
mations des parties internes , & temjpere
l'acrimonie & l'eifervefcence de la bile. On
la prépare d'une infinité de manières dans les
cu'ifînes. On la rôtit , on la frit , on la fait
bouillir , on l'aiî'aifonne avec le beurre , le
lait , le fel , les oignons , le fucre , & avec
des aromates ^ & même on fait du pain
jaune avec la pulpe de citrouille mêlée avec
de la farine de froment : il a une faveur
douce , & il efl rafraîchiffant &; falutalre.
GeofFroi , Mat. médicale, {b)
CITTA-DELLA-PIEVE, (G/o^.) petite
ville d'Italie dans TOmbrie.
CITTA-DI-CASTELLO, {Géog.)vï\\Q
d'Italie dans l'Ombrie , fur le T ibre» Long.
29, 53 ;lat. 43 , 28.
^ CITTA-Dl-SOLE, ( Géog. ) petite ville
d'Italie fortifiée , dans la Tofcane , flir la
rivière de Fagone.
CITTA-NUOVA, C G/og^, ; viUe d'Italie
fiir la côte d'Iibrie : elle appartieat aux Yénd-
CIT 191
tiens. Il y a un é vêché fuiîrajant d' Aquilée. L 2
mau\ais air qui y règne eiî: caufe qu'elle elt
mal peuplée. Long. 37. 23. lat. 45. 30.
Il y a encore une autre ville du même
nom avec le titre de duché , dans l'état
de l'égliië , marche d'Ancone , fur le golfj
de Venife : elle appartient à la maifon Cé-
iiiriui.
CITVISCH , f. m. (HiJI.nat.lchthyolog.%
poiiîbn des Hqs Mohiques , allez bien gravé ,
par Ruyfch , dans fa colkclion nouvelle des
poijfons £Amboine ^page 1^^ planche I^ILL ^
fig. I. Coyetî en avoit fait graver & enlu-
miner une très-bonne figure , au /z". 169 de
la féconde partie de ion recueil des poif-
fons d'Amboine , fous le nom hollandois
chietfevifch ou la toile peinte , du mot chiets
ou cits , qui fignifie toile peinte des Indes.
Il a le corps elliptique , pointu aux deux
extrémités , cxtrcmenient comprimé par les
côtés , une fois plus long que profond j la
tête & la bouche petites , les yeux mcdiO'
crement grands.
Ses nageoires font au nombre de fêpî ,
fàvoir , deux ventrales m.enues , longues ,
placées au delFous des [>e£l;orales qui font
rondes &c médiocres ^ une dorfale fort lon-
gue fendue en deux , plus Laiîe devant que
derrière ^ une derrière l'anus alTcz longue ,
& une à la queue arrondie. De ces nageoi-
res deux font épineufes , fàvoir , la dor-
fale qui a un rayon antérieur /impie , bc
l'anale dont deux rayons antérieurs font ea
épine.
Son corps efl jaune , entouré de. dix ban-
des circulaires rouges , &: bordé de bleu
en delfus Se en delTous ^ fa tête eft entou-
rée d'un cercle bleu ^ ks nageoires font ver-
tes , à l'exception de ladorfàle qui eft noi-
re , pointillée de blanc , avec fon rayon
épineux bleu & fa membrane jaune , &:
celle de l'anus qui a à Ion milieu un demi-
cercle jaune , & un bleu entourés d'un de-
mi-cercle rouge. Les deux rayons épineux
de cette dernière nageoire fout pareiileinen*t
bleus.
Mœurs. Ce poifFon eft très-rare & fê pè-
che dans la mer d'Amboùie feulement , au-
tour de l'île des trois Frères.
Ufages. Il eft fort bon à manger 5 maî«
comme il n'eft pas fort commun , ou l'envoie
paf curlQilté ; à caufe de la beauté de iè»
i5>i C I V
couleurs . à Batavia & ailleurs , dans des va-
fes de par:elaine , mais il rcllfte difficile-
ment à la longueur du voyage.
Remarque. Le citvifch a tous les caractères
généraux & principaux du douwiiig , dont
il eil une elpece , & dont le genre appar-
tient à la famille des Icares.
Quoique fou nom fe rapporte entière-
ment à celui du poiilbn que nous avons
décrit fous le nom de cluetfevifch , ces deux
poilTons ne doivent pas être confondus \ non
feulement ils ne fojit pas de même efpece ,
comme on en peut juger par les fix ou Icpt
caraâeres de différences que nous avons mis
en caractère italique pour les rendre plus
icnlibles i ils doivent même former deux
genres diiTércns , comme nous l'avons indi-
qué , vu la forme de leur queue qui eft
échancrée dans le premier & arrondie dans
celui-ci. C M. Adanson. )
CIVADIERE ou SIVADIERE , fubf. f.
( Mar. ) c'eft la voile du mât de beaupré.
Voye^marine^pl. /, la vergue de beaupré &
la civadiere cotée lo. Cette voile eft fort in-
clinée , & elle a deux grands trous à chaque
point vers le bas , afin cjne l'eau qu'elle reçoit
fe puilfe écouler au même inftant , quand il
arrive qu'elle touche à la mer.
La civadiere eft une voile d'un grand ufage ,
& fa fituation, euégardau vaiileau, fait voir
qu'elle femblc propre à tirer le vailîèau lorf-
que les autres voiles ne font que le poufler.
Cependant quelques-uns prétendent qu'elle
ièrt plus à fcutenir le navire & à le redrefibr
vers le haut , qu'à le poufler en avant. {Z)
CIUDAD DE LAS PALM AS , ( Qéog, )
ville capitale de l'île de Canarie , avec un fort
& un port très-fréquente. Long. 3 ; lat. 28.
CIUDAD DE LOS REYËS, {Géog.)
ville confidérable de l'Amérique méridio-
nale dans la Terre ferme , province de
Sainte-Marthe , près de la fource du Céfar.
CIUDAL REAL, {Géog.) ville d'Ef-
pagne dans la nouvelle Caftille , capitale de la
Manche , à une lieue de la Guadiana. Long.
14,10^ Ict. 39 , z. Il y a encore une ville de
ce nom dans l'Amérique méridionale au Pa-
raguai , au confluent des riviefes d'Itatu &
de Parana.
CIUDAL-RODRIGO , {Géog.) ville
forte d'Efpagne au royaume de Léon , fur la
rivière d'Aguada. Long, n , 54 j lat. 40 ,-38. |
C ï V
CIVE 01/ CIVETTE , f, f. c:^;,«/^ , (/^r^.l
il y en a de trois e/peces \ la cive de Portugal ,
la groiîe cive d'Angleterre, & la petite qu'on
nomme civette: elles ne différent que par la
groiiéur de leurs feuilles. Quelques-uns ap-
pellent la civette appétit. La racine de la cive
eft un aflemblage de petites bulbes, comme
l'échalote. Sa feuille eft longue , extrême-
m.cnt menue, & a l'odeur de la ciboule. Ses
fleurs font purpurines , faites en petit paquet
où fe forme une petite graine : elle fert dans
les fournitures de falade & dans \qs omelet-
tes ^ elle jette quantité de brindilles balfes ,
que l'on coupe à fleur de terre : l'ufage eil
de la multiplier par les petits rejetons de fon
pié. \}\\t. culture ordinaire , une bonne terre ,
eft tout ce qu'il lui faut. {K)
CIVEDA , ( Géog. ) petite ville d'Italie
dans le Brelcian , fur fOglio, aux Vénitiens.
*CIVELLE, f. f. {Pêche) forte de pe-
tit poiiTon que l'on pêche dans la Loire , de-
puis la ville d'Angers jufqu'à la mer, & qu'on
croit être un frai d'anguille , à caufe qu'il en
approche beaucoup. Ceux qui prétendent le
contraire , difent que ces poilfons ne vien-
nent jamais plus grands j ils ne font pas plus
gros ni plus \o\\%% que des aiguilles ordinai-
res à coudre : il s'en pêche une très-grande
quantité , qui fe confomme par les pauvres
gens & \^% riverains. Ils en forment des bou-
les qu'ils nomment /»û//2 de civelle.
On fait cette pêche en mars , elle dure
deux à trois mois '^ on ne fe ièrt que de facs ,
tamis ou cribles , avec lefquels hommes , fem.-
mes & enfans prennent les civelles , en écu-
mantlafuperiîcie de l'eau : ainfi c'eft la même
pêche que celle des pêcheurs bas-normands
de la rivière de l'Orme. On la fait la nuit \
les pêcheurs ne iè fervent point de lanterne :
s'il arrive que les déborde mens des eaux
aient rendu ks eaux troubles , on pêche d«
jour fur la Loire.
CIVENCHEU, ( Géog. ) viUe confidéra-
ble de la Chine , dans la province de Fokien.
Long. 134 , 40; lat. 25.
CIVERAGE, {Jurifpr.) eft une reda^
vance due au feigneur dans quelques pro-
vinces par les tenanciers , pour les terres qu'il
leur a concédées. Gjypape en fait mention
en fon confeil 91. Selon M. Salvaing, dans
fon traité de ï ufage des fiefs, ch. xcvij. civa-
ragium eft en Dauphuié un droit d'avenage ou
payable
C I V
payable en avoine, f^oyei Chopin fur Vani-
de IK^ de la coutume d^ Anjou. Voye-{^ le tr,
de la pratique des t£rriers , tom. II , feci. ix ,
guejl. z. {A)
CIVES , f. f. ( Kitr. ) c ctoient de petites
pièces de verre de forme ronde , dont on
iaifoit anciennement \qs vitres. On s'en fert
encore en Allemagne.
CIVET , f. m. C Cuifine. ) c'eft un ragoût
particulier , fait d'un lièvre coupé par mor-
ceaux , & cuit en pot avec bouillon, un bou-
quet d'herbes , & un aiTaifonnementde vin ,
de farine , d'oignon , & d'un peu de vinaigre.
CIVETTE, f:f. {HiJl.nat.Zoolog.) ani-
mal -{ibethicum quadrupède , que l'on a mis
fous le même genre que le chien , parce qu'il
lui rcffemble , de même qu'au loup & au
renard , par la forme de la tête & du mufeau ,
& par le nombre des dents ;, c'eft pourquoi
on lui a au/îi donné le noin de catus [ibethi-
cus oufelis odoratus. M. Linné a rangé la ci-
vette avec le blaii-eau fous le même genre ,
parce que c&s deux animaux ont chacun huit
mamelles , deux fur la poitrine , iix fur le
ventre , & cinq doigts à chaque pié.
La civette habite l'Afrique , les Indes , le
Pérou , le Brelil , la nouvelle Efpagne , la
Guinée : on en nourrit en Europe. Quelques
aTîteurs la prennent pour l'hyeue d'Ariftote
& de Pliîie j & ceux-là l'ont nommée alfez
bien kyœna odorifera. D'autres l'eûiment
être une efpcce de fouine ou de chat fauvage \
& ceux-ci l'ont appellce/t//j -{ibethina^ parce
que la civette porte un paiifum que les Arabes
appellent içdeb ou ^ibet , d'où elle a été nom-
mée en françois civette.
L'hiftoire de cet aniinal , celle de la faufte
origine de fbn parfum , les contes qu'on en
lit dans les voyages, les erreurs où font tom-
bés les divers naturaliftes qui en ont parlé ^
tous ces faits n'entreront point ici dans fbn
article : nous nous en tiendrons uniquement
à fa defcription anatomique , que nous ex-
trairons des mémoires de f académie des Scien-
ces ^ les feules fburccs fur lefquelles 0!i puifle
compter , & avec d'autant plus de railbn ,
qu'on trouve réuni dans un fè.d des anciens
volumes de cette académie , la defcription
de cinq de ces animaux.
La civette a environ deux pies & demi de
long, fa queue eftde quinze pouces plus ou
moins j fes jambes font courtes , priucipale-
Tome FIII^
CIV T5)3
ment celles de devant , qui u'avoicnt depuis
le ventre jufqu'en-bas , que cinq pouces ^ les
pattes , tant celles de devant que celles de
derrière , avoient chacune cinq doigts , dont
le plus petit tenoit lieu de pouce , comme à
l'ours ; mais ce petit doigt à peine pofoit à
terre , & n'y touchoit que de l'ongle. Outre
ces cinq doigts , il y avoit un ergot garni
d'un ongle comme les doigts. La plante du
piéétoit munie d'une peau douce au toucher.
Le poil étoit court fur la tête & aux pattes ,
mais ayant jufqu'à quatre pouces & demi fur
le dos, où il eft le plus long. Ce long poil
qui étoit dur , rude & droit , étoit entre-
mêlé d'un autre plus court , plus doux , &
frifé comm.e de la laine.
L'ouverture qui conduit a:: réceptacle où
s'amafTe la matière odorante , qu'on appelle
vulgairement civette , étoit au deffous de
l'anus : cette ouverture étoit longue de trois
pouces f, & quand on la dilatolt , elle avoit
plus d'un pouce & demi de large : elle étoit
l'entrée d'une cavité qui fervoit comme de
veftibule pour réceptacle de la matière odo-
rante.
Ce veftibule étoit garni par les bords d'un
poil tourné de dehors en' dedans , enforte
que la matière odorante n'en pouvoit fortir
qu'à contre-poil. Dans le fond de ce veftibule
qui pouvoit contenir un petit œuf de poule ,
*il y avoit deux autres ouvertures à droite &c
à gauche d'un pouce de diamètre , qui péné-
troient chacune dans un iàc de ièpt à huit
lignes de diamètre.
La peau du dedans de ces fàcs étoit iné-
gale comme celle d'un oifon , garnie de
petits poils clair-femés, & percée de piu-
lieurs petits trous : ces trous répondoient à
des glandes de la groffcur d'un petit pois ,
ferrées les mies contre les autres , & lices
par des membranes & par des vaiilcaux, qui
étoient les ram^eaux des artères & des vei-
nes Ir.^îogaftriqucs & honteufcs.
C'eii dans ces facs que s'amaile la matière
odorante , que les Arabes appellent :(ibct ,
qui fignifîe écume. En effet , cette matière
étoit écun^.eufe 3 & cela fe reconnoilToit , en
ce que peu de temps après elle perdoit la
blancheur qu'elle avoit en fortant : ce qui
arrive à toutes les liqueîirs , lelqueiles blar,-
chilfent toujours quand elles écument , ds;
quelque couleur qu'elles foient d'aiileurik'
Bb
194 C I V
La petite ouverture qui pnroifîbit au clcfTous
do la grande , étoit l'eutrce des parties de
la génération.
La forme àes poches où s'amaiTe la ma-
tière odorante , Te voyoit mieux renverfée
qae dans leur iituation naturelle. Les glan-
des de ces facs étoient du nombre des con-
glomérées. Au milieu de chaque glande , il
y avoit une cavité oblongue pleine de fiic
odorant fort blanc , qu'elle rccevoit par au-
tant de petits trous qu'il y avoit de grains qui
compofoient la glande ^ & cette cavité fe
retréciiFoit , & fcrmoit un petit col ou con-
duit qui perçoit la peau dont Je dedans des
poches étoit revêtu , & qui y diililloit la
matière odorante.
Ces facs parc^iloient recouverts dé fibres
charnues ramalTées enfemble , mais venant
d'endroits éloignés & difii'rens ;, de forte
qu'ayant égard à leur différente origine , on
pouvoit compter jufqu'à dix mufcles. L'ufage
de ces mufcles eil d'exprimer tk. faire fortir
la matière odorante , quand il s'en eft amaifé
une certaine quantité. Les veines & artères
hypogaflriques & épigaftriques fourniffent
Je fang qui produit cette matière dans les
glandes dont les facs font tapiiîés.
L'odeur de cette matière fe confer\'e , &
ne devient point mauvaife par le temps ^
mais il paroit que l'odeur de la civette n'eft
pas feulement dans la liqueur qui s'amailc
dans les poches , car elle eft aufîi répandue
par tout Ion corps ^ & fon poil eft tellement
parfumé , que la main qui l'a touchée con-
ièrve long-temps une odeur fort agréab|e.
C'eft ce qui a fait croire à plufieurs naturalif-
tes , que le parfum de la civette n'eft autre
cliofe que fà fueur \ enforte qu'ils ont penfé
qu'on l'amaffoit en faifànt courir ces animaux
dans une cage. Quoique cette fueur forte iu-
dilFéremment de tout le corps de l'aiiimal ,
cependant la liqueur odorante s'amalfe véri-
tablement dans les iàcs , s'y forme Se s'y
perfe(^tionne.
Dans la dernière civstte dift'cquéepar MM.
de l'académie , ils examinèrent la lirudure
des inamelks dont nous n'avons pas encore
parlé. Cette civette avoit quatre maireLiis ,
dont deux étoient fîtués au milieu du ventre
?. côté du nombril , &. les deux autres au bas
rie la p'jitrinc. La grolTeur des uns & des
autres étoit d'une ligne & demie j & la loii- \
C I V
gucur de deux lignes. Sous chacun de ces
mamelons il y avoit plufieurs conduits com-
muniquant les uns avesc les autres . & enfer-
més dans les inîégumens communs. Ces
conduits fem.bîoient dcftincs à porter le lait
aux mamelons , quoiqu'ils ne fortiffcnt d'au-
cunes glandes qui fullent vifîbles : mais cela
n'eft pas étonnant, car ces animaux qui n'a-
laitcnt & n'engendrent peint dans ces pays-
ci, doivent avoir ces glandes aftez petites
pour être in:perceptibles.
Dans ces cinq civettes il y avoit quelques
jeux de la nature. Par exemple dans l'une
d'elles , le crj'ftallin étoit d'une dureté ex-
traordinaire 5 ce qui peut fervir à expliquer
ce que Pline ( liv. XXXVII ^ chap. x.) dit
des yeux de l'hyène , qu'on en tire des pierres
précieufes appellées hyenicc. Cette particu-
larité jointe à quelques autres , ferviroit-elle
à juftifier l'opinion de Belon, qui a prétendu
que la civette & l'hyène àQ% anciens ne font
point ^iii animaux difterens ? Ily a quelques
raifbns pour appuyer fon fentiment j car les
deux principales marques que les anciens
donnent à leurs hyènes , fe trouvent dans
la civette , le poil hérifle le long du dos , &
une ouverture particulière fous la queue ,
outre \e^ deux qu'ont les femelles de tous les
autres animaux. Mais ^\\\\ autre côté y
l'hyène des anciens eft plus graride que la
civette , fon poil fort différent ; & ce qui
eft phis fort que tout , ils ne difent point
qu'elle eut aucune odeur , caraèèere qui les
diftingue prefque de tous les autres animaux..
A ce détail très-inftrué^if fur la civette y
il ne nous refte à ajouter que quelques nou-
velles particularités décrites par M. Mo-
rand , fiir le fac où cet aiîimal porte fon par-
tiun. Me'm. de tacad. 172.8 , pag. 403.
Ce fac , comme on l'a vu , eft frtué entre-
l'anus & le fexe de l'animal , à-peu-prèy
comme celui où \^% caftors portent leur cafio-
, reum. il pend extérieurement entre les cuif^
fes de la civette , & eft aifei grand. En
gros , c'eft une cavité e'ÀFcrmée dans une en-
veloppe épailîc , & qui a une îcngiie ouver-
ture en- dehors , de la figure d'une vulve.
Toute l'épaiffeur de l'enveloppe eft fermée
par luie infinité de petits grains , qui font
\q% glandes où fe filtre la liqueur odorante.
En regardant mieux ces grains avec le mi-
crofcope , M, Morand a découvert q^i'iis
CI V
étoient accompagnés d'une iiifinité de folli-
cules ou petites bourlss , qui contenoieat de
la liqueur déjà filtrée. Ces follicules peuvent
être aifément formées , ou par la défimion
des deux lames d'une membrane , ou par
l'extenfion des extrémités des vailTeaux fàn-
guins. Mais ce qui eft beaucoup plus fingn-
lier , M. Morand a vu dans la liqueur des
follicules , de petits poils pofés fans ordre çà
& là. Ils n'ont point de racines , & ne tien-
nent point les utis aux autres.
La cavité du fac eft occupée par deux
efpeces de pelotons de foie courte toute
imbibée de la liqueur odorante y qui paroît
comme un.e huile blanche.
En comprimant l'épaiffeur de l'enveloppe,
on en fait Ibrtir par les porcs , ou plutôt par
les canaux excrétoires de iâ membrane in-
terne , l'huile odorante qui va, fe rendre
dans la cavité du fac ; elle fort non par
gouttes fëparées , mais en forme de jet con-
tinu , à-peu -près comme la matière qui fort
des glandes fébacées de la peau , peut-être
parce qu'elle eft foutenue & comme liée
par ces petits poils qu'elle entraîne avec elle.
Il paroît certain que les follicules de l'en-
veloppe font les premiers réforvoirs de l'huile
odorante, mais des réforv^oirs particuliers &
difperfés ^ delà elle paiTe dans la cavité du
fâc , focond réfervoir , mais général , où
elle s'arrête & fè conferve dans les deux pe-
lotons foyeux : car fans cela la grande ou-
verture extérieure du fac n'ayant ni vah'ule,
ni fphinâier , l'huile s'écouleroit perpétuel-
lement au-dehors , & ce n'eft pas là le def^
fein de la nature. '
II eft vrai que l'on ne connaît pas aflèz la
civette pour favoir en quelle occafion elle
jette fou huile , quel ufage elle en fait j mais
enfin on voit bien que le méchaniline eft
deftiné à empêcher l'écoulement perpétuel.
Les pelotons foyeux font l'office d'une
éponge , qui garde la liqueur dont elle eft
abreuvée , jufqu'à ce que la nature l'exprime
en certain temps pour des ufages qui nous
font inconnus.
Cette liqueur odorante mirée à la lumière
d'une bougie , rend d'abord une odeur aflez
agréable ^ enfuite elle s'enflamme avec cré-
pitation , & le feu étant éteint , elle donne
une odeur de cheveux brûlés.
Tout ce qu'on a dit jufqu'ici de l'anatoitiic
de la c/rtv/x.', & du ikc qui porte fon parfum^
peut devenir d'autant plus iutéreftant , que la
civette n eft pas le feul animal à qui ces détails
appartiennent , ni le feul qui foit doué d'une
poche pour un parfum particulier. Nous
avons le caftor , le mufc , le rat mu{qué que
les Latins nomment pylo ris , & d'autres qui
ont des follicules pour une matière odorante ,
d'une nature pareille à celle de la civette, ou
d'une qualité différente , comme le rat do-
rneftique , le blaireau ou taiflbn , &c. Or
ces connoiflhnces réunies , ne peuvent que
jeter du jour fur l'anatoraie cornparée , ôc
peut-être fur la ftruôure des glandes con-
glomérées du corps humain. ( M. le chevalier
DE J AU COURT. )
Addition faite par M. Adanson à t ar-
ticle que ton vient de lire.
La civette a été confondue jufqu'ici avec
le zibet par tous les naturaliftes , au point
que M. Linné le défigne encore dans fou
SyJierTia naturœ , édition il, imprimé en
1766 , page 65 , fous le nom commun de
viverra 5 ybetha , caudâ annulatâ , dorfo ci-
nereo nigroque undatim variegato. Mais quoi-
que CCS deux animaux donnent également
ce parfum odoriférant , il y a entre eux des
différences affez grandes pour les faire regar-
der comme deux efpeces diftindes. 1°. La
civette ne fè trouve qu'en Afrique , & plus
communément en Ethiopie & au Sénégal ,
où on l'appelle kankcn ; au lieu qi'c le zibet
eft particulier à l'Afîe , où les Arabes l'ap-
pellent [ebed ou [ebet , d'où s'eft formé le
nom de [ibet. 2**. Elle a le corps plus court
ou plus épais à proportion , le poil plus long ,
plus rude fur le dos , où il s'étend & fè re-
dreffe comme une crinière , & fur la queue
qui approche afîèz de celle d'un renard ou
plutôt d'un épagneul , ou d'un chat angora ,
pendant que le zibet a ces poils plus courts ,
plus doux , plus égaux en longueur. 3°. Sa
queue égale à peine la longueur de fon dos
jufqu'aux épaules , au lieu que celle du zibot
eft un peu plus longue. 4°. Ses oreilles font
plus petites , exa(^ement arrondies en demi-
cercle , celles du zibet étant en pointe & pref^
qu'une fois plus longues que larges. 5°. Les
taches noires font plus grandes & moins
nombreufes dans la civette ; la queue n'eft
pas fènfîblement annelée , fa face a une
grande tache noire dont les bords eiicoa^
Bb2
I5)<5 CIV
leiit les yeux '^ fan ccu a une grande tache
noire en cravate, ^z fcs pattes font toutes
noires. Dans le zibeî , au contraire , les pat-
tes , au moins celles de devant , font mou-
clietc'es de noir j la queue eft unie & anne-
Ice de fix à fspt taches noires , comme celle
de la gcnette , mais à bout blanc '^ le cou
moucheté de noir , & les joues noires feu-
lement vers le deiîbus du m.enton.
Remarque. Nous remarquerons ki , avec
M. de Buiîbn , ( hijioire naturelle , édition
in-ii de 1769 , volume VIII^ page 344) ,
combien la tombinaifon des caraéleres &
des rapports de la civette a coûté à M. Lin-
né , &: combien ce naturaliile a été embar-
rafic pour placer cet animal dans ùi méthode^
qu'il appelle Syjlême naturel , puiiqu'il a
varié à (o\\ fiijet à chaque édition de cet
ouvrage ^ car , i ^. du genre du blaireau ,
mêles ^ où étoit la civette , dans !« quatrième
& la fixieme édition , elle a paiîe dans
ealui des furets viverra. D'abord elle étoit
feule avec le blaireau dans l'édition qtiatrie-
ine ^ enfuite elle, fut réunie avec le blaireau
& l'ichneumon dans la fixieme édition ^
dans la dixième édition elle fut féparée du
blaireau & réunie avec l'ichneumon , la
mouffette , fe putois rayé & la geiiette i en-
fin dans, la douzième & dernière édition ,
publiée en ij66y pag. 6$ , elle fe trouve réu-
nie , non feulement avec ces quatre derniers
animaux , mais encore avec les coati. 2°. Le
blaireau qui étoit fsul de fou genre avec
la civetti , édition quatrième , & avec l'ich-
ceumon , & la civette , édition fîxieme , fè
trouve éditions dix & douze avec l'ours ,
l'ours blanc de Groenland , le louveteau de
la baie d'Hudfon , & le raton ou racoon
d'Amérique. 3'', L'auteur a changé l'accep-
tion reçue du m.ot viverra , dont il fait un
nom générique pour cinq animaux ,. parmi
lefquels. on croiroit devoir trouver au moins
le vrai viverra y c'eft-a-dire , le furet , qui
se s'y trouve pas , & qu'il faut aller cher-
cher dans le genre des belettes , au n^. 8 ,
■page 4B j fous le nom de furo. Nous ne ci-
tons , avec M. de Buffon , ces difparates de
nom.enclature & ces affociations bizarres d'a-
nimaux , que pour faire fentir combien ces
-prétendus genres font peu fixes ,. & auiïi ar-
bitraires que les méthodes qui leur fervent
4ç,fQ»de,meflt..
C I V
En rafîbmblaiit fans préjugés , Hins pré-
vention pour aucun lyRêir^e , tous les carac-
tères qui fe remarquent dans la civette &
le zibct , on voit d'abord qu'ils ne peuvent
être ailociés avec les animaux qui n'ont pas
de poche à m.ufc , ni la queue longue , ni
les cinq doigts à la même hauteur , tels que
le fiiret , la fouine , la belette , le putois ,
rhermine , la martre ; & que parmi ceux qui
ont comme eux le pouce à la m^ême hau-
teur que les quatre autres doigts , il n'y a qiie
le blaireau , le coati & l'ours qiii aient quel-
ques rapports , mais la queue de ces animaux
eil plus courte , ils n'ont point de poche à
mufc. La genette du Sénégal ou la foifane
de Madagafcar, eft le feulquadnipede connu
jufqu'ici qui , ayant la queue longue , ait en
même temps une poche à mule , près des-
parties génitales, & par conféqucnt desrajv
ports intimes avec la civette ; mais cet ani-
mal en diffère , en ce qu'il a le pouce de
fes jambes placé un peu plus haut que les
quatre autres doigts. La civette forme donc
un genre particulier d'animal , voifin de la
genette ou de la foifane, dans la famille que
j'appellerai hi famille des lions ou des chats.
Civette , {Mat. méd.) La civette , Qu.
cette matière ondueufe & balfàmique four-
nie par l'animal qui porte le même non;! ,
eft employée extérieurement dans l'ufage
médicinal j elle eft réfolutive , anodyne ,
tonique , anti-lpafmodique ou nervine , &
particulièrement anti-épileptique & anti-hyf-
térique ^ c'eft à ces deux derniers titres qu'on
l'emploie quelquefois dans les accès d'épi-
lepfie ou de vapeurs hyftériques. Dans ces
cas on en frotte le nombril , la région du
cœur & de l'eftornac , ou on en applique
même chez les femmes à l'orifice extérieur
de la matrice ^ mais on fè donne bien de
garde de la leur porter au nez, parce que
Ion odeur , comme toutes les odeurs agréa^
hles , eft dangereufe dans ce cas , félon unç
obfervation connue;
On fait aufîî avec la civette , le muf
& l'ambre-gris incorporés avec une huilt
par expreftlon , un onguent dont on frott»
les aines & les lombes pour exciter l'aél^
vénérien. *
La civett£ palTe pour ipécifique dans l'i-
nertie des organes de la génération , fur-tout
. chfii les fenuEfis j &poiir remédier à leur
CI V
ftérilité lorfqu'elle provient de cette caufè.
Oii la dit bonne aufli pour appaifer les coli-
ques & les tranchées des petits enfans , fi on
leur en frotte le nombril.
Elle entre dans la compofition de quelques
baumes aromatiques , décrits dans difFérens
dilpeniàires fous \cnomde5aames apop/ecli-
gucs, qui font deftinés à être portés dans de
petites boîtes , & dont quelques auteurs ont
recommandé même l'ufage intérieur.
Elle efl: un des ing^rédiens des parfums or-
dinaires , connus en pharmacie fous le nom
de paftilli profumo , comme \ts oifelets de
Chypre , &c. (b)
Ceux qui s'en fervent , doivent la choifir
nouvelle , de bonne confiftance , c'eft-à-
dire ni trop dure , ni trop molle , d'une cou-
leur jaune tirant fur le blanc , & d'une
odeur violente. Au refte comme on la fo-
phiftique aifément , & qu'il eft très-difficile
de découvrir la tromperie , le meilleur parti
efl de l'acheter de bonne main. Comme on
nourrit à Amflerdam des civettes pour ce
commerce , & que la civette de cette ville a
la préférence fur celle des Indes & du Le-
vant , c'eft d'un honnête négociant du pays
qu'il faut tirer ce parfum. Il fè vend une
trentaine de florins l'once , plus ou moins ,
c'eft-à-dire foixante à foixante-fîx livres ar-
gent de France ^ & je crois qu'aujourd'hui
il ne s'en confomme pas cinq livres par an
dans tout le royaume. ( M. le chevalier de
J AU COURT. )
CIVIDAL-DI-FRIULI, ( Géogr. ) petite
ville d'Italie au Frioul , dans l'état de Venifè ,
iùr la Natifone. Long. 3 1 ^ lat. 46 , 15.
♦ CIVIERE , f. f. (Econ. rujl. ) machine
à porter des fardeaux. Imaginez deux forts
morceatix de bois larges , droits , & équarris
dans le milieu , recourbés un peu en S vers
les extrémités , arrondis par les bouts , &
affetnblés par quatre , cinq , fîx , ou même
davantage , bâtons ronds ou quarrés , & re-
çus d'un bout dans des trous percés à égale
diflance à la partie équarrie & large d'un des
forts morceaux de bois qu'on appelle un des
kras , & de ]^utre bout dans d'autres trous
percés de la même manière à l'autre bras :, en-
forte que CCS bâtons & les bras fbient paral-
lèles entre eux, & que les bras foiciît éloignés
de manière qu'un homme puifib fepîacer en-
tre euxj. foit à l'un des bouts j foit à l'ouîre.
CI V 197
' CIVIL , (■ Jurifp. ) ce terme a différentes
fîgnifications : il eft ordinairement joint à
quelque autre.
Par exemple , on àitfocie'té civile. V. au
mot Société.
On a d'abord appelle droit civil , le droit
particulier de chaque nation ou ville , quafijus^
proprium ipjius civitatis , pour le diÎHnguer
du droit naturel & du droit des gens. C'eft
pourquoi Juftinien nous dit en ïes injî. tit»
^J 5 §• 2. 5 que les loix de Solon & de Dracon
font le droit civil des Atl>éniens \ & que les
loix particulières obfervées par le peuple ro-
main , form.ent le droit civil rom.ain : mais
que quand on parle du droit civil fîmple-
mcnt , on entend le droit romain par excel-
lence.
•On appelle corps civil , une compilation
des loix romaines , que Tribonien compofh
par ordre de Juftinien , qih comprend le
digefle , le code , & les inflitutes.
On dit aulTî dans le même fèns , \ç.s loi.v
civiles.
Le terme civil efl quelquefois oppofé à
canon ou canonique : ainfi l'on dit le droit
civil ou le droit civil romain , par oppofltioiL
au droit canon ou canonique romain.
Le droit ^/v/V fè dit aufïï quelquefois par
oppolîtion au droit coutumier y auquel cas
il lignine également le droit romain on droit
écrit.
Civil cfl encore oppofe à criminel ; c'eft
en ce fens que l'on dit , im juge civil , uiy
lieutenant civil , un greffier civil , le greffe c%
vil ^\q parc civil ^ la chambre civile^ \ audience
civile , une requête civile , prendre la voie
civile.
Jouir des effets civils , c'eft avoir les droits
de cité 5 & encourir la mort civile , c'cfî
perdre ces mêmes droits.
En matière criminelle^ on ^q fert quelque-
fois du terme civil : on dit , par exemple ,
une partie civile , des cànclujions civiles .y Aq^
intérêts civils . renvoyer les parties kfins ci-
viles. Voye^t article Droit CIVIL , & les
autres termes que l'on vient de rapporter y,
chacun a fa lettre. {A\
CIVILISER, (Tunfprud.) En termes de
palais , civilifer une affaire , iignifîe recevoir
un accu fé en procès ordinaire -, ou rendre civil
un procès qui^'inftruifoit aiiparavaiit comme
. criiiîineL
15'^ c r V
V ordonnance de 1670 , titre rx , de h con-
ver/ion des procès civils en procès crimineh^
(f de la réception en procès ordinaire^ dit que
s'il paroît avant la confrontation des té-
moins que l'affaire ne doit pas être pour-
fliivie criminellement , les juges recevront
Iqs parties en procès ordinaire ^ que pour
cet effet ils ordonneront que les informa-
tions feront converties en enquêtes , & per-
mettront à l'accufé d'en faire de fa part dans
les formes prefcrites pour les enquêtes -, qu'a-
près la confrontation des témoins , l'accufé
ne pourra plus être reçu en procès ordi-
naire , mais qu'il fera prononcé définitive-
ment fur fon abfolution ou fur fa condamna-
tion ^ enfin que quoique les parties aient été
reçues en procès ordinaire , la voie extraor-
dinaire fera permiiè , fi la matière y eft dif-
pofée.
Ainfi civilifer une affaire ou procès ; ren-
voyer les parties à fins civiles , ou les rece-
voir en procès ordinaire , eft la même chofe.
Lorfque les charges paroiffant légères , on
renvoie quelquefois les parties à l'audience ;,
mais l'affaire n'eft pas pour cela civilifée ,
les informations demeurent toujours pièces
fecretes. V. Fins civiles , Procès ordi-
KAIRE. ( ^ )
CIVILITÉ , POLITESSE , AFFABILI-
TE jfynonymes^ ( Gramm. & Morale.) ma-
nières honnêtes d'agir &c de converfer avec
lès autres hommes dans la fociété^ mais V af-
fabilité qui coufifte dans cette infinuation de
bienveillance avec laquelle un fupérieur re-
çoit fon inférieur , fe dit rarement d'égal à
égal , & jamais d'inférieur à fupérieur. Elle
n'eft fouvent dans les grands qu'une vertu
artificieufè qui fert à leurs projets d'ambi-
tion,une baifefîé d'amequi cherche à (è faire
à&s créatures ( car c'eft un figne de baffeffe. )
J'ignore pourquoi le mot affabilité wq plaifoit
Eas à M. Patru ^ ce iercJit dommage de le
annir de notre langue , puifqu'ileft unique
pour exprimer ce qu'on ne peut dire autre-
ment que par périphralè.
La civilité & \3,politejfc font une certaine
bienféance dans les manières & dans les
paroles , tendantes à plaire & à marquer les
égards qu'on a les uns pour les autres.
Sans émaner nécelTaircment du cœur ,
elles en donnent les apparences , &: font pa-
roître l'homiîîe au-dehors comme il devroit
C I V
être intérieurement. C'eft . dit la Br-i^'cr'î ,
une certaine attention à faire que par nos
paroles &: nos manières ks autres foient cou-
tens de nous.
La civilité ne dit pas autant que- la po-
litejfe , & elle n'en fait qu'une portion ;
c'eft une efpece de crainte , en y manquant ,
d'être regardé comme un homme grofiler ^
c'eft un pas pour être eftimé poli. C'eft pour-
quoi hpoliteje femble , dans Tufage de ce
terme , rélêrvée aux gens de la cour & de
qualité '■, & la civilité, aux perfonnes d'une
condition inférieure, au plus grand nombre
de citoyens.
J'ai lu des livres fur la civilité, fî char-
gés de maximes & de préceptes pour en
remplir les devoirs , qu'ils m'auroient fait
préférer la rudeffe & la grofîîéreté à la pra-
tique de cette civilité importune dont ils font
tant d'éloges. Qui ne penferoit comme
Montagne ? « J'aime bien , dit cet auteur
( ej/àis , liv. I , cA. xiij , ) à enfuivre les
loix de la civilité , mais non pas fi couarde-
ment, que ma vie en demeure contrainte.
Elles ont quelques formes pénibles , lefquel-
les , pourni qu'on oublie pardifcrétion,non
par erreur , on n'en a pas moins de gracc^
J'ai vu fouvent des hommes incivils par trop
de civilité, & importuns de courtoific. C'eft
au demeurant une très-utile fcience que la
fcience de l'entregent. Elle eft comme la
grâce &la beauté conciliatrice des premiers
abords de la fociété & familiarité , & par
conféquent nous ouvre la porte à nous inf-
truire par les exemples d'autrui , & à ex-
ploiter & produire notre exemple , s'il a
quelque chofè d'inftruifànt & commimica-
ble. »
Mais la civilité cérémonieufè eft égale-
ment fatigante & inutile ', aufil eft-elle hors
d'ufàge parmi les gens du monde. Ceux de
la cour , accablés d'affaires , ont élevé flir
iks ruines un édifice qu'on nomme la poli-
tejje , qui fait à préfent la bafè , la morale
de la belle éducation , & qui mérite par con-
féquent un article à part. Nous nous contente-
rons feulement de dire ici , quelle a'eft d'or-
dinaire que l'art de fb palïèr des vertus qu'elle
imite.
La civilité , prife dans le fèns qa'on doit
lui donner, a un prix réel ', regardée comme
un empreffemcnt de porter du refpcâ: & des
C ï V
égards aux autres , par uîî fcntiment inté-
rieur conforme à la- raifon , c eft une prati-
que de droit naturel , d'autant plus louable
qu'elle eft libre & bien fondée.
Quelques légiflateurs inénie ont voulu
que les manières repréfèntaiîent les mœurs,
éi en ont fait un article de leurs loix civiles.
Il eil vrai que Lycurgue en formant les
manières , n'a point eu la civilité jîour ob-
jet^ mais c'eft que des gens toujours ccrri-
geans ou toujours corrigés , comme dit M.
de Montefquieu , également fimples & ri-
gides , n'avoient pas befoin de dehors : ils
exerçoient plutôt entr'eux des vertus , qu'ils
n'avoient des égards. ' »
Les Chinois , qui ont fait des rits de tout
& des plus petites actions de la vie , qui
ont formé leur empire fur l'idée du gouver-
nement d'une famille , ont voulu que les
hommes fèntillent qu'ils dépendoient les uns
des autres , & en conféquence leurs légif-
lateurs ont donné aux règles de la civilité hi
plus grande étendue. On peut lire là-delTus
le père Duhalde.
Ain fi pour finir cet article par la réflexion
de l'auteur de l'efprit des loix. « On voit
à la Chine les gens de village obfèrver en-
tr'eux des cérémonies com.me Aes gens d'une
condition relevée ; moyens très-propres à
maintenir parmi le peuple la paix & le bon
ordre , & à ôter tous les vices qui viennent
d'un efprit dur , vain , & orgueilleux. Ces
règles de la civilité valent bien mieux que
celles de l^politejje. Celle-ci flatte les vices
à&s autres , & la civilité nous empêche de
mettre les nôtres au jour : c'eft une barrière
que les hommes mettent entr'eux pour s'em-
pêcher de fc corrompre. ( M. le chevalier
DE J AU COURT. )
CIVIQUE , adj, ( HiJI. anc. ) épithete
qu'on donnoit à une efpece de couronne qui ,
fc faifoit de feuilles de chêne, & que les
Romains accordoient autrefois à ceux qui
avoient fauve la vie dans une bataille ou
dans un affaut à quelqu'un de leurs conci-
toyens. Voyei Couronne.
La couronne civique étoit fort eftimée ,
& elle fut mêîTie accordée comme un hon-
nerr à /ugufte, qui fit battre à cette oc-
cafion des moniicijs avec cette deviè, cb
cives fervatos. Elle fut aufli accordée à Ci-
céroii 3 après qu'il eut découvert la conjura-
CIV 15^5)
tien de Catilina. Dicl. de Tiév. & Chatn-
bers, (G)
CIVITA CASTELLANA, rC/o^^/-.;
ville d'Italie dans l'état de l'églifè dans la
Sabine , lùr la Triglia.
CIVITA DELLA PIEVE, {Géogr.)
ville d'Italie de l'état de l'églilè , dans lo
Peru£"in , fur la Trefà.
CÎVrrA DI CASCIA , r Géogr.) petite
ville d'Italie , dans l'état de l'églifè , en
Ombrie , près des frontières de l'Abruzze.
CIVITA DI PENNA, {Géogr.) ville
d'Italie au royaum.e de Naples , dans l'A-
bruzze ultérieure , près de Salino. Long, 31,
38; lût. 42 , 25.
CIVITA DI S. ANGELO . ( Géogr. ) pe-
tite ville du royaume de Naples , dans l'A-
bruzze ultérieure.
CIVITA DUCALE , ( Géogr. ) ville d'I-
talie au royaume de Naples , dans l'A-
bruzze ultérieure , près du Velino.
CIVITA LAVINIA , {Géogr.) petite
ville d'Italie de l'état de l'églilè , dans la
campagne de Rome.
CIVITA NUOVA , (Géogr.) petite
ville d'Italie dans la Marche-d'Ancone ,
près du golfe Adriatique.
^ CIVITA REALE , ( Géog. ) petite ville
d'Italie au royaume de Naples , dans l'Abnizze
ultérieure , près des fburces du Tronto.
CIVITA-TURCHINO, (Antiq. d'Ita-
lie ) eft une montagne de forme oblongue ,
à trois milles au nord de Carneto. Le fom-
met s'étend comme une feule plaine con-
tinuée. Quantité de médailles , de ftatues &c
d'infcriptions , qu'on y a trouvées en difle-
rens temps , ont fait conjecturer que c'étoit
dans cet endroit qu'avoit été autrefois la ville
puiiîante & célèbre , à laquelle les Tarquins
donnèrent leur nom. Aujourd'hui ce n'cft
plus qu'une plaine labourée. Vers le iud-eft
s'élève une autre montagne au niveau de Ci-
vita-Turchirio , qui l'unit à Corneto : le foin-
met en eft également plat , & forme une
étendue de rois à quatre milles de longueur.
Il eft couvert de plufieurs centaines de pe-
tites élévations faites de main d'hommes ;
les habitans les appellent en leur langue
Monti-Roti. On en a ouvert environ une
douzaine à différentes reprifes ^ & on a trouvé
dans chacune des ajîpartemens fbuterrains ,
taillés daDs le roc vif. Ces appaitemciis va-
lôo C L A
rioentpour la forme & les dimeiifîons. Tan-
tôt c'étoit une grande chambre d'entrée , au
bout de laquelle on trouvait un très-petit
cabinet ;, tantôt la première pièce n étoit
qu'une eipece cic veitibule , d'où l'on en-
troit dans une féconde beaucoup plus grande.
Quelquefois le fouterrain ne conlîftoit que
dans une ièiile pièce foutenue par une co-
lonne > autour de laquelle on tournoit par
une ouverture de vingt à trente pies. Quanr
à l'entrée de ces fouterrains , c'étoit toujours
une porte de cinq pies de hauteur , fur deux
pics & demi de largeur. Quelques-uns ne
reçoivent de jour que par l'entrée : d'autres
en reçoivent encore de la voûte par une
petite ouverture conique ou pyramidale :
plufieurs ont une efpece d'amphithéâtre , ou
petit parapet qui règne tout autour de la
muraille , & qui eft une partie du rocher
ainfi taillé. Quant aux antiquités qu'on y
trouve , ce font pour la plupart des vafes de
différenîîes formes : on en a trouvé quelques-
uns dans des cercueils avec des ofîémens de
morts : du refte , les appartemens fouter-
rains font plus ou moins ornés de peintures
& d'infcriptions. Il y en a trois fur-tout dont
la partie fupérieurc des murs , eft chargée
tout autour d'un double rang d'infcriptions
étrulques , avec des peintures au delfous ,
ik plus bas une forte d'ornement qui tient
lieu d'architrave. On n'y a point encore dé-
couvert de bas-reliefs. Les peintures font à
frefque , & la m.aniere eft à-peu- près celle
qu'on remarque communément fur les va-
fes étrufques , quoique certains morceaux
femiblent de beaucoup fupérieurs à tout ce
qu'on a vu jufques-ici de la peinture étruf-
que. Le deftin en général eft léger , mais
bien conçu , & prope à montrer que l'ar-
tifte étoit capable de donner des ouvrages
plus finis. Il jugeoit fans doute que plus de
délicatefle feroit en pure perte dans un lieu
fouterrain fi peu éclairé. On fait que chez
les Romains , dans l'âge de leur gloire , les
artiftes employés à ces fortes d'onvrages fu-
néraires , dejftinés à refter enfevelis dans
l'obfcurité d'un tombeau , fe contentoient
d'exprimer fortement leur penfée dans une
ébauche légère , fans fe donner la peine d'y
mettre la dernière main. Si l'on ouvroit les
fouterrains fans nombre qu'il y a depuis Ci-
vUa-Turckino. jufqu'à Corneto , il eft vrai-
C L A
femblable qu'on y trouveroit une très-grande
variété de monumens , peintures , infcrip-
tions & autres , dont on pourroit compofer
un ouvrage auiîî amufant qu'utile , qui ne
fauroit manquer d être bien reçu des îavans
& du m.onde curieux. Il répandroit beau-
coup de jour fur l'antiquité , les arts & l'hif-
toire d'une nation trop peu connue aujour-
d'hui. Il eft peut-être étonnant que ce vafte
tréfor d'antiquités foitpreique ignoré, même
à RomiC. M. Jankins , à qui l'on doit ces dé-
tails abrégés , eft le premier & le feul Anglois
qui ait eu la curiofité de l'aller voir. Tran-
facîions philofopkiques de lafocieté de Lon-
CIVITA-VECCHIA , ( G^ogr. ) petite
ville forte d'Italie dans l'état de l'églilè , fur
le bord de la mer. Long. 29 , 25 ^ lat. 42 , 5.
Il y a encore une ville de ce nom dans
l'île de Malte , que les habitans nomment
Medine.
CIVR AY, ( Gébgr. ) petite ville de France
en Poitou.
CL
CLABAUD, [Vénerie,) voy^^ Chien.
CLACKMANNAN, [Géogr, mod.)\\\\c^
d'Ecofte , capitale de la province de même
nom. Long. 54 ^ lat. 57.
CLADOTERIES, {Myth.){ètQs ainfi
nommées du mot grec KhâS'of , rameau. On
les célébroit dans le tem.ps où la vigne ic
taille. Voye^ Vantiq. expliq.
CLAGENFURT, [Géogr. mod.^v'AXo,
forte d'Allemagne , capitale de la Carinthie.
Long. 31,455 l^t' 4^ j 50-
* CLAIE, f. f. ( Vannier. ) eft un tiffu
de plufieurs bâtons menus & parallèles , phis
ou moins efpacés , & fixés par une chaîne
d'ofier , & d'autres bâtons menus & flexi-
bles. Cet ouvrage de mandrerie plat , eft
d'ufage dans le jardinage pour pafler les
terres. On jette les terres deftlis ;, la bonne
terre tombe d'un côté , en paftant à travers j
les pierres font rejetées de l'autre côté. Les
mailles de cette claie ont un pouce ou environ.
On donne le même nom à une échelle
qu'on attache au derrière d'une charrette , &
fur laquelle on traîne par les rues ceux qui
fe font défaits , ou qui ont été tués en duel.
Claie , terme de fortification. Ce font des
ouvrages faits avec des branches d'arbre ,
étroitement
C L A
étroitement entreiacées les mies avec les au-
tres , pour pafFer un fofîë qui vient d'être
faignéy en les jetant fur la boue qui refte au
fond , pour en affermir le paffage ^ & auflî
pour couvrir un logement , & alors on les
charge de terre , pour fe garantir des feux
d'artifice , & des pierres que l'ennemi pour-
roit j eter deifus.
On donne aufli le nom de claie à ce qui
fert aux bergers pour enfermer leurs trou-
peaux quand ils parquent. Chambtrs. CÇ)
Claie ^{Ptche) bouraque ypannier ^ najfe ^
& cajfier , termes fynoaymes de pêche. Voy.
Nasse.
Claie , e/z urme <£ Orfèvre , font de pe-
tites chambrettes féparées l'une de l'autre ,
prefque comme \zs alvéoles des ruches d'a-
beilles. On en met dans tous les lieux où
les orfèvres travaillent , pour recevoir Jes
paillettes d'or ou d'argent qui fè détachent
■en forgeant, àz^ limailles & autres déchets.
Elles font compofées de tringles de. bois qui
ic croifent quarrément. Chaque partie eft
entaillée à ini-épaiifeur , & reçoit l'autre :
ce qui rend toutes les tringles de niveau ,
& forme de petits quarrés dont le vuide
peut avoir à-peu-près dix-huit lignes fur
chaque pan. La tringle a environ un pouce
■d'équarrilfage , & eft ébifelée fous chaque
pan des viiides , pour laiiiër moins de fur-
face. L'ufàge des claies étant de recevoir les
parties d'or ou d'argent qui tombent \ moins
leurs bords ont de fiirface en bois , moins
\qs pies emportent d'ordures & font de
déchet.
CLAIN , f. m. ( Jurifprud, ) que l'on dit
auflî clame ou clameur , a différentes fîgnifi-
cations.
Quelquefois clain eft pris pour ajourne-
ment ou demande , comme dans la coutume
d'Anjou , art. 6<) , 70 ; Maine , art. 80 ;
Bourbonnais , art., 1 59.
Clain , en d'autres endroits , eft pris pour
^amende du4 par celui qui fuccombe. f^oye^
l'ancienne coutume de Bourges , tit. ij , art.
ti & 22. C'eft aufll dans certaines coutu-
mes l'amende due pour les bêtes prifes en
délit. Nivernais , tit. xv , art. 13.
Clain & arrêt , eft la fàifîe. Voye\ la
fomme rurale,
Clain de cerquemenage , eft la demande
formée pour l'infraftiondes bornes 8climites.
Tome VIII,
Coià.. de Cambrai , tit,
Jour-
C L A lOT
Clain de dégagement , eft la faifie & arrêt
que les domeftiques & ouvriers font pour
leurs gages & falaires fiir les meubles du
débiteur , que la juftice fait enlever , pour
le prix en provenant être employé au paie-
ment des créanciers.
XXV , art. 4,5 & 6 , & Pinaiilt des
neaux , fur ces articles.
Clain de rétabli ffement-^ eft l'aâiion ea
réintégrandc.
Clain de fimple faifine , eft l'aôion ea
complainte. ( ^ )
Clain ; ( Géog. mod. ) petite rivière de
France en Poitou , qui fe jette dans la Vienne.
CLAION , f. m. ( Vannerie. ) eft un pe-
tit tilfu de gros bâtons & de menus bâtons
d'ofier , qui fc fait comme la claie. Voye[
Claie.
Il eft à Tufàge de pâtiflicrs ; ils s'en fer*
vent pour tranfporter leurs ouvrages.
Claion , ( Confifeur. ) Les confifcurs ap-
pellent ainfi un rond de fîl-d'archal q{\
treillis , aflez ferré , fur lequel ils pofèut
particulièrement ce qu'on tire au fec , en
travaillant le fucre pour le glacer.
ClaiONNAGE , f. m, ( Maçonn. & Jard. )
eft un aftèmblage de fafcines , de fagots,
de branches de faules arrangées entre deux
piles de pieux , ou formant des lits de fix
pies de large entremêlés de lits de terre.
C'eft un travail très-nécelTaire dans \&s
terres humides ou trop mouvantes , pour
aftérmir les talus de gazon , qui fans cette
précaution s'ébouleroient par le pié. Quand
ce font des talus un peu roides , après avoir
mis de la terre un pié de haut , en commen-
çant par le bas , il faut mettre un lit de faf-
cines ou de claionnagesydeCix pies de large,
rangés l'un contre l'autre , & faire enforte
que le gros bout & la racine regarde la face
du talus , & vienne aboutir à un pié près
du revêtillèmieut. On mettra enfuite un lit
de terre par-delfus , & on continuera de mê-
me jufqu'en haut. On afîîed le gazon deftiis
ce claionnage , jcn le couvrant auparavant
d'un demi-pié de terre. Voyei^ Gazon. ( K)
* CLAIR, {PAy/iq.) adjeaif relatif à
la quantité des rayons de lumière qu'un corps
réfléchit vers nos yeux , & quelquefois à la
quantité de parties folides qu'il contient.
Ainfi on dit, des couleurs claires , une
eau claire , un verre clair , une étoj^e claire^
C c
îoi C L A
Une cîOiTb cir d'autant plus claire qu'elle
contient moins de parties folides , & qu'elle
eft percée d'un plus grand nombre de jours.
Un verre , mie eau font d'autant plus clairs ,
qu'ils permettent un pafi'age plus libre aux
rayons de la lumière , & que par conféquent
ils en renvoient moins à nos yeux. Une cou-
leur eft d'autant plus claire , que fà teinte
eft plus foible, plus voiline du blanc , & que
par conréquent la quantité de rayons réflé-
chis eft plus grande* Kojfç Blancheur.
Clair , Ba y-clair , ( MaréchalUrie
& Manège. ) nuance de poil bay. J^oy. Bay.
Clair , en peinture , fe dit des parties les
plus éclairées d'un tableau ^ elles s'appellent
le clair .^ oupourparler plus pittorefquc ment,
ies parties lumineufes ou éclairées, { R)
CLAIRAN , f. m. ( Mareck. ) efpece de
fc)nnette de fer-blanc ou de laiton qu'on
pend au cou des chevaux qui font en pâture ,
pour pouvoir entendre où ils font quand ils
s'égarent dans les forêts.
CLAÏRANGUE , f. f. GRATTE , ou
VERVEUX EMMANCHÉ , {Pêche. ) eit
un inftrument dont on fe fèrt pour la pêche.
On le peut rapporter à l'efpece des bouteux ,
quoique par ià figure il lëmble appartenir à
l'efpece des verveux. La pêche de la clairan-
gue fe pratique à Vayres , dans le reflbrt de
ï'ainirauté de Bordeaux.
Les pêcheurs de ce lieu repréfènterent que
dans le temps de la pêche , les payiàns , les
tonneliers , les charpentiers , les vignerons
& les métayers qui font bordiers de ces côtes ,
venoient dans de petites plates qu'ils nom-
moient gaharots, faire la pêche ^ & que plu-
fîeurs d'entr'eux qui la pratiquoient à pié ,
fe lervoient d'un inftrument qu'ils appel-
loieiit clairangue ou gratte , efpece de petit
verveux -emmanché d'un pieu ou petite per-
che longue de dix à douze pies au moins,
dont le fac étoit fait de mailles aulîi ferrées
que celles des rets, des avenets à efquires de
baccalant de -Bordeaux , ou àes plus petites
trulotes à pêcher les chevrettes : ils ajoutè-
rent qu'avec cet inftrument ils pêchoient
auftî le frai & les poiftbns du premier âge ,
cnforte qu'ils en dépeupfoient la Dordogne.
* CLAIRE , religieufes de fainte Claire
OU Ciarijffe , ( Hifi. eccl. ) elles ont pour fon-
datrice la faînte dont elles portent le nom.
S. François ^l'Aflife donna à feinte Claire
C L A
réglîfê de S. Damien. Les filles qui formolcnt
alors cette communauté n'avoient point
adopté de règle f, S. François ne leur en fit
wne qu'en 1224. Elles avoient déjà des éta-
bliftemens , tant en Efpagne qu'en France :
ces maifons fuivoient l'inftitutde S. Benoît,
& des conftitutions particulières qu'elles
avoient reçues du cardinal Hugolin ^ la rè-
gle de S. François ne fut que pour la maifon
de S. Damien. La vie de ces religieufes étoit
trcs-auftere. Elles fubfiftent aujourd'hui
fous deux noms '., les Damianifles , qui fui-
vent les conftitutions de S. François dans
toute leur rigueur \ & les Vrbanifles , qui
n'ont retenu ces conftitutions qu'avec les
tempéramens qu'y a apportés Urbain IV^
Claire, f f. {Chym. & Docim.) on
appelle ainfi la cendre d'os calcinés , lefTi-
vée , féchée & réduite en poudre impalpa-
ble fur le porphyre , dont on enduit la fur-
face interne des coupelles , non feulement
pour en remplir les inégalités, mais encore,
pour former fur cette fùrface un^ efpece de
crible à travers lequel le plomb & les autres
métaux vitrifiés paffent trcs-aifément, tan-
dis que l'or & l'argent , ou tout autre mé-
tal qui a encore fa forme métallique , y font
an-êtés. La claire a encore un autre avanta-
ge , c'eft que ï\ elle eft bien appliquée , elle,
empêche tous les accidens qui pourroient
arriver aux coupelles dans lefquelles il fe
trouveroit du fable ou d'autres matières vi-
trefcibles -^ ce qui eft fort ordinaire , fur-tout
il on s'eft fervi de cendres de bois pour les
former. On voit parla de quelle conféquence
il eft de préparer avec toute Tattenticn
pofîible les cendres dont on doit faire la
claire, yoyei fart. CendRÉE.
On fait calciner les os ou arêtes dans un
creufet ou vaifl'eau de terre bien net qu'oie
a foin de couvrir exaftement ^ on donne un
feu très-violent pendant quelques heures ^
on jette enfùite les matières calcinées dans
de l'eau pour les lefTivcr ou en tiier ha fels y.
& on les réduit en poudre impalpable. On
remet fur cette cendre de nouvelle eau qu'on,
a foin de bien remuer ;, on donne le temps à
la matière la plus groftiere de tomber au fond
de leau : après quoi on décante l'eau qui
fumage , tandis qu'elle eft. encore un peu
trouble. On biffe féjourner cette eau, pen-
dant vingt-quatre heures dans un vailfeavi
C L A
propre & à l'abri de la pouHlere. Au bout
de ce temps , lorfque l'eau eft entièrement
•claire , on la verfe doucement par inclina-
tion \ on laiflè fécher la fécule blanche qui
eft tombée au fond du vailfeau , &: on la
réferve pour l'ufâge.
Avant de s'en Icrvir , on la calcine de
nouveau dans un creufet , & on la puivérife
encore une fois à fec fur le porphyre , obfer-
vant que le porphyre foit alfez dur pour que
les cendres d'os n'en emportent rien. On
prend cette cendre pour en répandre fur la
fiiriace intérieure ou concave des coupelles ,
lorfqu'elles font encore fraîches , & même
avant qu'elles foient retirées du moule \ &
pour qu'elle foit diilribuée par-tout le plus
également qu'il eft poffible , on la met dans
un petit tamis de foie , &: on en faupoudre
la coupelle , ayant foin de n'en faire tom-
ber qu'autant qu'il en faut pour former une
légère couche qu'on achevé de rendre unie
avec le bout du petit doigt , s'il en elè be-
foin , & qu'on comprime d'un coup de mar-
teau frappé fur la partie fupérieure du moule
appelle moint , que l'on a bien eflliyé & fé-
-ché , s^il étoit humàde , de peur que la claire
ne s'y attache ^ & ii les coupelles font gran-
des , & par conféquent faites fans moule ;
on comprimera la claire , en faifant rouler
dans leur cavité une boule d'ivoire ou de
bois pefant. V, Coupelle, (-h)
Claire ( Sainte) , Géog. mod. petite île
de l'Amérique méridionale , dans la mer du ^
fud.
Claire cSainte), G/t>f. mo^. petite île
<l'A£rique , l'une des Canaries.
Claires ow Parcs AUX huîtres, (P<f-
che. ) Voy. HuiTRES.
C L A 203
le c/rz/rf/'pe6loral de Thomas Hoffman , ùc.
Quelques auteurs fubftituent au vin , dans
la compofition des clairets , l'eau-de-vie ou
l'efprit-de-vin , étendu d'une certaine quan-
tité d'eau commune ou de diverfes eaux dif^
tillées. Le clairet fimple de Bauderon , celui
de fÎK graines carminatives de la pharma-
copée de Paris , le clairet cordial de Lemeri ,
&c. font de cette dernière efpece : ceux-ci
ne font proprement que des teintures com^
pofées & édulcorées , ou des ratafias mé-
dicamenteux. VoycT^ Ratafia 6^ Tein-'
TURE. {b)
* CLAIRETS (Les) , HiJI. ecdéf. maifou
de filles religieufes de l'ordre de Cîteaux ,
& de la réforme de la Trappe , fondée par
GeofFroi , troifieme comte de Perche , &
érigée en abbaye en 12,21. Les religieufes
de l'abbaye des Clairets ont pour fupérieurs
immédiats les abbés de la 1 rappe.
* CLAIRE -VOIE , ( Art méch, ) ou
âh fait a claire-voie , de l'elpacement des
folives d'un plancher , des poteaux d'une
cloifon , des chevrons d'un comble , &c.
Claire-soudure , Claire-étoffe ,
voyei Soudure & Etoffe.
CLAIRÉE, f. f. en terme derajfineur^eùi
proprement le fucre clarifié & prêt à être
cuit. F. Cuire , Clarifier & Sucre.
CLAIRET , f. m. {Pharmac.) le nom de
clairet eft donné à certains vins médicamen-
teux , compofés , édulcorés avec un peu de
fucre. V. Vin médicamenteux.
On trouve dans les diiïerens difpenfaires
la préparation d'un grand nombre de ces
clairets deftinés à remplir différentes indica-
tions, tels que le clairet laxatif de Minfycht,
le c/tf/m anti-apopledique du même auteur,
lorfque cet efpacement eft plus large qu'if
n'a coutume de l'être dans les autres ouvra-
ges de la même nature , foit qu'on l'ait pra-
tiqué ainfi par économie , foit à caufe du
peu de charge. On fem.e à claire-voie quand
les filions font fort écartés les uns des autres ,
ou que la quantité de femence qu'on répand
étant peu confidérable relativement à l'ei-
pacc qu'on enfemence , les grains lailibnt
entre eux de grands intervalles vuides.- Les
ouvrages des vanniers font à claire - voie ,
lorfque le tiflli d'ofier laiftTe des intervalles à
jour ^ & il en eft de même des ouvrages des
tiffutiers. «•
CLAIRIER , V. n. terme de Brafferie ;
il défigne l'état Aqs miétiers dont on fait le
levain lorf.ju'ils font couverts de moufle. V,
Brasserie. '
§ CLAIRIERE ou Clariere , ( Econ.
rujl. ) endroit d'un bois qui eft dégarni d'ar-
bres.
Quelques attentions qu'on apporte à bien
faire le fèmis , il fe rencontre toujours des
places vuides , dans lefqueiles le peu d'arbre«
qui y fubfiftent fe montre lauguilîiint. Nous
avons indiqué , dansVarticle BoiS , le moyea
d'y remédier dans les endroits aquatiques.
1 Mais il arrive fouvent qu'on ne fait à quoi
C c 2
2 04 C L A
attribuer les clairières : alors le mieux eft cî y
planter de diftanceen diftaiice , & fans ordre,
des bouleaux , marfàux , ou joncs marins ,
qui, parleur ombre , favoriferont l'accroif-
fement des chênes ou des châtaigniers dont
on aura répandu la /graine.
Un autre moyen eîld en interdire l'entrée
au bétail : car il s'élève dans les clairières ,
d un bois mêmedcfenfable, de jeunes arbres
de fèmence, qui, par la fuite , rempliroient
Je vague j &ces petits arbres encore tendres,
lie font que trop aifément foulés ou broutés
jjar le bétail , qui fait que les clairières fub-
iîftent fàhs pouvoir fe repeupler.
On peut encore obfervcr que les bali-
^^eaux qu'on a laiiTé parvenir à une grojfTeur
iîiffifante pour former de grofles pièces de
charpente , font périr autour d'eux beau-
coup de fouches ^ enforte que ces gros bali-
«eaux étant abattus , il ne refte plus au mi-
lieu d'une grande clairière qu'une grofTe ioM-
che ufée , qui ne peut donner que de très-
foibles produâiions. Confiiltez Xarticle Ba-
J.IVEAU. (4-)
CLAIRIERES , f. f. {Jurifp,)\^xmQ
d'eaux & forêts qui fîgnifie les endroits des
forêts qui font dégarnis de bois , ou dans
lefquels il eft peu touffu. L'ordonnance des
«aux & forêts ordonne le repeuplement des
places vuides ou clairières qui fe trouvent
dans les forêts du roi. {A)
CLAIR-OBSCUR , f. m. {Teinture.) Rien
ne peut donner une idée plus nette du clair-
Qbfcur^ que ce qu'en dit M. de Piles.
En peinture , la connoiffance de la lu-
mière , par rapport à la diftribution qu'on
en doit faire fur \qs objets , eft une des plus
importantes parties & des plus eiTentielles à
cet art. Elle contient deux choies , l'inci-
dence des lumières & des ombres particu-
lières , & l'intelligence des lumières en gé-
néral 5 que l'on appelle ordinairement le
jçlair-obfcur.
Par l'incidence de la lumière , il faut en-
îendre la connoiffance de l'ombre que doit
faire & porter un corps fîtué for un tel plan ,
& expofé à une lumière donnée ^ connoif-
fance qui s'acquiert par celle de la perfpec-
^ive y dont les démonftrations nécefÏÏtent le
peintre à lui obéir. Par l'incidence des lu-
mières l'on entend donc les lumières & les
«œiwes qui appartiemieiit aux objets parti- ;
C L A
cuîicrs ;, & par le mot de clair-obfcur , l'art
de diftribuer avantageufement les lumières
& les ombres qui doivent fe trouver dans un
tableau , tant pour le repos & la fatisfaâ:ion
des yeux , que pour l'effet du tout enlèmble.
L'incidence des lumières , ainfi qu'on l'a
dit , force le peintre à fuivre les loix de la
peripeétive ,au lieu que le clair-obfcur dé-
pend abfblument de l'imagination du pein-
tre;, car celui qui choifit les objets eft maî-
tre de les difjjofer de manière à recevoir les
lumières & les ombres telles qu'il les defire
dans fon tableau , & d'y introduire les acci-
dens & les couleurs dont il pourra tirer de
l'avantage. Enfin comme les lumières & les
ombres particulières font comprifes dans \e%
lumières & les ombres générales , il faut re-
garder le clair-obfcur comme un tout , 8c
l'incidence de la lumière comme une partie
que le clair-obfcur fuppofe.
On défîgne par le mot clair , non feule-
ment ce qui eft expofë fous une lumière di-
reéle , mais aufîi toutes les couleurs qui font
lumineufes de leur nature ^ & par le mot
obfcur ^ non feulement il faut entendre tou-
tes les ombres caufées directement par l'in-
cidence & par la privation de la lumière ,
mais encore toutes les couleurs qui font na-
turellement brunes , enforte que fous l'ex-
polition de la lumière même elles confervent
l'obfcurité ^ & foient capables de groupper
avec les ombres des autres objets. Tels font,
par exemple , un velours chargé , une étoffe
brune , un cheval noir, des armures polies ,
& d'autres chofes femblables , qui confer-
vent leur obfcurité naturelle ou apparente ,
à quelque lumière qu'on les expofe.
\\ faut encore obferver que le clair-obfcur^
qui renfermie & fuppofé l'incidence de la.
lumière & de l'ombre , comme le tout ren-
ferme fa partie , regarde cette même partie
d'une manière qui lui eft particulière , en
ce que le clair-obfcur ajoute à la précifîon de
cette partie , l'art de rendre les objets plus
de relief, plus vrais & plus fenfîbles. Mais
quoique le clair-obfcur comprenne la fcience
de diflribuer toutes les lumières & toutes
\qs ombres , il s'entend plus particulièrement
des grandes lumières & des grandes ombres,
ramaffées avec une induftrie qui en cachée
l'artifice. Trois moyens conduifent à la pra-
tique du clair-obfcur^
C L A
I moyen. La dijiriliution des ohjets,
II moyen. Le corps des couleurs,
III moyen. Les accidens.
Premièrement , la dipribution des objets.
La ciiftribution des objets forme àQ% maffes
de clair-obfcur , lorfque par une incîuftrieufe
économie on les difpofè de manière que ce
qu'ils ont de lumineux fe trouve joint en-
femble d'un côté , & que ce qu'ils ont d'obf-
cur fe trouve lié enfemble d'un autre côté ,
& que cet amas de lumières & d'ombres
empêche la diilipation de notre vuç \ c'eft
ce que le Titien appelle la grappe de raijîn ,
parce que \^% grains de raifin féparés les uns
des autres auroient chacun fa lumière & fon
ombre également ^ & partageant ainfi la vue
en plufieurs rayons , lui cauferoient de la
confiifion : au lieu qu'étant tous ralFemblés
en une grappe , & ne faifant par ce moyen
qu'une mailé de clair & qu'une maflé d'om-
bre , les yeux les embraflent comme un feul
objet. Ce que je dis ici de la grappe de rai-
iîn ne doit pas être pris grofîicrement à la
lettre , ni félon l'arrangement ni iêlon la
forme j c'eft une comparaifon iènfible, qui
ne fignifïe autre chofe que la jonction des
clairs & la jonôion des ombres.
En fécond lieu , le corps des couleurs. La
diftribution des couleurs contribue aux maf-
les des clairs & aux mafTes d'ombres , fans
que la lumière direâey faile autre chofe que
de rendre les objets vifibles : cela dépend
de la fuppofition que fait le peintre , qui eft
libre d'introduire une figiirehabillée debrun ,
qui demeurera obicure malgré la lumière
C L A 105
dont elle peut être frappée , & qui fera
d'autant plus fon effet , qu'elle en cachera
l'artifice. Ce que je dis d'une couleur peut
s'entendre de toutes les autres couleurs , fé-
lon le degré de leur ton , & le befoin qu'en
aura le peintre.
Le troifieme moyen de produire l'efîèt du
clair-obfcur naît des accidens. Leur diftri-
bution peut fervir à l'effet du clair-obfcur ^
ou dans la lumière ou dans les ombres. Il y
a à^i lumières & des ombres accidentelles :
la lumière accidentelle eft celle qui eft
acceflbire au tableau , comme la lumière
de quelque fenêtre , ou d\jn flambeau , ou
de quelqu'autre caufe lumineufe , laquelle
eft pourtant inférieure à la lumière primitive : .
les ombres accidentelles font, par exemple,
celles des nuées dans un payfage , ou de
quelqu'autre caufè que l'on fuppofè hors du
tableau , & qui peut produire des ombres
avantageufcs ^ mais en fuppofant hors du
tableau la caufe de ces ombres volantes ,
pour ainfi parler , il faut prendre garde que
cette caufe fuppofée foit vraiièmblable , &
non pas impoitible. Voye\ le cours de Peint,
de M. de Piles.
On appelle un dejfin de clair-obfcur , un
deflin qui eft lavé d'une ièule couleur , ou
dont les ombres font d'une couleur brune ,
&: les lumières rehauifées de blanc. On
nomme encore ainfi les tableaux qui ne font
que de deux couleurs , comme les freiques
de Polydore qui font à Rome.
Les planches gravées à la manière noire
portent encore le nom générique de clair-
obfcur. (*) {R)
{^) Pour bien comprendre ce qu*on entend par ce terme çompcfé de deux idées qui contraftent ,
il faut obferver que , pour former un tout harmonique , les jours & les ombres, les couleurs clai-
res & les couleurs obfcures doivent mutuellement fe prêter du relief, & fe tempérer. L'erfet du
tout enfemble, & l'harmonie du tableau ne réfultent pas toujours de l'eiafte expreffion de la
lumière & des ombres ; il eft quelquefois befoin , ou d'affoiblir la force des jours par l'obfcurité
Ans couleurs locales , ou d'éclaircir les ombres par la clarté de ces mêmes couleurs.
L'intelligence parfaite du clair-obfcur , qui fait une partie confidérable de l'art du coloris, confifte
donc dans l'habileté .ichoifir les couleurs locales^ciaires ou fombres, les plus propres à renforcer ou
à mitiger , félon le befoin „les jours & les ombres naturelles ; vue dans un même jour, une couleur
claire femble plus éclairée qu'une couleur fombre ; & réciproquement celle-ci apperçue dans l'om-
bre , femble plus obfcure que ne le paroîcrcit la couleur claire dan* la même pofition. Delà, il eft
aifé de comprendre comment le peintre , après avoir exactement diftribué les jours & les ombres ^
félon le degré & la direclion de la lumière incidente , peut , fans manquer à la vérité , au moyen des-
couleurs locales , donner du relief aux objets qui fe trouvent dans l'ombre la plus forte , & adoucir
l'éclat de ceux qui font placés dans le plus grand jour , toutes les fois que l'harmonie .& l'effet de
VenfembJe l'exigeront. Si un objet qui naturellement ne peut recevoir la lumière d'aucun endroit ^
ioic néanmoins par oîite éclairé i on lui alîigne uns couleur claire; û l'objet eft placé, dans, oattû^
2C^ CLA
CLAIRON , f. m. (Lutherie,) vieux inf-
tniinent de l'erpece des trompettes , mais
dont le canal étoit plus étroit & le fou plus
aigu , enforte que ces derniers inftrumens
formoient la bafTe du clairon. Il fut très en
ufâgc chez les Mores , qui le tranfmirent
aux Portugais : ceux-ci ne s'en feryirent
guère que dans la cavalerie & la marine.
Il n'en refte aujourd'hui guère que le nom
parmi nous.
Clairon , {Lutherie. ) jeu d'orgue de la
clafTe de ceux qu'on appelle jeux £ anches ,
qui ne diffère de la trompette qu'en ce qu'il
fonne l'oi^ave au-defî'us d'elle , & qu'en ce
qu'il eft plus ouvert. Ce jeu eft d'étain ,
& fe met par la partie inférieure dans une
boite détoîfe comme la trompette. Voye-{
Trompette.
Les delfas de clairon font très-difficiles à
faire parler , aufll-bien que les baifes de
■cromorne.
Clairon , en terme de Blafon , eft une
pièce de l'art héraldique. Il porte de gueule
à trois clairons de topaze. Ce font les ar-
mes du comte de Bath , appelle Grandville.
CLA
Guillim prétend que ces clairons ibnt une
efpece de trompette ancienne ^ mais d'au-
tres avancent , avec plus de raiibn , qu'elles
repréfentent le gouvernail d'un navire , ou
un arrêt de lance. Voye^ le diâion. de Trév.
& Charniers.
CLAIRVAUX , r Géog. mod. ) petite
ville des Pays-Bas , dans le duché de
Luxembourg.
Il y a aufll en Champagne , non loin de
Langres & de Chaumont , fur la rivière
d'Aube , un lieu célèbre par fon abbaye j
c'eft la troifîeme fille de Cîteaxx. Voye\ Ci-
te AUX. Hugues comte de Troies, &: Etienne
abbé de Cîteaux , en furent les fondateurs ,
& S. Bernard le premier abbé.
C LAIZE ( La ) , Géog. mod. rivière de
France qui prend fa fource dans le Berri ,
& fè perd dans la Creufè.
CLAM , ( Jurifpr. ) dans la coutume de
Béarn , tit. vij. art. z , fignifie ùan ou pu-
blication , défenfe. {A)
Clam , f. m. ( Com. ) le plus petit des
poids qui foit en ufage dans le royaume de
Siam j c'eft la foixante-quatrieme partie
grand jour , on tempère cet écht , en donnant à l'objet une couleur plus fombre. Il ne faut donc
. pas confondre , comme on l'a fouvent fait , le clair & l'obfcur , qui dépend des jours & des om-
bres , avec le clair-oùfcur , qui ne dépend que des couleurs locales , quoique ces deux chofes
très-différentes peuvent produire un même effet. ( Foyez, ci-après cou levks locales. ) L'harmo-
nie & l'effet de l'enfemble dépendent principalement de la diftribution de la lumière & des ombres,
& c'eft un des grands objets de l'étude du peintre , mais il ne doit pas s'y borner ; il doit encorç
obferver ce que le choix des couleurs locales peut ajourer à l'effet , la lumière & les ombres ref-
- tant les mêmes. Pour faciliter cette étude, il pourroit à l'aide de divers manequins, faire d'a-
bord l'ordonnance de fes grouppes , Se ladiftribution des jours , & obferver enfuite la différence
dans l'effet de l'enfemble que produiront les diverfes couleurs des draperies qu'il y appliquera
fucce/Tîvement.
Ce n'eft pas au refte que nous voulions confeiller au peintre d*interrorapre fon ouvrage , pourdécou-
vrir le meilleur erfet , par ces effais peines & méchaniques. De pareils dérangemens ne ferviroient qu'à
léteindre le feu de l'imagination , d'où dépend l'excellence de l'ouvrage. C'eft dans les heures d'étude
xju'il doit faire ces combinaifons, & fe rappeller l'exemple de Léonard de Vinci , à qui rien de ce qui
{)Ouvoit enrichir fon art par de nouvelles obfervations , n'étoit ni trop minutieux , ni trop pénible. Que
'artifte ne fc livre qu'à fon génie lorfqu'il eft queftion de travailler ; mais que dans fes études , il n'é-
pargne ni foins , ni effais , ni recherches ; que tout s'y faffe avec poids , mefure & réflexions. De cette
manière , le génie acquerra un grand nombre d'idées utiles , qui le guideront dans l'exécution.
Un habile connoiffeur( M. de Hagedorn ) , dont nous fuivons ici les idées , a fait une remarque ,
^ui , toute paradoxe qu'elle puiffe paroître , ne laiffe pas d'être exaélement vraie , c'eft que le graveur
même peut tirer parti du clair-ohfcur , quoiqu'il femble qu'il n'ait d'autre reffource que celle des jours
& des ombres. Ce favant homme a obfervé que les graveurs qui ont travaillé fous la direélion de Ru-
bens , font les premiers qui aient trouvé lefecret de cet artifice. Auffi leurs chefs-d'œuvre font-ils une
nouvelle époque dans l'art de la gravure. Aujourd'hui on voit paroîiredes eftampes où le burin femble
égaler le pinceau dans l'art du clair-obfcur. Il feroit à fouhaiter que les maîtres de l'art vouluffent dé-
velopper en détail , par quel maniement diverfifié du burin ils parviennent à exprimer des couleurs
locales , tantôt claires, tantôt fombres , tantôt douces, ramôt tranchantes. Le (impie connoiffeur,
.^quelque habile qu'il foit , ne fauroit jamais découvrir diftinftement les règles de ce procédé , s'il
.^'a 4'^uti,Ë fecouts que Tctade des meilleurs morceaux dans ce genre. ( M. Suiz^r.. )
CL A
* '^u tael. Voye\ Ta EL \ voyci les diclhnn.
du Comm. & de Trév.
CLAMABLE , adj. (Jurifpr. ) dans la
coutume de Normandie , fignifie ce qui eft
fujet a retrait , foit feigneurial , lignager ,
ou conventionnel. Voy. le tit. des retraits &
clameurs, ( v^ )
CLAMANT , f. m. ( Jurifpr. ) dans quel-
ques coutumes & anciens auteurs , fignifie
le demandeur ; dans d'autres il fignifie lefai-
Jiffant , comme dans la coutume de Lille ,
art. 99 , ICI 5 ICI , 103 , 104 : en Nor-
mandie il fignifie quelquefois le retrayant ,
anc. coût. ch. xxij ; & au fiyle du pays de
Norman, ù en la nouvelle coût, tit. des retraits
& Clam. Coût, de Solle , tit. xrxv , art. 19;
4e Bearn , tit. vij , art. 6 & 10 ; tit. xviij ,
art 1 ; tit. xxxj , art. 10. Valenciennes , art.
376' 151. Seclin , locale fous Lille. (A)
CLAME, C Jurifpr.) anciennement figni-
fîoit amende. En certains lieux on levoit une
amende ainfi appelîée fur les débiteurs qui
étoient en demeure de payer. Voye[ le con-
feil de Pierre de Fontaines , ch. xxj , p. 1 20 ,
art. II fi' 1 5. Il y a aufii le droit & peine
de clame , c'eft-à-dire l'amende qui eft due à
juftice pour la prife des beftiaux trouvés en
délit. Il en eft parlé dans la coutume d'Au-
vergne , ck. XXV a j , art. 6 , 12, 13,14,
17 & fuiv. & dans les coutumes locales dudit
pays. ( A )
CLAMECY , ( Géog. mod. ) petite ville
de France dans le Nivernois , au confluent
duBeuvron & de Lyonne. Long. 21 , 11 ,
li-.lat.^y, 27, 37.
CLAMER , V. a. & n. ( Jurifpr. ) dans
les anciens auteurs & dans quelques coutu-
mes , fignifie demander , pourfuivre.
Clamer droit , c'eft former fa demande ou
rendre plainte en juftice. Voye^ tancienne
coût, de Beauquefne , art. 48. Clermont ^ 85.
Hainaut , ck. Ixxviij. Monsy ch. x. Valen-
ciennes , art. 88 & 109.
Clamer garant jCeiï agir en garantie con-
tre quelqu'un. Coût, de Bretagne , art. 145.
Norm. anc. coût. ch. xxvj , xxxiij & IviJ ,
& au f y le du pays de Normandie.
Clamer en garieur , c'eft quand l'on fait
flemande de quelque cliolè par voie pofi!èf-
foire ou propriétaire , ou que l'on fe plaint
en juftice du tort qui a été fait.
Clamer en jujiice , c'eft. fe plaindre de quel-
C L A 207
que trouble ou tort que l'on a reçu. Coutume
de Dunois^ art. 52.
Clamer les biens de fon débiteur ^ forain ,
c'eft faifir & arrêter. Coût, de Lille , art. 98,
104 , 116. Lille , art. c^()^ ICI, r02 , 103 ,
104 , 124. Afc. tit. xvjy art. 12. V. Clain
ۥ Clameur.
Lieu clame , eft un héritage pour lequel il
y a demande ou complainte. Voy. lafcm.me
rurale.
Se clamer en cour fuferaine de cour infé-
rieure , c'eft lorfque celui qui eft ajourné
devant un juge inférieur , s'adrefl^e à la cour
fupérieure pour avoir plus prompte expédi-
tion ;, ce qui eft permis en jnatiere de re-
trait lignager dans \(^% coutumes d'Anjou &
Maine , afin que les deniers de l'acquéreur
ne ibicnt point retardés.
Se clamer , fignifie aufll retraire. Coût, de
Normand, tit. des retraits & clameurs.
Clamer fon fujet , c'eft revendiquer ion
ferf ou moptaillabie , fon cenfitairc ou jufti-
ciable , qui fe veut avouer fujet d'un autre
lèigneur. Boutillier, en fa fomw.e rurale. {A):
CLAMEUR, f m. (Jurifpr.) en général*
fignifie demande ^ il fignifie aufii quelque-
îoisfaife , exécution , contrainte. C'eft ainfi
qu'il eft ait faire fa clameur au roi , en l'an-
cienne chronique de Flandre , ch. Ixxxv. Il
eft parlé de clameur , ctamor , en l'ordon-
nance de Philippe IV, de l'an 1304 , & de
la clameur du petit fcel de Montpellier dans
l'ordonnance de Louis XII , art. i/^i & fuiv.
Clameur , en Normandie , eft toute de-
mande intentée par la voie poftèflbire ou pé-
titoire , pour fè plaindre en juftice par ac-
tion civile du dommage que l'on prétend
avoir ibulîèrt. On y diftingue plufîeurs for-
tes de clameurs ; favoir ,
Clameur de bourfe , eft l'aélion en retrait-
lignager , féodal, ou autre.
Clameur de bourfe gagée , c'eft quand le-
défendeur en retrait lignager , féodal , ou
autre, acquiefce au retrait , en lui rembour-
fànt le fort principal du prix de la vente ,.
frais & loyaux coûts.
Clameur a droit conventionnel ., eft l'aélion'
pour exercer la faculté de réméré.
Clameur à droit de lettre lue , eft la faculté
qui appartient à un tiers acquéreur qui a pof>
{kàô. par an & jour un héritage ou autre im-
meuble en vertu d'un titre authentique jd»--
ic8 C L A
le pouvoir retirer fur celui qui s'en efl rendi^
adjudicataire par décret , eu lui rembourfanî
le prix de l'adjudication , frais & loyaux
coûts dans l'an & jour. Coût, de Normand.
art. 451.
Clameur faujfe , eft quand on fe plaint a tort
à juftice. Ane. coût, de Normand, ch. vij^ 95.
Forte Klameur , eft une amende de deux
fous fix deniers due au roi , félon la cou-
tume locale de la châtellenie de Montereau ,
reflbrt de Meaux \ lorfque quelqu'un a fait
ajourner ini autre en a<Sî:ion perfonnelle ,
celui qui fuccombe la doit pour le premier ;
ajournement , fuppofé que les parties s'ac-
cordent fans porter la caufe à l'audience j
car s'ils perfiftent plus loin , & que la caufe
foit conteftée , il y a fept fous fix deniers
d'amende : c'eft proprement l'amende du
clain & clameur faite en juftice , xjui eft moin-
dre que l'amende du ni atteint 6' vérifié .^ qui
eft due pour la conteftation. V. le glojfaire
</r M. de Lauriere,ûWOTo/ Forte CLAMEUR.
Clameur de gage pie ge , eft une complainte
contre le trouble fait en la propriété ou pof-
iëflîon d'un héritage , par voie de fait , vio-
lence ou autrement. Normand, art. 5.
Clameur gagée , eft le retrait confenti par
l'acquéreur.
Clameur de haro , ufitée en Normandie ,
& que Dumoulin appelle quiritatio Normano-
rum , eft une plainte verbale & clameur pu-
blique de celui à qui on fait quelque vio-
lence ou injuftice , & qui implore la pro-
tection du prince , ou qui trouvant fa partie
la veut mener devant le juge , en forte que
cette clameur emporte avec elle une aftigna-
tion verbale.
L'opinion la plus fuivie ftir^ l'origine de
jCette clameur de haro , eft que le terme de
haro eft u«e invocation du nom de Raoul
ou Rollo , premier duc de Normandie , qui
fe rendit reîpeâiable â fon peuple , tant par
fes conquêtes que par l'amour qu'il avoit
pour la juftice. Comme on imploroit fa pro-
teâion de fon vivant par une clameur pu-
blique , en l'appellant & en proférant ion
nom , & qu'après fa mort fa mémoire fiit en
vénération à fon peuple , on continua d'ufer
delà même clameur & du terme àcharo,^ par
corruption de ha Kacul. On a donné plu-
{leurs autres étymologies du terme de haro ,
Miais qui ne paroilfent pas bien fondées.
C L A
Le premier exemple mémorable de T\S^
fage que l'on faifoit de la clameur de haro.^
eft celui que rapporte Paul Emile en Ibii
hiftoire de France. Guillaume le Bâtard dit
le Conquérant , feptieme duc de Norman-
die , & roi d'Angleterre , étant mort à Rouen
au mois de feptembre 1087 , fon corps fut
tranlporté & inhumé dans l'églife de faint
Etienne de Caen qu'il avoit fait bâtir , & qui
avoit été conftruite en partie fur un petit
morceau de terre dont le prix n'avoit point
été payé à un pauvre homme de la ville de
Caen nommé Affelin , lequel ofa arrêter la
pompe funèbre du prince par une clameur de
haro en ces termes : Qui régna opprejfit ar~
mis , me quoque metu mortis oppreffit ; ego
injuriœ fuperjîes pacem mortuo non dabo : in
quem infertis iftum hnminem locum , meus eft:
in alienum locum inferendi mortui jus nemini
ejfe defendo, Sin extinclo tandem indignitatis
autore vivit adhuc vis^ Rollonepi conditorem
parentemque gentis appel lo , qui le gibus abfe
datis 5 quam cujufque injuria ^plus unus po-
tejî , polletque.
Henri V , roi d'Angleterre , ayant mis le
fiege devant Rouen en 141 7 , un prêtre fut
député pour lui faire cette harangue : Très-
excellent prince &feigneur , il m eft enjoint de
crier contre vous le grand haro ; c'eft ainfî
que le rapporte Monftrelet. Il eft vrai que
Henri V ne déféra pas à la clameur , & qu'a-
près un fiegc de fîx mois il fe rendit maître
delavilleparcompofition ^ mais cela prouve
toujours i'ufage qui a été fait de cette cla-
meur dans tous les temps.
Depuis la réunion de la Normandie à la
couronne , nos rois ont ajouté dans toutes
leurs ordonnances , édits , déclarations &
lettres-patentes , cette claufe , nonobftant cla»
meur de haro , ce qui fe pratique encore pré-
ièntement : enforte que cette clameur a paru
avoir aftcz d'autorité pour faire obftacle à
l'exécution des nouvelles loix , s'il n'y étoit
pas dérogé par une claufe exprefl'e.
L'ancien coutumier de Normandie con-
tient un chapitre de haro , dont Terrien a
fait mention dans fon commentaire , liv.
XII , ch. xviij. La même chofe fe trouve
dans l'ancien ftyle de procéder qui eft à la fin
de ce coutumier , & eft rapporté par Ter-
rien , liv. VIII , ch. xj.
Suivant l'ancien coutumier , le haro ne
pouvoit
_ C L A
poiivoit être interjeté que pour cnufè cri-
minelle , coinme pour feu , larcin , homi-
cide , ou autre péril évidetit.
Mais on voit dans le ftyle ancien de pro-
céder , que i'ufage avoit changé , & que la
pratique du haro étoit déjà étendue au cas
où il s'agit de conferver la poiïeflion des iiH-
meubles , Se même des meubles \ c'ert pour-
quoi , lors de la rédaction de la nouvelle
coutume qui commença d'être obfervée au
premier juillet 1583, les commilîaires nom-
més par le roi & les députés des trois états
inférèrent dans le cahier de la réformation
un article qui eft le cinquante-quatrième,
portant que le haro peut être intenté , wovl
feulement pour maléfice de corps & pour
chofe où il y auroit péril imminent , mais
pour toute introduétion de procès poflef-
foire , encore que ce foit en matière béné-
iiciale ou concernant le bien de l'églife.
Sous le terme de maléfice de corps fout
compris en cet endroit toutes fortes de dé-
lits , tels que vols , larcins , incendies ^ ainfi
préfentement la clameur de haro peut être
intentée pour toutes fortes de délits & de
conteftations civiles , bénéficiales , poiîeflbi-
res , & provifoires , même pour meubles ^
mais lorfqu'il s'agit du pétitoire, il faut pren-
dre la voie ordinaire des aftions , & obfèr-
ver les formalités prefcrites pour les denîan-
des. Il en feroit de même pour le recouvre-
ment d'un effet mobilier, lorfque celui qui
le poflede eft un homme domicilié , &
qu'il n'y a point à craindre qu'il s'évade.
Il n'eft pas abfolument néceffaire que la
clameur foit intentée contre les coupables
ou défendeurs à l'inftant même que l'aftion
dont on fe plaint a été cominife ^ la clameur
peut être intentée etiam ex intervallo , iiir-
tout lorfqu'il s'agit d'un délit , & que l'ac-
cufé eft un homme non domicilié.
On n'a pas befoin du miniftere d'aucun
officier de juftice pour intenter le haro ;
il fuffit que ceki qui crie haro le falTe en pré-
fence de témoins , & fomme fa partie de
venir devant le juge.
Suivant l'ancien coutumier , lorfqu'on
crioit haro , chacun devoit fortir ^ & fi le
délit paroifîbit digne de mort ou de mu-
tilation de membre , chacun devoit aider à
retenir le coupable , ou crier haro après lui ,
fous peine d'amende. Ceux qui avoicnt pris |
Tome Fllh
C L A 209
le malfai£l€ur ne pouvoient le garder qu'une
nuit , après quoi ils dévoient le rendre à la
juftice , à moins qu'il n'y eût un danger évi-
dent. Il refte encore de cet ancien ufage
que quand quelqu'un crie haro , fi c'eft con-
tre quelqu'un qui en veut outrager un au-
tre , ou qui veut voler un marchand ou vio-
ler une fille j en un mot s'il s'agit d'em-
pêcher quelque violence publique ou parti-
culière faite a^ec armes ou fans armes, tout
Je pel^ple doit afîifter le plaignant ^ il n'eft
pas même néceffaire que ce foit l'offenfé qui
interjette le haro , un tiers peut le faire , 8c
il lui eîi également dû afîîftance tant pour
protéger les innocens , que pour faire châ-
tier les coupables. Voye^ Godefroiywr /'ar-
ticle 54 de la coutume.
La clameur de haro ne peut être intentée
qu'en Normandie , mais elle peut l'être par
toutes fortes de perfonncs demeurantes dans
cette province , foit qu'elles foient originai-
res du pays ou non. Des Normands ne pour-
roieut en ufer dans un autre pays même en-
tr'eux.
Les femmes peuvent intenter cette cla-
meur ; les impubères peuvent aufîi y avoir
recours , même fans être affiliés de tuteur ou
curateur.
Elle peut être intentée contre des eccîé-
fîaftiques , fans qu'ils puifl'ent décliner la ju-
rifdiétion féculiere.
Elle ne peut être intentée contre le roi ,
ni même contre fes officiers, pour les empê-
cher de faire leurs fonélions , & notamment
contre les commis , huiffiers & fèrgens em-
ployés pour les droits du roi. L'ordonnance
des aides , tk. x, art.. 38, défend à tous
huiffiers de recevoir de telles clameurs , ôc
aux juges d'y ftatuer.
Godefroi excepte néanmoins le cas où un
juge entrcprendroit fur la jurifdiâiion d'au-
trui , & celui où un ofîîcier abuferoit de fon
pouvoir, comme fi un fergent emportoit le«
meubles par lui exécutés , fans lailfer d'ex-
ploit ^ dans ces cas il y auroit lieu au haro,
. Les officiers de la bafoche ou régence du
palais de Rouen , ont été autorifés par divers
arrêts à intenter la clameur de haro contre les
folliciteurs qui fe trouvent en contravention
aux réglemens concernant la difcipline du
palais.
L'eiFct du haro efl qu'à l'inftant qu'il eiE
Dd
2IO C L A
( rié fur quelqu'un , celui-ci eft fait prifon-
rier du roi j & s'il s'abfente , il eft toujours
réputé prifoimier en quelque endroit qu'il
sille ^ & quoiqu'il ne foit pas refféant de la
jurifdiâ:ion du lieu où le haro a été crié , il
peut être pourfiiivi & pris en quelque jurif-
dii^ion qu'il foit trouvé 5 pour être amené dans
les prifons du lieu où le haro a été crié. Toute
entreprife doit cefTer de part & d'autre , à
peine d'amende contre celui qui auroit fait
quelque chofe au préjudice , & d'être con-
damné à rétablir ce qu'il auroit emporté ou
défait.
Les deux parties font tenues de donner
caution ; favoir , le demandeur de pourfui-
"vre fa clameur , & le défendeur d'y défendre j
& ces cautions font tenues de payer le juge.
C'eft au fergent à recevoir ces cautions , de
même que les autres cautions judiciaires. Si
les parties refufoient de donner caution , le
juge doit \q% envoyer en prifon.
Après que les cautions font données , la
chofe contenticufe eft fequeftrée , jufqu'à ce
que le juge ait ftatué ilir la provifion.
L'ancien coutumier dit que le duc de Nor-
mandie a la cour du haro , c'eft-à-dire la
connoiifance de cette clameur , & qu'il doit
faire enquête pour favoir s'il a été crié à droit
ou à tort.
La connoiffance du haro appartient au
juge royal , fans néanmoins exclure le fèi-
gnenr haut-jufticier. Quand on procède de-
vant le juge royal en matière civile , la con-
noiiTance du haro appartient au vicomte en-
tre roturiers , & au bailli entre nobles , &
au lieutenant criminel , en matière crimi-
nelle , entre toutes Ibrtes de perfonnes.
Si le demandeur ou le défendeur n'inten-
tent point leur adHon fur le haro dans l'an &
jour qu'il a été interjeté , ils n'y font plus
recevabîes ^ & fi , après avoir l'un ou l'autre
formé leur action , ils reftcnt pendant un an
iàns faire de pourfiiite , la clameur de haro
tombe en péremption.
Le juge du haro doit prononcer une amende
contre l'une ou l'autre des parties \ la quo-
tité de l'amende eft feulement arbitraire.
Les parties ne peuvent tranfigcr dans cette
matière \ c'eft par cette raifon qu'on leur fait
donner caution , l'un de pourfuivre , l'autre
4le défendre. Voye\ t ancien coutumier & la
couvelle coutume , tit, de haro, & Us commen-
C L A
tuteurs fur ce titre ; le journal du palais , ar-
rêt du gr. conf. du iç) Janv. 169 5 ; ù le re-
cueil d arrêts du parlem. de Normandie par
M. Froland , part. I. chap. vj.
Clameur ligr.agere ou clameur de bourfe y
c'eft le retrait lignager.
Clameur de loi apparente , eft l'aâiion ,
mandem.ent ou commiftîon accordée au bas
d'une requête par le bailli ou propriétaire
qui a perdu la poflëftion d'un héritage depuis
quarante ans , à l'effet de rentrer en la pof-
fèftîon de cet héritage. Normand, art. 3.
Clameur feigneuriale , eft le retrait féodal
ou feigneurial.
Clameur révucatoire , eft une aôion pour
faire calfer &: refcinder un contrat , obli-
gation , ou autre afte. Normand, art. 3.
Clameurs ou rigueurs , font à&s commit^
fions expédiées lùr des contrats pafles fous
certains Icels appelles rigoureux , en vertu
de/quelles on peut contraindre le débiteur
par exécution de fes biens , & même pai"
emprifonnement de fa perfonne. f^oye^^^ Ri-
gueur & SCEL RIGOUREUX.
Ouverture de clameur , coût, de Normand,
art. 461 , c'eft lorfque par la qualité du con-
trat d'aliénation il y a lieu au retrait féodal ,
lignager , ou conventionnel.
Clameur du petit fcel de Montpellier , eft
une commifiion pour exécuter fous la ri-
gueur de ce fcel. Voy. ci-dev. CLAMEUR
ou Rigueur , & Scel rigoureux.
Clameur pour dettes y clamor pro debitis ^
étoit une alfignation à cri public ufitée an-
ciennement dans le Languedoc , pour la-
quelle le crieur public avoit des droits à per-
cevoir & fur le créancier & iur le débiteur.
Voye:^ le recueil des ordonn. de la troif. race ,
tcme ni . pag. 78 , aux notes. [A)
CLAMP , GABURON , GEMELLE , ^
{Marine.) voye:[ JuMELLE.
Clamp , « c'eft une petite pièce de bois en
» forme de rouet , qu'on met au lieu de
» poulie dans une mortaife. »
Clamp ou clan de mât , et c'eft un demi-
» rond dans une mortaife appellée encornail ,
» qui eft au mât : ce demi-rond eft fait dans
w le bois du même mât, &:c'eft-làque paflè
» Tétaque. Voye^^ Encornail. Il y a deux
» clamps au grand mât de hune, parce qu'il y a
» deux étaques , eu un étaque &:une guinde-
» refle ; mais aux petits ^ il n'y en a qu'un»»
CL A
Le clamp cîe beaupré c(l t:ne pièce de bois
en forme de demi-rouet , que l'on met dans
une mortaifè , & qui foutient le beaupré
près de l'étrave. Ce clamp dans un vaifieau
du premier rang, a neuf à dix pouces de-
pais. {Z)
CLAMPONNIER ou CLAPONNIER,
fubft. m. ( Maréch. ) on appelle ainfî un che-
val long-jointé, c'elt-à-dire qui a les patu-
rons longs , effilés & trop pleins. Ce terme
eft vieux , & conviendroit plutôt aux bœufs
qu'aux chevaux. Voyc^^ Paturon.
CLAMZ , f. m. (Commerce.) petite
monnoie quarrée d'argent billonné , qui a
cours aux Indes , & qui fërt en même temps
de poids. Elle vaut onze deniers argent de
France. Dicl. du Comm.
CLAN ou GLAND , f. m. ( Parchemi-
fierie. ) morceau de bois qui (èrt à arrêter fur
la heriè les peaux à travailler. Voye'{^ Par-
chemin , Sommier , Herse.
CLANCULAIRES ou OCCULTES ,
f. m. plur. ( Théol, ) feâ:e particulière d'Ana-
baptiftes , qui prétendoient pouvoir fans
crime déguifer leur religion quand ils étoient
interrogés , & qu'il fuffifoit de favoir en par-
ticulier à quoi s en tenir. Voye\ ANABAP-
TISTES. On \&% appelloit auffi Frères jar-
diniers , parce qu'ils ne s'affembloient point
dans des églifes , mais dans des maifons
particulières ou des jardins. Chambers.{G)
CLANDESTIN , adj. {Jurifpr. ) k dit
en droit de tout ce que l'on tient caché ,
comme un mariage ou autre aâ:e. Les aûes
clandefiins font naturellement fiifpeé^s de
fraude & de collufion. La clandeftinité eft
fiir-tout d'une dangereufè conféquence par
rapport au mariage. ^oj^:f<2i/ 7720/ Mariage
CLANDESTIN. {A)
CLANDESTINE , f. î.dandeflina , ( liiji.
nat. bot, ) genre de plante à fleur monopétale
en mafque j le deflbus eft en forme de tuyau \
le delîus eft divifé en deux lèvres , dont la
fupérieure eft voûtée , & l'inférieure divifée
en trois parties \ le piftil fort d'un calice fait
en tuyau comme la fleur , & crénelé \ il
perce la partie inférieure de la fleur , & de-
vient dans la fuite un fruit oblong, compofé
d'une feule capfule qui s'ouvre en deux par-
ties par une forte de reifort , & répand des
femences arrondies. Tournefort, infi. rei
herb, Voyei PlANTE. ( /)
CL A 21 t
CLAPET, f. iv.l{ Méchan,) efl uno cf-
pece de foupape faite d'un rond de cuir ,
fortement ferré entre deux platines de mé-
tal , par le moyen cFune ou de plufieurs vis.
Le rond de cuir tient par une queue à une
couronne de cuir , laquelle eft fortcmenî
ferrée entre le collet du tuyau fupérieur au
clapet^ & le collet du tuyau inférieur : c'eic
fur cette queue , qu'on fait beaucoup plus
étroite que le clapet , que iè fait le jeu du
clapet comme fur une charnière.
La platine de métal qui eft fur le cuir du
clapet , eft plus grande que l'ouverture du
diaphragme que le clapet doit couvrir \ & la
platine de deftbus qui doit fe loger dans l'ou-
verture du diaphragme quand le clapet fe
ferme , eft un peu plus petite que cette ou-
verture.
Le clapet étant ainfi conftruit , îorfqu'il eft
fermé, le cuir porte exaftementfurles bords
du diaphragme , & empêche l'eau de paflèr.
La platine de métal qui eft fur le cuir , le
garantit du poids de la colonne d'eau , & en
porte toute la charge que le cuir ne pourroit
pas foutenir. La platine de métal cfui eft fous
le cuir, fert à deux chofes^ 1°. elle fert avec
la platine fupérieure , à comprimer le cuir
pour le rendre plan ^ 2°. elle empêche que
l'eau qui pourroit s'infuiuer entre la platine
fupérieure & le cuir, n'enfonce le cuir & ne
lefafle pafler par l'ouverture du diaphragme.
Voye'^^ hifi. ù mém, acad, IJI^. Voye^ auffi.
Soupape. (O)
♦ CLAPIER , f. m. ( Econ. rujl. & Chajfe. )
c'eft un terrain clos de muraille , partie cou-
vert , partie découvert , & bien maçonné ,
où l'on enferme & nourrit des lapins. On le
place dans un coin de la garenne , pour que
les jeunes lapins puiftènt aller du clapier dans
la garenne^ on y conftruit quelques loges de
planches & de pierres plates , fous lelquelles
les lapins fc retirent : il faut que les fondc-
mens des murs en foient profonds , & pour
ainfi dire fortifiés par-tout d'un pavé qui ait
la pointe en-haut, afin que les lapins qui ai-
ment à creufer en terre , ne s'échappent point
pardeftbus les murs. Il eft bon que le terrain
en foit inégal : on y jette de la mouftè & du
petit foin , que les lapins ramalTent quand
lis doivent faire leurs petits. On les y nour-
rit en été de ion , d'avoine , & de toutes for-
tes de fruits j en hiver , de fou , de foin , ùc*
Ddz
211 C L A
Il feroit à propos que le clapier fiût partagé
en deux divifions j on renfermeroit les mè-
res pleines dans une, & on tiendroit les mâ-
les dans l'autre. Quand les petits feront a/Fez
grands pour lèpaiTer de leurs nieres , on les
lâchera dans la garenne ^ car c'eft à repeu-
pler les garennes que les clapiers font prin-
cipalement deftinés. On doit mettre dans
ion clapier un mâle fur vingt-cinq à trente
femelles, La conduite du clapier demande
quelque foin , fi l'on en veut tirer tout l'a-
vantage poflible. Voyei Lapin.
CLAQUES , f. f. {Cordonn.) efpece de
pantoufles ou fandales fort larges , que les
femmes portent dans les mauvais temps ,
pour confcrver leur chaulFure.
* CLAQUEBOIS , f. m. ( Luth. ) inftru-
ment de perculTion & à touches : c'eft une
cipece d'épinette qui a été en ufàge chez les
Flamands. Elle eft compofée de dix-fept bâ-
tons qui donnent l'étendue de tons com-
pris dans une dix-feptieme ^ le bâton le plus
à gauche eft cinq fois plus long que celui qui
eft le plus à droite, parce que les fons qu'ils
rendent font entre eux comme 531. Ces
bâtons parallèles font élevés & fixés au def-
fus d'une boîte quarrée beaucoup plus lon-
g^ue que haute j ils ont chacun leur touche ou
ïnarche : cette marche eft une efpece de mail-
let à tête ronde par un bout , & à manche
ou palette plate j le méchanifme par lequel
ils fe meuvent, ne diffère pas du méchanifme
des claviers d'épinette ou du clavecin. P^oye^
Clavier. On applique le doigt fur la pa-
lette de la touche ou marche j la tête levé ,
& va frapper un des bâtons. Les bâtons font
de hêtre , ou de tel autre bois qu'on veut ,
réfonnant par lui-même, ou durci au feu.
L'harmonie de cetinftrument ne feroitpeut
être pas défagréable , fi on fubftituoit des
verges de métaux aux bâtons. Voye[ Vhar-
Tïtonie univerfelle du père Merfènne.
CLAR (Saint-), Géog. mod. petite
ville de France dans le bas Armagnac.
ChhKE, {Géog. mod.) ville d'Irlande
dans la province d'Ulfter , capitale d'un
comté de même nom , fur le Thaunon.
Long. 38, 35; lat. 52 , 44.
ClARE ou ClARENCE, (Géog. nod.)
ville d'Angleterre avec titre de duché, dnis
la province de Suftblk.
CLARENCE oz/ CHIARENZA, {Géog.
C L A
' mod. ) ville de la Morée , capitale du duché
de même nom. Long. 39, 10; lat. :?7, 55.
CLARENCIEUX , f f. ou CLARENCE ,
comme l'écrivent nos anciens hiftoriens
françois , [HiJI. mod.) nom affedé au fécond
roi ou hérant-d'armes d'Angleterre. Il vient
d'un duc de Clarence qui occupa le premier
ce pofte. Voye^^Koi d'ar.mes.
Lionel, troifieme fils d'Edouard III, étant
devenu poiiëfi^eur de la terre de Clare dans
le comté de Thomond , que fa femme lui
avoit apportée en mariage , fut créé duc de
Clarence. Ce duché étant échu à Edouard
IV , il créa le héraut , qui appartcnoit au duc ,
roi-d'armes , & le nomma clarencieux en
françois alors d'ufage , & clarcncius en latin.
Voye-;^ HÉRAUT.
Son office eft de régler & d'ordonner les
cérémonies des funéniiilcs de la petite no-
bleft'e , comme des barons , chevaliers , gen-
tilshommes , qui m.eurcnt en-deçà de La ri-
vière de Trent : ce qui lui a fait aufîi donner
le nom à^furroy ou fudroy , par oppofitioii
à norroy. J^oye^ NoRROY. ( G )
CLARENDON , ( Géogr. mod. ) petite
ville d'Angleterre dans la province de Wilîs-
hire , avec titre de comté.
Clarendon , ( Géog. mod. ) rivière de
l'Amérique feptenîrionale dans la Caroline ,
qui arroiè une contrée qui porte le même
nom.
* CLARENINS , f m. pi. (H//, eccléf. )
ancienne congrégation de l'ordre de S.
François, ainfi appellée de Clarene , petite
rivière de la Marche- d'Ancone. Ils ont eu
pour fondateur Ange Cordon , religieux de
i'Obfervance. Il forma fa congrégation en
1302 I, elle ne fut approuvée qu'en 13 17.
Bientôt elle fe divifa j une partie s'unit aux
frères Mineurs ^ l'autre , après avoir fubfifté
jufqu'en 1510 fous le nom de Clarennins ^
s'incorpora avec les obfen'antins de leur
congrégation. En 1566 , ils difparurent en-
tièrement , confondus par Pie V , avec les
anciens profès de I'Obfervance.
CLAREQUET, f. m. en terme de Confi-
feur , c'eft une eipece de pâte transparente :
on en fait de plufieurs e{peces, de pommes ,
de coings , de grofeilles , de prunes , 6'c.
CLARICORDE , efpece de clavecin au-
trement appelle monocorde. Voye[ CLAVE-
CIN 0' Monocorde.
C L A
CL ARIEN , adj. ( Myth. ) furnom d'A-
pollon : il fut ainfi appelle de Claros en
lonie , où il avoit un temple , un bois & un
oracle.
CLARIFICATION , f. f. ( Pharmacie. )
Le mot de clarification qui , pris dans fou
feus le plus étendu, paroît exprimer une dé-
puration quelconque d'une liqueur trouble ,
a été prefque rellreirrt par l'ufage à cette ef-
pece particulière de dépuration qui s'opère
par le moyen du blanc d'œuf & des autres
fubftances animales , qui fe coagulent à un
certain degré de chaleur.
Cette opérationeftenufage en pharmacie,
pour réparer de toutes les liqueurs troubles
qui peuvent fupporter l'ébuUition , les parties
féculentes ou infolubles , qui par leur fuf-
penlion dans ces liqueurs en occallonent l'o-
pacité.
Ces liqueurs font toutes les décodions ,
tous les fucs des plantes purement extraâ:ives
ou très-légérement muqueufes j les firops
préparés avec les décodions , ou les fucs
dont nous venons de parler \ les diifolutions
du fucre qu'on deftine à la préparation des
tablettes , ou à celle de certains iîrops dont
les ingrédiens ne doivent pas être expofés à
l'ébuUition^ le petit-lait , & enfin certaines
potions purgatives connues dans les bouti-
ques ibus le nom de médecines clarifiées. V.
Décoction , Suc , Sirop , Médecine
CLARIFIEE , ÙC.
Les fucs des plantes aromatiques ou alka-
li-volatiles , les infufious des différents aro-
mates , en un mot , toutes les liqueurs char-
gées des parties volatiles qui font ordinaire-
ment leur principale vertu médicinale , &
qui ieroient diflipées par l'ébuUition , doivent
être exclus du nombre des fujets de la clari-
fication.
On ne doit pas non plus clarifier par le
blanc d'œuf les fucs doux ou acidulés tirés
des différens fruits , comme celui de citron,
de berberis ^ parce qu'outre qu'on dérange-
roit leur compofiîion par l'ébuUition , on ne
réuiîiroft pas encore à les rendre clairs , la
partie terreufe légère quiconftitue leur demi-
opacité , ne s'en féparant qu'à la longue par
une petite fermentation infènfîble : c'eft
pourquoi on fait dépurer les fucs de cette ef-
pece par réiîdence. V, Résidence.
Ce n'eH prefque que les blaucs d'csufs qui
C L A îi^
ibnt en ufàge dans l^?, boutiques des apothi-
caires dans tous les cas que nous avons
expofés ^ les lymphes animales , comme la
colle de poiilon, le fang de bœuf, ^c. font
employés aux mêmes ufages dans les travaux
en grand , comme les raffineries du fucre, ê-c.
V, Clarifier , en termes de raffineur de
fucre.
Quand on veut faire la clarification d'une
de ces liqueurs , on prend un ou plufieurs
blancs d'œufs , félon la quantité qu'on en a à
clarifier , & félon que \qs parties qu'on fè
propofe d'enlever, font plus ou moins adhé-
rentes au liquide. On commence par faire
mouffer le blanc d'œuf en le battant avec
une poignée de petites baguettes d'ofîer^ on
y mêle d'abord une petite partie de la liqueur
froide , ou du moins refroidie au point de
ne point coaguler le blanc d'œuf , on mêle
exactement , en continuant à fouetter jufqu'à
ce que toute la liqueur qu'on veut clarifier
foit introduite , & que le blanc d'œuf foit
bien divifé & étendu dans toute la maffe :
alors on fait prendre rapidement un ou deux
bouillons , on écume grofTiérement , & on
paffe à traverun blanchet.
Dans cette opération le blanc d'œuf difTous
& répandu également dans toute la liqueur ,
venant à fe coaguler par le degré de chaleur
qu'on lui fait prendre , forme une efpece
de réfeau ferré qui, en s'élevant du fond de
la liqueur de laquelle il fè fépare , & dont
il vient occuper la furface , entrame avec
lui toutes les parties féculentes qui la trou-
bloient.
haclarification des vins par le blanc d'œuf,
le lait, la colle de poiffon, &c. eCt une opé-
ration très-analogue à celle que nous venons
de décrire ', dans celle-ci c'eft par l'adliion
des parties fpiritueufes & acides du vin, que
ces matières animales font coagulées. Foy.
Coagulation.
On donne encore quelquefois en pharma-
cie , mais plus rarement , le nom de clarifi-
cation à la défécation des fiics des plantes ,
foit qu'elle fe faffe par réfîdence , foit par
filtration , foit enfin par ébullition. Foye^
Suc , Défécation , Filtration & Ré-
sidence. {B)
CLARIFIER , en termes de rafiineur de
fucre , c'eft fatlion de purifier les matières
de leurs fàlctés parles écumes. Voici comme
îî4 C L A
on s'y prend. On jette dans une chaudière de
l'eau de chaux moins forte , c'eft- à-dire moins
épaifle , il la matière qu'on a à clarijîer a du
corps j & plus forte , fi elle n'en a point , ou
que peu. Quand cette eau eft chaude , on y
brafîb une quantité de fang de bœuf tout
chaud , ou des blancs d'œufs : après quoi on
y met la matière \ on la lailTe chauffer dou-
cement 5 afin qu'elle monte peu-à-peu. Quand
elle efl montée , on éteint le feu pour faire
repofer l'écume qui demeure fur la furface
du fucre : on la levé enfijite avec une écume-
refîb ^ on laifTe rallumer le feu ^ on y remet
un peu de fang de bœuf, ou des blancs d'œufs
bien mêlés avec de l'eau de chaux , pour
faire pouffer une féconde écume, & ainfl de
iiiite jufqu'à ce que l'on voie la dernière
blanche comme du lait. On paffe alors ce
llicre dans un blanchet , au deffus du panier
& de la chaudière à clairce. Voy. Panier ,
Chaudière a clairée & Passer.
CLARINE , £E , adj. terme de blafon \ il fe
dit des animaux qui ont des fonnettes au cou ,
comme les vaches , les moutons , \q% cha-
meaux, êr.
Clarinées fè dit aufîî des têtes de ces ani-
maux détachées de leurs corps , lorfqu'elles
ont des fonnettes.
Ce terme vient de clarine , petite clochette
qu'on met au cou des beftiaux qui paiffent
dans les forêts , & cette clochette eft ainfi
nommée parce qu'elle a un Ton fort clair.
C L A
Seneret nu Gevaudan , d'azur au bélier
paiffant d'argent , accolé & clarine d'or.
V. Métaux Héraldiques.
CLARINETTE , {Luth.) La clarinette efl
un inftrument à anche , inventé , à ce que l'on
prétend , au commencement de ce fiecle , par
un Nurembourgeois.
\^2i clarinette telle qu'elle efl aujourd'hui ,
efl compofée de quatre pièces ^ la tête, deux
corps de milieu & le pic. Elle a douze trous
latéraux , dont fept par devant & un par
derrière fe bouchent avec les doigts , les
quatre autres font bouchés avec àQ% clés.
La tête de la clarinette efl faite de buis ,
comme le refle \ elle fe termine par un bec ,
fèmblable en dehors à celui d'une flûte
clouée : mais au heu d'un bifeau , ce bec a
flir le plan fupérieur un trou triangulaire. Le
bec ell percé obliquement , de façon que le
trou intérieur efl exaâ:enient de la figure de
ce même bec. La fente triangulaire fe cou-
vre d'une languette de rofeau qu'on amince
convenableinent , & qu'on attache avec du
fil : enforte que l'embouchure de la clarinette
tient beaucoup de ces languettes de laiton ,
qu'on met dans les trompettes de bois des
enfans ^ auffi la clarinette a-t-elle affez le fon
d'une trompette.
On Xvzi\X\2. clarinette comme la flûte à bec.
La clarinette , telle que nous venons de la
décrire , a trois oâaves &: deux tons d'éten-
due 5 avec la plupart des femi-tons.
mi fa fol
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C L A
Les cadences ou trih fè font fur la clari-
nette comme fur les autres inftmmens à vent,
en débouchant le trou fupérieur.
Une obfervation importante qu'il faut fai-
re , c'eft que te clarinette eft d'une tierce mi-
neure plus baffe que \q% autres inftrumens ;
c'ett-à-dire , que fon premier ut en bas eft
à l'unifTon du premier la du violon \ à ce
compte , l'étendue de la clarinette eft donc
effeàivement depuis Yut ^ à l'unaiTon de ce-
lui du 4 pies , ou du premier ut ^ du vio-
loncelle jufqu'au mi triple odave de la tierce
mineure de cet ut ^ & qui eft à l'uniffon
du mi qu'on prend" en démanchant fur la
chanterelle du violon. C'eft pourquoi quand
la clarinette eft accompagnée d'autres inftru-
mens , on note fa partie une tierce mineure
plus haut que celle des autres inftrumens:
par exemple , fi la pièce eft en la majeur ,
on note la partie de la clarinette en ut ; û la
pièce eft en re , on la note en fa. Vu la dif-
ficulté du doigter , on ne peut compofer des
parties obligées pour la clarinette qu'en ut
majeur ( ou la relativement aux autres inf
trumens ) , ècenfa majeur ( ou re relative-
ment aux autres inftrumens ) ^ pour remé-
dier à ce peu de variété , on a imaginé de
faire doubler les corps du milieu. Moyen-
nant ces nouveaux corps , on élevé toute la
clarinette d'un femi-ton majeur , enforte que
l'on a deux modes de plus // b ^ mi b ma-
jeurs , dans lefquels on peut compofer.
Lorfque l'on veut donc comparer une
pièce en la majeur pour la clarinette , on la
note en ut majeur, & pourra majeur eu ya,
& l'on écrit au deftlis comme pour le cors',
clarinette en ut , afin que le muficien fâche
quels corps du milieu il doit prendre. Si
l'on veut compofer en fi b ^ ou mi b , on
écrit la partie de la clarinette toujours en ut
pour Ji b j &cenfa pour mi b , èi. on écrit
au deifus clarinette en/J b.
Quant aux parties de rempliffage , où la
clarinette n'a que des tenues , ou du moins
peu de notes , on peut les faire dans tous les
modes j feulement il faut faire attention au
poigter , & à ménager du temps au joueur
pour reprendre haleine , car cet inftrumeut
en demande beaucoup. On aura toujours
égard à ce que la clarinette eft d'une tierce
mineure plus baffe que les autres inlbumens ,
C L A 215
& l'on aura foin d'écrire de quels corps les
muficiens doivent fè fervir.
Dans le iemps que je faifbis cet article ,
il pafla par Berlin un muficien qui joUoit
d'une clarinette à fix clés, fîir laquelle ilexé-
cutoit tous les modes. On a déjà remarqué
combien les quatre clés caufent de difficul-
tés ^ ce doit être bien pis avec fix. ( F.
D.C.)
CLARISSIMAT , dignité du bas empi-
re : ceux qui en étoient revêtus s'appelloient
clarijfimes.
^ * CLARTÉ, f.f.(G/-^m.) au fimple, c'eft
l'action de la lumière par laquelle l'exiftence
des objets eft rendue parfaitement fènfible à
nos yeux : au figuré, c'eft l'effet du choix &
de l'emploi des termes , de l'ordre félon
lequel on les a difpofés , & de tout ce qui
rend facile & nette à l'entendement de celui
qui écoute ou qui lit , l'appréhenfion du fens
ou de la penfee de celui qui parle ou qui
écrit. On dit au fimple , la clarté du jour ; au
figuré , la clarté dujîyle , la clarté des idées,
V. Discours, Idées , Style , Eloquen-
ce , Diction , Mots, Construction ,
Langue , ùc.
Clarté , ( Beaux-Arts. ) Nous nom-
mons dijîincls les objets de nos connoilFan-
ces , dans lefquels nous démêlons claiire-
ment ce qiïi conftitue leur genre ou leur
efjjecc : un bâtiment eft pour nous un objet
diftinâ: , lorfque nous y appercevons claire-
ment les caraéèeres particuliers d'un temple ,
ou d'une maifon , ou d'une grange : fi le terme
fiibftantif diftinclion étoit plus généralement
reçu dans le fens qu'il auroit ici , nous l'em-
ploierions préférablement à celui de clarté
qui lui eft réellement fiibordonné , puifqu'à
parler avec précifion , la diftinâ:ion du tout
réfiilte de la clarté des parties ^ pour éviter
l'ambiguité , nous nommerons clartédifiincle
celle dont nous parlons dans cet article , &
qui eft oppofée à la confufion , laiffant le
terme fimple de clarté pour exprimer l'op-
pofé de ïobfcurité.
C'eft donc parla clarté diftinâ:e d'un objet
qu'on rcconnoît ce qu'il eft ou ce qu'il ré-
préfèntç : il y entre toujours quelque chofè
de relatif^ fi , par exemple, je vois dans un
tableau un objet que je reconnois être un
bâtiment , fans pouvoir dire néanmoins
quelle elpece de bâtiment c'eft , wïi tel objet .
n<? C L A
fera cliftinâ: ou confus , félon la nature cîu
tableau qui doit ou me préfenter fimpleu^ient
un bâtiment quelconque , ou un bâtiment
d'une efpece déterminée.
Remarquons donc en général que dans
les ouvrages de l'art , chaque objet doit avoir
lé degré de clarté que fa connexion avec le
tout exige , afin qu'il foit reconnu avecpré-
cifion pour ce qu'il doit repréfenter : les ta-
bleaux font de tous les ouvrages de l'art les
plus propres à expliquer notre penfée ^ dans
un tableau hiftorique , les principaux perfon-
nages doivent être fi diftind:eraent peints ,
qu'on puifTe appercevoir clairement tout ce
qui contribue à les faire reconnoître pour
ceux qu'ils repréfenîent , & cela dans la Çi-
tuation d'efprit & dans l'attitude que l'ac-
tion fuppofe : les perfonnages fubaiternes ,
au contraire, feront encore aifez clairement
repréfentés , quand même on ne pourra pas
connoître prccifément ni qui ils font , ni ce
qu'ils {entent dans le moment de TadHon \
il peut même fufîire au but du peintre qu'on
puilfe reconnoître clairement de certains per-
îbnnages , qu'ils furviennent à l'aéiion , ou
qu'ils fe retirent , quoique d'ailleurs on ne
diftingue clairement ni ce qu'ils font , ni ce
qu'ils font.
Quand Homère décrit un combat, il choi-
fît un petit nombre da perfonnages , & ce
font toujours de fes principaux héros qu'il
nous fait voir de fi près , que nous diftin-
gi'ions clairement toutes leurs attitudes &
tous les mouvemens : il ne nous montre
d'autres perfonnages que dans le lointain ;,
il fe contente de nous laifiér */oir qu'ils fé-
condent vaillamment les premiers coinbat-
tans \ enfin , il en place des troifiemes fi loin
de notre vue , que tout ce que nous pou-
vons en dilHnguer , c'eft qu'ils affiftent au
combat , fans voir précifément ce qu'ils y
font : chaque perfonnage fe trouve ainiî
dans le jour où il doit être , pour que la
fcene entière faJfTe un tableau diftind: àL bien
terminé.
L'orateur en ufe de même , il ne déve-
loppe difi:inâ;ement que iesprincipauxchefs ,
enforte que toutes les notions qui doivent
y entrer , foient clairement expofées : les
idées accefîbires ne reçoivent que le degré
de développement & de clarté que leur im-
portance exige, c'eft auffi là l'unique moyen
C L A
de rendre diftindl \m tout qui eft compofé
de pluficurs parties différentes ^ &; l'on peut
hardim.ent avancer le paradoxe , que c'eft la
confufion des parties ifolées qui produit la
clarté diftindte de lenfemblc. Un payfhge
ne fàuroit repréfenter une véritable contrée,
à moins que chaque objet du tableau ne di-
minue en clarté,, à proportion de fon éloi-
gnement j car c'eft cette diminution de clarté
diftinâ:e qui produit le fèntiment des loin-
tains, ScilTeroitabrurde de regarder comme
un défaut la confufion d'un objet trop éloi-
gné pour être repréfenté difiindtement ^ ileft
affez diftinâ:dans un tel éloignement, s'ilefl
vifible.
Ainfi \?L clarté as. l'enfemble exige nécef^
fàirement que les parties principales foient
diftinguées des acceffoires , & que chaque
objet particulier foit mis dans un jour pro-
portionné à fon importance ; de cette ma-
nière , le tout acquerra la clarté diftincte
qu'il doit avoir.
Dans les arts de la parole , les ouvrages
de quelque étendue , \^^ narrations , 1^% def^
criptions , les diUèrtations acquièrent cette
clarté diftinéfe , par une di\'ifion-exaâ:e des
divers objets , par l'ordre dans lequel ils le
fuccedent , & par la tractation détaillée des
objets principaux. En particulier , l'art des
tranfitions y peut contribuer \ en marquant
clairement la fin d'un article capital, le com-
mencement du fuivant , & l'idée moyenne
qui les lie : \zi auteurs françois excellent eu
général dans la c/û/r^' de ladi£tion , & peu-
vent être propofés ici comme \^^ meilleurs
modèles \ m.ais il n'eft pas aifé de donner
des règles fixes fur la manière de divifer un
fujet , & d'en arranger les parties , pour que
l'enfemble devienne clair & diftinâ: : izs
maîtres de l'art oratoire ne nous donnent au-
cune lumière là-deiîiis j leurs obfèrvations fe
bornent à l'art d'exprim^er clairement cha-
que penfée ifolée, & roulent principalement
fur l'efjjece de clarté qui réfulte du choix
des expreffions , ce qui n'eft pas l'article le
plus difficile. Les recherches générales fur
la diftribution à&s penfees & flir la manière
de les difpofer , manquent encore totale-
ment à la théorie des arts de la parole ;, 6c
cependant ces deux points font peut-être ce
qu'il importe le plus à l'orateur , au ,poè'te
épique &: au dramatique de favoirbienfaifir.
La
CL A
La règle la plus générale & aufii la plus
importante qu'on puiiTe propofer au poète &
à l'orateur , fur ce fujet , c'eft de n'entre-
prendre aucun plan avant de bien connoître
tous Jes matériaux qu'ils veulent employer
dans leur ouvrage ^ qu'à force de méditer
leur fujet, il leur foit fi familier, qu'ils pui{^
fent en faifir l'enfemble d'un coup d'œil.
Celui qui aura vu fi fouvent , &: en tant
d'occafions différentes , une perfonne , qu'il
pourra fans peine s'en rappeller tous les traits,
les geûes , les mouvemens , eft infiniment
plus en état de bien décrire cette perfonne ,
qu'il ne l'étoit à la première vue : il en eft
de même de tout autre objet de nos percep-
tions : le témoin d'un événement , qui fe
l'eft fouvent rappelle depuis , qui en a cha-
que circonftance bien préfente à l'efprit, eft
plus capable qu'aucun autre d'en faire un
récit affez clair , pour que ceux qui l'enten-
dent aient une idée diftinâ:e de cet événe-
ment : quand une fois on polfede bien fon
fujet, que tous les matériaux néceflàires font
raffemblés , il ne faut plus à l'artifte , qu'un
bon difcernement , pour faire la diftribution
& l'ordonnance i ce fécond point étant ré-
glé , il ne lui refte qu'à bien méditer cha-
que chef principal {eparément,& cette opé-
ration le conduira au troifîeme point requis
pour la clarté ^ favoir , l'expofition diftinéte
àzs notions capitales.
En général , l'ordonnance que les plus
grands peintres ont ftiivie dans leurs meil-
leurs ouvrages , leur art de diftribuer les figu-
res & de \zs groupper , la fcience d'éclaircir
& de faire fortir les principaux grouppes :
voilà les modèles du poè'te & de l'orateur ,
pour ce qui concerne la clarté qui doit régner
<ians leurs écrits. ( Cet article efi tiré dt la
Théorie générale des Beaux-Arts dt M. SvL-
ZER,)
Clarté du discours, (Littér.) c'eft ,
comme on vient de le voir , la qualité par
laquelle un difcours eft propre à donner à
ceux qui le lifent on l'entendent , la vraie
connoiftance de ce que l'auteur vouloit leur
faire penfer. Tout ce donc qui empêche de
bien faifir la penfée précife de l'auteur , eft
dans fon difcours un défaut effentiel contre
la clarté.
Diverfes caufes nuifent à la clarté ôm dif-
cours \ i**. le fujet même qui fouvent eft
Tome VllI,
C L A iif
hors de la portée des leéieurs , & qui , pour
être bien entendu , fuppofè c'iezceux à qui,
on l'adreife , des connoiifances préliminaires
qui leur manquent abfolument. Ainfi des
ouvrages de philofophie font obfcurs pour
ceux qui n'ont pas étudié les principes de
cette vafte fcience \ & cependant il n'eft
fouvent pas pofTible , dans un ouvrage qui
n'eft pas élémentaire , d'expliquer tout ce
qui n'eft pas familier à tout le monde. Se
plaindre de l'obfcurité des difcours de cette
efpece , c'eft: fouvent fe plaindre de fa pro-
pre ignorance.
2°. L'emploi des termes de l'art , des
expreftions fcicntifiques , font fouvent auftî
une fource d'obfcurité , même pour des lec-
teurs intelligens qui auroient été très-capa-
bles de comprendre le fens dg chaque pen-
fée , & d'en fentir la vérité , fi l'auteur s'é-
toit fèrvi des termes communs & des exprcf-
fions ordinaires.
C'eft fouvent une afïèftation déplacée
chez certains auteurs , que l'ufage des termes
d'art & d'expreftions fcientifiques, auxquel-
les ils pouvoieut aifément fubftituer des ter-
mes & des expreflîons d'ufage ordinaire ,
que chaque leéieur un peu éclairé & qui fait
fà langue , comprend aifément. Souvent
c'eft un jeu de la charlatanerie des lettrés ,
ou des artiftes , que l'emploi de ces termes
barbares & étrangers , auxquels répondent
parfaitement des mots communs, & aux-
quels peuvent fiippléer des phrafes ordinaires.
3°. La trop grande brièveté eft fouvent un
obftacle à la clarté. Quelquefois un auteur
familiarifé avec un flijet qu'il étudie depuis
long-temps , veut épargner du temps & de
la peine , prévenir l'ennui qu'in^irent les
détails néceifaires à l'intelligence d'un fujet ,
à une perfonne qui les fait trop bien \ il fup-
pofè que ces détails , ces idées intermédiai-
res qui lient le principe à la conféquence ,
font aufti familiers à fes lefteurs qu'à lui-
même \ & fur ce prétexte , il fè difpenfè de
les donner , & le lefteur qui ne voit pas la
liaifon des idées , ne comprend plus ce qu'il
lit. Les hommes profondément favans , font
fujets à être obfcurs dans leurs difcours par
cette raifon. Cependant celui qui veut inf^
truire, deyroit fe fouvenir que lui-même au
commencement , n'eft pafl!e d'une idée à xmQ
autre éloignée , qu'eu faifilfant le fil des idées
£ e
2i« C L A
moyennes qui en forment la liaiibn. Abréger
un difcours , eft ordinairement retrancher
ces détails , ces idées moyennes , ces liaifons
inutiles aux gens fort intelligens , mais elîbn-
tiellement nécefTaires aux leâ:eurs ordinai-
res. En forte que fouvent, abréger, c'eft di-
minuer la clarté d'un difcours,
^. Le défaut de méthode eft une autre
iburce d'obfcurité dans le difcours. Ne pas
oiîrir les idées dans leur rapport réel , dans
leur vraie dépendance , c'eft prefque toujours
jeter de la confulion dans l'eiprit & rendre
impofTibîe l'intelligence de ce qu'on dît.
5**. Le défaut de clarté du difcours vient
ibuvent du défaut de clarté dans les concep-
tions , & de diftinéèion dans les idées de
celui qui parle. Il eft bien rare que celui qui
conçoit bien ce qu'il veut dire , qui com-
prend bien ce qu'il doit exprimer , qui en a
une idée nette , ne l'of&e pas de même ,
quand il en fait le iujet de fon difcours.
6^. Le défaut de ftyle produit ordinaire-
ment un défaut de clarté dans le difcours.
Des tranfpofitions défavouées par la nature
de la langue , des phrafes trop longues , des
parenthefes inférées mal-à-propos , ou trop
confîdérables , qui interrompent la peinture
de la penfée , des termes relatifs trop peu
caradérifës ou mal placés, l'ignorance delà
propriété des termes , en un mot , toute
faute contre les règles de la langue , expofè
Je difcours au danger d'être obfcur.
7*^. Le trop grand defir de montrer de
l'eiprit , eft fi fouvent une fource d'obfcurité ,
que l'on feroit tenté de dire à tout écrivain
qui prend la plume : oubliez que vous pou-
vez avoir de l'efprit , pour ne vous fouvenir
que de la néceflité d'avoir beaucoup de bon
iens , & de l'obligation où vous êtes de vous
faire bien comprendre. Ce defir de montrer
de l'efprit produit l'affeâiation du ftyle , l'em-
ploi des termes figurés •& des expreiîions
recherchées & non naturelles , qui font
prendre la penfée d'un auteur dans un tout
autre feus que celui qu'il avoit en vue.
La première qualité de tout difcours, c'eft
d'être clair ^ la féconde , c'eft d'être vrai.
(G. M.)
CLAS ou KALIS , ( Géog. mod, ) ville
de la Finlande près d'Abo , fur le golfe de
Bothnie,
CLASSE , f. f, ( WJl. nau ) La clajfe eft
C L A
^ un terme relatif à ceux de règne & de gerire.
On di\'ife & on fubdivife tous les objets
qu'embraffe cette fcience ^ on en fait pour
ainfi dire plufîeurs collerions que l'on défî-
gne par les noms de règnes , de claj/h , de
genres & à'efpeces , félon que les rapports
fous lefquels on les confidere , font plus
généraux ou plus particuliers. La diftribution
des objets de l'Hiftoire naturelle en trois
règnes , eft la plus générale ^ elle eft établie
furies différences les plus fenfibles qu'il y ait
dans la Rature. Chaque règne eft divifé en
plufieurs parties que l'on appelle claU'es ; par
conféquent les caractères qui conftituent les
claffes , n'appartiennent pas à un aufîi grand
nombre d'objets que ceux des règnes ^ mais
ils font plus étendus que ceux par lefquels on
détermine \qs genres. La clajfe eft donc un
terme moyen entre un règne & un genre ;
par exemple , tous les animaux pris enfem-
ble , & confidérés relativement aux végé-
taux & aux minéraux , compofent le règne
animal. Les quadrupèdes , les oifeaux , les
poiftbns , &c. font rangés en différentes
clajUes de ce règne \ les animaux folipedes ,
les pies fourchus & les fîlTipedes , font au
tant de genres de la clajfe des quadrupèdes :
ainfi le cara6lere des quadrupèdes qui eft
tiré du nombre de leurs quatre pies , eft
moins général que ceux par lefquels on dif-
tingue ces animaux des oifèaux & àes poif-
fons ^ mais il eft plus étendu que celui qui
réfidedansle nombre des doigts des quadru-
pèdes , & par lequel on les divife en dilïe-
rens genres. On commence par déterminer
les caraéieres effentiels aux animaux , pour
en faire un règne ^ enfiiite on confidere les
différences & les reffemblances les plus géné-
rales qui fe trouvent entre eux , pour en faire
des clajfes. Les reflémblances & les diifé-
rences moins étendues que celles des clajfes ,
déterminent les genres ^ & enfin les efpeces
font renfermées dans le genre. Voilà quatre
termes de gradation . règne , clajfe , genre ,
efpece ^ mais il eft aifé de concevoir que l'on
peut multiplier ces divi fions autant qu'on le
veut , en laiffant de moindres intervalles
entre ces termes , & en expofant une plus
grande fuite de caradf ères , foit pour les ref-
femblances , fbit pour les différences que
l'on obfèrve en comparant les produâioiîs
de la nature les unes aux autres. Voijà d'où
CL A
font venus les ordres , les tribus , les légions,
les cohortes , les familles , que l'on a ajou-
tées aux règnes , aux clajfes , aux genres &
aux efjjeces , dans diftërentes méthodes
d'hiftoire naturelle. Voyei MÉTHODE , Rè-
gne , Genre, Espèce, i^oyei aujfi Bo-
tanique. (/)
Classe , f. f. C Gmmm. ) Ce mot vient du
latin calo , qu vient du grec kakuo , & par
contraélion x,«Aa, appelUr, convoquer , ajfem-
bler ; ainfi toutes les acceptions de ce mot
renferment l'idée d'une convocation ou af-
ièmblée à part : ce mot lignifie donc une
diftinâion de perfonnes ou de chofcs que l'on
arrange par ordre félon leur nature , ou fé-
lon le motif qui donne lieu à cet arrange-
ment. Ainfi on range les êtres phyfiques en
plulieurs claJfes , les métaux , les minéraux ,
les végétaux , &c. Voye[ Classe. ( Hiji.
nat. ) On fait auffi plufieurs claffes d'ani-
maux , d'arbres , de fimples ou herbes , ^c.
par la même analogie.
Clajfe fè dit aufîî des différentes falles des
collèges dans lefquelles on diftribue les éco-
liers félon leur capacité. Il y a fix clalTes pour
les humanités , &: dans quelques collèges
fept. La première en dignité c'eft la rhétori-
que : or en commençant à compter par la
rhétorique , on defcend jufqu'à la fixieme
ou lèptieme ;, & c'eft par l'une de celles-ci
que l'on commeace les études cîafîiques. Il
y a deux autres clajfes pour la philofophie \
l'une eft appellée logique ^ & Y2i\\txQ phyfi-
que. Il y a aulîi les écoles de théologie , cel-
les de droit & celles de médecine ^ mais on
ne leur donne pas communément le nom de
claffe.
Il efi: vrai , comme on le dit , que Quin-
tilien s'eft fervi du mot de claffe en parlant
des écoliers ^ mais ce n'eft pas dans le même
fens que nous nous fervons aujourd'hui de
ce mot. Il paroît par le paffage de Quinti-
lien , que le maître d'une même école divi-
foit {&% écoliers en différentes bandes , félon
leur différente capacité , fecundïim vires in ge-
nii. Ce que Quintilien en dit doit plutôt fe
rapporter à ce qu'on appelle parmi nous
faire compofer & donner des places : Ita fu-
periore loco quifque declamabat ; ce qui nou^
donnoit , dit-il , une grande émulation , ec
nobis ingens palmœ conte ntio : & c'étoir
une grande gloire d'être le premier de fa
C L A 2 1^
dlvifîon , ducere veru clajfem multo pulcher-
rimam. Quint, infi. or, l»l ^ c. /).
Au refte Quintilien préfère l'éducation
publique , faite , comme il t entend , à l'édu-
cation domeftique ordinaire. Il prétend que
communément il y a autant de danger pour
les mœurs dans l'une que dans l'autre j mais
il ne veut pas que les clajfes fbient trop nom-
breufes. Il faudroit qu'alors la clajfe fût divi-
fée , & que chaque divifion eût un maître
particulier : Numerus objlat , nec eo mitti
puerum volo ubi negligatur ; fed neque prae-
ceptor bonus majore fe turbâ , quam utfujli-
nere eam poffit oneraverit ita numquam
erimus in turba. Sed ut fugiendœ fint magnœ
fcholœ , non tamtn hoc e)) valet ut fugiendœ
fint omnino fcholœ ; aliud ejî enim vit are eas^
aliud eligere. Quint, inft. or. l.I^c. ij.
Ce chapitre de Quintilien eft rem.pli d'ob-
ièrvations judicieuiès ; i 1 fait voir que l'édu-
cation domeftique a des inconvéniens , mais
que l'éducation publique en a auffi. Seroit-il
impoffible de tranfporter dans l'une ce qu'il
y a d'avantageux dans l'autre ? L'éducation
domeftique eft -elle trop folitaire & trop
languiffante ? faites fouvent des affemblées ,
des exercices , des déclamations , &c. Exci-
tanda métis & oitollenda femper ejf. Jbid. L'é-
ducation publique éloigne-t-elle trop les
enfans de l'ufage du monde , de façon que
lorfqu'ils font hors de leur collège ils paroif^
fent auffi embarraffés que s'ils étoient tranf^
portés dans un autre monde ? t^àâjmentfe in
alium terrarum orbem delatos\Pé\YO\\e ) j
faites-leur voir fouvent des perfonnes» raifon-
nables ^ accoutumez-les de bonne heure à
voir d'honnêtes gens , qu'ils ne foient pas
décontenancés en leur préiènce : AJfuefcant
jam a tenero non refortnidare homines. Quint,
ibid. Faites que votre jeune homme ne foit
pas ébloui quand il voit le foleil ^ & que ce
qu'il verra un jour dans le monde , ne lui
p^roiffe pas nouveau : Caligat in fok<^ omnia
nova off'endit. Ibid. L'éducation publique
donne lieu à l'émulation : Firmiores in litte-
ris profeclus alit emulatio ù licet ipfa
vitium fit ambitio , fréquenter tamen caufa
virtutum ejl, Ibid. Necejfe eft enim ut fibi ni-
mium tribuat , qui fe nemini comparât. Ibid.
Ce que dit Quintilien dans ce chapitre
fécond , fiir la vertu & la probité que l'on
doit rechercher dans
les maîtres
E e 2
eft coïit
110 C L A
forme à la morale la plus pure '^ & ce qu'il
ajoute dans le chapitre fiiivant , fur les pei-
rxcs & les châtimens dont on punit les éco-
liers , eft bien digne de remarque. Il dit que
Je châtiment abat l'efprit : Refringit animum
& abjicit lucis fugam , & tadium dictât. Jam
fi minor in diligendis prœceptorum moribus
fuit cura ^ pudet dicere in quœ probra nefandi
homines ijio cœdendi jure abutantur , non
morabor in parte hac ; nimium eji quod intel-
ligitur. Hoc dixijfe fatis ejl, in cetatem infir-
mam & injurias obnoxiam nemini débet nimium
licere unde caufas turpium faclorum
fcepè exîitijfe utinam falfo jaâaretur. Quint.
injî. 1. 1 , c. ij & iij.
Cette obferv'ation de Qu intilien ne peut
être aujourd'hui d'aucun ufàge parmi nous.
On ne peut rien ajouter à l'attention que
les principaux des collèges apportent dans
le choix des maîtres auxquels ils confient
l'inftruélion des jeunes gens , & les châti-
mens dont parle Quintilien ne font prefque
plus en ufage. Voyei Collège. ( A )
Classe , f. f. {Marine. ) On entend en
France par ce mot , l'ordre établi fur les
côtes & dans les provinces maritimes , pour
régler le fervice des matelots & autres gens
de mer qui font enrôlés pour le fervice du
roi , & diftribués par parties , chacune def-
quelles s'appelle claje. L'ordonnance de
LOUIS XIV , pour les armées navales , de
1689 j règle tout ce qui concerne les claffes ,
& le déîail?^ivant en eft extrait.
Il y a un enrôlement général fait dans les
provinces maritimes du royaume , àos maî-
tres , pilotes , contre-maîtres , canonniers ,
charpentiers , officiers mariniers , matelots,
& autres gens de mer.
Les provinces font divifées en divers dé-
partemens , en chacun defquels il y a un
commiiTairc qui tient le rôle des officiers
inariniers, matelots & gens de mer.
Les officiers mariniers & matelots font
divifés par clajfes , favoir dans les provinces
de Guiennc , Bretagne , Normandie , Pi-
cardie & pays conquis , en quatre clajfes :
& dans les provinces de Poitou , Saintonge ,
pays d'Aunis , îles de Ré & d'Oleron , ri-
vière de Charante , Languedoc & Proven-
ce 5 en trois clajjes ; ce qui forme fèpt clajJeA.
Chaque clajfe doit fervir alternativement
de trois ou quatre amiées l'une , fiiivaiu la
C L A
divifion qui en aura été faite , & le fervice
commencera au premier janvier de chaque
année. Les officiers mariniers & matelots
doivent toujours porter fiir eux les bulletins
qui leur font délivrés par les commilfaires.
Il eft défendu aux matelots de s'engager
pour aucune navigation , à moins qu'ils
n'aient été enrôlés , & n'aient retiré leur
bulletin. Défenfe aux capitaines & maîtres
de navires de les employer , à peine de 500
liv. d'amende pour la première fois , & peine
corporelle pour la féconde.
Ceux des clajfes qui ne font point dans
leur année de fervice , peuvent s'engager
avec les marchands & les navigateurs parti-
culiers ^ mais il eft défendu aux maîtres de
navires d'engager aucun matelot l'année de
fon fervice , ni pour aucun voyage long qui
puifle empêcher leur retour pour ce temps.
Et pour cet effet , le rôle de leur équipage ,
où l'année de la clajfe de fervice de chaque
matelot fera marquée , doit être vifé par le
commiffaire ou commis aux claffes établi en
chaque département. ( Z )
CLASSIQUE , adj. ( Gramm. ) Ce mot
fè dit des auteurs que l'on explique dans les
collèges ^ les mots & les façons de parler de
ces auteurs fervent de modèle aux jeunes
gens. On donne particulièrement ce nom
aux auteurs qui ont vécu du temps de la ré-
publique , &: à ceux qui ont été contempo-
rains ou prefque contemporains d'Auguftc ^
tels font Térence , Céfar , Cornélius Né-
pos 5 Cicéron , Sallufte , Virgile , Horace ,
Phèdre , Tite-Live, Ovide, Valere.Maxime,
Velleius Paterculus , Quinte-Curce , Ju-
vénal, Martial & Frontin ^ auxquels on
ajoute Corneille Tacite , qui vivoit dans le
fécond fiecle , auffi-bien que Pline le jeune ,
Florus , Suétone & Juftin.
Clajfique fe dit auffi des auteurs même
modernes qui peuvent être propofés pour
modèle par la beauté du ftyle. Tout écrivain
qui penfe folidement & qui fait s'exprimer
d'une manière à plaire aux perfonneS de goût,
appartient à cette claife : on ne doit chercher
des auteurs clajfiques que chez les nations où
la raifon eft parvenue à un haut degré de cul-
ture , où la vie fociale & le commerce des
hommes ont porté l'entendement & le bon
goût fort au-defliis des fèns groffiers : ce
n'eft que là que les hommes commencent à
C L A
trouver dn pîalfir dans des objets intellec-
tuels & dans des fentimens délicats :/ alors
ceux qui font doués d'un jugement & d'un
goût plus exquis , fe trouvent encouragés à
confidérer avec plus d'attention des objets
qui ne tiennent pas immédiatement aux
fens j ils découvrent des rapports plus déliés ,
que le vulgaire n'apperçoit pas : un nouveau
champ de plaifirs pour la fociété fe préfènte
à leurs regards , & l'infinie variété des objets
rend cette iburee inépuifable : le monde in-
telleéhjel , les penfées , les fentimens , for-
ment pour eux une nouvelle nature, un
autre univers fécond en événemens intéref-
fans , en heureufes ccmbinailbns , en vues
riantes , & incomparablement plus riche
en plaifirs que la nature grofliere qui n'agit
que fur les fèns extérieurs: celui quia trouve
les avenues de ce monde invifible , porte
avec foi tout ce qu'il faut pour une conver-
làtion agréable & des récréations honnêtes ^
il développe dans le commerce de la vie
plufieurs fceues de ce monde-là ; il s'attire
l'attention , & un goût plus délicat com-
mence à fe répandre de tous côtés ^ on ap-
prend à eftimer des chofès que jufqu'alors
on n'avoit pas même apperçues. On regarde
ceux qui ont découvert ces nouvelles fources
de plaifirs honnêtes, comme les bienfaiteurs
refpeftables de la fociété ^ l'honneur qu'on
leur rend , redouble leurs efforts ^ ils font de
nouvelles obfervations fur le monde moral ,
& apportent tous leurs foins à communiquer
leurs recherches aux autres de la manière
la plus parfaite : le bon ton , la raifon ,
Je goût s'introduifent dans les fociétés choi-
lies : les auteurs commencent à paroître ,
& leurs ouvrages deviennent clajfiques pour
la poftérité , parce qu'ils font puifés dans la
nature même , dans la fource inaltérable du
beau &: du bon.
On eft tenté de croire que l'homme n'a
reçu qu'un degré déterminé de fagacité ,
pour pénétrer dans la nature des objets
moraux ^ qu'il ne fauroit aller plus loin , &
que dans chaque nation les meilleures têtes
ont atteint ce degré-là. Nous voyons du
moins que les écrits àes hommes de génie
^e tous les fiecles & de toutes les nations ,
plaifent par-tout où la raifon eft déjà par-
venue à-peu-près à ce dernier degré de cul-
ture : ce fom là les vrais auteurs clajfi-
C L A m
^i/« pour toutes les nations de la terre.
Mais chez un peuple dont la raifon n'eft
pas encore cultivée au plus haut point , le
meilleur auteur qui s'y formera , fora ap-
plaudi , plaira, deviendra célèbre parmi fei
contemporains , & cependant ne fora jamais
auteur claffique : ce droit n'appartient qu'aux
.meilleurs écrivains de la nation la plus
éclairée & la plus polie.
La fimple culture de l'entendement , qui
ne s'attache qu'aux abftraâions & à l'analyfo
des idées , ne forme point à' auteur clajfique ;
il n'y en a pas un foui parmi les fcholaftiques.
Une nation qui ne s'attacheroit qu'aux fcien-
ces exactes , n'en produiroit aucun , & n'en
feroit pas moins de progrès dans ces fcieu-
ces-là. L'entendement clajfique , s'il eft per-
mis de s'exprimer ainfi , ne s'occupe pas
d'abftraftions ç, il n'analyfe point les diverfes
parties de l'objet ^ il fait l'énoncer dans toute
fon étendue avec énergie & fimplicité f, c'eft
un tableau bien fait qu'il préfente à l'imagi-
nation: ce font plutôt des obfervations fines ,
qui foppofent un coup d'œil perçant , que des
raifonnemens exaâs fondés fur le dévelop-
pement des idées : le penfeur abftrait dit
peu en beaucoup de paroles , parce qu'il n'a
en vue que le plus haut degré de ccrtimde :
le penfour clajfique , dit beaucoup de chofes
en peu de mots j il exprime par une fimple
réflexion ou par une courte fentence , le ré-^
foltat d'une longue & profonde méditation.
L'elprit d'obfervation , cette première
qualité d'un auteur clajfique , ne s'acquiert
point par des études abftraites & ne fo
forme pas au fond d'un cabinet ; c'eft dans
le grand monde au milieu des affaires , &
par le commerce des hommes qui font
eux-mêmes doués de ce talent , qu'il fe per-
fed:ionne: la fociété , celle for-tout qui s'oc-
cupe de grands objets , où toutes les facultés
de l'entendement fout mifes en aélion , &c
fo déploient avec rapidité , où il faut d'un
coup d'œil embraffer une multitude de con-
fidérations , & penfor folidement iàns avoir
le temps de réfléchir avec méthode 3 cette
fociété eft la véritable école où l'efprit ac-
quiert la force , le courage mâle & l'affu-
rance quf forment un auteur clajfique ; il n'y
a qu'un heureux génie qui puiffe réufi^r fans
ce focours , & à qui la ledure des bons
auteurs puiffe tenir lieu de tout le refte.
221 C L A
On remarque qu'en tout pays le nombre
des poètes clajfiques l'a emporté fur celui des
bous profateurs ^ la rai fou en eft aifée à trou-
ver : le fentimeut & l'imagination fe déve-
loppent lonç-temps avant l'entendement &
i'eiprit d'obfcrvation. Ainli ces premières
facultés fe perfcâiionnent plutôt chez une
nation que les talens qui fuppofcnt la perfec-
tion du jugement. De-là vient , comir.e
Cicéron l'a déjà obfervé , qu'il eft plus aifé
de trouver un grand poète qu'un grand ora-
teur. Multb tamen pauciores oratoris quhm
poetcc boni reperientur. De orat. lib. I. ( Cet
article efî tiré de la Théorie générale des
beaux-arts de M. SuLZER. )
En latin l'adjeclif clajficus n'a pas la
même valeur ou acception qu'il a en françois.
1°. Clajficus fe dit de ce qui concerne les
flottes ou armées navales , comme dans ce
vers de Properce :
Aut canerem Siculce clajjica bella fugœ.
L. II , élég. I , v. 28.
Clajjica corona , la couronne navale qui fè
donnoit à ceux qui avoient remporté la vic-
toire dans un combat naval. Clajficij dans
Quinte-Curce ,4,3,18, fignifie les matelots.
2°. ClaJJici cives étoient les citoyens de la
première claiîê ^ car il faut obferver que le
roi Servius avoit partagé tous les citoyens
romains en cinq clalTes. Ceux qui , félon
l'évaluation qu'on en fait, avoient mille
deux cents cinquante livres de revenu ,
au moins , ou qui en avoient davantage j
ceux-là , dis-je , étoient appelles clajfiques,
ClaJJici dicebantur primœ tantîim clajfis homi-
nes , qui centum Çf viginti quinque millia œris ,
amplius-ve ^ cenjî erant» Aul. Gell. 7, 13.
Clajfici tejles fe difoit des témoins irrépro-
chables , pris de quelque clafFe de citoyens.
Clajfici te fies ^ dit Feftus , dicebantur qui Jig-
nandis teftamentis adhibebantur. Et Scaliger
ajoute : qui enim cives romani erant , omnino
in aliqua clajje cenfebantur ; qui non habe-
bant clajfem , nec cives romani erant,
C'eft delà que dans Aulugelle , 1 9 j 8 ,
autores clajfici ne veut pas dire les auteurs
clajfiques , dans le fens que nous donnons
parmi nous à ce mot \ mais autores clajfici
fignifie les auteurs du premier ordre jfcrip-
tores primx notœ ^ prœjiantijfimi , tels que
Cicéron , Virgile, Horace , ér. {F)
On peut dans ce dernier fens donner le
nom hauteurs clajfiques françois .^ aux bons
auteurs du fiecle de Louis XlV , & de celui-
ci \ maii on doit plus particulièrement ap- ;
pfiquerle nom de clajfques aux auteurs qui'
ont écrit tcut à la fois élégamm.ent &: cor-
reâ:ement,tels que Deipreaux , Racine , frc.
Il ièroit à fouhaiter , comme le remarque
iVI. de Voltaire , que l'académie françoife
donnât une édition correde des auteurs claf-
Jiques avec des remarques de Grammaire.
CLATHROISDASTRUM, f m. (Rijl,
nat. bot. ) genre de plante différent du cla-
throïdes , non feulement parce que fon en-
veloppe eft très-peu apparente & a peu de
confiftance , mais encore parce que fa tige
le traverfe dans toute fa longueur de bas
en haut. Micheli , nova pi. gen.~ Foye^
Plante. (I )
CLATHROIDES , f. m. ( Hiji. nat. bot. )
genre de plante dont les individus font ronds
ou eu forme de poires , avant qu'ils fortent
de leur enveloppe |, mais dès qu'ils en font
dehors , ils deviennent elliptiques. Le cla-
tkroides n'eft pas creux coinme le clathrus,*
mais il eft compofé d'un tiftii fort fin , &
difpofé en forme de filet. Ce tiftù renferme
dans les espaces vuides des tas de femences
rondes 6c feches. Micheli , nova pi. gen,
Voye? Plante. (/)
ClfATHRUS, f m. {HiJi. nat. bot.)
genre de plantes dont les individus font de
figure arrondie , ou en forme de poire creufe
comme une bourfe , & ouverte en pluficurs
endroits comine une grille. Avant que le
clathrus forte de fon enveloppe , il fe forme
dans fon intérieur une maffe compofée en
partie d'une forte de glu fort pure , & en
partie d'une matière grife femblabie à de la
farine , un peu détrempée & fortement
battue. Cette maffe contient des femences
très-petites , &. dès que le clathrus fort de
fon enveloppe & s'épanouit , elle fe réfbut
en une liqueur fort puante , qui découle
goutte à goutte. Micheli ,/zov./?/. gen. f^oye^
Plante. (7 )
GLATIR , V. n. ( Chafe. ) Il exprimje
le cri du chien , lorfque cet animal le redoux
ble , & femblç avertir le chaffeur que le
gibier qu'il preffe à la pifte n'eft pas éloigné.
* CLATRA , f. f. {Mythol.) étoit
i félon quelques-uns , la déeflè des grilles ôç.
C L A
Ses ferrures j elle avoit à Rome un temple
eu commun avec Apollon fur le mont Qui-
rinal. Clan a n'étoit , félon d'autres , qu'un
iurnom d'Ifis.
CLAVAGE, f. m. {Jurifprud.) étoit un
droit que payoient ceux qui entroient en
prifon. Il en eft parlé dans les privilèges ac-
cordés par Charles VI , à la ville de Figeât ,
au mois d'août 13945 an. 46. Solvant duo-
decim denarios pro clavagio. Rec. des ordon-
nances de la troifieme race , tom. Vil , pag,
66%. {A)
CLAVAIRE, f. m. {Jurifprud.) nom
que l'on donnoit anciennement à celui qui
avoit la garde des clés d'une ville , ou du
tréibr , ou du chartrier. Cet officier avoit
en quelques endroits une jurifdicHon. Voye^
le recueil des ordonnances de la troifieme
race , tome VU , page 679 , & thiji. de
Dauphiné j /'^r Valbonay. (A)
CLAVARIA , f. f. ( Hift. nat. bot. ) genre
de plante charnue , qui n'a point de rameaux ,
& qui relTemble à une maffue. Il eft allez
rare d'en trouver qui foient creufes. La fiir-
face extérieure eft unie & parfemée de pe-
tites femences. Micheli. nov. pi. gen. Voyei
Plante. (/)
*CLAVARIUM, {Hiji.anc.) don en
argent que les empereurs faifoient diftribuer
aux foldats , pour le fournir des clous ué-
ceifaires à leurs chaufTures.
CLAUDE (Saint-)-, Géog. mod. ville
de France en Franche-Comté , fur la rivière
de Lifon. Long. 23 , 35 ^ lat. 46 , 20.
CLAUDIA , ( Hiji. Rom. ) veftale , fut
accufée d'avoir laiifé éteindre le feu iàcré.
Pendant qu'on inftruifoit fon procès, on
prétend que la déeffe Vefta fit un miracle
pour manifefter fon innocence. L'on avoit
fait venir de Phrygie le fimulacre de la mère
des dieux. Le vailfeau chargé de cette pré-
cieufc relique refta à ièc fur le rivage. La
confternation fut générale , on craignit que
ce ne fût une punition de la déelfe , offenfée
de ce qu'on l'avoit tirée d'un temple où elle
avoit de noinhreux adorateurs. Claudia ,
dit-on , attacha le vaifîèau à fa ceinture ,
& le traîna fans effort jufqu'au milieu de
Rome. Ce prodige prétendu confondit fes
calomniateurs, Scelle fut déclarée innocente.
Claudia , fœur de Claudius Pulcher ,
eut tout l'orgueil qu'on reprochoit à fa fa-
C L A 213
mille. Un jour qu'elle travcrlolt les rues de
Rome montée fur fon char , elle fut arrêtée
par l'afFiuence du peuple qui l'obligea de
ralentir fa marche. Senfible à cette efpece
d'affront , elle s'écria : <t Je voudrois que
mon frère fût encore en vie , & qu'il perdît
une féconde bataille navale peur débar-
rafîèr Rome de cette canaille dont elle eft
furchargée. » Ce fouhait fut regardé comme
une imprécation contre la patrie. Claudia,
fubit la peine décernée contre les crimes de
leze-majefté : ce fut le premier exemple de
la punition de ce crime , qui dans la fuite
fît perdre la vie à tant de citoyens innocens.
(T-N.)
CLAUDIANISTES , branche des Do-
natifles , ainfî appellée d'un certain Claude
qu'elle eut pour chef. Voyei DONATISTES.
CLAUDICATION, f. f. {Médec. chir.)
l'aftion de boiter , le boitement ;, mais ce
dernier terme n'eft pas reçu , & le premier
n'eft qu'une périphrafè. Le mot claudication ,
pris du latin , mériteroit d'être adopté dans
le difeours ordinaire, puifque d'ailleurs nous
n'avons point d'autre terme à lui fubftituer ,
& que les gens de l'art s'en fervent tous dans
leurs écrits.
La claudication dépend de plufieurs cau-
iks différentes. Elle arrive ou de naiffance ,
ou dans l'accouchement par le déboitement
de l'os de la cuiffe avec les os innominés ,
par la mauvaifè conformation de la cavité
cotyloïde de ces os , par la foibleffe des
hanches , par divers aceidens externes , &
par maladie.
La claudication de naifîance efl un vice
de conformation fans remède 3 mais il ne
pafîë pas d'ordinaire des mères aux enfans :
cependant cela peut arriver quelquefois par
des caufès difrîciles à dé.couvrir. Zwinger
a connu une femme boiteufe qui mit au
monde trois enfans afFe6f es de la même in-
commodité. ■ •
Dans toutes les efpeces de luxatrons acci-
dentelles du fémur , comme aufîi dans fa
fraâiure , l'adion de boiter fuit nécefîaire-
ment, & ne fe guérit que quand larédudion
a été biîHi faite. Quelquefois de fîmples coups
ou de légères chûtes ont occafioné une ef-
pece de luxation de los de la cuifîè , qui
donne un épanchement de fj'novie , relâche
hs ligamens , chaiîè la tête de l'os hofs de
124 C L A
fa. place , & procure abiolument la claudi-
cation ; quelquefois même le chirurgien par
fon mauvais traitement en eft feul la caufè.
Ambroifè Paré prétend que tous ceux qui
ont eu la rotule l'radlurée , reftent néceiiài-
rement boiteux après la guérifbn de cette
fracture ^ cependant l'expérience fait voir
que la rotule fraâ:urée fe guérit, fans qu'on
demeure ni boiteux , ni même incommodé.
J'en trouve des exemples dans Petit & dans
Palfin.
Dans la luxation complète des os de la
jambe , ce qui eft un cas très-rare , le ma-
lade devient boiteux , fi par hazard il ré-
chappe de cette aftVeufe luxation.
Plufieurs praticiens penfent auflî que la
luxation de l'aftragale ne peut jamais guérir
qu'elle n'entraîne la claudication , fti il faut
avouer qu'elle en eft la fuite ordinaire.
Dans la rupture incomplète du tendon
d'achille , non feulement le malade boite ,
mais il ne peut marcher qu'en paffant avec
peine alternativement un pié devant l'autre ,
& en pliant la jambe pour cet effet.
La claudication , qui eft une fuite de l'en-
torfe , ceffe par la guérifon du mal.
La cuiffe , ou la jambe trop longue ou
trop courte , par l'effet de quelque violence
faite à l'enfant quand il eft venu au monde ,
le rend boiteux pour le refte de fes jours, fi
l'on ne tente de bonne heure d'y remédier ,
en effayant de remettre le baffin dans fon
affiette naturelle. On a lieu de préfumer que
Robert III , duc de Normandie , n'étoit
boiteux que par cette cau{è.
La cuiffe & la jambe devenues plus cour-
tes par l'effet du deffécheinent de ces parties ,
à la fiiite de quelque maladie , produifent
une claudication incurable. Il en eft de même
du relâchement des ligamens , lors par exem-
ple que l'humeur de la fciatiquc ankilofe
l'articulation des os innominés.
S'il fe forme un skirrhe dans l'un des
reins , la cuiffe du même côté devient pa-
ralytique , ou du moins boiteufe , mal in-
guériffable.
Souvent il arrive , fans qu'il y ait de luxa-
tion , que la jambe par la feule contrac-
tion ou le fèul roidiffement des mufcles qui
fervoient à k$ mouvemens , fe retire au point
qu'on ne peut marcher fans boiter. Le re-
mède à cet accident , eft d'employer des
C L A
fomentations émollientes , jointes aux rélô-
lutifs fpiritueux , des bains de tripes gras 8c
adouciffans , des douches d'eau chaudes mi-
nérales , & de porter un foulier garni d une
femelle de plomb , dont le poids foit pro-
portionné au retirement plus ou moins grand
de la jambe.
La foibleffe des hanches produit la claudi-
cation des deux côtés. La caufe de cette dif-
grace vient quelquefois des nourrices & gou-
vernantes qui laiffent marcher leurs enfans
feuls & fans aide , avant que les parties qui
doivent foutenir le poids de leur corps aient
acquis la fermeté néceffaire.
Pour corriger cette faute , quand on s'en
apperçoit dans les commencemens , on re-
courra à des ceintures qui compriment tout
le tour du ventre , & qui foient bien garnies
vers les hanches : cette compreffion donne
de l'alfurance & de la force dans le mar-
cher , en raffermiffant les hanches. Il faut
outre cela les bafîiner plufieurs fois par jour
pendant plufieurs mois avec des décodions
aftringentes , & continuer de raffermir les
parties par l'ufage du bandage.
Il nous manque en chirurgie un traité fiir
la claudication. Perfbnne n'en a difcuté les
diverfes caufes & les remèdes ; & il y en a
dans certaines circonftances \ car enfin c'eft^
une difformité fâcheufe , digne de toute
l'attention de ces hommes qui font nés pour
le public.
Les boiteux de naiffance , ou devenus
tels par accident , ne méritent que davan-
tage d'être plaints , quoiqu'il fe puiffe trou-
ver dans cet accident àe% fujets légitimes de
confolation, & quelquefois même d'une con-
fidération plus particulière qui en réfulte. Ils
n'échappèrent point à cette femme lacédé-
monienne , qui dit à fon fils boiteux d'une
bleflure qu'il avoit reçue en défendant fa pa-
trie : <t Va , mon fils , tu ne faurois faire un
» pas qui ne te faffe fouvenir de ta valeur ,
» & qui ne te couvre de gloire aux yeux de
» tes concitoyens. » Voyei Boiteux. Cet
article eft de M. le chev. de Jav court,
CLAUDIUS NÉRON , ( Hift, Rom, )
étoit fils de Drufus , dont Livie étoit encein-
te , lorfqu'Augufte la fit paffer dans {on lit.
Il naquit à Lyon fous le confulat de Jules
Antoine &: de Fabius l'Africain. Il étoit à
peine fcrti du berceau qu'il perdit fon père
U
C L A
II étoit {[ mal orgaiiifé , que fa mcre Anto-
nie avoit coutume de dire qu'il ctoit l'ou-
vrage bizarre de la nature en délire. Calig^ula,
qui pouvoit l'envelopper dans le miCurtrc du
refte de fa famille, cnit ne pouvoir mieux
punir les Romains , qu'en leur donnant un
pareil empereur. Son éducation fut fort né-
gligea, parce qu'on la crut impuiiTante à cor-
riger les vices de la nature. Augufle lui dé-
féra les honneurs confulaires , mais il ne lui
permit pas d'en remplir les fonctions. Privé
des dignités auxquelles il étoit appelle par
fa nailfance , il fe retira à la campagne , où
confondu avec des hommes agrelies & fans
mœurs , il fe livra aux excès de la plifs fale
débauche , & fur-tout au jeu des dez. Quoi-
qu'il n'eût aucune des vertus qui attirent le
refpeft , on lui rendit en public tous les hon-
neurs qu'on déféroit aux enfans des Céfàrs ,
& à force d'être plaint, il parvint à être aimé.
Augufte , en mourant, le recommanda aux
armées , au peuple & au fénat. II lui légua
une fomme confîdérable pour foutenir fa
dignité dans la vie privée. Son neveu Cali-
gula le choifit pour collègue dans fon con-
fulat ^ mais il ne lui laifla que l'ombre du
pouvoir dont il iè réfèrva la réalité. Ce ne-
veu infolent l'admettoit à fa table , moins
pour lui faire honneur , que pour s'amufer de
fon imbécillité. Après la mort de Caligula ,
il fe cacha dans des monceaux de tapifferie ^
il fut découvert par un foldat , qui le mena
au camp pour y attendre fon fort. Le fénat ,
qui ne vouloit plus d'empereur , fê trouva
partagé dans fcs opinions. La lenteur de fes
délibérations impatienta le peuple , qui exi-
gea de donner promptementunchef à l'em-
pire : il fallut condefcendre aux vœux de la
multitude. Claudius , qui n'attcndoit que la
mort , fut proclamé empereur. L'armée lui
prêta ferment de fidélité. Il promit à chaque
foldat quinze fefterces ^ & ce fut depuis
l'exemple de cette libéralité, que l'empire
devint la proie de celui qui favoit le mieux
payer. Quoiqu'il fût trop foible pour foute-
nir un fî grand poids , il fit à fon avènement
plufieurs aèks de bienfaifance qui lui conci-
lièrent les cœurs. Il abolit la mémoire de
toutes les violences commifes pendant les
deux jours qui avoient précédé fon élévation.
Il ne punit que les tribuns & les centenicrs
qui avoient trempé leurs mains dans le fang
Tome FUI,
C L A î 2 y
cîe Caligula. Sa piété envers fès pafenslui fît
encore beaucoup d'honneur. Plein de refpe£l
pour la mémoire d'Auguftc , il ne voulut
jurer que par fon nom , & lui fit rendre les
honneurs divins. Il eut la m.ême piété pour
fon aïeule Livie , à laquelle il déféra le titre
à'AuguJfa , qu'elle avoit eu la modeftie de
refufer de fon vivant. Il fit célébrer àos jeux
en mémoire de fon père , de fa m.ere & de
fon frère. Il donna des couronnes de viéloire
à ceux qui remiportercnt le prix dans les
combats livrés pour l'honneur de fa famille.
Pour lui , il conferva la fimplicité de fa vie
privée , & refufa prefque tous les honneurs
qu'on voulut lui déférer. Il célébra fans
éclat les noces de fa fille , & la naiffance
d'un de fes neveux. Aucun exilé ne fut rap-
pelle que par l'autorité du fénat. Cet em-
pereur imbécille & fans talent pour gouver-
ner, fe concilia tellement tous les cœurs,
que fur un faux bruit de fa mort, le peuple
furieux fut fiar le point d'exterminer tout
l'ordre des chevaliers , & de traiter le fénat
de parricide. L'émeute ne fut calmée qu'a-
près qu'on fut affuré qu'il n'avoit effuyé au-
cun danger. Quoiqu'il ne fît rien de repré-
henfible , il avoit trop d'incapacité dans les
affaires pour ne pas tomber dans le mépris
des âmes fieres & élevées qui ne pouvoient
iè réfoudre à obéir à un pareil maître. Ou
découvroit chaque jour dans fon palais des
fénateurs & des chevaliers armés de poi-
gnards pour lui ôtcr la vie. Il s'éleva une ré-
volte dans la Dalmatie , qui fut éteinte aufîî-
tôt qu'allumée. Il exerça cinq confulats avec
une parfaite intégrité. Fidèle à la loi , il ne fè
décida que par elle , & n'ufa de fon pouvoir
que pour mitiger les peines & les amendes ;
mais quelquefois il rendoit des jugemens fi
bizarres , qu'il devenoit l'objet des dérifions
du public. Par exemple , ayant ordonné
d'effacer les placards qui notoient un fameux
adultère , il ajouta : à condition toutefois
que la rature n'empêchera point de lire la
condamnation. Quelques mouvemens fédi-
tieux l'appellerent en Angleterre , où il ne
trouva pas de rebelles à punir. Quoiqu'il
n'eût point tiré l'épée , il ambitionna les hon-
neurs du triomphe ^ & à fon retour à Rome ,
il étala dans fà marche \qs dépouilles d'un
ennemi imaginaire. Sa femme Meffaline ,
montée fiir un magnifique charriot, l'accom-
Ff
ii6 C L A
pagna dans fa pompe triomphale. On fît le
dénombrement des citoyens Romains , qui
ie trouva monter après de neuf millions. Le
najubre des fénatcurs étoit extrêmement di-
minué. Les profcriptions avoient éteint les
plus illullrcs familles , & l'on ne voyoit pref-
■que plus aucun àes dcfcendans de ceux que
■Romuîus & Eiutus avoient créés. Il en re-
trancha un grand nombre , dont la vénalité
6c les mœurs' ctoient décriées :> & ce vuide
fut rempli par des homm.es d'une probité
éprouvée. Ce fut en reconnoiflance de ce
bienfait, que le condil Vipfanius propofà de
lui déférer le titre de père de la patrie : mais
Claudius l'ayant repris de flatterie , fut affez
rnodefte pour rejeter ce nom. Méfiai ine don-
noit au milieu de Rome le icandalc de la
prollitution : fans frein & fans pudeur dans
îjs inipudicités , elle varioit fans ceife fes
débauches pour empêcher its defirs de s'é-
teindre. Elle profita d'un voyage de fon
mari à Oftiepour fe marier avec Silius, che-
valier Ron:iain. Ce mariage effronté s'ac-
complit avec la plus grande pompe. On con-
iiilta \qs arufpices , on olTrit des fàcrifices ,
on fit \\\\ banquet fomiptueux ^ & \qs deux
nouveaux époux furent conduits avec céré-
monie dans la couche nuptiale. Claudius ,
inllruit de ce fcandaie , fut dans la nécelîité
de le punir. Meifaline ce put fe difiimuler le
danger qui la menaçoit. Elle apprit le retour
de Claudius dans le temps qu'elle céiébroitla
fëte des vendanges , fuivie d'une troupe de
bacchantes couvertes de peaux de tigres &;
de panthères. Elle paroifibit au milieu de
cette troupe , le cothurne aux pies , le thirfe
à la main , é<: à iiç's côtés Silius , entortillé
de lierre & bondiiîant avec des ménaiies.
Des niifléaux de vin couloient de tous côtés ,
ti. l'ivreiTe du vin & de la joie étoit générale.
Aleflaline voyant fondre fur elle la tempête
du côté d'Oflie , fe retira dans les jardins de
Lucullus , fe flattant de fléchir , par fes
larmes & de feintes careiîès , un époux
qu'elle avoit tant de fois outragé. Elle em-
ploya le miniikre de la plus ancienne des
veftales. Elle lui confia fes enfans , & la pria
de \es conduire à leur père. Elle traverfa
Komie fans avoir d'autre efcorte que la po-
pulace, qui l'accabla de fonm.épris. Claudius
refuia de la voir &; de rcutendre. Il le ren-
dit au cSnip j où les foldats demandèrent la ,
C L A
punition do,^ coupables. Tous ceux qui étoient
attachés à Mefl"aline, furent condamnés à la
mort. Silius , fon amant adultère , follicita
fon iiipplice , & il fut exécuté le premier.
Tant de fang répandu fèmbloit avoir fatis-
fait le ftupide Claudius ; Meflaline ne celîbit
de lui écrire , tantôt avec tendrcil'e & tantôt
avec miCnace. Narcifib , qui préveiyoit fa
ruine, s'il ne la prévenoit , détermina Clau-
dius à conferitir à fa mort. Il s'avance à la
tête de fes fatellites vers les jardins de Lucul-
lus : à leur vue , Meflaline effarée fè faifit
d'un poignard pour s'en frapper ^ mais fà
main tremblante fut fans force j & pendant
qu'elle héfite , un tribun lui plongea fon épée
dans le corps. Sa mère , qu'elle avoit dédai-
gnée dans fa grandeur , fut à fes côtés jufqu'à
ce qu'elle eût rendu le dernier fbupir , & ce
fut elle qui prit loin de ià fépulture. Claudius
en reçut la nouvelle à table , fans donner
aucune marque de joie ni de triftefl^e. Il \it
avec la même indifférence , Ces enfans pleu-
rer leur mère, & fes accufateurs s'en réjouir.,
Après la mort de Meifaliiie , toutes les-
beautés de Rome briguèrent l'honneur de la
remplacer dans fon lit. Ce n'étoit point le
vœu de l'amour , toutes n'écoutoient que
l'ambition. Agrippine fut préférée^ & commue
elle étoit nièce de l'empereur , cette union:
parut inceiLueufe. Claudius, fier de s'être élevé
au-deifus des loix , fe rendit au fénat , où ces;
fortes de mariages furent autcrifés. Rome ,,
depuis ce moment , devint fefclave d'une-
femme aufli ambitieufe qu'impudique , qui
fit plier les hammes & l^Bloixibus fès volon-
tés. Quelques aéiions de démence lui conci-
lièrent d'abord l'îiffediion des Romains. Sé~
neque rappelle de fon exil pour lui confier
féducation de Néron ,. fut revêtu de la pré-
ture*. Ellefeiervitde fon efjjrit pour applanir
les obfl:acle3 qui fènibloient éloigner fon fils,
de l'empire. Cette mère , . aveuglée par fà.
tendreflè , fàcrifia ion bonheur à fon ambi-
tion» Elle lit époufer 0^a\'ie à Néron , hon-
neur qui le rendit égal en tout à Britannicus..
Ses delleins furent favcrifés par l'intrigue des-
courtifàns , qui , complices de la mort de
Meflaline , avoient à redouter le reirentim.ent
de fon fils s'il parvenoit à l'empire. Agrip-
pine , deveiiue l'arbitre des deliinées publi-
ques & particulières , fit chafler de Rome Se
de l'Italie celles qiii pouvoient lui diiputer le
C L A
fceptre de la beauté. Pallas , favori de Clau-
dius^ avoit été l'artifan de fon mariage avec
Agrippine qui en fît rinftrument de fon am-
bition. Néron adopté p:ar fcs confeils , jouit
dès ce moment des prérogatives attachées à
l'héritier de l'empire. Briîaniiicus négligé , fît
éclater fbn mécontentement , qu'on attribua
aux conieils de lès fèrviteurs , qui tous furent
punis par l'exil ou la mort. On leur liibllitua
des e'pions qui rendirent un compte infidèle
des démarches les plus innocentes de ce prince
infortuné. Le fuccès des complots d'Agrip-
jîine dépendoit des difpolîtions de l'armée.
Elle fît donner le commandement à^i^i cohor-
tes prétoriennes à Burrhus , capitaine eflinié.
qui n'oublia jamais qu'elle étoit fa bienfai-
trice. Cette femme, enivrée de fà grandeur,
fe faifoit porter fiir un char jufques dans le
capitule, privilège dont \q% feuls miniftres de5>
dieux avoient joui jufqu'alors : mais c'étoit
pour la première fois que les Romains ref-
pedoient dans la même perfbnne , la mère ,
la fœur , la fille & la femme d'un empereur.
Il s'éleva des féditions dont Claudius fut fur
le point d'être la viâiime. L'Italie fut frappée
du fléau delà flérilité. On imputa à fa négli-
gence \zs maux que l'on avoit foufferts , &
ceux dont on étoit menacé. Le péril qu'il
courut dans les émeutes populaires , lui fit
chercher les moyens d'entretenir l'abondance
dans la capitale. Il encouragea , par des ré-
compenfes , des négocians à tirer des grains
des pays étrangers : il promit des dédomma-
gemens à ceux qui effuieroient des pertes ou
des naufrages. Il fournit des vaiffeaux & de
l'argent pour cette entreprife. La loi qui dé-
fendoit de fe marier après foixante ans fut
abolie \ il fut permis à tout âge de donner des
citoyens à l'état. Il offrit enfuite , au champ
de Mars > le fpeâacle d'un combat naval.
Plufieurs arrêts furent lancés contre les aftro-
îogues & les devins \ mais de fî fages loix
relièrent fans exécution. Claudius ne pretoit
que ion nom à tout ce qui étoit ordoiuié
dans Rome &lcs provinces. Toute la réalité
du pouvoir réfidoit dans NarcifTe & Pallas ,
hommes nouveaux qui commandoient aux
defcendans d'un peuple de rois. Narciile ,
rebuté par l'impérieufe Agrippine, fe repen-
tit d'avoir perdu MefTaline. Il fe jeta dans
le parti de Britanuicus , qu'il promit de fervir
contre Ion co.icurrent à l'empire, La cour
C L A ^ 117
étoit agitée de factions , lorfque Claudius ,
tombé malade, fe fît tranfporter à Sinueilë ,
où il fe flattoit que la pureté des eaux & de
l'air lui rendroit fcs forces. Agrippine profita
de fbn éloignement de Rome où elle étoit
environnée de f})e£t:iteurs ^ elle crut qu'un
lieu fblitaire étoit favorable à l'exécution de
fcs horribles defléins. Elle fut long-temps
incertaine fur les moyens de fe débarrafTcrdfr
Claudius. Elle craignoit qu'en lui donnant uu
poifon lent , elle ne lui lailfât le temps de ré-
fléchir d'avoir préféré Néron à fon propre
fils. D'un autre côté , il étoit à craindre qu'en
ufant de trop de précipitation ^ elle ne prît
point allez demefùres pour voiler fon crime*
Enfin , elle eut recours au miniftere d'une
fameufb empoifouneuie ^ qui lui fournit lui.
poifon fubtil qu'elle fit fervir à fon mari dans
un plat de champignons. Claudius , dont les'
organes étoient ufés à force de débauches ^
réfîfta à la violence du poifon, qui ne fit qi.e
le provoquer au vomillement» Agrippine ,
tremblante , eut recours à Xénophon , vdi-
decinde l'empereur , qui .depuis long-temps ,
lui proflituoit le fecours de fon art. Ce mé--
decin , fous prétexte de faciliter le vomifFe-
ment , lui enfonça dans le gofier une plume
empoifonnée , dont il mourut, Agrippine
tint pendant quelque temps fa mort cachée
pour alfurer le trône à Néron. Elle afFecla la
plus vive douleur pour mieux tromper Bri-
tanuicus & izs fœurs. Quand elle eut pris fbs
sûretés , elle fit ouvrir les portes du palais ^
&: Néron , accompagné de Burrhus à la tête
des cohortes prétoriennes , fut conduit an
camp , où , après avoir fait des largelfes aux
foldats , il fut proclamé empereur, Claudius
fut plus méprifé pour fa ftupidité que pour
fes vices : ce n'ell pas qu'il n'eût un fonds de
cruauté , & ce caractère fanguinaire fè ma-
nifefloit dans le plaifir qu'il prenoit à voir
donner la queftion aux coupables. Il afTiftoit
aux fupplices y & fur-tout à celui des parri-»
cides. Il aimoit à voir la figure & le mou-
vement de vifage de ceux qui expiroient , &
jamais il ne manquoitde fe trouver àlhcure;
de midi au combat des gladiateurs contre les
bêtes fauvages. Cet empereur, qui fe plaifoit
à voir couler le fang , étoit le plus lâche de
tous les hommes. Il fut empoiibnné à la £ou
xante-quatrieme année de fon âgé , & à
la quatorzième de fon règne. Lep^upic.ôc
F f i
2iJ CL A
le fénat curent la lâcheté de le mettre au
nombre des dieux. Cet honneur fut aboli
par Néron & rétabli par Vefpafien. ( T-n. )
Claudius (Flavius ), Hijf. Romaine^
iccond du nom , parvint à l'empire après la
mort de Galiien , l'an 66ç). A fon avéncincut
à l'empire , il trou\a toutes les frontières
envahies & dcfolées par les barbares. Il mar-
cha contre les Sarmatcs , les Gctes, les Scy-
thes & les Quades , dont il fit un horrible
carnage dans différcns combats. Quoique
toujours vi£loricux, & qu'il ne dût Tes fuccès
qu'à fes talens pour la guerre , il s'acquit en-
core plus de gloire par la fageiFe de ion ad-
ininiltration , qui rendit à la république fa
tranquillité & fon éclat. Le fcnat, par re-
connoiifance , lui confacra une ftatuc d'or
dans le capitole. On prétend qu'il étoitfiisde
l'empereur Gordien , dont il avoit le carac-
tère doux & bienfaifant : Galiien , par amour
pour la république , l'avoit défigné fon fuc-
ccifeur en mourant j il lui avoit même en-
voyé tous les ornemens de la dignité impé-
riale : le peuple , le fénat & l'armée ne con-
tefterent point cette nomination, & tous fè
félicitereut dans la fuite d'obéir à un empe-
reur qui ne s'occupoit que du foin de perpé-
tuer la félicité publique. Il ne gouverna que
deux ans. C/ûz/i/'^j,'fentantfa fin approcher,
voulut encore être le bienfaiteur de la pofté-
rité en recommandant Aurélien au fénat & à
l'armée. Cette recommandation lui valut
l'empire, & l'on refpeâia les volontés de
Claudius jufques dans fon tombeau. Il lailfa
lin frère nommé Quintillus Aurdius , que le
fénat proclam.a Céiar Augufte , mais ce fut
un fantôme palFager fur le trône. Auréliea ,
à la tête des légions, marcha vers Rome
pour y faire valoir fes droits. Quintillus fe
icntant trop foible pour lui rêfifter , s'ouvrit
les veines , & mourut dix-ièpt jours après
qu'il eut été déclaré Céfar. Claudius fit re-
naître \<à% beaux jours de Trajan , dont il eut
Ja modération &c l'équité. Une femme per-
fuadée de fa dreiture , l'aborda , en lui di-
fant : Prince , un officier , nommé Claude ,
s'eft approprié mon champ fous le règne de
Galiien. Je n'ai que ce bien pour fiibfiHer \
puifque vous êtes empereur , ufez de votre
autorité pour me le faire reftituer. Claude re-
connut qu'il étoit l'officier dont cette femme
parloit 5 il lui répondit avec boute : Votre
CL A
bien voua fera rendu \ il eft jufte que Claude
empereur reftitue ce que Claude particulier a
ufurpé. ( T-iv. )
Claudius Pulcher ne doit fa célébrité
qu'à Ïq.^ défaites & à fon mépris pour la re-
ligion dominante. C'étoit un de ces hommes
qui , foulant aux pies l'abfurdc idolâtrie ,
n'avoient pas affez de lumière pour rendre
gloire au fcul Dieu vivant & véritable. Il
perdit une bataille navale en Sicile contre les
Carthaginois. Il voulut avoir {:à revanche
avec Afdrubal , qu'il fe fiattoit de furprendre
à l'embouchure du port de Trepani. Les
aruipices , dit-on , voulurent le détcurner de
cette entreprife, en lui repréfentant que les
préfàges éîoient finiflres. Il les tourna en ri-
dicule, £;iperfi{tadans faréfoiution. Comme
il Iqrtoit de P».ome , le chef des arufpices fè
préfenta fur fbn pafTage , & lui montra la
cage où les poulets facrés étoicnt renfermés^
Se comme on lui fit connoître qu'ils ne vou-
loient pas manger, ce qui étoit un mauvais
préfage , il les prit Se les jeta dans le Tibre
en difiint : Puifqu'ils ne veulent pas manger
il faut les faire boire. Les prêtres fcandalifés ,
vomirent des imprécations contre lui. Leurs
prédirions furent accomplies. Sa flotte fut
engloutie fous les eaux. Le peuple faperili-
tieux attribua ce défordre à fon mépris pour
la religion. Le fénat , pour fatisfaire la mul-
titude & l'ordre des prêtres , dégrada Clau^
dius de toutes {^s dignités. Il fut condamné à
une amande, & forcé de nommer lui-même
un diâ:ateur. Claudius^ qui méprifoit autant
fes concitoyens que les dieux , nomma \\\\
certain Glaucia^ cipcce d'imbécille qui étoit
l'objet des dérifions publiques. Ce choix re-
doubla l'horreur que les Romains avoient
pour lui. Claudius fe confola dans la retraite
& les plaifirs de fa dégradation &. de fon in-
famie. Il étoit riche , il ne manqua point
d'amis, ou plutôt de complices. ( T-^. )
Claudius (Publius) eut l'orgueil &:
les vices de fes ancêtres fans avoir aucune de
leurs vertus. Son courage audacieux le m.it à
la tête de tous les tumultes populaires qui
préparoientla ruine de la république. Amant
de toutes les femmes , il n'airaoit à les fubju-
guer que pour infulter à leur foiblelTe. Pom-
peia , femme de Céfar , alluma fa paffion.
Il s'introduifit fecrétement chez elle déguifé
en joueufc d'iiiHrumeat. Ayaat été décou-
C L A
vert , il fut falfi & cité au tribunal des loix
pour être ]ugé & puni. Cicéron , qui fut ion
accufateur, lança contre lui tous les foudres
de fon éloquence ^ mais les juges retenus par
le crédit de fa famille, & peut-être corrom-
pus par iès larg:elîês , le renvoyèrent abfous.
S'étant fait élire tribun par fà fad:ion , il
îibufa du crédit de fa place pour condamner
Cicéron à l'exil. 11 réduilit en cendres la
maiibn & les métairies de cet orateur. Il
mit à l'encan tous fes biens , mais il ne fe
trouva perfonne pour les acheter. C/audius,
flétri par la débauche , fut tué par iMilon ,
dont l'orateur Romain prit la défenlc. La
harangue qu'il pronojiça eft un chef-d'œuvre
ce l'éloquence oi. du raifonnement ^ mais
elle n'empêcha point que Milon ne fût exilé
à IVlarfeille. Le nom de ce Claudius ne feroit
jam^ais fbrti de l'oubli, il l'éloquence de Ci-
céron n'eût immortalifé i^s vices. ( T-^n. )
Claudius ( Appius ) , décemivir , s'eÂ
rendu honteufemiCnt célèbre par fa pafîion
pour Virginie, jeune Romaine , contre la-
quelle il exerça toutes foi tes de violences.
Cette innocente victime de la brutalité fit
avertir fon père des attentats faits à fa pudi-
cité. Ce vertueux vieillard , chef de cohorte ,
quitte fur le champ l'armée , £i fuivi de qua-
tre cents hommes qui partageoient fon ou-
trage , il fè rend à Rome pour arracher fa
£lle des bras de fon corrupteur. Il obtient la
permillion de la voir ;, ils s'embralfent & con-
fondent leurs larmes. Il lui miontre enfuite
un couteau , Se lui dit : Ma chère Virginie ,
voilà ce qui me relte pour venger ton hon-
neur & le mien. II lui enfonce à l'inftant le
couteau dans le fèin. Il fè dérobe à la fureur
de la multitude , remplie d'horreur &: d'ad-
miration. Virginius rejoint l'armée , qu'il
trouve difpofee à le venger de fon ravillèur.
Elle s'approche de Rome , & campe fur le
mont Aventin. Le peuple fbulevé fc joint à
l'armée. Claudius efl traîné ignominieufc-
ment dans un cachot , où il prévint la honte
de fbn fupplice en fè donnant la mort. Ce
crime fît abolir les décemvirs , qui avoicnt
tyrannifé Rome fous le titre de protecteurs
de la liberté publique. ( T-n. )
CLAVEAU, f. m. ( Archnccl.) efl une
des pierres en forme de coin , qui fervent à
fermer une plate-bande. Lat-cuneu
Claveau à crojfçtu j efl celui dont la tête
CLA 225
retourne avec des afîîfès de niveau pour
faire iiaifbn.
ilts claveaux font ordinairement ornés de
fculpture ^ je dis ordinairement , car il arrive
fouv eut qu'on en fait un trop fréquent ufage.
Ces orneniens ne devroient être employés
que dans le cas où l'ordonnance femible l'exi-
ger , comme dans les façades des bâtimens
de quelque importance , où l'architeûure &
la fculpture annonçant la magnificence , il
paroîtroit à craindre que les claveaux àts ar-
cades ou croifées étant lifîès ne fulfent un
défaut de convenance : mais d'en admettre
jufquc dans les maifons à loyer , dcitinées
au commerce & au logement àcs artifans ,
c'eft prodiguer ce qui doit fcul diltinguerlcs
maiibns àQS grands d'avec la demeure des
particuliers.
Le dcftut de convenance n'ell pas le fèul
que l'en puifîè reprocher dans le cas dont il
s'agit aux décorateurs de nos jours ^ le ridi-
cule de donner à ces claveaux àQS formes
pittoreiques &de travers , efl bien pluscon-
dairiiiable. ^oye^ ce que nous en avons dit
en parlant des agrajfes. (P^
Claveau , ( Art vétérin, ) maladie âiCs
brebis & des moutons '^ eu latin clavola j
fém. pufula , fém. Colum, Elle fe fait con-
noître dans fon commencement par de
petites élevûres ou taclies rouges qui fe
voient aux endroits où la laine garnit le
moins la peau : ces taches ou élevûres fe
changent eniùite en boutons ^ l'animal touf-
fe , &; porte la tête bafîè ^ fon nez devient
morveux & galeux \ enfin il meurt au bout
d'un petit nombre de jours. Si pour lors on
le\'e la peau , on la trouve toute remplie de
pullules , & communément les poumons &
\qs reins plus gros & plus enflés qu'ils n'é-
toient naturellement. Cette maladie fi fré-
quente & fi contagieufè parmi les brebis &
les moutons , a beaucoup de rapport à la
petite vérole qui règne parmi les hommes :
auiîi a-t-elle de tout temps fait des ravages
prodigieux dans les troupeaux \ & c'eil peut-
être de là qu'elle tire fon nom. L'étymolo-
gie importe fort peu, mais ce fèroit une dé-
couverte à^% plus utiles que de trouver un
remède à ce mal , ou du moins une méthode
de le traiter qui diminuât la mortalité du
bétail qu'il attaque. Article de M. le c/u'va"
lier D s Jaucqvut,
ijo C L A
CLAVECIN , f. m. ( Luth.) iiiftrument
de mélodie & d'harmonie , dont on fait
parler les cordes en preflant les touches d'un
clavier femblable à celui de l'orgue. Il eft ,
comme Ton fait , compofé d'une cailfe de
bois de lîx pies &demi de long, fur laquelle
font tendues des cordes de métal. Les cor-
des du delîiis font de Hl de fer très-fin , &
celles des balTes qui font plus greffes , font
de fil de laiton. Il y a fur le devant du cla-
vecin un clavier qui a autant de touches que
l'inftrument a de cordes. Quand on appli-
que le doigt fur l'extrémité antérieure d'une
de ces touchés , fon extrémité poftérieure
s'élève & fait élever dans la même propor-
tion une lame de bois nommiée fautereau ,
qui eft armée d'une petite pointe de plume
de corbeau. Ce petit morceau de plume
reacontre la corde , il la frappe & lui fait
rendre un fon comme (î elle étoit pincée
avec l'ongle.
Les caiffes -qui forment le corps des cla-
vecins peuvent être faites de toutes fortes
deboisindiftinôement^ mais la table d'har-
monie , qui eft celle fur laquelle les cordes
font tendues , eft toujours conftruite du fa-
pin le plus uni & le plus vieux qu'on puilfe
trouver. Les fadteurs de clavecins font venir
de la Lorraine ou de la Suiffe le fapin qu'ils
emploient pour la conflruftion de ces ta-
bles , d'où dépend principalement la bonté
d'un clavecin. Pour les écliffes , c'eft-à-dire
les contours de la caifle du clavecin , ils fe
fervent de planches minces de tilleul, de
chêne , même quelquefois de noyer '^ mais
ce dernier bois n'eft plus en ufage depuis
qu'on ven.iit le dehors à^i clavecins avec
autant de propreté , de richeffe & de goût
qu'on le fait à Paris. La carcaflé du dedans ,
qui foutient tout le corps du clavecin , eft
de bois de fapin ou de tilleul : les deux che-
valets du diapafon , ainfi que les autres qui
font près des chevilles , font ordinairement de
bois de chêne •., avec la différence que celui de
foâave eft beaucoup plus bas , & beaucoup
plus près des chevilles que l'autre, hefom-
mier , qui eft l'endroit où les chevilles font
adaptées , eft d'un bois dur , comme , par
exemple , du chêne , de l'orme ou du fy-
comore , & il eft très-folidement affermi par
les deux côtés pour pouvoir foutenir la tente
des cordes , qui dans un clavecin à grand
CL A
ravalement & à trois regiftres contenant
cent quatre vingt-trois cordes tendues avec
toute la force requife , équivaut à un poids
de dix-huit cents livres.
Le bois intérieur des daviers eft de tilleul
le plus uni;, les placages qui font collés artif-
tenient fur les touches du clavier , font d'é-
benc pour les touches du genre diatonique ,
& d'une petite palette d'os de bœuf pour
celles du genre chromatique. On faifoit au-
trefois d'ivoire ces palettes j mais comme elles
étoient fujettes à jaunir au bout d'un certain
temps , on a mieux aimé employer l'os de
bœuf qui refte toujours blanc. Les regijfres^
ainii que les guides intérieurs qui y ont rap-
port , font de bois de tilleul , & les regiftres
font garnis de peau pour empêcher le cli-
quetis des fautereaux qui font faits de poirier
le plus liffe & le plus uni. h.dibarre quiregle
l'élévation des fautereaux , & par conféquent
l'enfoncement des claviers , eiè une planche
étroite , très-maffive de bois de tilleul ou
d'orme : elle eft garnie en deffous de deux
ou trois bandes de drap qui empêchent d'en-
tendre le choc des fautereaux contre la barre:
elle eft affermie par les deux bouts avec àQi
crochets , de fort fil d'archal.
Le fàvoir d'un bon fafteur de clavecins
confifte à donner à fon inftrument un fon
mâle , fort argentin , moelleux , & égal dans
tous les tons. La plus grande partie de ces
bonnes qualités dépend de la bonté de la
table , de la jufteffe du chevalet du diapafon ,
& du ménagement d'un contrechevalet in-
térieur qui eft collé contre la table de l'har-
monie, entre les deux chevalets du diapafon,
& qu'on appelle boudin en termes de l'art.
Ce boudui , ainfi que les barres de traverfe
placées du côté des balles du clavecin , entre
l'écliffe terminante ou la planche droite qui
eft du côté des baffes fur le derrière du cla-
vecin , &le diapafon ou chevalet de l'oâave,
contribuent beaucoup à la belle qualité du
fon lorfque ces pièces font ménagées félon
les vrais principes de l'art.
L'aifance du clavier & l'égalité de la force
à l'égard de chaque touche , eft auili un des
points qu'un fadleur de clavecins doit nécef-
fairement obferver , en donnant le juftc con-
trepoids relatif à la force du doigt qui anime
le clavier , & en évitant que le clavier n'en-
fonce pas trop , ce qui le rend incommode
C L A
a jcuer , ni trop peu , ce qui le rend coriace
& diminue le volume du fbn.
Les meilleurs clavecins qu'on ait eus juf-
qu'ici pour le beau fon de l'harmonie , font
ceux des trois Ruckers (Hans, Jean & An-
dré ) ainfi que ceux de Jean Couchet , qui ,
tous établis à Anvers dans le lîecle pafié , ont
fait une immenfe quantité de clavecins ,
dont il y a à Paris un très-grand nombre
d'originaux , & reconnus pour tels par de
vrais connoifleurs. Il s'eft trouvé de notre
temps des faâ:eurs qui ont copié & contre-
fait les clavecins des Ruckers à s'y mépren-
dre pour l'extérieur , mais la qualité du (on
a toujours découvert la fupercherie. Cepen-
dant ces incomparables clavecins d^s trois
Ruckers & de Couchet , tels qu'ils font fortis
des mains de ces maîtres , deviennent ab-
iblument inutiles aujourd'hui ^ car ces grands
artiftes , qui ont entendu fupérieurement
bien la partie de l'harmonie , ont très-mal
réuflî dans la partie du clavier. Outre cela
tous ces clavecins Flamands font fi petits que
les pièces ou fonates qu'on fait aujourd'hui
ne peuvent point y être exécutées : c'eft pour-
quoi on les met à grand ravalement ^ en leur
donnant foixante 6c une touches au lieu de
cinquante qu'ils avoient autrefois. D'ailleurs ,
au lieu de cent cordes ( car la plupart de ces
clavecins dQS Ruckers n'ont été faits qu'à
deux cordes par touche ) on les charge de
cent quatre-vingt-trois cordes , en y ajoutant
lui grand unilîbn , moyennant lequel l'har-
monie devient encore plus mâle & plus ma-
jeftueufe.
C'eft dans cet art d'agrandir les clavecins
des Ruckers , que feu Blanchet a réuffi in-
comparablement bien. Il faut pour cet effet
les couper du côté des delîùs & du côté des
balles^ enfuite élargir , & même allonger
tout le corps du clavecin ^ enfin ajouter du
fapin vieux , fonore , & le plus égal qu'on
puiile trouver , à la table de l'harmonie ,
pour lui donner fà nouvelle largeur & lon-
gueur. Le grand fommier fe fait tout à neuf
dam ces fortes de clavecins , qui , tout bien
confîdéré , ne conièrvent de leur premier être
que la table & environ deux pies & demi
de leurs vieilles écliiîes du côté droit. Les
parties acceffoires , comme claviers, fawte-
reaux , regiftres , fe font à pré fent avec beau-
coup plus de jufteiié & de précifîon que les
CL A 23,
maîtres Flamands ne les ont faites dai-is 'e
iiecle paffé. Un clavecin des Ruckers eu de
Couchet , artiftement coupé & élargi , avc'C
des fautereaux , regiftres & claviers de
Blanchet , devient aujourd'hui un inftrumicnt
très-précieux.
Le prix ordinaire des clavecins ornés d'un
fimple vernis propre , fortant des mains du
faéteur , & fait par un artifie de Paris , va
aujourd'hui à cinq ou ftx cents livres : les
meilleurs fe paient fept cents livres , mais ce
n'eft que lorlque l'harmonie eft fi moelleuie
qu'elle approche de la bonté de celle des cla-
vecins Flamands dont nous venons de parler.
Les faveurs de clavecins empîument &:
accordent ces inftrum.ens dans les maifons ,
& ce n'eft pas le point le moins intérefiant
de leur art , lorfqu'ils veulent donner un em-
plumage léger, tranchant, -& par-tout égal.
Pour l'accord , il faut qu'ils faft~ent ce qu'on
appelle h partition ; elle confifte à accorder
de quinte en quinte , en partant de la note
qu'on a mife au ton , jufqu'à ce qu'il y ait
une oé^ave entière avec fès demi tons qui foit
d'accord ^ il eft facile d'accorder enfuite tout
le refte du clavecin lur cette oclavc. Mais
cette partition a fa diiïiculté , ik ne peut
être bien faite que par un homme qui en a
l'habitude. Cette difficulté vient de ce que
dans le clavecin , & en général dans tous
les inftrumens à clavier , on ne doit point
accorder les quintes juftes , parce qu'alors,
comme c'eft une même note qui fèrt de
quinte à un ton & de tierce à un autre , fi
les quintes étoient juftes les tierces ne le ie-
roient pas ,* & tout le clavecin feroit faux.
On eft obligé , pour éviter cet inconvénient ,
d'affoiblir un peu toutes ou preique toutes
les quintes , de manière cependant qu'elles
foient fupportables à l'oreille ; on diminue
par ce moyen le faux des tierces autant qu'il
eft poffible , fur-tout dans les tons naturels :
c'eft-là ce qu'on appelle le tempérament. Il
faut une application particulière & une oreille
très-fine pour bien accorder un clavecin ,
enforte qu'il paroifté jufte dans tous les tons,
quoique réellement il ne le foit jamais.
Les faveurs de clavecins font aufii des
épinettes qui font des demi-clavecins à une
corde par chaque touche \ ou bien des. épi-
nettes en oftave de c/ûrt'c//?5, qui ne font
d'aucun ufage pour une muiique réglée.
ijî
C L A
Les monocordes , appelles auiiî clancordes ,
méritent plus de conlldération. Ils font fort
agréables quand ou les joue tout iêuls ) leur
fbn eft extrêmement doux , vu que ce n'eft
pas le pincement d'une plume , comme un
clavecin , qui fait frémir la corde , mais une
petite lame de laiton fichée dans la partie
poftérieure du clavier , qui , en élevant la
corde , le fait fbnner. On peut exécuter fur
cet inftrument toutes les pièces de clavecin ;
il fert aufîî très- bien pour l'accompag-nement
d'une voix, flûte ou violon. C'eft dommage
que ces fortes d'inftrumens ne foient pas
connus en France. On en fait d'excellens
dans la haute Allemagne , ainlî que des cla-
vecins à deux claviers , for-tout dans les vil-
les de Drefdc , Berlin , Dantzick & Ham-
bourg. Dans ces mêmes villes on fait aufîî
des clavecins en obélifque ow pyramide : leurs
cordes étant placées perpendiculairement au
delTus du clavier , ils tiennent moins de place
dans les appartemens , & font un meuble
aiTez agréable \ mais pour les concerts , ils
deviennent inutiles , à caufe de la difficulté
de les placer avantagenfcment avec tout l'or-
cheftre.
Depuis un certain temps on fait venir à
Paris des clavecins a marteau^ appellés^or/r-
piano^ travaillés très-artiftement à Strasbourg
par le fameux Silbermann. Ces clavecins,
dont l'extérieur eft tout en bois de noyer le
plus propre & le plus luifant , font faits en
forte que chaque clavier fait lever une efpece
de marteau de carton enduit de peau , qui
frappe contre deux cordes unilTonnes , ou
contre une feule fi l'on veut. Ils ont cet avan-
tage , que l'appui du doigt, plus fort ou plus
foible , détermine la force ou la foibleife du
fon. Ils font fort agréables à entendre , fur-
tout dans des morceaux d'une harmonie
pathétique , & ménagés avec goût par celui
qui l'exécute ^ mais ils font plus pénibles à
jouer , à caufe de la pefanteur du mar-
teau , qui fatigue les doigts , & qui même
rend la main lourde avec le temps.
Clavecin a roue , {Luth. ) j'appelle
ainfi un clavecin , dont probablement l'in-
venteur a tiré l'idée de la vielle.
Comme le clavecin ordinaire n'a ni tenue ,
m piano , m forte , ou du moins, point de
différens degrés de piano & de forte , plu-
iîeurs perfonnçs ont cherché à remédier à
C LA
î CCS défauts. Ces recherches ont mené utî
bourgeois de Nuremberg , nommé Jean
Huyden , qui vivoit au commencement du
dix-feptieme fiecle , à l'invention de l'inftru-
ment fuivant : cependant Galilée &: d'autres
auteurs prétendent que cette invention eft
plus ancienne.
Le clavecin à roue eft , quant au corps ,
exaâ:ement fomblable au clavecin ordinaire ;
mais au lieu de fautereaux il a cinq ou fix
roues d'acier , fur chacune desquelles eft
collée une bande de parchemin bien unie ;
on frotte ce parchemin de colophane comme
les archets , ou , ce qui vaut inieux , avec
de l'huile d'afpic , où l'on a fait diflbudre de
la colophane : ces roues d'acier font mifes en
mouvement par une grande roue qui eft
dans le corps de l'inftrument & par quel-
ques cylindres. Le muficien fait aller lui-
même la grande roue avec le pié , comme
celle du rouet , ou bien un homme la fait
aller avec la main.
Les cordes font toutes d'acitr , celles qui
donnent les fons les plus graves font envi-
ronnées de parchemin, en forte que les plus
grofles font à-peu-près comme les cordes
d'une contre-bafle. Les cordes qui donnent
les fons aigus , ne font point garnies de par-
chemin.
Toutes ces cordes font tendues commc^
dans un clavecin ordinaire , mais chacune
palfe de plus dans un petit anneau qui tient
à la touche correfpondante , enforte que
quand on baiflé cette touche , la corde vient
frotter la roue , & produit un fon fembla-
ble à celui du violon ou plutôt de la vielle ;
il eft clair que tant qu'on tient la touche
baiflëe , la corde frotte & le ton a de la te-
nue ;, il eft encore également clair qu'en ap-
puyant plus ou moins fort , on peut produire
le piëno , le forte & le crefcendo.
J'ai vu un inftrument de ce genre à Ber-
lin ^ celui qui l'avoit conftruit , avoit fubfti-
tué des cordes de boyaux , aux cordes d'a-
cier , & une efpece d'archet aux roues cou-
vertes de parchemin : cet archet étoit une
large bande formée par un alfemblage de
nombre de crins de cheval , noués à un
bout \ cette bande de crins qui formoit un
anneau , paflbit fur deux cylindres , enforte
que quand ces derniers tournoient ,1a bande
de crins marchoit continuellement comme
CL A
un archet , mais toujours dans le même
feus ^ ce qu'il y avoit de plus ingénieux ,
c etoit la manière dont le facteur de cet ini-
. trument avoit évité le choc que dévoient natu-
rellement produire les nœuds des crins en
paiFant fur les co /des ] car il avoit arrangé
ces nœuds cuiorte qu'ils faifoient une ligne
oblique & par coniéquent ne paflbient que
fucceilivement fur les cordes , de manière
que quand un de ces^nœuds paifoit fous les
cordes , le mauvais effet qu'il auroit pu pro-
duire étoit étouffé par le fon que produi-
foieut tous les autres crins entiers.
A une des extrémités de l'archet , étoit un
petit fachet de moufl'eline ou de quelque au-
tre tilfu clair , plein de colophane , qui frot-
toit continuellement les crins.
Cet inftrument , aufTi bien que tous ceux
de cette efpece , produit un fon rude & dur ,
comme quand on racle du violon ^ il feroit
cependant à fouhaiter que quelqu'un pût lui
ôter ce défaut. ( F. D. C. )
Clavecin brisé, (Z://-;^.) clavecinqul (è
démonte ôc remonte fort aifément , en forte
qu'on peut le porter en voyage. ( F. D. C. )
Clavecin vertical , {Luth.) en Italien
cembato verticale , en Latin clavici therium ,
efpece de clavecin que quelques-uns appel-
lent xv.-A-bi-T^xO'^os pantalon. V, Pan TALON,
(Luth.) Le clavecin vertical n'eft autre chofc
qu'un clavecin dont le corps un peu plus
étroit que celui d'un clavecin ordinaire , cft
vertical au lieu d'être horizontal , & prend
par confcquent beaucoup moins de place.
Comme ici les fauteraux ne font pas verti-
caux , & ne peuvent pas retomber d'eux-
mêmes , ils font repoulîés par lui fil élafti-
que. ( F. D. C.)
* Clavecin oculaire. (Mu/lq. &Opt.)
inftrument à touches analogue au clavecin
auriculaire , coinpofé d'autant d'ochives de
couleurs par tons & demi-tons , que le cla-
vecin auriculaire a d'o£taves de fous par tons
& demi-tons , deitiné à donner à l'amc par
les yeux les mêmes fènfations agréables de
mélodie 8c d'harmonie de couleurs , que
celles de mélodie & d'harmonie de fons que
Je clavecin ordinaire lui communique par
l'oreille.
Que faut-il pour faire un clavecin ordi-
jiaire ? des cordes diapafonnées félon un cer-
tain fvftême de mullque , & le moyen de
Tome FUI,
C L A i}3
faire raifbnner ces cordes. Que faudra t-d
pour lui clavecin oculaire ? des couleurs dia-
pafonnées félon le mêm.c fyftême que les
fons , & le moyen de les produire aux yeux;
mais l'un eft auflî polfible que l'autre.
Aux cinq toniques de fous , ut , // , mi ,
fol , la , correlpondront les cinq toniques de
couleurs , bleu , verd , jaune , rouge , 6c
violet ^ aux fept diatoniques de fons ^ ut y
ré ^ mi ^ fa^ fol , la , // , ut ^ les fept dia-
toniques de couleurs , bleu , verd , jaune ,
aurore , rouge , violet , turquin , bleu-clair ;
aux douze chromatiques ou femi-diatoni-
ques de fons, ut^ut^y^ ; ré , r/, M^^ miy
fa, fa, )^,fol,fol,:^,la,la,y^,fy
ut ; les douze chromatiques ou femi-diato-
niques de couleurs , bleu , céladon , verd ^
oli\'e , jaune , aurore , orangé , rouge ,
cramoifi , violet , agate , turquin , bleu ,
&c. D'où l'on voit naître en couleurs tout ce
que nous avons en fons ^ modes majeur 6c
mineur , genres diatonique , chromatique ,
enharmonique , enchaînemens de modula-
tions ; confonnances , dilfonances ^ mélo-
die , harmonie ', enforte que fi l'on prend
un bon rudiment de muiîque auriculaire ,
tel que celui de M. d'Alembert , & qu'on
fubftitue par-tout le mot couleur au motfony
on aura àcs élemens complets de mufique
oculaire , clss chants colorés à plufîeurs par-
ties , une balTe fondamentale , une balîe
continue , des chiffres , des accords de toute
efpece , même par fuppofîtion & par fufpen-
fion , une loi de liaifon , des renverfemcns
d'harmonie, &c.
Les règles de la mufique auriculaire ont
toutes pour fondement la production natu-
relle & primitive de l'accord parfait par un
corps fonore quelconque : foit ce corps ut :
il donne les fons ut ,fol , m/, auxquels cor-
refpondront le bleu , le rouge , le jaune 9
que plufieurs artiftes & phyficiens regardent
comme trois couleurs primitives. La mufique
oculaire a donc dans £es principes un fonde-
ment analogue à la mufique auriculaire. F".
Couleur.
Qu'eft-ce que jouer? C'eft , pour le cla-
vecin ordinaire , fonner & fe taire , ou pa-
roître ^ difparoître à l'oreille. Que fèra-cç
que jouer pour le clavecin oculaire ? fe mon-
trer & fc tenir caché , ou paroître & difpa-
roître à l'œil 5 & comme la mufique auricu-,
Gg
134 C L A
laire a vin^ ou trente façons de produire les
fous , par des cordes, des tuyaux, des voix ,
des violons , des huiles , des lyres , des gui-
tares , des clavecins , des épinettes , des haut-
bois , des flûtes , des fifres , des flageolets ,
des baflbns , des ferpens , des trompettes ,
des orgues , &c. la mufique oculaire aura
autant de façons correi|X)ndantes de pro-
duire les couleurs, des boîtes , des éventails ,
des foleils , des étoile* , des tableaux , des
lumières naturelles , artificielles , ùc» Voilà
la pratique.
Les objections qu'on a faites contre la mu-
fique & l'inftrument oculaires fe préfcntent
fi naturellement , qu'il eft inutile de les rap-
porter : nous ofons feulement affurer qu elles
Ibnt fi parfaitement , finon détruites , au
inoins balancées par les réponfes tirées de
la coinparaifon des deux mufiques , qu'il n'y
a plus que l'expérience qui puilfe décider la
queftion.
La feule différence importante entre les^
deuK clavecins qui nous ait frappée , c'eft que
quoiqu'il y ait fur le clavecin ordinaire \m
grand intervalle entre fa première & fa der-
nière touche , l'oreille n'apperçoit point de
difcontinuité entre les fons ^ ils font liés pour
elle comme fi les touches étoient toutes voi-
fines , au lieu que les couleurs feront diftantes
& disjointes à la vue. Pour remédier à cet
inconvénient dans la mélodie & Tharmonie
■oculaires , il faudroit trouver quelque expé-
dient qui liât \t^ couleurs , & les rendîtcon-
tinues pour l'œil ;, finon , dans les airs d'un
mouvement extrêmement vif , l'œil ne fâ-
chant quel intervalle de couleurs on va faire ,
ignorera , après avoir vu un ton , oii il doit fe
porter pour apperccvoir le ton fuivant , & ne
làifira dans une batterie de couleurs que
quelques notes éparfes de tout un air coloré ,
ou fè tourmentera fi fortpour les faifir toutes,
qu'il en aura bientôt la berlue \ & adieu la
mélodie & l'harmonie. On pourroit encore
ajouter que quand on les faifiroit , il ne fèroit
pas poffible que Ton retînt jamais , & qu'on
eût la mémoire d'un air de couleurs , comme
on a celle d'un air de fbns.
Il fèmble que les couleurs d'un davtcin
oculaire devroient être placées fur une feuk
iande étroite , verticale & parallèle, à la
-hauteur du corps du muficien 5 au lieu que
4es cordes d'un clavecin auriculaire font pia-
C L A
cées dans un plan horizontal & parallèle à I^
largeur du corj)s cki mulicien auriculaire.
Au reile , je ne prétends point donner
à cette objedion plus de valeur qu'elle n'eu a :
pour la rélbudre , il ne faut que la plus petite
partie de la fagacité que l'invention du cla-
vecin oculaire fiippofè.
On ne peut imaginer une pareille machine
fans être très-vcrfé en mufique & en optique^
on ne peut l'exécutef avec fuccès fans être
un rare machinifte.
Le célèbre P. Caftcl jéfuite en efi: l'inven-
teur ^ il l'annonça en 172-5. La faéture de
cet inilrument eft fi extraordinaire , qu'il
n'y a que le public peu éclairé qui puiflè fe
plaindre qu'il fe fafle toujours & qu'il ne
s'achève point.
* CLAVETTE , f. f . ( Arts méck. ) c'eft
communémient un morceau de fer plat , plus
large par un bout que par l'autre , en forme
de coin , que l'on infère dans l'ouverture d'ua
boulon en cheville de fer pour le fixer. Il
arrive quelquefois à la clavette d'être fendue
en dens. par fbn bout étroit ^ alors on écarte
ces deux parties dont la divergence empêche
la clavette de fbrtir de l'ouverture du boulon :
quelquefois ce coin plat étant fait d'un mor-
ceau de fer mince , replié en double fur lui-
même , le bout étroit n'a pas befbin d'être
fendu jxjur arrêter la clavette ; il fuffit d'é-
carter par le petit bout les deux lames de fer ,
qui appliquées l'une fur l'autre forment le
corps môme de la clavette. Les clavettes Cont.
employées dans une infinité d'occafions. Les
tourneurs en fer donnent ce nom , & aux
coins de fer qui fervent à ferrer les poupées
& les fùpports fur les jumelles du tour , 8c
aux chevilles de fer qui fixent les canons
fiir la verge quarréc de l'arbre du tour en
ovale , & aux chevilles en bois ou aux fiches
de fer qu'ils placent de diftance en diftance
fur la barre d'appui. V. ToUR.
CLAVICORDE. Foyei Clavecin.
CLAVICULE , f. f. terme d'anatamie, eu le
nom de deux os fîtués à la bafe du cou & au
haut de la poitrine. F", les planches d'Anat»
{OJléol.)v.auJfiles articles Cou,THORAX,(S'r,
Elles font un peu courbées à chaque bout ,
mais en fcns oppofés , cnfbrte qu'elles ref^
fèmblent à-peu-près à uoc S qui fèroit cou-
chée. Ou les a appellées clavicules , parce
iqu'Uk^ ^iit coiianie \ç.% c)é$ du thorax.
C L A
"Leur fubflaiice interne eft fyongleuCe , ce
qui fait qu'elles caffent aifément. Elles fe
joignent d'un bout par fyncliondrofe à l'a-
Ïjophyfe acromion de l'omoplate , & de
autre par arthrodie à un linus (ituc à droite
&: à gauche de la partie fupérieure du fier-
nu m.
Leur ufàge eft de tenir les omoplates
fixes & arrêtées dans le même endroit, &
d'empêcher qu'elles ne glilTeiit trop en de-
vant vers la poitrine.
On a remarqué depuis long-temps que
dans les hommes les clavicules font commu-
ném.ent plus courbées que dans les femmes ,
c'eft pourquoi ils ont le mouvement des bras
plus libre :, les femmes au contraire en qui
ces os font plus droits , ont la gorg*» plus
belle , plus élevée , & moins remplie de
foiTes.
Toutes fortes d'animaux n'ont pas des
'Clavicules , il n'y a que ceux qui le fervent
de leurs pies de devant comme nous faifons
de nos mains , qui en aient : tels font les
iînges , \i^^ rats , les écureuils , & autres.
L'ui^ge des clavicules eft d'affermir les
«omoplates dans leur fituation naturelle , &
par conféquent de tenir les bras écartés : elles
-empêchent donc que les omoplates ne tom-
bent trop en devant avec les bras ; de-là
vient que la poitrine eft plus large dans
l'homnie que dans les autres animaux.
Comme les clavicules ne font recouvertes
'que de fîmples tégum.cns , -elles font fort
fiijettes à fe fradlurer par la violente impref-
fîondescaufes extérieures ^ & après la réduc-
tion faite , il eft très-difficile que les pièces
de l'os réduit demeurent dans la fituation
où on a les mifes , le moindre mouvem.ent
du bras étant capable de les déranger : il
refte toujours à l'endroit de la frafture un
calus phis ou moins diftbrme , malgré toutes
\qs machines qu'ont pu inventer les plus habi-
leschirurgicns pour tenir ces os fradturés dans
un parfait repos après leurréduôion. Quand
donc cette fraéture arrive à des femmes cii-
rieufès de la beauté de leur gorge , cette ré-
duéiion n'eft preique jamais trop honorable
au chinirgien : auffine négîige-t-il guère alor^
d'avertir de la difformité qui peut en réfulter ,
avant que d'entreprendre de la remettre.
Les clavicules font encore expofées aux
luxations , mais raremeiit j à caufe de ia force
C LA 235
de leurs ligamcns : la cure fera d'autant plus
difficile , qu'on différera la réduction ^ car
les luxations des clavicules font prefque tou-
jours incurables , quand elles font une foiî
invétérées ^ la réuftlte dépend des bandages ,
qu'il faut appliquer avec tout le foin pofîi-
h\Q , après avoir réuni les parties difloquées
dans leur fituation naturelle. Galien s'efl une
fois démis la clavicule en luttant, & les deux
os fè réunirent par un bandage qu'il porta
pendant quarante jours. ( M. h Chevalier de
J AU COURT. )
§ Clavicule , ( Chirurgie. ) Ifouveau
moyen de favorifer la curatioà des maladies
de la clavicule.^ torfqu elles font compliquées
defradure ou de luxation. L'anatomie nous
apprend que trois mufcles très-forts s'atta-
chent en partie à la. clavi.cu le, fàvoir , le del-
toïde , le grand pedèoral , & le fterno-maf-
toïdien : que leurs allions fuivent toujours
une direfticn contraire lorfque la clavicule
eft caffée , ou défarticulée , parce qu elle ne
peut plus leur ièrvir de point d'appui.
Ces mufcles donc fè rapproclient dô leur
infertion en déterminant l'épaule en avant ,
pendant que le malade d'un autre côté a
beaucoup de difficulté à relever le bras. Cela
pofe , ii fiiit que ce dérangement occafîone
pour l'ordinaire le gonflement avec la com-
preffion de la trachéc-artere , de la jugu-
laire , de la fous-claviere & de la plus grande
partie de la huitième paire des nerfs j d'où
la difficulté de refpirer , la rougeur des yeux y
les étourdifTemens , l'anxiété , avec dépra-
vation de l'adlion du brss & de Tépaule, &c.
Les parties étant ainfî léfées , il n'efî pas
douteux qu'on doit chercher à y remédier le
plutôt poffible , en les remettant dans leur
fituation ordinaire; Aais cojnme cette partie
eft très-expofée à être cafTée ou luxée , il efl
confiant que ces maladies peuvent être com-
pliquées de quelque accident ^cheux.
Aujourd'hui la difficulté n'eft pas de ré-
duire la clavicule ; tous les moyens employés
jufqu'à préfent font confacrés dans les trai-
tés àcs maladies des os, & rempliffent par-
faitement leurs vues ; le point le plus era-
barraffant dans la curation de ces maladies ^
eft de maintenir les parti 2s réduites dans leur
fituation naturelle pour en obtenir le plu?
convenablement la réunion.
Il m'a paru toujours très-difficile de rem*
^y^ C L A
plir cet objet , lorfqiie fbr-tout la luxation ou
la fracture eft compliquée de plaie d'arme
à feu , ou de toute autre nature qui exige des
panfëmens fréqueiis. Dans ces cas l'on juge
bien que la guérifon qui en réfulte eft tou-
jours imparfaite , parce que Ton efl malheu-
reufement forcé , faute de moyen pour con-
traindre \zs parties , fur-tout à farmée , d'a-
bandonner la gucrifon au foin de la nature ,
en recominandant au malade d'évafer les
épaules le plus en arrière qu'il peut pour n'ê-
tre pas eftropié : l'on {ç.nt parfaitement que
la guérifon du malade ne fauroit vaincre à
chaque inftant la réfiftance des mulcles &
la difpofition où ils font continuellement de
porter l'épaule en avant.
C'cfl pour éviter de pareils inconvéniens ,
cfue j'ai fimplifié leur traitement en fubfti-
tuant un moyen plus sûr que ceux qui font
décrits par Xts auteurs , &. en même temps
plus facile à exécuter par-tout & en quelque
lieti que l'on puiiîë être , qui enfin a l'avan-
tagé de contenir les parties toujours en fitua-
tion , en lailfant en mê:ne temps la liberté
des panfèmens imiifpenfàbles dans le cas de
plaie , de tumeur , ou d'abcès.
Pour réduire la clavicule , ou la remettre
lorfqu'elle eft frafturée, l'on fe munit de
deux bourlets d'un pouce de diamètre , faits
d'une peau mince quelconque , ou à fou dé-
faut de bazin ou de toile , rempli de crin ,
de laine , ou de quelque autre matière. Le
tour de ces bourlets excédera la rondeur des
épaules , d'environ une ligne feulement dans
toute leur circonférence , parce qu'ils s'aifaif-
lènt.
Les choies ainfi prcjjarées , on les palîè
dans chaque bras pour les fixer environ iur
l'extrémité des clavicule & autour de l'arti-
culation des épaules \ alors l'on paffe une
courroie garnie d'une boucle , pardelibus
les bourlets , vis-à-vis le derrière àz^ épau-
les j pour léi rapprocher pendant le temps
que l'aide-chirurgien évaie leurs extrémités
pour faire la rédu£l:ion des parties MUds,!
L'on doit concevoir maintenant que c'eft
par le moyen de fon aélion qu'on ferre en
raifon de l'efî^ece de la luxation ou de la
fra£èure que l'on a à réduire.
Il eft évident que par cette méthode , l'on
contraint les parties de manière qu'on n'a
plus rien à appréhender , ulpoiu: le déplace-
C L A
ment , ni pour la fituation très-pénible du
malade pendant toute la guérifon. Par cette
méthode aufll, l'on peut ferrer en raifon que
les bourlets s'afl'aiifent afin de tenir les parties
dans le même état qu'on le defire \ lorfque
les bourlets font des im.prefîîons à la peau juP
qu'à déterminer des écorchures , l'on y re-
médie faciÎCTnent en glilTant une ou plu-
fieurs petites compreffes de l'épailTeur de
trois ou quatre lignes fous le bourlet , & à
côté de l'endroit écorché. Par cet expédient ,
l'on a l'avantage de foulager la peau du ma-
lade & de panier avec facilité \q^ endroits
écorchés avec quelque petite pommade
adoucilfante , ou defîicative , puifqu'il ré-
fulte de cette manœuvre qu'on n'eft pas forcé
de difcoutinuer le traitement , comme dans
les autres méthodes , lorfque les bandes
écorcheut & coupent les parties de la peau
fur lefquelles elles pofent.
Ces chofes étant ainfi diipofées , un aide
applique fon geuou contre le dos du malade
entre les épaules qu'il prend avec les mains
pour les évalèr en dehors , tandis qu'avec le
genou , il pouffe le corps en avant , d'où ré-
fulte l'extciifion & la contre-extenfion , que
l'on fait plus ou moins forte , fuivant l'inten-
tion de fopérateur avant de remettre les
pièces rompues & détachées dans leur finia-
lien reii^ective. L'on lent parfaitement que
les chofes étant ainfi aflùjetties , il n'eft plus
queftion que d'appliquer les topiques conve-
nables avec un appareil très-léger &: le plus
fimplc pofTible , fans aucunement déranger
les parties luxées ou fradhjrées.
Par cette méthode , i°. L'on n'aura plus
befoiu de bandage' roulé ni d'appareil com-
pliqué. 2°. On n'aura. plus à crahidj-e le che-
vauchement des bouts de l'os , parce qi;e les
parties font toujours en extenfion égale. 3^.
L'on verra chaque jour les progrès des pan-
femens , & les bandages ne feront plus fu-
jcts à fc relâcher j ou les comprcifes à glifler,
4^. S'il y a des opérations à pratiquer , on
les fera avec toute l'aifance poffible , & la
chaleur & les démaugeaifons , qui fcntprel-
que infoutenables pendant le traitement , fe-
ront calmées facilement par les moyens
connus pour les com.battre.
De plus , en fuppolànt qu'on n'eut point
fous la main la matière propre à faire les
bourlets , comme après une affaire , ou uii©
C L A
retraite , à. l'armée , l'on fè fert de quelque
corps que ce foit en attendant qu'on puillè
mieux faire ; le grand point q£^ de ne pas per-
dre de Vue tévafwn des épaules 6' le moyen de
les retenir ainfi que nous f avons expligué.
Par exemple , daus un cas prelTant , l'on a
deux mouchoirs pour faire des bourlets , &
des jarretières pour ferrer en g-uife de cour-
roie ^ ou bien Ton coupe la chemife du ma-
lade pour en former les trois pièces nécelTai-
res , afin de pouvoir commodément tranf-
porter , ou faire marcher fon blcffé fans
courir aucun danger. Il eft certain que c'efl:
par cette manœuvre que j'ai maintenu des
parties extrêmemient maltraitées , 8c que je
fiiis parvenu à guérir des malades plus sûre-
ment que par les autres méthodes. ( Cet arti-
cle ejl de M. Chabrol , chirurgien - major
du corps du génie , ajfocié correfpondant du
collège royal de chirurgie de Nancy , détaché
a t école royale du corps du génie a Me^ieres.)
CLAVIER , f. m. ( Luth, ) c'eft la partie
d'une orgue fur laquelle l'organifte pofant fès
doia;-ts ouvre les foupGpes , qui étant ouvertes
laiiFent aller le vent aux tuyaux. C'ell cet
ufage qui lui a fait donner le nom de clavier y_
comme étant compofé de toutes les clés qui
ouvrent le paflage au vent qui fait parier les
tuyaux. Foyei Clavecin & Orgue.
Le clavier fe prend aufll pour la portée
générale ou fomme de*s ions de tout le fyi-
tême qui réfulte de la polîtion relative des
trois clés. Cette pofition donne une étendue
de douze lignes & par conféquent de vingt-
quatre degrés ou de trois octaves & une
quarte : tout ce qui excède en haut ou en
bas cet efpace , ne peut fe noter qu'à l'aide
de pîufieurs lignes poftiches ou accidentelles
ajoutées aux cinq qui compofènt la portée
d'une clé. Voye^ planche i de mufique j
figure 5 , l'étendue générale du clavier,
■ Les notes ou touches diatoniques du cla-
vier , leiqueîîes font toujours conftantes ,
s'expriment par des lettres de l'alphabet, à
la différence des notes de la gamme , qui
étant mobiles & relatives à la modulation ,
portent des noms qui expriment ces rapports.
Voye:{^ GamME ^ SoLFIER.
. Chaque oftave du clavier contient treize
fons , îept diatoniques & fix chromatiques
repréfentés fiir le clavier inilrumental par
autant de touches. Autrefois ces treize tou-
C L A 137
ches rcpondoicnt à quinze cordes \ favoir
une de plus entre le ré diefè & le mi naturel 5
l'autre entre \Q.fol diefe & le/2z, & ces deux
cordes qui formoient àt% intervalles enhar-
moniques , & qu'on faifoit fonr.er à volonté
au moyen de -deux touches brifccs , furent
regardées alors comme la pcrfeétion du
fyftéme : mais en vertu de nos régies de \\\q~
dulation , ces deux ont été retranchées
parce qu'il auroit fallu en mettre par-tout.
Kojf^ Clé, Portée.
Clavier, en terme d'épinglier ^ n'eft
autre chofe qu'un morceau de fîî-de-fer ou
de laiton plié de manière qu'un brin fornie
une efpece d'anneau vers le milieu qui lui
fert d'attache. On n'emploie point d'autre
outil pour le faire que àts bequettes. Voye:^
BeQUETTES d'épinglier,
CLAUSE , f. f. C Jurifprud. ) eft une par-
tie d'un contrat , d'un tellament ou de quel-
que autre aâe , foit public ou privé , quicour
tient quelque diipofition particulière. Ce
terme vient du latin claudere. Ainfi les claufes.
d'un aéte font les conventions, dilpofiticns ;
ou conditions renfermées dans cet aâie : 'i\
^peut renfermer plus ou moins de claufes y
Htiivant que la matière y eft difpofée , &: ce
que les parties ont jugé à propos de mettre
dans l'acle. Il n'y a régulièrement dans un
acic que ce que l'on y met ^ cependant il y
a certaines claufes qui font tellement de
l'ellcnce des aéles, qu'on les regarde comme
de iiyle , & qu'elles font toujours fous-en-
tendues: comme Fhypotheque des biens xlans
les ades paffés devant notaires , qui eft de
droit , quoiqu'on ait omis de la ftipuler. Il y
a quelques autres claufes qui font pour ainii
dire de ftyle , parce qu'on a coutume de les
ftipuler , mais qui néanmoins ne font pas de
droit , telles que le préciput dans l^pbontrats
de mariage , lequel n'eft pas dû fans une
convention expreffe. Une claufe obfcure
s'explique par celles qui précèdent ou par
celles qui fiiivent , félon le rapport qu'elles
ont entr'eiles ^ & dans le doute elle s'inter-
prète contre celui qui a parlé d'une manière
obfcure , parce que c'éîoit à iiii d'expliquer
plus clairement.
Dans les bulles & fignatures de cour de
Rome , il y a différentes claufes ufitées , que
l'on diftingne chacune par quelques termes
particuliers qui les caradérifcDt , tels que la
13? C L A
claiîfcf2/ot7'jr modo. On peut voir le détail &
l'explication de ces claufes dans îc traité de
tuGige & pratique de la cour de Rcme , de
Pcrard Caitel.
Clause codidllaire , eft une clcufe appo-
féc dans un teftament , par laquelle le tefta-
teur déclare que ii fon teftament ne peut va-
loir comme teftament, il entend qu'il vaille
comme codicille.
L'origine de cette claufe vient de ce que
dans les pays de droit écrit , les teftamens
exigent beaucoup plus de formalités que les
codicilles ;, c'eft pourquoi elle n'eft d'ufage
que dans les pays de droit écrit , & non dans
les pays coutumiers, où l'on dit communé-
ment que les teftamens ne font que des co-
dicilles , parce qu'ils ne demandent pas plus
de formalités qu'un fimpîe codicille.
On fuppléoiî quelquefois cette claufe chez
les Romains , lorfque l'intention du teftateur
paroilToit être que fa volonté fût exécutée
de quelque manière que ce pût être j mais
parmi nous on ne fupplée point cette claufe.
La claufe codidllaire ne peut produire Ion
effet que le teftament ne foit au moins revêtu
des formalités requifcs dans les codicilles.
L'inftitution d'héritier portée au tefta-
ment , étant répudiée ou devenue caduque
par prédécès de l'héritier inftitué , l'héritier
ab inteffat eft tenu , en vertu de la claufe codi-
dllaire , de payer les legs.
Cette claufe opère aufii que l'inftitution
d'héritier '& toutes les autres difpofttions qui
font conçues en termes direâis & impératifs,
font confîdérées comme des fidéicommis ,
de forte que l'héritier ab intejîat eft tenu de
rendre l'hérédité à l'héritier inftitué par le
teftament ;, mais aufîî il a droit de reteuir la
quarte ^bellianiquc.
Comme la claufe codidllaire n'a pour ob-
jet que de ftippléer les formalités omifes dans
le teftament , elle ne peut valider un tefta-
ment qui eft nul , par quelque autre caufè,
comme pour fuggcftion.
Il eft parlé de la claufe codidllaire dans
plwfieurs titres du code , & dans phifieurs
auteurs , entr'autres Dolive , Ricard , Cam-
bolas, Henr)'s.
La nouvelle ordonnance des teflamens , art.
57 , porte que fi l'héritier inftitué par un tef-
tament qui contient la claufe codidllaire , n'a
prétendu faire valoir la dili^ofition du tefta-
C L A
tCur que comme codicille feulement , ou ^iX
n'a agi qu'en confcquence de ladite claufe ,
il ne fera plus reçu à foutenir ladite ^ifpofi-
tion en qualité de teftament \ m.ais que s'il »
agi d'abord en vertu du tcftam.ent , il pourra
iè iervir enft:ite de la claufe codidllaire.
Clause de confHtut & précaire , voyf^
CONSTITUT & l^RÉCAIRE.
Clause dérogatoire , eft celle qui déroge
à quelque afte précédent. Ce terme étdit
ufitc principalement en matière de teftamens,
où les claufes dérogatoires étoient certaines
fentenccs ou autres phrafes auxquelles on
devoit reconnoîtrc le véritable teftament. Par
exemple , le teftateur difoit : « je veux que
» mon teftament fbit exécuté , fans qu'il
» puifle être révoqué par tout autre que je
w pourrois faire dans la fuite, à moins qu'il
» ne contieiuie la claufe fuivante , mon Dieu :
« aye:^pitiéde moi ». Il eft parlé de ces clau-
fes dérogatoires dansplufieurs loixdudigefte,
& dans divers auteurs j mais toutes les quef-
tions qui y fout traitées deviennent préfente-
ment inutiles parmi nous , au moyeu de \art,
j6 de Cordonnance des teflamens , qui abrogé
totalement l'ufage des claufes dérogatoires
dans tous lç.s teftamens , codicilles , ou dii^
pofitions à caufe de mort.
. Clause irritante , eft celle qui annulle
tout ce qui fèroit fait au préjudice d'une loi
ou d'une convention , comme lorfqu'il eft
dît a peine de nullité.
Quand la loi eft conçue en termes prohi-
bitifs négatifs , il n'eft pas befoin de claufe
irritante pour annuller ce qui eft fait au pré-
judice de la loi ^ mais la claufe eft néceft~aire
quand la loi enjoint Amplement quelque
cho/c. Le g. non dubium , cod. dz legib.
Clause pénale , eft celle qui impofe une
peine à quelqu'un , au cas qu'il ne faffe pas
quelque chofe , ou qu'il ne le fafte pas dans
un certain temps \ par exemple , qu'il fera
tenu de payer une fomime , ou qu'il fera
déchu de quelque droit ou faculté.
Ces fortes de claufes ne ibnt que commi-
natoires lorfqu'elles font inférées dans des
conventions \ la peine n'eft jamais encourue
de plein droit , à moins que l'on n'ait été
mis juridiquement en demeure d'accomplir
la convention ;, & il dépend toujours de la
prudence du juge de modérer le peine , &
même d'en décharger s'il y a lieu.
C L A
Dans les <îi(pofîtions de dernière volonté ,
les claufcs pénales ajoutées aux libéralités doi-
vent être exécutées à la rigueur , à moins
qu'elles ne renferment des conditions impof-
iibles ou contre les bonnes mœurs. Voye^
Henrys -, t. l ^ Uv, IV , ch, vj , çuejf. 68.
Clause réjblutoire , eft celle par laquelle
on convient qu'un afte demeurera nul &
réfolu , au cas qu'une des parties n'exécute
point ce qu'elle a promis.
■ Ces fortes de claufes peuvent s'appliquer à
différentes conventions. De ce nombre eft le
pa6te de la loi commllFoire , dont il icra
parlé à t article Pacte.
Pour mettre à effet une claufe réfolutoire ,
il faut d'abord que celui contre qui on veut
s'en fervir , foit mis juridiquement en de-
ineure de remplir Tes engagemens , & en-
fuite faute par lui de l'avoir fait , demander
& faire ordonner en juftice la réfolution de
l'aéie.
En effet , il en eft des claufes réfolutoires
à-peu-près comme à^s claufes pénales^ c'eft-
à-dire qu'elles ne fc prennent point à la ri-
gueur , mais font réputées comminatoires ^
c'cft pourquoi le juge accorde ordinairement
Mil délai pour fatisfiîire à ce qui eft demandé,
À moins que la chofo ne pût fouffrir de retar-
dement. Voyei Louet 6' Brodeau , let. V ,
fom. 50, Soefve, tome 11^ cent, i , ck, vj ; &
Resolution de contrat.
Clause des fixmois^ s'entend d'une c/ûw/f-
que l'on appofe dans quelques baux à loyer,
pour ré foudre le bail avant le temps qu'il
devoit durer , en avertiftant fix mois d'a-
vance. Cette faculté eft ordinairement réci-
proque. {A)
CLAUSEN, ( Géogr, ) ville d'Allemagne
dans le Tirol , près de la rivière d'Eiak.
CLAUSENBOURG , {Géogr.) ville de la
Traniilvanie , où s'aftemblent ordinairement
les états du pays. Long. 40. 20. lat. 46. 53.
CL AUSENTH AL , ( Géogr. ) petite ville
d'Allemagne en Franconie , famcufe par fes
mines.
CLAUSION, f. f. {Jurifpr.) dans cer-
tains parlemens Signifie appointement. Ce
tcrm« vient du \2^mcaufa conclufa; ce qu'on
appelle au parlement de Paris, dans les pro-
cès par écrit , appointement de condufion. Au
parlement de Toubiife, claufon iè dit de
tout appoiiit^nieiit ou réglemeat qui uitex-
C L A 235
vient {ut les demandes & défeuics des par-
ties. Voyei^ i^fiy^^ du parlement de Touloufe ,
/;arCairon,/'.477,483, 504, 510, 519,
5^9 î 535 î 584, 6'59 , Çf 66$. On fe fert
auftî de ce terme au parlement de Grenoble.
Voyei Guypape , décif. zo i , £" i!>id. not. (A)
CLAUSOIR , f. m. en bâtiment , eft le
plus petit carreau ou la boutillé qui ferme
une aflife dans un mur contixiu , ou entre
deux piédroits. (P)
CLAUSTHAL, (Géogr.) ville d'Alle-
magne dans le Hartz, dans la principauté
de Grubcnhagen , à i'élc£i:eur d'Hanovre ,
fameufo par ics mines.
CLAUSTRAL , adj. {Jurifp.) fe dit de
tout ce qui appaiticnt à un cloître de reli-
gieux.
Le Yix leur cl au frai eft un religieux qui a le
gouvernement du moiuiftere : on l'appelle
claufral , pour le diftingucr du prieur com-
mendataire qui n'eft pas régulier.
On ap}x:lle o^ces claufraux dans Icsmo-
nafteres d'hommes , certaines fonctions qui
n'étoient autrefois que de fimples offices , &
qui par fucccftîon de temps ont été coniidé-
récs comme de vrais titres de bénéiices |, tel*
font les ofnces de chambrier , d'aumônier ,
d'infirmier, de célerier, defacriiiain , & au-
tres femblables. L'abbé nomme à cesoffices.
Dans les maifons où on a introduit la ré-
forme , la plupart de ces offices ont été fup-
primés , & réunis avec tous leurs re\ enus à
la nianfè des religieux.
Dans l'abbaye de Saint-Denis en France
il y avoit \x\\ grand-prieur , un fous-prieur ,
un chancelier garde des focaux , grand-
aumônier , grand-confeflèur , grand bou-
teiller , grand-panuetier , grand-prévôt ,
grand maréchal féodal , & un grand- veneur
de l'abbé , qui étoient tous offices clauf-
traux poiîédés par des religieux. {A)
CLAVUS , f. in. terme de médecine , eft
le nom que les médecins donnent à une
douleur lancinante à la tête , où elle fo fait
fentir ordinairement au delTus des yeux ,
c'eft-à-dire au iînus frontal , de telle forte
qu'il fembfe au malade qu'il lui entre aétuel-
lenient dans la tête une vrille ou un })oin-
çon ^ ce qui a fait donner à cette maladie J2
nom de clavus. Quelquefois le clavus n'af-
feéèe qu'un côté , quciquefais auifi tous les
deux*
140 CLE
On regarde cette inalaclle comme «ne
erpece de fièvre intermittente , parce qu'en
ellet elle reprend & quitte le malade à des
périodes réglés. Elle eiï quelquefois quoti-
dienne , quelquefois elle n'clt que tierce.
Voyei Fièvre.
On la guérit en donnant au malade un
émctique un peu avant & un peu après l'ac-
cès ^ à quoi on ajoute , pour plus d'effica-
cité , une dofe convenable de quinquina ,
comme pour les fièvres intermittentes. Quel-
quefois auffî la faignée & les diaphoréti-
ques opèrent la cure , fans qu'il fbit befoin
d'autres remèdes. Chambers.
Quelquefois les hyftériques ont au fbm-
met de la tête une douleur femblable, que
Sydenham appelle clavus hyjiericus. Voye\^
Passion hystérique. (/5)
Clavus, f. m. dans t antiquité ^h^màe
ou filet de pourpre que les fénateurs & les
chevaliers romains portoient fiir la poitrine ,
& qui étoit plus ou moins large , félon la
dignité de celui qui le portoit. C'cft de ces
différentes largeurs qu'ell venue la différence
de la tunique angufiidavia , & de la tunique
latidavia. Voyei LatICLAVIA.
Cet ornement étoit appelle , félon quel-
ques-uns , clavus , cîou , parce qu'il étoit
femé de petites plaques rondes d'or ou d'ar-
gent, femblables à des têtes de clou. Le P.
Cantel , jéfuite , foutient que le clavus ne
confifloit qu'en des efpeces de fleurs de cou-
leur de pourpre , coufues fur l'étoffe. Dicl. de
Trev.
CLAZOMENE , ( Géogr. anc, ) ville
d'Afie dans l'Ionie , & l'une àes douze an-
ciennes de cette province \ elle avoit Smyrne
à l'orient , & Chios à l'occident.
* CLÉ , f. f. C Serrurerie. ) infiniment de
fer qui fert à ouvrir & fermer une ferrure.
On y diflingue trois parties principales ,
l'anneau , la tige , & le panneton : l'anneau
eit la partie évuidée en cœur ou autrement,
qu'on tient à la main quand on ouvre ou
ferme la ferrure ^ la tige eft le petit cylindre
compris entre l'anneau & le panneton \ le
panneton eft cette partie fàillante à l'autre
extrémité de la clé ^ & placée dans le même
plan que l'anneau. On voit que le panneton
étant particulièrement deftiné à faire mou-
voir les parties intérieures de la ferrure, doit
chauler de forme felou le nombre , la qua-
CLE
\\th , la difpofition de ces parties. Voye^ Ser-
rurerie , Panneton, &c.
Clé dans un feus moral ^ théologique ^
marque àepuijfance , comme lorfqu'il efl: dit,
Ifaie xxij i) V. Il: Je donnerai a mon fervi^
teur Eliacem la clé de la maifon de David j il
ouvrira 6* nul ne fermera .... il fermera 6»
nul n ouvrira .... de prééminence \ comme
lorfque Jefus-Chrift donne à Pierre la clé du
royaume des cieux .... ^intelligence , com-
me dans l'endroit où Jefiis-Chrift reproche
aux pharifiens d'avoir pris la clé de la fcien-
ce , & de ne point entrer dans le royaume
des cieux , & de n'en pas ouvrir la porte aux
autres , ùc.
Clé , caractère de mupque , qui mis au
commencement d'une portée , détermine
le degré d'élévation de cette portée dans le
fyftême général , & indique les noms de
toutes les notes qu'elle contient.
Anciennement on appelloit clés les lettres
par lefquelles on défîgnoit les fons de la
gamme ^ ainfi la lettre A étoit la clé àe la ,
C la clé ^ut , &c. A mefure que le fyflême
s'étendit , on apperçut bientôt l'embarras Se
finutilité de cette m.ultitude de clés. Guy
d'Arezze qui les avoit inventées., marquqit
une lettre ou clé au comm.enc^ment de cha-
cune des lignes de la portée , car il ne plaçoit
point encore de notes dans les efpaces : on
voit des exemples de cela dans plufieurs an-
ciens manufcriîs. Dans la fuite on ne marqua
plus qu'une des fèpt clés au commencement
d'une des lignes de la portée , celle-là fuffi-
fant pour fixer la pofition de toutes les au-
tres {elovL l'ordre naturel. Enfin de ces ièpt
lettres ou clés on en a choifî trois qu'on a
nommées clavcs fignatœ ou clés marquées^
parce qu'on fe contente d'en marquer une
des trois au commencement des lignes , pour
donner l'intelligence des autres. En effet Kec
pler prétend que fi étant au fait des ancien-
nes écritures , on examine bien la figure de
n3S clés ^ on trouvera qu'elle fe rapportent
chacune à la lettre un peu défigurée de la
note qu'elle repréfente \ ainfi la clé de foi
étoit originairement un G; la clé d'z// , ua
C , & celle de fa , une F.
Nous avons donc trois clés à la quinte
l'une de l'autre \ la clé àf- ut-fa ^. ou de
fa y qui efl la plus balle , Se qui fè marque
aluli
CLE
ainfi y-r h la ^^^ cî'"^ » o" ^^ c-foi-uc, qui
fe marque aiufi -jd- , & qui eft une quinte
au deiTus de la première j &: la clé àe fol ou
deg-ré-fol, qui fe marque ainfi *^ ? &qui
eft une quinte au deffus de celle d'ut dans
l'ordre marqué ( Planche première de mufi-
que ^figure 5.) Sur quoi il faut obfèrver que
la clé fe pofe toujours fur une ligne , & ja-
mais dans un efpace.
En ajoutant quatre lignes au deffus de la
clé de fol , ce qui fait le plus grand nombre
Hfité , & trois lignes au deffous de la clé de
fa , ce qui eft aulTi le plus grand nombre ,
on voit que le fyftême total des notes qu'on
peut placer fur les degrés déterminés par ces
clés , fe monte à vingt-quatre , c'eft- à-dire
trois oâ:aves & une quarte depuis lefa qui
fc trouve au deifous de la première ligne ,
jufqu'au/ qui fe trouve au deifus de la der-
nière \ & tout cela forme enfèmble ce qu'on
appelle le clavier général : par où l'on doit
juger que cette étendue a dû faire long-temps
celle du fyftéme. Aujourd'hui qu'il acquiert
fans ceife de nouveaux degrés , tant au grave
qu a l'aigu , on marque ces degrés fur des
lignes accidentelles qu'on ajoute en-haut ou
en-bas , félon le befoin.
Au lieu de joindre enfcmble toutes les
lignes , comme nous avons fait ici pour
montrer le rapport des clés^ on les fépare de
cinq en cinq , parce que c'eft à-peu-près
aux degrés qui y font compris qu'eft bornée
l'étendue d'une voix ordinaire. Cette collec-
tion de cinq lignes s'appelle /orr^-V , & l'on
y ajoute une c//pour déterminer le nom des
notes , & pour montrer <iuel lieu la portée
doit occuper dans le clavier.
De quelque manière qu'on prenne cinq
lignes de iiiite dans le clavier , on y trouve
une clé comprife , 6c quelquefois deux j au-
quel cas on en retranche une , comme inu-
tile : l'ufage a même déterminé laquelle il
falloitretrancher , & laquelle il falloit polêr ^
ce qui a donné lieu de fixer le nombre des
pofitions de chaque clé.
Si je fais une portée des cinq premières
lignes du clavier en commençant par le bas ,
j'y trouve la clé de fa fur la quatrième ligne ;
voilà donc une pofition de clé , & cette po-
Tomc riIL
CLE '241
fîtion Tippartient évidemment aux fons les
plus graves.
Si je veux gagner une tierce en-haut , if,
faut ajouter une ligne ^ il en faut donc re-
trancher Une en-bas , autrement la portée
auroit plus de cinq lignes : alors la clé de fa.
fè trouve tranfportée de la quatrième ligne
iiir la troifieme ^ la clé d^ut fè trouve auilî
fur la cinquième ligne : mais comme deux
clés font inutiles , on retranche ici celle d'i/r.
On voit que la portée de cette clé eft d'une
tierce plus élevée que la précédente.
En abandonnant encore une ligne en-bas
pour en gagner ime nouvelle en-haut , on
a une troifieme portée où la clé de fa fe trou-
veroit fîir la deuxième ligne , & celle uut
fur la quatrième : ici on abandonne la clé
de fa & on prend celle d'ut. On a encore
gagné une tierce à l'aigu.
En continuant ainfi de ligne en ligne , on
paflê fiicceftivement par quatre pofitions
différentes de la clé d'ut : arrivant à celle de
fol , on la trouve pofee d'abord fur la deu-
xième , & puis fiir la première ligne ^ & cette
dernière pofition donne le diapafon le plus
aigu que l'on puiffe établir par les clés.
On peut voir ( PI. I,fg. 6. ) cette fuccef^
fîon des clés du grave à l'aigu , avec toutes
leurs pofitions ^ ce qui fart en tout huit por-
tées , clés ou pofitions de clés différentes.
De quelque caraâ:ere que puiffe être une
voix ou un inftrument , pourvu que fbn éten-
due n'excède pas à l'aigu ou grave celle du
clavier général , on peut dans ce nombre lui
trouver une portée & une clé convenable ;
& il y en a en cfîèt de déterminées pour tou-
tes les parties de la mufique. Voye^ Par-
TiES.Sil'étendue d'une partie eft fort grande,
& que le nombre de lignes qu'il faudroit
ajouter au deffus ou au deffous devienne in-
commode , alors on change la clé : on voit
clairement par la figure quelle clé il faudroit
prendre pour élever ou abaiffcr la portée ,
de quelque clé qu'elle foit armée actuelle-
ment.
On voit aufTi que pour rapporter une clé
à l'autre , il faut les rapporter toutes deux
fur le clavier général , au moyen duquel on
voit ce que chaque note de l'une de ces clés
eft à l'égard de l'autre : c'eft par cet exercice
réitéré qu'on prend l'iiabitude cte lire aife-
ment les partitions.
Hh
^4^ CL E
Il fîiit de cette méchàniqiie j qu'on peut
placer telle note qu'on voudra de la gamme
iùr une ligne ou dans un efpace quelconque
de la portée , puifqu'on a le choix de huit
poiitions différentes , qui eft le nombre des
fous de l'oétave : ainli on pourroit noter un
air entier fur la même ligne , en changeant
la c/e à chaque note.
Lafig. 7 , planche 1 , montre par la fuite
des cléi la (iiite des notes , ré ^fa^la^ ut ^
mi ^fol ^fi , ré ^ montant de tierce en tierce ,
^ toutes placées fur la troifieme ligne.
La figure fuivante ( 8. ) repréfente fur la
fiiite des mêmes clés la note ut , qui paroît
defcendre de tierce en tierce flir toutes les
lignes de la portée & au delà , & qui cepen-
diuit , au moyen des changemens de clés ,
garde toujours l'uniribn.
Il y a deux de ces pofitions , fàvoir la clé
ùe fol fur la première ligne , & la clé ôa fa
lur la troilicme , dont l'ufage paroît s'abolir
de jour en jour. La première peut fembler
moins nécelfaire, puifqu'clle ne rend qu'une
pofîtion toute fèmbliible à celle de fa fur la
quatrième ligne , dont elle diffère pourtant
de deux oâaves. Pour la clé àzfa , en l'ô-
îant tout-à-fait de la troifieme ligne , il eft
évident qu'on n'aura plus de pofition équi-
valente , & que la compofition du clavier
qui eft com.plete aujourd'hui , deviendra dé-
iedueufe en cela. ( S )
Clé Transposée , eft en Muf que toute
clé accompagHee de diefès ou de bémols.
Ces figues y fervent à changer le lieu des
deux fèmi-tons de l'oôave , comme je l'ai
dit au mot BÉMOL , & à établir l'ordre
naturel de l'oftave fur tous les différens de-
grés de l'échelle.
La néceftité de ces altérations naît de la
fimilitude des modes dans tous les tons j car
comme il n'y a qu'une formule pour le mode
Viajeur , il faut que tous les Ions de ce mode
dans chaque ton iè trouvent ordonnés de la
même manière fur leur tonique j ce qui ne
peut Iè faire qu'à l'aide des diefes ou des bé-
mols. Il en ç.ii de même du mode mineur j
mais comme la même combinaifon de Ions
qui donne la formule pour un ton majeur ,
la donne aufîi pour le mode mineur d'un
sutre tonique ( voye[ MoDE ) , il s'enfuit que
pour les vingt-quatre modes il fuffit de douze
toinbinailbns. Or fi avecla gamine naturelle j
CLE
on compte fix modifications par die/es (voy,
dièse), & cinq par bémols [voy. Bémols),
ou fix par bémols & cinq par diefes, on trou-
vera ces douze combinaifons , auxquelles le
bornent toutes les variétés poflîbles des tons
dans le iyftêmc établi.
Nous expliquerons aux mets DiESE i^' BÉ-
MOL , l'ordre félon lequel ils doivent être
placés à la clé. Mais pour tranfjjorter la clé
convenablement à un ton ou mode quelcon-
que , voici une formule générale trouvée par
M. de Boifgelou , confeiller au grand con-
fcil , & qu'il a bien voulu me communiquer.
Je commence par le mode majeur.
Prenant la note ut pour terme de compa-
raiibn , nous appellerons intervalles mineurs
la quarte ut fa , & tous les intervalles ù'ut
à une note bémolifée quelconque •■, tout autre
intervalle eft majeur. Remarquez qu'on ne
doit pas prendre par diefe la note fiipérieurc
d'un intervalle majeur , parce qu'alors on
feroit un intervalle fiiperflu ^ mais il faut
chercher la même chofe par bémol , ce qui
donnera un intervalle mineur. Ainfi on ne
compofera pas en la diefe , parce que la
fixte ut-la étant majeure naturellement , le
diefe de la la rendroit fuperflue : mais ou
prendra la note // bémol , qui donne la
même touche par un intervalle mineur , ce
qui rentre dans la règle.
Voici donc comment le mode majeur doit
s'appliquer fur chacun des douze fous de
l'oârave , divifé par intervalles majeurs ÔC
mineurs.
S 2 S 2 2 2
n n n <^ n ">
c 5 = 5 = 5
2 2 2 2 2
= 5 M = t: c 5
Ut, ré b, rr'j mi b, mi, fa, fa ^ ,fol, la h, la, fi h, /i^
Q ïr> r-. cr. n.-Q -Q -o =-, ^^ r^ r»
3 hS S ^
^ q 3 g s
jj 3 ft o
-. fî •
3 n
3 3
Pour tranfporter la clé convenablement à
une de ces douze notes prife à volontéjConmie
tonique ou fondairxntale , il faut dVbord
voir û l'intervalle qu'elle fait avec ut eft ma-
jeur ou mineur : s'il eft mineur , il faut des
bémols.
Pour déterminer maintenant combien il
faut de dielès ou de bémols, foit a le noir»-
bre qui exprime l'intervalle à' ut à la note ea
CLE
tjiîeftlon j la formule par diefes fera i:
& le refte donnera le nombre de die-
fes qu'il faudra joindre à la clé ; la for-
mule par bémols fera i--'^'' ^ , & le refte fera
7 ^
le nombre des bémols qu'il faut joindre à
la dé.
Je veux , par exemple , compofer en la
mode majeur \ il faudra des diefes , parce
que/afaitun intervalle majeur avecz/r. L'in-
tervalle eftune fixte dont le nombre eftfix :
j'en retranche un \ je multiplie le relce cinq
par deux \ Se du produit dix rejetant, ièpt
autant de fois qu'il fe peut , le refte trois eft
le nombre des diefes qu'il faut à la clé pour
le ton m.ajeur de la.
Que 11 je veux prendre /à mode majeur ,
je vois que l'intervalle eft mineur , &: qu'il
fiîut par conféquent des bémols. Je retran-
che donc un du nombre quatre de l'inter-
valle j je multiplie par cinq le refte trois ;,
& du produit quinze rejetant fèpt autant de
fois qu'il fe peut , j'ai un de refte , c'eft un
bémol qu'il faut à la clé.
On voit par-là que le nombre de dièlès
ou de bémols de la cléwo. peut jamais paflër
fix , puiiqu'ils doivent être le refte d'une di-
vifion par fept.
Pour les tons mineurs il faut appliquer la
même formule des tons majeurs, non fur la
tonique , mais iùr la note qui eft une tierce
mineure au-deftlis de cette même tonique ,
c'eft-à-dire flir fa médiante.
Ainfi , pour compofer en fi mineur , je
tran{p)oferai la clé comme pour le ton ma-
jeur de ré ; pour/û diefe mineur , je la tranf-
poferai comme pour /« majeur^ pour/b/ mi-
neur, comme pour/ bémol majeur, Ér.
Les muficiens ne déterminent les tranfpo-
jfitions qu'à force de pratique ou en tâton-
nant \ mais la règle que nous donnons eft
démontrée générale & ïm\s exception. {S)
On voit aifémentpar la méthode que nous
propofons ici , que l'oa doit mettre un bé-
mol à la clé dans le mode mineur de ré ,
quoique prelque tous les muikiens françois,
fi on en excepte M. Rameau , ne mettent
rien à la clé dans ce mode. La méthode de
M. Rameau eft pourtant fondée fur cette
règle très-fîmple & très-vraie , que dans le
mode majeur il faut mettre autiiiit de die-
, que féchelle du
CLE
fes ou de bémols à la clé
mode en contient en miOntant j &; que dans
le mode mineur il faut mettre autant de die-
fes ou de bémols à la clé , que l'échelle du
mode en contient en defcendaut. V. Mode,
6' Echelle ou Gamme. {0)
Clé , terme de poly graphie à- de ftégano-
graphie , e'eft-à-dire de l'art qui apprend à
faire des caradteres particuliers dont on (è
fèrt pour écrire des lettres qui ne peuvent
être lues que par des perfonnes qui ont la
connoiftance des caractères dontons'eftfervi
pour les écrire \ c'eft ce qu'on appelle lettres
en chiffres. Foy. CHIFFRE & DECHIFFRER.
Or \q^ perjfbnnes qui s'écrivent de ces for-
tes de lettres ont chacune de leur côté un
alphabet où la valeur de chaque cara£lere
convenu eft expliquée : par exemple , ii l'on
eft convenu qu'une étoile lignifie a , l'alpha'
bet porte * , . . . a f, ainfi des autres figues.
Or ces fortes d'alphabets qu'on appelle
clés , en terme de ftéganographie , c'eft une
métaphore prilè des clés qui fervent à
ouvrir les portes des maifbns , des cham-
bres , des armoires , &c. & nous don-
nent ainfi lieu de voir le dedans ; de même
\qs clés ou alphabets dont nous parlons don-
nent le moyen d'entendre le fens des lettres
& chiiFres j elles fervent à déchiffrer la lettre ,
ou quelque autre écrit en carad:eres lingu-
liers & convenus.
C'eft par une pareille extenfion ou méta-
phore qu'on donne le nom de clé à tout ce
qui fèrt à éclaircir ce qui a d'abord été pré-
fènté fbus quelque voile , &: enfin à tout ce
qui donne une intelligence qu'on n'avoit pas
fans cela. Par exemple y s'il eft vrai que la
Bruyère , par Ménalque , Philémon , ôc, ait
voulu parler dç telle ou telle perfonne , la
lifte où les noms de ces perfonnes font écrits
après ceux fous lefquels la Bruyère les a ca-
chés : cette lifte, dis-je , eft ce qu'on appella
la clé de la Bruyère. C'eft ainfi qu'on dit ,
la clé de Rabelais , ta clé du catholicoit
d'Efpagne , &c.
C'eft encore par la même figure que l'on,
dit que la logique eft la clé des fciences , parce
que comme le but de la logique eft de nout
apprendre à raifonner avec juftelTe , & à dé-
velopper les faux raifonnemens , il eft évi-
dent qu'elle nous éclaire & nous conduit dans
l'étude des autres fciences : elle nous en ou-
Hhî
244 CLE
vre , pour ainfi dire, la porte, & nous fait
voir ce qu'elles ont de iblide , & ce qu'il
peut y avoir de défectueux ou de moins
exaa. (F)
Clé d'Or ( gentilshommes de la ) ,
hijf. mod. ce font de grands officiers de la
cour d'Efpagne ou de celle de l'empereur ,
qui portent à leur ceinture une clé d'or , figne
du droit qu'ils ont d'entrer dans la chambre
de ces princes.
Clé , terme de blafoti : on dit cle's en pal
ou enfautoîr , couchées ou adojfées , félon que
les pannetons font difpofés. Dictionnaire de
Trévoux.
Clé , ( Vénerie. ) clés de meute ; ce font
les meilleurs & les plus sûrs de la meute.
Clés , {Fauconn. ) ce font les ongles des
doigts de derrière de la main d'un oifèau de
proie.
Clé , terme cC architecture ; clé d'un arc ,
d'une voûte ou croifé ^ plein cintre , ou au-
trement , eft la dernière pierre qu'on met
au haut pour en fermer le cintre , laquelle
étant plus étroite par en-bas que par en-haut ,
prefTe & affermit toutes les autres. La clé ,
îèlon Vignole , eft différente félon les ordres :
au tofcan & au dorique , ce ii'eft qu'une
fîmple pierre en faillie ou boffage : à l'ioni-
que , la clé eft taillée de nervure en m.aniere
de confole avec un roulem.ent : au corin-
thien & au compofîte , c'eft une confole ri-
che defcuîpture, avecenroulemens & feuil-
lages de refend. En cela les anciens étoient
plus prudens que nous , & affeftoient tou-
jours de rendre les fculptures analogues à i'ar-
chiteékure. Voy. l'abus que les modernes en
font, fl^r^mW^^ Claveau, Agraffe. (F)
* § Clés , {Architeâure navale. ) pièces
de bois qu'on établit dans les mailles des
varangues & des couples ,* de diftance en
diftance , pour l'affei miffement des fonds du
vaiffeàu ^ les clés qu'on met dans les mail-
les des varangues , font différemm.ent tra-
vaillées que celles qu'on met entre les mail-
les des couples ^ les premiers doivent avoir
pour hauteur verticale , celle depuis le def
fus de la contre-quille jjjfqu'au bord fiipé-
rieur des varangues , moins cependant l'é-
paiiîeur ou hauteur verticale de l'arête de la
carlingue entre les varangues^ ellesontpour
largeur horizontale celle de la contre-quille,
^ ellçs occupent tout le vuide d'une var^-
C L
n
gi:e à l'autre. On fait à ces désime coupure
dans la partie qui eft liir la contre-quille
pour faii'e écouler les eaux au canal des an-
guilliers , & delà à l'archipompe : cette cou-
pure fe fait ainfi dans toute la largeur de la
clé ; on donne à cette coupure cieux pouces
de hauteur & deux pouces & demi de lon-
gueur dans les plus gros vaifleaux , & à pro-
portion dans le« inférieurs.
Dès que toutes les clés des varangues font
prêtes , on les préi'ente & on les chalîë en-
ièmble & avec force dans les mailles.
Les clés qu'on met entre les mailles des
couples pour leur procurer un pareil atfer-
mifîêment , font établies de diftance en dif^
tance , depuis la bauguicre du premier pont
jufqu'aux varangues. Elles ont pour longueur
deux fois l'épailTeur des membres , & on ne
doit leur donner pour épaifleur que l'efpace
du vuide ou la maille comprifè entre chaque
couple f, on leur laiife quelquefois fur la par-
tie intérieure des m.embrcs du vaifîeau , un
rebord d'un pouce ou deux , fuivant la di-
menfion des membres du vaiffeàu , & cette
arête s'empatte de àeux côtés f ir un des
membres de deux couples voifins qu'on en-
taille à cet effet ç, on chalfe également &en-
fèmble toutes ces clés. ( Injlrucliou élémen-
taire & raifonnée fur la conjîruclion pratique
des vai[feauz ^'^■axNï. Durant! de Lironcourt. )
Clé , en terme de bottier ; c'eft un mor-
ceau de bois plat , & plus mince en-bas
qu'en-haut , que Ion enfonce à force dans
Tembouchoir pour en faire prendre la forme
à la botte.
Clé , c'eft le nom que les bourreliers fet-
licrs , ik carrojfiers donnent aux manivelles
dont ils fe fervent pour démonter les écrous
des efîîeux à vis , ou pour tourner les roues
& pignons à crémaillère , fur lef<|uels ils ban-
dent les foupentes qui portent le corps des
carroflès. Une des extrémités de cette clé
eft une ouverture quarrée , & l'autre une ou-
verture oâiogone 5 elles fervent l'une & l'au-
tre pour ferrer les écrous des mêmes formes.
Il y en a de différente grandeur.
Clé , en terme de brajfcrie , eft une plan-
che d'un pié de long frr huit à neuf pouces
de large , percée d'un trou femblable à celui
du fond de la cuve & de la maîtreffe pièce
du faux- fond ^ de façon que le trou de la
maitreife pièce & celui de la clé foieut uu
CLE
peu plus grands, pour que la râpe puifTe par-
ier aiiemcnt, & boucher exactement le trou
du fond de la cuve.
Clés petites & grandes y outil de charron'^
c'eft un morceau de fer qui eft plus ou moins
gros & long , ièlon l'iifage de la clé. Par
^lemple , pour une clé à cric , le fer efl de
cinq à fîx pies de long fîar deux pouces d'é-
pailfeur: & pour une dé à vis ordinaire , il
y en a depuis un pié & au delTus.
C'eft un morceau de fer rond par le
corps , un peu applati des deux bouts , &
large dans le milieu , où il eft percé d'un
trou quarré de la groiFeur des vis que l'on
veut ferrer dans l'écrou.
Cette clé fert aux charrons pour ièrrer les
vis dans les écrous , pour monter & tendre
les foupentes d'un carroffe fur les crics , &
enfin pour viifer tous leurs ou\Tages.
Clés {Grojfè s forges. ) Voy. cet article.
Clé du trépan , inièrument de chirurgie
qui fert à monter & démonter la pyramide
du trépan couronné. Voye^ TrÉPAN.
Clé , ( F ont ai nier. ) ce font de grofles
barres de fer cintrées , dont on fourre la
boîte dans le fer d'un regard pour tourner
les robinets. Ce fer eft montant , & fe divifè
en parties plates qui embraifent les branches
d'un robinet , au moyen d'un boulon cia-
veté qui palFe à travers. ( K )
Clé , en terme de formier , c'eft un mor-
ceau de bois un peu aigu par un bout en for-
me de coin , qu'on introduit dans la forme
brifée pour l'ouvrir autant que l'on veut.
Clé ou Accoudoir : les faifeurs d'inf-
trumens de mAifique ont des clés pour mon-
ter & dellerrcr les chevilles auxquelles font
attachées les cordes des clavecins j pfalté-
rions , épinettes , &c. Ces clés font compo-
iees d'une tige de fer ou de cuivre , percée
par en-bas d'un trou quarré , dans lequel on
fait entrer la tête des chevilles^ & elles lont
furmontées d'un petit marteau de fer ou de
cuivre qui tient lieu de poignée , & qui fert
à frapper les chevilles & à les affermir
quand elles font montées.
Il y a de plus aux accordoirs ^ clés ^ ou
marteaux des clavecins , épinettes , pfalté-
rions , un crochet qui fert à faire les anneaux .
par le moyen defqucls on accroche à leurs
chevilles les cordes de laiton & d'acier. Pour
■feiie wcs anneaux , on cciiiineiicx p-ir ployer
CLE 245
le bout de la corde enforîe qu'elle forme
une anfe , que l'on tient avec les doigts pol-
lex & indicator de la main gauche j on fait
palier enfuite le crochet du marteau que
l'on tient de la main droite dans l'anfe de
la corde , & on tourne la tige du marteau
pour faire entortiller l'extrémité de la corde
qui forme l'anfe autour de cette m.ême cor-
de , laquelle fe termine ainfi en un anneau ,
par le moyen duquel on peut l'actrocher où
l'on veut.
Clé des étains , ( Marine. ) « c'eft une
w pièce de bois triangulaire qui fe pofe fur
)) le bout des étains &: qui les entretient
» avec l'étambord : on l'appelle aulfi contre-
)x fort ». Voyeiyà forme de cette pièce de
bois , pi. VI , Marine , fig. 1 2.
ce La clé ^iù% étains a un pouce d'épaiftcur
M moins que l'étrave ; elle eft renforcée de
» deux courts bâtons , & jointe à l'étrave
» par quelques chevilles de fer qui paflènt
» au travers dans fon milieu ^ &: il y en a
» quatre autres à chaque côté. » (Z)
Clés du guindas., (Marine.) » ce font
î) de petites pièces de bordage entaillées en
» rond , qui tiennent les bouts du guindas
» fur les côtes, n {Z)
Clé de fond de mât^ clé de mât de hune ,
{Marine. ) « c'eft le bout d'une barre de fer ,
» ou une groiTe cheville de bois qui entre
» dans une mortaife , au bout d'en bas du
» mât de hune , & qui fort à le foutenir de-
» bout , & que l'on ôte chaque fois qu'il
» faut amener ce mât ;, ou bien c'eft une
» cheville quarrée de fer ou de bois , qui
» joint im mât avec l'autre vers ks barres de
» hune , & que l'on ôte quand il faut ame-
» ner le mât. » Diction, de marine. ( Z )
Clé , ( Menuiferie. ) c'eft un m.orccau de
bois large & mince, que l'on infère dans dts
mortaifès faites à des planches , pour les
joindre enfemble.
Clé , fe dit aufti de pièces de bois en
forme de coin , que l'on fait entrer dan-S des
mortaifes faites au bout des tenons qui excé-
dent l'épaiffeur du bois , dans lefquels ils
font afîemblés j com^miC on voit aux tablet-
tes de bibliothèques , Gc.
Clé , en termes d' orfèvre-bijoutier ^ eft un
morceau de bois plat , quarré , large par ua
bout , &: qui vg en retrécifii"»^ juk^u'à l'au-
tre bout j il s^fêtc KS poupées lùr ie J?caiQ j
i<^S CLE
eu pafTant dans leur tenon. Voyei Banc.
Clé (Plombier. ) ce font de grofles ma-
nivelles de fer : l'ouverture s'applique aux
robinets des regards quand il s'agit de don-
ner ou de foullraire l'eau aux fontaines j la
queue fait la tbndtion de levier , & donne
au plombier la facilité de tourner les robinets.
Clé , {Relieur) ces ouvriers en ont une
qui leur fert à defferrer ou à ferrer leur
couteau.
Clé , C Manufaci. en foie. ) ces ouvriers
ont une clé qui n'a rien de particulier. Voye':^
fon ufage à ïanicle Velours CISELÉ.
Clé , ( Tourneur. ) coin de bois placé
fous les jumelles & dans la mortaife prati-
quée à la queue des poupées , qu'il tient
fermes & folides. Voye:{^ ToUR.
Clés , ( Jurifpr. ) mettre ou jeter les clés
fur la fojfe du défunt , étoit une formalité
extérieure qui fe pratiquoit anciennement
par la femme après la mort de fon mari ,
en figne de renonciation à la communauté.
Chez les Romains , dont nos pères imitè-
rent les mœurs , la femme avoit le foin des
clés : c'eft pourquoi , dans le cas du divorce
le mari ôtoit à la femme les clés , fuivant la
loi des douze tables ^ & la femme qui fe fé-
paroit de fon mari , lui renvoyoit fes clés.
î:{n France , il n'y avoit anciennement que
les femmes des nobles qui avoient la faculté
de renoncer à la communauté ^ ce qui leur
fut accordé en conlidération des dettes que
leurs inaris contractoienî la plupart aux voya-
ges & guerres d'outre-mer ^ & en ligne de
cette renonciation , elles jetoient leur cein-
ture ou bourie ci. les clés fur la folTe de leur
inari. Cet ufage eft remarqué par l'auteur du
grand coutumier , cA. xlj. Marguerite , veuve
de Philippe duc de Bourgogne , mit fur la
repréfentation du défunt fa ceinture avec fo
bouriè & les clés. Mouftrelet , ck. xvij.
Bonne , veuve de Valeran comte de Saint-
'Pol , renonçant aux dettes & biens de fon
mari , mit fur fa repréfentation fà courroie
& fa bourfe. Monftrelet , chap. cxxxix. Dans
la fuite , le privilège de renoncer à la com-
munauté fut étendu aux femmes des rotu-
riers , & établi par pluiieurs coutumes qui
ont prefcrit la même formalité , c'eft-à-dire
de jeter les clés fur la folfe du défunt en ligne
que la femms quittoit l'adminiftration des
biens de iQn mari j 6c ia weig.ture qu bourfe 2
CLE
pour marquer qu'elle ne retenoît rien des
biens qui étoient comm.uns. C'eft ce que l'on
voit dans la coutume de Meaux, art. xxxiij
& lij. Lorraine , tit. 1 , art. iij. Malines ,
art. viij. L'ancienne coutume de Melun ,
art. clxxxiij. Chaumont , vij. Vitri , xcj.
Laon , xxvj. Châlons , xxx. Duché (te
Bourgogne , art. xlj. Namur , art. liv.
Préfentement la femme , foit noble ou
roturière , a toujours la faculté de renoncer
à la communauté \ mais on ne pratique plus
la vaine cérémonie de jeter la bourië ni lei
clés fur la foffe du déflint. ( A )
CLECHÉ , ( Blafon. ) On croit que ce
mot, qui eft françois , eft formé de clé ^ les
extrémités de la croix ayant quelque reflem-
blance avec les anneaux des anciennes clés ^
il fe dit, fuivant Guillim, d'une pièce d'ar-
moirie percée à jour ou traverfée par luie
autre de même figure qu'elle ^ par exemple ,
d'une croix chargée d'une autre , de même
couleur que le champ qui paroît à travers
les ouvertures qu'elle laifî'e.
Mais la Colombiere & quelques autres
auteurs prétendent que ces ouvertures ne
font qu'une circonftance de la croix ckchée ,
qu'ils appellent vuidée ^ elle ne mérite , fui-
vant eux, le nom de clechée , que lorfqu'elle
s'élargit du centre vers iës extrémités , qiii
font vuidées & terminées par un angle dans
le milieu.
Le P. Meneftrier dit qu'on fe fert du mot
cleché en parlant des arrondilîémens de la
croix de Touloufe , qui a fes quatre extré-
mités faites en forme d'anneaux de clé.
Théard de Cotiere, à Paris , de gueules
à la croix vuidée , clechée , pommetée & aie-
fée d'or. Voye^^ le P. Meneftrier , le diction,
de Trév, & Chambers. ( ^ )
CLECKUM, {Géogr. ) ville du duché
de Lithuanie dans le palatinat de Mcizlaw.
CLEDONISME , f. m. dedonifmus ,
( Divinat. ) clpece de divination qui étoit en
ufage parmiles anciens. Voy. Divination.
On n'eft pas d'accord iiir l'objet & la
manière de cette forte de divination \ parce
que le mot grec KKiiov, duquel eft formé cl'e-
donifme^ fê prend en pluiieurs fens : i°.pour
un bruit , rumor ; i^. pour un oifeau , avis ;
8c 3°. pour un dérivé du verbe aa*», &
par contraction Kha , qui fignifie évoquer.
Cela les auteurs donnent diverfes iigni-
CLE
fîcations au mot clédonifme. Les uns préten-
dent que c'étoit une efpece d aUj^ure ou de
préfage tiré des paroles qu'on avoit enten-
dues : car au rapport de Cicéron , les pytha-
goriciens obfervoient avec une attention
fcrupuleufe , non-feuleinent les paroles des
dieux , mais encore celles des hommes , &
étoient perfiiadés que certaines paroles por-
toieut malheur , comme de prononcer le
mot incendie dans un repas -^ ainlî ilsdifoient
domicile au lieu deprifon ; &, les euménides
au lieu de furies. Le clédonifme pris en ce
feus , revient à une autre efpece de divina-
tion nommée onomancie. V. OiMOMANCIE.
D'autres foutiennent que par clédonifme ,
il faut entendre un augure tiré du chant ou
du cri des oifeaux \ & que cett en ce feus
qu'Horace a dit :
Impios parrce recinentis omen.
Et Virgile :
Cava prœdizit ab ilice cornix. Eclog.
ce qui ne diffère point de la divination ap-
pellée ornithomancie. Voye\ ORiNITHO-
MANCIE.
Enfin quelques-uns difent que le clédo-
nifme pris dans le troifieme feus , étoit la
même chofe que l'évocation des morts. C'eft
le fëntiment deGlycas : (( ISam KK<iê'ov^ dit- il ,
)j vocari geniorum per excantationes certes
)) attraclionem , 6' éfublimi deduclionem. De-
» duclâ voce a xA(y, quod idem fit cum Kheta ^
» evoco. » Voyei EvOCATIOxN (S* NECRO-
MANCIE. (G)
CLEF, Foy^î Clé.
CLÉIDOMANCIE , f. f. (Divinat.) ef-
pece de divination qui fè pratiquoit par le
moyen des clés. Ce mot vient de KKm , clé ^
& de |<-*;7s.*, divination.
On ignore quel nombre & quel mouve-
ment des clés exigeoient les anciens pour la
cléidomancie , ni quel genre de connoilfance
pour l'avenir ils en prétendoient tirer. Dei-
rio , qui fur toutes ces matières a fait des
recherches , ne donne aucune lumière fur
celle-ci , pour ce qui conceriîe l'antiquité \
il nous apprend feulement que cette fuperf-
tition a eu lieu dans le ehriftianiiine , &
qu'on la pratiquoit de la forte : c< Lorfqu'on
» vouloir , dit-il , découvrir lî une peribnne
» foupçonnée d'un vol ou de quelque autre
i> mauvaife adion eu étoit coupable , ou
CLE 147
w prenoitune clé autour de laquelle on rou-
» loir un papier , flir lequel étoit écrit le nom
n de la peribnne f.ifpeéLC \ enfuite on lioit
» cette clé a une bible , qu'on donnoit à
)) tenir à une vierge ;, puis on prononçoit
» tout bas certaines paroles , entre lefquelles
» étoit le nom de l'accufé ; &: à ce nom ,
M l'on voyoit fenfiblcment le papier fe re-
)) muer. » Delrio , difquift, magie, lib. IV ^
cap. ij ^qucvf. VU - /ec7. / './'. 548. (G)
CLÉLIE , [Hijîoire Rom.") fut une des
clames rom.aines données en otage à Porfenna
qui , proteéleur des Tarquins , exigeoit à
main armée leur rétabliflènient ^ fa fierté
fiit indignée d'être dans la dépennance d'un
roi , tandis que Rome libre , n'cbéiffoit qu'à
/es loix : elle ne crut pas manquer à la foi
des traités en fortant d'une efpece d'eicla-
vage qui bleiîbitla dignité du nom romain ^
rarmée des l'ofcans étoit campée fiir les
bords du Tibre , & l'on veiiloit avec foin
à la garde des otages. Clélie aflemble toutes
les dames romaines qui partageoientiiî def-
tinée : on l'écoute avec traniport : elle fe
met à leur tête & traverfant le camp fans
être reconnue , elle s'élance dans le fleuve
avec fes compagnes qu'elle reiid à leur fa-
mille. Rome applaudit à cette généreuié ré-
fblution : mais fidelk au traité , elle les ren-
voie à Poriènna qui les redemande pour tirer
vengeance de leur parjure. Clé/ie quicroyoit
en avoir fait aiTez pour fa gloire , retourna
fans crainte dans le camp d'un ennemi qui
avoit droit de la punir. Sa confiance défarma
le monarque Tofcan qui , faifi d'admira-
tion , avoua que i'aâion de Clélie avoit
quelque chofe de plus héroïque que le fana-
tifme de Mutius-Scevola , & la témérité dé-
/è{pérée d'Horatius - Codes. Les Romains
lui érigèrent une flatue équeftre flir la voie
Sacrée. C'efl le premier monument de cette
efpece qu'on ait élevé aux femmes. Les
mœurs étoient promptes à s'alarmer. On
avoit cru jufqu'alors qu'il y avoit de l'indé-
cence dans le fpeâacle d'une femme achevai.
{T-N.\
CLEMATITE , f. f, dematitis , en an-
glois , virgins Bower; en allerriand , Wal-
drebe , ( iiifl. nat. bot. ) genre de plante à
fleurs en rofè , qui font compofées ordinai-
rement de quatre î>éta les , & qui n'ont point
de calice. Le piilii fort du milieu d« k fleur j
248 ■ CLE
Se devient dans ia iuite un fruit dans lequel
les femences font raifemblécs en bouquet ,
& font terminées par un filament fembiable
en quelque forte à une petite plume. Tour-
nefort /«/. rei herb. Voye^ Plante. (1)
Clématite , {Jard.) 11 y a quelques ef
peces de clématite qui ne font que des plan-
tes vivaces : les autres en plus grand nom-
bre , font des arbriiTeaux grimpans , dont
quelques-uns par l'agrément de leurs fleurs ,
méritent de trouver place dans les plus beaux
jardins. Ce qui peut encore engager à les y
admettre , c'cfl que tous ots arbriifeaux font
très-robuftes , à l'exception d'un feul ^ qu'ils
croiffent très-promptement \ fleuriflènt très-
long-temps ,, & qu'ils réufîîfTent dans les ter-
rains les plus médiocres , & aux expofitions
les moins favorables. Une autre qualité doit
encore leur donner faveur ^ c'eft qu'ils ne
font jamais attaqués des infectes ^ ce qu'on
peut attribuer au fuc cauftique de leurs feuil-
les qui brûlent la bouche lorfqu'on les mâche.
Arbri^eaux grimpans. La clématite com-
tjiune ou i herbe aux gueux ^ eft ainfi appellée
de ce que les mendians de profelfion iè fer-
vent de ces feuilles pour fe former des ul-
cères , & exciter la compafîîon du peuple :
mais dans la balfe-Bourgogne on l'appelle
viorne , quoique ce nom ne foiî propre qu'à
un autre arbriffeau qu'on appelle mancienne
dans le mêtne pays. Cette efpece de cléma-
tite eft fort commune dans les bois , dans l^s
haies , & dans les anciennes ruines de bâti-
mens , oii (qs longues tiges rampent & cou-
vrent tout ce qui l'avoifîne. Ses fleurs blan-
châtres qui viennent en bouquet au mois de
juin 5 &: qui durent pendant tout l'été, font
plus finguîieres que belles , & ont une odeur
agréable ^ les graines qui leur fiiccedent ont
des aigrettes barbues , blanches, & raffem-
blées de manière à les faire prendre de loin
pour de flocons de laine : elles couvrent
î'arbrifTeau pendant tout l'automne , & une
grande partie dé l'hiver. La bouture lêroit le
plus court moyen de multiplier cet arbrif-
feau , fi on lui connoiflbit d'autre utilité que
d'être propre à faire des liens & des ruches
de mouches à îniel.
La clématite à feuille entière; c'eft une va-
riété de la précédente , dont elle ne diftere
que parce que fès feuilles ne font pas dé-
coupées.
CLE
La clématite du levant ; û\ feuille qui eft
lifte , d'un verd foncé 6c fort découpée , a
quelque rellemblance avec celle du perfil. ,
Sa fleur qui eft petite , d'un verd jaunâtre ,
ne paroît qu'en automne j mais elle n'a nulle
beauté. Si on peut tirer quelque agrément de
cet arbriftèau, ce n'eft que de fon feuillage,
qui étant bien garni , peut fcrvir à faire des
paliffades & des portiques de verdure dans
les plus mauvaifes places , où beaucoup d'au-
tres arbriifeaux ne pourroicnt réuflîr. Cette
clématite eft d'ailleurs très-robufte ^ fe mul-
tiplie aifément , & s'élève moins que les pré-
cédentes.
La clématite du Canada ;, c'eft encore une
variété de notre clématite commune , dont
elle n'eft différente qu'en ce que fa feuille
n'eft conftamment compofée que de trois
lobes , au lieu que dans l'efpece commune ,
les feuilles ont plus fouvcnt cinq lobes que
trois.
La clématite à fleur bleug \ cet arbriftèau
de fon naturel rampe par terre , ce qui le
diftingue d'une autre clématite à fleur bleue
qui fera rapportée ci-après , & qui n'eft qu'une
plante vivacc.
La clématite a fleur bleue double ; c'eft l'un
des plus beaux arbriftèaux fleuriifans que l'on
puiffe employer dans un jardin pour l'agré-
ment. Son feuillage d'un verd brun & conf-
tant , eft très-propre à varier les nuances de
verdure. Sa fleur , quoique d'un bleu obf-
cur , eft très-apparente ^ on eft dédommagé
de ne la voir paroître qu'à la fin de juin, par
fa durée qui vafouvent à plus de deux mois ;
&rarbrifîeau en produit une fi grande quan-
tité , qu'elles cachent fon feuillage : mais
elle eft fi double , que ne pouvant s'épanouir
tout-à-la-fois , les pétales extérieurs tombent
peu-à-peu , pour laifler aux plus prochaines
la liberté de s'ouvrir & de iè détacher à leur
tour 'j enforte que pendant tout l'été le ter-
rain au deftbus eft jonché de fleurs. On peut
le multiplier de boutures ou de branches
couchées , c'eft la plus courte voie & la plus
sûre : mais comme l'arbriftèau commence à
pouifer de très-bonne heure , & fouvent dès
la fin de janvier , il faudra coucher fes bran-
ches qui feront de bonnes racines dans l'an-
née j au lieu que fi l'on couchoit du vieux
bois , il feroit rarement des racines ^ & s'il
en produifoit , elles ne feroient fuffilàntes
pour
CLE CLE 249
pour la tranfplantatioii qu'au bout de deux 9 encore celles qui font rouges & incarnates:
ans. Les boutures prifès fur les jeunes bran-
ches, réuflliTent beaucoup mieux auffi que
celles faites de vieux bois -^ ciles donneront
même des fleurs dès la lêconde année : mais
il vaudra mieux attendre les deux ans révo-
lus pour les tranfplanter. Comme cet arbrif-
feau pouffe vigourcufement , & qu'il pro-
duit de longues tiges qui s'élèvent fbuvent à
douze ou quinze pies , la moitié de ces re-
jetons fè defîèche & meurt pendant l'hiver \
non feulement on doit ôter ce bois mort ,
mais il faut aufli tailler le bois vif au àci^'ds
d'un œil ou deux , fans craindre de nuire
aux fleurs :, l'arbriffeau étant fî difpofe à en
donner qu'il en produit toujours, quoiqu'on
lie lui ait laiffé que du bois fort vieux ^ &
quand même on en vient jufqu'à retrancher
Ja plus grande partie des jeunes rejetons ,
lorfqu'il eft prêt à fleurir , il pouffe de nou-
velles tiges , & doHue autant de fleurs qu'il
auroit fait fans cela ^ avec cette différence
ièulement , qu'elles paroiffent cinq ou fîx
femaines plus tard , & qu'elles durent toute
l'automne : facilité qui n'eft pas fans mérite
par l'avantage qu'on en peut tirer pour l'or-
nement des jardins, dont on n'a à jouir que
dans cette faifbn. Il fouffre également le re-
tard de la taille au printemps ^ je l'ai fbuvent
fait couper gufqa'auprès des racines , lorf-
qu'il avoit déjà pouflë des tiges d'un pie de
long, fans que cela l'ait empêclié de repouf-
ièr avec vigueur , ni de fleurir à l'ordinaire.
Ce bel arbriffeau qui croît promptcment ,
Tfui réîlfte aux plus cruels hivers , qui réuf^
lit dans tous \cs terrains , qui s'accommode
des plus mauA'aifès expoiîtions , qui fe
inultiplic aifément , qui n'eft jamais atta-
qué des infectes , efl fî traitable à tous
égards, qu'il ne demande aucune culture :
aufîî n'y en a-t-il point de plus convenable
pour garnir de grandes palilfadcs , des
portiques, des cabinets , des berceaux, &
d'autres femblabîes décorations de jardins .
dont il fera l'afpeâ: le plus agréable pen-
dant tout l'été.
La clématite à fleur pourprée , la clématite \
h fleur double pourprée , la clématite à fleur
rouge , la clématite afl.eur double incarnate :
<:es quatre dernières efpeces de clématite
font encore de beaux arbriffeaux fleuriiians,
fiir-tout les efpeces à fleur double, & mieux ,
.Terne FIJL
mais elles font fort rares , même en Angle-
terre. On peut leur appliquer ce qui a été
dit au fujet de la clématite à fleur bleue dou-
ble , elles ont les niêxnes bomies qualités %,
elles font aufîi aifées à élever , à conduire ,
& à cultiver : l'agrément qu'elles ont de plus
par la vivacité des couleurs rouges & incar-
nates de leurs fleurs , devroit bien engager-
à les tirer d'Angleterre.
La clématite toujours verte OU la clématite
d^Efpagne : cet arbrilîèau qui eft originaire
des pays chauds , fe trouvant un peu déli-
cat , eft fùjet à être endommagé du froid
dans les hivers rigoureux , ce qui doit enga-
ger à le placer aux meilleures expofitions ^
qui ne l'empêchent pas fouvent d'être gelé
jufqu'aux racines. Mais malgré qu'on vante
la beauté de fon feuillage , qui efî d'un verd
tendre & brillant , & plus encore la rare
qualité de produire au cœur de l'hiver fes
fleurs qui font faites en clochette &d'un verd
jaunâtre , ce n'eft tout au plus qu'un arbrif-
feau du refîbrt des curieux en coUeciions ,
lî'ajrant pas affez de tenue ni d'apparence
pour être admis dans leï jardins d'ornement.
On peut aifément le multiplier de branches
couchées & de boutures, qui font de bonnes
racines dans l'année.
On peut aufîî multiplier de graine toutes
les efpeces de clématite qui font à fleurs fîm-
ples ^ mais comme elle eft une année en terre
fans lever , on ne fe fêrt guère de cç
moyen qu'au défaut des autres plantes vi>
vaces.
La clématite h fleur bleue , la clématite à
fleur blanche , la petite clématite d'Efpagne :
ces plantes périfl'ent tous les hivers jufqu'aux
racines , repouflcnt chaque année de bonne
heure au printemps , Scfieuriffenten été. Lci
deux premières s'élèvent à trois ou quatre
pies , & l'autre feulement à un pié & demi j
& c'eft la feule circonftance qui la diftinguc
de la féconde plante. Ojii peut les élever de
graine , ou en divifant leurs racines , qui
donnent des fleurs l'année fuivante : on ne
manque pas de préférer ce dernier moyen
comme le plus court. & le plus fîm.ple , la
graine ne levant ordinairement que la féconde
année ;, & il lui en faut encore deux autres
pour donner des fleurs. Du refte ces plantes
font très-robaftes , viennent par-tout , & ac
il
150 CLE
demandent aucune culture particulière. ( c )
Clématite, ou herbe aux gueux ,
( Mat. méd. ) la fbur , la femence , fon
écorce & fa racine font cauftiques , & ne
doivent pas être employées intérieurement \
mais elle eft bonne à l'extérieur , pour ronger
les chairs baveufes qui empêchent les plaies
de fe cicatrifer. On l'appelle herbe aux
gueux , parce que (±s fortes de gens fè fer-
vent du fiic cauftique de cette plante pour fc
déchirer \qs jambes & autres parties du
corps , & infpirer par cette manœuvre de
la compaffion à ceux qui les voient dans cet
état , qui n'eft pas de longue durée ni bien
fâcheux , car lorfqu'ils veulent faire pafî'er
CCS marques, ils n'ont beiôin que de les étu-
ver avec de l'eau coinmune.
CLEMENCE , f. f. r Droit polit. )
Favorin la définit un acîe par lequel le fou-
verain fe relâche à propos de la rigueur du
droit ; & Charron l'appelle une vertu qui fait
incliner le prince à la douceur , à remettre
& relâcher la rigueur de la juflice avec juge-
ment & difcrétion. Ces deux définitions ren-
fermant \qs mêmes idées qu'on doit avoir
de la clémence , font également bonnes.
En effet , c'efl une vertu du fbuverain qui
l'engage à exempter entièrement les coupa-
bles des peines , ou à les modérer , fbit dani>
l'état de paix , foit dans l'état de guerre.
Dans ce dernier état , la clémence porte
plus communément le nom de modération .
& efl une vertu fondée fur les loix de l'hu-
manité , qui a entr'autres l'avantage d'être
la plus propre à gagner les efprits : i'hiftoirc
nous en fournit quantité dexem.ples, comme
aufll d'aâions contraires , qui ont eu des
fuccès tout oppofés.
Dans l'état de paix , la clémence eonfiiie
à exempter entièrement de la peine, lorfqife
Je bien de l'état peut le permettre , ce qui
eft m^êmc Une des règles du droit romain:
ou à adoucir cette peine , s'il n'y a de très-
fortes raifons au contraire , & c'efî: là la
féconde partie de la clémence.
Il n'eft pas nécefl'aire de punir toujours
fans rémiflîon ies crimes d'ailleurs punillh-
bles ^ il y a des cas où le fbuverain peut
faire graôe , & c'eil de quoi il faut juger
■ par le bien public , qui efl le grand but
ées peines. Si donc il fe trouve des circonf-
taaccs Quciifwiiàntgraeej on procure autant
CLE
ou plus d'utilité qu'en punifî'ant , le fbuve-
rain doit néceffairement ufer de clémence.
Si le criine eft caché , s'il n'eft connu quô
de très-peu de gens , s'il y a des inconvé-^
nicns à l'ébruiter , il n'eft pas- toujours né-
ceflhire , quelquefois même il fêroit dan-
gereux de le publier, en le punifî'ant par
quelque peine. Solon n'avoit point fait de
loi contre le parricide. L'utilité publique ,
qui eft la mefijre des peines , demande en-
core quelquefois que l'on fafîè grâce à caule
des conjonèfures , du grand nombre des
coupables, des caufès, des motifs qui les
ont animés , des temps , des lieux , &c. car
il ne faut pas exercer . au détriment de
l'état , la jultice qui eft établie pour la con-
fèrvation de la fbciété.
S'il n'y a point de fortes & prelfantes rai-
fons au fouvcrahi de pouvoir faire grâce ,
il doit alors pencher plutôt à mitiger la peine
( à moins que des raifons valables & juftes
ne s'y oppofènt entièrement, comme quand
il s'agit de crimes qui violent les droits de la
nature & de la fociété humaine ) , parce
que toute peine rigoureufe a quelque chofe
de contraire par elle-même , fînon à la juf-
tice , du moins à l'humanité. L'empereur
Marc-Antonin le penfoit ainfi , & y confcr-
moit fk conduite,
La clémence eft contraire à la cruauté , à
la' trop grande rigl^eur , non à la juftice, de
laquelle elle ne s'éloigne pas beaucoup.,
mais qu'elle adoucit , qu'elle tempère ; &
la clémence eft néceliàire à caufe de finfir-
mité humaine , & de la facilité de faillir ,
comme dit Charron.
Suivant ies principes généraux qu'on vient
d'établir, on peut voir quand le ibuveraiu
doit punir , quand il doit mitiger la peine ,
& quand il doit pardonner. D'ailleurs ,
lorfque la clém.ence a des dangers , ces dan-
gers font très-vifibîes ^ on la diftingue aifé-
ment de cette foibJcfiè qui mené le prince
au mépris , & à limpuiffance même de
punir , comme le remarque l'illuflre auteur
de; l'efprit des loix.
Voici ce qu'il ajoute fur cette matière
dans cet ouvrage , liv. VI , chap. xxj.
(( La clémence eiï la qualité diftindive des
m.onarqucs. Dans la république où l'on a
pour principe la vertu , elle eli moins nécef-
; faire* Vaiii l'état ^elipotic^ue qù jregne. ]a.
CLE
oranite , elle efl moins ea iifage, parce qu'il
•faut' contenir les grands de l'état par des
exemples de févérité. Dans les monarchies
où l'on eft gouverné par l'honneur , qui
foavent exige ce que la loi défend , elle ell
plus néceflaire. Ladifgrace y eft équivalente
à la peine ^ les formalités même des juge-
mens y font des punitions. C'eft-Ià que la
honte vient de tous côtés pour former des
genres particuliers de peines,
c< Les grands y font fi fort punis par la
difgrace, par la perte fouvcnt imaginaire de
kur fortune , de leur crédit: , de leurs habi-
tudes , de leurs plaifirs, que la rigueur àleur
égard eft inutile '^ elle ne peut fervir qu'à ôter
aux fujets l'amour qu'ils ont pour la perfonne
du prince , & le relpe£l: qu'ils doivent avoir
pour les places.
<c On difputera peut-être aux monarques
quelque branche de l'autorité , prefque
jamais l'autorité entière ^ & fi quelquefois
ils combattent pour la couronne , ils ne
combattent p3int pour la vie.
« Ils ont tant à gagner par la clémence ,
elle eft fiiivie de tant d'amour , ils en tirent
tant de gloire , que c'eft prefque toujours un
bonheur pour eux d'avoir occafîon de l'exer-
cer , & ils le peuvent prefque toujours dans
nos contrées. »
C'eft une héureufe prérogative dont ils
jouiifent , & le caraâere d'une belle ame
quand ils en font ufage. Cette prérogative
leur eft utile & honorable , fans énerver
leur autorité. Je ne connois point de plus
beau trait dans l'oraifon deCicéron pour Li-
giarius , que celui où il dit à Céfar , pour le
porter à la clémence : « Vous n'avez reçu rien
») de plus grand de la fortune , que le pou-
») voir de cçnfèrver la vie ;, ny^icn de meil-
)> leur de la nature que la volonté de le
» faire. » ( M. le chevalier de Ja ucovrt. )
* Clémence , ( Myth. ) Les anciens en
avoient fait une divinité ^ elle tenoit lîtie
Ijranche de laurier d'une main , & une lance
de l'autre. Le pié de fa ftatue fut un afyle
dans Athènes. On lui dédia dans Rome un
temple & des autels après la mort de Jules
Çéfar. Sa figure le voit fur les monnoies de
Tibère & de Vitellius. Elle eft là bien mal
placée.
. ^ CLEMENTE ( Sr. ) , Géogr. mod. ville
.d'E {pagne dans la mancîîe.
CLE 25T.
CLÉMENTIN , fi m. ( lîifloire cccléf. )
terme en ufiige parmi les auguftins , pour
défigner un religieux qui après avoir été neuf
ans fupérieur, ceflè de l'être, & redevient
fimple religieux , foumis comme les autres
à l'autorité d'un fupérieur.
Ce mot vient de ce qu'un pape du nom ■
de Clément , défendit par une bulle qu'aucun
fupérieur des augufcins confervât fon emploi
plus de neuf ans de fuite. Dicl» de Trév. {G)
CLÉMENTINES , adj. fémin. prisfjbf.
( Jurifp. ) On entend ordinairement fous ce
nom un recueil des décrétales du pape
Clément V , fait par l'autorité du pape Jean
XXII fon fucq||^ur.
Clément V avoit fait une compilation ,
tant des décrets du concile général de Vien-
ne, auquel il avoit p'réfidé , que de fès épi-
tres & conftitutions ;, mais fa mort arrivée
le 20 avril 1 3 14, l'ayant empêché de publier
cette colleftion , Jean XXII fon fucceffeur
la publia en 1317 fijus le nom à^ clémenti-
nes , &: l'adrella aux univerfités.
E.lles font divifées en cinq livres , où les
matières du droit canonique font diftribuées
à-peu-près fiiivant le même plan que les dé-
crétales de Grégoire IX. V. Dechetales.
Clémentines eft aufti le nom que l'on donne
quelquefois à un recueil de plufieurs pièces
anciennes , qui font de prétendus canons &
conftitutions des apôtres , & autres pièces
apocr^'phes attribuées faullèment à St. Cla-
ment , évêque de Rome. Voye^ Cotelier,
en fon recueil des ouvrages des pères ^ des
temps apoftoliques j Dupin , biblioth. des
auteurs eccléfiaftiques ; Ceiller , Aijl. des
ant. facr. & eccléf. {A)
CLEMPENOW , ( Gécgr, mod. ) petite
ville d'Allemagne dans la Poméranie.
CLÉOBIENS , fi m. plur. {Tkéolog.)
fefte àQs fimoniens dans le premier fiecle
de réglife. Elle s'éteignit prefque dans fii
naiflànce. Hegelippe & Théodoret , qui en
parlent , ne Ipécitient point par quels îènti-
mens lescléoèiens fe diftinguerent des autres.
On croit qu ils ont eu pour chef un nommé
Cléobe , compagnon de Simon , & qu'il
avoit compofé avec cet héréfiarque divers
livrer fous le nom deJefiis-Chrift pour trom-
per les chrétiens. Hegefippe , apud Eiifeb,
liv. IV^ , ckap. xzij , ant. conjiit. apoji. M.
' Dupin , hibliot, des auteurs eccléf. des trois
I i 2
3L 5 1 CLE
fremîers Jieclù\ hs diâ, de labiale^ de Triv.
& Chainbers.
CLÉOMENE I du n«m , ( Hifi. de La-
eédémone. ) Deux rois fpartiates ont porté le
nom de Ctéomene ; Je premier étoit nls d'A-
naxandridc , dont il fiit rhéritier au trône ,
fiins en avoir eu hs talens & la gcnéroiîté.
Dans les prerr.iers jours de fou règne , il
tourna les armes csntre l'Argolide, qu'il fc
jîropora plutôt de dévaftcr que de conqué-
rir. Guerrier fans principe & fans généro-
iîté, il exerça les plus affreufes cruautés con-
tre les Argiens. Ces peuples , après leur dé-
faite 5 fe réfugièrent dans une épaiifc forêt ,
où ils furent bientôt invei^HI^ Cléomerx ne
vouloit leur accorder aucune capitulation ;,
& dans le temps qu'ils imploroient fa clé-
mence , il fit mettre le feu à la forêt , où
tous ces infortunés furent la proie des flam-
mes. Quoique Cléomem , fans génie & fans
vertu , fût regardé comme un imbécillc fu-
rieux qui , dans certains momens , avoit la
férocité d'une bête lauvage , il eut la gloire
d'affranchir Athènes du joug des Pififtrati-
des j mais après en avoir été le libérateur ,
il voulut en régler la defîinée : fept cents des
principales familles furent bannies. La ty-
rannie , à peine détruite , fut remplacée par
une plus humiliante. Un certain Ifagoras,
flétri par fes crimes & fès débauches , avoit
fîi plaire à Cléomcnc ; cet homme vil & fans
capacité, voulut tout régler dans le fenat &
dans les afferablées du peuple. Les dignités
furent le prix de la corruption , & les plus
vertueux citoyens furent profcrits. Les Athé-
niens , dont les uns étoicnt opprimés & les
autres craiguoient de' l'être , s'alîemblercnt
furaultuairement -^ toute la ville retentit du
bruit des armes. Un peuple ne fent jamais
mieux fa force que quand il fort de i'op-
preiïîon. Cléomene effrayé , fe réfugie dans la
citadelle , où les cris des partifans d'ifàgpras
f{u'on égorge , lui font craindre une môme
'^deflinée. Les Athéniens , moins cruels que
lu* , confentent à lui faciliter une retraite.
Dès qu'il fe vit en fureté , il arma pour
fe venger de ceux qui l'avoient réduit à
trembler. Il entre dansl'Attique qu'il ravage ,
après avoir égorgé tous les habitans qui
tombent entre fes mains. Athènes du haut
de {es remparts apperçoit les flammes qui
4éyoreut ïes moiHbi^s y les habitans lueiia- \
CLE
ces de vivre efcîaves , prennent les armes ,
réfclus de mourir libres. Les àe\\^ armées
étoient en préfence , lorfque les alliés de La-
cédémOne le reprochèrent de ver(er un fang"
innocent pour affcuvir les vengeances d'un
forcené. Ils fe retirèrent fans combattre ,
& Démocrate , collègue de Cléomene , fiii-
vit leur e?<emplc. Cette défection engagea
les éphores à porter une loi qui défcndoit
aux deux rois de Sparte de fe trouver en-
fembîe dans la même armée , }>our éviter
les haines qui naillent du partage du pou-
voir. Cléomene abandonné de fes alliés &
de fon collègue , étoit trop borné & trop pré-
fomptueux pour prévoir le danger : il com-
battit & fut vaiîîcu. Sa défaite , qui devoit
l'hum.ilier , ne fit qu'aigrir fes fureurs j H
fiif:ita des ennemis aux Athéniens dans fou-
tes les contrées de la Grèce : & prodigue
dans fes largeifes , il fit parler la prêtreffe
de Delphes , qui prédit à toutes les villes
une opprefîlon afîlirée , fi elles ne mettoient
.des bornes à la puiirance d'Athènes. Mais
une fàine politique triompha des menaces
de la fùperflition , Se les Grecs pour la
première fois crurent être plus éclairés fur
leurs propres intérêts , qu'une prêtrelle fourbe
& vénale.
Ariftagore , gom-Tsmeur de- Milet , mé-
content de la cour de Perfc , fè tranfporta
à Sparte , pour y repréfenter qu'il étoit dés-
honorant pour un peuple auffi belliqueux
de laiffer l'Ionie fous la domination de Da-
rius, & il découvrit les moyens de l'arra-
cher à fès anciens maîtres. Il eut de fré-
quens entretiens avec Cléomene qui , étonne
de la difitance de Sparte à Suze , rejeta fès
propofitions. Il crut que fes préfens lèroient
plus puiffans^ue (es raifons , Si il lui offrit
jufqu'à cinquante talens pour l'engager à
tenter cette conquête. Gorgo , fille de Cléo-
mene ^ étonnée d'une offre fi éblouilfante ^
s'écria : « Mon père , renvoyez prompte-
raent cet étranger , c'eft un ufiirpatcur qui
vous féduira. -n Ariflagore rebuté à Sparte ,
fut favorablement écouté des Athéniens.
Cette conjuration étouffée dans fà naiffance,
fournit un prétexte à Darius de tourner fès,
armes contre la Grèce. Leshabitaiis d'Egine
étoient les plus expofés à ies vengeances ^
ils crurent devoir les prévenirpar une promptes
ibijimiffion : Clément fe uanfporta. daj^
C L Ë
leur île pour les punir d'avoir donné un
exemple qui pourroit entraîner les autres
vUles menacées. Crius , un des principaux
de ces iniiilaires , eut l'audace de lui dire
que , s'il ofoit maltraiter le dernier des ci-
toyens ^ il le feroit repentir de fa témé-
rité. Cléonune fe retira en menaçant Crius ,
dont la hardieffe étoit excitée par Démarate,
gutre roi de Lacédémone , qui traverfoit
fècrétement les defTeins de fon collègue.
Cléomene inftruit de ^on infidélité , le cita
devant k peuple pour fe juftifier. Outre le
crime de trahifon , il lui imputoit encore
d'être le fruit d'un adultère , & que fa naif-
fance prématurée avoit donné occafion à
ion père de dire qu'il n'étoit pas fon fils. La
pythoniife fut confultée , &: fa réponfe fut
conforme aux defirs de Cléomene , qui l'a-
voit féduite par la magnificence de fes pré-
fens. Démarate fut dégradé , & fa couromie
fut mife fijrla têtede Léotichide. Mais quel-
que temps après , là fourberie avec la Pytho-
Diife fut découverte ^ il fut regardé comme
un profanateur qui avoit abufé de la reli-
gion pour corrompre fès miniftres. Le peu-
ple demandoit hautement £à mort pour ven-
ger les dieux outragés ^ & ce fut pour fe
ibullraire à fès fureurs qu'il fe retira chez les
TucHaliens , dont il fut exciter la compaf-
fîon. Ces peuples féduits fe réunirent aux
Arcadienj , pour le rétablir fur le trône de
{ks ancêtres. Les Spartiates , occupés dans
une guerre importante , craignirent de fe
faire de nouveaux ennemis. Ils confentirent
à le faire rentrer dans fes prérogatives, mais
il n'en jouit pas long-temps ^ ii tomba dans
une démence furieufc qui obligea de ren-
fermer : un jour qu'il étoit reflé avec unfeul
de fès gardes , il lui arracha fon épée qu'il
fè paifa à travers du corps , l'an 492 avant
Jefus-Chrift. {T-N.)
Cléomene II , {Hifi. de^ Lacédémone) fils
de Léodina , fîit fon fucceifeur au trône de
Sparte. Son père , dévoré d'avarice , lui
avoit fait époufer Agiatis , îiprè^ la mort d'A-
^s fon premier mari. Cette union formée
par l'intérêt parut néceifaire à fa politique ^
car outre que la jeune veuve étoit la plus
opulente de la Laconie, eWt étoit la feule
qui pût calmer les haines des factions qui
,déchiroient l'état. L'exemple d un père avare
i^ *oiuj3tueux a'avoit ^oiht corrompu l«i
CLE 255
trempe du cœur de fou fils. Cléomene fut
fortifié dans {qs heureux penchans par fa vcr-
tueufe époufe \ le récit qu'elle lui faifeit da
défiutérefpjmeut d'Agis , le remplit d'admi-
ration pour ce roi citoyen. Dès ce moment ,
il réfoîut de faire revivre l'ancienne difei-
pline de Lycurguc & d'exécuter ce que l'au-
tre avoit maîheureuicment eifayé. Ceux,
qu'il choifit pour être les dépofitaireî de fou
fecret en furent les cenfeurs ;, il craignit d'ê-
tre trahi par des amis infidèles , & dès ce
moment , il réfolut de ne prendre plus d©
confèil que de lui-mêm.e : il n'avoit encore
rien exécuté de grand , & il ne pouvoit inf-
pirer cette confiance néceffaire aux arîifàns
des grandes révolutions. La guerre qu'Ara-
tus porta dans l'Arcadie , lui fournit uue-
occafion de développer fcs talens pour la
guerre. If fe mit à la tête de l'année qui ré-
prima l'invafion des Achéens d^ns l'Arca-
die. Ce jeiuîc prince , grand capitaine far.^
le fècours de rcxpcrieace , triompha tle l'ha-
bileté d'Aratus , dont la vie n'avoit été juf^
qu'alors qu'un enchaînement de viétoires,.
Cléomene fut aiTêtcdans le cours de fes prol-
périîés par les intrigues d'une faclion qui
aima mieux foufcrii'e aux conditions d'une
paix déshonorante , que de fùppcrter le
poids d'une guerre glorieufe. Ce fut pour fe
fortifier contre cette faélion turbulente , qu'il
rappella Archidamas , frère d'Agis , pour la
faire afieoir fur le trône avec lui : mais ceux
qui avoient trempé leurs mains dans le fàna^
d'Agis , craignoient les jufîes vengeances dct
fon frère, &;ccfuîpour les prévenir qu'ils ic
firent allkfiîner.
Cléomene touché de la deflinée de fbii
ami , n'en fut que plus ardent à pourfuivre
iki defièins. Les âmes vénales furent gagnées
par fès préfèns , & les gens de bien , qui
ferment toujours le plus petit nombre , lui
promiirent leur afiiflance. Sa mère Crateiilée
épuifa fès immenfès trélbrs pour lui acheter
Aqs partifàns. Les éphores dont l'avarice fut
flitistaite , confièrent à lui fènl le foin de. ■
continuer la guerre. Quoique tous l^s jours
de fon commandement fufTent marqués par
de brillnns fùccès , il excita moins l'admira-
tion que \ts fcupçons d'un peuple prompt
à s'alarmer fur iou indépendance. 1 audis.
qu'il triomphoit au dehors , fès plus dar.-
gereux einiemis ^ reuièiinés diuis Sparte , la
154. CLE
peignoient comme un ambitieux trop faml-
liarifé avec le commandement, pour iè con-
tenir dans les bornes de fes devoirs. Ces
bruits calomnieux parvinrent jufqu'à lui &
ce fut pour les dilTiper qu'il revint à Sparte,
où étudiant le caraftere de ceux qui étoient
le plus acharnés à lui nuire , il eut la politi-
que de les emmener avec lui à l'armée , pour
les avoit fous fes ordres : mais ces hommes,
nourris dans les fattions , furent aufll mau-
vais foldats qu'ils étoient fjtjets indociles ^
ils ne purent fupporter les fatigues du camp ,
& on fut obligé de les licencier. Des qu'il
fiit débarraffé de ce fardeau inutile , il n'eut
dans fon armée ni rebelles , ni murmura-
teurs. Les ennemis furent battus & difper-
fés ^ mais quand fa patrie n'eut plus rien à
craindre , il eut tout à redouter .pour lui.
Les éphores & leurs complices éblouis de
fa gloire , en ternirent l'éclat par des impu-
tations calomnieufes ^ il crut devoir les en
punir : il marché vers Sparte , & fes mou-
vemens font fi fecrets & fi bien concertés ,
qu'il y eft entré avant qu'on foupçonne qu'il
foit en marche. Les éphores , artifans de
tous les troubles , furent les viftimes fur qui
tombèrent fes premiers coups ; quatre fu-
rent égorgés , au milieu de la débauche de
la table qu'il fe propofoit de profcrire ^ dix
de leurs convives furent enveloppés dans
leur ruine. Agéfilas qui étoit le plus coupa-
ble, fauva fa vie en eontrefaifant le moft.
Cette fcene langlante lui parut néceliaire
pour n'avoir pas la même deftinée qu'Agis
qui avoit été la viâime de fa modération
ik de fa clémence. Mais le fang de l'inno-
cent ne coula point avec celui du coupable.
Les chaires des éphores furent enlevées du-
forum, & leur pouvoir" fut aboli. Cet aâ:c
du pouvoir arbitraire étoit un attentat con-
tre la fureté du citoyen. Cléomene fit afi'em-
hler le peuple pour lui faire entendre fa jui-
tification ^ il s'appuya fiir la nécefîlté qui
eft la première des loix , & fur rexem^ple
de Licurgue qui dans les mêmes circonflan-
ces en avoit donné lexemple. Son éloquence
ébranla les elprits , & il acheva de les fub-
juguer , en déclarant qu'il n'avoit d'autre
but que de délivrer Sparte des perturba-
teurs qui s'oppofoient à l'abolition des det-
tes & au partage des terres. Ces motifs fu-
rent iuftifiés par le facrifice qu'il fit de tous
C LE
ks biens. Son beau- père Mégefton & tous
fès amis fuivireut cet exemple de modé-
ration. L'ancienne difcipline fut rétablie
dans toute fa vigueur. Perfonne ne fut dif-
penfé de fe trouver aux repas publics ,
& la milice fpartiate tombée dans Je relâ-
chement redevint aufiî redoutable aux en-
nemis que dans le temps de fa première
fpiendeur. Les Achéens humiliés par des
défaites multipliées , fe dépouillèrent de
leur fierté infultante , & s'abaifTerent à de-
mander la paix à Cléomene. Il ne leur im-
pofa d'autre condition que d'être déclaré le
chef de leur ligue. Ces peuples charmés de fà
modération, furent flattés de. le voir mar-
cher à leur tête.
Aratus dépouillé d'un titre qu'il avoit porté
avec gloire , ne put fouffrir d'être fupplanté
par ce jeune rival. Il intéreflè les Macé-
doniens dans Ça. caufe , & leur ouvre les
barrières de la Grèce. Une guerre nouvelle
fe rallume : Clémene en foutint tout le poids
avec des forces dont l'inégalité ne iërvit qu'à
mieux développer la fupériorité de fès talens.
Ses premiers fuccès en annonçoient de plus
éclatans, lorfqu'il fut trahi par un de fes
principaux officiers , que l'or d'Antigone ,
roi de Macédoine , avoit corrompu. Six
mille Spartiates périrent près de Sillafie, dans
des embûches où le traître Damotelès \t%
avoit conduits. Cléomene qui n'étoit qu'à
plaindre , rentra dans Sparte qui fut alTez
ingrate pour lui reprocher fon malheur. Il
ne put le réfondre à fbuffrir les outrages
d'un peuple dont il étoit le bienfaiteur \ il fe
retira en Egypte, auprès de Ptolémée Ever-
gete , dont l'amitié lui- faifoit efpérer un dé-
dommagement de {es difgraces. La mort
inopinée de ce monarque l'expofa à la çen-
liire d'une jeune cour plongée dans le luxe
& la mollelfe. Cléomene qui avoit l'aufiérité
d'un fpartiate , étoit trop fier pour diflimu-
1er ; il exhala fes mépris contre les courti-
fans efféminés qui le regardoient commiC un
lion féroce qui venoit s'introduire parmi un
troupeau d'agneaux doux & dociles, il fè
vengea de leurs dédains , par les farcafmes
les plus amers. Il en fut puni par la prifon.
C'éîoit le plus grand outrage qu'on piit faire
à un i})artiate qui regardoit la vie comme
un opprobre , dès qu'il celfoit d'être libre.
l\ rompt les partes de fa prifon , ik fui\^ d©
CLE
douze fpartiates , compagnons de fon in-
fortune , il fe répand dans les rues d'Ale-
xandrie , où n'écoutant que fon défefpoir ,
il oublie qu'il eft prefque fèul au milieu d'une
multitude armée. Malgré la fureur dont il
eft enivré , il n'étend fes vengeances que fur
les auteurs de fa détention : c'étoit un fpec-
tacle d'héroïfme & d'extravagance , de voir
treize forcenés s'ériger en arbitres de la ville
la plus peuplée du monde. Cléomene devenu
plus calme , eft étonné de fe voir entsuré
de victimes qu'il vient d'immoler. Il fe tranf-
porte-dans la place publique oîi le peuple
s'étoit ralTemblé ^ il lui promet de fe mettre
à fa tête pour le rétablir dans la jouilfance
de lès privilèges. Les Egyptiens familiarifés
avec leurs chaînes , furent infenfibles à lès
promefTes. Cléomene indigné de leur infen-
iibilitc , s'écrie : peuple lâche & flétri , tu
ne mérites que d'être gouvirné par des fem-
mes. Il tire i^Qn. épée & invite {qs compa-
gnons à fuivre fon exemple , & tous en i'i-
mirant tombent expirans fiir leurs épées. La
liberté & la Iplendeur de Sparte s'éclipie-
rent avec lui ;, cette ville eut encore des iia-
bitans , mais on n'y compta plus de citoyens.
( T-N.)
CLEOPATRE , ( Hifi, des Egyptiens. )
Cléopatre , fille d'Antiochus , roi de Syrie ,
fut mariée à Ptolémée Epiphane. Cette
union ne produifit pas \<î:,% effets que; fon père
en avoit efpéré pour fon agrandiilêment \
devenue reine d'Egypte , elle en embraila
. vivement les intérêts : ce fut par les confeik
qu'Epiphane follicita les Romains de porter
la guerre, en Syrie. Après la mort de fon
mari , elle prit la tutelle de fon fils Philo-
métor, qui n'étoit âgé que de fix ans. Son
adminiftratioii prudejite garantît l'Egypte
des guerres & des révoltes \ tandis que tous
les peuples jouiiîoient du retour de la prof-
périté 5 une mort prématurée l'enleva à la
nation. ( T-s.. )
Cléopatre , C Hifloire des Egyptiens. )
fœur & femme de Piiilométor , en eut un
fils qu'elle voulut placer fur le trône. L'E-
gypte fut déchirée par deux faâions rivales.
Les uns vouloient un jeune roi , pour pou-
voir gouverner fous fon nom ^ les autres
craignoient que leur patrie ne fût frappée
. par de nouvelles calamités , fi l'on dcféroit
le fcep.tre à dss moins trop foibles poLir le
CLE 255
porter i rambafladeur rom.ain , choifi pour
arbitre , décida que Phifcon époulëreit Cléo-
patre , dont le fils feroit déclaré héritier du
royaume : le jour des noces fut un jour de
deuil. Le jeune prince fut égorgé par l'crdra
de Phifcon dans les bras de fa inere. Cléo-
patre répudiée eut encore l'humiliation de
fè voir remplacée par la fille qu'elle avoit
eue de Philométor , que le tyran avoit violée
avant de lui donner le titre d'époufo. Sou
malheur arma l'Egypte pour elle : les ftatues
de Phifcon furent renverfées , & Cléopatre
fut proclamée reine dans Alexandrie. Le
tyran dénaturé ne crut pouvoir mieux fe
venger , qu'en faifant égorger un fils qu'il
avoit eu d'elle , dont il lui envoya la tête
avec ordre de la faire fcrvir fur fa table , le
jour du feftin qu'elle préparoit pour célé-
brer fou anniverfaire : enfoite il levé une
arm.ée , & vainqueur par fes lieutenans , il
oblige Cléopatre à quitter l'Egypte , & à fe
réfugier auprès deDémétrius qui avoit épou-
fé fà fille , à qui elle promit la couronne
d'Egypte , pour î'intéreifer à fa vengeance.
Le monarque , ébloui par l'éclat de cette
promeiTe , étoit aufii detefté dans les états ,
que Phifcon l'étoit dans les fiens : il fut aliaf-
liné dans Tyr , avant d'avoir exercé Ces vcn-
:reances. Cléopatre , privée de fon appui ,
fo réfugia auprès de fa fille, montée au
trône de Syrie depuis la mort de (on m.ari :
elle y vécut obfcure & fans confidération ,
dévorée de la foif de la vengeance qu'elle ne
pouvoit aflbuvir. ( T-N. )
Cléopatre \Hift-oire des Egyptiens.^
femme de Phifcon , fut élevée fur le trône
d'Egypte , conformément au teftament de
fon époux , à conditiîion qu'elle partageroit
fon fceptre avec celui de io.'S. fils qu'elle croi-
roit le plus digne de le porter. Son penchant
la décida pour le plus jeune , qui s appelloit
Alexandre , dont le cara(ficre flexible pro-
m.ettoit qu'il lui abandonneroit la plénitude
du pouvoir. Les Egj'ptiens , ne confuitant
que le droit de la nature , lui dictèrent un
autre choix , & la forcèrent de s'afîbcier
l'ainé, qui prit le fornomi de Soter. L'oppo-
fition de leur caraftsre fut une femence de
troubles domefiiques : la mère , gouvernée
par fes miniilres , voulut envahir toute l'au-
torité: le fils, honteux de n'être qu'un fan-
tôme'courpmié , pcrfecuta les ininifiies ^gjii
»5^ CLE
Ji'oulolent faflervlr. La rivalité du pouvoir
aigrit les haines. Cléopatre , pour fe débar-
raiîèr d'uu collègue importun , lui fuppofa le
crime d'avoir voulu l'aflafliner. Des eunu-
ques tout fanglans fe préfenterent dans la
place publique , &: dirent au peuple aHcm-
b!c qu'ils a avoiciit été maltraités que pour
a\ oir défendu la mère contre un fils parri-
cide : cette impofture eut un plein fuccès.
Soter 5 devenu un objet d'exécration , ne
<téroba £a vie à la fureur du peuple que par
la fuite. Cléopatre^ inflexible dans fa haine,
lie ceffa de pourfuivre fon fils , qui , après
avoir eifuyé beaucoup de revers , redevint
affez puilTant pour la punir ^ mais il n'en fut
que plus tendre & plus fournis ^ fatigué d,u
iardeau des affaires, il iè reprocha la honte
<le tourner fes armes contre fa mère : elle
n'eut pour lui que les fèntimens d'une marâ-
tre ; &: confiante dans fa haine , elle ne put
lui pardonner d'avoir autant de modération
clans la profpérité , qu'elle avoit d'orgueil
dans les revers. Alexandre , qui profitoit des
crimes de fa mère , & qui par la dégra-
dation de fon frère , avoit été replacé fiir le
trône , crut avoir tout à redouter d'une
femme familiarifée avec les atrocités ^ il
s'impofa un exil volontaire j & tandis que
Cléopatre fe félicite de régner fans partage ,
le peuple lui impofe la loi de fe choifirun
collègue : Alexandre efl rappelle j & fur de
la faveur du peuple , il ne le borne plus à
jouir de l'ombre du pouvoir , il en veut la
réalité: fâraere acheté des afTafTîns, pour fe
débarralfer de ion collègue , qui la prévient
& la fait mourir. ( T-n. )
Cléopatre, [Hifioire des Egyptiens.)
Ptolémée Aulete , fentant fa fin appro-
cher , défigna pour lui fuccéder fon fils
Ptolémée , furnommé le jeune Denis & fa
fille ainée , connue fous le nom de Cléopa-
tre, Le fénat Romain , qui fut établi pour
tuteur , déféra cet honneur à Pompée qui ,
trop occupé de fes propres affaires , confia
l'adminiflration de l'Egypte aux foins d'Ar-
chillas & de l'eunuque Photin, miniftres qui
avoient des talens , & à qui il ne manquoit
que des mœurs. Cléopatre , qui avoit autant
d'élévation dans l'efprit que fon cœur avoit
de foiblelfe , lailTa Archilîas & Photin jouir
4'un vain titre , & s'arrogea tout le pouvoir.
Leur vanité humiliée calomnia cette prin-
CLE
celTe ; ils publièrent que , voulant jouir du
trône fans partage , elle tenoit fon frère dans
une dépendance aviliffante , le peuple prit
les armes , & Cléopatre , pour fe fouftraire
à fes fureurs, fe retira en Syrie , où elle leva
une armée. Elle fc préparoit à faire une in-
vafiondans l'Egypte, lorfquc Pompée, vain-
cu à la journée de Éharfalc , alla chercher
un afyle chez un peuple qu'elle avoit droit
de punir. L'aflaflinat de cet iJlullre romain
fut vengé par fon propre ennemi. Céfar vou-
lant encore être le pacificateur de l'Egypte ,
ordonna à Ptolémée & à Cléopatre , de licen-
cier leurs armées , & de venir difcuter leurs
droits à fon tribunal , fous prétexte que ,
repréfentant le peuple romain qu'Aulete
avoit établi tuteur de ks enfans , il pouvoit
s'ériger en arbitre , fans violer les droits de
leur indépendance. Cléopatre pleine de con-
fiance dans le pouvoir de {es charmes , fc
perfuada que fa beauté feroit plus éloquente
que les plaidoyers des orateurs. Elle fe rend
fecrétement à Alexandrie j & , à la faveur
des ténèbres , elle pénètre , fans être recon-
nue , dans l'appartement de Céfar. Elle
étoit trop tendre & trop belle , pour ne pas
intéreifer la reconnoilîhnce de fon juge.
Céfàr étoit trop galant , pour ne pas rendre
hommage à fa beauté : il fit appeller Ptolé-
mée qu'il invita à fe réconcilier avec fon
époufè : le prince , fcandalifé de la trouver
dans là maifon d'un homme qui avoit la ré-
putation d'être le mari de toutes les femmes,
en parut moins difjjofè à la reprendre ; & ,
voulant fe venger de fa décifion , il dépofe
fon diadème , & le met en pièces aux yeux
d'une multitude qu'il avoit fait affembler
pour être le témoin de fa dégradation. Le
peuple d'Alexandrie , touché de fon mal-
heur , court aux armes , & inveftit le palais
de Céfar qui, fans s'émouvoir , fe montre
aux féditieux : il prend un ton d'autorité ,
& leur parle en maître qui diéle des loix : il
fait lire le teftament d' Aulete , & en prefcrit
l'exécution. Le peuple calmé applaudit à fà
décifion , & Cléopatre eft aflbcié à fon frère
dans le gouvernement.
Cette émotion fut fuivie d'une autre plus
dangereufe. Archilîas qui craignoit d'être
puni par Cléopatre , fe met à la tête d'une
foldatefque familiarifée avec tous les crimes.
Céfar 5 afliégé dans Alexandrie, eut bcfoin
CL E
de toutes les reflburces de fbn génie pour
enfanter une armée. Les artifàns & les en-
claves furent métamorphofés en foldats. On
combattit fur terre &: fur le Nil : la fortune
ne trahit jamais Céfar ^ & toujours vain-
queur , il fe délalTa de fes fatigues dans les
bras de l'amour. Cléopatre lui donna un fils
qui porta le nom de Céfarion , & qu'Au-
gufte eut l'inhumanité de faire égorger : l'a-
mour qu'elle avoit infpiré à Céfar , étoit fi
violent , qu'il forma le deflein d'établir une
loi qui permettroit à tout citoyen romain ,
d'époufèr autant de femmes qu'il lui plairoit ,
pour avoir lui-même le privilège d'aflbcier
à fon lit fon amante. Il remonta le Nil avec
elle : & elle l'eût accompagné dans l'expé-
dition qu'il méditoit contre l'Ethiopie , fi
fon armée n'eût murmuré d'aller porter la
guerre dans ces climats brûlans.
Cléopatre^ favorifée de Céfàr , fut afîiirée
de l'impunité de tous les crimes : le jeune
Ptolémée , qu'on lui avoit aiTocié au gou-
vernement , alarma fon ambition : il fut
empoifonné par l'ordre de cette fœur bar-
bare , qui jouit paifiblement d'un trône dont
ion fratricide auroit dû l'exclure. Après que
Céfar eut été aflafilné , Cléopatre , incertaine
& flottante , favorifa fuccefiivement les deux
partis. La journée de Philippe décida du fort
de Rome & des rois fes alliés : Antoine paifa
^ans l'Afie , & Cléopatre fut citée à fon tri-
bunal 5 pour fe juftifier de ce que les gou-
verneurs de la Phénicie qui étoit foumife à
l'Egypte , avoient fourni du fecours aux en-
nemis du Triumvirat. Duellius , qui fut en-
voyé en Egypte , fut fi ébloui de l'éclat de
fa beauté , qu'il lui prédit qu'elle auroit bien-
tôt fon juge à {.ts genoux : elle partit pour
la Cilicie : fon vaifleau , chargé de richefl!es ,
étoit auiîî magnifique que fa fuite étoit vo-
luptueufè : la poupe étoit d'or , les rames
d'argent , & les voiles de pourpre : le fon
des flûtes , des guitares , & de tous les inf^
trumens propres à infpirer de douces lan-
gueurs , frappoit les oreilles , & réveilloit
les {èns. La reine étoit parée de tous les at-
tributs de Vénus. Des enfans repréfcntoient
de petits cupidons , & de jeunes filles les
grâces. L'odeur des difFérens parfums qu'on
brûloit , fe répandit fur tout le rivage : le
bruit ferépandoit que Vénus arrivoit à Tarfe,
pour avoir une entrevue avec Bacchus \ elle
Tomt VIIL
CLE 257
avoît vingt-cinq ans j l'expérience qu'elle
avoit déjà faite du pouvoir de fes charmas
lui fit eipérer un triomphe nouveau.
Antoine , âgé de quarante ans , avoit en-
core tout le feu des partions. Il l'envoya com-
plimenter , & la fit inviter à fouper j mais
elle le fit prier de fe rendre lui-même au ri-
vage , où elle avoit fait préparer , fous une
magnifique tente , un feîlin où elle étala ua
luxe & une élégance dont les Romains , ac-
coutumées à la délicateffe , n'avoient pas
même une idée. Antoine n'oublia rien pour
la fiirpaflèr le lendemain ^ mais il s'avoua
vaincu : ils devinrent bientôt ainans : leurs
cœurs également dominés par l'amour &
l'ambition , entretinrent leurs feux par le
rafinement de toutes les voluptés : aux pîai-
firs de la table fuccédoient ceux de l'amour,
Antoine lui ayant contefté la pofiibilité de
dépenfer un million dans un feul feftin , elle
ne fit fervir que des mets ordinaires ^ & fur
la fin du repas , on lui préfenta un vafe rem-
pli de vinaigre , dans lequel elle fit difibu-
dre une perle eftimée un million de notre
monnoie , & elle l'avala. Chaque jour elle
donne un nouvel exemple de fes profufions :
fi elle invite fon amant à un feftin , elle lui
fait prcfent des vafes & coupes d'or qui bril-
lent fur la table : les applaudifTemens qu'elle
reçoit la jettent dans de nouvelles prodiga-
lités 3 & elle eft aufli follement magnifique
envers tous les officiers Romains , qu'envers
fon amant.
Après quelques jours pafles dans une ivrefie
continuelle de plaifirs , ils quittent Tarfe ,
pour aller goûter les délices d'Alexandrie :
tandis qu'ils s'aiToupilTent dans des voluptés
voifincs de la débauche , le fénat ordonne
à Antoine de marcher contre les Parthes :
il part , & fbn amante trouve bientôt le fe-
cret d'adoucir les maux de l'abfence. Sans
frein dans fes penchans , elle s'abandonne
aux hommes les plus vils *, ils lui paroifiènt
alfez nobles , dès qu'ils font aiîèz robufles.
Plufieurs achetèrent , au prix de leur vie , le
plaifîr d'une nuit j & cette reine lafcive , par
un refte de honte , fe débarralFoit , par un
alFaffinat , des complices de fon incontinence.
Antoine triomphant , vint chercher le prix
de ks conquêtes dans l'Egypte. Le roi
d'Arménie , chargé de chaînes., fut traîné
dans les rues d'Alexandrie ^ & Cléopatre eut
Kk
15» C LE
4a gloire de voir à fès pies un monarque ,
dont le vainqueur étoit fon captif. Enivrée
de'ia profpérité , elle alpire à4'cmpire du
monde : fon amant lui en fait la promeffe ,
iôc il ordonne la cérémonie de Ton couron-
nement. Au jour indiqué , il monte fur un
trône , le front ceint d'un diadème , & por-
tant dans fa main un fceptr'e d'or. Cléopatre
aiîife à fa droite , eft proclamée reine d'E-
gypte , de Chypre , de Lybie , & de la Célé-
Syrie,conjointem.ent avec ion fils Céfarion.
Les trônes du refte du monde furent parta-
gés entre \qs fils qu'elle avoit eus d'Antoine ,
& ils prirent le titre de roi des rois. Ge fpec-
tacle fcandaleux fouleva tous les Romains :
Oâiave fait des préparatifs pour venger l'af-
front fait au nom Romain. Antoine lui op-
pofe fes forces nombreufes. Il fe rend à
Ephefè , où il fut fiiivi de Cléopatre : les
vieux foldats furent indignés de voir leur chef
dominé par une femme qui étaloit dans le
camp le luxe d'une cour voluptueufe. Ce fut
à Samos que Cléopatre jouit de la plénitude
de fa gloire : tous les rois qui s'y trouvèrent ,
ne parurent que fes ilijets. Dès que la faifbn
permit de commencer les hoftilités , on en
vint aux mains près du rivage d'A6lium. A
peine l'aftion étoit commencée , que Cléo-
patre , effrayée du bruit des armes , prit la
fuite. Antoine , infidèle à la gloire , ne con*
fuite que les intérêts de fon amour : il fuit
l'exemple de fon amante , & abandonne la
viôoire à fon rival. Cléopatre rafTembla dans
Alexandrie les débris de fa grandeur : deve-
nue inquiète & foupçonneufe , elle immole ,
à une politique timide, tous ceux qui pou-
voient allumer des féditions. Antoine trahi
par fon armée de terre , vient rejoindre fôn
amaiite qu'il trouve entourée de viâimes ^
il lui devint indifférent dès qu'il fut malheu-
reux '-, & cette reine , dont l'ambition tenoit
toutes fès autres pafîions afTervies , forma le
deifein de lui fubflituer fon vainqueur : elle
envoie fecrétement à Oélaveune couronne &
' un fceptre d'or , pour lui faire connoître que
tous les droits de la fbuveraineté réfîdoient
en lui. Il lui promit l'impunité, pourvu qu'elle
fît mourir Antoine : tandis que Cléopatre
négocie fa paix avec Od:ave , elle redouble
fes careffes à fon erédule amant , dont l'an-
niverfaire fut célébré , avec une magnifi-
çeuce que l'état préfènt auroit dû profcrirc.
CLE
Au milieu de toutes ces fêtes , elle contî-
nuoit f^ négociations avec Céfiir f, & bien-
tôt fon amiral avec fa flotte palTa du côté
de Céfar. Après cet éclat , elle avait tout à
craindre du reffentiment de fon époux ou-
tragé &: trahi : ce fut pour en prévenir le
jufle reffentiment qu'elle fe retira dans le
toirbeau des rois , fès ancêtres , oij elle fit
traufJ3orter fes tréfors. Le bruit de fa mort
fè répandit dans Alexandrie, & Antoine ne
pouvant fe réfbudre à lui furvivrc , le fit
donner la mort par un de fes affranchis :
tandis qu'il refpire encore , il apprend que
fon époufe efl: vivante : il ordonne à fes qC-
claves àe le tranfporter dans le tombeau où
elle s'efl réfugiée. Cléopatre qui craignoit une
trahifon , défendit d'ouvrir les portes , & fe
lèrvit de cordes pour le guinder en haut :
leur réunion fut touchante : Antoine tout
fanglant & refpirant à peine , tourne fes
yeux mourans vers elle , & paroît mourir
fans regret , puifqu'il meurt dans Ces bras ;
tandis qu'ils confondent leurs larmes , &
qu'elle nettoie fa plaie, il expire dans fes bras.
L'amibition de Céfar étoit de fe failîf de
Cléopatre vivante. Proculeus , à la faveur
d'une échelle , eut l'adreffe de s'introduire
dans le tombeau : dès qu'il l'apperçut , elle
tira fon poignard pour s'en percer le fein :
il le lui arracha , en lui difant : Princeffe ,
c'efl outrager Céfar , que de lui ravir la
gloire d'étendre flir vous fa générofité. La
première grâce qu'elle demanda fut d'enfe-
velir le corps d'Antoine j & elle s'en acquitta
avec une magnificence qui rappella fan an-
cienne fplendeur : la fièvre dont elle fut at-
taquée lui fournit un prétexte de s'abftenir
de manger , & de prendre des potions qui
pouvoient la délivrer du fardeau de la vie.
On pénétra fon deffein , & Céfar lui fit
dire qu'elle devoit vivre pour fes enfans.
Il alla lui rendre une vifite , où elle le reçut
couchée fur un lit , avec une fimplicité étu-
diée & plus féduifante que les ajuflemens
les plus recherchés. Le défordre de fes che-
veux , fes regards triftes & languiffans fèm-
bloient promettre un nouveau triomphe à
l'amour : fa voix exprimoit toutes les paf^
fions j & en décelant les mouvemens de
fon am.e , les tranfmettoit dans le cœur de
celui qui pouvoit l'entendre : fès yeux aidés
, de la magie de fa voix touchante commu-
CLE
nîquoient un feu , dont elle paroi/Toit elle-
même embrafée : dès qu'elle apperçut fon
vainqueur ; Recevez , lui dit-elle , mon hom-
mage : je fus autrefois fouveraine ^ c'eft à
vous que la viâ:oire ftc les dieux ont déféré
ce titre : tandis qu'elle parloit , Ces regards
mendioieut ceux de Céfar , qui n'ofoit les
fixer fiir elle : fon infenlibilité la rendit fù-
rieufe -^ elle fè jeta une féconde fois à fes
genoux, en lui difant : Je détefte la vie, &
ma gloire me défend de la confen'er. Cé-
iàr en la quittant lui fit les plus flatteufes
promelîès j & , quelque temps après , il
chargea le jeune Dolabella de lui annoncer
de fè tenir prête à partir avec fes enfans dans
trois jours. A cette nouvelle , elle fe repré-
fenta toute l'horreur de fa deftinéc j & fe
tranfportant dans le tombeau d'Antoine ,
elh l'apoftropha comme s'il eût été vivant.
Après qu'elle eut arrofé le tombeau de fes
larmes , elle fè fit fervir un magnifique re-
pas j enfuite elle écrivit à Céfar , pour lui de-
mander la faveur d'être enfevelie avec fbn
cher Antoine : elle fe revêtit de fes plus ri-
ches habits , comme fi elle eût dû afllfter à
une fête ^ & fc jetant fur fon lit , elle de-
manda une corbeille de fruits qu'un payfan
venoit de lui apporter. Il y avoit un afpic
caché fous les feuilles ; ellefè fit une incifion
au bras , & préfenta fa plaie à lécher à l'a-
nimal dont la morfure fit circuler le poi-
fbn dans fes veines, & lui procura une mort
prompte & fans douleur : telles furent la vie
& la mort démette reine célèbre , qui éprouva
l'ivreffe de l'amour & les tourmens de l'am-
bition , qui allia le goût des arts à celui des
voluptés , & la délicateffe à la débauche. Le
temps defirufteur de la beauté fèmbla ref-
pe(^er £es traits , & l'expérience lui prêta des
armes pour fubjugucr les cœurs les plus re-
belles. Quoique tendre Se fènfible , elle étoit
iàns frein dans fès vengeances , & prodigue
envers fès amans : elle verlbit fans remords
le fang des rivaux de fon ambition. ( T-n. )
CLÉOPHAS, {HiJI. eccléf. ) fi-ere de S.
Jolèph y & fils comme lui de Jacob , époufa
Marie , fœur de la fainte Vierge, & fè trou-
va ainfi oncle de Jefùs-Chrifl ^ il ne comprit
bien le myflere de la- croix , que lorfque Je-
fiis reffufcité lui apparut fur le chemin d'Em-
maiis où il alloit avec fon fils Siméon 5 alors
4cs yeux s'ouvrirent , Ôcil crut. Il avoit en-
C L E '259
core trois autres fils , Jofeph , Jacques le mi-
neur & Judas , autrement Thadée.
CLEPSIAMBE , f. m. {Hijf. anc. ) Hef-
chius & les lexicographes grecs nomment
ainfi quelques chanibns d'Alcman.
CLEPSIANGOS , ( Mujiq. inft, des anc. )
Athénée dit qu'Ariftoxene mettoit le cUp»
fiangos^ au nombre des inftrumens étrangers
aux Grecs, aufîi bien que le phœnix, le pec-
tis , la magade , la fambuque , le trigone , le
fcindapfè & l'ennéacorde. Je penfe que le
clepfiangos & le clepfiambe pourroient bien
être le même inflrument. {F. D. C. )
CLEPSYDRE, {Mu^q. injir. des anc.)
On trouve dans Athénée ( Libro IV Deipno-
foph. ) , qu'il y avoit un inflrument de mufi-
que à tuyaux , appelle ctepfydre , inventé
par Cléfibius, barbier de profefTion, mais
favant dans l'art de conftruire Aes inflru-
mens hydrauliques , & qui même a laiffé
un traité fur cet art. Voici la defcriptioa
qu'Athénée donne du clepfydre.
<c Cet inflrument , affez femblable par fk
figure à un autel rond , doit être mis , non
au nombre des inftrumens à cordes qu oa
pinçoit , mais au nombre des infbrumens à
tuyaux j les orifices des tuyaux étoient tour-
nés vers l'eau , en forte que quand on l'agi-
toit , le veut que cette eau produifoit , fai-
foit rendre un fon doux aux tuyaux : il y
avoit des efjjeces de balanciers qui paffoieiit
au delà de l'inftniment. »
Il paroît par cette defcription que c'étoit
une véritable orgue hydraulique. Athénée
conclut fà defcription par dire : a Voilà ^
» Oulpian! tout ce que je peux dire de l'or-
» gue hydraulique , » mais cela ne prouve
rien , car les Grecs appelloient les inflru-
mens en général or^aw , organa. ( F. D.C. )
Clepsydre , f. f. ( Phyjko-Mathém. )
efpece d'horloge à eau 9 ou vafe de verre
qui fèrt à mefiirer le temps par la chute d'une
certaine quantité d'eau. V. Horloge , &c,
Cemot vient de KKi'^rla , condo , je cache ,
& udfflf , aqua. eau.
II y a aufîi des cUpfydres de mercure. Les
Egyptiens mcfiiroient par cette machine le
cours du fbleil. Tichobrahé en a fait ufagô
de nos jours pour mefiirer le mouvement
des étoiles , &c. & Dudley dans toutes les
obfèrvations qu'il a faites à la mer.
L'ufàge des depfydres eft fort ancien j ell^
KkA
%6o CLE
■ont été inventées en Egypte fous le règne des
Ptolémées ^ on s'en fervoit fur-tout l'hiver ,
les cadrans folaires étant plus d'ufage l'été.
Elles ont deux grands défauts , l'un que l'eau
coule avec plus ou moins de facilité , félon
fjue l'air eft plus ou moins denfe ^ l'autre ,
que l'eau s'écoule plus promptement au com-
mencement qu'à la fin.
M. Amontons a propofé une depfydre qui
ii'eft fiijette , félon lui , à aucun de ces deux
inconvéniens , & qui a l'avantage de fervir
d'horloge comme les cUpfydres ordinaires ,
de fervir en mer à la découverte des lon-
gitudes , & de mefurer le mouvement des
artères : mais cette depfydre n'eft point en
ufage.
Confhuclion d'une depfydre. Il faut pour
cela divifer un vaiiTeau cylindrique en par-
ties qui puilFent fe vuider dans des divifions
de temps marqués \ les temps dans lefquels le
vaiiTeau total & chaque partie doivent fe
vuider étant donnés. Suppofons par exemple
un vaiifeau cylindrique , tel que l'eau to-
tale qu'il contient , doive fe vuider en 1 2
■heures j & qu'il faille divifer en parties dont
chacune mette une heure à fe vuider. 1°. Di-
tes : comme la partie du temps i eft au temps
total 1 2 , ainfi le même temps 1 2 eft à une 4e
proportionnelle 144. 2°. Divifez la hauteur
du vaiifeau en 144 parties égales , & lapartie
Supérieure tombera dans la dernière heure ,
les trois fuivantes dans l'avant-deniiere , les
cinq voifines dans la dixième , ùc. enfin \qs
vingt-trois d'en-bas dans la première heure.
Carpuifque les temps croilfent fuivant la
iérie des nombres naturels i , 2 , 3 , 4, 5 , &<?.
^ que les hauteurs font en raifon des quarrés
des nombres impairs , 3 5 5 ? 7 ? 9 5 «S'a. pris
dans un ordre rétrograde depuis la 12» heu-
re, les hauteurs comptées depuis la 1 2« heure
feront comme les quarrés des temps ,1,4,9,
16, 25 , àc. d'où il s'enfuit que le quarré 144
du nombre de divifions du temps , doit être
égal au nombre des parties de la hauteur du
vaiifeau qui doit fe vuider. Or la liqueur def-
cend d'un mouvement retardé , &. l'expé-
rience prouve qu'un fluide qui s'échappe d'un
Vafe cylindrique , a une vîteife qui eft à-peu-
près comme la racine quarrée de la hauteur
du fluide ;, de forte que les efpaces qu'il par-
court en temps égaux décroiifent comme les
nombres impairs. Donc > Çic>
C L E
M. Varignon a généralile ce problême
fuivant fa coutume , & a donné la méthode
de divifer ou graduer une depfydre de figure
quelconque , enforte que les parties du fluide
contenues entre les divifions, s'écoulent dans
des temps donnés. L'académie propofa les
loix du mouvement des depfydres , pour le
fiijet du prix de l'année 172 5. Il fut remporté
par M. Daniel Bcrnoulli;, & fa pièce eft im-
primée dans le recueil des pièces des prix de
l'académie. Quoiqu'elle foit fort ingénieufe ,
l'académie nous avertit , dans une eipece de
programme qui eft à la tête , qu'il lui a paru
que la queftion propofée n'avoit pas encore
été liiifiiàmment approfondie.
Une des grandes difficultés qu'on rencon-
tre dans la théorie des depfydres , c'eft de
déterminer avec exadHtude la vîteife du
fluide qui fort par le trou de la depfydre,
Lorfque le fluide eft en mouvement , &
qu'il eft encore à une certaine hauteur, cette
vîteiîè eft à-peu-près égale à celle que ce
même fluide auroit acquife en tombant par
fa pefanteur d'une hauteur égale à celle du
fluide. Mais lorfque le fluide commence à
fè mouvoir , ou lorfqu'il eft fort peu élevé
au deifus du trou , cette loi n'a plus lieu, &
devient extrêmement fautive.
D'ailleurs , il ne fuffit pas , comme on le
pourroit penièr d'abord , de connoître à
chaque inftant la vîteife du fluide qui s'é-
coule , pour favoir le temps dans lequel doit
fe vuider la depfydre : car, fans parler ici de
l'adhérence des particules du fluide , & du
frottement contre les parois du vafe , les par-
ticules du fluide ne fortent point du vafe fui-
vant des direftions parallèles. M. Newton a
obfërvé que ces particules ont des dire£tions
convergentes , & que la veine du fluide qui
ibrt va en diminuant de groifeur juiqu'à une
certaine diitance de l'ouverture j diftance qui
eft d'autant plus grande , que l'ouverture
elle-même eil plus grande. De-là , il s'eniùit
que pour trouver la quantité de fluide qui
ibrt à chaque inftant , tl ne faut pas prendre
le produit de la grandeur de l'ouverture par
la vîteife du fluide , mais le produit eft la vî •
teife du fluide , dans l'endroit où la vehie eit
le plus contrariée , par la largeur de la veine
en cet endroit. J^oyei (hydrodynamique de.
M. Daniel Bernoulli , feci, 3 , & tardcU
HïDRODYNAMKiUE*
CLE
Clepfydre fê dit auiïi d'un fablier. Voyei
Sablier. (O)
CLERAC oz/CLAIRAC , (Géog. mod.)
ville de France en Agenois , fur ÏQlot.Long.
l8 , 8 ; lat. 44 , 28.
CLÉRAGRE, f. f. (Fauconn.) efpecede
ÇGutte qui vient aux ailes des oifeaux de
proie.
CLERC, (Jurifp.) on comprend fous ce
nom tous ceux qui , par état , font confacrés
au fervice divin , depuis le fimple tonfuré
jufqu'aux prélats du premier ordre.
Ce terme vient dugrec)cÂni>of , qui fignifie
fort , partage , héritage. Dans l'ancicH tefta-
ment , la tribu de Lévi eft appeUée itA«p''<î
c'eft-à-dire le partage ou l'héritage du fei-
gneur. Du grec , on en a fait en latin derus ;
& l'on a donné ce nom au clergé , parce que
le partage des eccléfiaftiques eft de fervir
Dieu. De clerus , on a fait ckricus , clerc.
La diftinftion des clercs d'avec le refte
des fidèles fè trouve établie dès le commen-
cement de l'églife , fu ivant ces paroles de S.
Pierre , neque dominantes in cleris. Pétri j ,
>• 3-
Les clercs ou eccléfiaftiques , confidérés
tous enfemble , forment un corps qu'on ap-
pelle le clergé , & l'état des clercs s'appelle
la cléricature.
Il y a parmi eux differens degrés qui les
diftinguent.
Le premier degré de*la cléricature eft l'é-
tat de fimple tonfuré.
Les degrés fuivans font les quatre ordres
mineurs , de portiers , Ieâ:eurs , exorciftes
& acolytes.
Au deifus des ordres mineurs , font les
ordres facrés ou majeurs , de fous-diaconat,
diaconat & prêtrifo.
L'épifcopat & \<à^ autres dignités eccléfiaf-
tiques font encore des degrés au defliis de la
prêtrife.
Ces differens degrés parmi les clercs ,
compofent ce que l'on appelle la hiérarchie
eccléfiajiique.
Autrefois les moines & religieux n'étoient
point clercs ; ils ne furent appelles à la cléri-
cature qu'en 383 , par S. Sirice , pape.
Ceux qui fe préfentent pour recevoir la
tonfuré , ou quelque ordre majeur ou mineur ,
doivent recevoir cet état de leur propre évê-
^ue , à moins qu'ils n'aient de lui uu détnif-
CLE i6i
foire , c'eft-à-dire des lettres de pcrmiftion
pour être tonfiirés ou ordonnés par un autre
évéque. Can. Lugdunenf. causa c)^ Ç^^Ji- 2. ;
& conc. Trid. fejf. 23 , dereform. cap. 8,
Les clercs ont certaines fondions dans
l'églifo qui leur font propres : celles desévê-
ques , archevêques , prêtres & diacres , ne
peuvent être remplies par des laïques , même
à défaut de clercs.
Ils jouilfent , en qualité de clercs , déplu -
fieurs exemptions êc immunités , qu'ils tien-
nent de la piété de nos rois.
Il leur eft défendu de rien faire qui foit
contraire à la pureté & à la dignité de leur
état ; & par conféquent de faire aucun trafic
ou commerce , d'exercer aucun art mécha-
nique , ni de fe mêler d'aucunes affaires
temporelles. Can. pervenit credo Cy-
prianus , guœji. 3.
Leurs habits doivent être fimples & mo-
deftes , & ils ne peuvent en avoir de couleurs
hautes , telles que le rouge. Can. ornais
nullus.... epifcopi , quœft. 4.
La chaife à cor Ôc à cri , ou avec armes
oftenfives , leur eft défendue. Can.epifcoputn
«... 6' can. omnibus extra de clerico venatore.
Ceux qui contreviennent à ces défenfes de-
viennent irréguliers.
Les clercs ont le privilège de ne pouvoir
être traduits en défendant que pardevant le
juge d'églife , dans les matières perfonnelles.
En matière criminelle , ils font d'abord
jugés par le juge d'églife pour le délit com-
mun ; mais ils ne peuvent encore être jugés
par le juge royal pour le cas privilégié. Voy.
c/-^/»r^^CLERGÉ, Ecclésiastiques, Dia-
cre , Sous-diacre , Prêtre , Mineurs,
Ordre^veque. {A)
Clei^, ( Jurifprud. ) eft auffi un titre
commun à plufieurs offices , commiftîons &
fondtions qui ont rapport à l'adminiftratioii
de la juftice & police. Nous allons expliquer
ce qui concerne ces différentes fortes de c/er«
dans la fubdivifion fuivante , par ordre al-
phabétique.
C'eft un abus que l'on a fait du terme
clerc , qui fignifie eccléfiajiique. Comme dans
les fiecles d'ignorance il n'y avoit prefquc
que les clercs ou eccléfiaftiques qui euffent
confervé la connoiffance des lettres, onétoit
obligé d'avoir recours à eux pour remplir
toutes les fonctions dans lefquelles il falloit
loi CLE
favoir lire & écrire , ou être inftruit des loix \
de forte qu'alors clerc ou homme favant , &
lettré étoient des termes fynonymes ainfi
qu'il paroît par cette belle répoufe de Char-
les V , roi de France , à quelqu'un qui mur-
muroit de l'honneur qu'il portoit aux gens
de lettres , appelles alors clercs, « Les clercs
à fapience l'on ne peut trop honorer , & tant
que fapience ièra honorée en ce royaume ,
il continuera à profpérité ^ mais quand dé-
boutée y fera , il déchéera. w II eft arrivé de
cette acception du mot clerc , que l'on a
donné le titre de clerc à des laïques , parce
qu'ils étoient gradués ou lettres , ou qu'ils
rempliiToient quelque fonâion qui étoit au-
paravant remplie par des eccléfiaftiques ^ &
cette dénomination s'eft conlbrvée jufqu'à
préfènt.
Clercs des aides : cette qualité étoit quel-
quefois donnée au receveur des aides , quel-
quefois au greffier de ceux qui rendoient la
juftice fur le fait des aides. Il en eft parlé
dans les lettres de Charles VI , du dernier
février 1388 , recueil des ordonnances de la
troijîeme race ^ tome VU ^ page 228. Voyez
Clercs-grejfiers.
Clercs des arrêts ; c'eft le nom qu'on don-
noit anciennement au greffier du parlement.
Il eft ainfi appelle dans un éditpour le lende-
main de l'Epiphanie de l'an 1277. Il en eft
fait mention dans Fleta, lié. II , cap. xij ,^.
3 1 , qui le nomme clericus placitorum auLv.
V. le glojp. de Ducange , au mot clericus.
Clercs-auditeurs , voyez ci-après au mot
Comptes, a t article de la Chambre des
Comptes.
Clerc d'avocat, eft celui qui travaille habi-
tuellement chez un avocat à copio^fes con-
lîiltations , &: autres écritures du^iniftere
d'avocat. Les clercs d'avocats affiftent ordi-
nairement aux audiences de^iTiere le barreau,
pour donner aux avocats les facs des caufes
que l'on appelle pour être plaidées. Ce font
eux auffi ordinairement qui portent & qui
vont retirer les facs que les avocats fe don-
nent en communication. Ils font quelquefois
des extraits des pièces pour fbulagerles avo-
cats \f mais ceux-ci doivent vérifier l'extrait ,
pour voir s'il eft fidèle & exaâ:. Dans les
arbitrages 8c commiffions du confeil dont
les avocats font chargés , on configne les
vacations entre les mains du clerc de t avocat
CLE
plus ancien , & le clerc du plus jeune avocat
dépofe la fentence arbitrale chez un notaire.
Lorfqu'on veut compiilfcr des pièces qui
font chez un avocat , le ccmpulfoire fe fait
entre \qs mains de fcn clerc , lequel , en cette
partie , fait fonftion de perfonne publique.
Il eft défendu , par les réglemens , mxïiclercs
d'avocats de porter des épées , ni des cannes
& bâtons. Il y a très-loug-temps que les
avocats au parlement de Paris font dans
l'ufage d'avoir des clercs , puifque l'ordon-
nance , faite par la cour en 1344, défend
aux clercs des avocats de faire leurs écritures
en la chambre du parlement. Cette ordon-
nance eft rapportée dans le recueil des or-
donnances de la trcijîeme race , tome II, page
225.
Clercs des baillis , fé né chaux & prévôts:
on appelloit ainfi les fècretaires ou greffiers
des juges. Des lettres de Charles V , du $
mai 1357 , font mention du clerc du bailli
de Coutances. D'autres lettres du roi Jean ,
du mois de décembre 1363 , parlent du clerc
du prévôt de Langres , & règlent ce qu'il
pourra prendre pour chaque mémorial ,
écriture & foel ^ ce qui fait voir qu'il faifoit
la fonâ:ion de greffier & de fcelleur. Une
ordonnance du roi Jean , d'environ l'an
I3(5i, défend, art. 15 , aux baillis & féné-
chaux , & à leurs clercs , de prendre de per-
fonne dons , penfions & robes , fi ce n'étoit
par aventure des vins & viandes qui fe peu-
vent confommer en peu de jours : il eft aifé
de fontir l'abus que l'on pouvoit faire de
cette exception. V. le recueil des ordonnances
de latroijieme race , tome IV.pag. 412.
Clercs de la chambre des Comptes. V. ci-après
Comptes , à l'article de la Chambre des
Comptes.
Clerc & changeur du tréfor durai: c'étoit
le receveur du change du roi. Il eft ainfî
nommé dans une ordonnance du roi Jean ,
du 16 Septembre 13 51 •' clerico & cambiatori
thefauri noftri Parifius. Voye[ CHANGE &
Changeur.
Clercs des commijffaires du roi ou du parle-
ment : c'étoient les greffiers de la commifîîon.
L'ordonnance de Philippe de Valois , du 1 1
mars 1344, concernant la difcipline du par-
lement , porte que les gens du parlement
qui feront envoyés en commiflion , ne pour»
ront prendre que pour fix chevaux au plus;
CLE
les gens êes enquêtes ou requêtes du palais ,
pour quatre chevaux j que dans ce nombre
feront comptés les chevaux que chevauche-
ront leurs c/ercs qui travailleront à l'audition.
Un peu plus loin , il eft parlé des cas où ,
pour caufe du fait de la compiflîon , il
conviendroit mener notaire ou clerc. Il eft
dit , article 3 , que chaque clerc des commif-
faires ne pourra prendre des parties que cinq
fous feulement , chaque jour qu'il travaillera,
tournois ou parifis , {èlon le pays 011 il fera ,
tant pour parchemin , écriture , copie, grof
foiement d'enquêtes de procès , & de toutes
autres écritures qu'il fera.
Clercs des commiffaires au châteht & autres
commijfaires de police , font des elpeces de
commis ou aides qui écrivent fous la diâ:ée
du commiifaire , & font des expéditions des
aétes qui font de fon miniftere.
Clerc de la commune de Rouen : c'étoit le
greffier de l'hôtel-de-ville de Rouen. Voye[
f ordonnance de Charles V .^ du <) novembre
1373 j ûr/^. 5 6» 6 , & ci- après , Clercs des
villes de commune.
Clercs du confeil , fîgnifîoit anciennement
les gens du confeil du roi, quelquefois lesfe-
cretaires ou greffiers du confeil. Il en eft parlé
dans une ordonnance de l'an 1285 , portant
règlement pour l'hôtel du roi & de la reine.
Voyei^ le glojf de Ducange , au mot de ricus.
Clercs du confeil des officiers & ouvriers de
la monnaie , étoient les officiers de la cham-
bre des monnoies de Paris. Il fut pourvu à
leur fàlaire par des lettres de Charles V , du
6 juin 13 64. y'oye'^ le recueil des ordonnances
de la troifieme race 5 tome /F", p(ig^ 441*
Clerc dx confeiller ou préfident : c'étoit le
fècretaire du préfident ou confeiller, ou bien
le greffier de la commiffion dont le magif-
trat étoit chargé. Il eft parlé des clercs des
préftdens 6» confeillers au parlement , dans
une ordonnance de Charles V , alors régent
du royaume , du mois de mars 1366 , arti-
cle 11. f^oyeiauifi ce qui eft dit au mot
Clercs des commijfaires du roi ou du parlement.
Dans l'ufage préfènt , on qualifie de fecre-
taires ceux qui font la fonftion de clercs au-
près des magiftrats , & ils font commis pour
greffiers en quelques occafîons ^ on les qua-
lifie de greffiers de la commiffion.
Clerc du confulat : c'étoit le greffier d'un
confulat ou juftice municipale d'une ville.
CLE 16^
C'eft en ce fêns que les clercs du confulat de
la ville de Graffe fè trouvent nommés au
nombre des officiers de ce confulat dans
des lettres du roi Jean , du mois de mars
IIS$. Recueil des ordonnances de la troi-
fierne' race , tome IV , page 340.
Clercs des élus , étoient les greffiers de
ceux qui étoient élus anciennement poiur
régler la perception des aides & finances.
Lg 6 avril 1374, Charles V nomma deux
réformateurs pour punir ces clercs & autres
officiers des mal^'erfations qu'ils avoient
commifès dans leurs fondions.
Clercs d'embas , voyez ci- après au mot
Comptes, à l'article de la Chambre des
Comptes.
Clerc-examinateur : on dônnoit ancienne-
ment ce titre aux examinateurs du châtelet
de Paris , auxquels ont fuccédé les commif-
faires. Les ftatuts de la confrérie des mar-
chands drapiers de Paris furent publiés en
préfènce d'un clerc-examinateur , le 3 mai
1371 , comme on le voit dans le recueil des
ordonnances de la troijieme race , tome IV 9
page 536.
Clercs-experts : on donnoit anciennement
ce titre de clercs aux experts , pour dire qu'ils
étoient favans & verfés dans la matière pour
laquelle ils étoient commis. On en voit un
exemple dans la déclaration du mois d'odo-
bre 1577 , qui contient un règlement pour
les fonèiions de clercs-jurés & prud'hommes
de la ville & prévôté de Paris.
Clerc des foires , clericus nundinarum ; ce-
toit le notaire ou greffier des foires. Il en eft
parlé dans Fleta , lib. II , cap. Ixiv , §. 24.
Clercs de la chambre des comptes { grands ) ,
voyez ci-après au mot COMPTES , à t article
delà Chambre des Comptes.
Clercs-greffiers ou fecretaires : ils étoient
anciennement nommés clercs , & leurs fonc-
tions étoient différentes de celles des notai-
res , même de ceux qui étoient attachés au
fèrvice des jurifdiftions. En effet ceux-ci
tenoient d'abord les regiftrcs des cours &
autres jurildiâions , écoutoient les témoins ,
& délivroient copie des dépofitions & en-
quêtes ^ au lieu que les clercs faifoient plus
particulièrement la fonèlion de fecretaires
ou greffiers du juge. Il en eft fait mention
dans une ordonnance de S. Louis , du mois
de février 1254, faite pour le Languedoc,
2(?4 CLE
où il eft dit que les clercs des fénéchaux
ou leurs écrivains, ne pourront prendre plus
de fix deniers tournois pour chaque lettre
pateiue , & quatre deniers pour les lettres
clofes. On voit par-là que ces clercs avoient
d'autres écrivains qui leur étoient fubordon-
lïcs. Il y avoit au châtelet des clercs en titre
d'office pour le prévôt de Paris & pour les
auditeurs , qui furent fupprimés par Phi-
lippe-le-Bel par une ordonnance du i mai
13 13 , voulant qu'ils prilTent pour eux tels
chrcs qu'ils jugeroient à propos , & qu'ils
les puflent ôter toutes & quantes fois il leur
plairoit , nonobftant toutes lettres que ces
clercs eulTent du roi , lefquelles furent révo-
quées. Ainfî ces clercs aroient d'abord des
lettres ou provifions du roi \ enfuite ils de-
vinrent à la nomination du prévôt de Paris
& des auditeurs, & étoient alors amovibles.
Dans une autre ordonnance de Philippe-le-
Long , du mois de février 1320, on voit
qu'il y avoit au châtelet des notaires defti-
nés à faire certaines écritures & expéditions ,
& qu'il y avoit outre cela des clercs ; il fut
ordonné qu'à l'avenir le prévôt de Paris en
auroit feulement deux pour faire les regif-
tres & fes commiffions , & fecrettes befo-
gnes ;, que ces deux clercs dévoient payer le
quart de ce qu'ils auroient de leurs écritures ^
èc que a le prévôt'de Paris avoit befoin d'un
plus grand nombre de clercs pour faire fon
office , il prendroit les notaires qui lui con-
viendroient le mieux , & non d'autres per-
sonnes. La même ordonnance porte , que
les deux auditeurs n'auront point de clercs ,
& qu'ils feront faire dorénavant toutes leurs
befognes par la main des notaires. L'ordon-
nance de Charles V , du mois de novembre
1364, art. 10, appelle clerc des re<juêtes du
palais , celui qui y faifoit la fonction du
greffier.
Clercs du greffe , font des commis qui tra-
vaillent aux expéditions du greffe fous les or-
dres du greffier. Une ordonnance de Char-
les V , alors régent du royaume , du mois
de mars 1356, fait mention, art. 7, des
greffiers & clercs du parlement. L'édit du
mois de mai 1 544 , créa des clercs du greffe
du parlement de Paris j & la déclaration
dii 12 juillet fliivant, contient un règlement
pour leurs fondions. Par édit du mois de
riécembfe 1577 5 il y eu eut encore de créés.
CLE
Par édit du mois de décembre 1 5^5 , il fut
créé deux offices de clercs du greffe dans tou-
tes les cours fouveraines , bailliages &: féné-
chauffées , &c, L'édit du mois de décembre
1609 , créa quatre offices de clercs commis
au greffe du confeil privé du roi. Dans la
plupart des tribunaux , ces clercs du greffe
ont pris le titre de greffier , & celui qui por-
toit auparavant feul le titre de greffier , s'eft
fait appeller ^rt;^zVr en chef\ pour le diftingucr
des autres greffiers qui lui ibnt fu bordonnés.
Clercs des greniers à fel ^ étoient ceux qui
tenoient le regiftre de la diftribution du fel.
Il en eft parlé dans une inftru6l:ion faite pour
le fel du temps du roi Jean. Voye^ le recueil
des ordonnances de la troifeme race y tome
IV ^ page ICI.
Clerc de la halle de Douay , c'eft le greffier
de l'hôtel-de-ville de Douay , le terme de //û/-
le fignihant lieu d'ajpmlflee. V. l'ordonnance
de Charles V ^du ^ feptembre 1 368 , art. 20.
Clercs d'honneur. Philippe-de7Valois ,
dans des lettres du 6 avril 1345 , donne à
révêque de Beauvais , qu'il établit fon lieu-
tenant général dans le Languedoc , le pou-
voir de créer des clercs d'honneur, M. Se-
couflè , dans fa note fur ce mot clercs , dit
qu'il n'a rien trouvé fur ces clercs d'honneur ,
& croit qu'on a voulu dire chevaliers d'hon-
neur. Il renvoie au gloffaire de Ducange ,
au mot milites honorarii. Ne pourroit-on
pas auffi conjeôurer que ce terme clercs
d'honneur , fignifie en cet endroit confeiller
d'honneur , d'autant plus que ces mêmes let-
tres lui donnent le pouvoir d'inftitucr &
de deftituer tous officiers de juftice?
Clercs des juges .^ voyez Clercs-greffiers ,
Clercs des arrêts , des baillis , des commif-
f aires , des confeillers , du confeil , du confu-
latj des foires , des greniers h fel , de la mar-
chandife de l'eau , des monnoies , de la pré-
vôté , de roi , des villes.
Clerc C maitPÊ ) chez les procureurs & no-
taires , fè dit abufivement pour premier &
principal clerc. Voye[ Clercs des notaires Çf
des procureurs.
Clerc de la marchandife de Paris quant au
fait de l'eau ; c'eft ainfi qu'on appeïloit an-
ciennement celui qui faifoit fondion de fë-
cretaire ou de greffier dans la confrérie des
marchands fréquentant la rivière de Seine.
Il lui étoit défendu de fe mêler diredement
CLE
ni indireélemcnt de la marcliandire par eau ,
m être ïiffocié avec des commerçans , à peine
de perdre fes marchaiidifes , & d'être puni
grièvement à la f olonté du roi. Suivant une
ordonnance du . roi Jean , du 28 décembre
1355 , la connoifTance du commerce qui
fe fait par eau pour la providon de Paris ,
a3/aat été attribuée au bureau de la ville , le
greffier de ce bureau a fuccédc au clerc dont
on vient de parler.
C'ercs de monnoies de France , étoient les
greffiers des maîtres ou juges- gardes des
monnoies. Il en eft parlé dans des lettres de
Pliilippe-de-Valois , du mois d'avril 1337,
concernant les privilèges des généraux des
monnoies & des ouvriers des monnoies j &
dans des lettres du roi Jean, du mois de no-
vembre 1 3 5O5 confirmatives des précé^lentes.
Clercs ou notaires , étoient autrefois de
deux fortes ^ favoir les clercs du roi ou notai-
res du roi , qui faifoient à-peu-près les mê-
mes fonôèions que font aujourd'hui \qs fe-
cretaires du roi. Il y avoit aufil des clercs ou
notaires des fénéchaux , baillis & prévôts ,
qui faifoient près d'eux la fonftion de fc-
cretaires & greffiers. Il y avoit outre cela
d'autres notaires deftinés feulement à rece-
voir les contrats , & dont l'office étoit diffé-
rent de celui des clercs-notaires des juges.
Cette diftinâ:ion fc trouve bien établie dans
une ordonnance du roi Jean , du mois d'ocf 0-
bre 13 51 , article 37.
Clercs des notaires du roi , c'étoient les ai-
des ou commis des fecretaires du roi. Il en
eft parlé dans «ne ordonnance du roi Jean ,
donnée vers le 7 décembre 1^61 , qui por-
te , art. 1 5 que les notaires du roi feront
ferment de ne rien prendre , ni qu'ils ne
fbuffi-iront point prendre ^^r leurs clercs ious
couleur de parchemin ou de groffoyer les
lettres , une fois ou plufîeurs , li ce ri'eft des
Chartres ou des lettres criminelles , le droit
accoutumé. Préfentement les fecretaires du
roi qualifient de commis ceux qui travaillent
fous eux à faire leurs expéditions j & la qua-
lité de clerc de notaire ne fe donne qu'à de
jeunes gens qui travaillent chez un notaire &
fous fes yeux à rédiger ou expédier les aéies
qu'il reçoit comme notaire.
Clercs de la chambre des Comptes {petits ),
V05^ez ci-après au mot COMPTES, à l'article
de la Chambre des Comptes.
TomerUh
CL E î<>j
Clerc de la prévôté de Paris ; c'étoit le gref-
fier du prévôt de Paris. Il eft ainfi nommé
daus une ordonnance de Hugues Aubriot ,
prévôt de Paris, par laquelle on voit que ce
clerc recevoit ceux qui dévoient dépofcr en
l'information de vie & mœurs des courtiers
de chevaux, & que la caution qui étoit don-
née pour eux , devoit être enrégiftrée par-
devers le clerc. V. les ordonnances de la troi~
fieme race , tome II y page 381.
Clercs de procureurs , (ont des aide»^ que
, les procureurs ont chez eux pour faire ou
tranfcrire les expéditions qui font de leur
miniftere. Les procureurs au parlement, qui.
étoient anciennement en fort petit nombre,
ne pouvant faire feuls toutes leurs expédi-
tions à mefure que le nombre des affaires
augmentoit , obtinrent en 1303 du parle-
ment la permiffion d'avoir chez eux de jeu-
nes gens pour leur fervir d'aides , lefquels
furent nommés clercs , parce qu'alors les
eccléfiaftiques étoient preique les lèuls qui
euffent la connoift'ance des lettres , & que
les gens de pratique s'en fèrvoient pour fane
écrire leurs adèes : c'eft pourquoi l'on donna
auffi le titre de clercs aux laïques qui étoient
lettres.
Les clercs de procureurs font ordinaire-
ment de jeunes gens^ c'eft pourquoi le lieu
où ils travaillent s'appelle V étude du procu-
reur ; parce qu'en effet ceux qui font chez
les procureurs en qualité de clercs , y font
pour apprendre la pratique judiciaire , dont
la connoiftance eft nécelfaire à tous ceux qui
concourent à l'adminiftration de la juftice :
auflî voit-on tous les jours chez les procu-
reurs en qualité de clercs , de jeunes gens
deftinés à remplir des places diftiuguées de
judicature.
Ceux qui fè deftinent à la fonâion de pro-
cureur dans les villes oîi les clercs forment
entre eux une communauté , doivent s'inf-
criro fur les regiftres de la communauté pour
faire courir leur temps de cléricature ou
étude , qui eft de dix années. Celui qui eft
le premier de l'étude , prend le titre de mai-
tre-clerc.
A Paris. & dans plufîeurs autres villes du
royaume, la communauté des c/^ra s'appelle
bafoche, La communauté des clercs au pai;-
Isment a une jurifdiélion fjr fes membres
qu'on appelle auffi ba[^che , & qui lui a été
Ll
■ i-..
1^^ CLE
jiccordée par Piiilippe-le-Bel , de l'avis &
eonfeil de Ton parlement.
A Rouen , cette cominiînaiité s'appelle
auflî bafoche ou régence du palcis , parce
qu'elle eft chargée du foin de maintenir une
bonne difcipline dans le palais par rapport à
la population.
La communauté des clercs de procureurs
de la chambre des comptes , s'appelle le
haut ^ fouverain empire de Galilée, V^oye^
Basoche & Empire de Galilée.
Au parlement de Paris & dans la plupart
è<ts tribunaux, les clercs de procureurs n ont
point caraâ:ere de perfonncs publiques : ce-
pendant à Lyon Si. dans quelques autres
lieux jles clercs de procureurs ibnt en poflef
fîon de faire desrequifitoires & remontran-
ces devant le juge à l'audience & en l'hôtel,
lis reçoivent les fignifications que l'on ap-
porte chez leur procureur , & en donnent
leur reconnoiflance , & fignent en ajoutant
leur qualité de clerc d'un tel procureur.
11 eft défendu aux clercs de procureurs de
porter dans le palais aucune épée , canne ,
ni bâton , 8c de porter l'épée même hors du
palais. Mais les réglemens qui ont été faits
à ce fiijet , & renouvelles en différens temps ,
font afîèz mal obfervés de la part d'un grand
nomble de clercs. Voye\ les réglemens des 1 6
février & 14 mai 1671 , 19 juillet 1689, 6
février & \^ juillet 1698 , & f arrêt du 3
août 17 18.
Il eft auflî défendu aux procureurs de
donner aucuns gages ni appointemcnsàleurs
clercs. Arrêt du z% juillet 1698.
Voy'e[ Duperier , tome II , pag. 273. Bo-
jiiface, tom. /, liv. I , tit. ziz, n°, 3 & lO.
biblioth. de Bouchel , au mot préfentation ;
la déclaration du 10 juillet 16S5 , qui défend
aux procureurs d'avoir des clercs de la reli-
gion prétendue réformée ^ la délibération de
la communauté des avocats Ci' procureurs , du
30 avril 16^9 , «S* t arrêt du i% juillet fui^> ont
^ui l'homologue ^ î arrêt de règlement du 14
noût i6ç)i au journ. des aud.'çovLT la récep-
tion des clercs en l'office dç proaireur , &
portant aufli défenfè à eux;d'acheter aucune
pratique fojas avoir acheté une charge de
procureur^
• Clerc du roi; <m donnort ancieraîement
ce titre aux quatre maîtres des requêtes de
ïtiQtd du roi ,^ comme il paroît p^ mic or-
CL E
donnance du roi Jean , du 10 mars 1 3 511 ; )?-
de les clericos magijiros Stephanum , & magif-
tros requejlrarum hofpiiii noflri. Ce titre ii-
gniiîoit aufîi quelquefbisco/;/^ /V/c r du ro/.C'eft
ainft que dans l'épitaphe de Guillaume de
Maçon , évêque d'Amiens , il eft qualifié cle-
ricus régis. V. le gloff. de Ducange , au mot
clericus^ & ci- devant clercs du eonfeil.
Clercs du roi , eft auiîi le titre que l'on
donnoit autrefois aux notaires du roi , ap-
pelles préicntement/fcrf/û/'/^^ du roi, Voy.
Notaires.
Clerc du roi juge. Anciennement quelques
juges royaux étoient qualifiés clercs du roi
& juges j comme le juge d'Uzès dans des
lettres du maréchal d'Audenant , lieutenant
pour le roi dans le pays de Languedoc , du
16 avril 1364: clcricus rcgius & judez vice-
comitatus Ucetici. Voyc:^ le recueil des or-
donnances de la troifieme race , tome IV^^ P^§-^
230.
Clercs dufecret , eft le nom que l'on don-
noit anciennement à ceux d'entre les iècre-
taires du roi qui faifoient les fondions que
font aujourd'hui les fècretaires d'état. Au
commencement de la troifieme race, le-
chancelier réuniftbit toutes les fondions des
notaires & fècretaires du roi. Frère Guerin ,
évêque de Senlis , étant devenu chancelier
de France fous Louis VIII , en 1228 , aban-
donna totaleinent la fon<^ion du fecreta-
riat aux notaires & fècretaires du roi , &
fè réferva ièuIe.Tient fiir eux rin{pe<ftion. En-
tre les notaires- fècretaires , ceux qui appro--
choient du roi s'étant rendus plus confidé-
rables , il y en eut quelques-uns d'entre eux
que le roi diftingua A^s autres , &. qui fu-
rent nommés clercs du fecret : c'eft la pre-
mière origine des fècretaires d'état. Philip-
pe-le-Bel, eu 1309, déclara qu'il y auroit
. près de £à perfonne trois clercs dufecret , &
vingt-fèpt clercs ou notaires fbus eux. Les
clercs dufecret forent fans doute ainfi nom-
més 5 à caufe qu'ils expédiaient les lettres
qui étoient fcellées du fcel -dp^llé fcel dufe-
cret , qui étort celui que portoit le cham-
bellan. 11 parok par des regiftres de la c^am-
Iwe àes comptes , de l'an 1 343 , que les
clercs du fecret avoi^nt alors le titre ésfecrtr-
t air es des finances,.
Clerc du roi receveur. On a autrefois donné
.le titre de çlgrc du rei à cettaiiis. recevais*
CLE
des émolutnens procédans des expéditions
de jiiilice. C'eft aiufi que Phiiippe-le-Long ,
par Ion ordonnance du mois de février 1 3 2.0 ,
an. 1 5 , ordonna qu'il y auroit pour lui un
c/erc qui demeureroit continuellement au
châtelet , ^ qui feroit avec le fcelleur ^ qu'il
recevroit le quart des écritures & le tiers des
examinations des témoins , & l'apporteroit
au tréfor du roi chaque vendredi ou fa-
raedi ^ qu'afin qu'on ne pût y faire fraude ,
il écriroit en parchemin ou en papier lafom-
me que chaque notaire &: clerc prendroit
de chaque lettre , félon l'inflruéiion qui lui
ièroit donnée en la chambre des comptes ^
. que quant aux examinations , lefquelles fe
faifoient parles examinateurs & par les no-
taires , il mettroit en écrit combien chacun
auroit gagné dans la (èmaine , & de qui ,
afin qu'on n'y pût faire fraude ^ que ce clerc
auroit deux fous fîx deniers parifîs de gages
par jour ^ qu'il pourroit faire lettres de châ-
telet comme un autre notaire ; & qu'au
commencement de l'année il compteroit de
ce qu'il auroit reçu & payé des écritures &
examinations des témoins.
CUrcs-fecretaires ou greffiers , voyez clercs-
greffiers , clercs du grejf'e , clercs de confeil-
lers , clercs des commij) aires.
Clercs des villes de commune ; c'eft ainfi
que l'on appelloit anciennement les Secré-
taires ou greffiers des villes de commune ,
c'eft-à-dire , qui avoient droit de commune
& de mairie. II en eft fait mention dans une
ordonnance de S. Louis , donnée vers l'an
1256 , touchant les mairies, où il eft dit
qu'il n'y aura que le maire , ou celui qui
tiendra Ca place qui pourra aller en cour ou
ailleurs pour les affaires de la ville , &: qu'il
ne pourra avoir avec lui que deux perfonnes ,
avec le clerc de la ville &c celui qui portera
la parole. Des lettres de Charles , duc de
Normandie , du mois d'avril 1361 , parlent
du clerc de la ville de Rouen , qui s'eft qua-
lifié monfieur Gautier le fage^ clerc de la ville^
V. ci-devautc/^rcf/e/tf commune de Rouen, {A)
Clercs de chapelle , ( Hifi. moderne. )
dans les raaifons des rois & àes prhices ,
ibnt des eccléiîaftiques qui ièrvent l'aumô-
nier ou le chapelain à la meiiè , & qui ont
ibin de la décoration de la chapelle.
En Angleterre , on appelle clerc ducabi-
ftut y le^oiifeUeur du roi.
CLE 1(^7
Clercs de la chambre, à Pvome,
font des officiers de la chambre apoftolique ,
confeillers & affeflèurs du camerlingue , au
nombre de douze , qui font juges de cer-
taines caufcs qui leur font diftribuces , lef-
quelles reviennent par appel devant la cham-
bre.
Ces charges coûtent ordinaireinent qua-
rante-deux mille écus romains, qui font 21
mille piftoles de notre valeur aâuelle de
France , l'écu romain valant environ cinq
livres de notre monnoie ^ & ces charges rap-
portent à leurs propriétaires environ dix
pour cent, ce qui fait plus de quatre mille
écus romain par an.
Parmi ceux-là , l'un eft toujours préfet ou
commilFaire àes grains ou greniers publics j
car à Rome , & même dans toutes les villes
impériales d'Allemagne , il y a des greniers
publics pour fubvcuir à la difèttc & à la
cherté des blés , ce qui fait que rarement là
famine s'y fait lèntir. Il y a deux villes en
France où cet ufage fè pratique , iavoir à
Strasbourg, ce qu'ils ont retenu du temp,s
que la ville étoit impériale ^ l'autre ville eli
celle de Lille en Flandre , où , depuis la
paix de 1714 , on a établi un grenier pu-
blic, à l'imitation des villes impériales.
Un autre clerc de la chambre apoftolique
eft chargé des autres vivres '^ un troifieme a
le foin des prifciis ^ & un quatrième , des
rues de la ville de Rome.
La jurifdiûion àes clercs de la chamJjre
apoftolique s'étend fur les matières où il
s'agit d'intérêts de la chambre , contrats de
fermes des revenus du faint liège j des tréfo-
riers de l'état eccléiiaftique ^ des caulès de
communautés ^ des dépouilles des prêtres
morts hors la réfidence de leurs bénéfices j
des caufes des comptes & calculs avec les
officiers & miniftres d'état j fur les monnoies
& leur cours ; fur les appels des fontences
rendues par les maîtres des rues ^ ftir les
matières des gabelles, taxes, impofitions 8c
autres fomblables objets d'intérêt. Par-là y
on voit que ces charges , fous le fimple nom
de clercs , ne lailTent pas d'être fort impor-
tantes, {a)
Clerc du guet, {Marine.) celui qui
aflemble le guet fur les ports de mer & for
les côtes , & qui en fait à l'amirauté foa
Ta£j>ort,
L 1 2
i6S
CLE
Clerc. On appelle aiufi , dans les /îx
corps des marchands de Paris , & dans les
coiniminautés des arts & métiers , une per-
ibnne prépofée par les maîtres & gardes , &
par les jurés , pour faire les commifllons &
les courfes nécelTaires pour les affaires du
corps. C'eû le cierc qui a foin d'avertir les
maîtres des jours qu'il y a des alîèmblées
■ extraordinaires f, &c dans quelques commu-
■ nautés d'artifàns , c'ell au cierc que doivent
s'adreiTer les compagnons qui cherchent de
l'ouvrage. Diclion. du Comm.
CLERGÉ, f. m. {HiJI. eccl.) c'eft le
coips àts perfonnes confhcrées à Dieu par
la cléricature ou par la profefîîon religieufe ,
d'où le clergé fè diviiè en féculier & en ré-
gulier.
Ce mot eft dérivé du grec >/ îfpof , ou du
latin cleriis , qui fignifient part ou portion ;
parce que quoique tous les chrétiens puif-
îënt être appelles /a portion de Dieu^ cepen-
dant ceux d'entre les chrétiens que Dieu a
choifis , fëparés des autres & confacrés à fon
fervice , font la portion diftinguée & chérie
de l'héritage du Seigneur. On peut dire en-
core que le corps des eccléfiaitiques , infti-
tué pour enfcigner aux peuples la religion ,
pour adminiftrer les facremens & célébrer
l'office divin , eft ainiî appelle parce qu'il a
choifi le Seigneur pour fa portion , luivant
ce verlèt que prononcent les clercs lorfqu'on
les toniiire : Dominas pars àcereditatis meœ
& calicis mei ; tu es qui rejiitues hœreditatem
mtam mihi. Pf. 1 5.
Le dergé a toujours été dans l'état un
corps diftingué par des honneurs , des im-
munités , àes revenus , & autres droits ou
honorifiques ou utiles , qui lui appartiennent
de droit eccléfiaftique , ou qui lui ont été
attribués, foit par la concelîion des princes,
Ibit par la piété des fidèles.
Parmi nous , le clergé eft reconnu pour le
preiràer corps & le premier des ordres du
royaume, & en cette qualité il eft maintenu
dans tous les droits , honneurs , rangs , féan-
ccs , préfidences Se avantages dont il a joui
ou dû jouir jufqu'à préfent j ce font les ter-
mes de redit du mçis d'avril i<595 , art. 45.
Long-temps avant , nos rois s'en étoient
expliqués de même dans la déclaration du
10 février 1580 , & dans leurs lettres-paten-
tes du premier mai 1596, du 9 déceiiibre
CLE
i6c6 , du 10 août 161 5, & du 1$ juin
i6z8. Voye:^^ les nouveaux mém, du clergé ^
tomes VI & FUI.
Quant aux honneurs , le clergé a réguliè-
rement le pas & la préféance fur les laïques ,
les parlcmens , ou autres cours féculieres ,
dans les églifes , les proceflions , & dans
toutes les cérémonies de la religion. Divers
arrêts du confeil privé , rapportés dans le
tome Vdcs nouveaux mémoires du clergé , ont
réglé des conteftations qui s'étoient élevées à
ce fujet entre l'archevêque & le parlement
de Rouen , entre l'évêque de Metz & le par-
lement de cette ville : ces arrêts ont main-
tenu le clergé dans le droit de préféance.
Dans les aflemblées politiques , telles
qu'étoient autrefois en France les états-géné-
raux , & qui font encore aujourd'hui les af-
lemblées des états en Languedoc , en Breta-
gne , en Bourgogne , en Artois , le corps du
c/fr,^/ précède la noble/Te & le tiers-état, &
porte le premier la parole dans les députa-
t'ons au roi. L'archevêque de Narbonne eft
prélident-né des états de Languedoc , &
l'évêque d'Autun jouit de la même préroga-
tive dans ceux de Bourgogne. Aux aflem-
blées des états-géneraux , le clergé fuivoit
l'ordre politique du royaume , & nommoit
fes députés par gouvernemens & par baillia-
ges , comme les autres corps de l'état. En
Suéde , malgré le changemeirt de religion ,
le clergé précède dans les états généraux les
deux ordres du royaume. En Pologne , les
évêques n'ont leur rang aux diètes qu'en
qualité de fénateurs , excepté dans \qs in-
terrègnes & dans la diète d'éleétion où le
primat du royaume préfide de droit. En
France , les évêques comtes ou ducs & pairs
ont féance au parlement de Paris. Quelques
autres font confeillers-nés au parlement dans
le reilbrt defquels font fitués leurs évêchés.
Les évêques & archevêques d'Angleterre
font membres de la chambre haute. Ceux
d'Allemagne ont place & voix dans la diète
de l'Empire, dans le collège des princes».
Voyei Collège & Diète. •
Pour le corps du clergé , comme les cha-
pitres & les communautés régulières , leur
rang entre eux & avec les corps fëculiers y
fe règle fùivant les anciens ufàges. Il en eft
de même à proportion des eccléfiaftiques-
particuliers , s'ils a'oiu mi certain rang , à
I
CLE
caufe de leurs bénéfices ou de leurs charges.
En Angleterre , on diftingue le haut & le
bas clergé : le haut clergé eli compofé des
archevêques & évêques \ le bas clergé com-
prend tous \qs autres eccléfiaftiques. Nous
avons en France la même diftinftion , mais
fous àQS noms différens : on dit le premier
^ le fécond ordre. Le terme de bas-clergé eii
pourtant en ufàge dans les chapitres pour
lignifier iQsfemi-prébendés , chapelains^ chan-
tres^ mujiciens , ou autres officiers gagés qui
n'ont pas voix en chapitre. V. Chapitre.
Les immunités ou exemptions dont jouit
le clergé font de temps immémorial : nos
rois les ont confirmées par leurs ordonnan-
ces. On a fur ce fujet celles de S. Louis , de
Philippe-le Bel , des rois Jean , Charles V ,
Charles VII, ^c. Voye[ les mémoires du
clergé , tome VI.
Les évêques & les conciles ont marqué
dans tous les temps la plus grande fermeté
pour les maintenir & les conferver. On peut
voir fur cette matière la lettre que les pro-
vinces de Rheims & de Rouen écrivirent en
858 à Louis II. Il y a même des exemples
d'interdits & d'excommunications pronon-
cés contre les juges laïques qui violent les im-
munités eccléfiafliques. En 1207 j le chapi-
tre de Rouen , pendant la vacance du Ç\e^Q ,
jeta un interdit général fur toutes les églifes
de Rouen, parce que le maire de cette ville
avoit, de fon autorité privée , fait empri-
ibnncr le domeftique d'un chanoine. Dans
un des regiflres du parlement de Paris , on
lit qu'en l'année 1359 l'évêque de Chartres
& fes officiers mirent en interdit la ville de
Mantes , parce qu'on ne voulut pas leur ren-
dre deux clercs détenus prifonniers. Il efl
parlé de femblables interdits en une conlli-
turion inférée dans un ancien recueil des
llatuts fynodaux de l'égliiè de Rhei^is, faits
par l'archevêque Guillaume de Tryes , en-
viron l'an 1330. Voy. les mémoires du clergé ,
tome VI & VII, & l'a tradition des faits.
L'immunité eccléfîaflique eft de deux for-
tes j la perfonnelle , qui concerne la perfonne
des clercs j &: la réelle , qui concerne les
biens ou revenus de l'églife. La première
tend à conferver aux eccléfiafliques le repos
néceffaire pour vaquer à leurs fondions j la
féconde regarde plus la confervatiou de leurs
CLE 1^9
Les exemptions perfonnelles font premiè-
rement celles de la jurifdicf:ion : régulière-
ment un eccléliaftique ne peut être pourfùivi
devant les tribunaux féculicrs, ou du moins ,
dans certains cas , il faut que le juge ecclé-
fîaflique inflruife leur procès conjointem.ent
avec le juge laïque. Les eccléfiafliques font
exempts de charges municipales , de tutelle
& curatelle , s'ils ne l'acceptent volontaire-
ment. Dès le temps de S. Cyprien , la règle
étoit ancienne , que fî quelqu'un nommoit
un clerc pour tuteur dans fou teflament , oa
n'ofîriroit point pour lui le faint facrifice
après fa mort. Les eccléfiafliques font aufîl
exempts de la contrainte par corps pour det-
tes civiles. Ils font difpenfés du iervice de la
guerre qui fè devoit autrefois pour caufe de
fief , & n'a plus lieu qu'à la convocation de
l'arriere-ban. DécL du roi, du% février 5657.
Ils ne font pas même obligés à fournir d'au-
tres perfonnes pour faire le fervice , ni de
payer aucune taxe à cet effet. Ils font exempts
de guet &:de garde, & de logement de gens
de guerre : on ne peut leur impofer aucune
taxe pourraifon de logement, uflenfile , ou
fourniture quelle qu'elle foit. Les eccléfiafli-
ques ne doivent point être auffi compris
dans aucune impofition pour la fubfiftancsr
des troupes ou fortifications diQS villes , ni
généralement pour aucuns odlrois , fubven-
tions, ou autres emprunts de communautés.
En pays de tailles perfonnelles , ils en font
exempts , foit pour leur patrimoine , fbit
pour leurs dîmes \ mais ils font compris
dans les tailles négociales, c'efl-à-dire impb-
{é.^% pour les dîmes qu'ils font valoir , qui
ne font pas attachées à leur bénéfice. En pays
de tailles réelles , les biens appartenans à
l'églife^fbnt francs commue les biens nobles.
Ils font auffi exempts des droits d'aides pour
les vins de leur crû , foit bénéfice ou patri-
moine, du moins ils ne paient que des droits
fort médiocres. Tels font les principaux pri-
vilèges dont jouit le clergé, en confidération
des contributions particulières qu'il paie au
prince fous le titre de décimes , de fubven-
tions , aidons gratuits , &e. V. DÉCIMES.
L'immunité réelle qui concerne les biens
donnés aux é%\\[ts , ou par la munificence
Aqs rois , ou par la piété des fidèles , eft
fondée fur ce principe , qu'ils font fpécialer-
ment voués tsn coufàcrés à Dieu pour le
\yo ' CLE
roulagemêtit des pauvres , pour l'entretien 8c
la décoration des temples & des autels , &
pour la fiibfillance des miniftres du Seigneur.
On a depuis peu agité vivement cette <iuQf-
tion , & nous pourrons entrer à cet égard dans
des détails iutérefTans à ïan. Immunité.
Nous nous contenterons d'obferver ici ,
que ces biens ne font ni fi exceflîfs ni il
exempts de charges publiques que l'ont pré-
tendu les adverfaires du clergé. Outre les
droits d'amortiiFement qu'il lui en a coûté
pour les retirer du commerce , ignore-t-on
que les impofitions ordinaires , connues fous
le nom de décimes , & les impofitions ex-
traordinaires ou dons gratuits , font très-
fortes j qu'elles vont communément au
dixième , fouvent au feptieme, quelquefois
même au cinquième du revenu des bénéfi-
ces ? c'eft ce qu'il feroit aifé de démontrer ,
fi c'en étoit ici le lieu. Qu'il nous fuffife de
remarquer que la religion ne pouvant fe ibu-
tenir fans miniftres , il faut qu'il y ait dans
l'état des fonds àflurés pour leur fiibfiftauce j
& d'ajouter avec M. l'abbé Fleury , « que
puiique le public les entretient & les récom-
pense de leur travail , il eft jufte au moins
de leur conlèrver ce revenu , & de ne pas
reprendre d'une main ce qu'on leur donne
d'une autre. »
Les droits honorifiques du clergé font les
honneurs & prérogatives attachées aux fei-
gneuries , terres , fiefs , &c. que polTcdent
certains bénéficiers , chapitres ou commu-
nautés , tels que les droits de haute , baffe
& moyenne juftice , de chaffe , de pêche ,
d'c. Ses droits utiles confiftent ou en revenus
fixes & affurés , attachés à chaque bénéfice ,
chapitre , ou communauté religieufe , & en
rétributions ou offrandes cafuelles. Fleury ,
injîitut, au droit eccléf. tome 7, part, I , ck.
xxxix ^ pag,i^%,&fuiv.
En France , le clergé s'affemble fous l'au-
torité du roi , ou pour traiter des matières
eccléfiaftiques , ou pour ordonner des im-
pofitions. Ces afîèmblées font ou ordinaires ,
ou extraordinaires. Les ordinaires font ou
particulières de chaque diocefe , ou provin-
ciales de chaque province eccléfiaftique*, oa
générales de tout le clergé de France. A ces
dernières affemblées on fait les députations
par métropoles , qu'on appelle provinces tc-
xléjiajiiqms, Voye^ MÉTROPOLE,
C LE
Les affemblées générales du clergé font de
deux fortes ;, les grandes , auxquelles cha-
que province eccléfiaftique envoie deux dé-
putés du premier ordre & deux du focond ;
on les appelle les affemblées du contrat ; & les
petites affemblées , auxquelles les provinces
ne députent qu'un eccléfiaftique du premier
ordre & un du fécond j on les nomme les
ajfemblécs des comptes. Celles qu'on appelle
du contrat , ou les grandes affemblées , fè
tiennent tous les dix ans ^ & cinq ans après
la convocation de l'aftèmblée du contrat ,
on convoque une affemblée moins nom-
breufe , dans laquelle les comptes du receveur
général font examinés. Toutes les affemblées
ordinaires font indiquées dans l'ufage au
15 de mai ^ mais elles ont été quelquefois
avancées , & quelquefois remifos , fuivant
les circonftances. Uart. 24 du règlement de
i6i 5 , porte que les grandes affemblées ne
pourront durer plus de fix mois , & \qs affem-
blées des comptes plus de trois mois. Le roi
fixe le lieu pour chaque afl'emblée , & pour
l'ordinaire elles fe tiennent à Paris , dans le
couvent des grands Auguftins. Il s'en eft ce-
pendant tenu autrefois à Melun , à Saint-
Germain-en-Laye & ailleurs. Af/z/z. du clergé j
tome VIII. Les députés aux affemblées doi-
vent être dans les ordres , & pourvus d'un
^bénéfice dans la province qui les députe. Le
rochet & le camail font l'habit des députés
du premier ordre j & ceux du fécond y
afiiftent en habit long & en bonnet quarré.
Ces députés ont le privilège d'être tenus pré-
kns , pendant le temps de l'affemblée , à
leurs bénéfices qui demandent réfîdence , &
celui de faire furfèoir auffi pendant le même
temps les pourfuites des procès & des diffé-
rends intentés contre eux , avant la convoca-
tion ou pendant le temps de l'affemblée.
Ils ont^ aufti une rétribution ou taxe pour
leur féjour ou leur voyage , que leur paie la
chambre eccléfiaftique de leur province. Les
préfidens font toujours choifis dans le pre-
mier ordre , foit évêques , foit archevêques.
L'aifemblée nomme aufii des promoteurs Sc
focretaires tirés des députés du fécond ordre.
Enfin il eft d'ufàge qu'au commencement &
à la fin de chaque afl'emblée on nomme une
députation pour aller complimenter le roi.
Voye:^ les mémoires du clergé , tome VIII.
On diftingue encore dans le clergé des
CLE
afTemblées extraordinaires , & il y en a de
deux fortes ; les uiies font générales , & font
convoquées dans la forme ufitée pour la
convocation des affeiiiblées ordinaires ; les
autres , qu'on peut appeller des ajjïmblées
extraordinaires particulières , fe font fans
folemnités \ les provinces n'y envoient point
leurs députés , & les prélats qui les com-
pofent n'ont fouvent ni l'erdre ni la per-
miilîon du roi de s'alfemblcr. La convoca-
tion des affemblces extraordinaires particu-
lières fe fait dans cette forme : lorfqu'il i'z
préfente quelque cas extraordinaire qui inté-
reffe l'églife , les agens en donnent avis aux
évêques qui font à Paris ou en cour; le plus
ancien des archevêques ou évêques , s'il ne
s'y trouve point d'archevêque , dopnô fes
ordres aux agens d'envoyer des billets de
convocation à tous ces prélats. Cette forme
eft expliquée dans le procès verbal de l'aflèm-
blée de 1650. Celle de 1655 a réglé que les
évêques inpanibus ne feroient point appelles
à ces fortes d'aifemblées , mais feulement
les coadjuteurs d'évêques , & les anciens
évêques qui fe font démiis. Elles peuvent
faire des députations au roi , & être d'une
très -grande utilité, quoiqu'elles ne puiffent
pas ftatuer fur bien des chofes avec la même
autorité ni la même plénitude de pouvoir
que les aifemblées ordinaires du clergé. Voy.
Agens du Clergé. Voye^auffi les mém. du
clergé 5 tom. Vlll; fi* M. Fleury, mém, des
affaires du clergé de France , inféré a la fuite
de tinjîit* au droit eccléfiafl. tome II ,/». 264
&fuiv, (G)
Referions tirées de tefprit des loir fur la
puijfance eccléfiaflique. i. Autant le pouvoir
éxxclergé'Q^i. dangereux dans une république ,
autant eft-il convenable dans une mDnar-
chie , fur-tout fi elle tend au defpotifrae. Où
en feroient i'Elpagne & le Portugal depuis la
perte de leurs ioix , fans ce pouvoir qui
arrête (èul la puifTance arbitraire ? barrière
toujours boruie quand il n'y en a point d'au-
tre : car comme le defpotifme caufè à la
Hature des mauK effroyables , le mal mime
i[ui le limiteroit fèroit un bien.
2,. Dès les cominençemens de la première
race , on voit les cliefs de l'églife arbitres
^s jugemens ^ ils affiftent aux ailèir^lées de
la nation ^ ils influent puiifairanent fiir les
ïéfalutioiis às& rois \ on kur avok accordé
C L, E 271
des privilèges \ ils étoient comblés de biens.
L'auteur que nous citons rend raifon de cette
autorité.
3. Lq clergé a tant reçu pendant les trois
races , qu'on a été jijfqu'à dire qu'on lui a
donné la valeur de tous les biens du royaume :
mais fi la nation lui donna trop ^lors , elle
trouva depuis les moyens de lui reprendre.
Le clergé a toujours acquis ^ il a toujours
rendu j il acquiert encore. V. tefprit des loix^
Clergés , ( Jurifp. ) dans quelques an-
ciennes ordonnances , fignifie les gens dejuf-
tice , comme en l'ordonnance de Charles V ,
de fan 1356 , art. j. On les appelloit ainfi
comme étant gens lettrés ^ car ancienne-
ment les clercs ou eccléfiaftiques étant pref- '
que les feuls qui enflent quelque connoiifance
des lettres , on appelloit clerc tout homine de
lettres, & la fcience fe nomipoit clergie. (A)^
CLERGIE, {Jurifprud.) anciennement
fignifioityc/V/2Cf , à caufe que les clercs étoient
alors les feuls qui fiilfent fàvans : & comme
toute écriture étoit confîdérée comme une
feience , & que ceux qui écrivoient étoient
la plupart clercs ou qualifiés tels , & fingu-
liérement ceux qui faifoient la fonction de
greffiers i, on appella aufli ckrgies les greffes
des jurifdiitions. C'efl: ainfi qu'ils font nom-
més dans les anciennes ordonnances. Phi-
lippe-de-Valois , par des lettres du 10
feptembre 1 3 3 1 , rappelle une ordonnnance
précédente , portant que les écritures , cler-
gies^ & notaires de toutes îesfénéchauffées,
bailliages &: prévôtés , feroient réunies à fou
domaine , & vendues par cris & fiibhafta-
tions , c'eft-à-dire données à ferme au plus
offrant , comme les autres fermes du do-
maine. Le même prince ordonna , par un
mandement du i^ mai 1347, que les clergies
des b;ailli9ges & hs prévôtés royales feroient
données eii garde , & que les clergies des
prévôtés feroient ajoutées aux prévôtés , &
données aux prévôts en diminution de leurs
gages. Charles V , étant régent du royaume ,
fit une ordonnance au mois de mars 1 3 5<^ t
portant e^tre autres chofes que les clergies i>e
feroient plus vendues ni données â ferme
comme par le pafle , parce que les fermiers
commçttoient des exaâions fiir le peuple ^
mais qu'elles feroient données à garde , par
le confejl des gens du pays & des environs.
Cet article ne fiit pas long-teajps obiecïs 9
171 CLE
car le ir.êjr.e prince ordonna , le 4 feptembre
1357, aux g^eiis des comptes , d'affermer les
prévôtés , écriture? & tabelîioiiages ^ or ces
termes écritures ctoientfynonymes de cUrgies
ou greffes. Il eft dit qu'on les donnera au
plus offrant , mais néanmoins à des perfonnes
idoines. Qn pratiquoit encore la même
chofè en 1370, même pour les greffes de
villes, fliivant une autre ordonnance de Char-
les Vy du 6 février ^ portant que les éehevins
de Tournai donneront les offices de la ville
en la forme ufitée anciennement, excepté la
clergie des échevms , qui fera donnée à ferme
au profit de la ville. Le greffe de la ville de
Paris eft auffi nommé clergie dans une ordon-
nance de Charles VI ^ du zj janvier 1382 ,
qui réunit la prévôté des marchands & cler-
gie de la ville , à la prévôté de Paris. Dans la
fuite le terme de greffe a pris la place de ce-
lui ÀQ clergie. Voy. GREFFE. (A)
CLERI, CG^o^r.) petite ville de l'Orléa-
nois , éleâion de Baugenci fur le Doure , à
quatre lieues d'Orléans, avec une collégiale.
Louis XI y a un beau monument , que les
Calviniftes profanèrent , & que le chapitre a
rétabli magnifiquement. c< On voit, difoitia
Fontaine , dans une de Tes lettres , en 1663 ,
ce prince à genoux fur fon tombeau , quatre
enfaiis aux quatra coins \ ce feroient quatre
anges , fi on ne leur avoi*. point arraché les
ailes : le bon apôtre de roi fait là le faint-
homme, & eft bien mieux pris qu'à Péronne ,
quand le Bourguignon le mena à Liège.
Je lui trouvai la mine d^un matois ;
Aujfi tétoit ce prince dont la vie
Doit rarement fervir £ exemple aux rois\f
Et pourrait être en quelque point fuivie.
A fes genoux font iès heures & fbn cha-
pelet , la main de juftice , fon fceptre , fon
chapeau & là "Notre-Dame. Je ne fais com-
ment le ftatuaire n'y a point mis le prévôt
Triftan ' lé tout , d'un marbre blanc , ii^'a
ièmblé de bonne main. r> (C.)
CLÉRICATURE , (Jurifprud.) Ce qui
concerne l'état de cléricature eft expliqué aux
mots ChEKC& Clergé, & ci-après ^://wor
Ecclésiastique^ on parlera feulement
ici des privilèges de cléricature. Ces privilè-
ges confiftent :
1°. En ce que le clergé forme le premier
prdrc du royaume j il eft ainfi quaUfié dans
CLE
Védit du mois d'avril 169 5. Quant au rang ds
chaque eccléfiaftique en particulier vis-à-vis
des laïques , lorfqu'un eccléfiaftique fait
quelque fonftion de fon miniftere , il pré-
cède tous les laïques j mais lorlqu'il n'eft
point en fonétion propre à fon caradtere ,
fon rang vis à-vis des laïques fe régie par la
qualité des perfonnes & autres circonftances.
Voyei Domat , tr. du Dr. publ. liv, 1 , tit.
ix , feâ. iij , /z. 47 6» fuiv.
2°. En matière criminelle , les clercs peu-
vent demander leur renvoi pardevant le juge
d'églife , pour être jugés par lui fur le délit
commun ^ & lorfque ce renvoi «ft ordonné ,
le cas privilégié ne peut être jugé que par le
juge royal , attendu qu'il n'eft pas d'ufàge
que les juges d'églife inftruifent conjointe-
ment avec les juges des feigneurs , mais feu-
lement avec les baillis & fénéchaux royaux.
Ils ne font fujets en aucun cas à la jurifdic-
tion du prévôt des maréchaux , & les préfî-
diaux ne peuvent les juger qu'à la charge de
l'appel ;, & lorfque l'affaire fe trouve portée
au parlement , foit par appel , ou en pre-
mière inftance, ils peuvent demander d'être
jugés eu la grand-cliambre , & non à la
Tournelle , afin que les confeillers-clercs ,
qui ne font point de fervice à la tournelle ,
puiffent alîifter à leur jugement. Voye-^ t or-
donnance de Moulins , art, 41 ; celle de 1 670 ,
art. 21 ^ tédit et avril 1595 , art, 41 ; & /a,
déclaration du '^février 173 1 , art. 1 1. <S' 1,5.,
3°. En matière civile , lorsqu'il s'agit d'ac-
tions perfonnelles , les eccléfiaftiques ont le
privilège de ne pouvoir être traduits que par-
devant le juge d'églife , finon le défendeur
peut demander fon renvoi , quand même le
demandeur feroit un laïque. Voye\ les loix
eccl, de d'Héricourt , part. I. ch. xix. n, 8.
Ils ont aufti le privilège de ne pouvoir pas
être contraints par corps pour dépens ou
autres dettes purement civiles , fi ce n'eft
qu'il y ait ftellionat ou autre délit qui les.
faffe juger indignes de jouir des privilèges de
cléricature, Voye\ le traité dt lajurifdicliort
eccléfiaftique de Ducalfe \ tédit de 1606^ art,
123 ; &l la déclaration du ^O juillet 17 10»
4**. Les eccléfiaftiques font exempts de
taille dans tous les pays où elle eft perfon-
nelle , & ils jouiftènt du même privilège
pour faire valoir une ferme de quatre char-
rues , pourvu qu'elle foit du patrimoine de
leiir
CLE
leur bénéfice , ou fi c'eft un bien de famille
qui leur fbit échu en ligne dire£le.
Les curés peuvent même prendre à ferme
les dîmes de leur paroiiFe , fans être pour
cela fujets à la taille j mais leurs fermiers
font taillables. Voye^ les réglemens rapportés
dans le code des tailles.
5°. Ils font exempts des charges per/bn-
nelles , telles que tutelle , curatelle , colleâie
des impôts , guet & garde dans les villes.
\h font auflî exempts du logement des gens
de guerre , fi ce n'efl: en cas d'urgente né-
cefiité. Ils font pareillement exempts des
corvées perfonnelles ^ mais ils font tenus des
féelles , qu'ils peuvent faire par un tiers. Ils
ne font pas fujets à la bannalité du four ,
mais IÎ3 le font à celle du moulin & du pref-
foir. Voye^la Jurifprud. can. de de la Combe,
au mot privilège clérical , fecl. viij,
6^, En matière d'aides , ils font exempts
des nouveaux cinq fous pour les vendanges
& le vin du crû de leur bénéfice. Ils peuvent
vendre en gros le vin du crû de leur bénéfice
& de leur titre fàcerdotal , fans payer aucun
droit de gros & d'augmentation. Ils font
aufli exempts du droit de jauge & courtage ,
à la vente en gros & à l'entrée pour le vin
du crû de leur bénéfice ^ & du droit de
fubvention, à l'entrée du vin du crû de leur
bénéfice , pour ce qu'ils en confom nieront
dans leur maifon , pour leur provifion.
Voye:^ t ordonnance des aides j & les recueils
de règlement concernant cette matière.
Pour jouir de ces differens privilèges , il
faut que les clercs foient conftitués aux ordres
facrés , ou bénéficiers ou attachés actuelle-
ment au fervice de quelque églife.
Ils font déchus des privilèges de clérica-
ture , lorfqu'ils cefTent de vivre cléricalement ^
ce qui arrive lorlqu'ils portent des habits fé-
culiers , ou qu'ils exercent quelque fon£lion
Micompatible avec l'état eccléfiaftique.
Au refte il eft eflêntiel d'obfèrver que les
privilèges accordés aux eccléfiaftiques par
les papes , ne font point reconnus parmi
nous. Il en eft de même de ceux qui leur ont
été accordés par les empereurs romains , à
l'exception néanmoins des empereurs qui
étoient en même temps rois de France.
Les clercs font fujets du roi comme les
autres particuliers ^ ainfi leurs perfonnes &
les biens de leurs églifes , de même que
Tome VIII,
CLE 273
leurs biens propres & perfonnels , font fou-
mis aux loix du royaume , & doivent con-
tribuer aux charges perfonnelles & réelles ,
faufles privilèges qui leur -ont été accordés,
qu'ils tiennent tous de la libéralité de nos
rois, lefquels peuvent, de la même auto-
rité , étendre quelques-uns de ces privilèges ,
les interpréter , les reftreindre & modifier ,
même révoquer ceux qu'ils jugeroient à pro-
pos , lorfque le bien de l'état le demande.
A^oj^:{ d'Héricourt , loc. cit. le Diclionn. des
arrêts , au mot , clerc ; & la Jurifprud. can»
de de la Coinbe , au mot privilège. ( A )
§ CLERMONT en Auvergne , ( Géogr. )
Claromons , Claromontum , capitale de l'Au-
vergne i elle fut appellée urbs Arverna , oii
Arvernorum , cnfuite Auguftonemetum ou
Augufionomofum , à quatre lieues de Gergo-
ria , qu'affiégea Céfar : cette ville & la pro-
vince furent réunies à la couronne par Phi-
lippe Augufte , en 1212 , ayant étéconfif-
quées fur le comte Guy.
C'eft dans cette ville riche & peuplée que
Charles V tint les états du royaume en 1 374.
Le pape Urbain II y tint ||ii concile en 1 09 5 ,
où il publia la première croifade. Saint Auf-
tremoine , dont les reliques repofent à Mo-
fac , eft regardé comme l'apôtre du pays.
Depuis ce Saint jufqu'à M. de la Garlaye ,
on compte 93 évêques, dont 25 font recon-
nus pour fàints.
Etienne Aubert , Limofin , évêque de
Clermont en 1341 , devint pape fous le nom
d'Innocent IV , en 1352 ^ les cardinaux Char-
les de Bourbon , Duprat & de la Rochefou-
cault , ont auflî fait honneur au fiege épifoo-
pal de Clermont ; mais fur-tout le célèbre
J. B. Mafllllou de l'oratoire , mort en 1742.
Clermont fe glorifie d'avoir été le berceau
de Savaron , d'Audigier , de Blaife Pafcal
& de Domat.
Il y a dans cette ville trois collégiales , un
beau collège , une fociété littéraire établie
en 1741 , & l'abbaye de Saint- Alyre , mile
en commende en 1764.
On y remarque une fontaine , dont lei
eaux qui fè pétrifient ont formé à vingt pat
de la foMrce , un petit pont de pierre incrus-
tée. Long. 20. 45. 7. lat. 45. 46. 4S'{C)
Clermont en Argone , ( Géog. mod."^
petite ville de France , avec titre de comté,
en Verdunois. Long. 22 , 44 , 20 j lat^ 49, 64,
Mm
174 CLE
§ ClERMONT en Beauvoifis^ (Géogr.)
ville fur la Brèche , à cinq lieues de Beau-
vais & cinq de Senlis ^ c'eft la capitale d'un
comté que Philippe Augufte acquit en 1219.
Saint Louis le donna à fon fils Robert, tige
de la maifon de Bourbon , laquelle a pof-
{iàé ce comté jufqu'au connétable de Bour-
bon , dont les biens furent confifqués ôc réu-
nis à la couronne.
La dévotion à Saint Jengou ou Gengoux
( Gengulfus ), patron des bons maris, attire
à Clermont yn grand concours de peuple , au
mois, de mai.
Près de Clermont , eft Worty, érigé en du-
ché-pairie , fous le nom de Fif{-James , en
1710, en faveur de Jacques , duc de Ber-
wick. Long. 20. 4. 15. lat, 49. 22. 45. {C)
Clermont, {Géog.mod.) petite ville de
France , au bas Languedoc , entre Lodeve
& Pczenas. Il y a encore une ville de ce
nom en France, dans TAgénois.
CLÉROMANCIE , f. f. efpece de divi-
nation qui fe faifoit par le jet des dés ou des
offelets , dont on confidéroit les points ou
les marques , pou^en inférer des chofes in-
connues ou cachées. Voye^ DIVINATION.
Ce mot vient du grec kk^os , fort , & de
fjLavnicc , divination.
On trouve des traces de la cléromancie
dans le chapitre premier du prophète Jonas ,
où pendant la tempête qui s'étoit élevée , le
pilote du vailTeau & {qs compagnons , pen-
fant que quelque paifager leur avoit par {es
crimes attiré cet orage , jetèrent les dés , &
confulterent le fort pour connoître qui ce
pouvoit être j & le fort tomba fiir Jonas ,
ajoute le texte fàcré : « Et dixit vir ad col-
» legam fuum : venite , & mittamus fortes ,
» & fciamus quare hoc malum fit nobis. Et
» miferunt fortes ^ & ceciditfors fuper Jo-
w nam. Jon. cap.j^ 7. » C'étoient des païens
qui pratiquoient cette fuperftition ^ mais
Dieu la permettoit pour punir la défobéif-
fance de fon prophète , & lui faire accom-
plir fes delTeins fur Ninive.
: Il y avoit à Bura , ville d'Achaïe , un tem-
ple & un oracle célèbre d'Hercule. Ceux qui
confultoient l'oracle après avoir fait leurs
prières à l'idole , jetoieut quatre dés ;, & fé-
lon les points ou nombres qu'on avoit ame-
nés , le prêtre rendoit fa réponfe. D'autres
oracles fameux étoient connus fous le nom
CLE
Ae forts , tels que ceux de Prenefte , d'An-'
tium , de Lycie , de Delos , &c. Voye^i
Sorts. (G)
CLERVAL, (Géog. mo^.^petite ville de
France en Franche-Comté , fur le Doux,
Long.i^, 32^ /at.46, 35.
CLERVAUX , voyei Clairvaux.
CLERY , ( Géog. mod. ) ville de France
dans rOrléanois , iiir la rivière de Loire.
CLETJiRA , ( Botanique. ) cet arbriifeaii
n'a point de nom particulier dans les autres
langues.
Caractère générique.
La fleur confifte en un calice de cinq feuil-
les ovales , creufées en cuilleron , en dix éta-
mines environnées de cinq pétales , alongés ,
& en un piftil compofé d'un embryon ar-
rondi , & d'un ftyle terminé par un iîigmate
divifé en quatre. L'embryon devient une
capfiile oblongue à trois loges , remplie de
petites femences anguleufes.
On ne connoît encore qu'une eipece de ce
genre.
Clethra , Gron. FI. Virg.
Le clethra eft indigène de la Virginie &
de la Caroline, où il s'élève à la hauteur de
huit ou dix pies j il y croît dans les terres
humides , &le long des ruiifeaux dont il fait
l'ornement. Il faudroit le placer dans des po-
fitions femblables , pour le voir végéter aulîî
vigoureufement dans nos jardins ^ mais du
moins qu'on lui choifiife les parties les plus
huinides & les plus fertiles des bofquets d'été ,
dont il fera une des plus belles décorations j
fes rameaux font droits & convergens , pres-
que tous termines par de longs épis de fleurs
blanches , d'une odeur très-gracieufe , qui
s'épanouifTent dès le commencement de juil-
let , & fe fùccedeut quelquefois jufqu'en fep-
fembre. Ses feuille's font oblongues , allez
fermes , relevées en deflus de nervures rap-
prochées & faillantes, & placées alternati-
vement fur les branches ^ celles-ci font re-
couvertes d'une écorce mince & rougeâtre ;
comme elles font très-caifantes , il faut met-
tre ces arbuftes à l'abri des grands vents.
Du refte , ils réfiftent fort bien au froid de
nos climats feptentrionaux , lorfqu'ils ont ac-
quis une certaine force ^ feulement il con-
vient de plaquer de la mouife à leur pié
pendant les chaleurs, pour prévenir le deifé-
chement de la terre j &: de la menue litière ,
CLE
tîurant le temps froid , pour parera la gelée.
Si l'hiver étoit rigoureux, on pourroit les en-
vironner de pailIaiFons ou de grandes bran-
ches de pin , dont on les couvriroit en ber-
ceau.
Ce charmant arbufte fe multiplie de mar-
cottes , qu'on doit faire en avril ou en juillet,
fuivant la méthode détaillée aux articles
Alaterne & Clématite : la féconde
a'itomne, /i elles ont été bien foig-nées , elles
feront {îiiiifamment pourvues de racines -^
maison fera mieux d'attendre jufqu'à latroi-
fîeme , pour les enlever;, alors on pourra les
planter à demeure , ou les cultiver encore
<îuelque temps en pépinière , dans quelque
bonne partie d'un potager fermé.
En vain j'ai eflayé jufqu'à préfènt d'en
faire des boutures ;, celles même que j'ai mi-
iès iiir couche, n'ont pas réufli ^ mais on ne
peut rien établir fur un petit nombre de
faits, & il ne faut quelquefois, pour obtenir
un bonfaccès , qu'une attention iimple qu'on
apprendra en variant les expériences , félon
les faifons , les terres, les pofitions,les foins,
le choix des ramicaux , leur coupe , les abris ,
^c. Une feule de ces circonftances eft fouvent
<lécifive.
J'ai aufîî tenté de me fêrvir de la graine ,
■mais celle que j'ai femée avoit été recueillie
en France j apparemment qu'elle n'a voit pas
mûri j car vue à la loupe , elle paroiifoit
inaigre & ridée j aufli n'a-t-elle pas germé :
il peut arriver cependant que cet arbufte
mieux naturalifé dans notre climat, & profi-
tant d'une température favorable, nous donne
m\ jour de bonnes fèmences : je n'en ai pas
encore employé de celles qui fe recueillent
en Angleterre , ni de celles qu'on y apporte
d'Amérique. (M. te baron de Tschovdj.)
CLETTENBERG , ( Géo^. mod. ) ville
d'Allemagne dans le comté de Hohenftein ,
au roi de PrulTe.
CLETTGOW , ( Ge'og, mod. ) petit
pays d'Allemagne en Suabe ^ près de la forêt
Noire.
CLEVELAND ^ (G^g. mo^.) petit pays
d'Angleterre avec titre de comté , dans la
province d'Yorck.
CLEVES , ( Ge'og. mod. ) ville alTez
Igrande d'Allemagne au cercle de Weftpha-
iie , capitale du duché de même nom , re-
C L E 275
marquable par fes eaux minérales. Zo/i. 23,
45 hj^^' 51 9 48.
CleVES ( duché de ) , Ge'og. mod. J^ays
d'Allemagne au cercle de Weftphalie , arrofé
par le Rhin , appartenant au roi de Pruiîé.
CLIBANAIRES, f. m. ^\.{Hifî. anc.)
foidats romains ainfi nommés , dit Saumaife
dans (es notes fur Lampride , du mot latia
clibanum , qui fignifioit une cuirajfe de fer ,
&: venoit de clibanus , c'elt-à-dire four ;
parce que ces fortes de cuirailes étoient con-
caves en dedans & convexes dans leur partie
extérieure ^ ce qui avoit quelque analogie ,
quoiqu 'éloignée , avec la calotte ou le deflus
d'un four. (G)
CLICH , {y4rt milit. Armes) c'eft le
nom d'un fabre à l'ufage des Turcs.
CLIENT , f. m. ( Hijt. anc. ) parmi les
romaine, c'étoit un citoyen qui fe mettoit
fous la proteftion de quelque autre citoyen
de marque , lequel par cette relation s'ap-
pelloit fon patron , patronus. V. PatRON.
Le patron affiftoit le client dans fes be-
foins , & le client donnoit fon fufFrage au
patron quand il briguoit quelque magiftra-
ture ou pour lui-même , ou pour fes amis.
Les cliens dévoient relpeéèer leur patron ,
& le patron de fon côté devoit à iës cliens fa
proted:ion &. fon fècours. Ce droit de patro-
nage fut inftitué par Romulus, dans le defléin
de réunir les riches & les pauvres ;, de façon
que \^% uns fufîént exempts de mépris , & X^i
autres de l'envie. Mais la condition des cliens
devint peu-à-peu une efpece d'efclavage
adouci.
Cette coutume s'étendit enfuite plus loin ;
non-feulement les familles, mais les villes &
\q% provinces entières , même hors de l'Ita-
lie, la fuivirent : la Sicile, par exemple, fe
mit fous la proteûion de Marcellus.
Lazius & Budée rapportent l'origine des
fiefs aux patrons & cliens del'ancieniie Rome^
mais il y a une grande différence entre la re-
latioji du vaffal à k)n feigneur , & celle du
client à fon patron. V. Vassal , Seigneur ,
Ç^c. Car les cliens , outre le refpcâ: qu'ils
dévoient rendre , & les fuifrages qu'ils dé-
voient donner aux patrons , étoient obligés
de \qs aider dans toutes leurs affaires , &
même de payer leur rançon , s'ils étoient
faits prifonniers à la guerre , en cas qu'ils
n'euffènt . pas affez de bien pour la payer
Mm 2
i-jG C L I
eux-mêmes. V. Fief 6'MouvANCE. Dict,
de Trév. & Chambers. {G)
: Cliens , {Jurifpr.) On donnoit autrefois
ce nom aux vaflaux par rapport à leurs fei-
gneurs dominans , fous laprotedlion defquels
ils étoient.
En termes de pratique , client fe dit de
celui qui a chargé un avocat ou un procu-
reur de la défenfè d'une affaire , ou qui va
Solliciter fon juge.
II eft défendu aux avocats & procureurs
de faire avec leurs cliens aucune padèion pour
avoir une portion du bénéfice qui pourra re-
venir du gani d'un procès. V. Pacte de quota
litis.
Ils ne peuvent aufîi recevoir de leurs cliens
aucune donation entre-vifs , pendant le cours
des caufes & procès dont ils font chargés pour
eux. V. Ricard , part. J , cà, ii;, fecl. 9 , n.
504 , & Lemaître fur Paris, titre des dona-
tions , câ, j , fecl, I. (A)
CLIGNEMENT , f. m. {Ahat. Phijiol.)
froncement des deux paupières qu'on tient
volontairement à demi-rapprochées l'une de
l'autre , fbit pour regarder un objet plus fixe-
ment en tenant un œil fermé , ibit pour em-
pêcher l'œil à demi-fermé qui regarde , d'ê-
tre h\QÏ![é par un très - grand nombre de
rayons..
Cette aif^ion de clignement s'exécute parla
contraftion volontaire de toutes les portions
du'mufcle orbiculaire, dont je fuppofè ici
l'attache , la diftribution &. la terminaifon
connues ^ car fes fibres demi-circulaires fe
diftribuant aux deux paupières jufqu'à leur
cartilage , peuvent les fernier à moitié ou
entièrement. Dans cette aâ:ion les fourcils
fe bailTent aufll avec la paupière fupérieure ,
parce que diverfes portions du mufcle orbi-
culaire font adhérentes à la peau , & fe por-
tent depuis le fourcil jufqu'au haut de la
joue. Voilà la raifon des plis de toutes ces
parties qui paroiffent dans le clignement y &
qui font différens félon la différence de la
direftion des fibres du mufcle orbiculaire.
On en voit comme rayonnes autour de l'an-
gle temporal ^ il y en a peu entr^ le fourcil
& la paupière fupérieure. Il y en a plufieurs
au deffousde la paupière inférieure, lefquels
defcendent très-ol^liquement de devant en
arrière.
On cligne les paupières pourregarder un
C L I
objet éloigné , en comprimant l'hénniphere
antérieur du globe de l'œil , & l'on dilate
les paupières pour voir un objet de près ,
non pas que ces deux états des paupières
foient abfolument néceffaires pour donner
au globe les figures qu'il doit prendre dans
les deux cas propofés. Ces figures du globe
ont d'autres caufes plus puiffantcs ^ & l'on
peut , fans déranger leurs effets , cligner les
paupières dans l'un & l'autre cas : on le fait
effedivement toutes les fois qu'on double
d'efforts pour mieux voir , foit de loin ,
foit de près. Mais cette efpece de clignement
n'a aucun rapport à la figure du globe ^ tout
fon méchanifme aboutit à rétrécir les pau-
pières , pour empêcher les rayons de tomber
en trop grande quantité fur la furface polie
de la cornée , d'où ils fe réfléchiffent , s'é-
parpillent à la ronde , & nuifent à la pureté
des rayons qui entrent dans l'œil : c'eft pour-
quoi machinalement nous clignons les yeux,
afin de ne laiffer prefque que le paffage du
cône de lumière qui porte l'image , & afin
que cette image ne foit point troublée , fa-
lie , fi l'on peut le dire , par des rayons
étrangers. C'eft ainfi qu'on voit mieux un
objet par un tuyau , qu'on ne le voit en plein
air.
Quoique les paupières , iûivant la remar-
que judicieufe de M. Lecat , fervent comme
l'iris à conlèrver le cône lumineux qui entre
dans l'œil , plus pur & à rendre les images
plus nettes , cependant fi on regarde une
chandelle en clignant & en approchant les
paupières fi près l'une de l'autre , qu'elles
ferment en partie la prunelle , & qu'elles
interceptent une portion du corps lumineux
qui y doit entrer , alors on ne voit plus la
lumière nettement , mais avec de grands
traits lumineux dirigés vers le haut & le bas
de cette lumière , & ces grands traits font
les portions du cône réfléchies par chaque
paupière ^ mais les paupières ne troublent
ainfi la vue que quand on les ferme exprès ,
& encore l'objet n'a ces grands traits de lu-
mière qu'en deffus & en deffous , parce que
les paupières dans cet état de clignement in-
terceptent les rayons du cône lumineux de
la chandelle. La vue eft un fens qui fe trompe
lui-même , & qu'on trompe perpétuelle-
ment. Article de M. le chevalier DE Jau^
COURTi
C L I
CLIMACTÉRIQUE (Année), adj.
Divination , année critique ou période de
l'âge de l'homme , dans laquelle les aftro
logues prétendent qu'il fè fait dans le corps
une altération confidérable qui conduit à des
maladies , à la mort , ou qui iîgnale cette
année par des accidens jftineftes.
Nous ajoutons cette dernière ciauiè , parce
que Evelius qui a fait un volume entier /bus
le titre de annus climaclericus , y décrit la
perte qu'il fit par le feu qui prit à fon obfer-
vatoire , & que cet accident lui arriva dans
ià plus grande climaclérique.
Ce mot vient du grec K?jfxetK7îf , ou kxi-
fjMKrn§tmi^ dérivé de kkiiax^^ degré on échelle;
parce qu'on monte de fept en fept ou de
neuf en neuf ans , pour arriver à l'année qui
s'appelle climaclérique,
Ainfi la première année climaclérique de
la vie de l'homme , c'eft , félon quelques-
uns , la lèptieme : les autres font des multi-
ples de celle-ci^ favoir 14, 21 , 28 , 35 ,
42 , 49 , 56 , 63 , 70 , 77 , 84. Mais_ les
années 63 & 84 font nommées en particu-
lier grandes climaclériques , & l'on croit que
le danger de mort y eiî; beaucoup plus grand
que dans les autres.
Selon d'autres auteurs , l'année climaclé-
rique fe compte de neuf en neuf ^ c'eft pour
cela , difent-ils que la foixante-tit)ifieme
&la quatre^ vingt-unième font les plus dan-
gereufes , parce que dans l'une le nombre de
fept , & dans l'autre le nombre de neuf, fe
trouvent répétés neuf fois.
Cette opinion eft fort ancienne : Aulu-
gelle l'attribue aux Chaldéens , qui pouvoient
l'avoir reçue de Pythagore , fi peut-être dans
{qs voyages ce philofophe ne l'emprunta pas
d'eux ; car on fait que fa philofophie étoit
fondée en grande partie fur les rapports &
les propriétés des nombres , & qu'il attri-
buoit fur-tout au nombre fept une vertu
particulière.
Marfile Ficin penfe en avoir trouvé le fon-
dement , en dilànt qu'il a été afllgné à cha-
que planète une année pour dominer fur le
corps de l'homme chacune à fbn tour ^ &
que comme de toutes les planètes Saturne
eft la jjlus malfaifante , toutes les ièptiemes
années qui lui appartiennent , doivent être
par cette raifbn très-dangereufes , & fiir-
lout les 49 , 56 & 63 années où l'on eftrféja
C L I 277
avancé fur l'âge : mais peut-être eut- ou fort
embarrafié Marfile Ficin , en lui demandant
pourquoi les planètes dominoicnt fur le corps
de l'homme , & pourquoi les influences de
Saturne étoient plus fuucftes que celles des
autres planètes.
Cependant des hommes fort éclairés ont
eu foi à ces influences. Augufte , fi l'on en
croît Suétone , fe réjouiflbit d'avoir paAie
fans danger fà grande climaclérique , c'eft-
à-dire fa foixante & troifieme année , car
il mourut âgé de 76 ans. Quelques-uns ont
prétendu que \q^ années climaâériques
étoient aufli fatales au corps politique ^ &
on pourroit en convenir , s'il étoit prouvé
qu'elles le font au corps naturel.
On en étoit afiez perfuadé il n'y a pas
deux fiecles , c'eft-à-dire du temps de la
ligue j car M. de Thou & Mézerai racon-
tent que Jean Bodin , fi connu par fa démo-
nomanie, &qui étoit avocat du roi àLaon,
voulant faire déclarer cette ville en faveur
de la ligue & contre Heiu-i III , fit un dif-
cours aux habitans aifemblés , où il s'atta-
cha à lever leurs fcrupules j & après s'être
déchaîné contre le roi qu'il ofa traiter de
traître & d'hypocrite , « il tira , dit M. de
Thou , des circonftances préfentes un pré-
fage alFez funefte à la fuccefiîon à la cou-
ronne j car il dit que l'année foixante & troi-
fieme de l'homme étoit ibn année climaâé-
rique , & ne manquoit guère de lui être fu-
nefte '•) qu 'ainlî , comme on comptoit parmi
nous foixante & trois rois depuis Pharamond
jufqu'à Henri III, il ièmbleit que ce prince
dut être fatal à la France , & que ce fut par
lui que la couronne dût fortir de fa maifon. »
De Thou , Hift. l, XCIV , Mézerai dit à-
peu-près la même chofè dans fon abrégé
chronologique ^ fous l'an 1589. De pareils
raifonnemens ne furprenuent pas de la part
de Bodin , H. les impreflîons qu'ils firent ne
doivent pas paroître étranges dans un fiecle
infatué de l'aftrologie judiciaire.
Au refte plufieurs auteurs célèbres ont
écrit fiir Vannée climaclérique j entr 'autres
Platon , Cicéron , Macrobe , Aulugelle ,
auxquels on peut ajouter faint Auguftin ,
fàint Ambroiiè : le vénérable Bede , Boece ,
ùc. & parmi les modernes , Argol , Magir ,
& Saumaife , de annis cHmaclericis. (G.)
CLIMAT , f. m. ( Géogr, ) portion ou
278 CL I
zone de la fiirface de la terre , terminée par
deux cercles parallèles à l'équateur, & d'une
largeur telle que le plus long jour dans le pa-
rallèle le plus proche du pôle , furpallè d'une
certaine quantité , par exemple, d'une demi-
heure , le plus long jour dans le parallèle le
plus proche de l'équateur. Voye:^ Terre ,
Parallèle , &c.
Les climats fè prennent donc depuis l'é-
quateur jufqu'aux pôles , &. font comme
autant de bandes ou de zones parallèles à
l'équateur : mais il y a à la rigueur pluficurs
climats dans la largeur de chaque zone. Un
climat n'elt différent de celui qui ell le plus
proche de lui , qu'en ce que le plus grand jour
d'été cft plus long ou plus court d'une demi-
heure dans l'un que dans l'autre. Chambers,
L'intervalle du premier climat eft de 8^
30' , & celui du dernier n'a pas plus de ^.
Pour concevoir la raifon de cette inégalité ,
-qui procède d'une propriété de la fphere , il
faut s'imaginer que dans la fphere droite la
moitié du tropique du cancer , qui eft au-
defTous de l'horizon, eft divifée en quarante-
huit parties égales , chaque partie étant de
3<l 45' , qui valent un quart d'heure : de plus ,
•qu'il y a une de ces parties vers l'orient , &.
une vers l'occident, les plus proches del'ho-
, qui toutes deux enfemble font une
rizon
demi-heure de temps , qui répond à l'inter-
valle d'un climat. Cela pofé , on voit xjue la
•raifon de l'inégalité des climats procède de
la fc(ftion plus ou moins oblique du tropique
par l'horizon , félon les différentes élévations
du pôle , qui font que l'horizon coupant
inoins obliquement le tropique aux parties
«gales de 3^ 45' prifes du côté d'orient &
d'occident proche fhorizon immobile, il en
réfulte une plus grande différence des hau-
teurs du pôle , que lorfque le tropique eft
.coupé plus obliquement par fhorizon aux
mêmes points de jd 5' Aiufi cette diffé-
rence des hauteurs du pôle , qui corref-
pond à la demi-heure des premiers r//>7z<3r5,
étant plus grande vers l'équateur que vers
les cercles polaires où font \q^ derniers
climats , cela rend leur intervalle très-jné-
gal , & bien plus grand vers l'équateur que
vers les pôles.
Comme les climats commencent à l'équa-
teur , le premier climat dans fon commence-
ment a, pai- cette raifon , préciféraem douze
C LI
heures de jour à fon plus grand jour; & à fa
fin il a douze heures & demie à fon plus
grand jour. M. Formey.
Le fécond climat qui commence où le
premier finit , a douze heures & demie de
jour à ion plus grand jour , & à fà fin il a
treize heures de jour à fon plus grand jour ^
& ainii des autres climats d'heures qui vont
jufqu'au cercle polaire où fe termine ce que
les géographes appellent les climats d'heures ,
& où commencent les climats des mois.
f^oyei Heure.
Comme les climats d'heures font des ef-
paces compris entre deux cercles parallèles
à l'équateur , qui ont leur plus grand jour
plus long d'une demi-heure dans leur fin que
dans leur cominencement j de même les cli-
mats de mois font des efpaces termiinés par
deux cercles parallèles au cercle polaire , fi-
tués par-delà ce cercle , & dans lefquels le
plus grand jour eft plus long d'un mois ou
de trente jours à la fin qu'au commence-
ment, f^oyei Mois. Chambers.
Les anciens ne donnoient le nom à& climat
qu'aux enchoits de la terre qu'ils croyoient
iiabitabies. Ils eftimoient qu'une partie delà
zone torride vers l'équateur , & une partie
de la zone tempérée par-delà le 50^^ de la-
titude, ^étoient inhabitables, &:ils n'avoient
que fèpt climats. Ils pofoient le commence-
ment du premier 7kl^^ 41' de latitude , où
le plus long jour d'été eft de douze heures
trois quarts ^ & la fin du feptieme climat
alîoit vers les 50*1 de latitude , où le plus
long jour eft de 1(5 heures 20'. Pour mieux
diftinguer leurs climats , ils en faifoient
paifer le milieu par les lieux les plus confi-
dérables du vieux continent : favoir , le pre-
mier par Meroé en Ethiopie , le fécond par
Sienne en Egypte , le troifieme par Alexan-
drie aufîi en Egypte , le quatrième par fîle
de Rhodes , le cinquième par Rome , le
fixieme par le Pont-Euxin , & le feptieme
&: dernier par l'embouchure du Borifthene.
A ces fèpt climats on en ajouta depuis encore
deux autres j favoir le huitième , pallantpar
les monts Riphées dans la Sarmatie afiati-
que , & le neuvième par le Tanaïs. Les an-
ciens comme les modernes , ont encore di-
vifé la terre en de plus petits efpaces , que
l'on nomme parallèles des climats , afin de
\ç.% diftinguer des autres parallèles de l'équa-
C Lï
teur. Ces parallèles ne font que des demi-
climats , desquels l'efpace ne contient qu'un
quart-d'heure de variation dans les plus longs
jours d'été de chacun de ces parallèles.
Les modernes , qui ont voyagé bien plus
avant vers les pôles , ont mis trente climats
de chaque côté ^ & quelques-uns d'entr'eux
ont fait les différences d'un quart d'heure
ièulement , au lieu d'une demi-heure. M.
Formey,
Lorsqu'on détermine les climats^, on n'a
point égard ordinairement à la réfraction.
Voyei Réfraction.
On donne vulgairement k nom de cli-
mat à une terre différente d'une autre , par
rapport aux fa ifons, aux qualités de la terre,
ou même aux peuples qui y habitent , fans
aucune relation aux plus grands jours d'été.
Abulfeda , auteur arabe , diftingue la pre-
mière eipece de ces climats par le nom de
climat réel , & l'autre par celui de climat
apparent.
On compte ordinairement vingt-quatre
climats de demi-heure & douze de demi-
mois. Chacun des e^aces de ces derniers
comprend quinze jours de différence entre
les plus longs jours d'été de l'un & de l'autre
de ces c///7z^« ; car fous les cercles polaires,
le plus long jour d'été eft de vingt- quatre
heures ou d'un jour aftronomique^ & le
plus long jour fous les pôles contient
1 80 jours aftronomiques , qui font fi» mois :
de forte qu'après avoir établi la différence
de ces climats de la quantité de quinze jours,
il eft évident qu'il en faudra douze depuis
les cercles polaires jufqu'aux pôles ^ le pre-
mier defquels commencera aux cercles po-
laires , & le dernier finira aux pôles. Et pour
diftinguer l'étendue de ces douze climats ,
il faut encore imaginer douze cercles pa-
rallèles à- l'équateur par le commencement
& la fin de chacun de ces intervalles ^ le
premier defquels fera le cercle polaire , oîi
eft le commencement du premier de ces
■climxits ; & le dernier fera éloigné au pôle
de 2<l 59' qui déterminera le commence-
ment du dernier climat , dont le pôle fora
la fin. Les tables foivantes feront connoître
l'étendue de tous les climats^ avec leurs
degrés de latitude, & l'iutervalle compris
cutr'eux. M. Formey,
1
$>■■
C L I lyp
Table des climats de demi-heure.
il " "
Climats.
Leur
nombre.
9
10
II
li
j6
17
18
19
20
21
22
2-4
12
0
12
30
M
0
15
30
H
G
14
50
15
0
15
30
16
C
16 30
17 G
17 30
18 0
r8
30
.19
0
19
30
2G
0
20
30
21
G
21
3P
22
0
22
30
Latitude.
24
IC
30
46
36
8
41
21
45
i9
48
S9
57 57
54 ^8
56 36
58 25
59 57
61 16
61 24
63 20
64 8
62 24
65 20
65 46
66 64
23 o
23 30
24 o
66 19
66 27
66 30
Intervalle
des climats,
M.
O O
8 34
8 9
7 17
6 36
5 41
4 55
4 8
3 30
2 58
2 31
2 8
I 49
I
3^
I
19
I
8,
0
f^
0
48
0
40
0
3^
0
16
t
0
20.
13
8
I ~~r — r ^ '-"^ yy_ ^ ) (I
T/2i5/e û?e^ climats des demi-mois.
1
i
Climats.
Lear no/Tzl^.
Plus longs
jours.
Mois. Jours.
I
o
15
10
II
12
2
0
2
15
3
0
■*
)
15
4
0
4_
15
15
o
Latitude.
D.
M.
66 30
66 44
67 20
68 23
69 48
71 34
73 37
75 57
78 30
81 14
Intervalle
des climats.
D. M.
O O
0 14
G 36
1 3
I
if
I
46
2
3
2
57
2
56
2
44
i
84
5
i 57
87
I
2 56
90
0
2 9
I
m •-dïs»-^-»4&—»i9Îîw* «-*<&»--" -< ''irï^^^^â^^-
iSo C L I
Il ne faut pas croire au refte que la tem-
pérature (bit exactement la même dans les
pays fitués fous le même climat : car une
infinité de circonftances , comme les vents ,
les volcans , le voifinage de la mer , la po-
iîtion des montagnes, £e compliquent avec
l'aéHon du foleil , & rendent fouvent la tem-
pérature très- différente dans des lieux placés
fous le même parallèle.
Il en eft de même des climats placés des
doux côtés de l'équateur à diftances égales :
de plus , la chaleur même du foleil eft dif-
férente dans ces climats. Ils font plus près
du foleil que nous dans leur été , & plus
loin dans leur hiver. Voye^ Chaleur.
L'illuftre auteur de Vefprit des loix exa-
mine dans le XI y livre de iJon excellent
ouvrage , l'influence du climat fur les mœurs ,
le caraâere , & les loix des peuples.
Après les détails phyfiques fur les effets du
froid & du chaud , il commence par ex-
pliquer la contradiâion qui fe trouve dans
le caraèlere de certains peuples. La chaleur ,
dj^-il , donne d'un côté un corps foible, &
de l'autre une imagination vive : voilà pour-
quoi les Indiens ont à certains égards tant
de courage , & à d'autres tant de foibleffc.
La foibleffe du corps rend naturellement pa-
reffeux ;, de-là l'attachement de ces peuples
à leurs ufages : cette foibleffe portant à fuir
les travaux même néceffaires , les légiflateurs
iàges doivent au contraire par leurs loix en-
courager le travail, au lieu de favorifer l'in-
dolence. C'eft à la dévotion fpécuiaîive des
pays chauds qu'on doit la naiffance du Der-
vichifme. L'ivrognerie eft un vice des pays
froids. La loi de Mahomet en défendant aux
Arabes de boire du vin , étoit en cela con-
forme à leurs coutumes. Les loix contre les
maladies qui ne font pas particulières à un cli-
mat , mais qui y font tranfplantées , comme
la pefte , la lèpre , la vérole , &c. ne fau-
roient être trop féveres. Le fuicide en An-
gleterre eft l'effet d'une maladie ^ & fi les
loix civiles de quelques pays peuvent avoir
eu des raifons pour flétrir le fuicide , du
moins en Angleterre on n'a dû le regarder
que comme un effet de la démence ;, dans
ce même pays oii le peuple fe dégoûte fi
aifément de la vie , on fent bien que le gou-
vernement d'un feul eût été pernicieux, &
que les loix doivent gouverner plutôt que les
C L T
hommes. Ce caraélere d'impatience & d'in-
quiétude eft comme le gage de leur liberté.
Nos pères , \qs anciens Germains qui habi-
toient un climat froid , avoient des loix très-
peu féveres fur la pudeur des femmes. Ce
fut autre chofè quand ils fe virent tranfjior-
tés dans le climat chaud d'Efpagne. Chez un
peuple féroce comme les Japonois , les loix
ne f auroient être trop dures , & le font en
effet : il en eft & il en doit être autrement
chez des peuples d'un caraéèere doux ,
comme les Indiens.
Voilà en peu de mots ce que dit l'auteur
fur les effets du climat , & dont quelques
écrivains lui ont fait des reproches, comme
s'il faifoit dépendre tout du climat ; tandis
qu'au contraire fbn ouvrage n'eft deftiné qu'à
expofèr la multitude prefque infinie de caufcs
qui influent fiir les loix & fur le caraâere des
peuples , & dont on ne peut nier que le
climat ne foit une des principales. C'eft-là
l'idée qu'on doit avoir de ce qu'on lit à ce
fujet dans cet ouvrage, dans lequel il peut
s'être gliffé quelques propofitions qui ont be-
foin d'être éclaircies , mais où l'on voit bril-
ler le philofophe profond , le citoyen ver-
tueux. Notre nation lui a donné les applau-
diffemens qu'il méritoit, & les étrangers
le regardent comme un ouvrage qui fait
honneur à la France. { O )
Climat, ( Méd. ) Les médecins ne
confîderent les climats que par la tempéra-
ture ou le degré de chaleur qui leur eft pro-
pre ; climat , dans ce fens , eft même exac-
tement fynonyme à température ; ce mot eft
pris par conféquent dans un fens beaucoup
moins vafte qi-e celui de région , pays ou
contrée , par lequel les médecins expriment
la fomme de toutes les caufes phyfiques gé-
nérales ou communes , qiîi peuvent agir fur
la fanté des habitans de chaque pays 3 favoir
la nature de l'air, celle de l'eau, du fol,
des alimens , &c. Voyei Eau , Sol , Ré-
gime. Toutes ces caufes font ordinairement
fi confufément combinées avec la tempéra-
ture des diverfes contrées, qu'il eft aftèz dif-
ficile de faifir quelques phénomènes de l'é*
cohomie animale , qui ne dépendent uni-
quement que de cette dernière caufè. Ce
ne fera pas cependant une inexactitude blâ-
mable , que de lui attribuer certains effets ,
dont elle eft vraifemblablement la caufe
prédominante.
c L r
prédominante. Aiiilî on peut avancer avec
beaucoup de fondement , que c'eft du cli-
mat que dépendent les différences des peu-
ples , prifès de la complexion générale ou
dominante de chacun , de fa taille , de ià
vigueur , de la couleur de fa peau & de lès
cheveux , de la durée de ia vie , de fa pré-
cocité plus ou moins grande relativement à
l'aptitude de la génération , de fa vieillelTe
plus ou moins retardée , & enfin de ks ma-
ladies propres ou endémiques.
On ne fauroit contefter l'influence du cli-
mat fur le phyfique des pallions , des goûts ,
des mœurs. Les plus anciens médecins
avoient obfervé cette influence j & les con-
fidérations de cette clafTe font des objets fi
familiers aux médecins , que fi l'auteur de
Vefprit des loix avoit pu fuppofer que leur
dodlrine fur cette matière filtt allez répan-
due , il auroit pu fe contenter d'alFurer que
les loix , les ufages , le genre de gouverne-
ment de chaque peuple, avoient un rapport
néceflkire avec fes paflîons , fes goûts , fes
mœurs , fans fe donner la peine de déter-
miner le rapport de ces panions , de ces
goûts , de ces mœurs , avec fa conftitution
corporelle dominante & l'influence du cli-
mat. Les lumières fupérieures de l'auteur
l'ont pourtant fauve de l'écueil prefque iné-
vitable, pour \q% talens même les plus diftin-
gués qui s'exercent fur des fujets qui leur
ibnt étrangers. La partie médicinale des ob-
fcrvations de l'auteur de ce livre fur les cli-
mats , mérite l'éloge des médecins. J^oye^
le XI y^ livre de fefprit des loix.
Mais en nous attachant principalement
aux affeôions corporelles de chaque nation
relativement au climat fous lequel elle vit ,
les principales queftions de médecine qui fe
préfentent fur cette matière , fe réduifent à
celles-ci-, i°. quel eft le tempérament, la
taille , la vigueur , & les autres qualités
corporelles particulières à chaque climat?
Uneréponfe détaillée appartient proprement
à l'hilloire naturelle de chaque pays. Voye^
les articles particuliers. On a cependant alTez
généralement obfervé que les habitans des
climats chauds étoient plus petits , plus fecs ,
plus vifs , plus gais , communément plus ipi-
rituels , moins laborieux , moins vigoureux^
qu'ils avoient la peau moins blanche ^ qu'ils
étoient plus précoces ^ qu'ils vieillilloiemplu-
Tome VUL
C L î igî
tôt, & qu'ils vivoient moins que les habi-
tans des climats froids ^ que les femmes des
pays chauds étoient moins fécondes que cel-
les des pays froids j que les premières étoient
plus jolies , fnais moins belles que les der-
nières ^ qu'une blonde étoit un objet rare
dans les climats chauds , comme une brune
dans les pays du nord , &c. que dans les
climats très-chauds l'amour étoit dans les
deux fexes un defir aveugle & impétueuï ,
une fon£bion corporelle , un appétit , un cri
de la nature , in furias ignefque ruunt ; que
dans les climats tempérés il étoit une pafiion
de l'ame, uneafFedîion réfléchie , méditée y
analyfée , fyftématique , un produit de l'é-
ducation \ & qu'enfin dans les climats gla-
cés, il étoit le fontiment tranquille d'un bs-
foin peu prelTant.
Au refte , tant de caufes phyfiques & mo*
raies coopèrent dans tout ceci , que les ob-
fervations que nous venons de faire , ne doi-
vent pas être regardées comme générales &
confiantes.
Par exemple , à Paris , fous un climat
beaucoup plus froid que celui des provinces
méridionales de France , les filles font plu-
tôt formées ( pubères ) que dans ces provin-
ces , & devancent fur-tout de beaucoup
celles des campagnes des environs de Paris ,
qui vivent fous la même température. Cette
prérogative de la capitale dépend de plu-
fieurs caufes fenfibles, entre lefquelles celle
qui me paroît la plus particulière , & par
conféquent la plus évidente , c'eft que Paris
eft une elpece de foyer de connoilTances
& de vices ; or que la précocité dont nous
parlons , la précocité corporelle , puilTe être
due à l'exercice précoce des facultés intel-
leduelles , c'eft une vérité d'expérience. Les
écoliers , les petites demoifelles bien élevées ,
fortent de l'enfance avant les enfans de la
campagne & du peuple \ c'eft un fait : mais
que cette adolefcence bative puilfe être hé-
réditaire , c'eft un corollaire de cette oblèr-
vation , que les fondions animales & l'ap-
titude à les exercer , fe perfeftionnent de
génération en génération jufqu'à un certain
terme , & que les dilpofitions corporelles &
les facultés de l'ame font cntr 'elles dans un
rapport qui peut être tranfmis par la géné-
ration , 6'c.
2°. Quel eft [le régime , la manière de
N 11
agi CLI
vivre la plus propre à chaque climat ? Cette
quefîion eft fort générale \ elle s'étend à l'u-
fàge des diverfës choies que les médecins
appellent non-naturelles ; l'air , les alimens ,
le fommeil , l'exercice , l'aéte vénérien , les
affections de l'ame.
Il eft fort inutile de donner des préceptes
iiir les incommodités de l'air ;, on peut s'en
rapporfer aux habitans de divers climats du
foin de fe prémunir contre l«s injures du
froid & du chaud : c'eft-là un de ces be-
ibins majeurs fur lefqueh les leçons de la
nature la plus brute font ordinairement fuf-
fifantes aux hommes , ou du moins que les
premiers progrès de la raifon apprennent à
ïiitisfaire.
En général on doit moins manger dans
les climats chauds que dans les <://>nflr.ç froids,
& les excès dans le manger font plus dan-
gereux dans les premiers que dans les der-
niers. Mais la faim fe fait auflî moins fcntir
lorsqu'on efl'uie de la chaleur , que lorf-
qn'on éprouve du froid : ainfi cette règle de
diète fera facilement obfèr\'ée.
La médecine rationnelle ou théorique qui
"fe trompe fi fouvent , a dit que la partie
aqueufe de notre iàng étant diffipée par la
chaleur dans les climats chauds , il falloit
réparer cette perte par la boiiîbn abondante
d'un liquide femblable ^ & que dans les cli-
mats froids , les liqueurs fpiritueufes étoient
plus falutaires. La médecine pratique ou
l'obfervation dit au contraire que les li-
queurs fpiritueufes , aromatiques , acides ,
les épiceries , Tail , l'oignon , en un m.ot les
alimens & les boifTons qui font diredem.ent
oppofés à la qualité relâchante & inaôive
( iners ) de l'eau , f^nt d'un excellent ufage
dans les climats chauds , & que la boiiîbn
de l'eau pure y eil très-pernicieufë j qu'elle
jette les corps accablés de chaleur dans un
abattement , une langueur , un épuifement
■qui les rend incapables des moindres fati-
gues 5 & qui peut devenir même dangereux
& mortel. Auffi les payfans de nos provin-
ces méridionales , occupés des travaux les
plus pénibles de la campagne pendant les
plus fortes chaleurs , fe gardent bien alors
de boire une feule goutte d'eau , boillbn
qu'ils fe penriettent pendant leurs travaux
de l'hiver. Les boilTons aqueufes tiedes , le
ihé , ik autres légères infulîons de quelques
CLI
feuifles de plantes aromatiques , fonr fort
ufitées dans les climats froids , où elies ne
font pas fort falutaires apparemment , mais
où elles ne font pas à beaucoup près fi dan-
gereufes qu'elles le feroient en Efpagne , où
le chocolat le plus aromatifé & par confé-
quent le plus échauffant , efî; d'un ufage aufïi
fréquent que le thé l'eft en Angleterre.
Quant aux liqueurs fortes que les peuples
des pays du nord boivent habituellement ,
il faudroit que la dofe journalière moyenne
d'un manœuvre ou d'un payfan de ces pays ,
fût bien forte pour être équivalente à quatre
ou cinq pintes de vin très-violent que tout
payfan languedocien ou provençal boit au
moins par jour , fur-tout en été.
Il ne feroit pas difficile de donner de très-
bonnes raifons de l'utilité du régime que
nous approuvons ^ mais l'obTervation fuffit ,
elle efl confiante. Il n'en efl pas moins vrai
que les excès de liqueurs fortes font plus per-
nicieux dans les climats chauds que dans
les climats froids j c'elt encore un fait. Les
crapuleux ne font que s'abrutir dans les
pays du nord ^ au lieu que dans nos colo-
nies de la zone torride , l'abus des liqueurs
fortes efl une des caufes qui fait le plus de
ravages parm.i les colons nouvellement trant
plantés.
Le jufle milieu pour les perfonnes qui ne
font pas obligées aux travaux pénibles , ine
paroît confifler en ceci : d'abord il faut laif-
fer à chaque peuple le fond de nourriture
auquel il efl accoutumé ;, le riz à l'oriental ,
le macaron à l'italien , le bœuf à l'anglois ,
&c. Nous ne fbmmes pas affez avancés fur
le bon & le mauvais effet de chaque ali-
ment , pour pouvoir prefcrire fur ce point
des règles de détail. On peut avancer ce-
pendant en général , que les fruits , les lé-
gumes , & les viandes légères , conviennent
mieux aux habitans des climats chauds , &
qu'on doit animer un peu ceux de ces ali-
mens qui ont befoin de quelque prépara-
tion , par l'addition des épiceries & de cer-
taines plantes aromatiques indigènes, comme
le thyn , le baume , l'hyfbpe , le bafilic ,
le fenouil , &c. Quant aux boifTons , on doit
faire ufàge aux repas pendant les grandes
chaleurs , des liqueurs vineufes légères ,
comme la petite bierre, les vins acidulés plus
ou moiijs trempés , les gros vins acerbes de
C LI
certains climats chauds plus trempés encore.
Toutes ces boiïTons doivent être prifes très-
fraîches ^ & même à la glace , quand ce dé-
liré de froid n'incommode pas iènfiblement.
Les liqueurs glacées aigrelettes & les glaces
bien parfumées prifes entre les repas , font
auflî d'une grande reflburce dans les climats
chauds : la plus grande partie des médecins
en ont condamné ïwÙl^q \ mais ce font en-
core ici des clameurs théoriques. F.Glace.
(MédecinCé)
Les farineux non-fermentés , les laitages ,
les groffes viandes , les poiiTons féchés , fu-
més, falés , \qs viandes fumées & falées ,
font des alimens qui paroiflent propres aux
tabitans àzs climats froids ^ la moutarde , la
racine du raifort fauvage , certaines fubf-
tances végétales & animales à demi-putré-
fiées , comme le fauer-kraut , &c. peuvent
fournir aux habitans de ces contrées des af-
iàifonnemens utiles. Les liqueurs fortes ,
c'eft-à-dire les liqueurs ipiritueufes diftillécs
& dépouillées , par cette opération , d'une
fiibftance tartareufe & extraétive , qui eft
dans les vins un correctif naturel de la par-
tie fpiritueufb j c<^s liqueurs , dis-je , con-
viennent éminemment aux pays froids : le
café à grande do le, la boiifon abondante
du thé & des autres liqueurs aqueufes qui
^ prennent chaudes , font aufli très-utiles
dans ces climats^ fur- tout parla circonftance
d'être prifes chaudes , & peut-être unique-
ment par cette qualité.
Les excès avec les femmes font aufîî très-
pernicieux dans les climats chauds. Les ha-
bitans de nos îles de l'Amérique & de nos
comptoirs dans les grandes Indes , y fiic-
combent fort communément. Les habitans
des climats froids n'en font pas , à beaucoup
près , fi incommodés ; au moins l'excès ne
commence-t-il pas fi-tôt pour eux , comme
nous l'avons déjà obfervé.
Les exercices doivent être plus modérés
dans les climats chauds que dans les climats
froids. Cette loi découle tout fimplement
de l'obfervation de la moindre vigueur des
habitans des premiers.
Le fommeil eft fort falutaire aux corps
accablés par la chaleur : les habitans des cli-
mats froids foutiennent mieux les veilles.
Pour ce qui regarde la dernière de nos
iu cho&s non naturelles , les aâèâions de
C L I 183
l'ame , animi pathemata ; quand même la
médecine foroit venue à boiit de déterminer
exaftement celles qui font propres à chaque
climat , & m.ême qu'elle auroit gradué fur
l'échelle de thermomètre , ce qui peut s'exé-
cuter très-facilement, l'intenfité falutaire de
chacune , il refteroit encore à découvrir la
façon du hs exciter & de les entretenir fous
les diverfes températures j ce qui eft très-
polTible encore , quoique d'une exécution
peu commode : mais la morale médici-
nale n'en eft pas encore là , malgré [qs
progrès qu'elle vient de faire tout récem-
ment. Koyei Passion ( Médec, ) ; voye:^
Régime.
Au refte , la plupart des obfervations que
nous venons de faire fur le régime propre
aux climats , convient à-peu-près dans le
même fèns aux fàifons. V. Saison.
3*^. Quelles font les maladies particulières
aux différens climats , & leurs caufès ? ^oy.
Maladies endémiques , au mot Endé-
mique.
4*^. Les maladies générales ou communes
à toutes les nations , varient-elles fous les
différens climats dans leur progrès & dans
leur terminaifon , ou dans l'ordre & la fuc-
cefTion de leurs accidcns & de leurs crifes ?
en un mot ont-elles un type différent ? le
traitement de ces maladies doit-il varier
aufîî dans les divers climats ; ou , au con-
traire , une maladie générale , une pleuré-
fie , une fie\Te putride , eft-elle la même à
Londres & à Rome ? les defcriptions d'Hyp-
pocrate peignent-elles exactement une ma-
ladie de Paris ? & , ce qui ell bien plus ef^
fontiel , faut-il traiter une même maladie
par la même méthode dans tous les climats?
V, Crise , voy, Tipe {Médec) voy. Mé-
thode curative.
Le climat agit pins fenfiblement for les
corps qu'il affède par une imprefîîon fou-
daine , c'eft-à-dire que les hommes nouvel-
lement tranlplantés font plus expofés aux in*
commodités qui dépendent du climat , que
les naturels de chaque pays , & cela d'autant
plus que leur climat naturel diffère davantage
de la température du nouveau pays qu'ils
habitent.
C'eft une observation conftante & con-
nue généralement, que les habitans des pays
chauds peuvent palfer avec moins d'incou*
Nui
2^ c L I
^'é^ie^s cîans les régions froides , que les
habitans de celles--ci ne peuvent s'habituer
dans les climats chauds, (h)
CLIMATÉRIQUE,r.CLIMACTÉRIQUE.
CLIMAX , ( Belles - Lettres ) du ^rec
yWiuct^ , gradation ; figure de réthoriqiie
par laquelle le difcours s'élève ou defcend
comme par degrés : telle clï cette penféc de
Cicéron contre Catilina : NiAil agis , ni/iil
moliris , niAil cogitas , çuod ego non audiam^
non videam , planeque fentiam ; tu ne fais
rien , tu n'entreprends rien , tu ne penfes
rien , que je n'apprenne , que je ne voie ,
dont je ne (bis parfaitement inftruit : ou cette
invitation à fon ami Atticus : Si dormis , ex-
pergifcefe ; fi pas , ingredere ; fi ingrederis ,
curre : fi curris ^ advola : ou ce trait contre
Verres ^ C efi un forfait que de mettre aux fers
un citoyen romain ; un crime , que de le faire
battre de verges ; prefquun parricide , que de
le mettre a mort ; que dirai - je de le faire
crucifier ? (G)
Climax. {Mufiq.) On a tranfporté dans
quelques écrits ce mot de la réthorique à la
muiîque , & on lui fait fignifîer :
i**. Un trait de chant où les deux parties
vont par tierce en montant & defcendant
diatoniquement.
2". Un trait de chant qui eft répété plu-
iîeurs fois de (iiite , & toujours un ton plus
haut ^ dans ce cas , c'eft exadfement une
rofalie. V, RoSALIE , ( Mufiq, )
3°. Enfin 5 une forte de canon. F. Canon,
(Mufiq.) (F. D. C.)
CLINCART, f. m. (Af^rwe.) on appelle
ainfi certains bateaux plats qui fbntenufage
en Suéde & en Danemarck. Diâ. de Trév.
€' du Comm.
* CLINCHE , f. m. {Serrur.) c'eft dans
iine ferrure une pièce appliquée au deffus
du pefle & de fa longueur ^ elle a une tête
qui fort hors du palatre &: entre dans le
mautonet ^ elle eit arrêtée avec un étochio
par l'autre bout au bas du palatre , au delfus
il y a un relfort double qui tient toute la
longueur du palatre , & qui fert à faire tom-
ber le clinche dans le mantonet : quand on
ou^re la porte , le clinche s'ouvre avec une
f>etite clé , pour éviter de porter la groffe
^lé ^ mais quand on ouvre avec la grofîe clé ,
la groffe clé ouvre le clinche^ qu'elle attrape
^ac uuÊ barbe qu'on y a pratiqiice» On pra-
CL î
tique un clinche aux ferrures des portes- en-
chères.
CLINGEN 5 ( Géog. mod. ) petite ville
d'Allemagne dans la 1 huringe.
CLINGEN AU , ( Géog. mod. ) ville de
Suille dans le canton de Bade, fur l'Aar.
CLINIQUE , adj. ( Médecine. ) épithete
commune à la médecine &: aux médecins ,
à l'art & aux artiftes , fe donnant également
à l'un & à l'autre.
On appelle médecine clinique ^ la méthode
fuivie de voir & de traiter les malades alités 5
& l'on nomme médecins cliniques , ceux qui
affilient auprès du lit des malades pour trai-
ter leurs maux. C'étoient principalement les
médecins des empereurs auxquels on donnoit
anciennement ce nom.
On employoit chez les Romains les efcla-
ves au foin de garder les malades , ce qui
fit qu'on les appella rnedici ad niatulam ; &
pour leur faire plus d'honneur , quelques au-
teurs leur donnèrent aufîl le nom de medici
clinici , parce qu'ils ne bougcoient point
d'auprès du lit des malades. Mais c'étoit-là
détourner ironiquement la fignification du.
m.et clinicus , qui défignoit dans fon vrai
fèns un médecin proprement dit , un homme
éclairé qm voyoit les malades au lit, &leur
prefcrivoit des remèdes.
Martial , lib. I , epigramm. xxxj , détourne
au/Ti la véritable fignification de clinicus ,
dans ime épigrammc où il parle d'un pauvre -
chirurgien, en latin vejpillo , qui faute d'em-:
ploi s'étoit mis à porter les morts en terre ou
fur le bûclier :
Chirurgus fuerat , nunc efi vefpillo Diaulus y.
Capit quo potuit , clinicus ejfe modo.
La pointe de cette épigramme confifie-
dans féquivoque qui naît du double fens du'
mot yh.m , d'où clinicus a été formé , & qui'
fignifie également un /// & une bière.
Pline fait Hippocrate auteur de la méde--;
cine clinique : il n'y a pas toutefois de vrai-
fcmblance que l'on ait tardé fi long-temps à
vifiter les malades dans leur lit \ mais ce qui
diflingua fi fort à cet égard l'ami de Démo-
crite, c'eft comme le remarque le même au-^.
teur , qu'il a été le premier qui ait claire-
ment enfcigné la médecine. Génie ftipérieur^
il profita des lumières de fon fiecle , & fit
fervir , comme Boerhaave a fait de nos jours,,
la philofopliie à la médecine j &: la médecijûfi
C L I
à la philofophie. « Il faut , difoit. ce grand
3) homme , réunir avec foin ces deux fcien-
» ces ^ car un médecin qui eft philofbplie
» eft égal à un dieu. »
Cependant c'eft Efculape qui eft le véri-
table inventeur de la médecine clinique , ce-
lui qui le premier l'a pratiquée ; les méde-
cins avant lui ne vifitoient point les malades
au lit , on les portoit dans les carrefours pour
recevoir les avis des paftans. Le centaure
Chiron fe tenoit dans fa grotte , attendant
qu'on l'y vînt confulter. Quant aux méde-
cins de moindre importance , il eft proba-
ble que femblables à nos empyriques mo-
dernes , ils couroient les foires pour débiter
leurs remèdes fans s'avifer d'idler voir les
malades pour obferver les changemens qui
arrivent dans les maladies , &: y apporter les
iècours néceflaires.
Cette coutume introduite par Efculape ,
fit que les médecins qui l'imitèrent furent
appelles cliniques , afin de les diftinguer des
coureurs de marchés. Sa méthode clinique
lui réuiîit au point qu'on ne parla plus que
de la médecine d'Efculape & de ks mira-
cles. Les jumeaux Caftor & Pollux, le
voulurent avoir avec eux au fameux voyage
des Argonautes -, & quelques cures furpre-
nanîes qu'il avoit faites de certains malades
défeipérés , firent que l'on crut qu'il gué-
riiroit les morts. La fable ajoute que iiirla
plainte rendue par Pluton que iî on laiiîbit
agir Efculape , perfonne ne mourant , les
enfers fèroient bientôt vuides , Jupiter tua
d un coup de foudre le célèbre médecin d'E-
pidaure , & Hippolyte que ce médecin avoit
refl'ufcité. Aujourd'hui les iêdateurs d'Ef-
culape n'ont pas à craindre le fort du fils
d'Apollon. Article de M. le chevalier DE
Jaucourt.
Cliniques, f m, pi. terme (THifl. eccUf.
c'eft le nom qu'on. donnoit anciennement à
ceux qui avoient été baptifés dans leur lit &
en maladie ;, du grec;^;;A(i'^ , lit^
Cela étoit affez fréquent dans les premiers
fiecles , où plufieurs différoient ainfi leur
feaptême jufqu'à l'article delà mort, quelque-
fois par humilité, fouvent auftî pour pécher
avec plus dé liberté. L'empereur Conftau-
tin ne fut baptifé que quelques jours avant fa
mort. On appelloit ces ibrtes de perfonnes
diiiifuis ^ comme qui dirciî chrétittis du lit ,
C L I igj
& on \ts, regardoit comnie foibîes dans la
foi & dans la vertu. Les pères s'élevèrent
contre cet abus , & le concile de Néocéfarée ,
canon 1 2,. déclare les cliniques irréguliers pour
\Qi ordres facrés , à moins qu'ils ne foient
d'un mérite diftingué , & qu'on ne trouve
pas d'autres miniftres \ parce qu'on croyoit;
qu'il n'y avoit qu'une crainte fervile qui avoir
déterminé les cliniques à recevoir le bap-
tême. Et le pape S. Corneille, dans une let-
tre rapportée par Eufebe , dit que le peuple
s'oppofa à l'ordination de Novatien , parce
qu'il avoit été baptilé dans (bn lit , étanr
malade. ThomalL difcipline de téglife^part,
IV y liv. II , cAap. xiij. ( G )
CLINOIDES , adi. en anat. fe dit des
quatre apophyfes de l'os fphénoïde, & qu'on
nomme ainiî , fuivant quelques-uns , à caufe
de leur reflèniblance avec \t% pies d'un lit.
V. Sphénoïde. ;
Ce mot eft formé du grec x>v^v , lit , &
îTJ'of , forme , foit à caufè de la reftèmblance
que ces trois os ont avec les pies d'un lit , foit
qu'Usaient tiré ce nom de la cavité qu'ils for-
mant, laquelle relFemble àun lit même. (Z )
CLINOPODIUM , {HiJL nat. bot.)
bafilic fauvage, genre de plante à fleur mo-
nopétale, labiée .dont la lèvre fupérieureeft
relevée , arrondie, & le plus fouvest échan-
crée ;, l'inférieure eft divifée en trois parties :
il fort du calice un piftil qui eft attaché
comme un clou à la partie poftérieure de la
fleur , &; entouré de quatre embryons qui
deviennent dans la iuite autant de fèmenccs
cblougues enfermées dans une capfule qui a
fervi de calice à la fleur. Ajoutez aux carac-
tères de ce genre que les fleurs font rangées
par étages & par anneaux autour des bran-
ches & des tiges. Tournefort, injl, rei herb^
Fojq Plante. (/)
CLINQUANT , f. m. {Manufad, en
foie ; ruban , &c. ) eft une petite lame plate
d'or ou d'argent , fin ou faux , qui fe met
dans les galons ou nibans pour leur donner
' plus d'éclat par leur brillant. Le cliquant eft
toujours ftir une navette féparée , dont oii
paife feulement quelques coups de diftance
en diftance , lîiiVant que le deftîii l'exige..
Les levées pojr le fixer dans l'ouvrage font
les moins confidéraoks qu'il eft pofïïble y
afin de laifl'er le clinquant plus à découvert,
CLIOj {Mjth.) la première des m.Efçs,
iî6 C L î
efl: regardée comme l'inventrice de la gui-
tare ; on la repré fente tenant une guitare
d'une main , & de l'autre un pleétre, au lieu
d'archet. Comme on la fait aufîi prélîder à
rhiftoire,on lui donne quelquefois la trom-
pette à une main , & à l'autre un livre d'hif-
toire ^ fon nom fîgnifîe g/oirt , renommée.
Elle ofa un jour faire des remontrances à
Vénus, fur fon intrigue avec Adonis. La
déeffe la punit , en lui infpirant les foiblef^
£es de l'amour , & .elle devint mère. (•+-)
CLIPEUS ou CLIPEUM , bouclier ,
( Hiji. anc. ) pièce de l'armure dcfenfive que
les anciens portoient fur le bras pour fe ga-
rantir des coups de l'ennemi. Voye^^ Ecu &
Bouclier.
Sa figure étoit ronde ou ovale , ou circu-
laire ou exagone j il y avoit au milieu une
bo/iette de fer ou de quelque autre métal qui
finilToit eu pointe. Les grands boucliers ou
targes qui avoient trois pies & demi ou qua-
tre pies de hauteur , & couvroient prelque
tout le corps du fantaflîn , étoient en quarré
long, & demi-cintrés , comme les tuiles
qu'on nomme imbrices. ( G)
CLIQUART , f. m. ( Arckit. & Mac. )
pierre anciennement connue fous le nom de
pierre de bas appareil ; c'eft une des meilleu-
res elpeces qu'on tire des carrières des envi-
rons de Paris. On prétend qu'elles en font
épuifëes. Voyei Disk.
CLIQUET , dans t horlogerie , eft une
efpece de petit levier , toujours déterminé
dans une certaine pofition au moyen d'un
relTort qui appuie fur l'une de fes extrémités.
On l'emploie ordinairement lorfqu'on veut
qu'une roue tourne dans un fens, fans qu'elle
puiiTe retourner dans le fens contraire. Sa fi-
jçure efî: différente, félon les différentes par-
ties où il eil employé. F. Fusée, Rochet,
Encliquetage. {T)
Cliquet , en terme de metteur en œuvre ,
eft la partie fiipérieure de la brifure qui en-
tre & fort de la charnière. Voye^ Brisure
6» Charnière.
Cliquet , f. m. ( Éeon, rujî. ) c'eft une
pieae du moulin à grain ; elle tient à la tré-
mie , d'oîi elle fait defcendre peu-à-peu le
grain llir les meules. V. Moulin a grain.
CLIQUETIS , fubft. m. {Médec.) efpece
de bruit ou craquement ^ il fe dit des os dans
•ertaines circoiiftances ou maladies.
C L I
Le cliquetis ou la crépitation des os , eft
un bruit que les os font dans certains mou-
vemens & dans certains cas , dont la caufe
eft la dégénération , & plus ibuvent encore
la difette de la fynovie , cette liqueur muci-
lagineufè que Cloptou Havers , auquel on
doit tant de belles découvertes fur le mécha-
nifine àes os , a parfaitement connue. Voy,^
Synovie.
Or toutes les fois que la fècrétion de cette
liqueur eft trop peu abondante , l'articula-
tion devient roide ^ & lorfqu'on veut mou-
voir l'os, on entend un craquement , comme
\e% vieillards l'éprouvent fort fouvent ^ ce qui
provient chez eux, en partie de la difette de
cette humeur gluante deftinée à la lubrifica-
tion des os , en partie de la callofîté , &
quelquefois de l'ofllfication des ligamens.
Ou remarque la même chofe dans les hom-
mes qui ont été occupés à àet travaux vio-
lens avant que d'arriver à un grand âge ;
l'excès du mouvement mufculaire a endurci
dans ces hommes robuftes les parties fermes
du corps , & a difiipé l'humeur huileule
néceffaire à leur mouvement.
Le craquement des os accompagne auftî
quelquefois le feorbut , & autres maladies
des os oii la fynovie manque ; comme auflî
celles qui donnant de plu# grandes furfaces
à à^s os emboîtés enfemble , les collent par
une humeur accidentelle.
Quelques perfonues font craquer à plaifir
& à volonté les jointures de leurs doigts en
les tirant d'une certaine manière ^ c'eft qu'a-
lors ils allongent les ligamens élaftiques des
jointures , & féparent avec vîtefle deux fiir-
faces oflèufes qui fe touchoient immédiate-
ment.
Lorfqwe le cliquetis des os eft produit par
la vieillellè , il eft incurable ^ lorlqu'il vient
de la difette , de l'excès , de la dégénéra-
tion , de l'épaiftiiTement du mucilage d'Ha-
vers , il ceife ièulement par la guérifon de
la maladie dont il eft l'efi^èf.
Tous les remèdes extérieurs , comme les
huiles pénétrantes , & les fomentations
émoUieutes quand la fynovie manque j ou
les réfolutifs fpiritueux en forme d'embroca-
tion, quand l'humeur fynoviale pèche par
fon excès , fon épailîilfement , fa dégéné-
ration ^ tous ces remèdes , dis-je , ne feront
que des palliatifs peu fecourables ^/aus les •
C L î^
rerpecles internes diverfinés luivantles eaiifes:
ce feroit fe tromper foi- même que d'imagi-
iier le contraire. Si dans les méthodes cura-
tives on ne remonte aux fources du mal ,
comment détruira-t-on les effets qui en dé-
coulent ? {M. le chevalier DE Jaucourt. )
Cliquetis, f. m. pi. {Pêche.) pierres
trouées que les pêcheurs attachent au ver-
veux pour le faire defcendre. V, Verveux.
GLISSA , ( Géogr. mod, ) fortereiFe de
Dalmatie appartenante aux Vénitiens. Long.*
35^/ar. 44.
CLISSON, {Marine.) Voyei. Clokon
& Fronteau.
Clisson , (Comm.) toile de lin ni fine
ni g^roiFe propre à faire des chemiiès , qui
Ce fabrique en Bretagne. V. le dicl. du comm.
Clisson, (Géogr. mod.) petite ville de
Bretagne au pays Nantois , fur la Seure.
Long. 16 , 10 ; lat. 47 , 6.
CLISTRER , une poêle , ( Sal. ) c'eft ,
après avoir établi une poêle fur fon four-
neau , fermer les joints des platines avec des
étoupes , & enduire le fond de chaux dé-
trempée. Voye[ l'art. Sel.
CLITHERA , ( Géogr. mod. ) ville d'An-
gleterre dans la province de Lancashire.
Long. 14 , 18 ; lat. 53 , 50. ^
CLITORIS , f. m. terme d'anat. corps
rond & long fitué à la partie antérieure de
la vulve ou des parties naturelles des femel-
les , en qui il eft un des principaux organes
de la génération.
Le mot yKii7o?)i eft dérivé du verbe x^^'"^
je ferme. Sa figure relFemble ordinairement
à celle d'un gland ^ il eft pour l'ordinaire
proportionné à la grandeur de l'animal ^ ce-
pendant il y a des femmes qui l'ont fort
gros & fort long. Il refFemble en beaucoup
de chofes à la verge du mâle , ce qui fait que
quelques-uns l'appellent la verge de la femelle.
En effet il eft compofé des mêmes parties :
il a deux corps caverneux , un gland à l'extré-
mité couvert d'un prépuce , mais qui n'eft
pas percé comme le membre viril ;, il a iéu-
lement la marque du trou. yoye[ Gland ,
Prépuce , &c. voyei auffi Nymphes.
Il a auffi deux muicles qui le font drefFer
dans le coït \ alors il enfle &: durcit. Quel-
ques anatomiftes lui donnent auifi deuxmuf-
cles éjaculateurs. V. auffi les art. EjACULA-
TEUR , ErECTEUR , (^ ERECTION.
C L I 187
C'eft une partie extrêmement fbnfible ,
& qui eft le fiege principal du pîaifir dans la
femelle j raifon pour laquelle quelques-uns
lui ont donné le nom à'afrum Veneris ,
aiguillon de Vénus. Il s'eft trouvé des fem-
mes qui en ont abufé.
Lorfqu'il avance trop en dehors dans la
femme , on en retranche une partie , &
c'eft en quoi peut confifter la circoncifîon
àQ% femmes. Il eft quelquefois fi gros & fi
long, qu'il a tout-à-fait l'air d'un membre
viril; & c'eft de- là feuvent que l'on qualifie
àQ% femmes d'être hermaphrodites. Voye-^^
Hermaphrodite & Circoncision.
Les corps fpongieux du clitoris naift"ent
diftinâs de la partie inférieure de l'os pubis ;
&: approchant par degrés l'un de l'autre ,
forment en s'unilFant le corps du clitoris.
Avant leur union on les appelle cuiffes du
clitoris , crura clitoridis , & ils font deux
fois auffi longs que le clitoris mêmiC. Voye[
Cuisse ù Caverneux.
Ses mufcles naifFent de la tubérofité 4^
l'ifchium^, &: s'infèrent dans \t% corps fpon-
gieux. Les veines & les artères viennent des
hémorrhoïdales & des honteufes , & les
nerfs des intercoftaux.
Mufcles du clitoris j voye^ EreCTEUR
du Clitoris. (I)
CLITUNNO , ( Géograph. mod. ) rivière
d'Italie dans la principauté de Spolette , en
Ombrie , dans l'état de l'é^^life.
CLIVER , en terme de diamantaire , c'eft
féparer undiam.ant en deux ou plufieurs par-
ties , en le mettant fur un plomb où il entre à
moitié, & frappant avec un marteau fur un
couteau fixé fur le point où l'on veut feparer
le diamant. Il n'y a que ceux dont on fuit le fil
qui fe clivent de cette m.aniere ; encore pour
peu que la pièce foit de conféquctice on la fcie
plutôt que d'encourir les rifques du clivage..
C L O
CLOAQUE , f. m. {Rifl. anc. & Arch. )
aqueduc fbuterrain qui reçoit les eaux & les
ordures d'une grande ville : m.ais le mot
cloaque n'eft guère du bel ufage que pour les
ouvrages des anciens ; en parlant des ouvra-
ges inoderncs , on dit ordinairement égoût.
Le mot latin eft cloaca , mot que quelques
étymologiftes dérivent de duo , faiir , infec-
ter par ià inauvaife odeur.
i88 C L O
Le chaque eft allez exadlement défini par
le célèbre jurifconfulte Ulpien , un Heu fou-
terrain fait par art pour écouler les eaux &
les immondices (Tune ville.
Denis d'HalycarnafFe nous apprend que le
roiTarquin le vieux eft le premier qui com-
mença à faire des canaux fous la ville de Ro-
me , pour en conduire les immondices dans
le Tibre. Les canaux de cette efpece augmen-
tèrent infenfiblement, & fe multiplièrent à
mefureque la ville s'agrandit , & furent enfin
portés à leur perfedlion fous les empereurs.
Comme les Romains dans les premiers
temps de la république travailloient à ces
canaux , ils trouvèrent dans un d'eux la fta-
tue d'une femme \ ils en furent frappés : ils
en firent une déeffe qui préfidoit aux cloaques ,
& qu'ils nommèrent Cloacine. S. Auguliinen
parle au liv. IV de la cité de Dieu , c, xxiij.
Il n'en failoit pas tant pour engager des
peuples de ce caraéîere à la multiplication
de ces fortes d'ouvrages : leur religion s'y vit
ïntércfTée j car ils mêloient une efpece de
fentiment religieux'à leur attachement pour
la ville de Rome ^ cette ville fondée Tous
\qs meilleurs aufpices ^ cette ville dont le
capitole devoit être éternel comme elle , &
la ville éternelle comme fon fondateur , le
delir de l'embellir fit fur leur efprit une im-
prefTion qu'on ne fauroit imaginer.
L'exemple, l'émulation , l'envie des'iiluf-
trer , de s'attirer les fuffrages & la confidéra-
tion de Çqs com.patriotcs , & plus que tout
cela , l'amour pour le bien commun , que
nous regardons aujourd'hui comme un être
de raifon , produifirent ces édifices fiiperbes
& néceflkires qu'on admirera toujours ^ ces
chemins publics qui ont réfifté à l'injure de
tous les temps j ces aqueducs qui s'étendoient
quelquefois à cent milles d'Italie, qui étoient
percés à travers les montagnes , qui fournif-
ibient à Rome cinq cents mille muids d'eau
dans vingt-quatre heures ^ ces cloaques im-
menfes bâtis fous toute l'étendue de la ville
en forme de voûte, fous lefquels on alloit en
bateau , où dans quelques endroits des char-
rettes chargées de foin pouvoient palfer, &
qui étoient arrofés d'une eau continuelle qui
empêchoit les ordures d'y pouvoir féjourner
( il y en avoit un entre autres qui fe rendoit
dans le Tibre de tous les côtés & de toutes
les parties de la ville ) 3 c'étoit , dit Pline ,
C L O
le plus grand ouvrage'que des mortels eulTent
jamais exécuté.
Cafiiodore qui vivoit en 470 , qui étôit
préfet du prétoire fous Théodoric roi des
Goths , & bon connoifieur en architeâiire ,
avoue dans le racueil de fès lettres , epijï.
XXX , lib. V , qu'on ne pouvoir confidérer
les cloaques de Rome làns en être émerveillé.
Pline , lib. XXXIII , cap. xv , dans la
defcription qu'il donne des ouvrages que l'on
voyoit de fon temps dans cette capitale du
monde , remarque encore que l'on y admi-
roit pardeflTus tous les aqueducs fouterrains
de ce genre , ceux que conftruifit Agrippa
à {ks dépens pendant fon édilité , & dans
lefquels il fit écouler toutes les eaux & les
ordures de cette ville immenfe. Il s'agit ici
d'Agrippa favori & gendre d'Augufte , qui
décora K.ome non-feulement des cloaques
dont parle Pline, mais de nouveaux chemins
publics & d'autre ouvrages aufîi magnifi-
ques qu'utiles , en particulier de ce fameux
temple qu'il nomma le panthéon , conftruit
en l'honneur de tous les dieux, & quiiub^
fifte encore à quelques égards fans fes an-
ciennes ftatues & fès autres ornemens , fous
le nom de Notre-Dame de la Rotonde.
Le foin'&rinfpeâ:ion des c/oa^:/ej appar-
tinrent, jufqu'au temps d'Augufte , aux édi-
les, qui nommoient à cet effet des officiers,
ibus le titre de curatores cloacarum»
Voilà quel étoit l'efprit dont les Romainr
étoient animés : en lifant leur hiftoire , nous
les voyons d'autres hommes que nous ^ car
ils ignoroient ce que nous connoiflbns trop ,
l'indifférence pour la patrie. M. de Voltaire
fuppofe que dans les premiers tem<ps de lâ
république , un citoyen , dont la paffioii
dominante étoit le delir de rendre fon pays
floriifant , remit au conful Appius un mé-
moire dans lequel il repréfentoit les avan-
tages qu'on retire'roit de réparer les grands
chemins & le capitole, de former des mar-
chés & des places publiques , de bâtir de
nouveaux cloaques pour emporter les ordures
de la ville , fource de maladies qui faifbient
périr plufieurs citoyens : le conful Appius
touché de la leôure de ce mémoire , & pé-
nétré des vérités qu'il contenoit , immorta-
lifa fon nom quelque temps après par la voie
Appienne j Flaminius fit la voie Flami-
iiicune y lui autre embellit le capitole j un
autre
CLO
autre établit des marchés publics ^ & d'au-
tres conflruifirent les aqueducs & hs égoûts.
L'écrit du citoyen obfcur , dit à ce fujet
rilluftre écrivain déjà cité, fut une fènience
qui germa bientôt dans l'efprit de ces grands
hommes , capables de l'exécution des plus
grandes chofes. Cet article eji de M, le cheva-
lier DE Javcourt.
CLOC A , ( Mufiq. des anc, ) furnom d'un
nome propre aux joueurs de flûtes , comme
le rapporte Pollux , Onomaji. liv. IV ^ ck. x.
(F.D.G.)
* CLOCHE ,Cî.{ Kijl, anc. mod. Arts
méchan. ) c'eft un vafe de métal qu'on met
au nombre des inftrumens de percufîion , &
dont le fou eft devenu parmi les hommes
un figue public ou privé qui les appelle.
On fait venir le mot François cloche de
cloca , vieux mot gaulois pris au même ièns
dans les capitulaires de Charlemagne.
L'origine des cloches eft ancienne : Kir-
cher l'attribue aux Egyptiens , qui faifoient,
dit- il , un grand bruit de cloches pendant
la célébration des fêtes d'Ofîris. Chez les
Hébreux, le grand-prêtre avoit un grand
nombre de clochettes d'or au bas de fa tuni-
que. Chez les Athéniens , les prêtres de Pro-
ièi-pine appelloieat le peuple aux facrifices
avec une cloche , & ceux de Cybele s'en
fervoient dans leurs myfteres. Les Perles ,
Jes Grecs en général , & les Romains , n'en
ignoroient pas l'ulàge. Lucien de Samofate ,
x|ui vivoit dans le premier fiecle , parle d'une
horloge à (bnnerie. Suétone & Dion font
mention dans la vie d'Augufte , de tintinna-
hula , ou cloche , fi l'on veut. On trouve dans
Ovide les termes de œra , pelves , kbetes , &c.
auxquels on donne la même acception. Les
anciens annonçoient avec des cloches les
heures des aifemblées aux temples , aux
bains , Se dans les marchés , le paflage des cri-
minels qu'on menoit au iupplice , & même la
mort des particuliers ; ils fonnoient une clo-
'<:hette afin que l'ombre du défunt s'éloignât
de la maifon : Temefœaque concrepat œra ,
- dit Ovide , (S' rogat ut teâis exeat umbrafuis.
Il eft queftion de cloches dans Tibulle , dans
Strabon & dans Polybe, qui vivoit deux
cents ans avant Jefus-Chrift.Jofeph en parle
- dans fes antiquités judaïques , liv. III. On
trouve dans Quintilien le proverbe aola in
€ubiculo; ce mot nola , clocha, a faitpcnfer
.Totne FUI.
CLO 289
que les premières cloches avoientétc fondues
à Noie, où S. Paulin a été évêque, & qu'on
les avoit appellées campance .-p-drce que Noie
eft dans la Campanie. D'autres font hon-
neur de l'invention des cloches au pape Sabi-
nien qui fuccéda à S. Grégoire ; mais ils (e
trompent^ on ne peut revendiquer pour le
pape Sabinien & faint Paulin , que d'en
avoir introduit l'ulàge dans l'églife , foit
pour appeller le peuple aux offices divins ,
foit pour diftinguer les heures canoniales.
Cet uiàge palfa dans les églifes d'Orient 5
mais il n'y devint jamais fort commun , &
il y cefTa preiqu'entiérement après la priiê
de Conftantinople par les Turcs , qui l'aba-
lirentnon fous le prétexte que le bruit des clo-
ches troubloit le repos des âmes qui erroient
dans l'air , mais par la crainte qu'il ne fût à
ceux qu'ils avoient fubjugués un fignal en
cas de révolte j cependant il continua, au
mont Athos & dans quelques lieux écartés
de la Grèce. Ailleurs, on fuppléa aux clo-
ches par un ais appelle fymandre, & par des
maillets de bois , ou par une plaque de fer
sppellée le fer facré , àyiov a-Un^av, qu'oa.
frappoit avec des marteaux.
Il en eft de la fonderie des grclTes cloches
ainfi que de la fonderie des canons , de l'art
d'im.primer , de l'invention des horloges à
roue ou à foleil, de la bouffole , des lunet-
tes d'approche , du verre , & de beaucoup
d'autres arts , dûs au hazard ou à des hommes
obfcurs^ on n'a que des conjectures fur l'o-
rigine des uns , & on ne fait rien du tout fur
l'origiue des autres , entre lefquels on peut
mettre la fonderie des grofles cloches. On
croit que l'ufage dans nos églifes n'en eft pas
antérieur au fixieme fiecle : il y étoit établi
en 610 -, mais le fait qui le prouve, lavoir la
difperfion de l'armée de Clotaire au bruit
des cloches de Sens , que Loup, évêque
d'Orléans , fit fbnner , prouve aufîi que les
oreilles n'étoient pas encore faites à ce bruit.
L'églife , qui veut que tout ce qui a quel-
que part au culte du fouverain Etre foit con-
facré par des cérémonies , bénit les cloches
nouvelles ^ & comme ces cloches font pré-
(entées à l'églife ainfi que les enfans nou-
veau-nés, qu'elles ont parrains & marraines,
'éc qu'en leur impofe des noms , on a donné
le nom de baptême à cette bénédiction.
Le baptême des cloches , dont il eft parlé
Oo
29<!) C L O
dans Alcuin , difciplede Bedc , & précepteur
de Charlemagiie , comme d'un ufage anté-
rieur à l'année 770, fe célèbre de la manière
fuivantc , félon le pontifical romain. Le prê-
tre prie j après quelques prières , il dit : Que
cette cloche foit fanciifiée & confacrée , au nom
du Père , du Fils & du S, Efprit : il prie
encore ^ il lave la cloche en-dedans & en-
dehors avec de l'eau-bénite ^ il fait defîiis
fept -croix avec l'huile des malades , & qua-
tre dedans avec le chrême ^ il l'encenfe , &
il la nomme. Ceux qui feront curieux de
tjut le détail de cette cérémonie , le trou-
veront dans les cérémonies religieufes de M.
Tabbé Bannier.
Nous parlerons de la fonte des cloches à
T article PoNDEUR. Voye\ la defcription des
Arts ù métiers , par M. Bertrand , m-4°.
Cloche. ( Jurifpr. ) Quoique les cloches
foient déjà bénites , le fondeur qui en a
fourni le métal peut les faire vendre faute
dé paiement. Arrêts du xy février 1603.
Cnrondas , liv. XJlJy rép, vij.
Dans les églifes cathédrales , l'évêque ne
peut communément faire fonner les cloches
que de concert avec le chapitre \ cela dé-
pend uéamnoins des ftatuts & de l'ufage.
Chenu , tit. j , ch. ij,
L'émiOlument de la fonnerie dans les pa-
roiffes , appartient de droit commun à la
fabrique , à moins qu'il n'y ait ufage & pof
felîion contraire au profit du curé. Arrêt du
21 mars 1660 , pour la fabrique de Beau-
vais, qui lui attribue l'émolument de la fon-
derie , & néanmoins ordonne que les cloches
ue pourront être fonnées pour ceux qui font
inhumés dans la paroiife , que le curé n'en
ait été averti. Jurifpr. can. de l^^Combe ,
au mot cloche.
Il eft enjoint par un arrêt du grand- con-
feil , du 7 janvier 175 1 , à toutes perfonnes
qui auront foigné les bénéficiers jufqu'à la
mort, ou chez leiquelles ils feront décédés,
d'avertir les prépoies à la ibnnerie des clo-
thes 5 de fonner à finftantpour les eccléiiafti-
tjues qui viennent de décéder.
Les monafteres ne doivent point avoir de
cloches qui puiflent einpêcher d'entendre
celles de l'églife principale ou paroifTiale du
lieu ; & en général , les églifes doivent ob-
icrver entre elles certaines déférences pour
la foiînerie , feion le rang qu'elles tieiment
CLO
dans la hiérarchie eccléfiaftique. Henrys ,
tome I , liv, I ^ ch, iij , queji. 16.
L'entretien & la réfeftion des cloches^ de
la charpente qui les ioutient, & des cordes
qui fervent à les fonner , font à la charge
des habitans , & non des gros décimateurs.
Arrêt du 3 mars 1690 , contre le curé d'Azay.
Voyei^ les loix de bâtimens ; part. II , page
77 , aux notes. (A )
Cloche , ( Médec. ) ampoule ou vefîie
pleine de férofité , qui vient aux pies , aux
mains , ou autres parties du corps , par d^s
piquures d'infeftes .pr.r le violent frottement,
par la brûlure , ou pour avoir trop marché.
Au moyen d'une longue macération de la
peau dans l'eau , on en peut détacher avec
i'épiderme tous fes alongemens , de façon
qu'ils entraînent avec eux les poils & leurs
racines. Cette remarque fert à expliquer
comment les cloches ou ampoules qui s'élè-
vent fur la peau , reftent gonflées pendant
un temps confidérable , fans laiffer la férofité
extravafée échapper par les trous , qui , en
ce cas , devroient être agrandis par la dif-
traélion &: la tenfion de I'épiderme foulevé j
car quand I'épiderme fè détache ainii du
corps de la peau , il arrache auffi & entraîne
des portions de ces petits tuyaux entamés ,
qui étant comiprimés par la férofité , fe plif-
fent & bouchent les pores de répidern:e
foulevé , à-peu-près comme les tuyaux des
balons à jouer.
Les cloches fe guériffent d'elles-mêmes ,
ou par l'application de quelques ré folutifs ,
ou par la ceffation des caufes qui les ont
prodaites. Article de M. le chevalier DE
Javcourt.
Cloche , {Marine.) en donne ce nom à
une machine dans laquelle un homme efl
enfermé , & au moyen de laquelle il peut
reflcr quelque temps fous l'eau ^ on s'en fert
pour retirer du fond de la mer ou des ri-
vières des chofes pcries par naufrage ou au-
trement. La defcription qu'on en donne ici ,
efè tirée d'un auteur hoilandois.
Cette machine, qui a la figure 6\me clo-
che dont le fbmmetlêroit pointu, doit avoir
cinq à fix pies de haut , & au moins trois
pies de large par le bas , qui efl armé Ciun
gros cercle de fer en-dedans : il fert à main-
tenir la cloche & réfifler à la force de l'eau y
qui fans cela pourroit enfoncer les côtés de
CLO
îa machine. On la peut faire de bois , de
plomb , de fer , ou de cuivre j la matière
la plus pefante eft la meilleure , tant pour
réfîfter au poids de l'eau , que pour plonger
mieux , & defcendre plus aifément au fond.
La cloche eft furliée de cordes tout autour,
dont quelques-unes defcendent jufqu'au bas,
& auxquelles font attachées des plaques de
plomb d'un pie en quarré , & de deux pou-
ces d'épais au moins \ à chaque coin de ces
plaques il y a un trou par lequel les cordes
pafTent , & ces plaques pendent deux pies
au defTous de la cloche.
L'homme qui eft dans la cloche & qu'on
a defcendu fous l'eau , poiè ies pies for ces
plaques & y met auftî les uftenftles dont il
a befoin pour fon travail , foit tenailles ou
grapins , fuivant la nature des chofes qu'il
veut enlever du fond de l'eau.
La pointe de la cloche eft terminée par un
fort crochet , où l'on attache un bon cor-
dage qui eft pafte dans une poulie proche
de l'étrave du vaifteau d'où l'on coule
J'homine & la cloche dans l'eau , & l'on fe
fert du cabeftan pour lâcher ou retirer la
corde.
Toutes \t% parties des jambes de l'homme
qui defcendent plus bas que le bord de la
cloche , & qui font appuyées fur les plaques
de plomb , fo mouiÙent en entrant dans
i'eau , & deux pouces pardeffus , parce
qu'il entre environ cette quantité d'eau dans
la cloche , lorfqu'elle commence à en tou-
cher la fuperficie.
Il faut laiffer couler la cloche fort douce-
ment dans l'eau , & que le bas foit chargé &
fort pefant , autrement elle pourroit tour-
ner fur le côté j mais quand on la retire , il
faut le faire le plus vite qu'on peut.
On fait , par ceux qui ont été fous l'eau
dans une de ces machines , qu'un homme
peut y demeurer une demi-heure , quelque-
fois un peu moins. La vue y eft fort libre ^
& l'homme qui touche au fond , peut voir
diftinftement l'eau qui monte peu à peu
dans la machine \ & lorfqu'elle lui vient
jufqu'à la gorge , & qu'il fe voit en danger
fi elle montoit plus haut , alors il tire une
corde qui eft attachée autour de fon corps
& qui répond dans le vaifteau ; au fignal ,
on le retire promptement -^ & à mefure qu'on
l'enhve, l'i-ir augmente dans la machine &:
CLO i5>i
ï'eau y bâîfle, de forte qu'elle fo trouve tout-
à-fait vuide lorfqu'elle vient fur l'eau.
Plus le plongeur demeure fous l'eau , &:
plus l'air de la cloche devient chaud , fi bien
que quelquefois même le plongeur fiiigne
du nez.
Loriqu'il veut changer de place , fiiivant
que fon travail l'exige , & faire pour cet effet
avancer fa cloche d'un côté ou d'un autre , il
fait des fignaux par des cordes qui font atta-
chées au^bord de la cloche par le bas , &
dont l'autre bout répond au vaiflêau.
Pour faifir les fardeaux & autres effets qui
font au fond de l'eau , comme canons ,
ancres, balles de marchandifes , 6»c. on a de
grandes & fortes tenailles dont les branches
font attachées à des cordes qui fervent à les
ferrer & fermer, & dont l'autre bout qui
répond dans le navire s'attache au cabeftan^
& par ce moyen on enlevé les plus gros far-
deaux. (Z)
Cloche , (Jardinage. ) eft un vafe de
verre de dix-huit pouces fur tous fous , de
la figure d'une cloche , dont les jardiniers
couvrent \z% melons & les plantes délicates
qu'ils élèvent fur couche : elle concentre
beaucoup de chaleur , & avance infiniment
les plantes. On dit fort bien un melon cloché.
Il y a encore une efpece de cloche de
paille qui fort à garantir \q^ fleurs du foleil;
fo chaleur , qui perce au travers du verre ,
corrige ce que peut caufer à la jeune plante
la vapeur du fumier , qui , au moyen d'un
demi-pié de terreau qu'on met defliis , fo
condenfe fur la couche. L'air y eft encore
fort néceftaire , & on a des fourchettes de
bois pour élever les cloches. {K)
Cloche , en termes d'orfèvre en grojferie y
eft un ornement de monture de chandelier ,
qui fe place le plus fouvent fous le vafe.
Voyei Vase. Il prend fon nom de fa figure j
qui reftemble bien à une cloche.
CLOCHE , fl f. campana , ^ , (Slafon.)
meuble d'armoiries qui repréfeute une cloche.
On nomme le battant, i>atail , d'où on a
fait bataillée'^ on ne nom.me le batail en bla-
fonnant , que lorfqu'il eft d'un autre émail
que la cloche. Voye[ BataillÉE.
Trimond de Puimichel , à Aix en Pro-
verxe ^ d'azur à la cloche d argent , accom-
pagnée en chef (Tune croifette treflée d'or.
( t. D. L.T.)
OO 2
23?i CLO
CLOCHEPIÉ, f. î,{Mara/faa. en foie.)
orgnncin à trois brins , dont deux font d'a-
bord moulinés enfèmble , puis une féconde
fois avec un troifîcme brin. Voye^ les dicl.
du Comm. de Trév. Disk. & t article SoiE.
CLOCHER, f. m. ( Archit. ) eft un ou-
vrage d'archiîeâure qu'on élevé erdinaire-
ment audefli:s de la partie occidentale d'uiîe
églife , pour y placer les cloches. La foruie
des clochers leur donne différens noms. Ceux
quis*élevent en diminuant , comme un cône ,
&: dont le plan eft circulaire , s'appellent ai-
guilles ^ ceux dont le plan eft de forme qua-
'drang-ulaire , pentagonale ou exa<^onale, &
qui diminuent toujours de leur diamètre en
approchant de leur fommct, fe nomment
■pyramides. Dans \ts uns & les autres on pra-
tique çk::^ ouvertures ^ ces ouvertures font
garnies d'abavents , qui ne font autre chofe
*qiie àts, chaflis de charpente inclinés , cou-
verts d'ardoifo , qui iérvent à renvoyer le
fôn des cloches en contre-bas.
On appelle clocher de fond ^ une tour qui
prend naiffance du fol du pavé & s'élève de
toute la hauteur de l'églife, comme celles
de faint Euftache , de faint Sulpice , ùc.
Quelquefois cç.s tours, le plus ordinairement
quarrées par leur plan , font terminées par des
aiguilles ou flèches , comme celle du portail
de Rheims , ou par un petit comble , comir.e
celle de faint Jean en %xQ.\Qy ou enfin en plate-
forme , comme celle de Notre-Dame à Paris.
Mafius , dans fon traité des cloches , rc-
' maixîue qire le clocher de Pife eft le plus fîn-
■ gulier qui foit au monde ;, il penche , dit-il ,
tout d'un côté & paroît toujours prêt à tom-
ber : cependant ilalfure que cette difpofîtion
extraordinaire n'eft point l'effet d'un trem-
• blement de terre, commue quelques-uns fo le
font imaginé 5 mais que c'a été l'intention
' de l'arcliitefte qui l'a élevé, ainii qu'on le
voit évidemment par les planchers , les por-
tes & les croifëes , qui toutes font px)fëes
de niveaumalgré cette incîinaifon. (P)
Clocher , [Jurifprud. ) En parlant du
droit des cijrés par rapport à la dîme, on dit
communément que leur clocher eft leur titre y
ee qui s'entend de leur qualité de curé , dont
le clocher matériel a'eft qu'un attribut exté-^
rieiîF. .. .;.
Q^raud Je clocher d'une églife pai'oifïïale
cftçatiQrciJieiitpofé Hix 1q cKcew d'unî. églife
C LÔ
paroi/Tîalc , il doit être réparé par les gros
dccimateurs ;, mais s'il eft bâti fur la nef ou à
côté , il eft à la charge des habitans.
S'il eft pofé entre le chœur & la nef, il
doit être entretenu par moitié entre les gros
décimateurs & les habitans.
Les cloches font toujours à la charge des
habitans. Koyei ci-devant Cloches.
L'éditde ï6()$ concernant la jurifdiéiion
eccléfiaftiquc , ne parle point des clochers»
L'ufàge que l'on obforve à cet égard , n'eft
fondé que fur la jurifprudence.
Quand les clochers font conftruits avec des
flèches de pierre, & qu'ils fout d'une trop
grande élévation , on permet quelquefois
aux gros décimateurs & habitans d'en dimi-
nuer la hauteur autant que cela fe peut , 6c
d'y faire conftruire des flèches de charpente,
couvertes d'ardoife ou de plomb , au lieu
de flèches en pierre, f^, les loix des bâtimcns y
part. II y pages 75 «S» 76 , aux notes. {A)
CLOCHETTE , f. ï. {Fonderie. ) petite
cloche ou fonnette qu'on peut tenir & fonner
à la main. On fait des clochettes d'argent ,,
de cuivre & de métal compofé : ces dernières
font du nombre des ou\ rages de fondeurs
en terre & fable , & les autres de l'orfèvrerie.
Clochettes, royf^ Gouttes.
Clochette, {Bot.) K. Campanule.
CLODION ow Clogion , 11^ roi de
France , f Hijl. de France. ) ce prince eft
furnommé le chevelu ou de la grande quan-
tité de {es cheveux, ou de ce qu'il les laiJÎoit
croître par-tout également , contre l'ulage
des princes Francs qui, fuivant la remarque
de Sidonius , ne les laiffoient croître que fiir
les côtés, & fe rafoient le derrière de J a tête.
Les Francs , fous fon règne , prirent Tournai,
Cambrai, ôcréduifirent tout le pays jufqu'à
la Somme. Aétius leur livra plufîeurs com-
bats , où l'art militaire & la difcipline à(xs
légions romaines triomphèrent de la valeur
& de l'intrépidité àes Francs. Cependant
Aétius conçut une fi haute idée de cette iia-
tisn , que , quoique vainqueur , il recher-
cha la paix. Il préféra l'alliance & l'amitié
des François à fa gloire de les forcer d'aban-
donner leurs conquêtes* Ils. refterent paifî-
bles pofTeilèurs de Cambrai & de Tournai. ,,
ainfi que du territoire de ces villes :. il paroît
mêmxC qu'ils pofléderent quelques places dans.
XArtoi^.. La mort de ClQdiQtL.ik r.appQrtc. àt
C L O
Tan 447 , après un règne de vingt ans : on '
croit qu'elle fut occalionée par la douleur
que lui caufa celle de fou fils aine. Cette
opinion attefte faiènfibilité & fait l'éloge de
fon cœur. L'hiftoire varie fur le nom & fur
le nombre de fes enfans : les uns prétendent
qu'il en eut deux qu'ils nomment Claudebaut
éi. Clodomir ; d'autres lui en donnent trois ,
Renaut , Auberon , & Keynacaire ; c'eil de
cet Auberon que l'on fait defcendre Pépin ,
premier roi de la icconde race. On ne (au-
roit rien dire de pclltif à cet égard ^ tk grâce
à l'obfcurité des chroniques de ces temps ,
on ne fait fi Mérouce qui fut ion fuccefieur,
ctoit fon fils : le nom de fa femme eil ignoré.
( M-r. )
CLODONES , f. m. pi. {MytA. ) nom
que l'on donnoit aux femmes du pays de
Macédoine , qui fe plaifoient ^efque tou-
tes à célébrer les orgies & fêtes niftiîuécs à
l'honneur de Bacchus : c'étoient des e/peces
de bacchantes.
: CLOFIE , f. m. ( Ornnk. ) oifeau d'Afri-
que , noir Se gros comme l'étourneau : fon
chant eft de mauvais augure parmi les Nè-
gres f, quand ils menacent qnclqu'iui d'iuie
mort funefte , ils difcnt que le ciojie a chanté
fiir lui. J^oy. le àicl. de Trév^ & les voyageurs^
d'où cette mauvaifè defcripîion eft tirée.
: CLOCHER, {Géog. niod.) ville d'Ir-
lande dans la province d'Ulfter , au comté
de Tyrone.
CLOIS , { Gcog. mod. ) petite ville de
France dans le Dunois.
CLOISON , f. f. terme d^Atxkueâure ,
ouvrage de charpente j du latin craticii pa-
rietes ^ félon Vitruve , ou* de crates ^ \xm
claie ^ parce que les poteaux debout des
■ cloifons 5 leur fommier & leur travcrfe , imi-
tent les menues perches dont \qs premiers
hommes fe fervircnt pour clorrc leurs caba-
nes. Lxes poteaux de ces claifons font eii)acé3
de dix ou douze pouces : ces efpaces font
remplis de plâtre feulement quand ou veut
.lailfer les bois apparens , & hourdis des
deux cô tés iorfqu'on veut les recouvrir j alors
ces cloifons font appeliécs />/^/Vî^5. L'on ap-
pelle cloifons creufes , celles qui font ièule-
•ment hourdies des deux côtés*
On nomme cloifon de menai ferie , celre.de
planches alfemblces à rainures & languettes
. pQj^es à coiiUiTcs j pi. entre ccnues pur des
C L Ô 2^3
entretcifes , à l'ufage des retranchemens que
l'on veut pratiquer dans de grandes pièces.
On appelle cloifon de maçonnerie , tout le
mur de refend qui ne monte pas de fond , &
qui n'a pas l'épailleur requife fuivant l'art ,
n'étant pour l'ordinaire confiruit que de bri-
f{ues, déplâtras, ou de moilons non gif-
ians', liaifonués néanmoins avec du plâtre
ou du mortier. {P)
Cloison, (Fontainier.) on nommé ainfi
des féparatious de cuivre, de plomb , ou de
fer-blanc , qu'on place dans les cuvettes des
fontaines & des jauges. On en difringue de
àQ.iiK fortes : celle de calme , appellée lan-
guette 5 eft placée près de l'endroit où tombe
i'eau j fans interrompre fa com.muuication
dans toute la cuvette , elle ne fait qu'en rom-
pre le fiot, qui dérangeroit le niveau de l'eau
en même temps qu'il en auginenteroit la
dépenlè : l'autre cloifon eft celle du bord
où s'attachent \qs baffineîs pour la diftribu-
tion de l'eau. Voye^ Bassinets. (iv)
Cloisons ^ ce font des planches qu'on
attacJiç cnfèmble dans une écurie , depuis les
poteaiix jufqu'au râtelier , & qui en bouchent
tout l'intervalle , afin que les chevaux ne
puifTent point fe battre , & qu'ils loient plus
tranquilles en leurs place?. Lorfqu'on met
des claifons dans une écurie , il faut que les
poteaux foient plus éloignés les ims des au-
tres que quand il n'y a que des barres , afin
qu'ils aient affez d'efpace pour fè coucher.
Voyei Barre , {Man.) Poteau , &c. (F.)
Cloison , ( Marine^ ) c'eft mi rang de
poteaux efpacés environ à quinze ou dix-huit
pouces , & qui étant remplis de panneaux
ou couverts de planches , forment & fcpa-
reut les chambres dans les navires. Voyeila
pi. IF ^ Marine j fig, i , la grande cloifon
des foutes cotée 53 , & les mcnraas de ccîto.
cloifon cotés 54., la cloifon de la fainte-
barbe cotée 108. (Z)
Clois,on , {Sirrur.) c'eft dansnne ferrure
ce qui entoure le palatre & forme la iîirface
extérieure des côtés dq|^ forrure. La cloifon
eft arrêtée fur le palatre par des étochios.
Cloison, en Anatomie , nom de diffé-
rentes parties qui font roffice de iniix mi.
toyen entre deux autres..
La faux & îct preifoir d'Hérophile îienueiît
lieu d'une cloifon , dont la première feparc
les deux irémiiplicres du cerveau ^ Se ia
3L94 C L O
{ecoiide le cerveau du cervelet, ^oyei Faux
& Pressoir.
La cloifon traiifparente eft fituée direâie-
mciit fous la couture du corps calleux dont
elle eft la continuation , & comme une ef-
pece de duplicature. On l'appelle aufll fep-
tum lucidum.
Les deux finus fphenoïdaux & les deux
finus frontaux font féparés chacun par une
cloifon oifeufe ;, les foffes nafales font fépa-
rées par une cloifon formée par l'os vomer ,
la lame verticale de l'os ethmo'ide , & un
cartilage.
Les deux ventricules du cœur font diftin-
gués par une cloifon charnue.
Le diaphragme fait l'office d'une cloifon
qui fépare la poitrine du bas-ventre.
Ledarthos forme une cloifon quidiftiugue
les deux tefticules l'un de l'autre. V. Cœur ,
Diaphragme, ùc.{L)
Cloison du palais , ( Anatom, ) en latin
vélum palati. La cloifon du palais , dont la
luette eft regardée comme une partie , pour-
roit également être appellée la cloifon du nei,
du gofer.
Elle eft terminée en en-bas par un bord
libre &: flottant qui repréfente une arcade
particulière fituée tranfverfalement au deffus
de la bafe ou de la racine de la langue. Le
fommet de cette arcade porte un petit corps
glanduleux , mollaffe , irrégulièrement co-
nique , que nous appelions la luette, f^oyei
Luette.
On trouve dans tous les livres d'anatomie
la dcfcription de la cloifon ou du voile du
palais ;, mais comme la meilleure eft à mon
fens celle qu'en a donnée M. Littre , dans
les mémoires de facadémie des Sciences , ann.
1718 , page 300, je dois m'en fervir ici par
préférence.
C'eft , dit ce célèbre anatomifte , une
eipece de membrane qui eft d'une confiftance
inolle 5 de couleur blanchâtre , gluante au
taô , convexe par-delfus & concave par-
deifous ^ elle eft eî#iron d'une demi-ligne
d'cpaiifcur , de quinze lignes d'un côté à
l'autre, & d'un pouce de devant en arrière :
fa fituation eft à la partie poftérieure de la
voûte du palais , & elle eft plus antérieure ,
plus haute & plus élevée que celle de l'épi-
glotîe de trois k quatre lignes : fon attache
eli; par devant à la partie poftérieure des os
C L O
du palais , par les côtés aux parties latérales
& Hiternes des mêmes os &: des apophyfès
ptérigoïdes ^ par fa partie poftérieure , elle
n'eft attachée à rien , excepté par les deux
côtés , étant lâche & comme pendante par
fon milieu.
Cette cloifon eft éloignée de la glotte d'en-
viron quatre lignes ^ cependant toujours
prête à changer de fituation dans les corps
vivans , lorfque ces parties font en aftion ,
tantôt s'approchant , & tantôt s'éloignant
les unes des autres : elle forme par fa face
inférieure la partie poftérieure de la voiite
du palais , & par fa face fiipérieure la par-
tie poftérieure & inférieure du nez.
On remarque du côté de la face inférieure
de cette cloifon deux manières d'arcs muf-
culeux , l'un & l'autre un peu féparés au
milieu de^a partie fiipérieure , fitués tranf-
verfalemwit l'un vers le devant & l'autre fur
le derrière. L'aâe antérieur eft un peu incliné
par en-bas & en devant f, il s'attache par
une de ks branches à la partie poftérieure
& inférieure d'un des côtés de la langue ,
& par l'autre branche au même endroit de
l'autre côté. L'arc poftérieur eft incliné par
en-bas & en arrière , & il s'attache par une
branche à un des côtés du pharynx , & par
fautre branche au même endroit de l'autre
côté. On obfèrve entre fès deux arcs ou ar-
cades les deux glandes dites amygdales , qui
font placées l'une au côté droit , l'autre au
côté gauche. Enfin la cloifon du palais eft
compofée de deux membranes , de quantité
de glandes , &. de plufieurs mufcles , qu'il
fera toujours impofïïble de bien décrire.
On appcrçoit dans les corps vivans dont
la bouche eft beaucoup fendue , & qui ont
la langue petite , que cette cloifon fe porte
en en-haut , tantôt en devant , tantôt même
en arrière , & qu'elle fè porte en en-bas ,
tantôt aufll en devant , & tantôt aufli en
arrière ;, d'où l'on peut conclure qu'elle peut
fermer tantôt le paflàge du gofier à la bou -
che , & quelquefois aulfi couvrir la glotte.
Mais outre que la cloifon du palais fait 1^
fonction de valvule aux narines & au gofier ,
en empêchant de revenir par les narines ce
qu'on avale, principalement la boiflbn, elle
a d'autres uiàges que M. Littre a palfés fous
filence,&qui ne méritoient de n'être pas omis.
D'abord elle fort à conduire daas le pharynx
C L O
lâ lymphe lacrymale & la lymphe mucila-
gincufe qui s'amalTe continuellement ilir la
voûte du palais ^ de plus , e'ell une macliine
qui aide à poulTer en en- bas les matières de
la déglutition , qui fert aux modulations de
lavoixjfbitque les fons & lavoixpafTeutpar
la bouche , par les narines ^ ou par l'un &
par l'autre : c'eft encore une machine qui ,
avec l'aide de la luette , préicrve les pou-
mons des matières qui pourroient entrer par
la glotte ^ enfin , qui induit & lubrifie la
furface des alimens qu'on eft fur le point
d'avaler.
Je voudrois bien auflî donner les ufages
des diiîerens muicles de la cloifon du palais^
mais ils ne fout pas alTez diftinâement con-
nus , ni m.ême les diffcrens mouvemens
dont cette cloifon eft capable : voilà comme
Tanatomie trouve fes limites dans les objets
qui fèmblent tomber le plus fous les fens &:
l'art du fcalpel. Mais eft-il de partie dans le
corps humain dont la méchanique & le jeu
ne tendent à confondre notre préfomption
6c notre fcience imaginaire? ( M. h chevalier
DE J AU COURT.)
Cloison d'Angers, ou Clouaison,
{Jurifpr.) eft une impofition que les anciens
dr.cs d'Anjou avoient oftroyée aux maire &
échevins d'Angers, pour entretenir les forti-
fications de leur ville &du château. Ce droit
fut nommé cloifon , parce qu'il étoit deftiné
à la cloifon ou clôture de la ville. En 1500 ,
il y eut un règlement au fujetde la cloifon àQ
la ville d'Angers , qui eft imprimé à la fin de
plufieurs coutumes d'Anjou , où l'on peut
voir fur quelles marchandifes onlevoit cette
impofition. V. auffi Choppin/Lf/- tart. 50 de
la coutume d'Anjou , tome 1 , page 482, , de
la troifieme édition de Sonnius. M. Pérard ,
page ^17,. {A)
* CLOISONNAGE , f. m. {Archited. )
a deux acceptions ;, il fè dit de tout ouvrage
de meuuiferie ou de charpente fait en entier
à la manière des cloifbns ^ & dans un ou-
vrage de menuiferie & de charpente où.inj
partie feulement eft faite en cloiibn , ol les
autres d'une autre manière ;, il iè dit de la
partie faite en cloifon qu'on appelle le cloi-
fonnage. V. ClOISON.
CLOITRE , f m. terme dtarchiteâure ^
du latin clauflrum , & du françois clos : fous
c-2 nom ou comprend &: les galeries ou por-
C L O i^f
tiques couverts dans un monaftere où Ce pro •
mènent les religieux , & l'efpace découvert
nommé préau que ces portiques entourent
ou environnent. On appelle auift cet efpace
jardin , parce qu'il eft ordinairement garni
de verdure , de gazon , de plate-bandes de
fleurs , <S'c. comme on le remarque dans
toutes les communautés religieuses. Le
cloître àQS chartreux à Rome , du defiin de
Michel Ange , eft un des plus réguliers pour
fon architecture ^ & celui des chiU'treux de
Paris eft le plus eftimé par les ouvrages de
peinture du célèbre le Sueur, peintre fran-
çois , qui attirent l'admiration de tous les
connoiifeurs en cet art. (P)
Cloître , {Hif, eccléfiaji.) Dans un ièns
plus général , cloître fignifie un monafiere de
perfonnes religieufes de l'un &; l'autre iexe , ôc
quelquefois il fe prend pour la vie monafti-
que : c'eft en ce fens qu'on dit qu'o/2 ne fait pa^
toujours fon falut dans le cloître^ mais quonle
fait plus dijjicilement dans le monde. La plu-
part des cloîtres ont été autrefois non feule-
mens des- maifons de piété , mais aufii àe,s
écoles où l'on enièignoit les langues & les
arts libéraux. C'eft pour cette raifôn qu'Of-
wald roi d'Angleterre , comme nous l'appre-
nons de Bede , {hijl. liv. III , ck. iij.) donna
plufieurs terres & poiTeflions aux cloîtres ,
afin que la jeunclfe y fût bien élevée. Les
cloîtres de S. Denis en France , de S. Galcn
Suilîs , &: une infinité d'autres , avoient été
non feulement richement dotés à cette fin ,
mais encore décorés de plufieurs privilèges,
& principalement du droit d'afyle pour ceux
qui craignoient la rigueur de la juftice. Ils
fervoient aulTi de prifcns , & principalement
aux princes , foit rebelles , foit malhcuieux ,
exclus ou dépofés du trône. L'hiftoire by-
zantine & celle de France en fournilieut de
fréquens exemples. (G)
Cloître , {Comm.) nom qu'on donne au
comptoir ou raagafin que quelques villes
d'Allemagne ont à Kerg.
C'étoit autrefois le palais épifcopal & la
demeure des chanoines. Les rois de Dane-
marck donnèrent ce vafte bâtiment aux mar-
chands de Hambourg, Lubek, Brème & aii-
tres villes anfëatiques , après en avoir chalïë
i'évêqiie & les chanoines.
Il a conièrvé le nom de cloître : les ncgo-
cians qui rocc'-îpqr.t 5 ^x: qui ne foiit con>
25>^ C L O
merce que du poifTon (èc ou falé , portent
celui de moines. Ils ne fbuffrent point d'hom-
mes mariés parmi eux \, ceux qui veulent
prendre femme font obligés de fortir du
cloître : ils peuvent cependant trafiquer &
entretenir corrcfpondanceavec leurs anciens
confrères. Voye^ Us diclionn. du Comm. & de
Trév. (G)
Cloître , (Jardin.) fè dit dans unbof-
quet , d'une falle verte , quarrée , à doirbles
paliffades , autour de laquelle on tourne
comme on fait dans les cloîtres des couvens.
[K)
GLONEFORT , (Géo^. mod.) petite ville
d'Irlande au comté de Galloway , dans la
province de Connaug^ht.
CLONISSE , f. f. (H//?, nat. Conchjliolog.)
efpece de came , ainfi nommée à Mar/èille :
arfella à Gènes \ armilla en Eipagne \peloris
& ckametrachea chez \ts Grecs : chama afpera
chez les Latins , félon Belon , qui en a fait
graver une figure aiîèz médiocre , dans fbn
ouvrage de aquatilihus , imprimé en 1553.
En 1554 Rondelet l'a fait graver , tejîaceo-
rum 5 page i6 , fous le nom de conchula ru-
gata ou coquille ridée \ & Rumphe , en
1705 . dans fon Mufœum , page 160, plan-
che XLVllî , jig. 5 , fous le nom de chama
'wyfs-fchulp dicla. Klein .dans fon Tejïament,
■imprimé en 1753 , page 146, /pec. 2, lin
donne diiTéreiiics délignations , Ibusle nom
de cricomphalos Lujiranica alho cortice teéla^
quamfubminius ciireus purpureus & palecris
color dijlinguunt ^bonanni ; il l'appelle encore
tjuadrans plicata ^ page 155 > efpecc 5. J'en
ai fait graver trois figures avec l'animal ,
dans m.on Hijloire naturelle du Sénégal ^\n\-
bliée en 1757 , page 116 , planche Xf^I ,
figure I. Les V^énitiens l'appellent èiverone,
piverone ou piperone ;, les habitans de Ritni-
iii , Ravenne ■& Ancone , autrefois /or^ra-
jos ^ félon Belon", & aujourd'hui /j^vérjc-
cia , ièlon M. Plancus j & les naturels du
Sénégal bouckch.
Cor/ t.'/7/f.La coquille delac/oTz/^eftépaiffc,
prefque ronde , large d'environ deux pouces ,
& un peu moins longue |, elle eft convexe ,
fort renflée , & d'une profondeur prefqu'une
fois moindre que fa longueur : fa furface eft
relevée d'une quarantaine de cannelurestranl
verfales , demi-circulaires & ridées , qui s'ef-
facent & dirparoilTent à médire qu'elles ap-
C L O
prochentdu fommet \ là elles femblent quel-
quefois traverfées par d'autres cannelures
longitudinales pre(que infenfibles.
Les deux battans font exactement fem-
blables , aiTez tranchans , mais épais fur leurs
bords , qui font marqués intérieurement
d'une centaine de dents infiniment petites.
Ils portent chacun , un peu au deflbus du
milieu de leur largeur , un fommet peu éle-
vé , tourné en bas en volute , & qui touche
prefque fon voifin par les côtés \ au defluus
de ce fommet ou voit une petite cavité ap-
platie en forme de cœur , ronde dans les
coquilles plus renflées , une fois plus longue
que large dans celles qui font plus applaties,
& toujours couverte de rides.
Le ligament qui joint les battans , fort en-
tièrement au dehors où il paroît convexe j il
eft deux fois plus court que la largeur de la
coquille , & placé au-defliis du fommet au-
quel il vient fe terminer^ il fembîe qu'il
quitte plus facilement le battant droit que le
gauche : ces deux battans font applatis &
comme creufés obliquement autour de lui.
Deux grofTes dents à-peu-près triangulai-
res , obtules & fort proches l'une de l'autre ,
forment la charnière du battant droit \ elles
ont deux cavités fur les côtés j & une troi-
fieme entr'elles , qui reçoivent les trois dents
du battant gauche.
Sur la fin face interne de chaque battant ,
on voit vers fes extrémités les attaches de
daix gros mufcles ronds , dont le fupérieur
eft fort peu plus grand que l'inférieur \ un
trait demi-circulaire , tracé vers le miilieu ,
marque le lieu où les lobes du manteau
étoient attachés aux mêmes battans.
Le périoftc , s'il y en a un fiir la face, ex-
térieure , n'eft pas fènfibîe.
Cette coquille eft quelquefois blanche au
dehors comme au dedans , mais pour l'or-
dinaire fa furface extérieure eft de couleur de
chair ou jaunâtre , quelquefois coupée dans
fa longueur par trois bandes fauves , ou cou-
verte de petites marbrures très-fines , en
zigzags bruns ou fiîuves , ou grins-de-lin.
Variétés. Les variétés qu'on obferve dans
cetie coquille. {Jowt fi nombreufes &ficon-
ndérables^ que je n'aurois ofé entreprendre
de les fixer , fi je n'en euftè obfèrvéplufieurs
fois les animaux qui le font trouvés parfaite-
ment fèniblables dans toutes. Ces variétés
confiftent.
C L O
confîi1:ent , non feulement dans fà forme ,
mais encore dans le nombre de fès canne-
lures , les unes approchent de la figure ronde,
& d'autres de la forme triangulaire. Dans
Iqs premières , le fommet s'applatit , & il
devient pointu dans les dernières ^ il y en a
de plus renflées & de moins renflées. Leur
profondeur furpalfe quelquefois la moitié de
leur longueur , mais elle n'eft jamais moin-
dre ^ leur fommet eft toujours placé au dei-
ibus du milieu de leur largeur.
A l'égard des cannelures , les jeunes co-
quilles les ont ordinairement liflés , & beau-
coup moins nombreufes que les vieilles ^ il
s'en trouve même dans leiquelles on n'en
compte que fèpt ou huit au lieu de quarante.
Dans quelques-unes , ces cannelures fe ter-
minent par une petite pointe autour de la
cavité qui paroît auprès du ligament , comme
dans la came que d'Argenville a fait graver
à la lettre B de la j}/anc/!e XX ir de fa Con-
chyliologie ^ & que je n'ai pas citée à cauie
cie l'étrange courbure que prend cette co-
quille , qui d'ailleurs ne diffère pas fenfible-
ment de la nôtre. La comparaifon que j'ai
Ihite dupaveraccia de Rimini , envoyé par
M. JanusPlancus , m'a confirmé dans le foup-
çon où j'étois que la clonijfe de Belon & de
Rondelet pourroit bien être la came obfer-
vée au Sénégal , & elle ne m'a pas per-
mis de trouver aucune différence notable en-
tre ces deux coquilles. La clonijfe deRimini,
e(l de celles que j'ai ditapprocher de la forme
triangulaire , qui font moins renflées , dont
les cannelures font liffes , au nombre de qua-
rante ou environ , & à fond blanc , marbré
de zigzags bruns ou gris-de-lin.
Animal. La coquille de la came n'eft pas
toujours ouverte ou béante , comme fèmble
l'exprimer fon nom '■, l'animal qui l'habite
l'ouvre & la ferme à fon gré ,- comme font
toutes les autres bivalves , dont les battans
ferment exa<âement ^ lorfqu'elle eft entr'ou-
verte, on apperçoit fon manteau , comme
une membrane fort mince divifée dans toute
fa longueur en deux lobes égaux , qui recou-
vrent chacun les parois intérieures de chaque
battant ^ leurs bords font légèrement ondes
eu crénelés , & s'étendent fur ceux de la
coquille fans fbrtir au dehors.
De l'extrémité fupérieure du manteau for-
tent deux trachées en forme de tuyaux char-
Tome FUI.
C L O 197
nus cylindriques , dont la Ion;!;:ueur égale la
fixieme partie de celle de la coquille. Ces
tuyaux font aufti élc4gnés du fomn-îct de la
coquille que du milieu de fa circonférence ,
& joints enfemble prefque jufqu'au milieu
de leur longueur , par une mem.brane fri-
fée,en forme de crête ^ ils font quelquefois,
inégaux & quelquefois d'égale grandeur ,
félon qu'il plaît à fanimal d'allonger ou de
groftlr davantage l'un ou l'autre. Cependant,
j'ai remarqué qv;e dans les adultes , le tuyau
poftérieur ell le plus grand : fa longueur fur-
palfe de moitié la largeur, & d'un tiers fau-
tre tuyau -, il eft couronné à Ion extrémité
par une mem.brane fort mince & tranfpa-
rente, de l'origine de laquelle fcrtent envi-,
ron quarante petits filets cylindriques tron-
qués à leur extrémité \ ces filets font une
fois plus longs que la membrane, & diipofés
fur un feul rang qui règne tout autour d'elle
en dehors.
Le tuyau antérieur n'a pas plus de lon-
gueur que de largeur ^ fon extrémité ne porte
point de membrane , elle eft feulement cou-
ronnée d'environ foixante filets femblables ,
dont trente font alternes plus courts ^ tous
ces filets , tant dans l'un que dans l'autre
tuyau , font mobiles & jouent félon la vo-
lonté de l'animal , fans doute pour détermi-
ner certains corps à envelopper leur canal
avec feau qu'ils y font entrer ^ le tuyau pof-
térieur rend les excrémens arec l'eau que le
tuyau antérieur a pompée.
Le pié de l'animal prend autant de formes
différentes qu'il plaît à l'animial ^ mais lorf-
qu'il fe tient tranquille , il paroît ordinaire-
ment fous la forme d'un croiffant, dont la
largeur eft prefque égale à celle de la co-
quille ^ fanimal s'en fert , non pour marcher
en rampant , mais pour pouffer en avant foa
corps avec fa coquille.
La couleur du corps de la doniffe eft blan-
châtre ^ la frange de fes tuyaux , & fefpece
de crête qui les unit enfemble , font rou-
geâtres. •
Mœurs. Ce coquillage eft fort commun
fur toute la côte du Cap-Vcrd , il fè tient
enfoncé verticalement dans les fables , les
deux tuyaux reftant toujours au defîlis pour
communiquer avec l'eau,
Ufages. Les Nègres en mangent la chair
cuite fiir les charbons qu fous les cendres ;
298 C L O
elle efc for t bonne , très-délicate & très-faine.
Remarques. La came eft , comme l'on
fait , un genre de coquillage qui fè range
naturellement dans la famille des bivalves
où nous l'avons placée. Voye[ notre Hif-
toire naturelle du Sénégal , page 2, 1 6. ( M.
Adanson. )
CLONMELL, ( Géog. mod, ) ville forte
d'Irlande , capitale du comté de Tipperary.
Long. 9 , 58 ^ lat. 52 , 28.
CLOPEUR , f. m. (Raffinerie defucre.)
eft une efpece de petit battoir quarré avec
r.nc poignée , le tout faifant neuf à dix pou-
ces de long : il ièrt à frapper iiir le cacheur ,
iorfque le cercle ne coule pas affez aifément
à l'endroit où l'on veut qu'il foit arrêté.
CLOPPENBOURG, ( Géog. mod. ) pe-
tite ville d'Allemagne au cercle de Weftpha-
lie , dans l'évêché de Munfter.
CLOPORTE , f. m. {HiJI. nau Infeclol.)
afellus , cutio , porcellio ; infeâe de couleur
grifc approchante de celle de l'âne , c'eft
pourquoi les Grecs lui ont donné le nom
d'o/205. Les plus grands cloportes ont à peine
wn travers de doigt de longueur , & un de-
mi-doigt de largeur. Ceux que l'on trouve
dans les fumiers & dans la terre , font de
couleur livide , noirâtre ^ mais ceux qui font
dans les lieux humides & fous différens
abris , comme l'écorce des arbres , les pier-
res 5 &c. ont une couleur grife. Les cloportes
ont quatorze pattes , fopt de chaque côté ^
il n'y a dans chacune qu'une feule articula-
tion , & on a peine à l'appercevoir. Ces in-
ièéies ont deux antennes courtes ^ dès qu'on
les touche ils fe replient en forme de globe j
on les a comparés dans cet état à une fève :
les côtés du corps font dentelés comme une
fcie. MoufFet. théat. infect. V. Insecte. (/)
Cloporte , ( Mat. méd. ) \qs cloportes
font très -recommandés dans la cachexie,
l-'faych-opifie , les embarras lymphatiques du
poumon , les obftruôions à.QS glandes , le
calcul & la goutte.
Junker qui rapporte ces vertus , ajoute que
nous manquons encore de preuves aflèz au-
thentiques pour que nous puifïlons nous y
fier abfolument : & comme d'ailleurs ces in-
ièâres portent beaucoup vers les voies uri-
naires qu'elles irritent aflèz vivement , cet
auteur confeille d'être fort circonfped dans
leur adininiftratioii.
CL O
On peut s'en fervir pourtant utilement
comme d'un diurétique affez efficace , pourvu
qu'on ne perde pas de vue la fage précau-
tion de ménager les voies urinaires , Se
principalement Iorfque ce ménagement eft
plus particulièrement indiqué par quelque
vice de ces organes.
Des praticiens célèbres ont confeille d'en
ufer long-temps & en petite dofe , pour dé-
truire les cataraftes commençantes , &
même en général pour toutes les maladies
des yeux.
On donne les cloportes , ou écrafés vivans
dans du vin , à la dofe de dix ou douze ^ ou
féchés & mis en poudre dans un véhicule
approprié , à la dofe d'un demi-fcrupule jus-
qu'à un fcrupule.
Les cloportes en poudre font un des ingré-
diens des pilules balfamiques de Morton. (b)
CLOQUE , f. f. en terme de blanchifferie
de cire , fe dit d'un ruban de cire qui fe noue ,
pour ainfi dire , & qui fe forme en bouton
quand le cylindre n'eft pas chargé d'eau éga-
lement par-tout. Voye[ CYLINDRE j voye:^
Blanchissage des cires.
CLORRE , v. aft. eft fynonyme 2i fermer.
Clorre , ( Jurifpr. ) il y a différentes rè-
gles à obferver par rapport au droit ou à
l'obligation dans lefquels chacun peut être
de clorre fon héritage.
Il eft libre en général à chacun de clorre
fon héritage , foit de haies , foffés ou mu-
railles , fi ce n'eft dans quelques coutumes
qui exigent pour ce une permiftion du fei-
gneur , comme celle d'Amiens , art. 197. Il
faut auffi excepter les héritages enclavés dans
les capitaineries royales , que l'on ne peut
enclorre de murailles làns une permiiîîoii
particulière du roi. Ordonn. des chajfes , c/i.
xxiv , art. 24.
Suivant les réglemens de police , on eft
obligé de fe clorre dans les villes julqu'à
neuf pies de hauteur;, mais cela ne s'obferve
point dans les bourgs & villages, ni daiis \iis^
campagnes , non pas même pour des prés
communs.
On eft feuleinent obligé dans \^% campa-
gnes ftc par-tout ailleurs , de contribuer à
l'entretien , réparation & reconftruâion des
murs mitoyens. Voy. MuR MITOYEN.
Clorre un compte , c eft le fixer , l'arrêter.
Cli^rt un inventaire , c'eft déclarer que l'o»
CLO
ji*a plus rien à y ajouter , & faire mention
de cette déclaration à la fin de l'inventaire.
Voy. ci-aprèsCOMPTE , COMMUNAUTÉ DE
BIENS, è Inventaire. {A)
CloRRE , en terme de Vannier^ c'eft paf-
fer l'ofier entre les pés , & emplir ainfi tout
l'efpace qu'il y a depuis le fond jufqu'au
bord d'une pièce de vanuiere.
CLOS , ( Agric. ) e/pace enfermé d'une
clôture , & cultivé j terrain que le proprié-
taire eft en droit de tenir fermé , fans qu'il
foit permis à d'autres d'y envoyer, en aucun
temps , pâturer leurs beftiaux. Ce terme
s'einploie fur-tout par oppofition aux terres
afTujetties au parcours , & que le propriétaire
eft obligé de laifTer ouvertes au bétail de la
communauté , après la première récolte fi
ce font des prés , & fi ce font des champs ,
pendant qu'ils font en jachère. V, CoMMU-
>;es. Jachères , Parcours.
Dans les pays où \qs terres font aflTujetties
au parcours , on fè délivre de cette forvitude
& on obtient le droit de clôture , en payant
à la communauté une portion de la valeur
du fonds , quelquefois le fixieme denier.
Dans le canton de Berne , fuivant les derniè-
res ordonnances , on paie le vingtième de-
nier. Il eft fiirprenant que cette fervitude iè
foitconfèrvée fi long- temps , parmi des peu-
ples qui jouiflènt d'ailleurs de la plus grande
liberté j cependant l'on n'eft véritablement
libre , par rapport à fos fonds , que lorf-
qu'on a fur eux une propriété entière Se
exclufive.
Les avantages de la clôture des prés font
fenfibles. i''. On ne peut arrofer , dans les
temps convenables , \qs prés fur lefquels on
n'a pas ce droit. 2°. On ne peut y établir
des prairies artificielles. 3°. On ne peut les
ouvrir lorfque la néceflîté i'exigeroit. 4°. On
n'y fait pas les améliorations dont ils font
fiifceptibles , lorsqu'on n'en doit pas tirer
tout le profit. 5°. Si on avoit feul le droit de
pâtnre, on n'y mettroitle bétail qu'en temps
fec & lorfqu'il ne faudroit pas l'arrofer , &
on n'y enverroit que peu de bêtes à la fois.
<5^. On ne fauroit , fans clôture , planter les
arbres qui conviendroient au terrain.
La clôrure des champs ne foroit pas moins
favorable à l'agriculture. 1°. La terre ameu-
blie par les premiers labours n'eft plus expo-
fée à être pétrie , foulée & durcie par ks
CLO 299
noinbreux troupeaux dent on la charge ,
quelque temps qu'il faflè. 2°. On pouiroit
tirer parti des champs l'année de repos , en
y femant certains grains , des légumes , &c.
3^. On les amélioreroit par la culture alter-
native. 4°. On laboureroit de la façon la
plus convenable à la nature du terrain , &
l'on ne foroit plus forcé de s'aflujettir à l'u-
fage , fou vent très-déraifonnable. 5**. Dans
\qs pays où l'on manque de foin & où l'on a
befoin de fumier , on établiroit des herbages
artificiels ou des prés naturels , fuivant la na-
ture du terrain.
La clôture des bois , for - tout pendant
qu'ils font jeunes , eft aufiî d'une abfolue né-
cefiité : dès qu'on a fait un taillis , ou que
la forêt eft coupée à net , on ne doit y per-
mettre l'entrée au bétail , que lorique les
jeunes plantes font aflez hautes , pour que
les bêtes ne puiflent atteindre & brouter les
jeunes crues ou plier les arbres. Si la coupe
fe fait en jardinant , & qu'on fc propofe de
laifl'er le terrain en bois , il faut en exclure
le bétail qui brouteroit infailliblement les
jeunes plantes. D'ailleurs la clôture des bois
eft le feul moyen d'en prévenir les dépréda-
tions , & d'établir des bois par la transplan-
tation.
Enfin les montagnes , que Ton fait pâtu-
rer, & où l'on ne feme point , devroient être
fermées , fans cela la propriété eft incom-
plète, & le terrain foulé & ravagé ne peut
entretenir qu'une moindre quantité de bef-
tiaux. Les bois n'y fauroient croître , & le
produit , à tous égards , en eft diminué.
Il réfulte donc que les terres qui ne font
point ferinces,produifent moins , ce qui fait
une diminution réelle & fort confidérrMe
de la richeffe nationale. La valeur des fomls
eft par conféquent diminuée aufiî pour le
propriétaire. Le fouverain , le feigneur , ou
tous ceux qui tirent les dîmes, les cenfès,
ou le prix des lods & ventes , perdent par la
diminution de la valeur du fonds ou celle
de fon produit. Dans les pays où il y a des
taxes for les terres , elles doivent être moin-
dres , ou le cultivateur eft forchargé , & ne
peut plus faire les avances néceilaires pour
la meilleure culture. En un mot , il n'eft
perfonne qui ne perde , & aucun ne ga-
gne par cette défenfe de clômre. La per-
iniflîon achetée pour certains terrains , de
Ppz
300 C L O
le fermer , multiplie trop les haies &' les
clôtures , au lieu qu'une pennijfTion ou un
ordre général les rendroit moins nécei-
làires. II ièroit donc de l'intérêt général du
fbuverain & des propriétaires , que tous les
domaines fuilént libres & fermés , que les
héritages grands ou petits fulîcnt réunis , ar-
rondis tSc à c/os ; & il le fouverain paroif-
foit d'abord faire quelque facrifice eu faveur
des propriétaires , il en feroit amplement
dédomjnagé par l'augmentation de la va-
leur des fonds Se par celle des piodudiions.
CLOSERIE , f. f, (Jurifprud. ) en quel-
ques provinces, (igm^^Q un petit bien de cam-
pagne compofé d'une maifon & autres bâti-
nieiis, & de quelques terres adjacentes qui
eii dépendent. On appelle ces fortes d'héri-
tages cloferies^ parce qu'ils ibnt ordinaire-
ment clos de foliés & de haies. Ces Clofenes
Ibut quelquefois louées , &. forment de pe-
tites fermes. {A)
CLOiilFJE , f/2 terme de Vannier , figniiîe
cette eljîece d'ouvrage qu'ils font en pie in
fur des pés de lattes, de cerceaux, ou d'au-
tres chofes Icmbliiblcs.
CLOS^l S, f. m. pi. terme de Pêche : les
cîofets ou cuhaujfcts font des efjjeces de hauts
parcs , qui ne diilbrent de ceux dont on don-
nera la defcription kXarticlc Parcs , qu'en
ce que la crolfe eu extrémité recourbée ell
quarrée , au lieu que celle des parcs eft ar-
rondie : ces rets dont la maille a dix- huit
lignes en quarré , font tendus fur des fonds,
des roches : ces pêcheries n'ont fouvent que
dix ou douze perches pour les forn-iCr j ainfi
elles ne diifereiit prefque de celles des hauts
parcs-, qu'en ce que les clofets font beaucoup
plus petits. On ne prend dans les clofets que
le poilion qui fc maille , puifque le fond en
eft ouvert , c'e 11- à-dire que le filet n'eft
point enfablé , ni le bas du parc fermé d'un
clayonnage.
CLOTAIREII, dixième roi de France ,
(Hiji. de France.) naquit en 584 , de Chil-
eeric fon prédécelfeur , Se de la fameufe
Frcdegonde. Ce prince n'avoit que quatre
mois lorlqu'il perdit fon père , qui mourut
aflafliné : il fut élevé fous la tutelle de Fre-
degondc & de Contran , roi de Bourgogne ,
fon oncle paternel. Le commencement de
iço iQ^iXQ fut agité par iine infinité d'orages j
C L O
Chîldebert , roi d'Auftrafie , fon coufin , af^
piroit à le dépouiller , fous prétexte de ven-
ger la mort de Sigcbert I , fon père , que
Iredegonde avoit fait afîaffiner ^ il entroit
dans fa treizième année lorfqu'il fut aban-
donné à lui-même , par la mort de fa mè-
re , princcffe plus capable que digne de ré-
gner : il avoit perdu , plufieurs années au-
paravant , Contran , fon principal appui ,
après elle. Childebert , fou ennemi , avoit
tranfmis fa haine contre lui à Théodebert II
& à Thierri , fes fils , qui lui avoient fuc-
cédé , l'un dans fes états d'Auftraiîe , l'au-
tre dans ceux de Bourgogne : Clotaire n'eût
pu fè foutenir fur le trône , fi ces deux prin-
ces , ligués pour l'en faire defcendre , fuf-
fënt toujours reftés unis. Plufieurs batailles
qu'il fbutint contre eux , l'avoient mis à deux
doigts de fa perte: heureufement pour lui la
divilionfe mitentre eux, & ils employèrent
à fe détruire , les armées qu'ils avoient le-
vées à deiiein d'opérer fa ruiné. Théode-
bert 5 vaincu par fon frère , fut allafiiné peu
de temps après fa défaite , 6ê Thierri n'eut
pas le temps de jouir de fà vidoire ^ ce
prince miOurut de dylîcnterie l'année d'après.
Clotaire fe rendit maître de toute la monar-
chie , mais il abufà cruellement de fa puif-
lance : moins roi que t}'ran , il fit attacher
Bruneliaut à la queue d'un cheval indomté-
Tcile fut la fin d'une princelfe , fille , femme
& mère d'une infinité de rois ; de quatre
enfans que laiiioit 1 hierri , le barbare en
maifacra deux , il confina le troifieme dans
un cloître ; le quatrième chercha fon falut
dans l'obfcurité , bi iè cacha fi bien , que
l'hiftoire n'a pu nous apprendre quelle fut fa
deftinée.
Clotaire gouverna avec une extrême foi-
bleilè \ & fi l'on fait confiller la puiiiance
dans l'autorité , jamais prince n'en eut moins
que luii il fut toujours liibordonné à fes mi-
nifires , qui tous tranchèrent du monarque»
Ce fut fous fon règne que les m.aires du pa-
lais jetèrent les fondemens de cette énorme
puilfance qui tint celle des rois à la chaîne ,
& finit par l'anéantir, lladou qui l'étoit
d'Aufirafie,obtintdG ne pouvoir être deftitué^
cette inamovibilité s'étendit aux pofièilëurs
des grandes charges de l'état , & dès-lors le
trône chancela Ibus les légitimes maîtres.
Clotaire II mourut eu 6z8 , 6c fut en-
C L O
terré dans l'églife de Saint Germain-dès- \
prés ^ il étoit âgé de 45 ans ;, fon règne éga- ■
loit prefque fon âge. On peut , dit l'auteur
de \ Abrégé chronologique , reinarquer trois
chofes fur ce prince : il eft le troifieme roi
qui ait réuni toute la monarchie ^ il eft le
fécond du nom \ & par une deftinée atta-
chée à ce nom , ayant eu pour partage le
royaume de Soiirons , le moins confidéra-
ble de tous, il réunit tous les autres, ainfi
qu avoit fait Clotaire I , fon aïeul. Il avoit
eu trois femmes , Haldetrude , Bertrude &
Sichilde : il laiifa deux enfans , Dagobert
qui lui fuccéda , Se Charibert qui eut une
partie de l'Aquitaine , mais plutôt comme
apanage que comme royaume.
De tous \t% hiftoriens qui ont traité de
riiiiloire de Clotaire 11 , aucun n'en a parié
avec plui de vérité que M. Velly \ voici le
tableau qu'en fait cet excellent écrivain :
« c'eft en vain , dit-il , que les hiftoriens de
fon temps ou trop eiclaves , ou trop com-
blés de £qs bienfaits , repréfentent ce monar-
que comme un prince juite cl débonnaire ^
iès actions nous le peignent fous d'autres
couleurs ;, rufurpation du trône de Thicrri ,
le malfacre des petits-fils de Brunehaut , la
mort cruelle de cette reine , celle tb Bofon ,
celle de Godin, iils de Garnier^ tout prouve
qu'il n'avait ni cette inflexible équité , ni
cette incroyable douceur que lui donnent
iQs panégyriftes . ce font àcs taches fi
contraires à l'efprit d'équité , aux loix de
l'honneur , aux maximes du chriftianifme ,
qu'il eft impolîîbie de les excufcr. Il eft hon-
teux pour l'humanité , que le liecle de Clo-
laire II n'y ait vu ni injuftice , ni cruauté ;
au refte , on ue peut difconvenir qu'il n'ait
été un prince vaillant & brave j habile dans
l'art de gouverner , populaire , affable , cha-
ritable pour les pauvres , libéral envers les
égliies , zélé pour Tobièrvation des faints
canons j ami & proteâeur ardent de tous
les lérviteurs de Dieu . . . c'eft à lui que nous
devons le code des loix allemandes ;, elles fu-
rent rédigées & mifes par écrit dans un par-
lom.ent de 33 évêques , & de 34 ducs aflèm-
blés fous fes ordres : il avoit Te (prit orné ,
lamoit les belles-lettres, fc piquoit de poli-
tefle & de galanterie '-, fa complaifance pour
le beau fèxe alloit à lexcès j on lui repro-
che fon extrême paffion pour la chalfe. w
C L O 301
Clotaire III , treizième roi de France ,
( première race. ) fils & fucceffeur de Clovis
II, fut couronné en 655 ^ il étoit âgé de
cinq ans ou environ. Il vécut fous la tutelle
& fous l'empire de Batilde, fa mère , &
d'Erchinoalde ou Archambault , maire du
palais I, quoiqu'il eût deux frères , Chiide-
ric II & Thierri II ^ qui , fuivant l'ufagc ,
dévoient être admis au partage de la monar-
chie , il la poliéda toute entière , il régna
feul , ou plutôt il fut fèul fur le trône juf-
qu'en 660 : ce fiit à cette époque qu'il remit
à Childeric II , fon frère , le fceptre d'Auiira-
Hq j il fe contenta de celui de Neuftrie &
de Bourgogne qu'il conferva jufqu'à iamort ,
qui iè rapporte à l'an 668. lï reçut les hon-
neurs funèbres au monaliere de Chelles ,
où la reine Batilde s'étoit confacrée : fon
règne n'eft marqué par aucun événement
mémorable -^ & l'hiitoire ne nous a point
révélé quelle fut fa vie privée : ii avoit dix-
neuf à vingt ans lorfcju'il mourut , ck ce
n'eft pas à cet âge que l'on peut avoir fait
de grandes chofès. D'ailleurs les rois de la
première race , depuis Dagobert I , ne lu-
rent point deftinés à jouer un rôle bien inté-
reftaut. Thierri II , fon frère , qui juiqu'a-
lors avoit vécu obfcur , lui fuccéda , par
\qs foins d'Ebroin ^ mais la haine qu'on
portoit à ce miniftre rejaillit fur lui , & le
roi en fut la victime ^ oii le confina dans
l'abbaye de Saint Denis , d'où ii ne fortit
que long-temps après. (M-r)
CLOTHO , voyei Parques.
CLOTURE ou ENCLOS , f. f. terme
(£ Architeclure , mur de maçonnerie ou grille
de fer qui enferme une eipace , tel que l'en-
ceinte d'un monaftere , l'étendue d'un parc-^
d'un jardin de propreté , fruitier , potager y
&c.{P)
Clôture^ (7wr/7^.) dans lesmouafteres
de filles , a deux fignifications différentes.
L'une a rapport au vœu que les religieu-
fès font d'obferver la clôture perpétuelle ,
c'eft-à-dire de ne point fortir du monafèerc
L'autre eft pour ejcprlmer les murs , por-
tes tx. grilles , qu'il n'eft pas permis auxrcli-
gieulès de palier , &.dans l'intérieur defquels
les étrangers , fbit liommes ou femmes , ne
peuvent , fuivant l'û/r. 31. de l'ordonnance
de Blois, entrer fans permiflion du fupérieur
eccléfialiiqiie , permilTioii qui ue s'accorde
301 C L O
point fans nécefilté , comme aux médecins,
chirurgiens, &c. Suivant le droit commun ,
c'eft à 1 evêque diocéiàin à donner ces per-
niifîions.
Il en faut excepter les monafteres exempts
de la jurifdidlion de l'évêque , où ces per-
mifîîons peuvent être données par leur iùpé-
rieur eccléfiaftique , fiiivant Vart. 19 de
redit de 1^95.
Ce même article fùppofè qu'il y a des cas
oîi on peut permettre aux religieufes de for-
tir , comme pour aller aux eaux , lorfque
cela eft nécelTaire pour leur iânté ^ mais
c'eft à l'évêque feul à donner ces permir-
fîons , même dans les monafteres exempts :
c'eft ce que décide Yan. 1 de la déclaration
du ro février 1742.
Toutes ces permifîions pour ibrtir du mo-
naftere, ou à des laïques pour y entrer,
doivent être données par écrit.
Le roi & la reine ont feuls le droit d'en-
trer dans les maifous cloîtrées , fans permif-
iïon du iiipérieur eccléfiaftique.
Les évêques & autres fapérieurs eccléfîal^
tiques , en faifant leur vifîte dans les monaf-
teres , examinent fi la clôture y eft bien ob-
fèrvée ^ & fî elle ne l'eft pas , que les murs
ne foient pas afTez hauts , que les portes &
les grilles ne foient pas bien clofes ni fi'ires ,
ils peuvent ordonner ce qui eft néceifaire
pour faire obferver la clôture. [A]
Clôture d'un compte , d'un inventaire ;
c'eft l'arrêté &: l'état final d'un inventaire ou
d'un compte fait par des afTociés en quelque
commerce, ou par un négociant qui fe rend
compte à lui-même de fes affaires. P^oye^
Compte , LnveiNtaire. ( G )
Clôture , en terme de Vannier^ voyei
Closerie.
* CLOU , f. m. ( Art. méch. ) petit ou-
vrage en or, ou argent, ou fer, ou cuivre ,
à pointe par un bout & à tête par l'autre ,
dont le corps eft rond ou à face, mais va en
diminuant de la tête à la pointe, & dont la
tête eft d'un grand nombre de forme difîc-
rentes , félon les ufages auxquels on le def-
tine. Les clous en fer fe forgent , les autres fe
fondent \ la fabrication de ces derniers n'a
rien de particulier , c'eft un ouvrage de fon-
deur très -commun. Nous allons expliquer
comme on fabrique les clous en fer : nous
pbferverons d'abord qu'il y en a de deux
C L O
fortes , les clous ordinaires , & les clous d'é-
pingles.
Des clous ordinaires. On donne le nom de
clomier tout court , aux ouvriers qui font
ces clous. Les outils du cloutier font en pe-
tit nombre : ils confîftent en une forge , au-
tour de laquelle on pofe des blocs ou billots
qui fervent de bafe au pis d'étape , à la
clouycre ou cloutiere , &: au cifeau.
Les métaux dont on fe fèrt le plus ordi-
nairement pour faire des clous , font l'or ,
l'argent , le cuivre , & principalement le fer.
Les clous de fer fe forgent au marteau
fur une enclume ;, les autres fè fondent par
les orfèvres ou les fondeurs.
Pour faire un clou , on prend une verge
de fer plus ou ijioins longue \ on la chauffe
par un bout dan^ la forge ^ & , quand elle
eft rouge , on Xamorce , c'eft-à-dire , qu'on
forme la lame du clou fur l'enclume avec ua
marteau. Quand la lame eft formée , orx.
coupe le clou de la longueur néceffaire avec
le marteau, fur un morceau d'acier tran-
chant appelle cifeau.
Le clou étant coupé , on le pafTe dans la
clouyere par le bout pointu , & on y forme
la tête à coups de marteau. La clouyere eft
un morceau de fer long d'environ trois pou-
ces , attaché près de l'enclume, & à l'extré-
mité duquel il y a un trou proportionné à
la grofTcur du clou qu'on yeut faire.
Après cette opération , on fait fortir le
clou de la clouyere , & on en recommence
un autre , ainfi de fuite , jufqu'à ce que la
verge de ferfoitufee.
Le clous fe fabriquent fî promptement ,
qu'on en fait deux de fuite fans être obligé
de rechauffer le fer. Nous allons dire un mot
des différentes fortes de clous.
Il y a de la hroquette d'un quart ou de
quatre onces le millier , de demi-livre , de
trois quarts , d'une livre , de cinq quarts ,
de fîx quarts , &: de fept quarts.
Les clous a couvreurs & h. maçons doivent
être à tête plate. On les nomme clous de bou"
che^ parce que les ouvriers qui les emploient
les tiennent plus communément à la bouche
pour les avoir plus à leur portée en travail-
lant. Us font de deux fortes j les clous à ar-
doifc , &: les clous à latte : les premiers font
de deux , de deux & demie , & de trois li-
vres au millier, Içs autres de quatre , & de
C LO
quatre livres & demie : ces derniers font plus
longs que les autres , parce qu'ils s'emploient
pour clouer la latte fur de vieux bois. Ils s'a-
chètent à la fomme.
Les dous à parquet ont la tête longue afin
qu'elle puiffe entrer dans le bois & s'y per-
dre. Il n'y a guère que \qs menuifiers qui
s'en fervent. k
Les clous à crochet font ainfi appelles ,
parce qu'au lieu de tête ils ont une pointe
de fer , qui 5 s'élevant en angle droit fur le
clou , ferme un véritable crochet.
Il y a de plufieurs fortes de clous afoul'urs ;
les uns qui s'achètent à la fomme & les au-
tres au compte : ceux à la fomme pefent
deux livres & demie , trois livres , trois livres
& demie , & quatre livres au millier : les
trois premières fortes font clous légers , les
autres font clous au poids.
Ceux au compte font encore de deuxefpe-
ces , des clous à fouliers à deux têtes , Se des
clous à fouliers à caboche j ou à pointe de
diamant -^ les uns & les autres font fort ma-
tériels & par cette raifon ne s'achètent point
au poids. Les porteurs de chaifes & croche-
teurs de Paris font prefque les feuls qui s'en
fervent à caufe qu'ils travaillent & marchent
iàns ceife far le pavé.
Les clous àfouflet , font àes clous faits com-
me des clous à fouliers , mais plus longs &
avec une tête plus large. On s'en fertpour les
gros foufflets des forges , & c'eft avec ces
clous que le cuir s'attache autour àes bois.
Les clous à river font encore à-peu-près
comme des clous à fouliers , avec cette dif-
férence que leur pointe n'eft point aiguë ,
mais aufli groife au bout qu'au deffous de la
tête. Ce font les chauderonniers qui s'en
fervent.
Les clous à cheval font des clous qui fer-
vent à attacher les fers qu'on met fous les
pies d^s chevaux pour confèrver leur corne.
Il y en a de deux fortes ^ les uns ordinaires ,
& les autres à glace. La feule différence
confifte dans la tête que les preiniers ont
prefque plate , & les autres en forme de pe-
tite pointe de dard , afin que dans les temps
de gelée , en s'enfonçant dans la glace , ils
rendent les pas des chevaux plus fermes.
Outre les clous de toute forte que font les
maîtres cloutiers de Paris , ils ont encore le
droit de forger des gourmettes de chevaux ,
C LO 303
des tourets ou gros clous tournés eîi rond ,
qui ont une tête arrêtée dans «ne partie de la
branche du mords appellée la gargouille , qui
doivent être mis deux fois au feu , bien ôc
duement étamés ^ des anneaux de toutes
grandeurs , des barres , chaînettes d'avaloire,
boucles à dojjieres , boucles de foupente, &
enfin tous les pet?ts ouvrages de fer qu'on
peut faire avec le marteau & l'enclume ,
{ans avoir befoin de lime ni étau , & qui
font à l'ufage des felliers , carrofllers , bour-
reliers , coffretiers & malletiers.
Il y a deux fortes de cloutiers , dont les
uns portent fimplement le nom de cloutiers ,
& les autres celui de cloutiers ^épingle, La
communauté des premiers eft compofée au-
jourd'hui à Paris de foixante-huit maîtres \
elle eft régie par quatre jurés , dont deux font
élus tous les ans \ favoir , un d'entre les nou-
veaux maîtres , & un d'entre les anciens.
Les cloutiers d'épingle font ceux qui font
de petits clous de fer ou de laiton, de diffé-
rentes groffeurs & longueurs , dont un bout
eft aiguifé eu pointe , & l'autre refoulé ou
applati.
On commence par f^r le fil de fer, c'eft-
à-dire qu'on le prélènte aux efpaces circu-
laires de l'inftrument appelle ejfe , pour con-
noître fon calibre. Cet inftrument eft ainfi
appelle parce qu'il eft compofé d'un fil de
fer contoiu-néen S fur lui-même, pour for-
mer de petits anneaux de diftercns diamè-
tres. On pafle enfuite le fil de fer , pour le
dreffer , à travers les rangs des pointes de
Yengin ou petite planche fur laquelle font
clouées des pointes en zigzag ; puis on le
coupe & on l'affile fur une meule par cin-
quantaine de brins. Quand ils font affilés ,
on les met au mordant qui eft une eipece
d'étau compofé de deux morceaux de fer ,
dont les têtes font acérées. Lorfqu'on veut
que leur tête foit plate , on frappe un ou
deux coups de marteau fur le bout qui ex-
cède le mordant j fi on veut qu'elle foit ron-
de , on la commence coinme fi on la vouloit
plate , on ne frappe qu'un coup ^ on la finit
enlliite avec le poinçon à efiamper , qui eft
une pièce d'acier qui fort à frapper les têtes.
Quand les clous font de laiton , car on en
fait d'or , de fer & de cuivre , on les blan-
chit en les découvrant , c'eft- à-dire , en les
lailTant fëjourner quelque temps dans une
304 C L O
dKïblution de tartre ou de cendre ^avelée
& d'eau commune : oîi les porte en fuite ni!
vannoir , où Oîi les ag-ite d;ui3 du fou ou du
tan, jufqu'àce qu ils foicKtfecs & plus jaunes.
Quand on veut les étamer , on fait foudre
de Fctain fin avec du lèl ammoniac qu'on
met dans \m vailîëau plus étroit à chacun de
iës deux bouts qu'au milieu , &; où on les
agite jufqu'à ce qu'ils fbient devenus {uf[\-
iàmment blancs.
Les meilleurs ouvriers font par jour juf-
qu'à dix ou douze mille de ces petits clous
dont les layetiers , les fculpteurs , les gaî-
iiiers fe fervent ordinairement.
Dans leurs ftatuts , ils prennent la qualité
de maîtres cloutiers , larmiers, étameurs &
inarchands ferronniers.
Chaque maître ne peut avoir que deux
apprentis qui doivent faire cinq ans d'ap-
prentifîage , & enfuite (èrvir les maîtres deux
autres années, pour avoir droit à la maîtrife.
Les apprentis de province , ainfî que ceux
de Paris , font tenus au chef-d'œuvre , ex-
cepté les fils de maîtres. Quant aux ftatuîs
des cloutiers d'épingle , voye:^ Epinglier.
§ Une obfervation edentielle à Faire
pour les perfonnes qui emploient \qs clous ^
c'ell qu'avant d'en acheter de groflbs par-
ties , il faut les effiyer ^ car on en fait de
métal , fi aigre ou caifaut , que fiir c^nt
clous qu'on emploie , il s'en caffera peut-
être plus d'un quart \ & quoique la perte
ne fbit pas conîidérable , rien ne chagrine
plus un ouvrier qui perd (on temps &
une partie de ia marchandifè. Cet ou-
vrier a calculé , par exemple , que dans
une garniture qu'il fait , il lui faut mille
clous & qu'il doit relier une heure pour
les employer '-, il fait fon marché fuivant
cela , mais il fe trouve trompé , fi \qs clous
ne font pas bons ^ car il mettra un quart de
temps de plus , & emploiera un quart plus
de marchandifè , outre que fon ouvrage de-
viendra défeôueux , parce que les pointes
de clous qui fe font caifés , ne lui permet-
tront plus de les placer dans des endroits
nécelfaires ^ cela découragera l'ouvrier avec
raifon. Ce détail n'eft point inutile , parce
que fi c'eft un homme du métier que life ce
paragraphe , il efpérera que les marchands
qui font ce commerce de clouterie en gros ,
profiteront de l'avis qu'on leur donne ici ,
C L O
qu'ils etfaieront les clous avant que d'en
conclure les marchés , & qu'ils obferveront
qu'ils foient faits d'une matière capable de
ibuvenir le coup de marteau. Si l'on fe donne
CCS foins pendant quelque temps , & qu'on
rebute tous ceux qui ne lëront j^as de bonne
qualité , les fondeurs de ces clous fe con-
formeront ncccll^remeut aux règles requi-
Çes pour faire de bonne marchandifè , en
employant de boniie matière , qui ait un
corps Tuffifant, pour les uiàges auxquels elle
efl: deftinée. Cette'matiere doit être com-
pofée de cent livres de laiton très-doux , &
de trois livres d'étain ou environ fiiivant la
prudence de l'ouvrier , le tout fondu &
moulé proprement & fans fbuflure. Pour les
éviter , & pour que tes fondeurs aient foin
de bien fecher leurs chafiîs , avant que d'y
couler la matière fondue , il faut qu'ils ob-
fèrvent encore d'y lailfer des évents conve-
nables , & que la matière foit fondue li-
quide comme de l'eau. On voit qu'au moyen
de quelque légère attention , on peut fè met-
tre à l'abri de tant de fripponneries qui fe
cominettent journellement dans ce genre de
commerce.
Il en efl de même de toutes les autres
qualités àz clous ; ainfi \m marchand qui
fait le commerce de cew^i de fer , doit exa-
miner foigneufement la qualité du fer , avec
lequel ils font fabriqués , qui doit être fi-
breux , & par une fuite néceifaire doux &
très-flexible. En caflknt quelques clous on
connoît fi les fers avec lefquels ils ont été
faits font de la qualité qu'ils doivent être.
S'il paroît à la cafTure de ces clous des grains
& des lames , le fer a été mauvais , & les
c/oi/j le feront par conféquent, & très-fra-
giles ^ fi au contraire on a de la peine àlw
cafFer, & qu'il paroifTe fur leurcafFure un
grain fibreux , pareil à celui qu'auroit un
morceau de bois qu'on auroit caflé éh le
forçant des deux mains , cet indice démon-
trera la bonté du fer & celle des clous.
Les inconvéniens qui réfultent de l'em-
ploi de cette mauvaife marchandifè font in-
nombrables \ on n'a qu'à réfléchir fur les
difierens ufages auxquels elle eft employée ,
& à l'importance des travaux qu'on ne peut
perfedtionner fans le fècours des clous , ^pour
convenir de la vérité de ce qu'on vient de
dire, (+)
Clou ,
CL O
CL O
Clou , {Hijî. anc. ) Tite-Live rapporte [ s étant avancée en dehors , s'endurcit
& fe
que les anciens Romains , encore grofllers J reiTerre à la bafe de la tumeur qu elle forme;
& fauvages , n avoient pour annales & pour
faftes que des clous , qu'ils attachoient au
mur du temple de Minerve. Il ajoute que
les Etruriens , peuple voilîn de Rome , en
fîchoient à pareille intention dans les murs
du temple de Nortia leur déeffe. Tels étoient
\qs premiers monumens dont on fe fervit
pour^onferver la mémoire des événemens ,
ail moins celle des années ^ ce qui prouve
qu'on connoilîbit encore bien peu l'écriture
à Rome , & rend douteux ce que les hifto-
riens ont raconté de cette ville avant fa prife
par les Gaulois. D'autres prétendent que
c'étoit unefîmple cérémonie de religion, &
fe fondent aufli iiir Tite-Live , qui dit que
fe diftateur ou un autre premier magiftrat
attachoit ce clou myftérieux aux ides de fep-
tembre , idibus feptembr. clavum pungat ;
mais ils n'expliquent ni le fens ni l'origine
de cette cérémonie , & Ja regardent feule-
ment comme un fecours à l'ancienne chrono-
Jogie, iiirabondamment ajoutée aux annales
par écrit.
On avoit encore coutume à Rome , dans
\q^ calamités publiques , d'attacher un clou
dans le temple de Jupiter. Dans une pefte
qui défola Rome , le clou facré fut placé par
le diftateur , & la contagion cefla. En cas
de troubles inteftins & de féceflion , c'eft-
à-dire de fchifme de la populace , on avoit
recours à ce clou. Et dans une circonftance
iînguliere où les dames romaines donnoient
à leurs maris des philtres qui les empoifbn-
noient , on penfa que le clou qui dans {qs
temps des troubles avoit affermi les hommes
dans le bon fens , pourroit bien produire le
même effet fur l'eiprit des femmes. On ignore
fes cérémonies qu'on employoit dans cet
aôe de religion. Tite-Live s'étant contenté
de remarquer qu'il n'appartenoit qu'au diéèa-
teur , ou à fon défaut au plus confidérable
des magiftrats , de placer le clou. Manlius
Capitolinus fut le premier diâ:atcur créé
pour cette fondHon. Mém. de t acad. des bdl.
Ut. tome VI. (G)
Clou , {Méd.) maladie de l'œil ; efpece
de ftaphylome , en grec ÏKoi , en latin clavus
oculi.
On donne le nom de clou au ftaphylome ,
quand par un ulcère de la cornée , l'uvéc '
Tome Vllh
ou lorfque la cornée s'endurcit pareillement,
& fe reiîerre de telle manière que la bafe de
la tumeur étant fort retrécie , la tumeur en
paroît éminente & arrondie en forme de
tête iphérique d'un clou. Cette tumeur dé-
truit la vue , &: ne fe guérit point , parce
qu'aucun ftaphylome n'eft guériflable. Voy.
Staphylome. Voyei aujfi tan, Clavus,
( M. le chevalier DE Jaucourt.)
CLOUÉ , adj. ( Maréchall. ) être cloué k
cheval , fignifie être très-ferme & ne fe point
ébranler , quelque violens que foient io.^
mouvemens.
Cloué , terme de blafon , qui fe dit d'un
collier de chien , & des fers à cheval dont
\qs clous paroiffent d'un autre émail.
Montferrier , d'or à trois fers de cheval de
gueules , cloués d'or. {JV)
CLOUET , f. m. efpece de petit cifeau
mouff!e de fer , à l'ufage des tonneliers : ils
s'en fervent pour enfoncer la neille dans le
jable d'une pièce de vin , à l'endroit où elle
feinte j il a environ un demi-poiice de lar-
geur par en-bas , & a par en-haut une tête
fer laquelle on frappe légèrement avec le
maillet , afin de faire entrer la neille.
CLOUIERE ou CLOUVIERE , ou
CLOUTIERE ( le plus ufité eft clouiere , >
f f. inftrument de fer qui fert au clouîier ,
principalement à former la tête du clou quoi-
que le clou foit rond ou quarré , félon que
le trou de la clouiere eft rond ou quarré.
^oye';^ f article Clou. On a des clouieres de
différentes formes & de toutes fertes de
grandeurs. Les ferruriers les forgent , &: ils
en ont auffî pour former la tête de leurs vis
& autres ouvrages.Les clouieres des ferruriert
font des elpecesd'eftampes en creux, rondes,
quarrées , barfelongues , ùc.
Clouiere, {Serrurerie & Clouterie.)OeH
une pièce de fer quarrée , à l'extrémité de
laquelle on a pratiqué un ou plufieurs trous
quarrés ou ronds , dans lefquels on fait entrer
la tige du clou de force j de forte que la par-
tie qui excède la clouiere , fe rabat & forme
la tête du clou.
Les maréchaux ont leurs clouieres : ces
clouieres fent montées fer des billots, 6c
fervent pour les clous de charrette.
Siiis la clouiere y l'ouvrier ne pourroit que
Qq
3G(î C L O
très-diiKcilenient former la tête des clous au
marteau. Voye'^^ïartich CloU.
GLOVïS - U - Grand , cinquième roi de
France , ( HiJIoire de France. ) naquit vers
l'an 468 de Chikleric fon prédéceifeur , &
de la reine de Tliuringe qui , n'ayant pu
vaincre fa pafllon , avoit quitté le roi Bazift
£on mari , & étoit venue trouver ce prince
Cil France. Si l'on en croit Fredegaire , Chil-
deric eut un ibngc qui préfageoit la gran-
deur de ce HI5 , & Içs malheurs de fa pof-
tcrité. Les cinq premières années du règne
de Clovis furent employées à des exercices
conformes à fon inclination : il fomentoit
\c courage de fes foldats , les accoutumoit à
la fatigue , & s'y endurciifoit lui-même : il
donnoit fréquemment des jeux publics ; &
c'éîoieut à^s courfes de chevaux , des com-
bats d'homme à homme , & contre des bê-
tes féroces : il leur montroit fans ceffc l'image
de la guerre , à laquelle il avoit confacré
ion règne. Ses états étoient trop bornés
pour un cœur auffi ambitieux que le Çiqh :
il ne vouloit fouffrir dans les Gaules aucune
puilfance rivale de la fienne , & il afpi-
roit à en chafler , ou à afFujettir les Ro-
mains , les Vifigodis &: les Bourguignons
C LO
père ce Gilon q>;i avoit occupé le trône de
France pendant l'exil de Chilperic \ Clovis
lui fit trancher la tête , & l'imimola ainfi à^
ià iùreté & à fon relîéntiment. Cependant
ce qui prouve que cette rigueur étoit autant
dans fa politique que dans fon humeur , ce
fut fa clémence envers les Gaulois & les Ro-
mains qui avoient obéi à Siagrius : il leur
laifîà à tous leur religion , leur pays , leurs
coutumes , leurs loix , & ne voulut d'autre
prix de fa viûoire , que la gloire de leur
commander. Cette douceur affeÔée atta-
cha ces peuples à fa domination : & il n'eut
pas bcfoin d'une autre magie peur les main-
tenir fous fapuiilance. Les Rom>ains avoient
trop d'embarras en Italie peur fonger -à re-
conquérir ce qu'ils avoient perdu dans les
Gaules. L'entière foumiflion du Soilfonnois ,
fruit de la viftoire des François fur Siagrius ,
flit fuivie de la guerre de Thuringe '.une in-
valîon , vraie ou fuppofée , fur les terres des
Francs au delà du Rhin , en fut la caufe ou
le prétexte. Clovis accufbit les Thuringiens
d'avoir'excercé fur fes fujets les plus monf-
trueulès cruautés: {qs armes furent fécondées
par le plus heureux fuccès '^ tout fut mis à
feu & à làng dans la Thuringe ^ & ce royau-
qui en partageoient l'empire avec lui. Ses me alloit être réduit en province fujette
premiers regards iè tournèrent vers les Ro-
mains ^ foit que fa fierté fût flatée de fe me-
furer avec les anciens rois du monde , foit
que fà politique fût intéreffée à les chalfer ,
plein de confiance dans izs talens , dans la
valeur & l'intrépidité de- fon armée , il en-
voya Ibminer Siagrius , lieutenant de l'em-
pire romain dans les Gaules , de convenir
du jour & du lieu d'une bataille. Les Fran-
çois furent long-temps fidèles à cet uiàge ,
qu'ils apportèrent de la Germanie , qui fut
le berceau de leur nation. : ilsj:iédaignoient
toutes les rufes de guerre , 8l|.n'eftimoient
que les viftoires où la valeur avoit préfidé.
Vainqueur de Siagrius qui accepta le défi ,
Clovis pourfuivit ce général ^ & n'ayant pu
l'atteindre , il envoya des ambafiadeurs à
Touloufe , fbmmer Alaric , roi des Vifigoths,
aiiprès de qui il s'éîoit réfugié , de le lui li-
vrer , Se lui déclarer la guerre en cas de re-
fus. Alaric ne voulant point s'expofer à fon
relTentiment , hîi envoya le général vaincu ,
malgré les droits de Thofpitalité qui ren-
doient fa pcrfoune facrée. Siagrius avoit pour
lorfque l'illuftre Théodoric , roi des Oftro-
goths en Italie , défarma Clovis , & l'enga-
gea à fe contenter d'un tribut annuel. One
paix de plufieurs années fuccéda à ce traité 'y
les premiers mois furent confacrés aux noces
de Clovis avec Clotilde. Cette princeilè ,
nièce de Gondebaut, roi de Bourgogne ,
jouilfoit d'une réputation qui féduiiit le mo-
narque François : Clotilde étoit belle , fpiri.-
tuelle , ôc joignoit à ces heureufès qualités
toutes les grâces & toutes les vertus de fon
fexe. Il efl cependant à croire que le mérite
de Clotilde , tout grand qu'il étoit , ne fut
pas l'unique motif quidcîerminaC/ov/.î à cette
alliance : & ce n'ell pas trop préfumer de la
politique de ce conquérant, que de penfer
qu'il regarda ce mariage comme un titre qui
l'autorjlbit à dépouiller Gondebaut du royau-
me de Bourgogne. Chilperic , père de Clo-
tilde , avoit péri par l'ordre de Gondebaut ,
& fa qualité de gendre fèmbloit exiger qu'il
fût fon vengeur. La nouvelle époufe avoit
été élevée dans le fein de la religion : elle
multiplia fes efforts pour déterminer Clovis ^
CL O
à Ce pîîer au joug de la foi. Ses premières
tentatives furent iiifruâueufes : le monar-
que permit cependant que ies enfaus fulièut
lavés iur les fonts ^ mais la mort d'Inguio-
met , fbn aine , qui mourut peu de teinps
après la cérémonie , & la maladie de ion
f^ joad , qui fut aux portes à.i tombeau ,
s'cppjièrcnt aux vœux ardsîis de cette prin-
ceiib , ils ne furent accomplis qu'aprè:i la
bataille de Tolbiac contre les Allemands.
On prétend que C/ovis^ fur le point de per-
dre cette fameufè bataille , oc fatigué d'in-
voquer inutilement fes dieux , fè tourna \-ers
celui des chrétiens , qui couronna fes efforts.
Les hilloriens lui prêtent une alTez longue
prière , que fuivant eux il fit en préfence de
fou armée : mais c'eût été une indifcrétion
incompatible avec le caraélere d'un aufîi
grand général ^ ce n'étoit pas en montrant
fon défefpoir & en parlant d'abandonner les
dieux de fa nation qu'il pouvoit fe flatter de
ranimer le courage de les ibldats , qui tous
étoient idolâtres. Si , comme l'ajoutent ces
écrivains , il parvint à exciter de cette forte
l'ardeur des Francs , cette ardeur doit être
regardée comme un miracle. La déroute des
Allemands & des Sueves, leurs alliés, fut
complète , leur pays fut ravagé j & tous les
habitans auroient été chaffés ou exterminés ,
û le môme Théodork , qui avoit déjà obtenu
la grâce des Thuringiens , ne fût parvenu à
calmer le reffentiment de Clovis. Les vain-
cus fe fournirent , le roi leur permit le libre
exercice de leur religion , & leur conferva
leurs loix^ mais il feréfèrva le droit de con-
firmer l'éleélion de leurs fouverains , aux-
quels il fut défendu de prendre le titre de
roi , mais feulement celui de duc. Cette
conquête, qui ne coûta aux François qu'une
feule campagne , donne une haute idée de
leur valeur. Les Sueves feuls avoient été
long-temps le défefpoir des Romains : Céfar
avoit même regardé comme fort glorieux
d'avoir pu mettre le pié dans leur pays. Clo-
vis à fon retour fê montra fidèle au vœii
qu'il avoit fait d'embraiTer le chriftianifme :
il reçut le baptême par le miniftere de S.
Rémi , qui dans cette augufte cérémonie lui
parla avec une magnanimité finguliere. « Si-
cambre , dit ce prélat en lui adrelTant la pa-
role , autrefois fi fier, fi farouche, & que
la grâce rend aujourd'hui fi humble , fi fou-
C L O 307
mis 5 plie le col , adore ce que tu as brûlé ,
& brûle ce que tu as adoré. •» Rémi eût parlé
avec plus d'exactitude , s'il eût recommandé
à Clovis d'adorer ce qu'il eft impofîible de
brûler^ mais la religion lui pardonne en
faveur du faint enthouliafme quil'animoiî.
L'exem]jle c^2 CIcvis fut i'iùvi par une iiifî- ,
ni:é de.François qui dema.iclGrènî le bap-
tême. La con\erfion de ce monarque nenui-
fit point à i^Qs dQ&'m^ : elle lèrvit au con-
traire à en accélérer Texccution. L'cglifè
ctoit infeéfée de plufieurs (q^qs : le roi des
Vifîgoths & celui des Bourguignons éto'ent
Ariens ^ & leur héréfie excitoit la haine des
orthodoxes , qui form.oient le parti le plus
puifîànt , tous dévoient fe déclarer en fà fa-
veur contre les fèdèaires. Tout le clergé ca-
tholique , même celui de Rome , s'emprefîk
de lui donner des marques d'eftime & -d'a-
mour. Le pape , ou plutôt i'évêquc de Ro-
me , fuivant le ftyle en ufage alors , lui par-
loit fans cefTe d'un dieu qui devoit donner
à {ks armes les fiiccès les- plus éclatans : il
l'invoquoit dès-lors comme le protcâ:eur de
fon églifè. «Très-cher, très-glorieux, très -
illuflre fils , lui difoit-il , donnez cette fatis-
faclion à votre fainte mère; foyez pour elle
une colonne de fer j continuez , afin «[ue le
tout-puifî'ant protège votre perfbnne bc vo-
tre royaume , qu'il ordonne à ks anges ^e
vous guider dans toutes vos enîrepriies , &
qu'il vous donne la viétoire. » Une fembla-
ble épître eût été capable d'opérer la conver-
fion de Clovis, Il ne tarda pas à entrepren-
dre une nouvelle guerre j il chercha tous les
prétextes pour attaquer Gondebaut, dont les
états avoient allumé fa cupidité : les fouve-
rains en manquent rarement. Gondebaut
n'avoit qu'une petite partie de la Bourgo-
gne ^ Gcdigifile , ion frère , en partageoit
l'empire avec lui. Ces deux frères nourri!^
foient l'un contre l'autre une fecrete inimi^
tié : cette inimitié , pli^s puifTante fur Godi-
gifile que les nœuds du fang , le détermina
à folliciter le roi de France d'entrer en Bour-
gogne ^ ce qui fut bientôt exécuté. Gonde-
baut n'ayant pu arrêter l'impétuofité fran-
çoifè, fut vaincu & pourfuivi jufques dans
Avignon : il ne conferva fes états qu'en s'af-
fujettiffant à un tribut. Clovis avoit conjuré
fa ruine ^ il ne fe fût pas contenté de ce tri-
but 3 il fit dans la fuite plufieurs tentatives
Qq Z
3o8 C L O
pour le perdre , & il eût réufii dans ce pro-
jet fans Théodoric qui ne vouloit pas l'avoir
pour voiiin. La fbumiffion des villes Armo-
riques, c'eft-à-dire, de la Bretagne , fuivit
l'expédition de la Bourgogne : il ne fut plus
permis aux Bretons d'avoir des rois pour
les gouverner , mais feulement des ducs j
ainfî tous les peuples établis dans les Gau-
les , étoient ou îujets , ou tributaires de
notre monarchie. Les Vifigoîhs feuls avoient
confervé leur indépendance. Alaric ayant
jugé à propos de priver un é\'éque de ion
fiege , C/ovis affefta un faint zèle , & fei-
gnit de croire qu'il ne pouvoit fe difpen-
iër de prendre la défenfe de l'évêque dépof-
fédé, Alaric craignoit d'entrer en lice avec
ce monarque : fes fujets abâtardis par le
calme d'une longue paix , n'étoient pas en
état de fe mefurer avec les François : il eut
recours à la négociation ^ mais il éprouva
qu'un prince armé par la politique , eft im-
placable. C/ovis l'accufa d'avoir voulu l'af-
fafîîner : il étoit bien plus capable de lui
fuppofer ce crime qu'Alaric ne l'étoit de le
commettre. Rien ne put calmer l'indigna-
tion feinte ou véritable du monarque fran-
çois. Théodoric , qui régnoit avec tant de
gloire en Italie, & dont le roi des Vifigoths
avoit époufé la fille , lui écrivit les lettres
les plus preiTantes , qui toutes furent infruc-
tueufes. Les François en partant pour cette
expédition , firent un vœu qui étoit ordi-
naire aux Cattes , l'une des principales ti-
ges de leur nation ^ c'étoit de ne fe couper
les cheveux & la barbe que fur les dépouil-
les fanglantes des Vifigoths. C/ovis qui ne laif
ibit échapper aucune occafion de fe rendre
agréable aux orthodoxes , fit vœu de bâtir
une églife dans Paris, fous l'invocation de
S. Pierre & de S. Paul. On publia les plus
expreifes défenfcs de commettre aucunes
violences contre les perfonnes dévouées au
culte des autels ;, o^ n'a point d'exemple
de la diicipline qui fut exercée dans cette
guerre j C/ovis tua de fa propre main un fol-
dat pour avoir pris un peu de foin fur terre
ennemie. Les orthodoxes intéreifés aux
profpérités de fes armes , érigèrent en mi-
racles tous les événemens de cette campagne:
une biche , làns doute effrayée par le bruit
de la multitude , traverfe la Vienne à l'inf-
taiit que l'armée fe préparoit à paffer cette
CLO
rivière ^ c'étoit une biche envoyée par îe ciel
pour leur indiquer un gué : l'air paroiiToit
enflammé du côté de l'églife de Saint-Hi-
laire de Poitiers ;, c'étoit une marque de la
protcftion du faint qui avoit conjuré la ruine
des Vifigoths , parce qu'ils étoient Ariens.
Cependant C/ovis avançoit toujours , pré-
cédé par le bruit de ces miracles qui pro-
bablement ne furent pas les fèuls. Alaric ne
fè diffimuloit point fon infériorité devant des
troupes continuellement exercées & aguer-
ries par une infinité de combats & de yic-
toires. Il eût bien voulu tirer la guerre en lon-
gueur: il faifoitune retraite vers l'Auvergne j
mais ayant été forcé de s'arrêter dans les
plaines de Vouillé , fon armée fut taillée en
pièces , & lui-mêm.e périt de la main de
C/ovis, après avoir fait la plus belle déf eulè.
La foumiiïion de l'Albigeois , du Rouergue,
du Querci , de l'Auvergne , du Poitou , de la .
Saintonge & du Bourdelois , fut le fruit de
cette victoire j il ne refta plus aux Vifigoths
de leur domination , en deçà des Pyrénées
que la ville & le territoire de Narbonne ,
où ils proclamèrent Gefalic , fils du feu
roi. C/ovis dans tout le cours de fon règne ,
qui ne fut qu'un enchaînement de guerres ,
n'éprouva qu'une feule défaite ;, & ce fut
Ibba , général de Théodoric , qui eut la
gloire de la lui faire effuyer.
C/ovis reçut à Tours des ambaffadeurs de
l'empereur d'Orient : ils venoient le félici-
ter de la part de leur maître , fur la gloire
de fon règne. Anafl:afe lui envoyoit les 6r-
nemens de patrice , & des lettres qui l'invi-
toient à en prendre le titre ^ on lui donna
dès-lors les. noms pompeux de co/i/i// &d'ûz/-
guj/e, C'efi: ainfi que les empereurs , trop
foibles pour dominer dans les Gaules , ne
négligeoient rien pour y conlcrver un refte
de reipeâ: pour leur dignité , en y faifant
revivre les mêmes titres qu'avoient portés
ceux qui les avoient gouvernés dans le temps
de fon plus grand état.
Julqu'ici C/ovis a figuré en prince auquel
on ne peut reprocher qu'un excès d'ambi-
tion. Maintenant il va paroître en allié bar-
bare & fans foi , en parent dénaturé. Les
François étoient encore divifés en plufieurs
tribus: C/ovis étoit bien le général commun
de toute la nation '^ mais il n étoit pas l'uni-
que roi. Regnacaire régnoit dans le Cam-
C L O
brefis , Si^ebert dans Cologne ;, Riguiomer ,
dans îe Mans ç, Cararic , dans une partie de
" la Flandre : plufîeurs autres parens de Clovis
pofledoient , en pleine fouveraineté , des
états moins confidérables. Clovis avoit vécu
jufqu'alors dans la plus grande intimité avec
tous ces princes \ il en avoit tiré de puif-
fans fecours \ la réfolution fut formée de
les iàcrifier à la grandeur de fes flis. Il en-
gagea le fils de Sigebert à rafTafliner , & le
fit airafliner lui-même lorfqu'il eut confommé
cet horrible parricide. Devenu maître, par
trahifon , de la perfonne de Cararic , il
l'obligea de iê faire prêtre lui & fou fils ,
& les fit auffi-tôt maffacrer , fur le foup-
çon qu'ils méditoient une vengeance. Il en-
tra cnfuite dans le royaume de Cambrai ,
où Regnacaire lui fut livré , pies & poings
liés , par des traîtres qu'il avoit corrompus.
« As-tu fait ce tort à ta race, dit-il en apof-
trophant ce prince , de te lailTer ainfi lier
comme un efclave , & ne devois-tu pas pré-
venir cette honte par une mort honorable? »
II n'avoit pas fini ces mots qu'il lui ouvrit
le crâne d'un coup de hache. « Et toi , ajou-
ta-t-il en fe tournant vers Riquier, frère de
ce prince , fi tu avois défendu ton frère , on
jie l'auroit pas lié de cette forte. » Il lui fen-
dit également la tête. Riguiomer & tous \^%
autres qui avoient quelques prétentions au
titre de roi , périrent par ces lâches moyens.
Voilà quelles furent les principales a<ftions
de Clovis , premier roi chrétien : la religion
s'honoreroit plus d'avoir fait fa conquête s'il
fe fût montré m^oins féroce & moins bar-
bare , & l'on auroit plus de foi aux mira-
cles dont \ç.s hiftoriens ont cru devoir em-
bellir fon hiHoire. On a demandé la raifon
pourquoi ce prince commit plus de crimes
après fa converfion qu'auparavant ? Si l'on
fait attention qu'ils étoient moins un effet de
fon caractère que de fa politique, on pour-
roit croire que cette raifon vient de ce qu il
n'avoit point encore les mêmes motifs. Peut-
être cependant la religion mal entendue y
eut-elle quelque part ; le chriilianifme an-
nonce un dieu qui punit \ mais un dieu qui
pardonne. Un feul mot d'un de fes miniftres
liiffit pour effacer les Ibuillures de la vie
la plus longue & la plus criminelle , mais
feulement à ceux qui ibnt touchés d'un fin-
cere repentir. L'idolâtrie n'oiïroit pas cette
C L O 305^
confblation \ un païen pouvoit trembler dans
fa vieillcilè , dans la crainte d'être puni pour
des crimes commis dans fon enfance. Clovis
mourut l'an 511, âgé de quarante-cinq ans ,
dont il avoit régné trente : il laiffoit fix en-
fans \ deux de fà première femme , Thierri,
qui fut roi d'Auftrafie ^ & Teudichilde qui
fut inariée au roi de Vofiies , nation faxonne,
qui fijbfiftoit alors & qui ne fubfifte plus.
De ceux que lui donna Clotilde fa ieconde
femme , quatre lui fiirvécurent , Clodo-
mir, Childebert , Clotaire, & Clotilde,
Son corps fut porté dans la nouvelle égiifê
qu'il avoit fait bâtir pour accomplir le vœu
qu'il fit en partant pour la guerre contre
les Vifigoths. On lui doit plufieurs fon-
dations pieufes : il les fit pour duninuer
l'horreur que la poftérité pouvoit conce-
voir de {^s crimes. {M-y.)
Clovis II, douzième roi de France ,fiîs
& fiiccefléur de Dagobert I. Voye\ Sige-
bert II. ( liijh di France.)
Clovis III , /èizieme roi de France ,
fils & fuccelîéur de Thierry II , occupa le
trône depuis l'an 691 jufqu'en 695 , qui fut
l'époque de fà mort. Pépin ne l'y plaça que
parce qu'il voyoit encore du danger à s'y
placer lui-même j mais il ne lui laiffa que
l'ombre de la royauté , dont il fe réfèrva
toutes \&?, prérogatives. Il lui étoit d'autant
plus facile de /è revêtir de {^^ dépouilles ,
que le jeune monarque n'étoit point en état
de \q.% défendre : il avoit dix à onze ans
lorfqu'il parvint au trône , & quatorze à
quinze lorqu'il mourut. Voye-{^ PepIxN {Hip'
toire de France, ) ( M-Y, )
CLOUSEAUX , f. m. pi. ( Jurifprud. )
dont il e{t parlé dans la coutume d'Orléans ,
ankle 145 , (ont les jardins & enclos qui
font proche & autour de chaque bourgade
ou hamei^u. Voye\^ les auteurs des additions
aux notes de\' oumiQY fur cette coutume^ art,
145. (^)
CLOLi TERIE , f. f. {Comm. Arts méch,
& Gramm. ) Ce terme a plufîeurs acceptions ;
il (è dit 1°. à\i négoce des clous ; 2°. du lieu
où on en fabrique j 3°. d'un aifortiment de
toutes fortes de clous.
* CLOUTIER, f. f. Voyei Clou.
* (^LOURA , f. m. (Hijl. nat, OrnithoL
& Fêche. ) ciièau connu fur le récit des voya-
geurs 5 c'eft- à-dire , mal connu. Il fe trouve ,
310 € L O
à ce qu'on dit , à la Chine & dans Tlnde ,
où on le fait pêcher : il met le poiffon qu'il
attrape dans une poche qu'il a fous le hcc ,
d'où il ne peut defcendre plus bas , parce
qu'il y ed arrêté par un anneau qui fcire le
paiiajs. Quand l'oifcau eft forti de l'eau ,
on h contraint d'abord à rendre le jîoiflbn
qii'ii a pris e:i preffiuit la pojhc , ciiLire
à retourner à ia pjjiie en h friippant à coups
de bâton.
CLOYNE , ( G/og, mod. ) petite ville
d'Irlande au comté de Cork, dans la pro-
vince de Leinfter.
* CLUDO , f. m. ( HiJÎ. anc. ) poignard
de théâtre à l'ufage des Romains fur la fccne ,
& qui ne difFéroit en rien du nôtre j la lame
en rentroit dans le manche quand on s'en
frappoit ^ & unreirort fj^iraU'en faifoit (brtir
quand on s'ctoirfrappé.
* CLUENTIA , f. f. [Hiji.anc. ) le nom
d'une des trente-cinq tribus romaines. Voyci
Tribu.
CLUNDERT, ( Géograph.) petite ville
forte des Provinces-unies des pays-bas , dans
la Hollande méridionale , fijr les frontières
du Brabant hollandais.
CLUNY, ( Géogr. mjî. eccléf. ) Clunia-
cum fiirlaOrône, ville du Mâconnois , long.
2 2. , 8 ^ lat. 46 , 24. Ce n'étoit qu'un village
lorlque Bernon , abbé de Gigni , y fonda
une célèbre abbaye en 910 , des libéralités
de Guillaume I , duc d'Aquitaine.
L'é^^life eft une des plus vafles du royaume,
ayant oco pies de long fur 120 de large ,
& une double croifée.
Hugues I , duc de Bourgogne , petit fils
de Robert , roi de France , y prit l'habit
de religieux , & contribua beaucoup à la
conftrudbon de ce grand vaifTeau , entrepris
par faint Hugues , & con{àcré par le pape
Innocent H.
Cette abbaye a donné quatre papes , Ur-
bain n , Grégoire VII , Pafchal II & Urbain
V. Gélate II , fuyant la perfécution de Tem-
pei-eur Henri IV , fe réfugia à Clany & y
mourut 5 on voit encore fon tombeau dans
l'églilè 3 Guy de Bourgogne , archevêque de
Vienne , y fut élu pape fous le nom de
Calixte II en 11 19.
Innocent IV fe trouva à Cluny en 1241 ,
après la célébration du premier concile géné-
ral de Lyon , accompagné de deux patriar-
C L U
ches , de douze cardinaux , de trois arche-
vêques , de quinze ëvêques & de plufieurs
abbés : le roi faint Louis , la reine Blanche ,
fon frère le duc d'Artois & là fœur , l'empe-
reur de Conftantinople , les princes d'Ara-
gon & de Caftiile , le duc de Bourgogne ,
iîx comtes Se quantité de grands fcigneui-s j
s'y îrcuvcrciit e-iimcnie te^nps avec une fuite
nombreiîfè , fuiisque les religi^Lx, au nom-
bre de plus de cinq cents , quittallcut aucua
des lieux réguliers.
Le trélbr fut pillé jufqu'à trois fois du
temps des guerres de religion , les reliques
brûlées &; les châiTes emportées par les liu-
guenoîs j rin\'entaire du dernier pillage fait
au château de Hourdon , monte à plus de
deux millions.
La bibliothèque , fort curieufe en manuf-
crits qui alloient à 1^00 volumes , fut dif-
perfée. Le cœur de M. de Turenne eft dans
une boîte d'or au tréfbr , dépofé par le car-
dinal de Bouillon fon neveu, abbé de Cluny,
Cette abbaye, premier chef d'ordre de ia
régie de faint Benoit , a porté au loin fon
nom & fà fplendcur , & a eu dans fa dé-
pendance pli^s de 2000 monafteres. Ses pre-
miers abbés , Bernon , Odon , Aimar ,
Mayeul , Odilloi^ , Hugues , Pierre le Véné-
rable , fe font djftingués par leur favoir 8c
leur fainteté. Lc( premier abbé commenda-
taire fut Jean , tardinal de Lorraine , en
1529 .... Le commerce de la ville, qui a
trois paroilîès , eft en gants eftimés , en
toiles & en cuir. [C)
CLUSE , terme de fauconnerie ; c'eft le
crique le fauconnier fait entendre aux chiens,
lorfque l'oifeau a remis la perdrix dans le
buiiibn 'j ainfi clufer la perdrix , c'eft exciter
les chiens à faire fortir la perdrix du buifion
où elle s'eft rcmife.
Cluse (la) , Géogr. mod. petite ville
d'Italie , dans la Savoie , capitale de Fauci-
gny, fur l'Arve. Long. 24 , I2 ^ lat. 46.
CLUSIA, f. f. {Hifi. nat. bot. ) genre de
plante dont le nom a été dérivé de Charles
Clufius ou de l'éclufe d'Arras \ la fleur àt^
plantes de ce genre eft monopétale , faite
pour l'ordinaire en forme de foucoupe &
découpée \ quelquefois elleparoît comipofée
de pluiieurs pétales difpofées en rond ; il
s'élève du fond du calice un piftil entouré
d'une efpece d'anneau. Le piftil devient dans
C L Y
!a fuite un fruit ovale qui s'ouvre d'un bout
â l'autre en plufîeurs parties , & qui eft rem-
pli de femences obiongues recouvertes d'une
pulpe très-tendre , 8c attachées à un placenta
conique & fillonné. Plumier , nova plant.
Amer, gen. Voyei Plante. ( / )
CLUSONI , ( Géog. \ petite ville d'Italie
dans le Bergamafque ^ iur les frontières des
Grifons.
CLUSTUMINA , f. f. nom d'une des
trente-cinq tribus romaines. Fbje^TRlBÙ.
CLUYD ou CLYD , ( Géog. mod. ) grande
rivière de l'Ecolfe méridionale qui prend fîi
fburce dans le comté d'Annandale , & fc
jette dans le golfe de Cluyd,
CLUYDESDALE , ( Géog. mod. ) pays
de l'Ecolfe méridionale , entre ceux de
Lenox &: de Lothian , qui fe divife en haut
& bas.
CLYMENUM, (H/y?. /2<2/. bot:) genre
de plante dont les fleurs , les fruits & les tiges
font femblables à ceux de la fageiîe \ mais
les feuilles font rangées par paires le long
d'une côte , terminée par des vrilles. Tour-
ne fort, inji. rei herb. Voye[ PlanTE. (/;
CLYN , ( Géog. mod. ) petite ville de
l'Ecolfe feptentrionale , dans le comté de
Southerland , près de fembouchure du Bota.
CLYPEI-FORME , adj. {Fhyjique.)
fe dit d'une efpece de comète , dont la
forme ovale & oblongue eft femblable à
celle d'un bouclier. Harris.
CLYSSUS , C Chymie. ) terme technique
par lequel les chyîniftes ont déiigné di-
verfes préparations ou produits.
Ce nom eft plus particulièrement & plus
communément donné au produit volatil des
détonations du nitre avec différentes fubf-
tances : c'eft de ces dernières fubftances que
tirent î'^ur dénomination particulière les dif-
férens clyjjl/s de ce genre. C'eft ainfi qu'on
dit, clyjfus cC antimoine^ clyjfus de foufre ^
clyjjus de tartre , &c.
Pour les préparer on prend une cornue
tubulée de terre , que Von place dans lin
fourneau convenable , & à laquelle on adapte
un très-grand récipient, ou même une file de
balons cxaâemcut lûtes , dans chacun def-
quels on a mis une petite quantité d'eau ou
d*efprit-de-vin , & dont le dernier ou le
phis éloigné de la cornue , doit avoir une
petite ouverture ; on fait rougir le fond de la
CLY 31Î
cornue, & on projette cnfûite le mélange
par la tubulure , que l'on a foin de boucher
exactement pendant la détonation.
Les proportions de ce mélange peuvent
être variées à la volonté des artiftes , & les
auteurs les prefcrivent en dés proportions
très-ditfércntes. Les plus exactes pourtant
feroient celles moyennant lefquelles tous les
ingrédiens du mélange feroient exatStcmient
détruits , ou auroient fubi dans toutes leurs
parties les nouvelles combinaifons ou les
décompofitions , qui font la fuite de la dé-
tonation. Dans la fixation du nitre par le
tartre , par le foufre , que l'on mêle commu-
nément à parties égales , la proportion eft
allez exadtc.
L'explication de la formation des différens
clyffiis , &: la connoiifaMce de leur nature ,
appartient abfolunient à la théorie de la dé-
tonation. Voyei E|ÉTGNATION & NiTRE.
Ces clyjjus ont joui pendant allez long-
temps d'une grande célébrité à titre de mé-
dicamens ;, c'eft fur- tout du clyjjus d'anti-
moine , foit fimple, foit foufré , que les au-
^ teurs de chymie médicinale ont principale-
ment recommandé les vertus.
Le premier c'eft-à-dire le fimple, iè
préparoit avec un mélange de parties égales
de nitre & d'antimoine \ &c le fécond avec
le môme mélange , auquel on ajouioit une
partie de foufre : mais on a enfin reconnu
que l'un &; l'autre de ces clyjfus n'étoient
autre choIè qu'un acide très-ibible ^ étendu
par l'eau ou l'efprit-dc-vin employés à les
retenir dans les balons , & qui ne partici-
poit point des qualités utiles de l'antimoine.
On ne s'aviiè donc plus aujourd'hui de pré-
parer avec tant d'appareil une furple li-
queur acidulé , que l'on peut avoir fur le
champ & à bien moins de frais , par le mé-
lange de quelques gouttes d'acide vitriolique
ou niîreux , dans une quantité convenable
d'eau ou d'efprit-de-vin.
Les vapeurs qui fe détachent des menf-
trues actuellement agiflans avec efïèrvel-
cence^ fuh aclu ipfo effervefcentiœ , ont été
aufiî défignées par quelques chymiftes par
le nom générique de Clyjjus.
C'eft principalement à l'aétion de ces
clyjfus qu'eft duc l'abforption de l'air, que
iVl. Haies a obfcrvéc dans les difTcrentcs
eifervefcences qu'il a exécutées d. ns les
511 C L Y
vaiffeaux fermés : ces clyjfus font réellement
mifcibles à l'air , ou fubifieni avec lui une
combinaifon réelle, néceflairemeiit fuivie de
la fixation. Foye:[ Fixer.
Certains auteurs , comme Rullandus ,
Poterius Borrichius , ont aufîi donné le nom
de clyjfus à cette préparation , qui eft connue
aulîi fous le nom de pierre végétale , lapis
vegetabilis , qui confifte à réunir toutes les
parties utiles & elFentielles féparées d'une
plante par i'analyfe , après les avoir purifiées
&: rectifiées chacune féparément. Voye[ le
lexicon chymicum de Johnfon.
On peut regarder comme un clyffus de
cette dernière efpece , le potus medicatus de
Boerhaave , qu'il préparoit avec un gros
âielcofaccharum mêlé exadement par la tritu-
ration avec deux gros de iël alkali de Ta-
chenius , & dillous dans fix onces d'eau
diftillée & cohobée de la même plante qui
avoit fourni l'huile cffentielle , à laquelle il
ajoutoit un peu de firop delà même plante,
s'il fè trouvoit dans les boutiques.
C L Y
' cine , c'eft aufTi fous ce dernier que nous
parlerons de ce genre d'injedtion qu'on porte
dans les inteftins par le fondement , &: que
les Chinois en s'en fcrvant appellent le remède
des barbares. Cet article eji de M. le chevalier
DE JaUCOVRT,
C M
CMIELNTSKI ( Bogdan ) , Hijî. mod,
Hifîoire des Cofaques , hetman ou chef des
Cofaques , naquit dans l'obfcurité \ ion élé-
vation fut la récompenfe de fes fervices.
Il avoit porté les armes comme fimple ibl-
dat. Son courage l'avoit fait diftinguer de la
foule , fa fortune fut rapide : à peine une
belle aôion étoit-elle payée par un grade un
peu relevé, qu'il en faifoitune féconde pour
mériter un grade plus confidérable. C'eft
ainfi qu'accumulant toujours par fes fervices
\es dettes que fa patrie contraftoit avec lui,
il parvint au rang de capitaine. Son ambi-
tion n'étoit point encore fatisfaite , ilvouloit
commander à fes compatriotes. Ce peuple fu-
Le mot de clyffus a été pris encore par j perftitieux & barbare étoit plongé dans. la
quelques anciens chymiftes , dans une figni-
fication à-peu-prèsla même que celle du mot
quimejfence. Voyei QUINTESSENCE, {b)
CLYSTERE, LAVEMENT , REME-
DE , trois termes fynonymes en médecine ù
en pharmacie. Je ne les arrange point ici au
hazard , mais félon l'ordre chronologique de
leur fucceflîon dans la langue.
Il y a long-temps que clyfiere ne iè dit
plus \ lavement lui a fuccécïé : cepei^dant
î'abbé de S. Cyran le mettoit, fous le règne de
Louis XIV , au rang des mots déshonnêtes
qu'il reprocihoit au père GaraiTe , que quel-
ques-uns appelloientriJ/Z^'/ze^e la guerre des
je fuites ^ des janfenijies. Je n'entends ,difoit
le père Garaflé , par lavement^ que garga-
rifme ^ ce font les apothicaires qui ont pro-
fané ce mot à un ufage melTéant.
C'eft une chofe bien iingidiere que l'atta-
que de l'abbé de S. Cyran ^ c'en eft une autre
qui l'eft plus encore que la défenfè du P.
Garaffe. " •
On a fubftitué de nos jours le terme de
remède à celui de lavement ; remède eft équi-
voque , mais c'eft par cette raifon même qu'il
eft hoiuiête.
Clyfiere n'a plus lieu que dans le burlefque,
ôc lavement , que dans les auteurs de méde-
plus profonde ignorance , & de tous les arts
cultivés en Europe , ne connoilfoit que celui
delà guerre. CmielniskiXi'à connoiftanceavec
quelques favans , polit fes mœurs parle com-
merce des lettres , & acquit bientôt, par fou
éloquence , un afcendant irréfiftible furl'ef-
prit de ie% compatriotes. Il étudia enfuite les
intérêts des états voifins , le génie des peu-
ples , les intrigues des cours \ & devint en
peu de temps aufîi capable de repréfenterfa
nation dans une diète , que de la comman-
der dans un jour de combat. A la mort de
Sigifmond III , on l'envoj'^a en Pologne , où
il iiit bientôt gagner les bonnes grâces du
nouveau roi , pénétra fes deffeins fur la Tar-
tarie , & lui propofà des vues fi fages for
cette entreprife , que ce prince ne crut pas
en devoir confier l'exécution à d'autres mains.
Déjà tout étoit prêt pour cette expédition ,
lorfqu'un événement imprévu fit évanouir
toutes les efjjérances ducofaque.Lanobleffe
refufa de marcher. Les puiffances qui dé-
voient contribuer à la deftrudion des Tar-
tares , ne purent fournir les fecours qu'on
attendoit d'elles. L'appareil de guerre qui
couvroit la Pologne dif[:!arut en un inftant ,
& les troupes furent licenciées.
Cmielniski retourna donc dans fi patrie. Ce
n'étoit
C M I
lî'étoit ni par amitié pour Uladiflas , ni par
zele pour la république , qu'il étoit entré
dans le projet de cette expédition, il n'avoit
d'autre deilèin que de fe rendre redoutable
& puifTant. Indifférent fur le choix de {es
ennemis, égorgeant les hommes fans les haïr,
Tartare ou Polonois , tout lui étoit égal ,
pour\ u qu'il eût les armes à la main. Depuis
fon départ de Pologne , il cherchoit ini pré-
texte pour rompre avec cette puilfance avec
le même empreffement qu'il avoit marqué
pour la fervir. Mais trop foible par lui-même
pour tenir têrc à la république , il fe fortifia
de l'alliance des Ruifes fournis à la Pologne:
ces peuples abmtis par un long efclavage ,
portoicnt avec peine le joug Polonois, prêts
à le fecouer dès qu'ils trouveroient un chef
pour la révolte. La nobleife fjivoit pour eux
le fyllême politique adopté en Pologne , les
tenoit dans un efclavage rigoureux , confom-
moit dans la paix le fruit de leurs travaux ,
& prodiguoitleur fangdans la guerre ^ Cmïei
niski leur promit de \qs délivrer d'une domi-
nation odieufe , de les faire rentrer fous l'o-
béilfance au Czar , ou de leur laiifer choifir
tel chef & telle forme de gouvernement qu'il
leur plairoit. Ces magnifiques promeffes tirè-
rent les Ruilés de la profonde léthargie où
ils étoient plongés. D'un autre côté , Cmiel-
niski repréfentoit aux Cofaques que la pro-
tection que la république leur avoit accor-
dée n'étoit qu'une tyrannie déguifée , qu'elle
fe fervcit d'eux pour défendre fes frontières
contre les Tartares ^ qu'après tant de fervices
importans , lorfqu'ils s'étoient vus attaqués
eux-mêmes par leurs voiîins , la reconnoif-
fancedes Polonois avoit toujours été ou trop
foible ou trop lente , qu'enfin ils étoient alfez
puilfans pour vivre fans protefteur & fans
maîtres. Ces difcours firent fur l'cfprit des
Cofaques le même effet qu'ils avoient fait
fur celui àcs Ruffes , tout fe fouleva.
Tandis qu'en Pologne on délibéroit fiir
cet événement , qu'on publioit un ban ,
qu'on iè di^utoit far le nombre des troupes
& le partage du commandement , le Coih-
que alloit chercher un appui dans cette
même Tartarie où il avoit d'abord vouKi por-
ter la guerre. Le général Potoski fè hâta de
prévenir les effets de cette alliance. Mais il
commit une faute elfentielle. La république
avoit confervé quatre raille Cofaques atta-
Tome FUI,
C M I 315
chés à fon fervice. Il en forma l'avant-garde
de fon artnée. Il avoit eu foin de leur faire
jurer qu'ils mourroient fidèles à la Pologne»
Mais ce ferment ne devoit point raffurer un
républicain expérimenté qui devoit favoir
combien un Cofaque eft peu efclave de fa
parole , & combien un homme libre aime
fa patrie. Deux mille de ces foldats s'embar-
quèrent fur le Borifthene. A peine eurent-ils
perdu de vue le camp de Potoski , qu'ils je-
tèrent les en feignes polonoifes dans le
fleuve , & fe rangèrent fous celles^de leurs
compatriotes. Cmidniski courut au devant
de ceux qui côtoyoient la rive , les fit rou-
gir de porter les armes pour les oppreffeurs
de leur pays , les ramena à fon camp , &
tailla en pièces quinze cents Polonois qui
les accompagnoient.
Potoski fentit , mais trop tard , la faute
qu'il avoit commife. Il lui reftoit à peine
cinq mille foldats ç, l'armée de Cmicniski
étoit de quarante mille hommes , & grof-
fiffoit tous les jours. Potoski , trop foible
pour tenir tête à tant d'ennemis , fut con-
traint de rentrer en Pologne. Son armée pré-
cipitoit fa marche au milieu de fes chariots,
qui protégeaient fes flancs par un double
rempart.Elle s'enfonça dans uîie forêt épaiffe,
dont le fonds marécageux rendoit la route
auffi dangereufe que difficile. Les chariots
ne fèrvoient qu'à redoubler le défordre. Les
rangs étoient rom.pus à chaque pas. La forêt
retentiiîbit de cris mêlés au bruit des coups
de haches. Chacun fongeoit à fon falut ,
perfonne ne s'occupoit de celui de l'armée.
Au milieu de ce tumulte , les Cofaques ôc
les Tartares , dont les chevaux étoient ac-
coutumés à gravir dans les lieux \es plus
inaccefîîbles , pénètrent dans le bois. Les
Polonois, épuifés de fatigues , fe laifïènt
égorger fans réfiftance ^ ceux à qui il refle
affez de force pour fuir , s'engagent dans les
marais & y deineurent enfevelis. Pluiîeurs
rendent les armes. Les Tartares , occupés
au pillage , leur donnent la vie , moins par
pitié que par indifférence. Ce fut près de
Corfum que fe paffa cette boucherie.
L'alarme & l'épouvante pafferent jufques
aux frontières oppofées de la Pologne. On
s'attendoit à chaque inftant à voir le vaiii-
queur aux portes de Varfovie , lorfqu'on
reçut une lettre de Cmielniski z.àxQSkQ ^\x
Rr
314 C M I
roi. Il lui repré/èntoit que la tyrannie de la
noble/Te , & les exactions des fermiers du
domaine , avoient forcé la nation à prendre
les armes : qu'elle étoit prête à fe fcumettre
s'il vouloit lui rendre fes privilèges & fa li-
berté j que la dernière aôion dcvoit appren-
dre auxPolonois qu'il étoit dangereux d'op-
primer un peuple guerrier , & que tant que
ceux-ci feroientjuftes, les Cofaques feroient
fidèles. Uladiflas n'étoit plus lorfque cette
lettre arriva. Il venoit de termineur en Li-
thuanie une carrière alfez beUe pour ne lui
pas faire regretter la vie. Il étoit à craindre
que , pendant le trouble d'une éleftion ,
Cmielniski ne vînt apporter le fer & le feu au
milieu de la diète. On choifit , pour le fléchir ,
Adam Kifiel , palatin de Biraclaw , at-
taché comme lui , au rite grec. Ce fei-
g-neur étoit chargé par la république de
promettre aux Cofaques le rétablilfement de
leurs privilèges , une domination plus dou-
ée ^rrUne proteâiion plus réelle. Cmielniski
attendit ce député à Brialacerkiew. Il con-
gédia les Tartares, & renvoya une partie de
iès troupes. Mais il ordonna aux premiers
de ne pas s'éloigner , afin qu'il pût compter
fiir leur iècours au cas qu'il fût attaqué. Les
autres , fous la conduite de Czivonos , fe ré-
pandirent dans la Podolie & dans la Ruiîie ,
où ils commirent des ravages affreux.
Cmielniski fe hâta d'écrire à la république
pour défavouer la conduite de ce général , &
promit mêm.e de le livrer , ainfi que fes prin-
cipaux complices, à la vengeance des états.
Le nombre des rebelles grolTilToit tous les
j.ours. Les payfans de Podolie ne trouvaut
plus de quoi fiibfifî:er dans leurs chaumières,
pu renverfées ou brûlées , s'unirent aux Cofa-
ques pour réparer leur fortune. Cette armée ,
de plus de cent mille brigands , m.enaçoit la
Pologne. Le duc de ^^ifnowics paiTa le Bo-
rifthene à la tête de quelques troupes \ Janus
Tikewic.s , palatin de Kiovie , &: Offinoki ,
lieutenant-général de Lithuanie y ne tardè-
rent pas à fe joindre à lui ^ une noble ému-
lation les animcit, la diète étoit aflémblée
pour élire le iàcceflèur d'Uladiflas^ une vic-
toire remportée fur les Cofaques devenoit
un titre pour obtenir les fuifrages^ m.ais mal-
gré leurs efforts > ils ne purent attirer les
ïèbelles au combat. Ils fe bornèrent à ob-
fecv^. kui:s inouveinens.. CmidniskL tos relia
C M I
pas plus long- temps oifif, il vint fe joindre
à Czivonos. La nouvelle de fon arrivée ré-
pandit la terreur dans l'armée Polonoife ^
elle fe retira lâchement. Cmielniski en fut té-
moin f, mais ne fâchant à quel motif attri-
buer la fuite des ennemis , il craignit que ce
ne fût une rufe de guerre , & négligea de
les pourfuivre.
Cmielniski tourna fès pas vers Léopold.
Cette ville , mal fortifiée, fans vivres &- fans^
garnifon , étoit l'entrepôt des richeflés du
Levant. Le château fut bientôt emporté , la
viUe étoit déjà démantelée , l'ennemi s'ap-
prêtoit à donner l'affaut : les affiéges propo-
ferent aux Cofaques une fomme confidéra-
ble : on marchanda long-temps : ceux-ci
exagéroient leur mifere ^ Cmielniski exagé-
roit leurs richelfes : enfin la ville fut ra*
chetée. Cmielniski s'avança vers Zamofcié 5
la nobleffe Ruife , chafTée de fes châteaux
par les payfans unis aux Cofaques , s'était
jetée dans cette place. Ces vaiîaux rebelles
prefToient le fiege avec une ardeur que re-
doubloit le fouvenir des outrages & de la
tyrannie des nobles. Ceux-ci fentirent bien
qu'ils n'avoient aucun quartier à attendre»
Ils fe défendirent avec tant de vigueur ,
qu'ils forcèrent les ennemis à lever le fiege.
Cmielniski , pour fermer à la nobleffe le che-
min de la Ruflie , alla y cantonner fes trou-
pes. L'hiver vint fufpendre les opérations de
la guerre. La république demanda l'a paix
d'un ton fuppliant. Le Cofaque la reiufa
avec hauteur.
Enfin après bien des débats , la diète pro-
clama Jeati Cafimir roi de Pologne. Ce
prince , après avoir inutilement tenté auprès:
du Cofaque les voies de douceur & d'ac-
commodement , envoya contre eux André-
Firlei. Celui-ci attaqua les Cofaques dans,
leurs quartiers , s'empara de quelques places ,-
& par ces fuccès , rétablit la réputation des.
armes polonoifes. Le kam des Tartares ve-
noit de fe joindre à Cmielniski-^ ce ne fut pas~
fans dépit que ce général vit un allié fi pûif-
fant marcher de front avec lui , & s'afTocier
à ion expédition. Il affeéb cependant la plus,
parfaite intelligence avec le kam. Depuis
plufieurs fiecles on n'aroit vu une armée fi
nomfcreufè ^ elle étoit de plus de trois cents
mille- hommes^ fa marche couvroit une pro-
vijice eûlifircL elk inve£it la camp: poioiiûis^
C M I
Firlei ne fut point effrayé par l'appareil me-
naçant des troupes ennemies : il n'avoit que
neuf mille hommes à oppofer à cette multi-
tude : il s'étoit retiré fous les murs de Sbaras ,
& y avoit fait un amas prodig^ieux de muni-
tions de guerre 8c de bouche : « Mes amis ,
dit-il à fes foldats , nefoyezpoint étonnés du
nombre de nos ennemis, ils ibnt plus faciles à
vaincre qu'à compter , ils ne combattent que
par l'eipoir du pillag^e , ils ne trouveront
parmi nous que l'indigence , l'amour de la
gloire & de la liberté. Leiir multitude même
doit nous ralfurer. Notre camp occupe fi peu
de place , que les trois quarts de leurs forces
îcur deviennent inutiles. Voyez comme leurs
rangs font mal gafdés , nulle harmonie dans
leurs mouvemens , nulle difcipline dans leur
camp. Enfin quand tous ces motifs ne de-
vraient pas ranimer votre courage, vous êtes
Poîonois , & il s'agit du falut de votre patrie. »
On l'interrompit par des cris , & chacun jura
àe mourir les armes à la main , plutôt que
iic fuir ou de fe rendre.
Le 13 juillet 1649, les affiégeans paru-
rent fous les armes au point du jour. Le kam
lui-même étoit à la tête des Tartares , Cmiel-
nisJd s'étoit placé au premier rang des Cofa-
ques ; Firlei rangea fès Poîonois le long des
retranchem.ens , & choifît pour lui le polèe
le plus périlleux : ce fut de fon côté que l'at-
taque commença , il la foutint avec vigueur ^
mais à l'avantage du nom.bre , les ennemis
joignoient celui du terrain. Malgré l'iné-
branlable fermeté du général Poîonois , le
retranchement fut forcé , abandonné , repris
plufieurs fois ;, les aifaillans avoient à chaque
moment des troupes fraîches pour rempla-
cer celles qui avoient combattu. Ils ne laif-
foieîit point reipirer les Poîonois \ ceux-ci
cpuifës de fatigues , la plupart percés de
coups , ne dormoient , ne mangeoient que
les armes à la main \ mais leur courage s'ac-
croilfoit avec le péril , êc les alliés le« trou-
vèrent plus fermes dans les'dernieres attaques
que dans les premières. Cmklniski vit bien
qu'il falioit un fiege dans les formes , & fit
ouvrir la tranchée f, les travaux furent bien-
tôt pouffes jufqu'aux pies des retranchemens.
Le nombre des Poîonois diminué par tant
d'attaques , ne pouvoit plus faffire à garder
un efpace il vafte , il fallut élever des retran-
chemens plus étroits derrière les premiers ,
C M I 3 r y
& détruire ceux-ci pour ne pas îailîer aux
ennemis l'avantage de s'y loger. La famine
faifoit des ravages affreux dans Sbaras &
dans l'armée , le foldat difputoit au bour-
geois les plus vils alimens. Le partage d'une
proie dégoûtante divifoit des hommes raf-
femblés par l'héroifrae le plus pur.
Telle étoit l'affreufe lituationdes Poîonois >
loriqu'on apprit l'arrivée du roi. Il s'avançoit
à la. tête de vingt mille hom.mes raifemblés
à la hâte, mal armés, mal payés, mais à qui
l'exemple des alliégés apprenoit à ne rien
craindre. Cafimir , après avoir fait faire à
Ion armée une marche forcée , campa près
de Sborow. Le kam & Cmielniski ne l'atten-
dirent pas dans leurs lignes, m.ais ils couru-
rent à fa rencontre avec foixantc m.ille Tar-
tares & quatre vingt mille Cof^ques, L'ar-
mée de la république n'étoit pas encore ran-
gée en bataille , qu'une partie des Tartares
& des Cofaques vint fondre fur les Poloncis ,
tandis que le refte les prenoit en queue ;
après une vigoureufe réfiiîance, l'avant-gar-
de fut enfoncée , les Tartares jîénétrerent
dans les vuides ^ tout fut pris ou malfacrc.
La vicî:oire penchoit en faveur des alliés,
lorique le caltellan de Satidomir iè jeta fur
\e% Tartares & les prit en flanc. Cette diver-
fion donna le temps à l'avant-garde de fe
rétablir &au refte de l'armée de fe déployer;
Cmielniski marcha de front contre le corps
de bataille. Cafimir étoit au centre, &
donnoit à fès fbidats l'exeinple du courage.
Le choc fut terrible \ les Poîonois fermes à
leurs poftes , encouragés par la vue de leur
roi , ne laifferent prendre fur eux aucun avan-
tage \ il n'en étoit pas de mêm^e aux ailes ,
la gauche écrafee , culbutée par la cavalerie
Tartare,menaçoit d'entraîner dans fa défaite
la ruine de toute l'armée , Cafimir'y vola :
fà préfènce rétablit le combat. Telle étoit la
fîtuation des deux armées lorfque la nuit fur-
vint , chacun la pafi'a à fon pofte couvert
de fes armes. Cafimir exhortoit fes foldats,
les combloit d'éloges , & leur promettoit de
nouveaux triomphes : cependant malgré la
fiere contenance qu'il affeftoit , il n'étoit pas
tranquille. Le kam lui donnoit peu d'inquié-
tude, mais il craignoit Cmielniski & fès
Cofaques. Il efl'aya de le détacher de l'al-
liance des Tartares. Il lui fit tenir une lettre ,
dans laquelle il lui rappelloit les bienfaits
Rr i
31^ CM I
d'Uladiflàs , & ies anciens traités qui unil-
Ibieiit les Polonois & les Coiliques f, il lui dé-
voiloit enfuite les projets ambitieux du kam,
que Cmielniski connoiflbit mieux que lui^
enfin il l'exhortoit à quitter ce ramas de Tar-
tares qui lailibient aux Cofaques tous ies pé-
rils de la guerre , & en recueilloient tout le
fruit.
Le roi attendoit avec impatience la réponfe
de Cmielniski. Mais lorfque le jour parut , il
vit les Cofaques & les Tartares ranges en ba-
taille. Il fe prépara à les recevoir. L'événe-
ment de cette journée fut le même que celui
delà veille. Les Polonois en eurent tout l'hon-
tieur , puifqu'ils ne furent pas vaincus. Les
Tartares & les Cofaques rentrèrent dans leur
camp. La divilion étoit prête à naître entre
les généraux. Cmielniski ibupçonnoit la fidé-
lité du kam. Celui-ci , au lieu des conquêtes
aifées qu'il s'étoit promifes , ne trouvoit par-
tout qu'une réfiftance opiniâtre. Il écrivit
au roi de Pologne pour lui offrir la paix.
Cmielniski , craignant d'être abandonné fêul
à la fureur des Polonois , demanda un accom-
modement. Il l'obtint à des conditions très-
dures ; il fut obligé de venir fe jeter aux ge-
noux de Cafimir , le prier d'oublier fa révolte
& de lui pardonner^ il eft vrai que le roi ,
fenfible à fon repentir , le déclara chef de la
milice Cofaque. Les députés de la républi-
que lui préfenterent la queue de cheval &
l'étendard , marque de l'autorité dans la-
quelle il étoit confirmé.
Tandis qu'on négocioit dans le camp de
Sborow , on combattoit fous les murs de
Sbaras. La nouvelle de la paix n'y avoit point
encore été portée. Le kam & Cmielniski
avoient retardé le départ des couriers pour
donner à leurs troupes le temps d'exterminer
les Polonois. Ceux-ci fe défendoient avec
une confiance inébranlable ^ ils étoient réduits
aux plus cruelles extrémités , & ne parloient
pas encore de fe rendre. Enfin ils reçurent
une lettre de Cmielniski.Qe général profitant
de leur ignorance, leur mandoit que s'ils
vouloient lui payer une fomme confidérable ,
- il donneroit à {^qs troupes le fignal de la re-
traite. Les habitans demandèrent quelques
jours pour contribuer. Pendant cç délai le
traité fut publié ; on reconnut l'artifice de
Cmielniski^ & il fut obligé de fè retirer.
Ce général n'avoit point Qubliç l'aiFrout
C M I
qu'il avoit reçu à Sborow, ni la démarche
humiliante que la perfidie de fon allié i'avoit
forcé de faire ^ il négocia fecrétemeiit avec
la Porte ^ il obtint la protection de l'empe-
reur ennemi né de la république. Bientôt la
guerre fut rallumée. L'armée Polonoife s'a-»
vança vers le Borifthene. Cmielniski , par des
divifions faites à propos , fut la divifer , &
remporta quelques avantages ^ mais enfin il
fut vaincu5& s'enfuit. On croyoit les Cofaqjies
domtés par cette viftoire , mais Cmielniski
reparut à leur tête ^ il fut plus malheureux en-
core que dans la campagne précédente. Ce-
pendant la république ,lafrée d'une guerre qui
minoit fourdement fes forces , donna la paix
aux Cofaques, pardonna à leur chef qu'elle
devoit punir , & rétablit les anciens traités,
Cmielniski trouva une mort digne de lui
dans un combat qu'il livra aux Polonois , &
où il difputa la viftoirc jufqu'au dernier fou-
pir. Tels font les principaux traits de la vie
de cet homme célèbre , qui eut la gloire de
mettre la Pologne à deux doigts de fa perte.
Il charmoit les loifirs que lui laiflbient l(^s
intervalles de fes expéditions par des feftnis ,
où il s'abandonnoit à la débauche la plus
crapuleufe. Bazile , prince de Moldavie y
dont la fille avoit époufé un des fils de Cmiel-
niski , ayant été chafîé de ks états , vint un
jour implorer le fecours de fon allié. Le
chef des Cofaques étoit alors au milieu des
plaifirs & de la bonne chère. Il fallut que le
prince de Moldavie attendît une femaine
entière pour trouver le moment favorable de
l'entretenir. Enfin il obtint une audience y
& fit aux Cofaques une peinture touchante &
pathétique de fès malheurs. Pour toute ré-
ponfe Cmielniski fè faifit d'une large coupe
pleine de vin, & s'adreffant à Bazile , il l'in-
vite à la vuider, en laffurant qu'elle contient
un fur remède contre tous i^cs chagrins. Le
prince de Moldavie fe retira indigné , en
difànt : Tavois cru jufquici que les Cofaques
étoient des hommes , mais je ne vois que trop
maintenant , quon a raifon de dire que ce font ,.
ou des hommes changés en ours , ou des ours
changés en hommes. (M. de Sacy.)
C N
*CNACALESIA, furnom de Diane,
ainfi appcliée du mont Cnacalus en Arcadie ,
OÙ cliç avoit un temple £v des fêtes annuelles.
CNI
* CNAGÎA , [Myth.) furnom de Diane ;,
ainfi appellée de Cnagéus , qui , conduit à
Phidna par Caftor & Pollux , féduilit la
prcrrefTe de Diane , & l'enleva avec la ftatue
de la déelTe.
* CNAZON , (Hifi. anc. ) aiguille dont
les femmes romaines fe fervoient pour arran-
ger leurs cheveux : elle s'appelloit aufli dif-
cerniculum.
*CNEPHo^/CNUPHIS, [Myth.) l'Etre
fuprême chez les Egyptiens ^ on le repréfen
toit avec un fceptre à la main , marque de fa
fbuveraineté , la tête couverte de plumes ,
fîgne de fa fpiritualité , & un œuf à la bou-
che , fymbole du monde créé par fa parole -^
on ajoutoit quelquefois à ces caraôeres le
ferpent qui fe mord la queue , fymbole de
l'éternité.
* CNEUS , ( Hijl. anc. ) furnom que les
Romains donnoient à ceux qui naiifoient
avec quelques taches remarquables.
CNEZOW, {Géog. mod.) ville de Pologne
dans le palatinat de Chelm.
CNICUS , f. m. (H//?, nat, bot.) genre de
plante dont les fleurs (ont des bouquets à
fleurons découpés , portés chacun fur un
embryon, &:foutenuspar un calice écailleux,
& entourés de grandes feuilles qui forment
une efpece de chapiteau. Lorfque la fleur eil
palTée , les embryons deviennent des femen-
ces garnies d'aigrettes. Tournefort , injl. rei
herb. V. Plante. (/)
CNIDE , ( Géog. anc. ^ mod. ) ville an-
cienne de la Carie , dans la Doride. Ce n'eft
plus qu'un miférable bourg.
CNIDIENNE , ad], [Myth.) furnom de
Vénus , ainfi appellée de la dévotion parti-
culière que les habitans de Cnide avoient en
elle.
CNISME , ( Mufique. ) danfe & air de
danlè qu'on exécutoit fur la flûte.
C o
CO , COA , COOS ou COS , {Géog. anc.
&mod.) île de l'Archipel , vers la côte de la
Carieiclle eft célèbre par la naiifance d'Hyp-
pocrate , d'Apelle , & de Pamphile , qui la
première dévida la foie.Les Turcs l'appellent
aujourd'hui Stanco ou Stankon. On laconnoît
auflî fous le nom de Lango. Elle eft prefque
vis à-/is d'Halycarnaiie j près de Cnide £4 de
l'ile Palmola,
COA 317
COA 5 f. m. ( Hift. nat. lot. ) genre de
plante dont le nom a été dérivé du furnom
cous , qui a été donné à Hyppocrate parce
qu'il étoit né dans l'île de Coo. La fleur des
plantes de ce genre eft monopéiale , cam.pa-
niforme , globuleufe. Le piftil s'élève du
fond d'un calice découpé , &. eft attaché
comme un clou à la partie poftérieure de, la
fleirr : ce piftil devient dans la fuite un fruit
compofé de trois capfules membraneufès &
applaties -^ ces capfules font divifées en deux
loges , dont chacune renferme une ièmencc
longue & ailée. Plumier , nov. plant. Amer,
gen. V. Plante, f/)
CoA 5 ( Géog. mod. ) rivière du royaume
de Portugal, dans la province du Tras-ios-
Montes.
* COACTIF , adj. ( Théol. & Jurifpr.)
qui peut légitimement contraindre &fe faire
obéir par la force. Les fouverains ont feuls le
pouvoir coaclif : il y a cette différence entre
Izs loix de l'églife & les loix de l'état , que
celles de l'églilè , en qualité fimple de loix
de l'églife , n'ont que force direôive : au lieu
que les loix de l'état ont par elles-mêmes
force coûc7/Vf. Les loix de l'églife n'ont force
coaclive , que quand elles font devenues loix
de l'état.
* COACTION , f f. (ThéoL) aftion fur
la volonté , qui en ôte ou diminue le libre
exercice ; d'où il s'enfuit que la coaclion , fi
elle avoit lieu, excuferoit entièrement ou en
partie la créature du crime , & lui ôteroit
le mérite de la bonne action : car le mérite
& le démérite diminuent &: difparoiffent
auiïî-tôt que la nécefîîté de vouloir ou de
ne pas vouloir commence. Voy. Liberté ,
Grâce.
COADJUTEUR , f. m. ( mft. eccléf. &
/w/'(/^r.) eft celui qui eft adjoint à un prélat ,
ou autre bénéficier ou officier eccléfiaftique,
pour lui aider à faire fcs fonéîions.
Les coadjuteurs font ordinairement défi-
gnés fucceftèurs de ceux auxquels on les
adjoint.
Le P. Thomaiîin en fa dilclpline de l'é-
glife , part. II , Jiv. II , c/t. xxij & xciij ,
dit que les cpadjuto reries étoierit en ufage
dès les premiers iiecles de l'églife. On trouve
en effiît que dès l'an .55 , S. Lin fut {àlxco^id-,
jutiurào. S. Pierre , c: qu'en 95 Evariiie le fut
3i8 C O A C O A
du pape Anaclet (a). Cependant le P. Tho- ^ dignité d'un coadjuteur. On dit que N a éci
inaltin ajoute que les coadjutoreries fout
odieufés , en ce que c'eft une manière indi-
re«^e pour tranfmettre les bénéfices comme
par voie de fiicceiîion.
En France le rci donne quelquefois un
coadjuteur aux archevêques , évêques &
abbés , lorfque le grand âge du bénéficier
ou ks infirmités , fon ablènce ou quelque
autre caufe légitime , le demandent ,& que
c'eft pour le bien de l'égliiè.
Le pape donne des bulles qui portent
ordinairement la claufe cum futura fiiccef-
Jione : c'eft-à-dire provifion & collation du
bénéfice par expc6i:ative ; tellement qu'après
le décès du titulaire , le coadjuteur n'a pas
befoin d'autre titre pour fuccéder au bénéfice.
Mais on ne peut nommer de coadjuteur
avec droit de fuccéder , que pour les évêchés
& abbayes ^ & pour donner un coadjuteur à
un évoque , il faut que celui-ci y confénte.
Les cnadjut<urs des évêques doivent être
eux-mêmes évêques : on les nomme ordinai-
rement évêques in partibus infidelium , afin
qu'ils puiflént faire les fonétions épifcopales
à la décharge de celui dont ils font coadju-
teurs ; car le coadjuteur a les mêmes préro-
gatives que l'évéc^uc auquel il eft adjoint.
Celui qui eft nommé coadjuteur d'un ar-
chevêque , a rang au delTus de tous les évê-
ques dans les alîémblées du clergé.
i .e concile de Trente , fe^. 21, cAap. vj ,
veut qu'on donne aux curés ignorans des
coadjuteurs ou des vicaires pour faire leurs
fonétions.
L'ufage des coadjuteurs eft aboli en France
pour les canonicats & prébendes , prieurés ,
cures , & chapelles. On l'avoit toléré quel-
que temps dans les évêchés de Metz , Toul &
Verdun ;, mais par arrêt du 25 février 1642 ,
rapporté au journal des audiences , on a jugé
qu'il ne devoit point avoir lieu. Voye^ le tr.
des mat. bénéfic. de Fuet ,/?/». 59 , 62 , 140 ,
154 j 2,25 , 278 , 524 & 525 , ^lajurifpr.
canoniq. au mot coadjuteur. (A)
Coadjuteur, eft aufti le nom qu'on
donnoit à certains religieux parmi les jéfui-
tes. F. Jésuites. {G)
nommé a la coadjutorerie de tel ou telévéché*
La coadjutorerie par elle-nîême n'eft pourtant
pas un titre réel , mais une expeâiative pour
en obtenir un après la mort du titulaire. V,
Coadjuteur. (G)
COADJUTRICE , fub. f. ( Hijî. eccléf,
Jurifprud.) eft une religieufè nommée parle
roi pour aider à une abbefle à faire (qs fonc-
tions , avec droit de lui fuccéder. V, ce qui
ej? dit au mot COADJVTEUP.. [A]
COAGIS , f m. ( Comm. ) on appelle ainfi
au Levant celui qui fait le commerce par
commiiïion pour le compte d'un autre. Pref-
que toutes les nations commerçantes de l'Eu-
rope ont des coagis- aux échelles du Levant.
K, les dicî. de Trév. & du comm.
COAGULATION , f. f. ( Phyjîque &
Chymie. ) Le mot de coagulation pris dan^
fon {QWi le plus étendu , exprime tout chan-
gement arrivé à un liquide compofé , par
lequel ou la malle entière de ce liquide, ou
feulement quelques-unes de {qs parties font
converties en un corps plus ou moins denfè.
Ce changement s'opère dans ces liquides
par un grand nombre de caufes différentes ,
qui conftituent tout autant d'efpeces de coa-
gulations qui ont la plupart des noms parti-
culiers , & qu'on ne défigne même prefque
jamais par le nom générique àz coagulation^
qui a été borné par l'ufage à quelques efpeces
particulières.
Les coagulations de la première efpece,ou
improprement dites , font la congellatioii
ou condenfation par le refroidilïëment , la
concentration ou rapprochement par le
moyen de l'évaporation, la précipitation, la
cryftallifàtion. V, CoNGELLATION , EvA-
PORATION, RrÉCIPITATION, fi» CrYS-
TALLISATIOxV.
Les coagulations de la féconde efpece ,
celles pour lefquelles cette dénomination eft
confiicrce, font premièrement \'d coagulation
fpontanée du lait , du fang , de certains ftics
végétaux, par exemple celui de la bourrache
& du cochlcaria , &c. 2". celle du blanc
d'oeuf & des autres lymphes animales, par
un degré de chaleur répondant au cent cin-
quante-lixieme du thermomètre de Fahren-
COADJUTOKERIE , f..f. place ou
(«) Ce q-j'on èi: ici fur S. Lin eft douteux , & fur S. Evarifte encore plus , puifqu'il' n'y a point
eut de S. An.iclet pape. S. Evarifte fuccéda à S. Clément. Anaclet eft le même que CÎet, précccefleur
drS. Clément. Fojsx, PAPbBA.ocH, PiARsoN , Coûtant,
C O A
heit , félon les obfervations du doéteur Mar-
tine : 3*'. la coagulation des matières huileu-
{qs par le mélange des acides , celle du lait
par \q's acides , par les alkalis , & par les el-
prits fermentes ^ celle des matières mucilagi-
neulès ou farineufes délayées par les alkalis ,
Neus fommes forcés d'avouer que la théo-
rie de la coagulation fpontanée du lait , du
fang- , & des fucs gélatineux des végétaux ,
eil encore pour nous dans les ténèbres les plus
profondes , & que nous n'en fàvons pas da-
vantag^e fur la coagulation des lymphes ani-
males par le moyen du feu : nous ne pou-
vons attribuer cette dernière coagulation à
aucune efpece de diiUpation des parties
aqueufes qu'on fuppoferoit conftituer aupa-
ravant leur fluidité , puifqu'au degré de cha-
leur requis cet épaiflifTement fe fait dans
l'eau aufTi-bien qu'à l'air libre.
La condenfation de ces matières par cette
caufê , eft une des exceptions les plus re-
marquables à cette loi phyfique prefque gé-
nérale , par laquelle les degrés de rareté ou
de laxité du tilfu des corps font à-peu-près
proportionnels à leur degré de chaleur..
Quant à la troifieme efpece de nos coa-
gulations proprement dites ^ fàvoir l'épaif-
fifîénient des matières huileufes, ùc. par les
acides , 6fc, nous pouvons au moins les ra-
mener par une analogie bien naturelle à la
clafî'e générale des corporifications qui dé-
pendent' de la combiuaifôn des différens
principes , comme des acides avec les diffé-
rentes bafés terreufès ou métalliques , ùc.
Voyei Mixtion.
La coagulation du îait par cette cnufê ne
peut être cependant que très -difficilement
rangée avec ce genre d'effets ^ car on n'ap-
perçoit pas trop coiranent quelques gouttes
d'acides , quelques grains d'alkaiis , ou une
petite quantité d'efprit-de-vin , peuvent fè
«liftribuer afTez également & en une pro-
portion fufnfànte dans une grande quantité
de lait , pour en lier les parties au point
de leur faire perdre leur fluidité en fi peu
de temps. Voye^ Lait, (b)
COAGULUM, f. m. ( Chirurg,) terme
confacré en chirurgie pour exprimer \3. par-
tit rouge du fang.
Lorique le fang circule dans les vaiflèaux
ftti qii'il eii fort j il paroît compofé de p^r-
C O A 515^
ties homogènes ^ mais fî on le laiffe repofèr
dans un vafe , on reconnoît bientôt qu'il n'en
ell pas ainfî. Le fang reçu dans une palette
fè refroidit , fe coagule , & fè partage en
deux parties , dont l'une eft un coagulum
qu'on appelle X-a partie rouge du fang ; l'au-
tre fluide & blanche , ic nomme impartit
lymphatique.
Mais pourquoi le coagulum du fang tiré
dans un vafè efl-il quelque temps après la fai-
gnée d'un rouge vif à la fur face , & d'un rouçre
très-foncé au fond du vafe ? C'efl parce que
les globules de la fur face font non feulement
moins com.primés, mais encore mêlés avec
de l'humeur blanche & glaireufe qui s'élève
vers la fuperficie du coagulum , qui fe fige
avec \qs globules , & qui afîbiblit leur cou-
leur : c'efl cette humeur glaireufe qui pro-
duit quelquefois fur le fang que l'on a tiré
des coènes blanchâtres , dures , & coriaces.
Fbyt^CoENE.
Le ccfûgulum rouge lavé dans de l'eau
tiède , fè fëpare en deux parties , dont l'une
fe mêle avec l'autre à laquelle il communi-
que fà couleur rouge , & l'autre fe forme
en petits filamens blancs : la première efè
ce qu'on appelle proprement Xo. fang ^ dont
on expliquera la nature en fôn lieu. (M. k
chevalier de Javcovrt. )
COAILLE ou QUOAILLE, f. m. {Com-
merce & draperie. ) laine grofîîere qui fe levé
de la queue de la brebis : ce qui l'a fait ap-
ptlîer ainfî. V. lesdiâ. de Tréw & du comm.
COAÎTA , L m. ( liift. nat. quad. ) nom
que les habitans du Brefil donnent à une
forte de Ç\n%Q.. M. de Buffon en avoit publié
une excellente figure au volume XII de fou
Hifioire naturelle ^pa^e 301 , de l'édition in-
11. Barreze dans donHiJloire naturelle de la
France équinoxiale , page 150, la défîgnoit
fous le nom de cercopithecus major niger fa"
ciem humanam referens , quoata Guianenfbus^
Nous en vîmes un qui fut montré vivant au
public à Paris en 1754 y ibus le nom de
bel^ebud , que M. Briffon lui a confèrvé eu y
ajoutant la dénamination de cercopithecus in
pedibus anterioribus pollice carens ^ cauda in-
ferius verfksavicempilis dejiituta. Règne ani-
mal , quadrupède , imprimé en I75<5 , page
211. Browne , dans fon Hijioire de ta Jamaï-
que , page 489 j Ï2CÇiÇi&\\z j Jimia fufce major
palinJs. tetradcclilis,^ caudâprdtcnjlli ad apicim.
iiô C O A
J'ubtus nudâ. Enfin , M. Linné, dans fbn
Syfieina naturœ , édition 12 , imprimé en
1766 , page 37, la dcfigne fous le nom de
fimia 14 panifcus , cdudcta imberbis atra ,
càudâ prehenfili ^ palmis retradaclylis. On
rappelle chamek au Pérou.
Le coû/V<2 eft fi peu proportionné , & fi
effilé du corps •& des jambes , qu'on lui
donne aufiî le nom à<& jinge-araignée , félon
Edwards , Gtanures^page 221. La longueur
de fon corps depuis le bout du nez jufqu'à
l'origine de la queue eft de feize pouces ^
celle de fa queue de vingt-quatre pouces ;,
celle de ks quatre jambes depuis leur origine
julqu au bout des ongles trente pouces ;, fa
largeur aux épaules eft de quatre pouces.
II a cinq doigts aux pies de derrière &
quatrç feulement aux pies de devant , qui
n'ont qu'une apparence de pouce j la queue
prenante comme une main , c'eft-à-dire ,
applatie , nue , & fe roulant à fon extrémité ,
d'un quart plus longue que le corps & la tcte
pris enfèmble ^ les oreilles nues, faites comme
celles de l'homme \ la cloifon des narines
très-épailfe , & les narines ouvertes , non
pas au defi'ous , mais aux côtés du nez ^ \qs
icï^zs fans callofitcs , couvertes de poils
comme les fapajous *, le réfte du corps cou-
vert d'un- poil rude , hériffé , long de deux à
trois pouces , excepté les oreilles , la face &
les mains qui font nues , ainfi que le tiers de
la queue vers fon extrémité & dans fa face
inférieure dont la peau eft fillonnée comme
celle d'une main. II n'a pas d'abajoues , &
fa femelle 'n'eft pas fujette à l'écoulement
périodique non plus que les fapajous.
Pour l'ordinaire , cet animal a le poil &
la peau noires , la face tournée , la prunelle
des yeux noire entourée d'un iris brun bordé
de jaune, néanmoins on en voit qui ont le
poil blanc jaunâtre fous la gorge , le ventre
& le dedans des jambes roux fur les côtés ,
brun- noir fur la partie poftérieure du dos , &
la face noire comme le rçfte du corps.
Mœurs. Le coaita noir ou le chamek qui
eft le plus petit , eft commun au Pérou ^ le
coaita blanc fous le ventre eft originaire de la
Guiane & du Brefil. Ces animaux font intel-
ligens & fe familiarifent au point de deve-
nir très-carelfans. Ils vent de compagnie ,
s'avcrtiflent , s'aident & fe fecourent. La
queue leur fcrt exadement d'une cinquième
C O A
riîain \ il paroît même qu'ils font plus de
clîolès avec elle qu'avec les mains ou les
pies , & qu'elle ajoute beaucoup 1 leur adreft'e
naturelle. La nature fèmble les avoir dédom-
magés par-Là du cinquième doigt ou du
pouce qui manque à leurs mains. On afture
qu'ils pèchent & prenîient du poiflbn avec
cette longue queue ; & cela ne doit pas pa-
roître plus extraordinaire que de ks voir
prendre avec elle un autre animal , l'appro-
cher d'eux , ou s'en fervir pour porter leur
nourriture à la bouche. 11 eft certain qu'ils
fautent d'un arbre à un autre en s'entortil-
lant la queue autour d'une branche pour le
balancer •, & lorfque l'arbre eft tropéloigné ,
pour qu'ils puilTeut y atteindre d'un faut , ou
lorsqu'il s'agit de traverièr un ruilfeau , ils
s'attachent à la queue les uns des autres &
font par ce m.oyen une efpece de chaîne ,
puis le plus bas de tous s'élance avec afl'ez
de force pour faire un grand balancement
qui l'approche d'une branche qu'il faifit ,
foutenant &: tirant tous les autres jufqu'à ce
qu'ils foieht parvenus attachés ainfi à la
queue les uns àcs autres.
Facultés. Ces animaux ne produifent qu'un
ou deux petits comme toutes les eQ)eccs de
finges, & ils les portent toujours fiir leur dos.
Nourriture. Les fruits font leur nourriture
ordinaire , néanmoins ils mangent des poif-
fous , des vers, des infedtes , & mêmie des
coquillages & des huitres dont ils ont l'a-
drelfe de calfer l'écaillé pour les manger \
car Dampierre, volume IV , page 288 de
fes voyages , dit les avoir \ai à file de Gor-
gonia fur la côte du Pérou , defcendre fur le
rivage lorfque la mer étoit balFe , & cueil*
lir des huitres qu'ils ouvroieut en les met-
tant les unes après les autres fur une pierre ,
&. les frappant avec une autre pierre jufqu'à
ce qu'ils euftent rompu l'écaillé en morceaux
pour en avaler l'animxal.
Qualités. Quoique très-maigres pour l'or-
dinaire , ils deviennent très-gras dans le
temps de l'abondance & de la maturité des
fruits j alors leur chair eft fort bonne à
manger.
Remarques. Le coaita ne doit donc pas être
confondu avec les finge)^ proprement dits ,
comme ont fait jufqu'ici tous les zoologiftes.
Il ne doit pas même être réuni avec les fapa-
jous 5 comme a fuit M. de Buifon , m.ais
formel»
CO A
fbfmer un genre particulier d'animal dans
la famille des finges. ( M. Adanson. )
* COALEMUS , f. m. ( Mytk. ) dieu
tutélaire de l'imprudence. Les anciens fèm-
bloient avoir pcnfé en multipliant les dieux ,
que les vices avoient plus befbin du iècours
des dieux que les vertus.
COALITION , f. f. {Phyfiq,) fe dit
quelquefois de la réunion de plufîeurs par-
ties qui avoient été auparavant fëparées. Ce
mot vient du latin coalefcere , s'unir , fe con-
fondre enfemble. Il eft très-peu en ufage ,
& devroit y être un peu plus j car il eft com-
mode , dérivé du latin , & ne peut guère
être remplacé que par une périphrafe. (O)
COANGO , ( Géog. mod. ) rivière de l'A-
frique méridionale , qui a fa fource proche
à^t frontières de Monoemugi.
COANZ A , ( Géog. mod. ) grande rivière
d'Afrique en Ethiopie , qui fe jette dans la
mer près de l'île Loanda.
COASE,f. m. (Hijî.nat.quadrup.) nom
ibus lequel M. de BufFon a décrit & fait
graver au vol. Il de fon Hijioire naturelle ,
édition in-iz , page ii^ , pi. XXII , n°. i ,
un animal envoyé à M. l'abbé Aubry , fous
le nom depeian , enfant du diable , ou chat
fauvage de Virginie. C'eft , félon lui , le
fquashe décrit par Dampierre au volume III
de fon Voyage ^ page 301 , gravé par Seba^
volumel^pl. XLII ,Jïg. i ,page 68 , fous le
nom de quasje de Surinam ^ & par Hernan-
cez , fous le nom mexicain yfquiepatl , page
3 3 2 de fon Hijfoire naturelle du Mexique ,
enfin cité par M. BrilTon , fous le nom de
llaireau du Mexique ^ cuadrupedes ^ p. 2 55*
Le coafe décrit pai iVl. de Buffbn eft un
petitanimal approchant de la civette pour la
la forme , c'eft-à-dire , qui a le corps médio-
crement alongé , les jambes aftèz courtes ,
\qs oreilles rondes , le mufeau pointu , la
queue épaifTe fans être touffue , aufli longue
que la moitié du corps & couverte de poils
doux affez longs comme fur le refte du corps :
il n'a que quatre ongles aux pies de devant
& cinq à ceux de derrière j il eft d'une cou-
leur brune aftez uniforme.
Le quasje de Surinam décrit & gravé par
Seba , page 6% , pi. XLII , fig. i de fon pre-
mier volume , a au contraire la forme d'un
coati, c'eft-à-dire, le corps moins alongé ,
plus haut monté fur fes jambes, les oreilles
Tome VUl.
C O A 511
courtes , mais peiutues , le poîl court &pref^
que ras , cinq doigts à, chaque pié , tous à
la même hauteur , le corps brun en deffus ,
jaune fous le ventre , la queue plus longue
que la moitié du corps , marquée alternati-
vement de quatorze anneaux bruns & qua-
torze anneaux jaunâtres.
En comparant ces deux animaux , il eff
facile de voir qu'ils font très-différens & qu'on
ne doit point les confondre enfèmble ^ que
le quasje de Surinam , eft une efpece de coati
peu différente du coati noirâtre , décrit &c
gravé au volume VIII , planche IV ^ pages 80
& 86 deVHiJlolre naturelle in-iz , de M.
de Buffon , & que fon coafe qui , avec l'hyène
& le furikate , eft le feul animal de la famille
des chiens ou des lions , qui n'ait que qua-
tre ongles aux pies de devant , doit faire un
genre particulier voifin de cqs animaux. Il
diffère du furikate en ce qu'il a cinq doigts
aux pies poftérieurs , où le furikate n'en a
que quatre , & de l'hyène en ce qu'il a le
corps plus alongé , plus bas monté for fes
jambes , les oreilles plus courtes & la queue
plus longue. ( M. Adanson. )
COATI j f. m. (Hij?. nat. [ool. ) ce nom
a été donné à plufîeurs eipeccs d'animaux
quadrupèdes du Brefil, fidifférensles uns des
autres, que l'on n'eft pas encore parvenu aies
rapporter à un même genre: mais quoi qu'il
en foit du genre , il nous foffîroit de bien
connoître les eipeces. Celle que l'on appelle
coati-mondi a été décrite par M. Perraut ,
qui en avoit difféqué trois j la longueur de
la tête du plus grand étoit de fîx pouces
& demi depuis le bout du mufeau jufqu'à
l'occiput ^ il avoit foize pouces depuis le
derrière de la tête jufqu'à l'origine de la
queue , dont la longueur étoit de treize pou-
ces : le mufeau reffembloit à celui du co-
chon \ mais il étoit plus long , plus étroit 9
& plus mobile \ il fe recourboit facilement
en-haut. Cet animal avoit cinq doigts à cha-
que patte, un peu plus longs dans \ts pattes
de devant que dans celles de derrière \ & à
chaque doigt un ongle noir , long , crochu ,
& creux comme ceux du caftor. Les patte^
de derrière reffembloient à celles de l'ours 5
mais la plante étoic dégarnie de poil , & re-
vêtue d'une peau douce \ il y avoit derrière
le talon à&s callofîtés longues de cinq ou ftJè
ligues : le poil étoit court, rude, bouchonné^
311 C O A
noirâtre iîir le dos & fur quelques endroits
de la tête , aux extrémités des pattes & du
raufèau , ^ mêlé d'un peu de noir & de
beaucoup de roux {m le reilc du. corps , mais
plus doré eu quelques endroits du delTous
du ventre & de la gorge. Il y avoit fux la
queue plufieurs anneaux , les uns noirâtres ,
&. les autres mêlés de noir & de roux. La
langue étoit un peu fîllonnée , & au refte
rçffembloit à-pcu-près à celle des chiens.
Les yeux étoient petits comme ceux du co-
chon , & les oreilles rondes comme celles
<^s rats ; il y avoit au dehors de l'oreille un
poil court , & au dedans un poil plus long
& plus blanchâtre. Les dents canines étoient
grifes , traniparentcs , & fort longues , liir-
îout celles de la mâchoire inférieure : ciia-
que mâchoire avoit iîx dents incifives : la
gueule étoit fort grande , & la mâchoire in-
férieure beaucoup plus courte que celle d'en-
haut , comme dans le cochon. On dit que
le coaïi-mondi rouge fa queue , de forte
qu'on ne peut pas déterminer au julle la
longueur de cette partie.
On avoit apporté à M, Perraut deux au-
ti;"es animaux fous le nom de coati-mondi ,
mais ils étoient plus petits , & fort ditî'crens
de celui dont on vient de faire meniion \
lis n'avoienî pas les dents canines, ni les
talons éperomiés par des callofités : l'un de
ces animaux avoit le mufeau fendu comme
un lièvre \ cette partie . le tour des yeux &
às.^ oreilles , étoient dégarnis de poil , &:
de couleur rouge : les dents relfembloient
à celles du cailor, & la queue étoit courte.
Il y avoit aux pies de devant cinq doigts ;
lés trois du milieu étoient vraiment des
doigts , mais les deux autres étoient placés
<;omime des pouces à une certaine diftance
des doigts , un de chaque gôté :, celui du côté
intérieur étoit très-petit^ il ne fe trouvoitaux
pies de derrière que quatre doigts , dont l'un
etoit éloigné des trois autres comme un
pouce , & fort court j il étoit placé au côté
extérieur des doigts.
Enfin M. Perraut décrit un quatrième ani-
qui avoit été donné fous le nom de
mal
coati. C'étoit une femelle ^ elle avoit le pci!
tpux par-tout le corps, excepté la queue qui
étoit marquée de pûilieurs cercles d'un fauve
brun , & l'extrémité des pattes Scie delfus
«les oreilles qui avoieutuue teinte pins brune
GO B
que celle du refte <iu corps *, excepté auflx
i'extrcmité du mufeau , qui étoit d'un gris
brun. Ce coati avoit des mouftaches d'un
poil fort noir \ ce iriême poil le trouvoit à
la mâchoire inférieure &; aux joues : il n'y
avoit point d'éperons aux pattes de derrière ;
enfin les dents relIbn:bloient à celles des
chiens. Mém. de facad. fcyale des Jciences ^
depuis 1666 jufquà ï6c)C) , tome III , pun,
II , /. 17 & Juiv. Voy. Quadrupède. (I).
COBALES , f. m. [Myth.) génies ma-
lins attachés à la fuite de Bacchus. On les
confond quelquefois avec les faunes & les
fatyres.
COBALT , COBOLT ou KOBOLD ,
( Hi(i. nat. minéralogie ^ chymie. ) en latiu
cobaltum , cadmia fojfilis pro cœruleo \ cad-
mia metallica , &c. c'eft un demi- métal ,
d'un gris qui tire mi peu fur le jaiuiâtre ^ il
paroît compofé ^\m. alîemblage de petites
lames ou de feuillets : à l'extérieur il a aller
de reflèmblance avec le bifmuth : m.ais ce
qui caratStérife particulièrement ce demi-
métal , c'eft la propriété qu'il a de donner
une couleur bleue à la fritte du \erre , lorf-
qu'on le met en fufion avec elle.
On a long- temps regardé le cobalt comme
une fubftance terreufè ^ c'eft fa grande fria-
bilité qui femble avoir accrédité cette er-
reur^ mais M. Braudt, favant chymifteftié-
dois , a prou\'é dans un mémoire inféré dans
les aûes de l'académie d'Upfal, qu'on de-
voir le placer au rang des demi-métaux:
voici les railbns fur lefquelles il appuie fon
fentiraent : i °. le cobalt préfente à l'extérieur
le même coup d'œil qu'un métal : 2*^. il a
une pefanteur métallique : 3°. il entre en
fufion dans le feu , & prend en refroidif-
f mt luie furface convexe , ce qui eft un des
caraûeres diftin£lifs des iiibftances métalli-
ques : 4°. le cobalt fe diiîbutdans leau-fcrte ,
&: donne une couleur d'un verd jaunâtre
au diflblvant -, les fèls alkalis fixes précipi-
tent cette diflblution d'une couleur noire ,
& l'alkali volatil la précipite d'un rouge
très-vif ^ fi on édulcore la matière précipi-
tée & qu'on y joigne de la matière inflam-
mable, en faifant fondre ce mélange, on ob-
tient du cobalt en régule , comme cela fè
pratique fur les précipités des autres fubf-
tances métalliques dont on fait la réduôion.
Le cobalt ne s'a^nalgame point avec le
C O B
iftercure , & jamais par la fufioii on ne peut
l'unir avec le bifinutli , quoique les mines
de ce dernier demi-métal contiennent pref-
que toujours du cobalt. Il s'unit très-intime-
ment au cuivre , qu'il rend aigre & cafTant.
On diftingue plufieurs efpeces de mines
dont on tire le cobalt ; voici Iqs principales ,
iiiivant M. Wallerius.
I. La mine de cobalt cendrée : elle a quel-
que relFemblance avec la mine de plomb eu-
tique ou galène, mais elle reflemble encore
plus à la pyrite arfenicale avec qui on la
confond fouvent mal-à-propos j cependant
le grain de cette mine de cobalt eft plus fin ,
& d'une couleur plus foncée & plus rou-
geâtrc que celle de la pyrite arfenicale.
II. La mine de cobalt fpéculaire , ainfi
nommée parce qu'on y remarque des lames
ou feuillets luifans comme la glace d'un mi-
roir i ce que M. Wallerius conjefture venir
de ce que le cobalt (è trouve uni avec du Ipath
feuilleté ou quelque autre matière de cette
efpece.
lîl. La mine de cobalt vitreufe, ainfi nom-
mée parce qu'elle reflemble à des fcories ou
à une matière vitrifiée j elle ell brillante &
d'un gris bleuâtre.
IV. La mine de cobalt cryfiallifée ; on ap-
pelle ainfi les mines de cobalt qui affeélent
une figure régulière & déterminée ^ on leur
donne difFérens noms, fuivant la figure qu'on
y remarque ^ par exemple on les appelle
mines de cobalt tricotées , en réfeaux , 6(.c.
V. Fleurs de cobalt ; c'eft une mine de
cobalt tombée en efflorefcence à l'air , & qui
prend une couleur ou rouge , ou violette ,
^u pourpre , ou fleur de pêcher ^ quelque-
fors ces couleurs ne font qu'à la furface , quel-
quefois elles pénètrent de part en part.
^ VI. La mine de cobalt terreufe ; cette mine
€ft ainfi nommée parce qu'elle eft friable &
peu compare : fa couleur varie j il y en a
d'un blanc tirant fur le verd, de jaune comme
de l'ochre , de noire , &c.
Outre cela on rencontre fréquemment du
cobalt àcLiis les mêmes mines qui fournifl"ent
le bifmuth. On en trouve aufîl quelquefois
dans la mine d'arfenic , que l'on nomme
tejîacée ; c'eft pour cela que les minéralogif^
tes allemands l'appellent cobalt teftacée ,
( fchirben-kobolt ) , quoique ce fbit une
vx2x% mine d'arfenic. On eu rencontre aufiî
C O B 3^3
en petite quantité dans la mine d'arfenic
d'un rouge cuivreux , que les Allemands ap-
pellent hipfernikkel , mais ce n'eft qu'acci-
dentellement. On croit devoir avertir en gé-
néral , que les ouvriers des mines d'Allema-
gne , & quelques auteurs d'après eux , ont
fouvent confondu les mines de cobalt avec
celles d'arfenic , & ont iiidifFéreminent donné
le nom de cobalt à des mines arfenicales ,
qui ne contiennent que peu ou point de ce
demi-métal ^ ce qu'il y a de certain , c'eft
que toutes les mines de cobalt font chargées
d'une portion d'arfenic très-confidérable ^
que l'on eft obligé d'en dégager par le gril'
lage pour en féparer le cobalt ou la matière
propre à colorer le verre en bleu.
L'exportation du cobalt crud eft défen-
due en Saxe fous des peines très-rigoureufës \
il y a des commis établis pour en empêcher
la contrebande \ & tout le cobalt qui fc re-
cueiUe dans le pays doit être livré , fuivant
la taxe qui en a été faite par le confeil des
mines , aux manufaâiures de fàfFre. Voye\
Saffre.
On a fouvent tenté de tirer de l'argent
des mines de cohalt ; mais quand il s'y en
trouve , ce n'eft qu'accidentellement : il n'y
a donc point de meilleur parti que de les
travailler pour en tirer la couleur bleue pro-
pre à faire le faftre.
Une manière courte d'éprouver fi une
mine de cobalt fournira un beau bleu , c'eft
de la faire fondre dans un creufot avec deux
ou trois fois fon poids de borax , qui de-
viendra d'un beau bleu fi le cobalt eft d'une
bonne qualité.
Il y a des mines de cobalt en plufieurs en-
droits de l'Europe i mais les plus abondantes
& les meilleures font celles de Schneeberg
en Mifiiie ^ le cobalt s'y trouve ordinaire-
ment joint aux mines de bifmuth. Il s'en
trouve aufti en Bohême dans la vallée de
Joachim ( Joachims-thal ) , au Hartz , dans
le duché de Wirtemberg , aux Pyrénées ,
dans la province de Sommerfet en Angle-
terre , en Alface , &c. II paroît que les Chi-
nois , & fiir-tout les Japonois , ont auflî des
minesde cobalt chez eux , par les porcelaines
bleues fi eftimées qui venoient autrefois de
leur pays ^ mais il y a lieu de' croire que leurs
mines font épuifées , ou du moins que le
cobalt doflt ils fè fervent aâuellemcnt eft
314 C O B
ti'iine qualité inférieure , attendu que le bleu
de leurs porcelaiHCs modernes n'eft plus fi
beau.
L'exploitation des mines de cobalt eft
dangereufe \ il y règne très-fouvent des va-
peurs ariènicales , qui font périr ceux qui y
travaillent ^ outre cela leurs pies & leurs
mains font fbuvent ulcérés par ce minéral
qui eft très-corrofif.
Les mineurs allemands donnent aufTi le
nom de cobalt à un être qui n'exifte que
flans leur imagination 3 ils veulent défigner
|)ar-là un fantôme ou déraon fouterrain à
qui ils attribuent la figure d'un petit nain ^
ce prétendu gnome, lorfqu'il n'eft pas de
bonne humeur , étrangle les mineurs ;, mais
lorfqu'il eft bénévole , il leur fait découvrir
Iqs filons les plus riches. ( — )
COBBAN , f. m. ( Hijî. nat, bot. ) petit
îirbre ièmbîable au pêcher qui croît à Su-
matra j il a la feuille petite , les branches
courtes & couvertes d'une écorce jaune , &
îe fruit de la groffeur & de la figure de la
pomme , contenant une noix grolîë comme
i'aveline , où l'on trouve une amande a mère
dont on tire une huile à laquelle on attribue
beaucoup de propriétés médicinales , ainfi
qu'à une gomme qui découle de fa tige.
Le cobban doit être mis au nombre des
plantes exotiques mal connues. Voye\ Trév.
i> Disk.
COBELLA, f. m. [Hiji. nat, Strpentolog.)
nom que les Hollandois donnent à un petit
ierpent de l'Amérique ,dont Seba a fait gra-
ver le mâle au n^. 5 , & la femelle au n^. 6 ,
de inféconde planche du fécond volume de fbn
Thefaurus ^ imprimé en 1735 , fous la dé-
liOmination de ferpentes cobcllas diclœ Ame-
ricanee , page 4. M. Lijiné dans fon Syjlema
naturœ ^ édition 11, imprimé en 1766,
page 378 , rappelle colubar 204 cobella ,
j cutis abdominalibus 15O) ^ fquamarum cau-
dalium paribus 54 , & il le confond avec le
coluber 32, f cutis abdominalibus 151 &fqua-
rnarum caudalium paribus 51 , décrit par M.
Gronovius , dans fon Mufœum ichthyologi-
€um^ partiel!^ imprimé en l'/'^ô^pageô'^.
Cet animal n'a guère plus de dix ^ douze
pouces de longueur , fur quatre liglfts de
largeur ^ fà tête eft affez courte Se obtufe
dans la femelle , & relevée d'une bofîc con-
fjdéreble hx le derrière daui le mâle 3 fa.
C OB
bouche a aufti l'ouverture un peu plus grande
que celle du ma le ç, tout le deffus de fon
corps eft couvert de petites écailles quadran-
gulaires arrondies , difpofées en quinconce ,
pendant que le dcifous depuis la tête jufqu'à
l'anus eft couvert de i$o grandes écailles
tranfverfales , demi-circui;iires , & que Je
deflbus de la queue depuis l'anus jufqu'à fou
extrémité eft couvert de 54 paires , c'eft-à-
dire , de deux rangs chacun de 54 écailles
hexagones.
Le fond de fa couleur eft cendré-rougeâ-
tre 5 marbré ou plutôt traverfé par 60 à 70
anneaux blanchâtres , comme entrecoupés
ou partagés en demi-anneaux dans le mâle j
on remarque une tache oblique de couleur
plombée derrière chaque œil.
Remarques. En comparant à ce fèrpent
celui de M. Gronovius que M. Linné croit
être le m.ême , on y appcrçoit de grandes
différences, i °. Sa tête eft ovoïde , plus allon-
gée & fans bofle. 2°. Le nombre des écail-
les eft différent , puifqu'ily en a 151 fous le
ventre & feulement 5 1 paires fous la queue.
3^. Il eft noir fur le dos avec des demi-an-
neaux blancs , & blanc deiîous avec des
bandes tranfverfales noires.
Ces deux animaux font donc différens ,
& comme ils ont la tête courte comme la
vipère , ils pourroient bien être du même
genre & non de celui de la couleuvre , qui
comme l'on fait , n'eft pas malfaifante. Il
fo trouve à Surinam. C M. Adanson. )
GOBES oz/ ANCETTES, f m. (Ma-
rine. ) ce font des bouts de cordes que l'on
joint à la ralingue de la voile , & qui n'ont
pas plus d'un pié & demi de longueur j ils,
fèr\'ent pour paffer d'aiitres cordages nom-
mée pattes de boulines. (Z)
COBILANA, {Geog. mod.) ville de
Portugal , dans la province de Beyra , fuE
la rivière de Zezare.
COBINORA,(G/o^. 7720^. ) petite ville,
de Hongrie , fur la Save , à peu de diftance
de Sabacz.
COBIT , f. m. ( Commerce. ) mefure de
longueur d'ufàge en plulieurs endroits des
Indes orientales. Elle varie , mais celle de.
Surate eft ^ félon Tavernier , de dtux pies
de roi & fèize lignes. Koyrç les diclionn. du
6omm. Disk. Trév. & Chambers.
COBLENTZ , {(^éog. mod.). grande ville
COB
d'Allemag-ne , dans 1 eIeâ:orat de Trêves ,
au confluent du Rhin & de la Mofelle.
Long. 25,8; /at. 50 5 24.
COBLIN, f. m. (Hi/f. nat.lchthyolog.')
poifTon àzs îles Moluques , très-bien gravé
& enluminé fous ce nom , & fous ceux de
hma Hprefque-cavallo , par Coyettau/2°. 87
<le lapremiere partie de fon recueil des poijfons
a Amboine.
Il a le corps médiocrement allongé , à-
peu-près comme le muge ou cabot, mais
moins comprimé , plus cylindrique , menu
vers la queue , très-épais du côté de la tête
qui eft grande ainfi que la bouche, les yeux
& les écailles petites.
Ses nageoires font au nombre de huit ,
toutes molles fans épines ;, favoir deux ven-
trales , petites , fous le ventre , aflez loin
derrière les peélorales qui font auflî petites,
deux dorfales dont l'antérieure médiocre
triangulaire , & la poftérieure baiîë très-
longue \, une derrière l'anus aufîî balfe &
fort longue , enfin une à la queue échancrée
jufqu'au tiers de fa longueur.
Tout fon corps eft bleu-pâle , excepté
vers le dos qui eft un peu verdâtre. La pru-
nelle de fes yeux eft noire entourée d'un iris
rougeâtre.
Mœurs. Le coblin iè pêche dans la mer
d'Amboine.
Rimarques. Ce poifTon doit faire un genre
particulier dans la famille dts muges ou ca-
bots , mugiles. (M.Adanson.)
COBOURG , {Géog. mod.) ville d'Alle-
magne enFranconie, capitale d'une princi-
pauté de même nom fur l'Itch. Z. 18 , 35 ^
lut, 50 , 20.
CO-BOURGEOIS , f. m- terme de com-
merce : on donne le nom de bourgeois à un
propriétaire d'un vaifl'eau marchand , &
celui de co-bourgeois à tous ceux qui parta-
gent enferable fa propriété.
COBRA-CAPELLA , f. m. {Hijf. nat.
Serpentolog. ) ferpeiit aufti peu connu qu'il
eft fcuvent cité dans les dictionnaires. Les
Portugais le nomment ainfi & cobra de ca-
pclloy ou comme l'écrivent quelques-uns,
cobre de capello , à caufè d'un renflement
confidérable qu'il a au cou , dont la peau
s'élève à volonté , de manière qu'il forme
une efpece de chapeau fous lequel la tête
peut fe cacher.
COB 315
Neuf efpeces très- bien gravées daiis le
Thefaurus rerum naturalium de Seba , ont
ce caraftere & portent le nom de cobra-
capello^ chez les Portugais. M. Linné les a
toutes comprifes comme autant de variétés,
fous le nom de coluber 253 naja , [cutis ab-
dominalibus 193 , & fquamarum caudalium
paribus 60 , dans iJon Mufœum ad. j'r.p. 30 ,
planche XXI , fig. i , & dans fon Syjfema
naturœ , édition 12 , imprimée en 1766 ,
page 382 j mais toutes ces efpeces font fort
différentes ^ nous les allons caraftérifer en
peu de mots en commençant par ceux qui
n'ont qu'une feule couleur.
"Première efpece. HereTIMANDEL.
La plus grande efpece de ce genre fe trouve
au Malabar , où les Indiens l'appellentAere-
timandel. Seba en a fait graver une bonne
figure au volume II de fon Thefaurus rerum.
naturalium , imprimé en 1735 , page 99 ,^
planche XCIV ^ fig, i.
Son corps a environ quatre pies de lon-
gueur fiir vingt-une lignes de largeur au mi-
lieu du corps & vingt-fopt lignes au renfis-
ment du cou ^ fa tête eft courte , triangTj-
laire , à peine d'un quart plus longue ojie
large , très-obtuie & arrondie à fon exvvé-
mité ^ fon cou fe renfle immédiatement à
ion origine près de la tête en un ovaLe de
quatre pouces de longueur.
Les écailles du deifus de fon corps font
quadrangulaires , arrondies , diipofëf;3 en
quinconce f, celles qui couvrent le drlfous
du ventre , de la tête à l'aims , {ont quar-
rées tranfverfales au nombre de 200 , &"
celles qui couvrent le deffous de la queue y
depuis l'anus jufqu'à fon extrémité , font au'
nombre de 50 paires chacune de 5c écailles
hexagones ^ fes yeux font petits.
Tout fon corps eft cendré-jaure en def-
fus , cendré-blanc en deflbus , & peint for'
le renflement de fon cou d'une tache jaune
bordée de roux , figurée en lunette , dont
les deux anneaux font tournés du côté de
la lête.
Mœurs. Van - Rheede dans fon Hortus
Malabaricus ^volume ÎV ^page 1 1(5 , dit que
la morfure de i'heretimandel eft mortelle , •
mais feulement à la longue , que les chairs
commencent d'abord par fo iphaceler 5 que
la gangrené gagne les chairs quife détachent
3i<r C O B
& tombent fucceinvement en faifant fouf-
frirau malade les douleurs les plus cruelles ,
jusqu'au dernier moment de leur vie. Ce
même auteur nous apprend encore que les
Malabarcs ont un remède fbuverain de tous
cesacidens , dans les feuilles de Tarbrc qu'ils
appellent beflram , dont ils boivent la décoc-
tion dans l'eau avec le fruit falé , c'elt-à-dire,
«lariné du mangier.
Il habite les lieux humides , voifins des
eaux , tels que ceux plantés en papayers &
bananiers. Il vit de grenouilles , (kuterelles
\ & autres infeâres. Irrité il renfle fon cou &
\ rend un (îfflement comparable à cehii de la
\ grenouille.
Deuxième efpece. Cabelo.
Kœmpfer , dans fes Amanitates ^ page
■^6y , donne la figure d'une autre eipece que
,Jes Portugais de Siam appellent caMo , &
^ue Seba a fait graver planche LXXXIX ,
V2**. I , du fécond volume de fon Thefaurus ,
ïbus le nom de ferpens noja Siamenfis cum
C9nfpicillo , feu cobra de capello vel cabelo
diclus.
Il a le corps long de trois pies & demi ,
large de feize lignes au milieu , de vingt-
qii.iîre lignes au renflement du cou ;, la tête
d'u« tiers plus longue que large ^ les yeux
ibnt grands , étincellans ^ les dents antérieu-
res iVnt petites , couvertes par les lèvres , \q%
poftérieures font longues , recourbées en ar-
rière de manière qu'elles lâchent difficile-
ment ce qu'elles ont une fois accroché»
Les «cailles du defTus de fon corps font
petites f rhomboïdales ou en lozanges poin-
tus j celles qui recouvrent le defîbus du ven-
tre , de I3 tête à l'anus, font quarrées , lon-
gues, traçverfales au nombre de 250 , &la
queue en a environ 80 paires.
La coufeur de fon corps eft cendré-rouge
delfous , brun ou roux-noir delTus , avec
une lunette fur le cou , jaune , bordée de
roux.
Maurs, Le cabelo eii commun à Siam.
Troifteme efpece, DlAÏJEMA.
II y a à MacafTar une autre efpece de oo-
hra-capella appellée diadema par Seba , &
gravée au /z°. i , de la planche XLIV du
premier volume de fon Thefaurus imprimé en
^734 iJ^'^g^ 7K> ^^ ^^ ^^^^ ^^ cobra de I
C O B
capella ex India orientait , feu ferpens diadè-
mate vel perfpicillo faciem hominis reprœjen-
tante infigniia.
Il a le corps long de deux pies & demi ,
large de dix lignes au milieu , de vingt lignes
au renflement du cou qui efl prcfque rond ^
la tête aufll large que longue , les yeux
grands, & les écailles du deiliis du corps
elliptiques arrondies.
Il ellblanchâtre en deffous, cendré-jaune
en deffus & marqué d'une lunette noire qui
diflere des autres en ce que les anneaux
ne font pas fermés , & qu'ils entourent en
partie feulement deux points noirs qui imi-
tent deux yeux , & que le tout a oppofé à
un autre point noir qui imite la bouche &
deux traits fur le côté , de forte qu'en total ,
cette lunette repréfèute les traits principaux
de la face humaine.
Quatrième efpece, CoNSPICILLUM.
On peut défigner par le nom de confpi-
cillum ou lunette , la quatrième efj^ece qui
a été firravée par Seba 7X\x fécond volume de
fon Thefaurus , pi. LXXXIX , /z«. i , fous
le nom àe ferpens cum confpicillo minor.
Il a le corps long d'un pié un quart, large
de qtiatre lignes au milieu, & de neuf lignes
au cou qui efl enflé en ovale.
Sa couleur efl un roux-brun ou foncé.
Mœurs. Il efl particulier aux îles Molu-
ques , fur-tout à MacafTar.
Remarque. Il diffère peu du cabelo du
/Z . 2.
Cinquième efpece, CoBRA DE CAPELLO.
Le vrai cobra de capello des Portugais a
été gravé par Seba à la pi. XC , /z°. i fi» 2 ,
de fon volume II , page <)6 , fous le nom de
ferpens Indicus coronatus diademate ^feu conf-
picillo infignitus Lufitanis cobra de capello
diclus.
Son corps efl long de quatre pies , large
de douze à quatorze lignes à fon milieu , de
vingt-quatre à vingt-fix lignes à fon cou qui
efl renflé en ovale j fa tête efl beaucoup plus
obtufè , comme tronquée , aufîi large que
longue , & fa queue fè termine tout-à-coup
en une pointe conique moins allongée.
Les écailles du deffus de fon corps font
longues elliptiques.
Il efl cendré-clair en deffous, jaune rouf-
C O B
fàtfc en defTus , & marqué d'une lunette
jaune bordée de brun. La femelle n'a point
cette lunette , & elle ell un peu plus petite
^le le mâle.
Sixième efpece, N A J A.
Les habitans de Ceylan appellent du nom
de naja & de celui de nagkaja , l'eipece dont
Sjeba a donné deux, figures , l'une du mâle ,
l'autre de la femelle , au volume II de fon
Tàefaurus , pi, XCVll , fig. i 6" z , page
lOi , fous le nom de ferpens Indicus nojas
feu Lufitanis cobra de capello diclus maxi-
mus , confpicillo notatus mas ii'^. l ^ & fce-
me lia fine perfpicillo , n^. 2.
Il a trois pies de longueur iljr vingt lignes
de largeur au milieu du corps , & trente-fix
lignes au cou qui eft renflé en cœur ; fa tête
efl arrondie , moins obtulè que dans le co-
bra de capella , à-peu-près comme celle de
l'Jieretimandelj fes dents antérieures ibntin-
fenfibles.
Les écailles du defliis du corps font ellip-
tiques , obtufes ^ celles du delfous entre la
tête & la queue font au nombre de i6o
tranfverfales , & la queue en a en delfous
80 paires.
. Il eft jaune en delfous , cendré-jaune en
delTus 5 avec une lunette formée de deux
lignes noirâtres , parallèles , qui entourent
deux points noirs, de manière qu'en total ,
cette lunette représente alfez bien une face
de chat.
Mœurs, Ce ferpent eft naturel à l'île de
Ceylan.
Septième efpece.
Le ferpent que Seba a fait graver au même
volume II, planche XCVII , /i°. l , page
103 , fous la dénomination de ferpens Cey-
lanica confpicillo notatafeu cobra de capello ,
eft encore de ce genre.
Il n'a guère qu'un pié de longueur fiir fix
lignes de largeur au milieu du corps, & huit
lignes au renflement de fon cou qui eft ova-
le \ fa tête n'a pas plus de longueur que de
largeur , elle efl: an î^uleulè , inégale.
Sa couleur générale eft un brun clair ,
marqué de quelques anneaux plus clairs , la
lunette de fon cou eft jaune & les anneaux
de la lunette font remplis par une grande
tache noire.
Mœurs, Cette efpece fe trouve à l'île de
Ccylau comme le naja.
C O B
3^7
Huitième efpece.
Seba en a fait graver une huitième elpece ,
volume II , planche LXXXIX , /z°. 4 , page
96 , fous le nom de ferpens Brafilicnfis cum
confpicillo cordis oculati formam habente.
Il a un pié & demi de longueur lijr cinq
lignes de largeur au milieu du corps, & dix
lignes au renflement du cou qui eft ovale i
fa tête eft ovoïde de moitié plus longue que
large.
Son corps eft jaunâtre deflbus , roux en
delfus, anneilé d'une vingtaine de cercles
larges , rouge-bruns , & marqué fur le ren-
flement du cou d'une lunette en cœur blan-
châtre , avec quatre points noirs.
Mœurs. Ce ferpent eft commun au Brefil.
Neuvième efpece.
La neuvième & dernière efpece vient des
Indes ç, Seba en a fait graver une bonne fi-
gure fous le nom de ferpens Indicus cum
confpicillo lepide circulatus, Thefàur. vol,
II, pl. XCFII,n^. l^pagecfS.
Son corps a un pié un quart de longueur,
fur quatre lignes de largeur à fon milieu ,
& fept lignes à fon cou qui a un renflement
ovale.
Il eft cendré-jaune , annelé de 45 à 50
anneaux rouge-bruns , diftribués de manière
que deux plus larges font l'akcrnative avec
trois plus étroits.
Remarques. Si ces neuf efpeces font diffé-
rentes , M. Linné a eu tort de les confondre
toutes , & encore plus de leur donner le
nom de la couleuvre , coluber , qui n'eft
point m.alfaifante 3 s'il eft vrai , comme on
n'en peut douter , qu'elles ne foient aulîi
venimeufès ou plus venimeufès encore que
la vipère. Leur cou rtx^k plus que tout le
refte du corps , eft un caradere bien fufîî-
fant pour en faire un genre particulier qui
ne fe borne pas aux neuf efpec«s que Seba a
fait graver.
On lit dans un di£l:ioiinaire intitulé, Dic-
tionnaire d'kifloire naturelle , à l'article cobre
de capello , que cet animal gonfle fa joue ,
que l'efpcce qui fè trouve à Ceylan , s'ap-
pelle cobra de Neufria^enHii que tous les fer-
pens qui ont comme celui-ci fiir la tête une
couronne en figure de lunette , font de la
famille du ferpent à lunette. La vérité nous
3i8 C O C
oblige de dire que la Neuflria n'eft point à
Ceylan , mais en Hollande ^ mais que le
cobra capella n'enfle point fa joue , que la lu-
nette n'eft pas fur fa tête, & qu'il y a beau-
coup d'autres fèrpens qui ont une pareille
tache en lunette & qui ne font pas de ce
genre. Le public nous fauroit mauvais gré
de ne pas arrêter de pareilles erreurs dès
leur origine, (M.Adanson.)
COBRE , f. m. C Comm. ) mefure de
longueur , d'ufàge à la Chine & aux Indes
orientales ; à la Chine, du côté de Canton ^
aux Indes , fur la côte de Coromandel.
Elle varie félon Iqs lieux. A la Chine elle
cft de ,V d'une aune de Paris j aux Indes .
de 17 pouces & j de France.
COBRISSO , f. m. {Minéralogie.) nom
que l'on donne au Chili & au Pérou à la
mine d'argent lorfqu'elle tient du cuivre , &
qu'elle eft teinte d'une couleur verte. Cette
eipece de mine eft difficile à traiter. Diclion.
du comm.
COCA , f. m, ( Bot. exot. ) arbriflèau du
Pérou , dont les fruits , quand ils ibntfècs ,
fervent aux habitans de petite monnoie ,
de même que le cacao en fert aux Mexi-
cains ^ tandis que les feuilles de l'arbrilTeau ,
font les délices des Péruviens , comme le
bétel des Orientaux , & le tabac des Eu-
ropéens.
Cette plante ne s'cleve guère que de trois
à (juatre pies ^ fès feuilles font molles , d'un
verd-pâle, & aifez (èmblables à celles du
myrte. Son fruit eft difjjofé en grappes ,
rouge comme le myrtile quand il com-
mence àmilrir, de pareille groifeur , Scnoir
quand il a atteint fa parfaite maturité. C'eft
en cet état qu'on le cueille & qu'on le
laiîiè entièrement fécher avant que de le
mettre dans le commerce.
Je ftiis fâché de ne pouvoir rien dire de
plus d'une plante de ce prix , de ne la con-
noître même par aucune deicription de bo-
tanifte , mais feulement par des relations de
voyageurs , qui iè contredifent les uns les
autres , & qui paroilfent ne s'être attachés
qu'à nous en débiter des contes hors de
toute créance. Tels font ceux qui nous rap-
portent qu'il fe fait un ^ grand commerce
du coca , que le revenu de la cathédrale de
Cufco ne provient que de la dîme des
feuilles.
C O C
Quelques auteurs ont fait deux plantes de
celle-ci, & en conféquence l'ont décrite
difteremment fous les noms de coca & de
cuca. Cette façon de multiplier les objets
n'eft pas fans exemple dans la botanique.
( M. le chevalier de Jaucovrt. )
Coca ,{Ge'og. mod. ) petite ville d'Efjja-
gne y dans la Caftille vieille , ftir la petite
rivière d'Elerana.
COCAGNE , f. f. ( Hijf. nat. Bornn. ) la
guede ou vouede dont on tire la couleur
hlQue , ^^pt\\éc pajîel y fe réduit d'abord en
petits pains que l'on nomme cocagne , d'où
vient le nom de pays cocagne qu'on donne
aux pays 011 l'on cultive cette plante. On leur
donne aufti le nom de cocs, Voye[ Cocs ,
Guede & Pastel. ( M. Adanson. )
COCARDE , f. m. ( Art milit. ) en tenr.e
de marchand de modes , eft une bouffette
de rubans aflbrtiftans à l'ordonnance , que
les gens de guerre attachent au bouton du
chapeau.
COCATRE , f. m. {Ècon.ruftiq.) c'eft
ainfî qu'on appelle le chapon qui n'a été
châtré qu'à demi.
COCAZOCHITL , ( Hifi. nat. bot. )
c'eft ainfi que les Mexicains appellent le ta-
getes indicus.
COCCARA , ( Hijl. anc. ) nom d'une
efpece de gâteau des Grecs , dont on ne
connoît que le nom.
* COCCEIENS, f. m. pi. feftateurs de
Jean Cox , né à Brème en 1603 , homme
favant & profond théologien , qui fit grandi
bruit en Hollande dans le xvij« fiecle \ il ap-
percevoit dans l'écriture , qu'il lifoit beau-
coup , deux venues , celle de Jefus-Chrift:
& celle de l'antechrift ^ il croyoit que Je-
fus-Chrift auroit un règne vifible for la ter-
re , poftérieur à celui de l'antechrift qu'il
aboliroit , & antérieur à la converfion des
juifs & de toutes les nations. Il avoit en-
core d'autres idées particulières qui furent
combattues de fon temps avec beaucoup de
chaleur , & qui lui firent de la réputation^
quelques fè6^ateurs, &, comme de raiionj
une multitude d'enneinis.
COCCOCA, {Mythol.) furnom de Dia-
ne ', elle étoit invoquée fous ce titre en Elide 5
mais quelle en étoit la raifbn ? on l'ignore.
COCCYGIEN , adj. en anatomie , fè dit
de quelques parties relatives aux coccyx.
c o c
Le mufcle coccygien antérieur ou latéral
vient de la face interne de l'os des îles , de
l'os ifchion & du corps de cet os , derrière
le trou ovale , & s'y infère à la partie laté-
rale interne & inférieure du coccyx.
Le mufcle coccygien poftérieur vient de la
face antérieure des deux premières vertèbres
de l'os facrum , de la face interne du corps
de l'épine de l'os ifchion, 5c s'infère à la
partie moyenne de la face interne du coc-
cyx. (Z)
COCCYX , f. m. ( Anat. chir. ) Le coc-
cyx eil à l'extrémité de l'épine , & le trouve
placé comme la queue dans les animaux.
C'eft un os fitué au bout de l'os facrum ,
dont il efl comme l'appendice. Sa figure re-
vient en quelque manière à celle d'une pe-
tite pyramide renverfée & un peu courbée
vers le baHin, formant une efpece de bec de
coucou ou de corbeau , convexe en dehors ,
& concave en dedans. Il donne attache au
fphinéter de l'anus , & à une portion des
fefîîers. Sa face antérieure eft plate , & la
poftérienre un peu arrondie.
Il eft compofé de quatre ou cinq pièces
en manière de faulTes vertèbres , jointes les
unes aux autres par des cartilages plus ou
moins fouples , ce qui fait qu'ils obéilFent
&: qu'ils fe retirent aiiëment en arrière.
Quelquefois plufieurs de ces pièces , &
quelc^iefois toutes, font entièrement fon-
dées enfemble.
Les cartilagesqui lient les différentes par-
ties du coccyx , confervent leur natare dans
quelques fujets julqu'à un âge fort avaticé :
il y en a d'autres au contraire dans lefquds
ils deviennent promptement oiTeux.
Ces pièces oiîèufes qui compofent le coc-
cyx , foutiennent le reéinm &le portent plus
en dehors aux femmes qu'aux homm.es ,
donnant par-là plus d'étendue au baflln de
l'hypogaftre pour le temps de la grofléife :
la pointe de ces os regarde toujours en
dedans , ce qui empêche qu'on ne foit in-
commodé en s'alTeyant, & connne ils le
portent un peu en dehors aux femmes , cela
rend plus ample le paiîage de l'enfant dans
l'accouchement.
Chelèlden & Morgagni , deux grands
maîtres , l'un en chirurgie , l'autre en ana-
tomie, ont obfervé que le coccyx aune paire
de mufcles propres qui ont de chaque côté
Tomt VIII,
C O C .31^
leur attache fixe à l'apophyfè épineufe &
poftéricure de l'os iichion , & vont s'infé-
rer au coccyx. Ces mufcles tirent ce dernier
os ea devant , aident par-là aux releyeurs
de l'anus , & remettent le coccyx dans fà
fituation naturelle.
Diem.erbroek rapporte avoir vu un enfant
nouveau-né dont la queue , c'eft-à-dire le
coccyx , étoit de la longueur de 1 3 à 14
pouces ^ mais je crois que cet anatomifte a
mal vu dans cette occafion comme dans
quelques autres.
Harv'ey avoit oui dire à un de fès amis
revenant des Indes orientales , qu'il y a des
hommes dans quelques contrées de ce pays-
là , qui ont Aqs queues d'un pié de long.
Rapporter fidèlement ce qu'on a oui dire ,,
chofe même afîbz rare , eft prefque toujours
rapporter des chofes fiifpedfies. Cependant
Marc Paul dans fa defcription géographique
imprimée à Paris en 1556 , avoit déjà écrit
le même contre des hommes du royaume de
Lambry ^ Struys l'affure aufîî de ceux de
l'île de Formofe j & Gemelli Garreri , fur
le récit de quelques jéfliites , de ceux de
l'île de Mindore , voifine des Manilles. Que
Sorbiere avoit bien raifon d'appeller les re-
lations des voyageurs , les romans des phy-
ficiens ! Tous ces hommes à longue queue
des Indes orientales , du Royaume de Lam-
bry , des îles Formofè , Mindoro , Bornéo ,
&c. font des efpeces de gros fînges à queue
qu'on y trouve en quantité.
Ces fortes de finges à queue font nommés
par les naturaliftes cercopitheci. Il y en a
dans tous les cabinets des curieux, & j'en ai
vu de toute grandeur.
Bourdon dit qu'il y a des fages femmes
qui ont coutume de pouffer le coccyx en
arrière dans l'accouchement avec tant de
violence, qu'il en réfîilte de très-fâcheux ao
cidens. Cependant , fiiivant la Motte , au-
quel nous devons un bon traité des accou-
chemens , ce n'eft jamais cet os qui met
obftacle au pafta^ de l'enfant, mais le baf-
fin trop étroit de Thypogaftre , qui fait que
la tête de l'enfant s'y étant engagée , elle ne
peut avancer ni rétrograder. Il eft perfuadé
que le coccyx obéit fans peine aux efforts
que fait le fœtus pour s'ouvrir un pafTage ,
& à ceux que fait la mère pour accoucher.
Le coccyx peut fè luxer en dehors ou ea
Tt
33« € O C
dedans , car il eft très-rare que fes vertèbres
fe déjoignent entièrement. Pour réduire le
€occyx luxé en dehors , il ne faut que le
pouiîbr en dedans , le tenir dans cette fitua-
tion avec des comprcffes graduées & un
bandage en T.
Pour réduire le coccyx luxé en-dedans ,
on trempe le doigt indice dans l'huile , &
on l'introduit dans l'anus aufli avant qu'il
eft nécelTaire pour paiTer au delà du bout du
coccyx , & le relever. Il faut, pour éviter la
douleur , obièrver en introduisant le doigt ,
de l'appuyer toujours fur le côté de la marge
de l'anus oppofé à la pointe du coccyx.
On préviendra les fuites fâcheufes de cet
accident par des faignées , des narcotiques ,
la diète , les boilTons rafraîchiffantes , les la-
vemens , les bains , les cataplafmes anodins ,
ëmolliens & réfblutifs , un bandage lâche &.
iîmplement contentif, & le lit.
M. Petit dans fon trai/é des maladies des
os y tome I , ckap. ii; , remarque que le dé-
rangement du coccyx n'eft point , à propre-
ment parler , une luxation , parce que la
jonftion de cet os n'eft pas une articulation
formée par des têtes & des cavités , mais
une union par cartilage que les anciens ont
nommée fynchondrofe \ ce qui femble de-
voir faire appeller la luxation du coccyx en
dehors , renverfement , & fa luxation en de-
dans, enfoncement. Si le coccyx étoit entiè-
rement féparé de l'os iàcrum , on pourroit
dire qw'il eft rompu.
Les caufes de la luxation du coccyx en
dedans ( pour parler néanmoins le langage
ordinaire ), fbi-it les coups & les chûtes fur
cette partie , qui forment quelquefois par la
(EOHtufion des accidens funeftes , fiir-tout
lorfque les femmes négligent par pudeur de
montrer le mat aux maîtres de l'art. M. Pe-
tit en cite deux ou trois exemples qui doi-
vent apprendre à furmonter dans ces occa-
fîons des répugnances qui peuvent coûter
la vie. ,ab.
La pudeur bien entenfl^, n'eft qu'un ièn-
timent honnête qui doit feulement nous dé-
tourner du vice. {M. lech.DE Jaucourt. )
* COCHE , f. m. voiture publique qui
transporte les particuliers & leurs effets de
l'd capitale en différens endroits du royaume ,
& de ces endroits dans la capitale. Il y a
dfeux fortes de coches , les cechts d'eau 2« ïe$
c o c
coches de terre. Les coches d'eau font de
grands bateaux diftribués en différentes
chambres où fe retirent les voyageurs , & en
un grand magafin où font dcpofées les mar-
chandifes. Les coches de terre font de grands
carroff^es à un grand nombre de places j les
voyageurs occupent ces places ^ les mar-
ciiandifes font chargées fur le derrière j le
devant eft occupé par un grand tiffii d'ofier
qu'on appelle le panier , où l'on met auffî
des marchandifes , & où font reçues à un
prix médiocre les perfonnes qui ne trouvent
plus de place dans le coche , ou qui ne font
pas en état d'en prendre. La première mÇ-
titution de ces coches remonte fous Charles
IX. Ils étoient Joués par des particuliers ;
mais bientôt il y eut un privilège excluiif
& wn infpeâeur des coches. En 1 594 , Henri
IV fupprima cette infpeéiion, & créa un
furintendant de ces voitures j ce qui fait pré-
fumer qu'elles étoient déjà établies en grand
nombre. Ce fut alors que commença la po-
lice de ces voitures, qui a été portée juf-
qu'où nous la voyons , fur la qualité des mar-
chandifes , l'exaâiitude du départ , le prix
& l'ordre des places , la tenue des rcgiftres,
la fureté des eiïeu mis aux coches , les de-
voirs des cockers , ^c. Voye[ VoiTURE^
PUBLIQUES.
Coche , terme de Marine. Porter les hu-
niers en coche , c'eft les hiifer au plus haut
du mât. {Z)
Coche, {.î.inftrumenide chapelier., mor-
ceau de buis ou d'autre bois dur , long de
fèpt ou huit pouces , tourné en forme de pe-
tite bobine , avec lequel on met en adtion la
corde de l'arçon , dans la préparation àe%
matières dont on fabrique les chapeaux.
Les eardeurs fe fervent aufiî de la cocht
pour arçonner leur laine ou coton après l'a^
voir cardé. Voye\ Chapeau.
Coche qu Entaille qu'on fait dans le
bois.
COCHÉES, adjî f. pilules cochées^
( Pharm. ) On trouve dans prefque tous les
difpenfaires deux fortes de pilules, les unes
appeilées cochées majeures , les autres co'
chées mineures.
Les premières ou les majeures font de
Rhafis, &fè font de la manière fuivante.
Pilules cochées majeures de Rhajis. Tf!;
de la poudre d'hierepicre de Rhafîs dix gros 3
CGC
jHiIpe de coloquinte pulvérifée , trois gros un
îcmpule j fcammonée pulvérifée , deux g^ros
& demi ^ ftoechas, turbith choifî , de cha-
que cinq gros. On pulvérifera enfemble Je
.ftœchas & le turbith, & on fera du tout une
îuaflè de pilules félon les règles de l'art , avec
uiie fuffi faute quantité de firop de ftœchas.
La dofè de ces pilules eft jufqu'à deux fcru-
pules & même un gros.
. Pilules cochées mineures. 1^ alocs flicco-
trin , fcammonée choifie , pulpe de colo-
quinte , de chaque , partie égale;, huile elîèn-
X\t)\e. de girolle ^ f. q. ad aromatifand. faites
du tout une malfe de pilules avec f. q. de
iirop de nerprun. La dofe de ces pilules efl
depuis fix grains jufqu'à un fcrupule.
Les pilules coc/^É-V^ , tant majeures que mi-
neures , font des hydragogucs très violens
fort peu employés par nos médecins , mais
dont les Anglois & les Allemands font un
ufage affez fréquent. ( b )
COCHEIM, {Géog.mod,') petite ville
d'Allemagne dans l'éleétorat de Trêves , fiir
la Mofelle. Long. 24, 45 ^ lat. 50 , 12.
COCHEMAR , (MM. ) efl un fentiment
de pefanteur fur la poitrine , qu'on éprouve
€n dormant, & qui fatigue autant que pour-
roit le faire un grand fardeau , & allarme
encore plus par l'idée des fantômes & au-
tres chimères qui l'accompagnent ordinaire-
ment -^ mais cette opprefîion & ces frayeurs
fe difTipent par le réveil , fi ce n'eft qu'elles
laifîent quelquefois la palpitation du coeur
& beaucoup de lafTitude.
Il tire fon nom du grec ?t/, & de ^tA^c.Mot/,
fupra infïlio , je faute deifus ; parce que ce-
lui qui en eft attaqué , s'imagine qu'il a un
animal fur la poitrine.
Themifon lui a donné le nom de pinga-
lion , à caufe de la fuiîbcation qui l'accom-
pagne •, il l'a aufTi appelle pnigamon , c'eft
ïtpibole d'Aurelianus^ c'eft comme fî l'on
difoit jeté deffus. En effet , on trouve des per-
fbnnes qui rêvent qu'un poids qu'ils ont fur
eux les fufïbque. Diofcoride l'appelle -Truyixov^
vro it)etK7ov ^ Pline , ludibria fanni : caries
Romains accordoient aux faïuies , ce que
ceux de nos pays donnent aux efprits mal-
faifans qui errent pendant la nuit , comme
les anciens ont fait aux démons , aux incu-
bes & aux fuccubes. On appelle encore cette
maladie incube &yi/cc:/^f.;4Lyoneile porte
COC 33r
le tiom de chauchevieille ; d'autres , comme
Galien , lui confervent la dénomination d'é~
pilepfte nocturne , d^aflhme Q.oclurne , &:c.
C'eft un genre de maladie périodique pen-
dant la nuit , ou qui attaque en dormant^
fès fymptomes principaux font une forte
anhélation , accompagnée de l'infbmnie
d'un certain corps qui comprime la poitrine.
Cette maladie attaque fur-tout ceux qui
dorment à la renverfe j elle fe manifefte par
une refpiration plaintive^, tremblante, dou-
teufè \ le malade eft aufïïtôt éveillé , le fom-^
meil & la maladie s'évanouifFent alors.
L'ame , dit Hippocrate , veille & fait tou-
tes \^s fonèlions du corps , pendant que
l'homme dort : le cochemar en fournit la^
preuve. Car , de même que l'ame avertie
quand on dort, de l'acrimonie de la fèmence
qui eft dans les vélîcules , examinant cette
fènfation , elle l'unit à celles qui ont de l'af-
finité avec elle , ou qui font accoutumées à
l'accompagner , & en conféquence defîrant
d'afTouvir fà cupidité , elle met en éredèion '
la verge & termine l'aâie vénérien j ainfî dès
qu'il y a quelque obftacle dans les organes
de la refpiration qui lui fait réfiftance , l'ima-
gination erre aifément , H. elle voit à cette
fènfation l'idée , fbit d'un démon qui faute ,
d'un chat ou d'un chien qui preffe la poi-
trine, ou d'une vieille maifaifante qui étran-
gle , d'où il arrive qhe celui qui rêve étant '
tourmenté par la crainte , s'agite , fue , 8c
fè plaint autant qu'un fommeil profond Je
lui permet. Quand le fommeil eft interrompu,
celui qui eft attaque de cochemar recomioît
fbn erreur & ne tarde pas à fè rétablir.
Dans ce cas , lobftacle qui s^oppofè aw
mouvement de la poitrine , détermine le
fommeil ^ mais il eft certain qu'un fbmmeil
anticipé détermine quelquefois la fliffoca-
tion ^ & je me fbuviens d'avoir rêvé plufieurs
fois étant jeune , qu'un chat montoit dans
mon lit , & que je ne me fèntois fufFoqué
que lorfque je m'im.aginois que le chat liioa-
toit de mes pics vers ma poitrine. C'était le
longe qui déterminoit la fuffocation , & non •
la fiiftbcation qui déterminait le fbnge , •
comme on le croit vulgairement. Après cette
obfcrvation , il fuit que l'imagination , fans :
aucun vice corporel dans Ja poitrine , fufïït
pour occafioner une dyfpnée rl-ès-confidé- >
rable avec fièvre , fiieur;, angoifTes beaucoup
Tta
351 COC
plus grandes que fî la caufe que nous imagi-
nons , exiftoit réellement en nous.
Ce qui ciï digne de remarque , c'eft que
nous avons coutume de reprocher aux per-
fonnes qui nous tiennent long-temps en fiif-
pens 5 & en même temps fort attentifs par
les circonlocutions d'un difcours qui nous
annonce quelque cas grave ^ nous avons ,
dis-je , coutume de leur reprocher qu'ils
nous donnent un cochemar ; parce que l'at-
tention trop forte que prête notre ame , arrête
tellement en nous pour quelque temps , la
refpiration , que nous relpirons esfuite avec
beaucoup de peine & de difficulté , quand
nous relâchons notre poitrine & que l'atten-
tion'diminue.
Le cochemar pléthorique , c'eft celui qui
fc fait fentir à ceux qui dorment à la ren-
verlè : il peut être aufîi caufé par la chaleur
du lit, par le poids des couvertures , fur-tout
il le vent du midi fouffle , & par la plé-
thore , quand on fait trop bonne chère , ou
que l'on a foufFert la fuppreflion d'un écoule-
ment fanguin : car il n'y a rien de plus ordi-
naire que de voir dans ces circonftances , le
fang fe porter au cerveau , & exciter des fbn-
%QS qui , dans les uns , produiront la pano-
phobie , dans ceux-ci une gonorrhée lafcive j
dans ceux-là , le cochemar , fur-tout Ç\ le fang
demeure ftagnant dans les poumons , à caufè
de leur relâchement précédent.
On prévient cette efpece de cochemar par
la faiguée , en mangeant peu , en fe paiTant
de foupcr , en fê couchant fur le côté , & en
tenant fa tête plus élevée.
Le cochemar ftomachique eft celui qui eft
déterminé par le poids du ventricule gonfle
par les alimens qui ne font pas encore digé-
rés , & qui eft appuyé contre le diaphragme \
le cerveau étant engorgé par un chyle grof
fier & abondant, qui épaiilit le fang. Ceux
qui en font attaqués , ont la bouche mau-
vaifè , des hoquets , des naufées , la tête
p3fant€. Cette maladie attaque les gour-
mands qui vont de la table au lit , & parti-
culièrement s'ils fe c®uchent à la renverfe ,
& la tête placée horizontalement. Les enfans
y font plus fujsts que les adultes ^ elle eft
funefte particulièrement aux gourmands :
quant à l'objet du fonge , il varie en raifon
des mœurs dif malade.
Car il les domeftiqucs ont fait dsvant un
COC
enfant ou devant une perfonne d'un e/prit
foible , ces contes ineptes que les vieilles
femmes rapportent des efprits malins , des
losps-garous , & des faunes , cet enfant ou
cette perfonne rêvent qu'ils font opprimés ë<:
foulés aux pies par ces monftres , ou qu'ils
aifouviflent leurs paiîîons. Ceux qui , quand
ils veilloient , craignoient quelque chofe de
femblable des chats , àt% finges , ou d'autres
animaux méchan-s , doivent rêver que ces ;
animaux les attaquent.
Le traitement exige l'émétique , les ca-
thartiqucs , une nourriture médiocre. Le
malade doit s'abftenir de fouper , de boire
du vin 5 de manger de la viande de lièvre ,
de boire des liqueurs fpiritueufes \ & lî les
forces digeftives de l'eftomac s'affoibliliént ,
les ftomachiques amers , le quinquina , la
rhubarbe , l'aioè's font propres à les ranimer.
Cette efpece provenant de l'ivreffe & de
la gourmandife , & fur-tout après avoir beau^
coup mangé le foir , eft la plus ordinaire de
toutes j & félon le diffèrent caraâiere du
malade, les infomnies &le{iege des fymp-
tomes varient. L'homme lubrique rêve à
l'afte vénérien. Timée rapporte qu'uu^bldat
croyoit dans fon fommeil , que ion ennemi
l'étrangloit. Un de me.s amis s'imaginoit être
ferré & comprimé entre les murs d'un efca-
lier trop étroit \ d'autres font des rêves d'une
autre efpece , mais ces aftèêtions font pafla-
geres , & ne demandent que le fecours de
la prophilaéi:ique.
Le cochemar eft fouvent l'effet d'un hydro-
céphale. Après des terreurs noèbirnes & des
attaques d'incube, mourut un jeune homme
m.èlancolique , fujet aux vertiges , foible de
la tête & de la vue. A l'ouverture de fon ca-
davre , on trouva les veinés du cerveau de
couleur noire \ le cerveau étoit inondé de
pus \ le finus gauche de ce vifcere étoit gon-
flé de pourriture & de mucus, le malade
penchoit toujours la tête du côté gauche.
Bonet rapporte encore deux autres obfèri'a-
tions au iiijet des perfonnes attaquées de
cochemar , dans le cerveau defquelles les fî-
nus étoient diftendus par de l'eau. C'eft-là
ce qui a fait naître l'opinion que le fiege du
cochemar étoit dans le quatrième finus du
cerveau , dans lequel la féroflté coulant lorf-
que la tête étoit renverfée , occafîonoit cette
i Hialadis > suais je peafe que ce principe dii
c o c
cochemar eft très-rare j il n'y a rien de plus
ordinaire que de trouver de la féroiité dans
les iinus du cerveau. Un académicien d'Ox-
fort avoit ime hydropifie de poitrine 8c une
incube en même temps \ il n'eft pas difficile
de reconnoître dans ce cas les lignes de cette
elpece. Les hydragogues , les fêtons & les
diurétiques conviennent ^ mais Lower qui
foupçonne toujours un hydrocéphale , quand
un malade a le cochemar , nous paroît beau-
coup s'écarter du vrai.
Le cochemar vermineux a fon fîege dans
le ventricule même , parce qu'un enfant dans
Teftomac duquel les vers rampent , peut fa-
cilement rêver qu'il y a dans la région épi-
gaftrique quelque chofe qui l'épouvante ^ or
une forte terreiu: jette dans un vrai cochemar
caufé par une idée pareille , & ceux qui
font tout d'un coup frappés d'une pareille
terreur, font fuffoqués. L'indication cura-
tive n'eft pas difficile à développer.
Le cochemar tertianaire eft marqué par la
peur, & un certain fymptome furprenant ,
imitant en partie l'incube , & en partie l'é-
pilepfie , revenant le troifieme foir , & con-
tinuant depuis opuf heures jufqu'à onze.
Une demoiselle de neuf ans étoit faifîe
tous les trois jours , d'un paroxyfme fembla-
ble à la fièvre j c'eft-à-dire , que tout fon
ventre & fa poitrine ië relferroient avec
difficulté de refpirer , fes yeux reftoient ou-
verts , ils étoient continuellement fixés vers
le même lieu ^ ce qu'elle failiffoit avec les
mains , elle l'empoignoit fortement pour
refpirer avec plus de facilité , elle ne répon-
doit pas aux queftions qu'on lui faifoit , elle
paroiifoit cependant ne pas perdre la tête ;,
elle veilloit , elle étoit fort trifte , fon ventre
s'élevoit , fa poitrine fe relferroit ^ fa relpi-
ration étoit gênée , fes anhélations étoient
fréquentes , elle ne pouvoit parler , tant elle
étoit oppreffée.
Le cochemar eft ordinaire aux hypocon-
driaques & aux mélancoliques. Tel étoit ,
je crois , ce facrificateur qui ne reconnoif-
fànt pas fon erreur , fe perfuadoit fortement
qu'une vieille qu'il connoiifoit, venoit le
voir pendant la. nuit , & qu'il étoit ferré en-
tre fes bras , jufqu'à être fiifFoqué. On peut
voir dans Foreftus , livre X , cette hiftoire
affez curieulb , & une autre qui y a du rap-
port." Dans cette efpece , i'émétique ne con-
CGC 33J
vient point du tout , particulièrement s'il y
a hyftérie , & fi les inteftins ibnt fecs & fla{-
ques. Les vents peuvent preftér le dia-
phragme & caufer le délire dans un cerveau
qui y eft déjà porté chez les hommes timi-
des , & qui ne font pas trop à eux ^ ce délire
commence la nuit , & continue pendant le
jour. On traite cette efpece par les anti-épi-
leptiques , particulièrement avec la femence
de pivoine , d'anis , & par le cinnabre.
Le cochemar ne préfente pas toujours de
triftes fantômes à l'e/prit. J. R. Fortis traita
une demoifelle qui avoit des rêves fort agréa-
l?les j mais elle s'éveilloit avec un fentiment
de pefanteur dans la poitrine j fa voix & fa
refpiration étoient interceptées , elle relîén •
toit une grande anxiété , fa face étoit bai-
gnée de larmes, fa tête appefantie. Craanen
rapporte un cas femblable arrivé à un homme.
Heurnius & Foreftus rapportent la même
chofe d'eux-mêmes.
Un certain Silimacus raconte qu'autrefois
à Rome, plufieurs perfonnes périrent de
cette paiîion , comme d'une maladie con-
tagieufè ^ Caelius Aurelianus dit la même
chofe du cochemar y qu'il place parmi les
paillons tardives : mais cette efpece n'eft pas
affez certaine. ,
Cette maladie , lorfqu'elle n'eft ni fré-
quente ni violente , n'ell pas dangereufè j
mais dans le cas contraire , elle peut annon-
cer , fur-tout aux jeunes gens , l'épilepfie :
on a même vu quelquefois que la folie en
avoit été précédée ;, pour Iqs vieillards , on
doit la regarder comme un des avant-cou-
reurs de l'apoplexie : ou peut cependant en
être fuffoqué fur le champ ;, & nous en avons
des exemples pour tous les âges : on a vu
encore à Rome le cochemar épidémique, &
tout auffi meurtrier que la pefte. L'in/j^ec-
tion auatomique ne nous apprend prefque
rien lîir la nature de cette maladie : fi l'on a
trouvé dans quelques-ims de l'eau , dans les
ventricules du cerveau , ou des fuppurations
dans différentes parties de ce vifcere , ce
font des accidens étrangers , qui ne paroil-
fent avoir aucun rapport avec l'incube. Oa
a cependant vu dans quelques-uns le cœur
d'une groifeur énorme ^ & ce vice paroît
avoir beaucoup de rapport avec la maladie
Idont nous parlons.
En général, la fobriété eft le point le
^354 C O C
plus eiîêntieldu traitement, & c'eft commu-
nément tout ce qu'on a à faire : quelques-uns
s'en délivrent en évitant de fè coucher fiir le
dos j j'en ai cependant vu auxquels cette
fituation étoitlaplus favorable. La feignéey
efi: fouveiit utile , fur-tout s'il y a des fignes
de pléthore. On ne fauroit fe paffer des pur-
gatifs, Se même quelquefois des émétiqiies:
on en vient enfuite aux délayans , aux tem-
pérans & aux apéritifs , aux ftomachiques,
tant amers qu'abforbans &: fortifians , aux
céphaliques & aux anti-fpafmodiques. Les
remèdes particuliers dont on a fait le plus
d'ufage , après les délayans & les légers apé-
ritifs les pUis connus , font parmi les ftoma-
chiques , la fumeterre , le quinquina , la
gentiane , l'aloës , le corail & les autres ab-
forbans. Les céphaliques les plus recom-
mandés font le ftœchiîs , le romarin , la
méliffe , la fàuge & la bétoine , les fèmences
& la racine de pivoine , le fuccin : il faut
ajouter les martiaux ^ le tartre vitriolé , les
eaux minérales , tant froides que chaudes, &c.
Cependant les cas où il eft permis d'ufèr de
toutes ces chofes , font allez rares ^ mais on
n'eft jamais dilpenfé de garder un régime
convenable , & c'eft peut-être ce qu'on a de
mieux à faire. (T)
COCHENE , f. m. (H//?, nat. Bot. )
en latin , for bus aucuparia , ou forbier des
oifèleurs , forbier fauvage \ . c'eft le forbus
proprement dit de Brurtsfels , Vaucupalis de
Camerarius , le/raxinea de Hugues , Vornus
de Ruelle , & le for eus i aucuparia foliis
pinnatis utrinque glabris de M. Linné dans
{onSyJi. nat. édit. il , impr. en 1767,/». 347.
Il diffère du cormier , ou forbus légitima
de Clufius , en ce que 1°. il eft plus petit ,
«'élevant à peine à vingt-piés de hauteur.
2.°. Ses jeunes branches , & les pédicules de
£cs feuilles font rouges & liftes. 3^. Ses feuilles
font moins velues , ou même liffès, 4°. Les
corymbes de fes fleurs font plus grands ,
chargés d'un plus grand nombre de fleurs.
5^. Ses fleurs n'ont que trois à quatre flyles,
& plus communément trois. 6". Ses fruits
font des baies jaunes , rougeâtres ou oran-
gées , à trois ou quatre loges cartilagineufès,
comme celle de la pomme , contenant cha-
cune deux pépins.
Culture. Il croît naturellement dans ks
climats froids de l'Europe.
coc
Ufages. Comme iès fruits font partioslié-
rement recherchés par les oifeaux , les oife-
leurs en font un grand ufage , pour les piper.
Remarque. Le cochêne & le forbier ou cor-
mier font un genre particulier de plante qui
tient le milieu entre le pommier malus , 6c
l'alifier crategus , où nous l'avons placé. V,
nos FawJlles des plantes , volume II , page
iç)6. ( M. Adanson. )
COCHENILLAGE , f. m. {Teinture.)
ce terme a deux acceptions : il fe dit i**. de
l'aélion de teindre en cochenille j 1°. du
bouillon ou de la décoction deftinée à tein-
dre en cramoifi avec la cochenille ^ d'où l'on
a fait le verbe cocheniller. V. TEINTURE (S*
Cochenille.
COCHENILLE, f. î.{mfl. nat.)m?i^
tiere qui fert à la teinture de l'écarlate & du
pourpre. On nous l'apporte d'Amérique en
petits grains de figure iinguliere , la plupart
convexes & cannelés d'un côté , & conca-
ves de l'autre. La couleur de la cochenille la
plus recherchée eft le gris teint de couleur
d'ardoife , mêlé de rougeâtre & de blanc.
On garde la cochenille autant que l'on veut,
iàns qu'elle s'altère. On a ^té long-temps
fans favoir précifément ft cette matière ap-
partenoit au règne végétal ou au règne ani-
mal : on croyoit d'abord que c'étoit une
graine de l'efpece de celle qu'on appelle àzs
baies ; mais à préfent il n'eft pas douteux
que la cochenille ne foit un infère defteché.
On en a des preuves inconteftables par les
obièrvations qui ont été faites au Mexique ,
qui eft le foui pays où on recueille la coche-
nille ; mais indépendamment des faits que
l'on a conftatés à ce iujet , on pourroit re-
connoître la cochenille pour un infeâe à la
fîmple infpeftion , dans l'état où nous la
voyons dans ce pays-ci , fiir-tout en l'obfer-
vant à la loupe ou au microfcope , après l'a-
voir fait ramollir dans de l'eau ou dans du
vinaigre , pour développer & renfler les par-
ties racornies & deflechées. Par le moyen de
cette préparation , on diftingue dans les
grains de cochenille les plus informes , les
différens anneaux dont le corps de l'infèâie
étoit compofé , & on voit dans plufteurs de
ces grains des jambes entières , &c quelques
reftes qui tiennent au corps , ou au moins
on apperçoit les endroits où les jambes de
cet infe<^e étoieat attachées , êc il paroît
c o c
clairement qu'il en avoit fix ; on rcconnoît
au/n la tête & l'anus , & on voit quelque ap-
parence dyeux ou d'antennes , d'une trom-
pe , &c. enfin on en voit afîez pour recon-
Roître que la cochenille n'eft ni un fcarabé ,
ni une araignée , comme on l'avoit cru ^ on
reconnoît au contraire que cet infeâ^e a
beaucoup de rapport aux gallinfeâ:es , ou
plutôt aux progallinfeftes , fur-tout par ce
que l'on fait de fa manière de vivre.
On recueille la cochenille fiir des plantes
auxquelles on donne les noms de figuier
d'inde. à& raquette^ ^zcardaffe^ ^ de nopal.
Elles font afTcz connues dans les ferres &
même dans les orangeries , où on les garde
pour leur figure iinguliere ^ car elles n'ont
que des feuilles au lieu de tiges & de bran-
ches , ou plutôt leurs tiges & leurs branches
font compofées d'une file de feuilles épaiffes ,
oblongues & arrondies , qui tiennent les
unes aux autres par leurs extrémités. Il y a
dans les ferres du jardin du roi plufieurs
efpeces de ce genre de plante , & même celle
qui nourrit au Brefîirinfèdtedelacoci^e/z/V/e.
Ces plantes portent un fruit qui relTemble en
quelque façon à nos figues ^ c'eft d'où vient
le nom àe figuier d'inde. Ces figues n'ont pas
un aufîî bon goût que les nôtres \ elles tei-
gnent en rouge l'urine de ceux qui en ont
mangé , & communiquent , félon toutes
les apparences , à l'infèfte de la cochenille ^
la propriété qu'il a pour la teinture.
Les Indiens du Mexique cultivent aux
alentours de leurs habitations des nopals ,
pour y recueillir de la cochenille ; & pour
s'alfurer de cette récolte , ils les fement pour
ainfî dire fîir les plantes. Ils font de petits
nids avec de la moulFe , des brins d'herbe j
ou de la bourre de noix de cocos j ils met-
tent 12 ou i/^ cochenilles dans chaque nid ,
& placent deux ou trois de ces nids fur cha-
que feuille de nopal , & les affermiflent au
moyen des épines decette plante. Après trois
©u quatre jours , on voit fortir du corps de
ces infeftes des milliers de petits qui ne font
pas plus gros que des mites. Ces nouveau-
aés quittent bientôt le nid y & fè difperf ènt
fur les plantes ^ mais ils ne font pas long-
temps fans s'arrêter & fè fixer dans les en-
droits qui font les plus fùcculens & les plus
verds , ou les plus abrités contre le vent ^ ils
lefteat chacun à leiir place j jpiq[u'à ce qu'ils.
c o c 35J
aient pris tout leur accroiffement. Ces infec-
tes ne rongent pas la plante , ils la piquent
& en tirent le fuc. Dans les lieux où l'on
doit craindre que le froid ou les pluies ne
fafîent périr les cochenilles , on couvre avec
des nattes les plantes fiir lefquelles elles font.
Ces infe£tes font de figure ovale ;, ils ne de-
viennent pas plus gros que de petits pois ^
& on les a comparés pour la figure aux ti-
ques ou aux punaifes domefliques. Les In-
diens font obligés de défendre les cochenilles
contre diiférens infei^es qui les détruiroient,
fi on n'avoit foin de nettoyer exactement les
nopals.
On fait chaque année plufieurs récoltes
de cochenilli.Duns la première , on enlevé
les nids & les cochenilles que l'on avoit mis
dedans & qui y ont péri dès que les petits
ont été fortis de leur corps. Trois ou quatre
mois après , on recueille îe produit de cette
génération , l'on fait tomber les cochenilles
par le moyen d'un pinceau ; alors chaque
individu a pris fbn accroiffement. Il y en »
même qui commencent à produire une fé-
conde génération ^ on laiiTe ces petits , &
peut-être même des gros , pour fournir à la
troifieme récolte qui fe fait trois ou quatre
mois après la féconde. Les pluies viennent
trop tôt pour que l'on ait le temps d'en faire
une quatrième ^ c'eft pourquoi les Indiens
enlèvent des feuilles de nopal avec les petits
infedies qui y reftent , & les ferrent dans les
habitations , pour mettre ces infèôes à l'abri
du froid & de la pluie , & les feuilles fè con-
fèrvent pendant long-temps , comme tontes^
celles des plantes que l'on appelle plames
grades, hcs cochenilles croiilentainfi pendant
la mauvaifè faifbn ^ & lorfqu'elle eft pa|fée ,
on les met à l'air dans des nids fur des plantes
du dehors , comme nous avons déjà dit, La.
cochenille de la troifieme récolte n'eft pas-
aufTi bien conditionnée que celle des autres ,.
parce qu'on racle les feuilles de nopal pour'
enlever les petits inièéies nouveau- nés , qu'ils
ne fèroit guère poftible de recueillir avec le.
pinceau y à caufe de leur petit volume ;, on.
mêle- par conféquent les raclures des plan-
tes avec la cochenille ,. qui eft d'ailleurs do:
différente groffeur , parce que les mères fè
trouvent avec les nouveau - nés : c'eft pour-
quoi les Efpagnols. donnent à cette cocAù-
nilU le nom die granilùu.
33^ C O C
Les Indiens font périr les cochenilles dès
qu'ils les ont recueillies , parce que ces in-
fectes qui peuvent vivre pendant quelques
jours , quoique féparés des plantes , fe-
roient leurs petits , & que les petits fe dif-
perferoient , s'échapperoient du tas , & fe-
roient perdus pour le propriétaire. On \qs
plonge dans l'eau c!îaude pour les faire mou-
rir -.j enfuiîo on les feche au ioleil ^ d'autres
les mettent dans des fours , ou iîjr àas pla-
ques qui ont fcrvi à faire cuire des gâteaux
de maïs. Ces différentes façons de faire mou-
rir ces infedes influent {ur leur couleur : ceux
que l'on a mis dans l'eau chaude , ont perdu
une partie d'une efpece de poudre blanche
qi:e l'on voit fur leur corps lor^iu ils font vi-
vans , ils prennent une teinte de brun roux :
on appelle cette cochenille renegrida. Celle
qui a été au four eft d'un gris cendré ou
jafpé , elle a du blanc fur un fond rougeâ-
tre j on l'appelle jafpeada. Enfin celle que
l'on a mife fur les plaques , eft le plus ibu-
* vent trop échauffée , & devient noirâtre ^
aufîi lui donnc-t-on le nom de negra.
Il y a deux fortes de cochenille ; l'une eft
pour ainfi dire cultivée , & l'autre fauvage.
La première eft appellée mejleque , parce
qu'on en trouve à Meteque dans la province
de Honduras ^ c'eft celle que l'on lème pour
ainh dire , & que l'on recueille dans les plan-
tations de nopal : cette cochenille o.^ la meil-
leure. L'autre forte , que l'on appelle 7y/v^/^
tre , croît , à ce que l'on dit , ftir une elpece
de figuier d'inde que l'on ne cultive point ,
& qui a plus de piquans fiir fes feuilles que le
nopal : elle fournit moins de teinture que
l'autre. Les provinces du Mexique où on re-
aieille le plus de cochenille^ font celles de Tla-
fèalla 5 de Guaxaca , de Guatimala , de Hon-
duras , fi'c. Il faut qu'il y ait bien des gens
occupés à ce travail : car on a calculé en
1736, qu'il entroit en Europe chaque année
huit cents quatre-vingt mille livres pelant de
cochenille^ dont il y avoit près du tiers de co-
chenille jylvejire , & le refte de mejleque ; ce
qui valoit en tout plus de 1 5 millions en ar-
gent par aimée commune. Cet objet de
commerce eft fort important , & mériteroit
bien que l'on fit des tentatives pour l'établir
dans les îles d'Amérique , ou en d'autres cli-
mats dont la température feroit convenable
à la cochenille 6c à la plante dont elle fe nour- !
C O C
I rit. Mém. pour fervir à thift. des inf. tom,
^^iP^g^ ^7 ^fuiv. Voyei CaLLIN SECTES
& Insectes. (1)
Cochenille, infede. (Mat.méd.) La
cochenille paife pour fudorifiquc , alexiphar-
maque & fébrifuge 5 on l'ordonne dans la
pefte & dans les fièvres éruptives.
Lémery allure qu'elle eft bonne contre la
pierre , la gravelie & la diarrhée , & qu'elle
empêche l'avortement , étant prife en pou-
dre depuis 12 grains jufqu'à demi-gros. Ce
qu'il y a de certain , c'ell que les femmes
italiennes en font beaucoup uiàge dans ce
cas.
La cochenille entre dans la confeâioa
alkerme , dans l'efjjrit de lavande compofë ,
la teinture ftomachique amere ^ mais plutôt
pour colorer ces médicamens , que pour
contribuer à leur efficacité. ( b )
On fera charmé de lire la defcription de la
cochenille, tant mâle que femelle ^ que M,
Ellis a envoyée h lafaciété royale de Londres,
* Malgré les curieufes recherches des natu-
raliftesfur la nature & l'économie de l'infèéle
de la cochenille , dit M. Ellis , l'hiftoire de
cet animal eftimable m'ayant paru fort im-
parfaite , fijr-tout pour ce qui regarde le
mâle dont la defcription nous manquoit ,
j'ai cherché tous les moyens de perfedliionner
cette partie de l'inlècStologie.
Je iàvois que cet iufeâie fe trouvoit en
abondance fur le figuier des Indes ( appelle
caclus opuntia par Linnaeus ) , dans la Caro-
line méridionale & dans la Géorgie , de
même que liir le caâus coccillonifer du même
auteur qui croît au Mexique , d'où il a été
apporté à la Jamaïque. J'écrivis au doâeur
Alexandre Garden , de Charles-Town dans
la Caroline , de m'envoyer quelques branches
du figuier des Indes chargées de ces infe£l:es ,
ce qu'il fit en 1757. Ce qu'il m'envoya étoit
plein de nids de ces petits animaux , & j'eus
le plaifir de les obferver dans leurs différens
états, depuis l'inftant où ils éclofent & fe
promènent fur les branches de cet arbre ,
julqu'à celui où ils fe fixent & s'enveloppent
dans un cocon qu'ils filent autour d'eux ,
comme le vcr-à-lbie.
Je le fis voir à la fociété royale , & enfeite
à la fociété pour l'encouragement des arts ,
des manufactures & du commerce , dans la
vue d'en introduire ôt cultiver l'efpece dans
nos
c o c
nos colonies ; projet que cette dernière com-
pagnie tâcha d'avancer par des récompenfes
propofées ^ mais le manque de bras en a
empêché jufqu'ici l'exécution.
La femelle de la cochenille a été très-bien
décrite par M. de Réaumur , par le dodeur
Brown, & en dernier lieu par M. Linnaeus ,
dans fon Syftême du règne animal , fous le
noin de coccus caâi coccinelliferi. M. Rolan-
der lui en avoit envoyé de vivantes de Suri-
nam , dans l'année 1756 , mais ni Réaumur,
iii Brown , ni Linnaeus n'ont vu le mâle.
M. Linnaeus place cet infede parmi les
hémiptères , c'ell-à-dire , ceux qui n'ont que
des moitiés d'ailes , & il ne comprend pas
feulement dans cet ordre tous les infedtes
dont les fourreaux ne recouvrent que la moi-
tié des ailes , mais auffi ceux dont un ièul
fexe eft ailé , & c'eft ce qui diftingue parti-
culièrement le genre des coccus ou cochenil-
les : rojîrum pectorale , abdomen pone feto-
fum , aLv duœ , tantum mafculis ; ou comme
il s'exprime dans la dixième & dernière
édition de ion Syftême naturel , alœ duœ
ereclœ mafculis , fœminœ apterœ.
J'examinai avec foin ce que m'avoit en-
voyé le dodleur Garden , & dans la grande
quantité d'infeéies que j'avois , je trouvai
trois à quatre petites mouches mortes qui
avoient chacune deux ailes blanches. Je les
liumeâ:ai d'clprit-de-vin afFoibli , puis je les
examinai au microfcope : leur corps étoit
d'un rouge clair , ce qui acheva de me per-
fltader que j'avois trouvé le vrai mâle de la
cochenille. Pour confirmer cette découverte,
je la communiquai au dod^eur Garden , en
lui envoyant un deffin de l'infefte tel que
je l'avois vu , & le priant de vouloir bien
me faire part de ce qu'il favoit de l'écono-
mie de ces animalcules, & de m'envoyer
quelques mâles recueillis par lui-même. Il
€ut la bonté de m'en envoyer de la dernière
ponte , avec les obfervations fuivantes.
« Au mois d'août 1759 5 je pris un mâle
& l'examinai dans votre mi:;rofcope à eau.
Les mâles font difficiles à trouver , parce
qu'il n'y a peut-être qu'un au plus contre
deux cents femelles ou davantage. Le mâle
eft aftif & bien fait , mince & grêle , en
comparaifon de la femelle qui eft beaucoup
plus groffe , mal proportionnée , lente , eii-
j|ourdie & très-pareffeufe. En général , elles
Tome VUh
C O C 337
deviennent fi grofles & fi épaifles, que leurs
yeux & leurs bouches paroiiFent enfoncés &
comme cachés dans les replis ou les rides de
leur peau. Leurs antennes même & leurs
jambes font prefque à moitié recouvertes-
par cette enflure qui les empêche d'en re-
m.uer facilement les diverfes articulations ,
& leur permet encore moins de fe mouvoir
elles-mêmes.
La tête du mâle eft très-diftinfle du cou
qui eft beaucoup plus étroit que la tête , &
beaucoup plus encore que le refte du corps.
Le thorax eft de forme elliptique tin peu
plus que le cou & la tête enfemble , & ap-
plati par en-bas. Du front fortent deux an-
tennes beaucoup plus grandes que celles des
femelles , l'infefte peut les mouvoir de
côté Se d'autre avec une extrême agilité.
Ces antennes font articulées , & de chaque
articulation fbrtent quatre foies difpofées
par paires de chaque côté.
Il a trois pattes de chaque côté , & cha-
cune eft formée de trois pièces : il les meut
avec une extrême vîtefTe. De l'extrémité
poftérieure de fbn corps s'allongent deux
grandes foies ou poils quatre ou cinq fois
auflî longs que l'infèâie entier. Il porte deux
ailes plantées fur la partie fupérieure du
thorax qui s'abaiflent horizontalement
comme celles des mouches ordinaires ,
lorsqu'il marche ou fè repofè. Ces ailes font
de forme oblongue,&: diminuent fubitement
de largeur au point de leur infèrtion au corps
de l'animal , de forte qu'elles font là comme
étranglées. Elles font plus longues que le
corps de l'animal , & en outre , fortifiées de
deux longs nerfs , dont l'un décourt tout
autour de l'aile dont il forme le bord exté-
rieur, l'autre un peu moins gros eft intérieur
& parallèle au premier : il femble interrompu
vers la fommité des ailes. Le corps du mâle
eft d'un rouge plus clair que le corps de la
femelle & beaucoup moins épais. »
Cette defcriptiôn du doâ:eur Garden eft
tout-à-fait conforme à ce- que le microfcope
m'a fait voir de cet infefte, tant pour le maie
que pour la femelle. Je dois ajouter feule-' •
ment que la femelle a fous la poitrine verf
le milieu une efpece de trompe allongée ,
fourchue , que Linnaeus appelle fon bec , 8c
qu'il regarde comme fa bouche. Cette trompe
lie fert pas feulement à l'animal pour fc
Vv
338 CGC
nourrir , c'efi: encore avec les deux fîlamens
qui la terminent en forme de fourche , qu'elle
file le cocon blanc & délicat , où elle refte
dans fon état d'eiigourdiflement, & pendant
k temps de fa portée jufqua ce qu'elle
ixicite bas fès petits.
Dans ion état d'engourdilTement , elle eft
tellement enflée que fes pies & les antennes ,
ainli que fa trompe qui ne croifiè plus ,
quoique fon corps grcfîifre , font fi dispro-
portionnés , fi petits , fi enfoncés , qu'il faut
nvoir de bons yeux pour les reconnoître à la
fimple vue , fans le fecoui;s du microfcope -,
autrement elle a autant l'air d'une graine
que d'un animai.
C'eft ce qui a fait fi long-temps douter fi la
cochenille étoit un animal ou une produâ:ion
végétale. Mais fi les curieux, au lieu de s ar-
rêter à difputer , avoient pris la peine de
cueillir eux - mêmes quelques prétendues
graines de cockenilk , de les laiflèr pendant
vingt- quatre j ours dans de l'eau chaude ^ &
les obferver enfuite avec attention , ils au-
Toient reconnu que l'enflure confidérable-
ment diminuée laiffoit voir les pattes, les
antennes & la trompe de l'animal. La
trompe eft fùr-tout remarquable pour \ç.%
deux poils ou filamens déliés qui la termi-
nent, & dont l'animal fe fèrt pour liiTer fon
cocon à-peu-près comme le ver-à-ibie, qui file
toujours le fien avec deux fils qui s'unifient
enfemble au fortir de fon corps ,. avec une
colle naturelle à l'animal.
Si la femelle dans fon état de grofl!eur , un
peu humeftée d'eau j eft ouverte fur un
morceau de verre, avec une lancette très-
fine , on voit fortir de fon corps un grand
nombre d'œufs , avec une fourmilliei-e de
petits vivans qui en- Portent incontinent, ce
qui femble indiquer que les œufs de là coche-
nille éclofenten fortant du corps, ds l'animal.
Dès que la femelle efi: délivrée de fa nom-
fcreufe ponte , elle meurt & n'eft plus qu'une
coffe ou pellicule defiechée : aufii on a grand
£bin au Meïdque dexueillir la co£heaille2iV2^A
la ponte , pour ne pas perdre cette fiiperbe
ccarlate fi efiimée dans le monde.
Je joindrai ici les cara6leres de cet in-
fefte, tant du mâle que delà femelle, en la-
tin , félon la méthode iyllématique de Lin-
iiaeus qui l'a placé entre \q% infeâes hémip-
tères, comme je l'ai^dit ci^delliis.-
CGC
Mas AtATirs. Corpus mngnîtudine puîi^-
cis , glabrum rubrum,
Caput globofum.
AnKnnce moliràformes^ thorace paulo lon-
giores , decem aniculatce.
Cdllumprotraâum. ||É|.>
Thorax ovatus pojlic} truncatus. ^^
Abdomen thorace paulo longius , pojiicè
augujiatum , fcgmemis dccem , ultimo ap-
vendice fubulato brevi terminato,
Setœ caudales duce , cap illares , corport
quadrupla longiores.
Alœ oblongœ , abdomine longiores , apict
rctundatœ y baji augujîatae , thoracis ante mé-
dium ïnjertae^-
Pedes fex fubcpquales.
Femina aptera. Corpus magnitudine.
feminis vidiœ, ovaium, rubrum ^ rugo/um,
Antenna? brèves articulatœ.
Pedesfex in junior ibus inferti , fed in adul-
tis intra rugas conditi , uti & anus reliqui.
Thorax glaber^ fupra convexus^ rugojiis ,.
fubtus planiufculus ^ abdomine duplo longior.
Ro/lrum vel os punclum fubulatum è medio
pecloris , fegmentœ abdominis in junior ibus
margine pi lofa.
Cochenille de Pologne, ff. {Jiijî..
nat, Infe3olog.)^pY^el\é ic/iinbiiip-àr Cermr
fiir Dioicoride, //>. /^, chap. xxxix. C'eft
la progalliufecie de la graine d'écarlate, dé-
crite par Réaumur , Volume IV , mémoire 11,
page m : le kermès des racines de Geoffroy ,.
infecl, vol. /, page 504; & le coccus 17
Polonicus radicis fcleranthi perennis, de M.
Linné, fyjl. nat. édit. 12 de 1766 , page
741. Breyn, en 173 1 , en a donné l'hiltoire
danS' les Ephémérides des curieux de la na-
ture , ainfi que le dodeur Bernhard de
Bernitz : obfcrv. 104.
Le mâle de cet animal , qu'on peut appel-^
1er comme les Polonois , ischinbh\^ ou [chin-
biti^ diffère beaucoup de fa femelle. 11 efl
vingt fois plus petit , & a fur le dos deux ailes
blanches , relevées verticalement, &: mar-
quées chacune d'un petit trait rouge vermil-
lon. La femelle aie corps fphéro'ide , . fans
ailes, de deux lignes environ de diamètre:,
tous deux ont le corps mou , comme ridé ou
" marqué de onze anneaux , fix pattes , deux
yeux , deux antennes cétacées ^ la tête. ter-
minée par une trompe très-fine, couchée
.entre ks pattes le long da ventre, & l'anus
c o c
35ordé de nombre de filets blancs , femblables
à une laine , qui fe multiplie au temps de la
ponte , au point que ia femelle en eft toute
couverte ^ ce qui n'arrive point au mâle. La
iiemelle eft ovipare , quoique M. de Réau-
mur l'ait cru vivipare.
Mœurs. Le zchinbitz fe trouve fous terre
aux racines de la plante, appellée knawcl par
les Allemands f, & par nous , alchimilla gra-
mineo folio majore flore , par Tournefort \ &'
fcLeranthus 2 perennis , calycibus fruclus
claujîs , par M. Linné. Syfl. nat. édit. 12 ,
page 306.
11 fe nourrit du fuc q« il pompe à&% raci-
nes de cette plante avec fa trompe : on l'a
obfervé aufli , mais en petit nombre fur d'au-
tres plantes , fur le knawel annuel , & fur
la potentille ^ & je le découvris il y a nom-
bre d'années au pié du gnaphalium , pié de
<:hat , en juillet au haut des collines lituées
au nord-oueft de Montmorenci. Mais cet
animal ne fe trouve pas dans tous les lieux
où croiiTent ces plantes : il afFefle particu-
lièrement le knawel vivace \ & les feuls pays
où il foit abondant, Ibnt le palatinat de Kio-
Tie , l'Ukraine , la Podolie , la Volhinie &
la Lithuanie en Pologne , dans \<i^ terres dé-
fertes & fâblonneufes. Je fuis, au moins que
je fâche , le premier & le feul qui l'ait trouvé
aux environs de Paris , & cela fur le pié de
chat des collines fablonneufes , graveleufes
%i filiceufes de Montmorenci \ & il n'a
point encore été apperçu fur le knawel vi-
vace , qui ne fe trouve au phis près de Paris ,
que dans les fables , entre la Marlaye & la
montagne qui eft fur le chemin de Gou-
vieux , & en allant de Chantilly à Saint-
Leu d'Eifereus , & dans les fables de Fon-
tainebleau.
Récolte. La Pologne eft donc le fèul pays
où l'on puifî'e en faire une récolte , & où l'on
en faffe réellement une ^ mais elle manque
abfolument lorfque l'été a été pluvieux &
froid. Le zchinbitz , dont M. Volf a bien
-voulu me donner la colledliion la plus fuivie
^vec toutes {qs métamorphofes , n'a pris Ion
parfait accroiflement, & n'eft plein de Ion
iûc purpurin, qu'après le folftice d'été , c'eft-
à-dire , dans le mois de juillet ;, comme je
le trouvai auflî par hazard aux environs de
Montmorenci.
Alors les Polonois s'arment d'une eljîece de
339
^ l'enfoncent
C O C
houlette à manche court
d'une main fous la plante du tîiawel, qu'ils
tiennent de l'autre pour l'enlever de terre \
puis lis en détachent l'nifedle , & remettent
la plante dans le même trou , pour ce pas
perdre les œufs de la cochenille , qui doi-
vent foîirnir la récolte de l'année fuivante :
cette manœuvre fe pratique avec autant d'a-
drelfe que de célérité.
Le zchinbitz ainli cueilli fe paflè à un cri-
ble fait exprès pour le féparer de fa terre ^ &
afin qu'il ne prenne ni moififTure ni fermen-
tation qui lui ôte de fa qualité , on l'arrofe
de \'inaigre , & quelquefois d'eau la plus
froide \ ce qui fufiit pour le faire mourù" ':
alors on le porte dans un lieu chaud , ou
bien on l'expofe au foleil pour le faire fé-
cher : cette exficcation doit être faite lente-
ment, faute de quoi la beauté de leiu* cou-
leur s'altéreroiî.
Quelquefois ils féparent ces petits infeéles
de leur enveloppe , en les prelfant douce-
ment avec le bout des doigts pour en former
de petits pains ronds. Une comprefllon trop
forte en exprimeroit le fuc ^ & ce feroit une
perte réelle , qu'on évite en y prêtant atten-
tion : ces pciins font beaucoup plus eftimés
par les teinturiers , que l'infedie léché en
grains détachés.
La récolte du zchinbitz eft affermée aux
juifs par les Polonois Palatins de l'Ukraine ,
qui la font faire par leurs ferfs ou leurs vaf-
faux.
Ufages. Les juifs vont vendre cette tein-
ture aux Turcs & aux Arméniens , qui l'em-
ploient à teindre la laine , la foie , le cuir , le
maroquin & la queue de leurs chevaux. Les
femmes turques en tirent la teinture avec le
vin ou le jus de citron , & en font un ufage
journalier pourferougir l'extrémité desmains
& des pies d'une belle couleur de chair. Les
Hollandois achetoient autrefois le zchinbitz
fo-rt cher , & l'employoient par moitié avec
la cochenille pour teindre les draps en écar-
late. De la teinture de cet infe^le extraite
par le jus de citron où une lefîive d'alun , on'
peut avec la craie faire une laque pour les
peintres , qui , par l'addition d'un peu de
gomine arabique , égale en beauté la laquar
de Florence. Enfin , le fuc exprimé de cet
infeéle fe conferve pour \zs mêmes ufage*
médicinaux que le kermès 5 & à Varfovic 9
Vv A
340 C O C
on le fublHtiie au kermès dans la confection
de l'alkermès.
Nous ferons une obfervation {îir ces pro-
priétés & ufages , qui font extraits de la
difTertation du dofteur Bernitz , c'eft que ,
foit que ces propriétés foient exagérées , foit
que le zchinbitz envoyé de Dantzick à M.
de Réaumur & à M. Heliot , fût mal pré-
paré ou trop vieux , & comme éventé , ces
académiciens ne purent , en le traitant à la
manière du kermès & de la cochenille , .en
tirer autre chofe que des demi-teintes , des
couleurs foibles de lila , ou chair , ou cra-
moifi , plus ou moins vives , & jamais des
écarlates. D'ailleurs , comme cette coche-
nille de Pologne ne rend pas la cinquième
partie de la teinture que rend celle du Mexi-
que , & qu'elle coûte par-là beaucoup plus
cher que la plus belle cochenille , le com-
merce de cette drogue eft extrêmement di-
minué j & on ne fait plus ufage de la coche-
nille de grain dans les villes où les teintures
cnt acquis une certaine perfection.
Remarques. Il eft dit dans un diétionnaire
intitulé Diclionnaire {ÏHiJioire naturelle , art.
cochenille de Pologne , ou kermès du Nord ,
que cet infeCte fe trouve à la racine d'une
eipece de re nouée ou de centinode Polygo-
num ; mais c'eft une erreur : le knawel eft
certainement bien éloigné d'avoir aucun rap-
port avec la renouée : celle-ci eft une plante
de la famille des perfîcaires & de l'oièille ,
au lieu que le knawel vient naturellement
dans la famille des garous, où nous l'avons
placé. yoye:(^ nos Familles des plantes , vol.
Il , page 283.
La cochenille forme un genre particulier
dans la famille des cigales.
Ce petit animal & tant d'autres , dont la
recherche paroît méprifable aux yeux du
vulgaire , prouve par ion utilité , le cas
qu'on doit faire de nos recherches qui , tôt
ou tard, tournent au bien de la ibciété.
{M. Adanson.)
COCHER , f, m. fe dit en général de
celui qui fait conduire une voiture. Il y a les
cochers des voitures ordinaires , les cochers
de carrofles particuliers , \^^ cochers de car-
rofîes publics , les cochers de place , ùc.
Cocher (le) , c'eft le nom qu'on donne à
une conftellation , ou unaflèmblage d'étoiles
Jbses daiis l'hémiiphere feptentrioual. Ces
C O C
étoiles font dans le catalogue de Ptclomée
au nombre de 14 ;, dans celui de Tycho ,
au nombre de 23 : Hevelius en compte 40 ,
& le catalogue britannique 68. (O)
Cocher , v. aét. en termes de batteur d'or ,
eft un livre de vélin très-fin , apprêté avec
un fond ( Voye^ FoND ) , & bien defféché
fous une prefle. On dit \q premier & le Z^-
cond cocher^ quoique l'un ne diftere de l'aul-
tre que par le nombre de fes feuilles qui eft
double. Ils fervent tous deux à dégroftir l'or,
VoyeiDÉGKOSSlK (S» BaTTEUR d'OR.
COCHE VIS , f m. alauda crifîata , (Hiji.
nat. Ornithol.) oifeau plus gros que l'alouette
ordinaire , & dont le bec eft plus gros &
plus long I, il a près d'un pouce de longueur
depuis la pointe jufqu'aux coins de la bouche ,
la pièce fupérieure eft brune , 8c l'inférieure
blanchâtre \ la langue eft large & un peu
fourchue à fon extrémité \ l'iris des yeux eft
de couleur de noifette mêlée de couleur cen-
drée j il y a au delfus de la tête une hupe
compofée de fept ou huit petites plumes ,
& quelquefois de dix ou douze : l'oifeau
peut les élever ou les abaiftcr , les éloigner
ou \qs rapprocher les unes des autres comme
celles de la queue \ les plumes de la hupe
font plus noires que toutes les autres , &
ont près d'un demi- pouce de longueur. Le
dos eft d'une couleur moins cendrée , & n'a
pas autant de taches que dans l'alouette or-
dinaire ^ le croupion n'en a prefque aucune.
Les grandes plumes de chaque aile font au
nombre de dix-huit , fans compter l'exté-
rieure qui eft fort petite & femblable aux
plumes du fécond rang ^ les premières des
grandes plumes ont les barbes extérieures de
couleur blanchâtre mêlée de jaune ou de
roux pâle : les autres plumes font moins
noires que dans l'alouette ordinaire , & ont
un peu de roux pâle même à la partie in-
férieure. Le ventre & la poitrine font d'un
jaune blanchâtre \ la gorge eft marquée de
taches comme dans l'alouette ordinaire j la
queue a un peu plus de deux pouces de
longueur , & eft compofée de douze plu-
mes : \qs deux premières de chaque côté
ont le bord extérieur blanc mêlé de roux ^
& quelquefois noir \ la troifteme & la qua-
trième font entièrement noires , la cin-
quième & la fixieme ont la même couleur
que celles du corps. Cet oifeau diffère de
c o c
J'alouette ordinaire en ce qu'il eft plus gros,
qu'il a une hupe fur la tête , que la couleur
des plumes de fon dos eft moins marquée de
taches , & enfin en ce qu'il a la queue plus
courte. Les cochevis habitent le bord des
lacs & des fleuves , ils ne volent pas en
troupe , ils ne s'élèvent pas aufli fouvent en
l'air que l'alouette ordinaire , & n'y relient
pas aulfi long-temps. Willughby, Ornith.
Foyei Alouette , Oiseau. (/)
COCUIL A, (Ge'og. /Tza^/. j rivière d'I-
talie au royaume de Naples , qui prend fa
iburce dans l'Apennin , & fe jette dans le
golfe de Tarente.
COCHIN , ( Géog. mod. ) ville confidé-
rable d'Afie , capitale d'un royaume de
même nom fur la côte de Malabar. Les habi-
tans font idolâtres. Les femmes y peuvent
prendre autant de maris qu'il leur plaît. Long.
95 ■> lS;iat. lo.
COCHINCHINE , ( Géeg. mod. ) grand
royaume d'Afie borné par le Tunquin , le
royaume de Chiampa, le Kemi, & la mer:
les habitans font idolâtres & fort belliqueux.
Ce pays efl: très-fertile j on y trouve de l'or ,
des mines de diamant, & de l'ivoire. Lat.
11 , i8.
COCHINES , f. m. pi. (HiJÎ. nat.) petits
vailFeaux qui font attachés à l'extrémité des
branches coupées des arbres d'où diftille le
baume , & qui reçoivent cette liqueur.
COCHLEA , en Méchanîque , terme latin
qui fignifie Xune des cinq machines fimples :
on la nomme en françois vis. Voye[ Vis.
On l'appelle de la forte , à caufe de fa ref
ièmblance avec la coquille du limaçon ou
cochlea. (0)
COCHLÉARIA, f. m. {Botan. ) plante
anti-fcorbutique très-utile. Voici les carac-
tères du cochléaria.
Sa fleur eft cruciforme , à quatre pétales \
du calice fort le piftil qui devient un fruit
prefque fphérique , partagé en deux cellules
par une cloifon mitoyenne ^ ces cellules con-
tiennent plufieurs petites femences arrondies.
On connoît fixeipeces de cochléaria ^ mais
nous ne parlerons que de la principale qui
eft celle des boutiques , autrement dite
cochléaria folio fubrotundo , C. B. P. Tour-
nef. Boerh. Rupp. Bruxb. Çfc.
Ses racines font blanchâtres , un peu épaif
fes , droites . fibrées , & chevelues : elles
C O C 54r
pouffent à leur collet des feuilles nombreu-
fes , d'un verd foncé , arrondies , à oreilles ,
longues d'un pouce , creufcs preiqu'en ma-
nière de cuiller , d'où vient le nom de la
plante. Elles font fucculentes , épaiifes ,
acres , piquantes , ameres , d'une odeur ni-
doreufè , défagréable , &. portées fur des
queues longues d'une palme. Ses tiges font
branchues , couchées fur terre , longues»
d'une coudée , liffes , chargées de feuilles dé-
coupées , longues , & fans queue. Ses fleurs
font à quatre pétales , blancs, cjifpofés en
croix. Leur calice eft à quatre feuilles. Le
piftil fe change en un fruit arrondi, long
de deux lignes , compofé y de même que les
filiques , de deux panneaux appliqués fiir
une cloifon mitoyenne qui k fépare en deux
loges demi-iphériques , qui renferm^ent de
petites graines menues y arrondies , roufiTes ,
& piquantes au goût.
Cette plante qui eft toute d'ufage , croît
fans culture dans les Pyrénées , fiir les côtes
de la Flandre , en Hollande , au nord de
l'Angleterre , Ç^c. mais on la cultive dans les
jardins pour fon utilité. Elle fleurit en avril ,
& a fes graines perfeâiionnées en juillet ,
qui eft le meilleur temps pour la femer j 8c
c'eft ce qu'il faut renouveller chaque année.
( M. le chevalier DE Jaucovrt. )
Cochléaria, (Mat. méd. Pkarmac.)
Le cochléaria eft une de ces plantes que nous
appelions alkalines , depuis que \qs chymiftes
modernes ont découvert que la partie vola-
tile , vive , & piquante , qui diftingue cet
ordre de plante , étoit un vrai alkali volatil.
Comme il eft très-aifé d'avoir cette plante
fraîche toute l'année , qu'elle eft très-luccu-
lente, & que d'ailleurs on ne làuroit l'expo-
{èr à l'aétion du feu fans difliper /es parties
mobiles qui conftituent fa. principale vertu ,
le iuc de cette plante eft prefque la feule
préparation extemporannée qui foiten ufage.
On le donne ordinairement àladofede deux
ou trois onces. Voyei Suc. On garde d'ail-
leurs dans \qs boutiques l'extrait , l'efprit ,
l'eau diftillée , & la conlèrve de cochléaria»
L'extrait & la conlèrve n'ont rien de par-
ticulier ( voyei Extrait & Conserve ) ^
nous allons donner la manière de préparer
' l'efprit & l'eau.
Efprit de cochléaria. Prenez du cochléaria
lorfqu'il eft dans fyn temps balfàmique.
341 C O C
c'eft-à dire, lorfqu'il eft prêt à dottîlôf fes
fleurs , environ feize livres -^ hachez-le menu
& le mettez clans un alembic de verre , ver-
fant dellus une livre d'efprit-de-vin recftifîé ^
fermez exadement la cucurbite , & laifFez
digérer per«:iant deux joiu-s , après lefquels
diSiilez au bain- marie félon l'art.
Eau de cochléaria. V du cochUaria lorf-
•(qu'il eft prêt à donner fes fleurs f, hachez-le
& le mettez dans une cucurbite d'étain , à
laquelle vous adapterez fou chapiteau , qui
fera auflî d'étain, & vous diftillerez au bain-
marie jufqu'à ce qu'il ne paffe plus rien ^ par
ce moyen vous aurez une eau chargée de
l'efprit alkali volatil de la plante , qu'on peut
auflî appeller Yefprit volatil de cochléaria.
Toutes ces préparations font desanti fcor-
'butiques éprouvés \ il faut feulement obfervcr
que le fuc de cochléaria & fa confervc ren-
ferment toute la vertu de la plante , que l'ex-
trait au contraire n'en contient que les par-
ties fixes & l'efprit , & l'eau diftiliéedespar-
>ties volatiles \ & qu'ainfi une bonne façon
<l'animer l'extrait , c'eft de le donner avec
l'efprit ou l'eau diftillée ^ car fans cette addi-
tion l'extrait de cochléaria ne paroît poiTéder
;que les vertus communes à tous \^% extraits
nitreux. Au refte il paroît fort inutile, quand
on veut employer toutes les parties falutaires
-du cochléaria , d'avoir recours à ces prépara-
tions officinales \ fon fuc que l'on peut tou-
jours préparer très- commodément, comme
nous l'avons obfêrvé , remplit toujours mieux
les vues du médecin.
Il s'eft trouvé quelques fcorbutiques dont
le palais a pu réfifter à l'âcreté du cochléaria^
& qui fe font fort bien trouvés de le manger
fans aucune préparation \ & peut-être fèroit-
x;e là la meilleure façon de le donner ,
fur-tout dans le fcorbut confirmé.
C'eft prefque uniquement au fcor'but de
terre & aux différentes maladies fcorbuti-
ques de cette claffe ., que l'ufage de tous les
remèdes tirés du cochléaria eft confacré :
.cette plante tient le premier rang parmi les
remèdes anti-fcorbutiques. Fbye:[ScoRBUT.
On faifoit autrefois affez communément
xles bouillons anti-fcorbutiques , dans la
préparation defquels on expofoit à l'ébuUi-
iiou le cochléaria & les autres plantes alka-
lihes ; mais on s'eft enfin accoutumé à re-
garder les parties mobiles de ces plantes <jui
C O C
fe diflîpoient pendant la déco£î:îoiî , comme
\qs plus efficaces, & à chercher àlesretenin;
c'eft dans cette vue que Ton prépare aujour-
d'hui ces fortes de bouillons au bain-marie
dans des vailleaux bien fermés, & même
qu'on préfère d'ajouter à la décodf ion de la
viande & des plantes purement extrad^ives ,
lorfqu'elle eft prefque refroidie, le i\iz du
cochléaria ou ^z% autres plantes alkalines.
Le fuc & l'efprit de cochléaria , mais fur-
tout le dernier, font fort ufités extérieure-
ment dans le traitement des ulcères fcorbuti-
ques , dans les gonflemens fanguinolens des
gencives , dans leur infiammation , leur
exulcération , lorfque les dents tremblent ,
6v. On lave aufTi les taches de fcorbut avec
le fuc on avec l'efprit de cette plante : oa
peut appliquer delfus la plante pilée avec
un égal fuccès.
C'eft imç pratique fort utile contre le re-
lâchement & la pâleur des gencives , que
celle de \ç.% fotter fréquemment a\'ec des
feuilles fraîches de cochléaria.
Stahl recommande , dans fa matière mé'
dicale ^ le cochléaria dans les fièvres quartes
& dans la cachexie ^ & il obferxe qu'il faut
bien fe garder de l'employer dans les afîèc-
tions hémorroïdales , c'efl-à-dire dans tou-
tes \'^s maladies qui dépendent de la veine-
porte , qui , félon ce favant miédecin , joue
un fi grand rôle dans l'économie animale.
Les feuilles de cochléaria entrent dans le
decoâum anti-fcorbutique , dans le vin anti^
fcorbutique^dans l'eau généralei^dans l'eau an-
ti-fcorbutique , dans le firop anti-fcorbutique.
L'eau diftillée de la même plante entre
dans l'eau pour les gencives j fes femences
entrent dans l'eau anti-fcorbutique \ fon ef^
prit entre dans la teinture de gomme laque ,
dans le firop anti-fcorbutique \ fon extrait
eft un des ingrédiens des pilules de Stahl &
de celles de Bêcher. ( ^ )
COCHLITES , f. m. ( Hift. nat. Conchy-
liolog. ) On lit dans le didionnaire intitulé;
Diâionnaire dtJiifioire naturslk , que les li-
thologiftes diftinguent par ce nom toutes les
coquilles uni valves , fofriles,dontla divifion
eft la même que celle des coquillages unival-
ves vivans. Mais cette affertion ell: une er-
reur : \q^ naturaliftes ont reftrcint ce nom
aux coquilles foffiles , univalves feulement ,
qui fout de forme arrondie , H. douj |a
€ O C
Bouche eft demi-ronde , à-peu-près comme
«elle du limaçon ordinaire , appellée cochka,
(M. Ad AN SON.)
COCHOIR , voyei Toupin , & tartick
GORDERIE.
(COCHOIS , c Cirier. ) outil de bois qui
iert aux ciriers à équarrir les fîainbeaux ,
tant de point que de table. Diclionn, de
Trév. & du Comm.
COCHON , f. m. ( HiJÏ. nat Ecoaom.
ruftiq. Mat. méd. Diète , & Myth. )fus ; ani-
mal quadrupède qu'on a mis au ran^ des
animaux à pies fourchus qui ne ruminent
pas. Il ert affez diftingué par {es poils roides
qu'on appelleyb/> , par fon mufèau allongé ,
& terminé par un cartilage plat & rond où
ibnt les narines : il a quatre dents incifîves
dans la mâchoire ilipérieure , & huit dans
finférieure , deux petites dents incilives en
defTus , & deux grandes en delTous ; celles-
ci font pointues & creufes ^ elles fervent de
défsnfe à l'animal. Ilfe forme dans le cocAon,
entre la peau & le pannicule charnu , une
forte de grailïè que l'on appelle /ard : elle eft
fort différente de celle des animaux rumi-
nans , & même de celle du refte du corps de
cet animal ^ on appelle celle-ci azonge. Les
femelles ou truies ont jufqu'à fix mamelles
& plus ^ elles portent jurqu'à vingt petits à
la fois. Le cochon peut vivre 15320 ans.
On donne le nom de toit ou de fou à l'en-
droit 011 l'on enferme les cochons. Il faut
avoir deux toits , l'un pour les mâles , &
l'autre pour les fem.elles Scieurs petits ^ fans
quoi les verrats pourront blelîèr les truies
quand elles feront pleines , & même dévo-
rer les petits. L'aire du toit doit être bien
pavée , les murs bien folidement conftruits ,
à moilon & mortier , & revêtus en dedans
de douves de futailles. Comme ils font beau-
coup de petits, le profit de ce bétail eft con-
fidérable. Le porc châtré s'appelle cochon :
celui qui ne l'eft pas , verrat. Le verrat doit
être choifi quarré & vigoureux ; il peut fuf-
fire à dix truies ^ & il n'eft bon que depuis
un an jufqu'à quatre ou cinq. La truie fera
longue , & elle produira depuis un an |uf-
qu'à lix ou fept : elle porte quatre mois , &
cochonne dans le cinquième , ainfî elle peut
cochonner deux fois par an. Elle recherche
l'approche du mâle quoique pleine.
11. faut donner z\xs. cochons une '^etito 11-
c o- c 345
tiere , & nettoyer foigneufement leurs éta-
bles. Ces animaux aiment les bois , les glands ,
la farine , la châtaigne , &c les fruits fauvages
qu'on y trouve en automne , les terres fan-
geufes , les vers , les racines dont elles font
remplies , &c.
On les fait paître depuis le mois de mars
jufqu'en odobre , deux fois par jour^ le ma-
tin après la rofée jufqu'à dix heures ;, le foir
depuis deux heures jufqu'au foleil couchant ^
en o£lobre une fois , en hiver une fois ,
pourvu qu'il n'y ait ni neige , ni pluie , ni
vent , &c.
Il ne faut pas laiflêr fouffrir la foif aux
codions. On foue, c'eft-à-dire on lâche la fe-
melle au mâle , en février , mars & avril \
on prend pour cela le temps de manière que
les petits n'aient pas à Ibuffrir les rigueurs de
l'hiver.
On nourrit amplement la truie quand elle
a cochonné \ on lui donne un m.êlange de
fon , d'eau tiède , & d'herbes fraîches : on ne
lui laiftcra que fept à huit petits ^ on vendra
les autres à trois femaines. On gardera les
mâles de préférence aux femelles ^ on ne laif'
fera qu'une femelle fur quatre à cinq mâles :
on fevrera ceux-ci à deux mois : on les lail-
fera aller aux champs trois femaines après
. qu'ils feront venus \ on les nourrira d'eau
blanchie avec le fon foir & matin , juiqu'à
ce qu'ils aient deux mois \ on les châtrera au
printemps ou en automne , à fix ou à quatre
mois.
Quand les cochons {exoviX. forts , & qu'on fe
propofera de les engraiifer, on leur donnera
de l'orge pendant cinq ou fix femaines , avec
de l'eau mêlée de fe»n \ on les mènera dans
les forêts à la glandée y ou on leur donnera
dans la maifon le gland qu'on aura ramalTé.
Il faudra donc ramaifer le gland dans la fai-
fon ^ on le confervera en le faifant fécher au
fowr. On joindra à cette nourriture les buvées
d'eau chaude , avec les navets , les carottes ,-
les choux, & tous les rebuts des herbes po-
tagères.
Quand le cochon eft engraiffé , ce qui ne
demande guère que deux mois au plus , o\\
,1e tue j on le grille à un feu de paille ^ on le
racle j en enlevé toutes les parties du dedans^
& onfale le refte. Le faloir eft une elpece"
de cuve oblongue & bafl'e , avec un couver--
cl& : on lave cette cuve avec de l'eau chaude j-
344 C O C
OÙ l'on a mis bouillir du thym , de la lat'att-
de , du laurier , &c. puis on l'enfume avec
àes noix mufcades ^ on couvre le fond de
ièl : on prend un morceau de cochon , on le
trempe dans l'eau , on l'elTuie , on le pofe fur
la couche de fel ^ on fait un fécond lit de {q\
& un fécond lit de cochon , & ainlî de fuite ,
Jlraxum fuper Jlratum ; on finit par un lit de
fel. II faut environ une livre de felpour cha-
que vingt livres de viande •-, on y ajoute un
peu de girofle concafTé j on ferme le Taloir.
On laiiîè le cochon dans cet état environ un
mois ^ alors on peut l'ouVrir & manger du
porc falé : pour cela on le trempe dans l'eau
bouillante , on l'expofe à l'air , & on l'em-
ploie comme on veut.
Il y a d'autres manières de faler le porc ,
mais elles reviennent toutes à celles-ci. Le
cochon eft particulièrement fajet à la ladre-
rie ; on s'apperçoit de cette maladie à des ul-
cères qu'on lui remarque à la langue & au
palais , à des grains dont fa chair eft parfe-
mée , &c. Voyei Boucher. Il n'eft pas
exempt pour cela des autres maladies des
beftiaux.
La chair fraîche du cochon , fa chair falée
ou fumée mangée en petite quantité , aide
la digeftion j en grande quantité , elle fè di-
gère difficilement. Le bouillon de porc-frais
peut arrêter le vomifTem.ent : le vieux lard
ibndu déterge & confolide les plaies : la panne
eft émolliente , anodyne , & réfolutive : on
attribue au fiel la propriété de déterger les
ulcères des oreilles , & de faire croître Iqs
cheveux ;, à la fiente , celle de réfoudre , de
guérir la gale , d'arrêter le faignement de
nez , prife en poudre , & de foulager dans
refquinancie appliquée en cataplafme : la
graiftè lavée & préparée entre dans quelques
emplâtres , & dans un grand nombre d'on-
guens j c'eft la bafe des pommades.
La viande de cochon a été profcrite chez
quelques peuples , par exemple en Arabie ,
où il n'y a point de bois , point de nourriture
pour cet animal , & où la falure des eaux &
des alimens rend le peuple très-fujet aux ma-
ladies de la peau : la loi qui le défend dans
ces contrées , eft donc purement locale , &
ne peut être bonne pour d'autres pays où le
cochon eft une nourriture prefqueuniverfelle,
&: en quelque façon nécefîaire.
SanClorius a obfervé que la chair àz cochon
CO C
fè tranipîre peu , & que la diminution de
cette excrétion va à un tiers dans ceux, qui
s'en nourrilFent ^ d'ailleurs on fait que le dé-
faut de tranfpiration occafione ou aigrit les
maladies de la peau : cette nourriture doit
donc être défendue dans les pays où l'on eft
expofé à ces maladies , comme laPaleftine,
TArabie , l'Egypte , la Lybie , &c, V. tefprit
des loix.
Le cochon étoit immolé par les anciens aux
Lares , à Priape , aux Silvains ,àBacchus, à
Cérès , à Hercule , ùc. On facrifioit à Lacé-
démone un cochon de chaque ventrée.
Cochon de Guinée ^porcus GuincenJIsy
Margr. animal quadrupède qui eft de cou-
leur rouiîè , & qui reffemble à nos cochons
pour la figure ; mais fa tête n'eft pas fi élevée :
ks oreilles font longues &: pointues j fa queue
defccnd fort bas , & n'eft point couverte de
poil non plus que le dos. Il a fiir tout le
refte du corps un poil court, roux & brillant;
mais il eft plus long près de l'origine de la
queue & autour du cou. Rai , fynop. anim,
quad. V. Quadrupède. (/)
Cochon d'Inde , cuniculusjîve porcellus
IndtcuSyGeCn. mus feu cuniculus Americanusy
& Guincenjis porcelLipilis (S» voc^. Au Brefîl on
donne à cet animal le nom de cavia cabaya,
Margr. C'cft un quadrupède plus petit que
le lapin ^ fon corps eft plus court & plus gros :
lès oreilles font courtes , minces , tranlpa-
rentes , évafees , arrondies , prefque entière-
ment dégarnies de poil , & peu différentes
de celles des rats : le mufèau & la barbe ref
femblent à ces mêmes parties dans le lièvre j
la lèvre fùpérieure eft fendue comme celle du
lapm. Le cochon d'Inde n'a point de queue 5
fes dents font femblables à celles des rats, &
fon poil peut être comparé à celui du cochon.
Il crie comme les petits cochons , c'eft pour-
quoi on l'a appelle cochon de Guinée. Sa cou-
leur varie ; on en voit de blancs , de roux
& de noirs , & la plupart font en partie
blancs , & en partie roux & noirs. Il y a
quatre doigts aux pies de devant , & trois à
ceux de derrière '^ le doigt du milieu eft le
plus long. Ces animaux frottent leur tête avec
les pattes de devant , & s'affeyent fur celles
de derrière comme les lapins 5 mais ils ne
creufent pas en terre. Les femelles portent
jufqu'à huit petits à la fois. Les cochons d'Inde
vivent de foin & de toutes fortes déplantes ;
as
C 0 c
ils font bons à manger , mais non pas escel-
lens. Ray , fynop. anim. quadr.
Cet animal eft naturalifé dans ce pays-ci,
& mis au nombre de nos animaux domef-
tiqMCS. On l'élevé aifément,il ne craint que
le grand froid. Voye^^ QuIiDRUPEDE. (/)
Cochon chinois. Cet animal eft par-
venu en Europe \ on le connoît en France.
On dit qu'il eft plus petit que notre cochon \
qu'il a le dos concave & pour ainfi dire en-
iellé , &c. On l'engraifte , & il palFe pour
très -bon à manger.
CoCHON-MARON , c'cft le nom que l'on
donne dans les îles de l'Amérique aux co-
chons que l'on y a portés des autres parties du
monde ^ & qui y font devenus fauvages. On
en diftingue de trois elpeces.
Ceux de la première font courts \ ils ont
la tête grofle , le mufeau peu alongé , & les
défenfos fort longues : les jambes de devant
font plus courtes que celles de derrière pref-
que d'un tiers , ce qui les fait fouvent cul-
buter lorfqu'ils courent en defcendant. Ils de-
viennent féroces & très- dangereux quand ils
font blefles par les chafleurs. On prétend
qu'ils ont été apportés par X^i Efpagnoîsdans
le temps de la découverte de l'Amérique ,
& qu'ils ont été tirés de Cadix , où on en
voit encore qui leur reflemblent beaucoup.
Les cockons-marons de la féconde efpece
ne différent en aucune façon de nos cochons
domeftiques , & il paroît qu'ils fe font échap-
pés des parcs où on les nourriffoit après avoir
été tranfportés aux îles.
Enfin ceux de la troifieme efpéce font
appelles cochons de Siam , parce qu'ils ont
été apportés aux îles par des vaifTeaux fran-
çois qui revenoient de Siam & de la Chine.
(^)
COCHON d'eau. V. ci-devant. CABIAI.
Cochon de mer. Foyeç Marsouin.
COCHONET , f. m. (H//?, mod. Jeux. )
efpece de dé taillé à douze faces pentago-
nales , chargées chacune d'un chiffre depuis
I jufqu'à 12. On joue au cochonet comme
aux dés.
On donne le même nom à une balle ou
pierre que celui qui a gagné le coup précé-
dent jette à difcrction , & à laquelle tous
les joueiu*s dirigent leurs boules. La boule
plus voifîne du cochonet gagne le coup. •
COCKERMOUTH , {Géog. mod. ) vîlle
Tome rill.
C O C 34^
JAngleteiTe dans la province de Cumber-
land. Long. 13 , 43 ; /at. 44 , 54.
COCKIEN , f. m. ( Comm. ) monnoie de
cours au Japon : on l'évalue à environ huit
francs de notre monnoie préfente.
COCO , f. m. ( Hiji. nat. ) le coco eft le
fruit d'une efpece de palmier qui s'élève à
trente ou quarante pies de hauteur : fa tige
eft droite ^ elle diminue de groffeur à mefiire
qu'elle s'éloigne de terre. On fait des incifions
aux tiges des jeunes arbres pour en tirer un ""
fiic vineux qui fèrt de boiffon : ce fiic donne
par la diftillation de fort bonne eau-de-vie :
en le cuifànt fur le feu on l'adoucit j & au
contraire on en fait du vinaigre lorfqu'on le
laiffe expofé au foleil. La tige eft terminée à
fon extrémité par des feuilles fort longues ,
& larges à proportion : on sqtx fert pour
couvrir les maifons , pour faire des voiles de
navire , des nattes, (S'c. Les habitans de ces
pays écrivent fur ces feuilles comme fur du
papier ou du parchemin. Les fruits naifl'ent
au fommet de la tige entre Izs feuilles j ils
font enveloppés plufieurs enfêmble dans une
efpece de gaîne dont ils fortent en groffif-
fîuit : chacun de ces fruits eft gros comme la
tête d'un homme j il eft ovale , quelquefois
rond : trois côtes qui fuivent fa longueur lui
donnent une figure triangulaire. Ce fruit eft
compofé de deux écorces & d'une fubftance
moelleufe : l'écorce extérieure eft verte ^ l'in-
térieure eft brune. Lorfque le fruit n'eft pas
encore mûr , on en tire une bonne quantité
d'eau claire , odorante , & fort agréable au
goût. Il y a des cocos qui contiennent jufqu'à
trois ou quatre livres de cette eau. Mais
lorfque le fruit a pris fon accroiffement , la
moelle que renferment les écorces prend de
la confîfîance , & il n'y a plus qu'une cavité
dans fon milieu qui foit remplie d'eau , &
alors l'eau , quoique claire , n'eft pas fî douce
qu'auparavant. La moelle eft blanchâtre , &
bonne à manger j fon goût approche de celui
de la ncifette ou de l'amande ;, on en peut
faire un lait comme on en fait avec les
amandes: fi on veut la conforver long- temps,
on la fait fecher au foieil. L'écorce qui en-
veloppe cette fubftance eft dure & ligneufe 5
on la polit & on la travaille pour différens
ufàges , elle fèrt de mefure des liquides à
Siam : on gradue fa capacité avec des cauris ,
petites écailles qui fervent de momioie ; il y a
X X
34^ CGC
(ks cocos de mille caiiris , de cinq cents , C'c,
L.a CiicondQ , qui eft l'extérieure , eft îiiiè ,
de couleur grife , & garnie en dedans d'une
forte de bourre rougeâtre dont on fait des
cables & des corclages : elle vaut mieux que
les étoupes pour calfeutrer les vaiiTcauXjparce
qu'elle ne iè pourrit pas fi vite , & parce
qu'elle iè renfle eu s'imbibant d'eau.
* COCON , f. m. ( Econ. ruft. ) on donne
ce nom à ce tilfu filamenteux dans lequel le
ver à foie s'enveloppe , &. dont on obtient,
^l\ le dévidant par une opération qu'on
appelle le tirage , cette fùbftance animale
sppellée foie , que nous employons à tant
d'ouvraj^es précieux.. Voy. Soie 6' VeR-a-
SOIE. On diftingue des cocons bons , des
mauvais cocons ; des cocons fins , des dou-
bles , des fatinés ou veloutés , des ronds ,
des pointus. Foy. Soie, Tirage de soie.
COCOS ( Ile des ) , Géogr. mod. île
de l'Amérique méridionale dans la mer
Pacifique. Il y a encore une île de ce nom
dans la mer d'Afrique près de l'île de Mada-
gafcar , & une troifieme dans la mer d'Afie
près de l'île de Sumatra.
COCQ , voyei Coq.
CO-CRÉANCIERS, fi m. pi. [Jurifp.)
font ceux qui font conjointement créanciers
des mêmes perfonnes , 8>c en vertu d'un
même titre. Pour que chacun d'eux foit
créancier folidaire de la totalité de la dette ,
il faut que cela foit exprimé dans l'aôe ,
autrement la dette fè divife de plein droit ,
entre les co-créanciers , & chacun d'eux n'en
peut exiger que fa part. Il eft parlé des co-
çréanciers & des co-débîteurs dans plufieurs
textes de droit , où les premiers font appel-
lés correi Jiipulandi , & \ts autres correi pro-
mittendi. Voyez au code , liv, IV , tit. ij ,
/. ix , & aux inflitutes , Uv. III , tit. xvj, de
duobus reis jiipulandi ù promittendi. {^A)
■^ * COCS ou COCAGNES, fi m. (Com.)
c'eft le nom qu'on donne aux petits pains de
pâte de paftel j ils font du poids de vingt-
quatre onces, pour pefer étant fecs | de
livre j les réglemens ordonnent qu'ils ne
foient ni plus forts ni plus foibles. V, a tan.
Pastel , la manière de faire les cocs ou co-
cagnes ; voye^aujjî les réglemens gén. & partie,
des manufacl.page 190 & fuiv. tome III.
COCTIOjSf, fi f. l'aaion de cuire^ ce
terme a différentes acceptions : on dit la
CGC
cocîion des humeurs, celle desalîmens, ^&.
Voye'^ les articles Juivans.
CoCTION , {Médecine.) ce terme a été
tranfmis de la théorie des anciens médecins
à celle des modernes, pour fignifier la miême
chofe quant à l'eflSit , mais non pas ablblu-
mient quant à la» caufè : c'eft-à-dire pour
exprimer l'altération utile à l'économie ani-
male qu'éprouvent les matières ncurrilîantes
& \qs humeurs dans les difterentes parties du.
corps humain.
Les anciens attribuèrent cet effet à ce qu'ils
appelloicnt calidum innatum , le chaud inné ,
dontGaîien établilfoit le principal foyer dans,
le cœur j ils compofoient le chaud inné de,
l'adf ion du feu unie à l'humide radical , fans,
en connoître mieux la nature. Un illuftre.
parmi ceux qui ont écrit fur ce fùjet , Mon-
tanus , avoue ingénument qu'après s'être,
cru pendant long-temps un grand dodeur ^.
il étoit parvenu à un âge tr.ès-avancé fans
avoir rien entendu à ce que c'eft que la cha-
leur innée ^ elle étoit cependant regardée
comme le premier mobile de l'a^lion de tous^
les organes , & on croyoit par cette raifou;
que l'âdiivité de, fes organes doit être pro-
portionnée à la chaleur naturelle de l'animal ,
comme un efîèt doit être proportionné à ia
caufe 'j en un mot la chaleur étoit , félon les
anciens , le principe de la vie^, Voye^ Ch A- .
LEUR ANIMALE.
C'efl d'après cette idée qu'ils ont donné le,
nom de coclion , à coquendo ^ à toutes les
élaborations opérées dans le corps humain ,
foit en fanté , . foit en maladie , parce qu'ils
ne reconnoiffoient pas d'autre caufe efficiente
de.ces élaboratÎQnsquel'aftiondufeu , dont
\es parties élémentaires pénètrent tous le^
corps. Ils entendoient par coclion en géné-
ral , tout changement produit dans une fiibf^
tance par la force de la cjialeur , qui rend;
cette fubftance d'une nature plus parfaite :
'ds admettoient trois cfpeces de coclion : fà-
voir la maturation , ïajfation , & Yélixation ;
c'eft à cette dernière efpece qu'ils rappor-
toient toute coclion qui fe fait naturellement
dans le cprps humain , parccqu'il ne s'en
opère aucune fans le, concours du chaud &c
de l'humide.
Ils faifoient confîfter la principale coâiork
animale dans l'afllmilation des fiics alimen-
taires , produite par chacune des parties qui
c oc
îesfcçoît^ en forte qu'ils acquièrent par cette '
■opération toutes les qualités nécelTaires pour
çntrer dans leur compofition. Ils dillin-
çuoient la coclion de la nutrition, en ce que
par celle-ci les fuçs nourriciers font altérés
& unis à la partie , en réparant ou en aug-
mentant fa fubltance , au lieu que par celle-
là ils acquièrent la difpofition nécelTaire pour
cet ufage. Ils établilFoient trois fortes de con-
crétion de ce genre dans l'économie animale ^
iàvoir la chylification , la fanguification*, &.
l'élaboration de toutes les humeurs nourri-
cières & récrémentitielles-, & comme la ma-
tière de ces différentes coclions cil toujours
hétérogène , ils leur attribuoient un double
effet, c'eft-à-dire qu'ils enfaifbient dépendre
flufli la féparation des parties qui ne font pas
fufceptibles d'être converties en bons fucs ;
ainfi les matières fécales font les excrémens
de la première coclion .parce qu'elles font le
réfidu grolîîer des alimens qui n'ont pu être
convertis en chyle ^ pendant que celui-ci fe
change en fàng , il s'en fépare aufîî des par-
lies hétérogènes qui forment le fiel & l'urine ;,
ce font- là les excrétnens de la féconde coc-
tion : & ceux de la troifîeme , c'eft-à-dire
de celle qui perfectionne les humeurs utiles
que fournit le fang , en les faifant palfer par
differens degrés d'élaboration , font princi-
palement la craffe de la peau & la matière
de la tranfpiration fenfible & infenfîble.
Koyei Chylification , Sanguifica-
TiON, Sécrétion.
Ces différentes coâions ainfi conçues dans
le fens des anciens,telles qu'ils penfoient qu'el-
les s'opèrent dans l'état de fanté , concourent
toutes à la confervation de la vie fàine , lorf-
^u'elles fe font convenablement aux loix de
l'économie animale ; c'eft à l'effet qui en
réfulte qu'ils ont donné le nom de m'Trjii ,
pepfle , & celui de et-Triretat. , apepfie , crudité^
par oppofition à ces mêmes coâions , lorf-
qu'elles font viciées & qu'elles fe font d'une
manière contraire à l'état naturel , en forte
qu'il en réfulte un effet tout différent \ ils
attribuoient ces défauts de coclion principale-
ment au défaut de chaleur innée , qu'ils re-
gardoient , ainfi qu'il a été dit ci-devant ,
comme la caufe efficiente de toute digeflion.
C'eft dans cette idée qu'ils appelloient
<rud , en fait d'humeurs alimentaires & au-
tres 5 tout ce qui n'a pas acquis les degrés de
C o c 347
perfe<^ion qu'il doit avoir par rapport aux
qualités & au tempérament propres dans l'é-
tat de fànté , & tout ce qui n'eft pas lùfcep-
tible d'acquérir cette perfé^bion.
Toute matière crue contenue dans les
différentes parties du corps humain , étoit
traitée par les anciens comme peccante, parce
qu'elle étoit regardée comme y étant étran-
gère , & comme n'ayant pas acquis la dif-
pofition qui la doit rendre utile à Féconomi®
animale ^ c'eft cette matière psccante qu'ils
voyoient dans toutes les m.aîadies , dont ils
compofoient l'humeur morbifique, à laquelle
ils attribuoient plus ou moins les défordres
de l'économie animale , félon qu'elle leur
paroillbit plus ou moins abondante , plus ou
moins nuilible au principe vital.
Et comme ils s'appercevoientque phifîeurs
maladies fe déterminoient d'une manière
falutaire , fans aucun fecours , par de co-
pieufes évacuations , ils s'iinaginerent que le
même agent qui convertit les alimens en
bons fucs pour la confervation de l'animal ,
pouvoit bien être aufîî l'auteur des opérations
qui changent les qualités des humeurs vi-
ciées , dont l'effet tend à fà deftruâ:ion \ en
forte que ne pouvant pas leur en donner
d'afîéz bonnes pour les convertir en la fubf^
tance du corps , ou les rendre" propres à
d'autres fins utiles, il les fëpare des humeurs
de bonne qualité , & leur donne une con-
fîftance qui Xts difpofe à être évacuées par
l'adlion de la vie hors des parties dont elles
empêchent les fondions. Cette opération fut
donc aufîî attribuée à la chaleur innée
comme une forte de coclion , qu'ils regar-
dèrent bientôt comme une condition effen-
tielle pour détruire la caufe des maladies \ ils
en tirèrent le fondement de la méthode de
les traiter : c'eft à cette coclion des matières
morbifîques qu'ils donnèrent le nom de
^r^'r!t<TllQi^pepafme^^o^lï\2^. diftinguer de celle
des fucs alimentaires Scrécrémentitiels qu'ils
avoient nommée vti-jai-, tpepfis.
On trouve une diftinÂion très-jufte de
ces deux efpeces de coclion dans les défini-
tions de médecine de Gorrée : il dit que la
coclion proprement dite, c'eft-à-dire ladi-
geftion dans les premières , les fecondes &
les troifîemes voies , concerne les chofes qui
entrent dans le corps , & la coâion des ma»
tieres inorbiiîques , celles qui en fortent où
Xx 2
548 C O C
qui font préparées pour en être évacuées.
Les premiers maîtres de l'art ayant fait
l'importante découverte du moyen le plus
efficace que la nature met eu ufage pour
détruire les caufes morbifîques , s'appliquè-
rent foigneulèment à obferver les difFérens
iignes qui annoncent le pepafme , ou fou dé-
faut qui QÏil^. crudité ; parce qu'ils jugeoient
par les premiers , que la nature dcvenoit
fùpérieure à la caufe de la maladie 3 & par
les féconds au contraire , que \qs effets de
celle-ci étoient toujours dominans. Ils ap-
prirent à chercher ces lignes principalement
dans les excrémens , parce qu'étant le r«-
ûàu des différentes codions , ibit dans l'état
de fanté , Ibit dans celui de maladie , on
peut inférer des qualités de ces matières la
manière plus ou moins parfaite dont elles
ont été féparécs. . Ainli Hippocrate [ap/ior,
xij , fecl. V. ) avoit particulièrement indiqué
les urines & les matières fécales , comme
pouvant fournir les (ignés les plus fûrs , com-
muns aux coclions de matière morbinque fai-
tes dans quelque partie du corps que ce fbit j
les crachats , comme propres à faire con-
iioître particulièrement l'état des poumons
dans les maladies de la poitrine 3 la: mu-
cofité des narines , celui de leurs cavités af-
fedtées de catarrhe , &c. Galien établit auffi
la même choie , lib. Il , de crijib , cap, vij ;
en difant que dans toutes les fièvres , attendu
que le vice qui les caufe eft principalement
dans le fyftême des vaiffeaux fanguins ,
on doit avoir principalement attention aux
urines j que dans les maladies qui affeârent
le bas-ventre , on doit avoir égard aux ex-
crémens des premières voies , fans négliger
les urines , s'il y a fièvre 3 & que de mxême
dans les maladies de poitrine il faut exami-
ner les crachats 3 & joindre à cela toujours
l'inipeâion des urines , fi ces maladies font
accompagnées de fièvre.
Rien ne fignifie plus fûrement une heu-
reufe terminaifon , que de voir les marques
de cociion dans les excrémens en général 3
c'eft ce qu'enfeigne Hippocrate in epidem.
lib. I ,fecl. ij , text. 45 , lorfqu'il dit que tou-
tes les maturations d'excrémens font toujours
de faifon & falutaires; & enfuite il ajoute
que les promptes codions annoncent toujours
la prompte terminaifon des maladies , &fout
ime aifuraiice de guérifoii. Galieu a confirmé
C O C
toutes ces obfervaJons du père dé la mé-
decine par les fiennes : il dit , lib. I. de cri-
fib. cap. xviij , que lescoc7/'o/25nefont]amais
de mauvais figues j & il témoigne en être
fi affuré , qu'il ne craint pas de donner pour
régule infaillible , /ib. de conflit, art. medic,
qu'aucune maladie ne fc termine d'une ma-
nière falutaire , fans qu'il ait précédé des
lignes de cociion ; & Profper Alpin , de prœ~
fag. l'itœ & mort. cegr. lib. Fi, cap.j , ajoute
à tout ce qui vient d'être dit en leur fa-
veur , que non-feulement la cociion accom-
pagnée de bons figues eft une preuve affw-
rée que la terminaifon de la maladie fera
heureufè , mais même lorfque la cociion ne
fe trouve jointe qu'à de mauvais fignes 3 car
alors les infbmnies , les délires , les verti-
ges , les anxiétés , les douleurs , les trem.-
blemens , les convulfions., la difficulté de
refpirer , & autres femblabks fym-ptomes
qui font tous pernicieux par eux-mêmics ,
font prefque toujours les indices d'une crife
falutaire qui doit fuivre.
Toutes fortes d'évacuations qui arrivent
après la cociion , font toujours falutaires 3
c'eft l'effet de la nature qui s'eft rendue fn-
périeure à la caufe de la maladie : mais la
fureté du fuccès qui eft annoncée par les
fignes de la coâion , n'exclut pas cependant
abfolument toute incertitude 3 il faut au
moins que les fignes marquent une coâion
bien parfaite &; bien complète : que ces fi-
gnes perféverent jufqu'au moment de la
crifè , pepafmi & cruditatis vicijfitudo peffi-
ma 5 dit Duret , in coacas 54 , cap. xvj ; &
qu'il ne fiirvienne de la part du médecin ,
ou de celle du malade & de ceux qui le
gouvernent , aucun accident qui trouble la
coâion & qui s'oppofe à la crife.
Les grands maîtres qui nous ont tranfînis
leurs importantes obfèrvations à ce fujet , ne
s'en font pas tenus à ce qui vient d'être rap-
porté 5 ils ont cherché tous les fignes de coc-
tion relatifs aux différentes parties du corps ,
qu'il feroit trop long d'expofer ici 3 ils ont
de plusindiqué le temps où ils parciffoient
dans les différentes maladies : ils ont trouvé
qu'ils ne fe montrent jamais au commen-
cement , parce qu'alors les matières morbi-
fiques font abfolument crues 3 ni pendant
leur accroiffement , parce qu'alors les coû-
tions ne peuvent encore être qu'imparfaites j
c o c
^ eft au temps où la maladie cefTe d'augmen-
ter & de produire de nouveaux iymptomes ,
que l'on doit chercher à s'affurer fî la coâion
eft faite ou non, lorfque la chaleur natu-
relle a pu travailler fuffifamment pour la
préparer.
Autant il y a à compter fur les fignes de
coâion , comme préfages falutaires , autant
doit-on craindre lorfqu'iis manquent &
qu'il n'y a que des fignes de crudité , lors
même qu'ils ibnt joints aux meilleurs fignes ,
ou que la maladie paroît terminée ^ parce
qu'on doit s'attendre à ce que le mal ait des
fiiites fâcheufes ou de longue durée , s'il
fubfille encore , & à ce qu'il y ait rechute
s'il paroît fini : c'eft fur ce fondement que
Galien a dit , in primo aphorifmo , qu'une
maladie dans laquelle il fè fait quelque crifb
avec des fignes de crudité fubfiftante , doit
faire craincbe une fin funefi:e , ou au moins
un long cours dans la maladie ; au refte les
fignes de crudité & de coclion des ditîcrens
excrémens font rapportés dans chacun des
articles qui les concernent , ainfi voy. Dé JEC-
TiON, Urine, Crachat, Sueur , &c.
Après s'être aflliré par robfervation des
moyens de eonnoître dans les maladies la
crudité & la coclion '■) après avoir étudié ce
que la nature fait en conféquence de l'une
& de l'autre , les changemens utiles qu'elle
opère ^ les anciens m.édecins en conclurent ,
que pour imiter la conduite qu'elle tient
dans le cours des maladies laiflées à elles-
mêmes , il ne falloit jamais entreprendre de
procurer des évacuations dans le commen-
cement des maladies ^ parce qu'alors la ma-
tière morbifique étant encore crue , n'ayant
pas pu être encore préparée , rendue fufcep-
tible d'être portée par l'adion de la vie
hors des parties dont elle empêche les fonc-
tions , réfifte à fon expulfion , pendant que
leurs humeurs faines , s'il y en a , font em-
portées j ou elle ne cède , & fouvent même
qu'en partie, aux grands efforts qu'excite
le moyen employé pour en procurer l'éva-
cuation j ce qui diminue confidérablement
les forces du malade , & le jette dans l'a-
battement : d'où il fuit très-fouvent que la
nature réduite à refi;er prefque fans aâion ,
ne travaille plus à féparer le pur d'avec l'im-
pur , à furmonter le mal , à rétablir l'ordre
dans l'éconoraie animale j elle fuccombe ,
C O C 349
& le malade périt. Ce font ces confidéra-
tions qui avoient engagé le père de la mé-
decine dogmatique , le confident de la na-
ture , le grand Hippocrate , à établir com-
me une règle fondamentale de pratique , la
précaution de ne pas placer au commence-
ment des maladies des remèdes évacuans ,
& par conféquent de ne pas les employer
pour enlever du corps des matières crues ,
mais feulement celles qui font préparées ,
digérées par la cocfion : c'efl ce que déclare
expr-eflément ce légiflateur de la m.édecine ,
dans ,fon aphorifme 22^. feclionj , lorfqu'il
dit : concoâa medicamentis aggredi oportet ,
& movzre non cruda neque inprincipiis. L'ex-
périence confiante prouva tellement dans la
fiiite la juftice de cette loi , que félon Arif-
tote ( lib. lu , poL c. xj. ) , il n'étoit pas per-
«nis aux médecins d'Eg}'pte de produire au-
cun changement dans les maladies , par le
moyen des remèdes , avant le quatrième
jour de leur durée j & s'ils anticipoient ce
temps , ils étoient comptables , fur leur vie ,
de l'événement. Galien regardoit comme un
oracle la fentence qui vient d'être citée ,
tant il étoit convaincu qu'il eft nécelîàirc
dans la pratique de la médecine , de fe con-
former à ce qu'elle prefcrit. Il efl cependant
un cas excepté par Hippocrate lui-même à
qui rien n'a échappé , & qui a tant prévu
. en ce genre ^ c'eft celui auquel la matière
morbifique efl fi abondante dès le comimen-
cement des maladies , qu'elle excite la na^
ture à en favori fer l'évacuation : c'eft en ef-
fet par cette confidération que le divin au-
teur de l'aphorifine qui vient d'être rappor-
té , le termine en difant à l'égard des cru-
dités ,' qu'elles ne doivent pas être évacuées :
fi non turgeant , raro autcm turgent. Ainfi il
établit , que le cas eft rare \ mais qu'il ar-
rive cependant que le médecin doit être
plus porté à fùivre l'indication qui fe pré-
fente , de procurer l'é^'acuation de la ma-
tière morbifique , lorfque la maladie com.-
mence avec des fignes qui annoncent la fura-
bondance de cette matière , qu'à attendre
que la coclion en foit faite j parce qu'il y a
lieu de craindre qu'en la laifTant dans le
corps , les forces de la nature ne fuffifent
pas pour la préparer , & qu'il ne s'en faflë
un dépôt fur quelque partie importante : ce
qui ièroit im plus mauvais eiïet que celiâ
350 C O C
qui réfulterolt d'en procurer révacuatlon
avant la coclion j vu que dans cette luppo-
fltion , la matière morbifique a par elle-
même de la difpoiitionàétre portée hors des
parties qu'elle atiedle , qui elt tout ce que
la coâion pourroit lui donner. C'eft en pe-
lant les railbns pour &: contre , & en le dé-
cidant toujours pour le plus grand bien ou
le moindre détriment du malade , que l'on
prend le bon parti dans cette conjoncture :
c'eft ce qu'inlinue auHi Hippocrate dans le
iecond aphorifme , après celui ci-deffus
mentionné '-, il s'exprime ainfi ( aphor. fxev ,
feû. I ) , in acutis aff'cclionibus raro , «S* in
principiis uti medicamcntis oportet , atque
hoc facere diligenti prias œftimatione fhclâ.
Il fuit de tout ce qui vient d'être dit de
Li théorie des anciens fur la coâion , confi-
dérée dans l'état de faute &; dans celui de
maladie , que l'expofition de ce qu'ils onc
., penfé à ce fujct eft prefque tout ce qu'on
peut en dire de mieux, ou au moins.de
plus utile , attendu que leur doâ:rine eft prin-
cipalement fondée fur l'obfervation de ce
qui s'opère dans l'économie animale ^ elle
n'a par conféquent pas pu être renverfée &:
oubliée , comme tant d'autres opinions , qui
n'étant que la production de l'imagination ,
ont été fuccelîivement détruites les unes par
les autres , tandis que celle-ci s'eft confer-
vée dans fon entier, pour ce qui eft des,
principes établis d'après les faits , & des
conféquences qui peuvent en être tirées. En
effet , elle n'a éprouvé d e changemens que
par rapport à l'explication de l'opération
dont il s'agit ;, ce qui n'a même eu lieu que
dans le /îecle dernier.
Car depuis Hippocrate & Galien jufqu'à
ce temps-là, tous les médecins (en adoptant
les fentimens de ces grands maîtres qui s'é-
toient bornés à indiquer la chaleur natu-
relle comme caufe immédiate de tous les
changemens qui iè font dans les humeurs
animales , tant faines que morbifiques ) at-
tribuoient la digeftion des alimens dans le
ventricule , à une coâion faite dans ce vif
cere , femblable à celle qui fe fait dans les
cuifines. Ils comparoient l'eftomac à une
marmite '-, ils fe le repréfentoient comme
expofé à l'aftion du feu fourni & entretenu
par le cœur , le foie , la rate , & autres par-
ties voiiines j ils penfoient que les matières
c 0 c
renfermées dans ce principal organe de la
di^eftiou des alimens, étant comme détrem-
pées , macérées par les fluides qui s'y répan-
dent , deveuoient fufceptibles d'une vérita-
ble élixation par l'effet de la chaleur , ce qui
fembioit leur être prouvé par les vents qui
s'élèvent de Feliomac pendant la digeftion \
ils les comparoient aux bulles qui fe for-
ment fur la fiirtace d'un fluide qui bout : en-
ibrte qu'ils n'admettoient d'autre agent que
le feu , pour la préparation des matières
alibiles qui fë fait dans ce vifcere ^ celle qui
eft continuée dans les mitres parties des
premières voies , étoit auffi attribuée à fac-
tion continuée de cette caufe, qu'ils ren-
doient commune à toutes les autres élabo-
rations d'humeurs- dans le fyftême des vail^
féaux fanguins , &: de tous les autres vaif-
ièaux du corps.
Pierre Caftellus , profeffeur de l'école de
MefTine, commença à réfuter cette opinion ,
dans une lettre écrite à Severinus ;, il lui di-
foit autr'autres chofes à ce fujet , que fi la
chaleur feule fufîifoit pour la confedion du
chyle , on devroit auffi pouvoir en faire
dans une marmite : mais comme on ne le
peut pas , ajoute-t-il, il faut donc avoir re-
cours à la fermentation pour cette opération ,
&c. Bientôt après Vanhelmont attaqua avec
bien plus de force le fentiment de la coâion
des alimens opérée par la feule chaleur, dans
une differtation intitulée , caior effica citer non
digerit , fed excitative. Son principal argu-
ment étoit , que les poifîbns ne laiflènt pas
de digérer les alimens qui leur font propres,
quoique le fang des plus voraces même d'en-
tre ces animaux , ne foit guère plus chaud
que l'eau dans laquelle ils vivent : o« trou-
ve même établi , que le fang des tortues eft
plus froid que feau. ( Stubas , journ. in
Tranf. phil. xxvij. ) Vanhelmont objeâoit
d'ailleurs , que fi la chaleur feule pouvoit
opérer la coâion des alimens, la fièvre de-
vroit la faciliter ultérieurement, bien loin de
la troubler & de caufer du dégoût , comme
il arrive qu'elle le fait ordinairement. Il op-
pofbit au fyftême des anciens bien d'autres
chofès de cette nature j & il ne négligeoit
rien pour détruire, leur erreur , mais pour
tomber dans une autre , qui confiftoit à éta-
blir que la digeftion des alimens ne peut fe
faire que par l'efficacité d'un ferment acide
C Ô c
^écifiqiie. Gallen fenibloit bien avoir COtt'
jedturé que l'acide pou voit contribuer à la
digeftion. De ufu part. lib. IV , cap, viij ;
Riolan paroît aufli avoir eu la même idée.
Antropograph. lib. II, cap. x.M'd'is ni l'un ni
l'autre n'avoient imaginé que l'acide pût agir
comme dilïblvant , mais feulement en irri-
tant les fibres des organes de la digeftion.
Le fermejit acide fit bientôt fortune , il fut
adopté par Sylvius Deleboé , 6>c par toute ,
la Ceâ.e chymique cartéfienne ; mais fou
règne n'a pas été bien long , l'expérience a
bientôt détruit le fruit de l'imagination ; il
n'a pas été pofijble de prouver la fermenta-
tion dans l'eftomac , on n'y a jamais trouvé
de véritable acide j au contraire , Mufgrave
( Tranf. phil. ) y a démontré des matières
^Ikalefcentes \ Peger a prouvé qu'on trouve
c.onilaminent des matières pburries dans l'el^
tomac des bœufs , à llome \ c'eft ce qui eft
caufe que l'on n'y mange pas de la viande
de ces animaux. Les perfonnes qui ont des
rapports aigres y ont moins d'appétit ;, les
acides ne contribuent que rarement à le ré-
tablir. On n'a jamais trouvé d'acides dans le
fang ^ d'ailleurs , en fuppofànt même que le
prétendu acide puilTe exciter quelque fer-
mentation dans les premières voies, l'hu-
meur toujours renouvellée qui fè méleroit
avec \q% matières fermentantes, en arrête-
r.oit bientôt le mouvement inteftin , & fur-
tout la bile qui eft la plus contraire à toute
forte de fermentation Ces faits font plus que
fuffifans pour en détruire toute idée , tant
pour les premières que pour les fécondes
voies. V. Digestion , Chylification ,
Sanguification.
Il a fallu rendre à la chaleur naturelle la
part qu'on lui avoit prefque ôtée, pour la
préparation du chyle & des autres humeurs^
mais non pas en entier. La machine de
Papin démontre l'efficacité de la . chaleur
dans lui vafe fermé , pour diffou.dçe les corps
les plus durs qui puilfent fèrvir à la nourri-
ture : un œuf fe réfout en une elpece de fiibf
tance muqueule fans confiftance , inputrila-
ginem, par une. chaleur de 92 ou 93 degrés
du thermomètre de Farenheit^ la chaleurde
notre eftomac eft à-peu-près au même degré.
Mais la chaleur naturelle ne peut pas feule
fiiffire à l'ouvrage de la chylification & de
l^élaboiatipu des humeurs , comme .le peu-
CGC 3^1
foîent les anciens , puifqu'il ne s'opère pas
de la mêm.e manière dans tous les animaux,
qui ont cependant à-peu-près la même cha-
leur. Les excrémens d'un chien , d'un chat ,
qui fe nourrifîént des mêmes alimens que
l'homme , font bien différens de ceux qui ré-
fultent de la nourriture de celui-ci. Il en eft de
même du fang & des autres humeurs , qui
ont aufli des qualités particulières dans cha-
que eipece d'animal , qui n'a cependant riea
de particulier par rapport à la chaleur natu-
relle : elle doit donc êtje reconnue en géné-
ral , comme une des puifTances auxiliaires ,.
qui fert à la digeftion & à l'élaboration des
humeurs communes à la plupart Aqs animaux j
mais elle ne joue le rôle principal , encore-
moins unique , dans aucun.
Le défaut dominant dans tous les f5-'ftêmes
furcefujet, depuis les premiers médecins juf^
qu'à ceux de ce fiecle , eft que l'en a toujours
cherché dans lai fluides les agens principaux
différemment combinés , pour convertir les
alimens eu chyle, celui-ci en fang j pour
rendre le fang travaillé au point de fournir
toutes les autres humeurs , &. pour féparer de
tous les bons fiics les parties excrémenteufes^
qui s'y trouvent mêlées*
On a enfin de nos jours ôté aux fluides
le pouvoir exclufif qui leur avoit été attribué
pendant environ deux malle ans , de tout
opérer dans l'économJe animale;, après l'avoir
cédé, pour peu de temps à des piiifîànces
étrangères, à des légions de, vers , on eft
enfin parvenu à faire jouer un rôle aux foli-
des i & comme il eft rare qu'on ne foit pas
extrême en faveur des nouveautés , on a
d'abord voulu venger les parties organiiees de
ce qu'elles-avoient été fi long-temps laifTées
dans l'inadHon y à l'égard des changemens
qui fe font dans \qs différens fuCs alibiles &
autres. On a été porté à croire qu'elles feules
par leur a<^ion méchanique , y produifôient
toutes les altérations néceffaires : on a teut
attribué- à la trituration : mais on a enfiiite
bientôt fenti qu'il y avoit eu jufque-là de l'ex-
cès à faire dépendre toute l'économie animale
des facultés d'une feule efpece de parties : on
a attribué à chacune le droit que la nature lui
donne,,. & que. les connoifEuices phyfiques
& anatomiques lui ont juftement adjugé.
La dod^rine du célèbre Boerhaave fur les
eâçts de l'adUon des vaiiTeaux 6c fur-tout
351 COC
des artères ( dit M. Quefiiay dans Con nou-
veau traite des fièvres continues , ) nous a
enfin afllirés que cette adlion , comme quel-
ques médecins l'avoient déjà auguré , eft la
véritable caufe de notre cKaleur naturelle.
Cette importante découverte , en nous éle-
vant au-delRis des anciens , nous a rappro-
chés de leur doâ:rine ;, elle a répandu un
plus grand jour fur le méchanifme du corps
humain & àcs maladies , que n'avoit fait la
découverte de la circulation -du fang. Nous
favons en effet que c'eft de cette aâiion que
dépendent le cours des humeurs &: tous les
différens degrés de l'élaboration dont elles
font fufceptibles : mais on ne peut difcon-
venir qu'elle ne foit infuffifantepour produire
\qs changemcns qui arrivent à leurs parties
intégrantes ;, l'action de la chaleur peut feule
pénétrer jufqu'à elles , & y caufer une forte
de mouvement inteftin , qui les développe
& les met en difpoiition d'être auiîi expofées
à l'aftion des folides qui en fait enfuite des
combinaifons , d'où réfulte la perfeâ:ion 6t
rimperfe£èion de toutes les humeurs du corps
animal. ,
Cependant cette coopération de la cha-
leur naturelle dans la digeftion des alimens
& l'élaboration des humeurs , ne conftitue
pas une vraie coclion , & ce nom convient
encore moins au réfultat de plufieurs efpeces
d'a<5lions différentes de la coclion qui conjoin-
te-nent avec elle opèrent toutes les opérations
néceflaires à l'économie animale. Néanmoins
comme il eft employé en médecine fans être
reftreint à fon véritable fens , & qu'on lui en
donne un plus étendu qui renferme l'adion
àç.s vaiifeaux & de la chaleur naturelle qui
en dépend, il eft bon de retenir ce nom , ne
fût-ce que pour éviter de fe livrer à une in-
conftance ridicule , en changeant le langage
confacré de tout temps à déiîgner des con-
noiffances anciennes, que nous devons expri-
mer d'une manière à faire comprendre que
nous parlons des mêmes chofes que les an-
ciens , & que nous en avons au fond preique
la même idée. Car quoique leur doctrine ftir
les codions ( dit le célèbre auteur du nouveau
traité des fièvres continues , déjà cité ) fbit
établie fur une phyfîque obfcure , la vérité
y domine cependant affez pour fe concilier
convenablement avec l'obfervation , & pour
qu'on puiife en tirer des règles & desprécep-
c o c
tes bien fondés , acceflibles aux fens , telles
que font les qualités fenlibles & générales
qui agilfent fur les corps : ainfi elle fera tou-
jours la vraie fcience , qui renferme prefque
toutes les connoiifances pratiques que l'on a
pu acquérir dans l'exercice de la médecine ,
& qui mérite lèule d'être étudiée , appro-
fondie & perfeftionnée.
Il paroît convenable de ne pas finir cet
article , fans placer ici les réflexions fuivantes
fur le même fujet ^ elles doivent être d'au-
tant mieux accueillies , qu'elles font extrai-
tes des commentaires fur les inftitutions &
les aphorifmes du célèbre Boerhaave.
Hippocrateaconfidéré, & nous n'en fai-
fons pas plus que lui , que l'on ne peut rien
favoir de ce c/ui iè palfe dans le corps d'un
homme vivant . foit qu'il foit en fanté , foit
qu'il foit malaae , & que l'on ne peut con-
noître les changemens qui paroiflént , dans
les maladies , diftërens àQs phénomènes qui
accompagnent la fanté ; ces changemens
font les effets de l'aftion de la vie qui fubfifte
encore;, &la cauië occafionelle de ces effets
qui caraélérifënt la maladie, eft un principe
caché dans les corps , que nous appelions la
matière de la maladie; tant que cette matière
retient le volume , la figure , la cohéfion , la
mobilité , l'inertie , qui la rendent fufoeptible
de produire la maladie & de l'augmenter ,
elle eft dite crue ; & tant que les changemens
produits par la caufe de la maladie fobfiftent ,
cet état eft appelle celui de la crudité.
Ainfi il fuit de-là que la crudité eft d'au-
tant plus confidérable dans la maladie , que
les qualités de la maladie font plus différen-
tes de celles de la fanté. La crudité ne fignifie
pas une nature finguliere d'afîed^ion morbi-
fique ^ bien loin de-là , il peut y avoir une
infinité d'efpeces de crudités , telles que les
fluides acres , épais, aqueux , &c. ou , comme
ditHippocrate , le trop doux, le trop amicr ,
le trop falé , le trop acide. On ne peut dé-
terminer la nature de la crudité , qu'en ce
qu'elle eft propre à engendrer la maladie.
Le fang de la meilleure qualité nuit dans la
pléthore;, fon abondance lui donne un carac-
tère de crudité : il peut aufli produire de
mauvais effets dans le corps d'un homme
foible , fi on l'injeûe dans fes vaifl'eaux ,
quoique feulement en quantité convenable.
Àiiift on ne doit pas feulement entendre par
matière
c o c
matîert cuite , Celle qui fe mûrît par l'aéllon
^.e la vie , mais celle qui doit être regardée
comine telle , refpedHvement à la fond:ion
qui étoit viciée , lorfque. cette fondtion fè
rétablit dans l'état naturel. Hippocrate îî'a
vraifemblablement entendu autre chofe fur
fe nature de la cocHon^ fi ce n'eft que ce qui
cft crud dans le corps humain paiFe à l'état
de maturation , lorfqu'il ceffe d'avoir les qua-
lités nuifibles qui le faifoient appeller crud ,
& qui conftituoient la inaladie.
Par conséquent la concoéèion n'eft autre
\. ^ chofe que l'aflltriilation , le changement des
matières crues , & dont les qualités ne con-
viennent pas à la fanté , en matières fufcep-
tibles d'être converties en la propre fubftance
(du corps , fi elles ne font pas d'une nature
qui répugne à cet ufage , ou d'être rendues
moins nuifibles & difpofées à être évacuées.
La première de ces opérations de la nature
peut être rapportée à celle que les anciens
ont appellée pepjis , qui eft la plus parfaite ^
telle eft la réfolution dans les inflammations :
la féconde eft celle qu'ils ont nommée pepaf-
mus , qui a lieu dans toutes les maladies où
il fe fait des évacuations de matière morbi-
fîque par la feule adion de la rie j la fup-
fîuration dans les maladies inflammatoires
eft de ce genre.
On peut rendre la chofe plus fènfible par
des exemples plus détaillés : celui d'une coc-
tion de la première efpece , de laquelle on
vient de donner une idée , eft marqué par
ce qui fe paflb dans les perfonnes qui ont
une efpece d'accès de fièvre , caufé par une
trop grande quantité de chyle mêlé avec le*
îàw^ ^ cette agitation fébrile , fupérieure à
l'action ordinaire des vaiifeaux , procure à ce
chyle une élaboration ultérieure , que cette
aâion n'auroit pas pu lui donner ^ il fe fait
par-là une aflîmilation des parties crues de
ces fiics encore étrangers , ils fè convertiflént
en bonnes humeurs , d'oîi peuvent être for-
més le ikng & les autres liqueurs animales :
ce changement étant opéré , la fièvre ceiTe
fans aucune évacuation fènfible de la matière
qui avoit caufé la fièvre. Mais un tel effet
ne peut être produit que dans le cas oîi la
matière crue ne diffère guère des matières,
fufceptibles d'être converties en bons fucs ,
ou des humeurs iàines ^ & lorique les efforts
extraordinaires que la natisre doit fgire pour
Tomt yjlh
produire ce changement ne font pas bien
confidérables , ou durent fi peu qu'il n'eu
puilfe pas réfulter une altération pernicieufe
dans les humeurs faines j laquelle ayant lieu,
rendroit néceffaire une évacuation fènfible
de celles qui {croient viciées.
C'eft ce qui arrive dans tous les cas oii fo
fait la c^ion de la féconde efpece , qui eft
auffi toujours l'effet de la fièvre, c'eft- à-dire
de l'adèion de la vie plus forte que dans l'état
de fanté \ dans cette dernière coâion les fui-
tes ne font pas aufîî falutaires que dans la
précédente ^ le changement en quoi elle con-
iîfte eft borné à donner à la caufè matérielle
de la maladie des qualités moins nuifibles à
l'économie animale , en détruifànt celles qui
lui étoient plus contraires ^ mais il ne rend
jamais cette matière alfez différente d'elle-
même pour qu'elle puifTe devenir utile : toute
la perfcdion dont elle eft fufceptible ne fait
que la rendre difpofëe à être évacuée hors
de la cavité des vaiffeaux de la partie dont
elle trouble les fondions.
C'eft ainfi , par exemple , que dans les
maladies inflammatoires de la poitrine , les
molécules des fluides qui engorgent les extré-
mités àQS vaiffeaux artériels des poumons ,
éprouvent un tel changement par l'aétion de
la fièvre , qu'elles font feparées de la mafl!e
des humeurs faines avec la portion des foli-
des , qui les contient par l'effort de la colonne
des liquides qui eft pouffée contre la matière
engorgée , & par la force de prefïïon col-
latérale des vaiffeaux voifins j il fe forme
de ce mélange de fluides & de parties con-
fiftantes broyées , corrompues par l'effet de
toutes ces puiflhnces combinées , une matière
qui ne tient plus rien de celle dont elle eft
compofée ^ qui eft blanche , homogène ,
ondtueufe , qui venant à fè répandre dans
les cellules pulmonaires & à fè mêler avec
la matière des crachats , eft évacuée avec
elle par l'expedoratiou , qui eft fi fouvcnt
le moyen par lequel la nature termine heu-
reufèmeut les maladies de la partie dont i|,
s'agit.
Il réfulte de tout ce qui vient d'être dit ,'
que c'eft toujours la fièvre , ou l'adion de
la vie rendue plus forte en général ou en
particulier , qui produit la cccîion de quel-
que efpece qu'elle f bit ^ c'ç^c elle qui eft l'info
tmmçnt dont ig naturç fc fert , comme djj^
Y y
354 COC
Sydenham ^ feâ. i , cap. iv , pour féparer
dans les humeurs les parties impures des
pures , pour évacuer les matières hétérogè-
nes nuifibîes à l'économie animale. C'eft de
ce principe qu'il infère avec les plus grands
médecins , que la principale chofe que l'on
doit faire dans la cure des maladies , eft de
régler l'aâiion de la vie , les agitations de la
fièvre , de les tenir dans une jufte modéra-
tion , pour empêcher que par de trop grands
efforts les vaiffeaux du cerveau & des pou-
mons , qui font les plus délicats , ou ceux
de toute autre partie importante aifoiblie
par quelque caufe que ce foit , ne fe rompent
ou ne s'engorgent d'une manière irréfoluble ^
ou qu'au contraire par trop peu d'efforts , la
matière morbifique ne fbit mal digérée , &
ià coclion imparfaite : 8c dans le cas où l'ac-
tion de la vie eft convenablement animée &
excitée , l'agitation fébrile fufîifant pour
opérer une bonne coclion , fans que Ton ait
rien à craindre de {&% effets , de laifTer à la
nature le foin de la guérifon.
Hippocrate a donné l'exemple d'une pa-
reille conduite dans le traitement de plufîeurs
maladies , à l'égard defquelles il lui arrivoit
fouvent de fe tenir dans î'inaélion , & d'être
lpeâ:ateur des opérations de la nature lorf-
qu'elle n'avoit pas belbin d'être aidée. Un
des plus fidèles & des plus prudens imitateurs
du père de la médecine ;, Sydenham , avoue
ingénument s'être auffi bien trouvé d'avoir
pris le parti de ne rien faire dans certains
cas , pour fe conformer aux préceptes de fon
maître , qui dit expreifément ^ dans fbn traité
de aniculis : Interdum enim optima medicina
tjî medicinam non facere. C'eft auffi iiir ce
fondement que Galien , de dieb.. crit. Mb. I ,
s'élève contre les médecins, qui ne croyoient
pas exercer leur art félon les règles , s'ils ne
prefcrivoient toujours quelques remèdes à
leurs malades , tels que la faignée , les ven-
toufes , ou quelques lavemens , purgations ,
&c. & il dit que de pareils médecins ne
j^' 'approchent des malades que pour com-
mztu^ des fauf^s aufîi répétées que leurs
tifites • .^"'^^ ^ft conféquemment irapofîible
que la mi^^^^^ ^ lô>uvent interrompue &
ircublée dan^^ fon ouvjage , puiffe corriger
la matière mortl^ifique, .^ parvenir à la gué-
rifoiv de la maladK" : rhun-\eur viciée dont il
ism que la coaionikbiSsi^^^ la pfocurer;,
COC
demande plus ou moins d'action fébrile ,,
félon qu'elle eft d'une natiu-e plus ou moins^
tenace , rebelle.
Ainfî dans les fièvres éphémères, & autres?
maladies légères , la nature n'a fouvent pas*
befoin de procurer lepepafme , comme dans
l'exemple allégué ci-deflus , où le vice ne
confifte que dans une trop grande abondance
de chyle ; la coclion qui s'en fait eft fembla-
ble à celle de la digeftion ordinaire dans les
fécondes voies f, elle n'eft qu'un peu plus la-
borieufe f, c'eft le vraipep/is; ou s'il faut quel-
que chofè de plus ., & que la coâion doive:
procurer quelque élaboration , elle eft très-
peu confîdérable j ce n'eft qu'une tranfpira-
tion plus forte , une petite fueur , ou tout au.
plus un léger cours de ventre. Dans les fièvres
putrides, dans les inflammatoires, la coclion
demande plus de travail j la nature a fouvent
befoin d'être aidée , pour qu'elle puiffe venir
à bout de préparer la matière morbifique ,
& la difpoiér à l'évacuation , qui fouvent
doit être très-copieufe & à plufieurs reprifes :
c'eft le cas où l'on emploie avec fuccès les
moyens qui peuvent détremper , divifer ,
atténuer les humeurs viciées , relâcher les
folides , afin qu'ils cèdent plus aifement ^ ou
leur donner du relfort s'ils en manquent ,,
afin que les voies foient plus libres pour fa-
vorifer'l'évacuation. Tels font fur-tout les
lavages en boiffon , en lavement , qui étant
adminilirés avec prudence, félon les indi-
cations qui fè préfentent , peuvent fatisfaire-
à ce que recommande Hippocrate , lorfqu'il
dit , aphor, ix , [tel. i , Corpora cîim quis:
pur gare volucrit ^ ca jluxilia faciat oportet '..
c'elï de cette manière qu'il convient de fa-
ciliter la coSion, & la cri/è qui doit toujours,
en être précédée.
Dans les fièvres qu'on appelle malignes ,,
il y a une fi grande léfion de fonétions , &
un vice fi difficile à corriger dans la matierer
morbifique , que la nature fuccombe bien-
tôt fi e\[Q n'eft puiffam.ment fecourue , parce^
qu'il ne faut pas moins que la coâion la
plus forte pour détruire la caufe du maL
Dans les fièvres peftilentielles &lapefte, les.
fecours les plus appropriés & les plus grands
leffortsdela nature fbot le plus fouvent infuf-
fifans pour opérer la coclion , parce que les
forces de la vie font trop peu actives à pro-
\ portion de la réiiftance. des délétères , &
c o c
que les mauvais effets de ceux-ci font fi
prompts , qu'ils ne laiiTent ni à la nature ni
à l'art le temps d'y apporter remède , ou au
moins d'en tenter quelqu'un.
Il réfulte de ce qui a été dit jufqu'ici de
la coclion dans les maladies , qu'elle ne peut
avoir lieu proprement que dans celles qui
font avec matière , félon le langage de l'école,
c'eft-à-dire qui font caufées par un vice dans
les hum.eurs \ dans toute autre il ne peut y
avoir ni coclion ni crife. V. Crise , Fièvre.
Cet article $fi de M. d'AumONT , premier
profejjeurde médecine entuniverfité deValence.
COCTION , (Pharmac.) mot générique
exprimant l'altération opérée fur un corps
folide par i'aftion d'un liquide , excitée ou
augmentée par le feu.
Dans la coclion on n'a en vue que le chan-
gement opéré fur le corps qui en eft le fujet ,
fans s'embarraffer de ce que le liquide qu'on
lui applique en peut extraire ^& c'eftencela
précifëment que la coclion pharmaceutique
diifere de la décodion , dans laquelle c'eft
cette feule extraction qu'on fe propofe. V.
Pécoction.
On fait la coclion des racines ^tnulacam-
pana , pour les ramollir & les rendre propres
à être réduites en pulpe, afin d'en former en-
fuite une conferve \ ôcon fait la décoftion des
mêmes racines pour charger l'eau qu'on y
emploie de leurs parties extradives , qu'on
rapproche enfuite ou qu'on réduit en con-
fiftance d'extrait. V. Extrait.
Les oignons de lis , de fcylles , & quelques
autres corps très-aqueux qu'on fait ramollir
fous la cendre chaude , doivent être rangés
parmi les fujets de la coclion pharmaceu-
tique \ Us ne diffèrent des autres dont nous
venons de parler , qu'en ce qu'ils portent
avec eux-mêmes le liquide qu'on eft obligé
d'appliquer aux corps qui font plus durs &
plus fecs.
Le mot cuite n'eft pas fynonyme en phar-
macie au mot coclion. V. CuiTE. {b)
CoCTiON , {Alch,') ce mot eft employé
communément dans le langage à^i alchy-
miftes , pour exprinjer la longue digeftion à
laquelle ils expofent la précieufe matière du
grand œuvre , dans le deffein de lui faire
«prouver cette altération graduée & infenfi-
l)le qui doit la conduire enfin à la matura-
lion ou à la perfeâ:ion. {f)
CGC 3H
COCYTE , f. m, {MytkC) un At% quatre
fleuves des enfers ^ fleuve d'Épyre , ou plu-
tôt de la Thelprotie qui en étoit une partie:
il tomboit avec le Pyriphlégeton dans le
marais Achérufia. Son étymologie & fon
voifinage de l'Achéron , l'ont fait mettre par
\qs poètes grecs au nombre des fleuves des
enfers. En effet cocyte veut dire pleurs , gé~
mijjemens , de kokvhv , ge'mir. Il a donné Ibii
nom aux fêtes cocytienues qu'on célébroit ea
l'honneur de Proferpine.
Je crois que le Cocyte des poètes latins
étoit le ruifl'eau de ce nom qui couloit en
Italie près du lac d'Averne , & iè déchargeoit
dans le lac Lucrin , lequel fut enfin preique
comblé par une nouvelle montagne de cen-
dres qu'on vit s'élever du fond de ce lac
dans un tremblement de terre arrivé le 29
feptembre 1538.
Ce n'eft donc pas feulement de l'Epyrç
que les poètes ont tiré l'idée des fleuves de
l'enfer ^ le lac d'Averne d'Italie , & les fon-
taines d'eaux chaudes qui étoient aux env-i-
rons , y ont également donné lieu. Tous ces
endroits étoient fi couverts de bois depuis
Bayes & Pouzzol , que les eaux y croupifi'ant,
palfoient pour être des plus mal faines ^
outre que la vapeur qui fortoit des mines dç
foufre &: de bitume qui y font en grand
nombre , ne pouvoit pas s'exhaler aifément.
Agrippa favori d'Augufte , & rempli
d'amour du bien public , fit couper ces bois
& nettoyer fi bien les lieux voifins , que
depuis les eaux devinrent claires & nettes ,
au rapport de Strabon. Mais c'eft pour cela
même que les poètes ornèrent leurs écrits
des anciennes idées qu'on avoit du Cocyte.
Horace, o<^f xiv , liv. II , v. 18 , & Virgile ,
Enéidy liv. VI y v. 313 , n'y manquèrent
pas.
Le premier , dans cette ode àPofthume ,
où la morale eft fi bien cachée , où laverfifi-
cation eft fi belle , rappelle poétiquement à
fbn ami la néceflité de mourir :
Vi fendus ater fiuminc languido
Cocytus errans.
( M. le chevalier DE Javcovrt)
§ CQDAGA PALA, f. m. ( Hijl. nat.
botani^. ) arbrilfeau du Malabar , très-bien
gravé , avec la plupart de fes détails , par
Van-Rheede , au volume I de fon Hortuf
Yy2
•35« . COD
'Malabaricus , imprime en lojd^page Z$ ,
'z?/. XLVIII. Les Brames l'appellent ^r^^o
€itdo , & Jean Commelin dsns lès notes ,
arbor Malaharica laâefcens jafmini flore odo-
ro ^jiliquis oblongis. C'eft le nerium Indicum
fiUquis anguffis ereclis longis geminis , gravé
par M. Btirmann , dans fon Thefaurus Zd-
ianicus , imprimé en 1737 , page 167, pi.
ZXXVII : le co/z^i des ades d'Edimbourg,
vol. 111 , page 3 z ; & le nerium 3 antidyfen-
tericum , foliis ovatis acuminatis petiolatis ,
ide M. Linné , dans fon Syfiema naturœ ,
édition in-iz , page 190.
C'eft un arbriffeau qui s'élève à la hau-
teur de fix à dix pies : fon tronc eft haut de
trois à quatre pies fur un pié de diamètre ,
& couronné par une tête Iphérique, compo-
fée de nombre de branches alternes , courtes,
épaiffes, ouvertes fous un angle de quarante-
cinq degrés , à bois blanc , recouvert d'une
ccorce d'abord rouile ou brune , enfùite cen-
drée comme celle du tronc.
Sa racine eft fort longue , peu enfoncée
fous terre , & traçante prefque horizontale-
snent , recouverte d'une écorce brun-rouge.
Les feitilles font oppofées deux à deux ,
au nombre de deux à quatre paires fur cha-
que branche , non pas en croix , mais fiir un
îBcme plan , de manière que le feuillage en
eft applati. Elles font elliptiques , pointues
aux deux extrémités , longues de quatre à
iix pouces , une fois &: deinie moins larges ,
relevées en deffous d'une côte longitudinale ,
ramifiée de fix à douze paires de nervures
alternes , & portées horizontalement for un
pédicule cylindrique , extrêmement court à
des diftances de deux pouces les uns des au-
tres.
L'extrémité de chaque rameau eft term.i-
ïiée par un corymbe une fois plus court que
îes feuilles , compofé de dix à vingt fleurs
tîlanches , longues d'un pouce & demi , por-
tées fiir un pédicule cylindrique , trois à qua-
tre fois plus court qu'elles.
Chaque fleur eil hermaphrodite , mono-
|)étale , régulière , pofée au-deffous de l'o-
vaire. EUe confîfte en un calice d'une feule
pièce , à cinq dents perfiftantes \ en une co-
rolle monopétaîe à tube €ylindrique!^4>artagé
en cinq divifions aufti longues, que lui , ellip-
tiques , obtiilès , une fois plus longues que
laiges j ouvertes en étoile , tournées obliquc-
C O D
ment de coté , épaiffes. Le fommet du tube
eft orné intérieurement de cinq étamiiies
petites qui ne le débordent pas. Du fond du
calice s'élève un diique jaune , court , por-
tant deiax ovaires cylindriques y appliqués
l'un contre l'autre , réunis à leur extrémité
par un ftyle cylindrique, couronné"par deux
ftigmates hémifphériques veloutés.
Ces deux ovaires , en mûriffant , deviennent
deux filiques ovoïdes , pointues aux deux
bouts,de fix à fept pouces, c'eft-à-dire comme
les feuilles , douze à quinze fois moins larges ,
vertes, aune loge-, s'ouvrant longitudinale-
ment for leur face intérieure , en une valve
ou battant , qui porte for fes bords un pla •
centa longitudinal cylindrique , couvert par
une cinquantaine de graines elliptiques, verd-
brunes , longues de trois lignes,une fois moins
larges , attachées , pendantes , & couronnées
par un faifoeau de poils argentins , feflîles ,
une fois plus longs qu'elles.
Culture. Le codaga croît au Malabar dans
des terres fablonneufes.
(Qualités. Toute la plante blefféc rend ua
foc laiteux. Elle a une laveur amere & peu
forte : i&% fleurs répandent une odeur forte
& très-agréable.
Ufages. L'écorce de cette plante , fiir-tout
de îa racine , eft un fpécinque renommé
dans riude pour toute forte de flux de ven-
tre , foit dyfléntérique , foitlientérique, fort
hém.orrhoïdal. Pour cela , il foffit de la piler
& de la boire dans du lait aigre. Sa décoc-
tion dans l'eau fe boit auffi dans les contu-
fions avec épanchement de fang. La même-
décoôion dans l'eau de riz s'emploie en li-
niment au cou dans la fquinancie , pour les
tumeurs & les douleurs de la goutte. Engar-
garifme , elle appaife les douleurs des dents y
en faifant périr les vers qui y féjournent. La
décoôion de fes graines fe donne dans les
fièvres ardentes , dans les chaleurs du foie ,
dans la goutte , & pour tuer les vers^.
Remarques. Quelques rapports que îe
Walidda de Ceylan , gravé par M. Bnrmann ,
à Va pi. LXXVU de fon Thefaurus Zejlani-
cus , fous le nom de nerium fîliquis angufiis
erutis longis geminis , fomble avoir au pre-
mier abord avec le codaga ^nou^ ne pouvons
penièr , comme M. Burmann , que ces deux
pKantesfoient de k même efpece & du même
^ genre. U en diffère non feulement par fes
C O D
feuilles , dont le pédicule eft plus long , par
fes fleurs qui ont dix petites lames rappro-
cKées en cône au haut du tube comme le
nerium , par (es filiques qui font élevées
droites , non pendantes , plus longues que
les feuilles , & par fon écorce qui eft noirâ-
tre. Ainfi le codaga eft un genre particulier^
& M. Linné , qui s'en eft rapporté à M.
Burraann , a induit en erreur tous les au-
teurs qui font venus après lui , & qui ont
rangé le codaga dans le genre du laurier-rofe ,
fous le nom de nerium antidyfentericum. Le
codaga vient naturellement dans la famille
Aqs apocins où nous l'avons placé. Voye:^ nos
Familles des plantes ^ volume II ^ page 172.
( M, Adanson. )
CODAGEN, f. m. {Hiji. nat. botan.)
iefpece d'écuelle d'eau , hydrocotyle , alfez
bien gravée , mais avec peu de détails , par
Van-Rheede , dans Con Honus Malabaricus ,
vol. X^ pi. XLVI , page 91. Rumphe en a
donné auflî une figure plus complète dans
{on Herbarium Amboinicum^ vol. ^,/».455,
pi. CLXIX , n^. 1 y fous le nom de pes equi-
nus pancflgaafHermann y dans fon Paradifus
Batavus , page 238, en a donné auflî une
figure palfable , fous la dénomination de va
lerianella Zeylanica palujlris , repens , hederœ -
terrefiris folio , ad radicemflorida. Plukenet
Ta fait aufîî graver , pi. CVÎ , /z°. 5 de fa
Thytographie^ fous la défignation âera/iun-
culo , ajfinis umbelliferis accedens chelidonii
minoris folio Zeylanica minor. C'eft le hydro-
cotyle 4 Afiatica ffoliis reniformibus œqualiter
crenatis de M. Linné , dans fon Syjiema na-
ïurx , édition in-ii^ page 202. Les Brames
l'appellent rcûr/Jû/;/ èiundiri:\es Mal^ys pan-
caga : les Hollandois , paarde voetjes : les
Porrugaisyo//^o rabaffb : les habitans de Ter-
nate cloditi manoora , ou cloditi mafru; c'eft-
à-dire poudre contre les vers : ceux d'Am-
boine aJfotdijM laun ; c'eft-à-dire feuille en
oreille de chien , ou alaun ribute ; c'eft-à-
dire feuille en entonnoir : ceux de Loehoe
cylaun capepuli : ceux de Banda y bijji mattan :
ceux de Baleya , paydeh.
C'eft une plante vivace à tige cylindrique
d'une ligne un quart de diamètre, rampante
iiir la terre à la longueur de deux à quatre
;! pies 5 verte , & en partie rouflatre , char-
nue , aqueufe , fomée de quelques poils , je-
tant par iiàtervalles de quatre à ftx pouces un
falfceau de cinq à dix racines blanchâtres ,
longues d'un pouce & demi au plus , & aa
defliis de ce faifceau une feuille en demi*
lune , comparable à celle du lierre terreftre.
Ckamaclema , échancrée d'un quart à {oi\
origine , d'un pouce à un pouce & demi de
largeur, d'un quart moins large, verd-claire ,
mince , lifte , relevée en defibus de fept ner-
vures rayonnantes , fomée de quelques poils ,
marquée de fon contour de vingt-quatre
dents , triangulaires , inégales , & portées
fur un pédicule cylindrique , fîllonné en
deftiis , long de cinq à fix pouces , relevé
en haut verticalement.
De l'aift^elle de chaque feuille fort un
bourgeon de trois ou quatre autres feuilles
fèmblables , mais plus petites , & une om-
belle feflile à deux étages , dont chacun eft
accompagné d'une enveloppe à quatre feuil-
les affez larges : l'ombelle univerfelle a trois
ou quatre branches , & chaque ombelle par-
tielle eft d'une à trois fleurs fèftiles , rouges ,
violettes , d'une ligne & demie de diamètre ,
ouverte horizontalement.
Chaque fleur eft hermaphrodite , polipé-
tale , pofée fur l'ovaire. Elle confifte en un
calice à cinq denticules, en cinq pétales en
cœur , violets , & en cinq étamines de même
longueur , pofëes fiir l'ovaire qui eft en cœur
comprimé , couronné par deux ftyles cy-
lindriques , divergens , tronqués , terminés
par un ftigmate formé de petits poils, épais,
coniques.
L'ovaire en mûriflant devient une capfiile
orbiculaire , ou en cœur très-comprimé ,
d'une ligne & demie de longueur , pointue
en bas , non diftin<fte des graines ^ car elle
iè fopare en deux graines de même forme ,
cendrées.
Culture. Le codegen croît naturellement
au Malabar , dans les terres argilleufos hu-
mides , & aux îles Moluques , le long des
haies : on le cultive aufli dans àcs terrains
fèmblables.
Qualités. Toute la plante a une faveur ùt-
line , très- acre & piquante,
Ufages. Ses feuilles fo mangent quelque-
fois cuites avec les autres herbages acides ,
en manière d'épinard , pour réveiller l'ap-
pétit. Celle qui croît dans des terrains (qcs ,
expofes au fbicil , fc mange plus volontiers»
Cette plâfite eft le vulnéraire déteriif êc
35» COD
uCtnngcnt , le plus puiilaiit qui fbit connu
dans l'Inde. On fait amortir fes feuilles au
feu , & on les applique communément ainlî
_ iùr les blelTures de peu de conféquence ;,
mais pour les blelfures coafidérabies , fur-
tout celles des pies , on exprime de fes
racines le fuc que l'on fait couler dans les
plaies , qu'on recouvre enfuite avec une
feuille. On fait manger aullî ces feuilles pi-
lées avec les feuilles d'une douzaine d'autres
plantes , acres , acides & ameres , telles que
le langafa , le fonboug , le boaya , le bafilic
fulajfi , le micka , &c. Le fuc exprimé de
fes feuilles fe coule dans les oreilles puru-
lentes ; il fè donne aux enfans pour les co-
liques cpntre les vers : avec le lait aigri ,
il arrête la dyffenterie : fa décoé^ion fê boit
dans les douleurs néphrétiques , les fièvres
ardentes , l'hydropilie & la migraine.
Remanjue. Il ne paroît pas qu'il y ait la
moindre différence entre le codagen du Ma-
labar , & le pancaga de Ceylan ^ & c'eft
peut-être par oubli que Rumphe n'a pas fait
mention des poils que Van-Rheede a observés
iwr cette plante. Au refte, le codagen eft cer-
tainementune efpece d'/^y^rocor;7f , & vient
dans la cinquième fèâion de la famille des
ombeiliferes , où nous Tavons placé. V. nos
F, des pi. , V» //,/>. loo. {M. Ad an son.)
CODDAM PULLI , f. m. ( Hiji. nat. bo-
îaniq. ) nom que les Malabares donnent à un
grand arbre , très-bien gravé , par Van-
Rheede, dans fon Hortus Malabaricus^ vo-
lume I , page 41 , planche XXIV. Les Ma-
labares l'appellent encore otapulli , & \ç.s
Brames darambo, C'eft le ghoraka ghokatu
de Ceylan \ le carcapuli d'Acofta , & le cam-
bogia 1 guua de M. Linné , Syjiema naturœ ,
édition II, page 361.
Cet arbre s'élève à la hauteur de 60 à 70
piés^fon tronc eft droit, cylindrique , élevé
de douze à quinze pies , fur trois à quatre
pies de diamètre , & couronné par une
cime iphéroïde épaifle , compofée de bran-
ches oppofées , deux à deux , en croix , cy-
lindriques , écartées d'abord fous un angle
de trente degrés, enfuite horizontalement ,
à bois blanc , recouvert d'une écorcc noirâ-
-tre extérieurement , rouge au delFous , &
blanc-jaune au dedans.
Sa racine eft grolTe , piquant droit fous
terre , 8c ramifiée eu nombre de groftes bran-
C O D
ches qui s'étendent horizontalement à une
grande diftance.
Les feuilles font au nombre de deux à
quatre fur chaque branche , oppofées , eu
croix , elliptiques , pointues aux deux extré-
mités, longues de quatre à fix pouces, une
fois à une fois &: demie moins larges , entiè-
res, épaiilcs, fermes , luifantes , verd-brunes
delliis , claires delfous , relevées en delîbus
d'une côte fans nervures , & portées hori-
zontalement fur un pédicule cylindrique,
fix à huit fois plus court qu'elles.
Les branches /ont terminées chacune par
une fleur incarnate , felîîle , ouverte en
étoile , de quatre à cinq lignes de diamètre.
Chaque fleur eft hermaphrodite , polypé-
tale , complète, pofée au delfous de l'ovaire
& caduque ^ elle confifl^ en un calice à qua-
tre feuilles elliptiques , concaves , une fois
plus longues que larges , épaift'es , verd-jau-
nes ;, en une corolle à quatre pétales fembla-
bles , rouge-jaunâtres , & en huit à dix et, -
mines blanches à anthères rouges , placées
au deifous d'un difque , fur lequel eft élevé
un ovaire Iphéroïde à huit oy dix angles ,
couronné par quatre ou cinq ftigmates en
rayons ratupans , ou plutôt par un ftigmate
hémilphérique , marqué de 4 à 5 filions.
L'ovaire en mûrilîant devient une baie
fphéroïde de trois pouces de diamètre , d'a-
bord verte , enfuite jaune plus blanchâtre ,
relevée de huit à dix côtes arrondies & mar-
quées d'autant de filions correfpondans à
autant de loges & de cloifons membraneu-
fès , à chair blanche , contenant chacune une
graine en fève elliptique , comprimée , bleu-
noire , longue d'un pouce, une fois & demie
moins large , & attachée verticalement par
le milieu de fà longueur au placenta qui se'
levé comme un axe au centre du fruit.
Culture. Le coddam pulli croît au Malabar
dans les terres fablonneufes \ il fleurit &
fruftifie une fois l'an en mars.
Qualités. Toutes fès parties ont uriefaveur
acide afTez douce \ fès fleurs font iàns odeur.
Lorfqu'on fait une incifion à l'écorce de ie^
racines & de fbn tronc , il ea coule une li-
queur blanche très-vifqueufe , fans odeur ,
qui en féchant forme cette gomme réfine ,
appellée gomme-gutte , jaune-fafran , opa-
que , fans odeur , laifi'ant une légère âcreté
dans le gofier.
C O D
Ufages. Son fruit fe mange crud , & les
Malabares l'emploient fec en poudre dans
leurs alimens , comme un aftringent favora-
ble dans les flux de ventre bilieux.
La gomme-gutte eft un purgatif que les
Indiens prenirent dillbus dans 1 huile de lin ,
En buvant l'eau dans laquelle ils en ont fait
infufer dix à feize grains pendant une nuit.
Cette gomme-rélîne leur fert encore plus
pour la peinture en miniature & pour les
lavis.
Remarques. Si l'on en croit J. Commelin
dans fes notes , il ne faut pas confondre la
gomme-gutte du coddam pulli ^ avec la
gomme-gutte commune , que Bontius , cha-
pitre 58 de fon Hijîoire des Indes , dit que
l'on retire d'une plante , appellée par les In-
diens lonam cambodja , parce qu'elle croît
dans la province de Cambodja , voifine de la
Chine , plante que le même Bontius dit être
très-approchante du tithymale. En effet , la
qualité purgative que l'on attribue à la
gomme-gutte , doit appartenir à un tithy-
male , & conféquemment au lonam cam-
bodja ; & il eft probable que le coddam pulli
n'eft pas une efpece de gomme-gutte , ou au
moins la craie gomme-gutte, puifque Van-
Rheede n'en dit mot, & que Hermann , en
écrivant en 1677 de Columbo , dans l'île de
Ceylan, à J. Commelin, lui mande que le
ghoraka de Ceylan, qui eft le coddam pulli
du Malabar , ou le carcapuli d'Acofta , & le
kanna ghoraka ^ c'eft-à-dire, le ghoraka doux
& non acide , qui eft le carcapuli de Linf-
eot, font deux plantes très-différentes , quoi-
que Gafpar Bauhin les ait confondues , &
que toutes deux rendent une gomme-gutte ,
mais que celle du kanna- ghoraka eft iûpé-
rieure à celle du ghoraka ou du coddam pulli.
Voici comment cet auteur & Grimm décri-
vent cette féconde efpece.
Det0eme efpece. KannA-GHORAKA.
Le kanna-ghoraka , appelle encore par les
habitans de Ceylan kanna-koraka^^kanna-
kurka , kanna-wakoraka , kœpnaykoraka &.
gœthagoraka , c'eft-à-dire, goraka doux, dif-
fère du ghoraka ou du coddam pulli par les
caractères fuivans \ 1°. c'eft un arbre de
moyenne grandeur, d'un afpedt très-agréa
fele \ 2°. fes feuilles font rondes ou crbicu-
laiies y vertes &: grailes j 3°. fes fleufs ji'oût
C O D > f ^
' que quatre étamines V4°. ^^^ fruits font fphéu
riques, de la forme & groffeur d'une cerife ,
à quatre loges & quatre graines , & à chair
douce non acide.
Cet arbre croît communément autour de
la ville de Columbo , dans l'île de Ceylan.
Il rend , par les bleffures qu'on fait à fon
écorce, un feic jaune qui fe condenfe en une
gomme d'une qualité fupérieure à celle de
la première eipece.
Remarques. Van-Rheede eft le fèul au-
teur qui ait décrit en botanifte & deffmé le ♦
coddam pulli , & on ne voit pas trop fur
quelle autorité M. Linné attribue à cette
plante plus de douze étamines , des fleurs
verticillées , & par conféquent pourquoi il la
place dans fa claffe treizième de la polyan--
drie. Pour nous , en examinant attentive-
ment fes dirers caraâ:eres , nous la jugeons
faire un genre particulier , voiiin de la Ca-
rambole , dans la famille des jujubiers. Voye-{^
nos Familles des plantes , volume 2 , page
304. {M. Adanson.)
CODDA PANA, f. m. (Hijî. nat. bota^
/2/^. ) palmier des plus finguliers du Malabar,,
dont Van-Rheede a fait graver une figure
affez complète , au volume 111 de fon Kor-
tus Malabaricus ^ planches 1 a Xll. Les Ma-
labares l'appellent encore tenga panna ^ les
Brames kare tcla ; les Cingalois de Ceylan
tala talagas , talagaijo & tallipot ; & les
Portugais arvore dos fombreiros, J. Comme-
lin dans fès notes l'appelle , palma montana
Malabarica folio magno complicato acute flore
albo racemofo , fruâu rotundo. M. Linné ,
dans fon Syjiema naturac , édition 12, page
729 , lui donne le nom de corypka i umbra-
culofa J frondibus pinnatopalmatis ,, plicatis j
filoque interjeâis , & le confond avec \q fa-
rt bus , gravé par Rumphe , au volume 1 de
fon Herbarium Amboinicum ^ planche Vlll.
C'eft un arbre dont le tronc s'âleve droit
à la hauteur de foixante à foixaate-dix pies j
fous la forme d'un cylindre égal de deux
pies environ de diamètre , lifîe , luifànt ,
couronné par un faifceau de huit à dix feuil-
les en parafai qui lui foraient une tête iphé-
rique de quarante pies de diamètre.
Ces feuilles ne font dans toute leur gran-
deur , que lorfque l'arbre a acquis toute fa.
hauteur de foixaiite à foixante - dix pies ^
c'eftrà-dircjt à treiite-çiiiq,outreute-fixau&^
3^o C O D
alors elles forment chacune un éventail de
quinze pies environ de largeur , fur vingt
pies de longueur , compofé de cinquante à
{bixaiite plis féparés à fon milieu en deux
rangs chacun de vingt-cinq à trente par une
côte fort mince , le long de laquel'e elles
font comme ailées , étant fëparées les unes
des autres feulementà leur extrémité jufqu'au
quart de leur longueur , où elles laiiîcnt
échapper un filet qui faifoit leur union. Le
pédicule qui porte chaque feuille eft égal à
leur longueur , creufé en demi-cylindre ,
convexe en dehors , concave en dedans ,
dentelé fur fes bords de dents montantes ,
plus large à fon extrémité fupérieure , qui
eft triangulaire pointue , & formant à fon
origine une gaine non pas entière , mais fen-
due entièrement d'un côté. Les feuilles qui
précèdent cet accroiffement entierde l'arbre ,
& celles qui le fuivent font beaucoup plus
petites ^ celles-ci commencent même à tom-
ber fuccefiîvement , fans être remplacées
par de nouvelles.
Ce n'cft que dans ce temps , vers l'âge de
trente-cinq à trente-fix ans , que cet arbre
commence à porter fleurs & fruits. Il n'en
porte qu'une ièule fois , & dépérit enfuite
peu-à-peu , alors il produit (es fleurs, mais
d'une manière des plus fingulieres. Du fom-
met de fon tronc au milieu de {es feuilles ,
s'élève à la hauteur de trente pies comme
une autre tige droite , conique , couverte en-
tièrement par une trentaine djécailles imbri-
quées très-ferrées , dont chacune renferme
une gaînc elliptique comprimée , obtufè ,
prefque deux fois plus longue que large, en-
tière comme une gaine de couteau , percée
par le dos vers fon extrémité d'un trou par
où fort un épi de vingt pies de longueur ,
écarté fous un angle de 6© à 70 degrés d'ou-
verture , entièrement couvert de iîx à quinze
écailles cylindriques , engaînées les unes
dans les autres ^ fendues d'un feul côté fur
toute leur longueur , contenant chacune un
régime en panicule , de deux à trois pies de
longueur , compofé d'une cinquantaine d'é-
pis pédunculés cylindriques , pendaus , longs
de fîx à neuf pouces , portant chacun deux
cents fleurs feflilles , blanchâtres , rappro-
chées quatre à quatre par petits paquets.
Chaque gaine contient donc environ quinze
régimes & plus de 15000 fleurs.
CDD
Cha<?[i!e fleur efl hermaphrodite $ placée
autour de l'ovaire. Elle confifte en un calice
à trois divifions , félon Van-Rheede , mais à
fix , dont trois extérieures plus petites , ou-
vertes fous un angle de 45 degrés en étoile
de quatre lignes de diamètre , en fîx étami-
nes d'un quart plus longues , & en un ovaire
fphérique deux fois plus petit, couronné par
un ftyle , dont le fîigmate forme un fdîon
velouté fur fa face intérieure.
L'ovaire , en mûriffant , devient une baie
fphérique d'un pouce & demi de diamètre ,
liile , verre, à chair fucculeute , graffe , un
peu amicre , de deux lignes de diamètre , à
une loge , contenant un ofîelet blanchâtre ,
liife , mince , à amande blanche , charnue ,
ferme , fufceptible de poli comme l'ivoire ,
d'un pouce de diamètre , ayant à fon centre
une petite cavité de trois lignes dediairietre.
Culture. Le coddapaaa croît au Malabar ,
fur-tout dans la province de Mangarti ,
Tirtjonc , Katour , & autres lieux , fur \ç^^
montagnes entre les rochers. On le voit auffi
à Ceylan , dans les provinces de Meuda ,
Cortu , Agras , & près de Baoudhou-Malac ,
c'eft-à- dire , du Pic-d'Adam. Il fleurit indif-
féremment dans tous les temps de l'année ,
mais particulièrement au mois d'août. Ses
fruits font environ quatorze mois à mûrir ,
& dès-lors il commence à périr & à fè dé-
truire peu-à-peui
Vf âges. C'efl des feuilles de cet arbre que
font compofës les livres des Malabares. Ils
écrivent delfus en y traçant , avec un fèilet
de fer , des caractères qui , pénétrant leur
épiderme fupérieur , deviennent ineffaçables.
Ces mêmes feuilles leur fervent de parapluies
& de parafols , capables de couvrir vingt
perfbnnes ^ ils en couvrent auffi leurs mai-
fbns. Les noyaux , ou plutôt les amandes de
k% fruits , fe tournent & fe poliffent pour
faire des colliers qui , peints en roi^e , imi-
tent beaucoup le corail. Le fuc exjMmé des
branches de fès régimes , eft un vomitif qui
fe donne auxperfonnes que les morfures des
fèrpens venimeux ont fait tomber dans le
vertige & le délire. La gaine de fes fleurs ,
encore tendre , rend , lorfqu'on la calfe ,
une liqueur qui , féchèe au foleil, devient j
une efiîece de gomme émétique , que les
femmes greffes emploient ordinairement
pour faiie fortir l'enfant mort , & dont
d'autre»
C O D
«l'autres abrtfcnt quelquefois pour fè pro- j
curer l'avortement.
Remarques. Le codda pana diffère vrai-
fcmblablement comme genre , & au moins
comme efpecc du faribus de Rumphe , que
M. Linné a confondu avec lui, fous le nom
<la corypha ; & nous penfons que ce nom
nouveau de coripha^ qui n'a aucune origine ,
doit céder à celui de codda pana , fous le-
quel la plante que nous venons de décrire eft
il connue dans l'Inde. I^e codda panna fait
un genre particulier dans la famille des
palmiers. Voye[ nos Familles des plantes ,
volume II , page 25. [M. Adanson. )
CODE , f. m, ( Jurifp. ) fignifie en géné-
ral recueil de droit ; mais on donne ce nom à
plufieurs fortes de recueils fort difFérens les
uns des antres.
Les premiers auxquels on a donné ce nom
font des compilations des loix romaines ,
telles que les codes Papyrien , Grégorien ,
Hermogénien , Théodolien , & Juftinien ^
on a auflî donné le titre de code à différen-
tes colleii^ions & compilations des canons ,
& autres loix de l'églife. Ce même titre a
été donné à plufieurs colleftions de loix
anciennes & nouvelles raffemblées en un
même volume, fans en faire de compila-
tion , comme le code des loix antiques , le
code Néron *, on a même appelle & intitulé
code , le texte détaché de certaines ordon-
nances , comme le code civil , le code crimi-
nel , le code marchand , & plufiewrs autres
femblables : enfin on a encore intitulé code
certains traités de droit qui raffemblent les
maximes & les réglcmens for une certaine
matière ,tels que le code des curés , le code
des chaffes , & plufieurs autres. Nous allons
donner l'explication de chacun des différens
codes féparément.
Code des Aides, eft un titre oufornom
que l'on donne quelquefois à l'ordonnance
de Louis XIV , du mois de juin 1680 , for
le fait des aides ^ mais ce nom fo donne
moins à l'ordonnance même qu'au volume
qui la renferme , lorsqu'elle y eft feule , ou
qu'il ne contient que des réglemens for la mê-
me matière ^ car du refte , en parlant de cette
ordonnance , & for- tout en la citant à l'au-
dience , on ne dit point le code des aides , mais
V ordonnance des aides : il faut appliquer la
même obfervation à plufieurs autres ordon-
Tome VUL
C O D 3<^i
nances dont il fera parlé ci-après , qui forment
chacune féparément de petits volumes que
les libraires & relieurs intitulent code y com-
me code des Gabelles , code de la marine ,
(S'c. F^. Aides (S» Ordonnances DES Aides.
Code d'Alaric , eft une compilation du
droit romain qu'Alaric II , roi des Vifigoths
en Efpagne , fit faire en 158 , tirée tant des
trois codes Grégorien , Hermogénien &
Théodofien , que des livres des jurifconfiil-
tes. Ce fut Anian, chancelier d'Alaric, qui
fut charge de faire cette compilation : il y
ajouta quelques interprétations comme une
eff)ece de glofo^ on n'eft pas certain qu'il
l'ait lui-même compofée , mais du moins il
la foufcrivit pour lui donner autorité. Cette
compilation fut aufii autorifée par le confen-
tement àss évêquesôc des nobles , & publiée
en la ville d'Aire en Gafcogne le 2 février
506, fous le nom de code Théodofien. On fit
dans la fuite un autre extrait de ce code , qui
ne contenoit que les interprétations d'Anian ,
& qui fot appelle fcintilla. Ce code ^Alaric
ou Théodofien fot long-temps en ufage, 8c
formoit tout le droit romain qui s'obfervoit
al«rs en France, principalement dans les
provinces les plus voifines de l'Efpagne 5
mais cette loi n'étoit que pour les Romains
ou Gaulois \, les Vifigoths avoient leur loi
particulière , laquelle fot enfoite mêlée avec
le droit romain. V, Code d'Evarix.
Code d'Anian , eft le même que le code
Alaric , les uns donnent à ce code le nom da
prince par ordre duquel il fut rédigé , les au-
tres lui donnent le nom ^ Anian qui en fut
le compilateur ; mais on l'appelle plus com-
munément code Alaric.
Code d'Arragon & de Cajîille , ou corps
des loiz obfervées dans ces royaumes , fot
commencé fous le règne de Ferdinand III ,
& achevé fous celui d'Alfonfe X , fon fils,
C'eft fans doute ce qui a fait dire à Ridderus
miniflre de Roterdam C de erud. cap. 3 , )
qu'Alfonfe étoit très-verfé dans la juri^ru-
dencc , & qu'il avoit rédigé un code de loix
divifë en fept livres , dans lequel étoit raf^
femblé tout ce qui concerne le culte divia
& ce qui regarde les hommes. Mais M. Bayle
en fon dictionnaire à l'article de Caftille , ob-
ferve que ce fcroit fe tromper grofliérement ^
que de prétendre qu'Alfonfe a été lui-même
I le compilateur de ces loix : qu'il a fait e«
Zz
3^1 C O D
cela le même perfonnagc qucThéodore ,
■Juftinien & Louis XIV , par rapport aux
codes qui portent leur nom.
Code canonique ou code des canons , ou
corps de droit canonique , codex feu corpus
' ^anonum , eft le nom que l'on donne à diffé-
rentes collections qui ont été faites des ca-
nons des apôtres & de ceux des conciles. Il
y a eu plufieurs de ces collections faites en
«ifférens temps. La première fut faite en
Orient ^ félon Uflerius , ce fut avant l'an
380, d'autres difent en 385 ^ les Grecs réu-
nirent les canons des conciles , & en firent
un code ou corps des loix eccléjiaftiques ,
que l'on appella le code des Grecs ou code
canonique de l'églife greque ou de l'églife
«l'Orient. Les Grecs y ajoutèrent enfuite les
canons des apôtres au nombre de cinquante ,
ceux du concile de Sardique tenu en 347 ,
ceux du concile d'Ephefe , qui eft le troi-
iieme concile général , tenu en 43 1 , & ceux
du quatrième concile général tenu à Chalcé-
doine en 451. Ce code fut approuvé par fix
cent trente évêques dans ce concile , & au-
torifé par Juftinien en fa novelle 131. Ce
Kode des Grecs étoit en fi grande vénération ,
que dans toutes les aflemblées , foit univer-
ièlles ou nationales , on mettoit ftir deux
pupitres l'évangile d'un côté , & le code ca-
nonique de l'autre. Pour ce qui eft de l'églife
romaine ou d'Occident , elle n'adopta pas
d'abord les canons de tous \ts conciles d'O-
rient inférés dans le code des Grecs : elle avoit
ion code particulier, appelle code de l'églife
romaine , qui étoit compofé des canons des
conciles d'Occident^ mais depuis les fré-
quentes relations que l'affaire des Pélagiens
occafîona entre l'églife de Rome & celle
d'Afrique, leglife de Rome*4î^nt connu
les canons des conciles d'Afrique , & en
ayant admiré la fageffe , elle les adopta. Le
pape Zozym.e , grec d'origine , fit traduire
les canons d'Ancyre , de Néocéfarée , & de
Gangres. On fè fèrvit quelque temps dans
l'églife d'Occident de cette traduction corî-
fiife de l'ancien code canonique des Grecs. On
y inféra dans, la fuite les décrets contre les
Pélagiens , ceux d'Innocent I , & de quel-
ques autres papes \ on y joignit encore de-
puis les canons de plufieurs conciles &: diffé-
rentes lettres des papes. Nous avons plufieurs
de ces anciens cadts des canons à l'ufàge à&i
C O D
églifes d'Occident , les uns imprimés, d'au-
tres manufcrits , lefquels différent peu cn-
tr'eux, & l'on ne fait pas précifément quel
étoit celui de l'églife romaine. Quoi qu'il en
foit , comme on trouva qu'il y avoit de la
confufion dans le code des canons dont on fè
fervoit à Rome , on engagea Denis , fîir-
nommé le Petit ou tAbbé , fur la fin du
cinquième fiecle , à en faire une compilation
plus méthodique , dans laquelle il inféra les
cinquante canons des apôtres reçus par l'é-
glife , & les canons des conciles , tant grecs
que latins , & quelques décrétales des papes
depuis Siricius jufqu'àHormifdas. Cette com-
pilation fut fi bien reçue , qu'on Tappella le
code des canons de l'églife romaine ou corps
des canons j il ne fut pas néanmoins d'abord
adopté dans toutes les églifes d'Occident,
En France on fè fervoit de l'ancienne col-
lection ou de quelqu'autre nouvelle que l'on
appelloit le code de? canons de l'églife galli-
cane , ce qui demeura dans cet état jufqu'à
ce que le pape Adrien ayant envoyé à Char-
lemagne le code compilé par Denis le Petit ,
il fut reçu dans tout le royaume. Cette col-
lection a été fuivie de plufieurs autres , &
notamment de celle du moine Gratian en
1151^ mais fbn ouvrage eft intitulé , concor-
dance des canons : on l'appelle cependant
quelquefois le code canonique de Gratian,
Le code des canons de l'églife d'Orient ayant
été reçu dans celle d'Occident , on l'a ap-
pelle code de téglife univerfelle. Dans tous
ces codes du droit canonique , on a fuivi à-
peu-près l'ordre & la méthode du droit civil.
yoyei le traité de tabus par Fevret , totne I ,
p. ^I't la préface des loix eccléfiafiiques de M.
de Héricourt^ & ci-devant Canon , & ci-
après Droit canonique.
Code Carolin , eft un règlement gé-
néral fait en 1752 par dom Carlos roi des
Deux-Siciles , pour l'abréviation des procès»
On affure qu'il eft dreffé fur le modèle du
code Frédéric. Nous ne pouvons quant à
préfènt en dire davantage de ce code Caro-
lin , ne l'ayant point encore vu. Voye:^^
Code Frédéric.
Code de Caflille , v. CoDE d'Arragon.
Code des chajfes , eft un traité du droit de
chaffe fiiivant la jurifprudence de l'ordon*
nance de Louis XIV , du mois d'août i66<^ ^
conférée avec les anciennes & nouvelles or-
C O D
• donnances , édits , déclarations , arrêts &
régleinens, & autres jugemens rendus iiir le
fait des chafTes. Cet ouvrage qui eft en deux
volumes /■/;- 12 , contient d'abord un traité du
droit de chalTe , enfuite une conférence du
titre 30 des chafî'es de l'ordonnance de 1669:
cette conférence eft divifée en autant de
chapitres que le titre des chafles contient
d'articles. On a rapporté fous chaque article
les autres ordonnances & réglemens qui y
ont rapport ^ on y a aufll joint des notes pour
faciliter l'intelligence du texte.
Code civil. On entend fous ce nom
l'ordonnance de 1667 , qui règle la procé-
dure civile ^ on l'appelle aufîi code Louis ,
parce qu'il fait partie du recueil des ordon-
nances de Louis XIV. F'oyei Code Louis
XIV, & Code Criminel.
Code des commenfaux , eft un volume
in-iz , contenant un recueil des ordonnan-
ces , édits & déclarations rendus en faveur
des officiers , domeftiques & commenfaux
de la maifon du roi , de la reine , des enfans
de France , &: des princes qui font fur l'état
de la maifon du roi. Ce recueil eft en deux
volumes in-iz.
Code des commktimus ; on entend fous ce
nom l'ordonnance de 1669 , concernant les
évocations & les committimus.
Code criminel ^ on entend fous ce nom
l'ordonnance de 1670 , qui règle la procé-
dure en matitre criminelle. Le co^f^ criminel
& le code civil font différentes portions du
code Louis ^ ou recueil des ordonnances de
LouisXIV. F. Code civil 6'CodeLouis.
Il y a aufli un code criminel de l'empereur
Charles - Quint , ou ordonnance appellée
vulgairement la Caroline.
Code des Curés , eft un recueil de maxi-
mes & de réglemens à l'ufàge des curés
par rapporta leurs fonctions, à celles de leurs
vicaires perpétuels ou amovibles , & autres
béaéfîciers ^ comme auflî pour ce qui con-
cerne leurs dîmes , portions congrues , &
autres droits & privilèges^ ceux des feigneurs
de paroiffes , & des officiers royaux , foit
commenfaux ou autres. Il eft préfèntement
divifé en deux volumes in-ïx , dont le pre-
mier contient d'abord un abrégé du traité
des dîmes , enfuite les réglemens interve-
nus for la même matière ;, on y a ajouté les
décilîons de Borjon <jui regardent les curés ;
C O D 3^3
le fécond volume contient les réglemens qui
établift!ènt les privilèges des curés.
Code des décisions pieuses & des
caufes jugées par Pierre de Broflês , eft un.
recueil de décifrons imprimé à Genève en
i(5i6, vol. />z-4°.
Code du droit des gens, codex Juris
gentium difplomaticus , eft un traité du droit
des gens, imprimé à Hanovre en 1693 , vol.
in- fol.
Code des Eaux et Forets ^ on entend
fous ce nom l'ordonnance de 1669 for le fait
des eaux & forêts. Voy. Code Louis XIV.
Code de téglife Gallicane ,\
Cade de téglife Greque , /
Code de téglife d Occident y\foy. ci- den
Code de téglife (f Orient , yCoDE canon.
Code de téglife Romaine A
Code de téglife Univerfelle ,j
Code des donations pieu fe s , qui eft im-
primé en latin fous le titre de codex donatio-
numpiarum, eft un recueil fait par Aubertle
Mire , de Bruxelles , de tous les teftamens ,
codicilles , lettres de fondation , donations ,
immunités , privilèges , & autres monumens
de libéralités pieufes faites par les papes ,
empereurs , rois , ducs & comtes , en faveur
de différentes églifes , & principale ment des
églifès de Flandre.
Code d'Evarix ou d'Euric , eft un corps
de loix qui fut rédigé fous Evarix roi des
Vifigoths , qui commença en 466 : ces loix
furent faites tant pour les Vifigoths qui occu-
poient l'Efpagne , que pour ceux qui s'étoient
établis dans la Gaule Narbonnoife & dans
l'Aquitaine. Alaric II , fils d'Evarix , fit un
autre code pour les Romains ou Gaulois ,
qu'il tira des loix romaines. Voye[ ci-devant
Code Alaric. Leuvigildc corrigea le çcde
Evarix , en fopprima quelques loix , & en
ajouta d'autres. Les rois fuivans eu firent de
même , & particulièrement Chindofuinde
qui fitdivifer ce code en douze livres , comme
celui de Juftinien , fans néanmoins qu'il y
ait aucun rapport entre ces deux codes pour
l'ordre des matières , & il ordonna que ce
recueil fèroit l'unique loi de tous ceux qui
étoient fujets des rois Goths , de quelque
nation qu'ils fuffenr: ce recueil s'appelloit
le livre de la loi gothique, Exgica qui régna
jufqu'en 701 , commit l'examen & la corr
re(âion des loix gothiques aux évêqugjs d'Ef-
Zz 2
3^4 C O D
pagne , mais à condition qu'ils ne déroge-
roient point aux loix établies par Chindo-
fuinde , & il le fit confirmer par les évêques
au fèizieme concile de Tolède , l'an 693.
Ce code d'Euric étoit encore obfervé dans la
Gaule Narbonnoife du temps du pape Jean
VIII , vers l'an 880 : on y voit les noms de
plufieurs rois '^ mais tous ibnt depuis Reca-
rede , qui fut le premier entre les rois Goths
catholiques. Les loix antérieures ibnt inti-
tulées antiques , ians qu'on y ait mis aucun
nom de rois, non pas même celui d'Erarix ^
ce qui fans doute a été fait en haine de
rarianifme dont ces rois faifoient profeiTion.
Voy. tkijl, du droit fran^ois de M. l'abbé
Fleury.
Code FaVRE , ou Fabre , ou Fabrien ,
(odex Fabrianus definitionum forcnfium in
fenatu Sabaudice traâarum , eft un traité fait
par Antoine Favre, connu fous le nom d'-^/z-
tonius Faber , contenant les définitions ou
décifions arrangées fiiivant l'ordre du code
de Juftinien. Il avoit été long- temps juge-
mage , c'eft-à-dire lieutenant civil & crimi-
nel de la Breffe & du Bugey. Après l'échange
<le ces provinces , le duc de Savoie le fit
préfident du confèil genevois , enliiite pre-
mier préfident du fénat de Chambéri. Il a
fait en tr 'au très ouvrages fon co^e , qui forme
wn volume in- fol, dans lequel il traite plu-
îîeurs matières qui font en ufàge dans la
Brelîè , telles que l'augment de dot , \qs ba-
gues & joyaux , & les droits feigneuriaux.
yoyei la préface de M. Bretpnnier , de fan
recueil alphabétique de quefions , à l'article
du parlement de Dijon.
Code Frédéric , eft un cori>s de droit
compofé par ordre de Charles Frédéric , au-
jourd'hui roi de Pruffe, électeur de Brande-
bourg , pour fervir de principale loi dans
tous fes états.
Ce qui a porté ce prince à faire cette loi
nouvelle , eft l'incertitude & la confiifion du
droit que l'on fuit dans l'Allemagne en géné-
ral, & en particulier de celui que l'oafuivoit
dans les états de Pruffe.,
Jufqu'au treizième fiede , chaque peuple
d'Allemagne avoit fes lo^ propres , qui ont
été recueillies par Lindenbrog , Goldaft ,
Baluze , &c. mais elles étoient fort concifes ,
êc ne décidoient qu'un petit nombre de cas.
lie droit romain fut introduit en Allema-
COD
gne vers la fin du treizième fiecle , & au com*
mencement du quatorzième.
On reçut aufli dans le treizième fiecle les
décrets de Grégoire IX ^appelles aujourd'hui
le droit canon.
L'Allemagne eut donc depuis ce temps
trois fortes de loix , qui s'obfervoient con-
curremment j & dans certains cas on étoit
en doute lequel devoit prévaloir du droit
allemand , du droit romain , ou du droit
canon.
Toutes ces différentes loix ne décident la
plupart que des cas particuliers , au lieu qu'il
auroit fallu les réduire en forme de iyftême y.
fuivant les divers objets du droit , comme
Juftinien a fait dans fes injiitutes.
Ces inconvéniens engagèrent l'empereur
Frédéric III , en 144 1 , à abréger en quel-
que forte le droit romain en Allemagne par
la réfolution de l'Empire ^ & pour cet eifet
il ne permit qu'à certains doéîeurs de don-
ner des réponfes iur le drsit , leur ordonnant
aufiî de rendre leurs réponfes conformes aux:
loix reçues & approuvées. Il défendit à tous
autres doâieurs de prendre féance dans les
jullices , & de donner des inftruéiions aux
parties j & il fupprima tous les avocats.
Cette réfolution de l'empire ne mit guère
plus de certitude dans la jurifprudence d'Al-
lemagne i & Maximilien fils de Frédéric y.
en établilTant la chambre de juftice de l'Em-
pire , y introduifit eu même temps le droit
romani , & voulut qu'il fût encore obfervé
comme un droit impérial & commun : ce
qui fut réfolu dans les diètes de, l'Empire des
années 1495 Se 1500,
L'étude des loix eft encore devenue plu*
difficile par la multimde de commentateurs;
qui ont paru en Italie , en France , en Ef-
pagne , & fur-tout en Allemagne ^ au lieu
de s'attacher à la loi, on fuivit l'opinion
commune des dodeurs , chacun prétendit
avoir pour foi l'opinion commune ^ & l'a-
bus alla fi loin , que dès qu'un avocat pou-
voit rapporter en fa faveur l'opinion de quel-
que doâ:eur , ni lui ni fa partie ne pouvoient
être condamnés aux dépens*.
Jel eft encore l'état de la jurisprudence;
dans la plus grande partie de l'Allemagne.
Plufieurs iàvans ont fait des vœux pour-
la réformation de la juftice dans l'Allema'-
gne j quelques-uns, ont donné des projets^
C O D
d'un nouveau code ; les empereurs mêmes
ont propofé pluiîeurs fois dans les dictes la
réfiormation de la juftice : mais toutes les
délibérations qui ont été faites , n'ont abouti
qu'à mieux régler la procédure , & l'on n'a
point formé de corps de droit général &;
certain.
Quelques états de l'empire ont à la vérité
fait dreiler des corps de droit , entre lef-
quels ceux de Saxe , de Magdebourg , de
Lunebourg , de PrufTe , du Palatinat , & de
Wirtemberg, méritent des éloges ^ mais au-
cun de ces codes n'cft univerfël , & ne ren-
ferme toutes les matières de droit : ils ne
font point réduits en forme de fyftême , ils
ne contiennent point de principes généraux
fiir chaque matière , la plupart ne règlent
que la procédure & quelques cas douteux j
c'eft pourquoi on y laiffe fubfifter le recours
aux ïoix romaines.
La juriiprudence n'étoit pas moins incer-
taine dans les états du roi de Pruffe, avant la
publication du nouveau code dont il s'agit ici.
Outre le droit romain qu'on y avoit reçu ,
le droit canon y avoit aufTi une grande au-
torité avant que les états de Pruffe fè fîii-
fcnt féparés de communion d'avec l'églifè
romaine j les dofèeurs mêloient encore à ces
loix un prétendu droit allemand qui n'é-
toit qu'imaginaire, puifqu'on ne fait rien de
certain de fon origine , & que la plupart de
ces loix germaniques ne convenant plus à
rétat préfent du gouv^ernemcnt y font de-
puis long-temps hors d'ufage.
La confufîon étoit encore plus grande
dans quelques provinces , par l'introduâion
du droit mxon qui diffère en bien des cas
du droit commun , & que l'on fiiivoit prin-
cipalement pour la procédure.
Chaque province & prefque chaque ville
alléguoit des ftatuts particuliers , inconnus
pour la plupart aux habitans.
Le grand nombre d'édits particuliers , fou-
vent contradiâoires entre eux , augmen-
toient encore l'incertitude de la jurispru-
dence & la difficulté de l'étudier.
Il s'étoit auffi introduit dans chaque pro-
vince un ftyle particulier de procéder ^ &
cette diveriité de ftyles donnoit lieu à tant
d'incidens , qu'on étoit obligé d'évoquer au
confeil la plupart des affaires.
Pour remédier à tous ces inconvénient ,.
C O D 3<r5
le roi de Prufîè à préfent régnant, fit lui-
m.ême un pian de réformation de la juftirce.
Ce plan contenoit en fùbftancc , que
l'homme eff né pour la fociété j, ce n'eft
que paï-là qu'il diffère des animaux ^ la fo-
ciété ne fauroit fe maintenir ou du moins
ne peut procurer à l'homme les avantages
qui lui conviennent , fi l'ordre n'y règne j
c'eft ce qui dilHngue les nattions policées
des (àuvages : les fociétés les mieux établies
font expofées à trois fortes de troubles , les
procès , les crimes , oc les guerres ^ les guer-
res ont leurs loix dans le droit des gens ,
les crimes & les procès font l'objet des loix
civiles : mais les procès feuls ont été l'objet
de cette réformation.
Les procès peuvent être terminés par trois
voies , l'accommodement volontaire , l'ar-
bitrage , & la procédure judiciaire ^ les deux
premières voies étant rarement fuffifantes y
il faut desvtribunaux bien réglés , & un or-
dre Judiciaire.
C'eft dans cet ordre qu'il s'eft gliffé plu-
fieurs abus , auxquels il s'agit de remédier.
Abolir totalement les procès , c'eft choie
impofilble 3 mais il faut rendre la loi cer-
taine & la procédure uniforme , & abréger
les procès de manière que tous foient ter-
minés par trois inftances ou degrés de ju-
rifHiâ:ion , dans l'efpace d'une année.
Le roi de Pruffe ayant communiqué ce
plan à fbn grand-chancelier , lui ordonna
d'en commencer l'effai dans la Poméranie ^
où les procès font les plus fréquens.
L'exécution ayant parfaitement répondu
aux efpérances , le roi ordonna à fon grand-
chancelier de drefler un ample projet d'or-
donnances , & de le faire pratiquer provi-
fîonnellem«nt dans tous fès états & par tous
les tribunaux , leur enjoignant de faire en-
fuite leurs objfervations & leurs remontran-
ces ftir les difficultés qui pourroient fe ren-
contrer dans l'exécution de ce plan , afin
qu'il y fût pourvu avant de mettre la der-
nière main à cette ordonnance. C'eft ce qui
a été exécuté quelque temps après par la ré-
duction du code Frédéric.
Il été publié en langue allemande , afin,
que chacun pût entendre la loi qu'il dort
fuivre. M. A. A. de C. confêiller privé du
roi, a traduit ce code en françois le plus lit-
téralement qu'il étoit poflîble*
3^^ C O D
Suivant cette traduûion , l'ouvrage eft
intitulé code Frédéric ou corps de droit pour
les états de fa majeilé le roi de Pruffe. La
fuite du titre annonce que ce code eft fondé
fur la raifon & les couftitutions du pays ;,
qu'on y a difpofé le droit romain dans un
ordre naturel, retranché les loix étrangè-
res , aboli les fubtilités du droit roinain , &
pleinement éclairci les doutes & les diffi-
cultés que le même droit &. fes commen-
tateurs avoient introduits dans la procédure :
enfin que ce code établit un droit certain &
univerfel. On verra cependant qu'il y a en-
core plufieurs loix différentes admites dans
certains cas. Ce code ne comprend que les
loix civiles qui ont rapport au droit des par-
ticuliers ^ ce qui concerne la police , les af-
faires militaires , & autres , n'entre point
dans ce plan.
L'ouvrage eft divifé en trois parties , fui-
vant les trois objets différens du droit , dif-
tingués par Juftinien dans fes inftitutions ;
favoir l'état des perfonnes , le droit des cho-
£es , & les obligations des perfonnes d'où
naiflent les aérions.
Chaque partie eft divifée en plufieurs li-
vres , chaque li^'re en plufieurs titres , cha-
que titre en paragraphes ^ & lorfque la ma-
tière d'un titre eft fufceptible de plufieurs
fubdivifions , le titre eft divifé en plufieurs
articles , & les articles en paragraphes.
Le premier titre de chaque livre eft def-
tiné uniquement à annoncer l'objet de ce li-
\Te & la divifion des titres. On a confervé
dans les rubriques & en plufieurs endroits
de l'ouvrage , les noms latins des adions &
autres termes confacrés en droit , auxquels
les officiers de juftice font accoutumés , &
qui ne pouvoient être rendus avec précifîon
dans la langue allemande.
On remarque auffi en beaucoup d'en-
droits de ce code , qu'il ne contient pas fim-
plement des difpofitions nouvelles , mais
qu'il rappelle d'abord ce qui fe pratiquoit
anciennement , & les motifs pour lefquels
la loi a été changée ^ & que le légiflateur
pour rendre fa difpofition plus intelligible ,
emploie quelquefois des comparaifons &
des exemples.
Le titre fécond du premier livre ordonne
que le code Frédéric fera à l'avenir la prin-
cipale loi des états du roi de Prufl?.
C O D
Pour cet effet , il eft défendu aux avocats
de citer à l'avenir l'autorité du droit romain
ou de quelque dofteur que ce foit , & aux
juges d'y avoir égard , abrogeant tous au-
tres droits , couftitutions , & édits diftërens
ou contraires au code Frédéric.
L'éditeur de la traduction de ce code dit
néanmoins dans fa préface , que l'intention
du roi de Pruflè n'a pas été d'empêcher que
l'on ne donnât à l'avenir dans les univerfi-
tés àes leçons fur le droit romain -^ parce
que connoiflant ion autorité par rapport aux
affaires qu'il peut avoir à démêler dans l'em-
pire avec ks voifins , & qu'il doit pourfui-
vre dans les tribunaux de l'empire , il eft
convenable que la fcience de ce droit foit
cultivée, & auffi pour les étrangers qui vien-
nent l'apprendre dans les univerfités.
Le roi de Pruife déclare qu'aucune cou-
tume contraire ne pourra prévaloir fiir fon
code , quand même elle feroit approuvée
par des arrêts qui auroient acquis force de
chofe jugée.
Il défend aux juges d'interpréter la loi
fous prétexte d'en prendre l'eiprit ou des
motifs d'équité ^ mais il veut qu'ils puiflent
l'appliquer & l'étendre à tous les cas fem-
blables qui n'auroient pas été prévus.
Quand quelque point de droit paroîtra
douteux aux juges & avoir befoin d'éclair-
ciflement , il leur eft ordonné de s'adrelfer
au département des affaires de la juftice,
pour donner les éclairciffemens & les fiip-
plémens néceffaires j & il eft dit que ces dé-
cifions feront imprimées tous les ans : mais
les parties ne pourront s'adrelfer direéle-
ment au prince pour demander l'interpréta'
tioH d'une loi j la requête fera renvoyée au
juge , avec un refcrit pour l'adminiftration
de la juftice.
Il eft défendu aux tribunaux de faire au^
cune attention aux reicrits qui feront mani-
feftement contraires à la teneur de ce corps
de droit , lefquels n'auront pas force de loi j
car le roi déclare qu'en les donnant , fon
intention fera toujours de les rendre confoir-
mes à fbn code.
Quant aux ordres émanés du cabinet du
, fi les tribunaux les croient contraires
roi
au code , ils feront leurs rcpréfentatious &:
demanderont de nouveaux ordres , lefquel§
fçrpftt pjtécutésy
C O D
Il eft auflî défendu de faire des com-
mentaires ou dilFertations fur tout le corps
de droit , ou fur quelqu'une de fes parties.
Le code Frédéric ne pourra fervir pour la
décifîon des cas arrivés avant fa publica-
tion , fi ce n'eft qu'il puilîé éclaircir quelque
loi douteufè.
Comme les fujets du roi de Prufle qui font
profeflion de la religion catholique , doi-
vent en vertu de la paix de Weftphalie être
jugés félon leurs principes en matière de foi ,
le roi confèrve au droit canon force de loi.,
en tant qu'il eft néceflàire pour cet effet ^
mais il l'abroge dans toutes les affaires ci-
viles , & n'en excepte que ce qui concerne
\qs offices & dignités dans les chapitres ^
comme auffî les droits qui en dépendent ,
& ce qui regarde les dîmes : le tout ièra
décidé fuivant le droit canon , même entre
les fujets du roi qui font proteftans.
Les caufes féodales feront jugées félon le
droit féodal , jufqu'à ce que le roi ait fait
compofer & publier un droit féodal par-
ticulier.
Les conftitutions particulières qui feront
données pour décider les cas non prévus
dans le code , auront force de loi deux mois
après leur publication.
A l'égard des ftatuts oh privilèges parti-
culiers des provinces , villes , communau-
tés , ou de quelques particuliers , ceux qui
voudront les conferver , les rapporteront dans
l'efpace d'une année , le roi fe réfervant de
\qs approuver fuivant l'exigence des cas , &
de faire imprimer & joindre à fon code un
appendice qui contiendra les droits particu-
liers de chaque province.
Il invite néanmoins les provinces à con-
courir de leur part à rendre le droit unifor-
me, & à fe foumettre fur-tout à l'ordre de
fùcceffîon établi dans fon code , & à renon-
cer pour l'avenir à la communauté de biens ,
qu'il regarde comme une fource de procès.
Outre les loix dont il vient d'être fait
mention , il dit qu'une coutume raifonnable
& bien établie par un ufage confiant, aura
force de loi , pourvu qu'elle ne foit pas con-
traire à la conftitution de l'état ou au code
Frédéric.
Enfin le roi déclare que dans les procès
où il fera intérefle , s'il y a du doute , il
aime mieux fouffrir quelque perte qae de fa-
C O D 3^7
tiguer fes fujets par des procès onéreux.
Les autres titres de ce m.ême livre traitent
de l'état des perfonues , qui font d'abord
diftinguées en mâles , femelles , & herma-
phrodites j les perfonnes de cette dernière
eipece dans lefquçllcs aucun des deux fexes
ne prévaut , peuvent choifir celui que bon
leur fembîe : mais leur choix étant fait , elles
ne peuvent varier. Ainfi un hermaphrodite
qui a époufé un homme , ne peut plus
époufer une femme.
On voit dans le titre cinq , qu'il n'y a
point d'efelaves , proprement dits , dans les
états du roi de Prufiè , mais feulement dans
quelques provinces , des ferfs attachés à cer-"^
taines terres , à-peu-près comme nous en
avons en France.
Le titre fix concerne l'état de citoyen 5
mais l'éditeur avertit à la fin de fa préface ,
que cette matière n'a pu pour cette fois être
traitée avec l'étendue requife , parce qu'on
travaille aftuellement à un règlement qui
doit déterminer jufqu'où les affaires des villes
appartiendront à la connoiiTance du dépar-
tement de la juftice ^ & il annonce que cet
état fera réglé plus amplement , loriqu'on
fera la révifion de ce nouveau code.
Entre les devoirs réciproques du mari &
de la femme , il eft dit que fi la femme eft
en la puilfance de fon mari , que fi elle s'ou-
blie , il peut la ramener à fon devoir d'une
manière raifonnable ; qu'elle ne doit point
abandonner fon mari ; que le mari ne peut
pas non plus fe féparer d'elle fans des raifons
importantes -, &: qu'il ne peut , fans com-
mettre adultère , avoir commerce avec une
autre.
Les bâtards fimples peuvent être légitimés
par mariage fubféquent , ou par lettres du
prince feulement *, le droit d'accorder de tel-
les lettres eft ôté aux comtes appellés/>a/û///zj.
Les adoptions font admifes par ce nouveau
code , à-pefj-près comme elles avoieut lieu
chez les Romains.
On y règle auffî les effets de la puifl!ance
paternelle. Il eft permis au père de châtier
fes enfans modérément , même de les enfer-
mer dans Ça. maifon ; mais non pas de les
battre jufqu'à les faire tomber malades , ni
de les faire enfermer dans une maifon de
corredion , fans que la juftice eu ait pris
couttoifïâflce.
3^8 C O D
Par rapport aux mariages , ils doivent être
précédés de trois annonces ou bancs pendant
trois dimanches confécutifs. Le roi feui
pourra difpenfèr des trois annonces , ou
même de deux : mais les confiftoires pourront
difpenfèr d'une ^ & ie roi confirme VuCage
obiervé à l'égard des annonces des nobles ,
de les faire publier fans qu'ils y foient nom-
més On ne conçoit pas quelle publicité
cela peut donner à leurs mariages.
Entre les caufes pour lefquelles un m.ariage
légitime peut être diflbus , il eft permis aux
conjoints de le faire d'un mutuel confente-
ment , après néanmoins qu'on aura elTayé
pendant un an de les réunir.
Un des conjoints peut demander la dilTo-
lution du mariage , pour cauiè d'adultère
commis par l'autre conjoint.
Il fuffit même au mari que fa femme ait
un commerce fiifpect avec des hommes ,
comme fi elle leur écrit des billets doux, &c.
Ces galanteries ne font pas punies par-tout
il févérement.
Le mariage eft encore dilTous , lorfqu'un
des époux abandonne l'autre malicieufe-
ment , ou lorfque l'un des deux conçoit
contre l'autre une inimitié irréconciliable ,
ou contraéfe le mal vénérien , &c. ou lori-
qu'il devient furieux ou imbécille ^ & de-
meure en cet état.
V article 3 du titre iij , livre II , diftingue
deux fortes de concubinages : le premier ,
qu'on appelle mariage à la morganatique ou
de la main gauche , lequel n'eft pas permis
félon les loix \ le prince fe réfen'e néanmoins
la faculté de le permettre aux gens de qua-
lité ou de condition éminente , lorlqu'ils ne
veulent pas s'engager dans un fécond ma-
riage 5 & que néanmoins ils n'ont pas le don
de contiaeiice \ l'autre forte de concubinage ,
qui n'eft point accompagné de la bénédiâiion
nuptiale, eft abfolument défendu comme
par le palTé.
Les titres fliivans règlent ce qui concerne
la dot , les paraphernaux , les biens de la
femme appelles res receptitiœ , la donation à
caufe de noces , le douaire y dotalitium , ac-
cordé aux veuves parmi la nobleffe, le
préibnt appelle morgengabe , que le mari fait
à fa femme le lendemain des noces , la fuc-
ceflion réciproque du mari & de la femme
lorfque cela eft ftipulé dans le coatrat , & la
C O D
» portion sç^t'Aèt Jiatutaire , que le iiirvivant
gagne en quelques provinces , & qui eft d*
la moitié des biens du prédécédé.
Le furplus de cette première partie eft
employé à régler les tutelles.
La ièconde partie eft divifée en huit livres,
qui forment deux volumes : cette partie
traite du droit réel que les perfonnes ont fur
les choies , de la diftindion des biens , des
différentes manières de les acquérir & de \q$
perdre^ ce qui embrafîë les prefcript ions ,
les fervitudes , ks gages &. hypothèques ,
les fuccelîions , les teliamens ik. codicdles :
tout y eft alTez conforme au droit romain ,
excepté que l'on en a retranciié beaucoup
de chofes qui ne conviennent plus au temps
ni au lieu j & pour les teftamens , il eft or-
donné qu'à l'avenir ils ne pourront être faits
qu'en juftice en préfence de trois officiers de
la jurifdidion : l'ufage des teftamens devant
notaires & témoins elè aboli.
La troiiieme partie , dont la traduéiion
ne paroît pas encore en France , eft celle qui
traite des obligations de la perlbnne &dela
procédure.
C'eft dans cette dernière partie que le roi
s'attache principalement à réformer l'ordre
judiciaire.
Il diftingue trois degrés de jurifdiéèion j
favoir , les juftices inférieures , les juftices
iiipérieures où relfortit l'appel des premiè-
res , & les tribunaux où reiibrtit l'appel des
juftices fupérieures.
Il règle de quels officiers chaque ^icgc
doit être compofé , & le devoir de chaque
officier en particulier.
Les rapports doivent être expédiés en huit
ou quinze jours , à moins qu'il n'y ait une
néceffitéindifpenfàble de prolonger ce délai.
Tout procès doit être terminé en trois inf-
tances ou degrés de jurifdiâion dans i'efpace
d'une année.
Les avocats qui n'ont ni les fentimens
d'honneur ni les talens que demande leur
profeffion , doivent être caftes \ le nombre
en doit être fixé à l'avenir dans chaque tri-
bunal j les candidats feront examinés à fond
ftir le droit & les ordonnances ^ l'honoraire
des avocats fera fixé par le jugement feloii
leur travail , & ils ne pourront rien prendre
des parties que le procès ne foit terminé j
leur minifterc ne fera employé que dans les
grandes
c o b
grandes villes ocdms des tribunaux ccnCtàé-
rablss , dc à Tavenir ils font féuls chargés de
faire les procédures qui font fort fimplifiées,
ôc le miniftcre des procureurs eft iupprimc.
Tel eft en fubftance le fyftême de ce nou-
veau code y par lequel on peut juger de la
forme du gouvernement & des mœurs du
pays par rapport à l'adminiftration de la j u£~
tice ; il feroit à fouhaiter que Ton fit la même
chofe dans les autres états où les loix ne font
point réduites en un corps de droit.
Code des Gabelles , eft Un titre que
Ton met quelquefois à l'ordonnance de
Louis XIV , du mois de mai 1680, fur le
fait des aides & gabelles. Fbje:^ ce qui eft
dit ci-de(lUsrt« /norCoDE des Aides , & ci-
après Gabelles , Ordonnance des Ga-
belles.
Code Gillet ou code des procureurs , eft
un recueil d edits & déclarations, arrêts Se
réglemens concernant les fonâiions des pro-
cureurs , tiers référendaires du parlement de
Paris : le véritable titre de ce recueil eft ar-
rêts & réglemens concernant les fcnclicns des
procureurs y &c. ce n'eft quedansTufagc vul-
gaire qu*on lui a donné les furnoms de code
Gillet ou code des procureurs ; 8c quoiq ue le
titre n'annonce d'abord que des arrêts 5c
réglemens , il contient cependant au ili pîu-
fieurs édits & déclarations, & plufieurs dé-
libérations de la corïmaunâuté des avocats
ôc procureurs ; le tout eft accompagné de
différentes inftrudtions conformes à Tordre
judiciaire. Ce recueil a été (urnommé le
code Gillet , du nom de M« Pierre Gillet ,
l'un des procureurs de communauté qui en
fut Tauteur Se le donna au public en 1 7 1 4 :
on en a fiit une nouvelle édition en 1 7 1 7 ,
qui a été augmentée. Ce recueil eft divifé eh
trois parties : la première contient les édits
6c déclarations concernant' la création des
procureurs au parlement; la féconde partie
traite du devoir &c des qualités néceftairesau
procureur pour bien exercer fa profefTion ,
dont Pauteur du code Gillet donnoit l'exem-
ple au iTi bien que les t)réceptes; il y traire
auffi très-fommairemenr de la communauté
des avocats & procureurs par rapport à l'o-
bligation & à l'utilité qu'il y a pour les pro-
cureurs de s'y trouver : mais il n'a point ex-
pliqué aflèz amplement ce que l'on entend
par cette communauté des avocats ôc procu-
Tome FUI,
C 0 t) 5^^
feurs ; on pourra le voir ci-àprês au mot
Communauté : la "troineme partie eft di-
vifée en plufieurs titres; favoir jdela décharge
des pièces , procès Ôc inftances , ôc du temps
pendant lequel on peut les demander , du
défaveu , de la confîgnation que les procu-
reurs doivent faire des amendes , de la poftu-
lation , des frais ôc falaires des procureurs ,
de la fonction ôc inftru<£tion des ticrs-taxa-
teurs de dépens. Ce recueil, quoique fait
principalement pourTufage des procureurs,
peut auiïî fervir à tous ceux qui concou-
rent à l'adminiftration de la juftice : mais il
y auroit beaucoup de nouveaux réglemens à
y ajouter, qui font furvenus depuis le décès
de Tauteur.
Code des Grecs , v. Code canonique.
Code Grégorien, codejc Gregorianus,
eft une compilation des conftitutions des
empereurs romains, depuis ôc compris Tem-
pire d" Adrien juiques Se compris celui de
Dioclétien Ôc de Maximien. Ce code eft fur-
nommé Grégorien du nom de celui qui a
fait cczzs compilation. On tient communé-
ment qu'elle a précédé une autre coUedion
des mêmes conftîtucions, connue fous le titre
de code hermogênieny dont nous parlerons ci-
après ; cependant Pancirole en (on traité de
clar. kg. interpret. cap. txv & fxvj , croit au,
contraire que le code Grégorien a été rédigé
depuis le code hermogênien. Il prétend que \é
code Grégorien fut Compilé par Grégorius ,
préfet, de TËfpagne ôc proconful d* Afrique
fous les empereurs Valens Ôc Gratien qui ont
régné depuis Conftantin-le- grand : la loi i $'
au code Théodofien , depijlorihus^ fait men-
tion de ce Grégorius. Jacques Codefroi eu
fes prolégomènes du coJeThéodofien , attri-
bue la compilatioji du code Grégorien, à un
autre Grégorius qui fut préfet du, prétoire
fous l'empire de Conftantin. Il eft parlé de
ce Grégorius dans pluiîeurs loix du code
Théodofien , ôc il eft encore douteux lequel
de ces deux Grégorius a compilé le code
Grégorien. Qiielqaes auteurs, (Scnotammcnç
celui de la conférence des loix inoiaïques6c
romaines qui vivoit peu de temps après , le
nomme io\i]OW[s Qregcrianus , ce qui fait
croire que c'étoit fon véritable nom , ôc non
pas Grégorius, Quant au temps où il a vécu ,
il paroit quec'eft fous Conftantin , fa com-
pilation finrftaiit aux coilfticutions de Dio-
Aaa
370 ^ ^ ^ , ,
clctien & de Maximien , qui ont régné avant
Gonftantin , lequel pofTédoit déjà une partie
de Tempire avant Maximien. Grégorien
ayant fait de Ton chef cette compilation , il
ne paroit pas qu'elle ait eu par elle -même
aucune autorité fous Conftantin ni lous Tes
fucceiTèurs , non plus que le code hermcgé-
nien; Juftinien cite , à la vérité , ces deux
codes au comm.encem.ent , ^ les fait aller
de pair avec le code Théodcfien , en parlant
du grand nombre de conftitutions que ces
trois codes contenoient : mais tout ce que
Ton peut induire de là par rapport aux codes
Grégorien & Hermogénien , eft que l'on con-
fultoit ces colledlions comme une indruétion
tz comme un recueil contenant des confti-
tutions qui avoient force de loi. M. Terraf-
ion , en ion h,J}. de la jurifprud, romaine ,
penfe que probablement on ne voulut pas
revêtir ces deux codes de Tau torité publique
à caufeque leurs auteurs étoient païens,
comme il paroit en ce qu'ils ont alfedé de
j:e rapporter que les conftitutions des em-
pereurs païens. On croit cependant que Jufti-
jnien n'a pas laiflé de fe fervir de ces deux
codes pour former le fîen ; on fonde cette
conjeÂure fur ce qu'il fe trouve dans fon
code des conftitutions qui n'étoicnt point
dans celui de l'empereur ThéodoTe , parce
qu'elles font plus anciennes , & qu'elles ont
probablement été tirées des deux codes Gré-
gorien 8c Hermogénien.
Après que Juftinien eut tiré de ces deux
codes ce qu'il crut nécellaire , on les négli -
gea tellement qu''ils ont été perdus, à Pex-
ception de quelques fragmens qu'Anien,
jurifconfuke d'Alaric , nous en a confervé
depuis ; Jacques Sichard les a compris dans
ion édition du code Thécdcficn , imprimé à
Bâle en 1518 j Grégorius, Tholofanus &
Cujas les ont enfuite donnés avec des cor-
redlicnsj enfin Antoine Schulting en ^ donné
une édition plus complète avec des notes ,
dans fon ouvrage intitulé jurifpriidentia
veius ante-jujîinianea , imprimé à Leyde en
l'année 1717. Voye'^lajurifprudence romaine
de M. Terra flbn, page z8^ , Se ci -après
Code Hermogénien & Gode Justinien.
Code Henri ou code d'Henri III, eft une
compilation faite par ordre d'Henri lil,
des ordonnances des rois fes prédécefteurs
^ dçs iiemies. Ce prince crut qu'il étoit à
C O D
propos , pour le bien de fon royaume , de
faire , à l'imitation de Juftinien , un abrégé
de toutes les ordonnances. Il annonça ce
def!èin dans l'ordonnance de Elois, faite tn
^579 i ^ regiftrée en ifSo, dont l'article
207 porte quil avoit avifé de commettre
certains perfonnages pour recueillir ôz arrêter
les ordonnances , de réduire par ordre , tn
un volume, celles qui fe trou veroicnt utiles
ôc néceflaires , & aufïî pour rédiger les
coutumes de chaque province.
Il chargea de la compilation des ordon-
nances Barnabe Crifton , lequel avoit d'a-
bord paru avec éclat au bureau du parle-
ment de Paris. Henri ÏII charmé de (on éru-
dition &: de fon éloquence , le fit fon avocat-
général , puis confeilk r d'état , de enfin pré-
fidcnt à mortier en ij-So. Il s'en fervit en
différentes négociations, &: l'envoya am-
baflàdeur en Angleterre. Ce fut au retour
de cette am^baftade qu'il fut chargé de tra-
vailler au code Henri , ce qu'il exécuta avec
beaucoup de foin & de diligence. Il mit au
jour cet ouvrage fous le titre de code Henri
ôc dehafJiques, ôc comptoit le faire autorifer
ôc publier en 1585; en effet, comme il
avoit obiervé de marquer en marge de cha-
que difpofition d'ordonnance le nom du
prince dont elle étoit émanée , &. la date de
l'année 8c du mois , lorf qu'il a ajouté de
nouvelles difpofitions , il les a toutes mar-
quées fous le nom d'Henri III , 25% , fans
date de miois j c'eft à quoi l'on doit faire at-
tention, pour ne pas confondre les vérita-
bles ordonnances qu'il a rapportées , avec les
articles qui ne font q uc de iimples projets de
loix. Loyfeau & Carondas ont dit de lui
qu'il tribonianifoit , parce qu'à l'exemple de
Tribonien il avoit ajouté dans fa com.piîa-
tion de nouvelles difpofitions pour fuppléer
à ce quin'étoit pas prévu dans les anciennes
ordonnances.
M. de Lauriere , en fa préface du recueil
des ordonnances de la troijïeme race , dit que
M. ErifTon fit imprimer fon ouvr:?ge en
1587 , fous le titre à.t k JiUques 8c de code
Henri.
Dès que cet ouvrage parut, Henri III en
fit envoyer des exemplaires à tous les parle-
mens pour l'examiner , l'augmenter ou le
diminuer comme il leur pr.roitroit ccn^ e-
nable, fcn intention étant de lui dci;ncr
CDD
force de loi , après qu'il aaroit été revu èc '
corrigé fur les obfervations des parlemens ;
mais rexécution de ce projet fut arrêtée par
les guerres civiles qui défolerent Pétat , par
la mort fuiiefte d'Henri III , arrivée le i août
1589 , & parla fin tragique du préfident,
indigne d'un homme de (i grande confidé-
ration & de Ton mérite. Ce magiftrat ayant
été choifî par la ligue pour occuper la place
du premier préfîdent de Harlay, quiétoit
alors prifonnier à la Baftille , fut arrêté le i y
novembre 1591 par la fadiou des feize, ik
conduit au petit châtelet , où il fut pendu à
une poutre de la chambre du confeil , non-
obftant toutes les prières qu'il fit que l'on
l'enfermât entre quatre murailles , afin qu'il
pût achever l'ouvrage qu'il avoir commencé,
dont le public dévoie recevoir de grands
avantages. Cette circonftance eft rapportée '
par Simon en fa bibliothèque , hijl. des auteurs
de droit.
Quelque temps après la mort de l'auteur ,
M. le chancelier de Chiverny (décédé en
1599) engagea Carondas à revoir le code
Henri & aie perfeârionner, & Carondas en
donna deux éditions : la première en 1 60 1 ,
qu'il dédia au roi Henri IV ; & dans l'épître
dédicatoire , il parle du code Henri comme
d'un ouvrage que le préfident Briflon fepro-
pofoit de mettre au jour. Il dit que M. le
chancelier de Chiverny lui avoir commandé,
pour le roi , de revoir ce code , & d'y em-
ployer le fruit de Tes études ; qu'il y avoit
ajouté plufieurs ordonnances mémorables
des anciens , & les édits & conftitutions
d'Henri IV ; il y joignit aufîi , par forme
de notes , une conférence des ordonnances,
des anciens codes de Théodofe &: de Jufti-
nien, & des bafiliquesdesloix des Vifigoths,
des conciles , des arrêts , & de plufieurs an-
tiquités & faits hiftoriques. •
La féconde édition fut donnée par Caron-
das en 1605 , & augmentée de plufieurs
édits &c ordonnances , & notes qui man-
quoient dans la précédente.
Nicolas Frérot , avocat au parlement , en
donna en 161 5 une édition fur les manuf-
crits même du préfident BrilTon, & y joignit
aulTi de nouvelles notes.
Louis Vrevin donna en iCij un volume
//2-8°. intitulé obfervations fur le code Henri.
En 16 XI p:rut une quatrième édition de
C O D 371
ce code , augmentée par Jean Tourner & par
Michel de la Rochemaillet.
Ce code ell divifé en vingt livres , &: ciia-
que livre en plufieurs titres qui embraflènt
toutes les matières du droit.
Le premier livre traire de l'état eccléfiaf-
tique & des matières bénéficiales : le fécond
traire des parlemens , de leurs officiers , &
des procédures qui s'y obferventde troifieme
des juges ordinaires Se autres miniftres de
juftice: le quatrième, des préfidiaux : le
cinquieme,de la procédure civilede fixieme,
de diverfes matières décidées par les ordon-
narxces , telles que les dots , mariages , dona-
tions, teftamens, fubftitutions, fuccellions,
delà nobîeife, des rentes conftituées, des
fervitudes , retrait lignager , de robligatioii
de déclarer dans les contrats de quel feigneur
relèvent les héritages , de l'exécution des
oiïligations & cédules , des tranfports , des
mineurs , tuteurs , curateurs , des refcifions,
répits , péremptions ; que tous ades de juf-
tice feront en langue vulgaire, & que l'année
fera comptée du premier janvier : le fep-
tieme livre traite des procès criminels : le
huitième , des crimes & de leur punition : le
neuvième , traite de l'exécution des juge-
mens , & des moyens de fe pourvoir contre:
le dixième , de la police : le onzième , des
univerfités&de leurs fuppôts : le douzième,
de la chambre des comptes : le treizième ,
de la cour des aides & des officiers qui lui
font fournis : le quatorzième , des traites ,
impofitions foraines & douanes : le quin-
zième , des monnoies & de leurs officiers :
le feizieme , des eaux & forêts &: de leurs
officiers : le dix-feptieme , du domaine &
droits de la couronne : le dix-huitieme , du
roi èc de fa cour , le dix-neuvieme , des
chancelleries de France : le vingtième , des
états, offices, & autres charges militaires,
& de la police des gens de guerre.
Ce code confidéré comme loi nouvelle efl
fortbon; mais étant demeuré dans les termes
d'un fimple projet , il n'a aucune autorité que
celle des ordonnances qui y font rapportées ,
& on ne le cite guère que quand on y trouva
quelque ordonnance quin'efl pas rapportée
ailleurs. Voye-^ ce qui en efl dit par Pafquier
dans fes lettres , liv. IX , lett. première ,
adreflée au préfident Briflon ; Loifeau , tr.
des offices, liv. /, ch. viij ,n.^?.y Bornier en^/i
A aa 1
372 C O D
préface , journal des a&dieiices , arrêt du %
juillet lycS.
Code du Roi Henri IV , eft une com-
gUâcit>n du droit: romain &: dia droit Fran-
çois , ou pîutôr du droit coiuumicr de la
province de Normandie , qui éroit familier
à Fauteur de cet ouvrage : ce fut Thomas
Cormier , confeiUer à Téchiquier de Rouen
èc au confeil d'Aknçon , qui donna au pu-
bfic cerre compilation en i6iy. Elle fut
d'abord imprimée en un volume //z-/o/. Fran-
çois & latiï>. En 1(^15" on le réimprima feu-
lement en François en un volamt; in--4^°. On
croisoir , au titre de cet ouvrage , qu'il ren-
ferme une colkébion ou compilation des
ordonnances d'Henri IV. Cependant on n'y
trouve aucun texte d''ordonnance , c'eft feu-
lement un mélange du droit romain avec
d«s dirpotïtions d'ordonnances. Voyei la
préfûccie Bornier. Simon qui en fait men.tion
en Cil h-bUotheijue des- auieurs de droit rap-
porte fur celui-ci unefmgularitc , favoir qu'il
s^'étoitiî fort appliqué à Pétude que la femme
avoir obtenu contre lui une ientence de
diflolutioiidans les formes , & s'étoit mariée
d'un autre côté \ que néanmoins Cormier
ayant aeliievé fôn ouvrage , le repos d'efprit
1-ui fit recouvrer la- fanté qu'il avoit per^ro-e ,
qu'il fe marix avec une autre Femme donc il
tLu: des enfanSjCe qui donna Heu à un graiid"
procès dont parle Berauk. On peur citer ace
iujet l'exemple de Tiraqu^au , quidonnoit,
dit-on , disque awnée au public un eaifanc
& un volume ; ce qui fait voir que les pro!-
cUiAioiTS de l'el^r.it n'empêchent pas celles
de la narure.
Code H er moge niem- , eft- mie oolb<Stion
oucompilation des eonftirutions fkires pat
lôs empereurs Dioelétien & Maximien , &
parleurs fuccefïcurs, julqu'à-l'ani joé', ou
au- plus tnr-dàl'an 312. Il a été ai^ifr nommé
^'CL\\Ktrmcgmiiinus<^\ fit cette compilation;
mais on ne fait pas-bien prccifémenr quel en
cfHe véritable auteur , y ayant deux Hermo-
géniens à chacun defquels cet ouvrage efl:
attribué par quelques auteurs. Pancirole croit
tiu'ileft d'un. Eugenius Hermorrsninnus qm
( fuivantles annales de Baronius) fut préfet
du prétoire fous l'empire de Dioelétien , &
qui fut employé pir cet empereur à pcrfécu-
ter les chrétiens; d'autres, tels que M. Mé-
ïi%gc €;n [qs amMit^s du droit ^chap^ xj , p:rn-
c 0 D
fent cjrie ce code eft d'un autre Hermogéni(?n>
jurifconfuke , qui vivoit fou-s l'empire
de Conftantiii & fous les enfans de ce
prince.
Jacquet Godefroy , dans Ces prolégomènes
du Code T/iéodcJien, chap.j , lemble croire
quekcovij Hérmogénien corhprenoit les conf^
titutions des mênies empereurs que le code
Gréàcrieiî : il ne prétend pas néanmoins que
œ fullent prcciiément toutes les mêmes conf-
tittitions , ni qu'elles fuilènt rapportées dans
les mêmes termes ; il obferve au contraire
que plu (leurs de ces coiiftitutions qui font
rapportées dans Pun & l'autre code , différent
entr*elks en plufieurs diofes. Et en effet l'au-
teur de la conférence des loix mofaïques ù
romaines y après avoir rapporté un paflage
d'HerrïiOgén'ien contenant une conftitutiort
cks empereurs Dioelétien èc Maximien ,
remarque qu€ Grégorien a aufli rapporté
cette conftitution , mais fous une dcite diffé-
reiîte.
Ni. Terraftbn , eh fon lùfîoire de la jurif-
pmdeitce romaine , p. %8^ , regarde comme
douteux qu^Hennogériifen eût compris dans
fa compiktiôft des conftitutions des empe-
reurs qui ont régné depuis Adrien; il fe fonde
fur ce que' dans ks fragmens qui nous ref^
teftt du code Hcrmcgénien , on ne trouve que
des conftitutions- de Dioelétien & Maxi-
mieh'. Les trois premières à la vérité font
attribuées à un erripereur nommé Aurelius'y
mais il n'y €n a' aucun qui ait porté fim-
pJemeftt ce n'oift*; & M. Terra (l'on rapporte
la preuve qu'Aurdius éroit un prénom qui
fut àonné aux empereursDioclétien & Maxi-
mien. Il n'étoit pasnatlîrel d 'ailleurs q u'Her-
mogénien eût compilé préciiémentksmêmcs
ordonnances que Grégorien; il eft^ plutôt à
préliirAei* que le code Hérmcgénien né fut
autre chofè qu'une fuite' & un (upplément
dupïétédeniT, &;que fi l'auteur y comprit
quelques conftirutiGns du nombre de celles
que Grégorien-avoir déjampportées , ce fut
apparemment pouries donner d'une manière
plus côrfedre, foit pour le x.<ixi<t^ foit pour
la date , & pour le rang qu'elles doivent tenir
dansk recLcil.
Nous ne dirons rien ici de ce qui concerne
rauthenticicé qu'a pu avoir le code Hennoge-
nien y ni de la perce de ce code de des fi'ag-
mens que l'on en a confervés ^ tout cela- fe
C O 6
trouvant lié avec ce qui a écé ci-devant dit
du code Grégorien.
Code Justinien, èft une compilation
Elite par ordre de l'empereur JufEinien , tant
de Tes propres conftitutions que de celles de
Tes prédécèireurs. Ces confïitutions furent
rédigées en latin /excepté quelques-unes qui
furent écrites en grec & dont une partie fut
perdue , parce que fous l'empiré de Juftinien
la langue greque étoit peu d'ufage. Cuj'as
en a rétabli quelques - unes dans les obferva-
dons.
Il avoir déjà été fait avant Jufïinien trois
différentes colledVions ou conipilations des
conrtirutions des empereurs, depuis Adrien
furqu'â Théodofien le jeune, fous les noms
de code Grégorien, tiermogénien, Théodcften^
Les fùccéileurs de Théodofe le jeune j ufqu'à
Juftinien, avoient encore fait un grand
nombre de conftitutions & de novelles j Juf-
tinien lui-même dès Ton avènement à l'em-
pire avoit publié plufieurs conftitutions i
toutes ces différentes loix fe trouvoient la
plupart en contradiction les unes avec les
autres , far-tout celles qui concernoient la
religion , parce que les empereurs chrétiens
5^: les empereurs païens fe conduifoient par
dés principes tout difîércns.
L'incertitude & la confufîon où étoit la
jurifprudence, engagea JuiTinien dans la
i'ccohdé année de fon empire à faire rédiger
uii nouveau co4e , qui feroit tiré tant des
trois codes précédens , que des novelles ôc
autres continuions de Thfodofe & de fes
fuccelleurs. Il chargea de l'exécution de ce
projet Tribonien , jurifconfulte. célèbre ,
que dé lapfofeiîîbn d'avocat qu'il exerçoità
Conftantînople 5 il avoit élevé aux premières
dii^nités de l'empire : il avoit été maître des
orhces , quefleur & même confJf^m.ais il
ri'étoit plus en place , lorsqu'il fut chsrgé
principalement de la conduite des corripila-
fiôns du droit faites fous les ordres de Jufti-
nien. Cet empereur pour la rédaétion d\i
code , lui aflocia neuf autres jurifconfultes :
favoir , Jean , Leontius , Phocas , Bafilides ,
Thomas , Conflancin' le tréforier , Théo-
l5hile , Diofcore , & Pntfentlnus. La miflîon
qui leur fut donnée à cet effet , efl dans une
conftitution adreffée au fénat de Conilan-
tmople, datée des ides de février 518,
& qui eft au titre de novo codice faciendo.
C O D 373
Tribonien & fes collègues travaillèrent
avec tant d'ardeui à la rédadtion de ce code ,
qu^il fut achevé dans une année , ôc publié
aux ides d'avril 519.
Quelques auteurs fe font récriés fur le peu
de temps que ces juriiconrultes mirent à la
rcdadion du code. Mais il faut aufTî confî-
dérer qu'ils étoieHt au nombre de dix , tou?
gens verfés dans ces matières, & qu'il y
avoit peut - être desraifôns fecrctes pour.pu-
bher promptement cecoJe, lauf à en faire
une révifion , comme cela arriva quelques
années après.
Cette première réda6bion'du code , a])pél-
lée depuis codex prim^ prcûleclionis , éioit
dans le même ordre que nous le voyons au-
jourd'hui ; on y fit feulement dans la féconde
rédaétion quelques additions ^conciliations*.
Quelques auteurs ont cru que la divifîon du
code en douze livres n'avoit été faite qu'e
lors de la féconde rédaclion ; mais le con-
traire eftattefté par Jufcinien même, /. IT,
paragraphe l , titre J , de veieri jure enu~
ckando.
Les matières furent aufîî dès-lors rangées
fous les titres qui leur ctoient propres ,
comme il paroît par le pcmg. 2. , Je novg
ccdice faciendo.
La rédaétion du code fut revêtue du ca-
ractère de loi par une conflit ution qui a pour
titre , de Jujîinianeo codice confirmando , que
Pempereur adrefïa à Menna qui étoit alors
pr^^fet du prétoire , & avoit été préfet de la
ville de Conflantinoplc , par laquelle il
abroge toutes autres loix qui ne feroient pas
comprifes dans fon code.
Juftinien , en faifant lui-même l'éloge de.
fon code , a iur-tout remarqué qu*il ne s'y
trouvoit aucuîîe des contrariétés qui étoient
dans les codes précédens.
Quelques auteurs modernes n'en ont pas
porté le même jugement ; JacquesGodefroy
entr'autres dans (es prolégomènes fur le code
Théodojien , reproche à Tribonien d'avoir
tronqué plufieurs conflitutions , d'en avoir
omis plufieurs , & d'autres cho fes efl'entielles
pour en faciliter l'intelligencei d'avoir coupé
quelques loix en deux, ou d'avoir joint deux
loix différentes j d'en avoir attribué quel-
ques-unes à des empereurs qui n'en éroienc
pas les auteurs.
M. Terrallbn , en fon hijldre de iajitrrf-
374 C O D
prudence romaine, ]u[\l^QTnhonien de ces
reproches , en ce que Juftinien avoir lui-
même cruonné d'ôter les préfaces des conf-
titutions; que Ci Tribonien a quelquefois
tronqué , féparé ou réuiii des loix , il ne fie
en cela que fuivre les ordres de Juftinien ;
que s'il a placé certaines conftitutions fous
une autre date qu'elles n'étoient dans le code
Thécdcfien , ileft à préfumer qu'il y avoir eu
de la méprife à cet é^ard dans ce code.
Mais M. Terraflon , en juftifiant ainfi
Juftinien de ces reprochcS;lui en fait d'autres
qui paroifl'ent en effet mieux fondés ; il lui
reproche d^avoir fuivi un mauvais ordre dans
U diftribution de fes matières : par exemple,
d'avoir parlé des aurions, avant d'avoir
expliqué ce qui peut y donner Heu ; d'avoir
'détaillé les formalités de la procédure , avant
d'avoir traité des actions qui donnoient ma-
tière à Tinftruârion judiciaire } d'avoir parlé
des teftamens , avant d'avoir déraillé ce qui
concernoit la puiflance paternelle : en un
mot d'avoir transporté des matières qui dé-
voient précéder celles à la fuite defquelles on
les a mifes , ou qui dévoient fuivr-e celles
qu'on leur a fait précéder. Cependant M.
Terraflon femble convenir que ce défaut doit
moins être imputé à Tribonien, qu'au fiecle
dans lequel il vivoit , où les meilleurs ou-
vrages n'étoient point arrangésauffi métho-
diquem.ent qu'on le fait aujourd'hui.
L''éditeurcuco(feiv-eVc"/V fait auffi fentir
dans fa préface , en parlant du code Jujlinien,
que cet ouvrage eft fort imparfait , n'étant
qu'une collcârion de conftitutions qui ne
décident que des cas particuliers , & ne
forment point un fyftîme de droit , ni une
fuite de principes rangés par matières.
Cependant malgré les défauts qui peuvent
fe trouver dans ce code , il faut convenir ,
quoi qu'en difent quelques auteurs , que le
code Théodolien ne nous auroit point dé-
dommagé de celui de Juftinien , & que ce
dernier coc?eeft toujours très-utile , puiique
funs lui on auroit peut-être perdu la plupart
des conftitutions faites depuis Théodofe le
jeune , & qu'il a même fervi à rétablir une
partie du code Théodolien.
Le premier livre qui contient 59 titres ,
traite d'abord de tout ce qui concerne la
religion , les églifes , & les ecclcfiaftiques ;
il traire eniuirs des différentes fortes de loix.
C O D
de Pignorance du fait &c du droit , des de-
voirs des magiftrats, & de leur jurifdiélion.
Dans le fécond livre qm a aufTi 59 titres ,
on explique la procédure : il parie des a\'0-
cats , des procureurs , & aucres, qui font
chargés de pourfuivre les intérêts d'aurrui ;
desreftitutions en entier , du retiarxheinent
des formules , & du ferment de calomnie.
Le troifîeme livre contenant 44 titres ,
traite desfonétions des juges, de la contel-
tation encaufe , de ceux qui pouvoient efter
en jugement, des délais, fériés, &c fandifi-
cation des dimanches &: fêtes; de la com-
pétence des juges, & de ce qui a rapport à
l'ordre judiciaire : il traite aufîî du teftament
inofïîcieux , des donations & dots inoiîi-
cieufes, de la demande d'hérédité , des fer-
virudesdela Xoïaquilia , des limites des hé-
ritages , de ceux qui ont des intérêts com-
muns , des aélions novales , de l'aétion ad
exhibendum , des jeux , lieux confacrés aux
fépultures , & dépenfes des funérailles.
Le quatrième divifé en GG titres , explic[ue
d'abord les actions perfonnelles qui naiflent
du prêt & de quelques autres caufes; en fuite
les obligations & ^étions qui en réfultent ;
les preuves teftimoniales & par écrit ; le prêt
à ufage , le gage \ les actions relatives au.
commerce de terre & de mer ; les fénatuf-
confultcs Macédonien & Velléien; la com-
penfation , les intérêts, le dépôt , le mandat,
la fociété , Pachat & la vente ; les monopo-
les , conventions illicites ; le Commerce &: les
marchands; le change , le louage , l'emphy-
téofe.
Le cinquieïne qui a 75 titres , concerne
d'abord les droits desgejis mariés , le divor-
ce," les alimens dûs aux en fans par leurs
percs , & vice ver fa; les concubines , les en-
fans natj^els , les manières de les légitimer ;
enfin tout ce qui concerne les tutelles & l'a-
hénation des biens des mineurs.
Le lîxieme livre comprend en Gi titres ce
qui concerne les cfclaves , les affranchis , le
vol , le droit de patronage , la fuccefïîon
prétorienne, les teflamens civils &: militai-
res,inftitutions d'héritiers, fubftitutions, pré-
téritions , exhérédations , droit de délibérer,
répudiation d'hérédité , ouverture &: fuggef^
tion des teftamens ; les legs fîdéi-commis , le
fénarufconfulte Trébellien , la falcidie , les
héritiers fîeits & légitimes , les fénatufcon-
%
COD
fuites TertuUien &c Orfirien, les biens ma-
ternels , & en général tout ce qui concerne
les iucceiTîons ab intejîat.
Le feptieme livre compofé de 75 titres,
traite des affranchiflemens , des prefcrip-
tions , ioit pour la liberté Ibit pour la dot ,
les héritages, les créances : il traite aulli
âiQs diverles fortes de fentences, de l'in-
compétence, du mal-jugé, des dépens, de
l'exécution des jugemens ; des appellations ,
cellîons de biens , faiiie & vente des biens
du débiteur ; du privilège du Çi(c & de celui
de la dot \ de la révocation de biens aliénés
en fraude des créanciers.
Le huitième livre contenant 59 titres ,
traite des jugemens poilèlToires ou mterdits,
des gages & hypothèques, ftipulations, no-
vations , délégations , paiemens , acceptila-
tions, évitions; de la puiflànce paternelle,
des adoptions, émancipations j du droit de
retour zppeWé pojî liminium; de Pexpolîtion
des enftiis ; des coutumes , des donations ,
de leur révocation , &: de Tabrogation des
peines du célibat.
Le neuvième livre divifé en 51 titres,
explique la forme des procès & jugemens
criminels, ôc la punition des crimes, tant
publics que privés.
Le dixième contenant 71 titres, traite
des droits du fifc, des biens vacans , de leur
réunion au domaine , des dénonciateurs
pour le fifc , des tréfors , tributs ," tailles &
iur-taux; de ceux qui exigent au-deià de
ce qui eft ordonné par le prince; des dif-
cufiions ; de ceux qui étant nés dans une
ville vont demeurer dans une autre; du do-
micile perpétuel ou paflàger ; de Pacquitte-
ment des charges des biens patrimoniaux;
des charges publiques & exemptions; des
profefleurs , médecins , affranchis ; des in-
fâmes, interdits, exilés; des ambafladeurs ,
ouvriers & artifans; des commis employés
à écrire les regiftres de recette des impoii-
t'ons publiques; des receveurs de ces impo-
rtions ; du don appelle aurum coronarium ,
que les villes & les décurions faifoient au
prince; des officiers prépofés pour veiller
à la tranquillité des provinces.
Le onzième livre compofé de 77 titres ,
tr lite en général des cojpj & communautés
&: de leurs privilèges , ik. des regilires pu-
blics contenant les noms &; ficukés de tous
les citoyens : il traite aufïî en particulier de
ceux qui tranfportoient par mer à Rome
les tributs des provinces en argent & en bié :
il contient plulieurs loix ibmptuaires pour
modérer le luxe ; des loix de police pour la
diitriburion des denrées, pour les étudians,
les voitures, les jeux, les fpectacles , la
challè, les laboureurs , les fonds de terre &
pâturages, le cens, les biens des villes, les
privilèges attachés au palais & autres biens
fonds de l'empereur, & la défenie de
couper des bois dans certaines forêrs.
Enfin le douzième livre contenant G.\
titres, traite des difrérentes loues de di-
gnités , de la difcipline militaire ; des vœux
& préfens q^u'on offroit à l'empereur; de
plulieurs oiiiccs fubordonnés aux dignités
civiles & militaires ; des couriers du prince ;
des poftes publiques ; des officiers inférieurs
compris fous la dénomination à'apparkorcs
judicum ; des exaclions & gains illégitimes ;
des officiers fubalterncs , & notamment de
ceux qui^alloient annoncer la paix ou quel-
qu'autre bonne nouvelle dans les provinces.
Telle ell la diftribution obfervée dans
les deux éditions du code.
Lorfque la première édition parut, on
y trouva deux défauts ; l'un , qu'en plu-
lieurs endroits le code ne s'accorcioit pas
avec le digefte , qui avoit été rédigé de-
puis I2 première édition du ccde ; l'autre
défaut étoit que le code contenoit plulieurs
conftitutions inutiles, & laiflbit fublifter
Pincerdtude que les Iccles des Sabinicns
Se des Proculé^ens avoient jetée dans la
juriipradence ; les uns voulant que l'on
fuivît la loi à la rigueur; les autres vou-
lant que Pon préférât l'équité à la loi.
D'ailleurs , taiidis que Pon travailloit
au digefte , Juftinien avoit donné plu-
lieurs novelles & cinquante décilions , qui
n'étoient recueillies ni dans le code ni dans
le digefte , & qui néanmoins avoient
apporté quelques changemens.
Ces inconvéniens déterminèrent Jufti-
nien à faire faire une révilion de fon
code : il chargea de ce loin cinq jurif-
confultes, du nombre de ceux qui avoient
travaillé à la première rédaction «Se au
digefte; ce furent Tribon'cn , Dorothée^
i\ienna , Conftantin Se Jean.
Ces jurilconfukes retranclierenr du code
37^ C P D
quelques cpnilitutions inutiles; ils y ajou-
tèrent quelques-unes de celles de Jufti-
nien , & les cinquante déciiions qu'il avoit
données depuis la déciiion du premier code.
Ce nouveau code fut publié dans Tan-
née 5 34 : Juilinien voulut qu'il fût nommé
codex Juflinianeus repetit œ prxleclioni s ; c'eft
pourquoi en parlant de la première édi-
tion du code , & pour la diftinguer de la
dernière , les commentateurs Tappellent
ordinairement codex primœ prœlecïïonis.
Malgré tous les foins que Juftinien fe
donna pour perteârionner fon code^, quel-
ques jurifconfukes modernes n'ont pas
laiflé d'y trouver des défauts. On a déjà vu
les reproches que Jacques Godefroy fait à
ce fujet à Tribonien -, ce qui s'applique à
la féconde édition du code auilî-bien qu'à
la première. Godefroy voudroit que l'on
préférât le code rhéodpiien , en faveur du-
quel il étoit prévenu , fans doute parce
qu'il avoit travaillé à' le reftituer : il eft
certain que le code théodofien eft utile , en
ce qu'il contient plufieurs conftitutions en-
tierres qui ont morcelées dans le code jujîi-
nieii : le code tliéodoiîen n'étoit propre-
ment qu'une colle6tion des conftitutions
des empereurs ; au lieu que le code juftinien
en eft une compilation; fon objet eft diffé-
rent de celui du code théodofien , & les
jurifconfukes qui ont travaillé au code , fe
font conformés aux vues de Juftinien.
Le défaut le plus réel du code , eft
celui de n'avoir pas prévu tous les cas ;
ce qui eft au furplus Fort difficile dans un
ouvrage de cette nature. Juftinien y fup-
pléa par des novelles, dont nous parlerons
ci- après ou mot Novelles.
Les auteurs qui ont fait des commen-
taires ou glofes fur le code, font Accurfe,
Godefroy , Jean Favre , Arnoldus , Cor-
vin.us , Brunneman , Pierre & François
Pithou , Perezius , Mornac , Azo , Cujas ,
Ragueau, Giphanius, Mirbel, Décius &
plufieurs autres.
Code Léopold, eft un furnom ou titre
ue l'on donne vulgairement à un recueil
es ordonnances, édits & déclarations de
Léopold I , duc de Lorraine, imprimé d'a-
bord en deux volumes in~i % & enfuice réim-
primé à Nancy en 1733 en trois volumes j
ffi-^°- H contient aufïi d^ercns, arrêts de 1
3
COD
réglemens rendus en conféquence des édits
& déclarations , tant au confeil d'état &:
des finances , que dans les cours fouve-
raines , fur des cas importans & publics»
Le premier volume commence au 10 fé-
vrier 1698 , àc finit au 19 décembre 171 2.
Le fécond comprend depuis le 7 janvier
171 5 jufqu'au 28 décembre 1723. Et le
troifîeme contient depuis le 3 janvier
1724 jufqu'au 27 décembre 1729.
Code des loix antiques, eft un re-
cueil de loix anciennement obfervées dans
lès Gaules , écrites en latin , intitulé codex
legum amiquarum. Ce recueil qui forme un
volume in-fol. a été ainfi appelle , fbit
parce que toutes les loix comprifes dans ce
volume font fort anciennes , ou plutôt
parce que les premières loix qui font en
tête de ce volume , qui font des loix gothi-
ques, ne font défîgnées que fous la déno-
mination de leges antiquœ , fans que l'on y
ait mis le nom des rois Goths dont elles font
émanées : on y trouve enfuite les loix des
Vifîgoths , qui occupoient l'Efpagne & une
grande partie de l'Aquitaine ; un édit de
Théodoric roi d^'Italie; la loi des Bourgui-
gnons ou loi Gambette i ainfi appellt'e parce
qu'elle fut réformée par Gondebaut en 501;
la loi falique; celles des Ripusriens, qui
font proprement les loix des Francs ; la loi
des Allemands, c'eft-à-dire, des peuples
d'Alface &: du haut Palatinar; les loix des
Bavarois , des Saxons , des Anglois & des
Frifons ; la loi des Lombards, beaucoup plus
confidérable que les précédentes; les capitu-
laires de Charlemagne , & les conftitutions
à&s rois de Naples & de Sicile. Lindem-
broge a fait des notes fur plufieurs de ces
loix. J'. l'hijî. du droit fran^'ois par M. l'abbé
Fleury; ù ci-devant Code Al akic; Code
d'EvARIC & Loix ANTIQUES , LoiX DES
Allemands, des Bavarois, &c.
Code Louis XIII, eft un recueil que
Jacques Corbin avocat au parlement , 3c
depuis maître des requêtes ordinaire delà
reine Anne d'Autriche , donna au public en
un velume in-fol. imprimé à Paris en 1 628 ,
contenant les principales ordonnances de
Louis XIII, concernant Tordre de la juftice,
le domaine & les droits de la couronne.
Il rapporte ces ordonnances en entier, mê-
.me avec les préfaces, publications de en-
régiftremens
COD
rcgîflremens ; ce qui n avoir encore été ob-
fer.vé par aucun aucrecompilateur. Il aauiïi
commenté &c conféré ces ordonnances avec
celles des rois Henri le grand , Henri IIÏ ,
Charles IX , François II , Henri II & autres
|?rédéceflcurs de Louis XIII. Ce recueil au
llirplusell: l'ouvrage d'un particulier , 8c n a
d'autre autorité que celle qull tire des or-
donnances qui y font inférées.
Code Lou is ou Code Louis XIV , eft
un titre que les libraires mettent ordinaire-
ment au dos du recueil des principales or-
donnances de Louis XIV , qui font celles de
1667 , pour la procédure civile ; celle de
1669 , pour les évocmons &C commiuimus;
une autre delà même année, pour les eaux
êc forêts; celle de 1670, pour la procédure
criminelle ; celle de 1672 , appellée com-
munément ['ordonnance de la ville, pour la
jurifdi6tion des prévôt des marchands 6c
cchevins de la ville de Paris; celle de 1675 ,
pour le commerce ; celle des gabelles de
1680 j ôc celle des aides qui eft adiïî de la
même année ; celle des fermes , qui eft de
l'année fuivante 168 1 ; celle de la m.arine,
de la même année ; le code noir ou ordon-
r^ance de i68f , pour la police des Nègres
dans les îles françoifes de PAmérique ; celle
des cinq grofies fermes , de Tannée 16S7.
On a aulTi appelle code LouisXV, un p^tit
recueil des principales ordonnances de ce
prince , mais quand on dit code Louis fim-
plement, on entend le recueil desordonnan-
ces de Louis XIV , ce titre le voit même
fouvent fur un volume qui ne contient que
l'ordonnance de 1 667 , ou fur quelqu'autre
ordonnance du même prince.
Code Louis XV ^ eft un titre que l'on
met ordinairement au dos d'un recueil en
deux petits volumes in-x^ , contenant les
principales ordonnances de Louis XV ,
telles que l'ordonnance des donations ,
de 1 7 3 1 ; celle des teftamcns , de 1735;
celle de 1736, concernant les faux prin-
cipal & incident ; celle des fubftitutions ,
de 1 747 ; d>c pluCieurs autres édits & décla-
rations. Voye-^^cz qui eft dit au mot Code
Louis 5caumot Code des Aides.
Code marchaî^d , eft un furnom que
l'on donne vulgairement à l'ordonnance ou
cdit de Louis XIV , furie fait du commerce,
du mois de mars 1673; mais en citant cette
Tome VIII,
COD 377
ordonnance à l'audience , on ne diroît point
le code marchand y on diroit ['ordonnance du
commerce , qui eft fon véritable titre. Ce code
eft divifé en douze titres : le premier traite
des apprentis négocians «Se marchands , tant
en gros qu'en détail ; le fécond , des agens
de banque & courtier» ; le troifieme , des li-
vres & regiftres des négocians , marchands
de banquiers ; le quatrième titre traite des
fociétés ; le cinquième, des lettres & billets
dechange,&promeflesd'enfournir;lefixie-
me traite des intérêts de change & rechange
(les deux derniers articles de ce titre concer-
nent les formalités que l'on doit obferver
dans le prêt fur gages ) le feptiemc titre traite
des contraintes par corps ; le huitième , des
féparations de biens ; le neuvième , des dé,-
fenfes& lettres de répi;le dixième, des
celfions de biens; le onzième, des faillites &:
banqueroutes ; & le douzième &: dernier ,
de la j urifdiclion des coniuls. Qtioique cette
ordonnance ibit principalement fur le fait
du commerce , elle forme néanmoins une
loi générale qui s'obferve entre toutes fortes
de perfonnes, lorfqu*elles fe trouvent dans
les cas prévus par cette ordonnance : par
exemple , ce qui eft ordonné pour le prêt
fur gages par les deux articles dont on a parlé
ci-devant , n'a pas liea feulement entre
marchands , mais entre tous ceux qui fc
trouvent dans les cas prévenus par ces arti-
cles , ainiî qu'il a été jugé plufieurs fois en-
tre des perfonnes non marchands. Bornier
a fait une conférence de l'ordonnance du
commerce avec les anciennes èc nouvelles
ordonnances , édits , déclarations , & autres
réglemens qui y ont rapport.
Code Marillacow Code MicHAULT,
Voye'^ ci-après Code Michault.
Code de la marine , eft un titre que
l'on donne quelquefois à l'ordonnance de
Louis XIV , du mois d'août 1681, tou-
chant la marine. Elle eft divifée en cinq
livres , qui font divifës chacun en plufieitrs
titres & articles. Le premier livre traite des
officiers de l'amirauté &c de leur jurifdic-
tion ; il traite aufti des interprètes 6c des
courtiers conduéteurs des maîtres de navi-
re; du profefteur d'hydrographie; des con-
fuls de la nation françoife dans les pays étran-
gers ; des congés & rapport de la procédure
çtuife fait dans les amirautés i des prefcrip-»
Bbb
378 C O D
tions qui ont lieu dans les affaires mariti-
mes , &: de la fàifie & vente des vaifleaux.
Le fécond livre règle ce qui concerne les
gens &c bâtimens de mer ; lavoir , le capi-
taine , maître ou patron , l'aumonier , Técri-
vain , le pilote , le contre-maître ou nocher ,
le chirurgien, les matelots, les propriétaires
des navires, les chapcntiers & calfateurs, les
navires ôc autres bâtimens de mer. Le troi-
lieme livre contient tout ce qui concerne
les charte-parties , affrettcmens ou nolifl'e-
mens , les connoifîemens ou polices de char-
gement , le fret ou nolis , l'engagement &
les loyers des matelots, les contrats à grofle
aventure ou à retour de voyage , les aflu-
rances , les avaries , le jet & la contribu-
jion , les prifes , lettres de marque ou de
repréfailles , les tcftamens & la lucceiïîon
de ceux qui meurent en mer. Le quatrième
livre traite de la police des ports &c havres,
côtes , rades & rivages de la mer : des maî-
tres de quai , des pilotes , lamaneursou loc-
mans , du leftage & déleftage , des capitai-
nes garde-cotes , des pcrfbnnes fujettes au
guet de la mer,des naufrages, bris de échoue-
mens , & de la coupe du varech ou vraicq.
Enfin le cinquième livre traite de la pêche
qui iè fait en mer , de la liberté de cette pè-
che 5 des pêcheurs , de leurs filets , des parcs
ôc pêcheurs , des poifïons royaux , &c. Le
commentaire qui a été fait en 1 7 1 4 fur cette
ordonnance eft peu eflimé. Il y a encore une
autre ordonnance pour la marine du i j avril
1 689; mais elle ne concerne que la difciplinc
des armées navales , & la première efl la
feule que Ion appelle code , comme conte-
nant un règlement général pour la police de
la marine. Voye[ Marine ù Ordon-
nance DE LA Marine.
Code Michault , qu^on appelle aufîi
code Marillac , eft un furnom que Ton
donne vulgairement à une ordonnance pu-
bliée fous Louis XIII , au mois de janvier
1 62.9 : elle a été ainii appellée de Michel de
Marillac, garde des fceaux de France, qui
en fut l'auteur. Mais en la citant à l'audien-
ce , on ne la défigne point autrement que
fous le titre d'ordonnance de i6x^.
Elle fut tirée des principales ordonnances
& principalement de celle de Blois.
Louis XIII fit travailler à fa rédaction
furlesplaiiites & doléances faites par les dé-
COD
pûtes des états de fon royaume , convoqués
& aflemblés en la ville de Paris , en 1614,
bc fur les avis donnés à S. ]VI. par les allèm-
blées des notables tenues à Rouen en
1617, & à Paris en 1626.
Elle ne fut publiée & enrégîftrée à Paris
que le i f janvier 1 629. Le roi féant en fon
lit de juftice, en fit faire lui-même la pu-
blication & cnrégiftrement. Elle ne fut en-
régiftrée au parlement de Bordeaux que le
6 mars fuivant; dans celui de Touloulè , le
5 juillet j à Dijon , le 19 feptembre de la
même année : elle fut aufli enrégiftrée au
parlement de Grenoble & ailleurs dans la
même année. Les parlemensde Touloufe,
Bordeaux & Dijon , par leurs arrêts d'enré-
giftrementjy apportèrent chacundifférentes
modifications fur plufieurs de fes articles.
Cesmodilîcacions, qu'il eft efïentiel de voir
pourconnoitre l'ufagede chaque province,
font rapportées à la fuite de cette ordon-
nance avec les arrêts d'enrégiftrement , dans
le recueil des ordonnances par^éion , torne /.
Cette ordonnance eft une des plus amples
ôc des plus fages que nous ayons ; elle con-
tient 461 articles , dont les premiers règlent
ce qui concerne les eccléflaftiques : les au-
tres concernent les hôpitaux , les univerfi-
tés , Padminiftration de la juftice , la no-
bleflè ôc les gens de guerre , les tailles , les
levées qui fe font fur le peuple , les finan-
ces , la police , le négoce ôc la marine.
Le mérite de fon auteur , les foins qu'il
prit pour la rédaélion de cette ordonnance ,
ôc la fagelfe de fes dilpofitions , la firent
d'abord recevoir avec beaucoup d'applau-
diflement dans tout le royaume j ôc c'eft à
tort que les continuateurs du didionnaire
de Moreri ont avancé le contraire à l'article
du garde des fceaux de Marillac. Ils ont fans
doute voulu parler du difcrédit où cette or-
donnance tomba quelque temps après la
difgrace du maréchal de Marillac , qui re-
tomba fur fon frère. Le maréchal de Maril-
lac avoir été de ceux qui opinèrent con-
tre le cardinal de Richelieu , dans une af-
femblée qu'on nomma depuis la journée des
dupes; ÔC le cardinal en ayant gardé contre
lui un reflentiment fecret , le fit arrêter le.
30 oâx)bre 1630 en Piémont , oti il com-
mandoit les troupes de France. Il fut con-
, damné par des commiifaircs à perdre la tête :
C O D
ce qui fut exécuté le i o mai 16^1. Quant a
Michel de Marillac , on lui ôca les fceaux le
Il novembre 1750; on l'arrêta en même
temps f & on le conduifit au château de
Caen , eniuite en celui de Châteaudun , où
il mourut de chagrin le 7 août 163Z. Ainfi
ladifgrace de Michel de Marillac ayant
fuivi de près la publication de ^ordonnance
de 1 62.9 , cette ordonnance tomba en même
temps dans un difcrédit prefque général.
Il y eut néanmoins quelques endroits dans
kfquelson continua toujours de Pobferver ,
comme au parlement de Dijon , où elle eft
encore fuivie ponctuellement. M. le prési-
dent Bouhier, en (on ccmmenîairefur la coût.
deBourgogne ycixe fouvent cette ordonnance.
Il a été un temps que les avocats au par-
lement de Paris & de plufieurs autres par-
lemens , n'ofoient pas la citer dans leurs
plaidoyers.
Cependant la {ageffe de cette ordonnance
l'a emporté peu à peu fur fa mauvaife for-
tune ; ôc nous voyons que depuis environ
fbixante années , on a commencé à la citer
comme une loi (âge & qui méritoit d'être
obfervée : les magiftrats n'ont pas fait non
plus de difficulté de la reconnoitre. On voit
dans un arrêt du 30 juillet 1 693 , rapporté
au journal des audiences, que M. Daguef-
feau , alors avocat-général ôc depuis chance-
lier de France, cita cette ordonnance comme
une loi qui de voit être fuivie. Elle eft pareil-
lement citée par plufieurs auteurs , notam-
ment par M, Bretonnier en divers endroits
de fon recueil de quefiions , & par Fromental
en fes décifions de droit. Et préfentement il
paraît que l'on ne fait plus aucune difficulté
de la citer ni de s'y conformer. On peut voir
ce que dit à ce fujet M. Raflicod , dans le
traité des fiefs de Dumoulin , p. i.^6, in fine.
Il faut même obferver que depuis cette
ordonnance il en eft furvenu d'autres qui
ont adopté plufieurs de fes difpofitions j
telle que celle de V article cxxiv , qui or-
donne que dans les fubftitutions graduelles
& perpétuelles , les degrés feront comptés
par perfonnes & par têtes , & non par fou-
ches & par générations ; ce qui (è pratiquo^
ainfi au parlement de Dijon en conféquence
de cet article. L'ordonnance des fubftitu-
tions du mois d'août 1 747 , ordonne la
même chofe , article xxxiij.
c o D -37,
Il y a auffi quelques difpofitions de l'or-
donnance de i(ji9i introdudives d'un droit
nouveau , qui n'ont pasété reçues par- tout ;
comme l'<2rr. cx-a-î^ , qui veut que lestefta-
mens olographes foient valables par tout le
royaume : ce qui a été modifié par l'ordon-
nance desteftamens , article xix , qui porte
feulement que l'ufage des teftamens , codi-
cilles , &c autres difpofitions olographes ,
continuera d'avoir lieu dans les pays & dans
les cas où ils ont été admis jufqu'à préfent.
Gode militaire , eft une compilation
des ordonnances & réglemens faits pour les
gens de guerre, depuis i6f i jufqu'à préfent.
Cet ouvrage eft de M. le baron de Sparre.
Il eft divifé en onze livres , dont les dix
premiers regardent la difcipline militaire ;
le onzième concerne les jeux défendus dans
les garnifons , les mariages des officiers ,
fergens ôc foldats , & les congés abfolus.
L'auteur y a joint les réglemens faits contre
les duels , ceux faits par MM. les maréchaux
de France pour les réparations d'honneur ,
la déclaration du 1 3 décembre 1 701 pour les
lettres d'état , & l'édit de 1 69 3 portant inf-
titution de l'ordre de S. Louis.
Il y a aufli un code militaire des Pays-bas ,
imprimé à Maftricht en 1711 , vol. in 5®.
Code Néron : on a quelquefois donné
ce nom , mais improprement, à un recueil
d'ordonnances , édits , déclarations , fait par
Pierre Néron & Girard , avocats au parle-
ment. La plus ancienne ordonnance de ce
recueil eft du mois de mai 173 z , & les der-
niers réglemens font de 1 7 1 9 : mais ce re-
cueil eft imparfait en ce qu'il ne comprend
qu'une partie des ordonnances rendues de-
puis le temps auquel il remonte. On y a
inféré plufieurs édits , (ans mettre les décla-
rations qui les ont modifiés ou révoqués; &
au contraire on y a mis plufieurs déclara-
tions (ans y comprendre les édits en inter-
prétation defquels elles ont été données.
Nous n'avons cependant point de recueil
moderne plus ample , en attendant que l'ex-
cellent recueil des ordonnances de la troi-
ficme race , auquel M. SecouflTe travaille
parordreduroi/oitparv'enujufqu'autemps
préfent : mais il n'eft encore ( en 1 7 5 j ) qu'à
Tannée 1403. On peut (eulcment (uppléer
une partie des édits & arrêts qui manquent
dans le recueil de Néroo , par le recueil des
Bbb 2
)»o C O D
édits Se déclarations enrégiftrés^ au parle-
ment de Dijon , qui a été imprimé en onze
volumes //z-4°. & comprend les principaux
édits & déclarationsintcrvenus depuis 1 666
jufqu'en 1710.
Code NOIR ,eft le furnomquel'on donne
vulgairement à Tcdit de Louis XIV , du
mois de mars 1685, pour la police des îles
françoifesdePAmérique. On lappelle ainli
code noir, parce qu'il traite principalement
des nègres ou efclavcs noirs que Pon tire de
la côte d'Afrique , & dont on Te fert aux
îles pour Pexploitation des habitations. On
tient que le célèbre M, de Fourcroy, avocat
au parlement, fut celui qui eutle plusdeparr
à la rédadtion de cet édit. Il ell divifé en
foixante articles , dont le plus grand nom-
bre regarde la police des nègres. H y en a
cependant plufieurs qui ont d'autres objets ;
tel que l'article j , qui ordonne de chaflèr
les juifs j Yarî. iij ,qm interdit tout exercice
Fublic d'autre religion que la catholique ;
article v , qui défend à ceux delà R. P. R.
de troubler les catholiques ; V article vj , qui
prefcritl'obrervation des dimanches & fêtes;
les arîicbs viij & x , qui règlent les forma-
lités des mariages en général : les autres arti-
cles concernent les efclaves ou nègres , &
règlent ce qui doit être oblervé pour leur
inftrud:ion en matière de religion , les de-
voirs reij7e(5tifs de ces efclaves & de leurs
maîtres , les mariages de ces efclaves ; Tétat
de leurs enfans , leur pécule , leur affran-
chiflement , de divers autres objets. Il faut
joindre à cet édit celui du mois d'odl. 1716,
Se la déclaration du 15 décembre 172.1 ^
qui forment un fupplémentau code noir.
CoEE Papyrien , ou droit civil Papy-
rien ,Jus civile Papyrianum , eft un recueil
des loix royales , c'eft-à-dire faites par les
rois de Rome. Ce code a été ainfi nommé
de Sextus Papyrius qui en fut l'auteur. Les
loix faites par les rois de Rome jufqu'au
temps de Tarquin le fuperbe , le feptieme
&le dernier de ces rois , n'éroienr point écri-
tes : Tarquin le fuperbe commença même
par les abolir. On fe plaignit de l'inobferva-
tion des loix , & l'on penfa que ce défordre
venoit de ce qu'elles n'étoient point écrites.
Le fénat & le peuple arrêtèrent de concert
qu'on les rafïcmbleroit en un feul volume ;
^ ce foin fut confié à Publias Sextus Papy-
COD
' rius , qui éroit de race patricienne. Qiieî-
ques-uns des auteurs qui ont parlé de ce Pa-
pyrius & de fa colleftion , ont cru qu'elle
avoir été faite du temps de Tarquin l'ancien,
cinquième roi de Rome : ce q ui les a induits
dans cette erreur , eft que le jurifconlulte
Pomponius en parlant de Papirius dans la
loi ij , au digefte de origine juris , femble
fuppofcr que Tarquin le luperbe fous lequel
vivoit Papyrius , étoit fils de Demarate le
corinthien ; quoique de Paveu de tous les
hiftoriens , ce Demarate fut père de Tar-
quin l'ancien , & non de Tarquin le fuperbe :
mais Pomponius lui-même convient que
Papyrius vivoit du temps de Tarquin le lu-
perbe ; & s'il a dit que ce dernier étoit De-
marati filius , il eft évident que par ce terme
filius il a entendu petit-fils ou arrière-petit-
fils : ce qui eft conforme à plulîeurs loix qui
nous apprennent que fous le zevmçfilii font
auiîî compris les petits enfans & autres def-
cendans.D'ailleurSjPomponiusncditpasquc
Papyrius rallèmbla les loix de quelques-uns
des rois , mais qu'il les radembla toutes; Se
s'il le nomme en un endroit avec le prénom
de Publias , ôc en un autre avec celui de
Sextus, cela prouve feulement qu'il pouvoit
avoir plusieurs noms , étant certain qu'en
l'un ôc l'autre endroit il parle du mêm.e in-
dividu. Les loix royales furent donc raf-
femblées en un volume par Publius ou Sex-
tus Papyrius , fous le règne de Tarquin le
fuperbe ; & le peuple , par reconnoiffance
pour celui qui étoit l'auteur de cette collec-
tion , voulut qu'elle portât le nom de fou
auteur: d'où elle fut appellée le codepapyrien.
Les rois ayant été expulfés de Rome peu
de temps après cette colledion , les loix
royales cefterent encore d'être en ufage : ce
qui demeura dans cet état pendant environ
vingt années , &c jufqu'à ce qu'un autre
Papyrius furnommé Ca'ius , ^ quiétoit fou-
verain pontife , remit en vigueur les loix que
Nu ma Pompilius avoit;^aires au fujet des
fàcrifices & de la religion. C'eft ce qui a fait
croire à Guillaume Grotius & à quelques
autres auteurs , que le codepapyrien n'avoit
été fait qu'après l'expulfion des rois. Mais de
ce que CaïusPapyrius remit en vigueur quel-
ques loix de Numa , il ne s'enfuit pas qu'il
ait été l'auteur du code papirien , qui étoic
fait diuis le temps de Tarquin, le fuperbe.
C OD
Il ne nous relie plus du codepapyrien que
quelques fragnriens répandus dans divers au-
teurs : ceux qui ont eHayc de les rairenibler
font Guillaume Forfter, Fulvius Urlinus,
Antoine-Auguftin , Juftclipfe, Pardulphus
Prateius , François Modius, EtienneVinant,
Pighius , Antoine Sylvius , Paul Meruîe,
François Baudoin & Vincent Gravina.
François Baudoin nous a tranimis dix-huit
loix , qu'il dit avoir copiées fur une table
fort ancienne trouvée dans lecapitole, &
que Jean-Barchelemi Marlianus lui avoit
communiquée. Paul Manuce fait mention
de ces dix-Huit loix ; Pardulphus Prateius y
en a ajouté fix autres. Mais Cujas a démon-
tré que ces loix ne fonc pas à beaucoup près
il anciennes : on n'y reconiîoît point en cflet
cette ancienne latinité de la loi des douze
tables, qui efl: même poftérieure au code
papyrien; ainfitous ces prétendus fragmens
du code papyrien n'ont évidemment été fa-
briqués que fur des paflàges de Cicéron , de
Denis d'Halycarnailè . Tire-Live , Plutar-
que , Aulugelle , Feftus Varron ; lefquels en
citant les loix papyriennes , n'en ont pas rap-
porté les propres termes , mais feulement le
fèns. Un certain Granius avoit compofé un
commentaire fur le code papyrien , mais ce
commentaire n^eft pas parvenu jufqu'à nous.
M. Terraflon , dans fon hijîoire de laju-
rifprudence romaine y a'raflemblé les frag-
mens du code papyrien , qu'il a recherchés
dans les anciens auteurs avec plus d'atten-
tion & de critique que les autres jurii-
confultes n'avoientfiit ju (qu'ici. Il a eu foin
de diftinguer les loix dont l'ancien texte nous
a été confervé, de celles dont les hiftoriens
ne nous ont tranfmis que le fois. Il rapporte
quinze textes de loi , & vingt-une autres
loix dont on n'a que le fens : ce qui fait en
tout trente-lixloix. lia divifé ces trente-iix
loix en quatre parties : la première en con-
tient treize , qui concernent la religion , les
fêtes & les facrifices. Ces loix portent en
fubftance , qu'on ne fera aucune ftatue ni
aucune image de quelque forme qu'elle puif-
fe être , pour reprélenter la divinité , & que
ce fera un crime de croire que Dieu ait la
figure foit d'une bête , (bit d'un homme ;
qu'on adorera les dieux de fes ancêtres , &
qu'on n'adoptera aucune fable ni fuperflition
desautrespeuplcs3 qit*oa n'entreprendra rien
C O D 3gr
d'important fans avoir confulté les dieux;
que le roi préiîdera aux facrifices , & en ré-
glera les cércm.onies \ que les veftales entre-
tiendront le i^v. iacvé -, que fi elles manquent
à la chafteté , elles feront punies de mort ,
& que celui qui les aura (cduites , expirera
feus le bâton : que les procès & les travaux
des eiclaves feront fufpendus pendant les
fêtes, lefquelles feront décrites dans des ca-
lendriers \ qu'on ne s'aflemblera point la nuit
foit pour prières ou pour facrifices; qu'en
fuppliant les dieux de détourner les malheurs
dont Pétat eft menacé , on leur préfènrera
quelques fruits & un gâteau filé, qu'on
n'emploiera point dans les libations de vin
d''une vigne non taillée ; que dans les facrifi-
ces on n^ottrira point de poillons fansécaillesi
que tous poillons fans écailles pourront être
offerts , excepté le fcarre. La loi treizième
règle les facrifices & offrandes qui dévoient
être faits après une vidloire remportée fur
les ennemis de Pétat. La féconde partie con-
tient fept loix qui ont rapport au droit public
& à la police : elles règlent les devoirs des
praticiens envers les plébéiens , & des pa-
trons envers leurs cliens; le droit de luffrnge
que le peuple avoit dans lesallemblées de fc
choifir des magiftrats , de faire des plébif-
cites, &: d'empêcher qu'on ne conclut la
guerre eu la paix contre fon avis ; la jurif-
didtiondesduumvirs par rapport aux meur-
tres, la punition des homicides, l'obligation
de refpe6ter les murailles de Rome comme
facrées & inviolables ; que celui qui en labou-
rant la terre auroit déraciné les ftatues des
dieux qui fervoient de bornes aux héritages ,
feroit dévoué aux dieux Mânes lui &: fes
bœufs de labour ; & la défenfè d'exercer
tous les arts fédentaires propres à introduire
ou entretenir le luxe & la mollefîè. Latroi-
f leme partie contient douze loix qui concer-
nent les mariages & la puiflance paternelle ;
favoir , qu'une femme légitimement lice
avec unhommeparlaconferréation, parti-
cipe à fes dieux & à fes biens; qu'une con-
cubine ne contrade point de mariage folem-
nel ; que fi elle fe marie , elle n'approchera
point de l'autel de Junon qu'elle n'ait coupé
fescheveux & immolé une jeune brebis ; que
la femme étant coupable d'adultère ou autre
libertinage, fon mari fera fon juge & pourra
la puiair lui-même , après en avoir délibéré
38z C O D
avec Tes parens; qu'an mari pourra tuer fa
femme lorfqu'elle aura bu du vin , fur quoi
Pline Se Aulugelle remarquent que les fem-
mes étoient embraflees par leurs proches ,
pour feiitir à leur haleine fi elles avoienc bu
du vin : il eft dit auflî qu'un mari pourra faire
divorce avec fa femme , fi eUe a empoilon-
né les enfans , fabriqué de faufles clés , ou
commis adultère; que s'il la répudie fans
qu'elle foit coupable , il lera privé de Tes
biens , doiit moitié fera pour la femme , Pau-
rre moitié à la déefle Cér^s ;que lemriri lera
aufli dévoué aux dieuxinfernauxj que le père
peut tuer un enfant monftrueux auffi-fct
qu'il eft né ; qu'il a droit de vie Ôi de mort fur
fes enfans légitimes ; qu'ila auffi droit de les
vendre, excepté lorfqu'il leur a permis de
fe marier ; que le fils vendu trois fois , celle
d'être fous la puiflance du père ; que le fils
quia battu Ion père , fera dévoué aux dieux
infernaux , quoiqu'il ait demandé pardon
à Con père ; qu'il en fera de même de la bru
envers Ion beau-pere ; qu'une femme mou-
rant enceinte ne lera point inhumée qu'on
n'ait tiré fon firuit , qu'autrement fon mari
fera puni comme ayant nui à la naiflance
d'un citoyen; que ceux qui auront trois
enfans mâles vivans , pourront les faire éle-
ver aux dépens de la république jufqu'à l'âge
de puberté. La quatrième partie contient
quatre loix qui concernent les contrats , la
procédure, & les funérailles; favoîr,que
la bonne foi doit être la bafe des contrats ;
que s'il y a un jour indiqué pour un juge-
ment, &c que le juge ou le défendeur ait
quelque empêchement , l'affaire fera remife ;
qu'aux facritices des funérailles on ne ver-
iera point de vin fur les tombeaux ; enfin
que fi un homme eft frappé du feu du ciel,
on n'ira point à fon fecours pour le relever ;
que fi la foudre le rue , on ne lui fera point
de funérailles , mais qu'on l'enterrera fur le
champ dans le même lieu.
Telle eft en fubftance la teneur de ces
fragmens du code Papyrieru M. Terrafïbna
accompagné ces trente-fix loix dénotes très-
favantes pour en faciliter l'intelligence ; &
comme pour l'ordre des matières il a été
obligé d'entrc-mêler les loix , dont on a con-
fèrvé le texte , avec celles dont les auteurs
n'ont rapporté que le fens , il a rapporté de
fuite à la fin de cet article , le texte des
CO D
quinze loix dont le texte act-é confervé. Ces
loix font en langue ofque , que l'on fait erre
la langue des peuples de la Campanie , que
l'on parloir à Rome du temps de Papyrius ,
& lune de celles qui ont contribué à former
la langue latine ; mais l'erthographe & la
prononciation ont tellement changé depuis ,
&: le texte de ces loix paroit aujourd'hui fl
barbarequeM.Terraflon a mis à coté du tex-
te o 'que une verfîon latine pour faciliter l'in-
telligence de ces loix ; ce qu'il a accompagné
d'une diflertation très - curieufe fur la lan-
gue ofque.
Code pénal , eft un traité des peines qui
doivent être infligées pour chaque crime ou
délit. Ce traité donné au public en 1752 par
un auteur anonyme , forme un volume /Vz-
12. Il eft mûxxûé code pénal , ou recueil des
principales ordonnances , édits , &; déclara-
tions fur les crimes & délits , &: précis des
loix ou des difpofitions des ordonnances ,
édits , & déclarations. Il eft divifé en cin -
quante titres ; les loix pénales y font rangées
fuivant l'ordre de nos devoirs. Les fept pre-
miers titres regardent Dieu & la religion v
les titres huit & neuf jufqu'au treizième
concernent l'état &c la patrie ; les autres titres
regardent les crimes oppofés à ce que nous
devons aux autres & à nous-mêmes. Cet
ouvrage eft divifé en deux parties , l'une eft
le texte même des loix pénales , l'autre ren-
ferme les maximes ou l'auteur a exprimé
la fubftance de ces mêmes loix. Le code cri-
minel qui eft l'ordonnance de 1 670 , con-
tient les procédures qui doivent être faites
contre les accufés. Uart. i ^ du titre xxv ,
indique l'ordre des peines entr'elles; mais il
n'en fait pas l'application aux différentes
efpcces de crimes : c'eft l'objet du code pénal,
où l'on a refîèmblé les loix pénales qui font
éparfès dans une infinité de volumes.
Code PoNTCHARTR AIN , eft un titre que
quelques-uns mettent au volume ou recueil
de réglemcns concernant la juftice, interve-
nus du temps de M. le chancelier Pontchar-
train, &: imprimé par fon ordre en 1712 en
deux volumes //2- 22..
Code des Privilégies , eft un volume
in-8P. imprimé à Paris en 16 $6 , dans lequel
Louis Vrevein a reffemblé tout ce qui con-
cerne les difïerens privilégiés.
Code DES Procureurs^ Q\xcod6
C O D
Giiïet , voyez ci- devant Coce Gillet.
Code rural j eft un recueil de maximes
8c de réglemens concernant les biens de cam-
pagne. Ce petit ouvrage , dont je fuis Tau-
teur j a paru en 1 749 ; il forme deux volumes
in-ii ôc eft diviiè en deux parties ; la pre-
mière contient les maximes j la féconde con-
tient lesréglemens & pièces juftificativ es de
ce qui eft avancé dans les maximes. Il con-
tient en abrégé les principes des fiefs , des
francs-aleux , cenlives, droits de juftice,
droits feigneurîaux & honorifiques , ce qui
concerne la chafle & la pêche , les bannali-
tés, les corvées , la taille royale 6c leigneu-
riale , les dîmes eccléfiaftiques & inféodées ,
les baux à loyer & à ferme , les baux à chep-
tel , baux à rente , baux emphytéotiques , les
troupeaux & beftiaux , Texploitation des ter-
res labourables, bois, vignes Ôc prés, &
plufieurs autres matières propres aux biens
de campagne.
Code Sav ary , furnom que quelques-
uns ont donné dans les commencemens au
code marchand, ou ordonnance de 1673
pour le commerce. L'origine de ce furnom
vint de ce que M. Colbert qui avoit inipiré
au roi le delïèin de faire un règlement géné-
ral pour le commerce, fit choix en 1670 de
Jacques Savary , fameux négociant de Paris ,
pour travailler à l'ordonnance qui parut en
1675. Bornier , dans fa préface , dit que Sa-
vary rédigea les articles de cette ordonnance,
Ôc que par cette raifon M. Puflbrt , confeil-
1er d'état , avoit coutume de la nommer le
code Savary ; mais on l'appelle communé-
ment/e co^e marchand^ & plus régulière-
ment l'ordonnance du commerce, Voye';^ ce
qui eft dit ci-devant au mot Code mak-
CH AtiT y & au mot CoDi. des Aides.
Code du tabac , eft un titre que l'on
donne quelquefoisau volume ou recueil des
réglemens concernant la ferme du tabac j il
eft imprimé à la fin du code des tailles.
Code des Tailles , eft un recueil des
ordonnances, édits, déclarations^ réglemens
ôc arrêts de la cour des aides fur le fait des tail-
les. Cet ouvrage eft en deux volumes in-ii.
Code LE tellier , furnom que quel-
ques-uns ont donné à un recueil de régle-
mens concernant la juftice , intervenus du
temps de M, le chancelUer le Tellier , de im-
primé en 1 687 , en deux volumes in-^°.
C O D . 383
Code Theodosien, ainli nommé de l'em-
Çereur 1 hfodofc le jeune par ordre duqueljil
tut rédigé , eft une coUeéfcion des conftitu-
tions des empereurs chrétiens depuis Conf-
tantin juiqu^àThécdofe le jeune. Il ne nous
eft rien relté des loix faites par les empereurs
jufqu'au temps d'Adrien. Les conftitutions
de ce prince ôc celles de fes fuccefleurs juf-
qu'au temps de Dioclétien ôc de Maximien ,
hrentl 'objet de deux compilations différen-
tes que l'on nomma code Grégorien & Hermô-
génien , du nom deleurs auteurs : mais ceux-
ci ayant fait de leur chef ces compilations ,
elles n'eurent d'autre autorité que celle qu'el-
les tiroient des conftitutions qui y étoient
rapportées. Le premier code qui fut fiit par
ordre du prince fut le code Théodofien.
Indépendamment des conftitutions faites
par les empereurs depuis Adrien , qui çtoient
en très-grand nombre , Thc'odofe le jeune
en avoit fait lui-même plufieurs , d'abord
conjointement avec Honorius empereur
d'Occident , ôc avec Arcadius Ion père ^
lorfque ce dernier Peut aflbcié à l'empire
d'Orient. Après la mort d' Arcadius il en fit
encore plufieurs , conjointement avec Ho-
norius. Juftinien en a confervé dans fon code
environ trente des premières , ôc environ
cent vingt des fécondes. Théodofe en fit
encore d'autres , depuis qu'il fut demeuré
feul maître de tout l'empire d'Orient ôc
d'Occident par la mort d'Honorius. Six
années après , en 141 5 , il partagea fon auto-
rité avec Pulchérie fa fœur , qu^il fit créer
Augufte i ôc en 424 il céda l'empire d'Oc-
cident à ValentinienlII âgé de fept ans feu-
lement. Théodofe étoit fort pieux , mais
peu éclairé ; de forte que ce fut Pulchérie
la fœur qui eut le plus de part au gouver-
nement. L'événement le plus remarquable
de l'empire deThéodofe , fut la rédadlion ôc
la publication du cod'e qui porte fonnom.Les
motifs qui y donnèrent lieu font exprimés
dans le premier titre de fes novelles , où il
ie plaint d'abord de ce que malgré les récom-
penles propofées de fon temps aux gens de
lettres , peu de perfbnnes s'empreftbient
d'acquérir une parfaite connoiflànce du
droit , ce qu-*il attribue à la multitude d'ou-
vrages des) urifconfultes Ôc des conftitutions
des empereurs , capable de rebuter les lec-
teurs ^ & de mettre la confufion dans les ef«.
3^4 C O D
prirs. Pour remédier à cet inconvénient , il
titraire un choix des confticucions les plus la-
ges de les plus convenables au tempspréfent ,
pour en former un code ou loi générale, ôc
chargea huit juriiconfultes , dont il marque
les noms à la fin de la première novelle ; la-
voir, Anticchus , Maximni, Martyrius ,
Spérantius, AppoUodore, Théodore, Epi-
genius , & Procope; leurs titres ôc qualités
font exprimes dans la même novellej ce qui
nous apprend qu'ils avoient polîédé ou pof-
■fé^oient alors les premières dignitésde rem-
pire. On ne fait pas le temps qui tut employé
à la rédaction de ce code; on voit feulement
qu'il fut divilé en fèize livres. Le premier
traite des différentes fortes de loix dont le
droit eflcompofé : le fécond traite delà jurif-
divfbion des dilférens juges; des procédures
que Ton obfervoit pour parvenir à un juge-
ment ; des perfonnes que Pon pouvoir cirer
devantlc juge jdesreftitutionsen entier ; des
jugemens ; des actions qui ont rapport à ce
que l'on peut poiîéder à titre univerfel ou
particulier , & des trois fortes d'adtions qui
procèdent de la nature des chofes réelles ,
perfonnelles , & mixtes : le troiiieme livre
com.prenbit ce qui concerne les ventes , les
mariages , & les tutelles ■■, le quatrième ,tout
ce qui regarde les fucceffions a5 intejiat ôc
teftamentaires , les chofeslitigieufes , les dif-
férentes conditions des perfonnes , les impo-
rtions publiques , ôc ceux qui étoient pré-
po fés pour les recevoir , lesprelcriptions , les
chofes jugées, les cédions de biens , les in-
terdits, quorum bonorum , undevi, utruhi , ÔC
les édifices particuliers : le cinquième livre
comprenoit ce qui concerne les (uccefïions
légitimes , les changemens qui peuvent arri-
ver dans Pétat des perfonnes par différentes
caufes, & les anciens ufages autoriféspar une
longue pofleiïion : le fixieme livre concer-
noit toutes les dignités qui avoient lieu dans
Pcmpire d'Orient ôc d'Occident , ôc toutes
les charges quis^exerçoient dans le palais des
empereurs : dans le feptieme livre on raflem-
bla ce qui concernoit les emplois ôc la difci-
pline militaire : dans le huitième , ce qui re-
gardoit les officiers fubordonnés aux j uges ,
les voitures Ôc poftes publiques , les dona-
tions , les droits des gens mariés , ôc ceux
des enfms ôc des parens fur les biens & {\\z-
celTîons auxquels ils pouvoient prétendre : le
COD
neuvième livre traitoit des crimes ôc de
la procédure criminelle : le dixième , des
droits du fifc : le onzième, des tributs ôc
autres charges publiques , des confulutions
faitesrpar le prince pour lever les doutes , ôc
des appellations ôc des témoins : le douzième
traitoit des dccurions, ôc des droits ôc devoirs
des officiers municipaux : dans le treiziè-
me on ralTemble ce qui concernoit les diffé-
rentes profe liions , les marchands , les négo-
cians fur mer , profellèurs des fciences , mé-
decins , artifans , le cens ou capitation : le
quatorziemerenfermoittoutcequiivoit rap-
port aux villes de Rome, de Conftanrino-
ple , d''Alexandrie , ôc autres principales vil-
les de l'empire j& ce qui concernoit les corps
de métiers & collèges , la police , les privilè-
ges : le quinzième contenoit les réglemens
pour les places , théâtres , bains , ôc autres
édifices publics \ enfin le feizieme livre ran-
fermoit tout ce qui pouvoit avoir rapport
aux perfonnes ôc aux matières eccléfîaftiques.
Qtcode , ainfi rédigé, fut publié Pan 43 8.
Théodofe par fa première novelle lui donna
force de loi dans tout Pcmpire : il abrogea
toutes les autres loix , ôc ordonna qu'il n'en
pourroit être fait aucune autre à l'avenir ,
même parValentinien III , fon gendre. Mais
il dérogea lui-même à cette dernière difpo-
fîtion 5 ayant fait dans les dix années luivan-
tesplufieurs novelles, qu'il confirma par
une novelle donnée à cet effet , Ôc qu'il
adreiîa à Valcntinien. Il eft probable que ce
dernier confirma de fôn côté le code Théo-
dojien , ayant par une novelle confirmé celles
de Théodofe.
Ces différentes circonftances font rappor-
tées dans les prolégomènes de Go Jefroy fur
ce code , où il remarque pluiîeurs défauts
dansParrnvngement , ôc même quelques con-
tradidions : mais il eft difficile d'en bien ju-
ger , attendu que ce code n'eft point parvenu
dans fon entier jufqu'à nous. En eftct, on
trouve dans celui de Juftinien trois cents
vingt conftitutions de Théodofe le jeune
ou de les prédécefleurs , que Pon ne retrouve
plus dans le code Théodofien ^ quoiqu'elles
n*y euflcnt fans doute point étéomifes.
Le code Théodojlen futobfervé fous les em-
pereurs ValentinienIII,Marcien, Iviajorien,
Léon , ôc Anthemius , comme il paroit par
leurs conftitutions dans lefquelles ils en font
mention.
C O D
mention. L'auteur de la conférence des loix
mofaïques & romaines , qui vivoit peu de
temps avant Juftinien , cite en pluiieurs en-
droits le code de Théodore. Aman , chance-
lier d'Alaric II , roi des Viiigoths , publia
en 506 , à Aire en Gafcogne , un abrégé de
ce même code ; &; Juftinien dans Ton code ,
qui ne fut publié qu'en 518 , parle de celui
deXhéodole comme d'un ouvrage quiéroit
fubliftant , & dont il s^éioit iervi pour com-
poler le (len.
Il paroit donc certain que le code Théodo-
Jîen s'étoit répandu par toute l'Europe , &
qu'il y étoit encore en vigueur dans le iixie-
me fiecle ; c'eft pourquoi il eft étonnant que
cet ouvrage fe Ibit tout à coup çerdu en Oc-
cident , fans qu'on en ait conîervé aucune
cop'e. Quelques auteurs modernes imputent
à Juftinien d'avoir fupprimé cet ouvrage,
de même que ceux des anciens jurifconful-
tes : en effet , il n'en eft plus parlé nulle part
depuis la publication du code de Juftinien;
& ce qui en eft dit dans quelques auteurs ,
ne doit s'entendre que de l'abrégé qu'en
avoir fait Anian.
Pour rétablir le code Théodojien dans (on
entier, on s'eft fervi, outre l'abrégé d' Anian,
de plufieurs anciens manulcrits , dans Icf-
quels on a recouvré différentes portions de
ce code. Jean Sichard en donna d'abord à
Bâlc , en 1518, une édition conforme à l'a-
brégé d' Anian: en 1549, JeanTilly ou du
Teil donna à Paris une autre édition //z-8°.
des huit derniers livres qu'il venoit de recou-
vrer, dont le dernier feulement étoit impar-
fait. On rechercha encore dans la conférence
des loix mofaïques & romaines , & dans les
fragmens des codes Grégorien &c Hermogé-
nien , dans celui de Jullinien , & dans les
loix des Goths & des Viiigoths, ce qui man-
quoit du code Théodojien.
Cujas , après un travail de trente années ,
en donna à Paris, en i ^66 , une édition in-
fol. avec des commentaires; il augmenta
cette édition des fixieme , fejjtieme «Se hui-
tième livres entiers , & d'un lupplément de
ce qui manquoit au feizicme dans l'édition
précédente ; & il nous apprend qu'il étoit
redevable de ce travail à Etienne Charpin.
Pierre Pithou ajouta à l'édition de Cujas les
conftitutions des empereurs fur le fénatuf-
confulte Claudien. Enfin Jacques Godefroy
Tome VIII.
C O D 5S5
parvint à rétablir les cinq premiers livres &
le commencement du fixieme , &: à difpofer
une édition complète du code Thtodofien :^
mais étant mort avant de la mettre au jour,
Antoine Mar ville , profe fleur en Droit à Va-
lence , en prit foin , & la donna à Lyon en
1 66 y en lix volumes //2-/c/. Jean Ritter, pro-
feflcur à Leiplic, en adonné, en 1756, dans
la même ville une édition auflî en (ix volu-
mes, revue & corrigée fur d'anciens manuf-
crits , & enrichie de nouvelles notes.
Il n'eft pas douteux que le code Théodojien
a été autrefois obiervé en France , & que les
ordonnances de Clovis , de Clotaire ion fils ,
& de Gondcbaut roi de Bourgogne , qui
portent que les Gaulois ou Romains feront
jugés fuivanc le droic romain , ne doivent
s'entendre que du code Théodojien , pairque
le code Juftinien n'étoit pas encore fait.
C'eft ce qu'obferve M. Bignon dans fes notes
fur Marcul. ch. lij. Godefroy, dans fes ;jro-
lég. du code Théod. ch. v y à la fin , & le P.
Sirmond, dans (on append. du code Théod.
Les Viiigoths qui occupoient les provinces
voifînes de l'Eipagne , avoient auffi reçu le
môme code ; mais il paroit qu'il perdit toute
fon autorité en France aufli-bien que dans
l'empire romain , lorlque le code Juftinien
parut en y z8 , Juftinien ayant abrogé toutes
les autres loix qui n'y étoient pas com-
priles.
Cependant M. Eretonnicr , avocat, dans
des mémoires imprimés qu'il fît en 1714
pour la dame d'Elpinay , au fujet d'un tef-
tament olographe fait en Beaujolois , pré-
tendit que le code Théodojien avoit toujours
continué, d'être obfervé en France , &c que
c'ctoit encore la loi des pays de droit écrie.
Il fe fondoit fur ce qu'avant la publication
du code de Juftinien on oblervoit en France
le code Théodojien ; que Juftinipn n'a voit ja-
mais eu aucune autorité enFrance; queChar-
lemagne fit faire unenouvelle édition duco^e
Théodojien j &: ordonna de l'enfeigner dans
tous fes états , & notamment à Lyon , où il
établit pour cela des profefleurs : il obfervoit
que l'édit des fécondes noces paroît fait en
conformité des loix des empereurs Théodofc
Se Valentinien ; que le chancelier de l'Hô-
pital, du temps duquel fut fait cet édit, n'ofà
citer une loi de Juftinien fans en demander
excufe au roi , d'où il concluoit que c'étoic
Ccc
38^ G O D
le code Thêodojîen que Ton obfervoir en Fran-
ce ; & que fi l'on citoit celui de Juftinien ,
«ce n'étôit qu'à caufe qu'il rcnfermdit les loix
qui étoient compiles dans le code Théddcflen
doù ces loix tiroient, félon lui, route leur
autorité : il allcgùoit encore le témoigna'ge
de Dutillet, qui vivoit fous Charles IX,
lequel auteur , en fbn 'recueil dés rois de
France , dit qiie le code Tkcodojicn ayant été
"reçu par les Viiigoths, étoit demeuré pour
coutume aux pays de droit écrit.
Ce paradoxe avancé par M. Bretonnier ,
quoique appuyé de quelques ràifons fpé-
Cieufes, révolta contre lui tout le palais,& ne
jfic pas fortune , étant contraire à Pufage no-
toire des pays de droit écrit , à celui des uni-
verfitésoù l''on n'enfeigne que les loix de Juf-
tinien, & àk pratique de tous les tribunaux,
où les affaires du pays de droit écrit font ju-
gées fuivant ces mêmes loix. M. Terrai'ïbn le
)pere qui répoîndit aux mémoires de M . Bre-
tonnier , ne ftiiinqua pas de relever cette pro-
pofitîon , & lit voir qUele code de Juftinien
avoit abrogé celui deThéodofc : que de tous
les auteurs qui avoient écrit fur le droit ro-
main dep'uis que Ifc code de Juftinien avoir
eu cours dans le royaume , il n'y en avoir
pas un feul qui eut jamais prétendu que le
code Théodcjie/i duz prévaloir fur Pautre ,quc
VincentiusGravina quia fait un traité de ori-\
gine juris , ne parle du code Tnéodojicn quei
comme d'un droit hors d^ifage, quipou'voi' j
fèrvir tout au plus à éclaiïcir les endroits obf *
curs du code de Juftinien , mais qui ne fait'
pas loi par lui-même ; & c'eften effet le feu!'
ufage qu'on peut faire du code Thêodojîen, {\
ce n'eft qu'il fert aulTi à faire connoïtre les:
progrès delà jurifprudence romaine , 5c
qu'il nousinftruit des mœurs & de l'hiftoire
du temps. F'oye:ici-deyantX2oT)E d'Alaric.
Code di là Ville', eft le titre qu'on
/iionnc quelquefois à une ordonnance de
Louis XIV, du mois de décembre 'i6jz ,
tonrenant Un règlement général pour la ju •
rildidion des prcvot des marchands & éche-
Vins de la ville de Paris.
Code voiYurin, eft 'un fecueildesédits,
âéclafatiôns,' lettrés-patentes, arrêts Se ré-
•jlerhens Concernant les fondions , droits ,
■privilèges, ifïiïïl unités, franchifes, libertés,
^ 'e^em'ptidns , tant des meffagers royaux
^lïe "de àcih "de 'l^UniVerOtéxîe Pa'i'is j "& au-
C O D
très voituriers publics. Cet ouvrage , qui eft
fans nom d'auteur, forme i vol. in-^°, il
a été imprimé en 1748 : il contient les prin-
cipaux réglemens intervenus kn cette ma-
tière , depuis l'an iioo jufqu'au ï6 déc.
Î747 ; l'auteur y a mis en quelques éndrbits
des notes pour en faciliter l'intelligence.
Code de la Voierie , eft un recueil des
ordonnances , édits , déclarations , arrêts ôc
réglemens fur le fait de la voierie, c'eft-à-dirc
de la police des chemins , rues ôc places pu-
bliques.Cet ouvrage forme un volume in-^°,
CODÉBITEURS , f. m. pi. (Jurifp.) font
ceUx qui font obligés à une même dette, loit
par un même titre ou par des acbes féparés.
Les codébiteurs , quoiqu'obligés conjointe-
ment & par le même adte, ne font pas obli-
gés folidairement , à moins que la folidité né
foit exprimée dans l'a6te \ fans cela, l'obliga-
tion fe divife de droit entre eux par égales
portions, à moins qu'il n'y ait quelque claule
exprelfe qui en oblige un à payer plus que
l'autre. LescodéBitéurs lont appelles en droit,
correi debmdi five promittcndi ; il en eft parle-
en diflférens textes du droit , qui font indi-
qués dans Brederode au mot rei. Voye';^auj]l
aux injlit. le titre de duobus reis Jiipulandi &
prornitîendi. {A)
CODÉCLMATEUR , f. m. {Jurifpr.) eft
celui qui a part dans des dîmes , foit ecclé-
haftiques ou inféodées , auxquelles un ou
plulîeurs autres décirnateurs ont aufïi droit
chacun félon leur pirt & portion. Les cod'e-
cimateurs qui jouilîènt des groftes d'âmes ,
font tenus chacun folidairement de fournir
la portion congrue,ou le fupplément d'icelle,
au curé qui n'a point de gros , fauf à celui
qui a payé la totalité , à exercer ion recours
contre chacun des autres codécimateurs pour
leur part & portion. F'oje:^D£CiMATEURS
S- Dîmes. {A)
CÔDÉTENTEURS , f. m. pi. {Jurifp^
font ceux qui font conjointement déten-
teurs d'un même héritage , foit par indivis-
ou divifément , chacun pour telle part djc
portion qu'ils y ont droit.
Les codétenîeurs font tous obligés folidai-
rement au paiement des charges foncières j
oc celui qui a payé pour tous n'a pas un re-
cours folidaire contre les au très ccdétentcursy ^
mais feulement contre chacun pour telle
part &: "portion dont ils font détenteurs.
C O D
En matière de rente conftituée , l'un des
codkeatturs de l'héritage hypothéqué étant
pourfuivi par action perfonneile , (uivant la
coutume de Paris , pour payer la rente , n^a
pas de recours de fon cher contre Tes coff/re/z-
teurs , à moins que le créancier ne Tait fu-
brogé en Tes droits & a<5bions. Cette matière
ert rrès-bien expliquée par Loyfeau , en Ion
traité du déguerpijf. liv. II, ch. viij. {A)
CODI AV ANACU , f. m. ( Hijîoire na-
turelle. Botanique.) plante du Malabar , af-
fez bien gravée , quoique fans détails , par
Van-Rheede, dans Ton Hortus Malabaricus,
vol. II, p. ^3, pi. XXXIV, fous ce nom , &
Ibus celui de cadi avanacu. Les Brames Tap-
pellent boin erando ôc boi erando. C'eft le tra-
gia ^ chamcelœa , foliis lanceolato-obtufis in-
tegerrimis de M. Linné , dans Ton Syflema
naturœ , imprimé en 1 767 , page Gig, qui le
confond avec le chameolœa foliis linearibus ,
Jlofculis ,fpicatis , echinato rudu , gravé par
M. Burmann , dans fon Thefaurus Zeylani-
eus , planche XXV , page 5^.
C''eft un fous-arbridèau qui croit fous la
forme d'un buiflbn ovoïde de deux à trois
pies de longueur , fur une largeur une fois
moindre, à racine fibreufe , brune, portant
une tige très-courte , cylindrique, de trois
lignes de diamètre , partagée dès fon origine
en quatre à cinq branches cylindriques,
écartées fous un angle de 10 à 30 degrés ,
verd-claires , menues , à bois blanc , ayant
un cœur rendre , verd , charnu au centre.
Les feuilles font alternes elliptiques, étroi-
tes, pointues aux deux bouts, longues de
deux pouces , cinq à fix fois moins larges ,
molles , unies , vertes de(Tus, pâles deflous ,
marquées fur chacun de leurs bords d'une
centaine de dentelures aiguës , fcmblables à
des crenelures très-ferrées , relevées en def-
(bus d'une cote longitudinale , & attachées
fous un angle de 45 degrés d'ouverture, ians
pédicule aux tiges , à des intervalles égaux ,
à-peu-près à la moitié de leur longueur.
Les fleurs mâles font féparées des femel-
les fur le même pie , de manière que les
mâles forment un épi dansl'aiflelle des feuil-
les fupérieures, pendant queles femelles font
folitaires à l'aillèlle des feuilles inférieures.
L'épi des fleurs mâles efl: citiq à iix fois plus
court que les feuilles, c'eft-à-dire, long de
trois à quatre lignes , couvert daiis fa moitié
COD 3»7
fupéneure par dix à douze flenrs feffîles ,
verd-jaunâtres, contiguës. Chaque fleur
mâle cft caduque ; & coniifle en un calice
verd-j aune à trois feuilles, & en trois éta-
mines courtes diftindes; & les fleurs femelles
n'ont qu'un calice à cinq feuilles perfiRantes,.
& un ovaire fphéroïde, porté fur un difque
orbiculaire aflèz court, & terminé par trois
fliigmates cylindriques ,, marqué d'un iillou
cylindrique fur leur face intérieure.
L'ovaire, en mûriflànt , devient une cap-
fule fphéroïde de quatre lignes de diamètre,
femblable en petit à celle du ricin , c'eft-à-
dire , à trois angles arrondis, portant chacun
trois rangs longitudinaux de petites épines
molles , à trois loges , s'ouvrant en trois
valves , àc contenant chacune une graine
ovoïde, cendré-brune , longue de deux
lignes, preique une fois moins large, à
amande blanche.
Culture. Le coài avanacu croît au Malab.fr,
dans les terrains labionneux & pierreux. Il
fleurit toute Pannée , mais plus abondam-
ment dans les temps pluvieux.
Vfages. Son fuc fe boit dans le vin pour
arrêter le flux de ventre ;& cuit dans l'huile,
pour réparer les forces. On en rire une huile
dont on frotte la tête pour dilîiper les verti-
ges & fortifier le cerveau.
Remarques. Qtielque refîemblance appa-
rente que la plante gravée par M. Burmann,
fous le nom de chamcelœa , ait avec le codi
avanacu, il y a tant de différences réelles qui
ne peuvent s'attribuer à une négligence , que
nous ne pouvons guère les confondre enfem-
ble. Voici les différences qui fe remarquent
dans l'efpece de l'ilc deCeylan ; 1°. fa ra-
cine eft noirâtre j 2°. la plante n^a pas un
pié de hauteur ; 5°. fa tige n'efl: pas rami-
fiée dès fon origine ; 4°. les feuilles font
plus étroites , huit à dix fois moins larges
que longues, dentelées plus finement enco-
re , plus obtufes , attachées horizontalement:
fur un pédicule cylindrique égal à leur lar-
geur \ 5". lescapfulesont à peine trois lignes
de diamètre.
Si tant de différences peuvent s'attribuer
à une négligence de la part des auteurs, il
ne faut plus compter fur la moindre certi-
tude dans nos connoiflànces j mais iî on
rend jufl:ice à l'exadlitude du travail de Van-
Rheede & de M. Burmann 5 fi d'ailleurs on
Ceci
388 C O D
coniidere que ces deux plantes font de deux
climats dilFcrens , on ne pourra guère les
confondre , comme a fuit M. Linné : on les
diftinguera au contraire en deux efpeces ,
qui paroillènc appartenir au genre du Tc/^o-
rigenam du Malabar , qui vient naturelle-
ment dans la famille des tithymales , où
nous l'avons placé. Voye^^ nos Familles d, s
plantes , vol. II, p, ^6^. ( M. Adanson.)
CODI-AVANAM , f. m. {Botan.) ar-
brifleau qui croit dans les lieux fablonneux
des Indes orientales. Voilà tout ce qu'on
fait de Tes catciûeres , ce qui nous diipenfe
de l'énumération de Tes propriétés.
CODiCILLAlRE , adj. {Jurifpr.) ce
terme efl toujours joint avec celui de claufe.
Voye■;^ci~(le^ ara Clause cocîcillaire.
CODICILLANT, adj. pris fubfl. {Ju-
rifpr. ) le dit , en pays de droit écrit , pour
exprimer celui qui tait un codicille , comme
on appelle tejîateur celui qui k^ii un tefta-
ment. Voye-;^ le traité des tejlamens de M.
Furgole , tome IV, ch. Xij,page^^^ ; & ci-
aprh Codicille. {A)
CODICILLE , f. m. ( Jurifpr. ) eft une
difpofition de dernitre volonté, qui diffère
en certaines chofes des teftamens.
Dans les pays de droit écrit , le codicille eft
un a6te m.oins lolcmnel que le teftament, &z
par lequel on ne peut faire que des difpofi-
tions particulières , ëc non pas dilpofcr de
toute la lucceilion.
En pays coutumier , les codicilles ne dif-
férent point des teilamens quant à la forme
ni quant aux effets 5 ce il: pourquoi Ton dit
orvlmairemtnt dans ces pays , que les tefca-
mens ne ionr que des codicilles.
Il y a néanmoins quelques coutumes qui
requièrent plus de formalités pour un tefîa-
mentj proprement dit , que pour un iimple
codicille , com.me celle de t'erry , qui diftin-
gue les teftamens des autres difpolitions de
dernière volonté.
On diftinguc aufTi en pays coutumier les
ccdiciiU& des teftameri5 : on appelle premier^
iecond , ou autres ceftamens , la dirpoiitîon
principale que le teflateur fait de fa fuccef-
iîon ; &c ious le nom de ccdt:ille, on entend
certaines di'pofîdons particulières mifes, foit
à la fuite du teftament ou par quelque aéte
féparépar lelquellesle teftateurr.joutCjchan-
ge ou modilie quelque choie à fon teftament. ^
C O D
Expliquons d'abord les règles que Vnn
fuit pour les codicilles en pays de droit écrit.
Vefembée en fes paratnles fur le titre de
ccdicillis ,n,Z, dit que le terme de codicille
eft un diminutif de co^ex, c'eft-à-dire, un
petit écrit moindre que le tefbment.
- On appelle ccdicillaiit , en pays de droit
écrit , celui qui feit un codicille.
L'ufage des ctdicilles étoit moins ancien
chez les Romains que celui des teftamens ;
la loi des douze tables ne parloir que des
teftamens , & les codicilles ne furent intro-
duits que fous le règne d'Augufte.
Les codicilles ne furent d'abord autorifés.
que pour les fîdéi-commis ou fubftitutions ^
lefquels éroient confirmés quoique faits par
un codicille : mais il n'étoit pas encore per-
mis de faire ainfi des legs j c'eft ce que dé--
note la loi ^6 , Jf'. de légat. ;î° , où il eft dit
que la fille de Lentulus paya des legs f-iits par
un codic //e , quoiqu'elle n'y fat pas obligée ;
il y a aufïi plufîeurs textes de droit qui indi-
quent que les legs , pour être valables , dé-
voient être faits par teftament. Dans la fuite
on confirma les legs loit univerfels ou parti-
culiers , quoique faits par un codicille; mais
le ccdic.lL ne iaifit point le légataire; il doit
demander la délivrance à Théritier inftitué ,
s'il y en a un , ou à l'héritier abinteftat.
Le droit romain ne permet point d'infti-
tuer un héritier par un codicille , ni d'y infti-
tuer ou exhérécler fes enfans & autres qui
ont droit de légitime; cela ne fe peut faire
que par teftament , ce qui a été ainfi ordon-
né , dit Juftinien , afin que le droit des tef-
tamens. & des codicilles ne fût pas confondu.
Les codicilles ^tXxytxK concourir avec un.
teftament , ou fubfifter fans qu'il y ait de
teftiiment ; ils peuvent aufTî précéder ou fui-
vre le teftament , & n'ont plus befoin d'ctre
confirmés par le teftament , comme cela fe
pratiquo-it autrefois loîfqu'ils étoicnt anté-
rieurs.
Lorfqu'il y a un teftament, les codicilles
antcritnrs ou poftérieurs font cenfes en ftiire
partie , &; s'y rapportent tellement , que fl le
teftament eft nul dans (on principe par quel-
que défaut de focmahté , ou que l'héritier
inftitué répudie la fuccefTion , les codicilles-
fuivent le même fort que le teftament.
On diftingue dans le droit romain trois
forces de co J/a7/e^,.fayoir» 1°. ceux qui foat
C O D
miftiques ou fecrecs , comme les teftamens
ainh appelles , c'eft-à-dire , qui font écrits ôc
clos ou cachetés j mais pour faire un tel co-
dicilb il faut du moins pouvoir lire , comme
il réiulte de l'art, xj dr l'ordonnance des tej-
tamens : i". les codicilles nuncupadfsxjui pou-
voient être faits verbalement & fans écrit en
prtience de témoins , comme les teftamens
nuncupatifs ; mais ces fortes de codicilles font
abrogés par l'ordonnance des teftamens ,
qui veut que toutes difpoiitions à caufe de
mort loient rédigées par écrit y. à peine de
nullité : 3°. les caa/c/V/e^. olographes, qui font
admis par le droit romain en faveur des en-
fans & autres defcendans ; ces fortes de co-
dicilles font confirmés par l'ordonnance des
teftamens , qui veut qu'ils foient entièrement
écrits, datés <k lignés delà main du teftateur.
On ne doit pas prendre à la lettre quel-
ques textes de droit , qui difent que les co-
dicilles ne demandent aucune formalité ; ce-
la iignihe feulement qu'ils ne font pas fujets
aux mêmes formalités que les teflnmens,
comme d'inftituerun héritier, d'inftiruer ou
exhéréder fes enfaiis, ôc d^appeller fept té-
moins, &c.
Pour la validité du codicille , il faut , fui-
vant le droit romain , que le codicillant ,
.c'eft-à-dire , celui qui dilpofe, explique fa
volonté en préfence de cinq témoins aiîem -
blés dans le même lieu 3^ dans le même
temps ; & fi le ccdicille eft rédigé par écrit &c
cacheté , les témoins doivent leiîgner.
h'ordonnance des tejlamens , art. xir, veut
que b forme qai a eu lieu jufqu'à préfent
pour les codicilles ^conûiviid d'être obrervée.
Suivant cette même ordonnance , les co-
dicilles doivent toujours être dates 5 & h le
codicille eft clos , la date doit fc troxiver tant
dins l'intérieur que dans Padie de fufcrip-
tion : fiJe codicille c(ï nuncupatif, il doit être
■prononcé noa feulement devant les témoins,
mais aulli en. préfence de la psrfonne publi-
que qui en drclle Pade ; 5c il le codicille eft
clos , il fuftir qull foit écrit par le. teitataïf
Gu d'une autr^e main , mais toujours figné du
telb-teur; Se s'a ne lait ou ne peut figner , il
faut appeller un témoin de plus à l'aéVe de
fufcnption , comme cela eft ordonné pour
les teftamens , art. x. Il en eft de même îorf-
que celui qui dilpofe eft aveugle.
Les codfû/Ucs foiii, entre é;ïangcrs , c'cft.-
C O D 3.S^
à-dire , au profit d'autres que les enfans ôc
defcendans de celui qui diipofe , doivent
être reçus par un notaire ou tabellion , en
préfence de cinq témoins, y compris le no-
taire ou tabellion ; fi la coutume du lieu'
exige un moindre nombre de témoins , il
iuiiit d^appeller le nombre qu'elle prefcrit.
Pour ce qui eft des coduilles faits au pro-
fit des eiitansou autres defcendans de celui
qui difpofe , il fuffit , luivant l'art, xv de
l'ordonnance , qu^'ib foient faits en préfence
de deux notaires ou tabellions , ou d'un no-
taire &c deux témoins.
Du refte , les témoins appelles à un co-
dicille , doivent avoir les mêmesqualités que
pour alTifter à un teftament. Le droit ro-
main dîftinguoit feulement les codicilles , en
: ce qu'il n'étoit pas néceflaire que les témoins
fulîent priés comme pour les teftrmens ;.
mais l'ordonnance ayant aboli cette fubtilité,
il n'y a plus à cet égard aucune diftinâ:ion.
Les Codicilles qui font reçus par une per-
(onne publique , doivent être faits uno con-
textu , en préfence de tous les témoins ; ils
doivent être écrits & datés de la main même
de l'ofîicier public , de même que les tefta-
mens. Le Codicille doit en fuite être lu en
. préfence du codicillant & des témoins , &
l'officier public doit faire mention de cette
lecture, après quoi le codicillant doitfigner;
& s'il ne le fait ou ne le peut faire , on en
doit fîire mention. Les témoins doivent
pareillement figner tous , fi c'eft dans une
ville ou bourg muré : mais fi le codicille eft
fait ailleurs , il fufïit qu'il y en ait deux qui
fâchent figner & qui fignent en effet, &
que l'on fine mention que les autres ne fa-
voient ou ne pouvoicnt figner j enfin , il
faut que le notaire figne l'acte.
Pour ce qui eft des codicilles en faveur des
enfans ou defcendans en pays de droit écrit,
ils ne demandent pas tant de formalités que
ceux qui font faits au profit d'étrangers ; ils
peuvent être faits en deux, manières ; Pune
en préfence de deux notaires ou tabellions ,
ou d'un notaire &deux témoins; l'autre eft
en forme olographe , c'eft-à-dire , qu'ils
(oient entièrement écrits , datés & fignés du
codicillant. Art. xv & xvj de l'ordonnance
' des tejlamens.
Une différence efTentielle entre les tefta-
mens wC les codiCiUes en gays de droit écrii:..
3pe^ C O D
^uaiît à leur effet, c'eftc^uc les dirpofitions
laites par ccdicille ne failiflènt point , mais
font fujettes à délivrance.
En pays coutumier , la forme des tefta-
mens & celle des codicilles eft la même.
Les codicilles qui fe font devant une per-
sonne publique , peuvent être reçus par les
mêmes officiers que les teftamens , & ne de-
mandent pas plus de formalités ; on y peut
aulîî fiire des codicilles olographes , éc les
codicilles y ont le même e|Fet que les tefta-
mens.
Les codicilles militaires ou foits en temps
de pefte , fort en pays coutumier ou en pays
de droit , font fujets aux mêmes règles que
les teftamens militaires.
Pour faire un codicille en général , il faut
avoir la même capacité de dilpofer que pour
faire un teftament , 11 ce n'eft qu'en pays de
droit écrit, pour difpofer par teftament, il
faut en avoir la capacité au temps du tefta-
■ ment & au temps de la mort j au lieu que
pour un codicille il fulfit de pouvoir difpo-
ler au temps de la mort.
A Pégard de la claufe codicillaire , nous
en avons parlé ci-devant au mot Clause.
La matière àes codicilles eft traitée ample-
fnent par Furgole , en fon traité des tejla-
mens . tome IV . ch. xij. {A)
CODIGI, f. m. {Hifloire naturelle. Bo-
tanique.)'ph.ntt duMalabar, très-bien gravée,
avec la plupart de fes détails, par Van-Rhee-
dc , dans (on Hortus Malabaricus , vol. /X",
planche L XV, page l%j , fous le nom mala-
baie foneri ila. Les Brames Tappellent codiji.
Jean Commelin , dans fes notes fur cet ou-
vrage, VapçeUepulmonaria folio macula to In-
dica fimilis ,floribus tripetalis rofhceo-faturis.
C'eft une herbe annuelle qui s'élève fous
la forme d'un petit buiflbn iphérique de (îx
pouces environ de diamètre. Sur une racine
conique , verticale , de trois pouces de lon-
gueur , fur deux lignesde diamètre , peu ra-
mifiée, ligneufe, s'élève droit une tige cylin-
drique d^une ligne de demie de diamètre , de
quatre pouces environ de hauteur , à trois
ou quatre branches alternes, relevées vertica-
lementcontrelatige^blanchâtrescommeelle
chsft-nues , aqueufes , hériflces de longs poils.
Cinq à iix feuilles alternes , dii'poiées cir-
cuîairement , gamiflènt cette tige. Elles font
«ilip tiques , ^roiadies à leur exti^mité 'm\é-
CO D
rîcure , qui eft légèrement échancr^e , poin-
tues à rextrémité antérieure , longues de
trois à quatre pouces , une fois mouis larges
entières, rouge-violettes , excepté à leur mi-
lieu , qui eft verd-brun , héniîées de poils
longs , qui fortent chacun d'une follette
ronde , blanches , relevées en defibus d'une
côte ramifiée en fept à huit paires de ner-
vures alternes, exportées horizontalement
d'abord , enfuite pendantes fous un angle
de 4 y degrés , fur un pédicule cylindrique
blanchâtre , fillonné en defliis.
Du bout de chaque branche & de l'aiflèlle
de chaque feuille , fort une ombelle en co-
rymbe une fois plus courte qu'elles, compo-
fée de cinq à fept fleurs rôles , ouvertes en
étoile de cinq à fept Hgnes de diamètre i &c
portées fous un angle de 45 degrés fur un
pédicule cyEndrique, rougeâtre, une à deux
fois plus court qu'elles. '
Chaque fleur eft hermaphrodite , mono-
pétale , régulière , pofée fur l'ovaire. Elle
confifte en un ovaire ovoïde, hériifé de
poils , long d'une ligne &c demie , de moitié
moins large , furmonté d'un calice à trois
dents horizontales , d'une corolle monopé-
tale, rouge de rofe , à tube très-menu , très-
court , à trois grandes divifions eUiptiques j
pointues aux deux bouts , de moitié plus
longues que larges , épaiiouies horizontale-
ment , & en trois étammes auiïî longues
qu'elles , élevées droit , rouges , attachées au
haut du tube , & terminées par des anthères
jaunes triangulaires , pointues. Du fommet
de l'ovaire au centre de la fleur , s'élève un
ftyle rouge , terminé par un ftigmate iîmplc
tronqué velu.
L'ovaire , en mûriflant , devient une cap-
Iule ovoïde , qui paroit être à une loge rem-
plie de quantité de femences menues.
Culiure. Le codigi croît au Malabar dans
les terres iablonneules. Il eft annuel.
Remarque. Cette plante n'a encore été dé-
terminée par aucun botanifte , & elle forme
un genre particulier dans la famille des cam-
panules. Voyei^ nos Familles des plantes, vol,
II y page î^^. {M. Ad AN SON,)
CODILLE , terme de jeux. On dit être
codille à l'ombre , au médiateur , au qua-
drille , ùc. quand on ne fait pas le nombre de
mains prefcrites par le gain ou la remife de
la partie. VoyeT^cesjcax. iÉb-
C O D
CODrVI , r. m. {Hijîoire naturelle. Bota-
nique. ) & codivi vasji , nom que les Brames
donnent à une plante du Malabar , allez bien
gravée , mais avec peu de détails, par Van-
Rheede,dans Ton Hort. Malabaricus^ vol. X,
pi. XXIV, p. 47, fous le nom de kaijfa tsjira.
J. Commelin,dans Tes notes fur cetôuvrage,
l'appelle rubia fylvejlris floribus pentapetalis.
Sur une racine Vivace, verticale, longue
de cinq à lix pouces , fur trois lignes de
diamètre , afl'ez ramifiée , ligneufe , blan-
châtre , s'élève un buiflon de iix à fept pou-
ces de diamètre , compofé d une vingtaine
de tiges cylindriques ramifiées , chacune en
quatre ou cinq branches alternes , ouvertes
preique horizontalement , cylindriques ,
vertes,d'unc demi-ligne au plus de diamètre.
Les feuilles font oppoféesdeux à deux en
croix , accompagnées Ibuvent de deux folio-
les une fois plus petites , & de deux ftipules
ïnembraneufes. Elles font elliptiques, poin-
tues aux deux extrémités, longues de quanre
à cinq pouces, prefque une fois moins larges,
entières , molles , aqneufes , lillès , relevées
en deflous d'une cote longitudinale , fans
ramifications , attachées horizontalement
fans pédicule le long des branches à des dif-
tances égales à leur longueur.
De PaiflHle de chaque feuille fbrtent tme
a trois fleurs oppofées, blanchâtres, égales à
'elles , y compris le péduncule qui les porte.
Chaque fleur eft hermaphrodite , polipé-
tale , incomplète, polée autour de Povaire,
& s'ouvre en hémiiphere de trois lignes au
•plus de diamètre. Elle coniïfte en un calice |
verd extérieurement, blanchâtre intérieure-
ïnent, à cinq feuilles elliptiques concav<;s ,
deux fois pl-us longues que larges , periiftan-'
tes , en une corolle à cinq pétales blaiics ,
en cinq itamines oppofées au calice , de
même longueur , à anthères blanches , &
'en un ovaire fphéroïde blanchâtre , portant'
un fl:>'ie partagé en trois ftigmates cylindri-
ques iîmples & veloutés à leur extrémité,*
qui eft tronquée.
L'ovaire , en m.iariflant , devient une cap-
-fuîe ovoïde , longue de près de deux lignes,
. frefque une fois moins large, verd-blanchâ-
"tre , à une loge, s^'ouvrant eh "trois valves
'& contenant plulieurs pérîtes graines ovoï-
des , noirâtres , attachées autour d'un.pla-
'cêiita en colonne centrale.
cor) 39t
Culture. Le codivi eft vivace j il croît au
Malabar dans les fables.
Qualités. Toutes fes parties ont une (àveut
amere.
Ufages. Son fuc tiré par expreflîon , fè
•boit avec le gingembre , le poivre te le Tel
'Contre les douleurs du bas-ventre.
Kemarques. Jean Commelin n'a pas ren-
contré fort jufte en comparant cette plante
aux rubiacées ou aparines. On voit qu'elle
forme un genre particulier voifm du p/^^r/z^-
ceuTTi dans la famille des efpargnetes , fper-
gulœ , qui eft notre 38®. Fbje:(_ nos Familles
des plantes , vol. II , page ÇLJX. {M. Adan-
SON.)
CODON , ( Mujîque injlrumentale des
anciens. ) Ce mot , qui dans le fens propre
(igniîie une cloche , iîgnifie auffi la partie
inférieure des flûtes des anciens. Cette partie
étoit ordinairement de corne de veau ; &;
on la nommoit codon , à caufe de fa reflem-
blance à une cloche. Vcye^F l\j te y {Mujiq.
injlr. des anciens^ { F. D. C.)
CO-DON AT AIRES , f, m. pi. (Jurif-
prud. ) font ceux qui font donataires con-
jointement d'un même effet : le donateur
peut les aflocier ainfi , Ibit en leur donnant
à tous par un même adle, ou en leur donnant
à chacun par un a6te féparé. Il peut aufïi
leur donner à tous la même chofe par indivis
ou par portions diftinguées , égales ou iné-
gales. F. Don ATAiPvEs 6' Donation. {A)
CÔDONOPHORES , f. m. pi. ( Kiji.
c.) c'éfoit l^'ufàge chez les anciens de faire
anc.
accompagner le cadavre à fon enterrement
par un porteur de fonnette, C'eft cet
homme qu'on appelle codonophcre.
CODUVO , f. m. {Hiffoire naturelle.
Botanique,) Les Bram^es appellent de ce nom,
& de celui coduvo nani & rana nimba , un
arbre du Malabar , fort bien gravé , avec la
plupart de fes détails , par Van-Rheede ,
dans fon Hortus Malab ricus , volume IF,
planche XIII , pageçtg. Les Portugais l'ap-
pellent///tt/jo coroaJo ; (3<:les Hollandois,
wilde litnoencn.
. Il s'élève à la hauteur de foixante-dix à
quatre-vingt pies. Son tronc eft cylindri-
que, haut de quiiîze à vingt pics , fur deux
à trois pies de diamètre , couronné par une
cime ovoïde , une fois plus longue que large,
formée par nombre de branches alternes ,
39i C O D
cylindriques , médiocrement longues , écar-
tées fous un angle de 45 degrés d'ouverture ,
à bois jaune , plein de moelie fongueulè , &
recouverte d'une écorce épaifl'e , cendrée.
Sa racine eft jaune , à écorce brune.
Ses feuilles font oppofées deux à deux en
croix & alternes , elliptiques , pointues aux
deux extrémités , longues de deux pouces à
deux pouces &: demi, une fois moins larges,
entières, ondées , comme crépues, relevées
"endefl'us d'une côte longitudinale, ramifiée
en cinq à fept' paires de groiles nervures ,
&c portées horizontalement fur un pédicule
demi-cylindrique , trois à quatre fois plus
court qu'elles , à des diftances égales à leur
longueur.
Au defibus de chaque feuille on voit fortir
une petite épine conique , droite ,^ brune ;
luifanre , fimple , quelquefois ramifiée , ho-
rizontale , longue de deux à quatre lignes.
Chaque branche ell terminée par un co-
rymbe de deux à fix fleurs feffiles , verd-jau-
ties , ouvertes en étoile de fept lignes de dia-
mètre.
Chaque fleur eft: hermaphrodite , polypé-
tf le , complète , régulière , pofée fur l'o-
vaire. Elle confirte en un calice verd , à cinq
petites dents triangulaires , en cinq pétales
verd-jaunes, triangulaires, ou en cœur,
épanouis horizontalement , deux à trois fois
plus long que le calice , & en huit à dix éta-
mines blanches , une fois plus courtes , rele-
vées en cône. Au delî'us de cette fleur eft
l'ovaire ovoïde , obtus , long de trois lignes,
de moitié moins large , terminé^en deflus
par un ftyle blanc, cylindrique, couronné
par un ftigmate fiihple , cylindrique , tron-
qué & velouté.
L'ovaire , en mûriffant , devient une baie
ovoïde , obtufe , comme arrondie , longue
d'un pouce & demi , d'un tiers moins large ,
couronnée par fon calice , verd-noire d'a-
bord, piquetée deblanc , enfuite jaune d'or,
citron , marquée extérieurement de huit à
dix côtes à chair blanche , aqueufe , parta-
gée intérieurement en deux loges qui con-
tiennent chacune quinze à vingt pépins el-
liptiques , obtus, blasichatres,luifans, longs
d'une ligne & demie , de moitié moins lar-
ges, enveloppés dans une membrane comme
ceux du grenadieroude la fleur de palfion,
<J^ diftribués fur deux rangs.
C O D
Culture. "Le^cduvo croît au Malabar , flir-
rout vers les provinces de Para-Karo & Kai-
maal , dans les terres fablonneufes ik pier-
reules. Il fleurit une foistous les ans, l'avoir,
en odobre & en novembre, de porte fts
fruits à maturité en décembre & janvier.
Qualités. Toutes les parties de cet arbre
'ont ameres & aromatiques. Ses fleurs ré-
pandait une odeur fuave & comme amere.
)es fruits ont une acidité vineu'e.
Ufages. Le fuc exprimé de fes feuilles a
une vertu errhine ou fternutatoire , propre à
purger la tête de fes humeurs. Ce même lue
(e boit ayec le poivre-long , le gingembre &:
le fucre pour appaifer la toux , & difïiper les
affeélions du poumon , qui doivent leur
origine à une caufe froide. La décoébion de
es feuillesdans Peau forme un bain qui dif-
fipe fouvent la lafl[itude & les douleurs des
membres.
Remarques. Le coduvo eft un genre parti-
culier de plante qui fe range naturellement
dans la famille des onagres , où nous l'avons
placé. Fbye^ nos Familles des plantes , vo-
lume II y page 8^. ( M. Adanson. )
CCSCALE, adj, en Anatomie, fe dit de
l'artère & de la veine qui fe diftribuent au
cœcum. Voyc^^ Ces eu m. (L)
CCSCITE , lubft. f. ( PhyfioL) privation
de la vue , foit par défaut de naiflànce , foit
par l'âge , par accident ou par maladie : perte
du fens qui eft le plus fécond en merveilles,
& dont l'organe eft le miroir de Pâme.
Seafons rtturn , but not to me returns
Day y or the fweet approach of ev*n , or
morn ,
Or fight ofvernal bloom, orfummer's rofe
Orjlocksy or herds, or humaneface divine :
But cloud injlead , and ever during dark
Sur rounds me. . . .
'> Les faifons & les années reviennent , mais
» le jour ne revient pas pour moi \ Içs rian-
>j tes couleurs du loir éc du matin ne me
" confolent point : je ne vois plus les bbu-
» tons du printemps , ni les rofes de l'été :
» la beauté du vifage de l'homme où le créa-
'> teur a imprimé les traits divins de fa ref^
» femblance, ne frappe plus ma vue : je
» fuis entouré d'épais nuages , une nuit làns
» fin m'envisonne. "
I Telles font les triftes réflexions que fait
M il ton
C O E
Milton fur la perte de fa vue. Il n^eroît pas
•dans le cas des aveugles-nés : il regrettoit
des biens qu'il connoifl'oit , &C qui ne rou-
' rhent point les autres. Combien d'accidens
diffcrens peuvent nous jeter dans le même
malheur pendant le cours de la vie ♦ Je ne
me propoiè point de faire avec exa6titude
'la trifte énumération de ces accidens, je
me conter.terai de généralités; le déraille
trouvera dans ce didiomiaire fous chaque
article.
Les caufes nombreufes , qui produifent
la c^^aVe font internes ou externes.
Les caufes internes , font toutes les ma-
ladies de quelque efpece qu'elles foient , qui
attafjuant violemment le globe de l'œil , dé-
truiient là figure , fes tuniques , feshumeurs,
fes vailïèaux &c les nerfs ; ainfi des tumeurs
inflammatoires , des abcès , des apoftumes,
des skirrhes , des cancers , &c. feront au-
tant de caufes de l'aveuglement.
La vifion eft encore abolie par de gra-
res maladies fur la cornée & la conjondive ,
telles que leur obfcurciiîement , leur épaif-
-iîrfement, leur fuppuratiôn , & les cicatri-
ces de ces tuniques fur Taxe de la vue.
Si Phumeuraqueufe vient à manquer, ou
■à s'écouler dans la cornée tranfparente, Tctil
s-'éteint -, fi elle rtoupit , elle détruit la fabri-
que de cet organe par fi putréfaftion ; fi elle
s'épaiiTît entre les parties internes de l'uvée
& le cryftallin , ce font des fuffufions , des
cataradtes , 8c par conféquent la ccecité.
Si Puvée fe relferre & devient immobi-
le , l'aveuglement de jour en eft PefTet ; fi
• elle fuppure, c'eft l'aveuglement de jour &
de nuit.
L'opacité, la corruption , la fonte , l'a-
trophie du cryftallin , produifent la cata-
racte ou le glocome , & en même temps la
- perte de la vue : l'humeur vitrée expofée aux
• mêmes maux , a la même fuite.
La choroïde , la tunique de Ruy fch , étant
fu jettes par leur ftruéture & leur délicatefle
■ à 1 inflammation &à la fupuration , feront
afft^iftées de nuages & de vifions confules ,
qui fe terminent par la privation de la
' ûimiere.
La prunelle , la rétine & les nerfs optiques
■ attaqués de paralyfie , d'érofion , de corrup-
tion , d'obftrudbion , en forte que la com-
= BQUiîîcation libre entre ces paçties daais leur
Tome VJIl
C O E 5^3
origine &la moelle du cerveau foit abolie,
la ccpcifé doit en réfulter inévitablement.
Les caufes externes font ou communes à
tous les pays, ou particulières à certains
lieux & à certains hommes.
Les caufes externes communes à tous les
pays feront les coups violens , les chûtes fur
l'œil, les piquures ,les bîeflures, les plaies ,
les exhalaifons vénéneufes , qui picorant ,
déchirant , rompant & féparant entièrement
par leur violence les parties intérieures de
l'œil , le font Ibrtir hors de fon orbite ; on
confondantintérieurement fonorganifation, '
produifent la c^^aVe douloureufe qui fuit né-
ceflàirement de ce ravage.
Les caufes particulières de la cûecîré chez
certains peuples & à certaines perfbnnes,font
la trop grande quantité de lumière qui blefïe
perpétuellement leur vue , on en a des exem-
ples fréquens dans le feptentrion.Les Samoje-
des , les habitans de la nouvelle Zemble ,
les Borandiens , les Lapons , les Groënlan-
dois , & les Sauvages du nord , continuelle-
ment éblouis par l'éclat de la neige pen-
dant l'hiver , le printemps & l'automne ,
& toujours étouffes par la fumée pendant
Tété , deviennent la plupart aveugles en
avançant en âge. La neige éclairée par le
foleil dans ces pays du nord , éblouit les yeux
des voyageurs au pointqu'ils font obligés de
fe couvrir d'un crêpe pour n'être pas aveu-
glés. Il en eft de même des plaines fablon-
neules de l'Afrilque; la réflexion de la lu-
mière y eft fi vive qu'il n'eft pas poftîblc
d'en foutenir l'éclat fans courir le rifque
de perdre la vue.
Les brodeurs , les ta'piftîers , les cifeleurs,
les graveurs , & tous ceux qui parmi nous
ont des métiers de cette efpece , fatiguent
confidérablement leur vue , Se la perdent à
la fin ; parce que l'éclat de l'or , de l'argent ,
& des autres couleurs , fait une impreffion
trop vive fur leurs yeux , ce qui les affoiblit
& les ruine , les rayons de lumière n'étant
plus fuffifamment modifiés par la rétine.
Lesaftronomes par l'ufage du télefcope ,
les naturaliftes par celui du micro (cope , 6c
les gens de lettres par leurs travaux perpé-
tuels, fe préparent un aveuglement préma-
turé. Milton , le célèbre Milton , ne devint
aveugle que parce que dès l'âge de 1 1 ans
U ne xjuittoit fes études qu'après minuit ; k
Pdd
354 C O E
foibleflè de fa vue ne put jamais le corriger
de cette habitude. Comment abandonner
«ne occupation délicieufe , confoknte dans
radverilté , propre à rehauiîcr le luftre de la
fortune dans la profpérité , répandant en
tous temps d'innocens plaiiirs., fans em-
barras , fans foucis & fans regrets ?
Le feul bon avis qu'on puifl'e donner aux
gens qui lifcnt & qui écrivent long-temps
de fuite, c'eft du moins d éviter de travail-
ler à une lumière trop forte ; il vaut beau-^
coup mieux , à choix égal , faire ufage d'une
lumière trop foible, Pœil s'y accoutume
bientôt j on ne peut tout au plus que le
fatiguer en diminuant la quantité de lu-
mière , & on ne peut manquer de le blelîer
•en la multipliant : l'on doit ce confeil &
-les faits fur la trop grande lumière comme
caufe de la ccecité , à l'ingénieux phyficien
qui a décoré Ion hiftoire naturelle d'une
charmante phyf ologie.
La caecité , apanage de la vieillelîè ou de
la décrépitude, naît du re tréciflemeni de Pu-
vée , de la conjonctive , de la cornée , de la
diminution du cryftallin , de la coalclcence
des vaifïèaux , du manque d'efprits ; &c pour
le dire en un mot , de f'ufement de la ma-
chine qui n'eft fufceptible d'aucun remède.
Mais n'y en a-t-il point pour la cûecité pro-
duite par les autres caufes dont nous avons
parlé î La médecine & la chirurgie n'y peu-
vent-elles rien? Faut-il toujours défefpérer
de la cure de cette maladie? D'heureufes
expériences ont quelquefois prouvé le con-
traire , & l'arc nous apprend à diftinguer les
efpeces de cadîé qui Ibnt incurables , d'avec
celles dont on peut tenter ôc opérer la gué-
lifon.
La caché fymptomatique , quelle qu'elle
ioit , ne doit point alarmer, elle finit avec
le mal dont elle émane. Celle par exem-
ple , qui provient de pituite , de lymphe
épaiflîe dans le cerveau , ôc qui accompagne
les maladies foporeufes & apoplectiques ,
celle avec la maladie par les remèdes réfo-
lutifs, épifpaftiques , volatils, cathardiques,
& par les fternutatoires.
La CiTC/Ve produite par la fupprelïîon d'un
ulcère ou de toute matière morbifique , por-
tée par la circulation dans le cerveau , fê
icrablitpar la cure ordinaire delà métaftafe.
La catff/e caufée par l'akératiou du cryf-
C OE
tallin fe guérît , comme on {air , par Pope-
ration , mais la catarade adhérente à l'iris
eft fans remède.
La C(*d/e fubite occafîonée par des va-
peurs de lieux fouterrains , eft encore gué-
riflable : nous en avons un exemple dans
Phiftoire de l'académie des fciences , ûnn,
ïjii ,pag. z6. Des exhalaifons d'une vieille
folfe produiiîrent un aveuglement réel fur
deux manœuvres ; ils recouvrèrent la vue
en vingt-quatre heures par des comprefles
imbibées d'une liqueur fpiritueufe tirées des
plantes aromatiques mifes fur les yeux , qui
reportèrent les efprits dans cet organe.
Mais, je le dis avec douleur , l'atrophie
de l'œil, la fortie entière de l'orbite par quel-
que coup ou inftrument , en forte qu'il ne
tient plus qu'à quelques fibres nerveu'es
charnues , ou membraneufes i l'abcès de la
cornée , les cicatrices de cette partie qui cou-
vrent la prunelle , le delféehement entier du
cryft»llin , la fonte du corps vitré , la def-
truûion de la choroïde , la flétriflhre des
nerfs optiques , leur paralyfie , Sfc. forment
tout autant d'efpeces de cœcité qui fonc
abfolument incurables.
Je ne parlerai point ici de la cœcité de
naillance , ni des aveugles-nés. V^oy. Aveu-
gle & Aveuglement. Art. de M, le che-
valier DE JaU COURT,
C(SCUM ,C. m. (Anat.) le premier des
gros inreftins ; on le nomme cœcum ,
c'eft-à-dire aveugle , parce qu'il n'a qu'une
ouverture qui lui fert d'entrée & de fortie.
Les modernes ayant divifé les gros intef-
tins , quoiqu'ils ne fillent qu'un canal con-
tinu en trois portions ; la première , qui
eft faite en forme de poche , s'appelle le
cœcum. Rufus d'Epheiè le nommoit ap-
pendicula cœci.
Ce n'eft qu'un bout d*înteftin comme
une efpece de fac arrondi , court & large ,
dont le fond eft en bas, & l'ouverture ou lar-
geur en haut. Il eft fitué fous le rein droit ,
èc caché par la dernière circonvolution de
l'inteftin ileum. Sa longueur eft environ de
trois travers de doigt , plus ou moins ; fon
diamètre a plus que le double de celui des
inteftins grêles ; on voit au travers de fa tu-
nique charnue trois bandes ligamenteufes
adhérentes à cette tunique , & qui fe réunif^
fent fui l'appendice vermiforme, dont elles
C O E
couvrent la convexité. La tunique interne '
du cacum porte une efpece de velouté ras ,
parfemé d'efpacc en efpace de follicules
glanduleufes ou glandes fblitaires , plus lar-
ges que celles des inreftins grêles. L^ufage
du ccecum ell de contenir pour un temps
les excrémens , jufqu à ce qu'ils entrent
dans le colon.
Sur le côté du fond du caecum , fe trouve
un apendice comme un petit inteftin, pref-
que de la même longueur que le ccecum ,
mais extrêmement grêle, on lappelle û^^/^e/z-
dice vermiculaire ou vermiforme, à caufe qu'il
a quelques entortillemens à-peu-près comme
ceux d'un ver quand on le touche. Il rcflem-
ble aulïi en quelque façon à la pendeloque
charnue de la tête d'un coq-d'inde. Son dia-
mètre n'excède guère trois lignes pour l'or-
dinaire. Il s'ouvre par une de Tes extrémités
latéralement dans le fond du cœcum \ l'autre
extrémité qui eft fermée, eft quelquefois
plus étroite , & quelquefois plus ample que
le refte de fa longueur. Cette extrémité fer-
mée n'eft point attachée au méfentcre , mais
au rein droit , par le moyen du péritoine.
L'appendice vermiculaire eft tout parfemé
de follicules qui répandent continuellement
dans (à cavité une efpece de liqueur onc-
tueufe , lubrifiante.
On ne connoit point encore l'ufage de
cette partie ; mais entre plufieurs fèntimens
qu'il lèroit inutile de rapporter, leplusvrai-
(èmblable femble être celui des phyficiens
qui prétendent qu'elle fert à fournir une
cenaine quantité de liqueur mucilagineufè
propre à lubrifier la furfice interne du fac
du colon , & à ramollir les excrémens qui y
font contenus. Le grand nombre de folli-
cules glanduleufes qu'on trouve danscet ap-
pendice , & la conformité de ftruéture du
cœcum dans les brutes, femble juftifier cet
ufage , non-feulement dans les adultes ,
mais encore dans les fœtus humains.
On objeélera fans doute que ctt appen-
dice étant à proportion beaucoup plus grand
dans l'enfant nouveau né que dans l'adulte ,
il paroît qu'il doit avoir dans le premier quel-
que autre ufage qui nous eft inconnu : mais
il eft vraifemblable que la petitefte de cet
il teftin d ns l'adulte , dépend de la com-
preflion qu'il fouftxe , & de ce qu'il fe dé-
charge iûuventdcs matières qu'il contient j
COE ,95
au lieu que dans le fœtus il n'y a point de
refpiration , niparconféqucntde compref-
fion qui puiflc en exprimer les matières qui
y font contenues , d'ailleurs le meconium qui
fe trouve dans le fac du colon , l'empêche
de fe vuider , de forte que les liqueurs fépa-
rées par fes glandes en relâchent les fibres ,
& les diftendent par le long féjour que les
matières y font.
Pour connoître la ftruârure de Tappendice
vermiculaire & de fon embouchure dans le
caecum , il faut s'en inftruire fur le cadavre ;
les planches anatomiques ne fufïîfent point,
& les préparations feches en donnent une
fauftc idée. Cette partie n'eft pas exempte
des jeux delà nature : car Riolan dit avoir vu
trois appendices fort éloignés les uns des au-
tres , Rattachés à X'ileum. Job Vanmekecren
rapporte qu'il a une fois trouvé une balle de
plomb dans ce petit inteftin. Quelquefois
aulTi des noyaux de cerife reftent des mois
entiers dans le cxcum , fans cauier d'incom-
modité ; & il y en a divers exemples dans
les auteurs. Mais pour finir par une obfer-
vation plus fingulierc , Riolan afture avoir
trouvé le caecum placé dans le pli de l'aînc
à l'ouverture du corps d'un apothicaire. (3£,
le chevalier DE Jau COURT.)
COEFFE , f. i. terme de marchand de modes ^
ajuftement de femme ; c'eft un morceau
de taffetas noir taillé quarrément parde-
vant, & en biais par deftbus , &dont le der-
rière , qui forme le derrière de la tête , eft
plifle. Les femmes fê fervent de cet ajufte-
ment pour fe couvrir la tête ; elles placent
la coëffe fur la coëfFurc , la nouent ou
l'attachent fous le menton avec un ruban
noir. Celles qu'elles portent en été font de
gaze ou de dentelle.
Autrefois les coeffes étoient compoféesde
deux aunes de taffetas , & pendoient fur
l'eftomac: elles ont été diminuées petit à
petit , de font devenues ce qu'elles font
aujourd'hui. Elles ont une infinité de noms
difterenr. Il n'y a rien qui reflemble tant à
l'abus de la nomenclature en hiftoirc na-
turelle, que celle des marchandes de modes;
la moindre petite différence de formes dans
un individu , fait imaginer aux naturaliftes
un nouveau nom ou une nouvelle phrafe \ la
moindre petite différence dans un ajufte-
ment, altère ou change , chez les marchaar
Ddd 1
3^«: C O E
des de modes , la dénomination d^unajulle-
ment : une coëffe eft-elle grande Se prife
dans toute la largeur du taffetas , a-t-elle les
Îians à peine échancrés, fe noue-t-elle fous
e menton , & le termine -t -elle en bavoir
étendu fur la poitrme; c'eflunecoë^é^/iz
bonne femme: differe-t-elle des autres coëfès
par l'es pans , ces pans font-ils aflez longs , fe
nouent-ils d'un nœud à quatre devant ou
derrière , & font-ils terminés par tm gland ,
c^eft une ccëjfe a la diichcjfe : eft-elle prife
dans la moitié de la largeur du taffetas , n'a-
t-elle que des pans fort courts, eft-cUe bordée
d'une dentelle tout autour devant & der-
rière , & fe noue-t-elle fous le menton avec
deux rubans paflés en fens contraire dans une
couliflè faite fur le derrière , c'eft une coëjf'e
a la miramione : n'a-t-elle pas plus de pro-
fondeur que le premier bonnet , & eft-elle
bordée devant & derrière d'un ruban bou-
chonné , n'a-t-elle que des pans fort courts,
& s'attrxhe-t-ellé en devant par une agraffe
couverte, d'un nœud de dentelle à quatre ,
c'eft une cc'éjf'e au rhinocéros , &:c. Sec. bce.
COEFFE A PERRUQUF , cft UUC fortC de
réfeautifïu de façon qu'il s'aj ufte exaélement
à la grolleur d'une tête": on applique fur ce
réfeau des trèfles de cheveux pour en fibri-
qiier une perruque, il y a de ces coëjfes qui
lont de foie ou de filof elle , & d'autres de fïl.
" CoEFFK , en Anatomie , eft une petite
membrane qu on trouve à quelques enfans ,
qui enveloppe leur tête quand ils naJient.
Drelincourt penfe que ce n'eft qu'un lam-
beau des tuniques du fœ^tus , qui ordinaire-
ment fc crevé à la naifïance de l'enfant.
Voye-^^ Fœtus.
Lampridius dit que de fon temps des
fages-femmes vendoient ces coëjfes à desavo-
cats qui les payoicnt bien cher , perfaadés
qu'en les portant , ils auroient une vertu
perfuafive de laquelle leurs juges ne pour-
roient pas, fe défendra. Les canons en ont dé-
fendu l'ufage -, parce qu'il y a eu , dit-on ,
des magiciens Se deS; forciers qui en ont abufé
pour faire des ^aléfîces. Dià. de Trév. (Z)
COEFFÉ , Bien ccëfé, ( Chajfe. ) fe dit
d'un chien courant qui efl bien avalé , & à
qui les oreilles pafTent le nez de quatre doigts.
■Diclion. de Trév.\
GoîFFÉ , adj. {praperie^ Il fe dit en bien
■& en mal y félon que la lifiere efl bien ou
c ô E
mal faîte : Ci cette partie efl bien travaillée 5^
relativement à la largeur , à l'ourdiffag;^ ,
à la couleur , &; à la matière , on dit que
le drap ejl bien coëjfé ; Ç\ elle pèche par le
défaut de quelqu'une de ces qualités , on
dit qu'// eft mal coëffé.
CoEFFE bien ou mal , ( Maréch. & Man. )
Bien , fe dit d'un cheval qui a les oreilles
petites &;bien placées au haut de la tête ; &
mal y de celui qui les a placées trop à côté
de la tête , Se longues Se pendantes. Voye-;^
Oreille 6' Cheval.
COEFFER ( SE ) , Marine, fe dit des voi-
les , lorfqu'abandonnées à elles-mêmes Sc
dénuées de bras , de bouline Se d'efcoutes ,
elles s'appliquent aux mâts , Se ne fervent
plus à la conduite du vaifleau.
CoEFFER un livre ; les relieurs appellent
coëffer un livre , lorfque le volume étant cou-
vert , ils arrangent la tranchefile avec la
pointe , Se retirent un peu de veau pour"
recouvrir la tranchefile , ce qui fe fait avec
un poinçon légèrement , pour ne pas déchi-
rer la peau , en obfervant de ne pas'trop
cacher la tranchefile. On fait cette façon eix
couvrant le livre , lorfque les peaux font en-
core mouillées. Fby. Couvrir & Relier.1
Co.",FFER {fer à , ) t'arme de m.archand de
/Tzocfe.f;. anciennement ctsfcrs à coëjf'cr étoienc
de différentes figures ; ils avoient trois ,
quatre , cinq , Se fîx branches de chaque"
coté j ils étoient faits de fild''archal reploye,
& fbrmoient une e'pecede peigne dont les^
deux premières branches , c'eft-à-dire celles
de defïus la tête , étoient plus longues , Se ley-
autres alloient par étages Se en diminuant >.
éloignées d'un bon doigt lesunes des autres j'
chaque branche faifoit faire à la coëffure uit
gros pli, ce qui reflembloit à des tuyaux^'
d'orgue.
Les fers du temps préfent font environ,
longs de trois ou quatre doigts , n'ont qu'une-
branche de chaque côté , Se font couverts.
de petits rub ms fort étroits de foie blanche : :
ils fervent pour former & foutenir le gros pli
du milieu d'une coëffure. Voy. Coeffure.,
COÎ.FFEU ^E , f. f. femme (lont leméties
efl d'aller dans les maifons pour frifer &?
coëffer , elle monte aulH les bonnets Se les.
coëffures.
COEFFICIENT , f m. ( Algèbre.) em
langage algébrique , eu. le nombie. ou. lai.
C O E
quancîté quelconque placée devant un terme;
&: qui , en fe multipliant avec les quantités
du même terme qui la fuivent, lert à for-
mer ce terme. Voye^^ Terme. Ainfî dans
3 a , bx ^ C XX , 3 eft le coefficient du terme
^ a y b celui dt bx ^ C celui de C xx.
Lorfqu'une lettre n eft précédée d''aucun
nombre, elle eft toujours cenfée avoir i pour
coefficient , parce qu'il n'y a rien qu'on ne
puiire regarder comme multiplié par l'unité.
Ainiî a , bcfonx abfolument la même chofe
que I a , i ^c. Il ne faut pas confondre les
coefficiens avec les expofans. Dans la quantité
3 û , le coefficient 5 indique que a eft pris
trois fois, ou que ^ eft ajouté deux fois à
lui-même. Au contraire dans la quantité ^^ ,
Pexpofant 3 indique que a eft multiplié
deux fois de fuite par lui-même.
Par exemple , fuppofons que a foit 4, 3 ^
fera 3 fois 4 , c'eft-à-dire , iz , & a^ lera 4
X4X4,c'eft-à-dire64. Voy. Caractère.
Dans une équation ordonnée /le coefficient
du fécond terme eft la fomme de toutes les
racines ( ^'^oye'^ Racine ) ; en forte que fi la
fomme des racines pofitives eft égale à celle
des racines négatives , & que par conféq'uent
la fomme totale des racines foit zéro , il n'y
aura point de fécond terme dans l'équation.
Le coefficient du troifieme terme dans la
même équation ordonnée , eft la fomme de
tous les produits des racines prifes deux à
deux'de toutes les manières pollibles.
Le coefficient du quatrième terme eft la
fomme de tous les produits des racines prifes
trois à trois , de toutes les manières poiTibles,
ëc ainfi des autres termes à Tinfîni.
La méthode des coefficiens indéterminés
eft une des plus importantes découvertes que
l'on doive à Defcartes. Cette méthode très-
en ufage dans la théorie des équations , dans
le calcul intégral , & en général dans un
très-'grand nombre de"problêmes mathéma-
tiques , confifte à fuppofer l'inconnue égale
à une quantité dans laquelle il entre des
coeffi.ciens qu'on fuppofe connus , & qu'on
défigne par des lettres ; on fubftitue enfuite
cette valeur de l'inconni# dans l'équation ;
& métrant les uns fous les autres les termes
homogènes , on fait chaque coefficient = o ,
èc on détermine par ce moyen les coefficiens
indéterminés. Par exemple , foit propofée
€sn& équaxion difféieucielle ,,. ^
C O E 35)7
f dy\-b y à x^axzdx~]r cxdx "^-fd a" = o- ,
on fuppofera y =■ A-{- B x -\- C xx,ô<: on
j aura dy = Bdx -{-iCxdx
-{' b y d x=b Ad x-^-b B X d x+ b Cxxdx
-^ax' dx= a x^ d X
--{-c x d x= '{'Cxdx
+ fdx = ~{-fdx
Enfuite on fera B -{-B A +/= o ,zC
^bB-hc=OybC'ha=o ; &c téCoU
vantces équations à l'ordinaire (yoy. Equa-
tion ) , on aura les inconnues A, B, C. (O)
COEFFURE , f. f. en terme de marchand
de modes , eft proprement tout ce qui ferc
à couvrir la tire des femmes , dans le négligé,
demi -négligé & dans l'ajufté. Ce terme
fera bientôt au nombre de ceux auxquels
on n'attache plus d'idées ; déjà la moitié des
dames ont trouvé le moyen de fe coëfFer
(ans co'éjj'ure.
Cette partie de- l'ajuftement des femmes
a été. de tout temps fujette à bien des révo-
lutions , tant chez les Grecs que chez les
Romains , & les autres nations , il eft impof-
iible d'en fiire mention. Les modes chan-
geoient alors comme aujourd'hui ; en dix-
neuf ans du règne de Marc Aurele, fa f^m^
me paroît avec trois- ou quatre coeffures
différentes. Chacune de ces modes avoit ibiï
nom. Loiirde connoitre celui des pièces de
toutes (xscoëffiir es ^noxxs n'avons feulement
pas ceux de la coeffure entière : il y en a en»
cheveux , d'autres en perles &c pierres pré-
cieufes , ùc.
Les co'èffures font faites le plus ordinaire-
ment de belles dentelles , de gaze , de blon-^
de , ùc. Les veuves en portent de moufle-
hne unie , ourlée tout autour d'un grand
ourlet large & plat. Les femmes d'artifans
en portent de mouffeline & de batifte; &3
les femmes au-deflus du commun fè fervent-
de ces co'éffures pour la nuit. /
Les co'éffures à quatre barbes font de deux:
pièces , dont celle de deflous eft plus large
que celle de delFus \ il y faut près de (v^
aunes de dentelle, car pour les barbes on coud
deux dentelles de la même façon à côtéPune
de l'autre , ce qui forme la largeur de la.
barbe , qui peut avoir demi-aune de long ,
& eft tout en plein de dentelle , le bas former
une coquille pliflee : le deflus de tête eft
aufîî de la niême dentelle , & tientaux bar-^
be5 j.il peut avoir un quart ôc demi de long^
30 8
C O E
de eft attaché ou monte fur un morceau de
moullèline unie , ou rayce , ou brodée : en
la cou faut à ce morceau , on plifl'e cette den-
telle de pluiieurs plis. C'eft fur la féconde
pièce que Ton monte le fer qui forme le gros
pli du milieu , qui fe pofe fur la première
pièce. Les pièces s'accolent Tune fur l'autre j
elles fe montent enfuite fur un bonnet piqué ,
& s'y attachent avec de petites épingles.
IlyaaufTî descoè^re^appellées j/^m-o/e/ ,
parce que la féconde pièce, qui n'eft à pro-
prement parler qu'un deflus de tête fans
barbe , s'appelle bavolet ; mais il fait le
même effet que les coëffures à deux pièces.
L'on garnit toutes ces coëffures en deflus
de rubans de différentes couleurs , &: qui y
font affujettisavecde petites épingles. La
façon de les pofer diffère fuivant les modes.
Autrefois , c'eft-à-dire il y a quarante ou
quarante-cinq ans , les coë^'ures de femmes
étoient beaucoup plus larges , & montées fur
des fers à trois , quatre , cinq , ou lix bran-
ches de chaque coté, qui étoient pluscourtes
les unes que les autres , qui formoient de
gros plis tout autour du vifàge qui repré-
fentoient des tuyaux d'orgue.
Aujourd'hui les femm^es ne font coè'ffées
qu'avec de petites coëffures qui , quand elles
font montées , ne font pas plus larges que
la paume de la main j les cheveux qui font
frifés font le refte de la coëffure. On appelle
cette façon de coëffure , en -arrière.
L'on faitaufïî des coëffures de geai m.ontées
fur du fîl de laiton , que l'on appelle coëf-
ftres en comète.
Ce feroit encore ici une longue affaire de
nomenclature , que de rapporter toutes les
variétés que les coëffures ont eu , & tous les
noms qu'on leur a donnés félon ces variétés.
CO-EGALITÉ, f. f ( Thêol.)iGïmt qui
exprime le rapport qui fe rencontre entre
plufieurs chofes égales. Voye-^^ Égalité.
La dodtrine de l'églife catholique tou-
chant la trinité , eft que le fîîs & le S. Efprit
font co-égaux au père. Les ariens nioient la
co-égalité des perlonnes divines. Voye"^
Arieks & Trinité. ( G)
C(ELESîRIE ou C(ffiLÉ , ( Géog. anc. )
contrée de Syrie qui comprenoir , félon les
uns , la vallée qui s'étend entre le Liban &
l'anti-Liban ; lelon d'autres, le mêmeefpace,
avec le pays de Damas , ^ ce qui eft entre
C O E
la Syrie propre , la Phcnicie , & la Pat.
ieftine. Il y en a qui ne la bornent qu'à
l'Arabie & à l'Egypte. Elle fe nomme
aujourd'hui Bocaibalbec.
§C(SLIAQy E, {Anaiomie. Thyfrologie.)
nom d'une artère très-coniidérable du
bas-ventre, & qu'il eft nécellaire de bien
connoitre.
C'eft une des preraieresbranchesde l'aorte
abdominale ; elle naît dans le paflàge même
de cette grande artère entre les piliers du
diaphragme , un peu à gauche , èc elle def-
cend en avant & à droite. Il eft très-rare
qu'elle ait une origine commune avec l'ar-
tère méfèntériquefupérieurei mais ileft afîcz
commun que la phréniq^ue gauche, & même
la phrénique droite en fortent prefque à fa
naiflànce. Son tronc eft très-court ; elle fc
partage après avoir fait un chemin de peu de
lignes, en trois branches , dont la première,
c'eft la coronaire , fort quelquefois du tronc
avant fes compagnes. Mais il eft plus com-
mun que la cceliaque fe partage en même
temps en trois troncs principaux , la coro-
naire , la fplénique & l'hépatique. D'autres
fois les trois troncs font deux hépatiques
& la fplénique.
La coronaire , qui provient quelquefois
de l'aorte , joint à l'extrémité gauche de la
petite courbure de l'eftomac , & defcend
vers la partie antérieure du bas ventre. Elle
donne quelquefois la phrénique gauche , ou
les deux phréniques , & une pancréatique ,
qui fait une anaftomofe avec la méfentéri-
que ; mais elle donne plus conftamment une
œfbphagienne , qui remonte dans la poitrine
& communique avec les œfophagiennes
thorachiques.
Elle donne au même endroit une coro-
naire j qui fait véritablement une couronne
imparfaite autour de l'œfophage , à l'endroit
où il s'unit à l'eftomac. Cette branche donne
des artères à l'œfophage , & d'autres au cul-
de-làc de l'eftomac j & ces dernières s'uilif^
fènt au fplénique.
Elle fournit des artères aux deux plans
de ce réfervoir ;1ile fe partage , & forme
deux & même trois branches afl'ez fcmbla-
bles entre elles , une antérieure , une pofté-
rieure, & une moyenne.
- Chacune de ces branches fait dans k
petite courbure de l'eftomac une arcade ayec
C O E
les branches de rhépatique j de4)enres bran-
ches vont aux deux plans Se s'unillcncavec
les arceres gaftroépiploïques Se fpléniqucs.
Le refte de la coronaire fe ré fléchit autour
du petit lobe du foie , entre dans la fofTe
du conduit veineux , Se fe partage entre le
diaphragme Se le foie.
Cette branche eft ordinairement peu
confidérable , Se d'autres fois, elle égale la
grande hépatique.
La rplcnique naît rarement de l'aorte ,
& le plus fouvent de la cœliaque^ après qu'elle
a donné la coronaire. Elle fe porte à gauche
en fuivant le bord fupérieur du pancréas :
en ferpentant avec des courbures répétées ,
elle atteint la face cave de la rate , remonte
avec l'épiploon gaftrohépatique, Se s'enfonce
par de nombreufes branches dans ce vifcere.
Elle donne cependant ou dans le pancréas,
ou de la plus inférieure des branches fplé-
niques , une artère qui s'attache à la grande
arcade de Peftomac, Se fe porte à droite dans
Tépiploon , un peu fous fon attache , c'eft
la gaftroépiploïque gauche; fes branches
remontent d'un côté dans les deux plans de
Teftomac , Se defcendent de l'autre dans les
deux feuillets de l'épiploon. Les premières
de ces branches vont s'unir à celles de la
coronaire , Se les dewiieres font des réfeaux
d'une grande beauté entre les lobes de l'épi-
ploon Se s'uniflent avec les épiploïques du
côté droit. Le tronc de la gaftroépiploïque
s'ouvre diredement dans le tronc de l'artère
droite du même nom. La même artère
donne quelques filets au pancréas , au méfo-
colon , à la rate.
Dans la face concave de la rate même , il
naît des artères fpléniques quatre ou cinq
branches qui vont au cul-de-fac de l'efto-
mac , Se communiquent avec les coronaires
Se les branches des gaftroépiploïques gau-
ches. Ce font les vaifleaux courts. Ôuelques-
uns de leurs rameaux vont à l'cciophage ,
à fon ligament gauche , au diaphragme ,
au pancréas Se au méfocolon.
Il eft aflez ordinaire à la fplénique de
donner depuis le milieu du pancréas une
Se même deux artères confidérables au plan
poftérieur de l'eftomac fous Pœfophage. On
les nomme gajîriques pujlérieures.
Mais il naît conftamment piulieurs bran-
ches pancréatiques de louEe la longueur du
C O E 3^^
tronc fplcn'qu3. Une de ces branches , pro-
duite quelquefois par l'aorte , pafiè aflez fré-
quemment derrière le pilore , Se fe diftribue
au pancréas Se au duodénum en faifant des
arcades avec les pyloriques. Se les branches
de la méfantérique. On. a vu la fplénique
donner une branche confidérable au mélo-
colon tranfverfal , Se cetré branche commu-
nique avec les artères méfentériques.
L'artère hépatique eft le véritable tronc
de la cxliaque , elle s'avance à droite , Se
contre la partie antérieure du bas-ventre ,
par un filion du lobule de fpigel. Se le long
de la petite arcade de rcftomac.
Arrivée au pylore , elle y donne l'artère
pancréatico-duodénale , qui eft confidéra-
ble. Cette artère donne près de fon origine
une branche à l'eftomac , qu'on nomme la
coronaire droite , qui fait une arcade avec la
coronaire gauche. En remontant à droite le
long de la petite courbure de Peftomac , elle
donne des rameaux au petit épiploon Se
aux deux plans de l'eftomac.
Le tronc de la pancréatico-duodénale
pafle derrière le pylore , elle donne les deux
pyloriques, la fupérieure Se antérieure, unie
à la gaftroépiploïque & à la pylorique infé-
rieure, qui nait bientôt après. Se qui donne
également des branches à l'eftomac Se au
duodénum. La branche de la pancréatico-
duodénale , qui mérite principalement ce
fait un arc autour du duodénum.
nom
elle donne une branche aflez confidérable au
pancréas, qui fait des anaftomofes avec la
îplénique , la coronaire Se la méfentérique ,
Se fournit quelques petites branches à l'épi-
ploon Se au méfocolon tranfverial ; mais le
tronc fait une arcade avec la duodénalc
fupérieure Se plufieurs autres communica-
tions ; elle donne quelques filets au péritoine
près des reins.
Le refte du tronc de l'artère , dont nous
parlons , porte le nom de gajîroépiploïque
droite , Se fuit l'épiploon à quelque diftance
de la grande arcade de l'eftomac ; fes bran-
ches montent d'un coté aux deux plans de
l'eftomac , Se font des réfeaux avec la coro-
naire ; & de l'autre, ils fe répandent aux deux
feuillets du grand épiploon Se à l'épiploon
cohque , où elles font d'autres réfeaux Se
entre eux-mêmes , Se avec les braiiches de la
gaftroépiploïque gauche. Quelques autres
400 CO E
branches vont à l'épiploon gaftrohépatique
^ aux conduits biliaires.
Lagaftroépiploïque droite s'ouvre à la fin
dans là compagne du coté gauche , née de
la liénale. Cette anaftomofe efc quelquefois
très-conlidérable , ellel'eft moins dans d'au-
tres fujets.
L''hépatique fe divife bientôt après avoir
donné cette branche. La branche hépatique
gauche eft attachée à la veine-porte , vers
Ion bord gauche ôc devant elle : elle donne
allez fouvent une coronaire gauche , elle
.envoie au même endroit une petite branche
à l'épiploon hépatogaftrique & à la folîè du
conduit veineux , 8c bientôt après elle pro-
duit la duodénale fupérieure , qui fe con-
tourne autour du duodénum par fa face
poftérieure, qui traverfe le canal cholédoque
qui donne des branches à ce conduit , au
duodénum &c au pancréas , Ôc finit par une
double arcade , qu elle fait en remontant
avec la duodénale gauche dont nous venons
de parler, & en defcendant avec la méfèn-
térique. r • i i
Le tronc de l'hépatique fuit la branche
gauche de la veine-porte dans lafodè tranf-
verfale , 5c finit par trois branches qui vont
avec quelques variétés au lobe de fpigel , au
lobe anonyme , & au lobe gauche. Quel-
ques branches fuperficielles communiquent
avec celles de l^épigaftrique ôc de la mam-
maire dans le Hgament fufpenfoire ôc avec
la phrénique. Quelques petits filets vont au
ligament gauche & à la rate.
L'artère hépatique droite arrivée au valon ,
que l'on nomme les portes , remonte en
ie portant à droite & fe plonge dans le
-foie. Elle donne quelques branches aux
vaifleaux biliaires & quelquefois une pylo-
rique ■■, elle fe partage une féconde fois , ôc
fa brancheantérieuredonnelacyftique, dont
le tronc eft le plus fouvent l'origine com-
mune de deux artères cyftiques. Il y en a
-une fupérieure , peu vifible , qui fe rend au
foie & à la partie de la véficule du fiel , qui
tft attachée à ce vifcere : cette artère a de
nombreufes communications avec les bran-
• ches de l'hépatique. L'autre branche de
la cyftique eft inférieure, elle fe -partage
- comme la précédente dans le foie ôc dans
Ja véficule.
l^ç rf fte dç la l^anche antérieure de l'ar-
C O E
fera hépatique fe rend au lobe droit 5c à
l'anonyme.
La branche poftérieure eft prefque tou-
jours cou v(?rte par la veine-porte : elle donne
uiie branche au lobe de fpigel , une autre
au lobe anonyme, plufieurs petites branches
qui font fur la furface du foie des réfeaux
plus confidérables que dans aucun autre
vifcere. Les gros troncs fe perdent dans le
foie.
Cette branche droite eft très-petite dans
les fujets dans lefquels l'hépatique droite
que fournit laméfentérique eft confidérable.
{H.D.G.)
C (E L I A Q^u E , f. f. ( Médec. ) la cœlia-
que ou pour mieux parler , Vaffeâioncalia-
que , la pajfion cœliaque , eft une efpece de
flux de ventre copieux ôc fréquent , dans
lequel ^'on rend par l'anus les alimens digé-
rés , mais avec du chyle qui s'y trouve
confondu.
Hyppocrate ne fait aucune mention de
cette maladie. Aretée eft le premier parmi
les Grecs qui en ait donné la delcription ,
& très-exaûement , /. //, ch. vij, il appelle
ceux qui en font affligés ;>;;o/\/i<jto». Cœlius
Aurelianus les nomme ventriculejî , ôc in-
dique la manière de les guérir, liv, IV j ch.
iij. Mais ce . que Celfe appelle maladie cœ-
liaque del'eJlomaCy & qu'il décrit //r. IV , cap.
xij , comme accompagné de* douleurs dans
le bas- ventre , d'une conftipation fi violente
que les vents ne peuvent iortir , d^'un froid
aux extrémités , ôc d'aune grande difficulté
de refpirer , eft une maladie également
différente de celle dont parlent Aretée ôc
Cœlius Aurelianus , ôc de la nôtre.
Quelques modernes prétendent que la
paillon cœliaque ÔC la lienterle ne différent
abfolument qu'en degré ; cependant il faut
encore y ajouter cette différence , que dans
lalienterie les alimens fortent prefque cruds ;
ce qui indique que l'eftomac n'a pu les diu
foudre, au lieu que dans la paiïion cœliaque
le chyle fort avec les excrémens : ce qui
montre que l'eftomac a bien la force de
broyer , de digérer les alimens , mais que les
vaifîeaux ladées , les glandes inteftinales ,
font obftruées , en forte que le chyle n-'y peut
pafler.
Freind diftingue la pafïion cœliaque du
flux chyleux , mais cette diftin(5lioi^ eft" à
mon
C OE
mon (èns trop raffinée ; car Toîc que l'obf-
trudion procède des vaifleaux ladées ou
des glandes inteftinales qui ne fournirent
pas allez de lymphe pour délayer le chyle
de Peftomac , &c le mettre en état de paflTer
dans les vaifleaux lactées, il en rélultera
toujours le même effet; le chyle fera préci-
pité hors du corps avec les matières fécales.
Ainfi le danger du mal fe trouve dans
la grandeur de TobUrudion ôc dans fa
durée. La cure confifte domc à employer
dans les commcncemens les fècours propres
à lever les obftruftions des vaillèaux lac-
tées , des glandes des inteftins, ôc de celles
du méfentere qui peuvent être affedtées.
Pour procurer cet effet il faut d'abord
tnettre en ufage les purgatifs légers donnés
en petite quantité , mais à plufîeurs re-
prifesi enfuite les réfolutifs, les apéritifs,
tant intérieurement qu'en applications ex-
térieures fur le bas - ventre , avec de fré-
quentes fridions qu^on y joindra.
Puifque le flux de ventre règne dans l 'af-
fection cceliaque , ne feroit-il pas à propos
de l'arrêter par les meilleurs aftrin^ens ?
Nullement : il ne s'agit-pas ici de reflerrer
les glandes inteftinales , ni les orifices des
vaiflèaux laétées; il s'agit de les défobflruer.
Mais en échange V ipecacunnha , les antimo-
niaux donnés à petites dofes, ne répondent-
ils pas à l'indication du mal? C'efî ce dont
on ne peut guère douter. Tournez toujours
les remèdes contre la caufe de la maladie ,
& vous réuflïrez en médecine comme en
droit politique. Ici vous détruirez la parelîe
par la vanité , par le point dMionneur ; &c
là vous'ne vaincrez que par l'appas du gain.
Tantôt le flux de ventre demande des ref-
ferrans, & tantôt des défobftiruans ; l'ap-
plication des remèdes mal dirigée gâte tout.
Jirt. de M. le chevalier DE J au court.
* CCELISPEX, {Myth.) furnom d'A-
pollon, ainfi appelle à Rome de la ftatue
qu'il avoit dans la onzième région. Cette
itatue regardoit ou le ciel ou le mont
Cœlius.
* C(SLms ( MONS ) , Mijl. anc. le
mont Cœlius , une de fept montagnes de
R'ome, ainfi nommée d'un Cœlius ou
Gœlès Vibenna , chef des Etruriens , qui
fecourut Romulus ou Tarquin. C'eft au-
jourd'hui le mont Saint «Jean, -
Tome FUI
C O E 4or
•^ C(SLUS , f. m. ( Myili. ) dieu du
paganifme : il étoit époux ôc fils de k
terre; il eut de fa mère, Saturne, Rhéa,
l'Océan 5c les Titans. Saturne rompit les
chaînes dont il avoit été chargé par fort
père , délivra fes frères & fa fœur , ôc
coupa les tefticules à Cœlus. De ces tefti-
cules coupés , naquirent les Nymphes , les
Géans , les furies ôc la mère de PAmour.
COENE ,(.(.{ Anatomie. ) croûte
ordinairement blanche , dont le fang eft
-quelquefois recouvert après la faignée dans
le vaifleau où elle eft faite.
Le mot de coeae pourroit bien avoir
été formé de kena , qui dans la langue
du pays de Galles fîgnifie peau, cuir y
d'où vient le terme anglois skin , qui
veut dire la même chofe.
j, La co'éne eft cette humeur concrète du
fang refroidi 6c en repos, formée fur fa
fuperfîcie en une efpece de croûte ordi-
nairement pâle, épailîe ôc tenace.
Lorfqu'on a tiré du fang d'une perfonrte
qui eft attaquée d'une inflammation vio-
lente, on apperçoit le phénomène dont nous
venons de parler, ôc qui eft fort furprenant.
Tout le monde fait que le fang que l'on
reçoit dans un vaifTeau à mefure qu'il fort
de la veine, fe fige aufîî-tôt après ôc fe féparc
en deux parties; l'une blanche-jaunâtre ap-
pellée férojltè; Pautre rouge , qui flotte or-
dinairement dans la première comme une
île : mais dans la plupart des maladies in-
flammatoires, fièvres aiguës, ardentes, dans
les rhumatifmes, ùc. la partie fupérieure de
cette île eft couverte d'une pellicule blan-
che, quelque peu bleuâtre, jaunâtre, ou
verdâtre , fouvent épaifle de quelques li-
gnes, & fi coriace qu^on peut à peine la cou-
der avec un rafoir. Comme le fang des per-
fbnnesqui ont une pleuréfieeft fouvent cou-
vert d'une femblable pellicule, les médecins
lui ont donné le nom de croûte pleurétique ,
quoique la même chofe arrive aufTî dans
d''autres maladies , & même dans celles qui
ne font pas inflammatoires , comme la
phthifie ôc la dyflenterie; cette matière coë-
neufè s'endurcit aifément; ôc quand elle eft
long-temps agitée ou battue, elle fè change
quelquefois en ichorofité. De plus, cette
co'éne n'eft pas toujours de la même ténacité.
■ Pluficurs auteurs ont fait des remarques
Eec
'40i C O E
fingulieres fur ce fujet. Par exemple Syde-
iiham , dans fon traité de la pleuréjîe , a
obfervé que lorfque le fang , après une ou-
verture trop petite ou par d'autres raifons,
ne fort point horizontalement de la veine ,
Ôc qu'il coule perpendiculairement le long
du bras , il ne fc couvre point d'une fem-
blable pellicule. Il remarque encore que
dans ces Ibrtes de cas , les malades ne fe
trouvent pas autant foulages que iî le fang
fût Ibrti de plein jet &c iè fut couvert de
cette croûte blanche. Il dit aufïî que la for-
mation de cette pellicule eft empêchée par
tout ce qui s'oppofe à la fortie du iung.
D'autres ajoutent que cette ccëne ne fe ma-
nifjfte point ou très-peu , lorfque le vaiflèau
dans lequel on reçoit le fang eft large Se plat,
êc lorfqu'il a été cxpofé à un air trop froid.
Enfin ce qui paroit plus étrange , eft qu'en-
core que le îàng forte librement par une
1 rgeouverture, cette peau ne le forme point
1 )rfque le farg a été bien agité dans le vaif-
fcau avec le doigt ou quelque inftrument.
Il réfulte de toutes ces obfervations que
l'explication de ce phénome^ie , quoique
très-commun , eft plus difficile qu'on ne
l'imagine. Se que l''origine de cette coëne
eft fort obfcure.
Quelques - uns cependant prétendent
qu'elle eft feulement produite par la féro-
lité du fang , qui eft difpofée par la ma-
ladie à s'épaiflîr : mais c'eft ne rien dire ,
outre que cette pellicule qui furmonre la
férofité , occupe toujours la partie fupé-
rieure , ôc tantôt s'attache à la circonférence
du vaifl'eau dans lequel on a reçu le fang,
tantôt en eft entièrement détachée.
D'autres croient qu'elle eft formée d'un
chyle crud , qui n'a pas eu le temps de
ie convertir en fang ; mais le chyle quand
il eft mêlé avec le fang &c qu'il n'eft point
aflèz travaillé , flotte toujours dans la férp-
lîté fous une forme fluide, fans jamais
s'attacher à la partie rouge du fang : de
plus , cette pellicule a également lieu j fbit
que la faignée ait été faite trop tôt après
le repas , ou lorfque le chyle a eu tout le
temps néceflàire d'être changé en fang.
D'autres penfent que cette pellicule te-
nace fe forme lorfque lavîteffc de la cir-
culation tend à difpofer le fang à fe coa-
guler , & par corjféquent qu'elle n'eft
CO E
point la caufê , mais plutôt l'effet de la
maladie. Mais on a quelquefois remarqué
cette croûte dans le fang des perfonnes les
plus faines : on Pa auffi obfervée chez des
gens fort foibles, qui avoient coutume de
fe faire faigner par précaution ou pour
prévenir un crachement de fang. En un
mot , cette coëne fe trouve dans l'inflam-
mation comme hors de l'inflammation.
Enfin d'autres phyiiciens ont dit avec plus
de fondement que cette peau compaéle pro-
vient d'une lymphe grofTîere &c vifqueu'e
du fang , qui dans la circulation partant dif-
ficilement par les extrémités artérielles , doit
s'endurcir naturellement quand elle eft en
repos , ôc peut néanmoins fe tranfmuer en
matière critique par une circulation modé-
rée ou par des remèdes propres à divifer
cette lymphe. Ils ajoutent que la partie
albumineufe, gflatineufe &c graifleufe du
fang , concourt encore à la produétion de
cette pellicule coriace , qui ié forme fur la
furface de ce fang tiré des veines. Suivant
ce fyftême , les différentes couleurs qui fe
trouvent quelquefois fur la fuperficie du
coagulum , & qui la rendent comme mar-
brée , procèdent des parties intégrantes du
fang qui ont fouffert diftérenres triturations
de la qualité du chyle , de la férofité ôc de la
bile qui s'y trouve mêlée j ainfi la couleur
laiteufe de la pellicule coëneufe vient de la
partie gélatineufe du fang prédominante, ou
de ce que la faignée a été faite trop tôt après
le repas i la couleur jaunâtre, bleuâtre , ou
verdâtrc , dépend de la bile qui , ne fe fil-
trant pas bien , fe mêle avec la férofité du
fàng , ôc lui imprime fes couleurs. Cette
hypothefe eft allurément la plus vraifem-
blable; cependant comme elle ne fuffit pas
encore pour expliquer tous les faits , le pro-
blême médicinal fubfifte toujours; trouver
la raifbn de la non-exiftence ou de la forma-
tion de la coëne fur le fàng tiré par la faignée
des gens fains ôc malades,conformémenr aux
phénomènes jufUfiés par de bonnes obferva-
tions. ( M. le chevalier de J au court.)
C(ENOBITE, Yoyei Cénobite.
COEPENICK , ( Géo^r. mod. ) petite
ville d'Allemagne dans la marche de
Brandebourg , fur la Sprée.
COERBACH , ( Géogr. mod. ) ville
d'.Allemagne , capitale de la principauté
C O E
àe Waldeck, près du pays cîe He(îè-
Caflèl. Long. 2.6", 50; lat. 57, 25.
COERCITION , f. f. (Jurifpr.) Cignide
punition des délinquans. Le droit de coerci-
tion eft un des attributs de la juftice. Il y a
certains officiers de police qui ont feulement
ce que l'on appelle jus vocationis & preken-
jîonis , c'eft-à-dire , le droit de faire appeller
devant eux, &z même arrêter des délinquans,
mais qui n'ont pas le droit de coercition.
Quelques-uns confondent mal-à-propos le
droit de correction avec le droit de coerci-
tion. Les fupérieurs réguliers ont le droit de
correction modérée fur leurs religieux, mais
lis n'ont pas le droit de coercition y lequel s'é-
tend à toutes (brtes de peines afflid:ives. {A)
COERLIN , ( Géog. ) ville & bailliage
d'Allemagne en haute Saxe , dans la Po-
méranie ultérieure , &c dans la principauté
de Camin , appartenant au roi de PrulTe.
Elle eft fituée fur la rivière de Perlante,
munie d'un cMteau , & pourvue d'une
prévôté. L'on y travaille beaucoup en
laines. {D. G.)
■ COESFELD, {Géog. mod.) ville forte
d'Allemagne en Weftphalie, dans l'évâçhé
de Munfter , près du Berkel. Long, çl^ ,
£0 ; lat. 52 , ^8.
COESNON (Le), Géog. mod. rivière
de France en Normandie, qui prend fa
fource dans le Maine & fe jette dans la
mer près du mont S. Michel.
COESSEIN , (Gé'V.) c'eft le nom d'une
des pointes du mont Fichtelberg, l'un des
plus élevés de l'Allemdgne; il eft en Franco-
jiie dans la principauté de Bareith. {D.G.)
COESSLIN, {Gécgr.) ancienne ville
d'Allemagne , chef-lieu d'un bailliage &
d'un cercle du même nom , en haute Saxe ,
dans la Poméranie ultérieure , & dans la
principauté de Camin , appartenant au roi
de Prufte. On la nommoit autrefois Cojfaliti
&c Ccjfalin. Elle eft fituée fur la rivière de
Nifebeck , laquelle va tornber dans le lac
de Jafmund, au pié du mont ChoUen. Les
évêques de Camin y faifoient leur réfidence
avant la réformation. C'eft aujourd'hui le
lîege d'une prévôté luthérienne , d'un con-
fîftoire & d'une cour de juftice affedtée à
la Poméranie ultérieure. Le grand incendie
qu'elle efluya l'an 1718, engagea le roi de
Pruflè à la faire rebâtir folidçjnent ^ régu-
C O E 405
' l-iérement ; & les bienfaits de ce prince à
cette occafion , portèrent fes habitans k
lui ériger une ftatue de pierre , au milieu
de leur grande place publique. (D. G.)
COÉTERNITÉ , f. f. ( Théol. ) Les
théologiens fe fervent de ce terme comme
un attribut des perfonnes de la trinité.
f^oye^ Éternité.
Les orthodoxes tiennent que la féconde
ôc la troifîeme perfonnes de la trinité font
coéternelles à la première. V. Trinité. (G)
COETHEN , {Géog.) ville d'Allemagne,
en haute Saxe, dans la principauté d'Anhalt,
fur la petite rivière de Zittau. C'eft là que
réfîdent hs princes d'Anhalt qui prennent le
furnom de Coethen, & qui forment une des
quatre branches principales de cette illuftre
maifon. C'eft une des villes les plus anciennes
de l'Allemagne : elle étoit déjà fort connue
du temps de Henri l'oifeleur , dans le x*
fîecle. Elle eft compofée de plufieurs parties
que l'on agrandit &. que l'on embellit tous
les jours. Les luthériens & les réformés y
ont chacun féparément une églife , une
école pubhque ôc une maifon d'orphehns ,
& ils y ont un hôpital en commun. Les arts
& métiers y prolperent , & l'on y établit
en 1617 une f bciété qui prit le furnom de
frucïifiante. Le terroir de Coethen ôc de fes
dépendances eft un des plus fertiles de l'Al-
lemagne : il y a un bailliage d'où reflbrtiftent
au-delà de cinquante villages , tous riches
en grains. Il fe tint dans cette ville l'an
1565?, une aflemblée de tous les eccléfiafti-
ques de la principauté d'Anhalt. (D. G.)
COÉyÉQUE, f. m.{HiJ}. eccl.) évêque
employé par un autre à fatisfaire pour lui
aux fondions de l'épifcopat. On dit qu'il y
a encore en Allemagne de ces dignitaires.
COEVORDEN,(Geo^./no^.)villefortedes
Provinces -Unies dans l'OverilTel, capitale
du pays de Drente. Long. 2,4, z 6- lat. 5^, 40.
* CŒUR, en anatom. eft un corps muf-
culeux iîtué dans la cavité de la poitrine ,
où toutes les veines aboutiflent , ôc d'où
toutes les artères forrentj & qui par fa
contradion ôc fa dilatation alternative, eft
le principal inftrument de la circulation
du fang ôc le principe de la vie. Voye:^
Artère , Veine , Sang , Vie , &c.
Les parties principales du cœur font la
, bafe ; c'eft le côté droit du cœur. Si pointé,
Eee 1
4C4 C O E
c'eft Ton extrémité gauche. Son hord anté-
rieur & fon bcrdpojlérieur, ce font deux des
côtés de Ta figure triangulaire. Sa. face anté-
rieure fupérieure convexe y c'eft celle qui re-
garde un plan horizontal qui feroit pofé fur
la tête. Sa face plate , c'eft la face oppolée
à la précédente. Les deux veJîiBules, ce font
les cavités. qui iont à k bafe : on y diftingue
deux parties, Pune plus évafée qu'on appelle
finus; l'autre plus étroite figurée comme
une petite oreille , qu'on appelle oreillette.
Ses ventricules , et font les deux cavités creu-
fées dans fa fubftance, & qui le conftituent :
on les diftingue en droit ou antérieur , en
gauche ou poftérieur. Sa cloifon, c^eft la
partie charnue qui fépare les deux ventri-
cules. Ses valvules tricufpides, mitrales ,Jîg-
moïdes. La valvule d'EuJîachi. La valvule du
trou oval. Le tubercule de Lower, ou l'émi-
nence qui fe remarque dans les animaux
entre le concours de la veine-cave fupérieure
& de Tinférieure , dans le paroi interne.
Uijîhme de Vieujfens ,^ c'eft une émincnce
que forment les trouffeaux de fibres qui fe
croifent autour du trou oval dans l'oreillette
droite. Les colonnes charnues , voye:^ Co-
xoNNES. Le réfeauy ce font des eipeces de
mailles que les troufleaux de fibres qui gar-
niflènt en dedans les ventricules du cœur,
forment par leur cntrelalfement. Les petites
îraverfes , petits paquets de fibres fîtuées
tranfverfalement dans le fond des ventri-
cules du cœur, relativement à l'orifice de
Partere aorte & de la pulmonaire auxquelles
elles répondent. Le trou oval ou botal, par
lequel le fang pafle dans le fœtus de l'oreil-
lette droite dans la gauche. Le fac de Mor-
fagni, c'eft un efpace qui s'obferve entre
i valvule du trou oval & ion contour. Les
crifices des veines de Thebejius & de Ver-
heyen , ce font les orifices des veines qui
s'ouvrent dans les ventricules.
Le corps mufculeux entier eft enfermé
dans une capfule appellée péricarde , dont
on expliquera la ftrudure & les fondions
foi*6 le mot PÉRICARDE.
Le cceur a en quelque forte la figure
d'un cône ou d'une pyramide renverlée^
dont la partie fupérieure, qui eft la plus
large eft appellée bafe, & l'inférieure la
pointe , qui eft un peu tournée vers le côté
gaucke. La bafe eft accompagnée de deux
COE
appendices^ nommés oreillettes , & degroî
vaiifeaux fanguins, Voye-;^ Oreillette.
Sa grandeur n'eft point déterminée , &c
elle varie dans les diftérens fujets. Il a pour
l'ordinaire iix çouces de long , quatre ou
cinq de large à la bafe , & quatorze de cir-
conférence. Il eft fitué dans le milieu de la
poitrine dans le médiaftin , entre les deux
lobes des poumons. Il eft attaché au péri-
carde, & foutenu par de gros vaiflèaux
fanguins qui s'infèrent immédiatement
dans fa fubftance , & il eft par ce moyen à
couvert des obftacles qui pourroient s'op-.
pofer à fon mouvement. Il eft enveloppé
d'une membrane mince , & entouré de
graiflè vers fa bafe. Fbye5[ Membrane.
Le cœur eft creux & divifé en général en
deux grandes cavités appellées ventricules y
dont le droit qui eft le plus grand, peut con-
tenir deux ou trois onces de fang : ces ven-
tricules Iont féparés par une cloifbn char-
nue, compofée des mêmes fibres mufcu-
laircs que les parois : on l'appelle cloifon ; fa
figure eft concave du côté du ventricule
gauche & convexe vers le droit. Ces ventri-
cufes n'ont aucune communication immé-
diate , & le fang ne peut fe rendre de l'un
dans l'autre, qu'en pallant par les poumons.
Les parois de ces ventricules ne font point
également forts & épais; le gauche l'eft "beau-
coup plus que le droit, parce que fa fonc-
tion eft de poufler avec force le fang dans
toutes les parties du corps 5 au lieu que le
droit ne le pouffe que dans les poumons ,
encore eft -il aidé par d'autres parties.
Il paroît en effet que le ventricule droit
n'a été fait qu'en faveur des poumons , car
l'on ne trouve que le ventricule gauche
dans les animaux qui n'en ont point.
On trouve dans les ventricules de petits
mufcles appelles colonnes charnues ou lacer-
tuli , lefquels fortent des parois èc vont
s'attacher par des extrémités tendineufes
aux valvules du cœur, dont nous parle-
rons ci -après.
On obferve au deffus de chaque ventri-
cule une cavité dans chaque oreillette, com-
pofée de même qu'eux d'un double rang
de fibres charnues. Voye-;^ Oreillette.
Les vaifleaux qui fortent du cœur confif-
tent en deux artères, favoir l'aorte & Partere
pulmonaire i l'aorte fort du ventricule gau-
COE
cKc , & Tartere pulmonaire du droit , & les
vaifleaux qui s'y rendent font deux veines
qui aboutiirent aux oreillettes^ favoir la vei-
ne-cave dans la droite , & la veine pulmo-
naire dans la gauche. Voye^ Aorte , Pul-
monaire, &c.
Les artères ont à leur embouchure dans
chaque ventricule trois valvules ou membra-
nes femi-lunaires , fituées de façon qu'elles
s'oppofent au retour du fang dans le coeur
lors de ia dilatation. Voy. Valvule.
Les oreillettes communiquent avec les
ventricules. A l'orifice du ventricule droit ,
à l'oreillette droite , font placées trois val-
vules appellées tricufpides , à caufe qu'elles
font attachées par leurs trois pointes ou co-
lonnes charnues , par plufieurs cordes ten-
dineufes i de forte que dans la contra<Sbion
ou fyftole du cœur elles ferment l'orifice , &
empêchent le fang de rentrer dans Torcillette
droite.
Les deux valvules mitrales font les mêmes
fon6tions à l'entrée du ventricule gauche &
s'oppofent au retour du fang dans l'oreillette
gauche. 7-^oje:(_TRicuspiDE & Mitrale.
La fubftance du cœur eft entièrement
charnue ou mufculeufe. Les anciens le pre-
noient généralement pour un parenchyme :
mai^Hippocrate a mieux penfé qu'eux là-
delTus; &: Stenon, & ceux qui font venus
après lui , ont démontré qu'il eft compofé
d'une fuite continue défibres mufculeufes
différemment entrelacées , qui aboutiflènt
aux orifices de chaque ventricule , où elles
forment leurs tendons.
Lorfqu'on dilîeque Xtcœur, on découvre,
après avoir ôté la membrane propre , fur la
furface externe du ventricule droit, quelques
fibres fort déliées qui tendent en ligne droite
vers fa bafe. Ow trouve immédiatement fous
celles-ci une double couche de fibres fpira-
les, dont les extérieures montent obHque-
ment depuis la cloifon jufqu'à la bafe, &
formeHt une efpece de vis. Les fibres inté-
rieures prennent une route contraire , fe por-
tent obliquement de droite à gauche , Refor-
ment pareillement une vis dans un fens op-
pofé : ious celles-qiparoiflent les fibres du
ventricule gauche , & premièrement une
fuite fpirale qui fe porte vers la gauche , fous
laquelle , auffi-bien que dans l'autre ventri-
cule , on en trouve une autre qui va du côté
COE 40Ç
oppofé , laquelle s'étend non-feulement juf-
qu'aux extérieures qui lui font femblables ,
mais environne encore tout le ventricule ,
& fait que la cloifon devient une partie da
ventricule gauche; quelques-unes d'elles,,
au lieu de fe rendre comme les autres dans
les tendons du cxur , rentrent en dedans &'
forment les colonnes charnues , tandis que
d'autres fe portent vers la pointe qu'elles en-,
vironnent , & forment le cercle appelle cen-
tre du cœur.
Les fibres du cœur paroifTent les mêmes
que celles des autres mufcles , ce qui fait re-
garder aujourd'hui cette partie comm.e un
vrai mufclc , quoique quelques-uns rejettent
cette coniéquence comme peu jufte; prétcn-.
dant que iî cela étoit , l'aorte devroit être
regardée comme un mufcle. Voye^^ Mus-
cle & Aorte.
Quelques auteurs modernes , après avoir
examiné la ftru6ture & la difpofition des fi-
bres fpirales , ont mieux aimé regarder le
cœur comme un double miffcle , ou comme
deux mufcles joints enfemble. En efîet , les-
deux ventricules avec leurs oreillettes , font
deux corps , deux vaifïeaux , deux cavités
différentes qui peuvent êtr<e féparées fans
cefler pour cela d'être des vaiffeaux \ d'au-
tant plus que la cloifon que l'on croyoit au-
paravant n'appartenir qu'au ventricule gau-
che , eft compofée de fibres qui appartien-
nent à tous les deux. D'ailleurs, fi Pon en
croit M. Winflow, les deux ventricules font
deux différens mufcles, unis enfemble non-
feulement par la cloifon , mais encore par
plufieurs plans de fibres qui partent de la bafe
du cœur , fe rencontrent à la pointe , &: ta-
piffent les parois du ventricule gauche.
Le cœur a encore des vaifleaux fanguins
qui lui font propres ; favoir deux artères qui
fortent de la naifîànce de l'aorte, & une
grande veine avec une ou deux plus petites ,
que l'on appelle aheres & veines coronaires ,
parce que leurs troncs couronnent en quel-
que manière la bafe duc^e^/r.v.CoRONAiRE.
Les nerfs du cœur ôc de fes oreillettes vien-
nent d'un plexus de la huitième paire,. 6c du
nerf intercoftal a^péïé plexus cardiaque. Voy,
Nerf & Plexus.
Il y aauflî des vaifleaux lymphatiques qui
portent la lymphe dans le canal thorachique.
Fbje:^ÇQNi>VIT LYWLPHATIQJJE, %
40 <î
C O E
L'ufage du cceur eft de poufïcrle fàng dans
routes les parties du corps , à quoi contribue
principalement Ton mouvement alternatif de
contradion & de dilatation. Par la dilata-
tion , appelléc dîajiole , Tes cavités s'ouvrent
& fe dilitent pour recevoir le iang que les
veines y apportent ; & par leur contraélion
appellée^j^o/e , Tes cavités fe reflerrent &c fe
conrradtent pour repoulTer de nouveau le
fàng dans les artères. Fbye^ Oreillette,
Systole, & Diastole.
Ajoutez à cela, que ces mouvemens al-
ternatifs du cceur &c de Tes oreillettes font
oppofés; car les oreillettes fe dilatent pendant
que les ventricules fe reflerrent , &: récipro-
quement.
Au moyen du ventricule droit, le (àng eft
pouflë dans l'artère pulmonaire , d'où il paflè
dans la veine pulmonaire qui le rapporte dans
le ventricule gauche, d'où il fe diftribue par
le moyen de l'aorte dans toutes les parties du
corps; il retourne enfuite par la veine-cave
dans le ventricule droit du cceur , ce qui ache-
vé fa circulation. J^oyeij^CiRCULATiON.
Schenkius parle d'un homme qui n'avoit
point de cceur , ce que Molinetti traite de
fable j il nie mêm.e qu'il puifl'e y avoir deux
cceur s dans un même homme , quoique cela
foit fort ordinaire dans divers infedlesqui en
ont naturellement plulieursjtémoinsles vers-
à-(biequiont une chaîne de cœurs qui s'é-
tend depuis une extrémité de leur corps juf-
qu*à l'autre.Maisnous avons des preuves in-
conteftables qu'on a trouvé deux cœurs dans
la même perlonne ; on a même trouvé des
c^z/r^ que des vers avoient rongé & dévoré.
Muret a ouvert le cœur de quelques ban-
dits , & l'a trouvé entièrement velu , ou du
moins revêtu d'une efpece de duvet. Ce
qu'il y a encore de plus extraordinaire , eft
qu'on a vu des perfonnes dont le cœur étoit
renverfé ou tourné du haut en bas ; témoin
une femme qu'on pendit il a quelque temps
en Saxe , & un homme qui fouffrit le même
fupplice à Paris. Journ. des Sav.
Les animaux timides ont toujours le Cirwr
plus grand que ceux qui font courageux ;
comme cela fe voit dans le daim , le lièvre ,
l'âne , ùc. On trouve un os dans la bafe du
cœur de certains animaux, fur-tout du daim,
ui paroît n'être autre chofe que les tendons
brcux du c<ri.r endurcis & offifiés.
I
c o E
L'hlftoire rapporte qu'on trouva un pareil
os dans le cœur du pape Urbain VIII , lors-
qu'on vint à l'ouvrir après fa mort. Le cas
eft affez ordinaire dans le tronc de l'aorte
qui fort immédiatement du cœur. Voyer
A0R.TE & Ossification.
Il y a pluiîeurs animaux amphibies ,
comme les grenouilles,dont le c^j-wr n'a qu'un*
ventricule. Les académiciens françois préten-
dent que celui de la tortue a trois ventri-
cules; mais M. BuilTîere réfute leur fenti-
ment , &: foutient qu'il n'en a qu'un Ce
point eft encore indécis jufqu'aujourd'hui.
Mém. de Vacad. ann. 1703 , & Tranfact,
phi lof. n°. 328.
Théorie du mouvement du cceur. Les mé-
decins ôc les anatomiftes modernes ne s'ac-
cordent point entre eux fur le principe du
mouvement du cœur , ou fur les caufes de
facontradion & de fa dilatation alternative.
L'expulfion du fang hors des ventricules,
prouve qu'il fe fait un mouvement confidé-
rable dans cette partie. Il eft certain que la
force motrice doit furmonter la réfiftance
qu'elle rencontre ; &c fuivant le calcul de
Borelli , la réfiftance que le fang rencontre
dans les artères, eft égal à. iSooco livres
qu'il faut que le c<a?wr furmonte tant que la
circulation dure. D'où le cœur peut-il donc
recevoir tant de force ? & quelle eft cette
autre force qui après l'expulfion furmonte la
première , ôc donne aux parties le moyen
de fe dilater pour produire un mouvement
réciproque ? On a été dans de profondes té-
nèbres là-deflus jufqu'à ce que Lower ait
publié fbn excellent traité du cœur, dans
lequel il expHque d'une manière admirable
le méchanifme de la contraction ou fyftole
de cette partie. Le dodteur Drake qui eft
venu après lui, a heureufement expliqué la
caufe de fa dilatation ou diaftole , que Lower
avoit entièrement négligée.
Lower ôc plufieurs autres ont fuffifam^
ment prouvé que le cœur eft un mufcle def-
tiné à produire un mouvement de même
que les autres ; & comme il eft un mufcle
lolitaire fans aucun antagonifte , & qu'il
n'a point un mouvemen|^volontaire , il ap-
proche de fort près du fphind:er. Voyc^
Sphincter.
Le cœur diffère cependant de tous les
, autres mufclos du corps humain, par l'uni-
C O E
formité ôc la régularité de Tes dilatations &
contraélions alternatives. Fbje^ Muscle.
Cette vicilîitude de mouvemens a donné
aflèz d^embarras aux favaHS , qui , ne décou-
vrant rien dans fa ftrudture qui pût nécellai-
rement Toccaiioner , ni aucun antagonifte
qui pût le produire par fa réadion , n'ont fu
à quoi en attribuer la caufe.
La raifon & l'expérience prouvent que la
contradion eft l'aÂion & l'état qui convient
naturellement à tous les mufcles. Car , dès
qu'un mufcle n'eft plus furmonté par Ton
antagonifte , il fecontradeimmédiatementj
la volonté ne fauroit l'obliger à fe dilater. Si
Ton coupe , par exemple , le fléchifleur de
quelque partie, les extenfeurs n'étant plus
lurmontés par Padbion contraire de leurs
antagoniftes , celte partie fera étendue auili-
tôt, (ans que la volonté y ait part, & de-
meure dans cet état; la même chofe arrive ,
mais dans un fens contraire, lorfqu'on coupe
les extenfeurs.
Il s'enfuit donc que les mufcles ordinaires
n'ont d'autre mouvement de reftitution que
celui qu'ils reçoivent de l'aâbion de leurs an-
tagoniftes , par lefquels ils font balancés.
Les fphind:ers , par exemple , de l'anus, de
la velTie , &c. qui n'ont point d'antagoniftes
propres, font toujours dans un état de con-
tracSbion , 8c ne laiftent rien pafter , à moins
qu'ils n'y foient forcés par l'adion contraire
de quelques mufcles plus forts, qui font
toutes les fonctions d'antagoniftes , ians en
porter le nom, toutes les fois que cela eft
néceftaire. Voye^Ativs , Vessie , &c.
Nous avons donc ici une caufe adéquate
de la contra6tion du cceur , favoir , la force
motrice naturelle des fibres mufculaires , qui
tendent d'elles-mêmes à fe contraûer. Voy.
Musculaires & Fibres.
Il eft vrai cependant que , quoique les
fibres mufculaires du cceur mues par les nerfs,
foient l'inftrument immédiat de fa contrac-
tion ou fyftole, comme l'a fait voir Lower ,
il ne laifTe pas d'y avoir une autre caufe qui
n'y contribue pas peu , & que Lower n'a pas
connue ; favoir , les mufcles intercoftaux &
le diaphragme , qui aident &c facilitent cette
contradion , en ouvrant un paftage au (ang
dans les poumons,lequel lui étant refufé,de-
viendroit un obftacle invincible. Ajoutez à ce-
la , que l'artère Se la veine pulmonaire fê rs-
C O E 407
pandant dans toutes les divilions Se fubdivi-
fions des branches des poumons, & y étant
pour ainfi dire co-étendues, fouffrent les mê-
mes altérations dans leurs dimenfîons fuperfi-
cielles, que les bronches dans l'élévation & la
déprellion des côtes. Dans le temps donc que
les cotes font dans un état de dépreffion ,
foit avant ou après leur communication avec
l'air extérieur , les cartilages annulaires des
bronches fe raccourci lient 8c rentrent les
uns dans les autres , 8c par ce moyen leurs
dimenfions fe trouvent extrêmement con-
tradées ; l'artère 8c la veine pulmonaire fe
contractent de même par le moyen de leurs
tuniques mufculaires, ou fe plidènt 5c fe
rident ; ce qui paroît moins probable. D'un
autre côté , lorfque les côtes s'élèvent «3c que
le diaphragme s'affaitTe, l'air s'introduit dans
les poumons, poufle' les anneaux cartilagi-
neux, 8c écarte les bronches de la trachée-ar-
tère, augmente par leur moyen les différentes
divifions de L'artère 8c de la veine pulm.o-
naire, &: augmente par-là leurs cavités. C'eft
ainiî que leur adion alternative contmue &
fe communique au coeur , d'où elles fortent.
Par ce moyen , le fing paffè du ventricule
droit du coeur dans le gauche par les pou-
mons , ce qu'il ne pourroit faire autrement i
l'oppofition que le fang contenu dans le ven-
tricule eût nécellairement faite à fa contrac-
tion , cefte , & la fyftole devient par-là plus
fîcile. Fbjc;[ Systole.
Quant à la diaftole ou dilatation du coeur,
M . Lower fe contente de l'attribuer au mou-
vement que font les fibres pour fe remettre
dans l'état où elles étoient avant leur con-
tradion. Voici fes propres termes : " Puifque
tout le mouvement du coeur ne confifte que
dans fa contraétion , 8c que toutes fes fibres
ne tendent qu'à lui imprimer ce mouvement^
il s'enfuit que tout le mouvement de cette
partie confifte dans la fyftole ; mais comme
les fibres fe raccourciflent au-delà de leur
ton dans chaque contradion , il faut de toute
nécefTité qu'après que l'effort ace fte, le cceur
fe relâche de nouveau par un mouvement
naturel de reftitution , 8c qu'il fe dilate pour
recevoir le fang qui y eft apporté par les vei-
nes. La diaftole ne fe fait donc par aucune
nouvelle adion du coeur ; elle n'eft que la
fuite de la ceftàtion de fa première tenfion
8c de l'affluence du fang daiis fes cavités. >»
4cS C O E
S'il eft vrai , comme Lower le prétend ,
que la contra6lion (bit la feule a61:ion de ces
fibres , comment fe peut-il faire que leur
diflenlîon , qu'on appelle communément,
quoique mal à propos , leur relâchement ,
foit un mouvement de reftitution ? caria na-
ture & la difpofition de ces fibres prouvé
clairement que le coeur eft fait en forme de
cône, & qu'il efl dans un état violent pen-
dant fa dilatation. Il s'enfuit donc que la
contradion eft le vrai mouvement de refli-
tution , & le feul état dans lequel il retourne
de lui-même lorfquel'aâiiona celîéj de forte
que nous fommes toujours obligés de cher-
cher la véritable caufe de la diaftole , qui
paroît le phénomène le plus difficile qu on
remarque dans le cceur.
M. Cowper , dans l'introduâ:ion à fbn
anatomie , augmente la part que M. Lower
donne au fang dans cette a6tion , & le re-
garde comme le principal inftrument de la
dilatation du cœz/r; M. Drake, fon fe6ta-
teur , ne s'accorde cependant pas avec lui
fur la manière & la caufe de cette dilatation.
" Le cœur de l'animal , dit M. Cowper,
a beaucoup de rapport avec les pendules des
automates artificiels, des horloges &c des
montres portatives , en ce que fon mouve-
ment fefaitcomme celui des autres mufcles,
par le moyen du fmg qui fait Toffice d'un
poids». Suppofé que cet auteur ait voulu
dire que le iang en retournant dans les oreil-
lettes & les ventricules du cœur, les oblige à
fe dilater en pefant fur eux , en agiflànt
comme un contre-poids à fa contraction,
entant que mufcle , il eft dommage qu'il
n'ait pas donné une plus ample explication
d'un phénomène aum difficile de aulTi im-
portant j la pefanteur fpécifique du fang ne
paroît pas une caufe adéquate de l'effet qu'on
fuppofe qu'il produit dans cette occaiion :
car, fuppofé que le fanç n'agifte ici que
comme un poids par une limple gravitation,
il ne peut employer dans cette addon , en
defcendant de la partie fupérieure du cœur ,
qu'une force équivalente à cinq livres au
plus , quoiqu'il ait à furmonter , fuivant la
lupputation de Borelli, une réfiftance de
I 35000 livres. Quelle que foit la force qui
dilate le cœur , ôc la caufe de fa diaftole ,
elle doit être égale à celle du cœur , des muf-
cles intercoftaux 6c du diaphragme , contre
COÊ
laquelle il agit comme un antagonifte;
Il eft peut-être difficile ôc même impof-
fible de trouver une telle puiflance dans la
machine du corps animal j & cependant ,
fans le fecours d'un pareil antagonifte , il efl
impoffible que la circulation du fang puiflc
continuer. Tous les reilbrts qu'on a décou-
verts jufqu'aujourd'hui dans le corps humain
concourent à la contra6tion du cœur, qui eft
un état de repos auquel il tend naturelle-
ment ; cependant nous le trouvons alterna-
tivement dans un état de violence ou de di-
latation ; ôc c'eft cependant de cette alterna-
tive que dépend la vie de l'animal.
Il eft donc nécefï'aire de trouver quelque
caufe extérieure capable de produire ce phé-
nomène , foit dans la qualitéde l'air ou dans
la preffion'dc l'atmofphere , puii(|ue nous
n'avons point de commerce conftant &c im-
médiat avec d'autres miHeux.
Quelques phyfîciens ayant obfervé que
nous ne pouvons fubfifter dès que la com-
munication que nous avons avec Pair exté-
rieur eft interrompue , ont imaginé qu'il (è
mêle pendant l'infpiration certaines parties
de l'air extrêmement pures avec le fang qui
eft dans les poumons, lefquelles paftentavec
lui dans le cceur , où elles entretiennent une
efpece de flamme vitale , qui eft la caufe du
mouvement réciproque de cette partie.
D'autres ontniéPexiftence de cette flamme
aétuelle , Ôc prétendu que les parties les plus
fubtiles de Pair venant à fe mêler avec le
Iang dans les ventricules du ca?ur, produifent
une effervefcence quiPobligeà fe dilater.
Mais on a rejeté tous ces différens fenti-
mens, ôc l'on eft encore aujourd'hui dans le
doute s'il fe mêle quelques particules d'air
avec le fang dans les poumons, ou non.
F'oye:^'? ou MOUS , Air , f/c.
En fuppofant même qu'il s'infinue quelque
portion d'air dans la veine pulmonaire , il
ne peut autrement dilater le cceur que par une
effervefcence dans le ventricule gauche , qui
ne feroit point fuffifante pour dilater le droit:
mais ladiftedionanatomique de la partie ne
fuffit-elle point pour détruire ce fentiment,
quia été fuffifamment réfuté par un grand
nombre d*excellens auteurs? Voye^ Respi-
ration.
Qtioi qu'il en foit , la maffe de Patmof-
phere paroît être le véritable antagonifte de
tous
C O E
tous les mufcles qui fervent à l1n(pîration
ordinaire & à la contraction du cœur ; ôc
cela fe trouve confirmé non feulement par
fa puiflànce , mais encore par lanéceflité de
fon action fur les corps animaux. Voye:^
AtMOSPHEPvE.
L.e ca?ur y comme nous lavons déjà
oblervé , eft un mufcle folitaire d'une force
extraordinaire*) qui eft encore augmentée
par les mufcles intercoftaux & le diaphrag-
me, qui n'ont point d'antagoniftes ; de forte
qu'elle a befoin d'être contrebalancée par
quelque force équivalente quelle qu'elle
puifle être : car quoique l'aéVion des mufcles
intercoftaux foit volontaire , ils ne font pas
pour cela exempts de la condition des autres
mufcles qui fervent aux mouvemens volon-
taires , lefquelsferoient dans une contraftion
perpétuelle , nonobftant l'influence de la
volonté , fans le balancement des mufcles
antagoniftes. Les poids de Patmofphere
qui preflè lur la poitrine ôc fur toutes les
autres parties du corps , fuppléeà ce balance-
ment qui fe trouve entre les autres mufcles;
ôc comme dans tous les autres mouvemens
volontaires l'influence de la volonté ne fait
qu'augmenter l'adion de l'unedesdeux puif-
lances qui étoient auparavant en équilibre; de
même elle ne fert ici qu'à donner à ces muf-
cles aftez de force pour foutenirun poids qui
furmonteroit leurs forces, s'ils n'étoient point
fécondés de la manière que je viens de le dire.
Auffi-tôt que ce fecours vient à manquer , les
côtes s'abaiflent de nouveau par la feule pe-
fanteur de Patmofphere ; ce qu'elles ne fe-
roient point fans cela , malgré le penchant
naturel qu'ont ces mufcles à fe contracter.
Cela eft fuflSfamment prouvé par les ex-
périences de Torricelli , &c par celles qu'on
a faites fur des animaux dans le vuide , où
dès que la preflion de l'air eft ôtée , les muf-
cles intercoftaux ôc le diaphragme font con-
tractés , les côtes s'élèvent dans le moment,
& la volonté ne peut plus les obliger à s'a-
baifler , à moins que l'air ne vienne à fon
fecours & ne les y force par fa preffion.
Comme dans l'élévation des côtes le fang
eft en quelque forte obligé d'entrer dans les
poumons par le pafllage qu'il trouve ouvert j
de même lorfqu'elles viennent à s'abaiftèr ,
il eft forcé , par l'affaiftement des poumons
& par la contraction des vaifleaux fanguins ,
Tome FJIl
C O E 43^
de palTer par la veine pulmonaire dans le
ventricule gauche du coeur : cela joint au
poids de l'atmofphere qui prefle fur toute la
furface du corps qu'il entoure de tous côtés ,.
eft cette puilfance qui oblige le fang à mon-
ter dans les veines , après. que la force que le
cceur lui avoit imprimée a ce fle ; & elle fuffit
même pour obliger le cceur à fortir de fon
état naturel , & à fe dilater.
Lorfqu'on vient à fupputer la pefànteur
d'une colonne d'air égale à la furface du
corps , oji s'appcrçoit qu'elle fuffit pour pro-
duire les effets qu'on lui attribue. Si l'on con-
sidère outre cela que les corps des animaux
(ont des machines capables de céder à la
prelTion , on connoitra fans peine qu'elle
doit agir fur eux de la manière que nous
l'avons dit. Cependant quoique nos corps
foient entièrement compofés de petits tubes
ou vaifleaux remplis de fluides , cette pref-
fion, quelque grande qu'elle foit, étant la
même par-tout , ne pourroit les affecter , à
moins que les dimenfions fuperfîcielles ne
variafl'ent également ; à caufe qu'étant éga-
lement preflés par-tout avec le même degré
de force , les fluides qu'ils contiennent ne
pourroient fe retirer dans aucun endroit, ôc
taire place à ceux qui les fuivent , mais de-
meureroient aufïi fixes ôc aufîi immobiles
que s'ils étoient actuellement folides. Voye:(^
Fluide Ê'Air.
Mais la dilatation de la poitrine fournit
afîez d'efpaceaux fluides pour fè mouvoir ,
ôc fon reflèrrement leur imprim.e un nouveau-
mouvement ; ce qui eft le principe de la
circulation continuelle du fang.
Cette dilatation ôc cette contraction réci-
proque des dimenfions fuperficiellesdu corpt
paroifléntfînécefîàiresà la vie de l'animal ,
qu'il n'y en a aucun, quelque imparfait qu'il
Ibit , dans lequel elles ne fe trouvent ; pour
le moins on n'en a encore découvert aucun
dans lequel elles n'aient exiflé.
Quoique les côtes ôc les poumons d'un
grand nombre de poiflbns ôc d'infeCtes
n'aient aucun mouvement , ôc que leur poi-
trine , par une fuite néccfl'aire , ne puiflè
point fe dilater, ce défaut efl: cependant
réparé par un méchanifme analogue qui fup-
plée autant qu'il fùut aux belbins de la vie.
Les poiflbns , par exemple , qui n'ont point
de poumons , ont des ouies qui font Içs
410 C O E
mêmes fondions qu'eux -, car elles reçoivent
& rejertcnt l'eau alternativement , de forte
que les vailTeaux fanguins fouffrent la même
altération dans leurs dimenlions, que dans
les poumons des animaux les plus parfaits.
y^oye^^ Ouïes.
Qiioique les poumons des infedes diffé-
rent autant que ceux des poillbns de ceux
des animaux parfaits, ils ont cependant la
même adion & le même ufage qu^'eux , c'eft-
à-dire qu'ils fervent à challèr l'air & à varier
les dimenfions 8c la capacité des vaifleaux
fanguins. Comme ils n'ont point de poitrine
ou de cavité feparéc pour le drur 3c les vaif-
leaux qui reçoivent l'air , ces derniers fe dif-
tribuent dans tout le tronc , par le moyxn
duquel ils communiquent avec l'air extérieur
'^arditférensfoupiraux ;, auxquels font adap-
tés différens (iftletsqui envoient des rameaux
dans tous les mufcles Se dans tous les vifce-
res , Se paroiflènt accompagner les vaifleaux
fanguins pnr tout le corps, de même qvie
dans les poumons des animaux parfiits. Par
cette difpodtion , le corps s'enfle dans chaque
infpiration, Se fe reflerre dans chaque expi-
ration ; ce qui doit caufer dans les vaifleaux
fanguins une viciffitude d'extenfion Se de
contradion. Se imprimer un plus grand
mouvement dans les fluides qu'ils contien-
nent , que ne le feroit le cœur qui ne paroit
point mufculcux dans ces animaux.
Le fœtus eft le feul animal qui foir exempt
de la nécefFiré de recevoir Se dechafler alter-
nativement quelque ffuide j mais pendant
qu'il efl; enfermé dans la matrice , il ne pa-
roit avoir tout au plus qu'une vie végétative ,
êc ne mérire point d'être mis au nombre des
animaux ; Se fans cette petite portion de
mouvement mufculaire qu^il exerce dans la
matrice , on pourroit fans abfurdité le regar-
der comme une greffe ou une branche de la
mère. Vo^reiVffiTxjs , Embryon, &€.
On peut objeder contre la dodrine que
nous venons d'établir , que le drur de plu-
fieurs animaux ne bat pas avec moins de ré-
gularité Se moins de force dans le vuide que
dans l'air , comme M. Bcyle l'a expérimenté
avec ceux des grenouilles. Tranf. philofoph.
d\ 6%.
Efiimation de la force du coeur. La quantité
de la force du cœur a été différemment eftri-
inée 3 8c fur divers principes , par placeurs
C O E
auteurs ; mais particulièrement par Borellî ,
Morland , Keiîl , Jurin , &c.
On peut déterminer la force du cœur par
le mouvement avec lequel il fe contrade ,
ou par le mouvement d'un poids qui étant
oppoié au fang tel qu'il exifl:e hors du cœur ,
foit cap?.ble de le balancer Se d'en arrêter
le cours. Nous n'avons aucun moyen de
pouvoir en venir à bout à priori , à caufe
que nous ne connoiflons qu'imparfaitement
la fl^ruéture interne de cette partie , Se la
nature Se la force de la caufe d'où dépend la
contradion ; de forte que le feul moyen qui
nous rcfl:e efl de l'apprécier par les effets.
Toute l'adion du cœur confifte dims la
contradion de fes ventricules; à mefure
que ceu> -ci fe contradent , ils preflènt le
langs Se lui communiquent une partie de
leur mouvement , ils le pouflent avec vio-
lence dans les paflagcs quM trouve ouverts.
Le fang ainli pouflé dans l'aorte Se dans l'ar-
tère pulmonaire , fait effort de toutes parts ,
en partie contre les tuniques des artères qui
étoicnt devenues flafques dans la dernière
diallole , Se en partie contre le fang qui le
précède , Se dqnt le mouvement eft trop
lent. Par ce moyen les nmiques des artères
fe tendent peu à peu , le mouvement du
fang dont nous venons de parler, devient
plus rapide.
Il eft bon d'obferver en piflant . que plus
les artères iont flafques , moins elles font de
réiiftance au fang qui veut les dilater; Se
que plus elles font tendues , plus aufli s'op-
pofent-elles avec force à une plus grande
dilatation ; de forte que route la force du
lang au [omr dn cœur eft d'abord plutôt em-
ployée à dilater les artères , qu'à pouHèr le
fang qui le précède; au lieu que dansla fuite
il agit moins fur les artères, que fur le fang
qui s'oppofe à fon cours.
Borelli, comme nous l'avons déjà obfèr-
vé , dans fbn éconcm. anim. fuppofe les obf-
taclesqui s'oppofent au mouvement du fang
dans les artères, équivalens à iSoooc liv.
Se la force du cœur à 30C0; ce qui n'e-ft
qu'un -A de la réiiftance qu'il rencontre. Si
l'on déduit 4yooo liv. pour le fecours fortuit
qu'il reçoit de la tunique mufculaire élafti-
que des artères , il refte pour le cœur une
force de 3000 livres , avec laquelle il doit
furmonter mic réiiftance de 13 5000 livres.
^
C O E
c*efl:-à-<îire écarter avec une livre de force
un obfraclc de quarante-cinq livres ; ce qu'il
fait , à ce que liippole cet auteur , par la
force Je percuiTion.
S'ileût pouflé Ion calcul ju(qu*aux veines,
qu'il prétend contenir quatre fois plus de
1 mg que les artères , ôc dans lefquelles cette
f jrcc de percuiïion ne Te fait point fentir du
tout, ou du moins que très-foiblement, il
n'eût pas eu de peine à reconnoître l'infuffi-
fance du fyftême de percuiïion.
On accuie même Ton calcul de fiufTeté ,
& l*on prétend que la force qu'il attribue au
cœur eft infiniment trop grande.
Ledo(5teur Jurin fait voir que fi Borelline
fe fût point trompé dans fon calcul , il eût
trouvé la réfiftance que le cœur eft obligé de
furmonter beaucoup plus grande, même fui-
vant Tes principes , 6c qu'elle eût été de
1076000 , au lieu de 1 55000; ce qui pafle
toute vraifcmblanc^e.
Le plus grand défaut de la folution con-
fifte , fuivantle docbeur Jufin , en ce qu'il a
apprécié la force motrice du cœur par un
poids en repos ; en ce qu'il a fuppofé dans
une de fes expériences que le poids que fon-
dent un mufcle eft entièrement foutenupar
fa force de coniraâ:ion ; que les mufcles qui
ont la même pefanteur font également forts ;
enfin que la force du cœur augmente à cha-
que fyftole , &c.
Le dodceur Keill , dans Çts ejfaisfur Vécon.
an m. a le premier abandonné le calcul de
Borelli , auquel il en a fubftitué un autre
infiniment plus petit. Voici comment il cftime
la force du cœur. Suppolant que l'on con-
noiflè la vîtefle d'un fluide, & faifmtabf-
tradtion de la réfiftance qu'il rencontre de la
pare d'un autre fluide, on détermine la force
qui le met en mouvement comme il fuit.
Soit la ligne a la hauteur de laquelle doit
tomber un corps pour avoir une viteUe égale
à celle du fluide , la force qui met ce fluide
en mouvement fera égale au poids d'une
colonne du même fluide , dont la bafe feroit
égale à l'orifice, &: la pefanteur à 1 ^. CorolL
2. , prop.^&y lib. /J,des principes de Newton.
Maintenant le fang qui fort du cœur trouve
une réfiftance qui retarde fon mouvement
de la part de celui qui circule dans les veines
&c les artères ; ce qui l'empêche de couler
avec toute la vîtefïè que X^cœur lui imprime.
C O E 41!
une partie de cette force étant employée à
furmonter la réfiftance de la maflè du fiing..
Suppofé donc que Pon connoide de com-
bien la vîtefl'e dufingeft diminuée par cette
réfiftance, ou quelle eft la proportion entre la
vîtefle du fang qui rencontre cette réfiftan-
ce , & celle du fang qui n'en trouve aucune;
il ne fera pas diflficile , après avoir détermine
la première , de trouver la féconde , & par-
conléquent la force abfolue du cœur. L'au-
teur s'eft fèrvi , pour la découvrir , de l'ex-
périence fuivante.
Après avoir découvert l'artère & la veine
iliaque dans la cuifle d-'un chien près du
tronc, & y avoir fait les ligatures convena-
bles , il coupa les vaiftèaux &c reçut pendant
dix fécondes le fang qui en fbrtit. Il fit la
même chofe fur l'artère pendant le mê-
me efpace de temps , & il pela avec foin
la quantité de fang qui fortit de ces deux
difïérens vaifTeaux : il réitéra la même expé-
rience , ik. il trouva enfin que la quantité de
fang qui étoit fôrtie de l'artère , étoit à.cellc
qu'avoit donnée la veine dans le même ef-
pace de temps , à-peu-près comme 7 i à 3 .
La vîtefle du fang dans l'artère iliaque Ci
près de l'aorte , doit être à-peu-près la mêni«
que dans l'aorte ; d'où il fuit que la vîtefle
avec laqu ;lle il fort par l'artère iliaque après
qu'on l'a coupée , eft égale à celle qu'il au-
roit au fortir àwcœur lorfqu'il ne trouve au-
cune réfiftance ; ou , ce qui revient au même,
le fang fart par l'ouverture de l'artère iliaque
avec toute la vîtefle q^u'il a reçue du cœur.
Tout le fang qui pafle dans l'artère iliaque ,
y revient de nouveau par la veine iliaque ,
& par conféquent la quantité de fang qui
paflè dans toutes les deux dans le même temps
doit être égale. Il s'enfuit donc que la quan-
tité de fang qui fort par l'ouverture de la veiné
iliaque , eft égale à celle qui a paflé dans l'ar-
tère iliaque avant qu'on l'ait coupée , dans
le même espace de temps. Puis donc que
nousconnoiflbns laquantit\4 de fangqui paflè
dans Tartere iliaque lorfqu'elle eft coupée &
avant qu'elle le foit , il s'enfuit que nous
avons leur viteflè ; car la vîteffed'un fluide
qui coule dans le même tuyau dans un ef-
pice de temps égal , eft diredement comme
f.i quantité : mais la vîtelLe du fang lorfque
l'artcre eft coupée , eft égale à celle qu il re-
çoit du cœur ; ôc la vîtelïe lorfqu'elle n'eft
Fff 2
411 C O E
point coupée , eft celle avec laquelle le fang
coule dans l'aorte, dans laquelle il trouve de
la rélîfknce ■-, d'où Ton voit que ces deux
vîteires font l'une à l'autre comme 7 î à 3 .
Si l''on fuppofe maintenant que le caur
jette deux onces de fang à chaque fyftole ,
ce qui eft affez vraifemblable , le fang doit
parcourir dans l'aorte 156 pies en une mi-
nute; de forte que la vîtelîê abfolue avec
laquelle il eft poufl'é dans l'aorte , eft ca-
pable de lui faire courir 590 pies en une
minute, ou ^ pies \ en une féconde, s'il
ne trouvoit aucune réliftance.
Recherchons maintenant de quelle hau-
teur doit tomber un corps pour acquérir la
vîteil'e que nous lui avons donnée; car cette
hauteur étant doublée, donne la hauteur
d*lin cylindre dont la bafe eft égale à 1 o-
rifice de l'aorte , & la pefànteur à la force
abfolue du caur.
L'on fait par expérience que la force de
gravité fait parcourir à un corps 5 o pies en
une féconde , ce qui eft la vitefle qu'il ac-
quiert en tombant de la hauteur de 1 5 pies ;
d'où il fuit que cette vîteftè eft a celle du (ang
qui^coule lans trouver de la réfiftance dans
l'aorte , comme jo à 65. Mais comme les
efpaces qui font acquérir aux corps les vitefles
que nous leur avons données, font comme
les quarrés de ces mêmes vitefles , c'eft-à-
dire, comme 900 à 42.25, il s'enfuit qu'il y
a même rapport de 900 à 42.15, que de 15
à o 74, Cette hauteur étant doublée , donne
148 ou i77<j pouces; ce qui eft la hauteur
d'une colonne de fang, dont la bafe eft égale
à l'aorte que notis avons fuppofée égale à
o 4187 ; & par conféquent le folide qu'elle
contient eft 7 436iiz , dont la force eft
égale à la force ablolue du cœur. Cette force
eft de cinq onces; d'où il fuit que la force
du cœwr eft égale à un poids de cinq onces.
Ce même auteur a trouvé par un calcul
fondé fur les loix des corps mis en mouve-
ment , que la force du cœured prcfque égale
à huit onces; & quoique cette quantité dif-
fère q uelque peu de la précédente , elle n'eft
4-ien eu égard au calcul de Borelli, dont
Terreur ne vient, à ce que prétend le doc-
teur Keill, que de ce qu'il n'a mis aucune
différence entre le fang qui eft en repos, &
celui qui éroit déjà en mouvement. Il eft
çeitain que la force du caur n'eft point I
CO E
employée à donner du mouvement au fang
qui eft en repos , mais feulement à l'entre-
tenir dans le mouvement qu'il avoit déjà :
de favoir maintenant d'où il a reçu ce pre-
mier mouvement , c'eft ce qui n'eft pas au
pouvoir de l'homme de déterminer. Il eft
facile de démontrer que le caur n'a jamais
pu mettre le fang en mouvement , fuppofe
que la réfiftance de ce dernier ait toujours
été telle qu'on la trouve aujourd'hui. Si le
fang étoit toujours mu en avant avec le mou-
vement qu'il a d'abord reçu. Se que les tu-
niques des vaiflèaux ne fiflent aucune réfif-
tance , le fang qui le précède ne pourroit le
retarder , &: fa force feroit toujours égale à
la force abfolue du moteur ; mais comme il
trouve de la réfiftance de la part des tuniques
des vaifteaux fanguins, & qu'il eft obligé
d'employer une partie de la force qu'il a
reçue pour les dilater, fon mouvement eft
continuellement retardé , & s'anéantiroit à
la fin fi le caur ne lui en communiquoit un
nouveau ; c'eft pourquoi la force du caur
doit néceflàirement être égale à la réfiftance
que le fang rencontre lorsqu'il fe meut : fi
elle étoit plus grande, la vitefle du fang
augmenteroit continuellement; & elle di-
minueroit fans celle fi elle étoit moindre ;
d'où il fuit que fi la circulation du fang
venoit une fois à cefler ; toute la force du
caur feroit incapable de le mettre de nou-
veau en mouvement.
Mais c'eft aflèz nous arrêter au fyftême
du doéteur Keill. Le dodteur Jurin ne le
trouve pas exempt de défauts , & con-
damne la fuppofition qu'il fait , que la per-
fanteur qui peut donner le mouvement à
l'eau qui iort d'un vaiileau , eft la caule
de ce même mouvement : ce dernier auteur
croit que Keill a mal entendu lé corollaire
de M. Newton, & il prétend que l'eau qui
tombe par fa propre pefànteur acquiert fon
mouvement d'elle-même, & que le poids
qui tombe en même temps , ne reçoit qu'un
mouvement égal à celui qu'a l'eau hors du
vaiftèau. Il fait encore plufieurs autres ob-
jections contre ce fyftême, auxquelles l'au-
teur a répondu dans lestranfaClionsphilofo--
phiques. Son . antagonifte n'a pas demeuré
lans réplique; Se cette difpute n'en fût pas^
reftée là , fi la mort de l'auteur ne Teùt.teriK-
minée..
C O E
Le dodeuT Jurin n'a pas lailTé que de
donner un autre calcul, fondé fur des
principes auxquels il n'y a rien à redire;
mais Ion adverfaire a pris de -là occafion
de rentrer en lice avec lui.
Il confidere un des ventricules du caur
qui pouflè le fang , comme un corps donné
qui en poude un autre qui eft en repos
avec une vîtefle donnée , &: qui après lui
avoir communiqué une partie de Ton mou-
vement, marche avec lui avec une viteflè
commune. Sur ce principe , la quantité de
la force du cœur doit être égaie au pro-
duit du nombre qui défigne le poids du
ventricule , par celui qui dé%ne ia vîtefle
avant qu'il poulie le fang , ou à la fomme
du mouvement du ventricule &z du (ang
qui en fort , & de celui qu'il communique
aux tuniques des artères & au fang qui le
précède.
On peut démontrer, i°. que le mou-
vement de contraction d'une machine
creufe qui (e contrade inégalement , eft
égale à la fomme ou nombre qui exprime
les différentes particules de la machine ,
multiplié par celui qui marque leurs vîtefles
refpecHves ; d'où il fuit que le mouvement
de la machine eft égal au nombre qui
défigne la quantité de fon poids par quel-
qu'autre nombre qui indique la vitefle
moyenne entre les particules qui fe meu-
vent avec le plus de vitefle , ôc celles qui
fe meuvent plus lentement. z°. Quelor(que
l-eau comprimée iort par l'orifice d'une
telle machine. Ion mouvement eft égal à
la {omme de chaque lecVion tranfveriale
de tous les filets- d'éau mulapliés par leurs
hauteurs & leurs viteffes reipeétives; d'où
il fuit que le mouvement de l'eau eft égal
à la fomme de Peiu qui s'écoule par quel-
que longueur moyenne entre celle du plus
long filet d'eau , & celle du plus court.
Suppofé donc que l'on ait pluiîeurs ma-
chines femblibles pleines d'eau , ôc preflees
de même, foit également ou inégalement,
lé mouvement de l'eau qui fort par l'orifice
d'une d'elles , fera en railon compofee de
là raifon quadruplée de tout diamètre ho -
mologue de la machine &c de li raifon
réciproque du temps dans lequel la con-
araftion fe fait.
Ces grinciges une fois pofésj il eftuaifé
C O E 413.
d'en déduire la folution du problême , dans
lequel on demande de trouver la force du
cœur Car^ appellant la pefanteur du ven-
tricule gauche, ou la quantité du fang qui
lui eft égale, p; la furtkce interne du ven-
tricule, s; la longueur moyenne des filets
du (ang qui en lortent, /; k fedion de
1 aorte, /; la quantité de fang contenue
dans le ventricule gauche, ^; le temps que
le iang met a lortir du cœur égal à la réiif
tarice des artères, & du fang qui le pré-
céder; la viteffe variable avec laquelle le
Iang fortiroit de l'aorte , s'il ne trouvoit
aucune refiftance, v; la longueur variable
de 1 aorte que le fang parcourt , x - ôc
le temps pendant lequel cette longueur eft
parcourue, i; la vîteffe variable moyenne
du iang contigu au ventricule , ou la vite/Te
moyenne du ventricule même fera= —
le mouvement du ventricule = p x — •
le mouvement du fang qui en fort==:^ vK
l+x; ôc leur fomme ou la force du ventri-
cule = . V X ( £-+ / 4. ^y j,j^-^ ^, ^ ^.
d'où l'on trouve , par la méthode inver'^e
Q^^s Huxions que la force du ventricule eft
~~ T ^ It "^ T "+" 0 ■ "^^s puifque ^=r?,
^^=^, il s'enfuit donc que la force du
ventricule =-fx(^4.i.+ /) , ^n trouve
de la même manière , en fe fervant de lettres
greques , au lieu de lettres italiques , la force
du ventricule droit =:?x/^--4-X_l.,V
de lorte que ja force entière du cœur eft
^ Si l'on fuppofe maintenant que p foit égal
a 8 onces ,^ & -r à 4, 5- 10 pouces quarrés ;
2 — la même quantité ; /= 2 ^ & ^ =:; j .
pouce; q = x onces; j = o, 4185 pouces
quarres i .^ == v^ , y 8 3 ; & r = i " : bs forces
des ventricules feront égales aux poids ci-
delious ;. fa voir.
Celle du ventricule gauche. . . cj* i'
Celle du droit ^ ^ .
La force totale du cœur . . .* . ij 4
Ces poids ont une vîteffe qui leur feroit.
parcourir un powce en une féconde..
Coll. Il fuit de là que lorfque le pouls;
eft plus Vite, qu'à l'ordinaire-, il faut qiii^ki
414- COE
réfiftance foie moindre , ou que la force du
fang ait augmenté , ou qu'il forte une
moindre quantité de fang à chaque con-
traction du cczur^ ôc vice verfâ. Il fuit
encore , que fi la réfiftance augmente ou
diminue, il faut que le pouls ou la quan-
tité de fang que le cœur pouflè à chaque
contraction , augmente ou diminue ref-
peCtivement ; & que lorfque la force du
cœur augmente ou diminue, le pouls doit
être plus vite , ou la réiîftance moins grande.
Fojf:^^ Pouls.
Le doéteur Turin entreprend de démon-
trer par ces principes les théorèmes luivans :
1°. Que le mouvement total de réfif-
tance que le fang rencontre en fortant du
cœur dans chaque fyftole, ou le mouve-
ment qu'il communique au fang qui le
précède, & aux tuniques des artères, eft:
à-peu-près égal à la force totale du cœur.
1°. Que le mouvement communiqué
au fang qui précède celui qui fort du cœur
dans la fyftole, eft au mouvement com-
muniqué aux tuniques des artères , comme
le temps de la fyftole eft à celui de la
diaftole. Suppofons donc, avec M. Keill,
que la fyftole s'achève dans le tiers de
Tintervalle qui s'écoule entre deux pouls,
le mouvement communiqué au fang qui
devance celui qui fort du cœur, fera le
tiers de tout le mouvement du cœur; de
COE
celui qui eft communiqué auK artcre", les
deux tiers de ce même mouvcmciit.
5°. Dans les différens animaux , la force
du cœur eft en raifon compofée de la
raifon quadruplée du diamètre de quelque
vailîèau homologue que ce foit , & de la
raifon inverfe du temps pendant lequel
le cœur fe contracte , ou en raifon com-
pofée de la raifon de la pef^nteurdu cœur
ou de l'animal entier, de la raifon fou-
doublée de la même pefmreur , & de la
raifon réciproque du temps.
Nous allons finir cti article par une
table, qui contient le réfulcat de plufieurs
expériences que M. Halles a faites fur la
v'tefie du fmg dans les animaux, & fur
d'autres confidérations de la même nature.
L'appareil de ces expériences eft fimpîc.
Il faut avoir un tuyau de cuivre recourbé
aflez court , tSc d'un ^ de pouce de dia-
mètre ; un tuyau de verre de neuf à dix pies
de longueur , 6c du même diamètre que ce-
lui de cuivre i un troifieme tuyau de cuivre
qui joigne & affermifle enfemble les deux
tubes précéciens, en les embraflant : quan4
ils font adaptés l'un à l'autre , on commence
par lier le vaiflcau deftiné à l'expérience ;
on le perce , on infère dans l'incifion le petit
tuyau de cuivre recourbé; on achevé le
reftç de l'appareil : tous ces tuyaux font
gradués par des divifions très -petites».
C O E C OE 4,5
I LaplusetandelLa plusgraudt Capacité de«i _ , .... /r j r j lU
É. A KTi»^ A ,TV T. :j. k,L /. f„„„ K,.., i, r.„„ -Lr.;...i-. Coupe de VitefTe du fang dans.»
ANIMAUX
Homme.
i^r cheval.
Bœuf.
iMouron.
Daim.
I "■ chien,
-.e
Leur poids.
Liv. 0:ic
160
Sis
1600
91
haut, du fang
10^
5^
18
31
43
15
57
3^
^4
578
3;
3^
.^3
des)
igulaircs
Pifi.
PoilC
12
52- '
A-
5_
haut, du diig
d;s carotidfî.
Fi«.
/'CUf.
ventricules
gauches
7
5
SI
5
Si
5
5
6
14
2.4
9
8
14
.i _2
3
L^t.ibe adapté
.1 l'art, crurale
à ces 2 ch ens.
S
I
6
*>
7
1 1
8
Kn fuçant for
En fuçant.
5 i
7 II
10
Pc!U«i cutiç
I
6s9
3
31S
IZ
y
I
8j
9
z
Coup
l'aorte
1 fang
l'aorte par minutes.
I 171
I ^S
I
I lyzl
Lei tubes axés à Tartere crurale.
Il étoit très-vieux {le mourut prompiement.
Les tubes iîxét latéralem. à la carotide gauche
le tuyau
3S ^^^î^^^^^^^^^s;gJSsi^Si--^^&'^^feï^s-^o^^^^I^^'^^^^^3^^^^^^^^^^^^^&5i€
:=^=;r=g^^^
ANIM-\UX.
Homme.
:heval.
Bœuf.
IMouron.
chien.
Il palfe une
quantité de
lang égale
au po ds d?
l'aniraal.
: «-<'y!'~'— ^y->— »-^>— ^«^ip»— — <3|7>~ — gip~ —^e>— •«^jp»— ■>--ff^>r — •gf»~ ^^
Minutes.
36
18
(^O
88
10
1 1
6
7
6
9
48
8
Co!T:biendf
fang par mi-
nute pafl'e
par le cœur
Livres.
57
74
M 75
18
14
4 595
34
7
3
8;
si. A— ^9._
Poids fouce-
nu j)at l'cf- jNo.T.bre de
foitdu ven-
tricule gau'
che.
Lignes.
51
5
113
zz
3;
J3
33
19
II
61
8
I
P'.ilfations
par minute
73
36
^S
97
Coupes d;
l'aorte defccn
dance.
douces
quar.
.
0
<^77
0
91Z
0
0
094
383
Coupes de l'aorte
afcendante.
Vi:uces qu.irrés.
O 369
O 85
106
lOZ
07
061
119
i^y
109
Droite.
O 07
O
Gauche.
O OIZ
1^6
O
O
O
o
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o
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041
C3I
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tS ^=^ • "r^TÎfs" — ratV— .7F^F^r-tj{&r— s^feg siTîjfei — ii-ife-^ ^^ii^i^mt I^iwi^iS5siTiit^-*iùj*«-i«aSt-^ST€
41 < C O E
On voir par ces tables , qukà coînp?.rant
les poids des animaux , &c les quantités
correl pondante s de iang qui paCent dans
leurs cœurs dans un temps donné, on n'en
peut rien tirer de fixe.
Que ces quantités dans les grands ani-
maux font fort dii'proportionnées à leurs
corps , en comparaiion de ce qu'elles font
dans les petits animaux.
Que le fang ayant dans les grands ani-
maux une plus grande courfe à faire &
plus de réfiftaiice à vaincre , en cornpa-
rant les hauteurs perpendiculaires du Iang
dans les tubes fixés aux artères , la force
du fang artériel efl particulièrement plus
grande dans les animaux les plus grands.
Qu'en fuppofant les vaifleaux fanguins
de l'homme ôc du cheval diftribués éga-
lement dans toutes leurs parties homolo-
gues, alors le fmg fc devroir mouvoir dans
ces animaux avec des vîtefles réciproques
aux temps durant Icfquels des quantités
de fang égales à leurs poids relatifs paflent
dans leur cœury &c par conléqucnt dans le
rapport de 60 à 1 8, i y minutes.
Et que , quoique le fang artériel du che-
val foit poulie avec une plus grande force
qi]e celui de Phomme , cependant il fe meut
plus lentement dans le cheval , à raifon
du plus grand iwmbre de ramifications &:
de la longueur des vaiiléaux plus grande
dans les plus grands anim.aux, ùc.
Le favant phyficien que nous citons, a
fait les mêmes expériences fur les vaiflTeaux
des mufcles &c fur ceux des poumons. V.
d^ais fon ouvrage le détail de ces expé-
riences , des expériences précédentes , & des
induftions qu'il en tire fur la force du cœur.
Une des principales différences entre
l'homme &: les bêtes , conf.fte en ce qu'il
y a beaucoup plus de correfpondance entre
la tête & le cœur de l'homme que dans les
autres animaux. Or , cette correfpondance
cfl: produite par le grand nombre de nerfs
que le cerveau envoie au coeur &c aux par-
ties circonvoiiînes : dans les bêtes, il ne
vient des nerfs du cerveau aux parties cir-
convoifines du cœur que par les branches de
la paire vaguer au lieu que dans l'homme
il en vient encore par la paire intercoftale.
La raifon de cette différence , félon le
«loueur Willis, c'efl que les brutes n'ayant
C O E
point de difcernerrent & peu de pafïîons,
elles n'ont pas befoin, comme 1 homme,
d'un double palïàge pour les efpritsj l'un
pour l'ufage des fonctions vitales , l'autre
pour rimprefïîon réciproque des afFedions,
F'oye';^ Nerf, Esprit, Cerveau, ôc.
C(E.UR ( MALADIES DU ). On ne peut
nen ajouter à Pexaélitude & à la précifion
avec laquelle M. de Sen?.c a expoicles ma-
ladies du cœur, dans fon favant traité fur la
ftrudure de cette partie. Nous allons donner
un extrait de fa doébrine fur cette matière.
L'auteur commence par faire un détail
des caufes qui augmentent ou qui diminuent
l'aétion du cœur : il entre à cet égard dans
des examens fort importans, 3c qu'il eft trcs-
néceflaire que ceux qui fuivent les théories
les plus répandues , & qui en font les fonde-
mens de leur pratique , lilent avec attention.
Nous expoferons l aétion générale de toutes
ces caufes aux articles Epaississement des
HUMEURS, Obstruction, Pléthore,
Spasme , Irritation.
M. de Senac donne enfuite une idée gé-
nérale àcs maladies propres du cœur, pour
conduire à un détail particulier fur chacune
de ces maladies. Les mouvemens du Cœur,
dit-il, fi ftruéxure, la délicateflè de fes
oreillettes, celle des valvules artérielles &c
vemeufes , les frottemens du cœur, ôc le
nombre Se l'adlion continuelle de fes nerf^ ,
font autant de caufes apparentes de la poffi-
bihré des maladies propres du cœur; fans
oublier les efforts des pafTions, les obftacles
que le fang peut trouver dans le poumon ,
l'aéVion des corps externes , ôc les écoule-
mens des matières acres dont le fang lui-
même eft fi fouvent chargé : mais , ajoute
l'auteur, la nature trompe fcuvent nos craintes
comme nos efpérances. On peut dire en gé-
néral que les maladies du cœur font rares.
Mais quelque rares qu'elles foient, elles
ne font que trop firéquentes, ne fik-ce que
parce qu'elles font difficiles à connoître. En
efifèt , il n'eft pas aifé de donner, dans des
recherches fi épincules, des règles fixes pour
diflinguer ces maladies d'avec celles qui ont
quelques fymptomes communs avec elles j
tels font les mouvemens irréguliers des nerfs,
l'affcdlion hypocojidriaque , l'aifeétion hyf^
térique, ôc les différentes maladies de la poi-
trine qui porterJ:finguliércment fur le cœur^
COE
& qui caufènt des palpitations & des varia-
tions dans le pouls : or les palpitations Se les
changemens du pouls font les premiers
fîgnes auxquels on doit s'attacher pour s'o-
rienter fur les maladies du coeur.
Il y a pourtant des indices qui peuvent
feire diftinguer les cas où ces fympromes
dépendent eflentiellement de cet organe ;
car il les accidens cefl'cnt en divers temps ,
ou dans de longs intervalles; fi tous les raou-
vemens du cceur rentrent enfuite dans l'or-
dre naturel , on peut aflurer qu'en tous ces
cas difFérens les maladies ne font que des
maladies fympathiques ou qui n'appartien-
nent pas , à proprement parler , au coeur.
Au contraire , ii le pouls eft conftamment
irrégulier & variable, s'il change ainfi que
le mouvement du caur au plus léger exer-
cice , on peut prononcer en général qu'il y a,
quelque vice ou quelque obftacîe dans le
coeur ; mais ces vices ou ces obllacles étant
quelquefois compliqués avec des dérange-
mens à-peu-prcs femblabîes de la bafe de
l'aorte ; & les dérangcmens de Tartere , lorf-
qu'ils font feuls, étant très-difficiles à dif-
tinguer d'avec ceux du coeur , ileft fort heu-
reux que le danger où l'on eft de fe tromper
dans CCS cas- là , ne foit pas de grande coîv
féquence.
Telles font les règles néce(Taires pour ne
pas confondre les maladies propres du coeur
avec les maladies fympathiques. Il n'eft pas
moins eftèntiel de diftinguer ces maladies
propres les unes des autres. Premièrement,
les dilatations des divcrfcs cavités du coeur
peuvent être difcernées par les figncs fuivans;
€n général , les battemens du caur ne font
pas violens , dit M. deSenac;quandle ven-
tricule droit ou le fac de ce ventricule font
extrêmement dilatés, à peine les dilatations
produifent-cllesdes palpitations; dans beau-
coup de cas les malades fentent feulement
un grand poids dans la région du coeur , ils
font lujets à des fyncopes , à des érouife-
mens , autre figne confiant, lèlon Lancifi :
outre cela , les dilatations du venrricule
droit & de (on oreillette , produifent tou-
jours des battemens dans les veines du cou.
L'abfence de ces battemens , lor (qu'une
dilatation eft d'ailleurs fôupçonnée , indique
que cette dilatation , fi elle exifte , eft dans
le ventricule gauche. Cette dilatation a
Tomt VIIL
COE 417
er.core d'autres fignes ; les battetnens des
artères font très-violens , fi ces artères font
libres ; c'eft ce que M. de Senac a cbfervé
dans plufieurs maladies : l'auteur ne parle
pas delà dilatation feule de l'oreillette gau-
che ; elle eft rare , & les /ignés diftindife de
cette maladie nous manquent.
Pour ce qui eft des autres vices du cœur ^
tels que le rerréciflèment , les corps étran-
gers, les tumeurs , les oftilications , il faut
n'en former qu'une claflè , & les réduire
en général aux obftacles qui s'oppofent à
l'entrée ou à la fortie du fang.
Il eft des principes généraux qui doivent
régler la cure des maladies du cœur : en gé-
néral , l'ignorance crédule peut efpérer de
certains luccès qu'elle ^n'a jamais vus ; &
dans les dilatations du ctpz/r, dans les oftîfi-
cations , & lorfqu'il contient des polypes qui
réfiftent à tous les diflblvans , les reflburces
de l'art font plutôt entre les mains des ma-
lades , que dans les pharmacies.
Il faut fe borner à arrêter les progrès de
ces maladies , à modérer leurs accidens , à
prévenir ou à éloigner leurs fuites , à moins
qu'on ne puifle faifir ces maladies dans leur
commencement , car alors il y en auroit
plufieurs qui peut-être ne réfifteroicnc pas
aux remèdes.
Quoi qu'il en foit , il fiut dans la cure
palliative que nous venons de propofer, di-
minuer le volume du fang par les faignées ,
à laquelle la petitellè du pouls ne doit pas
empêcher d'avoir recours, à moins qu'il n'y
eut des fyncopes a(5tuelîes : l'exercice , les
efforts , les mouvemens violens doivent être
interdits , parce qu'ils s'oppofent même aux
bons effets des faignées ; non que les mouve-
mens doux , dans des voitures ou à cheval j
ne foient des remèdes utiles , puifque le fang
croupit fur-tout dans le bas-ventre dans la
vie fédentaire. ^^ . .
La diète , ôc même l'ufage du lait, oit^'
celui des alimens doux Se faciles à digérer,
font auftî utiles que les faignées ; & il ne
faut pas oublier d'avoir recours aux lave-
mcns , aux laxatifs doux , &; aux eaux mi-
nérales ferrngineufes ; ainfi qu'à l'efprit ano-
din minéral de Hoffman , la poudre tempé-
rante de Stahl , l'eau de fleur d'orange , de
tilleul , &c.
Telle eft l'idée générale que l'on peut ren-
GgS
4i8 C O E
dre des maladies propres du cœur , riûvant
M. de Senac. On trouvera des connoillan-
ces de détail fur les cas particuliers , aux
/Tjor^ PÉRICARDE, PoLiPE, Palpitation,
Syncoi*£. Voye-^^ ces différens articles.
Outre les maladies propres du cceur dont
nous venons de parler , cette panie eft cx-
poféc à des maladies générales , c'eft-à-dire
qui peuvent attaquei^ toutes les diverfes par-
ties du corps. Nous obferverons d'abord en
deux mots , à propos de Tes bleflures, qu'el-
les ne font pas toutes & toujours mortelles
Î)ar elles-mêmes j leur cours eft (buvent au (Ti
ong que le cours des bleilures des autres
parties ; elles fuppurent quelquefois , fur-
tout fi elles font petites. C'eft ce que M. de
Senac démontre par un grand nombre d'au-
torités»
. Il y a des plaies ou des déchirures d u c^eur-
faites par l'effort du fing ,>^u qui font la
fuite des contufions du cœur , qui font audi
dangereufes , quoique plus rares , que les
plaies par caufc externe &: récente.
Quant au diagnoftic des plaies du Civur ,
la place fur Laquelle Tinflrument perçant a
ponc, la profondeur jufqu'à laquelle il a été
enfoncé , peuvent donner des loupçons fur
Texifteiice des plaies du cceur •■, mais ces (bup-
çons ne pey vent erre confirmés que par des
accidens : telles font les défaillances , la pe-
riteil^è & Pinégalitédu pouls, les fueurs froi-
des , les anxiétés , la douleur vers le fternum.
Pour ce qui eft de la fièvre , c'eft un acci-
dent général dans les blefl'ures 5 il n'eft pas
douteux qu'elle ne s'allume lorfque le cceur
eft blsilc.
Les lavages , les faignées lorsqu'il n^y a
point une hémorrhagie conf dérable, Peau
de Rabel ou i'efprit de fel , les acides végé-
taux qui ont quelque auftérité , & une
diète très-févere , font les feulsremcdes aux-
quels on doive avoir recours dans les plaies
du cceur ; obfervanr qu'il eft important de
ne pas fermer l'ouverture extérieure de la
plaie , & qu'il convient même quelquefois
de l'agrandir, fuivantquelesaccidenspour-
ront iaire foupconner un épanchcmcnt.
Le cœur eft fujet , comme les autres par-
ties du corps , à l'inflammation , aux abcès ,
èi, aax ulcères. Voye-; Inflammation,
Abcès , Ulcère. Les fièvres violentes font
quelquefois la caufe ou l'effet de la première
CO E
de ces maladies. Les obfervations înconteT^
tables de plufieurs auteurs , dcmontrtnr que
le cxur c ft 1 uj et à des abcès & à des ulct tes j
la douleur , les fyncopes , les palpitations ,
ne doivent donner que des loupçons au fu-
jet de l'inflammation. Pour ce qui eft àts
fignes des abcès & des ulcères , ils font à-
peu-près les mêmes que ceux des plaies.
Mais fi la nature no<.is permet quelquefois
d'appercevoirfesdémarches, ellenouscache
les lecours qui pourroient les arrêter ou les
corriger. L'art ne peut dans les inflamma-
tions du cœur , s'il n'y eft pas entièrement
inuiile ,- que hâter les remèdes que deman-
dent les autres inflammations. Pour ce qui
eft des abcès & des ulcères du caur , les
médecins ne peuvent fe conduire dans ces
cas que par l'analogie, puiique l'expérience
ii'^a nen appris là-deflus.
Le volume du cœur peut fe reflerrer ou
s'étendre. Le cœur fe concentre ; on l'a
trouvéflétri, defléché, durci , 5: pourainfi
dire skirrheux, à la fuite de quelques ma-
ladies chroniques , & même dans un hom-
me qui périt de la rage : s'il en faut croire
Pline , les rois d'Egypte avoient obfervé la
phthilie du cœur. La concentration du caur
ne peut être appliquée à l'abfence de la H-.
queur péricardine , félon M. de Senac.
Le cœur peur fe dilater beaucoup , tant à
la fuite des pleuréfies &: des fièvres violen-
tes, que par les efforts du fang caufés par
des mouvemens violens , ou par les paf-
fions , par la pré'ence des polypes , les ané-
vryfmes des groffes artères. Il n'arrive pas
toujours que les parois du cœur qui fe dilate,
s'épailliflcnt; cette dilatation apparticntaufïî
fouvent , au moins , aux oreillettes qu'aux
ventricules : elle a des fignes fort équivo-
ques , elle eft quelquefois mortelle ; & tous
les remèdes auxquels on puifle avoir re-
cours , font la faignée , la diète & les caï-
mans. On ne connoît aucun remède pour le
retréciflement ou la diminution du cœur ,
dont les fîgnes foilt aufli fort obfcurs.
Quelque bornées que (oient nos coiinoif^
(ances à Pégard des maladies du cœur dont
nous venons de parler, il en eft d'autres
qu'on nefauroitmême fe flatter de conno;trc
par aucun ligne -, tels font les cœurs velus ,
& ceux dans lefquels il fe forme des couches
d'une matière qui fe condenfe , ôc qui n eft
G O E
autre chofe que la lymphe. On a aufli trouvé
dans le cœur , des pierres , & fouvent des
concrétions ofîculès aux artères, aux valvu-
les &c aux parois ; on y a trouvé des vers ,
quelques obfervateurs le prétendent au
moins : mais M. de Senac ne reçoit pas de
telles oblervations (ans (ôupçons ; & il faut
porter le même jugement des poux , qu'on
dit avoir trouvés dans le cœur y &c peut-être
de (on hydropifie venteufe. Enfin le cœur
change quelquefois de place, &c.
Telle ejl , dit M. de Senac , Vhijîoire des
faits répandus dans divers ouvrages : fi on ne
fe propofoit que la guérifon des maladies aux-
quelles ce vifc reejifujcty on pourrait négliger
ces obfervations ; mais on ne conçoit ce qui ejl
fournis à la médecine , qu^en connoijfanz ce qui
lui réfijîe ; on ne peut dijlinguer les maux fi
on les ignore.
Quelque bon que foit l'article qu*on vient de
lire y M. le baron de Haller a cru devoir faire
des additions a la partie anatomique ù à la
partie phyfiologique.
Tous les animaux doués de vai(Tèaux des
deux ei'peces , ont un cœur , une cavité muf-
culaire dans laquelle les veines répandent
leur fang , & qui poudè ce (ang dans les
artères. Il n'eft pas décidé que les autres
animaux aient un cœur : on trouve dans la
chenille , la mouche , le fcarabée , & dans
la plus grande partie des infedies, un vailïèau
cylindrique, mais que des brides relïerrenr
d^'ePpace en efpace : le fang fe porte dans ce
vaiflèau de la queue à la tête dans la chryfa-
lide, & de la tête à laqueue dans le papillon.
Mais comme les animaux expofésau micro f-
cope & à l'induftrie de M. Lyonnet , n'ont
j)oint paru avoir des vaifleaux , & que bien
. lùrement il n'en (brt pas de ce cœur ; il ne
paroît pas mériter unnom que nous (bmmes
accoutumés de donner uniquement à l'or-
gane moteur des humeurs animales. Pour le
polype , & plu(îeurs autres animaux de la
clalTe marine, même confidérablement plus
grands que les petits poiflbns , comme Pho-
lothurium , il paroit allez décidé qu'ils n'ont
rien d'analogue au cœur. Le cœur n'eft donc
pas le caractère diftinftif de l'animal \ c'eft
l'inteftin quiconftitue l'cdènce de cette cladè
d'êtres vivans.
La (îtuation du cœur de l'homme diffère
de celle du. cœur de tous les quadrupèdes :
C O E 419
& cette différence tient cxadcment à fa dé-
marche droite. La pointe du caur touche le
cartilage de la cinquième cote à gauche , ou
la fixieme aux confins de fa partie oflèufc 5c
du cartilage. Il change de place avec la refpi-
ration ; il defcend confidérablement avec le
diaphragme dans l'infpiration , & s'élève
dans Icxpiration. C'eft en vain qu'on a cru
que ce déplacement n'avoit pas lieu , il cft
évident dans les animaux j on a vu le cœur
varier & porter fa pointe à droite ; nous
avons vu le cœur remplir prcfque toute la
poitrine : & il eft arrivé que des enfans l'ont
apporté au monde entièrement à découvert ,
fuipendu devant la poitrine comme une mé-
daille.
Il eft à obferver que l'oreillette droite ne
diffère du finus , que comme une partie
peur différer d'une autre partie du même
tout. La partie de ce vcftibule du cœur , la
plus à droite & la plus poftérieure , eftiHÂTei
le reftc eft travcrfé comme le cœur de ban-
des mufculaires ; c'eft ce qui fait la diver-
iîté du finus &; de l'oreillette. Cette obfèr-
vation eft néceftaire , pour qu'on n'ajoute
pas aux époques du mouvement du fang
une époque luperflue. Le fang , dit-on ,
vient des veines dans le finus, du finus dans
l'oreillette , de celle-ci dans le ventricule :
mais dans le fait il vient des veines , & dans
le finus , & dans l'oreillette en même
temps i ^c du finus & de l'oreillette , en
même temps dans le ventricule.
On n'eft pas d'accord fur la capacité des
ventriculesdu cœ^/r. Voilàce que l'expérience
nous a appris : le ventricule droit cft très-^
petit dans le commencement du fœtus ; fa
formation eft poftérieure à celle du ventri-
cule gauche ; il égale ce ventricule vers la -fin
de la groftcffe. Après que les canaux particu-
liers du fœtus ont été fermés , le ventricule
droit cède peu à peu au fang des veines ca-
ves -, il devient plus mince & plus grand j &
nous l'avons vu conftamment plus ample
dans l'adulte. Peut-être la rffiftance du pou-
mon y contribue-t -elle : dans l'homme
adulteplufieurscaufès, les travaux de toute
efpece , les efforts , le mouvement même de
la promenade , &: fur-tout la montée rend
le paffage du (ang par le poumon plus diffi-
cile, & le fang arrêté dans le ventricule &
dans l'oreillette droite, dilate ces cavités. Il
- Cggi
41C C O E
cfft affez diSîi^ S'sfîigner iapropoTtion pré-
cifed'on vcHtricoh: à i'airrre ; mais elle eft
bien de cin^ à Trois.
ïit'ft "s'fc comiQ deTfos'jotrrs , qne les
vaiviilés Yeineafcs^cles'veiïtricales ne loiir en
effet qu'un anne^fu îriCrKbrnneux , dont les
extrémités -fioTtanres font aicernativement
p'ius ioïiga«s & plus courtes. Ce n'eft qu^à
Paide deTimagination qu*on a fait trois val-
vules , & qu'on lesâ appeil<:es à trois pointes.
La pointe de ces valvules eft rrès-obtufe , &
elles font inégales. La portion antérieure &
fupérieare del'anneau valv ulus , eft de beau-
coup hplus grande: c'eft elle qui fépare 1 em-
bralure du Teittricule ,-qui mené à l'artère
pulmonaire de l'embrauire qui reçoit lo-
reillette. Elle ne fert pas uniquement à em-
pc!cher le retour du fàng veineux qui vou-
droirre^uer du venrriculeal'oreiliette : elle
ùouvre l'entrée de l'arcere pulmonaire , lorf-
qu-'elle a été épanouie par le iang de l^oreil-
lette, 6w elle enferme le. paflage dans la dila-
tation du cciur. Dans le ventricule gauche ,
la plus grande àcs deux valvules fait la
Tnéme fon(5tionpar rapport à l'aorte.
La fecoadc valvule du ventricule droit
eft beaucoup plus étroite ; elle occupe le
tranchant du c^ur. La troifieme répond à
la clqifon mitoyenne ; elle eft fou vent fans
mufcle papillairc.
Les quatre tendons des orifices du cœur
ne reffemblent à des tendons que par leur j
couleur bleuâtre •■, ce ne font que des cellu- ;
'lofîtéscalleufes.
Les deux grandes arteïes fofit efffeftive-
menrunîpeu plus amples , àrendroit où elles
viennent d'être entièrement dégagées des,
chairs du cœur. ^J(h]ex. cependant n'eft .pas
'confîdérable , & paroît dépendre de l'im-
■pulfion obliqué du fang ; car ces .finus ,
•comme on a bien voiflu fesappeïler , ii^exîf-
\ent ni danslefeus , ni dans le nouveau 'rié.
Lesner fs ^Mcœur ibnt^ex t^e memenrnom-
lîî'eux : prerque tous 'font d'une mdlléffè "5c
'd'une rougeur particulière , & à leur origi-
ne , '&: à leur paflàge autouT des grandes
aïteresdu cizur , & daïls lé iocur tdtmiz.
'Nous tenterons d'en donner une defcrip-
tion qui ék vraie , mais qui peut-êitfc ïi'cft
pas complétte encore.
Le -nerf Tupétieur du cteur naît 'au 'côté
droit du gr^nd^anglioncervicâ ftïpéristfr ,
COE
dans lequel fe réunit le nerf intcrcoftal ,
né de la branche ptérygoïdienne de la cin-
quième paire & de la'fmeme , avec laquelle
le premier , le fécond & le rrorfeeme cervi-
cal ;, le neuvième & le huitième du cerveau
fe réunifient. Le nerf que ce ganglion pro-
duit, fe joint à d'autresbrancheslinguliérc-
mcnt molles du même ganglion mêlées avec
desbranchesdu tronc pharyngien & du tronc
laryngien, de la huitième paire Le nerf fu-
périeur du cœur formé de cette manière , &
quelquefois, mais moins fouvent , par d'au-
tres branches , defccnd le long de la grande
thyroïdienne , donne plulieurs branches aux
mufcles inférieurs du pharynx & du larynx ;
il communique avec le nerf récurrent ; il
reçoit quelques filets du ganglion cervical
moyen , pkcé fur le mufcle droit antérieur
de la tête , &C formé par Pintercoftal , le
phrénique &: quelques nerfs cervicaux ; il
fait avec ces filets un plexus , onié quelque-
fois d'un ganglion -, les 'branches de ce ple-
xus paflènt devant l'aorte , donnent des hlets
au grand nerf cardiaque , & fe terminent
avec les branches de l'artère coronaire droi-
te , après avoir reçu des filets de la huitième
paire.
D'autres branches du ganglion ccrvicîil
moyen s'uniflent avec des filets conildérables
du ganglion cervical inférieur, gros ganglion
partagé prcfque toujours en deux , & qui
avec les propres filets embrafte l'artère fous-
claviere droite , en formant plufieurs anfes
autour d'elle. L^es nerfs cardiaques moyens
provenus de ces deux ganglions , paflènt
entre l'artère pulmonaitc droite & Taorte ,
&: fe ponent à l'oreillette droite & au cœur
avec l'arterc coronaire droite.
Des branches de ce tronc (è portent devant
la branche gauche de la trachée-artere : ils
forment le plexus cardiaque avec leurs pa-
reils du côté gauche. De ces nerfs , les uns
fuivertt l'artère coronaire &lefinus gauche j
d'autres , plus profondsencore , vont au fi-
nus gaudie , à k'veine-cave , & à la face
plane àn^cœtsr.
Latroifieme claflê dèsnei'fs du cceur , naît
du ganglion cervical inférieur & du troncjn-
lercdftal. ïl en pïn quelques filets qui , s'u-
niflant avec des branches du récurrent &: du
huitième , vont au poumon jmais le plus
■grand nombre fe 'pune au biont^he droit.
CO E
s'unit avec les nerfs moyens an cceur , fait
un plexus à la droite du coHduit artériel , &
finit au cixur , comme nous venons de le
dire en parlant des nerfs moyens 5 nous ap-
pellerons ces nerfs inférieurs.
Du coté gauche , le nerf fupérieur du
cœur a la même origine que nous avons dé-
crite en parlant 'du cote droit. Les branches
de cenerf fuivent l'artère coronaire gauche ,
à la droite ( où ils fè mêlent avec leurs pareils
du coté droit ) & à la cloifon mitoyenne.
D'autres filets fe réunilîcntau plexuscardia-
que placé devant le bronche.
Les nerfs moyens , nés des trois ganglions
cervicaux , compofent le grand plexus car-
diaque , placé devant la brandie gauche de
la trachée. De ceplcxus, une partie des bran-
ches paflè devant l'artcre pulmonaire &
derrière elle , &: fe rend au cœur avecTar-
tere coronaire droite & au ventricule de ce
côté j d'autres paflent derrière l'aorte ,s'u-
niflent avec des branches ducôté droit <k fe
partagent. Quelques filets vont à l'artère
coronaire droite, d'autres à la gauche., &
ceux-ci fuiventla branche antérieure de cette
artère , & fe rendent à la face fupérieure ^du
cœur ; d'autres fuiventla branche poftérieure
de cette même artère , & fe diftribuent à la
face plane du cceur & à l'oreillette gauche ,
dont ils fuivent la racine. D'autres filets en-
core vont au poumon gauche; d'autres filets,
différens de ceux que nous avons décrits , &
plus poftérieuis , vont avec l'artère gauche
au ventricule de ce côté. Les plus poftérieurs
<ic tous paflènt derrière l'artère pulmonaire ,
& vont au finus gauche & à la face plane
du cœur , où ils fe mêlent avec quelques
branches du nerf fupéricur , & avec quel-
ques filets du récurrent.
Le nerf gauche de la.huitiemepaire donne
<3es filets au plexus cardiaque , aux nerfs fu-
perficicls du cœur , nés du nerf fupérieur ,
& d'autres aux nerfs les plus profonds , qui
/c rendent au 'finus gauche.
Les deux artères coro«aircs maiflent de
Paorte au delà de fcs valvules , & mêmeau
delà d'un cercle calleux de cette grande ar-
tère , qui pafie par l'extrémité la plus fupé-
licure des valvules. Elles ne peuvent donc
p;7s être couvertes par les valvules ;& elles
Ttçoivçnt le fang de l'aorte dans le même
«Dwracnt quç les aucres oriercs du corps hu-
C O E 421
main. Nous avons vu bien des fois le .jet de
fang d'une artère coronaire blelïee ,. s'élever
plus haut pendant la contraction du cœur ^
ôc s'abaifler dans fa dilatation. L'opinion
contraire eft née de l'idée erronée que les
artères coronaires fortent des finus des val-
vules de l'aorte, & queces valvules éten-
dues par l'onde de fang qui fort du cœur ,
couvrent nécefîairemcnt ces arr-eres.
Une autre erreur dans la defcription de
ces ancres , c'efl la couronne que l'on leur
attribue , en fuppofant que l'arcere droite
atteint la gauche , &c s'y infère directement
par fon tronc. Cette fîructure doit avoir
exiflé , puifque Ruy fch l'afait defïiner ; mais
nous ne l'avons jamais vue dans de nom-
breufes recherches.
Les troncs de veines coronaires ne fuivent
pas les artères. La principale s'ouvre au côté
gauche du trou ovale : elle a dans Ton em-
bouchure une valvule confidérable : elle en
a même quelquefois plufieurs ; elle accom-
pagne à-peu-près la branche antérieure de
l'artère coronaire gauche.
La vcinemoyenne , branche principale de
ce tronc , fuit dans toute fa longueur la cloi-
fon mitoyennedes ventricules., dans la face
plate du cœur. La veine-du finus droit s'ou-
vre , ou dans l'embouchure delà :grande co-
ronaire , ou bien dans la veine moyenne.
£lle fuit la racine du finus droit , & vient
juiqu'au tranchant du cipz/r.
•hQS veines innominées toccupent la face
.antérieure & laparrie inférieure du ventricule
droit. Il yen a trois ou quatre qui s'ouvrent
dans la racine de l'oreillette droite. La plus
grande efl la plus voifine du tranchant du
cœur.
Plufieurs petites veines s'ouvrent dans le
finus droit : il y en a une qui fait avec d'au-
tres veines un cercle parfait autour du cœur:
il y a aufïi des veines dont l'ouverture efl
dans le finus gauche. Il y a plus , les deux
ventricules & les deux oreillettes font pleines
de petites embouchures veineufes , par lef-
•quelles on peut faire fuinter le mercure ou
l'eau colorée. Se même l'air. Ces petites
veines Teçoivent ces liqueurs , quand onies
injede dansles artères; & plus aifément en-
core , quand onfe fert des veines poury faire
parvenir la liqueur.
Le mouvement du c^eur «ft ude la plus
411 C O E
grande Importance dans le corps animal.
C eu le véritable moteur des humeurs, &
l'auteur de la vie.
Ce mouvement commence par la veine
cave : elle ie contradte avec force dans les
animaux à fang froid, & elle pouflèle fang
dont elle eft remplie , dans Toreillctte uni-
que. Dans l'animal mourant , une partie de
ce fang eft rcpoufléc dans les veines jugu-
laires , ou dans la veine cave abdominale.
De la veine cave le fang eft reçu dans l'o-
reillette i il la dilate , la gonfle , & redreflè
tous les petits lobes qui la terminent à la ma-
nière d'une crête de coq. Bientôt après l'o-
reillette (e met en contradion ; elle devient
en même temps plus courte & plus étroite ;
ellepâlit , ôc fbn fang paftèdatîs le ventricule
droit. Une partie eftrepouflëe dans la veine
cave , dans l'animal mourant &c aftoibli.
Le ventricule , après avoir été dilaté par
le iàng de l'oreillette , le contra6te : ilfe rac-
courcit dans tous les animaux ; de fi quelques
anatomiftes ont cru voir qu'il s'alonge , ils
ont écrit d'après une observation imparfaite;
il devient plus court dans les anguilles mê-
mes. La iituation particulière de l'oreillette
peut en impofer : il a pu fùire croire que le
caur s'alonge ; mais il eft fur qu'il devient
plus court. La pointe fc courbe pour fc rap-
procher de la bafe ; 8>c celle-ci fait quelque
chemin pour '"e rapprocher de la pointe. En
même temps !es parois extérieures du ven-
tricule fe rapprochent de la clcifon : il fe ré-
trécit donc dans toutes fes dimeniîons , & il
poulîè fon (àng dans l'artère pulmonaire.
Les quatre veines pulmonaires battent
dans le même moment que les deux caves ;
elles rempliflent le (înus & l'oreillette gau-
che , qui Ce contractent à leur tour pareille-
ment dans le même temps que l'oreillette
droite j & le ventricule gauche fè contradte
au même moment que celui du coré droit.
Dans un animal vigoureux dont le cceur
eft alTez tranfparent pour laifler diftinguer
fonde de fang dont il eft rempli , dans lé
poulet enfermé dans l'œuf, & dans la gre-
nouille , la veine cave , l'oreillette & le ven-
tricule fe défempliflent entièrement , & de-
viennent blancs dans leur fyftole. Dans l'a-
nimal à {âng chaud , le cceur ne fe vuide pas
avec la même perfection : comme leur fang
eft viiqueox , îesobftacles que lui oppofe le
C o E
' poumon , & le froid qui le faifit , le privent
de fa fluidité , ôc très-fouvent il refte dans
les ventricules, un peu de fang caillé.
La diaftole de la veine , de l'oreillette Sc
du ventricule , fuit l'évacuation de ces cavi-
tés. Dans cet état , toutes ces parties fe relâ-
chent , & le moment après font remplies de
nouveau par le f tng que leur fourniflènt les
branches des veines , la veine cave & l'oreil-
lette.
Cette alternative de contraction & de dé-
tention fuit un ordre conftant dans ces trois
cavités. Dans le premier moment la veine
cave & la veine pulmonaire le vuident en
même temps dans chaque oreillette. Le mo-
ment enfuite , les deux oreillettes fe contrac-
tent &c (è vuident. La contraction du ventri-
cule tombe dans le même moment , dans le-
quel les veines cave & pulmonaire fe contrac-
tent, Sc la contraction des oreillettes tombe
dans le moment où les veines fe rempUlIent.
Cet ordre s'obferve très-exaCtement dans
l'animal bien conftitué ; dans le poulet en-
fermé dans l'œuf. Dans les quadrupèdes à
fang froid , le ipcCtacle eft plus net , parce
qu'il n'y a qu'une veine , une oreillette ôc un
ventricule , ôc que toutes cescavités ont des
membranes tranlparentes. Dans les animaux
à (àng chaud , on a fbuvent plus de peine à
découvrir cet ordre. C'eft cependant lui quî
règne , tant que le mouvement du cûeur eft
dans fon ordre naturel.
Les approches de la mort troublent cet or-
dre de plulîeurs manières. L'oreillette droite
reçoit le fang de toutes les parties du corps ,
que lereflèrrement univerlel des vaifleaux ,
caufé par le froid , effet de la mort , renvoie
dans les parties intérieures , où la chj»leur fe
confèrve plus long-temps. C'eft donc l'o-
reillette droite qui eft irritée , même après
la mort; aulïi eft-cc la veine cave & cette
orcilletue qui confcrvent le plus long-temps
le mouvement dans l'anim d prêta mourir.
Mais comme l'oreillette eft irritée par chaque
ondée de fang , & qu'elle a de la peine à fe
vuider dans le ventricule du cjeur afFai(ïc ,
qui n'eft plus en état de fe défemplir dans le
poumon , devenu incapable de tranfmettrê
le fàng de fes artères à fes veines , cette oreil-
lette bat pluficurs fois avant qu'elle puiiïc
pouflcr dans fon ventricule une quantité de
làng fufEfaitte pour y exciter une fyftole.
C O E
Une feule contradion du ventricule droit
fuccede par conséquent à plu (leurs contrac-
tions de roreillette. Pour l'oreillette gauche
& Ton ventricule , leur mouvement cefl'c
avant celui des cavités droites du ccBz/r Jparce
que le peu mon affailîe ne tranfmct plus de
làng , & n^'en pouflè plus dans Toreillette
gauche. DanS l'ordre naturel , la veine cave
conlerve donc le plus conftamment le mou-
vement , enfuite l'oreillette droite , puis le
ventricule, & le mouvement des cavités
gauches ceflc le premier.
Dans les derniers momcns de la vie , la
confuiion Ce met dans le mouvement du
tœur. On a vu la contraélion de Toreillettc
droite Ce faire dans le même moment avec
celle du ventricule : on a vu les ventricules
fe contracter fans les oreillettes ; mais tous
ces défordres ne prouvent rien contre l'ordre
de la nature , dans lequel le mouvement des
oreillettes précède immédiatement celui des
ventricules. Dans le poulet enfermé dans
l'œuf , cette fuccefllon eft très-viiible.
Tous les mouvemens du cœur Ce font
avec une promptitude ôc une vivacité
extraordinaires dans un homme qui fe porte
bien. Sans entrer dans des calculs tels que
ceux de Keill , de Jurin ou de Haies , il eft
aifé de Ce convaincre de la force étonnante
de cet organe. A tcares les pulfations du
ccpur , toutes les artères du corps humain
s'élèvent , elles dilatent chaque partie , ôc
tout le corps fans exception. Le cœur eft
le feul moteur de ce (ang j car en liant
l'aorte, ou en arrachant lecorz/r, on fupprime
tout d'un coup le mouvement du fang dans
tous fes vifceres. Le cœur furmonre donc le
poids de Patmofphere , qui prefle fur toute
la furface du corps , & dont le poids qui
pefe fur quinze pies de furface , ne peut êcre
de moins que de quinze fois trente-trois pies
d'eau , ou de trente & quelques mille livres.
Ce n'eft pas tout , qu on pLce une perfbnne
fur un genou, ce poids , îouvent fortagréa-
bîe a eft élevé àch?.que pulfation ôc delcend
de même : ce font cent livres & au delà
d'élevées par une feule artère , qui ne reçoit
qu'une petite partie de fang forti du cœur ,
& dont la dilatation n'eft u Ii qu'une petite
portie de l'effort que£ut le cœur , puifque
dans le même moment qu'il dilate l'arrert
crurale , il dilate aufïi toutes les autres artères
COE 42.5
du corps humain. Ileft étonnant , qu'un aullî
petit organe produifc un mouvement de
cette force j mais on doit s'accoutumer à ces
merveilles , quand on a vu les mufcles de
la mâchoire inférieure cafter des noyaux,
qui demandent trois cents livres pour être
écrafés j & qu'on fe rappelle la force prodi-
gieufedes convulfions. Nous avons vu plus
d'une fois plufieurs perfonnes robuftes hors
d'état de contenir la force des mufcles irrités,
quicourboient le corps en arc , & retiroienc
d'un coté la tête , ôc de l'autre les pies. En-
un mot , le cœur produit des mouvemens
d'une force infiniment fupérieure à ce que
lonpourroit attendre du poids de fes fibres.
Cette force eft l'effet de l'irritation , qui,
paroit mettre en mouvement un fluide
moteur *, ôc l'on fait de quoi eft capable le
fluide éledrique , l'air enfermé dans le nirre
échauffé , &c la chaux fulminante de l'or.
Les effets de l'irritation font comme ceux de
la poudre à canon , hors de toute propor-
tion aux caufes vifibles , dont elles paroif-
fent être les effets.
La prérogative de produire avec conftance
un mouvement très-vif , étoit bien nécefTàire
dans le cœur. Il eft (ans contredit le grand
moteur de la machine animale. On a voulu
lui agréger des aflociés , la force contrac-
rive des artères , l'ofcillation des petits vaifl
faux capillaires, l'air, la chaleur. Aucune
de ces puiflances ne foulage le cxj/r dans Ca.
fonction.
La force contradive des artères eft réelle ;
elle eft mufculaire dans les grandes artères.
On a même quelque preuve de leur irritabi-
lité : on les a vu fe contrader par l'irritation
de l'étincelle éleétrique. Les petites artères
ne paroifïèni pas irritables j il eft fur qu'elles
ne le font abfolument pas dans les animaux
à fing froid, à peiney pourroit-on démon-
trer la force commune à toutes les membra-
nes deJ'animal, Mais la force des artères
n'aide pas le cœur; quind elle feroit toute
mufculaire : elle réfifîe effectivement à l'im-
pulfion du cœur j elle abfbrbe la prefïîori.
latérale , ôc ne rend au fing que ce que cette
prciîion a enlevé au cœur fans y ajouter la
moindre chofe.
Quels que foient les doutes des auteurs
^ur la nature du pouls , ôc quelles que foient
les objedions qu'on a faites contre la dik-
414 C Ô E
ration des artères dans la diaftole du pouls ,
il eft fur que les artères rentrent parlafyftole
dans l'état dont elles font forties par la diaf-
tole , & que par conféquent la perte du mou-
vement du cctur y employé à les dilater,
ik répare exaârement par leur contra<5tion ,
& que ces deux mouvemensfe détruifant
mutuellement , le fang conferve la vîteflè
qu'il autoit dans un canal immobile. Nous
parlerons au refte à fa {^ace de ces objec-
tions que Inexpérience ne nous permet pas de
trouver fotides. Nous favons bien qu'il n'eft
pas toujours facile de rcconnoitre k dilata-
' tion de l'artère -, c'eft de cette claflè qu^ont
été les ebfervations de l'auteur, dont nous
différons ; mais dans d'autres animaux &
dans les brebis fur-tout , nous avons vu bien
certainement & la dilatation de l'artère & la
contradion. Elle eft très-vifible encore dans
k bulbe de l'aorte des poiiTbns àc des gre-
nouilles, & dans l'artcre liée.
L'ofcillatioii des vaifleaux capillaires fe-
roit abfoîumcnt le même effet que celle des
artères. La dilatation du vaiflèau feroit per-
dre au mouvement du fang ce que la con-
tradion lui raidroit. Mais cette ofcillation
n'eft qu'une hypothefe , que les faits ne nous
permettent pas d'admettre. Aucun microf-
cope n'a appcr^u encore ce mouvement ; &:
dans les animaux à fang froid , les artères
încifées ne montrent pas même une force
contradive , puifque k fente faite avec la
lancette , ne s'augmente pas par le retire-
îTient des lèvres de la bleflure.
La chaleur, en raréfiant le fang, lui donne-
toit une efpece de mouvement i mais comme
la chaleur agit également dans toutes les
directions , elle rctardcroit autant le fàng
qu'elle l'accéléreroit , parce qu'elle repouf-
feroitle fang vers le cœur avec la même force
qu'elle le feroit avancer vers les extrémités.
Nous nedifconvtnonspas cependant qu'elle
ne ferve de ftimulus au cœur , en y faifànt
parvenir avec plus de vîteifcle fang des oreil-
lettes, & fur-tout en accélérant la refpiration,
vraie force motrice , qui eft excitée par la
chaleur. Mais les animaux à fang froid ,
ces terribles requins, ces dangereux croco-
diles , vivent avec un fang dont la chaleur
\ ne diffère que très-peu de celle de l'eau , &
le cœur dans cette chaleur modique , fuffit
à entretenir la circulation. Là chaleur eft
{a) Spallanzani, Leder, MuUer.
C O E
d'ailleurs l^efFet du mouvement du fang &
non la caufe. Un homme tiré de l'eau eft
fans chaleur, fans pouls ; on irrite fon cœur
par des fridions , des remèdes acres , des
lavemcns, qui rappellent le mouvement
périftaltique de l'air même , que l on fait
pafïèr dajis (on poumon : le cœur recom-
mence à battre , le fang fc remet en mou-
vement , & bientôt il a rétabli une chaleur
égale à ^6 degrés de Fahrenheit dans un air
plus froid de 60 degrés , & fans le fecours
de la chaleur.
La refpiration a fans doute de l'influence
fur le mouvement du fang. L'infpiration
ouvre un accès facile au fang du ventricule
droit j l'expiration exprime le fang du pou-
mon & le renvoie au ventricule gauche :
le fang veineux eft d'ailleurs ou accéléré
ou retardé , félon la diverfité des périodes
de la refpiration ; attiré en quelque manière
dans l'infpiration, repoufïé dans l'expiration.
Mais ces cas particuliers n'infîuent pas furk
généralité du mouvement du fang. On ne
s'apperçoit point au pouls que l'infpiration
accélère le fang, pi que l'expiration le retarde.
Les quatre pull'ations qui répondent à une
refpiration complète , font égales entr 'elles
quoique les deux premières répondent à
l'infpiration , & les deux autres à l'expira-
tion j & les animaux à fang froid vivent , Se
leur fang circule fans aucune refpiration. Le
diaphr.igme eft encore moins le moteur de
la machine animale : il n'eft charnu que dans
les quadrupèdes, & n'a point de mouvement
à lui dans les oifeaux & dans les poifîons ; il
agit même très-foiblement dans les femmes.
Le mouvement du cœz/r s'apperçoit d'ail-
leurs avec évidence dans les artères & même
dans les veines de l'animal. Tant que l'ani-
mal eft vigoureux , le mouvement paroît
uniforme. Mais quand l'aaimal a perdu de
fes forces , on apperçoit aifément dans cha-
que diaftole du cœur , que le fàng n'avance
pas , qu'il recule même : & dans fa fy ftole ,
cette petite onde de fàng , qui étoit fufpert-
due , fait un pas & s'avance vers les vaiffcaux
capillaires. Dans les veines cette accélération
du fàng qui répond à la contraction du cœur y
eft moins manifefte. Nousl'avons'vu cepen-
dant , & de très-bons auteurs {a) l'ont vu.
Et quelle autre caufe pourroit donner du
mouvement au fang veineux des animaux à
fang
C O E
fang froid , puifque les artères y (ont immo-
biles. & que ces animaux ne refpirent point?
Les vaille lUX des genres inférieurs font
difficiles à appercevoir , &c le microlcope
même ne les découvre que rarement. Il eft
cependant avéré fur d'autres fondemens ,
que le ca^ur cl\ le moteur des humeurs invi-
fiblcs de ces vaifleaux , de ceux de la franf-
piration infenfible , de ceux qui féparent les
humeurs cranfparentes de l'œil, ou qui com-
pofent avec le tiflu cellulaire les vifceres.
Une féconde preuve que tous ces vaifleaux
învifibles tirent leurs humeurs Se leur mou-
vement du cceur , c'eft Tinjeclion. Cette
manœuvre n'cft autre cho e qu'un cceur
artificiel, quifupplieàrimpuiflance de celui
que la nature a fourni. C'eft un moteur qui
pouile dans Tartere une liqueur dont lui ieul
produit le mouvement. L'injedtion remplit
une bonne partie des vaifleaux invifîbles,
dont les humeurs font plus fines que le fang :
elle fait pafler l'huile de térébenthine dans
l'humeur aqueufe : ellerempUt les vaifleaux
de la capfule du cryftallin &C de la lame
vaiculeufe de la rétine : elle ouvre à l'eau un
paflage dans les uretères , dans les canaux de
la bile. Il nous piro.t bien naturel que dans
l'animal vivant le dvur faflc ce que le flphon
fait dans le cadavre , & que lui , & lui
feul , poufle le fang par ces petits canaux,
comme le fiphon feul les y fait pafler.
Il y a cependant des liqueurs dont le mou-
vement ne paroit pas dépendre du cxur.
Tel efl: le mouvement par lequel la graifle
fait du chemin par le tilfu cellulaire , &
qu'elle rentre dans le fang : que la lymphe
atténuée &c épanchée dans le même tlifu
rentre dans les vaifleaux lymphatiques : que
le lait fe rend de la graiflle du contour de la
mamelle jufqu'au mamelon : que le chyle efl:
pompé : en un mot , les mouvemens vei-
neux des matières contenues dans des cavi-
tés grandes ôc petites , ik le mouvement
des corps & des humeurs qui font du che-
min dans le tiflu cellulaire. L'un Ôc l'autre
paroît en partie Peffet de la force contrac-
tive des lames & des filets cellulaires , ou
des mufcles voiflns ; & en partie tenir à
Tartradion des vaifl[èaux capillaires , qui
attirent les humeurs , comme le font les
tuyaux de verre du même nom.
Les caufes du mouvement du cœur ne
Tome VIII.
COE 415
font pas entièrement connues ; on approche
cependant du vrai ; on a travaillé à écarter
les opinions erronées & les expériences mal
faites.
La caufe immédiate du mouvement du
cœur n'efl: point obfcure ; ce font les fibres
charnues du cceur. Qiielque obfcure que foie
leur direction , elle eft en général oblique ,
& elles deicendent de la bafe à la pointe.
Leur mouvement approche donc ces deux
extrémités en raifon inverfe de leur réfif-
tance. Le raccourciflement du cceur ôc une
légère courbure de la pointe en eft l'effet.
Mais comme ces fibres forment avec la
cloifon du cœur deux ventricules, ôc que
la cloifon eft la partie la plus folide du ca^ury
elle fert de point fixe à les fibres , qui , pour
former l'un Ôc l'autre ventricule , forment
des arcs , dont la corde eft la cloifon. Elles
abaifient ces arcs en agiflant , elles fè rap-
prochent de la hgne droite , ôc en s'ap-
platiflant , elles réduifent exactement à rien
chaque feélion du ventricule : c'eft elles qui
ont la principale part au vuide parfait , qui
fuccede dans l'état naturel au fang exprimé
par les forces que nous venons de nommer.
Les oreillettes ont de même ôc des arca-
des charnues , qui en s'applaniflant rétréci!^
fent la cavité , ôc des fibres droites , qui
de la bafe de l'oreillette s'élèvent à fa pointe ,
ôc qui la raccourciflent en même temps.
Nous avons vu ôc les fibres ôc leur jeu.
Ce n'eft pas la partie difficile du pro-
blême , que nous venons de propofer. Il
refte à découvrir la fburce de ce mouve-
ment fi violent , ôc en même temps Ci
conftant ôc fi répété , qui eft exécuté par les
fibres charnues du cœur.
Les phyflologiftes répondoient autrefois
bien vite à cette queftion. Les uns trou-
voicnt dans l'âme une fource inépuifàble de
mouvement , qui en communiquoit à la
nature immobile par elle-même , la portion
néceffaire pour fes delTeins , ôc la force
fuffifante pour faire paf^r le fang dans les
artères.
Cette hypothcfe n'explique rien. Nous
cherchons la caufe phyfique dont les fibres
du cceur font animées. Mais il y a contre
la pui fiance de l'ame des témoignages
dire<5ts. Plufîeurs animaux ont été foumii;
à l'expérience y on leur a arraché le cûeur^
Hhh
4i^ C O E
Ceux dont le fang efl: froid , ont vécu &
iong-remps vccii après cette cruelle opéra-
tion. Ils ont regardé , ils ont fauté , marché
& donné toutes les marques de volonté
dont ils étoient capables. L'amede Thomme
même continue fes fondions, aprts qu^on
lui a arraché le cœur. Un des malheureux
qui avoient trempé dans la confpiracion des
poudres a continué de prier j un autre a
contemplé ; un autre encore a proféré quel-
ques paroles , &: a regardé fon cœur que le
lîourreau lui avoit arraché , àc qu'il rcnoit
à la main.
On ne voit point que les maladies du
cœur affedent l'ame. Nous avons va un
jeune homme avoir le cœur rongé par des
ulcères & couvert de pétrifications : le pouls
ctoit irrégulier , la circulation fouffroit;
mais l'ame n'étoit point gênée dans fes
fondions.
Il y a plus , le cœur 6.\\Yi animal à fàng
froid , fou (Irait à Tempire de lame , arraché
à l'animal , bat pendant plufieurs heures
d'un mouvement régulier de iyftoie & de
diaftole. Il y a donc dans le cœur une
Iburce de mouvement qu'il ne tient pas
de lame 6c que même le corps de l'animal
ne lui fournit pas.
Cette expérience prévient contre l'hypo-
thefe commune. Prcfque tous les auteurs
attribuent aux nerfs cette force avec laquelle
le cœur fe meut. C'eft un mufcle , difent-
ils , & le mouvement mufculaire vient des
nerfs. Il y a même des auteurs qui ont
cru voir que l'irritation des nerfs cardiaques
accélère & rétablit le mouvement du cœur ;
que l'irritation du cerveau ou de la moelle
de l^épine a le même pouvoir , & que la liga-
ture de la huitième paire tue fur le champ
un animal & fupprime le mouvement de fon
cœur.
Quoic^ue l'analogie nous mené à cette
hypotheie, l'expérience nous en éloigne,
Non-feulem.ent le cœur arraché continue de
fe mouvoir , mais la ligature des nerfs de la
huitième paire ^ celle des nerfs intercoftaux,
celle même des uns te des autres de ces
nerfs & leur entière deftrudion n'affedent
point le mouvement du cœur. La deftruc-
ticn totale du cerveau , celle du cervelet ,
celle de la moelle de l'épine ne iuppriment
pas non plus ce mouvement i l'irritation
'C O E
des nerfs de la huitième paire , celle de
intercoftaux , de la moelle de l'épine & de
nerfs cardiaques même , n'altère pas le
rnouvement du cœur, ne Paccélere &: ne le
rétablit pas , quand il a été interrompu :
le cœur continue de batcre , & le point
fautillarit fe meut avec la même régularité,
quand on détruit la bulle du cerveau.
Nous n'abuferons point de ces expérien-
ces ; nous nous fouviendrons également que
des nerfs nombreux ne font pas donnés au
cœur fans utilité 5 nous n'exclurons pas ces
nerfs du rang des caufes du mouvement du
cœur ; mais nous croyons conclure avec
équité, de ces expériences, qu'outre la force
nerveufe , il y a dans le cœur une fource de
mouvement qui ne dépend pas du cerveau ,
& qui n'arrive pas au cœur par les nerfs.
Les faits ont découvert dans les mu fc les
& dans le cœur une puiflance qu'on appelle
irritabilité . qui ne dépend pas des nerfs , qui
règne dans les animaux dépourvus de cer-
veau , de tête & de nerfs , &: qui paroit ré-
fider dans la fibre mufculaire elle- même ;,
cette force mouvante eft excitée par prefque
tous les ftimulus , la chaleur , Pair , le feu »
l'étincelle éledrique j le mufcle & le cœur
rentrent en mouvement après un plein re-
pos, lorfqu'on y poufle Pair, l'eau chaude
ou du fang chaud ; car c'eft la furface inté-
rieure du cœur qui fent le plus vivement la.
force des ftimulus , & ce font des fluides
fans âcreté qui l'irritent le mieux.
L'avantage que le cœur a fur tous les au-
tres mufcles , c'eft la force de l'irritabilité ,
& la conftance de cette force. Le cœur
furvit de beaucoup aux inteftins & aux muf-
cles dans les animaux à lang froid ; nous l'a-
vons vu battre pendant vingt-quatre heures
dans la grenouille après qu'aucun autre muf-
cle ne fe contradoit , quelque irritation
qu'on employât; dans le poulet enfermé
dans l'œuf , le cœur bat malgré le froid mor-
tel de l'animal , malgré celui de l'eau qui
environne l'œuf j dans les premiers jours de
Pincubation , le cœur eft animé d'une force
très-vive , & les autres mufcles font ab/blu-
mcnt fans irritabilité , les inteftins & l'efto-
mac n-'en donnent même aucune marque.
Dans l'animal à lang chaud, k fupérioriré
du cœur n'eft pas tout à fait la même , la
graific dont il eft couvert fe fige par le frûid *
C O E
ôc le cceur lui-même fe durcit Se perd Ton Ir-
ritabilité ; il lui faut pour conferver cette
qualité, de la chaleur & de l'humidité,
ies interdns confcrvent quelquefois leur irri-
tabilité auffi long-temps que le cirur , ôc
nous les avons vu la conferver plus long-
temps ; parce qu'on les a découverts plus
tard que le caur , ôc qu'ils ont confervé plus '
de chaleur ; mais en général dans ces ani-
maux même le cceur relie irritable quand
tout autre mufcle ne l'eft plus. Nous avons
vu battre l'oreillette droite d'un chien , cinq
heures entières après la mort abfolue de l'ani-
mal ; le coeur arraché furpaffè de beaucoup
les autres' mu fcles dans la confiance de Tes
mouvemens ; les inteftins arrachés s'agitent
pendant quelques minutes, les mufcles pal-
pitent de loin en loin , fans aucun mouve-
ment régulier qui fubfifte uniquement dans
le cccur ; dans le poulet le mouvement eft
revenu au cœur irrité vingt-fîx heures après
la mort de l'animal. Les morceaux même du
cœur di vifc en petites parties , continuent de
le mouvoir ; le cœur des jeunes animaux eft;
plus irritable , & le cœur du poulet l'eft au
luprême d»gré.
D'où vient cette fupériorité dans le mou-
vement du cœur? Elle ne dépend pas de fa
fenfîbihté , il en a peu , fes nerfs font nom-
breux fans être grands. Penferoit-on aux ré-
feaux que forment les fibres & les mufcles
du cœur , & par leiquels cet organe dilTere
des autres mufcles dont les fibres ne s-'unif-
fent jamais entre elles? On ne voit pas dans
cette ftruélure une caufe fuftifanted'uneplus
forte irritabilité.
La figure cave du cœur donne au langqui
l'irrite , la facilité d'en toucher une grande
furface ; la membrane qui revêt cette cavité
eft extrêmement mince , &: le fing touche
prefque à nu les fibres mufculaires. Il eft pof-
lible que les nerfs plus à découvert fentent
plus vivement l'imprellion du lang ; les muf-
cles creux ont un avantage dont ne jouiflent
pas les mufcles longs ; ceux-ci ne font irrités
que par les efprits animaux , & ceux-là ont
pour ftimulus les liquides qui rempliftènt
leur cavité ; il eft fur du moins que le cœur
arraché du corps d'une grenouille , & qui a
perdu prefque tout fon mouvement , le re-
prend lorfqu'on le remplit d'air, & que dans
cet étafcil continue pendant plufieurs heures
C O E
427
de poufîèr alternativement le fang dans
l'oreillette & de l'en recevoir. Il eft fàr en-
core queleacwr bienvuidé perd le mouve-«
ment, c'eft une expérience que nous avons
faite bien des fois, & variée de bien des ma-
nières. Ayant remarquéque le cœ ur de l'oreil-
lette du côté droit confervent plus long-
temps le mouvement , que le cœur ôc l'oreil-
lette du côté gauche , nous avons tenté de
renverfer l'ordre de la nature , & nous y
avons réulïî , en ôtant aux cavités du côté
droit le fang qui les irritoit ; l'expérience
n^'eft pas bien aifée à faire , elle nous a réuil!
cependant ; il faut pour ôter le mouvement
au ventricule droit & à l'oreillette , ouvrir
l'artcre pulmonaire Se lier la veine cave , Se
de l'autre côté Her l'aorte , ouvrir la veine
pulmonaire ; dès-lors les cavités du côté droit
reftant parfaitement vuides, ce font celles du
côté gauche dont le mouvement continue le
plus long-temps -, on a ouvert la ligature de
la veine cave , Se rendu du fang au ventri-
cule : il ne battoit plus pendant qu'il étoit
vuide , rempli de fang il a recomunencé de
battre. Se avec plus de force à mefure que
le fang le remplilloit plus parfaitement.
L'air pouffé dans le canal thorachique ou
bien dans un des grands troncs veineux du
cœur , rappelle le mouvement que le fâng a
perdu. La faignée affoiblit le cœur. Se le faut
du fang d'une artère s'abaifle , à mefure que
Panimal a perdu de Ion fang.
En fuivant ces expériences Se en les com-
parant avec les phénomènes du cœur dans
l'animal vivant, il paroit que cette conftancc
à fe mouvoir , ii admirée dans le cœur , a.
pour caufe principale l'application perpé-
tuelle du ftimulus ; en effet , on voit dans le
poulet la veine battre Se fe vuider , le fang
pafler dans le ventricule encore unique ,
celui-ci fe contracter auffi-tôt , fe vuider Se
donner fon lang au bulbe de l'aorte , qui te
contracte de même à l'attouchement da
fang -y dans la grenouille , cette fuite de mou-
vement eft la même , Se par~touc la partie du
cœur ou de l'oreillette qui eft rempHe de fang,
fe contraéle , Se celle qui s'eft vuidéeperdle
m.ouvement; de-là cette fupériorité dans la
durée des battemens de la veine cave , de
l'oreillette droite , Se du ventricule droit ;
1' phénomène que nous ne rappelions pas. Le
mouvement fubfifte le mieux dans les pâ>
Hhh.2
4iS C O E
ties qui reçoivent le plus long-temps du fang.
Nous avons parlé du mouvement dncaeur,
parlons de (on repos ; tout muicle qui a été
irrité, fe contracte, mais après un certain
remps^rimprertion de l irritation ayant ceflé,
le muicle fe relâche , s'amollit & s'allonge ,
le ca-ur en fait de même ■■, dès qu^il eft vuide,
il perd le mouvement, s'allonge , fe flétrit &:
relie immobile , juiqu'à ce qu'une onde de
fangrucceflivement accumulée foit devenue
fufhlante pour le contradcr; de-là les longs
intervalles entre les pulfations de lanimal
qui le meurt.
Comme le cceur refte irritable dins le
corps de l'animal qui fe porte bien , il ne lui
faut qu'Hun nouvel aiguillon pour rentrer en
mouvement , &c ion adtion eft une alterna-
tive r;;gke de mouvemens produits par Tir-
litation , ôc de relâche mens qui fui vent Ton
inanition.
Dans un animal mourant, l'irritabilité di-
minue peu à peu , il ne fufiit plus de 1 irri-
ter j cette irritation ne produit plus ion eftet
qu'après un intervalle de temps , parce que
l'irritabilité aflfoiblie ne fe réveille que par la
durée de l'application du ftimulus.
Bientôt après , le asur durcit , la graifle
fe prend, & les irritations ne produilent plus
quedes mouvemens imparfaits. Nous regar-
c:ons la deliruécion de l'irritabilité du ccear
comme le véritable terme de la vie , ôc com-
me la mort complète; cet état naît beaucoup
plus Vite dans l'animal à fàng chaud, &: plus
tard dans l'animal à fang froid. (H. D. G.)
Cœur , {Gramm.) La poiition du coeur ,
fa fonâ::on dans le corps humain , l'impor-
tance de ce viictre , &c. ont fort multiplié
les acceptions figurées de ce mot, tant au
moral qu'au phyiique. Voye'^^lesart.fuiv.
C(EUR , ( GéoTuéirie. ) Qiiclques géomè-
tres , entre autres M. Vangnon , dans les
Tném. de l'acad. desfc. an. i6q% , ont donné
ce nom au foUde que forme roit une demi-
ellipfe en tournant non autour de Ton axe ,
mais autour d'un de les diamètres ; & en
effet un tel (olide auroit afiez la figure d'un
cczur pointu p ir le bas , & enfonce par le
haut. M. Varignon a cherché la dimenlion
de ce folide ; mais il s'tft trompé , comme il
feroit aifé de le faire voir. On peut trouver
facilement la dimenlion du ccci/r par la mé-
^.lode fuivante.
C O E
Soit imaginée une demi-ellipfè: dont les
deux axes foient égaux diamètres de l'cllip'e
donnée; chaque ordonnée Itra auiïi égaie
de paît &: dauire , excepté que dansl ellip'e
formatrice duccEi/rlesordonncesleiont obli-
ques à l'axe , & que dans l autre elles lui le-
ront perpendiculaires ; celles-ci dans la rota-
tion formeront des cercles , & les autres for-
meront des furfaces coniques qui ieront aux
cercles dans le rapport du imus de l'angle
des deux diamètres à l'angle droit : rien n cil
plus facile à démontrer. De plus , dans le
c(£ur les furfaces coniques feront oblique-
ment pofées par rapport à l'axe \ au lieu que
dans le folide forme par 1 autre elliple , les
cercles feront perpendiculaires à Taxe : don.c
l'élément du caur eft encore à lY'lémer.t de
l'autre lolide , envifagé fous ce point de vue,^
comme le finus de l'angle des deux diamè-
tres eft au (mus total. Donc , puifque ce
rappoit encre deux fois dans le rapport total
des deux élémens , il s'enkiit que l'élément
du cctur eft à l'élément de l'autre folide ,
comme le quarré du finus de l'angle des dia-
mètres eft au quarré du finus total : donc les
deux folides font aufli entre eux dans ce rap-
port. En voilà allez pour mettre fur la voie
ceux qui voudroient aller plus loin , faire de
cette propcfîiion une démonftration en
form.e , & reconnoître en quoi^eche celle
de M. Varignon. (O)
Cœur du Vao^ouRbgulu s^ {AJîron.^
étoile de la première grandeur, dans la conf^
tellationdu Lion. Voyeihioa. (O)
§ Cœur de Charles , {AJîron,) c'eft
le nom d'une petite conftellation boréale ;
elle eft marquée fous ce nom dans le planif^
phere en deux feuilles, gravé en Angleterre,
& appelle communément plcnijphtre de Se-
nex , quoiqu'on y voie le nom de Harris
comme rédaûeur , & celui de Eowles
comme marchand. Cette conflellation fe
trouve aufTi marquée fous le même nom dans
le planifphere gravé à Paris par les foins de
M. Robert de Vaugondy. Elle n'eft remar-
quable que par une étoile de féconde gran-
deur , f ituée fous la queue de In grande our-
le , du coté de la chevelure de Bérécine &
de la queue du lion. Cette étoile appel-
Ice dans le catalogue de Ticho-Brahé , i/ifor-
mis iiiur caudam hu us & leonis. Dans le ca-
talogue bhtannque^ publié en 1 7 1 1 , par M.
C O E
Halî^y , fur les cbfervarions de Flamdeed ,
eî!e eft appellée clara fub caudâ infvrmis ,
en force qu'on n'avoir pas encore donné
à cetre étoile le nom qu'on lui donne aduelle-
menten Angleterre. Dans l'édition de lyij",
donnée par Flamfteed lui-même elleeft com-
prife dans la conftellation des chiens de chât-
ie , Introduite par Hevelius in annulo armil-
Lr charx infcrmis fub caudâ urjî. Dans les
grandes carres cékfies de Flamfteed , elle
eft en effet (ituée fur le collier d'un des chiens,
fans aucune figure de ca^ur. Cette dénomi-
nation de CiVur de Charles , a probable-
ment été introduite par Halley,ainli que
le chêne de Charles II , par refped pour la
mémoire d'un prince fondateur de l'acadé-
mie ik de l'obi'ervatoire d'Angleterre. La
principnle étoile avoit en 1690 , ç*, i^, 15',
1 2." de longitude , ôc 40^, 7', 1 8" de latitu-
de boréale, { M. n b la Lande. )
Cœur de l'Hydre, e/2^,?ro/zo//2/e, étoile
de la féconde grandeur dans le ccrwr de la
conftellation de l'Hydre , la douzième dans
le catalogue de Ptolomée , la onzième dans
celui de lycho, & la vingc-cinquicme dans
celui d'Angleterre F.Etoile & Hydre/. O)
Cœur , en termes de Blafoti. Parti en
cct.ir , lignifie une ligne courbe de partition
en pal ou centre de l'écufl'on , qui ne s'étend
que fort peu , très-courte du haut &; du bas ,
& qui eft rencontrée par d'autres lignes qui
forment une partition irréguliere de l'écu :
c'eft aulTî un meuble de l'écu , qui repréfente
le cœur de l'homme. Il eft le fymbole de la
force & du courage. Lacour de Bafleroi , de
Miltot , diocefe de Bayeux , d'azur à trois
cœurs d'or.
Cœur , ( Horlogerie. ) pièce qui en a la
f )rme , qui eft placée fur la leconde roue
d'une horloge,&dont la fonction eft de déga-
ger le pié de biche de la détente de la fonnerie.
CiRUKyCheyaldedeuvcjeurs y en termes de
manège , eft celui qui ne manie que par con-
trainte , & n'obéit pas volontairement aux
aides du cavaUer. Ces chevaux tiennent quel-
que chofe des ramingaes. V. Ramingue.
Cœur dt^ bœuf, i. m. {Hifl.nat.botan.)
efpece d'anone , nommée au (Ti /je^// coro/o/
à Cayenne. Les habitans de la Guiane l'ap-
pellent alakaiona , & les ^ oriu^ûs guanabo
pintavo. C'eft le guana anus fruclu turbinaîo
minori luteo , de Barrere.
C O E 429
Cet arbre difFcre beaucoup du cvur ds.
bœuf des iles des Antilles , dont le fruit
a jufqu'à fix pouces de diamètre, &: pefe
juiqu'àfept ou huit Uvres, Le (iena pareil-
lement la forme d'un cœur , mais feulement
de trois à quatre pouces de diamètre. Il eft
jaune dehors & dedans , compofé de l'alfem-
blage d'un grand nombre d'ovaires rappro-
chés dont les extrémités forment des tuber-
cules qui lui donnent l'air d'une pomme
de pin. Ses pépins font châtain-clair.
Culture. Cet arbre eft nain comme un
arbrifleau , & fe plante en forme de haie
avec le médecinier , curcas , autour des
plantations. Il fructifie deux fois l'r.n.
Qualités. Son fruit a un goût légèrement
acide &c parfumé.
Ufages. Les habitans de Cayenne man-
gent ce fruit. Il eft rafraichiflknt en appa-
rence , mais très-échauffant enfuite & af-
cringent -, il excite l'appétit oC arrête le cours
de venrre.
Sa racine eft aromatique , elle fe prend
en poudre par le nez comme du tabac , ou
par la bouche dans l'épilepfie.
Remarques. îl eft dit danslediiftlonnaire
intitulé , Diclionnaire d'hijloire naturelle , à
l'article cœur de bœuf: 1°. que cet arbre a
caufé beaucoupde controverfeschez les au-
teurs botaniques ; 2°. que fon fruit eft gros
comme un melon médiocre, 5**. qu'il a la
chair fort blanche ; 4°. que les femences
font noirâtres ; 5*^. que les Malaïens (on veut
dire les Malays ) s'en fervent en place de
légumes. Ces cinq aftèrtions font également
làutivcs.
L'anone eft , comme Pon fait , un genre
de plante aromatique qui fe range mturelle-
ment dans la f imille qui porte fon nom ,
&: qui eft notre quarante-lixieme. Voye^
nos familles des pla/ues , volume II, page ^6^.
{M. Adanson.)
Cœur de bœuf , f. m. ( Hift, nat. con-
chyliolog. ) nom que quelques écrivains ont
auffi donné à une efpece de coquillage
bivalve , qu'ils nomment en latin , bucar-
dium ; parce que les deux bittans font iî
renflés , fi bombés qu'ils imitent un cœur.
( M. Adanson. )
Cœur de saint Thomas, f. m. (iï{/?.
nntur. botan. ) cor fancli Thomœ , ou cor
divi Thomœ ; c'eft la fève d'une gouiTe arti-
430 C O F
culée d^une plante rampante quiclroît àl*île
de Saint Thomas fur la côte d'Afrique. Cette
plante n''eft pas une efpece d'acacia comme
il efl: dit dans le diélionnaire intitulé , Dic^
tionnaire d'hijfoire naturelle ; m^^unt efpece
d^cntada , dont les feuilles font pinnées fur
deux r^.ngs, par paires & terminées par une
vrille à tkux branches , les fleurs en épi ter-
minal , le calice de la fleur à tube évaié à
cinqdcnrs , la corolle à cinq pétales menus
longs, les étamines au nombre de dix.
L'entada forme un genre particulier de
plante voillne delà fcniizlve mimofa , dans
la première feclion de la famille des plantes
iégumineules, où nous l'avons placée. Voy.
ïjOS familles des plantes, volume II, page
Zî8. (M. Adanson.)
Cœur de Vénus , f. m. ( Hijl. nat. con-
chyl. ) coquillage bivalve des Indes , à bat-
tans parfaitement égaux , fermant très-exac-
tement , comprimés ou applatis , non pas
par le dos , mais par leurs côtés , au con-
traire de la plupart des autres coquillages bi-
valves , de manière qu'ils repréfentent un
cceur de deux pouces & demi de longueur
des fommets à l'extrémité oppofée , un peu
moins large, relevée fur chaque face de quin-
ze à feize cannelures , relevées de dentelures ,
dont celles du bord qui eft Taillant & tran-
chant , font plus grandes.
Cette coquille efl: entièrement blanche,
mince & afifez tranfparente. ( M. Adan-
son. )
COEU VRES , ( Géog. mod. ) petite ville
de France dans le Soifïbnnois, avec titre de
duché-pairie.
COEX , f. m. ( Jurifprud. ) on appelle
ainfi aux environs de la Rochelle un tuyau
de bois que l'on met fous une chaulTee, pour
conduire l'eau des marais falans. {A)
COFFER DE NASSELAW , f. m.
{ Hijîoire nat. Ichthyolog. ) poiflon des îles
Moluques, allez bien gravé & enluminé
fous ce nom , par Coyett, au n°. 75 de la
féconde partie de fon Recueil des poijfons
d*Amboine.
Son corps eft elliptique très-comprimé
par les côtés , pointu vers la queue , arrondi
vers la tcte , une fois plus long que profond ;
il a la tête grofîè & courte , la bouche gran-
de , les yeux petits.
Ses nageoires font au nombre de fept :,
C O F
favoir , deux ventrales au deflous des deux
pedorales qui font petites , arrondies , une
dorfale fort longue , plus baflè devant que
derrière , une derrière l'anus fort peu plus
longue que profonde , &c une à la queue
échancrée en croiflànt.
La couleur de fon corps eft brune , celle
de (es nageoires verte; fa tête eft jaune
bordée de bleu derrière , à deux taches
bleues fur le front , la prunelle des yeux
eft noire bordée d'un iris rougeâtre.
Remarque. Ce poillôn eft , comme l'on
voit, une efpece de fpare. (M. Adanson.)
CoFFER-viscH, f.m. (i///?. nat. Icfithyo-
log. ) on nomme encore de ce nom aux îles
Moluques , une autre efpece de fpare , aftèz
bien gravée de enluminée par Coyett , au
n°. Il'/ de h féconde partie de fon Recueit
des poijfons d'Amboine.
Il ne diffère du coffer de nalîèlaw que
par les caraderes fuivans : 1°. Sa nageoire
dorfale a dans fa partie antérieure deux
rayons épineux , èc celles de l'anus un rayon
pareil. i°. Son corps eft brun-noir ; fa tête a
trois taches bleues fur le front , &: dix taches
rondes bleues fur chaque face ; fa queue eft
jaune , avec fept taches bleues de chaque
côté , les rayons épineux de fes nageoires iont
bleus , & la membrane qui unit ces rayons
épineux eft rougeâtre. {M. Adanson.)
COFFILA , f m. ( Co/Tzm. ) poids d'ufagc
à Mokajil pefe ,UoOu lô^k de livres. Voyer
le dicl. de Trév. & le dicl. de Comm.
COFFINER, V. n. {Jard.) fc dit des
œillets lorfque les feuilles fe frifent au lieu
de demeurer étendues ; c'eft un défaut qui
fe défigne par le verbe coffiner. Il fedit auflî
des fruits , lorfqu'ils changent & devien-
nent mous,
Coffiner , v. n. (ynonyme , en menui^
ferie , & charpenterie , à fe cambrer , fe
déjetter , s*envoiler : il fe dit d'une pièce
ou planche de bois qui s'eft déformée ou par
le fec , ou par l'humidité , ou par la charge.
COFFRE , f. m. (HiJI. nat. Ichthyol.)
poifîon qwi fe trouve vers les Antilles , qui
eft couvert d'une écaille mince , mais dure
& feche, dont on le tire quand il eft cuit
comme un limaçon de fa coque, ou comme
une tortue de fon écaille , dont la forme eft
depuis la tête jufqu'à la queue en pyrami-
de , à trois faces , qui a Ja tête jointe au
C O F
refte du corps , fans qu'on y diilingue
aucune fëpai. tion, &c dont la chair eft blan-
che & fucculei-te, aa ienriment du père
Labat qui en fait mention au tome II de
fes voyages.
Remarques. Ce poiflbn eft du genre de
ceux qu'on nomme, en latin or bis ; on lit
dans le didionnairc quia pour titre Diclion-
naire d'hijloire naturelle , à l'article poijfon-
coffi-e y que cet animal eft couvert depuis
la tête jufqu'à la queue d'une écaille alfez
mince , feche & très-dure ; mais cette pré-
tendue écaille n'eft qu'une peau coriace &
prefque cartilagineufe , grenue & chagrinée
par des tubercules en compartimens qui tien-
nent lieu d'écaillés. {M. An an son.)
^ Coffre, {Layetier & Gainier.) efpece
de caifte de bois ordinairement couverte de
cuir , fermant à clé , & fervant à ferrer les
hardes , linge , &c. Il y a des coffres-forts
faits de bois , mais fonifiés de plulleurs
bandes & liens de fer. Ce font les layetiers
qui font les coffres de bois fimples, qu'on
appelle plus exadement caiffes. Ce font les
gainiers qui font les coffres couverts. Ce
font les lerruriers qui font ou qui garnif-
fent les coffres-forts.
Le mot coffre s'emploie de différentes
manières , tant au fimple qu'au figuré. On
dit de la cavité du corps la plus grande
qui contient le cœur , les poumons , le foie,
les inreftins , ùc. le coffre du corps humain.
On dit aulïi , les coffres du roi ^ le coffre
d'un clavecin , &c.
Coffre, {Jurifprud. ) Le don de coffre ,
hardes , troufleau , & joyaux , eft un gain
nuptial & de furvie, que Ton ftipule ordi-
nairement en Provence dans les contrats de
mariage , en faveur du furvivant des futurs
conjoints. La femme fe fait reconnoitre
par le contrat fes coffres , hardes , &c. que
l'on apprécie à une certaine fomme , par
exemple i ooo liv. Après cette reconnoiftance
& la conftitution de dot , dans laquelle on
comprend ces coffres , 6c après la donation
de furvie en argent que Pon ftipule en fa-
teur du furvivant , on ajoute queles(7o^/er,
hardes , ùc. enfemble le prix & reconnu d'i-
ceux , appartiendront au furvivant. Cette
claufe , enfemble le prix ù reconnu d'ic^ux ,
opcrc que la femme , en cas de furvie» re-
prend en entier fa dot & fes coffres en nature.
C O F
43
& encore ï ooo livres en argent pour i^
coffres : au contraire , ii c'elt le mari qui
furvit , il garde les coffres ôc hardes en na-
ture ; il eft difpenfé de payer ux héritiers
de fa femme les i ooo livres qu''elle s'étoit fait
reconnoitre pour les co^e^, ôc ne leur rend
que le furplusde la dot. V.le traité des gains
nuptiaux & de furvie , ch. viij. page Su. {A)
Coffre , terme de fortification , logement
creufé d^ms un fofte fec , de 1 5 ou 20 pies de
large & de 6 à 8 pies de profondeur 3 cou-
vert de foliveaux , qui font élevés de deux
pies au deflhs du plan du fofte j cette petite
élévation fert de parapet ; elle a des embra-
fures pour y placer des pièces d^irtillerie , qu i
défendent la place du baftionoppofé & em-
pêchent le paftàge du fofte. Foje^jj^ Fossé.
Le coffre diffère encore de la traverfe &
de la galerie , en ce que celle-ci fert aux
afiîégeans & l'autre aux aiïîégés. Voye-;^
Galerie & Traverse.
Les affiégés fe fervoient autrefois de ces
fortes de coffres pour repoufler lesafîiégeans
au partage du fofté ; mais ils he foni plus en
ufags à prcfent : la caponiere du foflfé répond
exactement à l'obj et de ccS fortes de travaux,
qui le plaçoient ordinairement non vers le
milieu de la courtine comme la caponiere ,
mais à peu de diftance des flancs. Voyi\
Caponiere.
Qn appelle quelquefois coffre , dans l'ar-
tillerie , la chambre ou le fourneau de la
mine. Voye^CuAuisKE & Fourneau. (Q)
Coffre de bord ,( Marine.) c'cd ut\
coffre de bois dont l'affiette ou le fond eft
plus large que le haut , & où les gens de
marine mettent ce qu'ils portent à la mer
pour leur ufage.
Coffres a gargouffes , ce font des retran-
chemens de planche faits dans les fou tes aux
poudres , où l'on met les gargouiîes après
qu''on les a remplies.
Coffres à feu ; ce font des coffres que-
l'on remplit de feu d'artifice &: de matières
combuftibles , qu'on tient en quelque en-
droit , & dont on fait uf:ige lorfque les
ennemis ont fîiuté à l'abordaj^e , pour les
repoufler & faire périr ceux qui font expofé^
à leur effet, Dicl.dc Trévoux. {Z)
Coffre , en terme de blanchifferie de cire ^
c'eft une machine de cuivre longue de quatre
j^iés j f lus large en liiut qu'en bas ^ cquvcite
431 C O F
d'une paflbire au milieu , &: de deux portes
ou plateaux de fer-blanc à chaque bout ; le
devant &c le derrière font garnis de deux ré-
chaux pofl:iches,& fur un des bouts du cqf're
eft un robinet d''où la cire tombe dans des
éculons pour être verfée fur des planches à
pain. Fbjei^PLANCHE A pain &" Lculons.
Le cc^'re fcrt à contenir la matière fondue
pour la troifieme fois dans uneclialcur con-
venable pour être coulée en pains.
Coffres , ( Hydr. ) font faits de bois , de
tôle ou de fer en forme de boites quarrées
pour renfermer les foupapes. yo^e^CRA-
PAUDINES. (K)
Coffre , fe dit quelquefois en parlant du
ventre du cheval : on dit ce cheval a un
grand coffre y pour dire qu'il a bien du ventre,
ou qu'il mange beaucoup : on dit d'un cheval
qui a peu de force , que c'eft un vrai ccffre a
avoine.
Lecq^e àavoine dans une écurie , efl: un
ccffre de bois qui ferme à clé , & qui efl: or-
dinairement féparé en dedans par une cloi-
fon , afin de mettre l'avoine d'un coté & le
Ton de l'autre. Le dé'.ivreur a la clé du coffre
à avoine. Fbjc:[ Del IVR eu R.
COFFRET , diminutif de coffre. Voyeii^
Coffre. Les confifcurs donnent ce nom à
des boîtes de bois de différentes grandeurs,
dans le'quelles ils ferrent leurs confitures : les
cordonniers , à un rond de bois fur lequel ils
coupent les empeignes. Fbye^SouLiERs. Il
en eft dcscq^e^^ainiî que des coffres; l'ufage
en eft prodigieux , & il y a peu d'artiftes ou
même de maifons où l'on ne s'en ferve à
ferrer différentes chofes qu'on ne veut pas
laifler expofées fous la main du premier venu .
COFFRETIER , f. m. {An méch) on
donne ce nom à deux fortes d^arti'ans ; les
malletiers àc les bahutiers. Les ccjfreriers-
malletiers , ce font ceux qui en qualité de
membres d'une communauté de ce nom ont
droit de faire &: de vendre des coffres d'ar-
mée , malles , valifes , ùc. Les bahutiers
font ceux qui en qualité de membres d'une
communauté de ce nom , font autorifés à
faire & vendre bahuts , caifîès , caffettes ,
coffres de ménage , ùc. Voye^tart. Bahu-
TiER. Les premiers ne paroiftent pointavoir
form.é de communauté avant 1 596. Ils ont
quatre jurés, dont deux fbrtcnt de charge
rous les ans. Il faut avoir cinq ans d'appren-
C Ô F
tiffagc , ôc cinq de compagnonage pour
parvenir à la maîtrife. On ne peut faire qu'un
apprenti à la fois. Ces artifans font iî
bruyans , que la police , qui veille au repos
descitoyens,a voulu qu'ils n'ouvriflent qu'à
cinq heures & qu'ils rermaflènt à huit.
COFIDÉJUSSEUR , f. m. {Jurifprud.)
eft celui qui a répondu folidairement avec
quelqu'autre de la dette du princip il obligé.
Suivant le droit romain, un des cofidé^
jujfeurs qui a payé feul toute la dette au
créancier , fans prendre de lui ccflîon de (cs
droits & adions , ne peut agir contre (es
cofidéjujfeurs , quoiqu'il n'ait pas befoin de
fubrogation pour répéter du principal oblige
ce qu'il a paye pour lui. Injî. l. IIl^ t. xxj, §.4.
Cette maxime du droit romain s'obfervc
encore en quelques provinces du droit écrit ,
comme Pob'ervc Catelan , liv. V, ch. lix.
Mais Pufage comm.un eft que celui des
cofidéjujjeurs qui a payé fans s'cire fait lubro-
ger par le créancier , peut néanmoins agir
contre les cofidéjuffeurs pour répéter de cha-
cun d'eux leur part & portion. Vu^ ci^Cau-»
TION Ù FiDÉjUSSEUR. {A)
COGMORIA, f. f. mouffeline que les
Anglois apportent des Iwdes orientales. Voy*
le diclionn. du Comm.
§ COGNAC , ( Géogr. ) Campiniacum ,
Copriniacum ou Conniacum , la féconde ville
de l'Angoumois du diocefe de Saintes ;
Gérard , archevêque de Bordeaux , y tint ua
concile en 1 2 5 8. Long. 2 7, z^, 54 ; lat. 45,
La lituation en eft charmante & rien n'efl
plus riant que le payfage dont elle eft envi-
ronnée. Elle eft célèbre par la naiflànce de
François I , & par fes eaux-de-vie. C'eft la
patrie de Pabbé de Villiers, auteur des poè-
mes/z/r V amitié ôcfur l'art de prêcher.
Cognac eft fur la Charente, à quatre lieues
de Saintes , à fept d'Angoulême , & à deux
de Jarnac. (C)
§ COIGNASSIER , (Sotaniq.) en latin,
cydonia , en anglois , quince-tree ; en alle-
mand, quittenbaum.
CaracJere générique.
Le calice de la fleur eft permanent , d'une
feule pièce & divifé en cinq par les bords :
il foutient cinq grands pétales arrondis ,
creufés en cuilleron & difpofés en rofe ; il
renferme Pembryon qui fupporte cinq flyles
déliés
C O I
déliés & environ une vingtaine d'étamines
dont les fommets font divilés en quatre par-
ties : cet embryon devient un fruit charnu
& velu , tantôt pyramidal , tantôt arrondi ,
félon les efpeces; ce fruit eft diviié en cinq
cellules , dans lelquelles il ie trouve un ou
deux pépins figurés en larmes : il eft: terminé
par un ombilic formé des veft:iges du calice.
Efpeces.
1. CoignaJJier à feuilles oblongues, ve-
lues par-deilous, à fruit oblong, allongé
vers la bafe. Coin-poire. Coignajjlcr ordi-
naire à feuilles moyennes.
Cydonia foliis ovato-cbLngis , fubius to-
me nîojîs , pvmis oblongis , bafî produâis.
Qjiince-trec wkh oblong oral leaves , &CC.
Peur quince.
2. Coignajfier à fruit oblong &: imberbe;
en Provence , coudounier.
Cydonia fruclu oblongo , Iceviori, Injt.
rei herb.
Il ne fe trouve pas dans Miller.
3 . Coignajfier à feuilles ovales , velues
pardeflbus , à fruit rond , ou coignier.
Cydonia foliis ovatis , fubtus tomentojîs ,
pomis rotundioribus; cydonia fruclu breviore
& rctundiore. Injl. rei herb.
Apple -quince.
4. CoignaJJier à feuilles ovales renverfées,
très -larges Ôc à gros fruit; coignajfier de
Portugal.
Cydonia foliis obvers} ovatis , latijfimis ,
fruclu maximo. Hort. Col. Cydonia latifolia
lufitanica. Inji. rei herb.
La vertu ftomachique & aftrlngcnte des
coins 5 le mucilage de leurs pépins li propre
à garantir les malades long-temps alités des
effets du frottement , la forme agréable de
ces fruits , le duvet doré dvnt ils (ont cou-
verts , fur-tout leur grolTeur prodigieufe &:
leur parfrim fi gracieux dans les confitures
& les ratafias , alfurent aux coignajfiers une
place diftinguée parmi les fruitiers ; mais ce
qui rend ces arbres plus eftimables encore ,
c'efl: leur proche parenté avec la famille des
poiriers; peut-être ne fommes-nous rede-
vables de nos plus belles efpeces de poires
qu'aux alliances contraétées entre les deux
genres; le volume , la figure de ces fruits,
le jaune dont ils fe peignent , font du moins
foupçonner qu'ils tirent en partie leur ori-
gine du coignajfier ; & ce n'cft pas encore
Tome FUI.
COI 433
tout ce que nous lui devons; qu*on lui
confie les greffes des meilleurs poiriers , la
fève rnodérée va réfréner les faillies de la
leur , ils en deviendront plus dociles à la
taille & au paliflàge; par-là, on les réduit
à une ftiature médiocre , on en fbrme des
demi-vents, desefpallers, des quenouilles,
des buiftbns, &z fous toutes ces formes ils
font d'un plus prompt & plus grand rapport
que ceux grcliés fur franc ; le fruit en eft
aufïl plus gros 6c d une pâte plus douce.
C^eft dommage que tous les poiriers ne
s'accommodent pas également de ce fujet
qui ne convient guère qu^aux poires fon-
dantes , & ne réulïit parfaitement que dans
les terres fraîches. Plufieurs poires d'hiver,
celles qui ont des difpolitions à fe crevaifer
n y font que peu de progrés. Il eft des efpeces
qui ne peuvent fubiifter de fa fève : de ce-
nombre font entre autres quelques-unes de
celles connues fous le nom de bergamotte;
leur forme arrondie donne Leu de penier
qu'elles tiennent de très-près aux poiriers
lauvages & aux nefïliers ( Voye^ ci-après
Fructification) , & qu'elles nont que
très-peu d'analogie avec le coignajjîer ; il eft
cependant un moyen de tromper leur aver-
fîon pour cet arbre; il faut d abord modi-
fier fa fève , en y greffant du beurré , ou de
la virgouleufe , qui y reprennent très-aifé-
ment; c'eft fur le bois provenu de ces
greffes qu'on pofera les écuflbns ou les
iUoins de ces poiriers infociables ; par cette
médiation on les réconciliera avec le coi-
gnajfier ; ce fujet intermédiaire ell: en jar-
dinage ce que les intermèdes font en chy-
mie. Eh! quelle chymie plus belle que
celle de la végétation î N'oubUons pas de
prévenir qu'un autre moyen de tenir nains
ces poiriers , ceft de les greffer fur épines ,
fur nefflier &: fur azérolier.
Mais il eft d'autres efpeces dont la fevc
impétueufe ne peut fympathifer avec la len-
teur de la plupart des co/^/z^7/7?erj; d'après
cette obfervation , je ne doute nullement
que ceux-là ne puiilent réufTir fur celui de
Portugal ; fa fupériorité de vigueur fur les
autres efpeces de fon genre , fe fut aflez
remarquer dans l'excès des dimenfions de
toutes fes parties. On trouveroit encore un
grand avantage dans l'alliance de ces poi-
riers avec aet iibre, c'eft que leurs poires
lii
434- COI
participant cîe la grofleur de Ton fruit , exce-
deroient de beaucoup leur volume naturel.
En général il faut choilir prcférablement
les coignûjjiers à feuilles larges , pour y pla-
cer les greffes des poiriers, c'cft k moyen
cîe grofïir les fruits. On doit de même
donner la préférence aux poiriers, neffliers,
azéroliers à gros fruit, dans les cas indiqués
pour le choix de ces fujets; fi l'on avoir
cepcndûMt pour objet d'avoir des arbres
très-bas , il conviendroit de préférer le coi-
gnajjîer à feuilles étroites , qui eft le moins
élevé & le moins vigoureux de tous, &
Tcpine blanche ou quelqu'autre efpece plus
bafle de ce genre , dans le cas où l'on
;iuroir des raiions pour y avoir recours.
De favoir fi en greffant un arbre fur
lui-même, on abonnit fon fruit, & jufqu'à
^uel point ces opérations multipliées pro-
«îuiroient de bons efïcts , c'eft: ce que nous
examinerons à Vartick Greffe.
On fe fert ordinairement des /z°. i &
3 dans les pépinières, pour y greffer les
poiriers deftinés à former des bafîes-tiges
ou des demi -vents.
L'efpcce n°. 5 ne nous efl pas connue,
le nous ne garanriflbns pas fon exiftence.
Le coignajfier fleurit à la fin de mai ; fcs
larges fleurs d'un blanc animé , naiflènt fbli-
taires fur les rameaux & relTortent merveil-
leufement fur les touffes verdoyantes où elles
font comme parfemées ; elles le fuccedcnt
encore quelquefois dans le commencement
de juin ; cet arbre peut donc fervir à l'orne-
ment des bofquets du printemps ; comme il
a une habitude de mal porter lès branches,
qui met l'art en défaut, il convient de le
jeter en madè dans les fonds des parties
les plus négligées & les plus agreftes.
Donnons encore quelque attention au coi-
gnajpccr de Portugal , nous n'avons parlé que
du fecours qu'il prête au poirier, occupons-
nous des avantages qu'il nous procure par
lui-même. Qu'on le greffe fur quelque ef-
pece de poirier à gros fruit , le lien en fera
plus gros èi. meilleur; il prend très-bien fur
les autres efpeces de fon genre , & en géné-
ral il cfl d'autant plus utile de le multiplier
par Li greffe , que par ce moyeu ©n obtient
plutôt & en plus grande quantité fes fuper-
bes fruits , dont le parfum eft plus gracieux
que celui des CAitiss cpiiis , & qui par la
C O I
cuilîbn fe colorent du plus beau pourpre ; on
peut auifi multiplier cet arbre de marcottes
& de boutures; ce font les voies qu'il fiut
choifir pour fe procurer des fujecs propres à
porter les greffes des poiriers : les marcottes
ne s'enracinent pas aufïi aifément que celles
des autres efpeces ; il convient de les coucher
en automne , d'y faire «ne coche Se de les
couvrir d'un peu de litière; fes boutures
font auffi un peu rebelles , & il faut les
traiter avec une partie des ménagemens
indiqués à {'article Bouture ; trop d'om-
bre & d'humidité leur nuifent infiniment.
On multiplie ordinairement les coignaf-
fiers, en en formant des mères, c'eft~à-dire,
qu'on recoupe de jeunes (ujets près de terre,
& qu'on élevé un petit monticule autour des
branches qu'ils ont pouflécs d'une automne
à l'autre : ces efpeces de marcottes prennent
fuffifamment de racines. Qu'on plante en
automne les boutures des coignajjiers ordi-^
naires dans une terre fraîche , couverte de
litière à lexpofition du levant, elles réuf-
f iront très-bien. Les fujets obtenus par ce
moyen , font préférables à ceux qu'on tire
des mères , en ce qu'ils font pourvus de
racines tout autour de l'aire de la coupure î
au lieu que ceux-là n'en ont que d'un côté.
J'ai femé avec fuccès des pépins de coin ;
mais outre qu'il eft difficile d'en rallembler
en alfez grande quantité pour fubvenir aux
befbins d'une pépinière, cette voie eft
longue & ne procure pas des arbres plus
droits que ceux provenus des boutures.
' On plante les jeunes coignajfier s en pépi-
nière depuis la fin d'od:obre jufqu'à la fia
de mars dans une terre fraîche & effrondée ,
où on les efpace d'un pié èc demi ou deux
pics dans des rangées diftantes de deux ou
trois. La féconde année» on les élague 611
juin, on les écuffonne tout le mois d'août
& partie de feptembre , fe réfervant d'enter
au mois d'avril fuivant les fujets où i'écuflba
a manqué.
Les poiriers greffés fur coignaffîers ne d^
mandent pas un fol auffi profond que le&
poiriers fur franc ; ils réuflifîent allez biea
par-tout, pourvu qu'on varie leur taille
lujvant les différentes qualités du terroir.
A l'égarddes cw^^tf^er^non-greÉTésqu'on
élevé pour leurs fruits , fi on les plante près,
des eaux, ils en donneront davantage &
C O G
tîe plus gros ; dans une terre fechc les fruirs
feront plus précoces ôc plus parfumés. La
taille que demandent ces arbres, confifte
uniquement à les délivrer des branches gour-
mandes, fur-tour des plus ambitieufes qui
s'élèvent au-deflus de la touffe i il faut auiïi
les décharger du trop de bois qui les rendroit
confus 5 ce qui leur eft commun avec tous
les fruitiers. {M. le baron de Tschoudi. )
COGNAT, {Jurifpr.) fignifie en géné-
ral celui qui eft joint à quelqu'un par les
liens de parenté ; quelquefois il fignifie îni-
guhérement celui qui eft parent du côte des
femmes. Voye-^^ ci-aprh Cognation. {A)
COGNA nON , f. f. {Jurifpr. ) iignifie
en général la parenté qui eft entre deux
perfonnes unies , foit par les liens du fang ,
ou par quelque lien de famille , ou par
Pun ôc 1 auire de ces difFérens liens.
On diftingue trois fortes de cognations ;
la naturelle , la civile & la mixte.
La cognation naturelle eft celle qui eft
formée par les feuls hens du fang; telle
éft la parenté de ceux qui font procréés
de quelque conjondion illégitime , foit
relativement à leurs père & mère & autres
afcendans , foit relativement à leurs frères
5c fœurs de autres collatéraux,
La cognation civile eft celle qui procède
des feuls liens^e famille, telle que la pa-
renté qui eft établie entre le père adoptif
& l'enfant adopté.
La cognation mixte eft celle qui réunir
à la fois les liens du fang &: les liens de
famille ; telle eft celle qui fe trouve entre
deux frères procréés d'un légitime mariage.
On diftingue dans la cognation deux
chofes principales; favoir, la ligne & le
degré. Voye^^ Degré.
La ligne eft directe ou collatérale. V.
Ligne.
Dans la ligne collatérale on diftingue
les parens en agnats & cognats ; les agnats
font ceux qui font parens du coté des
mâles , les cognats font ceux qui font
parens par les femmes.
On dit communément que tous les
cognats font agnats , mais que tous les
agnats ne font pas cognats, parce qu'en
effet la cognation eft le genre qui com-
prend en loi l'agnation , qui n'en eft que
la différence. Voye'^^ les injfit. au titre de
COG 435
nuptiis y ÔC au tit. de grad. cognât. Se ci-
aprh Consanguinité ù Parenté.
La cognation ou affinité fpirituelle, eft
celle qui fe contracte par le baptême entre les
père &c mère & Penfant avec les parrains Se
marraines. V. Alliance & Affinité {A)
COGNATIQUE, fucceflfion linéale ,
C Droit polit. ) forte de fuccelTion à la
couronne.
Il y a deux principales fortes de fuccefl
fions linéales à la couronne , favoir , la
cognât ique Se X'agnatique; ces noms viennent
des mots latins cognati Se agnati , qui dans
le droit romain fîgnifient , le premier , lès
parens du côté des femmes ; l'autre ^ ceux
qui font du côté des mâles.
La fucceffion linéale cognatique eft cell,e
<^ui n'exclut point les femmes de la Çucc^Ç-
fion à la couronne , mais qui les appelle
feulement après les mâles dans la même
ligne ; enforte que lorfqu'il ne refte que
des femmes, on ne pafle pas pour cette
raifon à une autre ligne; mais on retourne à
elle , lorfque les mâles les pkis proches ou
d'ailleurs égaux , viennent à manquer avec
toute leur defcendance. H réfulte de-là que
la fille du fils du dernier roi eft préférée au
fils de la fille du même prince , & la fille
d'un de fès frères au fils d'une de fès fœurs.
On appelle aufïî cette forte de fuccef-
fion , cajîillanne , parce qu'elle avoir lieu
dans le royaume de Caftille. Pour favoir fi
on doit fuivre cette forte de fuccefïion au
défaut de loi Se d'exemple , on peut voir
quel ordre s'obferve dans la fucccffion des
corps ou confeils publics dont les places
font héréditaires.
Le fondement de cette fuccefïion, en
tant qu'elle eft différente de la fuccefTion
purement héréditaire, c'eft que les peuples
ont cru que ceux qui efperent le plus
juftement de parvenir à la couronne, tels
que font les enfans dont les pères au-
roient fuccédé s'ils eufîènt vécu , feront
les mieux élevés.
La fuccelTion linéale agnatique, eft celle
dans laquelle il n'y a que des mâles ifTus
des mâles qui fuccedent, en forte que les
femmes , Se tous ceux qui fortent déciles ,
font exclus à perpétuité.
Elle s'appelle âximfrancoife , parce qu'elle
eft en ufage dans notre royaume. Cette
lii 2
43<^ C O G
exclufion des femmes &c de leurs defcen-
dans a été établie principalement pour
empêcher que la couronne ne parvienne
à une race étrangère ^ par les mariages
des princefles du lang royal.
Ainii lelon ce principe , n"eût-il pas été
plus avantageux dans la dernière révolu-
tion des Provinces - Unies , de borner la
luccelTîon du ftathouderat à la ligne agna-
tique ? Et n'eft~il pas à craindre que la
république Payant étendue à la ligne cogna-
tique , le gouvernement ne puifiè tomber
dans la fuite à une race étrangère , dont
les intérêts feroient bien différens de ceux
qui conviennent au bien de cet état ?
Je renvoie le led:eur aux ouvrages des
célèbres jurilconfultes, d'Hottoman, deTi-
raqueau, de Grotius, 6'c, pour la décilion
d'un grand nombre de queftions qu'on peut
faire liar cette importante matière , & je me
contenterai de ne traiter ici que la pr Jicipale.
On demande li dans un royaume indivi-
fible, un fils né avant que fon père parvienne
à la couronne, doit être préféré à celui qui
eft né depuis, quelle que foit la fuccellion
établie , cognatique ou agnatique. Grotius
décide avec rai(on pour Taffirmatlve , parce
que, dit-il, du moment que quelqu'un a
acquis la couronne dans la 1 uccelTion lincale,
les enfms nés auparavant ont quelque elpé-
rance d"y parvenir; car fuppoié qu'il ne na-
quît plus ci'enfiins à leur père , perfonne n'o-
feroit dire que ceux qui étoient nés déjà
doivent êcre exclus delà fucceffion. Or, dans
ce cas , pour avoir droit de fuccéder, il fufiit
qu'on en ait eu l'efpérance, & ce droit ne
ic perd point par quelque cho: e arrivée de-
puis; tout ce qu''il y a , c'eft cjue dans la fuc-
cefîion cognatique , Pacquifition prochaine
en eft lufpendue par le-privikge du fexe , ou
en ce qu'il peut naître des enfans maies.
Par la même raifon, dans la fucceffion
cognatique le 61s de l'ainé doit Remporter
fans aucun égard à l'âge , & la fille même
d"e l'ainé a la préférence, parce que l'âge
ni le fexe n'autorifeiit pas à pailèr d'une
ligne à l'autre. Ainfi en Angleterre, où la
fucceffion eft linéale cognatique, Richard
ÎI, petit-fils d'Edouard^ III, monta fur le
trône âgé de ii ans, en 1377, & l'emporta
fur fes trois oiîcks.
Convenons cependant que la fucceffion
CO G
! linéale, tantct)^,7^//'i^z/equ'"agnatîque, afbuf-
fert dans pluiicurs états les changemens cC
les viciffitudes de ce monde : & pour n'en
citer qu'un exemple; en Efpagne , où la fuc-
ceffion linéale cognatique a lieu,- les rois , qui
plus d'un fiecle avant Richard H, roi d'An-
gleterre , avoient poflédé la couronne de
Caftille,étoientdexendusd'un princequi Pa-
voit obtenue au préjudice de fes neveux, fils
de fon frère aine. {M. lec. de Jai/couet.)
"^ COGNÉE , f. f. inftrument tranchant
deftiné à couper du gros bois, ôc à l'u'age
de piuiîeurs ouvriers ; la forme en varie peu.
Les charrons , les bûcherons, les charpen-
tiers, les jardiniers, &'c. ont \tuis cognées,
La cognée du charron eft un outil fait
commue une hache, d'un morceau de fer
forgé à-peu-près comme une équerre; le
côté tranchant en eft large , plat & fore
affilé ; l'autre branche eft creufe & en
douille : on Pemmanche par cette douille
d'un morceau de bois loj:g d'environ deux
pies , plus gros du côté de la poignée qua
du coté qui entre dans la douille. Les char-
rons fe fervent de cette cognée pour char-
penter ôc ôter le fuperflu des genres ôc
des pièces de bois qu'ils ont à tailler.
Les mêmes artifans ont une féconde co-
gnée : c^eft un morceau de fer de la lon-
gueur de huit pouces, doii^ un des bouts
eft plat , large ôc tranchant ; l'autre coté
eft quatre ôc percé d''un gros œil fait en
cœur, dans lequel fe met un manche de
deux à trois pies de longueur. Cet outil
fert aux charrons pour fendre le bois.
La cognée des bûcherons ne diffère point
de celle-ci.
Les Cognées des charpentiers font de dif-
férentes façons : ils ont une cog ée à deux bi-
feaux , qui a une douille au bout pour rece-
voir îe manche; elle fcrt à dreflèr les bois 3,
ôc ne diffère pas de la première cofnée des
charrons : une cognée à deux bileaux , ôc qui-
n^a pas de douille pour recevoir le manche ,.
mais un œil ; elle fert à abattre les arbres &
à équarrir, ôc ne diffère pas de celle du.
bûcheron ou de la féconde du charron.
Les jardimers ont deux cognées, Vunc.
grande , l'autre petite ou à main.
La grande cognée Çtn à fendre le bois^
ôc à couper les racines ÔC les fouches des
aibres qu'on arrachç.
COG
La petite fer: au jardinier à couper à
la main de grolles branches , & à refaire
proprement, quoique monté à l'éclielle ,
les grandes plaies , lorfque la branche eft
(eparée du corps de Parbre.
Cognée , ( Ruban. ) eft un outil de
cuivre ou de fer, mais mieux de cuivre :
il a la forme d'un couteau qui ne fe plie
point j le dos en eft fort épais, pour lui
donner plus de poids; Tautre côté eft aigu,
m.ais fans être tranchant; il fert au lieu du
doigtiér pour frapper les ouvrages extrême-
ment forts, &: où le doigtiér feroit trop"
foible : l'ouvrier le tient en plein par fon
manche dans la main droite , &: frappe
avec chaque fois qu'il a paflé la trame.
COGNER, V. ad. n eft guère d'ufage
qu'au fimilier , ou dans les boutiques des ar-
tiftes. Il eft fynonyme à frapper. Ainiî les
chapeliers difent cogner un chapeau fur le bil-
lot, TpouT frapper le dejfus de la tête , afin que
la forme ea foit mieux marquée; façon qui
fe donne avant la teinture. V. Chapeau.
Les relieurs difent cogner les coins , pour
fr.îppcr un ou deux coups fur chaque coin
du caiton d'un livre après qu'il eft poli,
ahn que fi un de ces coins fe trouve re-
broufié , il foit remis en état.
COGNET, f. m. (^Fabrique de tabac.')
rôles de tabac faits en cônes, dont on fe
fert pour affermir & ferrer ceux qu'on met
en boutes &; futailles , de peur qu'ils ne fe
brifent dans le tranfport , & ne s'éventent
dans le féjour.
COGNEUX , f. m. ( Fond, en fable. )
forte de petit bâton dont les fondeurs en
fable fe fervent pour frapper le fable dont
ils forment les moules. Ils le fervent de cet
outil lorfque le maillet ne fauroit atteindre.
Voye^ Fondeur en sable.
COGNl , ( Gécgr. mod. ) grande ville
d'Alie en Turquie, dans la Caramanie.
Long. 52, ^o ; lat. 37, 56'.
COGNIER , f. m. ( Hifl. bot. ) plante
qui doit fe rapporter au genre appelle
coignajfier. Voye-^^ Coignassier. (/)
QOGUOlhou COGNIÇL, f m. (H"//?.
nat. Ichîhyl. ) colias ,, poiflon de mer qui
reftèmbleroit en tout au maquereau s'il
étoit aulfi gros. On falc ordinairement ce
poiflbn. C'eft à Marfeille qu'on lui a donné
k nom de coguoil ou cogmoL Willughby^
COH 437
hifl. pifc. V. AIaquereau, Poisson. (/)
COHABITATION, f. f. {Junfpr.) fe
prend en général pour la demeure commune
que quelqu'un a avec une autre perfonne.
C'eft en ce fens qu'il eft défendu aux clercs
de cohabiter avec les cerfomies du fe.e.
Décrétai, lib. III , tit. ij.
La cohabitât on ou demeure commune
entre le pcre &c les enfans ou entre autres
perfonnes , emporte dans certaines cou-
tumes une focicté tacite ; telles ibnt les
coutumes de Poitou , Troye & autres.
Le terme de cohabitation entre perionnes
conjointes par mariage , fignifie quelquefois
la demeure commune des conjoints : c'eft en
ce fens que l'ordonnance de 1 6 3 9 demande,
pour Thonneur ôc la validité du mariage ,
une cohabitation publique : le défaut de telle
cohabitation eft une marque de clandeftinitéj
au contraii e la cohabitation publique aflure la
validité du mariage , l'état des conjoints , ôc
celui des enf.:ns. Mais h. cohabitation feule
n'eft pas capable de faire préfumer le maria-
ge, à moins que les conjoints n'aient encore
d'autres preuves de pofiefïion d'états. Voy.
Hcnris, tome IF, liv. VI, qu:Jl. G; Duperier^
tome II, p. 4^4; Augeard, tome II, ch. xxviij.
On entend aulîî quelquefois par le terme
de cohabitation entre conjoints , la confom-
mation du mariage : il n'eft pas nécefifaire
qu'il y ait eu coh ibitation entre les conjoints
pour que la femm.e gagne fon douaire, finon
dans le^ coutumes qui portent que la femme
gagne (on douaire au coucher , comme
celle de Normandie. Quand on fépare les-
conjoints d'habitation, on n'entend pas feu-
lement qu'ils auroiU chacun leiu: demeure
{eparée,mais au ffi qu'ils feront féparés a /oro..
La cohabitation entre autres perfonnes-
que les conjoints par le mariage légitime ,
fe prend ordinairement pour le commerce
charnel qu'un homme a eu avec une fille
ou femme autre que (a femme légitime..
Comme on a rarement des preuves de la
cohabitation^ même lorlqu'une fille (è trouve
enceinte, & qu'elle déclare celui des faits
duquel elle l'cft, cette déclaration, jointe
aux preuves de firéquentation & de fcmilia-
rite , fufrifent pour obUger le père à payer
les frais de géfine &: dommages & intérêts
de la mère , s'il 7 a lieu de lui en adjuger,
& à fe charger de l'eii£int>
45S COH
Suivant Panciennc jurifprudence , dès
qu'il y avoir preuve de cohabitation, on
condamnoit le garçon à époufer la fille
qu'il avoit rendue enceinte , fînon à être
pendu : mais préfcntement cela ne s'ob-
Terve plus , du moins dans la plupart des
tribunaux. Voyei^ Mariage. {A)
1- COHEN , ( Hijî. facr. ) facrificateur.
Les Juifs fe fervent encore de ce mot,,
quoiqu'ils n'aient plus de temples. Leurs
tribus fe (ont confondues , & il n'y a plus
perfonne parmi eux qui le puifle dire de race
févitique fans des prétentions imaginaires.
Auiïi ceux d'entre eux qui aflurent la vérité
de leur généalogie , & allèguent des titres
confervés malgré les troubles des tranfrni-
grations & l'état de mifere 6c de difperfion
adtucUe de la nation , font-ils peu crus &
ne jouilTènt pour toute prééminence , que
d'un petit tribut fur les nouveaux-nés j pré-
,TOgative proportionnée à l'authenticité de
la nobleflè de leur origine. On leur accorde
encore de lire les premiers le Pentateuque
dans les fynagogues, & de bénir le peuple
dans les fêtes folemnelles.
COHÉRENCE , voye;^ Cohésion.
COHÉRITIERS, f. m. ^\,{Jurifpr.)
font pluficurs héritiers d'un défunt , qui
viennent conjointement à fa fuccefïion. Il
y a des cohéritiers qui fuccedent également
à tous les biens du défunt ; il y en a d'autres
qui ne fuccedent qu'à certains biens , com-
me aux meubles & acquêts, ou aux propres
d'une certaine ligne, ou aux biens fitués
dans certaines coutumes. Ceux qui fucce-
dent aux mêmes biens font cohéritiers entre
eux ; ils ne laiflent pas aufTi , par rapport
, à la contribution aux dettes , d'être conlidé-
rés comme cohéritiers de ceux qui prennent
d'autres biens auxquels ils ne fuccedent pas.
Vûye[ci~aprh Contribution, Dette,
HÉRITIER , Succession. (A)
' COHÉSION, f. f. en termes de Phyfiq.
cft la force par laquelle les particules pri-
mitives qui conftituent tous les corps font
attachées les unes aux autres , pour former
les parties fenfibles de ces corps, S>c par
laquelle au 111 ces parties fenfibles font unies
& compofent le corps entier. Voye^^ Par-
ticules , Corps.
De tout temps la caufe de la cohéjîon a
embarraflë les philofophes dans tous les
COH
lyftemes de phyfique. La matière doit être
fuppofée originairement compofée de par-
ticules ou atomes indivifîbles, c'eft- à-dire,
qu'aucune force ne peut divifer. Voye:^
Matière & Dureté. Quant à la manière
dont ces particules fe joignent les unes aux
autres, & forment de petits fyftêmes ou
allemblages particuliers , & aux caufes qui
les font perlévérer dans leur état d'union ,
c'eft une difficulté des plus embarralTantes
qu'ait la phylique, &: c'en eft en même
temps une des plus importantes.
Une des opinions les plus anciennes eft
celle qui a été foutenuc par M. Jacques
Bernoulli , de gravitate œtheris : cet auteur
rapporte la cohéjîon des parties de la matière
à la preffion uniforme de notre atmofpherc ;
ôc il appuie fa théorie fur l'expérience des
marbres polis qui tiennent fi fortement l'un
à l'autre dans l'air libre , & qui font ,
dit-il , aifément féparés dans le vuide. Le
fait eft faux. x?
Mais quand cette théorie feroit (àtisfai-
uinte pour expliquer la cohéjîon des parties
de grande étendue, elle n'eft d'aucun fe-
cours dans la cohéjîon des atomes ou par-
ticules des corps.
M. Newton parle ainfi fur la cohéjîon :
" Les parties de tous les corps durs homo-
» gènes qui fe touchent pleinement , tien-
» nent fortement enfemble. Pour expliquer
" la caufe de cette cohéjîon , quelques - uns
"Ont inventé des atomes crochus j mais
" c'eft fuppofer ce qui eft en queftion : d'au-
» très nous difent que les particules des
" corps font jointes enfemble par le repos ,
» c'eft -à -dire par une quaHré occulte, ou
" plutôt par un pur néants & d'autres,
» qu'elles font jointes enfemble par des
" mouvemens confpirans , c'eft-à-dire , par
» un repos relatif entr'eux. Pour moi j'aime ^
» mieux conclure de la cohéjîon des corps ,
» que les particules s'attirent mutuellement
» par une force qui dans le contact immé-
» diat eft extrêmement puiflante , qui à de
» petites diftances eft encore fenfible , mais
" qui à de fort grandes diftances ne fe fait
» plus appercevoir. Voye:^ Attraction.
>i Or , fi les corps compofés font fi durs
» que l'expérience nous le fait voir à l'égard
» de quelques-uns , ôc que cependant ils
» aient beaucoup de pores ôc foient corn-
C O H
3, pofés de parties qui foient fimplementpla-
,, cées Tune auprès de l'autre -, les particules
„ fimples qui font fans pores , Se qui n ont
j, jamais été divifées, doivent être bcau-
5, coup plus dures : car ces fortes de parties
„ dures entaflees enfemble , ne peuvent
j, guère fe toucher que par très-peu de pointsj
,, 6c parconféquentiifaut beaucoup moins
5, de force pour les féparer , que pour rom-
,, pre une particule folide dont les parties fe
,, touchent dans tout 1 efpacc qui eft en-
„ tr'elles, fans qu'il y ait ni pores niinterf-
,, ticcsqui affoibliflent leur cohéfion. Mais
„ comment des particules d'une iî grande
j, dureté qui font leulement entaflees enlem-
y, ble, fans fe toucher que par un très-petit
,, nombre de points , peuvent-elles tenir en-
,, femble & li fortement qu'elles fout, fans
,, l'adion d'une caufe^ qui fallè qu'elles
„ foient attirées ou preflées l'une vers l'au-
„ tre? C'eft ce qui cfttrès - difficile à com-
55 prendre.
j. Les plus petites particules de matière
„ peuvent être unies enfemble par les plus
_,, fortes attrapions , & compolcr de plus
,, grofles particules dont la vertu attradtivc
j, Ibitmouis forte; & pluiieurs de ces der-
,, nieres peuvent tenir enfemble & composer
,, des particules encore plusgroiles, dont la
5, vertu attradive foit encore moins forte ,
,, & ainfi de fuite , iufqu'à ce que la pro-
5, grelTion finiflè par les plus groflesparticu-
,, les , d'où dépendent les opérations chymi-
j, ques , les couleurs des corps naturels, &
5 5 qui jointes enlemble composent des corps
5, d'une grandeur feniible. /^ojeij^DuRETï,
5, Fluidité.,,
Les différens degrés de cohéfion conlli-
tucnt les différentes formes S>c propriétés des
corps. Suivant l'illuftrc auteur que nous ve-
nons de citer , les particules des fluides qui
n^ontque peu de cohéfion, &c qui font aflez
petites pour être fui ceptibles des agitations
qui entretiennent la fluidité , font très-aifé-
ment ieparées & réduites en vapeur ; elles
forment ce que les chymiftes appellent corps
volatils ; elles fe raréfient par la moindre cha-
leur , & (e condenfent de même par un froid
modéré. Fbyc:(_ Volatil.
Les corps dont les particules font plus
grotles,ou font cohérentes entre elles avec
une attri(^on plus forte 3 font moins fufcep-
.„ , . . c o H 439
tibles d'agitation , & ne fauroient être fépa-
rés les uns des autres que par un degré beau-
coup plus confidérable de chaleur; quel-
ques-uns d'eux ne fauroient même fe fépa-
rer fans fermentation ; & ce font ceux-là
que les chymiftes appellent des corps fixes.
Chambers.
M. Muflchenbroek, dans (onejfai dephy-
fiujue y nous a donné plufieurs recherches iur
la cohé/ïonou adhérence des corps. En voici
la fubflance ; c'eft M. MufTchenbroek qui
parle.
Les lurfaces de tous les grands corps font
fort raboteufes , ce qui eft caufe qu'ils ne le
touchent que dans un petit nombre de
points lorfqu'ils font pofcs les uns for les au-
tres 5 & qu'ils fe trouvent féparés en d'autres
endroits où l'attraAion cft par confcquent
beaucoup moindre. Moins les corps font
raboteux , plus ils fe touchent; auiïi volr-cn
que ceux qui ontunefurface fort unie s'atti-
rent davantage , & tiennent plus fortement
les uns aux autres que ceux qui font raboteur- .
Mais pour rendre les furfaccs encore plus
unies , il faut les enduire de quelque liquide
dont les parties foient fort fines , & qui puif-
fent boucher les pores.
La chymie nous apprend que les parties
terreftres des plantes tiennent enfemble par
le moyen d'une huile cpaille, qui n'en peut
être fcparée , foit qu'on les faflè fecher on
bouillir dans l'eau , mais feulement lorfqu'on
les brûle au grand air. En effet elles fe con-
verriflent en cendres , qui n'ont plus aucune
iiaifonauilî-rôt que cette huile eft conCu -
mée ; fi l'on incorpore ces cendres avec de
l'huile de de l'eau , les parties fe lieront de
s'uniront enfem.ble. Les os des animaux
qu'on fait bouillir long-temps avec de l'e^ii
dans le pot de l'invention de M. Papiii
(i'oye;{_DiGESTOiPvE) , deviennent fort fra-
giles , & fo caftent aufïitot qu'on vient à les
frotter ; mais on ne les plonge pas plutôt àiw.s
Phuile , qu'ils redeviennent durs 5 & ne fe
caficnt pas facilement.
J'ai pris différens corps , continue M.
Muflchenbroek, dont le diamètre etojt de
I !î pouce du Rhin ; les furfacesaveclefqucl-
les ils fe touchoient , é:oient prefque parfai-
tement plates & unies : je les fis chauffer da n s
de l'eau bouillante ; ôc après avoir enduit
ieu#s furfaces de fuif de choiidelle^ je les mis
440 C O H
d'abord les uns furies autres; je les fis en fuite
refroidir, après quoi je trouvai que leur
adhérence s'étoit faite en même temps de
la manière que voici.
tb
Lescorpsde verre, 1 3 o
decuivre jaune, 150
de cuivre rouge, 200
3 oc
100
tfe
debifmuth, 100
demarcaiTited'or, 1 30
de plomb , Z75
de marbre blanc ,225"
de marbre noir , 230
d'ivoire , ig8
Q argent,
d'acier trempé ,
de fer flexible ,
d'étain ,
La chaleur de l'eau bouillante n'eft pas
confidérable ; ce qui fiit que les parties foli-
des peuvent à peine être écartées les unes
des autres , & que les pores ne s^ouvrent
que peu; de forte que la graiflè ne fauroit
y pénétrer profondément , ni faire par con-
féquent la fbndrion d'un aimant qui agit
avec force : ain/i afin que la graille pût
alors mieux remplir les pores , on rendit ces
corps beaucoup plus chauds en les frottant
de graille dansle temps qu'elle étoit comme
bouillante ; & après qu'ils furent refroidis ,
ils s^ittirerent réciproquement avec beau-
coup plus de force , comme on le peut voir
par ce qui fuit :
de verre , 5 00
decuivre jaune, 800
de marbre blanc, 600
tfe
de fer, 950
de cuivre rouge, Sjo
d'argent, 250
On met quelquefois entre deux corps
folides un enduit à demi liquide , qui fait
que ces corps tiennent enfemble dans la
fuite avec beaucoup de force , & qu'ils
femblent ne former qu'un feul corps folide ;
cela fe remarque lorfqu'on détrempe de la
chaux avec du fable de de l'eau.
Il arrive quelquefois que deux liquides
font compofés de parties qui s'attirent mu-
tuellement avec beaucoup de force , de forte
qu'ils fe changent en un corps folide après
leur mélange. C'eft ainfi que l'huile de tar-
tre par défaillance incorporée avec l'huile
de vitriol , fe convertit en un corps folide
auquel on donne le nom de tartre vitriole.
Le froid durcit certains corps dont les
parties étoient auparavant moUafles : le feu
produit auffi le même effet fur d'autres corps.
Le froid réduit en maffe folide tous
les métaux , les demi-métaux , les réfines
leiieftres & végétales , dé même que le
C O H
verre , après que ces corps ont été fondus
par la chaleur.
L'acier rougi au feu Se plongé enfuira
fubitement dans l'eau froide , devient aufTi-
tôt dur.
Le feu durcit encore d'autres corps , par-
mi lefquels on peut compter la terre
glaife mollalTè, que le feu rend auffi dure
qu'une pierre, tant à caufe que l'eau s'éva-
porc , que parce que le feu fubtilife en même
temps toutes les parties terreftres , ôc qu^il
fait fondre les fels , lefquels pénètrent enfuite-
& s'infinuent dans ces parties; ce qui fait
qu'elles s'attirent mutuellem.ent avec force ,
parce qu'elles fe touchent en^îlufieurs points
de leurs furfaces , & doivent former par con-
féquent un corps fort folide.
Tout celaeli tiré de M. Muflchenbroek
effhi dephyfiq. art. 655 ùfuiv. Nous n'avons
fait que l'abréger ; ceux qui voudront recou-
rir à l'ouvrage même de ce grand phyficien, -
y trouveront un plus grand détail. ( O)
Cohésion , ( Méd.) Quelle que foit la
caufe de la force plusou moins coniidérable,
par laquelle deux parties fluides ou folides fe-
touchent & adhèrent, la médecine doit con-
fidérer attentivement cet effet dans les fluides
& les folides du corps humain. '
Nos fluides peuvent être viciés à cet égard
de différentes manières ; & en général leur
cohéjion peut être trop forte ou trop foible.
L'union trop forte ou trop tenace de leurs
molécules , empêche qu'il ne fe fépare de
petites particules des grandes : production
fi néceflàire pour l'intégrité de la vie ! Leur
divifion trop facile ne nuit pas moins en
ce qu'elle eft un obftaclc à la eonftance de
la fanté. Tous les médecins favent que cette
ténacité & cette difiblution des humeurs
dérruifant également leur cohéjion naturelle,
font la fource d'une infiwité de maladies
particulières.
Les folides peuvent pécher pareillement
en manque ou en excès de cohéfion ; car
la cohéfion trop foible ou trop forte , foit
desfimples fibres folides, foit des vaifleaux
ou des vifceres qui en font formés , donnent
naiflànce à une infinité de défbrdres, que
le» jnéthodiques nommoient très-bien ma/^-^
dies de relâchement ÔC de rejferrement. Voici
comme on doit concevoir ces vérités.
Dec[uelquc caufe que procède la cohéfion
mutuelle
C O H
mutuelle de tous les vaiflèaux , il efl: cer-
tain qu'ils peuvent fe prêter à Timpulfion
du fluide , & en être diftendus ; mais ils
ne le peuvent que jufqu'à un certain point
fans accident. Il eft d'ailleurs certain que
cette cohéfion ed différente dans les divers
âges de la vie : de plus » on ne peut s'empê-
cher d'imaginer difFérens degrés de cohéfion
dans les ditTérens folides. Par exemple , il
femble qu'il y a bien moins de cohéfion
dans la pulpe molle du nerf auditif, que
dans le fiiiceau nerveux qui conftitue le
dur tendon d'Achille : ajoutons aullî , qu'il
faut que la cohéfion des folides foit capable
de fupporter non feulement le mouvement
modelé des fluides dans les vaiflèaux , tel
qu'il a lieu en bonne fanté , mais encore la
vélocité de leur circulation dans l'état mala-
dif, fans que cette cohéfion foit détruite ; &
c'eft effedivement ce qui arrive d'ordinaire ;
car il efl communément befbin de longs &c
de violens efforts pour produire la rupture.
La débilité des parties iblides eft donc
excelTive , lorfqu'elles ne peuvent , fans que
leur cohéfion celfe , foutenir l'effort des
adtions d'un corps en fanté , Se même d'un
mouvement de circulation plus impétueux
que de coutume. On reconnoît que le
relâchement eft trop grand , quand les fibres
iàns fe rompre s'allongent au moindre effort
du mouvement vital. De cette facile dila-
tation des fibres & des vaiflèaux , naiffent
la ftagnation des liqueurs , La crudité des
humeurs, la corruption fpontanée, l'ina-
nition , la cachexie, h cacochimie , & plu-
fieurs autres maux qu'on regarde mal à
propos comme des maladies de tempéra-
ment.
Si on laifïè trop augmenter l'affoiblifle-
ment , pour lors il eft encore à craindre que
Pimpétuofité violente du liquide , pouffé
continuellement par la force du cœur ,
n'occafione la rupture. On voit plufieurs
exemples de ce fâcheux accident , lorfque
de jeunes gens délicats étant dans l'âge où
finit leur croiflance , fe rompent unvaiflèau
dans le poumon pour avoir crié , chanté , ou
couru. Puis donc que la cohéfion trop foible
des folides caufe de fi grands défordres , il
£iut y obvier par des remèdes qui procurent
une cohéfix)n^\\is forte , par des alimens fubf-
tantiels , les acides aufteres, entre autres le
TomeVlIl
C O H 44c
ferdiflous dans des acides doux ; Pexercicc,
les fTiâ;ions , &c.
Mais s'il y a des maladies qui ont pour
principe la foibleflè de la cohéfion dans les
lolides , il y en a beaucoup aufïï qui procè-
dent néceflairement de l'excès de cette coAe-
fion : de-là le manque des fecrétions , la roi-
deur, Pimmobihté, la féchereflè , la coali-
tion des vaiflèaux avec leurs liquides, les
concrétions de tour genre , l'offincation , la
vieilielTe , &c. les remèdes même contre ces
maux , ne font prefque que des palliatifs. Il
eft cependant néceflàire de les mettre en
ufage , de diminuer la violence , la denfité,
la prefTion du fang ; d'employer les humec-
tans , les émolliens , les délayans de toute
efpece , en boiflbns , en vapeurs , en fomen-
tations , en bains , ùc.
On comprend maintenant les divers effets
qui réfultent tant de la force que de la foi-
bleflè de la cohéfion. On conçoit en confé-
quence la nature & la cure d'un grand nom-
bre de maladies , l'utiUté qu'on peut retirer
de la dodtrine du reflèrrement & du relâ-
chement des folides \ & cette matière fi im-
portante en pratique , fi curieufe en théorie ,
étoit inconnue avant Boerhaave , &: n'a été
développée que par ce grand homme. {M.
le chevalier DE jAlf COURT.)
COHI , f. m. {Comm) mefure de grains,
en ufage à Siam. Un cohi pefe environ jooo
Evres. Voy. les Diclion. de Trév. & du Corn.
COHOB ATION , f. f. (Chymie.) La co-^
hobadon eft une opération chymique , qui
confifte à reporter les produits volatils d'une
diftillation , ou fur Iç réfidudont ils ont été
féparés , ou fur de la nouvelle matière fem-
blable à ceUe qui les a fournis , & à diftiller
de nouveau.
'L^iCohobatione.Çi une efpece de diftillation,
i^oye:^ Distillation. (3)
COHORT AL , f m. ( Hijl. anc. ) c'eft
le nom qu'on donnoit aux lèrviteurs du pré-
fet du prétoire.
^ COHORTE , f. f. ( Hifi. anc) c'étoit ,
chez les Romains , un corps d'infanterie de
la dixième partie d'une légion. Il contenoic
trois manipules , &c chaque manipule deux
centuries ; d'où l'on voit que chaque légion
itoit de foixante centuries , de trente mani-
pules ôc de dix cohortes.
Il y avoir dans la cohorte les quatre fortes
Kkk
44*
C O H
de fantaffins des armées romaines ; les velites,
les haftati , \ts principes & les triarir. Quand
elle croit complète , les velites y étoient au
nombre de cent vingt ; les hajîati au même
nombre , les principe: pareillement , & les
îriarii au nombre de ioixante , ce qui fait
quatre cents vingt foldats. Au rcfte , ce nom-
bre augmentoit ou diminuoit , félon que la
légion étoit plus ou moins forte.
La première cohorte étoit la plusconfidé-
rée ; elle étoit compofée des principaux cen-
turions & des meilleurs foldats. Dans un
ordre de bataille , elie avoir la droite de la
première ligne , comme les grenadiers de
nos régimcns i les autres fuivoient dans l'or-
dre naturel : enforce que la troifieme étoit
au centre de la première ligne de la légion ;
la cinquième à la gauche , la féconde entre
la première & la troifieme , la quatrième
entre la troilieme & la cinquième -, les cinq
autres cohortes formoient la féconde ligne
dans leur ordre naturel. On croit que Ma-
rius fut le premier qui diviia la légion en co-
hortes. Voye^hiGio-a. La première coAcr/e
devint aufn dans la fuite la plus nombreufe ;
elle fut quelquefois de i loy hommes, tandis
que les autres n étoient que de $$$.
Cohortes auxiliaire.'; ; c'étoient cel'es qu'en-
voyoient les alliés \ elles portoient le nom de
leur nation ou de leur chef ; elles écoient
aulTi diftinguées par première, deuxième,
troifieme , quatrième , ùc.
Cohorte dite equitata ; elle étoit compofée
d'infanterie & de cavalerie; elle étoit de
mille hommes, fept cents fbixantefanrafïins,
deux cents qu?.rante cavaliers. On l'appelîoit
aulTi cohorte milliaire.
Cohorte dite peditata ; elle n'étoit que de
fantafïins.
Cohorte prétorienne ; troupe de foldats
choiiîs qui fervoit de garde au préteur ou au
général. Elle étoit compofée,re!onquelques-
uiis , de fantafïins & de cavaliers , & félon
d'autres , de fantafïins feulement. Elle flir
jnftituée par Publius Poilrluimius. diélareur.
P. Scip-on Ppara dans la fuite de fon armée
les meiileurestroupes pour la former; il aug-
menta fa paie , & Tcxempta de tous les tra-
vaux milirfires. Augufle forma, fous le nom
de cohorte préîcrieune y un corps de neuf co-
Tiortjs plus fortes du double que celles de la
légion 3 enforte que les prétoriennes furent
C O H
de neuf mille hommes : d'autres difenr de
dix mille , divifés en dix cohortes. Septime
îévere augmenta encore ce corps. Il étoit
uniquement deftiné à la garde des empe-
reurs 8c de leur m.ufon , de commandé par
le préfet du prétoire , qui avoit (ôus lui des
tribuns & des centurions. Il étoit prefque
tout infanterie ; d'abord on n'y admit que
des Romains ; on y introduifît avec le temps
des étrangers , des Germains , des Batavcs ,
des Thraces , 6'c. Il avoit la paie double , ôc
fe tenoit dans un camp retranché proche de
Rome ; il avoit des lignes militaires , &c des
boucliers parricuHers. Il excita dans la fuite
beaucoup de troubles. Conflantin décruifit
fon camp & le cafla. Les prétoriens s'étoient
rendus redoutables à pluiieurs de fès prédé-
cefîeurs ; ils éHfoient ou dépofbient les em-
pereurs de leur propre autorité ; ils forçoient
queîquefoisle fénac àreconno^tre celui qu'ils
avoient clioili. Dans ces révolutions , ceux
qui prétendoient à l'empire étoient obligés
de s'attacher cette milice redoutable qui dif^
pofoit du diadème.
Cohorte dite togata ; c'étoit celle qui fai-
foit la garde des rues à Rome ; c'étoit la
milice de la police ; elie marchoit avec la
toge, n'ayant d'armes que la lance & l'épée.
Cthortes dites vigilum ; elles furent infli-
tuées par Augufle ; elles fervoient dans les
incendies. Il y en avoit fept, une pour deux
régions de la ville; chacune avoit à fa tête
un tribun , 8c rouies étoient commandées
par un officier appelle le. préfet des vigilum.
Elles étoient diftribuées en quatorze corps de
gardes. Il y a des auteurs qui font monter le
nomibre de ces cohortes jufqu'à treftte-un ;
mais il y a lieu de croire qu'ils fe trompent,
& qu'ils prennent pour des cohortes ce qui
n'en étoit que des divifîons. Ces cohortes
n'étoient point cenfées troupes ; elles étoient
prefque entièrement d'affranchis , qcfon ap-
pelloit par déûiion fparteoli.
Cohortes dites urbanœ ; on appelloit ainfî
Cîx mille hommes partagés en quatreco/zorrej,
chacune de quinze cents. Augufle les infli-
tua pour la defcnfe de la ville : elles avoient
des cafernes. On les nommoir encore milites
urhanitiani , troupes de ville. Elles étoient
commandées par le préteur :i'^^t\\étutelaris ;
ce qui leur fit donner aufTi quelquefois le
nom de cohortes j^rétoricnnes.
C O î
GOHUAGE, r. m. {Jurifpr.) eft ua
droit qui fe levé en certains lieux fur les mar-
chandifes que l'on apporte au marché. Ce
terme vient de celui de cohue , qui ancienne-
ment iîgnifioit ajfemblée ou marché. Suivant
un arrêt de la Saint-Michel , de Pan 1278,
les templiers en Normandie prétendoient
que leurs hommes ou fujets dévoient être
exempts du paiement de cohuage ; par leur
charte , il fut accordé que s'ils vouloient
entrer au marché en cohue , ils paieroient le
cohuage. Ce droit eft différent de celui d^en-
trée & du droit de coutume , comme il pa-
roît par un ancien aveu rendu en 1473 , au
comte d'Anjou par le fieur de laTrimouille,
où il cft dit : que Comme de beurre venant de
Bretagne , doit deux deniers d'entrée , maille
de coutume , 6' un denier de cohuage ; que fi
elle n'ejî toute vendue à iceluijour , & il arrive
que le marchand la rapporte à huitaine , il ne
payera que le cohuage. Glojf. de Lauriere ,
au mot cohue ge. {A)
COHUE ,' f. f. ( Jurifpr. ) en quelques
lieux iignifioic zncïtrm&TD£ni ajfemblée ^halle,
ou marché. Ce mot paroît venir du latin co-
hœrcre. Dans les ordonnances de l'échiquier
de Normandie , de l'an 1585, cohue lignifie
Y ajfemblée des officiers de juftice qui fe fait
en l'auditpire ou autre lieu accoutumé, pour
juger les caufes & procès. Il eft auffi parlé de
la halle & cohue de Quintin en Bretagne ,
en laquelle fe font les bannies & contrats ,
livre III du recueil des arrêts de Bretagne.
Koyc:^^ ci-devant Cohuage. (A)
COHYNE , f. m. ( HiJÏ. nat. bot.) arbre
de l'Amérique , qui a la feuille du laurier &
le fruit eUiptique tk. delagrolleur du melon.
Les Indiens font des vailleaux de ion écorce.
On attribue à ia pulpe quelque propriété
médicinale. Le cehyno eft aufïl une plante
exotique mal connue.
QOl , faire coi j terme de rivière ; c'eft
s'arrêter un moment. Il y a des pas difficiles
où les chevaux remontent difficilement un
bateau, un coche ; alors on dit c^n ils font coi.
COIANG , f. m. (Commerce.) poids &c
mefure d'ufage à Cambaye, aux Indes orien-
tales : c'eft les quatre cinquièmes d'un lart.
Voye^^hAKT. Diclion. de Comm.
COIAUX , f. m. pi. ( Charp.) pièces de
bois quarrées d'un bout &: délardées de l'au-
tre, qui fe placent au pié des chevrons d'un
COI 44,
omble, pour racheter la faillie de l'enta-
blement.
COIER, f. m. {Charp.) pièce de bois qui
va du poinçon ou du gouflet à l'arbalétrier.
V. Arbalétrier , Poinçon & Gousset.
COIGNAGES , f. m. pi. nom que Ton
donne dans les groffes forges à certaines
portions de la maçonnerie du fourneau. V.
Grosses forges.
^COIGNIERS, f. m, pi. c'eft ainfi qu'on
appelle dans les fours à verrerie , les quatre
coins des fieges du dedans du four , corref.
pondans aux lunettes Aqs arches à pots.
COIMBRE, {Gécg.mod.) grande vilîc
du royaume de Portugal , capitale de la pro-
vince de Beira , fur le Mondcgo , fameufe
par fon univerfité. Long. g, 40;lat.^o, lo,
COIN , f. m. ( Méchan. ) eft la dernière
des cinq puiiTances ou machines fimples. V.
Puissances mechaniques. La forme du
coin eft celle d'un prifme triangulaire \ on
en voit la forme dans la^^. 59 de la méch.
L'angle que forment en D la face ^ G du.
coin &C celle qui lui eft oppofée , s'appelle la
pointe ouïe tranchant du coin : le plan C s'ap-
pelle la bafe ou la tête ; ôc la hauteur , qu'on
appelle auffi axe du coin , eft la diftance de
l'angle D au plan C; ^ Z> eft la longueur.
Les anciens auteurs font partagés fur le
principe de la force du coin. Ariftote le re-
garde comme deux leviers de la première
efpecc inclinés l'un à l'autre, & agilîant
dans des direétions oppofées.
Guido-Ubaldus , Merfenne , veulent que
ce foit un levier de la féconde efpece : mais
d'autres prétendent que le coin ne fauroic
en aucune manière fe réduire au levier : d'au-
tres rapportent l'adion du coin au plan in-
cliné , & il y a des auteurs qui n'attribuent
prefque aucune force au coin, ôc croient qu'il
n'agit guère que proportionnellement à la
force appliquée fur le mailler qui le poufle.
On verra, par les propofitions fuivantes, que
ces derniers auteurs fe trompent j ôc à
l'égard de l'analogie prétendue du coin
avec le plan incliné , ou le levier , ou la
vis, &c. cette analogie n'eft capable que d'in-
duire en erreur fur fes propriétés ; ôc la meil-
leure manière d'en déterminer les effets , eft
de les examiner d'une manière directe, fans
rapporter le coin à aucune des autres machi-
nes finiples.
Kkk z
444 COI
La théorie du coin eft contenue dans cette
propcficion : " la puiflàncc appliquée au co//z
y, dans la direcVicn C D {planche de la mè-
^, chanique,fig. 53), perpendiculaire à AB,
>, doit être à la réfiftance dans la raifon de
j, ABaBD y afin qu il y ait équilibre : „
ou bien encore : " ii la force appliquée fur
3, la tête du coin eft à la réiiftance à fur-
3, monter comme répailfeur du coin eft à
,j fa longueur , la force fera égale à la ré-
3, iiftance , & la vaincra pour peu qu on
5, l'augmente. „ Cela eft très-aifé à prou-
ver par le raifonnement fuivant ; imaginons
la force fuivant CD décompofée en deux
autres perpendiculaires aux cotés DA , DB
du coin , & qui doivent être égales à la
réfiftance du bois , puifque c'eft par ces
deux forces que la puilTance qui agit fuivant
CD tend à écarter les cotés du bois. Or for-
mant un parallélogramme fur ces trois for-
ces , on verra qu'il eft divifé par la ligne CD
en deux triangles ifoceles femblables à BAD;
d'où il s'enfuit que la diagonale de ce paral-
lélogramme qui repréfente la force fuivant
CD, fera au coté du même parallélo-
gramme qui repréfente la force perpendi-
culaire à ^Z> ou la réfiftance comme AB
eft à 51?.
Donc la force fera plus petite ou pkis
grande , ou égale à la réfiftance , félon que
Z4 B fera plus petite ou égale y ou plus
grande que A B.
Au rerte , nous fuppofons ici que les côtés
BD 3 AD du coin s'appliquent exadement
C 0 ï
aux côtés de la fente ; s'ils ne s'y appliquoienr
pas, il faudroit décompofer la force fuivant
CD en deux autres perpendiculaires aux
côtés de la fente , &c le rapport de la diago-
nale aux cotés indiqucroit le rapport de la
force fuivant CD à la réfiftance. Voyez la
méchaniqiie de Varignon.
On rapporte au coin tous les inftrumens à
pointe 6i. à tranchant, comme couteaux,
haches , épées , poinçons , ùc. En effet , tous
ces inftrumens ont au moins deux furfaces
inclinées l'une à l'autre, & qui forment tou-
jours un angle plus ou moins aigu entre elles.
De plus , comme c^eft l'angle qui eft la par-
tie eflentielle du coin , il n'eft pas nécelTaire
qu''il foit formé par le concours de deux plans
iculs. Les clous qui ont quatre faces qui
aboutiflent à une même pointe , les épin-
gles , les aiguilles , dont la furface peut être
regardée comme un aflemblage de plans in-
finiment petits qui fe réuni lient à un angle
commun , font auffi l'office du coin^ ôc
doi vent être confidérés comme tels. Enfin,
parmi ces fortes d'inftrumens qui agifTent
comme des ceins ,{1 y en a aufïi qui agiflent
comime des leviers. Tels font les couteaux,
qui font à la fois des coins ôc des leviers de
la première efpece , dont le point d'appui
eft entre la réiiftance &c la puiflance. Noll.
lecî.phyf, (O) {a)
Coin {le) la tête de roRc cii l'em-
BOLON ; c'étoit , félon M. le chevalier de
Folard, une certaine difpofition de troupes
dont les anciens fe fervoientdansles armées.
(^) Coin , (Art milit.) Les Grecs avoient deux fortes de crinsi l'un dont on fiifoit ufige dans la
cavalerie, & l'autre dans Pinfantcrie. Les Scythes & les Thraces rangeoienc leurs efcadrons en forme
àe coi.'t. Les Macédoniens fuivoient aufîi la même méthode : ils la tenoient de Philippe, qui paffe
pour en être l'inventeur.
Le coin étoic proprement la moitié du lofange C Voy. ce mot & la^^. lo de nos pi. milit. taHtque^
des Créa dans lefuppl. des pi. ) & formoit une efpece de triangle. On cbfervoit , en le formant , la
même proportion que dans le lofange ; il n'y a voit qu'un feul cavalier .i la tête , trois au premier rang,
cinq au fuivant, c^r. ainfi fucceflîvemeni jufqu'au dernier. A cette difpolition, on en oppofcit une
aBt;e qu'on appellcit la tennille^ parce que fa figure reflemble à la lettre/^ relie fe formoit d'un corps
de foldais bien feirés, qui recevoient le coin , & l'enfermoient de deux côtés.
Aguthias rapporte que , dans la bataille du Cafilin , toute l'armée des francs étoit ordonnée ert
manière de coin. tl!e formoit , dit-il , une mafle épaifTe , condenft'e , toute cosverte de boucliers ,
& qui diminuant infenfiblement depuis fa ba(e , ne préfentoit plus enfin, par ù partie antérieure,
qu'un front afTez étroit. Ses ailes qui s'allongeoient en arrière , comme deux jambes , étoient coinpo-
iées de files étroites, unies & ferrées dans toute leur profondeur; & s'écartant peu à peu l'unede l'au-
tre , finilToienr par lailler entr'elles un fort long intervalle ; de forte qu'on y voyait à découvert les
épaules oppofées des foidats i car ceux des deux ailes fe tournoient mutuellement le dos en combat-
tant ; parce que , n'ayant point d'armure qui les couvrît dans cette partie , elle fe iiouvoit <û
quelque façon défendue par leux double oppolùion. (^^
COI
Quelques auteurs prétendent que l'embo-
lon étoit un arrangement difféient du coin,
cuneus , ou de la tête de porc , caputporci-
num : mais M. de Folard , comme dit un
iournalifte , démontre que perfonne de ceux
qui ont parlé de Tembolon , du cuneus &c de
la tête de porc, n'a fu ce que c'étoit ; & il
fait voir allez probablement que ces diver-
fes ordonnances dont on a dit tant de mer-
veilles , n'étoient autres que la colonne. Bi-
èlioth. raifon. torrn VI. Voyei^ Colonne.
Vegece définit le coin une certaine difpo-
fîtion de foldats qui fe terminoit en pointe
par le front , & qui s'élarglifoit à la baie ou
à la queue. Son ufage étoit , dit cet auteur ,
de romipre la ligne des ennemis , en faifant
qu'un grand nombre d'hommes lançaflerr
leurs traits vers un même endroit. Il dit aufli
que les ioldats appelloient cette difpofition
de troupes tête, de porc , caputporcinum. Sui-
vant cette définition le coin n'étoit qu'un
triangle ; m.ais M. de Folard prétend qu'il
n'en avoit pas la figure , & qu'on donnoit
ce nom à un corps de troupes de beaucoup
de profondeur & de peu de front, c'ef t-à-dire
à des troupes rangées en colonne. Il prouve
aufïi que chez les anciens le terme de cuneus
ne fignifie pas toujours une figure triangu-
laire , mais une cohorte , cohors. Voye^^ Co-
horte.
" Tacite, mœurs des Germ. dit que les Al-
lemands s'arrangent enferme de coin : mais
on voit bien que par ce terme (dit M. de
Folard; il ent nd une cohorte , parce qu^il
l'oppofe à turma , c'eft-à-dire, à l'efcadron.
J'ai remarqué , continue le commentateur
de Polybe , que les Grecs qui ont écrit des
guerres des Romains, fe fontfervis du terme
à'imbclon ; lorfque les latins ont employé
celui de cchcrs dans le détail des mêmes
opérations. Tite-Live qui a copié Pclybe
prelque par-tout , a pris (ouveiit l'embolon
pour un triangle , lorfque por ce mot Thii-
torien grec entendoit cohorte. "
Elien, dans fcn /ivre de la d/fcipli ne mili-
taire des Grecs , prétend , ainiî que Vegece,
que le cuin étoit un triangle j M. de Folard
infirmée fon tém.oignage de cette manière :
« fi Frontin , dit cet auteur , qui étoit un la-
vant homme de guerre , me diloit que le
coin étoit un triangle , je le croirois plutôt
qu Elien, Vegece éc tant d'autres, il ne faut
C O I 44.T
pas douter que le terme de cuneus n'ait trom-
pé ces auteurs. Ehen ne dit-il pas qu'Epa-
minondas avoit comibattu en ordre trian-
gulaire à Leudres ; ce qui eft manifcfte-
ment faux. Je parierois qu'Elien n'avoit ja-
mais lervi ; & s'il étoit vrai qu'il eût fait la
guerre , il en railbnnoit très-mal. »»
" Je ne laiflèrai pas , dit M. de Folard, la
:ête de porc , que je ne la voie coupée ôc
féparée de fon corps. Ammien Marcellin ,
qui eft bien de ce temps-là , & qui en parle,
me fournira le couteau. Bien loin de dire que
ce fut un triangle , il fait voir au contraire
que c'eft un corps fur beaucoup de hauteur
&: peu de front. Dans la guerre de l'empe-
reur Conftantius contre les Lim.igsntes , qui
étoient une race d'anciens efclaves qui
avoient chaflé leurs maîtres ( les Sarmates )
de leur pays 5 ces efclaves ayant été attaqués
& enveloppés par Parm.ée romaine , fe fer-
rèrent en un gros bataillon , s^ouvrircnt un
paflage à travers les légions , & pénétrèrent
jufqu^à Pendroit où étoit l'empereur, tant
le choc de cette mafiTe d'infanterie , unie &
ierrée, étoit redoutable. Les foldats, dit
Ammien , appellent cç\:à faire la tcte de porc ^
Ce n'eftdonc pas un triangle , mais un corps
rangé fur une extrême profondeur & peu de
front. » Traité de la colonne par M. le che-
valier de Folard. ( Q)
Coin de mire , eft , e/z terme d'artillerie y
un coin dont on fe fert pour élever la culalîe
du canon & pour le pointer. Voye^^ de ces
coins , pi. Vide l'art militaire ,fig. 6. (Q)
Coin , C Architeclure. ) eft une elpece de
dé coupé diagonalement fuivant le rampant
d'un efcalier , qui fert à porter par en bas
des colonnes de niveru , & à racheter par
en haut la pente de l'entablem-ent qui fou-
tient un berceau rnmpant,commeàl'efca-
lier pontifical du Vatican,
Ces coins font aufiTi le même effet aux
bail! lires ronds qui ne font point inclinés
iuivant une rampe , comme à l'efcalier du
palais royal.
On peut aullî donner ce nom aux deux
portions d'un tympan renfoncé , qui portent
les corniches rampantes d'un fronton ,
comme on en voit au fronton cintré du por-
tail de S. Gervais à Paris. (P)
Coins , en terme de diamantaire , ce font
des faces angulaires qui féparent les bifeaux.
44^ C ^ ^
de font du brillant quatre par Tes quatre bi-
feaux , un quarré arrondi. V. Biseau &
Brillant.
Coin , en terme de boutonnier , c elt 1 en-
droit par où Ton commence un bouton aux
pointes ; &: comme il y a quatre pointes ,
il eft clair qu'il doit y avoir quatre coins
dans un bouton. Les premiers tours de ces
points ne font pas ondes. Voye:j^ Ondes.
Dans un bouton de trait ou glacé , ils font
toujours de file, & lont comme autant
d'attaches pour coudre le bouton fans l'en-
dommager. . ^r A- A 1
Coin , {Fauconnerie. ) le dit des plumes
qui forment les côtés de la queue de loi-
feau ; il y a les deux premières , les deux
fécondes , ùc. de chaque coin ; cette déno-
mination ne cefle qu aux deux du milieu
qu'on appelle les couvertes.
Coin ou couteau de bois , (Jardinage.)
cet Inftrument fert à détaler le peuple au
pié de fleurs qui en ont trop , & dans la
greffe à ouvrir la fente que le couteau n'a
fait que commencer.
Coins : on nomme ainfi, dans l'Impri-
merie , nombre de petites pièces de bois de
chêne , taillées de fept à huit lignes d'épaii-
feur , de façon que l'un des bouts foit plus
large que l'autre de quelques lignes. Ces
coins iont de grandeur différente , & fer-
vent , avec le (ecours d'un marteau , à
ferrer' la forme dans le chaiTis , de façon
qu'on peut la lever de defliis le marbre , la
defcendre , la tranfporter ou la laifler fur
champ , mais adoffée à quelque chofe de
Coin , (Lutherie) on appelle ainli , dans
la fadture des orgues , un petit morceau de
bois , de forme conique , tronqué & coupé
en deux par un plan qui pafle par l'axe ,
dont on le fert pour boucher le trou que
l'anche & la languette des jeux d^anches
laiffent dans la noix. Ce coin doit entrer
dans la noix après que l'anche & fa lan-
guette font placées. La face plate du coin
tournée vers la languette , on le chaffe à
force pour qu'il affermiffe l'anche & fa
languette dans la noix , & qu'il achevé de
boucher entièrement fon ouverture. Voyei;^
Trompette. s /. , ,
Coins, (Maréchallerie.) fe dit des quatre
dents du cheval fituécs entre les mitoyennes
C O I
Se les crocs , deux deflus 5c deux dclTous ,
qui poullènt lorique le cheval a quatre ans
6c demi. Voye:(^ Croc.
Coins, fe dit aulïi des quatre angles, extré-
mités ou lignes de la volte , lorfque le che-
val travaille en quarré. Ce cheval a fait les
quatre coins, a travaillé fur les quatre coins.
Voye:(_ Travailler , Volte.
Entrer dans les coins , terme de manège.
Voye^ Entrer.
CoiNS^e chantier , {Marine.) ce font des
coins que l'on met entre les tins ëc la quille ,
lorlqu'on la pofe lur le chantier : quand on
veut lancer le vaiffeau à l'eau , on chalTe ces
coins à coups de bélier •■, on les met ordinai-
rement à cinq ou ilx pies de diftance les uns
des autres. {Z)
Comsd'arrimage, {Marine.) ce fontceux
qu'on met entre les futailles en les arrimant,
afin de les empêcher de rouler. {Z)
Coins de mat , {Marine.) ce font de
certains coins de bois qu'on fait de bouts de
jumelles ; ils tiennent de leur rondeur ôs: de
leur concavité , &c fervent à reflerrer le mit
lorfqu'ii eft trop au large dans l'étambraie
du pont : ces coins font traverfés de che-
villes de fer. (Z)
Coin y {à la monnoie. ) Les coins s'appel-
lent aujourd'hui matrices ou quarrés. Voye:^
Matrice. On fe fervoit de ce terme dans
l'ancien monnoyage.
Coins de cheveux, terme de perruquier;
ce font des trèfles de faux cheveux , dont les
hommes fe fervent pour augmenter l'épaif-
feur ôc la longueur de leurs cheveux natu-
rels , en les ajuftant au deflus des oreilles
au moyen d'un fil.
Coins , {Relieurs.) outils de relieurs-
doreurs , ornemens de livres ; les outils fon-
dus font de cuivre &c figurés en triangle ;
la queue en eft un peu longue , afin de fer-
vir à des volumes de différente grolîèur ;
on en a deux , l'un grand &c l'autre petit :
on poufl'e les coins à quatre fois , fur le dos
des livres , dans les entre-nerfs , pour garnir
les côtés des bouquets. Fbje:(_ Dorer.
Coins , terme de rivière. V. Voussoirs.
■* Coins , ( Tablett. ) fe dit d'efpeces de
petites armoires ou tablettes qui fe placent
Idans les angles des appartcmens. Ceux qui
fe fufpendent en tablettes , font d'une mc-
nuiferie ou d'un bois de marqueterie léger;
CO I
l'angle que forment les côtés eft: égal à celui
que forment les murs ; la face antérieure en
eft cintrée ; la partie inférieure fe ferme à
porte & à ferrure ; la fupérieure eft ouverte
& iert à placer des morceaux de porcelaine.
Ceux qui fe placent à terre & font à pie
comme les commodes , font aflez fbuvent
couverts de marbres & décorés d'ornemens
en cuivre doré , la partie antérieure en eft
aulTî cintrée, elle eft divifée en deux ou
trois parties , fermée à ^extérieur par autant
de ferrures & de portes. Ces meubles font
de nouvelle invention.
Coin, au tricîrac ; qui dit fimplement
le coin j entend le coin de repus ; ainii nommé
parce que le joueur eft moins expofé quand
il s'eft emparé de ce coin ; c'eft toujours la
onzième café , non compris celle du tas des
dames.
Une des règles les plus fûres , c'eft de le
prendre le plutôt qu'on peut , &: d'avoir pour
cela des dames fur les cafés de quine éc de
fonnez. Voye-;^ Coin Bourgeois.
Le coin de repos fe prend par puiflanceou
par effet ; dans le premier cas , lorfque celui
contre qui l'on joue n'a pas le iien , & que
du dé que vous am.enez vous pouvez mettre
deux dames dans fon coin , ce qui ne fe
iàit point : on n'empêche point fon adver-
faire de faire fon grand jan, quoiqu'on
en ait la puiflance , il eft plus avantageux
de prendre fon coin. On le prend par effet
lorsque de fon dé on a deux dames qui
battent fon propre coin. Comme on ne peut
ie laifir de fon coin qu'avec deux dames , les
règles du jeu ne permettent pas au fïi qu'on
le quitte fans les lever toutes deux enfemble.
Qui s'empire de Ton coin par effet , n'eft
plus en droit de le reprendre par puifîance ;
il celui co'itre qui l'on joue s'eft faiiidu fien ,
cette pui (Tance eft. ctée.
Coin bourgeois , nu trictrac y fe dit
encore de la café de quine & de fonnez,
Vi-ye^^ Quine & Sonnez.
Coin , fè dit encore en un grand nombre
d'autres circorift.mces , dont nous ferons
mention lorfque l'occafion s'en préfentera.
Il y a chez les tabl-etiers àt%coins. Il y en a
de gros , de petits & de moyens dans les
grofî'es forges. Les ferruriers ont des coins
fimples & à talon , £'c. mais tous ces inftru-
me;îs font aiiifi nommés de leur forme fem-
C O 1 447
blablc à celle du coin machine de mécha-
nique , &: de leur ufage qui n'en diffère pas.
coïncidence , f. f. en Géométrie , fe
dit des figures , lignes , ^c. dont toutes les
parties fe répondent exadement lorfqu^elles
font pofées l'une lur l'autre , ayantlesmcmes
termes ou les mêmes limites.
La coin'idence défigne donc une égalité
parfaite , c'eft-à-dire que les figures ou lignes
entre lefquelles il y a coincidence , font égales
&c fembiables, V. Égalité & Semblable.
Euclyde , & prefque tous les auteurs géo-
mètres à fon exemple , démontrent un
grand nombre depropofîtions élémentaires ,
par le feul principe de la coincidence , ou fuper-
pofition K Superposition. (O)
coïncident, adj. ( Phyf. & Méch. )
fe dit des corps qui tombent à la fois & en
même temps fur une furfacc quelconque :
ainfi on dit les rayons de lumière coi acide ns ,
pour défigner les rayons qui tombent à la
fois fur une furface.
On dit aufli coincident , de lignes , ou fur-
faces qui coïncident. V. Coïncider. ( O)
coïncider , terme de géométrie : on
dit que deux lignes ou furfaces coincident ,
lorfqu'étant appliquées l'une fur l'autre elles
s'ajuftent & fe confondent parfaitement. V.
Coïncidence. (O)
COINC Y , ( Géog. mod. ) petite ville de
France dans le Soiitoinois.
COING, {Pharm. & diète.) fruit du
coignafîier. ^oje^ Coîgnassier.
Le fuc de coing eft d'un goût acerbe ,
aftringent , ôc d'une odeur agréable ; ilpour-
roit être employé comme cordial , ftoma-
chique Se tonique : peut-être même feroir-
il plus efficace que pluiieurs préparations ou
mélanges que nous employons tous les jours
au même titre , 5c même que le fyrop de
coing , qui n'eft autre chofe que ce fuc
cpaiffi avec une fufïifante quantité de fucre.
, Quoi qu'il en foit, ce fuc eft peu ufîté dans
les prefcriptions magiftrales : il fe conferve
pourtant fort bien des années entières fous
1 huile , &c dans un lieu frais. K Suc &
Conservation.
Le fyrop de coir^, dont l'ufàge a prévalu
fans doute àcaufe de fon goût agré;-!ble fur
celui du fucquin'avoit pasbefbin pour être
Icoi^ervé d'être affaifonné avec le fucn;.
448 COI
comme nous le venons d'obferver , fe pré-
pare de la façon fuivante.
Prenez du fucde co/'/i^épuré&bien clair ,
une livre ; fucre blanc , deux livres : faites
fondre le fucre à petit feu , & le fyrop aura
la confiftance rcquife.
Le cotignac ou gelée de coing , 6c les
différentes confitures qu'on prépare avec ce
fruit , ont paflé de la pharmacie aux confi-
feurs.
Ces différentes confitures font de bons
analeptiques , dont l'ufage eft très-falutaire
pour les convalefcens , & pour réveiller dou-
cement le jeu de l'eftomac& des organes de
la digeftion , en fourniflant en même temps
une nourriture légère.
On prépare quelquefois dans les bouti-
ques une efpcce de gelée de coing qu^on
appelle myva cydoniorum : elle fe fait avec
douze livres de lue de coing, & trois livres de
fucre blanc, que Ton fait évaporer jufqu'en
confîftanced'un extrait mou. Ce myva ou rob
de coing eft peu en ufage ; les gelées ou
marmelades de coings dans lelquellesil entre
beaucoup plus de fucre , lui ont été préfé-
rées, pirce qu'elles flattent davantage le goût.
Le mucilage desfemencesdeco/Vz^extrait
à froid , ou à un léger degré de chaleur ,
avec Peau commune ou quelqueeauophthal-
mique, comme celle de rofe , de fenouil ,
fournit un excellent remède contre lesoph-
thalmies.
Le fuc de coing entre dans le fyrop d'ab-
/ynthe compofé , le fyrop émétique , & le
fyrop de jujubes ; fa chair confite entre dans
les tablettes diacarthami. ( /5 )
COIPA , f. m. ( Hifi. nat. bot. ) nom
Brame d'une plante du Malabar , fort bien
gravée , avec la plupart de fes détails , par
Van-Rheede, dafts fbn Hortus Malabari-
cusy volume X, planche ZXVII , page Zjj ,
fous le nom de pee-coi^a.
C''cfl; une herbe à racine vivace , blan-
châtre , ligneufe & fibreufe , longue defix
pouces fur trois lignes de diamètre , couron-
née par fix à huit tiges cyHndriques, Uflès ,
étendues fur la terre comme autant de
rayons , rougeâtres , d'une ligne au plus de
diamètre.
Les feuilles font oppofées deux à deux ,
non pas en croix , mais fur un même plan ,
elliptiques , pointues aux deux extrémités ,
COÎ
longues d'un pouce , deux à trois fois moins
larges , entières , épaiiles , un peu ondées ,
communément vertes , quelquefois rougeâ-
tres , hfles , luifantes , relevées en deflbus
d'aune cote longitudinale , fans nervures , Se
attachées horizontalement aux branches,
fans aucun pédicule : les deux feuilles ter-
minales font fouvent alternes , ou au moins
y en a-t-il quelquefois une alterne dans celles
qui doivent porter une tête de fleurs.
Chaque branche eft terminée par unetcte
fphérique , quelquefois fefTile entre deux
feuilles oppofées ; mais pour Pordinaire por-
tée fur un péduncule cylindrique , égal à fà
longueur , qui eft de cinq à fix lignes , com-
polee de quinze à vingt fleurs , blanc-rou-
geâtres , feiïiles , contiguës , liftes , luifantes,
longues de trois hgnes au plus, ouvertes
fous un angle de quarante-cinq degrés.
Chaque fleur eft hermaphrodite incom-
plète, pofée autour de l'ovaire. Elleconiîfte
en un calice à huit feuilles , roux-pâles donc
deux extérieures font pliées ; en cinq éta-
mines droites réuniesen cylindre par le bas
de leurs filets , à anthères rouges entourant
un ovaire fphérique, verd-blanchâtre, termi-
né par un ftyle blanchâtre , à deux ou trois
ftigmates.
L'ovaire en mûriflant devient une capfule
fphéroïde , membraneufe , blanche, longue
d'une hgne, à une loge ne s'ouvrant point ,
& contenant une graine lenticulaire , noire ,
luifante , attachée verticalement à fa partie
inférieure.
Culture. Le coipa croît au Malabar dans
les fables.
Qualités. Son goût eft herbacé.
Ufages. Les Malabares l'emploient feulc-i
ment pilé dans le lait de vache , avec le
beurre & le (àntal , pour en frotter les tem-
pes dans les délires.
Remarque. Il eft facile de voir par ces
caractères , que cette plante , qui n'a encore
été déterminée ni clauée par aucun botanif.
te , appartient au genre du coluppa , qui fe
range naturellement dans la famille des ama-
ranthes , où nous l'avons placée. Voye^rios
Familles , volume II , page %68. ( M.
Ad AN SON.)
COIRE , ( Géog. mod. ) grande ville de
Suifle , capitale du pays des Grifbns , près
du Rhin. Long. 2.7, 8 ; lat, 46* , ^o.
COÏT,
CO I
COIT,r.m.(Py^yM & Hygiène.) ex-
prefTîon dont les médecins fe lervent allez
communément comme fynonyme à ces au-
tres façons de parler honnêtes , acie vénérien,
copulation charnelle , acIe de la génération.
Fbye:^; GÉNÉRATION, Mariage (iWeV.) ,
& Virginité {Médecine. )
COITADE,r. m. {Hijî. nat. Ichifiyo-
log. ) poiflTon des iltrs Moluqucs , très-bien
gravé & enluminé fous ce nom , par Coyett,
au n°. J^ de la première partie de Ton Re-
cueil des pojfonsd'Amboine.
Il a le corps extrêmement court , très-
comprimé par les cotés , pointu vers la tête,
à peine de moitié plus long que large, la tête,
la bouche & les yeux petits.
Ses nageoires font au nombre de fept;
fàvoir deux ventrales très-petites , menues ,
placées au-defïbus des deux pectorales , qui
font quarrées , médiocrement longues , une
dorfale fort longue , plus balle devant que
derrière , & une derrière l'anus , un peu plus
longue que profonde : celle de la queue cil
tronquée comme quarrée : de ces nageoires
deux font épineufes ; favoir la dorfale , dont
les huit rayons antérieurs font fîmples, pi-
quans , & Tanale qui en a deux pareillement
piquans.
La couleur de Ton corps cfl: jaune , mar-
qué de deux bandes rouges , longitudinales
fur chaque côté , & trois bandes vertes , dont
une fur le dos , une fous le ventre , & une
fur le milieu de chaque côté : la tête eft bru-
ne , les nageoires pectorales font vertes, celles
du ventre & de la queue iaunes , celles du
dos & de l'anus rouges , excepté les rayons
épineux, qui font réunis par une membrane
verte & rouge : la prunelle des yeux noire ,
entourée d*un iris rouge.
Moeurs. Le coitade fe pêche communément
dans la mer d'Amboine , autour des rochers.
Remarque. Ce poilîon eft une efpecc du
dou wing qui forme un genre particulier dans
la famille des fpares. (M. Adanson.)
COITTES , COITES , f f. pi. {Mar. )
ce font deux longues pièces de bois qu'on
met parallèles (bus un vailîeau , pour le por-
ter & le foutenir quand on veut le tirer du
chantier pour le lancer à l'eau. V. Colom-
biers. ( Z)
CoiTTEs DU guindas , {Marine.^ ce
font deux pièces de bois épaiil'cs, ou deux
Tome VIIL
.} COI 449
billots frappés fur le pont , qui fervent à-
appuyer les bouts du guindas, & fur lef-
quelles il tourne horizontalement. Quelque-
fois on emploie pour cet ufage deux gros
madriers qui fe joigiaent aux bordagcs du
vaillèau. ( Z )
COJER, f m. {Hiji. nat. Ichthyolog.)
nom que les habitans des Moluques donnem:
à un poiflon qui a été fort bien gravé & en-
luminé par Coyett , fous le nom de cojer
laudt y au /2^.54 de la féconde partie de fon
Recueil des poijfons d'Amboine.
Il a le corps elliptique , alfez court , très-
comprimé par les cotés, pointu vers la queue,
obtus vers la tête , &c prefqu'une fois plus
long que profond ; la tête grande j la bouche
& les yeux petits.
Ses nageoires font au nombre de fept ;
favoir deux ventrales petites au delïbus des
pedtorales qui font triangulaires,une dorfale
allez longue,alï^iîégale en hauteur devant S>c
derriere,une derrière l'anus, un peu plus lon-
gue que profonde , & une à la queue , four-;
chue jufques vers le milieu de fa longueur.
La couleur de fon corps eft bleue fous le
ventre , jaune fur le dos , & les côtés qui ont
chacun deux lignes bleues obliques , & neuf
autres lignes qui s'étendent comme autant
de rayons autour des yeux : fes nageoires
font jaunes-, la prunelle des yeux eft blan-
che , entourée d'un iris rouge.
Moeurs. Le coj'er eft commun autour des
rochers dans la mer d'Amboine.
Remarque. Ce poilïbn forme un genre
particulier dans la famille des fpares.
( M. Adanson. )
CO JUSTICIERS , C m. pi. {Jurifp. )
font plufieurs feigneursqui ont un droit de
juftice commun cntr'eux. Ce droit en lui-
même ne peut fe partager quant à l'exercice,
mais les profits peuvent fe partager entre
les co~JuJiiciers. Voye[ Haute-Justice &
Justice. (A)
COKENH AUSEN , ( Gécg. mod. ) ville
forte de Suéde en Livonie , fut la Dwina.
Long. /^2 y 2-^y ^^^' 5^i 40.
COL , voyei^ Cou.
Col , ( Géog. ) c'eft le nom qu'on donne
en géographie à plufieurs palfages étroits,
entre des montagnes.
Col, f. m. partie de notre ajuftement ;
c'eft un morceau de toile très-fine , garnie
45© COL
par Tes deux bouts de deux autres morceaux
de toile plus grofle , à l'aide deiquels &c d'une
boucle ou d^une agrafe , on fixe cet ajufte-
ment autour du cou fur celui de la chemifc.
Si Ton Te Tert d'une boucle , il ne faut des
boutonnières qu'à un des bouts du co/; mais
l'autre bout doit être plus long, afin depou-
voir boucler commodément. Si c'eft une
agrafe, il faut des boutonnières aux deux
bouts , où les attaches des deux parties de
l'agrafe foient reçues.
Col , ( Géog. mcd. ) île d'EcofTè , l'une
des Wefternes , dans l'Océan. Long, ii ;
lat.^j.
COLA , f. m. {Bifl. nat. bot.) Lemery
dit que c'eft un fruit de Guinée delà grofleur
d'une pomme de pin , contenant lous Ion
écorcedes fruits femblables à des châtaignes,
où font renfermées quatre petites noifettes
rouges ou rougeâtres, 6^roduit par un
arbre. V. dans cet auteur fjpdétail des pro-
priétés, fur lefquelles il ne faut compter
qu'à proportion de la connoiflance des
carafteres de la plante ; ce doit être une loi
générale pour tout article de botanique.
COLAERISME, fub. m. {Hifi. anc.)
danfe des Grecs, qu^ils avoient priie des
Thraces. C'eft tout ce qu'on en fa't.
* COLACHON , f. m. inftrument de
înufique qui n'eft plus d'ufage': il n'a que
trois cordes , quelquefois deux ; il a quatre à
cinq pies de long 5 l'accord à vuide en cft
d'o6bave en quinte , quoiqu'il y ait d''autres
manières de l'accorder : il a la forme du
luth : fon manche eft & doit être fort long :
car il faut compenfer par la longueur des
cordes , ce qu'on n'a pas du coté du nom-
bre : ceux qui n'ont que deux cordes , les
accordent à la quitte. Il y en a qui font la
table du colackon m.oitié de bois , moitié de
parchemin \ le P, Merfenne ajoute qu'on la
pourroit faire de verre & d'autres matières,
mais qu'il vaut mieux qu'elle foitae fapin.
Le colachon a été inventé en ItaUe. V. le P.
Merfenne, Uv. II ^ page 100.
coLAGE ou (Collage , f. f. {Jurifp:)
4ans la coutume de Châteauneuf en Berri ,
A, iij , arï. 5 , eft un droit que le feigneur
levé fur fes habitans qui ont des bœufe avec
Içlquels ils labourent la terre. Ce droit eft de
^fbus parifis par couple de bœuf. M. de
iauriete en ion glcjfaire 3 prétend que ce
COL
terme vient de cokre , qui iîgnifie cultiver;
qu'ainli on doit dire feulement calage , &c
non collage : mais ne peut-on pas dire aufti
qu'il vient de colla boum , & qu'il a été ainii
nommé parce qu'on le paie pour les bœufs
qui font Ibus le joug. C'eft la même chofe
que le droit de carnage. V. Corhage. {A)
§ COLANGÈS ou COULANGES-LES -
VIN^EUSES , ( Géog.) Colonice-vmofiS , petite
ville de l'Auxerrois, une des meilleures terres
du comté d'Auxerre. Dès le douzième fie-
cle , la nomination de la cureapparcenoir à
l'abbefie de S. Julien. Au comm^encemenc
du treizième iîecle , les comtes de Joigny
en étoient feigneurs. Le comte Jean expli-
qua les privilèges des habitans en 12.79.
Philippe de Sainte-Croix , évêque de Ma-
çon , qui en étoit feigneur en 1 377 , y fondai
un hôpital. Le roi y unit la maladrerie de S.
Cyr , de Mailly-la-ville en 1 697.
Le château quatre fut bâti en 1 571 : c'é-
toit un bel ouvrage , qui depuis a été rafé ,
il y a un peu plus d'un fiecle.
L'égUiè paroiiTiale, tombée en 173 1 , a
été rebâtie à neuf: elle eft belle , vafte &
très-claire; elle fut confacrée par M. de
Caylus en 1741 , fous le vocable de Saint
Pclegrin , l'apotre de PAuxerrois.
Deux écoles gratuites, Pune pour les gar-
çons , & l'autre pour les filles, & une fila-
ture de coton , ont été établies par le zèle
bienfaifant du curé aduel.
Le territoire ne produit pas du blé pour
fix femaines ; mais il eft très - abondant
en vm ; Henri IV en faifoit ufàge ; il y
a 1 1 1 0 arpens de vignes qui peuvent don-
ner par an , communément 7 a Soco feuil-
lettes : on y compte 340 feux, & environ
I OGO communians.
Le défaut d'eau a été caufe que cette ville
a été brûlée plufieurs fois, entre autres le 1 1
mai 1676.
Dès 1 5 1 6 , on avoit tâché d'y faire venir
l'eau , mais inutilement : enfin , en 1705, M.
d'Aguefleau , procureur - général , depuis
chancelier , qui en étoit feigneur , y envoya
Couplet , ingénieur , qui a trouvé le fecret
de fcuirnir cette ville d'une eau qui coule
continuellement : en reconnoiflànce , on fit
graver cette iirfcription ;
Non erat ant} fiuens populis jitientibus unda :
Afi dédit œternas arie Cupktus aquas.
La devife reprélenue un
COL
MoiTe , qui rire
de l'eau d'un roclier , entouré de ceps de
vigne , avec ces mots , utib dulci.
Coulanges a donné deux évêques à l'églife
de Nevers , tous les deux Jacobins , Mau-
rice de Coulanges en 1 581 , & Philippe Fro-
ment Ton neveu , en i ;94.C'cfl:àirançois
Rou(Teau, né à Coulanges, que nous devons
l'invention de la cire d^bfpagne. Il vivoit
fous Louis XIII & i ,ouis XiV. Romual le
muet, provincial des frères de la chanté,
habile mathématicien , mort en 1 7 j 9 , étoit
auflî de Coulantes. ( C)
COLAO , Cm. ( Hifl. mod. ) ce font des
officiers qui ont à la cour de Pempcreur chi-
nois les fondions qu'ont ici les miniftres
d'état.
COL ARBASIENS , f. m. ( H/yf. eccUf, )
hérétiques ainii nommés de leur chef Colar-
^~'" qui vivoit dans le ij fieclede l'églife
)aie
& étoit lui-même difciple de l'héré/iarque
Valentin. Aux dogmes éc aux rêveries de 'on
maître, Colarbaie avoir ajouté que la gêné
ration & la vie des hommes dépendoient des
fept planètes; que toute la perfection & la
plénitude de la vérité étoit dans l'alphabet
grec j & que pour cela Jefus-Chrift étoit
nommé alpha & oméga. Baronius& Philaftre
ont confondu ce Colarbafe avec un autre
hérétique appelle Bajfus ; mais S. Auguftin,
Théodoret , ùc. les regardent comme
deux personnages diffirens. Les Colarbafiens
croient une branche des valentiniens. V'oye-;^^
Valentiniens. s. Irenée, TertuUien , ont
auifi parlé de Colarbafe & de Tes difciples.
Dupin biblioth. des aut. eccléf. M. Fleury,
ecclé^. hijl, tome I. (G)
COLARIN, r.CciNTURE & GORGERIN.
COLASSO , f. m. ( HiJÎ. nat. Botan. )
plante du Malabar , ainfi nommée par les
Brames , & très-bien gravée avec la plupart
de fes détails , par Van-Rheede , dans fon
Hortus Malabaricus y volume II, planche
LXVy page 8j , fous le nom de bahelfchulli
qui lui eft commun avec une autre plante
qui a été décrite fous ce nom. J. Cemraelin
dans fes noces l'appelle genijla , fpinofa ma-
jor y longioribus aculeis ; & M. Linné ,
baleria i longifolra , fpinis verîicillorum fe-
nis , f^liis enjiformibus longijfimis fcabris ;
Syfîema naturœ , édition i z , imprimé en
COL 45 £
C'eft un ^us- arbrifleau , dont la racine
ligneufe , blanchâtre y longue de cinq à (rt
pouces, fur cinq à fix lignes de diamètre,
tres-ramifiée à fon origine , jette une tige
ramifiée dès fon origine , en deux à trois
branches alternes , longues d'un pié & demi
à deux pies , fur trois lignes de diamètre,
écartées fous un angle de 30 à 40 degrés aii
plus , quarrées , comprimées & (iilonnées
alternativement de deux cotés oppo'es fur
chaque articulation , vertes & rougeâtrcs ,
femées de poils longs , blanchâtres, à bois^
blanc j à centre charnu , verdâtre.
Les feuilles font oppofées deux à deux en
croix , elliptiques , pointues aux deux extré-
mités , longues d'un pouce & demi à deux
pouces , quatre ou cinq fois moins larges ,
ondées lur leurs bords , légèrement rudes
par les poils longs , blanchâtres , dont elle*
i'ont femées , verd-rougeâtres , relevées en
deflous d une cote longitudinale , blanchâ-
tre , ramifiée de quelques nervures peu ^t\\^
fîbles , & attachées fans pédicule aux tiges
horizontalement ou pendantes , & courbées
en bas en demi-cercle.
De l'aiiTelle de chaque paire de feuilles,
il fort quelquefois deux ou quatre autres
feuilles, qui font les bourgeons ou commen-
cement d'autres petites branches, & tou-
jours iix épines oppofées trois à trois, co-
niques , fort peu plus courtes qu'elles , bru-
nes, ligneufes, très-dures, un peu courbées
en bas.
De la même aiffelle de chaque feuille Ibr-
tent encore huit fleurs felliles , violet-bleuâ-
tres ou purpurines , égales aux épines.
Chaque fleur eft hermaphrodite , mono-
pétale , complète, irréguliere, po^éc au-
tour d'un disque un peu au dellous de
l'oraire. Elle conlîfte en un calice, periiftant
à quatre feuilles triangulaires, étroites poin-
tues , verd-rougeâtres ; quatre à cinq fois
plus longues que larges , une fois plus cour-
tes que la corolle qui eft monopétale, à tube
court , partage en deux lèvres écartées preC-
qu'horizontalement , dont la fupérieure a
deux divifions, ôcl'inf'^ricure trois divisions:
quatre écamines blanchâtres, épaiftès, rap-
prochées deux à deux , & à anthères bleues ,
s'élèvent du haut du tube , & vont fè cacher ,
fous la lèvre fupérieure de la corolle .-l'o-
vaire s'élève dadeflusd'undifquejaunâtrc>
LlU
451 C O L
qui fait corps avec lui : il cft ovoïde , verd-
clair , & porte un flylc blanchâtre , aulli
long que les étamines , terminé par deux
ftigmates hémifphériques.
L'ovaire en mûriilànc devient une capfule
ovoïde , pointue à l'extrémité , longue de iix
lignes, deux àtrois fois moins large, d'abord
Verte , enfuite roufsâtre , enveloppée par le
calicequieftun peu plus long , à deux loges
s'ouvrant élaftiquement en deux valves par-
tagées par leur milieu , en une cloifon longi-
tudinale : chaque loge contient trois, à quatre
graines , elliptiques , brunes, longues d^une
ligne , d'un tiers moins larges , attachées ver-
ticalement par leur partie inférieure.
Culture. Le colajfo croît au Malabar dans
les terres fablonneufes , mais argilleufes en
même temps , qui retiennent l'eau.
Variétés. Il y en a une variété , que Van-
Rheede dit être une autre efpece , dont les
tiges & les feuilles font verd-claires , &c non
rougeâtres. Se les fleurs blanches tirant fur
le bleu.
Ufages. La décoélion de fa racine fe boit
dans la rétention d'urine , la pierre & l'hy-
drepifie : pilée avec l'eau , elle fert à baflî-
«er le corps, lorfqu'il eft plein d'humeurs,:
fes feuilles en décoéVion & marinées au vi-
tiaigre, font auffi un puiflTant diurétique : la
poudre de fes feuilles fe boit avec l'huile ex-
primée des fleurs du figuier d'enfer , pour
diflîper les tumeurs des parties génitales.
Remarques. 'LtcolaJJo eft donc différent
du harleria , qui a cinq feuilles au calice , &
fci corolle a cinq divifionsprefque égales fans
fevres : il fut avec le coktta un genre de
plante particulier , qui fe range naturelle-
ment auprès de la ruellia & de l'acanthe ,
dans la troifieme fe^tion de la famille des
perfonnées , où nous l^avons placé. Voye^^
nos Familles des plantes , volume II, p. Zio.
{ M. Adanson. )
COLATURE, f. iî.(P.harmac.) la cola-
ïure eft proprement une efpece de filtration
imparfaite , ou la féparation d'une liqueur
d'avec les fèces ou les parties les plus grof-
fieres, par Le moyen d'un filtre peu ferré,
comme un tarais, une toile, un blanchet
une étamine , ér. Cette efpece de filtration '
qui ne feroit pas affez exade pour les vueg
ehymiques , fuffit pour la plupart des prépa _
tations pharmaceutinues \ elle eft même îeule
COL
praticable dans quelques cas , comme k>rf-
que les liqueurs qu'on fe propoic de purifier
par ce moyen , (ont trop épailîes pour pou-
voir palier à travers des filtres plus ferrés.
Le nom de colaiure eft auffi donné en
pharmacieà touresliqueurspafléesou filtrées^
& c'eft même dans ce fens-là qu'on l'em^
ploie le plus communément j le nom de co-
lature étant prelque hors d^ufage pour expri-
mer l'opération même ou la manœuvre par
laquelle ou on coule ou on pafle une liqueur
trouble ; ainfi on dit , dans le langage ordi-
naire pharmaceutique, dans la prefcription
d'une médecine , par exemple , y du iené ,
de la rhubarbe concaflée , 6'c. fâites-en l'in-
fuiion ou la décoébion ; paflez & diflolvez
dans la colature du fyrop de chycorée , du
fel d'epfom , Ê'c. (^)
COLBERG , ( Géog. mod.) ville forte
d'Allemagne dans la Poméranie ultérieure ,
à l'embouchure du Perlant , dans la mer
Baltique. Long. 39 , qo ; lat.^^y l8.
COLCAQUAHÙITL , f: m. plante de
l'Amérique. Voilà le nom; k refte eft à
connoître , excepté les propriétés , fur lef-
quelles Ray s'eft fort étendu.
COLCHESTER, (Céogr. mod.) ville
d'Angleterre dans la province d'Eftex , fur
le Cohi. long. i8 ,zz ; lat. ^î , 52-.
COLCHIDE, f. ^.{Géogr. anc.) L'an-
ciemie Colckide y aujourd'hui la Mingrelie,
eft au fond de la mer Noire , entre la Cii-
cafïie, la Géorgie, &l'Aladulie.
Ce pays paflbit autrefois pour être fertile
en poifbns ; de-là vient qu'Horace parle fou-
vent des poifons de la Colchide, venenacolcha
ou coichica. Médée , fi fameufe par fes vé-
néfices, éroit de la Colchide : en falloit-il
davantage pour donner Heu aux fiétions de
lapoéfie?
Mais ce qui n'eft point une fidiôn poéti-
que , c'eft l'étrange & réelle différence qu'il
y a entre la Colchide de nos jours , & cette
Colchide d'autrefois ii riche & fi peuplée ;
différence qui n'a point échappé à l'auteur
de Te/prit des loix. " A voir , dit-il , Hv,
XXI, ch. V. aujourd'hui la Colchide, qui.
n'eft plus qu'une vafte forêt , oii le peuple
qui diminue tous les jours ne défend fa li-
berté que pour fe vendre en détail aux Turcs.
& aux Perfàns; on ne diroit jamais que
cette contrée eût été du temps des Romains
COL
pleine de villes où le commerce appelloit
toutes les nations du monde : on n'en trouve
aucun monument dans le pays , il n^y en
a de traces que dans Pline ôc Strabon. »
( M. le chevalier DE J AU COURT. )
COLCHIQJJE, adj. { HiJÎ. nat. bot.)
colchicum , genre de plante à fleur liliacée ,
monopétale , Tortant de la racine fous la
forme d'un petit tuyau , qui s'évafe peu
à peu 3c fe divife en fix parties. Le piftil
fort du fond de la fleur , fe termine en
petits filamens , & devient dans la fuite
un fruit oblong , triangulaire & partagé
en trois loges dans lefquelles il y a des
femences arrondies. Ajoutez aux caradleres
de ce genre , qu^il y a deux racines tu-
berculeufes , dont Tune eft: charnue ôc
l'autre fibreufe; elles font toutes les deux
enveloppées par une membrane. Tourne-
fort , injî. rei herb. Voye^^ Plante. (/)
Colchique , ( Mat. méd. ) tous les mé-
decins s'accordent aflez unanimement à
regarder toutes les parties du colchique
comme un poifon. On doit remédier aux
accidens qu'il caufe à ceux qui en ont
avalé , d'abord par les émétiques , fi^ on
eft appelle d'aflez bonne heure, & enluite
par les adoucillans , comme les mucilages ,
les émuhîons , les huileux , le lait , ùc.
donnés' tant en lavement que par la bouche.
Le bulb;î ou la racine de colchique ap-
pliquée extérieurement , peut avoir quel -
que ucilité , à titre de cauftique , contre les
j)oreaux , les verrues , certaines dartres ,
pc. Sa décoction fait mourir les morpions,
félon Jean Bauhin.
Le célèbre VVedelius rapporte une vertu
bien plus excellente de cerce racine, dans
une dilfertation faite exprès fous ce titre :
€xperimentum curiofum de colohico veneno , 6'
alexipharmaco jimplici &" compcfito , dont M.
Geoffroy a donné un extrait aflez étendu
dans fa mat. méd. Wedelius raconte qu'il a
toujours porté depuis l'année 1668 jufqu'en
1718, de même que plufieurs autres per-
fonnes, cette racine en amulette pendue à
fon
cou avec un heureux fuccés , non
-feuk
ment dans la pefte , mais encore dajÉboutes
fortes de maladies épidémiques ; K qu'il
^oit trouvé ce fecret dans une diflertation
mr la peft:e univerfelle qui avoir régné en
1.637, 9,^i lui écoic tombée par luzard entre
COL 453
les mains , lorfqu'il étoit chargé (en 1668;,
dans une ville de la bafl'e Siléiie , où régnoic
une dyflenterie cruelle, de quatre cents ma-
lades attaqués de fymptomej de malignité.
W cdclius & fes compagnons attachèrent
à leur cou une racine de colchique en amu-
lette , & aucun d'eux ne fut attaqué de la
dyflenterie peftilentielle dont nous venons
de parler. Cet auteur confirme l'efficacité
de fon remède par plufieurs obfervations
qu'il rapporte , & entre autres par l'hiftoire
de deux médecins qui ayant été appelles à
Hambourg pendant la pefte qui y régnoit ,
partirent pour cette ville après s'être mis
fous la protedtion de Dieu, & s'être munis
de cet amulette. Ces deux médecins réuf-
firent très- bien; & la pefte étant ceflee, ils
s'en retournèrent l'un & l'autre en bonne
fanté. Enfin Wedelius après avoir éprouve
pendant cinquante ans fon remède, qu'il
diftribuoit fous le nom à'arcanum dupU^
catum catholicum , n'a pas héfité à le rendre
public, comme étant un alexipharmaque
contre la pefte , les fièvres ardentes , les
fièvres malignes, la petite vérole, la rou-
geole , le pourpre , la dyflenterie , ùc.
Il faut obferver que Wedelius ordonnoit,
outre ce remeder» une diète exadte , qu'il
recommandoit d'éviter tout ce qui eft nui-
iible , & de garder la modération dans les
iix chofes que l'on appelle non- naturelle s ;
ce que bien des gens regarderoient aujour-
d'hui comme une aulîi bonne recette contre
les maladies épidémiques, que Varcanum
duplicatum catholicum TVidelii. M. Geoffroy
finit cet extrait par l'explication très-judi-
cieufe que Quirius Rivinus a donnée de
l'opération de cet amulette , qu'il croit être
fort propre à encourager le peuple & à
l'empêcher de craindre la contagion : car
il y a long-temps que l'on a obfervé que
dans les maladies épidémiques , ifn des plus
fouverains alexipharmaques étoit le cou-
rage ou l'infenfibilité. (^)
COLDING , ( Géog. mod. ) petite ville
de Danemarck , dans le Nortjutland.
Long. ÇLJ ; lat. 55 , 55.
COLDINGHAM, (GfV.) petite ville
de l'Ecofle méridionale, dans la province
de Berwick ou de Merfe : elle avoit
autrefois une abbaye fameufe , dont le
domaine s'étcndoit fur toute la plaine
454 COL
voi/înc , que l'on appelle Cvldingham Moor,
& qui a huit milles d'Angleterre de lon-
gueur. Proche de-là fe trouve fur la mer du
. nord le cap Stint-Ebbe , vulgairement nom-
mé par corruption faint Tabbes. (D. G.)
COLDITZ , ( Géog. mod. ) petite ville
d'Allemagne dans la haute Saxe, en Milhie,
fur la Mulda.
COLDSTREAM , ( Gêogr. ) ville de
TEcoflè méridionale, dans la province de
Berwick ou de Merfe : elle n'eft remar-
quable que pour avoir eu un grand mo-
naftere avant la réformation , & en ce
qu^outre le droit de tenir marché , elle
a Thonneur de donner fon nom à l'un des
corps militaires qui compofent la garde
du roi de la Grande-Bretagne. {D. G.)
COLEOPTERES, f. m. pi. {Hijl. net.
Infccîol. ) colecptera. On donne ce nom à
l'une des diviiions de la clafle des inre(5tes
qui comprend ceux qu'on déiîgnoit autre-
fois par le nom commun de fcarabéesy le-
quel eft propre à un genre. Les in{ed:es de
cette famille ont dans leur état parfait le
corps couvert par deux étuis, èlyira , Toit
féparés, ce qui eft le plus ordinaire, foit
réunis, fous lefquels iont cachées deux
ailes membraneulcs; & leur bouche eft
armée de deux ferres ou mâchoires pofées
dans un m-me plan horizontal & mobile.
Tune contre l'auire lareialement.
Le corps de ces infedcs (e diyife en trois
parties principales , la tête , le corceler , &
le ventre ou la partie poftérieure : la tête porte
des antennes, outre lefquelles on oblerve
deux antennulesou barbillons pofés près de
la bouche ; il n'y a que les deux grands yeux
à réfeau , excepté dans quelques infe(5tes que
M. Geoffroi joint à cette feftion : les jambes
font ordinairement au nombre de fix , deux
attachées au corceler , ôc les autres à la partie
antérieure du ventre , qu'on pourroit regar-
der comme un fécond corcelet ; elles font
formées de quatre parties, la cuiflè, la jambe
&r le pié ou tarfc formé de quelques articula-
tions & terminé par des crochets. Les ailes
Se les lélytres font attachés fur le dos à la
m ^me partie qui porte les quatre dernières
jambes, les ailes font mernbraneufes , plus
grandes que les étuis fous lefquels elles fe
rangent en fe repliant d^^ns leur milieu ; elles
manquent à quelques efpeces : les étuis mo- 1
COL
biles dans la plupart comme des ailes, font
pour l"'ordinaire de confiftance éca.lleufè :
dans quelques e'peces, ils font réunis en un
feul, fur lequel s'obferve une future fembla-
bie à celle que forment en fe touchant ceux
qui font féparés. On a donné le nom décuf-
Jon , fcutelLm , à une pièce triangulaire qui
fe voit fur quelques cûcop-eres , placée entre
les étuis, dont la bafe touche le corcelet.
M. Linné borne cette fection aux inftéles
à étuis cruftacés , & en fiit trente genres. M.
GeolF.oi la divi'e en trois articles, dont le
premier comprend ceux qui ont des étuis
durs qui couvrent tout le corps j le fécond
dont les étuis , aufTî cruftacés , ne couvrent
le corps qu'à moitié , & le troifieme ceux
dont les étuis (ont mous & flexibles , peu
difFérens des ailes : le nombre des pièces des
tar es lui fournit les fubdivifions de ces ar-
ticles; il fubdivife les deux premiers chacun
en quatre ordres, félon que les infeétes qu'il
y rapporte ont , i°. cinq pièces aux tarfes de
toutes les jambes; i°. quatre articulations à
tous les tarfes; 3°. trois articles à tous les
tarfes; 4°. cinq articles aux tarfes des deux
premières paires & quatre à la dernière. Les
infedes à étuis mous font ranges en trois
ordres , de cinq , deux & trois pièces aux
tarfes. Il nous paroit que cette méthode a
des avantages fur celle de M. Linné. iMais
nous obferverons que les infedîres que M.
Geoffroi range dans le dernier article; fa-
voir , les blattes , le grillon , la matite , la
fauterelle , différent à bien des égards des
autres coléoptères , & tiennent aux autres fa-
milles d'infedtes, fur-tout aux hémiptères,
par plus de cara6leres : outre la fouplefle des
étuis & les petits yeux Hfles, leurs méta-
morphofes incomplètes de la reftèmblance
prefqu'entiere de la brve & de la nymphe
avec Tinfeéte parfait, femblent leur afîigncr
place parmi les hémiptères , dont ils ne dif-
férent que par la bouche; peut-être aufÏÏ
vaudroit-il mieux en faire un ordre moyen
entre celui des cokupteres Se les hémiptères.
Quoi qu'il en foit , ce qui nous refte à dire
ne rcg^de que les col aptères de M. Linné,
ou leswux premières divifîons de Geoffroi.
Ces infeÂes pafîènt par trois états , &
fubifïènt des métamorphofes aflèz com^
pietés. Tous naifïènt d'un œuf; &: dans leur
premier état , ils ont la forme d'un vec à
C O L ^
fix jambes Se à tête écailleufe , munie de
fortes mâchoires latérales , & chargée de
deux gros yeux : leur corps eft oblong &
cylindrique j blanc ou de couleur laie, di-
vifé ordinairement en treize anneaux , fur
leiquels on voit dix- huit ftigmates^ la plu-
part font lourds & vivent dans la terre ou
dans le bois , d'autres dans Teau ; ils chan-
gent plulieurs fois de peau dans ce premier
état : leurs nymphes font de celles dans lef-
quelles on apperçoit diftindement toutes les
parties de l'animal, parfait , nues , déHcates,
preiqu'immobiles & fans coque : elles font
au commencement blanchâtres , elles pren-
nent enfuite une couleur plus foncée , &
quand l'infedle parfait a acquis toute fa
confiftance , il fe dépouille de Tenveloppe
de nymphe, en tirant toutes fes parties de
la pellicule mince qui les couvroit, comme
la main fort d'un gant. (Z))
COLERAIN, (Géog.) ville d'Irlande,
avec titre de baronnie , dans la province
d'Ulfter & dans le comté de Londonderry,
fur la rivière de Bann qui fait communiquer
le lac Lough Neagh avec TOcéan fepten-
trional. Cette ville eft allez grande &c aflèz
bien lituée pour faire un commerce coniîdé-
rable ; on ne la dit cependant pas riche : elle
envoie deux députés au parlement d^Ir-
lande. Long. îo, ^£ ; lat. ^£ ^ îo. (D. G.)
COLERE , ( Gramm. ) le courroux eft
la marque extérietire de la colère , Pem-
porrem.ent en eft l'excès. ( O )
Colère, f. f. {Morale.) c'eft, fuivant la
définition de Locke, cette inquiétude ou
ce détordre de Tame que nous reflentons
après avoir reçu quelque in] ure,& qui eft
accompagné d'un delir preflant de nous
venger : paiîîon qui nous jette hors de nous-
mêmes, & qui cherchant le moyen de
repoufler le mal qui nous menace ou qui
nous a déjà atteints, nous aveugle & nous
fait courir à la vengeance : maùrefieimpé-
rieufe & ingrate , qui récompenfe mal le
lervice qu'on lui a rendu , ôô qui vend chè-
rement les pernicieux confeils qu'elle donne.
Je parle ici de la colère couverte , durable ,
jointe à la haine : celle qui eft ouverte,ingé-
nue , femblable à un feu de paille , fans
mauvaife intention , eft un fimple effet de la
pétulence du tempérament , qui peut quel-
quefois être louable j ou du moiins qui ne
COL 4n
feroit repréhenfible que par rindifcrétion ou
le tort qui en réfulteroit. Mais cette vivacité
eft bien différente d'une violence qui fur-
monte toute affeûion , nous enlace & nous
entrave, pour me fervir d'un terme expreflfif
de fauconnerie. Telle étoit la colère de Co-
riolan, qupnd il vint fe rendre à Tullus pour
fe venger de Rome & acheter les effets de
fon relîentiment aux dépens même de fa vie.
Les caufes qui produifent ce défordre
font, une humeur atrabilaire, une foiblefle,
mollefïè & maladie d'efprit, une fauffe
délicatefte , une feniibilité blâmable , l'a-
mour propre, Pamour des petites chofes,
une vaine curiolîté, la légèreté à croire,
le chagrin d'être méprifé & injurié; d'oii
vient que la colère de la femme eft fî vive
& fî pléniere : elle naît auflî dans le refus
de la violence du defîr.
Cette paffion a fouvent des effets lamen-
tables, fuivant la remarque de Charron :
elle nous pouffe à l'injuftice ; elle nous jette
dans de grands maux par fon inconfîdéra-
tion; elle nous fait dire & faire des chofes
melTéantes, honteufes, indignes , quelque-
fois funeftes & irréparables , dont s'enfui-
vent de cruels remords ; l'hiftoire ancienne
& moderne n'en fourniilent que trop
d'exemples. Horace a bien raifon de dire :
Qui non moderabitur irœ ^ &c.
Epift. ij , lib. I , ver. 60 — GG.
Les remèdes, dit Charron , dont je vais
emprunter le langage , font plufîeurs &
divers, lefquels Peiprit doit être avant la
main armé & bien muni , comme ceux qui
craignent d'être afïiégés j car après il n^'eft
pas temps. Ils fe peuvent réduire à trois
chefs : le premier eft de couper chemin à
la colère , &: lui fermer toutes les avenues j
il faut donc fe délivrer de toutes les caufes
& occafions de colère ci-devant énoncées :
le fécond chef eft de ceux qu'il faut em-
ployer lorfque les occalions de colère fe pré-
lentent, qui font, 1°. arrêter & tenir fon
corps en paix & en -repos , fans mouvement
& agitation; 2°. dilation à croire & prendre
réfolution , donner loilîr au jugement de
confidérer; 3°. fe craindre foi-même, re-
courir à de vrais amis & mûrir nos colères
entre leur^ difcours \ 4°. y faire diverfîon
par tout ce qui peut calmer , adoucir ,
45^ COL
égayer : le troifieme chef efl: aux belles
conlidérations donc H faut abreuver &
nourrir notre efprit de longue main , des
fidtionsfuneftes ôc mouvemensqui réfultent
de la colère; des avantages de la modéra-
tion; de l'eftime que nous devons porter
à la fagefie, laquelle fc montre principa-
lement à fe retenir &c fe commander.
Il ne faut pas cependant confidérer la
colère comme une paflion toujours mau-
vaife de fa nature; elle ne Teft pas, ni ne
déshonore perfonne, pourvu que Tes émo-
tions foient proportionnées au fujet qu'on
a de s'émouvoir. Par conféquent elle peur
être légitime , quand elle n efl: portée qu'à
un certain point; mais d'un autre coté , elle
n'efl: jamais néceflàire : on peut toujours ,
ôc c'efl: même le plus fur, foutenir dans
les occafions fa dignité ôc fes droits fans
fe courroucer. Si le dcfir de la vengeance .
effet naturel de cette pafïîon , s'y trouve
joint; alors comme cet effet eft vicieux par
lui-même, il lâche la colère, l'empêche de
demeurer dans de juftes bornes. Donner à
la vengeance émanée de la colère , la cor-
reéVion de l'ofFenfe, feroit corriger le vice
par lui-même : " La raifon qui doit com-
mander en nous , dit encore Charron ,
auteur admirable fur ce fujet , ne veut
point de ces officiers-là qui font de leur
tête fans attendre fon ordounance : elle
veut tout faire par compas ; ôc pour ce ,
la violence ne lui eft pas propre. «
Ceux donc qui prétendent qu'un meurtre
commis dans la colère ne doit pas propre-
ment être mis au nombre des injuftices
punifTables , n'ont pas une idée jufte du
droit naturel ; car il eft certain que l'injuf-
tice ne confifte eflentiellcment qu'à violer
les droits d'autrui. Il n'importe qu'on le
falTè par un mouvement de colère, par
avarice, par fcnfualité, par ambition, &c,
qui font les fources d'où proviennent ordi-
nairement les plus grandes injuftices : c'eft
le propre au contraire de la jufiice de réfîfter
à toutes les tentations , par le feul motif
de ne faire aucune brèche aux loix de la
fbciété humaine. Il eft pourtant y rai que
les actions auxquelles on eft porté par la
colère , font moins odieu(es que celles qui
naifTent du defîr des plaifîrs , U quel n'eft
pas fî brufque , & qui peut trouver plus.
COL
facilement de quoi fe fatisfaire ailleurs fans
injuftice; fur quoi Ariftote remarque très-
bien que la colère eft plus naturelle que
le defir des chofes qui vont dans l'excès,
ôc qui ne font pas nécefTaires.
Mais lorfque ce philofophe prétend que
cette pafTion fert parfois d'armes à la vertu
& à la vaillance , il fc trompe beaucoup :
quant à la vertu, cela n'eft pas vrai; ôc quant
à la vaillance , on a répondu allez plailam-
ment qu'en tout cas c'eft une arme de nou-
vel ufage; car, dit Montagne , " nous re-
muons les autres armes , ôc celle-ci nous re-
mue ; notre main ne la guide pas , c'eft elle
qui guide notre main ; nous ne la tenoHS
pas. '» (M. le chevalier DE Jaucourt.)
Colère , ( Médecine. ) cette paffion
irritante nous jette dans des mouvemens
violens, en caufant un grand défordre
dans notre machine.
Nous venons de parler de cette pafTîon
en moralifte, nous allons la confîdérer en
médecin.
Telle eft fà nature , qu'elle met fubite-
ment , quelle qu'en foit la caule , tout le
lyftême nerveux dans une agitation extraor-
dinaire par la conftridlion violente qu'elle
produit dans les parties mufculaires, ôc
qu'elle augmente "prodigieufement , non
feulement la fyftole du cœur ôc de fes
vaifTeaux contigus , mais encore le ton des
parties fibreufes de tout le corps.
Ce mouvement impétueux du fang ÔC
de l'altération du fluide nerveux dans les
perfbnnes en qui la colère eft poulTée à fon
dernier période, fe manifefte évidemment
par l'augmentation du pouls, la prompti-
tude de la refpiration, la foif, la chaleur,
le gonflement ôc la rougeur du vifage , la
pulfation des artères de h tête plus forte,
plus élevée , fur-tout aux environs des tem-
pes , l'éclat des yeux , le bégaiement , la
voix enrouée , le parler précipité , la fup-
preflîon de l'urine , le tremblement des par-
ties extérieures; enfin une certaine précipi-
tation remarquable dans les fonébions de
l'efprit. Ces fymptomes le trouvent plus ou '
moins raflèmblés , fuivant le tempérament
ôc la force de la paflfîon > & la phyfiologie
les explique fans peine par la conftri6tior^
fpafmodique de tout le fyftême nerveux.
En conféquence , les obfèrvations de
t pratique
COL
pratique ont appris que des fièvres bilieufes,
infkmmaroires , la jaunifle , les obflruc-
tions du foie , des liémorrhagies , des diar-
rhées , des pierres dans la véiicule du fiel ou
dans les conduits biliaires , en ctoient quel-
quefois la luite. La confpiration finguliere
de tous les nerfs en donne la raifon. D'abord
la conftriâ:ion violente qui fe fait ici dans le
genre nerveux produit la fupprelîion de
Turine , Pobftrudion ôc l'embarras dans
1 écoulement de la bile , d"*©!! refaite la for-
mation des pierres de la véiicule du fiel.
Ccft de cette conftriârion que provient la
jaunifle ; d'un autre coté , les conduits bi-
liaires formés de tuniques mufculaires Ôc
nerveufes , (è trouvant excelîivement com-
primés par l'influx rapide du liquide fpiri-
tucux contenu dans les nerfs , fe reflèrrent ,
font couler la bile qu'ils contiennent ; Se cate
bile paflè dans le duodénum & dans le ven-
tricule. De-là les envies de yomir , la déjec-
tion de matière bilieufe , ôc la diarrhée.
L'abondance Se l'âcreté de cette bile caulè-
ront la chaleur , la foif , des fièvres lentes ,
bilieufes , inflammatoires , &c.
La cokre produifant des rpafmes , Se aug-
mentant le mouvement des fluides , il efi:
néceflaire qu'il fè porte avec impétuofité, ou
qu'il s'arrête dans les parties fupérieures une
trop grande quantité de fang ; d'où il arri-
vera que ces parties feront trop diftendues,
& en coniéquence le viiage s'enflammera ,
toutes les veines de la téïc , celles du front ,
des tempes , feront gonflées , ô'c. Il en pour-
ra donc rclulter des liémorrhagies , loit par
le nez , foit par une rupture de la veine pul-
monaire , (oit par les veines de l'anus , foit
par la matrice. En un mot , dans les parties
dont les vaifleaux fe trouveront les plus foi-
bles ou les plus diftendus , l'influx rapide
déréglé du liquide fpiritueux contenu dans
les nerfs , rendra la langue bégayante , la
voix enrouée, le parler précipité , le tremble-
ment , la précipitation dans les fondions de
l'efprit.
Enfin quelques obfervations nous appren-
nent qu'il y a des perfbnnes qui , à la fuite
d'une grande colère , ont perdu tour-à-toui
l'ouie , la vue Se la parole , Se d'autres qu
font tombées pendant plufieurs jours dan;
un état d'infenfibilité. Ces divers acciden;
dépendent entièrement oude la compreflTion
Tome FUI,
COt 457
des nerfs du cerveau , ou du flux arrêté des
efprits , tantôt fur un organe des fens , tan-
tôt fur Pautre.
C'efl: pourquoi le médecin travaillera à
calmer ces fpafmes , cette agitation de tout
le fyftémc nerveux j à remettre le fang & les
humeurs dans un mouvement uniforme Se
corriger l'acrimonie des fluides. Ainlilesré-
frigérans , tels que la liqueur minérale ano-
dine d'Hoflînan , l'efprit de nitre ou l'efprit
de vitriol dulcifiés , délayés dans un liquide
convenable, deviendront de vrais caïmans.
Si la bile s'efl: jetée dans les intcfl:ins , il faut
l'évacuer doucement par des lénitifs , tels
que la magnéfie blanche , la poudre de rhu-
barbe mêlée avec le nitre , les déco6lions de
tamarins , Se autres de cette efpece . On cor-
rigera l'acrimonie des fluides par des boif-
fons oppofées à cette acrimonie. S'il s'efl:
rompu quelque vaiflèau dansletiflu pulmo-
naire , on diminuera l'impétuolité du fang
parla faignée , la dérivation , les derai-bains,
les rafraîchiflàns. Mais Pon évitera dans la
méthode curative les cathartiques Se les émé-
tiques qui (ont funeftes dans cet état ; car
comme ils n^'agiflènt qu'en irritant les fibres
délicates de refl:omac Se des inteftins. Se que
ces fibres font déjà attaquées de conftricbions
Ipafmodiques par la colère , de tels remèdes
ne feroient qu'augmenter le mal. Ce feroit
bien pis dans les perfonnes fujettes à des fpaf-
mes hypocondriaques , hyftiriques, &dans
celles qui (ont déjà tourmentées de cardial-
gie. Ce n'efl: point ici que la difficulté pour
déterminer des remèdes fait une des parties
délicates du jugement du médecin , un peu
de bon fens lui i'uflit. Art. de M. le chevalier
DE JaU COURT.
COLERET , f. m. terme de pkhe ; le
filet qui forme le coleret efl: étroit par les deux
bouts , où il n'a au plus que deux pies Se
demi de haut ; il s'élargir enfuite , de forte
qu'il a quelquefois trois à quatre brafles de
chatte dans le milieu. La grandeur des mail-
les efl à la diîcfetion des pêcheurs , qui fe fer-
vent de cet engin défendu notamment par
l'ordonnance de 1584 , tit. Ixxxiv , Se par
celle de i<j8i , tit. xvj Se xxj. Le bas de ce
rilet eft garni de plommées ou plaques de
plomb roulées , pour le foire couler bas Se le
i enir ouvert. Le haut eft garni de flottes de
iiege , au moyen defcudles & des plommées
M mm
4rj8 C O L
le filer fe trouve étendu. A chacune dés
extrémités du filet eft un bâton fur lequel il
tft amarré ; de chacune des extrémités de ce
bâton , partent des cordes qui fe réunifient
€n ime leule , qui a une brade ou deux de
diftance , eft ployéepour former une grande
boucle ou bretelle , que les pêcheurs fepaf-
fent au ccu pour tirer cet iniirument à-peu-
près comme font les bateliers qui hallent
leurs petits bateaux pour remonter les rivie-
-res. Il faut deux hommes , un à chaque bout
du filet ; ils fe mettent quelquefois dans Tea»
jufque fous le m.entcn^ afind^avoir une plus
longue marée , cette pcche ne pouvant fe
faire que de bafle mer.
Dans quelqutsendroits, les payfans indif-
ciplinés & voifins des cotes de la mer, y def.
cendent avec des colerets d'un très-grand vo-
lume qu-'ils apportent fur des chevaux , &
^ont ils fe fervent pour tirer ces grands co-
lerets qui font fur les fables le même mau-
vais e&Qi que la dreige , lorfqu'on s'en fcrt
près de terre : aufïi cette pêche eft-elle une
ciesplusnuifibles,puifqu'ellc détruit tout ce
qu'elle rencontre lur les fables.
Outre ces deux elpeces de colerets y il y en
a une trolfieme qui ne diffère de celle-ci
qu'en ce qu'il y a au milieu une chaulle ou
queue de verveux , dans laquelle pafle tout
le poiflôn qui fe trouve dans la route du
coleret.
Une autre efpece de coleret eft compofée
de deux fortes de filets ; les mailles du haut
font de l'échantillon de 1 4 hgnes , & celles
du bas n'ont au plus que neuf lignes en
quarré.
Comme les pêcheurs qui fe fervent de cet
engin le traînent fur des côtes dures, leurs
filets n'ont que quelques braffes de longueur ;
& au lieu d'être garnis de plommées par le
bas , ceux-ci ont ce que les pêcheurs nom-
ment de hfouillardure : c'efî un rouleau de
vieux filets , hors de fervice , avec quoi ils
Ramifient le corps de leurs colerets , afin de
les faire toujours traîner fur les fonds.
Nous avons dit que le coleret pouvoit être
tiré par des hommes ou des chevaux i mais il
le peut être aufTi par des bateaux que des
rameurs font avancer; en ce cas , on l'appelle
feinne, dont le coleret eft une efpece. V^oye^
Seinne.
COLEREl TESj f. m. pi. terme depcche, \
COL
forte de Courtines volantes & variables : ces
filets ont les mailles de deux différentes gran-
deurs ; les pluslarges ont neuflignes enquar-
ré , & les plus ferrées ont feulement huit
lignes en quarré.
Cette efpece de pêche eft proprement la
tente du paiicot des pêcheurs du bufch , ou
des petites pêcheries des grèves de la baie de
Cancaîe : on ne peut la fliire fans bateau. On
la pratique pendant toute Pannée , lorfque
les vents forcés S>c les tempêtes ne régnent
point.
Qiiand le pêcheur veut tendre fes filets
pour faire pêche à la colerctte , il emibarque
avec lui dans fa chaloupe de petits pieux ôc
des rets pour former l'enceinte ; il dif pofe en-
fuite fes pieux ou petits piquets qui ont en-
viron quatre pies au plus de haut ; les deux
rangées en font placées en long , ôc de ma-
nière qu'étant un peu couchées , le haut du
rets qui y eft amarré par un tour m.ort , ne
fe trouve élevé au plus que de la hauteur
d'un pié au deftus du terrain ; ainfi le filec
n'a ni flottes , ni plomb •■, il eft feulement ar-
rêté par de petits fourcillons ou crochets de
bois , de quatre pies en quatre pies de dif-
tance. Les deux rangées de petits pieux font
auilî placées de manière qu'ils s'cnrretou-
chent par les bouts pour former Centrée.
Les pêcheurs mettent encore dans le fond de
la pêcherie , une efpece de fac qui eft un
verveux fimple , fans goulet & fans cercle j
il peut avoir une bralle <k demie de long :
les deux piquets qui tiennent l'entrée du ver-
veux , font placés debout. Après que le pê-
cheur a planté fes pieux , il remonte dans la
chaloupe où il fe tient pendant la marée; ÔC
après qu'elle eft finie , & fon poiiîbn refté à
(ec j il s'embarque avec les hlets ôc les pi-
quets ; fi le hazard veut qu'il faffe bonne
pêche ôc beau temps , il laitre quelquefois fa
pêcherie ainfi tendue deux ou trois m.arces j
ce qui arrive cependant rarement.
Il faut pour cette forte de pêcherie , le
même calibre que celui que l'ordonnance a
fixé pour les bas-parcs, courtines ôc venets ,
avec des mailles de deux pouces en quarré ;
on y prendra toujours de toute forte d'ef-
peces de poiflbns plats j Se ce font ceux que
l'on y prend ordinairement.
Il y a encore des colerettes ou courtines,
qu'on appelle courtines a double fond , qui fê
COL
tendent de différente manière aft gré des pê-
cheurs.
Quelques-uns mettent au fond des vcr-
veux volans ou varvouts , fans cercle ; d^'au-
tres font encore cette même pêche d^une au-
tre manière : ils plantent fur les vafes leurs
petits pieux qu'ils relerent toutes les marées ;
les bâtons en font plantés tout droit, comme
ceux des bas-parcs ; ils forment au fond une
efpece de varvout ou de double fond avec
les mêmes piquets plajités en équerre , ou en
angle aigu ; les ailes ou les bras ont environ
dix brades de long , & le bout du fac ou de
la pointe du rets qui garnit la pêcherie , eft
tenu en état au moyen du petit piquet de
bois , fur lequel il eft amarré à une petite
corde qui eft frappée dedus. Il y a des pê-
cheurs qui mettent auflides verveux, dont
•le fac eft tenu étendu au moyen de cinq à
ilx cercles , &c dont le goulet va jufqu'aux
■deux tiers du verveux. Les mailles de ce ve^r-
veux font fort ferrées, puifqu'ellesnontque
fept à huit lignes au plus en quatre. Ces pê-
cheries ne ditferent point des bas-parcs en
équerre & à fond de verveux , que l'on a
trouvé fur les grèves de la baie de Cancale,
; * COLÉT ANS , f. m. pi. ( Hifl. eccUf. )
frères mineurs ainfî appelles de la bienheu-
reufe Colete de Corbie , dont ils embraftè-
■ rent la réforme au commencement du quin-
zième fiecle. Ils conferverent ce nom pen-
dant deux cents ans , & ne le perdirent qu'à
la réunion qui fe fit de toutes les réformes
de Pordrc de S. François , en conféquence
de la bulle que Léon X donna en i j 1 7.
COLETT A , f. f ( Kifi. nat. Botaniq. )
plante du Malabar fort bien gravée , avec
la plupart de fes détails , fous ce nom , &
fous celui àt Colette veetla, par Van-Rheede,
dans fon Hortus Malaharicus , volume IX ,
planche XLIy page jj. \.ç:^ Brames rappel-
lent ^o/2/z^^, & les Cinghales, habitans de
Ceylan , kathu karo hiti. C'cft le eryngium
Ceylanicum febrifagum.Jloribus luteis d^Her-
• mann ; & le barlcria ^ prionitis yfpinis axil-
laribus pcdatis quazernis , foliis integerrimis
lanceolato-ovatis de M. Linné , dans Coufjf-
tema naturx ^ edit. îX , imprimé en 1767 ,
page 4Z£.
Sur une racine noirâtre , très-ramifîée 6c
fîbreufc , elle s'élève fous la forme d'un
buifibn ovoïde , pointu , haut de trois à i
COL 459
quatre pies , une fois moins large , ramifié
dès fon origine en dix à douze paires de
branches oppofées en croix , cylindriques ,
verd-luifàntes , de deux à quatre lignes de
diamètre , écartées (bus un ajigle de ibixante
degrés environ d'ouverture.
Les feuilles font oppofées deux à deux en
croix , elliptiques , pointues aux deux extré-
mités , longues de quatre à fîx pouces , une.
fois 8c demie à deux fois moins larges , en-
tières, légèrement ondées , épaifles , molles,
lifTès , luifantes , verd-brunes , relevées en
deflbus d'une cote longitudinale , ramifiée
en cinq à huit paires de nervures alternes ,
de attachées horizontalement fur les bran-
ches , à des diftances une à deux fois plus
courtes qu'elles, fur un pédicule demi-cylin-
drique, plat en defTus , comme ailé ou bordé^
fur les cotés.
De l'aiflelle de chaque feuille fortent deux
à trois épines réunies a leur origine , de forte
qu'il y en a quatre à fix à chaque paire ds-
feuilles. Elles font coniques , vertes droites,
horizontales, égales à leur pédicule. Des
mêmes aiflèlles fortent encore une à deux
fleurs feffiles, jaunâtres , une fois plus cour-
tes que les feuilles.
Chaque fleur eft hermaphrodite complète,
monopétale ir régulière , pofée a-utour d'un
difque au defîbus de l'ovaire. Elle confîftc
en un calice perf iftant , à quatre feuilles iné-
gales , dont deux plus étroites , une fois plus
court que lacorolle quieft jaune-rougeâtre,
à tube médiocre , à deux lèvres aulTi longues
que lui , dont la fupérieure a une diviiiou
plus courte ôc Pinférieure quatre divifions
roulées en deflbus. Du bas du tube s'élèvent
quatre étamines à anthères jaunes triangur
laires , dont deux aufïî longues que la co-
rolle , ôc deux plus courtes cachées fous [9.
lèvre fupérieure. L'ovaire part du fond du
calice attaché à un difque applati qui fait
corps avec lui, & porte un ftyle cylindrique,
terminé par un ftigmate ovoïde.
L'ovaire en mûriflant devient une capfule
elliptique ou en fer de lance , très-compri-
mée , pointue aux deux bouts , longue de
huit lignes , deux fois moins large , ligneufe,
élaftique , très-dure , blanche , à peau verte ,
ftriée , à deux loges s'ouvrant élaftiquement
en deux valves comprimées car les côtés ,
réparées en deux par une cloi'bn longitudi-
M m m z
4^0 COL
nale qui porte à Tes bords un petit crochet. '
Chaque loge contient une feule graine lenti-
culaire , mais plate d'un côté Se convexe de
Tautre , de deux hgnes de diamètre , blanc-
rouflltre , lille , luifante.
Culture. La coletta croît au Malabar dans
les terres fîiblonneufes humides.
Qualités. Toute, la plante eft amcre j Tes
fleurs font fans odeur.
Ufages. Les Malabares mâchent Tes feuil-
les avec Tareak, au défaut des feuilles du bé-
tel. Le fuc qu'on en exprime eft fouverain
contre les aphtes & les vents qui gonflent
le bas-ventre.
Remarques. La coletta , comme Pon voit,
n'eft pas un panicaut eryngium , comme l'a
penfé Hermann. Elle n'eft pas non plus une
elpece de barleria, comme la cru M. Linné,
puifqu'elle n'a pas comme lui cinq feuilles
au calice , ni cinq diviiions prefquc égales
à la corolle. Il fait donc avec le colaflb un
genre particulier , voifm de Pacanthe & de
ia ruellia , dans la féconde fedtion de la fa-
mille des perfonnées. Voye'{^ nos familles des
plantes , vol. II , p. %î o. {M. Adanson.)
COLGIAC , {arme turque.) hcsTMïCS
appellent ainû un bracelet avec fon gantelet
de fer.
* COLIADE , {Myth) furnom de Vé-
nus j ainiî appellée de fbn talent pour la
danfe. Il vient de kokiaw, je danfe. Les Grecs
a\*oient élevé un temple à Vénus la danfeufe.
COLL^JLT , f. m. raialœvis undulatafeu
tîherea. Kond.( Hijl. nat. Icfithyolog.) ^oi(-
fon cartilagineux plat & h(fe , qui a de très-
grandes nageoires. Il eft fl gros que l'on en
trouve qui pefent cent livres , & on en a vu
un qui pefoit jufqu'à deux cents livres. Ce-
lui mr qui on a fait cette defcription , avoit
trente-huit à trente-neuf pouces de longueur
depuis la pointe du bec jufqu'à l'extrémité
de la queue, & vingt-huit ou vingt-neuf
pouces de largeur entre les extrémités des
nageoires ; fon corps étoit de figure rhom-
boïde. La face fupérieure de ce poifton eft
blanchâtre ou de couleur cendrée , parfe-
piée de plufieurs taches noirâtres ou on
COL
doyantes, félon Lifter. La face inférieure eft
blanchâtre & parfemée de quantité de petits
points noirs ; le bec court & pointu jles cotés
font terminés par une nageoire. Quant au
refte , ce poifîbn refîèmble à la raie à long
bec , foit par la queue , par les nageoires qui
entourent l'anus , parla bouche , les dents,
les narines , ùc. Willughby , hifi.pifc. Voy.
Raie , Poisson. (J)
COLIBRI , fub. m. oifeau commun dans
plufîsu rs contrées de l' Amériq ue. Il y en a des
efpecesfortdiftérentes pour la gro fleur, pour
les couleurs , ùc. Il y en a de fi petits , qu'on
leur donne le nom d'oifeaux mouches {a) :
ils font très-beaux par la diverfité & l'éclat
de leurs couleurs , ce qui les a fait appeller
rayons dufoleil; leurs plumes font en etfet fi
belles , qu'on les emploie à faire des tapifle-
ries & même des tableaux ; & Poifeau en-
tier , après avoir été deflëché, eft encore fi
beau, qu'on le fufpend aux oreilles pour fer-
vir d'ornement. La longueur du bec varie
dans les différentes efpeces de colibri ; il eft
droit dans les uns , & courbe dans les autres.
Leurs yeux font petits & noirs ; leur vol eft
fi rapide , qu'on les apperçoit à peine ; ils fe
fbutiennent pendant long-temps en Pair , &
femblenr y refter immobiles. On les voit
dans les forêts , fur-tout le matin , recueillir
la rofée ou le miel fur fes fleurs , particuliè-
rement fur celles du gui. Ils font leur nid
avec du coton lur des branches d^arbre , &
y dépofent des œufs blancs qui ne font pas.
plus gros que des pois. Il y a en Amérique
des araignées, qui font beaucoup plusgroiiès
que les colibris , & qui mangent leurs œufs.
Foj£^ Araignée.
Lorique les colibris ne trouvent plus de
fleurs, ils fe fufpendent parle bec à l'écorce
d'un arbre , & y reftent jufqu^à ce qu'il y ait
de nouvelles fleurs. Hijl. des Incas , Paris ,
1 7 1 4 , tome II, page %'JJ.
On donne aux colibris le nom de fuce-
fleurs y ou à'oifeau abeille ( Seba Th. rer.
nat. tom. I , page 6î . ), parce qu'ils font très-
petits,&: qu'ils voltigent fur les fleurs comme
les abeilles. Seba rapporte qu'on lui a envoyé
(a) Le diâionnaire d'hiftoire naturelle a ton de confondre le fo//(Jr/ avec l'oifeau mouche.Lebec
de ce dernier eft droit, moins allongé à proportion, applati en deflbs & en delTous, un peu renflé par
Je bout & non pis arqué comme celui du coWr/.Celui-ci qui doit être placé dans la famille des grim-
pereanx, n'en diffère qu'en ce que le grimpereau a le bec plus court, la langue (impie fans tuyau,
& la queue compofée de douze plumes. { M. AD^JNSOJN- j
COL
des colibris des Indes orientales *, qu'ils font
ordinairement plus grands que les autres ,
& que le plumage en eft gris & mêlé d'un
veird éclatant.
Edwards fait mention , dans fon hiftoire
naturelle des oifeaux , de plufieurs efpecesde
Colibris , & il donne les figures & les defciip-
tions du colibri rouge à longue queue , du
petit colibri brun de Surinam , du colibri
verd à longue queue , du colibri à tête noire
& à longue queue , du colibri dont le ventre
eft blanc , du colibri bleu & verd , du colibri
verd dont le ventre eft noir , du co//i^r/ hupé,
& du colibri à gorge rouge, llfuftîrade rap-
porter ici d'après ce même auteur la defcrip-
tion du colibri rouge à longue queue , qui eft
un des plus grands & des plus beaux oifeaux
de fon genre ; & celle du colibri hupé , qui
eft un des plus petits.
" Le colibri rouge à longue queue eft un
des plus gros oifeaux &: plus beaux que {""aie
j amais vu de ce genre. Son bec eft long , min-
ce, & courbé en bas vers la pointe , &: de
couleur nojre : la tête Se le haut du cou font
noirs & iuifans ; la gorge eft d\in verd bril-
laiît , & même de couleur d'or : au-deflbus
de ce verd , il y a une ligne noire en forme de
croiftànr , qui le fépare de la poitrine qui eft
de couleur de rofe. Le dos & les petites plu-
mes des ailes font d'une couleur rouge oran-
gée. Les grandes plumes des ailes & le pre-
mier rang des petites font d'un violet. La
queue a dans le milieu deux longues plu-
mes de la même couleur violette que les ailes.
Les plumes des cotés &; de la queue font
d'une couleur orangée rougeâtre , comme
celles du dos. Les plumes du bas du dos ,
celles du croupion , & les plumes qui recou-
vrent la queue font d'un beau verd. Les
jambes font très-courtes & de couleur noire,
de même que les pies qui ont quatre doigts,
dont trois font "en avant & l'autre derrière ,
comme dans tous les oifeaux de ce genre.
y> Le colibri hupé a le bec mince , aigu par
la pointe , mais pas ii long que dans la plu-
part des oifeaux de fon genre , de couleur
noire & très-peu courbé en bas. Le haut dé
la tête depuis le bec jufqu'au derrière de la
tête qui fe termine en une hupe , eft d'abord
verd , & furie derrière bleu-foncé: ces deux
couleurs brillent avec un luftre qui furpafîè
de beaucoup les métaux les plus poHs éc les
COL 4^î
plus éclatans ; fur-tout la partie verte qui eft la
plus claire en certains j ours,fc change de verd
en couleur d'or d'une fî grande beauté,qu'on
ne fauroit l'exprimer par des couleurs , ni
même la concevoir dans l'abfence de l'objet.
Lesplumes de la partie fupérieure du corps &c
des ailes , font d'un verd foncé entremêlé de
couleurd'or. Précifémentau defîbus du bec,
il y a une tache d'un blanc terni. La poitrine
& le ventre font d'une couleur grifâtre , ou
mêlée de gris fombre & terni. Les grandes
plumies font de couleur cie pourpre. La queue
eft d'un noir bleuâtre , un peu luftré pardef-
fus ; mais le deftbus eft encore plus brillant
que le dcflus , ce qui n'eft pas ordinaire. Les
jambes & les pies font très-petits & noirs. Le
nid eft compofé d'une fubfîance de coton ou
de foie très-belle ôc très-douce , jencfaurois
dire prccifément ce que c'eft ; c'eft un com-
pofé de deux matières, l'une rouge , & l'au-
tre d'un blanc-jaunâtre. Voye^ Oise au. ( /)
COLICOLLESoz/CAULÏCOLES,ff.
pi. (Arc/lit.) du latin cûulis : ce font de peti-
tes tiges d'où prennent naiflàtice les volutes
ou hélices du chapiteau corinthien. Ces co-
cclks partent de dedans des culots , compo-
fés de feuilles d'ornement qui pofent elles-
mêmes fur des tigettes. (F)
COLIM A , {Gécg. mod.) ville confîdéra-
ble de l'Amérique feptentrionale , au Mexi-
que. Long. 2-7 f ^3 ; lat. î8 , ^o.
CO LIMBE , f. m. colymbus maximus cau-
datus 5 {Hijl. nat. Ornith. ) oifeau de rivière
qui eft à-peu-près de la grofteur d'une oie.
Il a le corps allongé , la queue arrondie , &c
la tête petite. La partie fupérieure du cou eft
recouverte de plumes fi touffues . qu'elle pa-
roît plus grofle que la tête. Lesplumes du cou,
des épaules èc du dos , & les petites plumes
du delfus des ailes , enfin lesplumes de toute
la face fupérieure de cet oifeau , font brunes
ou plutôt d'une couleur cendrée noirâtre ,
avec des taches blanches qui fe trouvent en
petit nombre furie cou , & qui font fort fré-
quentes fur le dos : chaque plume en a deux
près de fon extrémité , une de chaque côté ;
ces taches font plus grandes fur les petites
plumes des ailes & fur les grandes plumes des
épaules, que fur celles du dos. La gorge & la
face inférieure du cou font blanchâtres. Le
deflus du cou , la poitrine , & le ventre font
blancs;on a v u à l'endroit de l'anus une bande
4^1 COL
tranrverfale noirâtre. Il s'eft trouvé auflfî un
de ces oifeaux dans i'ile de Jerfey qui avoit
h tête noire , Se un collier formé par de petits
points blancs. Il y a trente grandes plumes à
chaque aile ; elles (ont courtes à proportion
de la grolfeur de l'oileau j leur couleur eft
riioire ou d'un brun obicur. La queue ref-
femble à celle des canards ; elle ell très-
courte, «Se compofée de vingt plumes au
moins. Le bec eft droit , pointu , & long de
près de trois pouces. La pièce fupérieure eft
noirâtre ou livide •■, elle eft creufée en forme
. de gouttière , & garnie ju (qu'aux narines de
plumesquifontun peu replicesendeflus. La
pièce du defious eft blanchâtre. Il y;a au nii-
îieu de chaque narine une pellicule qui tient
au bord fupérienr. Cet oifèau a les doigts
joints enfemble par une membrane , ceux de
devant Ibnt Fort longs , Rir-tout le doigt ex-
térieur i celui de derrière eft le plus court &
le plus petit. La longueur des pattes eft mé-
diocre } elles font applaties Se larges ; la f\ice
extérieure eft brune , Se Tintérieure eft de
couleur plombée , ou d'un bleu pâle. Les
ongles font larges , & (emblables à ceux de
l'homme. Les pattes font dirigées en arrière
de façon qu'ellestouchent prelque à la queue
Se qu'il paroît que l'oifeau ne peut marcher
qu'en dreflant perpendiculairement fon
corps. Les couleurs des oifeaux de cette ef-
pece varient j il y en a qui ont des colliers , Se
dont le dos , le cou Se la tête font de couleur
noire avec de petites lignes blanches j d'au-
tres n'ont point de collier. La couleur de
toute la face fupérieure du corps tire plus fur
le cendré ; Se au lieu de petites bandes, il n'y
a que des points blancs ; peut-être que ceux-
ci iont les femelles , Se les autres les mâles.
Willughby , Ornhh. Voye[ Oiseau. (/)
. COLIN, f. m.CANIART, oz/ GRI-
S AIvT , larus velgravia major , ( HijL nat.
Ornhh.) oifeau de mer qui fe trouve plus
fréquemment fur les côtes de l'Océan que
l'ur celles de la Méditerranée : il eft de la
taille d'une oie de médiocre grandeur \ fes
plumes font renflées Se le font paroître gros,
quoiqu'il n'ait pas plus de chair qu'un petit
morillon. Il eft de couleur grife , c'eft pour-
quoi o'ci l'a wowLmk.grifart. Ses pies reflem-
bient à ceux d'une cane ; il nage , mais il
nç plonge jamais. Sa tête eft aufTi groflfe que
celle d'un aigle royal , Sç le bec aulTi grand
COL
que celui du plongeon de mer. L'ouverture
du goiier pft lî large qu'il avale de fort gros
poiftbns ; il prend ceux qui font rejetés fur
le rivage. Sa queue eft ronde. Se ne s'é-
tend pas au-delà du bout des ailes ; il vole
pendant long-remps fans fè repoier , Se il pa-
roît en Pair aufïî grand qu'un aigle ; il court
aftèz rapidement fur terre. Se fon cri fe fait
entendre de bien loin. Sa peau eft auili dure
que celle d'un chevreau ; quoiqu'il mange
beaucoup , il eft toujours fort maigre : ià
chaireft de mauvais goût , Se difficile à digé-
rer. Belon , liv. III, de la nature des oifeaux.
Foje^ Oiseau. (/)
CO'LINIL , f. m. {Hiji. nat. Botaniq.)
plante du Malabar , affez bien gravée ious
ce nom avec la plupart de fes détails , par
Van-Rheede , dans fon Hortus Malabar i^
eus , volume I , planche L V, pag2 l oj ; les
Brames ['appélentfchera-punca, Se J.Com-
melin dans fes notes , polygala Indica minor
Jîliquis recurvis.
*C'eft uii fous-arbriftèau qui s'élève fous
la forme d'un buiflbn fphéroïde , de 2 à 5
pies de diamètre , à racine blanchâtre , li-
gneuie , ramifiée ,' à écorce jaunâtre , por-
tant une fouche cylindrique de deux à trois
pouces de diamètre , fort courte , ramifiée
dès fon origine en plufieurs branclitfs cylir^
driques, menueS;, d'une à deux lignes de dia-
metrç , écartées fous un angle de 45 degrés,
à bois blanc , dur , recouvert d'une écorce
verte intérieurement , cendrée au dehors.
Les feuilles font alternes compofées , pin-
nées fur un double rang , longues de deux
pouces à deux pouces Se demi ; une fois
moins larges , compofées des trois à cinq
paires avec une impaire , de folioles ellip-
tiques, plus longues à leur extrémité anté-
rieure qui a une pointe , longues de 8 à 9
lignes , deux fois moins Larges, ternes , veç-
tes deflus, bleuâtres deflous, relevées d'une
côte longitudinale. Se rangées horizontale-
ment fur un pédicule commun , une fois
plus coun qu'elles,& accompagné à fon ori-
gine de deux ftipules caduques.
Chaque branche eft terminée par un épi
une à deux fois plus court que les feuilles ,
compofé dans fa moitié fupérieure de quatre
à fept fleurs feiïiles , rouge-pâles , de trois
lignes de diamètre , accompagnées d'une
petite écaille triangulaire.
COL
Chaque fleUr eft Hermaphrodite , poly-
pétale , complète , ir régulière , difpofce au
dcflous de l'ovaire ; elle confifte en un ca-
lice verdj hémifphériquc, petit, à cinq dents
periiflnntcs j en une corolle quatre ou cinq
fois plus longue , auffi longue que large , &
en une corolle à quatre pétales , dont le fu-
^érieur qui forme Tétendard , & les deux
ailes latérales font rouge-pâles & l'inférieur
qui forme la nacelle eft verd- blanchâtre ; les
érr.mincs font au nombre de dix réunies en
deux faifceaux , dont un de neuf filets for-
mant un tuyau fendu en deflhs dans toute
f t longueur , & le dixième couché fur cette
fente ; de ces filets, cinq font alternativement
plus courts , &c tous portent une anthère
jaune ; du centre du calice s'élève un dif-
quc en pédicule cylindrique loin des éta-
mines , qui porte un ovaire applati , allongé,
terminé par un (lyle cylindrique blanc, avec
un ftigmate ovoïde , velu , jaunâtre , placé
fur fon côté fupérieur.
L'ovaire en mûriflant devient un légume
en labre , très-com.primé par les côtés , long
d'un pouce & demi à deux pouces , iîx à
huit fois moins profond , courbé en haut
vers l'extrémité lupérieure 8c en bas à l'ex-
trémité inférieure , vert d'abord , enfuite
rouge-brun, partagé intérieurement en fix
à huit loges , & s-'ouvrant par l'extrémité
fupérieureen deux valves élaftiques ; chaque
loge contient une graine ovoïde-oblongue ,
taillée en rein , longue de deux lignes ôc
demie, une fois à une fois & demie moins
large , verte d'abord , enfuite noirâtre , atta-
chée horizontalement , pendante aux bords
fupérieurs des valves.
Culture. Le co/i/?// croît au Malabar dans
les terres fablonneufes : il fleurit deux fois
J'an ; favoir dans la faifon de la féchereflè
& dans celle des pluies.
Qualités. Toutes fes parties ont une faveur
légèrement acre & amerc j fcs gou(Ies , lorf-
qu'elles font encore jeunes ou vertes, lont
lu jettes à être piquées par des infedes du
genre du coflon.
Vf âge. Le lue qu'on en tire par expref-
fion , s'unit avec le miel pour en frotter les
puftules de la bouche.
Remarque. Le colinil forme un genre de
plante particulier qui fe range naturellement
auprès du fesban Ôc du fecuridaca dans la
COL 4<Î3
quatrième feAion de la famille des légumi-
neuies où nous Pavons placé. Voye^nosfa-
wiiks des plantes y volume II, page^'Xj , &
il diffère innnim.ent du polygala auquel J.
Commelin l'a comparé. ( M. Adanson. )
COLIN-MAILLARL) , i\ m. jeu d'en-
fans ; on bouche les yeux à un d'entre eux ^ il
pourfuit ainii les autres à tâton jufqu'à ce
qu'il en ait attrapé un autre qu'il eft obligé
de nommer , & qui prend ^<i place , & qu'on
appelle Çixx'i^'fcollintnaUla rd.
COLIN NOIR, ï'oye;j;PoiJLE d'eau.
COLIOURE , ( Géog. mod. ) petite ville
de France fortifiée dans le Rouflîilon , au
pié àcs Pyrénées , avec un petit port. Long,
2.0,45, îi; lat.^x, ^i ,4S'
^ COLIPHIUM , {WJI. anc.) forte de,
pain fans levain, groftîer, pefant , paitri avec
le fromage mou, & qui iervoitde nourri-
ture ordinaire aux athlètes. Il en eft parlé
dans les fatyres de Juvenal. Il falloit avoir
un bon eftomac pour digérer aifément une
pareille nourriture.
COLIQUE , f. m. ( Hift.nat. Conàylio.
logie. ) nom que quelques auteurs donnent
très-im.propremcnt & fajis aucun fonde-
ment à l'efpece de coquillage que l'on ap-
pelle communément cauris ou monnaie de
Guinée : c'eft une efpece de pucelage , cy^
prœa. ( M. Adanson. )
Colique, f. f. (Méd.) douleur plus
ou moins violente dans le bas-ventre.
Définition. La colique paroît tirer ion nom
de la douleur dans Pinteftin colon j cepen-
dant ce mot défigne en général toute dou-
leur intérieure du bas-veiitre. On auroit pu-
ne nommer colique qnt la douleur du co-
lon , comme on nomme pojfton iliaque, celle
qui attpque les inteftins grcies : mais Pufagc
en a décidé autrement : néanmoins les dou-
leurs de Peftomac , du foie ,-de la rate , des
reins , de la veffie , de Putérus , fe rappor-
tent aux maladies de ces parties ; &c l'on
diftingue encore de la colique , les mala-
dies qui occupent les tégumens de tout Pab-
domen.
Les douleurs de colique fbpt fi fort dans
l'humanité , qu'il n'y a ni âge . ni fexe , ni
pays , ni conftitution , qui en ioient exempts
pendant le cours de la vie i les enfans , les
jeunes gens d'un tempérament chaud & bi-
lieux, lesferamesjles vieillards, les perfonnqs
4^-1-
CO L
foniîcs d'une nature foible & délicate , ôc !
d^un lênriment vif, y font les plus fujecs. [
Pour en développer la nature autant qu'il
cft poilible , &c en former le pronoftic , il
fiut obferver foigneufcment il la colique eft
fixe , vague , changeant déplace , confiante,
périodique , intermittente , fympathique ,
opiniâtre , douloureufe , aiguë , caufant une
métaftafe , &c.
Ses caiifes &fes àlverfes efpeces. Ses caufes
>qui Ibnt en très-grand nombre fe peuvent
rédiger fous quarre chefs généraux : i°. des
matières inhérentes dans lesinteftins ; 2°. des
matières nées d'ailleurs «Se portées dans les
entrailles : 3°. la correipondance des nerfs
affcétés : 4°. des maladies propres aux in-
teftins Se au méfentere , produiient les di-
verfes douleurs de colique.
I. J'ai dit : i °. des matières inhérentes dans
les intejlins ; telles font leschofes acres , mor-
dicantes , de quelque nature qu'elles foient ,
bilieufes, rancides, putrides, acides, muria-
tiques', échauffantes, fpiritueufes, aroma-
tiques, ftimulantes ; les vomitifs , les pur-
gatifs , les poifons , ùc. Il faut les délayer ,
les faire fortir par haut ou par bas , endom-
ter la nature par des boifibns aqueufes , &
toujours oppofées au genre d'acrimonie.
Toute fermentation d'alimens qui trouble
le mouvement des inteftins, & par la diften-
lion excite des douleurs de colique , doit
être appaifée après les remèdes généraux ,
par des carminatifs ^ des anodins , des caï-
mans.
Lorfque la douleur caufe une tenfîon con-
vulfîve , &c qu'elle paroît produite par des
vents ou par la conftipation, l'indication
nous conduit à l'ufage des clyfteres émoi-
liens , réfblutifs , répétés coup fur coup ; à
des linimens carminatifs, nervins, appliqués
fur la partie afFedée ; aux pillules balfami-
ques , ôc à des infufions ou dé^odtions de
manne. Dans ces douleurs flatueufes des in-
teftins , le bas- ventre s'enfle , les vents ont de
la peine à fortir ; le mal aigu efl fui vi d'anxiété
ou d'opprefïion j fi les vents paflent par haut
& par bas , le malade fenr du foulagement ;
il cette colique venteufe procède de l'atonie
du ventricule Se des intetlins, elle demande
des carminatifs plus chauds qu'à l'ordinaire :
quelquefois la liatuofité des inteftins a fa
fource dans cette foiblefTe du ton Se du peu
COL
de force de ces vifceres , fur-tout dans les
perfonnes âgées , Se dans celles qui ont fait
un ufage immodéré d'alimens flatueux , de
boiflons fpiritueufes , dans celles dont le
corps a été affoibli par les maladies ou les
remèdes. Pour lors , on n'a de fecours que
la cure palliative Se préfervative.
Si la colique vient des vers logés dans les en-
trailles , on y remédiera par les vermifuges
convenables. Les enfans font fujets à cette
efpece de colique accompagnée quelquefois
d'une douleur poignante dans le bis-ventre,
& de iyncopes ; ils éprouvent auiTi des tran-
chées occ.iiionées par une ftagnition d'un
lait aigri Se rendu corrofif , ce qui les jette
quelquefois dans des convulfîons épilcpti-
ques. Le iiiop de chicorée avec la rhubarbe
eft le meilleur retnede.
La colique biligufe fera un petit article
particulier dans lequel on indiquera Tes
lymptomes Se fa cure. Pour la colique
qui naît de l'endurciilement des matières
fécales dans les gros inteftins , elle fe termine
par la guérilbn de- la conftipation. Fore:^
ce mot.
IL Les humeurs viciées du corps entier
ou de quelque partie , étant portées aux in-
teftins , y caufent de vives douleur^ de coli-
que , & requièrent des fecours oppofés à la
nature du vice. Telle eft l'humeur de Li
goutte , le catharre , la cachexie , le fcorbut ,
la galle , l'évacuation fupprimée de la fueur,
de l'urine , de la falive , des excrémens ,
d'un ulcère , d'un abcès , des hémorrhoï-
des , ott commue il arrive dans les maladies
aiguës , inflammatoires, épidémiques, con-
tagieufes , dans lefquelles maladies les ma-
tières acres fe jettent de toutes parts dans les
inteftins. Il eft néceflaire de détruire la ma-
ladie même , Se en attendant de lubrifier le
canal inteftinal par des boiffons & des in-
jeéïions onélucufes , détergentes , adoucif-
fantes. Lorfque la fuppreflionduflux hémor-
rhoïdal Se menftruel eft l'origine de la coli-
que, il faut employer la faignée du pie ,
les laverncns émolliens , les demi-bains , les
anti - fpafmodiques , les eaux minérales ,
l'exercice convenable Se le régime , qui dans
toutes les douleurs d'entrailles eft d'une ab-
folue nécelTité.
III. Souvent les inteftins fbuffrent par
fympathie des autres parties inalades,comme
de
COL
<le lutérus dans les femmes grofles qui avor-
tent , qui accouchent , qui font en couches
ou nouvellement accouchées , qui perdent
leurs règles, qui ont les mois, les vuidanges
lupprimées, ou qui foufFrcnt d'autres affec-
tions de la matrice. Ce même phénomène
a lieu dans les maladies des reins , la pierre ,
la néphrétique , l'inflammation du dia-
phragme , du foie , ùc. Toutes les douleurs
de colique de ce genre , nées par fympathie ,
cellcnr par la guérifon des maux dont elles
émanent. Telle eft encore la colique convul-
five & quelquefois épileptique des enfans ,
qui vient des douleurs que leur fait la fortie
des dents , en vertu de la correspondance
qu'ont entre ellesles parties nerveufes. Telle
eftaulli la colique d^entrailles , caufeeparun
calcul biliaire détenu dans la vélîcule du
fiel , lequel irrite Ton conduit. Les femmes en
couches éprouvent des douleurs de colique
dans la fupprelîion de leurs vuidanges , lorf^
qu'on néglige de leur bander le ventre com-
me il faut après ^accouchement, ou lorlqu'il
iurvientdu refroidiflement.
IV. Les maladies propres aux intefl:ins&
au méfentere , produifent de vives douleurs
de colique ; c'eft ce qui arrive dans Pobf-
tru6lion des glandes du méfentere , dans les
abcès de cette partie , qui , s'étant portés fur
les boyaux, y croupilîènt, corrodent les
membranes & les gangrènent. On en trouve
quelques exemples dans Willis , Eenivenius
éc Wharton. Telles font encore les coliques
qui proviennent d^un reflerrement , d'une
contradtion, d'un étréciflement , d^unskir-
re , d^une callofité , dans quelque portion
des inteftins, tous maux qui détruifent l'éga-
lité du mouvement de ces vifccres. Enfin
toutes leurs maladies, ou celles des parties
voifines , l'inflammation , l'hernie , l'éréiî-
pcle, lerhumatifme, Reproduiront cet efltt,
Efpeces particulières. Quelquefois les co-
liques font la fuite de plufieurs maladies ,
comme de toute elpecc de fièvres mal trai-
tées , de diarrhées , de dyflcntcries trop tôt
arrêtées par des aftringens , des vomitifs ,
ou des cathartiques trop violens.
Il y a encore une elpece de colique fpaf-
modique , que quelques-uns appellent co//^z/e
fanguine , parce qu'elle provient du fang qui
s'efl: amaflé au dedans des tuniques des in-
teftins , fur-tout du colon , où ce fàng
Tome FUI.
COL 4<Î5
croupi irrite , difl:end les membranes ner-
veufes qui font d'un fentiment très-délicat.
Les hommes robuftes qui mènent une vie
déréglée en font les martyrs ordinaires , ôc
quelquefois les femmes lorfque leurs règles
viennent àêtre fupprimées. Cette co//yz/e pro-
cède aulïi de la fuppreiTion d'un flux hémor-
rhoïdal périodique.
On connoît dans certains endroits une
autre elpece de colique fpafmodique , que
l'on peut proprement appeller etidémique y
parce qu^elle eft commune dans certains cli-
mats &: dans certains pays ; alors ces fortes
de coliques tirent leur origine de l'air , des
exhalailons , des alimens , desboiflbns , ùc.
Par exemple , le bellou en Derbishire , qui
piovient des exhalaifons de la mine de
plomb , eft fi funefte , que les animaux , &:
même la volaille , en fouffrent. On peut
citer en exemple encore , les habitans de la
Moravie , de l'Autriche èc de la Hongrie -,
ils font fouvent affligés d'une colique convul-
five, qui n'a d'autre caufe que ^habitude
immodérée des vins fpiritueux de ces con-
trées, fur-tout quand on n'a pas foin de
fe garantir du froid. On peut rapporter aflèz
commodément cette dernière maladie à la
colique fanguine , parce qu'elle demande
les mêmes remèdes, avec î'ufage des boif-
fons adouciflantes & émulfionnées , prifes
chaudes , pour rétaWir en même temps la
tranfpiration.
La colique fpafmodique qu'on nomme co"
tique de Poitou , autrement colique des pein-
tres ^ colique des plombiers y pzTce qu'elle eft
caufée par le plomb , I'ufage des faturnins ,
&c qu'elle commence à s'étendre dans toute
l'Europe , mérite par cette raifon un article
particulier.
Symptômes delà colique. Les malades atta-
qués delà colique , éprouvent plus ou moins
les fymptomes fuivans, à proportion des
degrés de la maladie. Toute la région des
inteftins, ou une partie eft le iiege de la
douleur. Les malades reflèntent dans le bas^
ventre une fenfation très-vive,. piquante >
poignante , brûlante , fixe ou vague \ ils font
plein de mal-aife & d'inquiétudes ; ils ne
;geuvent dormir \ ils s'agitent , fè couchent
îur le ventre , fur l'un ou l'autre coté pour
trouverunepofturequilesfoalage.Queîque-
fois les vents & les boiborigmes fe joignckit;
Nnn
4.66 COL
à cec état , de même que la conftîpation , le
renefme , le pouls ferré , la fièvre , la fup-
preilîon d'urine, la difficulté de refpirer ^ le
dégoût , la cardialgie , les naufées, les vo-
milîèmens : mais voici d'autres fymptornes
encore plus dangereux , le hoquet , le frilîon,
le tremblement , l'abattement de toutes les
forces , les fyncopes , la Tueur froide , le dé-
lire , & quelquefois des convulfions épilep-
tiques , dont les fuites font la deftrudion de
la machine. Qiielquefois ces fymptomes fe
terminent par d'autres maladies , la fuppu-
xation , la jaunifle,la diarrhée , la dyflenterie
&■ pluficurs autres maux , fuivant les caufes
& la violence des accès de colique.
Pronojîics. Les pronoftics fe tirent de la
durée du mal, du nombre & de la nature
des fymptomes ; ainfic'eftunbonpronoftic
lorfque les divers fymptomes qu'on vient de
détailler manquent j que la douleur eft inter-
mittente , tolérablc , & qu'elle diminue : les
vents foulagent le malade quand ils peuvent
paflèr par haut ou par bas. La colique ac-
compagnée de cardialgies , de naufées , de
vomiflèmens , devient déjà dangercufe ; elle
l'eft beaucoup lorfqu'elle faifit le malade
avec violence en même temps que le friflbn ,
&: que cet état fubfifte y car c'eft un figne
d''une inflammation qui dégénère en ipha-
cele, fî on néglige d'y apporter un prompt
jemede. Elle Peft encore davantage , fi con-
jointement à ces fymptomes , fe trouvent
réunis la conftipation , la fupprelTîon d'uri-
Jie , la fièvre & la difficulté de refpirer. Elle
l'eft beaucoup plus , fî la fbiblelîe , le délire
& le hoquet îurviennent : mais c'eft un pro-
nofticfunefte , fi les forces s'épuifent, Ci les
convulfions fuccedent , le froid , la fueur
coUiquative, une vraie ou fauflè paralyfie des
extrémités , & finalement la ftupeur des pies
&: des mains j pour lors le malade eft fans
cfpérance.
Curegénérale. Nous avons vu que la cure
devoir toujours être adaptée à la caufe , &
variée en conformité : mais quand cette
caufe eft inconnue , que doit-on faire ? Il
faut toujours employer les remèdes géné-
. laux j la faignée , pour peu que l'inflamma-
tion foit à craindre , les fomentations chau-
des ou émollientes perpétuellement répétées,
leslavemensrelâchans, délayans , antiphlo-
gifUqu^ , les laxatifs ^ les boitTons humec-
C O L
tantes , 6c perfifler danscet ufage jufqu'à ce
que le mal foit appaifé , ce qui arrive d'or-
dinaire fans que la caufe ait été découverte
par le médecin. La colique fe guérit naturel-
lement par une fueur abondante , par un fai-
gnementde nez , par un flux hémorrhoïdal ,
par un cours de ventre , par une diarrhée ,
par un écoulement d'urine, ùc. mais les re-
mèdes généraux qu'on vient d'indiquer ne
tendent qu'à avancer la guérifon , & à la
déterminer plus sûrement.
Cure préfervative. Ceux qui font fujets à
des coliques ou de vives douleurs dans les
inteftins , ce qui eft afléz ordinaire aux per-
fonnes affligées de la goutte , du fcorbut ,
deshémorrhoïdes, de i'afFeâ:ion hypocon-
driaque , hiftérique , &c. doivent obferver
un régime f évere , éviter les pafïîons violen-
tes, s'abftenir des alimens de difficile digef-
tion, gras èc falés, entretenir la tranfpi-
ration , fur-tout dans le bas-ventre & la ré-
gion des reins , tenir les pies chauds , mettre
en pratique les friélions , l'exercice de quel-
queefpece qu'il foit , éviter les vins fufpeéts ,
les liqueurs ipiritueufes , les fruits d'été qui
ne font pas mûrs , &c.
Obfervations cliniques. Comme la plupart
des coliques font accompagnées d'inflamma-
tion , ou que l'inflammation ne manque
guère de furvcnir , il faut tout mettre en
ufage pour domter cette inflammation ou
pour la prévenir. Dans les douleurs fpafmo-
diques des inteftins , on doit s'abftenir des
vomitifs , des cathartiques , des lavemem
d'une qualité acrimoiiieufe. Si la conftipa-
tion eft jointe à la colique , & qu'elle foit in-
vétérée , il eft befoin de répéter les clyfteres
plufieurs fois de fuite , d'y joindre les fup-
pofitoires & les fomentations émollientes fur
le bas-ventre. La fumée de' tabac , que quel-
ques-uns recommandent d'injeéter dans le
fondement par le moyen d'une feringue con-
venable, doit être abandonnée aux maré-
chaux pour les chevaux. On s'abftiendra des
carminatifs , des échauffans , des fudorifi-
ques dans toutes les coliques convulflves &
inflammatoires. Enfin l'on évitera de tom-
ber dans l'erreur des praticiens , qui , tant
que la colique eft encore renfermée dans les
bornes de l'inflammation , l'artribuent mal
à propos au froid , au flatuoiités , aux vents\^
& la traitent par des remèdes chauds^
COL
carminatifs, dont les fuites font très-funeftes.
H faut efpérer que cette mauvaife pratique ,
contraire à tous les principes , tombera dans
notre pays avec les livres qui la recomman-
dent ; c^eft ici où la bonne théorie doit fervir
de guide , & c'efl: dans le traité d'HofFman
fur cette matière qu'on la trouvera. Toutes
les obfervations qu'on lit dans tant d'ouvra-
ges fur la colique guérie par tels ôc tels remè-
des , par les noix de Bicuibas , ki/i. del'Acad.
des Sciences , îjio, page z 6", par la Pareira-
brava , ib.page^j ^ par des teintures chymi-
ques , 1753, Mém. page %6x, dcc. tous ces
remèdes, dis-je , & autres les plus vantés,
ne fervent qu'à jeter dans l'erreur.
Antiquité delà maladie. Sipréfentementà
la diverlité prodigieufe descaufes de Xicolique
on joint la connoilTance de la ftruéture de
notre machine , de en particulier des intef-
tins , qui font le (îege de cette maladie , on
ne pourra douter que fon exiftence ne foit
un apanage inféparable de l'humanité. Jeiai
bien que le nom de cette maladie eft du
nombre de ceux qui ne fe trouvent point
dans HippoGrate ; mais il ne s'enfuit pas de-
là que la maladie n'eût pas lieu de fon temps.
Elle eft certainement comprife fous le nom
de tranchées ou de douleurs de ventre , dont
il parle en pluiieurs endroits ; & en effet la
colique eft-elle autre chofe?
S'il en faut croire Pline , le nom n'étoit
pas feulement nouveau du temps de Tibère ,
mais la maladie elle-même étoit toute nou-
velle, èc perfonne n'en avoir été attaqué
avant cet empereur , enforte qu'il ne fut pas
entendu à Rome lorfqu'il fit mention de ce
mal dans un édit où il parloir de l'état de fa
fanté. Il fe peut que le nom de colique eût
été inconnu jufqu'à ce temps-là, mais la
confëquence du nom à la choie eft pitoyable.
Les médecins inventèrent un nouveau mot ,
foit pour flatter l'empereur , foit pour fe faire
plus d'honneur dans la guérifon de la mala-
die , foit pour fe fingularifer dans cette con-
jonéburc : cette efpece de charlatanerie n'eft
pas fans exemple.
Quand Mademoifelle eut , il y a quelques
années , une petite vérole qui heureufement
fut légère, M. Sylva fon médecin , dont la
pratique condftoit en néologifme & en tour-
nures gentilles de ces bulletins modernes
qu'on compofe fans réflexion pour le public ,
COL 4^7
& qu'il lit fans intérêt ou fansetre mkux inC.
truit de l'état du malade; M. Sylva, dis-je,
quahfia pour lors le premier du nom de dif
crête la petite vérole de S. A. S. Le terme
bien imaginé prit faveur ; mais l'efpece de '
petite vérole en queftion n'étoit pas plus
nouvelle dans le monde que la colique l'étoit
du temps de Tibère. Si la petite vérole dif-
crête devient plus rare parmi les grands , la
colique y devient plus commune ; & n'eût-
elle pour caufe que la feule intempérance ,
on peut préfumer, fans crainte de fe trom-
per , que ce mal fubfiftera jufqu'à la fin du
monde. ( M. le chevalier de Jau court.)
Colique bilieuse, (Médec) efpece de
coliq^eqni procède d'un débord de bile âcrc
dans les inteftins.
Cette efpece de colique e(\: très-commune ,'
& règne fur-tout en été & au commence-
ment de l'automne; elle attaque principa-
lement les jeunes gens d'un tempérament
chaud ôc bilieux , les perfonnes qui vivent
d'alimens gras , huileux, alkalins & pour-
riftans , les gens riches , qui ont ce qu'on
nomme les meilleures tables, fervies des
plus rares poiflbns & du gibier le plus dé-
licat par fa chair & fon fumet.
Les fymptomes de cette maladie font des
douleurs vagues 6c violentes dans le ventri-
cule , les inteftiiis , les hypocondres , le dé-
goût, les naufées , le vomilTement, la conf-
tipation , des tiraillemens , des agitations ,
des fueurs froides, des fyncopes, l'abatte-
ment des forces , la déjeétion d'une matière
jaune , verte , poracée , acre & corrofive.
L'indication curative confifte à évacuer
cette humeur , à la mitiger ôc à appaifer les
douleurs. -
On ne peut trop tôt employer la fiignée ,
les boiflbns aqueufes, fimples , légères,
diluentes , en quantité; les purgatifs doux,
liquides , fouvent répétés , Ôc fuivis des nar-
cotiques après leur effet; les clyfteres, les
fomentations adoucilTantes fur le bas-ventre,
les bains chauds faits avec les plantes émol-
hentes , Ôc joints avec foin à tous ces remè-
des. Pour confirmer la guérifon & empêcher
la rechute , la diète févere eft abfolument
néceffaire , la boiffon de crème de riz, d'or-
ge , de gruau , les panades, le lait coupé, la
promenade^ en voiture ôc enfuite à cheval.
Enfin on rétablira peu à peu prudemment
N n n z
4^ C.OL^
par les {lomachiqucs le ton des vi fcercs afroi-
blis : je renvoie le ktbeur à Sydcnham, qui
a cîoriné une defcriprion fi complète & ii
fsge de cette efpcce de cd/que ,ftâ. iv , ch.
rij, qu'elle ne lai iTe rien à dcfn-er. {M. le
charalier DE Jau COURT.)
\. CotiQUE DF Poitou , ( Médec. ) efpcce
particulière de cdiçuequï provient des exha-
iriifons , des préparations de plomb , & de
lufage des vins iophiftiqués avec des prépa-
rations de ce métal ; en latin colica Piâonum.
Eu I yji 5 dit M. de Thou , urne VI,
ynge f^-i,! , la France fut affligée d'une mala-
die julqu'alors inconnue, qu'on nomma
colique de Poitou , parce qu'elle commença
à fe faire fentir dans cette province. Dès qu'un
homme en eft attaqué , ?joute-t-il, fon corps
devient comme paralytique ; il a le vifage
pale , l'efprit inquiet j des maux de cœur,
des vomiffemens , un hoquet continuel ,
ime foif ardente, une difficulté d'uriner,
luie douleur violente dans l'eflomac , les
inteflins , les hypocondres , les reins ; il y
en a même dont les pies , les jambes , & les
mains, deviennent paralytiques , après avoir
été attaqués de convulfions cpileptiques ,
ùc. Ce trait hiftorique efl d'autant plus fin-
gulier , que d^un coté il renferme une def-
cription exadte des fymptomes de la coli-
que des plombiers , autrement dite colique
des peintres , colique convuljlve faturnine ; &c
que de l'autre on ne comprend guère com-
ment elle efc refiée inconnue dans ce royau-
me jufqu'au temps où M. de Thou en
rapporte la naiflànce. Quoi qu'il en foit ,
c'efl une colique nerveufe , qui depuis n'a fait
que trop de progrès dans l'Europe , ôc dont
voici la caufe & les fymptomes.
Elle provientdes vapeursqui s'élèvent des
fourneaux oii l'on fond le plomb , que l'on
1 efpire & que Ton avale avec là falive. Elle
eft très-frcquente parmi les ouvriers qui
s'occupent à fondre , à purifier ce métal ,
ou à le féparer de l'argent dans àts four-
neaux d'affinages , comme le pratiquent
ceux qui travaillent dans les mines de la forêt
Noire en Allemagne , dans celles d'Angle-
terre en Derbishire , de ailleurs , où malgré
l'attention que l'on a de ne drefïer les four
neaux que iur des lieux élevés , & de les
cxpcfer aux vents , les exhalaifons en font
fatales aux ouvriers^ aux habitans, 6c même
COL
en Angleterre aux animaux qui pafîtnt près
des minerais de plomb. Les poititrs de terre ,
qui fe (crvent delalquifoux, efpece de plomb
minéral difficile à fondre , eu de plomb en
poudre , peur vernir leurs ouvrages , font
fort lujets à cette efpece de colique. Les pein-
tres qui emploient la cérufe , n'y font pas
moins expofés , de même que les fcmir^es
qui mettent du blanc, compoiition perni-
cieufe pnr la cérufe qui en Cm la bafe , dont
le moindre effet eft celui de defiécher li
peau , &c d'avancer par les rides la vieilleflè
qu'elles fe propofent d\-loigner.
On eft encore convaincu par plufîeurs
expériences, que les médicamens dans la
compofîtion ciefquels il entre du plomb,
com-ine la teinture antiphtifique, le fuc,
fel magiftere ou vitriol de Saturne, que les
charlatans prefcrivent intérieurement contre
le crachement de fang , le piflèment de fang >
la gonorrhée , les fleurs blanches , & autres
maladies femblables, produifent enfin cette
malheureufe colique.
Mais l'ufage que plufieurs marchands de
vin font aujourd'hui de la cérufe ou de la
litharge pour éclaircir , corriger , édulcorer
leurs vins , a fi fort répandu cette cruelle
maladie dans toute l'Europe , que les fouve-
rains font intéreffés à chercher les moyens
les plus convenables pour en arrêter le couis.
Perlbnne n'eft à l'abri des triftes efî^ts qui
réfultent de cette fophiftication de vins , &c ,
particulièrement des vins acides , comme
par exemple , des vins du Rhin , que l'on
édulcore de cette manière en Suabe de ail-
leurs avant de les envoyer en Hollande , Se
dans les autres pays où ces fortes de vins
adoucis font recherchés.
Il eft donc certain que toutes les parties,
du plomb , fes exhalaifons , fa poudre , ôc
Ces préparations, produifent principalement
la colique de Poitou , dont voici les fymp«
tomes. -
Le malade eft attaqué de douleurs aiguës.
& infupportables dans le bas- ventre, qui fbnc
vagues ou fixes : il relient une douleur lanci-
nante & poignante , dans l'eftomac , dans
ie non.brill, dans les hypocondres , une
:onftipation opiniâtre , qui cède à peine aux
lavemens ôc aux laxatifs ; des agitations con-
tinuelles, le dégoût, des naufées , la pâleur,
ia frigidité , des fueurs , des fyncopes.
COL
friquentes , Pabattemenr de toutes les for-
ces , le troubk dans toutes les fecrétions,Ie
tremblement , la parnlyiie qui en eft une
fuite, ou un afthme fpafmodique incura-
ble i fymptomes qui ne fe manifeftent dans
route leur étendue que lorfqu''ii n'y a plus
de remède.
Pour guérir cette maladie , quand elle
n'eft pas parvenue à fon dernier excès , il
faut employer les apéritifs , les fondans , les
favonneux , les défobftruans , les lénitifs
doux &dcterf:fs en forme liquide , médio-
crement chauds & en petite dofe. Dans le
temps des convulfions fpafmodiques , on
donnera les caïmans , les opiates avec le fa-
von tart.ireux , ou Topium mêlé avec le
cûjtoreum , les clyfteres avec le baume de
Copahu. On appliquera fur le bas-ventre des
flanelles trempées dans une décodion de
fleurs de camomille , de baies de genièvre,
& de femences carminatives ; des demi-bains
faits avec les plantes chaudes &c nervines. On
frottera tout le corps , &: en particulier les
vertèbres &: le bas-ventre , avec les fpiri-
tueux , les huiles de romarin & autres de
cette efpece. Si la paralyfie commence à fe
former , il faut recourir à l'ufàge des eaux
minérales fulfureufes.
Un médecin françois a donné il y a plus
d\m fîecle un traité latin in-/f. decolicâ Pic-
tonum , qui eft inutile aujourd'hui j mais on
trouvera de bonnes obfervations fur cette
maladie dans la bibliothèque raifiinnée. ( M. le
chevalier DE JaucoUET.)
Colique , adj. en ariatomie , fe dit de
quelques vaifl'eaux qui fe diftribuent au co-
lon. V^oye^CoLO^.
COUR, f. m. {Hift. mod.) officier de
l'empire de la Chine , dont la fondion eft
d'avoir' Pinfpedion fur ce quife pafle dans
chaque cour ou tribunal , & qui , fans ctre
membre de ces tribunaux , aiïiftc à toutes
la afîemblées , de reçoit la communication
de toutes les procédures. C'eft proprement
ce que nous appelions un infjpecleur ou con-
trôleur.
Il a des intelligences fecretes avec la cour j
& dans Poccafion il attaque ouvertement les
mandarins , & cela non- feulement fur les
fautes qu'ils peuvent commettre dans leurs
fondions , mais même dans leur vie particu-
lière & privée.
O Q) 11^ 4^^v
Pourqu'ilfoitjn3tpai'.ttal,.o»lcrèndencié-,
rement indépendant , 6c fà. charge eft per-
pétuelle. Les colirs font redoutibics-., njêmc-
aux princes du fang. ( G )
COLIS , f. m. terme de négoce- en ufàge
à Lyon ; il eft fynonyme à ballot , balle ,
caijfe y &c, y^o^'e:^ le diclionn. du Commerce,
COLISÉE , f. m. ( Hifl. nat. ) On fait que
chez les Romains c'étoit un amphithéâtre
ovale que bâtit l'empereur Vefpaiîcn , près
du ballin de la maifon dorée de Néron.
On y ^'oyoitdesftatuesquirepréfentoient
toutes les provinces de l'empire, & dans le
milieu étoit celle de Rome tenant une
pomme d'or dans fa main. On donnoit en-
core le nom de colifée à un autre amphithéâ-
tre bâti par l'empereur Sévère.
On répréfentoit dans le cclifée des jeux dc
des combats de gladiateurs & de bêtes fau-
vages. Ce qui refte aujourd'hui de ces édi-
fices eft tcès-peu de chofe , le temps Se la
guerre les ayant réduits en ruines, f^cye:^ '
Amphithéâtre. Diâ. de Trév. & de Me
réri. ( G )
^COLISSE , f. m. ( M^nuf. en fhie. )
forte de mailles entre lefquelies on prend les
fils de la chaîne ou du poil , pour les faire.lc-
ver & baifter àdifcrétion. Il y a les mailles à
grand coVjJe ; ôc les mailles h. colijfe fimpk.
F'oye:^^ l'article Y ELOVKS.
COLL, {Gécgr.) île dépendante de l'Éco{l /
fe, du nombre des Werternes, jadis lesAV-
brides : elle n'eft féparée de celle de Tyre-Y
qui eft à fon midi , que par un canal aflèz
étroit : & l'on obfervc que la nature fit ces
deux îles particulièrement l'une pour Pau-
tre , en ce qu'il naît plus de filles que de
garçons dans Tyre-Y , de plus de garçons
que de filles dans Coll. Cette dernière, un
peu plus grande que la première , a dix mil-
les du pays en longueur , 6c deux en lar-
geur : elle eft généralemeiu fertile , & Tes
cotes abondent en ftockfish. Des proteftans
feulsPhabitent, & elle appartient à l'une des
branches delà familie.de Maclean. {D. G.)
COLLADI , f. m. ( H"//?, nat. Botaniq. ) .
les Brames nomment ainfi & tambidc-baio , .
lesPortugais/âv/7.f-orc/^e/><j , les Hoikndois
ocrhangers , un arbre du Malabar que Van-
Pvheede a fait fort bien graver , fous le nom:'
de kaîou-konnas,ce^-h.-(Xne cafte fauvage,
au volume VI de ibn Hortus malabaricus , .
470 COL
flanche XII:, page %î ; c'eft le mimofa 4 bîge-
mina , inermis ,foliis bigeminis amplis acumi-
natis y de M. Linné dans fon^^^e/Tzj naturœ ,
édition 1 1 , imprimé en 1 767 ^page 6jG.
Cet arbre s'élève à 70 pies ou 80 pies de
Iinuteur i Ton tronc a 1 5 ou 20 pies de haut
fur trois à quatre pies de diamètre ; il eft
couronnépar unecime rphériquejCompoféc
de nombre de branches alternes , lèrrces ,
écartées d abord fous un angle de 45 degrés,
enfuite horizontalement à bois rouge au cen-
tre , brun à l'aubier , recouvert d'une écorce
rouge.
Sa racine eft très-longue , traçante , rouge
dans ion bois & dans Ton écorce.
Ses feuilles font pinncesfîmplement,com-
pofées d^une à deux paires de feuilles ellipti-
ques pointues aux deux bouts , longues de
trois à cinq pouces , deux fois moins larges ,
entières , minces , fermes , luifantes , brunes
en deflus , plus claires en deflbus , «relevées
d'une côte longitudinale , ramifiée de huit à
dix paires de nervures alternes , attachées
vers le bout d'un pédicule commun cylin-
drique, prelqu'une fois plus court qu'elles.
Lesjeunes branches font terminées par un
panicule une fois plus long que les feuil-
les , partagé dans ia moitié fupérieure en
huit à dix branches alternes , écartées fous
un angle de 45 degrés , portant chacune
quatre ou cinq têtes , compofées de cinq à
fix fleurs fefïîles, blanchâtres, longues de
quatre à cinq lignes.
Chaque fleur eft hermaphrodite , com-
plète , monopétale , régulière , difpofée au
deflbus de l'ovaire ; elle confifte en un calice
verd , caduc , à tube court , partagé en cinq
dents , en une corolle monopétale blanche ,
une fois plus longue, à cinq divifions retrouf-
fées en deflbus , & en vingt-cinq étamines
une fois plus longues , réunies à leur origine
&: rapprochées en un faifceau ; du centre de
la fleur s'élève uii difque en pédicule cylin-
drique, aflez éloigné des étamines, portant
un ovaire elliptique , applati , long , terminé
par un ftyle cyHndrique , tronqué & cou-
ronné par un ftigmate velu.
^/ovaire en mùriflant devient un légume
elliptique , long de cinq à fîx pouces , fept à
huit fois moins large , roulé en deux tours
de fpirale, entouré de deux groflès nervures
velues : vertes extérieurement , jaune-rou-
COL
geâtre au-dedans, membraneux , fec, s'ou-
vrant en deux valfes , partagé intérieure-
ment en dix à douze loges qui contiennent
chacune une gf aine lenticulaire de flx lignes
de diamètre , noire , lifle , luifante , à amande
verte , recouverte de deux pellicules.
Culture. Le colladi croît au Matabar dans
les terres iàblonneufes & pierreufes , fur-
tout autour de Parou & de Repolin ; il eft
toujours verd &: toujours chargé de fleurs
& de fruits.
Qualités. Ses fleurs font fans odeur ; les
autres parties font fans faveur , mais répan-
dent une odeur forte & ingrate.
Ufages. Ladécoétion de fes feuilles , ou
même fon écorce réduite en pâte avec le fu-
crc, guérit la lèpre èc empêche les cheveux
de blanchir.
Remarque. Quioique cet arbre ait beau-
coup de rapports avec l'acacia , il eft évident
qu'il doit former un genre particulier dans
la famille des légumineufes, & qu'il ne doit
point être confondu avec? lui , & encore
moins avec la feniitive , mimofa , comme a
fait M. Linné qui n'a pas fait aflez d'atten-
tion que le calice de la fenfitive eft partagé
en 1 5 dents , que fes étamines ne paflènt
pas le nombre de huit , & que fon légume
fe fépare par articles. Voye-;^ nos Familles
des plantes , volume II , page ^z8. {M,
Adanson. )
COLLAGE, ( Jurifpr.) Voy. Col âge.
Collage, terme depapeterie ; c'eftla der-
nière préparation que Pon donne au papier ,
& qui le met en état de recevoir Fécriture.
Cette préparation confifte à l'enduire feuille
par feuille d'une colle faite avec des rognures
de parchemin & de peaux de mouton , &
quelques autres ingrédiens qu'on y ajoute-
Pour la manière de coller le papier , Foye^
l'article Papier , & la defcription des arts &
métiers de M. Bertrand in-^ .
COLLAO , ( Géog.) contrée de l'Amé-
rique méridionale au Pérou , dans la pro-
vince de los-Charcas.
COLLATAIRE, f. m. (J^rr/pr.) eft
celui que le collateur a pourvu d'un béné-
fice. Cette exprefïîon eft peu ufitée; on dit
plus communément le pourvu par le colla-
teur. Voye';(De[îiCOTnhe , jurifprud. canon, p.
Z 46* , coi 2, , fccl. ij. {A)
COLLATÉRAL, zà],' en terme de
COL
géographie , Te die d un lieu j d'un pays ,
ùc. fitué à côté d'un autre. Ce mot cft com-
pofé de cum , avec, & de latusy côté.
Collatéral. Points collatéraux , dans
la cofmographie , font les points placés entre
les points cardinaux. Fbye:^^ Cardinal &
Point.
Les points collatéraux fc divifent en prin-
cipaux , lefquels font ceux qui font égale-
ment éloignés des points cardinaux j ik. en
fecondaires , qui font à Tégard des premiers
ce que ceux-ci font à l'égard des cardinaux.
Les points collatéraux fecondaires fe divifent
enfuite en, fecondaires du premier & du
fécond ordre : ceux du premier ordre font
également diftans des points cardinaux &
des points collatéraux principaux \ ôc ceux
du fécond ordre font également diftans ou
des cardinaux & des fecondaires du premier
ordre , ou des principaux & des fecondaires
du premier ordre. Fbje:^ Point.
Ainiî les points <:o//a/er^wa:principaux (ont
les points du nord-eft , du fud-eft , du fud-
oueft, &du nord-oueft. Les points co//^/e-
raux fecondaires du premier ordre , font les
points du nord nord-eft , fud fud-eft , &c.
ceux du fécond ordre (ont les points du nord
quart de nord-eft , fud quart de fud-eft , &c.
Les vents collatéraux font ceux qui fouf-
ilent des points collatéraux. Voye^ Vent.
Tels font les vents de nord-eft , fud-eft ,
nord-oueft , fud-oueft , &c. 6c leurs divi-
fions. Cham. (O)
Collatéral, (Jurifpr.) eft celui qui
eft parent de quelqu'un à latere , c'eft-à-dire
de coté , ôc non en ligne direéte : les frères,
les oncles 5 lescoufîns, fom des collatéraux;
ils fojment ce que l'on appelle la ligne colla-
térale , qui eft oppofée à la ligne directe. On
diftingue deux fortes de collatéraux ; les uns
qui tiennent en quelque forte lieu de père &
de mère , tels que les oncles & tantes,
grands-oncles &c grandes-tantes : on les
appelle collatéraux afcendans yipour les diftin-
guer des autres qui font en parité de degré ,
ou en degré inférieur , tels que les frères ôc
fœurs , coufins, arricre-coufîns. On diftin-
gue aufîi les fucceffions diredes des fuccef-
fîons collatérales ; ces dernières font celles
auxquelles les collatéraux font appelles. Voy.
Consanguinité , Degré , Parente ,
Succession.
COL 471
Collatéral , à Rome , eft un juge
civil qui fait la fondion d'afleffeur ou con-
feiller auprès du maréchal de cette ville , &
juge avec lui les caufes d'entre les bourgeois
èc autres habitans : il y en a deux ^ Tun qu'on
appelle premier collatéral , l'autre qu'on
:i'ppt\k fécond collatéral. Voyc^ le dicl. hifi.
de Moréri , au mot pape , à l'aiTicIe des cfi~
ci ers du palais. (A)
COLLATÉRALES , artères ,{Anat. )
ce font trois rameaux qui naiflènt de l'artère
brachiale , un peu au defTus du pli du hrzs.
Le premier de ces rameaux fournit des rami-
fications au mufclcenconé interne, defcend
fur le condyle interne de l'os du bras , &
communique là avec des artères de l'avant-
bras. C'eft l'artère collatérale interne. Le
fécond rameau naît de même , j ette une arté-
riole qui fournit du fang , derrière le condyle
interne , aux mufcles voifins , & va com-
muniquer avec une branche de l'artère cubi-
tale qui embrafle le pli du bras, & qui fc
nomme collatérale externe. Le troi/ieme ra-
meau eft un produit femblable de l'artère
brachiale . lequel pafTe aulli devant le même
condyle , &: communique de la même ma-
nière avec l'artère cubitale , par un rameau
de cette artère qui remonte de l'avant-bras.
C'eft par le moyen de ces anaftomofès des
artères collatérales, que les parties qui font
au-defTus du bras peuvent recevoir du fàng
& fc nourrir , après qu'on y a fait l'opéra-
tion de l'anévrifme. (-f-)
COLLATÉRAUX ou LATÉRAUX ,
{Jurifprud.) font aufîî les bas côtés d'une
églife , autrement les ailes. Dans les églifes
paroifTiales , on diftingue les collatéraux du
chœur & ceux de la nef: ces derniers font
fans difficulté à la charge des habitans : à
l'égard des premiers , il y a eu plus de diffi-
culté; quelques-uns ont prétendu que quand
ces collatéraux font de même conftruétion
que le chœur , c'eft aux gros décimateurs à
les réparer : mais les derniers arrêts ont jugé
le contraire ; ce qui eft conforme à l'édit de
i6c)j , qui ne charge les gros décimateurs
que de la réparation du chœur & cancel ,
c'eft-à-dire de la fermeture du chœur , Voyer
le traité de^ loixdes bâtimens par Defgodets ,
ch. des répaY, des bénéf, & les notes de Goupy ,
ibid.^A)
COLLATEUR , f. m. {Jurifprud,) en
472 COL
général , efl celui qui confère un bénéfice
eccléfiaftique , c'eft-à -dire qui en donne les
proviiîons j au lieu que le patron ou préfenta-
tcur , même eccléfiaftique , ne fait que nom-
mer au bénéfice , & fur fa nomination il
faut enfuite obtenir des provifions de celui
qui cft le coUateur du bénéfice.
Le pape eft le (èul coUateur en France de
tous les bénéfices coniiftoriaux fur la nomi-
nation du roi ; poUr ce qui eft des autres
bénéfices , même éledifs , qui ne (ont pas
confiftoriaux , le pape en eft le coUateur par
prévention contre les archevêques, évêques,
& autres qui en font coUateur s ordinaires.
A l'égard de tous les autres bénéfices qui
ne (ont pas confiftoriaux , les archevêques ^
évêques font chacun dans leur diocefe ,
les co//^/ewrj ordinaires , faufle droit que
quf Iques autres coUateur s peuvent avoir fur
certains bénéfices.
Il y a des abbés , des prieurs , des cha-
pitres , &: autres bénéficiers , qui (ont coUa-
teur s de certains bénéfices.
Il y a inême aufti quelques laïques qui
font coUatew^ de certains bénéfices. Voyei^
C i -ap rh COLL AT EU KS LAÏQUES.
Le coUateur ne peut fc conférer à lui-
même le bénéfice , quand même il en feroit
auiïi le patron eccléiîaftique.
Qiiand le coUateur inférieur néglige de
conférer le bénéfice dans les Cix mois de la
vacance , le droit de le conférer eft dévolu
au coUateur fupérieur. Si c'eft un iimple
bénéficier qui eft coUateur , le droit pallè
à révêque ; fi c'eft l'cvêque , le droit eft
dévolu à l'archevêque , &.de celui-ci au
primat , cette dévolution fe faiiant de gradu
ad graduni.
CoLLATEUR ÀBSo'i.u , fc dit de celui
qui eft tout à la fois patron & coUateur du
bénéfice ; on l'appelle auffi coUateur direcî;
ou plein CoUateur.
Il y a des abbés , des chapitres , & autres
bénéficicrs inférieurs à l'évêqUe , qui font
coUateur abfolus de certains bénéfices.
Qiielqueslaïques jouiflentmême de cette
prérogative. Le roi eft coUateur abfolii de
tous les bénéfices dont il eft patron : il eft
aufïi coUateur abfclu, comme l'cvêque l'au-
roi: été , de tous les binéfices qui vaquent
pendant que la régale eft ouverte.
Les patrons qui fcxit en même temps'
COL
CoUateur s abfolus , n'ont pas communément
le droit de donner le vifa ou inftitution cano-
nique ; ce droit appartient naturellement à
l'évêque. Il y a cependant des patrons co/Aî-
teurs,[\xï les provifions defquels il n'eft pas
néceftàire d'obtenir de vifa ; Ôc ce font prin-
cipalement ceux-là qu'on peut appeller col-
lateurs abfolus , ou pleins collateurs , parce
qu'ils ont omnimodam difpojitioncm benejicii.
L'abbé de Fécamp eft coUateur abfolu de
plus de cinquante bénéfices , qu'il confère
pleinement fans que l'on ait bcfoin du vifa
des évêques diocéfains.
Quelques abbefl'es jouiftent auiïî de ce
droit , même pour des bénéfices-cures.
CoLLATEUR ALTERNATIF, eft Cclui quî
confère alternativement avec un ou plufieurs
autres collateurs , foit que chacun d'eux aie
fon mois ou fa femaine pour conférer les
bénéfices qui peuventy vaquer, ou que cha-
cun confère aiternativemen: un des bénéfi-
ces qui viennent à vaquer. Vuye-;^ Colla-
tion ù Tour.
CoLLATEUR DIRECT, eft k même chofè
que CoUateur abfolu , ouplein coUateur, Voy.
COLLATEUR ABSOLU.
CoLLATEUR ETRANGER : OU COnfidetC
comme tel celui dont le chef-lieu du béné-
fice eft fitué hors l'étendue du royaume , (bit
que le bénéficier foit regnicole , ouqu'il foit
perlonnellement étranger : il eft également
fujet aux loix du royaume pour les bénéfi-
ces étant à fa collation qui font fitués dans
le royaume. Vaillant , ad regul. de infirm.
rejign. n. çl8i.
CoLLATEUR INFERIEUR , cft Cclui au
préjudiceduquel un autre fo/Zû/ei/r fupérieur
a droit de conférer par dévolution , lorfque
le premier manque à conférer dans les iîvi.
mois de la vacance : ainfi le droit pafle du
patron à l'cvêque , de celui-ci au métropo-
litain , & de celui-ci au primat. Voye-;^ Dé-
volution.
CoLLATEUR LAÏQUE , cft uue pcrfonue
laïque qui a droit de conférer quelque béné-
fice eccléfiaftique. On qualifie au iTi quelque-
fois les patrons laïques collateurs , mais im-
proprement,Ies patrons laïques n'ayant com-
munément que le droit de nomination &:
préfenration au bénéfice; ce qui eft diffé-
rent de k collation. Voyei^ ci-après Colla-
tion & Patronage.
Cependarrf
COL
Cependant il y a des laïques qui (ont
réellement collatcurs de certains bénéfices.
On tenoit autrefois pour principe, que
la collation d'un bénéfice eccléiiaftique
étoit un droit purement fpirituel, qui ne
pouvoir appartenir qu'à des eccléiiaftiques.
Cap. tranfmijf. extr. de jure patron. Cap.
mejfan. de ekcï.
Le pape Léon IX défendoit, en l'an
7049, Li vénalité des autels, c'eft-à-dire ,
des bénéfices , des dîmes & oblations. Dans
le même fiecle plufieurs conciles condam-
nèrent le rachat des autels , qui le (âifoit en
payant à l'évêque une redevance à chaque
mutation , comme il fe pratique envers le
feigneiir pour les fiefs. Yves de Chartres
refula de permettre ces fortes de rachats,
^C^^T^me, il paroît pr.r fon épit. xi;.
Mais depuis que Ton a dilHngué la colla-
tion du bénéfice d'avec l'ordination du bé-
néficier, on a penfé que la collation n'a pas
la mîme fpiritualité que l'ordination i que la
collation des bénéfices ne concerne que la
difcipline extérieure de l'églife , & que ce
droit peut appartenir à des laïques , d'autant
qu'il fait partie des fruits du bénéfice, dont
les laïques ne font pas incapables de jouir.
Simon, traité du droit de paironage , tit. ij.
La collation des bénéfices a été accordée
à quelques laïques, principalement en con-
iîdérarion de la fondation & dotation qu'ils
avoient faite de ces bénéfices. Fevret, tr. de
Vabus , tome /, Itv. HT, ch. vij , n. 2§. Il
peut néanmoins y avoir de telles conceflions
f lites pour d'autres fervices elîentiels rendus
à l'égliie par les laïques, auxquels ce droit
a été accordé.
Le roi eft collateur de toutes les dignités,
prébendes & bénéfices inférieurs des faintes-
Chapelles, tant celles qui font de fondation
royale , que celles qui ont été fondées par
des feigncurs particuliers dont le domaine
a été réuni à la couronne. Il confère aulîi
les bénéfices de plufieurs autres églifes qui
iont de fondation royale. Il confère pareille-
ment feul tous les bénéfices a la collation
de l'évêque , qui viennent à vaquer pendant
l'ouverture de la régale. Mais je ne fais fi le
roi doit erre confidéré comme un collateur
purement laïque , étant perfonne mixte , à
caufe de la conjonârion qui fe trouve en
fa perfonne du facerdoce & de l'empire \
Tomt FUI.
COL
473
ratione unclionis fuce & chrijîianitatis fuce.
Fevret , ihid.
Au furplus , il cft conftant qu'il y a çlw-
lîeurs perfbnnes purement laïques qui lont
' en droit & pofleiTion de conférer des béné-
fices; il y a même des abbefl es qui ont ce droit.
En Bourgogne , les fuccciTèurs du chance-
lier Rolin, & les feigneurs de Chagny, con-
fèrent les prébendes des églifes de Nottc-
Dame d'Autun & de Saint-Georges deChà-
lons, qui font de leur fondacioii & dotation :
les leigneurs - barons de Blaifon & de la
Guierche en Anjou, les feigneurs-marquis
d'Epinay & comtes de Qiiintin en Bretagne,
confèrent les chapelles & prébendes de leurs
églifes collégiales. Le chapitre dileclo de tef-
tibus, fait voir que la coratefle de Flandre
avoit une femblable prétention.
Il y a auiïi en Normandie beaucoup de
leigneurs iaïques, qui lont en même temps
patrons & pleins collateurs de certains bi-
néfices.
Non feulement des laïques font collateurs
de certaines prébendes & chapelles, mais
même auHî de bénéfices-cures, & à charge
d'ames : par exemple , le feigneur de la ba-
ronnie de Montchy-le-Châtel, celui de Lu-
fàrches près Pontoife, nomment à des cures ;
mais ceux qui font pourvus par ces collateurs
laïques de quelque bénéfice à charge drames,
font obligés de prendre de l'ordinaire du
lieu une inftitution autorifàblc , avant qu'ils
puiflent exercer aucune fonéiion. Voye-^
Simon , du droit de patronnage , titre xj.
COLLATHUR ORDINAIRE, eft tout Col-
lateur, foit évêque ou archevêque , ou tout
autre collateur, (bit eccléfiaf^ique ou laïque ,
auquel appartient en premier lieu la nomi-
nation diC provifion d'un bénéfice. L'évêque
eft le collateur ordinaire de tous les bénéfices
de fon diocefe, s'il n'y a titre ou ufage con-
traire. On donne à ceux qui ont le premier
degré de collation ce titre de collateurs ordi^
naires , par oppofition aux collateurs fupé-
rieurs , qui en cas de négligence de l'infé-
rieur, confèrent, non pas jureordinaric, mais
jure devolutOi &c par oppofition au pape , qui
confère par prévention fur tous les collateurs
ordinaires, quoiqu'iln'y ait pas de négligence
de leur part. Voyei^l'injîitut. au droit eccléf,
de M. Fleury, tome I,p. ^G^^ù la biblioth.
canon, tome. I, au mot collateurs ordinaires,
Ooo
474 COL
COLLATEUR PATRON, eft Ccluî quî cft
en même temps patron & collateur. Il y a
des patrons laïques qui font collateur s j de
même que des patrons eccléfiaftiques. V.
ci'devaniCoLLATEVK laïque & Patron.
Collateur plein , eft la même chofè
que collateur abfolu ou collateur direB^ c'eft-
à-dire celui qui eft en même temps patron
& collateur. Ce titre ne convient propre-
ment qu^à i'évêquc ou à certains patrons
collateur s fur les proviiîons defquels on n'*a
pas befoin d'obtenir de vifa.
Collateur supérieur , eft celui qui
confère par dévolution au défaut de l'infé-
rieur. Voye-^^ ci-devant Collateur infé-
rieur : voyei^aujjî Collation. {A)
COLLATIE, < Géog. anc. ) on la place
dans la première région de l'Italie , fur le
Teveron , en allant à Tivoli ; aux environs
de Sabine, où eft maintenant Cervara. On
prétend que c'eft d'elle que fut appellée
la porte de Rome, connue fous le nom
de Collatine : il n'en refte que des ruines.
COLLATIF, adj. {Jurifp.) fe dit en
matière canonique , d'un bénéfice qui eft
à la difpofition d'un feul collateur, lequel,
arrivant la vacance dudit bénéfice , peut le
donner à qui bon lui femble , pourvu que
ce foit à quelqu'un qui ait les qualités Ik.
capacité requiies.
Les bénéfices purement coUatifs font ainfi
appelles , pour les diftinguer des bénéfices
éleétifs-confirmatifs , & de ceux qui font
éleclifs-colla:ifs. On appelle éleclifs-confir-
matrfsy ceux auxquels on pourvoit par élec-
tion & confirmation , c'eft-à-dirc , auxquels
il faut que l'éleétion foit confirmée par le
fupériear : les bénéfices ékâifs-coUatifs font
ceux que les cleéleurs confèrent, élilant
fans que.Péleélion ait befoin de confirma-
rioiii au lieu que les bénéfices purement
coUatifs fonf, comme on Ta dit en com-
mençant j à la difpofition d'un feul colla-
teur. Fbye5[ Bénéfice 6" Collation. {A)
COLL ATIN , adj . ( Hift. anc. ) Le mont
^o//ï3r//zétoit une des fept montagnes dcl'an-
cienne Rome, & la porte Collatine éto'n celle
qui conduifoit à Collatie. V. Collatie.
COLLATION , f. f. (lurifpr.) Ce terme
eft ufité, tant en matière civile qu'en matière
bénéficiale , Ôc a différentes iïgnifications.
En Dûatierç civile-, colla tien fi^nifie quel- '
COL
quefois la comparaifon que l'on fait d*une
pièce avec fon original , pour voir fi elle y
eft conforme , & la m.ention qui eft faite de
cette collation fur la copie que l'on appelle
alors une copie ccllationnêe.
L'ufage de ces collations doit être fort an-
cien ; les lettres de vidimus qui ie donnoient
dès le commencement du quatorzième
fiecle , pour la confirmation de quelques or-
donnances rendues précédemment, étoieni
une véritable collation de ces lettres. Les an-
ciens auteurs fe fervent du terme de vidimus
pour collation; ôc dans quelques provinces
on dit encore une copie vidimée pour copie
collationnée. Voye^ ViDIMUS.
Je n'ai point trouvé le terme collation em-
ployé dans aucune ordonnance avant celle
de Philippe de Valois, du mois de fcvrier
I ^ 17, portant règlement pour le cliâtelet de
Paris; lequel porte, article ^6, que la col^
lation des pièces (c'eft-à-dire, la vérification
des pièces que les parties produifoient ) , fera
faite par telles perionnes que le prévôt éta-
blira dans huit jours , qu'il fera conclu en
caufe ; & l'article 57 ajoute que fi aucune
partie eft défaillante de faire fa collation de-
dans le temps que les parties auront accorde
à la faire, le procès fera mis au confeil pour
juger. On met encore préfentement dans les
appointemens de ôonclufion, que le procès
eft reçu pour juger en la manière accoutu-
mée,/flz//^/^/>eco//ar/o/2, c'eft-à-dire, fauf
à vérifier fi les productions font complètes,.
&C fi toutes les pièces énoncées en l'iiivencaire
de production font jointes.
Les commis greffiers qui expédient les
j ugemens fur la minute , mettent au bas
de la copie ou expédition , collationné, pour
dire qu'ils ont fait la collation de la copie on
expédition avec l'original.
L'ordonnance de Charles V^ du ly janvier
zj6y, portant réglemeiit pour le châtclet,.
dit que les avocats ne plaideront aucune,
caufe, s'ils n'en ont fait auparavant co/Zû/zo/z,.
& qu'ils n'e^feront point collation en juge-
ment; que swla veulent faire, ils fortironc
de l'auditoire, & la feront à part. Mais M.
Sccoufîè penfe que le terme de collation
fignifie en cet endroit la communication
des pièces qwe fo font réciproquement les.
avocats : c'eft en effet une efpece de vé-
rification qu'ils font des. faits, fur les pièces*
COL
Les lecretaîres du roi ont un droit de
collation, qui leur a été accordé pour la
fignaiure des lettres de chancellerie , qu'ils
iont préfumés ne ligner qu'après les avoir
cbllationnées ; il en ell: fait mention dans le
fciendum de la chance^ilerie , que quelques-
uns croient avoir été rédigé en 1 3 3 9 , d'au-
tres en 141 5". Il y eft dit que la collation des
lettres doit fe faire en papier, & le droit
de collation que Ton doit payer pour chaque
forte de lettre y eft expliqué.
L'ordonnance de Charles F7, du H/f mai
2g8^ , portant confirmation d'un règlement
fait par les fecretaires du roi , pour la diftri-
burion des droits à eux appartenans pour
les lettres qu'ils fignent, porte que le droit
de collation qui appartient aux fecretaires
du roi , fe partagera entre eux ; que ce droit
fera reçu par deux fearetaires du roi députés
par la compagnie, & diftribué comme il
eft dit par cette ordonnance.
Les fecretaires du roi ont aulïî le droit
de délivrer des copies collationnées de
toutes lettres de chancellerie , contrats &
jugemens.
Les notaires peuvent aufTî délivrer des
copies collationnées , tant des adles qu'ils
reçoivent que de tous autres a6tes, lettres &:
jugemens qui leur font reprcfentésj ils dif-
tinguent la copie collationnée fur la minute
de celle qui n'a été collationnée que fur la
grollè ou fur une autre expédition ou copie.
La collation a plus ou moins de force
félon le plus ou moins d'authenticité de
l'original fur lequel elle eft faite; ainfi la
collation faite fur la minute fait plus de foi
que fur la groflè ou expédition.
On diftingue auili deux fortes de colla-
tions; favoir , la judiciaire de l'extrajudi-
ciaire : la première eft celle qui fe fait en
vertu d'ordonnance de juftice, les parties
intéreirées préfentes ou ducment appellées ;
l'autre eft celle qu'une partie fait faire de
fon propre mouvement , & fans y appeller
ceux contre qui elle veut fe fervir de la
copie collationnée.
L'ordonnance de i6€j, tit. xij. traite de
compulfoires & collations de pièces ; le com-
' pulfoire précède ordinairement la collation.
L'ordonnance veut que les afiîgnations pour
afiiftcr aux compulfoires , extraits & colla-
tions de pièces, ne fbient plus données aux
COL
>47î
portes des églifes ou autres lieux publics ,
pour de-là fe tranfporter ailleurs , mais
qu'elles foient données à comparoir au do-
micile d'un greffier ou notaire, & que les
afiîgnatfons données aux perfonnes ou do-
miciles des procureurs aient le même effet
pour les compulfoires , extraits ou colla-
tions de pièces, que fî elles avoient été
faites au domicile des parties.
Le procès-verbal de compuhoire &c de
collation ne peut être commencé qu'une
heure après Téchéance de l'afïignation ; &
il doit en être fait mention dans le procès-
verbal. Voye-;^ Compulsoire.
Ces Collations judiciaires fe font par le
miniftere du greffier ou huiffier, au do-
micile duquel l'afïignation eft donnée.
Les pièces ainfi collationnées font la
même foi que l'original contre ceux qui
ont été préièns ou appelles à la collation ^
pourvu que les formalités néceflaires y
aient été obfervées.
Les collations extraj udiciaires fe font par
les fecretaires du roi ou par les notaires ; on
leur remet entre les mains la pièce que l'on
veut faire collationner; ils en font faire une
copie au bas de laquelle ils mettent : Cslla^
tionné à l'original (ou autre copie ) , par nous
..,.,.. Ù à l'injlant remis l'origitwl
(ou autre copie.) -F^/V ^ .... ce ... .
Les copies collationnées fur le requtfitoire
d'une partie , ne font foi qu'autant qu'on
veut bien 7 en ajouter.
Dumoulin , fur {'article § delà coutume de
Paris y /z. 6j, au mot dénombrement , dit que
quand quatre notaires auroient collationné
une copie fur l'original , & qu'ils ccrtifie-
roient que c'eft le véritable original pour
l'avoir bien vu & examiné , néanmoins leur
copie collationnée ne fait pas une pleine foi
fans la repréfentation de cet original; car,
dit-il, les notaires ne peuvent dépofèr que de
ce qu'ils voient ; & n'ayant pas vu faire l'o-
riginal , ils n'en peuvent pas auflî avoir de
certitude , ni rendre témoignage que la pièce
qu'on leur a mife entre les mains fût l'origi-
nal. Il en feroit autrement fi le notaire avoit
lui-même reçu la minute de l'adte ou s'il
en eft dépofîtaire ; d'ailleurs Dumoulin ne
parle que d'une collation extraj udiciairc faite
fans partie préfénte ni appellée. {A)
CoiLATiON , ( Jurifpr. ) en matière
Ooo i
binéficiale, fe prend taiicot pour le droit de
C3nférer un bénéfice vacant de fait ou de
droit , ou de fait & de droit , ou pour l'ade
par lequel le collateur confère le bénéfice ,
c'eft-à-dire , donne titre & provifion par
écrit à quclqu^un pour le pallèder.
Le droit de collation ne doit pas être
confondu avec celui de nomination ou
préfentation , ni avec celui d'inflitution.
Par le terme de Jimple nomination ou
préfentation, on entend le droit qui appar-
tient aux patrons laïques ou eccléliaftiques
de préfcnter quelqu'un à Tévêque pour
erre pourvu du bénéfice. Une telle nomi-
nation ou préfentation eft fort différente
des provifions mêmes ; car Pévêque peut
refuier le préfenté , li celui-ci n'a pas les
qualités & capacité requifes pour polTéder
le bénéfice ; & s'il le trouve capable, il lui
donne des proviiions , fans leiquelles le
préfenté ne peut jouir du bénéfice.
On fe fert néanmoins quelquefois, mais
improprement , du terme de nomination
pour exprimer le droit de collation , ce droit
étant fort différent, comme on voit, de
la fimple nomination ou préfentation.
Pour ce qui eft du terme inJUtution, il
a trois li£;ni(ications différentes; car il le
prend quelquefois pour la provilion que
Pévcque ou autre collateur donne fur la pré-
itntation du patron , ou pour Tautorifarion
que 1 evêquc donne fur des provifions pro-
prement dites, mais d'un collateur qui lui eft
inférieur en dignité &c en puillance ; enfin,
il lignifie aulTi la confirmation que le col-
lateur fait d'une éledion à un bénéfice
qui eft fujette à confirmation.
La collation des bénéfices appartient de
droit commun à chaque évêque ou aiche-
vêque dans ion diocefè j^ &: au pape par
prévention.
Il y a cependant quelques abbés , des
cbapitres, & autres ecclciiaftiques , qui ont
droit de ctllation fur certains bénéfices, pour
Icfquels le pourvu eft feulement obligé de
jreudre le vifa ou inûitution canonique de
ï'évêque , lorlqu'ii s'agit d un bénéfice à
charge d'ames. F. înstitutiok, Nomi-
l^AllON , PRÉSENTATION, PROVISION.
Ondiftinguedeux fortes de coUativas; fa-
\eir, la collation libre ou volontaire, ik la
êuUatiii ucceflaiiei foicée ou involontaire.
COL
La collation eft libre & volontaire , lorf^
que Ï'évêque ou autre collateur , eft le maître
de la faire à qui bon lui femble , fans être
aftreint à donner le bénéfice à une perfonnc
plutôt qu'à une autre , à caufe de quelque
grâce expedative, telle que celle de l'induit
ou à&s gradués , des brevetaires de joyeux
avènement & de ferment de fidélité.
On appelle collation nêcejfaire , forcée ou
involontaire , celle dans laquelle le collateur
eft obligé de conférer le bénéfice à celui à
qui il eft affedté par quelque expeélative ,
par exemple , à un gradué, foit que le col-
lateur ait le choix entre plufieurs gradués
hrnples , ou qu'il foit dans le cas de con-
férer au plus ancien gradué , qu'on appelle
gradué nommé.
Le collateur, pour établir fbn droit de col-
lation ^ n'a pas befoin de rapporter de précé-
dentes provifions du même bénéfice , don-
nées par lui ou par quelqu'un de les prédé-
celleurs; il lui fuffit de prouver par des ades
&c titres anciens que le bénéfice dépend de
lui, & qu'aucun autre collateur n'en réclame
la collation. Voye:^ de la Combe , jurifprud..
canoniq. au mot collât, fecl. j , n. J.
En fait de collation^ trois ades difFérens,
joints à une poflcfiion de quarante ans, ac-
quièrent le droit à celui qui fe prétend col-
lareur. La Rochefl. liv. /, tit. xxxiv, art. z«
La collation m.ême forcée étant toujours
un ade de jurifdiéfion volontaire ou gra-
cieuie, peut être faite en tous lieux par
le collateur , même hors de fon territoire.
Ceux qui ont à leur collation des béné-
fices fitués hors le royaume , font obligés
de les confier conformément aux loix qui
s'obfervent dans le lieu de la firuation de
ces bénéfices; & par une fuite du même
principe , les collateurs étrangers font obli-
gés de le conformer aux loix du royaume
pour les bénéfices qui y font litués. Du-
mouUn, de infirm. refign. n. 2.8z. Ainfr
ils ne peuvent conférer qu à des regnicoles^
Déclarât, de janvier iGSî.
La collation du bénéfice peut être faite à
un abfenr , & zeWe collation empêche la prt^
vcntion ; ilfuftit que le pourvu accepte dans
les trois ans , auquel cas Ion acceptation a
un effet rétroadif au jour, des provifions.
Dumoulia, ibid. & Louet, n. JX & JJ..
Uu collateur ne peut pas fe conférer à lui-
COL
msme le bé-îiélîce q ui cft à fa collation , quand
même il en feroit auffi patron & préfenta-
teur ;il ne peut pas non plus le le faire donner
par ion grand-vicaire, s'il en a un. Capital.
per nojîras ext. de jure patron, Voye^ ci-de-
vant au mot Collateur.
Dans les colLt ions qui fe font paréleétion,
les électeurs doivent donner leur voix à un
autre qu'eux , il y a néanmoins des exemples
que des cardinaux Ce donnent leur voix à
eux-mêmes , & qu^un cardinal auquel les
autres s'en étoient rapportés , s'eft nommé
lui-même pape , ce qui eut (on effet.
Deux collations ou provifions de cour de
Rome , faites le même jour Se d'un même
bénéfice à deux perfonnes différentes, fe
détruifent mutuellement par leur concours,
cap. duohus de refcriptis , in fexto ; ce qui a
lieu quand même l'une des deux collations
oa provisions ie trouveroit nulle.
En cas de concours de deux provifions du
même jour , dont l'une eft: émanée du pape,
l'autre du collateur ordinaire , foit l'évêquc
ou autre collateur fupérieur ou inférieur ,
celle du collateur ordinaire eft préférée,
quand même celle de cour de Rome mar-
querait Pheure. Lebret , //v, /^, drcijîon I.
Journal des aud. arrêt du 1 6 mars iGGi.
Lorlque l cvêque ou archevêque & leur
grand-vicaire ont conféré le même jour , le
pourvu par Tévêque ou archevêque eft pré-
féré , à moins que le pourvu par leur grand
"vicaire n'eût pris pofleiïlon le premier. Re-
buffe , tracl. de benef. tit. de refcrip. ad bemf.
y ce. Kuzé i privil. ^G, n. lo.
Dans le cas où deux grands- vicaires ont
donné le même jour des provifions , autre-
fois on donnoit la préférence à celle qui mar-
quoit l'heure; mais fuivant la déclaration du
10 novembre 1748 , la feule date du jour eft
utile. Vcye:^ Date.
Un collateur eccléfiaftique ne peut varier ;
sll confère à une perionne indigne ou inca-
pable , il perd pour cette fois la collation du
bénéfice ; mais le collateur même eccléfiafti-
que quiconferc fur une démiftion ou permu-
tation nulle , peU'Ptonférer le même bénéfice
comme vacant par mort à la mêroeperfbn-
ne ; cette nouvelle cu//,(7?/o^ n'eft piÉj^fidé-
rée comme une variation de la p;M, étant
faite yî/3 diverfo refpeclu.
L"s coilateurs biques , foit les patrons que
COL 477
l'on comprend quelquefois fous ce terme ,
foit les coilateurs proprement dits , peuvent
varier dans leur collation ; ce qui ne lignifie
pas qu'ils puiflentenlever au pourvu le droit
qui lui eft acquis , mais qu'ayant fait une pre-
mière collation qui eft nulle, ils en peuvent
faire une féconde ou autre fubféquente ,
pourvu qu'ils foient encore dans le temps de
nommer. l^<yye:^CoLLATEURS laïques 6'
Patrons.
Dans quelques églifes cathédrales où l'c-
vêque confère des bénéfices alternativement
avec le chapitre , les feules lettres àe collation
ou provifions données par l'un des deux coi-
lateurs font tour , c'eft-à-dire le remplifïènc
pour cette fois de fon droit.
Pour ce qui eft des chapitres qui ont la
collation de quelques bénéfices , il y en a où
tout le chapitre en corps confère, d'autres où
le droit de co/to/o/z s'exerce par chaque m.em-
bre du chapitre alternativement, c'etl-à-dirc
que chaque chanoine a (on mois ou fa fe-
maine , pendant lequel temps il confère tous
les bénéfices qui viennent à vaquer ; & s'il
n'en vaquoit aucunpendant fon temps, fon
tour ne laiflèroit pas d'être rempli.
Pour la collation libre & volontaire , le
collateur n'a que fix mois pour conférer ; ce
temps expiré, le droit de co//û//o/7 eft dévolu
pour cette fois au collateur fupérieur de de-
gré en degré , c'eft-à-dire de l'abbé ou autre
eccléfîafl-ique à Pévêque,de celui-ci à l'arche--
vêque , & de ce dernier au primat.
Dans les collations forcées , comme celles
qui fe font aux indukaires, gradués, breve-
taires de joyeux avènement & de ferment de
hdélité , l'expédiant peut obliger le collateur
de lui donner des provifions , même après
les Çvji mois du jour de la vacance; il fuiîîr
que la requiiition ait été faite dans les (n.
mois. Arrêt du %l février l6^6 ^ Journal des
aud.
Le collateur en conférant le bénéfice ne
peut impofer au pourvu la condition de s'en
démettre dans un cenain temps , ou en cas
de certains événemens. Il ne peut pasnon^
|>lus charger le pourvu de récompenfer quel-
qu'un ; ce feroir une claufe fimoniaque.
• Toutes provifions doivent être fignées de
deux témoins connus, domiciliés, non pa-
rcns ni alliés , julques & compris le degré du.
coufin-^ermain , foit du collateur > foit du
478 COL
pourvu , à peine de nullité. Rebufte ^fur te
concordat de collât. Voyez audî l'art, ix de
ledit de 1 646.
L'édit de 1691 ordonne, ardclev, que
tous coUateurs autres que les évêques , don-
neront leurs proviilons devant deux notaires
royaux &C apoftoliques , ou devant un tel
notaire &c deux témoins. Mais l edit ne pro-
nonce pas la peine de nullité ; 8c c'cft appa-
remment par ce motif qu'une collation Elite
fous feing privé en préfence de deux térnoins,
fut confirmée par arrêt du grand-confeil du
iç) juillet 171 1.
Il n'eft pas néceflaire que le collateur garde
minute des provihons qu'il donne ; cela fut
ainfi jugé par arrêt du grand-confeil du
6 mars 1727. Jurifp. can. de de la Combe ,
p. 148 , col. %.
Pour la validité de Pade de collation ou
provision , il faut que cet adte contienne Ta-
drefle du collateur à celui à qui il confère le
bénéfice , le droit en vertu duquel il confère ;
& fi c'ell: fur la préfèntation du patron , les
provifions doivent en faire mention , & de
même fi c'eft à un gradué , indultaire , ou
autre expedtant , ou ii c'eft par droit de dé-
volution.
Il faut pareillement exprimer dans les provi-
fions lesqualitésde celui que le collateur pour-
voit du bénéfice , le genre de la vacance , la
qualité du bénéfice , la collation en faveur de
celui auquel le collateur veut donner le béné-
fice,la date de l'aâ:e,la fignaturedu collateur
& des notaires &: témoins fur la minute ou
original de l'ade , & le fceau du collateur.
Le collateur ordinaire n'eft cependant pas
absolument obligé d'exprimer précifément
le genre de vacance du bénéfice \ de s'il n'en
exprime point , tous y font ccnfés compris.
Dumoulin , de public, n. zoo.Fbje^j^CoLLA-
TEUR 6* Provisions. ( ^ )
Collation , ( Économie domejlique. ) re-
pas très-frugal qu'on fait le foir les jours de
jeûne, &; d'où lepoiflbn & même les légu-
mes cuits font profcrif s.
Le même terme défigne un repas très-dif-
COL
nairement en vifite , ou à la fuite de quelque
fête , comme daniès , bal , afl'emblée , &c.
COLLATIONNEPv,veib. ad. terme de
Librairie; quand on imprime un livre , &C
que les feuilles en ont été aflèmblées ainii
qu'il a été dit au mot ajfemblage , on les col-
lationne , c'eft-à-dire qu'on les levé par des
coins pour voir fi elles (c fuivent bien régu-
lièrement, s'il n'y a point de feuilles de trop
ou de moins. On collationne pareillement un
livre entier quand on veut s'afiurer s'il eft
complet, ce qui fe voit par la fuite non in- -
terrompue des lettres de l'alphabet qui fc
trouvent au bas de chaque feuille.
CoLLATiONNER , termed' imprimerie yCt^
voir Se vérifier iur une féconde épreuve , Ci
toutes les fautes marquées fur la première ont
été corrigées exactement par le compoiiteur ;
la même vérification fe fait enfuite fur la
troisième épreuve , & quelquefois fur une
quatrième , avant d'imprimer.
^ COLLE , r. f. {Art méchan. & Comm.)
matière fadice & tenace qui fert , quand
elle eft molle ou liquide , à joindre pluiîeurs
chofes , de manière qu'on ne puiflfe point leS"
féparer du tout , ou qu'on ne les fépare qu'a-
vec peine quand elle eft fechc. Il y a diffé-
rentes fortes de colle , dont nous allons faire
mention , aprèsavoir remarqué que M. Muf-
fchenbroek dit que la raifon pour laquelle la
colle unit deux corps entre lefquels elle eft
étendue , c'eft qu'elle s'infinue dans les ca-
vités de leurs furfaces ; d'où il arrive que ces
furfacesfe touchent alors par un plus grand
nombre de points ; fyftême où Fauteur ne
fiiit point entrer la delTication, conditioir
fans laquelle toutefois les corps collés ne ré-
fiftent point à leur féparation , quoique leurs
furfaces fe touchent , félon toute apparence,
par un nombre de points plus grand avant
la dedîcation qu'après.
CoLLE d'Angleterre owColle-forte;
c'eft une dillblution des parties animales
membrancufes , cartilagineufes & tendineu-
fes qui (e fait dans l'eau. On defteche enfuite
cette difiblution , pour en faire des tablettes
férent du précédent j car on eft quelquefoiÉBfcui fe confervent fans (t corrompre. Les
fervi en viandes froides , en confitures , eir jpiés , les peaux , les nerfs , les oreilles de
pâtifl'erie , en fruits & en vins de toute efpe.-
ce. La collation prife dans ce dernier fens
peut être moins fo|nptueufe , mais ellç n'a
point d'heure prefcrite. Elle fe pread ordi-
peaux
bœuJ^ÉjÉj^eaux , de moutons font d'excel-
lente cZ^P^r/e. On fe fert le plus commu-
nément des rognures de cuirs, ou de peaux
de ces mêmes animaux , que l'on mêle
COL
or(3inairemcnt avec moitié d'oreiiioiis de
bœuf, & ce mélange préparé de la manière
que nous Vallons dire , fournit environ un
tiers de Ton poids de bonne colle-forte. Par
exemple , mille livres de rognures avec cinq
cents livres d'oreillons, doivent donner entre
cinq & fix cents livres de colle ; 8c en variant
les doles de ce mélange , on donne une diffé-
rente qualité à la colle.
On met tremper féparément chaque ma-
tière dans de grands cuveaux remplis d'eau,
vingt-quatre heures fuffiroient pour des
peaux fraîches : il en faut davantage pour les
peaux feches , &c beaucoup plus encore pour
les vieux cuirs, ayant foin de les remuer de
temps en temps , foit avec une fourche ou
avec une pelle. Qiiandcesmatieres font bien
pénétrées d'eau , on les retire des cuveaux
& on en charge des civières grillées, plus
étroites par le fond que par le haut : ces
civières font faites avec les barreaux ou pau-
melles qui font reçues dans un fort bâtis de
charonnage ou de menuiferic. Ces cuirs
s'égouttent dans ces civières , enfuite on les
lave à la rivière , ou dans un grand réfervoir
d'eau , aux bords duquel on établit des ca-
ges à Jour , que Ton plonge dans l'eau &
qu'on en retire à volonté au moyen d'un
chafïis qui forme une bafcuiC. Tandis que
la cage où l'on met les morceaux de cu:rs ,
trempe dans l'eau , on les remue fortem.ent
avec un bouloir , ou un barateau. De temps
en temps , on abaiife la queue delà bafcule ,
pour faire forrir la cage de l'eau , afin que
les cuirs s'égouttent,& que l'eau fale en forte.
Puis , on les replonge de nouveau & on
les remue, répétant cette manœuvre jufqu'à
ce qu'ils foient bien nettoyés, ce que l'on
reconnoît lorfque l'eau qui en fort eft claire.
Les oreilles fur-tout qui confervent ordinai-
rement plus de faletés, ont befoin d'un lavage
multiplié.
Après le lavage , on porte les cuirs dans
des cuveaux cerclés de fer , pour les y faire
tremper dans une eau de chaux plus ou
moins foible. On fe fert toujours des civiè-
res grillées pour porter les cuirs 5 Se pour les
manier , Pon fe fert du barateau ou d'une
fourche. Les cuirs ordinaires trempent dans
une eau de chaux allez foible , qu'on renou-
velle tous les quinze jours avec un feau ou
deux de nouvelle eau de chaux j de l'on
COL 47P
retourne de temps en temps les cuirs qui font
en trempe. Mais pour les peaux qui ont été
pafTées à l'alun ôc au fuif , ainfî que les ma-
tières qui contiennent de la graifïe , du fang ,
de la f uiovie , des parties charnues ôc du
poil, il faut les mettre dans une forte eau de
chaux , &; les y tenir plus long-temps que
les autres ; Se pour que la chaux puiilè plus
commodément difloudre les parties char-
nues Se fanguinolentes , lorfqu'on les retire
des cuveaux , toutes blanches de chaux , on
les conferve à fec dans des folles , ou en tas
fous des hangars , fouvent pendant un hiver
entier , parce que dans cet état elles ne font
pas fluettes à s'altérer ; puis, on les retrempe
dans des cuveaux pleins d'eau, où on les
remue fortement. On les lave à la rivière
Se elles font en état d'être niifes dans la
chaudière.
Jufqu'ici on a lavé, trempé, brafle les
diverles matières féparément : il efl temps de
les afiàrtir. On les mêle en dofes convena-
bles , puis on leur donne un dernier lavage ;
on les pallè même fous la prefl'e , iî Ton croit
à propos d'exprimer une panie de Peau dont
elles le font imbibées , de peur qu'elle ne
rendit la colle trop claire , ou trop difficile à
s'épaiiTir. Alors on les met dans une chau-
dière de cuivre , montée fur un fourneau de
m.açonnerie. On la rempUt jufqu'au- defîus
dc3 bords , Se l'on met au fond de la chau-
dière une grille de bois for:e , pour empê-
cher que les matières ne s"y attachent Se ne
brûlent. Il y a des faifeurs de colle qui n'a-
joutent point d'eau dans la chaudière à celle
que les matières ont prife dans la trempe ,
prétendant qu'elles en ont allez pris. D'autres
y en mettent un peu, fur-tout files matières
(ont dures Se feches , parce que la trempe ne
leur en a pas donné une quantité fuffifante :
c'eft à rintclligenCe du fabricant à régler la
quantité d'eau néceflàire pour obtenir la
meilleure colle.
On allume fous la chaudière d'abord un
petit feu pour fondre les matières peu à peu
Se fans les brûler ; on augmente ce feu par
degrés jufqu'à faire bouillir la colle : les u^
diminuent le feu à mefure que la colle fe fait
& la laiflèntfe faire fans remuer; d'autres »
quand une partie des peaux efl fondue , bra(-
fent Se remuent vigoureufement avec le
palon ou bouloir, cequ'ilsrépe:cent de temps
48o COL
en temps jufqu'à ce que la, cvV.e ioit faire : on
reconnok qu'elle Peft , lorfcjue étant refroidie
elle forme une gelée paflablement épaifle ;
alors il cil temps de la retirer. Cette opéra-
tion dure de douze à quinze heures , félon le
degré de feu \ mais il eft à propos d'aller len-
tement , & il vaut mieux diminuer le feu à
mefure que les matières fondent , ou qu'il y
en a une partie de fondue , que d'en préci-
piter la fufion par un feu violent. Il eft temps
<de vuider la chaudière , lorfqu^en mettant
un peu de colle fondue fur une alîîette ou
dans une coque d*œuf, on s'apperçoit qu'en
fe refroidilTant elle prend la confiftance re-
quife. Pour cela , on établit fur une cuve de
bois cerclée de fer , qui doit être auprès de
la chaudière, une cage de bois. Elle doit oc-
cuper tout le diamètre de la cuve : on met au
fond de la cage de la paille , ou mieux encore
une toile de crin , & avec une grande cuiller
de cuivre rouge, nommée cajfin, on vuide la
chaudière dans la civière établie fur la cuve.
Cette opération ie fait promptementpournc
pas lailîèr à la colh le temps de perdre fa
fluidité en fe rtfroidifiant. Il fe forme au
fond de la civière un marc ou un dépôt ,
nomméle/L/72/er Je la colle , qu'on y lai (Te
long-temps s'égoutter , afin de ne rien per-
dre. Ce marc egoutté & delléché à l'air , fe
met fous la chaudière pour entretenir le feu,
ce qui produit une économie fur le bois.
La celle pafléc & tombée dans la cuve s'y
dépure par précipitation : pour entretenir la
co//e liquide le plus long -temps qu'il eft pof-
iîble , & faciliter la dépuration , on a loin
que les portes & les fenêtres de l'attelier où
font les chaudières & les cuves , foient bien
fermées-, quelques-uns même y ont un poêle.
Il faut environ quatre à cinq heures pour
que la colle fe dépure. Quand on juge qu'elle
s'eft fufîîfamment dépurée, on la tire encore
chaude de la cuve , on la porte prompte-
ment & on la verfe dans des auges ou boites
de bois , qu'on a auparavant bien mouillées ,
& égouttées lorfqu'on y met la colle. La
cuve ojj la colk s*eft clarifiée par précipita-
rWn , eft percée à différentes hauteurs , & il
y a des robinets de bois à chaque trou , le
plus bas eft à un pouce ^c demi du fond. La
liqueur qui vient par le robinet le plus élevé,
fournit la plus belle colle; on a feulement
attention de ne pas tirer tout ce qui peut
COL
venir par ce robinet, parce qu'à la fin il vlen-
droit un peu de graille qui , nageant fur' la
colle, lui donneroit un œil défagréable. Ce-
pendant on tire la liqueur par les differens
robinets , tant qu'elle vient claire. Celle qui
coule par le dernier n'a pas autant de tranf-
parence , mais elle n'en eft pas moins bonne.
S'il fe trouve un peu de graiftè figée à li fur-
face des bo tes , ou du marc au fond , on
retranche ces matières lorfqu'on coupe la
colle en tablettes.
On laiflc la colle pendant vingt-quatre heu-
res ou environ , fe refroidir & s'épailTir dans
les boites , les tenant fous un hangard à l'abri
de la pluie & du foieil ; à mefure qu'elle perd
de fon humidité , elle diminue de volume.
Quoiqu'on ait mouillé les boîtes, la colle y
adhère ; pour l'en détacher , on prend de
grands couteaux à deux tranchans , qu'on
trempe dans de l'eau, & do;it on pafCj la lam.e
entre la colle de les parois des boites.Qiiand on
a fait le tour des boites avec le couteau , on
coupe avec le même inftrument la a lie figée,
en cinq morceaux, danslefcns de la largeur
de la boîte , ce qui donne cinq morceaux ou
parallélipipedes , fuivant le moule ou calibre
dont on fe fert pour cet effe; , afin découper
les morceaux égaux : h. longueur du calibre eft
la largeur de h boîte , Ôc fa largeur le cin-
quième de la longueur de la boîte. Il s'agit à
préfent d'enlever de l'auge ces parallélipipe-
des. Les ouvriers adroits les enlèvent avec la
main , avec la précaution de verler un peu
d'eau fur la colle avant que de l'en détacher
avec le couteau. D'autres fe fervent d'unet
palette légère de bois , qu'ils gliftent fubti-
lem.ent fous chaque parallélipipede , en com-
mençant par un du milieu. Ils l'enleveifc
ainfî fur cette palette ; & font enfuite la mê-
me chofe à Pégard des autres. Chaque mor-
ceau étant ainii enlevé fe met fur une plan-
che , à un bout de laquelle il s'en élevé une
autre perpendiculairement. Celle - ci fert
d'adoftbir , c'eft-à-dire , qu'une des faces du
parallélipipede étant pofee fur la planche
horizontale , un de fes cotés longs s'appuie
contre la planche verticale : alors l'ouvrier
placé du coté de la planche verticale , &
tenant des deux mains une efpece de fcie,
montée d'un gros fil de fer tendu par
un écrou & une lame mince de cuivre ,
tire à lui cet inftrument dans une pofîtion
horizontale ,
COL .
horizontale, 6c coupe ainii la colle en tranches
ou feuilles. Celui de dellous étant ordinaire-
ment chargé de quelques laletés qui Te font
précipitées , & celui de defl'us de quelques
gouttes de graille figée , on les retranche pour
remettre dans la chaudière avec de nouvelles
matières. Les autres feuillets fe portent à la
fécherie qui eft un hangard couvert par-
deflus , &c garni de rideaux des deux cotés.
Sous ce hangard font des poteaux qui portent
de longues chevilles fur lefquelleson pofedes
chaflis de menuiferie , où font cloués des
filets femblables à ceux des pêcheurs : c'eft
fur ces filets qu'on pofe les feuilles de colle
pour les faire fécher. On les arrange aulTi
près les uns des autres qu'il eft poiïible , fans
fe toucher.S'il pleut , ou que Ton craigne que
le foleil ne donne fur la colle , on ferme les
rideaux du hangard. La pluie déformeroit
ces tablettes encore molles, & la chaleur du
foleil les feroit fondre & tomber en gouttes.
On a foin de les retourner de temps en temps
fur les filets , pendant qu'elles fechent, fans
quoi elles s'y attacheroient fi fortement, qu'on
ne pourroit plus les en ôter fans déchirer les
filets.Lorfqu'elles font à demi-feches,on perce
chaque feuillet à un des bouts , pour y pafîèr
une ficelle qui fert à les pendre dans les ma-
gafins. Il faut plus ou moins de temps pour
fécher la colle , fuivant la température de
l'air. Dix jours d'un temps (ec ôc d'un vent
modéré fuffifent , de quinze jours dans un
temps humide ne Ibnt pas allez. Lorfque les
tablettes font prefque feches , on leur donne
un coup d^œil féduifant, en les mouillant un
peu & les frottant avec un linge neuf. Cette
opération leur donne du poU de de la tranf-
parence.
La belle co//e n'a point de taches obfcures,
ni d'odeur; les caflures en font brillantes
comme il c'étoitun morceau de glace. Pour
l'éprouver , on en met un morceau tremper
dans Peau pendant trois ou quatre jours j il
doit fe gonfler beaucoup , mais ne fe pas
diflbudre, & fe deflecher enfuite fans avoir
perdu de fon poids.
Colle de parchemin. Pour la faire , on
imet deux ou trois livres de rognures ou ratu-
res de parchemin dans un (eau d'eau. On
les fait bouillir dans un chaûderon jufqu'à
rédudion dé moitié; on pafle enfuite le tout
Tome Vllt
COL 48r
à travers une toile peu ferrée , puis on laiflc
la liqueur refroidir.
Colle pour fortifier le papier & en réparer
les défauts. On la prépare fouvent avec la-
fleur de farine détrempée dans de l'eau bouil-
lante fur laquelle on a jeté quelques gouttes
de vinaigre.
Une meilleure préparatioii eft celle qui fe
fait avec la mie de pain levé , détrempée
dans de l'eau bouillante , &: paflee par l'éta-
mine. Cette colle doit être employée le len-
demain j ni plutôt , ni plus tard ; enfuite on
bat le papier avec le marteau ; on y paftc
une féconde fois de la colle , on le met en
prefle pour le lifler &c l'unir, & on l'étend
à coups de marteau.
Ces préparations font tirées de Pline , &
relatives au papier d'Egypte. Mais ce papier
a de fî grandes reflemblances avec Le notre ,
que ce qui convient à Pun peut également
iervir pour tous les deux.
On nous apporte d'Allemagne des livres
imprimés fur du papier fluant & qui n'eft
pas collé ; on peut coller ces feuilles impri-
mées avec de la colle de gants & de lalun ,
avant que de les faire relier , cela en corrige
le défaut.
Colle de Flandre. La colle de Flati"
dre eft un diminutif de la colle-for le d'An-
gleterre , parce qu'elle n-'a pas la même con-
fîftance, & qu'elle ne pourroit fèrvir à coller
le bois ; elle eft plus mince que la première
& plus tranfparente ; elle fe fait aufïi avec
plus de choix & de propreté. Lorfque les
peaux ou nerfs qui la compofent ont bien
bouilli , on paflè le tout à travers un gros
linge ou tamis ; on la laiflè un peu refroidir;
enfuite on la coupe par tranches , & on la
met fécher fur des cordes entrelacées comme
un filet, afin qu'elle puiffe fécher deffus com-
me dcftbus. Cette colle fert beaucoup à. la
peinture; on en fait auiîî de k colle a bouche
p!?ur coller le papier , en lafaifant refondre,
& y ajoutant un peu d'eau & quatre onces
de fucre-candi par livre de colle.
Colle pour dorer ; faites bouillir de la
peau d'anguille avec un peu de chaux dans
de l'eau; pafi[èz l'eau, & ajoutez~y quelques
blancs d'œufs. Pour Remployer faites -la
chauffer; paflez--en fur le champ une cou-
che; laiffe2-la fécher; appliquez l'or enfuite.
CoXle de fa-rine^ eft celle quifè fait
PPP
48i COL
avec de la farine & de l'eau , qu'on fliit un
peu bouillir enfemblc fur le feu. Ellefert à
plufieurs fortes d'artifins , aux tillerands ,
pour en coller les trames de leurs toiles •, aux
cartonniers, pour faire leur carton ; aux re-
lieurs , pour coller les couvertures de leurs
livres; aux felliers pour nerver leurs ouvra-
ges; ôc à beaucoup d'autres ouvriers.
Cette colle fera plus forte , fi au lieu de
ivirine de froment on prend celle de blé noir.
On peut auffi la préparer avec la fleur de fa-
rine, ôc y ajouter du garum.
Colle de gant. La colle de gant ie fait
avec des rognures de gants blancs bien trem-
pés dans de l'eau & bouillis : on en fait auiTi
avec les rognures de parchemin. Il faut pour
que ces deux colles foient bonnes , qu'elles
aient la coniiftance de gelée tremblante lorf-
qu'elles font refroidies.
Colle a miel , eft une efpece de colle en
ufage parmi les doreurs. On la fiit en mê-
lant du miel avec de l'eau de cole de un peu
de vinaigre qui fert à faire couler le miel.
On détrempe le tout enfemble ; on en fait
une couche qui reftegraflè 3z gluante à caufe
du miel qui a(pire l'or & s'attache fortement
au corps fur lequel on le met.
Ou prenez de la gomme arabique , du
miel & du vinaigre ; faites dilloudre la
gomme dans de l'eau bouilbnte ; ajoutez les
deux autres ingrédiens, & collez.
Colle d'Orléans : prenez de laco//ede
poiflbn blanche ; détrempez-la dans de l'eau
de chaux bien claire ; au bout de vingt-
quatre heures d'infufion tirez votre colle ,
•fiites-la bouillir dans de l'eau commune. Se
vous en fervez.
Colle a pierre : prenez du marbre ré-
duit en poudre^ de h colle- forte y de la poix :
mêlez bc ajoutez quelque couleur qui con-
vienne à Pufage que vous en voulez faire.
Cette colle fert à rejoindre les marbres callés
©u écorchés.
Colle de polisson , eft une efpece de
colle faite avec les parties mucilagineules d'un
gros poilTon qui fe trouve très-communé-
ment dans les mers de Mofcovie. Les An-
glois & les HoUandois qui en font feuls le
commerce, vont la chercher au port d'Ar-
^ changel, Ôc c'eft d'eux que nous la tirons.
Les auteurs ne font point d'accord fur la
fbf me ni fui l'efpece de ce poiflbn. Il y en a
CO L
qui l'appellent hufo ou exojjis ; mais ils con-
viennent tous que les Mofcovites prennent
fa peau, les nageoires &:fes parties nerveufes
& mucilagineufes; Ôc qu'après les avoir cou-
{îées&fait bouillira petit feu jufqu'à con-
(iftance de gelée, ils Pétendent de l'épaiflèur
d'une feuille de papier , ôc en forment des
pains ou cordons tels que nous les recevons
de Hollande.
La colle de poijfon, pour être bonne, doit
être blanche, bien tranfparente , ôc fans au-
cune odeur.
Les ouvriers en foie , ôc principalement
les rubaniers , s'en fervent pour luftrer leuri
ouvrages : on en blanchit les gazes , ôc les
cabaretiers en font ufage pour éclaircir leurs
vins.
Il y a encore une autre colle de poiffon
qu'on tire de Hollande ôc d'Angleterre en
petits livres : mais on prétend que ce n'eft
que le rebut ôc la partie la moins pure de la
colle de poijfon de Mofcovie.
La colle de poijfon entre dans quelques em-
plâtres décrits dans d'anciens difpenfaires.
Pour s'en fervir, il faut la battre, la laillèr
amollir dans le vinaigre , y ajouter de Peau
commune, la faire bouillir , y mêler un peu
de chaux d'étain, bien remuer, ôc s'en fervir
le plus chaud qu'on pourra.
Pour rendre la colle de poijfon très- forte ,
on la choifira blanche ôc claire , on l'amin-
cira ôc défera à coups de marteau , on la
coupera en petits morceaux, on mettra ces
morceaux dans un vailTèau de faïence à cou
étroit , on les couvrira de bonne eau de-vie,
on placera le vaiflcau dans un pot de terre
plein d'eau, qu'on tiendra fur un feu doux
jufqu'à ce que les morceaux foient fondus ;
on les laiflera refroidir, ôc ils feront prépa-
rés. Pour s'en fervir; il faudra y ajouter un
peu d'eau-de-vie, faire réchauffer , ôc coller
fur le champ. Voyc;^ Ichthyologie.
Colle à verre : prenez des limaçons , ex-
pofez-les au foleil , recevez dans un vaifîeau
la liqueur qui en diftillera , extrayez le laiï
du tifhymale ; mêlez ce lait ôc le fuc de li-
maçon , collez , ôc expofez au foleil les ver-
res collés.
Les relieurs , les chapeliers , ôc d'autres
ouvriers ont leur colle. Voye-;^-en les compojî'
tions à leurs articles. V. Relieur.
Co^LE , ( Geo^. mod, ) ville dlcalie en
c o t
Tofcane dans le Florentin, ^ur les confins du
Stennois, près de la rivière o'Elfa. Long. xS,
45 .'• ^^- 43 '^4-
Colle (la), Géog. rivière de France en
Cfi^mpagne , qui fe jette dans la Marne
près de Châions.
CoLLt à -cheval , {Manr.ge^ c'efl: la même
cliofe que cloué. ?^c/je^ Cloue.
COLLECTE, r. f. en btin colkcla , {Ju-
rifprudcnce^ dans les anciens titres & au-
teurs, lignifie tantôt la perception & recou-
vrement qui fe lait des tributs & impoiitions
qui le lèvent fur certaines perlbnnes, tantôt
{'impofiîion même qui feleve fur cc-s perfon-
nes : c'eli en ce dernier fens qu'ail en efi: parlé
dans Othon de Frilinge , lib. 1 1 . de gef}.
Friâerici imper, cap. xj. Rex a toto exercitu
coîleclam ficri juffit. Matthieu Paris, à Pan
I Z45 , dit aufïi , en parlant de laint Louis;
jwjjrt quafdam colle cias & t allias j ta m in clero
quàm in populo , jieri graviores. On en trou-
vera encore d'autres exemples dans leglojjaire
de Ducaiige , au mot colleâa. Chez les Ro-
mains , la collecte des tributs ou impoiitions
n'étoit point confidérée comme un emploi
ignoble : c'eft ce qui reluire de la loi , au
code de excufat. mun. laquelle ayant déraillé
tous les emplois qui étoient réputés bas &
fbrdides, n'y a point compris la cc)//e'c7e des
tributs; elle étoit même déférée aux décu-
rion.s qui étoient les principaux des villes,
comme on voit civla L xvij , §. exigendiff.
ad municip. & /. v/y, cod. de facroj. ecclef. Il
n'en eft pas de même parmi nous. Quoique
la colLcle des tailles & autres impoiitions
n'ait rien de déshonorant , elle eft mile au
nombre des emplois inférieurs dont les no-
bles & privilégiés font exempts , comme
nous le dirons ci-après à l'article de la Col-
lecte du fel& des tailles , qui font préfente-
ment les feuls impots dont la colleâe ou re-
couvrement fe fafle par le miniftere de col-
lecteurs proprement dits. Voye:(_ci-aprh les
fubdivijions des différentes fortes de Col-
lectes ù de Collecteurs, (^)
Collecte des Amendes , Restitu-
tions , ùc. eft le recouv remuent qui iê fait
des amendes & autres peines pécuniaires
prononcées contre les délinquans. En ma-
tière èi'eaux ù forêts, cette collecte fe fait pr. ;
des fergens des eaux & forêts, appelles /er-
gens^olleâeurs. L'ordonnance de 1669 j.
C O t 483
[ titre des chajfes, art. xl , dit que îa collecle
des amendes adjugées es capitaineries des
chaiies , fera faite par les fergens- colledteurs
des amendes des lieux, leiquels fourniront
chaque année un état de leur recette & dé-
penlé au grand m litre. L'article dernier du
titre de la pcche , porte que touêes les amen-
des jugées pour raiion des rivières navigables
& flottables , & pour toutes les eaux du roi,
feront reçues à fon profit par le fergent-col-
leCleur des amendes dans chaque maitrife
oudép-'rtement; qu'il en fera ufé comme
pour celles des forêts du roi, & que ce qui
lui en reviendra, fera payé es mains du re-
ceveur, & par celui-ci au receveur général.
Le titre fuivant, qui eft des peines, amendes,
reftitutions , ùc. contient pluiieurs difpoii-
tions fur la collecle des am.endes prononcées
pour toutes fortes de délits en fait d eaux &c
forêts; favoir, que les amendes ne feront
point affermées , mais levées au profit du
roi par les fergens coile6beurs des mairrifes,
& par eux payées aux receveurs; que les
rôles des amendes feront mis &: laiiles es
mains des fergens colleéteurs de chaque mai-
trife , pour en faire le recouvrement & en
compter; que les collecteurs des amendes
feront tenus d'émafger les rôles de ce qu'ils
recevront, èc d'en donner quittance , fur
peine de reftitution du quadruple ; que le
collc(5teur demeurera refponfàble des amen-
des , reftitutions, ùc. faute par lui dans les
trois mois après qu'ils lui auront été délivrés,
de juftifier des exploits de perquifition d'in-
folvabihté des débiteurs, & de diligences
fufïifantes ; que ces exploits feront atteftés
des curés ou vicaires , ou du juge des lieux;
que les colle6leurs ne feront point déchar-
gés de la collecte qu'après avoir fourni cha-
que année un état au grand-maitre de leur
recette & diligence , & qu'il n'y ait eu un
jugement qui paiTeles parties en non-valeur:
quand il y a appel du jugement portant
amende , la collège de l'amende ne fe fait
qu'après le jugement de l'appel. Les fergens
collecteurs ont une certaine remife fur les
amendes. V. l'ordonnance des eaux ù forêts.
Il y a un des huilTîcrs du bureau des finan-
ces de Paris , qui a le titre de collecteur des
imendes qui font prononcées en matière de
oierie. {A)
Collecte d'une aide particulière : lorfque
Pppz
484 COL
les habicâns d'une province ou ville zcccr-
•iloient au roi quelques aides pour les befoins
de Pétat , ils en faif'oienc faire la colleclc
C'eft ainfî que dam une ordonnance de
Philippe V, du 17 février 1 349, il eft parlé
«^iCS collecfleurs d'une aide ou imposition
fur les marchandifes 6c denrées ; dans une
ordonnance du roi Jean, du 5 mars 1 3 n >
Se dans une autre ordonnance du mcm.e
roi, du mois de juillet 1 3 5 y, on voit qu'une
partie des habitans du Limohn & des pays
voifins, ayant accordé à Jehan de Clermont ,
maréchal de Frcnce, qui étoit lieutenant
pour le roi dans les pays d'entre les rivières
de Loire & de Dordogne , une aide ou fub-
fide d'argent pour l'engager à demeurer
dans le pays &c le mettre mieux en état de
le défendre , ils arrêtèrent que cette aide
feroit levée & cueiUie par bonnes gens fol-
vables, établis ôc nommés parles commis
& jufticiers de chaque lieu ; ce qui fut
confirmé pair le roi Jean. Ordonnance de lu
troifieme race. (A)
Collecte impope par une ville: Philippe
VI en confidération de ce que les bourgeois
de Mâcon lui avoient fourni un certain
nombre de gendarmes , ou de quoi les fol-
der , leur accorda entr'autres chofes , par
des lettres du mois de février 1 346 , que les
confeillers de cette ville pourroient faire ù
impofer des col k 3e s j tant fur* les perfonnes
que fur les pofleffions & héritages de leur
yille , en la manière accoutumée ; les recou-
Trer , lever , ou faire lever , cueillir & con-
vertir au profit commun de cette ville , & à
ce qui feroit néceflaire. Ces lettres furent
confirmées par le roi Jean , au mois d'o6bo-
bre 1362. Voyc':^ le recueil des ordonnances
de la troifieme race. (A)
Collecte du Sel ou de l'impôt du fel ,
cft le recouvrement qui fe fait de Timpofi-
tion due au roi par chaque contribuable
pour fa cote de fel , dans les pays où le fel
fe diftribue par impôt. L'ordonnance des
gabelles diftingue les greniers à fel d'irnpôt,
.& ceux de vente volontaire : elle fait l'énu-
mération des lieux où le fel fe diftribue par
impôt; 6c dans le titre viij, il eft dit que les
ailéeurs de colledeurs du fel feront nom-
més pas les habitans afi'emblés en la ma-
nière^ accoutumée au Ton de la cloche s
àuiîue de la mefle paroiiTiale ou de vêpres ,
G O L
dans le m.ois d'oclobre de chaque année ;
favoir deux d?ns les paroUles où le priPiCi-
j^al de rim.pct: eft au delfous d''un muid de
fel , quatre dans celles qui font impofces à
un muid de fel ôc au deflùs, &c îîx dans
celles qui portent deux muids de fel & au-
delîùs; que les habitans les plus riches Se
les médiocres feront nommés colLcîcurs à
leur tour, en nombre égal; que les habitans
doivent mettre au greffe du grenier à fel de
leur relfort , une expédition en bonne forme
de la nomination des collecfteurs , avant le
premier novembre de chaque année, iinon ,
aprcs ce tem^s pafte , fans autre fommatioii
ni diligence , les collecteurs doivent être
nommés d'office par les officiers du grenier à
iel, fuivantl'ordre quia été expliqué. On ne
doit point nommer pour aftceurs & collec-
teurs de l'impôt, ceux qui exercent des oftî-
ces dejudicaturedansles juftices royales, les
mineurs, les leptuagénaires, ceux qui font \x
cclkcle des tailles , ceux qui l'ont faite tant
du fel que de la taille dans les années précé-
dentes, les maires , échevins & fyndics des
paroiflés dans le temps de leur charge , les
regratiers , ceux qui font dans la première
année de leur mariage , & généralement
ceux qui font exempts en vertu d'édits regif-
trés à la cour des aides. Il eft défendu aux
cours des aides de recevoir Pappel des nomi-
nations de colleéleurs de fel , fauf l'oppolî-
tion devant les premiers juges , & enfuite
Pappel à la cour des aides, & le tout doit être
jugé fommairement de manière qu'il y ait
des colledleurs nommés avant le premier dé-
cembre. Perfonne ne peut affifter à la nomi-
nation des collecteurs avec les habitans , ni
à l'afïîette de l'impôt avec les colledeurs,
excepté le notaire ou fergenr qu'ils voudront
choifir , pour rédiger par écrit l'aCte de no-
mination ou le rôle , fans que le greffier du
grenier à fel, fes clercs 6c comrnis y puilfcnr
vaquerdireélementou indired:emenL. Il eft
enjoint aux colledeurs d'inférer au rôle qu'ils
feront de l'impôt, le nombre , qualité & con-
Ht'on des perfonnes de chaque maifon qui
y eft fujette ; de marquer à la fin les noms,
îunioms , & nombre des eccléfiaftiques >
nobles , & autres exempts, 6c de mettre deux
copies lignées de cesrôles, l'une au greffe du
grenier à fei.. l'autre entre les mains du fer-
, mier des gabelles ou de fes commis. Les col-
G O L
çolIe£teursTie doivent faire qu'uii feul rôle
pour chaque année, lequel ell vérifié par les
officiers du grenier à Tel, qui ne peuvent
augmenter ni diminuer les cotes, ni ordon-
ner que le rôle fera refait. Après la vérification
du rôle , les collcdeurs doivent lever le Tel
de l'impôt dans les premiers huit jours du
quart-er de janvier, &: continuer de le lever
dans les premiers huit jours de chaque quar-
tier , 6c le diftribucr aux contribuables dans
la huitaine fuivante. Ils font obligés de por-
ter entièrement le fel dans leur paroifle le
même jour qu'ils le prennent au grenier. Les
deniers provenans de l'impôt du fel , doivent
être payés par les colledeurs entre les mains
du commis des gabelles , favoir moitié
dans les lîx premières femaines , ôc l'au-
rre moitié à la fin de chaque quartier ; finon
ils y font contraints folidairement pour em-
f)rifonnement. Ils font autorifésà retenir fur
e dernier paiement de Pimpôt du fel une
certaine remife fixée par l'ordonnance. Le
fel d'impôt que les colledeurs ont négligé de
lever ne leur eft point délivré fix femaines
sprès l'année expirée , on leur diminue feu-
lement le prix du marchand. Les principaux
h^^bitans des paroifîes peuvent être contraints
fc H lairem.cnt par emprifonncment pour
1 impôt , lorfque tous les colledeurs ont été
difcurés en leurs perfonnes & biens. La dif-
cufTion des colledeurs en leur perfonne eft
fuffifantc , quand ils ont gardé prifon pen-
dant un mois , ou lorfqu'il y a eu perquifition
de leur perfonne. Les colledeurs emprifonnés
pour le paiement de l'impôt ne peuvent être
élargis ; même fous prétexte de la révérence
des quatre bonnes fêtes de l'année, ou autres
réjouitLmces publiques, qu'en payant du
moins la moitié des fommes pour lefquell-es
ils font détenus. Voye:^ l'ordonnance des ga-
belles , titre riij , qui détaille plus au long
les règles qui doivent être obfervées pour
celte colkcle Ôc pour les colledeurs. Voye-;^
ûujfi la déclaration de il2. mai i jo8 , portant
règlement pour la punition des colledeurs de
l'impôt du fel qui divertirent les deniers de
leur colkâe ; de la déclaration du l^ janvier
îjî8 , portant règlement pour la nomination
des colledeurs de l'impôt du fel : le recueil
du fieur Bellet, page 8Sy de aux mots G a-
PELLE , Grenier a sel. Sel. ( ^ )
Collecte pes Tailles, eft le recouvre-
C O L 485
ment que les colledeurs font de la raille fur
chaque taillable. L'ufige de cette collecic
doit être fort ancien , étant certain que dès
avant S. Louis on payoit des tailles en France
pour les befoins de l'état. Se que S. Louis
ne fit que régler la manière de les im.pofer.
Le terme de collecle ôc celui de taille étoient
lynonymes au commencement , foit que
par le terme de collecte on entendit la taille
qui fe levoit fur le peuple , foit que le recou-
vrement de l'impôt fe pr:t quelquefois pour
l'impôt même : c'eft ce que l'on voit dans
Matthieu Paris, ainfi que nous l'avons déjà
remarqué ci-devant fur le mot collecle en
général. Il eft parlé des colledeurs des paroi fies
dans un règlement fait par la chambre des
comptes en 1 3 04 ; mais ces colledeurs étoient
prèpofés pour la perception des fouages. Une
ordonnance de Philippe VI , de l'an 1329 ,
fait mention des colledeurs députés pour
le recouvrement d'une imposition fur les
nouveaux acquêts : ce qui fait voir que le
nom de colledeurs n'ètoit pas propre unique-
ment à ceux qui Icvoient la taille ; qu'il fe
donnoit anciennement à tous ceux qui étoient
chargés de la levée & recouvrement de quel-
que fubfide ou impofition. Dans des lettres du
roi Jean , du moisd'odobre 1 362. , qui per-
mettent aux habitans de Soiflôns d'élire leurs
gouverneurs , tréforiers & colledeurs; ces
derniers font nommés colkcîores feu taillia^
tores : ce qui fait connoitre que les collec-
teurs faifoient dès-lors l'afliette de la taille.
Il y a pluiîeurs chofes à obferver par rap-
port à la collecle &c aux colledeurs des tailles.
Age. Les feptuagènaires ne pouvant plus
être contraints par corps , ne peuvent plus
être forcés d'être colledeurs : néanmoins d
un feptuagénaire acceptoit la charge , il fe-
roit contraignable par corps pour le fait de
fa commiflion.
Apothicaires, ne font excn^pts de la collecle,
Voye^ le mémoire alphahéiiqm.
Afféeurs , eft un premier titre que l'on
donne aux colledeurs , parce qu'ils font
d'abord l'afTîette des tailles fur chaque
contribuable. Les afteeurs étoient autre-
fois desperfonnes différentes des colledeurs ;
ils furent fubftitués aux premiers élus qui
impofoient la taille ; on lés choififtbit prami
les gens du lieu. Les fondions d'alTèeurs
i & de colledeurs fuient féparées jufqu'au
4S^ cet
temps â'ilenri III , qu'elles furent réunî(!S ;
i'afleeur ne faifoit auparavant que raffieite.
Se le coUeéleur la recette , mais comme
les afl'éeurs étoient garaiis de la non-valeur
des afïîettes envers les colled:eurs, ce qui
cau(bic continuellement des procès entre
eux, on trouva plus convenable d^établir
que ceux qui feroient TafTiette, f croient auffi
la collecîe. h* article ij du règlement de r 600 ,
& le xxx\'iij du règlement de 1634 , por-
tent que les afleeurs feront collecleurs en la
même année de leur charge. Depuis ce temps,
on joint prefque toujours le titre à'r.Jfécurs à
celui de collecleurs ; mais dans l'ulage on dit
amplement collecleurs.
Avocats , font exempts de faire la collecîe :
mais ce privilège neft pas accordé à tous
ceux qui ont le titre d'avocat; on le reftreint
à ceux qui exercent aduellement la pro-
fefïion.
Chirurgiens , ne font point exempts de
la collecîe , à moins que ce ne foit par privi-
lège particulier; tels que les chirurgiens du roi.
ClaJfesoM échelles : il eft permis aux habi-
tans des paroifles d'établir , fi bon leur fem-
ble , deux clafles ou échelles compofées Pune
des plus riches habitans , & Pautre des mé-
diocres ; afin que chaque contribuable vienne
à fon tour à la charge de collecteur : &
quand les habitans fe font une fois foumis à
cet arrangement , il n'eft plus en leur pou-
voir de le changer, DéclarationdemarsiCj^y
article 5.
Colleâeurs, voye^^ce qui efi: dit ci-devant ,
& ce qui fuit, & au mot Collecteur.
Déch d'un collecteur arrivant avant la
confection des rôles , ou avant qu^il ait été
rien reçu ,on en peut nommer un autre pour
remplir fa place : mais s'il décedt avant
l'exécution du rôle , ceux qui relient font
feuls la collecîe.
Décharge; ceux qui font nommés collec-
teurs , & qu? prétendent avoir des raifons
pour fe fiire décharger delà collecîe , doivent ,
fuivant la déclaration du 18 août 1685 , fe
pourvoir dans la quinzaine du jour de leur
nomination pardevant les officiers des élec-
tions ; autrement la quinzaine paflee , ils n'y
font plus recevables , & il eft défendu aux
cours des aides de recevoir directement les
appellations des nominations des collecteurs ■■,
faufaux parties , après le jugement des op^o-
c oc
firîon<; ; a {è pourvoir par appel de ces juge-
mens à la cour des aides. Les colleCteurs
nommés ne peuvent obtenir leur décharce
qu'elle ne ibit ordonnée avec le procureur-
lyndic de la paroiflè. Les élus doivent être
au nombre de trois pour juger ces oppo-
litions , & les colleCteurs font tenus de faire
PafTiette & levée des deniers , jufqu^à ce
qu'il y ait d^autres colleCteurs nommés. Rè-
glement de îGoo , art. i^ , confirmé par plu-
fieurs autres réglemens poftérieurs.
Diminution , voyez Taxe.
Domicile : iuivant le règlement de février
1(^63 , un habitant qui transfère (on domi-
cile après fa nomination à la collecîe , ne peut
être déchargé.
Echelles , \'oyez Clûjfes & Tableau.
Etpprifonnemens , voyez Prifonniers.
Exemptions de la collecîe , voyez Age ,
Avocats y Médecins. Par arrêt du confeil du
premier décembre 1645 , les exemptions de
la collecte des tailles Se fublîftances accordées
jufqu'alors furent révoquées , à l'exception
de celle des colleCteurs de l'impôt du fel , &
pour l'année feulement qu'ils feroient collec-
reurs du fcl.
M f: la die incurahle , tel que le mal caduc
ou autre qui fait perdre la raifon & empêche
d^agir , exempte de la collecîe.
Marguilliers en charge , ne font exempts
de la collecîe que pendant l'année de leur
charge. Règlement de février i6G^. Mém.
alphab.
Médecins , font ordinairement déchargés
de la collecîe , pour la dignité & nécefïité
de leur emploi.
"Nombre desajféeurs 6' collecleurs. Le règle-
ment de 1600 , article îz, dit qu'ils feront
misjufqu'au nombre de quatre chacun an,
pour les grandes paroifles taxées à 30oècus
de grande taille & au-deflus ; & pour les
moindres paroîlïes deux , qui feront enfem-
ble la recette , ou la fépareront entre eux ,
s'ils veulent , par quartier ou demi-année.
U article ^8 du règlement de 1654 , or-
donne qu'au lieu de quatre colleCteurs pour
les paroifles taxées à 1 500 livres &: au-deflus ,
il en fera nommé huit , & pour les moindres
paroifles , quatre , afin qu'ils puiflent fe fou-
lager l'un l'autre , & lever plus facilement
les deniers de la taille , & qu'ils feront en- ^
lèmblc cette levée par quartier & demi-
COL
année , ainfi qu ils conviendront entre eux.
La déclaration du 24 mai 17 17 , pour préve-
nir toute difficulté en cas de partage d'avis
entre les colledleurs , ordonne que dans les
paroifïes où il eft d'uTaged^'avoirplusde trois
colledeurs , le nombre foit à l'avenir de cinq
ou fept.
Nomination des collecteurs ; elle doit être
faite par les habitans des paroilles duement
ailèmblées à l^ifl'ue de la grand'mefle , à
jour de dimanche ou fête , & Paflèmblée qui
fe fait pour cette nomination^ doit être publiée
au prône des grand'mefles par deux diman-
ches confécutifs. Ces publications faites , le
procureur-fyndicdoit faire fonner les cloches
ou battre le tambour, fuivant Tufàge des
lieux , &c fe trouver devant Péglife à l^ifllie
de la mefle paroilïia[e on des vêpres , affillié
d''un notaire ou aut^e perfonne publique ,
lequel rédige l'adte, 6^ fait mention de tout
ce qui a précédé : on doib ^(^nommer par nom
6c furnom les habitans qui fe trouvent à
Tafiemblée , & faire mention qu'un tel a
nommé un tel , &: faire ligner chaque habi-
tant , ou s'il ne lait pas figner , en faire
mention. La nomination des colleéleurs
xloit être faite dans le courant de feptembre ,
de lignifiée aux colledeurs avant le premier
c6iobre. Déclaration du %8 août 1 68^.
La déclaration du 1 août 1 7 1 6 , ôc celle
du 9 août 1723 , ont ordomié de faire dans
chaque paroiflè un tableau des habitans ,
fuivant lequel ils viendront à la collecle cha-
cun à leur tour d'année en année : mais ces
réglemens n'ont pas encore eu par-tout une
pleine & entière exécution.
Suivant la déclaration du 28 août i68y ,
faute par les habitans de faire les nomina-
tions des colledeurs , & de les avoir fait
regiftrer en l'éleétion dans le dernier feptem-
bre , il efl: dit qu'il fera procédé d'office à la
nomination des colledeurs par les commif-
laires départis dans les provinces , & par les
officiers des éleélions, fans néanmoins que
le > officiers des éledions en puiflènt nommer
feuls.
Ceux qui ont déjà fait la fondion de col-
ledeurs 5 ne peuvent être nommés de nou-
veau qu'après trois années , èc pour les villes
murées , qu'après cinq années. Règlement de
février îG6^.
D'office j voyez ci-devant Nomination»
COL 487
Oppojîtion , voyez ci-devant Décharge.
Prifonniers : les colledeurs emprifonnés
faute de paiement , ne peuvent être élargis
fans appeller les receveurs des tailles ou leurs
commis qui les ont fait emprifonner. Règle-
ment de 264^ , article ij. Si tous étoient
empriionnés , on en élargiroit un pour ache-
ver le recouvrement. Ces élargiflemens fè
demandent ordinairement aux féances que
la cour des aides tient à la conciergerie à
Noël & à Pâque : mais il faut pour en obtenir
l'élargiilement , que le colledeur paie au
moins un quart de la fomme pour laquelle
il eft cmprifonné.
Rôle ou affiette des tailles , doit être faite
par les colledeurs en lieu de liberté \ per-
sonne ne doit y affifter que le notaire , fer-
gent , ou autre perfonne choifie par les col-
ledeurs pour écrire les taxes. Ils doivent y
procéder dans la quinzaine du jour de la
réception du mandement pour l'impofition
de la taille. Déclarât, du mois d'août 1683.
Ils doivent marquer fur le rôle le nom & la
{^rofcflion de chaque taillable , Tefpecc de
Ion commerce ou induftrie , la quantité de
terres qu'il exploite , le nom du propriétaire ,
le nombre de charrues ou paires de bœufs ,
fervant au labourage. Arrêt du confeil du J
juillet ly^J. Voyei plus bas Taxe.
Solidité. Les colledeurs font refponfabîes
folidairement du fait les uns des autres. Règle-
ment de îGoo , art. Zii , & de 2%-^ , art. ^8.
Taxe : les colledeurs ne peuvent le taxer
ou cotifer ni leurs parens & alliés , à moins
jqu'ils l'étoient l'année précédente, ou fur
le pié de leurs cotes , au cas que la taille eut
augmenté ou diminué , li ce n'eft qu'ils
eulîènt fouffert quelque notable perte ou.
dommage en leurs biens & facultés , ôc que
pour raifonde ce , les élus au nombre de trois
euflent jugé qu'il y eût lieu à un rabais. Edit
de iGoo , article zo , & de z6?4 , article ^o.
Ils ne peuvent pas non plus être augmentés
en fortant de charge , qu'à proportion de
. l'augmentation fur la taille , s'il y en a. Régi.
de l6j2 , art. G. Voyez le mémoire alphab.
des tailles , aux mots ajféeurs , collecle , collec-
teurs y rôle y tailles , &;c. ( ^ )
Collecte , ( WJi. eccléf. Lithurg. ) dans
la mefle de l'églife romaine , & même dans
la lichurgie anglicane, lignifie une prière
£rojpr£ à certains jours defâesj que le prêtre
488 COL
récite immédiatement avant 1 epître. Voy.
LiTHURGiE & Messe.
Eli général toutes les oraifons de chaque
office peuvent être appellées colleâes , parce
que le prêtre y parle toujours au nom de
toute lallèmblée , dont il réfume les ienti-
mens^' les deiirs par le mot oremus , prions ,
ainfi que l'obferve le pape innocent ïll , ou
parce que les prières lont offertes lorfque le
peuple^eft: ailemblé , ce qui eft lopinion de
Pamelius dans les remarques fur TertuUien.
Qiielques-uns attribuent f origine de ces
collèges aux papes Gélafe & S. Grégoire le
grand. Claude Defpenfe , dodeur de la
faculté de Paris , a fait un traité particulier
des colkâes , où il parle de leur origine ; de
leur ancienneté , de leurs auteurs , ùc.
Dans quelques auteurs anciens on trouve
le nom de collecle appliqué à Taflèmblée ou
congrégation des fidèles.
Colleâ2 fignifie auifi les quêtes qu'on fai-
foit dans la primitive ' églife dans certaines
provinces , pour en foulager les befoins des
pauvres & du clergé d'une autre province,
il en eft fait mention dans les ades & dans
les épîtres des apôtres. V. Trév. & Chambers.
COLLECTEUR , f. m. {Jurifprud. ) eft
le nom que l'on donne à ceux qui font
chargés du recouvrement de quelque impofi-
tion : comme les collecteurs des tailles , ceux
de Timpôt du fel \ on donnoit aufti autrefois
le nom de colleâeurs à ceux qui étoient pré-
pofés pour la levée de diverfes autres impofi-
tions, comme enverra dans les fubdiviiions
iuivantes. Chez les Romains , les importions
ordinaires furent appellées canonica , & les
collecîcurs canonicarii , comme on voit en
Vauth. de collatorïbus ,^^hoc cujîodiri. Voy.
ci -devant Collecte & ci-après Collec-
teurs DU Sel & DES Tailles. (A)
Collecteurs de l'Aide, voje:(^ Col-
lecte d'une aide , Collecteurs dï
L''ÀssisE, Collecteurs des Impositions
& Subsides. {A)
Collecteurs des amendes , voye:^ ci-
devant Collecte des Amendes. {A)
Collecteurs de l'Assise ou Aide fur
les marchandifes ù denrées qui fc vendent à
Taris ; il en eft parlé dans des lettres de
Philippe VI , du 17 février i:545>, portant
qu'il feralevé pendant un an une impolition ,
qui eft qualifiée à' aide ou ajjifc , fur toutes
COL
' les marchandifes & denrées qui feront ven-
dues dans la ville ik fauxbourgs de Paris j que
s'ilavenoir'âucuns débats ou difcuiïions entre
les collecteurs députés à la levée de ladite impo-
fiîion de les bonnes gens de ladite ville de
Paris , les prévôt 6c échevins en pourront
ordonner , ô'c. {A )
Collecteurs du droit d*Aubaine. Il
y en avoir du temps du roi Jean , comme
il paroît par des lettres de Charles V , alors
régent du royaume , du 16 février 1361, qui
défend à tous officiers ^ commiflaires-co//ec-
teurs, de autres, d'inquiéter les aubams qui
étoient membres du chapitre de Rheims.
Ordonnance de la troijiemc race. {A)
Collecteurs des Dlcimes. Il en eft
parlé dans les lettres du roi Jean , du 1 2
janvier 1 3 j i , portant commifTion au prieur
de S. Martin des champs de Paris , envoyé
par le roi dans le Languedoc pour y régler
toutes les affaires quiregarderoienr la finance ;
le roi lui donne pouvoir de pourfuivre tous
receveurs , collecteurs 5c fous-collecteurs des
décimes , pour les obliger de rendre compte :
ces Colleâeurs des décimes faifoient alors la
fonétion que font aujourd'hui les receveurs
particuhers des décimes dans les diocefcs.
Ko jc^ ci -après Décimes. (^)
Collecteurs députés a lever Vimpofition ,
&c. voy. Collecteurs de l'imposition
fur les marchandifes.
Collecteurs députés fur les finances des
nouveaux acquêts , étoient ceux qui étoient
prépofés pour le recouvrement des droits
dûs par les gens de main-morte pour les nou-
velles acquifitions par eux faites ; il en eft
parlé dans des lettres de Philippe VI , du 19
janvier 152,9, qui font adrelîces au bailli
de ville _, & collecloribus deputatis fuper finan-
dis acquejîuum in bailliviâ antediclâ. {A)
Collecteurs des Fouages , étoient
ceux qui faifoient la levée de l'impofition ou
aide appellée fouage , qui fe levoit fur cha-
que feu ou ménage ; Charles V ordonna , le
Il novembre 1379, que ces collecteurs nt
feroient plus nommés par les élus ni par les
autres officiers , mais qu'ils feroient choifis
par les habitans des lieux fujets à cette im-
pofition j que les habitans feroient garans
de leur geftion &: recette ; que les afleeurs
& collecteurs prêteroient ferment , que les
afleeurs feroient l'alïiette & donneroient sux
colleâeurs
COL
collecteurs le rôle d'impofidon un mois
avant le commencement de Tannée; que
les collecleurs pourroient recevoir un mois
avant le terme du paiement, & quijize jours
après contraindre ceux qui n'auroient pas
payé ; qu'un des collecleurs apporteroit au
receveur les deniers de Pimpofîtion quatre
jours au plus tard après l'échéance du terme :
il eft dit par cette même ordonnance , que
les afleeurs & colleâeurs feront réputés offi-
ciers royaux , & qu'on leur obéira comme à
des fergens royaux ; qu^ils pourront prendre
des commiiTions des élus du dioceiej que
Il les contribuables ne paient pas, les collec-
teurs en feront refponfables en cas qu'ils
n'aient pas fait les pourfuites néceffaires pour
les faire payer ; enfin , que les colleâeurs qui
iront porter au receveur l'argent de Timpo-
fition 5 auront pour le temps de leur voyage
quatre (ous par jour s'ils font à cheval , &
deux fous par jo^ir s'ils font à pié; 5c que
pour récompenfe de la peine qu'ils auront
de lever Timpofition , ils en feront exempts ,
à moins que les habitans ne conviennent
avec eux d^un autre falaire. On voit par ce
détail que Ton obfervoit alors à-peu-près le
mêm.e ordre pour les collecleurs y que Ton
oblerve aujourd'hui pour ceux des tailles
qui ont f)ris la place du droit de fouage , fi
ce n'eft que les colleâeurs des tailles ne ibnt
pas exempts de Timpofition , comme Té-
roient les colleâeurs des fouages. Cette or-
donnance contient auffi un règlement pour
la gabelle , à la fuite duquel il eft dit que les
élus & les grenetiers feront jurer tous les ans
aux colleâeurs des fouages , qu'ils leur dé-
nonceront ceux qui contreviendront à cette
ordonnance dans leurs paroiflès ; & que
lorfqu'ils le feront , ils auront la récompenfe
alîîgnée aux dénonciateurs , qui eft la moitié
des confifcations &: amendes. V.le recueil des
ordonn. de la troijîeme race, 5c Fou Age. (A)
Collecteurs d'Impositions, Ce nom
étoit commun autrefois à tous les prépofés
établis pour la levée de diverfes impoiitions ;
c'eft en ce fens qu'il fe trouve employé dans
des lettres de Philippe VI, du 3 juin 13 48,
adreftees à tous nos jufticiers, fénéchaux ,
baillis, receveurs, fermiers, colleâeurs des
impositions , & autres qui ces préfentes
lettres verront; il leur eft défendu de con-
traindre aucun changeur à payer impoiîtion
Tome VIII,
COL 48c>
du billon d'or Ou d'argent , qu'ils auront
vendu ou acheté dorénavant pour porter
aux moDIiioies. ordonnance de la troiJieme
race, tomz. II Q A)
Collecteurs de l'Imposition yî/r /e^
marcfiandifes ù denrées vendues à Paris.
Voye^ Collecteurs de l'assise. {A)
Collecteurs de l'impôt du Sel, v.
Collecte du Sel. (A)
Collecteur du Pape en France; il y
a eu quelques papes qui , du confentement
de nos rois, ont levé de temps en temps
en France une imposition fur le clergé pour
la Terre -fainte ôc autres objets de piété.
.Par exemple, Alexandre IV impofa, du
confentement du roi, un centième fur le
clergé de France pour la Terre-fainte. Les
papes levoient auflî des procurations ,
dixièmes , & d'autres droits fur les béné-
fices; 6c pour cet eftet ils avoient des col-
leâeurs & fous-coUeâeurs : il en eft parlé
dans des lettres de Charles V, du 4 fep-
tembre"i37j; ôc plus amplement encore
dans des lettres de Charles VI, du 3 oc-
tobre 138J, par lefqueiles il en révoque
d'autres qui avoient ordonné de pourfuivrc
les eccléiîaftiques qui n'avoient pas payé au
pape les redevaiices qu'il exigeoit d^eux.
Le même prince , dans une Inftrud-ion
qu'il donna le 1 1 mars 1388 aux généraux
des aides fur la levée des aides, djt que
le pape avoit envoyé une bulle portant que
les colleâeurs & fous-colleâeurs & autres
officiers, étoient francs & exempts des aides
qui étoient alors établies ; que cela porteroft
un grand préjudice au roi , vu que tous ces
officiers avoient coutume de payer les aides ;
pourquoi il ordonne aux généraux d'avifer
le remède convenable & d'y pourvoir. Il
en eft encore parlé dans d'autres lettres du
même prince, du 28 feptembre 1390; &
enfin par d'autres lettres du 17 juillet 1398,
il défendit à tous fes fujets, de quelqu'état
qu'ils fuflcnt, de rien payer aux colleâeurs
du pape des revenus éc émolumens qu'il
avoit coutume de prendre dans le royaume
& dans le Dauphiné : la même défenfe fut
par lui renouvellée le 19 décembre 1403 . V.
le recueil des ordonn. de la troifieme race. (A)
Collecteurs du Sel , voye:^ ci-devant.
Collecteur du Sel. {A)
Collecteurs des Subsides , étoient"
aqq
490 COL
ceux qui feifoient la levée <3es impofîtions '
extraordinaires que Ton mettoit en temps
de guerre j il en eft parlé dans dé^ lettres
df Philippe VI, du j8 juin 1319, adref-
lees au Bailli de Bourges , où il dit que
pour cïiufe de la guerre qu'il devoir avoir
en Gai cogne, pluiieurs commiflàires, col-
hcîeurs , fergens & autres , avoient levé fur
les fujets de ce bailliage pluiieurs fommes
d'argent & pluiieurs gages. {A)
Collecteurs de Subventions,
étoient les mêmes que ceux qui faifoient la
levée des aides, & autres impofîtions j ils
font nommés fubventionïwi co/kâcres dans
des lettres du roi Jean du 16 février 1 361.
Ordonnance de la troijieme race. {A)
COLLECTIF, adj. {Gram.) Ce mot
vient du hûncoUigere^ recueillir, rafièm-
bler. Cet adjeélif le dit de certains noms
fubftantifs qui préfentent à l'efprit l''idée
d'un tout , d'un enfemble formé par l'af-
ièmblage de plufieurs individus de même
elpece ; par exemple , armée eft un nom
collectif y il nous préfente l'idée finguliere
d'un enfemble , d'un tout formé par l'af-
femblage ou réunion de pluiieurs ioldats :
peuple eft aulTi un terme colleclifi parce
qu'il excite dans Pefprit l'idée d'une col-
lection de pluiieurs perfonnes raflemblées
en uh corps politique , vivant en fociété
fous les mêmes loix : foret eft encore un
nom coUeclif; car ce mot , fous une e^xpref-
^on finguliere , excite l'idée de pluiieurs
arbres qui font l'un auprès de l'autre; ainfi
le nom colle3if nous donne l'idée d'unité
par une pluralité aifemblée.
Mais obfervez que pour faire qu'un nom
ibit collecîify il ne fuftit pas que le tout fait
compofé de parties divifiblesj il faut que
ces parties foient aduellement féparées , &
qu'elles aient chacune leur être à part ,
autrement les noms de chaque corps par-
ticulier feroient autant de noms coUcclifsi
car tout corps eft divifible : ainfi homme
n'eft pas un nom collecîify quoique l'homme
foit compofé dç différentes parties; mais
ville cil un nom collecîify foit qu'on prenne
ce mot pour un affemblage de différentes
maifons , ou pour une fociété de divers
citoyens : il en eft de même d« multitude,
quantité, régiment y troupe ^ la plupart ^ ÔCC.
JUl Élut obfeiver ici vuie maxime impor-
COL
tante de grammaire , c'eft que le fens eft K
principale règle de la conitrudion : ainfi
quand on dit qu'une infinité de perfonnes
Jbuîiennent y le xcrhc fou tiennent eil au plu-
riel , parce qu'en effet , félon le fens , ce
lont plufieurs perlonnes qui iouriennent :
finfinité n'eft que pour marquer la plu-
ralité des perfonnes qui foutiennent : ainfi
il n'y a rien contre la grammaire dans
ces fortes de conftrudions. C'eft ainfi que
Virgile a dit : Fars merfi tenuere ra:em ; &c
dans Salufte , pars in carcerem acli , pars bef~
tiis objecli. On rapporte ces conftructions à
une figure qu'on appelle fyllepfe; d'autres la
nomment fyntheje : mais le nom ne fait
rien à la chofe; cette figure confifte à faire
la conftruélion félon le fens plutôt que félon-
ies mots. Voye:^ Construction. {F)
COLLÉG AT AIRES , C m. pi. {Jurif^
prud. ) font ceux auxquels une même chofc.
a été léguée conjointement. .
Pluiieurs légataires d'une même chofe
peuvent être conjoints en trois manières dif-
férentes , (avoir, re , verbis , aut re & verbis^
Ils font conjoints feulement re , c'eft-
à-dire par la chofe , lorfque la même chofe
leur eft léguée à chacun par une difpofi-
tion particulière : par exemple , je lègue à
Titius ma maifon de Tufculum , je lègue
à Mcevius ma maifon de Tufculum.
Ils f(?nt conjoints de paroles feulement,
verbis , lorfque la même difpofition les
appelle au legs d'une certaine chofe , mais
néanmoins en leur afîgnant à chacun la
part qu'ils doivent y avoir : par exemple >
je lègue à Titius &c à Mœvius ma maifon
de Tufculum par égales portions.
On les appelle conjoints re & verbis ,
lorfqu'ils font appelles enfemble & à la.
même chofè fans diftinârion , comme
quand le teftateur dit : je lègue à Titius
& à Mœvius^ ma maifon de Tufculum.
Le droit d'accroillèment n'a pas lieu
entre toutes fortes de collégataires , mais
feulement entre ceux qui font conjoints
re y ou qui le font tout enfemble re &
verbis. Voye[ injî. lib. II y tit. xx ; voye^
Légataire & Accroissement. {A)
COLLEGE, f. m. corps ou compagnie
de perfonnes occupées des mêmes fonc-
tions. Collegium chez les Rojnains avoit le
même fens; on s'en fendit indifféremmeat
COL
pour ceux qui vaquoient aux affaires de la
religion , à celles de l'état , ai*x arts libé-
raux, aux arts mécha niques, au commerce,
ùc. Ce mot ne fignifieit proprement qu'une
compagnie^ une focié té. Voye:^ Société,
Ainfi parmi eux, outre le collège des au-
gures Se celui des capitolins , c'eft-à-dire,
la compagnie qui avoir la furintendance
des jeux capitolins, on comptoit encore le
collée des artificiers , celui des charpentiers ,
des potiers, des fondeurs, des ferruriers,
des ouvriers pour les machines de guerre ,
des bouchers, des dendrophores , des ra-
vaudcurs, des tailleurs d'habits militaires,
des faiseurs détentes, des boulangers , des
muficiens, &c. Voye'{^ Augure.
Plïitarquc prétend que cette divifîon du
peuple en collèges y étoit un effet de la po-
litique de Numa, qui voulut que les dif-
férens intérêts de ceux qui compofoient ces
divers collèges les tenant toujours défunis,
les empêchaient de penfer à aucune conC
piraiion générale. Ces collèges étoient dif-
tingués des autres fbciétés formées fans
laveu de Tautorité publique, en ce que
ceux qui compofoient ces collèges traitoient
pour les intérêts communs de leur corps , &
qu'ils étoient autant de membres de l état :
ils avoient une bourfe commune, & un
agent pour folliciter leurs affaires : ils en-
voyoient des députés aux magiflrats quand
ils ne pouvoient y aller en perlonne; enfin,
ils avoient droit de faire des ftatuts &: des
réglemens pour l'adminiftration de leurs
affaires , à - peu - près comme font parmi
nous les corps de métiers par leurs (yndics ,
jurés, gardes & autres officiers.
Il y a parmi les modernes quelques col-
lèges , mais d'un ordre bien fupérieur à ces
collèges des Romains , tels que les trois
collèges de Pempire. Voye-^ ci-dejfous Col-
lèges DE l'Empjre , & le Collège des
Cardinaux , ùc.
Collège des Avocats. Les avocats,
confidérés tous enfemble , forment un or-
dre , Ôc c'efl ainfi qu'on les qualifie ordi-
nairement; néanmoins dans quelques prp-
vinces, comme à Rouen, à Lyon, &c.
on dit le collège des avocats. Voye-^ Avo-
cats , Ordre des Avocats.
Collège des Avocats au Conseil,
eft la compagnie des avocats qui /ont
COL 491
chacun pourvus d^un office d'avocat es
conieils du roi , en vertu duquel ils peuvent
feuls occuper dans toutes les iiîflances qui
ie portent au oonfeil. Fcrye;^ Avocats au
Conseil & Conseil.
Collège, fignifie auflî quelquefois un
corps d'eccléfiafliques. C'efl en ce Çtns que
l 'on dit collège des cardinaux ou lefacré collège.
Il y a auffi des collèges de chanoines &
des collèges de chapelains.
On ne donne communément le titre
de collège ou de collégiale aux chanoines
féculiers ou réguliers , que dans les égUfes
autres que la cathédrale.
Pour ce qui eft des chapelains , il y a des
cgliies , même cathédrales , où ils forment
un corps que Pon appelle collège , comme
dans l'églife cathédrale de Rouen , où il y
a cinq ou fîx collèges différcns de chape-
lains, qu'on appelfe collégiaux^ à la diffé-
rence d'autres chapelains de la même églifè ,
qui ne forment point de corps entre eux,
& qu'on appelle non -collégiaux.
Le Collège des Cardinaux ou Iq
facré collège , eft le corps des cardinaux qui
font divilés en trois différens ordres; les
cardinaux évêques, les cardinaux prêtres
& les cardinaux diacres. V. Cardinal.
Chaque ordre a fon doyen ou chef;
celui des cardinaux évêques eft toujours
l'évêque d'Oftie.
Collège des Secrétaires du Roi»
eft la compagnie des fecretaires du roi :
il y a le grand & le petit collège.
Le grand collège eft la compagnie des
fecretaires du roi , maifon couronne de
France & de fes finances, qui font attachés
à la grande chancellerie de France.
Cette compagnie étoit autrefois compo-
fce de fix collèges différens.
Le premier, qu'on appelloit le collège
ancien y ne fut d'abord compofe que de
foixante perfonnes; favoir, le roi & cin-
quante-neuf fecretaires. Ce collège fut de-
puis augmenté de foixante fecretaires ap-
pelles ^^^<rr.T , pour les diftinguer des autres
qu'on appelloit bourfiers.
Le fécond , appelle le collège des cïn'-
quanîe-quatre , compofé de cinquante -qua-
tre nouveaux fecretaires du roi, créés par
édit de Charles IX , en i yyo , & confirmé
par Henri UI en 1583*
Qqq 1
45)i COL
Le troiileme;, appelle des foixante-Jix ,
comporé de loixanre-lix fecretaires du roi,
créés à divcrfes fois , àc unis en collège
par Henri IV en 1608; auxquels furent
joints les quarante -lix créés par édit de
Louis XIII en 1641 ; ce qui fit en tout,
dans ce colley y 111 fecretaires du roi.
Le quatrième, appelle des fix-vingts des
finances créés à trois fois; favoir, 16 par
Henri IV, 19 par Louis XIII en 1615, &
S4 encore par Louis XIII en 16 55.
Le cinquième , appelle collège des vingt
de Ncn'crré f fut créé & établi en 1607
par le roi Henri IV , cpi les amena en
France avec la couronne de Navarre ; ils
croient Tes fecretaires lorfqu'il n'étoit encore
que roi de Navarre.
Le fixieme & dernier , appelle des qua-
tre-vingts, fut créé à deux fois par Louis
XIVj lavoir, 46 en 1655, & 34 en 1657.
. Ces fix collèges difFérens ont depuis été
réunis en un feul & même collège , qu'*on
appelle le grand collège des fecretaires du
roi, qui ont tous le même titre.
Le petit collège eft compofé des fecre-
taires du roi établis près des cours & pe-
tites chancelleries. Voy. Secrétaires du
Rai. {A)
. Collège , en parlant de l'Allemagne , fe
dit d'une célèbre divifion de tous les états
qui compofent le corps germanique en trois
ordres ou clafles , qu'on nomme le collège
des électeurs , le collège des princes , & le
collège des villes libres ou impériales. Les
deux premiers corps ne formoient d'abord
qu'une feule & même afîèmblée , (bit pour
l'élettion de Pempereur, foit pour les autres
délibérations. Mais les éledeurs s'étant in-
fènfiblement arrogé le droit d'élire feuls
l'empereur , & de tenir leurs conférences à
part, tant dans cette occailon que pour les
autres affaires de l'empire, malgré les pro-
tefîations des autres princes & des villes im-
périales y cela fit prendre aufïî à ces princes
& à ces villes la réfolution de s'affembler en
corps féparés; & de là elT: venue la diftinc-
tion des trois collèges, qui fut reçue & établie
dans la diere de Francfort en 1580. Mais les
villes impériales font les dernières qui ont
fait un collège particulier : leurs privilèges
néanmoins font bien moins confidérables
que ceux des deux premiers corps om collèges.
COL
Quand les deux premiers collèges étoîSnt
d'accord, le collège des villes le trouvoit
obligé de confentir fans autre délibération.
Mais cet ordre a changé ; fi le collège des
villes impériales s'oppofe à l'avis unanime
des deux autres collèges , pour lors on dé-
pute vers l'empereur, pour le prier d'hi-
duire les villes à donner leur confentemenc
à l'avis des deux autres collèges fupérieurs.
Le collège électoral eft compole des princes
électeurs , qui font trois eccléfiaftiques y
favoir, l'éledteur de Mayence, l'éleéteur de
Trêves & l'éledteur de Cologne, tous trois
archevêques, & de cinq féculiers, qui font,
le roi de Bohême, le duc de Bavière, l'élec-
teur de Saxe, celui de Brandebourg, &; le
palatin du Rhin , auxquels l'empereur Léo-
pold ajouta un fixieme en faveur du duc de
Brunfwik-Hanovre, dont la maifon occupe
aujourd'hui le trône d'Angleterre.L'éleéteur
de Mayence tient le diredroire , ou eft du'ec-
teur de ce collège y c'eft-à-dire , qu'il y pro-
pofe les matières & recueille les voix. Les
éledeurs peuvent y afîifter par eux-mêmes
ou par leurs ambafïàdeurs ; quant à leurs
autres prérogatives, voye^^ Electeur.
Le collège des princes comprend tous les
autres princes d'Allemagne , fbit eccléfiafti-
ques, comme archevêques , évêques , abbés,
prévôts &: autres prélats , princes , fbit fecu-»
liers , comme ducs , marquis , landgraves ,
burgraves &: autres princes. Il comprend
aufli les abbés , abbefîes , les autres prélats
& les comtes qui font membres relevant
immédiatement de l'empereur ou de l'em-
pire , &C qui font non feulement compris
dans la matricule de l'empire, mais encore
contribuent à fes nécclîltés fuivant la taxe
portée par cette matricule; car il y a plu-
fîeurs feigneurs qui ont confervé le titre de
princes de l'empire , comme les archevêques
de Befançon &c de Cambrai , fans avoir ni
féance ni fuffrage aux diètes; mais l'éveque
de Strafbaurg , quoique fous la domination
de France , a confervé fbn rang à la diète de
l'empire. Il doit cette prérogative finguliere
au feu empereur Charles Vî ; ce qui fut né-
gocié par le favant M. Schccpflin , profefTeur
d'hifk)ire Se de belles - lettres à Strafbourg.
Le diredoire des princes eft tenu alterna-
tivement par l'archiduc d'Autriche & par
l'archevêque de Saltzbourg.
COL
Le troKîeme collège eft celui des villes impé-
riales, ainii nommées parce quelles lonr
états immédiats & indépcndans de toute au-
tre puifiànce que de l'empereur & de l-'em
pire. Depuis le traité de Weftphalie elles ont
voix délibérative & décifive comme les deux
autres collèges. L'Allemagne avoit autrefois
quatre-vingt-quatre ou quatre-vingt-cinq
villes quijouifloient de ce droit; ce nombre
eft réduit à environ cinquante ; leur direc-
toire eft tenu & exercé par le premier magif-
trat de la ville impériale où la diète eft con -
voquée , & fi elle ne s'aftèmble pas dans
une ville impériale , les premières villes des
bans font exercer le diredoire alternative-
ment par un fyndic ou par un avocat.
HeiC h/foire de F Empire , tome. III. (G) {a)
Collège deSion, ou du Clergé de
Londres : c'étoit de temps immémorialune
maifon religieufe nommée tantôt prieuré ,
& tantôt hôpital. A fa deftrudion , arrivée
la rrente-unieme année d^Henri VIII, on
i'appelloit V hôpital d^Ehyn^ du nom d'un
mercier qui l'avoit fondé en 1 319. Préfen-
remenc ce collège eft compofé du collège du
clergé de Londres , qui lui a été incorporé
en i(>3i à la requête du docteur Withe ,
en qualité de préiident des membres du col-
lège de Sion , & d'un hôpital fondé pour dix
pauvres hommes & autant de femmes.
Les officiers de cçcdlegeCom le préfîdent,
deux doyens , & quatre aiTèfîèurs ; ils font
élus tous les ans parmi les curés 3c vicaires
de Londres , & font fujets à la vifite de
l'cvéque. Ils ont une belle bibliothèque fon-
dée par M. Simfon : elle eft principalement
deftinée à Tufage du clergé de Londres, fans
en excepter cependant les autres étudians.
Ils ont aullî une claftè avec des chambres
pour les étudians ; mais elles font occupées
communément par les miniftres des paroiffes
voifines. Chambers.
Collège des Docteurs en Droit de
Londres , ordinairement appelles doclors
commons , a été îovÂi parle dodeur Ilarvey,
doyen de la cour des Arches , en faveur des
profeileurs de droit civil établis à Londres ,
auffi-bien que pour le juge de la cour des
Arches de Cantorbéry, le juge de l'ami-
rauté , de la cour de la prérogative , ùc. ôc
autres do6beurs en droit. Ils vivent tous, tant
pour le logement que pour lanouiiiturej à
COL 45)5
la manière des collèges, c'eft-à-dire en com-
mun , ce qui fait qu'on les appelle doclors
commons. Leur maifon ayant été brûlée
dans le grand incendie de 1 661 , ils demeu-
rèrent à Exeter-houfe-in the Strand, jufqu'à
ce que leur ccZ/eoe fut rebâti à leurs dépens,
-&.ayec magnificence.
Ce Collège a trente procureurs qui fc char-
gent de toutes les caufes des étudians. Voye-^
Procureur.
Collège des Hérauts d'armes jc'eft
un» compagnie établie par des patentes du
roi Richard IIÏ , qui leur a donné pluiieurs
privilèges , comme d'être exempts de fublî-
des , de péages , d^offices , ùc. Voyc:^
HÉRAUT.
Ils ont eu- une féconde patente fous le roî
Edouard VI ; & une maifon proche celle
des docteurs communs, que le comte de
Derby avoit fait bâtir fous le règne d'Henri
VII , leur fut donnée par le duc de Norfolk
fous le règne de la reine Marie. Cette maifon
a été nouvellement rebâtie.
Cette compagnie a trois officiers appelles
rois d'armes , reges armorum anglicorum ;
fix hérauts & quatre pourfuivans. Voye^^^,
Roi d'armes, HÉRAUT d'aRMES &PoUR-
suivANS d'armes. Chambers. (G)
Collège des Marchands j c^eft ainfî
que l'on nomme dans prefquc toutes les vil-
les anféatiques un lieu ou place publique ,
où s'aflemblent ordinairement les marchands
& négocians pour traiter des affaires de leur
commerce. C'eft ce' qu'on appelle ailleurs
bourfe , à Lyon place du change. Voyer
Bourse , Place du change & A:;séati-
ques.
On appelle auffi à Londres collège, un
endroit où s^aflèmblcnt ceux qui font de la
fociété royale. Les Anglois ont joint à ce mot
de collège celui de Gresham , nom de ce
fameux marchand anglois , que la reine
Elifabeth employa en qualité de réfidenc
dans les pays-bas , & fur-tout à Anvers ,
pour les affaires du négoce , auquel on
érigea des ftarues en i f 64 & en i ;66 dans
la place de la bourfe & dans ce collège , qui
atoujours^é appelle depuis Gresham col-
%£ , en coniillfration de ce que Gresham
avoit fait fleurir en Angleterre le commerce
Se les manufactures. Dicl. du Cornm. Foye:^
Collège de Gresham,
45)4 COL
Collège fignîlîe aulTI en quelques endroits
la même chofe que communauté ^ c'e(l-à-
dire un corps d'artifans de certains métiers,
unis enfemole fous une même difcipline &:
fous les mêmes officiers.
Nous avons emprunté ce terme des La-
tins, chez qui collegium avoir la même figni-
fication dans les arts &: métiers qu'a parmi
nous le mot de communauté, comme il
paroît par plufieurs anciennes infcriprions ,
où Ton trouve le collège des marchands . le
Collège des forgerons , le collège des boulan-
gers , le collège des bateliers. Voyez tanti-
fuiîé expliquée du P. Montfaucon.
Les Hollandois nomment aufïî collèges
les différentes chambres de leur amirauté,
établies dans q^uelques- unes de leurs princi-
pales villes j (avoir , à Amfterdam , Rot-
terdam , Hoorn , Middelbourg & Har-
lingen. Voye-;^ Amirauté , & Dicl. du
Comm. (G)
Collège , terme d'Arckiteâure , grand
bâtiment établi pour enfeigner la religion ,
les huraanités , ôc les belles-lettres , com-
pofé de plufieurs chapelles, clallès , ôc loge-
■ftiens , tant poiu: les prpfefl'eurs , que pour
les penfionnaires ôc bouriiers. Ces édifices
doivent être bâtis avec fi^lidité & fimplicité,
iîtués , en bon air , tenus peu élevés , &
être munis de grandes cours ôc de jardins
fpacieux. Celui des pères Jéfiiites à Rome ,
appelle le collège romain, eft un des pluscon-
dérables pour la beauté de (on archireârure.
On peut encore nommer celui des Quatre-
iiations à Paris , èc celui de la Flèche en
Anjou.
Il faut un a(îemblage de plufieurs coU
legcs pour former une univerfité. Voye'^
Université.
L'univerfité d'Oxford eft compofée de
dix-neuf collèges. Se de fix halls , ou lieux
deftinés à loger &c à nourrir en commun
de pauvres écoliers.* Celle de Cambridge
compte douze collèges 5c quatre halls. Urxnï-
verfité de Paris a onze collèges de plein exer-
cice , & plus de quarante autres fondés pour
un certain nombre de bourfiers, & aflèz
vaftes pour contenir encore un f rand nom-
bre d'étudians qui y logent î^qui de-là vont
écouter les profelleurs dans les collèges de
plein exercice.
LMredion des collèges ne fe peut faire en
COL
» Angleterre que par le confentement èc l'au-
torité du roi , & en France que par lettres-
patentes.
Chez les Grecs les collèges les plus célèbres
étoicnt le lycée & l'académie : ce dernier
a donné le nom à nos univerfités , qu'on
appelle en latin académies ; mais plus pro-
prement encore à ces fociétés littéraires qui
depuis un fiecle fe font formées en Europe.
Outre ces deux fameux collèges dans l'anti-
quité greque , la maifbn ou l'appartement
de chaque philofbphe ou rhéteur pouvoic
être regardé comme un collège particulier.
Voye^LycÉE ù Académie.
On prétend que les Romains ne firent de
pareils établiflemens que fur la fin de leur
empire : quoi qu'il en foir, il y avoit plu-
fieurs collèges fondés par leurs empereurs
& principalement dans les Gaules , tels que
ceux de Marfeille, de Lyon, de Befançon,
de Bordeaux , &c.
Les Juifs ôc les Egyptiens avoient aulTî
leurs collèges. Les principaux de ceux des
Juifs étoient établis à Jérufalem, àTibériade,
à Babylone : on prétend que ce dernier avoit
été inftitué par Ézéchiel , & qu'il a fubfifté
jufqu'au temps de Mahomet.
La plupart de ces établiflemens deftinés à.
l'inftrudion de la jeunefle , ont toujours été
confiés aux perfonnes confacrées à la reli-
gion : les mages dans la Perfe , les gymnofb-
phiftes dans les Indes , les druides dans les
Gaules ôc dans la Bretagne , étoient ceux à
qui l'on avoit donné le foin des écoles pu-
bliques. Fbj^^ Druide, M agh, &c.
• Après l'établi (îement du chriftianifme il
y eut autant de collèges que de monafteres.
Charlemagne, dans fes capitulaires , enjoint
aux moines d'élever les jeunes gens , ôc de
leur enfeigner la mufique , la grammaire &
Tarithmérique : inais foit que cette occupa-
tion détournât trop les moines de la contem-
plation , ôc leur enlevât trop de temps , fbit
dégoût pour l'honorable , mais pénible fonc-
tion d'inftruire les autres , ils la négligèrent -,
ôc le foin des collèges qui furent alors fondés
fut confié à des pcrfonnes uniquement oc-
cupées de cet emploi. Trév. Moréry , &
Chambers. ( G )
Nous n'entrerons point ici dans le détail
hiftorique de i'établilfement des différens
coHeges de Paris > ce détail «eft point de
COL
l'objet de notre ouvrage , & d^ailleurs inté-
relîèroit aflez peu le public : il eft un autre
objet bien plus important dont nous vouions
ici nous occuper; c'eft celui de l'éducation
qu'on y donne à la jeunellè.
Qiiintilien , un des hommes de l'antiquité
qui ont eu le plus de lens&: le plus de goût,
examine, dans Tes înflitutions oratoires y {\
l'éducation publique doit être préférée à
l'éducation privée ; & il conclut en faveur de
la première. Prefque tous les modernes qui
Qfit traité le même fujet depuis ce grand
homme , ont été de Ton avis. Je n'examinerai
point fi la plupart d'entre eu*ïi*étoient point
intérelîés par leur état à défendre cette opi-
nion, ou déterminés à la fuivre par une
admiration trop fouvent aveugle pour ce que
les anciens ont penfé ; il s'agit ici de raifon ,
& non pas d'autorité , & la queftion vaut
bien la peine d'être examinée en elle-même.
J'obferve d'abord que nous avons alTèz
peu de connoiflances de la manière dont fe
raifoit chez les anciens l'éducation, tant pu-
blique que privée , & qu'ainfi ne pouvant à
cet égard comparer la méthode des anciens
à la nôtre, l'opinion de Quintilien, quoique
peut-être bien fondée , ne fauroit être ici
d'un grand poids. Il eft donc néceflàire de
voir en quoi confifte l'éducation de nos
collèges, &c de la comparer à l'éducation
domeftique > c'eft d'après ces faits que nous
devons prononcer.
Mais avant que de traiter un fujet fî im-
portant, je dois prévenir les lecteurs délîn-
terelTés , que cet article pourra choquer quel-
ques perfonnes , quoique ce ne foit pas mon
intention : je n'ai pas plus de fujet de haïr
ceux dont je vais parler , que de les crain-
dre ; il en eft même plufieurs que j'eftime ,
& quelques-uns que j'aime & que je refpec-
te : ce n'eft point aux hommes que je fais la
guerre , c'eft aux abus , à des abus qui cho-
quent & qui affligent comme moi la plupart
même de ceux qui contribuent à les entrete-
nir , parce qu'ils craignent de s'oppoier au
torrent. La iliatiere dont je vais parler inté-
refle le gouvernement & la religion , & mé-
rite bien qu'on en parle avec liberté , fans
que cela puifle ofFenfer perfonne: après cette
précaution , j'entre en matière.
On peur réduire à cinq chefs l'éducation
publique 3 leSt humanités x la rhétorique ,
COL 45) j
j la philofbphie, les mœurs de la religion.
Humanités. On appelle ainfi Ittempsqu'on
emploie dans les collèges à s'inftruire des pré-
ceptes de la langue latine. Ce temps eft d'en-
viron fix ans : on y joint vers la Hn quelque
connoiflànce très-fuperhcielle du grec ; on
y explique , tant bien que mal , les auteurs
de Pantiquité les plus faciles à entendre ; on
y apprend aulîi , tant bien que mal, àcom-
poièr enlatin; jenefache pas qu'on y èn-
leigne autre choie. Il faut pourtant conve-
nir que dans Funiverfité de Paris , oij ciia-
que profefleur eft attaché à une clallc parti-
culière , les humanités font plus fortes que
dans les collèges àtiégwYiQis, où les profef-
feurs montent de claflè en clafle , & s'inf-
truifent avec leurs difciples , en apprenant
avec eux ce qu'ils devroient leur enieigner.
Ce n'eft point la faute des maîtres, c'eft,
encore une fois , la faute de l'ufage.
Rhétorique. Quand on fait ou qu'on croit
favoir allez de latin , on pafle en rhétorique:
c'eft alors qu'on commence à produire quel-
que chofe de loi-même; car jufqu'aiors on
n'a fait que traduire , foit de latin en fran-
çois , foit de françois en latin. En rhétori-
que on apprend d'abord à étendre une pen-
fée , à circonduire Se allonger des périodes ^
& peu à peu. l'on en vient enfin à des dif-
cours en forme , toujours ou prefque tou-
jours , en langue latine. On donne à ces dif-
CQurslenom d'amplifications ; nom très-con-
venable en effet , puifqu'ils conliftcnt pour
l'ordinaire à noyer dans deux feuilles de ver-
biage, ce qu'on pourroit & ce qu'on dcvroit
dire en deux lignes. Je ne parle point de ces
figures de rhétorique fi chères à quelques
pédans modernes , 8c dont le nom même
eft devenu fi ridicule , que les profefîeurs^
les plus fenfés les ont entièrement bannies
de leurs leçons. Il en eft pourtant encore qui
en font grand cas , & il eft afïèz ordinaire
d'interroger fur ce fujet important ceux qui
afpirent à la maîtrife es arts.
Philofophie. Après avoir pafTé fept ou
hu* ans à apprendre des mots , ou à parler
fans rien dire , on commence enfin , ou on
croit commencer l'étude des ciiofes ; car c'eft
la vraie définition de la philofophie. Mais
il s'en faut bien que celle des collèges mérite
ce nom î elle ouvre pour l'ordiiiaire par um
compendium , qui eft , fi on peut parler ainE^
49(f COL
le rendez-vous d'une infinité de queftions
inutiles fur Pexifcence de la philofophie .fur
la philofophie d'Adam , ùc. On pafle ae-là
en logique : celle qu'on enfeigne, du moins
dans un grand nombre de collèges , eft à-
peu-près celle que le maître de Philofophie
le propofe d'apprendre au bourgeois gentil-
homme : on y enfeigne à bien concevoir par
le moyen des univerfaux, à bien juger par
lemoyendescathégories^&àbicnconftruirc
un fyllogifme par le moyen des figures, bar-
hara y celarenî , dûrii , ferio , baralipton , &c.
On y demande fi la logique eft un art ou
une fcience , fi la conclufion eft de l'elTence
du fyiîogifme , ùc. &€. &c : toutes queftions
qu'on ne trouvera point dans l'art de penfer;
ouvrage excellent , mais auquel on a peut-
être reproché avec quelque raifon d'avoir
fait des règles de la logique un trop gros vo-
lume. Là métaphyfique eft à-peu-près dans
le même goûtj on y mêle aux plus impor-
tantes véritQS les difcuflions les plus futiles:
avant & après avoir démontré l'exiftence de
Dieu , on traite avec le même foin les gran-
des queftions de la diftindion formelle ou
virtuelle , de l'univeriel de la part de la chofc,
ôc une infinité d'autres ; n'eft-ce pas outra-
ger 6c blafphémer en quelque iorte la plus
grande des vérités , que de lui donner un.fi
ridicule & ii miférable voifinage î Enfin
dans la phyfique on bâtit à fa mode un fyf.
tême du monde ; on y explique tout ou pref-
que tout ; on y fuit ou on y réfute à tort &z
à travers Ariftote , Defcarrcs Se Newton.
On termine ce cours de deux années par quel-
ques pages fur la morale , qu'on rejette pour
l'ordinaJre à la fin , fans doute comme la
partie la moins importante.
Mœurs & Religion. Nous rendroffî fur le
premier de ces deux articles la juftice qiii eft
due aux foins de la plupart des maîtres ; mais
nous en appelions en même temps à leur
témoignage i & nous gémirons d'autant
plus volontiers avec eux fur la corruption
do:nt on ne peut juftiner la jeunefle des co/-
legiis , que cette corruption ne fauroit kur
être imputée. A l'égard de la religion , on
tombe fur ce point dans deux excès égale-
ment à craindre : le premier & le plus com-
mun , eft de réduire tout en pratiques exté-
rle ures , & d^attacher à ces pratiqtjes une
vejftu qu'elles n'ont apurement pas ; le fe-
COL
cond eft au contraire de vouloir obliger
les enfans à s'occuper uniquement de cet
objet j & de leur faire négliger pour cela
leurs autres études , par lefquelles ils doi-
vent un jour fe rendre utiles à leur patrie.
Sous prétexte que Jefus-Chrift a dit qu'il
faut toujours prier, quelques maîtres, ôc
fur-tout ceux qui font dans certains prin-
cipes de rigorifme , voudroient que prefque
tout le temps deftiné à Pétudc fe pafsât en
méditations & en catéchifmes; comme fi
le travail & Pexadtitude à remplir les de-
voirs de fon état, n'étoient pas la prière la
jîlus agréable à f)ieu. Auffi les difciples qui ,
loit par tempérament, foit par pareflè, foit
par docilité, fe conforment fur ce point
aux idées de leurs maîtres, fortent pour
l'ordinaire du collège avec un degré d'im-
bécillité & d'ignorance de plus.
Il réfulte de ce détail qu'un jeune homme
après avoir pafle dans un collège dix années ,
qu'on doit mettre au nombre des plus pré-
cieufes de fa vie , en fort lorfqu'il a le mieux
employé fon temps, avec la connoiftance
très-imparfaite d'une langue morte, avec
des préceptes de rhétorique ^ des principes
de philolbphie qu-'il doit tâcher d'oublier;
fou vent avec une corruption de mœurs
dont ^altération de la fanté eft la moindre
fuite ; quelquefois avec des principes d'une
dévotion mal entendue ; mais plus ordinai-
rement avec une connoiftance de la religion
a fuperficielle , qu'elle fuccombe à la pre-
mière converfation impie , ou à la première
ledure dangercufe. V. Classe.
Je fais quQ les maîtres les plus fenfés déplo-
rent ces abus avec encore plus de force que
nous ne faifons ici; prefque tous défirent paf-
fionnément qu'on donne à l'éducation des
collèges une autre forme : nous ne faifons
qu'*expofer ici ce qu'ils penfent, &: ce que
perfonne d'entre eux nofe écrire; mais le
train une fois établi a fur eux un pouvoir
dont ils ne fàuroient s'affranchir; & en ma-
tière d'ufage, ce font Içs gens d'efprit qui
reçoivent la loi des fots. Je n'ai donc garde
dans ces réflexions fur l'éducation publique ,
de faire la fatire de ceux qui enfèignent, ces
fentimens feroient bien éloignés de la recon-
noiftance dont je fais profeftion pour mes
maîtres : je conviens avec eux que l'autorité
fupérieure du gouvernement eft feule capable
d'arrêter
COL C CTL 45^7
d'arr*ter les progrès d'un fî grand mal ; T r'ifme , déclarent une guerre mortelle. Nous
je dois même avouer que plusieurs profef-
Tcurs de l^univerfîté de Paris s'y oppofent
autant qu'il leureft pofïîble , & qu'ils ofcnt
s'écarter en quelque cliolè de la ^routine
ordinaire , au rifque d'être blâmés par le plus
grand nombre. S'ils ofoient encore davan-
tage , & Cl leur exemple étoit fuivi , no^is
verrions peut-être enfin les études changer
de face" parmi nous : mais c*efl: un avantage
qu'il ne faut attendre que du temps , fi
même le temps eft capable de nous le procu-
rer. La vraie philofophie a beau fc répandre
en France de jour en jour , il lui eft bien plus
difficile de pénétrer chez les corps que chez
les particuliers y ici elle ne trouve qu'une tête
à forcer , fi on peut parler ainlî , là elle en
trouve mille. L'univerfité de Paris , compo-
fée de particuliers qui ne forment d^'ailleum
entre eux aucun corps régulier ni eccléfiafti-
que , aura moins de peine à fecouer le joug
des préjugés dont les écoles font encore
pleines.
Parmi les différentes inutilités qu'on ap-
prend aux enfans dans les collèges , j'ai né-
gligé de faire mention des tragédies , parce
qu'il me femble que l'univerfité de Paris
commence à les prefcrire prefque entière-
ment : on en a l'obligation à feu M. Rollin,
un des hommes qui ont travaillé le plus
utilement pour Péducationde la jeunefu; : à
ces déclamations de vers il a fubftitué les exer-
cices , qui font au moins beaucoup plus uti-
les , quoiqu'ils puiffent l'être encore davan-
tage. On convient aujourd'hui afïez géné-
ralement que ces tragédies font une perte
de temps pour lesécoliers d<. pour les maîtres:
c'eft pis encore quand on les multiplie au
point d'en repréfentcrplufieurs pendant Pan-
née , &: quand on y joint d'autres appen-
dices encore plus ridicules , comme des ex-
plications d'énigmes , des ballets , & des
comédies triftement ou ridiculement plai-
fantes. Nous avons fous les yeux un ouvrage
de cette dernière efpece ^intitule la défaite du
Solécifme par Defpautere , repréfentée plu-
lîeurs fois dans un collège de Paris ; le cheva-
lier Prétérit , Le chevalier Supin , le marquis
des Conjugaifons , & d'autres perfonnages
de la même trempe , font les licutenans
généraux de Defpautere, auquel deux , _ _ . ...
grands princes , ^^ppcWésSolécrfmeScSarùa- i parlent encore quelques profelîe'irs célèbres
' Tome Fin, K*
faifons grâce à nos lecteurs d'un plus grand
détail , & nous ne doutons point que ceux
qui préfîdent aujourd'hui à ce collège y -ne
fiflent main-bafïè , s'ils en étoient les maî-
tres , fur des puérilités fî pédantefques & de
fi mauvais goût : ils font trop éclairés pour
ne pas fcntir que le précieux temps de U-
jeunefTe ne doit point être employé à de pa-
reilles inepties. Je ne parle point ici des bal-
lets où la religion peut être intérefTée ; je fais
que cet inconvénient eft rare , grâce à la
vigilance des fupérieurs; mais je faisaufïi que
malgré toute cette vigilance , il ne laifle pas
de fe fûire fentir quelquefois. Foye;^ dans le
journ. de Trév. nouv. Uttér.fept. ij^o, la cri-
tique d'un de ces ballets , très-édifiante à
tous égards. Je conclus du moins de toot
ce détail , qu'il n'y a rien de bon à gagner
dans ces fortes d'exercices , & beaucoup
de mal à en craindre.
Il me femble qu'il ne feroit pas impofïî-
ble de donner une autre forme à l'éducation
des Collèges : pourquoi pafïèr fix ans à ap-
prendre , tant bien que mal , une langue
morte ? Je fuis bien éloigné de défapprou-
ver l'étude d'une langue dans laquelle les
Horaces & les Tacites ont écrit ; cette
étude eftabfolument nécefïàirepour connoî-
tre leurs admirables ouvrages : mais je crois
qu'on devroit fe borner à les entendre , Sc
que le temps qu'on emploie à compofèr
en latin eft un temps perdu. Ce temps feroit
bien mieux employé à apprendre par prin-
cipes fa propre langue, qu'on ignore toujours
au for tir du collège , Se qu'on ignore au point
delà parler très-mal. Une bonne grammaire
françoife feroit tout à la fois une excellente
logique , Se une excellente métaphyfîque,
& vaudroit bien les rapfodies qu'on lui fubf^
titue. D'ailleurs , quel latin que celui de cer-
tains collèges ! nous en appelions au j uge-
mentdes connoifleurs.
Un rhéteur moderne , le P. Porée très-
refpe6bable d'ailleurs par les qualités perfon-
nclles , mais à qui nous ne devons que
la vérité , puifqu'il n'eft plus, eft le premier
qui ait ofé fe faire un jargon bien différent
delà langue que parloient autrefois lesHer-
fans , les Mawns , les Grenans > les Commi-
lelPCoftarts Se les Jouvencis, & que
res
49^ COL
de runiverflté. Les fuccefieurs du rhéteur
dont je parle ne fauroicnt trop s'éloigner de
fes traces. Fojc:{_ Latinité , Eloquence ,
ù Rhétorique.
Je Tais que le latin érantune langue morte ,
dontprefque toutes les fînefles nous échap-
pent , ceux qui paflént aujourd'hui pour
•écrire le mieux en cette langue , écrivent
peut-être fort mal; niais du moins les vices
de leur didion nous échappent aulTi; &
combien doit être ridicule une latinité qui
nous fait rire ? Certainement un étranger
peu verfé dans la langue françoiie , s'apper-
cevroit facilement que la didion de Monta-
gne , c'eft-à-dire du feizieme liecle , appro-
che plus de celle des bons écrivains du fîecle
de Louis XIV , que celle de Geoffroy de
Villehardoin , qui écrrvoit dans le treizième
iîecle.
Aurefte , quelque eilime que j'aie pour
quelques-uns de nos humaniftes modernes ,
je les plains d'être forcés à fe donner tant
de peine pour parler fort élégamment une
autre langue que la leur. Ils fe trompent s'ils
s'imaginent en cela avoir le mérite de la dif-
culté vaincue : il eft plus difficile décrire
& de parler bien fa langue , que de parler
& d'écrire bien une langue m-orte ; la preuve
en eft frappante. Je vois que les Grecs & les
Romains, dans le temps que leur langue
ctoit vivante, n'ont pas eu plus de bons
écrivains que nous n'en avons dans la nôtre;
je vois qu'ils n'ont eu , ainfi que nous ,
qu'un très-petit nombre d'excellens poètes ,
& qu'il en eft de même de toutes les nations.
Jevois au contraire que le renouvellement
des lettres a produit une quantité prodigieufè
de poètes latins, que nous avons la bonté
d'admirer: d'où peut venir corst différence?
& fî Virgile ou Horace revenoient au monde
pour juger ces héros modernes du Parnafîe
latin , ne devrions-nous pas avoir grand'peur
pour eux î Pourquoi , comme l'a remarqué
un auteur moderne , telle compagnie-, fort
eftimable d'ailleurs , quiapiroduit une nuée
de verlificateurs latins , n'a-t-elle pas un feul
Jîoëte françois qu'on puiffe lire ? Pourquoi
es recueils des vers françois qui s'échappent ,
par malheur de nos collèges ont-ils fi peu de.
fiiccès 5 tandis que plufieurs gens de lettres
eftiment les vers latinsqui en fortenft Jedois
au refte avouer ici que runiverlîcé de Paris
COL
eft trcs-cîrconfpede , & trcs-réfervée fur la
verfifîcation françoife , & je ne faurois Ten
blâmer ; mais nous en parleronsplus au long
à l'article LatinitÉ.
Concluons de ces réflexions , que Icscom-
pofitions latines font fu jettes à de grands in-
convéniens,& qu'on feroitbeaucoup mieux
d'y fubftituer des compofitions françoifes ;
c'cft^ ce qu'on commence à faire dans l'uni-
verfîté de Paris : on y tient cependant encore
au latin par préférence , mais enfin on com-
mence à y enfeigner le françois.
J'ai entendu quelquefois regretter les the-
fes qu'on foutenoit autrefois en grec ; j'ai
bien plus de regret qu'on ne les loutienne
pas en firançois ; on fèroit obligé d'y parler
raifon , ou de fe taire.
Les langues étrangères dans lefquelles nous
pns un grand nombre de bons auteurs ,
mme l'anglois &c l'Italien , & peut-être
l'allemand Ik. l'efpagnol , devroient auffi
entrer dans l'éducation des collèges ; la plu-
part fcroient plus utiles à favoir que des
langues mortes , dont les favans feuls font
à portée de faire ufage.
J'en dis autant de Thiftoire & de toutes
les fciences qui s'y rapportent , comme la .
chronologie & la géographie. Malgré le
peu de cas que l'on paroit faire dans \ts
cclkges de l'étude de Thiftoire , c'eft peut-
être l'enfance qui eft le temps le plus propre
à l'apprendre. L'hiftoire , aftèz inutile au
commun des hommes , eft fort utile aux en-
fans, par les exemples qu'elle leur préfèntc ,
& les leçons vivantes de vertu qu'elle peut
leur donner , dans un âge où ils n'ont point
encore de principes fixes , ni bons ni mau-
vais. Ce n'eft pas à trente ans qu'il faut com-
mencer à l'apprendre, à moins, que ce ne foit
pour la fimple curiofité , parce qu'à trente
ans l'efprit & le cœur font ce qu'ils feront
pour toute la vie. Aurefte, un homme d'ef-
prir de ma connoifïànce voudroit qu'on étu-
diât & qu'on enfeignât l'hiftoire à rebours ,
c'eft-à-dire en commençant par notre temps,
& remontant de-là aux fiectcs paffés. Cette,
idée me paroît très- jufte, & très- philofbphi- ■
que : à quoi bon ennuyer d'abord un enfant
de l'hiftoire de Pharamond , de Clovis , de
Charlemagne , de Céfar & d'Alexandre ,
& lui lai fier ignorer celle de fon temps ,
comme il arrive prefque toujours , par le
COL
dégoût que les commencemens lui infpirent ?
A Pégard de la rhétorique , on voudroit
qu'elle confiftât beaucoup plus en exemples
qu'en préceptes , qu^on ne fe bornât pas à
lire des auteurs anciens , & à les faire admi-
rer quelquefois aflèz mal-à-propos ; qu'on
eût le courage de les critiquer fouvent , les
comparer avec les auteurs modernes , & de
faire voir en quoi nous avons de l'avantage
ou du déiavantage fur les Romains & fur
les Grecs. Peut-être même devroit-on faire
précéder la rhétorique par la philolophie ,
car enfin, il faut apprendre à penfèr avant
d'écrire.
Dans la philofophie , on borneroit la lo-
gique à quelques lignes i la métaphyhque ,
à un abrégé de Locke ; la morale pure-
ment philofophique , aux ouvrages de Sé-
neque & d'Epictete ; la morale chrétienne,
au fermonde Jefus-Chrift fur la montagne;
la phyiîque , aux expériences & à la géomé-
trie , qui eft de toutes les logiques ôc phyiî-
quesla meilleure.
On voudroit enfin qu^on joignît à ces
différentes études , celle des beaux arts, ôi
fur-tout de la mufique , étude fi propre pour
former le goût , & pour adoucir les mœurs ,
& dont on peut bien dire avec Cicéron :
Hcec Jîudia adclefcentiam alunt , feneclutem
obleclant y jucundas res ornant , adverfisperfu-
gium & folatium prœbcnt.
Ce plan d'études iroit, je l'avoue, à mul-
tiplier les maîtres & le temps de l'éducation.
Mais 1°. il me femble que les jeunes gens en
fortant plus tard du collège , y gagneroient
de toutes manières , s'ils en forcoient.plus inf-
truits . 2°. Les enfans font plusQipables d'ap-
plication & d'intelligence qu'on ne le croit
communément; j'en appelle à l'expérience ;
& fi , par exemple , on leur apprenoit de
bonne heure la géométrie , je ne doute point
que les prodiges & les taltns précoces en ce
genre ne fuflènt beaucoup plus fréquens ;
il n'eft guère de fcience donton ne puiîle inf-
truire fefprit le plus borné , avec beaucoup
d'ordre^ de méthode ; .mais c'eft-là pour
l'ordinaire par où l'on pèche. 3°. il ne feroit
pas néceUaire d'appliquer tous les enfans à
tous ces objets à la fois , on pourroit ne les
montrer que fucceilîvement ; quelques-uns
pourroient fe borner à un certain genre , &
<jians cette quantité prodigieufejil feroit bien
C O L
^99
difficile qu'un jeune homme n'eût du goût
pour aucun. Au refte , c'eft au gouverne-
ment , comme je l'ai dit , à faire changer là-
delfusla routine & l'ufage , qu'il parle , & il
fè trouvera affèz de bons citoyens pour pro-
pofer un excellent plan d'études. Mais en
attendant cette réformée , dont nos neveux
auront peut-être le bonheur de jouir, je
ne balance point à croire que l'éducation des
collèges , telle qu'elle eft , eft fujette à beau-
coup plus d'inconvéniens qu'une éducation
privée , où il eft beaucoup plus ficile de (è
procurer les diverfes connoiflànces dont je
viens de faire le détail.
Je fais qu'on fait fonner très-haut deux
grands avantages en faveur de l'éducation
des collèges , la fociété & l'émulation ; mais
il me femble qu'il ne (croit pas impoiïible
de fe les procurer dans l'éducation privée ,
en liant enfemble quelques enfans à-peu-près
de la même force & du même âge. D'ail-
leurs , j'en prends à témoin les maîtres ,
l'émulation dans les collèges eft bien rare ; Se
à l'égard de la fociété, elle n'cft pas (ans de
grands inconvéniens ; j'ai déjà touché ceux
qui en réfultent par rapport aux mœurs,
mais je veux parler ici d'un autre qui u^eft
que trop commun , fur-tout dans les lieux
où on élevé beaucoup de jeune noblellè i
on leur parle à chaque inftant de leur naif-
(ànce &: de leur grandeur , & par-là on leur
infpire fans le vouloir , des fenrimens d'or-
gueil à l'égard des autres. On exhorte ceux
qui préfîdent à l'inftrudion de la jeuneflè,
à s'examiner foigneufement fur un point de
Cl grande importance.
Un autre inconvénient de l'éducation des
collèges , eft que le maître fe trouve obligé
de proportionner la marche au plus grand
nombre de fes difciples , c'eft-à-dire aux
génies médiocres ; ce qui entraîne pour les
génies plus heureux une perte de temps con-
ïidérable.
Je ne puis m'cmpêcher non plus de faire
fentir à cette occafion les inconvéniens de
l'inftrudion gratuite, & je fuis aifuré d'avoir
ici pour moi tous les profefleurs les plus,
éclairés & les plus célèbres: fi cet établillè-
ment a fait quelque bien aux difciples , il a
fait encore plus de mal aux maîtres.
Au refte, fi l'éducation de la jeunefteeft
jiégligée, ne nous en prenons qu'à nous-
Rrr z
50Ô COL
mêmes , &: au peu de confîcîî^ratîon que
nous rémoignons à ceux qui s'en chargent ,
c'eft le fruit de cet efprit de futilité qui règne
dans notre nation , &qui abforbe , pour ainfi
<îire j tout le refte. En France on fait peu de
grè à quelqu'un de remplir les devoirs de fou
état ; on aime mieux qu il foit frivole. Voye-^^
Éducation,
Voilà ce que l'amour du bien public m'a
infpiré de dire ici fur l'éducation , tant pu-
blique queprivée : d'où il s'enfuit que l'édu-
cation publique ne devroit être la reflburce
que des enfans dont les parens ne font mal-
heureufement pas en état de fournir à la
dépenfe d'une éducation domeftiquc. Je
ne puis penfer fans regret au temps que j'ai
perdu dans mon enfance : c'feft à l'ufage
établi , & non à m^es maîtres , que j'impute
cette perte irréparable; & je voudrois que
mon expérience pût être utile à ma patrie
JExcriare aliguis. ( O)
CoLLiCE,{Jurifprud.) les collèges deftinés
pour l'éducation delà jeunefle, ne font
confidérés que comme des corps laïques ,
quoique de fait ils foient mixtes , c'eft-
à-dire compofés d'eccléfîafliques ôc de
laïques.
Les places de principal ni les bourfes des
collèges ne font point des bénéfices y elles ne
lont point fuj ettes à la régale. J^oye:^ Chopin,
defacr. polit, lib. I. tit. v y n. Q ù fuiv.
En quelques endroits , les évêques ont
Tin droit d''infpeâ;ion plus ou moins étendu
fur les collèges , ce qui leur a fins doute été
ainfî accordé pour la confervation de la reli-
gion & des bonnes mœurs ; mais cela dé-
pend des titres d'établi fie ment des collèges
ôc de la pofîefîion de Pévêque.
Le règlement du châtelet, du 30 mars
1636 , pour la police de Paris , fait défènfes
à tous écoliers de porter épées , piftolets , ou
autres armes ofFenlives, &: enjoint aux prin-
cipaux & procureurs des collèges où ils font
logés , de tenir leurs collèges fermés dès cinq
heures du foir en hiver & neuf heures en
éré : de faire toutes ksfemaineslavifite dans
routes les chambres de leurs collèges pour
rcconnoîtrc ceux qui y feront logés , fans
qu'ils puiflèntyretirerni loger autres perfon-
nes que des écoliers étudians aduellement
dans l'univerlité, ou des prêtres de bonnes
ia«uis 6c de leur connoiflànce , domilsré-
C O L
pondront , & feront tenus des délits qui fê
trouveront par eux commis.
Dans les collèges où il n'y a pas plein exer-
cice , on loue ordinairement à des particu-
liers , loit laïques ou eccléfiaftiques , le fur-
plus deslogemens qui ne font pas néccf-
laires pour les bourfiers.
Mais dans aucun collège foit de plein
exercice ou autre , il ne doit point loger
ni entrer des femmes ni filles.
L'arrêt du confeil , du 5 novembre 1 666,
qui conferve aux officiers du châtelet la
poHce générale à l'excluiion de tous autres
juges , les autorife à fe tranfporter dans
toutes les maifons, collèges 3 ôcc. & dit qu'ou-
verture leur en fera faite nonobftant tous
prétendus privilèges. Voye^^^ le traité de la
pol. tom. I.pp. 1^8 y 14^3 ^44^ 26*2 {A)
Collège DE Gresham ou Collège de
Philosophie , efl un co//c^e fondé parle
chevalier Thomas G resham , avec des reve-
nus alîignés fur la bourfè royale. La moitié
de ces revenus ont été laifîcs par le fonda-
teur aux maires & aux échevins de Londres ,
aux conditions de choifîr quatre perfonnes
capables de faire des leçons de théologie , de
géométrie , d'aftronomie &: de mulique
dans ce collège , & de leur donner à cha-
cun , outre le logement , cinquante livres
par an. L'autremoitié fut laifléepar le même
fondateur au corps des merciers de Londres ,
pour choifîr trois perfonnes capables d'enfei-
gner le droit, la médecine & le rhétorique
fur le même pié & fous ces conditions : que
chaque profelleur donneroit tous les jours ,
excepté le dimanche , deux leçons , l'une
en latin qui le feroit le matin , & l'autre en
anglois l'après-dînée. La mufique feule ne
devoir être expliquée qu'en anglois.
Q'e^kàznscç: collège que la fociété royale
tint fes aflemblées dans les premiers temps
de fon inftitution fous Charles IL Voyei^
Société royale.
COLLÉGIALE, f f. {Jurifp, ) ou églife
collégiale, efi: une églife defïervie par des
chanoines féculiers ou réguliers , dans la-
quelle il n'y a point de liège épifcopal ; à
la différence des églnfcs cathédrales qui font
auflî defTcrvies par des chanoines , lefquelles
tirent leur nom du fiege épifcopal ou chaire
de l'évêque.
Pour forater une églife collégiale , il feue
COL
âa moins trois prêtres chanoines. Can. hoc
quogue , ///. de confecr. dijl. î .
Une églife qui eft en patronage , foit laï-
c[ue ou eccléfîaftique , ne peut être érigée en
collégiale fans le confentement du patron ,
parce que ce feroit préjudicier à Tes droits ,
attendu que ceux qui compofent le chapitre
ont ordinairement le pouvoir d'élire leurs
chefs & leurs membres , & que d'ailleurs ce
feroit changer Tétat & la difcipline de cette
églife. Si le patron confentoit purement &
llmplement à ce que l'éghfe fût érigée en
collégiale , &c qu'il ne fe réfervât pasexpref-
fément le droit de préfenter , il en feroit dé-
chu à l'avenir ; il conferveroit néanmoins
toujours les autres droits honorifiques , mê-
me le drok d'obtenir des alimens fur les re-
venus de Péglife par lui fondée , au cas qu'il
tombât dans l'indigence. Caftel , mat. bénéf.
tom.I.pp.y ,s8^£g.
Enirtlescollégiales j pluiîeursfont de fon-
dation royale , com.me les faintes chapelles ;
les autres de fondation ccclcfialHque ; d'au-
tres encore ont été fondées par des laïques.
Il y a eu autrefois des abbayes qui ont été
fécularifées , Se qui forment préfentemcnt
àe fim^lts collégiales.
Quelques églifes collégiales jouilîènt de
certains droits épifcopaux, par exemple dans
les quatre collégiales de Lyon tous les cha-
noines , & même tous les chapelains , lorf-
qu'ils officient , portent la mitre. {A)
COLLÉGIATS , f. m. pi. (Jurifprud.)
«que Fon ne doit pas confondre avec les col-
légiaux , dont il fera parlé ci-après , eft le
nom que l'on donne en quelques endroits à
ceux qui pofledent une place dans un col-
lège ; par exemple , il y a à Touloufe le col-
lège de faint Martial, compofé de vingt-qua-
tre collégiafs ; favoir , quatre prêtres & vingt
écoliers étudians en droit , ou d'autres laï-
ques ; ces places ne (ont pas des bénéfices ,
non pas même les quatre places presbytéra-
les, quoique elles aient annexumojfficiumfpi-
rituale. Albert en fes arrêts , lett. R , chap.
xxxviijy Se la Rocheflavin, livre J, tit.j^ ,
arrt^t %.{A)
COLLÉGIAUX , f. m. pi. (Jurifprud.)
eft le titre que l'on donne dans certaines égli-
fes à ceux des chapelains qui forment un col-
lège cntr'eux , y ayant quelquefois dans la
même églife d'autres chapelains qui ne for-
C O L 501
ment point de collège , Se que Pon appelle
non-collégiaux. Fbyei^CoLLEGE. (-(4)
COLLEGIENS •■> c'cft le nom d'une cer-
taine fede ou parti , qui s'eft formé des ar-
miniens Se des anabaptiftes dans la Hollan-
de. Ils ont été ainii appelles parce qu'ils s'af-
femblent en particulier tous les premiers di-
manches de chaque mois , & que chacun a
la liberté dans ces aflemblées de parler , d'ex-
pliquer l'écriture , de prier Se de chanter.
Tous ces collégiens font ibciniens ou arieiis.
Ils ne communient jamais dans leur collège ;
mais ils s'aftemblent deux fois l'an de toute
la Hollande à Rinsbçurg , qui eft un village
environ à deux lieues de Leyde , où ils font
la communion. Ils n'ont point de miniftres
particuliers pour la donner ; mais celui qui
fe met le premier à la table , la donne , Se
l'on y reçoit indifféremment tout le monde,
fans examiner de quelle fedte on eft.
Ils ne donnent le baptême qu'en plon-
geant tout le corps dans l'eau. Dicîionnaires
de Trévoux , Moréri , & Chambers. ( G )
COLLEGUE , f. m. compagnon en mê-
me magiftrature , ou emploi quelconque :
c'eftdansle premier fensque les confuls ro-
mains s'appelloient collègues ; Se ce n'eft que
dans le fécond que les miniftres dans la mê-
me églife , les profefteurs dans la même uni-
verfité , s'appellent collègues.
On appelle collègues généraux dans l'ordre
des minimes , ceux qui compofent le con-
feil du général Se qui l'afliftenr dans le gou«-
vernement de ion ordre. Il y a aufïi des col-
lègues provinciaux qui font auprès des pro-
vinciaux j ce que les collègues généraux font
auprès du général. (+)
COLLER , V. ad. c'eft unir des corps
par l'interpofîtion de la colle. Voyci^J' article
Colle.
Coller eft (ynonym^^. apprêter. ^Voyei^
Apprêt.
Coller le vin , c'eft l'éclaircir ; cette opéra-
tion le fait en mars & en avril , huit jours ou
environ avant que de mettre en bouteilles.
Pour cet effet prenez de la colle de poilîon
la plus blandie , à-peu-près foixante-trois
grains par pièce ; faites-la difïbudre dans de
Teau ou'^dans du vin , ou dans de l'efprit de-
vin, ou dans de l'eau-de-vie ; maniez-la afin
de la bien divifer ; pafïez ce qu'il y en aura
de délayé j remaniez Se paffe^ ; q^uand ella
502 COL
fera toute délayée , filtrez-la encore \ travers
un linge ; prenez autant de pintes de cette
folution que vous aurez de tonneaux à col-
ler; jetez-la dans cette quantité dans le ton-
neau ; remuez le vin avec un bâton pendant
trois ou quatre minutes après Py avoir jetée,
& votre vin fera éclairci au bout de trois
jours au plus tard. Il y en a qui font tremper
la colle de poiflbn dans de leau , la fondent
fur le feu , & en forment une boulette qu'ils
jettent dans le tonneau.
La colle agit plus ou moins promptement ,
félon qu'il fait plus ou m.oins froid ; fi elle
manque fon effet , on en rajoute une demi-
dofe.
CoLL'EK^aujeudeMl/ardjCeiïùire tou-
cher la bille à la bande , de façon qu^on ne
puiife pas la jouer aifément. Voy. Billard.
COLLERAGE , f m. {Jurifpr. ) étoit un
droit que fpn payoit anciennem.ent pour
mettre le vin en coule , c'eft-à-dire en perce.
Il eft parlé du droit de tirage & coller âge à\x
pour le vin , au livre de Péchevinage de Pa-
ris, chap.iv. {A)
COLLET , f. m. ce terme a un grand
nombre d'acceptions différentes, prifes,pour
la plupart , de la partie de notre corps qu'on
appelle le col , de fa forme , de fa pofition ,
ùc. Ainii on appelle.
Collet , en architeciure ,1a. ^amclz plus
étroite , par laquelle une marche tournante
tient au noyau d'un efcalier. (P)
* Collet, ( Art/Il. & Fond. ) la partie du
canon comprife entre l'aftragale & le bour-
relet. Voye[l' article CAtios.
Collet , en botanique , la liaifon , ou la
couronne , ou l'endroit de l'arbre où finit la
racine , & où commence la tige.
Il fe dit auifi de l'endroit le plus élevé de
la tige d'une fleur.
Collet, {Bottier.) la partie de la botte
qui correfpond au talon.
Collet de veau , ( Boucherie. ) morceau
qui contient le quarré , le bout làigneux ,
$ç la poitrine.
Collet , che7J.es chandeliers ùlesciriers ,
la partie de coton qui paroît à l'extrémité à^is
flambeaux , des bougies , des chandelles , S'c.
Collet , ( Charr. ) fe dit de la partie
antérieure d'un tombereau, qui s'élève au-
dellus des gifans. Voye-i^ks dicl, de Comm.
ù de TrévQU3i,
COL
Collet , en terme de chajfe , un petit filet
de corde ou de fil de laiton , tendu dans des
haies ou palTàges étroits, avec un nœud cou-
lant , dans lequel les lièvres , les lapins , &c
autre gibier , fe tprennent &: s'étranglent
quand ils y paflent.
Ou un filet compofé de trois crins de
cheval en nœud coulant, que Pon tend dans
les haies aux pallées , ou dans la campagne ,
dans lequel les oileaux en paiîant le prennent
par le cou ou par les pattes.
Ou un nœud coulant de grofle corde ou
de gros fil de fer , qu'on tend fur la paflee
d'un cerf, d'un loup , d'un fanglier , ou tel
autre animal. Le bout delHné à (errer ce
nœud coulant , eft attaché à l'extrémité d'un
arbrifleauvigoureuxxetarbrilleau eft courbé
de force , de manière que fon extrémité eft
ramenée dans une encoche faite au corps
d'un autre arbriftèau voifin , où elle tient iî
légèrement, quePanîmal ne peut pail'er fans
l'en faire échapper , en heurtant quelque
corps qui correfpond à l'encoche & à l'extré-
mité de l'arbriflcau courbé , & dont le dépla-
cement rend fa liberté à l'arbriflèau , qui en
fe reftituant avec violence , ferre le nœud
coulant f ir l'animal.
ColletomColletin de bujle , (Manège.)
eft une peau de bufle préparée , formant une
efpece de jufte-au-corps îans manches: c'eft
un vêtement pour les cavaliers , qui leur fert
d'ornement & de défenfe. D/cl. de Trév.
Collet d'étai , ( Marine. ) c'eft ainfî
qu'on appelle un tour que fait l'étai fur le
ton du mât. Le collet d'étai fe place au def-
fus de tous les haubans , & il pafle entre les
deux barres de hune d'avant. {Z)
Collet , en terme d'Orfèvre en grojferie ,
c'eft une petite partie ronde & concave , qui
eft au deflùs & au delfous du nœud d'une
éguiere , ou telle autre pièce d'orfévierie.
Collet , en termes d' Orfèvre ^ c'eft un
cercle creux en forme de collet , qui orne un
chandelier ou telleautre pièce, foit dans fon
balîînet , foit dans la monture & dans fon
pié. Fbje:^^ Bassinet, Monture & Pli.
Collet , ( Serrurier. ) l'endroit d'une
penture le plus voifiii du repli où le gond eft
reçu.
Ce terme a encore dans le même art d'au-
tres acceptions ; il fe donne dans certaines
occaiions à des morceaux de fer en viroles
COL
ou anneaux, deftinés à embraiïèr d'autres
pièces , & à les fortifier.
Collets oi/ Tir ANS , {Manufacî.enfoie.)
Voye:^ l'article Petite-tire.
Collets , ( Tailleur. ) dans un habille-
ment , tel qu'un manteau , une redingote ,
un furtout /une chemifc , ùc. c'eft la partie
la plus haute , celle qui embrailè le cou :
cette partie eft plus ou moins large , félon la
nature de l'habillement.
Collets , (, Tourneur.) on appelle ainfi
les deux pièces de cuivre ou d'étain , entre
lefquelles les tourillons; d'un axe tournent.
Fbje;(_ Tour a lunette.
Collet de hotte , ( Vannier. ) c'eft la par-
tie fupéricure du dos , qui couvre le cou &
la tête de celui qui la porte.
Collets , ( Verrerie. ) c'eft ainii qu^on
appelle les portions de verre qui relient atta-
chées aux cannes, après qu'on a travaillé.!
COLLET AGE , f. m. ( Jurifpr. ) étoit un
nom que Ton donnoit anciennement aux
tailles , aides , & fubfides que 1 on levé fur
le peuple. Voyc-{^ Monftrelet , vol. I^^ap.
Ixxviij. {A) ^w"
COLLETÉ 5 adj. en termes de Blafon , fe
dit des animaux qui ont un collier.
Thierri , d'azur , à trois têtes de lévrier
d'argent , colletées de gueules.
COLLETER , ( Chandelier, ) Colleter les
chandelles , c'eft à la dernière fois qu'on les
plonge , les defcendre dans le fuif jufqu^à
qu'il foit parvenu à l'endroit de la boucle
que la mèche torme à l'extrémité delà chan-
delle, & laiflèr prendre lefuiffur une par-
tie de cette boucle , pour qu'elle refte ouver-
te , & qu'étant enfuifée , elle prenne facile-
ment la première fois qu'on l'allumera ; ce
qui ne réulïîtpas ordinairement, la flamme
du coton feul ne fufïîfantpas pour fondre le
fuif. Fr;je;^CHANDELLE.
^ COLLETEUR,f.m.(a^/e.)celuiqui
s'entend à tendre les collets. Feyei^^CoLLET.
COLLÉTIQUES, adj. en médecine , ce
font des remèdes qui réunifient ou qui col-
lent enferrible les parties iéparées , ou les
lèvres d'une plaie , ou d'un ulcère , & qui les
rétabliflènt par ce moyen dans leur union na-
turelle, ^oje:^ Agglutinant , Plaie, ùc.
Ce mot vient du grec, Ko}^ntK0i , ce qui a la
vertu de coller enfembk ; de xo>A* , colle.
Les coUétiques font plus delTicatifs que les
COL 503
larcotiques , & moins que les épulotiques.
Ori met au nombre des collétiques la lithar-
ge , l'aloès , la mirrhe, ùc. Ce mot eft très-
peu d'ufage. Chambers.
COLLEUR 5 f. m. on donnoit autrefois
ce nom^ aux cartonniers. Voye-^^ Varticlt
Carton. Ileft encore d'ufage dans quelques
atteliers. Le's différentes manœuvres font
diftribuées à différens ouvriers, &:oùl'a6ti©n
de coller eft une de ces manœuvres. Ainfi
dans la fabrique du papier , il y a les colleurs^
Il en eft de même de plufieurs autres.
Colleur, {Manuf. d'ourdijfage. ) c'eft
ainfi qu'on appelle celui qui donne l'apprêt
aux chaînes , quand elles en ont befoin.
COLLIER 5 i. m. ornement que les fem-
mes portent au cou , qui confifte en un ou
plufieurs rangs de perles ou pierres précieufes
percées &c enfilées. Ce font les lapidaires &
les j oailliers qui vendent les colliers de perles ^
& autres perles fines ; & les patenôtriers qui
font & vendent ceux de pierres faufles.
Outre les colliers de pierres fines , les da-
mes en portent auffi de perles fauflès , qui
pour leur éclat & leur eau , imitent parfai-
tement les perles fines. Voye';^ Perles
FAUSSES.
L'ufage des colliers chez les Grecs &: chez
les Remains , eft de la première antiquité :
on en m^ettoit au cou des déeflès , les fem-
mes enportoient en ornement j on en ofFroit
aux dieux ; c'étoit unerécompenle militaire ,
il y en avoit d'or , d'argent , de pierreries j
les peuples de la Grande-Bretagne en por-
toient d'ivoire; on en mettoit aux efclaves
avec une infcription , pour qu'on les arrêtât
s'ils s'enfuyoient.
Nos marchandes de modes donnentle nom
de collier , à un autre ornement de cou ,
compofé quelquefois <^un feul ruban , ou
d'un tiftu de crin garni de ruban , de blon-
de , de fbuci d'hanneton , ùc. Tout collier ,
comme les autres pièces d'une parure , doit
lui être aflorti par la façon & par la matière.
Les colliers ont des noms dépendans de leurs
formes , & le moindre changement dans la
forme fuffit pour changer le nom. Ainfi il
y aie
Collier à la dauphinç ; c'eft un tour de cou
noué par derrière avec un ruban , garni par
devant d'un nœud de ruban à quatre , d'un
demi-cercle attaché fous le menton ^ & de
504 C O L
deux pendans , dont deux bouts s'attachent
autour , à côté de ceux du demi-cercle , &
les deux autres tombent dans la gorge en fe
croifant au-deflous de ce demi-cercle. Ces
colliers font de blonde, de rùbati , de guir-
lande , ùc.
Le collier en efclavage; ileftcompofé d'un
tour de cou & d€ deux ronds par devant ,
Pun au-deflous de l'autre , qui tombent &
couvrent la gorge en partie : au milieu de
ces ronds fur le tour de cou , eft un nœud à
quatre.
Le collier d^homme , eft un ruban noir &
i^ns façon ni pli , nï)ué quelquefois d'un
nccud ?. quatre fous le menton, quelquefois
d'un nœud fini pie , les pendans retombant &
fe cachant dans la chemife: ce qu'on nom-
me alors cellier a béquille.
Le collier d'homme aux amours , eft une
rub'.n no.rnoué par derrière aux deux coins
de la bourfe , orné d'une rofe iîmple , dont
le§ deux bouts découpés font froncés à un
doigt de leur extrémité , & forment un
feuille de la rofe fimple.
h^ collier d'un feul rang y eft un tour de
cou à l'ulàge des d.'^mes, compofé de ruban
bouillonné , & en chou , & orné fur le de-
vant d'un nœud à quatre. Voilà un échan-
tillon de la folie de nos modes.
Collier , ( Hijl. mod. ) cet ornement ,
dans le fens que nous lui donnons ici , ne
fert que pour les ordres mihtaires, auxquels
on Paccorde comme une marque de diftinc-
tion & de l'honneur qu'ils ont d'être admis
dans leur ordre. C'cft fouvent une chaîne
d'or émaillée avec plufieurs chiffres, au bour
de laquelle pend une croix ou une autre
liiarque de leur ordre.
Le collier de l'ordre de la jarretière confifte
en plufieurs 5'5' entremêlées de rofesémail-
lées de rouge , fur une jarretière bleue , au
bout de laquelle pend un S. George. Voyc^^
Jarretière.
Le collier du Saint-Efprit eft compofë de
trophées d'armes cfpacées de fleurs de lys
d'or cantonnées de flammes & de la terre
jFlcouronnéejparc^quec'eft la lettre initiale
du nom de Henri lîl , inftituteur de cet
ordre -, & au bas une croix à huit pointes ,
fur laquelle eft une colombe ou faint-Efprit.
Fbjr^ORDnE DU Saint-Esprit.
Le collier de l'ordre de S' Michel eft £brmé
COL
î>ar des coquilles d'or , liées d'aiguîîlettes de
foie à bouts ferrés d'or. Le roi François I
changea ces aigu 1 ttes en cordelières ou
chaînettes d'or : au bas de ce collier eu. repré-
fenté l'i'rchange S. Michel.
Maximilien a été le premier empereur qui
ait mis un collier d'ordre autour de fesarmes ,
étant devenu chef de celui de la toifon :
ufage que pratiquent maintenant ceux qui
font décorés de quelque ordre de chevalerie,
à l'exception des prélats commandeurs dans
l'ordre du S. Efprit , qui ne mettent autour
de leurs armes , qu'un cordon ou ruban bleu
d'où pend la croix de l'ordre , & n'arborent
pas la marque de l'ordre de S. Michel ; auffi
ne prennent-ils pas le titre de commandeurs
des ordres du roi , au lieu que les chevaliers
fe qualifient du titre de chevaliers des ordres
du roi.
Ordre du collier. Chevaliers du collier ou
de S. Marc , ou de la médaille ; ordre de
chevalerie dans la république de Venife.
Mais ces chevaliers n'ont point d'habit parti-
culia||& comme c'eft le doge & le fénat
qui i^conferent , ils portent feulement par
diftinéiion la chaîne que le doge leur a
donnée : elle leur pend au cou , & fe trouve
terminée par une médaille où eft repré fente
le lion volant de la république , qu'ils ont
tiré du fymbole de l'évangélifte S. Marc ,
qu'ils ont pris pour patron. (G) {a)
Collier d'ét ai , ( Mar. ) c'eft un bout
de groflè corde femblable à l'étai. L'ufàgc
du collier d'étai eft d'embrafler U haut de
l'étrave , & d'aller fe joindre au grand étai ,
ojj il eft tenu par une ride. ( Z)
Colliers de défense , {Marine.) ce
font plufieurs cordes tortillées en rond com-
me un collier , qu'on a à l'avant , & fur le
côté des chalounes , ou autres petits bâti-
mens, pourleurfervirde défenfe & les garan-
tir du choc contre les autres bâtimens. Voye':^
planche XXV ^ Marine ,fig. 5 , lett. r , ^jig.
4 , lett. n. o^ r.{Z)
Collier du ton , (Marine.) collier de
chouquet , c'eft un lien de fer fait en demi-
cercle , qui conjointement avec le ton & le
chouquet , fert à tenir les mâts de perroquet
& de hune : quelquefois ce lien eft fait d'une
pièce de boisi alors on lui donne d'épaiffeur
de haut en bas , les trois cinquièmes de
l'épaiffeur du chouquet. ( Z )
Collier
COL
CoLLTER dehcsuf, (i?o//c//. ) morceau qui
contient le premier & le (ècond travers avec
la joue. 4ÉL'
Collier de chevaT^Bourrel. & Sell. )
hernois de .bois couvert de cuir & rem--
iDOurré , qu'on met au cou des chevaux de
tirage , afin que les cordes des traits qui s'y
attachent , ne les blelîent point.
Collier a i^a keiî^e , termedeBourferie;
c'eft un collier de fer couvert de velours , qui
embraflè le cou desenfans. Il eft garni d'une
branche de fer &c couverte, qui defcend
fous le m.enton , & vient fe fixer fur le bord
de leur corps : ce collier leur tient la tête
droite.
Collier , (Pèche ) c'eft ainfi qu'on ap-
pelle fur les rivières , la corde qui part du
bout du filet appelle verv?ux , & qu'on atta-
che à l'extrémité d'un pieu qui, enfoncé dans
la vafe , tient cette partie du verveuxau fond
delà rivière. Ainfi pour placer un verveux ,
on a deux pieux , l'un pour la tête , l'autre
pour la queue. J^oye:^ Verveux. On fup-
plée quelquefois au pieu de la queue & au
collier par le poids d'une pierre.
Collier de limier ou Botte, ( Vénerie. )
c'eft l'attache de cuir qu'on lui pafleau cou ,
quand on le mené au bois.
COLLIERES , f. f. ( Commerce de bois.)
ce font des chantiers qui fervent de fonde-
ment aux trains ; ils ont à leur extrémité des
coches dans lefquelles on pafle les couplie-
res. Fcjc:(^CoùPLiEREs & Trains. *
COLLIMATION , ligne de collimation ,
{Ajîron:) efl: celle"par laquelle on vile à un
objet , par les deux pinnules d'un graphome-
tre. Dans une lunette c'eft la ligne qui pafie
par le centre des verres , ou l'axe optique de
la lunette. La ligne de collimation doit être
parallèle à la ligne de foi , c'eft-à-dire , à la
ligne qui pafle par le centre de l'inftrument
ôc par le point de l'index qui marque la
divifion. On dit la ligne de foi pour dire la
■ligne de collimation , parce que ces deux lignes
«tant parallèles entr'elles & peu diftantes
l'une de l'autre , elles fe dirigent au même
point du ciel. (M. de la Lande.)
COLLINA ou COLLATINA , f. m.
( Mytholvg. ) déefTe qui prélîdoit aux mon-
tagnes ; c'eft de Ton culte qu'on fait venir le
verbe colère.
* COLLINE , f. f. (H//?, anc, ) une des
Tome VIIL
COL J05
quatre parties de Rome. Elle étoit ainfi ap-
pellée , parce que des fept collines renfer-
mées dans cette ville , il y en avoit cinq dans
cette partie ; fa voir la viminale , la qyirinale ,
lafalutaire , lamutiale & lalatiale. Il y avoit
auffi la tribu colline. La porte fitùée au pie
de la quirinale , s'appelloit h porte colline ou
la porte dufel, parce que les fabins qui ap-
portoient le fel à Rome entroient par cette
porte : c'étoit-là qu'on enterroit les veftales.
La colline des jardins fut une petite mon-
tagne , renfermée dans Rome par Aurélien.
Ceux qui afpiroient aux charges fe mon-
troient là à la vue du peuple , avant que de
defcendre dans le champ de Mars.
COLLIQUATIF, adj. {Médecine.) fe
dit des maladies , des poifons de toute ef-
pece , dont l'effet dans le corps humain eft
de faire perdreaux humeurs leur coniiftancc
naturelle , en y produifant une grande diflb-
lution , une décomposition de leurs parties
intégrantes, d'où réfulte une forte d'altéra-
tion appellée colUquation.
Ainii on dit d'une fièvre dont l'effet eft de
jeter en fonte les humeurs , qu'elle eft colli-
quative: ainiî le venin du ferpent des Indes
appelle /tiFTOorroz/^, dont l'effet eft le même ,
peut être dit colliquatif: de même les fubf-
tances alkalines , le mercure , &c. pris inté-
rieurement , au point de produire la difè)-
lution du fang , doivent être regardés comme
des poifons colliquatifs.
On applique auffi ce terme aux fympto-
mes de maladies , produits par la colliqua-
tion ; ainfî on ditde la diarrhée , de la fueur,
6'c. qu'elles font colliquatives y lorfqu'clleK
font des évacuations d'humeurs qui fè font
par une fuite de diflolution générale de leur
mafle. J^ojpî^Colliquation.
COLLIQUATION, f. f. iKic^^i^colUqua^
tio , ( Médecine. ) ce terme eft employé pour
fîgnifier l'efpece d'intempérie des humeurs
animales , quiconfifte dans une grande diflb-
lution & une décompofition prefque totale
de leurs parties intégrantes ; enfôrte que la
maflè qu'elles compofent paroit avoir entiè-
rement perdu la confiftance & la ténacité qui
lui eft néceflaire , pour être retenue dans le
corps, & n'être mife en mouvement que
conformément aux loix de l'économie de la
vie faine.
La colliquationçù. difTércnte , félon la dif-
Sss
5©^ COL
férenre nature du vice dominantdcs humeurs '
qui tombent en fonte : ainli on appelle colli-
quation acide , celle dans laquelle il fe fait un
mélange informe de quelques grumeaux de
fcng , avec une lymphe devenue aqueufe &
alkalefccnte : on nommtccWquationalkalef-
ceiitepwride, celle qui eft le produit de cer-
tanîes fièvres malignes ; colliquation acre,
muriatique , celle qui s'obfèrve dans l'hydro-
pifie , le fcorbut, coWquarionâcre, huileufe,
f>ilieufe,ct\\ç, quiréfulte des fièvres ardentes.
Les caufes diverfcs de la colliquation des
humeurs font , i°. le mouvement animal ex-
ceilif , les exercices violais , qui ne font pas
immédiatement fuivis de fueurs : i°. Teiret
trop long-temps continué des remèdes apé-
litifs i. fondans , tels que les martiaux , les
mercuriels: 5°..Iespoi!Gns qui ont une qua-
lité puiflàmment dilîblvante, tels que la
morfure du ferpent des Indes, appelle hce-
morrous , le virus fcorbut ique , la putréfac-
tion produite par le fphacele , & par cer-
taines mala4ies malignes , peflilentielles.
Sauvage, pathologia meihodica.
La colliquation des humeurs produit les
effets fuivans. Si les forces de la vie font en-
core aflezconfidérables , elle rend très-abon-
dante & exceffiye l'excrétion de la tranf-
piration de la fueur , des urines , & de tous
les excrémens Hquides , d'où fuivcnt la foi-
blefle , la fbif , la fécherelle de tout le corps,
la maigreur^le marafme : fi les forces de la vie
font çonfidérablement diminuées dans le
temps que; fe fait la fonte dès humeurs , tou-
tes ces évacuations ne peuvent pas avoir lieu j
la matière refle. dans le corps , il s'en, forme
des amas , des extravafions, dès hydropifies
de toutes les e/peces. Aiijfi la colliquation peut
être fuivie de cachexie feche. &: de.çachexie
humide.
La confomption fi commune parmi les
Anglois , dit lA.M afwieten , eft l'effet d une
véritable colliquation caufée par la nature de
l'air & des alimens dont ils ufent , Ôc par le
tempérament ; d'où réfultent de5 humeurs
trop fluides , difToutes, fufceptibles de fortir
aifément de leurs conduits ; des organes ren-
dus délicats ,.foibles qui , s'ils ne s'afFermif-
fent pas par l'exercice , (e fondent entière-
ment en fueurs nodurnes fur-tout , ou feré-
iôlvent en falivation ôc encxAcliats. Ces uia-i
CO L
lades ne peuvent pas être guéris , que leur
fang ne ibit condenfé : ce qui ne peut être
fait que par le mqu|cment du corps , c'eft-
à-dire , par l'exerce réglé ; fans ce moyen ,
l'ufage du lait , la diète blanche incrafTante ,
ne produifent aucun bon effet : mais c'efl.
le comble de l'erreur q^ue d'employer dans
ce cas des remèdes difiolvans^
Lorfqu'il fe filtre une grande quantité de
bile qui eft pertée & fe mêle dans le fang , ou
qu^elle y reflue du foie comme dans k jau-
nifle , fi la maladie dur^ long-temps,. il en
rélulte unedifiblution totale , une vraieco///*
quaiion des humeurs par l'effet de ce récré-
ment , q^ui en eft le diilblvant naturel & né-
ceflaire , en tant qu'il s'oppofe feulement à
, leur cohéfion par fa qualité pénétrante , mais
qui divife& diflout leurs molécules, les difî.
pofe à la putrifaélion , comme un poifon^
dès qu'il eft trop abondant ou qu'il devient
trop adjtif : l'iétcre eft prefque toujours
fuivi de l^hydropifie. .
Dans le fcorbut putride-, le fang eft auiïî
tellement difibus par l'effet de l'acrimonie
muriatique dominante, 'qu^il ne peut pas
être retenu dansles vailfeaux qui lui lont pro-
pres; en. forte qu'il s'extravafe aifément»,
paflè dans d'autres vaiflèaux d'un genre dif-
férent , produit des taches , des ecchy mofes ,
ou des hémorrhagies confidérables.
Le fang de ceux qui étoientinfeélés de la
pefte qui régjioit dans la ville de Breda ,
pendant qu'elle étoit affiégée , paroiftbit lir
vide., étoit de mauvaife odeur , & n'avoir
point de- CQnfiftance. Vande.rmye , de morbis
bredanis. La diflblution du fang étoit auffi
très-marquée dans la pefte de Marfeille y
par les évacuations fréquentes & abondantes
qui fe faifoient de ce fluide par toutes les
voies naturelles , & par l'ouverture des bu-
bons, ùc. que l'on avoir peine à arrêter».
Recueil des mémoires fur cette pejle , imprimé
en 1744; à la tête duquel eft un favant dil^
cours de M. Senac , premier médecindu roi;
Voy. fur \2i colliquation , fes différentes ef-
peces, leurs fignesdiagnof tics & prognofticsj
& leurs caractères ; le nouveau traité des fie-r
vres continues de M . Qu efiiay , premier méde-
cin ordinaire du roi en furvivance. V. Hu- .
MEUR, SAiiGy BiLÇ, ViEVKEhecIique y colli^
quative i maligne j Pf.ste , Diarrhée,
^UEUR jDiAB.f TES , Consomption ^^ H y-
,C O L
DR»PIS1E , ùc. Ces deux articles foni de M.
d' Au MONT,
COLLISION en michanique , eft la même
chofe que choc. Voye'^QvLOC.
COLLITIG ANS, adj . pris fub. {Jurifp. )
font ceux qui plaident l'un contre l'autre.
On dit communément que inter duos liti-
gantes tertius saudet , c'eft-à-dire , que fou-
vent un tiers (urvient de les met d accord , en
obtenant l'héritage ou bénéfice que les deux
autres fe conteftoient réciproquement. (A)
COLLO , ( Géog. mod. ) village d'Afri-
qae , fur les côtes de Barbarie , au royaume
de Tunis.
COLLOBIS, {Mufiq. des anc.) nome
des Grecs pour la cythare. ( F. D. C. )
COLLOCATI0N ,C.f.{ Jurifp. ) eft le
rang que Ton donne aux créanciers dans l'or-
dre du prix d'un bien vendu par décret. Pour
être colloque dans*un ordre , il faut rappor-
ter la groflè de l'obligation y iî l'on ne rapporte
qu'une féconde grolîe , on n'eft colloque que
du jour de cette groflTeil'ufage eft néanmoins
contraire au parlement de Normandie. F.
Grosse,
En Artois , où il n'y a point d'ordre pro-
prement dit , les collocations fe font dans le
cahier de diftribution.
On colloque au premier rang les créanciers
privilégiés , chacun fuivant l'ordre de leur
privilège ; enfuite les hypothécaires , chacun
félon l'ordre de leur hypothèque ; & enfin les
chirographaires,^ ces derniers viennent par
contribution entre eux au fou la livre, lorf-
que le fonds n'eft pas fuffifant pour les payer.
On diftingue les collocations utiles ou en
ordre Hitile , de celles qui ne le font pas : les
premières font celles qui procurent au créan-
cier colloque fon paiement ; les autres font
celles fur lefquelles le fonds manque.
On diftingue aurtî la coîlocation en ordre ,
de celle qui fe fait feulement en fous-ordre ;
la première fe fait au profit du créancier de
la partie faifie ; la féconde fe fait au profit
d'un créancier de celui qui eft oppofant dans
l'ordre. Les collocations en fous-ordre fe font
entre elles dans le même rang que celles de
l'ordre. V. Ordre & Sous-ordre, Oppo-
SANS.
Quelquefois par le terme de coîlocation ,
on entend le montant des fommes que le
créancier colloque a droit de toucher ,
fiûvant le rang de fa coîlocation*
COL 507
Quand l'ordre eft fait , les créanciers pre-
miers colloques , dont les collocations ne
font pas conteftées , peuvent demander à
en toucher le montant , (ans prendre aucune
part aux conteftations d'entre les autres
oppofàns.
Maisaucun créancier , quoique utilement
colloque &: pour fommes non conteftées ,
ne peut demander à toucher les deniers de
fa Coîlocation , qu'il n'ait afîirmé devant le
juge que la fomme pour laquelle il a été col-
loque , tant en principal, intérêts que frais ,
lui eft bien & légitimement due , qu'il n'en
arien touché, & qu'il ne prête fon nom
directement ni indiredement , à celui dont
le bien a été vendu par décret.
Il y a plufieurscasoù l'on ne peut toucher
le montant des collocations , lans avoir donné
caution : favoir 1°. lorfque c'eft dans Pordre
du prix d'un office fait avant le fceau des
pro vif ions; déclaration du ZJ juillet t'/o^ :
1°. lorfque le juge ordonne le paiement de
la coîlocation p^i provifîon ; 3°, lorfque l'or-
dre eft fait par une fentence qui n'eft exécu-
toire qu'en donnant caution.
Suivant l'ufàge commun , il fkut que Por-
dre foit achevé avant que les créanciers ,
utilement colloques , puiflènt fe faire payer
de leurs collocations : cependant en quelques
endroits , comme en Normandie , les créan-
ciers peuvent fe fliire payer à mefure qu'ils
font colloques. Voye^^le traité de la rente des
immeubles par décret , de M. d'Héricourt ,
p. i^G , X4J y z8z & z8^. (A)
CoLLOCATioN , ( Jurifprud. ) eft aufïî
une voie de pourfuite ufitée en Provence au
lieu des faifies réelles & décret que l'on n'y
pratique point. Les créanciers qui veulent
fe faire payer fur les biens de leurs débiteurs ,
viennent par coîlocation fur ces biens , c'eft-
à-dire, qu'on leur en adjuge pour la valeur
des fommes qui leur font dues fur le pié de
Peftimation faite par des officiers qu'on ap-
pelle ejlimateurs. Cet ufage a été confirmé
pour la Provence par Louis XIII, lequela or-
donnél'exécution du ftatut de cette province,
qui défend de procéder par décret fur les biens
qui y font fîtués , quand même on procé-
deroit en vertu de j ugemens & arrêts éma-
nés des tribunaux de quelqu'autre province
où les décrets font en ufage. La déclaration
du 10 mars 170(3 , porte auflî quelesexécu-
S ss z
5oS COL
t!ons fur les biens immeubles de Provence
ne pourront être faites que par la voie ordi-
naire de la coîlocation. Voyez le traité de la
vente des immeubles par décret de M. d'Hé-
ricourt , ck.j , n.îo.{A)
COLLURION, Voyei^^PlE-GRIECHE.
COLLUSION, r. f. {Jurifprud.) eft
une intelligence fecrete qui règne entre deux
'parties au préjudice d'un tiers \ cette intelli-
gence eft une véritable fraude qui n'cft ja-
mais permife , & que Ton ne manque jamais
de réprimer lorfquelle eft prouvée. Ainfî
dans un r.cTce, foit authentique ou privé, il
y a collufion lorfque les parties font quelque
vente ou autre convention fimuléc. Dans
les ad:es judiciaires il y a cclhifion ^ lor(que
deux parties qui feignent d'être oppofées ,
paflènt des jugemens de concert , ce qui eft
prohibé fur-tout en matière criminelle à
caufe de Tintérêt public , qui demande que
les délits ne demeurent point im.punis. Il y
à au code un titre , de collujione detcgendâ,
qui eft le titre xx du liv. Vil. {A)
^^COLLUTHIENS, f. m. pi. (Jf//?.
eccléf. ) hérétiques qui parurent dans legîife
•au quatrième (iecle ; ils furent ainfi appelles
de CoUuthus prêtre d'Alexandrie , qui , fcan-
dalifé de la condefccndancc que faint
Alexandre patriarche de cette ville eut dans
les commencemens pour Arius qu'il efpéroit
ramener par la douceur , fit rchifme , tint
des aflèmblés féparées , & ofa même or-
donner des prêtres fous prétexte que ce
pouvoir lui étoit néceflàire pour s'oppofer
avec fuccès au progrès de l'arianifme : il
ne s'en tint pas là , & Pirré gularité paflà
bientôt de fa conduite dans fes fenti-
mais j il prétendit que Dieu n'avoic point
créé les méchans , & qu'il n'étoit pomt l'au-
teur des maux qui nous affligent. Ofius le
fit condamner dans un concile qu'il convo-
qua à Alexandrie en 319:
COLLYRE, f. m terme de Médecine,
remède externe deftiné particulièrement
pour les maladies des yeux. Voye-^ (Sil.
Il y en a de liquides & de fecs. Les co/-
lyes liquides , vyfonM^ioc , font compo-
lés d'eaux & de poudres ophrhalmiques,
comme les eaux de rofe , de plantain , de
fenouil , d'eufraife , dans lefquelles oh dif-
foutou on mêle de la tuthic préparée , du
•ïitriol blanc , ou telle autre poudre con-
COL ^
vcnable. Voye'^^ O p h t h à l m i q_tt E.
Les fecs, ^t\çoKo>htpt^^ , font les trochif-
ques de rhafis , le fucre candi, l'iris, la
ruthie préparée , ^^c. qu'on fouftle dans l'œil
avec un petit chalumeau.
On donne le même nom à des ongucns
employés pour le même effet , comme Ton-
guent de tuthie , & plufîeurs autres.
On le donne aulli , mais improprement ,
à quelques remèdes liquides dont on fe lert
pour les ulcères vénériens. Dicîionn. deTrév.
& Charniers.
Tel eft le collyre de Lanfrac , dont voici
k compofition. V du vin blanc , une livre ;
eaux de plantain , de rofe, de chaque trois
onces ; orpiment , deux gros; verd-de-gris,
un gros; myrrhe , aloës , de chaque deux
fcrupules : faites du tout un collyre feioii
l'art, (h)
* COLLYRroiENS , fub. m. pi. (Hiff.
eccléf. ) anciens hérétiques qui portoient à
la vierge un hommage outré ôc (uperfti-
tieux i faint Epiphane qui en fait mention ,
dit que des fem.mes d'Arabie entêtées du
collyridianifme s'aftèmbloient un jour de
l'année pour rendre à la Vierge leur culte
impertinent , qui confiftoit principalement
dans l'of&ande d'un gâteau , qu'elles man-
geoient enfuite en fon nom. Le nom colly^
ridien vient du mot grec collyre , petit pain.
. ou gâteau.
^ COLM AR , ( Géogr. m.od. ) ville con-
/îdér bîe de France dans, la haute Alface,.
dont elle eft capitale près de la rivière:
d'Ill. Lcng. 2.5 , 2. , Il ; lat. 48 , 4 , 44.
COLM ARS , ( Gécg. mod. ) petite ville
de France en Provence , proche des* Alpes..
Long. 2.4 , 50; lat. 44 , îo.
COLMOGOROT, ( Géog. med.) ville
de Pem.pire rulTien , dans une île ktrmée
par la Dwina. Long. ^8 , 25 , lat. 64,,
ÎO.
COLMOND, (G/o^r.) très-ancien châ-
teau d^Allemagne, dans le cercle de Weft-
phalie, & dans l'évêché de Liège , au pays,
de Tongres : il eft connu par les dévafta-
-t'ons qu'il efluya l'an 1170 & l'an 1489..
{D.G.)
COLN , ( Gécgr. ) ville d'Angleterre , au
bord oriental de la province de Lancaftre :
elle fait un grand trafic des grains & d'au-
tres provifions de bouche 5 &: on déterra >
COL
ïî y a quelques années , dans ces environs ,
nombre de médailles romaines , tant d'ar-
gent que de cuivre. Long, l^ , 55 ; lat. 53 ,
§ COLNE , ( Gécg. ) rivière d'Angleterre
qui coule dans les provinces de Hert-ibrd &
du Buckingham , & tombe dans la Tamife
entre Wind(or&: Hampton-Courc.(D. G.)
* COLOBI^vl , ( HiJ}. anc. ) habit (ena-
torial ; c'étoit une efpece de tunique dont on
ne connok pas bien la forme , & dont il cft
allez rarement parlé dans les auteurs.
COLOCASIE , ( Botan. exot. ) plante
étrangère , efpece d'arum ou depié-de-veau.
Peu de fciences o4it plus de befoin de ie
prêter un fecours mutuel que l'hiftoire an-
cienne & la botanique , lorlque pour Tintel-
ligence de quantité d'ufages ou myftérieux
eu économiques que les Eg^^ptiens fiiifoient
des plantes de leur pays , il s'agit de difcer-
ner cellesqui fc trou vent repréfencéesiur les
monumens qui nous en reftent.
Les antiquaires qui fe font flattés d'y réuf-
{ïr,enconfuitant Théophrafte,Diofcoride de
Pline , n'en ont pas pu juger fùrcment ; parce
qu'aucun de ces naturaliftes n'avoit vu ces
plantesdans leur lieu natal, &quelesdefcrip-
tions qu'ils nous en ont laiiîees étant très-
courtes , très-imparfaites & fans figures , on
n'a pas pu en faire une jufte application aux
parties détachées des plantes que les fabrica-
reurs de ces monumens ont voulu reprc-
îenter.
C'efl: donc au fol de l'Egypte même & au
lit du Nil 5 qu'il faut avoir recours pour en
rirer les pièces de comparaifon qui leur ont
fervi de types. C'eft fur la vue de ces plantes,
ou rapportées feches de ce pays-là, ou tranf-
plantées dwins celui-ci , ou très-exa6tement
décrites par ceux de nos meilleurs boranif-
tes , qui les ont deflînées d'apt'^s le naturel ,
comme l'a fait Profper Alpin , que Pon çeut
qualifier raifonnablement cellesqui ontiervi
d'attributs aux dieux , & de fymbole aux rois
& aux villes d'Egypte , des noms qui leur
conviennent fuivant les genres auxquels elles
ont du rapport.
C'eft de cette manière que s'y font pris
d'habiles gens pour découvrir la co/or^y7e des
anciens , & être en état de la ranger fous le
genre de plante auquel elle doit appartenir.
Gomme fa principale qualité it trouvoit
COL 50^
dans la racine dont on fil Q)it du pain, 5c que
de cette racine de laquelle les Arabes font
encore commerce , il nair une fleur & des
feuilles d'un genre à'a-um , on ne doute plus
que ce n'en (oit une efpece , & tousles bora-
niftes modernes depuis Fabius Coîomna , &
l'ouvrage de Profper Alpin fur les plantes
d'Egypte , fontconftammentde cet avis. Le
nom V ulgaire de culcas ou colcas qu'elle fem-
ble avoir retenu de l'ancien colocafia, doit
encore contribuer à confirmer cette opinion.
Sesfcuiilesfontauflîlargesque celles d'un
^chou. Satigeefl: haute de trois à quatre pies ,
& grofle comme le pouce. Ses feuilles font
grandes , rondes , nerveufes endeflbus , at-
tachées à des queues longues &: groflès , rem-
plies d'un fucaqueux & vifqueux. Les fleurs-
font grandes, amples comme celles de l'a--
rum , de couleur purpurine , monopétales ,
de figure irréguliere , en forme d'oreille d'â-
ne. Il s'élève de chaque calice unpiftil qui de-
vient enfuite un fruit prefque rond , qui con-
tient quelques graines. La racine eft charnue,
bonne à manger. Cette plante naît dans l'ile
de Candie en Egypte , & près d'Alexandrie, -
Les antiquaires reconnoîrront donc au-
jourd'hui la fleur de cette plante fur la tk(t
dequeiques harpocrates,&de quelquesfigu-
res panthées par fa forme d'oreille d'âne ou-
de cornet , dans laquelle efl: placé le fruit ; &
il y a toute apparence qu'elle étoit un fym-
bole de fécondité. Voyelles mémoires des Inf- -
criptions , tome II.
; Les curieux de nos pays cultivent la colo-
cafie avec beaucoup de peine. Ils la plantent
dans des pots pleins de la meilleure terre qu'il ■
eft poflible d'avoir , & la tiennent toujours ■
dans des ferres fans prefque l'expofer à Tair ,
qui endommage promptement fes feuilles :
rarement on la voit produire des fleurs. Sa
racine cuite a le goût approchant de celui de
la noifette. J'ignore où Bontius a pris qu'elle
eft^d'une qualité vénéneuse , &qu'avantque'
(d être mangeable , il faut la macérer quelques -
jours dans l'eau.
Il eft certain qu^en Egypte , en Syrie , en '■
Candie , & autres régions orientales, on eni
mange lansaucune macération , comme on ••
fait des navets en Allemagne. Elle a , étant:
crue , un peu d'amertume & d'âcreté vif-'-
queufe; mais tout cela s'adoucit entiéremenft:
parlacuilibn,.
5 lo C O L
Du refte cette plante n'a point de verrtis
médicinales.
Le chou karaïbe des Américains répond
prefque parfaitement à la coiccafie d'Egypte j
car c'eft aufii une efpece d'Arum d'Améri-
que , dont le? racines font grofles, de cou-
leur de chair par dehors , jaunes par dedans,
d'une odeur douce ; Tes feuilles reflèmblent
h. la grande ferpentine. On fait du potage
de Tes feuilles 5c de fes racines. ( M. le che-
valier DE JaU COURT.)
COLOCHINA , {Géog. mod.)v\\\c de
la Turquie en Europe , dans la Morée, fur
\.m golfe de même nom. Long. 40 , ^^ ; ht.
CÔLOCZA , {Gécg. mcd.) ville de la
haute Hongrie , capitale du comté de Bath
fur le Danube. Long. 36 ^ a^ ; lat. 46" , 57.
^COLOENA, furnom^de Diane, ainfi
appellée d'un temple qu'elle avoit dans TAiie
mineure , près du marais Coloé jadis le ma-
rais Gygée, à quarante ftades de la ville de
Sardes en Lydie \ on lui célébroit des fêtes ,
dans lefquellcs on faifoit danfer des finges.
* COLCENIS , ( Mythol. ) furnom de
Diane : elle étoit adorée fous ce nom parles
habitans de Myrrhinunte en Attique. Ow
prétend qu'il lui venoit de Colcenus , que
quelques-uns prétendent avoir régné à Athè-
nes avant Cécrops.
COLOGNE , ( G4og. mo^.) grande ville
d'Allemagne fort commerçante , capitale de
l'éledtorat de même nom. Elle eft libre &
impériale , fituée fur le Rhin. Long. 2.4 ,
45 ; lat. ^o ,^0.
Cologne ( Elecloratde) , pays afiez grand
d'Allemagne , borné au nord par les duchés
de Cleves &; deGueldres, à l'orient par celui
de Berg & l'éledorat de Trêves , au couchant
par le duché de Juliers. LeRhinquiarrofe
ce pays, le rend très-commerçant. L'éledeur
de Cologne eft archichancelier de l'empereur
pour l'Italie ; mais ce n'eft qu'un titre qui
n'entraîne aucune fondtion ; un titre plus
réel pour lui , c'eft celui de duc de VVeft-
phalie.
COLOMAY, {Gêog. mod.) petite ville
de Pologne dans la Rufïie rouge > fur la
Pruth. Lo/ig. 44 ; lat. ^8 , 45.
COLOMB (Saint-), G^^r. ville d'An-
gleterre dans la province de Cornouailles ,
au fommec d'uiic collme peu éloignée de la
C O C
mer. L'on n*y compte que 1 5 o maifons, 6i
la plupart aflèz mal bâties j mais ks rues en
font larges Se bien pavées , & il y a foires
& marchés pour gros & menu bétail , Ôc
pour étoffes de laine. L'on trouve dans Con
voilinage les veftiges d'un ancien camp Da-
nois, io/?^. iz, îZy lat. ^0,30. {D.G.)
CoLOMB.C Saint- ) , Géogr. petite île, du
nombre des anciennes Hébrjdes, à la pointe
méridionale de celle de Mull , dans la mer
occidentale d'Ecofle. On lui donne deux
milles du pays en longueur , & un en lar-
geur j les Irlandois PappcUcnt VColm'-
Kill; elle a auiTi porté le nom de Jona. C'eft
dans cette île , qu'au vi® fiecle CoLmb ou
Colomban , faint homme Irlandois , célè-
bre par l'auftérité de fes mœurs , & par la
pureté de fa doctrine, fit un certain féjour ,
& jeta les fondemens d'un féminaire qui
s'eft long-temps foutenu , &c qui fourniflbit
les îles britanniques d'une multitude de reli-
gieux & de prêtres , d'autant plus refpedes
qu^ils étoient moins connus \ car cette île
fut de tout temps par fa fituation une patrie
de folitaires qui ne pouvoientfbrtirdelàfans
apporter avec eux un air de nouveauté , très-
équivalent à celui qu'eux-mêmes dévoient
trouver dans le monde. Sodor, dont les
évêques de Man portent le titre , eft le nom
du diocefe moderne de cette île. La reli-
gion proteftante eft celle qu'on y profeflè.
{D. G.)
COLOMB , ou COLM , ou COLMKIS ,
(Congrégation DE S.) HiJl.eccléf.c'dWc
nom d'une congrégation de chanoines régu-
liers qui étoit d'une grande étendue , &c com-
pose de cent monafteres répandus dans les
îles d'Angleterre. Elle avoir été établie par
S. Colomb , Colm , ouColmkis , irlandois
de nation , qui vivoit dans le vj* fiecle , ôc
qu'on appelle au fïî S. Colomban ; mais qu'il
ne faut pas confondre avec un autre S. Co-
lomban fon compatriote ôc fon contempo-
rain , fondateur 8c premier abbé de Luxeuil
en Franche-Comté.
Le principal monaftere ou chef de l'ordre
dont nous parlons , étoit félon quelques-uns
à Armagh, fuivant d'autres à Londondery;
d'autres enfin prétendent qu'il étoit dans l'île
de Hi ou Lon , qu'on appelle maintenant
Ycolmkil., au nord de l'Irlande j à quelque
diftaiîce de l'.EcolIè.
COL
On voit encore une règle en vers , qu'on
croit avoir été di<5bée par faint Colomb à
Tes chanoines. Foje:^^ Règle. (G)
COLOMBAYE, en architeciure. Voye^
Pan de Bois & Colombe.
COLOMBE, r. f. Voyei Pigeon. Ily a
quelques oifèaux qui portent le nom de co-
lombe , qui font la colombe de la Chine , la
colombe de Portugal , k colombe de Groen-
land , ùc. celle-ci eft cependant abfolument
différente des pigeons , car c^fl: un oifeau
aquatique. Koye-^^ l'hijhire naturelle des oi-
feaux , gravée par Albin , & V ornithologie de
Willughby.(/)
'^ Colombe , {Mythol.)ct{\. Toifeau de
Vénus ; elle le portoit à la main , elle Tatta-
choit à Ton char, elle prenoitfa forme. Ju-
piter fut nourri par àtsxolombes : fable dont
l'origine reflèmbleà celle de beaucoup d'au-
tres j elle vient de ce qu'en phénicien le mot
colombe fignifie ;'r//re ou cureté. Leshabitans
d'Arcalonrerpc6loientcetoi(èauaupointde
n^ofer ni le tuer ni le manger. Les Aflyriens
croyoient que Sémiramis s^étoit envolée au
ciel en colombe. Il eft fait mention de deux
colombes fameufes ; Tune fe rendit à Dodone ,.
où elle donna la vertu de rendre des oracles
à un chêne de prédile6lion } Tautre s'en alla
en Lybie , où elle fe plaça ejitre les cornes
d'un bélier d'où elle publia Tes prophéties.
Celle-ci étoit blanche, l'autre étoit d'or. La
Colombe à'ox., qui donnoit le.don de prophé-
tie aux arbres , ne le perdit pas pour cela ; elle
étoit perchée fur un chêne; on lui facrifioit ;
on la confultoit , & Tes prêtres vivoient dans
Ifabondance. Ce fut elle qui annonça à Her-
cule fa. fin malheureufe. On fait d'ailleurs
par Hérodote & parles mythologues que ces
colombes étoient de vieilles femmes. La co-
lombe éioix. le feul oifeaU'qu'on laiflat. vivre
aux environs du temple de Delphes.
Colombe , {'Ajlror?. ) conftellation mé-
ridionale,, fituéeau-délîbus du lièvre &du
grand chien , introduite vers le commence-
ment du xvii^liecle , lorfque les navigateurs
commencèrent à obferver les étoiles au ftra-
lès & à leur donner des noms : on prétendit
placer la colombe de Noé à côté du vaifleau
que l'on confîdéra comme l'arche de Noé.
Elle eft repréfentée dans les cartes de Bayer
avec neuf étoiles j fans autre explication que
celle-ci; reçentiçribas columba^ Danilci:affl-
C O L yt
logue de Flamfteed , elle contient dix étoiles ;
dans celui de M. de la Caille , elle en ren-
ferme un bien plus grand nombre. La priii-
cipale appellée « avoit en 1750, 81° 59, 15"
d'afceniion droite , & 54° 1 5' 2 1'' de décîi-
naifon , d'où il iuit qu'on peut très-bien la
voir en Europe , puisqu'elle paflè au méri-
dien près de 7 degrés au-dellus de l'horizon
de Paris. {M. de la Lande.)
Colombe {Ordre de la) , Jean deCaftille,
premierdunomjrinftituaàSégovieeni 3 195
ou félon 'd'autres , Henri III Ton fils , en
13.99. Lês chevaliers poruoient une chamc
d'or avec une colombe cmaillée de blanc , les.
yeux & le bec de gueules :cec ordre dura peu»
Colombe , en architecture , eft un vieu)C
motqui fignifioit autrefois toute folive poféa
debout dans les pans de bois Se cloifons y
d'où l'on a fait celui de colombage.
Colombe , che-^ leslayeùers , eft un mÇ-'
trument en forme de banc , percé à joue
comme le rabot , & garni d'un fer tranchant
deftiné à drefier le bois, yàye-^ Dr es sep.
Colombe , outil de gainier en gros ou-
vrages.
Cette colombe eft faite comme la colombe
des layetiers , & ferr aux gainiers en gros
ouvrages pour unir- & raboter- les bords des
planches dont ils font descaifl'es. Voye^^V ar-
ticle précédent..
Colombe , ( Tonnelier.) efpece de grande
vadope renverfée dont le fer- a trois pouces
de large , & le bois quatre pies de long ; elle
eft fou tenue fur trois pies de bois. Les tonne-
liers s'en fervent pour pratiquer; des joints
,au bois qu'ils emploient.
Colombe (Sainte-) , G/ogr./no^. petite
, villedeFrance dans leLyonnois, furie R hone.
* COLOMBIER, f. m. ( Économ. rufî,q. )
•endroit où l'on tient des pigeons ; c'eft un
.pavillon rond quarrégarni de boulins. Il faut
le placcrau milieu ou dans un angle déballe^
cour; le plancher &: le plafond doivent en
être bien joints ,,pour en écarter les rats de
autres animaux ; il faut qu'il foit blanc en
dedans , parce que les pigeons aiment cette
couleur-; que la fenêtre foit à coulille , pour
l'ouvrir & la fermer d'en-bas foir & matin,
par le moyen d'une corde & d'une poulie.,
& qu'elle foit tournée au midi ; les boulins
feront ou despotsoudes fépararions faites de
f^tufè.oudetoxchis 3 on les fera grands j le der*.
511
COL
nier rang d'en -bas fera à quatre pies de terre
ou environ.; le dernier d'en-haut à trois pies
du hiite ; on pratiquera au bas de chaque
boulin une avance fur laquelle le pigeon
puifiè le repofer.
Colombiers, (/i.r//i^r.) Les loix ro-
maines n'ont point dedifpolition au fujet des
colombiers , ni pour fixer le nombre de pi-
geons; il étoit libre à chacun d'avoir un ou
pluiieurs colombiers en telle forme qu-*il ju-
geoit à propos , &: d'y avoir aufïi tel nombre
de pigeons que bon lui fembloit. Les loix ro-
mainesavoient feulement décidé par rapport
aux pigeons , que leur naturel eft fauvage , &
qu'ils appartiennent à celui qui en eftproprié-
■taire tant qu'ils ont confervé l'habitude de
revenir à la maifon ; que s'ils perdent cette
habitude , alors ils appartiennent au premier
occi^pant. Il étoit néanmoins défendu de les
tuer îorfqui'sfontau champ pour y chercher
leur nourriture , ou de les prendre par des
em.bùches , &: ceux qui y contrevenoient
ctoient coupables de voX.ff. i o^tit. z; 1.8. § z .
En France on a pouflé beaucoup plus loin
Tattention fur les colombier sSc fur les pigeons;
c'efl: pourquoi il faut examiner à quelles per-
fonnes il eft permis d'avoir des co/o/7z^/'er5&
en quelle forme ; quelle quantité de pigeons il
eft permis d'avoir ; (i les pigeons renfermés
dans un colombier (ont meubles ou immeu-
bles ; enfin les peines dont doivent être pu-
nis ceux qui prennent ou tuent les pigeons.
Il eft défendu d'abord dans toutes les villes
d'avoir des pigeons foit privésou fuyards , &
cela pour la falubrité de l'air ; c'eft évidem-
ment par ce m.otifque la coutume de Melun,
art. :?40 , dit que nul ne peut nourrir pigeons
pâtés & non-pâtés dedans la ville de Melun.
Celle d'Etampcs ^art. i<^2, , défend de nour-
Tir dans cette ville des pigeons privés, à peine
de cent fous pariiis d'amende. Quelques au-
tres coutumes , comme celle de Nivernois ,
ch. X. art. z8 , défendent de nourrir dans
lesvilles difFérensanimaux qu'ellesnorament;
Se quoiqu'elles ne parlent pas des pigeons , la
prohibition a été étendueàcesanim.aux.Ch-^r-
îes V par deslettres patentes du 19 août 1368,
défendit expreftement à toutes personnes de
nourrir des pigeonsdanslavilîe&faux bourgs
<îc Paris : &:la même défenfe fur renouvellce
tpar une ordonnance du prévôt de Paris , du
^ ayi;U i joz ^ fur le requifitoire des ayocâtsi
COL
ôc procureurs du roi , à peine de confîlca-
tion & d'am^ende arbitraire. Irait, de la
pol.-ce , tome I, p. J^l.
Dans les campagnes , il eft'pcrmis à toutes
fortes de perionncs d'avoir des pigeons pri-
vés , pourvu qu'on les tienne enfcrmésdans
une chambre ou volet , & qu'ils n'aillent
point aux champs ; car de cette manière ils
ne caufent aucun dommage à personne.
A l'égard des pigeons bizets ou fuyards
qui vont aux champs , quelques-uns ont pré-
tendu que fuivant le droit naturel , qui per-
met à chacun de faire dans fon fonds ce qu'il
lui plaît , il étoit libre auftl d'y faire édifier
tel colom^'ier que l'on juge à propoj ; que la
nourriture des pigeons ne fait point de tort
aux biens de la terre , riclus columbarum inno -
cuusexrjlimatur ,can. fanclus Augujl. j , ca-
non, non omnis ; qu'en tous cas c'eft unefer-
vitude aulîl ancienne que néceflaire pour la
campagne ; que le dommage qu'ils peuvent
apporter par la nourriture qu'ils prennent aux
champs eft compenfé par l'utUité de leur
fiente qui réchaufteles terres.
Il eft néanmoins conftant que malgré cet
avantage , la nourriture que les pigeonspren*
nent aux champs eft une charge , fur-tout
pour ceux qui n'en ont point , &c pour lef-
quels le bénéfice que l'on tire des pigeons
n'eft pas réciproque. C'eft principalement
dans le temps des femences qu'ils font le
plus de tort , parce qu'ils enlèvent &l arra-
chent même le grain quicommence} pou iîèr.
Auffi voyons- nous q\ie chez les Romains
même , où la liberté d'avoir des colombiers
n'étoit pas reftrcinte , on fentoit bien que
la nourriture des pigeons prifeaux champs,
pouvoir être à charge au public. Lampride,
en la vie d'Alexandre Sévère , dit qu'il met-
toit Ton plaifir à nourrir des pigeons dans
fon palais, qu^il en avoir jusqu'à vingt mille;
mrîis de peur qu'ils ne fuft-ènt à charge, il
les faifoit nourrir à fes dépens : Avia injlitue.-
rat maxime columbarum quos haburjfe dicitur
ad viginti milha ; Ù ne eorum pafn/s grava-
ret annonam ,fervos habuit vecîi gales qui eos
ex oris , ac pullicnis Ù pipionibus akrent.
Cette confidération eft principalement ce
qui a fait reftreindre parmi nous la liberté des
colombiers; on enafaitaulîî un droit feigneu-
rial. Pour (avoir donc à quelles perfonnes il
eft permis d'en avoif & en quel nombre , 8c
en
COL
en quelle forme peut être le coîomhîer y volet
ou fuie, il faut d^abord diftinguer les pays
de droit écrit des pays coutumiers. .
Dans les pays dt droit écrit Ton fe fert
plus communément du terme de pigeonier
que de celui de colombier; on Te lert aufli
du terme de/z//e pour exprimer un colombier
à'pié , au lieu que dans les pays coutumiers
on n'entend ordinairement par le terme de
fuie , qu'un fimple volet à pigeons qui ne
prend point du rez-de-chaullèe.
Sous le terme de colombier à pie on entend
communément un édifice ifolé , foit rond
ou quarré , qui ne fèrt qu'à contenir des
pigeons , oc où les pots & boulins deftinés à
loger des pigeons vont jufqu'au rez-de-
chauflée; car (1 dans un colombier à pié la
partie inférieure du bâtiment eft employée à
quelqu'autre ufage , le colombierncù. plus ré-
puté colombier à pié ni marque de iêigneuric.
Les colombiers ou pigeoniers fur piliers ,
les (impies volets , fiiiesou volières , font tous
colombiers qui ne commencent point depuis
le rez-de-chau(îee.
La liberté des colombiers eft beaucoup
moins reftreinte en pays de droit écrit ,
que dans les pays coutumiers ; ce qui eft
une fuite de la liberté infinie que l'on avoit
à cet égard chez les Romains : on y a cepen-
dant apporté quelques reftriélions , & l'ufàge
des diftérens parlemens de droit écrit n eft
pas uniforme à ce fujet.
Salvaing , de l' ufage des fiefs , ck. xliij ,
pofe pour principe général , que chacun a
droit de bâtir des colombiers dans Ion fonds
fans la permidion du haut-jufticier , s'il n'y
a coutume ou convention au contraire ; plu-
fîeurs autres auteurs, tant des pays de droit
écrit que des pays coutumiers , s'expliquent
à-peu-près de mêm^.
Cependant il ne faut pas croire que , même
en pays de droit écrit , il foit permis à
toutes fortes de perfonnes indiftinctement
d'avoir des colombiers à pié , cette liberté ne
pourroit concerner (^ue les firaples volets.
En Dauphinéondiftingue entre les nobles
& les roturiers ; les nobles ont le droit de
faire bâtir colombier a pié ou fur piliers , com-
me bon leur femble , fans la permifïîon du
haut-jufticier. Les roturiers au contraire ,
quelque étendue de, terres labourables qu'ils
aient, ne peuvent avoir un colombier à pié ^
Tome FUI.
COL 513
ou fur follves, fans le congé du haut-jufti-
cier , qui peut les obliger de les démolir ou
de détruire les trous & boulins , ôc de faire
noircir la cage pour s'en fervir à tout autre
ufage.
En Provence au contraire , on tient que
il le feigneur n'eft point fondé en droit ou
pdflelTion deprohibjr à fes habitans de conf-
truire des colombiers de toute efpece , que
dans le pays on appelle colombiers à pié ou
à cy^ei'^/ , c'eft-à-dire , fur piliers ou fur (oli-
ves, ou garennes cloies, les habitàns peu-
vent en faire conftruire fans fon con(ente-
ment; pourvu que ces colombi^ n'aient
nicrénaux ni meurtrières , qui font des mar-
ques denoblelTe. Boniface , tit. i , ùv. III ,
tit. ^ , ch. iij.
On obferve la même chofe au parlement
4e Touloufe ôc pays de Languedoc , fuivant
la remarque de M. d'Olive , liv. II, ch. ij ;
de la Rocheflav. des droits feign. ch. xxij ^
art. z; 5c l'explication que faitGraverol (uc
cet article.
Au Parlement de Bordeaux on diftingue :
chacun peut ybkir librement des pigeoniers
élevés fur quatre piliers j mais on ne peut ,
fans le conl'entement du feigneur , y bâtir
des colombiers à pié , que dans ce pays on
appelle fuies. Voye^ La Peyrere , édit de
2727 , lett. S;n.^,Ôcla note , ibid.
Tel eft audi l'ufage du Lyonnois & au-
tres pays de droit écrit du reftb t du Parle-
ment de Paris. Salvaing , loco cit.
Aîn(î dans ces pays & dans le pays borde-
lois , la liberté d'avoir un colombier fur piliers ,
volet ou volière , ne dépend point de la quan-
tité de terres que l'on a , comme à Paris ; il
n'y a que les colombiers à pié qui (ont une
marque de juftice. .
On obferve auflî la même chjfe à cet
égard , dans la principauté de Dombes.
Pour ce qui eft des pays coutumiers , plu-
(leurs coutumes ont des dilpofîtions fur cette
matière ; mais elles ne font pas uniformes en
certains points; d'autres (ont abfolument
muettes lur cette matière , & l'on y fuit le
droit commun du pays coutumier.
L'ufage le plus commun 8c le plus général,
eft que Ton diftingue trois lortes de perfonnes
qui peuvent avoir des colombiers , mais diffé-
rens & fous différentes conditions ; (avoir les
feigneurs hauts- jufticiers , les feigneurs féo-
Ttt ^
514 COL
daux qui n*ont pas la feigneurie foncière ,
& les particuliers projTriétaires de terres en
ccn/îve.
Dans la coutume de Paris & dans celle
d'Orléans , le feigncur haut- j ufticier qui a des
ceniives j, peut avoir un cclombicr à pie ^
quand même il n'auroit aucune terre en
domaine ; Se la raifon qu^en rendent nos au-
teurs , eit qu'il ne feroit pas naturel que l'on
conteftât le droit de colombier à celui qui a
ieul droit de les permettre aux autres; que
d'ailleurs le feigneur haut-jufticier ayant
cenfîves, efl: toujours réputé le propriétaire
primordi|l de toutes les terres de ces tenan-
ciers , & qu'il n'eft pas à préiumer qu'en leur
abandonnant la propriété ou feigneurie uti-
le, moyennant une modique redevance, il
ait entendu s'interdire la liberté d'avoir un
colombier , ni les décharger de l'obligation de
iouffrir que Tes pigeons aillent fur leurs ter-
res. Ces coutumes ne fixent point la quantité
de ceniîves, néceflaires pour attribuer le
droit de colombier âpié?.u. (èigneur haut-juf-
îicier , qui n'a que juftice 6c cenlîve. Paris ,
itrt. Ixix. Orléans , clxviij.
Le droit de colombier à pie eft regardé
comme un droit de haute- juftice dans plu-
iîeurs coutumes ; telles que Nivernois. iit. des
Colomb. Bourgogne, c. xiv. Bar, art. xlvij.
Tours, art. xxxvij ; & de Château-neuf,
crt. clij.
Le feigneur de fiefnon haut-jufticier ayant
cenlive , peut auilî., fuivant les mêmes con-
clûmes, avoir un colombier à pié , pourvu
qu'outre le fief & Çts cenfivesil ait, dans la
coutume de Paris , cinquanrc arpens de terre
endom.aine , & dans celle d'Orléans , cent
arpens. Paris , Ixx. Orléans , clxxvilj.
La coutume de Tours ne donne au fei-
gneur féodal que le droit d'avoir une fuie ou
volière à pigeons. Celle du Boulonnois dit
qu'il peut avoir un colombier , fans expliquer
ii c'eft à pié ou autrement.
Celle de Bretagne, art. ccclxxxix^ dit qu'au-
cun ne peut avoir de colombier , foit à pié ou
fur piliers , s'il n'en eft en poflèlîion de temps
immémorial , ou qu'il n'ait trois cents jour-
nauxde terre en fief ou domaine noble aux en-
virons du lieu où il veut faire bâtirle colombier..
La coutume de Blois porte , qu^aucun ne
peut avoir de colombier âpié , s'A n'en a le
dtoic ou une ancieSne poflèlTion^
COL
On ne trouve aucune coutume qui ait
interdit aux feigneurs la liberté de faire bâtir
pluiieurs colombiers dans une même feigneu-
rie 5 & dans Pufage on voit nombre d'exem-
ples de feigneurs qui en ont pîufieurs dans le
même lieu ; il n'y a que la coutume de Nor-
mandie qui femible avoir reftreint ce droit
par l'article cxxxvij , qui porte qu'en cas de
divifionde fief , le droit de co/o^n^/er doit de-
meurer à l'un des héritiers , fans que les
autres le puiflen: avoir , encore quechacune
part prenne titre & qualité de fief avec les
autres droits appartenans à fief noble par la.
coutume ; que néanmoins fi les paragers
ont bâti un colombier tnlcur portion de lief,
6c joui-d'icelui par quarante ans paiiible-
ment , ils ne pourront être contraints de le
démolir.
Le nombre des pigeons n'eft point non
plus limité par rapport au feigneur , on
préfume qu'il n'abuie point de fon droit. Les
colombiers à pié ont communément deux
mille boulins; mais on en voit de plus con-
fidérables. Il y a à Château vilain en Cham-
pagne un colombier qui eft double, c'eft-
à-dire , dans l'intérieur duquel il y a une
autre tour, garnie des deux côtés de bou-
hns ; (k letouc en contient , dit-on , près de
I lOOO.
A l'égard des particuliers qui n'ont ni
juftice , ni feigneurie , ni cenlîve ; ils ne pen-
ventavoir que de fimples volets. La coutume
de Nivernois dit qu'on en peut bâiir fans
congé de juftice. Celle d'Orléans permet à
celui qui a cent arpens de terre , d'avoir un
volet de deux cents boulins ; & Lalande , fur
cet article , dit qu'on ne peyt avoir qu'une
paire de pigeons pour trois bouHns. Celle de
Calais demande pour un colombier , qu'on
ait la permifïion du roi & cent cinquante
mefures de terres en domaine ; mais pour
une volière de cinquante boulins, elle ne
demande que cinquante mefdres de terres.
Torifand/ fur la coutume de Bourgogne , dir
que les volets ne peifvent avoir que quatre
cents pots ou boulins.
Dans les autres coutumes qui n'ont point
de difpofition fur cette matière, lajurifpru-
, deuce a établi que ceux qui n'ont aucun fief,
peuvent avoir une volière, pourvu qu'ils
aient au moins cinquante arpens de terre în
, domaine dans le Ûeu. Par un anct da- 2.
COL
Teptembrc 1759, repdu en la quatrième
chambre des enquêtes , trois gentilshommes
qui avoient des co/oOT3/er5 àpié , furent con-
damne's à n'avoir que de fîmples volières
contenant deux boulins par arpenf ,
Les curés ne peuvent avoir de colombier
ni de volet , fous prétexte qu'ils ont la dime.
dans leur paroifl'e.
Les particuliers qui ont droit d'avoir un
volet, ne font point tenus communément
de renfermer leurs pigeons dans aucun temps
de l'année. J'ai cependant vu une ordon-
nance de M. l'intendant de Champagne,
rendue en 175 z à l'occa/Ion de la dilette de
1751 , qui porte quetous particuliers , autres
que. les feigneurs ^ ceux qui ont droit de
colombier à vie y tant dans les villes que dans
les bourgs & paroiflès de la généralité de
Châlons , feront tenus de renfermer les pi-
geons chaque année , depuis le 10 mars j uf-
qu'au 20 mai, depuis le Z4Juin jusqu'après
la récolte des navettes , & depuis le temps
de la moilTon desfeigles jufqu'au 20 novem-
bre fuivant ; il leur efl: défendu de les laifler
fortir pendant ce temps ,. à peine de cent
livres d^imende applicable aux befoins les
plus preflàns des communautés où ils demeu-
reront. Celaferoit près de fept ou huit mois
que l'on feroit obligé de tenir les pigeons
renfermés.
Quant à la qualité des pigeons / ceux des
colombiers à pié font réputés immeubjes,
comme faifant en quelque forte partie du
colombier : mais les pigeons de volière
font meubles. Voye:(^ le tr. de la police , tome
I.p-Jjo.^
Il elt défendu de dérober les pigeons d'au-
trui foit en les attirant par des odeurs qu'ils
aiment & autres appâts , foit eh les pre-
nant avec des filets ou autrement. Ccut.
d'Ehmpes , art cxciij. Bretagne , cccxc. Bor-
deaux, cxij.
Il n'eil pas non plus permis de tirer fur les
pigeons d'autrui , ni même fur fes propres
terres ; parce que ce^ animaux ne font qu'à
moitié fauvages , & que fous prétexte de tirer
fur fes pigeons , qu'il eft fort difficile de re-
connoître , on tireroit fur les pigeons d'au-
trui. Ordonnance de Henri IV , du mois de
juillet iGoj, (A)
Colombiers, {Mar.)ce font deux lon-
gues pièces de bois endentées , qui fervent
COL 5iy
à foutenîr un bâtiment lorfqu'on veut le lan-
cer à Peau. Ces pièces différent des coites en
ce que les colombiers fuivent à Peau avec le
bâtiment , &c que quand il vient à flot , les
colombiers qui y font attadiés avec descor-
des flottantaufti , on les retire ;mai« lescoites
demeurent en leur place, & le vaillcau ghdè
delfus &c s'en va ieul. Les Hollandois fe fer-
vent de coites , & les François de colombiers.
Voyei^ Coites. ( Z )
Colombier , dans la pratique de l'impri-
merie ^ fe dit par allufîonj c'efl: le trop
grand efpacé quife trouve entre les mots. Ce
défaut répété dans une fuite de lignes , pro-
duit dans une page d'imprefîîon un blanc
confidéxable , qui devient un des défauts
efîentiels. Les petites formes en gros caradVe-
res , & celles à deux colonnes , font fujettes
à cet incident : mais un ouvrier qui a de la
propreté dans fon ouvrage, ou n'y tombe
pas , ou fait y remédier en renianiant la
compofition.
COLOMBINE , forte de couleur violet-
te , appelléeauffi^or^e Jep/ff"eo/2. Fbye^Cou-
LEUR 6" Teinture.
CoLOMBiNE, f. Ç {Jardinage.) n'efl au-
tre chofe que du fumier ou de la fiente de
pigeon , qui eft h remplie de parties vola-
tiles , fi fort en mouvement , que fî on ne les
laifïbit modérer â l'air on courroit rifque , en
les répandant trop promptement , d'altérer
les grains femés & de détruire les premiers
principes.
Ce fumier efl peu propre aux terres labou-
rables; 11 convient aux prés trop ufés, aux
chenevieres & aux potagers, pourvu qu'il
foit mêlé avec d'autres engrais, & qu'il foit
répandu à claire-voie. ( iC )
COLOMBO , ( Géog. mod.) ville forte &
confidérable des Indes , dans l'ile de Cey-
lan , en Afie, avec une citadelle. Elle eft aux
HoUandois. Lonçr. g8 . lat. 7.
COLOMMIÈP.S , ( Géog, mqd. ) ville de
francedans la Brie, fur le Morin. Long, çlo ,
4q; lat. 48, 48.
COLON , f. m. ( Co/72OT.) celui qui habite
une colonie , qui y défriche , plante & cul-
tive les terres. Les colons s'appellent encore
en France habitans Se concejjionnaires. Dans
les colonies angloifes on leur donne le nom
de planteurs , pour les diftinguer des aven-
' turiers. Voye:^ Aventuriers & Plan-
Ttt 1
^i6 COL
TEURS j yoye^ Colonie. Diâ. du Comm.
Colon , ( Jurifp. ) du latin colonus , Te
dit en quelques provinces ^om fermier d'un
bien de campagne. Colon paritaire y eft celui
qui , au lieu de fermage en argent , rend au
propriétaire une certaine jjartie des fruits en
nature. On l'appelle aulîî quelquefois mé-
tayer; mais ce nom ne lui convient que
quand la convention eft de rendre la moitié
des fruits. Quelques-uns ne rendent que le
tiers franc , plus ou moins ; ce qui dépend
del'ufage du lieu &c delà convention. (A)
Colon , {Anatom. ) le fécond &: le plus
ample des gros boyaux, autrement nommé
loyau culier. Quelques-uns dérivent ce mot
de KoùKimv , retarder y parce que c'eft dans Tes
replis que s'arrêtent les excrémens : d^autres
le tirent de koIk^v , creux , à caufe de la gran-
de cavité de cet inteftin; & c'eft de lui,
diient-ils^quelacoliqueapris fon nom.
Quoi qu'il en ioit , il commence lous le
rein droit , à la fin du cœcum , dont il n'eft
réellement que la continuation : il monte
devant ce même rein , auquel il s'attache ,
pafle fous la véiicule du fiel , qui lui com-
munique là une teinture jaune , &: il con-
tinue fa route devant la première coupure
du duodénum , laquelle il cache en partie ,
& y eft adhérent, Ainli il y a dans cet en-
droit une connexion très-digne d'attention,
entre le colon , le duodénum , le rein droit ,
& la véficule du fiel.
De-là l'arc du colon Te porte devant la
grande convexité de l'eftomac , quelguefois
plus bas , après quoi il fè tourne en arrière
fous la rate , ^ dans l'hypocondre gauche ,
& dcfcend devant le rein gauche , auquel
il eft plus ou moins attaché , & fous lequel
il s'incline enfuite vers les vertèbres , en (e
terminant au reâ:um par un double contour ,
ou deux circonvolutions à contre-fens , qui
repréfentent en quelque façon une S romaine
renverfée.
Ces derniers contours du colon (ont quel-
quefois multipliés , & s'avancent même dans
le côté droit du balTin : il règne le long de
ces contours une efpece de franges adipeufes,
nommées appendices graijfeufes du colon.
Toute l'étendue de la convexité du colon
eft diviféeen trois parties longitudinal es par
trois bandes ligamenteufes , qui ne font que
la continuation de celles du cœcum , &: qui
COL
ont la même ftrudure -ÀÏ eft alternativement
enfoncé entre ces trois bandes par des plis
tranfverfes , & alternativement élevé en
grofles boftès qui forment des loges qu'on
appelle cellules du colon. Les tuniques de cet
inceftin concourent également à la formation
de fes duplicatures & de fes cellules.
Ses cellules qui font nombreufes , fervent
à retenir quelque temps les excrémens grof-
fiers qui doivent fortir par l'anus \ car il
auroit été également incommode & défa-
gréable à l'homme de rendrecontinuellement
les fèces inteftinales: auiTi le colon a-t-il
plufieurs contours , outre une ample capa-
cité , afin de contenir davantage ; èc à l'ex-
ception du cœcum , il eft le plus large &: le
plus ample de tous les inteftins.
Leco/o/z aaulTi plufieurs valvules qui vien-
nent destrois bandes ligamenteufes, le fquel-
les en retréciflant cet inteftin , rendent fa ftruc-
ture épailfe & forte. On obferve entr'autres
valvules , celle qui fe trouve au commence-
ment de cet inteftin : elle empêche que ce qui
eft entré dans les gros boyaux ne retourne
dans l'iléum ; ce qui fait encore que les lave-
mens ne peuvent palier des gros inteftins dans
les grêles. C'eft par rapport à cette valvule
que l'iléum eft placé à coté du colon ; car s'il
eût été continu à ce dernier inteftin en ligne
droite, cette valvule auroit fouffert tout le
poids de la matière ç[ui tendroit à retourner;
au lieu qu'elle pafle facilement au deflus de
la valvule , & s'amafle dans le cœcum. On
peut voir cette valvule , après avoir lavé &:
retourné le boyau culier.
Il paroît par ce qu'on vient de dire, que les
matières fécales doivent s'accumuler dans le
colon y y féjourner , fe deftecher , & feputréfier
de nouveau; la membrane mufculeuie venant
enfuite à fe contracter , pouflè par l'aétioij de
Çqs fibresles excrémens j ufque dans le red:um.
Je voudrois que ces détails puflent donner
au leéleur quelque idé.e de la conformation
du colon, de fon cours, de fes ligamens
mufculeux , de fes cellules , & de fes val-
vules : mais c'eft ce que je ne pus efpérer ; il
faut voir tout cela fur des cadavres ; même
les préparations feches de cette partie en
donnent une très-faufle idée. Il fiut au(Tî
confulter les tables d^Euftachi , Véfale ,
Ruyfch, Peyer , Morgagni, Winflow.
N'oublions pas de remarquer que le coton
COL
a dans quelques fujets descontours différens
te tout à fait iînguirers. Palfin dit avoir une
fois trouvé ce boyau fitué au milieu du bas-
ventre , au deflus des autres inteftins. On
lit dans les mém. d*Edimb. une obfervation
fur le pafl'age de la valvule du colon entière-
ment couché. OnlitaufIidansl7/(/?. de l'aca-
dém. desfciences y ann. if^J , Pobfervation
d'une rumeur confidérable caufée par le
boyau culier rentré en lui-même , en confé-
quence d^un effort , &: ce boyau formoit un
long appendice intérieur.
M. Winflow prétend que la (kuation du
colon nous inftruit que pour retenir plus
long-temps les lavemens , on doit fe tenir
couché fur le coté droit i & que pour les
rendre promptement , on doit fe tenir fur
le coté gauche. V. Valvule du Colon.
Art. de M. le chev. DE Jau COURT.
Colon , {Gramm.) Ce mot eft purement
grec , K'JùKcùv membre , & par extenfîon ou
métaphore , membre de période : enfuite par
une autre extenfion quelques auteurs étran-
gers fe font iuervis de ce mot pour déligner le
tigne de ponduation qu'on appelle les deux
points. îsdais nos grammairiens françois di-
fent fimplement les deux points , & ne fe fer-
vent de colon que lorfqu ils citent en même
temps le grec. C'eft ainfi que Cicéron en a.
ufé : Inmembra quœdam quçe y.wKa. Grœci
vocantydifpertiebatorationem. {Cic. Brut. cap,
xliv.) Et dans Orator. cap. Ixijy il dit : Nefcio
cur, cum Graci Ko^{/.(fTit, & Kahu, nominent ,
nos , non reâ^, incifa & membra dicamus. {F)
COLONADE, f. f. {terme d'architecl.)
fuite de colonnes dilpofées circulairement ,
comme on les voit au bofquct de Proferpine
du Parc de Verfailles , nommé la colonade.
Celles qui font rangées fur une ligne droite
s'appellent communément périjlyle. Voye:^
Plristyle.
Périjlyle eft le terme d'art pour les colo-
nades droites ; & colonade eft le mot dont on
fe fert vulgairement pour ces mêmes colona-
des ; ainfi on emploie ce terme en parlant
du magnifique périftyle du vieux Louvre ,
monument de la grandeur de* Louis XIV ,
du génie de Perrault & du zèle de Colbert j
ouvrage que le cavalier Beinin admira en
arrivant à Paris , &: qu'on a mafqué d'une
manière barbare par les bâtimens gothiques
dont on l'a environné 3 jufque-là que plu-
COL 517
fleurs habitans de Paris ne connoifTent pas ce
morceau d'architedure, l'un des plus beaux
qu'il y ait au monde.
Une colonade paliflyh eft celle dont le
nombre de colonnes eft fi grand , qu'on ne
fauroit toutes les appercevoir d'un même
coup d'œil : de ce genre ç.Çi\iL colonade de la
place de S. Pierre de Rome , qui tonfifte en
deux cents quatre-vingt-quatre colonnes de
l'ordre dorique , toutes ayant plus de quatre
pies & demi de diamètre , & de marbre
tiburtin. (P)
CoLONADES v%RTES, {Jardin^ font des
ornemens extrêmement curieux dans les jar-
dins , mais d'une exécution très-difficile :
nous n'en voyons prefque que dans les j ardins
de Marly. L'orme mâle & le charme y font
plus propres que tous les autres arbres. (iC)
COLON AILLES, f. f. {Vannerie.) ce
font des brins d'ofier ou d'autre bois plus
gros que ceux dont le refte de l'ouvrage eft
travaillé. Ils font diftribués à quelque dif-
tance les uns des autres , & fortifient Pou-
vrage de la bafe duquel ils s'élèvent parallèles
les uns aux autres jufqu'à fes bords fupé-
rieurs.
COLONAISON , f. f. terme d'architec^
ture dont plufieurs anciens architectes fe font
fervis pour fignifier une ordonnance de co-
lonnes.
COLON ATE, {Myth:) furnom de Bac-
chus 3 ainfi appelle du temple qu'il avoit fur
une éminence appelléc Colonna auprès de
Lacédémone en Laconie dans lePéloponef^.
COLONEL , f. m. {Art^ milit.) oflScier
qui commande en chef un régiment , foitde
cavalerie , foit de dragons.
Skinner tire ce nom de colonie , préten-
dant que les chefs de colonie , appelles co/o-
niales , pouvoient bien avoir donné le nom
aux chefs militaires. Voye-^^ Colonie.
Dans les armées de France & d'Efpagne,
le nom de co/o/ze/eft particulièrement aftedé
àl'inflmterie & aux dragons , ceux qui com-
mandent la cavalerie étant appelles mejîres
de camp.
Le titre de colonel eft donné à celui qui
commande un régiment de dragons , parce
que les dragons font réputés du corps de l'in-
fanterie. On le donne aufïî à celui qui com-
mande un régiment de cavalerie étrangère.
Il eft pareillement donné à celui qui eills
5i8 COL
chef d'un régiment de la milice bourgeoijfe '
<ians une ville. Il y a à Paris feize de ces for-
tes de colonels , &; un colonel des archers de
la ville.
Les colonels d'infanterie n'ont ce titre que
depuis la fuppreflîon de la charge de colonel
gênéralàc Tinfanterie en 1 66 1 . V. Colonel
GÉNÉRAL D£ l'InFANTERIE FRANÇOISE.
Il y a des colonels en pie , des colonels
réformés , ÔC des colonels de commiffion.
Les colonels réformés ont à proportion dans
les régimens d'infanterie les mêmes préroga-
tives , que les meftres de caijip réformés dans
. les régimens de cavalerie.
Les colonels en pié ont aullî à proportion
la même autorité fur leurs fubalternes , que
les meftres de camp fur les officiers infé-
rieurs dans les régimens de cavalerie; ils
ont droit d'interdire les capitaines & les
fubalternes de leurs régimens quand ils man-
quent au fcrvice.
Lorique dans une place fermée ou dans
une garnifon il fe rencontre un colonel, c'eft
lui qui y commande, s'il n'y a pas de gou-
verneur ou de lieutenant de roi , ou quel-
qu-'autre officier qui ait commiiïion de com-
mandant de la place.
Dans un arrangement de bataille le pofte
de colonel eft à la tête du régiment trois pas
avant les capitaines ; mais dans le moment
de combattre , il ne doit déborder que d''un
pas environ le premier rang , pour voir plus
aifément la di^ofition du régiment à droite
ik à gauche. Les armes du colonel font Pépéc,
l*bfponton & les piftolçts , & tout au plus,
s'il veut fuivrejes ordonnances , la calotte de
fer dans le chapeau , ISc h cuirafife. Fbje^
MeSTRE DE CAMP.
Colonel général de l'Infanterie
PRANçoisF , étoit autrefois le premier offi-
cier de l'infanterie. Cette charge fut érigée
en charge de la couronne par le roi Henri III,
en faveur du duc d'Epernon.
Ce prince attribua au colonel général le
Î>ouvoir de nommer généralement à toutes
es charges qui vaqueroient dans Pinfanterie
françoife , lans excepter même celle de mei^
tre de camp du régiment des gardes. Il lui
donna aufli une juftice particulière pour
juger de la vie & de l'honneur des gens de
guerre , fans être obligé d'y appeller d'autres
o^ciers que les fiens. Ilaugmenta les appoin-
COL
temenè de fa charge , 5c il y attacha de pîuf
une groffe penfîon. Il tiroit outre cela 6 den.
pour livre fur tous les paicmensdu régiment
des gardes, ce qui montoit à une grolle fom-
me. Les honneurs qu'on lui rendoit étoicnt
extraordinaires: lagardeécoit montée devant
fon logis par deux compagnies avec le dra-
peau , '& le tambour battoit toutes les fois
qu'il entroit ou fcitoit. Toutes les prérogati-
ves attribuées à cette place, qui rendoient cet
officier trop puitlant & maître, pour ainfî
dire, de toute l'infantericdonnerent lieu à la
fuppreffion.de cette charge. Cette fuppref.
fion arriva à la mort du fécond duc d'Epcr-
non , eni 66 1 . Feu M. le duc d'Orléans , ré-
gent du royaume, la fit rétablir en faveur de
M. le duc d'Orléans fon fils , en i yi i ; mais
ce prince ayant prié S. M. d'accepter fa dé-
miffion de cet office , il fut de nouveau fup-
primé par l'ordonnance du 8 déc. 1 730 , &
S. M. a ordonné que les meftres de camp de
fes régimens d'infanterie françoife & étran-
gère porteroient à l'avenir le titre de colonels.
Il y a en France trois colonels généraux ,
qui font celui des Suilfes & Grifons, celui de
la cavalerie, & celui des dragons : mais outre
que ces corps ne font pas aulli confîdérables
que celui de l'infanterie , ces colonels n'ont
pas le même pouvoir fur leur corps que celui
de l'infanteri; en avoit fur l'infanterie, C'eft
le roi qui nomme à toutes les charges ; les
officiers font feulement obligés de prendre
l'attache du colonel général. Dans les corps
où il y ann colonel général , les commandans
des régimens portent le titre de mefîres de
camp. Fôye:[MESTRE de camp. (Q)
Colonel-lieutenant, c'eft en France,
dans les régimens des princes , l'officier qui
aie régiment pour le commander en fon ab-
fence. ( Q ^
COLONIA , ( Jurifpr. ) dans le for ou
coutume de Bearn, rubrique depenasy art. z,
fîgnifie dommages & intérêts. {A)
COLONIE , f f. {HiJÎ. anc. mod. &
Comm. ) on entend par ce mot le tranfport
d'un peuple , du d'une partie d'un peuple ,
d'un pays à un autre.
Ces migrations ont été fréquentes fur la
terre , mais elles ont eu (buvent 4es caufes &
des effets différens ; c'eft pour les diftingucr
que nous les rangerons dans fix claftès que
nous allons caradtérifer.
COL
ï. Environ 350 ans après le déluge, le
genre humain ne formoit encore qu'une feule
famille : à la mort de Noé , fcs defcendans ,
déjà trop multipliés pour habiter eniemble
fe réparèrent. La poftérité de chacun des fils
de ce patriarche , Japhet , Sem 8>c Cham ,
partagée en différentes tribus , partit des
plaines 'de Sennaar pour chercher de ncu -
velles habitations , &c chaque tribu devint
une nation particulière : ainfi Ce peuplèrent
de proche en proche les diverles contrées de
la terre , à mefure que l'une ne pouvoir plus
nourrir Tes habitans.
Telle eft la première efpece de colonies ,
le befbin l'occafiona j fon effet particulier
fut la fubdivKîon des tribus ou des nations.
II. Lors même que les hommes furent
répandus fur toute la furface de la terre , cha-
que contrée n'étoit point allez occupée pour
que de nouveaux habitans ne puflent la par-
tager avec les anciens.
A mefure que les terres s'éloignoient du
ecntre commun d'où toutes les nations
étoient parties , chique famille féparée erroit
au gré de fon caprice , fans avoir d'habita-
tion fixe : mais dans les pays où il étoit rcfté
un plus grand nombre d'hommes , lefenti-
ment naturel qui les porte à s'unir , & la
connoifïànce de leurs befoins réciproques ,
y avoient fiarmé des fociétés. L'ambition , la
violence, la guerre , te même la multiplicité,
obligèrent dans la fuite des membres de ces
fociétés de chercher de nouvelles demeures.
C'eft ainfi qu'Inachus , phénicien d'ori-
gine , vint fonder en Grèce le royaume d' Ar-
gosj dont fa poftérité fut depuis dépouillée
parDanaiis,autre aventurier forti de l'Egypte.
Cadmus n'ofant reparoître devant Agenor
fon père , roi de Tyr, aborda fur les confins
de la Phocide , & y jeta les fondemens de
la ville de Thebes. Cécrops , à la tête d'une
colonie égyptienne , bâtit cette ville , qui de-
puis, fous le nom à' Athènes, devint le temple
des arts & des fciences. L'Afrique vit fans
inquiétude s'élever les murs de Carthage ,
qui la rendit bientôt tributaire. L'Italie re-
çut les Troyens échappés à la ruine de leur
patrie. Ces nouveaux habitans apportèrent
îeursloix & la connoillance deleurs arts dans
les régions où le hazard les conduifit ; mais
-' ils ne formèrent que de petites fociétés , qui
prei<^ue toutes s'érigèrent en répubiiqiies.
COL 515)
La multiplicité des citoyens dans un. terri-
toire borné ou peu fertile , alarrcoit la li-
berté : la politique y remédia par l'écablifl'e-
ment des colonies. La perte même de la li-
berté , les révolutions , les fadions enga-
geoient quelquefois une partie du peuple à
quitter fa patrie pour former une nouvelle
fociété plus conforme à fon génie.
Telle eft entre autres l'origine de la plu-
part des colonies des Grecs en Afie , en Sicile,
en Italie , dans les Gaules. Les vues de con-
quête & d'agrandiflement n'entrèrent point
dans leur plan : quoiqu'aflez ordinairement
chaque colonie confervât les loix , la religion ,
& le langage de la métropole , elle étoit li-
bre , 5c ne dépendoit de fes fondateurs que
par les liens de la reconnoifîance 'y ou par le
befoin d'une défenfe commune : on les a
même vues dans quelques occaiîons , aiïèz.
rares il eft vrai , armées l'une contre Pautre.
Cette féconde efpece de colonies eut divers
motifs ; mais l'effet qui la caractérife , ce fut
de multiplier les fociétés indépendantes par-
mi les nations , d'augmenter la communi-
cation entre elles , & de les polir,
III. Dès que la terre eut allez d'habirans
pour qu'il leur devînt nécefîàire d'avoir des
propriétés diftinétes , cette propriété occa-
liona des différens entre eux. Ces diffé-
rens jugés par les loix entre les membres
d'une fociété ', ne pouvoient l'être de même
entre les fociétés indépendantes ; la force en
décida : la foibleffe du vaincu fut le titre
d'une féconde ufurpation , & |^ gage du
fuccès 5 Pefprit de conquête s'empara des
hommes.
Le vainqueur, pour afïurcr fcs frontières,
difperfoit les vaincus dans les terres de foii
obéiflance , &; d'iftribuoit les leurs à fes pro-
pres fujets, ou bien il fe contentoir d'y bâtir
&c d'y fortifier des villes nouvelles, qu^il peu-
ploit de fes foldats & des citoyens de fon état..
Telle eft la troilieme dpece de colonies ,
dont prefque toutes les hiftoires anciennes
nous fourniffent des exemples,fur-tout celle
des grands états. C'eft par ces colonies qu'A-
lexandre contint une multitude de peuples
vaincus fi rapidement. Les Romains, des
l'enfance de leur république , scn fervirent
pour ^accroître ; &: dans le temps de leur
vafte domination , ce furent les barrières q^i
la déiendirenrlong- temps îoiitre IcjàPartÊês
510
COL
& les peuples du Nord. Cette efpece de co-
lonie étoit une fuite de la conquête , &c elle
en t^ï la^^fùreté.
IV. Les excurfions des Gaulois en Italie ,
desGoths & des Vandales dans toute TEu-
rope èc en Afrique , des Tartares dans la
Chine , forment une quatrième efpece de
colonies. Ces peuples chalfés de leur pays par
d'autres peuples plus puilfins , ou par la mi-
fère , Gu attirés par la connoiflance d'un cli-
mat plus doux &C d'une campagne plus fer-
tile , conquirent pour partager les terres avec
les vaincus , & n'y faire qu'une nation avec
eux : bien differens en cela des autres con-
quérans qui fembloient ne chercher que d'au-
tres ennemis , comme les' Scythes en Afie ,
ou à étendre leurs frontières, comme les fon-
dateurs des quatre grands empires. »
L'effet de ces colonies de barbares fut d^ef-
faroucher les arts , & de répandre l'igno-
rance dans les contrées où elles s'établirent :
en même temps elles y augmentèrent la popu-
lation,& fonderentde {)uiffantes monarchies.
V. La cinquième elpece de colonies efl: de
celles qu'a fondées Pefprit de commerce, &
qui èmichiflent la métropole.
Tyr , Cartilage & Marleille , les feules
villes de l'antiquité qui aient fondé leur puif-
fànce fur le commerce, font aulli les feules
qui aient fuivi ce plan dans quelques-unes
de leurs co/o/z/e^.Utique bâtie par les Ty riens
près de zoo ans avant la fuite d'Elilïa , plus
connue fous le nom de Didon , ne prétendit
jamais à aucun empire fur les terres de l'A-
frique : eïle fervoit de retraite aux vaifleaux
des Ty riens , ainii que les colonies établies à
Malte & le long des côtes fréquentées par
les Phéniciens. Cadix , l'une de leurs plus
anciennes & de leurs plus fameufes colonies ,
ne prétendit j amais q u'au commerce de l'Ei -
pagne , fans entreprendre de lui donner des
loix. La fondation de Lilybée en Sicile ne
donna aux Tyriens aucune idée de conquête
fur cette île.
Le commerce ne fut point l'objet de l'éca-
bliflement deCarthage , mais elle chercha à
s'agrandir par le commerce. C'eft pour l'é-
tendre ou le conferver exclufîvement,qu'elle
fut guernere,& qu'on la vitdifputer à Rome
la Sicile , la Sardaigne. , PEfpagne , l'Italie ,
«& même fes remparts. Ses co^o/z/'ej le long des
côtes de l'Afrique , fur l'une <Sc l'autre mer
■ ^ ^ ^
jusqu'à Cerné , augmentoient plus fes ri-
chellès que la force de fon empire.
Marfeille , colonie des Phocéens chalfés de
leur pays &c enluite de l'île de Corfe par les
Tyriens, ne s'occupa dans un territoire fté-
nie que de fa pêche , de fon commerce , &
de ion indépendance. S es co/o/z/ej en Efpagne
& lur les cotes méridionales des' Gaules,
n'avoient point d'autres motifs.
Ceslorcesd'établiflèmens étoicnt double-
ment néceilaires aux peuples qui s'adon-
noient au commerce. Leur navigation dé-
pourvue du fecours de la boufible , étoit ti-
mide ; ils n'ofoient fe bazarder trop loin des
cotes , & la longueur néceflàire des voyages
exigeoit des retraites fûres & abondantes
pour les navigateurs. La plupart des peuples
avec lefquels ils trafiquoient , ou ne fe raf-
fembloient point dans" des villes , ou uni-
quement occupés de leurs befoins , ne met-
toient aucune valeur au fuperflu. Il étoit in-
dilpenfable d'établir des entrepots qui filîènt
le commerce intérieur , & où les vaifleaux
puflent en arrivant fiire leurs échanges.
La forme de ces colonies répondoit aflèz
à celle des nations commerçantes de l'Eu-
rope en Afrique & dans l'Inde : elles y ont
des comptoirs & des forterelfes, pour la
commodité & la fureté de leur commerce.
Ces colonies dérogeroient à leurinftitution ,
fi elles devenoient conquérantes , à moins
que l état ne fe chargeât de leur dépenfe ; il
faut qu'elles foient fous la dépendance d'une
compagnie riche &: exclufive , en état de
former & de iuivre des projets poUtiques.
Dans l'Inde , on ne regarde comme mar-
chands que les Anglois , parmi les grandes
nations de l'Europe qui y commercent ; fans
doute çarce qu'ils y font les moins puiflàns
en poflefîions.
VI. La découverte de l'Amérique vers la
fin du quinzième fiecle , a multijilié les colo^ ,
nies européennes , &: nous en préfente une
fixieme elpece.
Toutes celles de ce continent ont eu le
commerce &; la culture tout à la fois pour
objet de leur étabUflèment , ou s'y (ont tour-
nées : dès- lors il étoit néce flaire de conqué-
rir les terres , &: d'en chafler les anciens ha-
bitans , pour y en tranfporter de nouveaux.
Ces colonies n'étant établies que pour l'uti-
lité de la métropole , il s'enfiiit :
1°. Qu'elles
COL
1°. Qu'elles doivent être fous fa dépen-
dance immédiate, ôc par conféquent fous fa
protection.
2°. Que le commerce doit en être exclufif
aux fondateurs.
Une pareille colonie remplit mieux (on
objet, à mefure qu'elle augmente le produit
des terres de la métropole , qu'elle fait fub-
fîfter un plus grand nombre de fes hommes ,
& qu'elle contribue au gain de Ion com-
merce avec les autres nations. Ces trois avan-
tages peuvent ne pas fe rencontrer enlemble
dans des circonftances particulières ; mais
l'un des trois au moins doit compenfer les
autres dans un certain degré. Si la compen-
fàrion n'eft pas entière , ou iî la colonie ne
procure aucun des trois avantages , on peut
décider qu'elle eft ruineufe pour le pays de
la domination , & qu'elle l'énervé.
Ainfî le profit du commerce & de la cul-
ture de nos colonies eft précifément, i°. le
plus grand produit que leur confommation
occafione au propriétaire de nos terres,
les frais de culture déduits \ i*?. ce que reçoi-
vent nos artiftes 5c nos matelots qui travail^
lent pour elles , & à leur occaiion j 5°. tout
ce qu'elles fuppléent de nos befoins ; 4°. tout
le fuperflu qu'elles nous donnent à exporter.
De ce calcul , on peut tirer plufieurs con-
féquences :
La première eft que les colonies ne feroient
plus utiles , fi elles pouvoient fe paftèr de la
métropole : ainfi c'eft une loi prilè dans la
nature de la chofe , que l'on doit reftreindre
les arts & la culture dans une colonie , à tels
& tels objets , fuivant les convenances du
pays de la domination.
La féconde conféquence eft que fi la co-
lonie entretient un commerce avec les étran-
gers , ou que Ç\ l'on y confbmme les mar-
chandifes étrangères, le montant de ce com-
merce & de ces marchandifes eft un vol fait
à la métropole ; vol trop commun , mais
punifïàble par les loix, & par lequel la force
réelle & relative d'un état eft diminuée de
tout ce que gagnent les étrangers.
Ce n'eft donc point attenter à la liberté de
ce commerce , que de le reftreindre dans ce
cas i toute police qui le tolère par fon indif-
férence , ou qui laiftè à certains ports la fa-
cilité de contrevenir au premier principe de
l'inftitution des colonies, eft une police d^
Tome VIII,
COL 5ir
trudive du commerce , ou de la richeflè
d'une nation.
La troifieme conféquence eft qu'une co^
lonisftïs. d'autant plus utile , qu'elle fera plus
peuplée , Se que fes terres feront plus culti-
vées.
Pour y parvenir furcment , il faut que le
premier établiftèment fe faftè aux dépens de
l'état qui la fonde ; que le partage des fuccef-
fions y foit égal entre les enfans , afin d'y
fixer un plus grand nombre d'habitans par
la fubdivifion des fortunes ; que la concur-
rence du commerce y foit parfaitement éta-
blie , parce que l'ambition des négocians
fournira aux habitan? plus d'avances pour
leurs cultures, que ne le feroient des com-
pagniescxclufives, &c dès-lors maîtreftès tant
du prix des marchandifes, que du terme des
paiemens. Il faut encore que le fort des ha-
bitans foit très-doux , en compenfation de
leurs travaux & de leur fidélité ; c'eft pour-
quoi les nations habiles ne retirent tout au.
plus de leurs colonies, que la dépenfe des
forterefles Ôc des garnifons j quelquefois
même elles fe contentent du bénéfice général
du commerce.
Les dépenfes d'un état avec fos colonies,
ne fe bornent pas aux premiers frais de leur
établifïèment. Ces fortes d'entreprifes exigent
de la conftance , de l'opiniâtreté même , à
moins que l'ambition de la nation n'y fupplée
par des efforts extraordinaires ; mais la conf-
tance a des effets plus fiirs & des principes
plus folides : ainfi jufqu'à ce que la force du
commerce ait donné aux colonies une efpecc
de confiftance , elles ont befoin d'encoura-
gement continuel , fuivant la nature de leur
pofition &c de leur terrain} fi on les néglige ,
outre la perte des premières avances & du
temps , on les expofe à devenir la proie des
peuples plus ambitieux ou plus avSbifs.
Ce feroit cependant aller contre l'objet
même des colonies , que de les établir en dé-
peuplant le pays de la domination. Les na-
tions intelligentes n'y envoient que peu à
peu le fuperflu de leurs hommes, ou ceux
qui y font à charge à la fociété : ainfi le point
d'une première population eft la quantité
d'habitans néccfïàires pour défendre le cane-
ton létabh contre les ennemis qui pourroient
l'attaquer ; les peuplades fuivantes fervent à
l'agrandiflement du commerce; l'excès de
Vvv
V
It
COL
h populVtion feroit la quantité d'hommes
inutiles qui s'y trouTeroient , ou la quantité
qui manqueroit au pays de la domination.
Il peut donc arriver des circonftances où il
feroit utile d^empêcher les citoyens de la mé-
tropole de fortir à leur gré pour habiter les
colonies en général , ou telle colonie en parti-
culier.
Les colonies de l'Amérique ayant établi
une nouvelle forme de dépendance Se de
commerce, il a été nécelîàire d'y faire des
loix nouvelles. Les légiflateurs habiles ont eu
pour objet principal de favorifer l'établilîe-
ment Se la culture : mais lorfque l'un &c l'au-
tre font parvenus à une certaine perfection ,
il peut arriver que ces loix deviennent con-
traires à l'objet de l'inftitution , qui eft le
commerce; dans ce cas elles foilt même in-
juftes, puifque c'eft le comm.erce qui par
ion aélivité en a donné à toutes tes colonies
un peu floriflàntes. Il pviroîtroit donc conve-
nable de les changer ou de les modifier , à
xnefure qu'elles s'éloignent de leur efprit. Si la
culture a été favorifée plus que le commerce ,
c'a été en faveur même du commerce ; dès
que les raifons de préférence ceflènt j l'équi-
libre doit être rétabli.
Lorfqu'un état a plufieufs colonies qui
peuvent communiquer entr'elics, le véritable
iecret d'augmenter les forces ôc les richcfles
de chacune , c'eft d'établir entr-'elles une cor-
refpondance &c une navigation fuivie. Ce
commerce particulier a la force ôc les avan-
tages du commerce intérieur d'un état, pour-
vu que les denrées des colonies ne foient ja-
mais de nature à entrer en concurrence avec
celles de la métropole. Il en accroît réelle-
ment la richefle , puifque l'aifance des colo-
nies lui revient toujours en bénéfice , par les
confomimations qu'elle occafione : par cette
même raifon , le commerce aftif qu^elles
font avec les colonies étrangères , des denrées
pour leur propre confommation , eft avanta-
geux,s^ileft contenu dans fes bornes légitimes.
Le cornmerce dans les Colonies ôc avec el-
les, eftaflujetti aux maxirties générales , qui
par-tout le rendent floriflant: cependant des
circonftances particulierespeuvent exiger que
l'on y déroge dans l'adminiftration : rout doit
changer avec les temp^; & c'eft dansîe^arti
que l'on tire de ces charigemens Forces ^ que
tonfifte h fuprême habileté.
COL
No«s avons vu qu'en général la IH^erté
doit être reftreinte en faveur de la métropole.
Un autre principe toujours conftant , c'eft
que tout exclufif 5 tout ce qui prive le négo-
ciant & Phabitant du bénéfice, de la con-
currence, les péages, les fervitudes , ont des
effets plus pernicieux dans une colonie , qu'en
aucun autre endroit ; le commerce y eft fi
reft'erré , que l'impreflion y en eft plus fré-
quente ; le découragement y eft fuivi d'un
abandon total : quand même ces effets ne
ieroient pas inftantanés , il eft certain que
le mal n^en feroit que plus dangereux.
Ce qui contribue à diminuer la quantité
de la denrée ou à la renchérir , diminue né-
ceftairement le bénéfice de la métropole , &
fournit aux autres peuples une occafion fa-
vorable de gagner la fupériorité, ou d'entrer
en concurrence. ,
Nous n'entrerons point ici dans le détail
des diverfes colonies européennes à l'Améri-
que , en Afrique , ôc dans les Indes orien-
tales , afin de ne pas rendre cet article trop
long : d'ailleurs la place naturelle de ces ma-
tières eft au commerce de chaque état. Voy^
les mots France, Londres, Hollande,
Espagne, Portugal, Danemarck.
On peut confulter furies colonies ancien-
nes la Genefe, ckap. x. Hérodote, Thucydide,
Diodore de Sicile , Strabon , Juftin, la^éo-
graphie facrée de Sam. Bochart, l'hijfciredu
commerce Ù de la navigation des anciens, la
dijfertation de M. de Eougainville/z/r les de^
Voirs réciproques des métropoles & des^colonies
greques : à l'égard des nouvelles colonies ,
M. Melon dans fon ejfai politique fur le com-
merce , ôc r efprit des loix , ont fort bien traité
la partie politique : fur le détail, on peut
confulter les voyages du P. Labat , celui de
dc« Antonio de Ulloa , de M. Fraizier , &
le livre intitulé commerce de la Hollande. Cet
article efi de M. V. D. F.
* COLONNAIRE, f. m. {mfi. anc.)
columncrium , impôt mis flif les colonnes
dont on ornoit les maifons : on dit que ce
fut Jules Célàr qui l'imagina, afin d'arrêter
le luxe de l'architedture , qui fe remarquoit
d'une manière exorbitante dans les bâtimens
des citoyens.
COLONNE, f. f. ferme d'archkeBure , du
latin cbhimna , qui a été fait , félon VitruVe,
lie tûîutikn , f^jaikm Hon entetid fousxre
COL
nom une e/pece de cylindre , qui diffère du
pilier en ce que la colonne diminue à fbn ex-
trémité fupérieure en forme de cône tron-
qué , & que le pilier eft élevé parallèlement.
Sous le nom de colonne l'on comprend les
trois parties qui la compofent : favoir fa
bafc , ion fuft, & fbn chapiteau. Nous nous
appliquerons ici particulièrement à ion fuft ,
après avoir dit en général qu'il eft cinq ef-
peces de colonnes^ favoir la tofcane, la dori-
que , Honique , la corinthienne , & la com-
pofite, fans en compter une infinité d'autres
qui tirent leurs noms de la diverfité de leur
matière , de leur conftru<5lion , de leur for-
me, de leur difpofition, de leur ufage , Ê'c.
Voye^ Chapiteau , voyeT^auJfi Base.
Le fuft des colonnes diffère par leur dia-
mètre -y la colonne tofcane en ayant fept de
hauteur , la dorique huit , Tionique neuf,
la corinthienne & la compofite dix. Voyei^
Ordrf. Les anciens & les modernes s'y
font pris différemment pour k diminution
du fuft des colonnes : les premiers les ont
fait diminuer depuis la ba(e jufqu'au fom-
met; enfuite ils les ont feulement confer-
vées parallèles dans leur tiers inférieur , ne
les diminuant que dans les deux tiers fupc-
rieurs : la plus grande partie âtts modernes ,
tels que Philibert , Delorme , Manfart , &
Perrault, les ont diminuées haut & bas, c'eft-
à-dire ont porté leur véritable diamètre à
Textrémité fupérieure du tiers inférieur , &
les ont dirqinuées vers les deux extrémités.
Cette dernière manière , quoique allez gé-
néralement approuvée par nos architectes
françois, n'eft cependant pas toujours bonne
à imiter; car il réfulte de cette manière que
le foible porte le fort , ce qui eft contre toute
règle de vraifemblance & de folidité; ce
qui devroit faire préférer les colonnes paral-
lèles dans leur tiers inférieur , &c les dimi-
nuer feulement depuis ce tiers jufqu'àleur
fommet. Les architedes ont aufîi différé fur
la quantité de diminution qu'ils dévoient
dpnner au diamètre fupérieur des colonnes ;
Vitruve a prétendu que plus les colonnes
avoient d'élévation . & moins elles dévoient
avoir de diminution ; parce qu'étant plus
éloignées de Pœil du fpedateur , alors par
l'effet de l'optique , elles diminuoient d'elles-
mêmes. Ce précepte fans douté eft judicieux;
mais il n'en faut pas moins prévoir ii ces
COL 52J,
' colonnes font ou coloflfàles , ou ilblées , oa
flanquées , ou adoffées, ou accouplées; car,
félon ces différentes fituations, il convient
d'augmenter ou de diminuer le fuft fupé-
rieur des colonnes ; ce qui exige une expé-
rience fort au deftus, à cet égard, de la
théorie : pour cette raifon nous dirons en
général , que les archite<51:cs qui ont écrit
depuis VitruTC font aflez d'accord , que les
colonnesau. fommet de leur diamètre fupérieur
aient un fixieme de moins qu'à leur diamètre
inférieur, &: cela indiftindement pour les cinq
ordres de colonnes dont nous venons de pax-
1er ; quoique Vignole , par une contradic-
tion qui n'eft pas convenable , ait établi une
moindre diminution à la colonne tofcane
qu'aux autres , qui ont néanmoins un carac-
tère plus léger & plus élégant.
Il faut obferver que la diminution des
colonnes ne fe détermine pas par deux lignes
droites , n^ais par des courbes nommées con-
choïdes {}'cyeTf^ Conchoïdes) , "qui donnent
beaucoup de grâces à leur fuft en empêchant
de former des jarrets qui deviendroient iné-
vitables , fî leur diminution étoit déterminée
par des lignes droites : on ufe de ce même
moyen pour Xtscolonv.es renflées , c'eft-à-dirc
pour celles qui font diminuées haut & bas ,
& dont nous avons déjà parlé.
Les fufts des colonnes font fufceptibles de
diverfesricheflès, félon qu'ils appartiennent
aux differcns ordres. Nous allons en parler
en particulier.
Le fuft tofcan eft le plus ordinairement
tenu liflè , comme ceux du palais royal , de:
l'orangerie de Verfailles , ùc. cependant on
revêt quelquefois fon fuft de boftàgcs con-
tinus, comme ceux du Luxembourg , ou
alternatifs, comme ceux du château neuf
de Saint-Germain-en-Laye : cesbofïàges font
quelquefois vermiculésou ornés de congéla-
tion , tels qu'il s'en remarque de cette der-
nière efpece à la grotte du jardin du Luxem-
bourg. L'on voit à Paris au guichet du Lou-
vre du côté de la rivière, un ordre toican
revêtu de bolfages enrichis de fort beaux
ornemens; mais dont le travail délicat &:
recherché n'a aucune analogie avec la rufti- •
cité de l'ordre.
Le fuft dorique fe tient encore afl[èz ordi-
nairement liife : quelquefois on le revêt àc
boflàges alternatifs, comme au Luxem-
V v V 1
514 COL
bourg ; mais plus communément on l'orne
de cannelures {voye^ Cannelures) fepa-
rées par des lifteaux , comme il s'en voit au
portail S. Gervais , dont le tiers inférieur
efttenu liflepour plus de (implicite. Yignole
a propofé des cannelures à l'ordre^ dorique
fans liftcau ; mais ces cannelures fontnon-
ieulement trop fragiles , mais aurti elles font
peu propres à exprimer la virilité , qui eft
le véritable caradere de 1 ordre dorique ,
ainfi que nous l'avons obfervé ailleurs.
Le fuft ionique eft prefque toujours orné
de cannelures ; mais comme fon diamètre
eft plus élégant que le dorique , au lieu de
vingt on €n diftribue vingt-quatre autour de
fa circonférence , & l'on ajoute aux lifteaux
qui les féparent, des filets ou d'autres mou-
lures pour les enrichir , ainfi qu'on l'a ob-
fervé aux colonnes ioniques des galeries du
château des Tuileries , du coté des jardins ,
à celle des colonnes du veftibule du château
de Maifons , &c. Ces cannelures régnent
ordinairem^ent dans toute la hauteur du fuft
des colonnes ; mais dans leur tiers inférieur
l'on ajoute des rofeaux ou rudentures {roye-^
RuDENTUREs), qui par leurs formes con-
vexes altèrent moins la folidité inférieure de
la colonne : de ces rofeaux fortentle plus ibu-
\tni des graines , des feuilles , & des fleurons,
qui forment un agréable effet ; ainfi qu'on
l'a pratiqué aux colonnes des Tuileries , dont
les tiges de quelques-unes font fufelées d une
manière inimitable. Au refte on doit observer
que ce genre de richeflè devroit être rélervé
pour l'ordre corinthien , malgré l'exemple
célèbre que nous citons",^ malgré celles du
veftibule du château de Maifons , qui étant
d'ordre dorique , en font encore moins fuf-
ceptibles , quoique renfermées dans Tinté-
rieur du bâtiment.
L'on voit des co/on/zw ioniques au palais
des Tuileries , où au lieu de cannelures , on
a introduit des boflages à bandelettes , enri-
chis de membres d'archite<5ture & d'orne-
mens aflcz précieux : mais il n'eft pas moins
vrai que cette' forte d'enrichiflement eft peu
convenable à cet ordre , par la raifoii que
les hommes intelligcns , accoutumes au genre
de beauté qui fe remarque en général dans
le rapport de la hauteur d'une colonne avec
■ ion diamètre , croient qu'il eft détruit , lorf-
que par des bolîages horizontaux , ( voye:^
COL
Bossage ) l'œil ne peut iâns obftacle par-
courir fon fuft fans diftradtion.
Les fufts corinthien & compofite font fuf-
ceptibles des mêmes ornemens dont nous
venons de parler , c'eft-à-dire de cannelures
que l'on orne plus ou moins de lifteaux , de
rudentures , &c. Mais nous remarquerons
qu'aujourd'hui oùilfemble qu'on porte en
général toute fon attention à la décoration
intérieure des bâtimens , Fon fait peu d'u-
fage des cannelures dans les dehors , même
jufques dans nos édifices facrés ; exemple ,
les portails de faint Roch , des Petits-Peres ,
de l'Oratoire , ùc. où le fuft des colonnes qui
y font employées eft fans cannelures , & où
l'on a fupprimé prefque tous les ornemens
des entabîemens.
Quelquefois Ton fait le fuft des colonnes
en fpirale , qui pour cette raifbn font nom-
mées torfes ; telles que celles qui fe voient
au maître autel de S. Pierre à Rome, celles
de l'abbaye S. Germain-des-Prés , des Inva-
Hdes , & du Val-de-Grace à Paris; ces co-
lonnes font ornées de feuillages , de rinfeaux ,
de pampres , & autres ornemens arbitraires ,
allégoriques , ou Symboliques.
Les colonnes étant faites pour foutcnir un
fardeau , la raifon veut qu'on leur donne
toute la force qu'elles peuvent avoir , &
qu'ainfi il femble que ce foit un défaut &
une inconféquence en architecture de les
affoiblir par des retours qui les éloignent
encore de la perpendiculaire. Cette réflexion
eft jufte. AufTi ces colonnes de pur ornement
ne doivent point s'employer dans de gran-
des conftru6tions , & dans les endroits qui
demandent de la folidité , mais feulement
dans les lieux de diftinélion , comme les au-
tels , les tombeaux , les fallons , ùc. parce
qu'alors ces colonnes n'ayant point de gros
fardeaux à porter , on peut donner davan-
tage à la décoration , & faire moins d'atten-
tion à la folidité.
Les colonnes torfes font tournées en vis
atec fix contours ou circonvolutions. Voici
la manière de les tracer. On commence par
tracer une colonne ordinaire hflè , lui don-
nant les proportions qu'elle doit avoir ,
commue fi elle ne devoit pas être torfe. Telle
eft la colonne A B CD yfig. 7 de la planche II
d'archiîeâure , Suppl. des planches. Tirez en-
fuite Taxe E JPque vous diviferez en vingt-
COL
quatre parties égales. Tirez fur chacune de
ces parties des perpendiculaires à l'axe E F
qui feront toutes parallèles entr^elles, étant
autant de diamètres de la colonne , comme
les lignes G H., I K. Divifez la moitié de cha-
cune de ces lignes , telles que LMôcL N ,en
quatre parties égales aux points z , 2. , 5 & 4.
Alors une pointe du compas fera au point z ,
& l'ouvrant jufqu^au point D , on tracera
Tare D O. Après cette première opération ,
divifez la ligne QRen quatre parties égales :
vous en prendrez trois pour une ouverture
de compas ; prolongez la même ligne Q R,
de trois de ces parties , ÔC du point S extré-
mité de cette prolongation portez l'autre
branche du compas en O , ôc tracez Parc
O P. Vous continuerez ainfi à tracer le refte
du contour de la colonne , tant en dedans
qu'en dehors de chaque côté. Comme les
diamètres de la colonne fuivent ces propor-
tions , les parties égales de chaque divifion
les fuivront aulïî , & vous aurez des con-
tours qui feront dans le même rapport ,
ce qui doit être pour que la vis de la colonne
foit dans les règles de Tart. Ce trait fervira
à tailler Pépure qui doit guider le cifeau des
apparcilleurs.
En général j lorfqu'une colonne furpafïe
deux ou trois pias de diametTe , on la nomme
colojfale ; telles que celle de Trajan à Rome ,
d'ordre Tofcan , qui en a huit , & qui eft
ornée de bas-reliefs qui repréfentent les prin-
cipales aétions de cet empereur dans la guerre
qu'il eut contre les Daces : ces bas-reliefs
ont été expliqués par plufieurs favans , &
Louis XIV lésa fait mouler en plâtre pour
en avoir des modèles -, preuve inconteftable
de la beauté de cet ouvrage célèbre. Il fe
voit encore à Rome une colonne coloflale ,
nommée celle à'Antonin , ainli qu'à Paris
celle nommée de Médias , dans l'emplace-
ment de Pancien hôtel de Soiflbns , qui
i^rvoit d'obfervatoire à la reine de ce nom ,
après Pavoir fait élever près de fon palais ,
dont cette colonne eft la feule chofe qui ait
été confervée. Ces trois colonnes coloflàles
dont nous venons de parler , ne font cou-
ronnées d'aucun entablement ; mais lêule-
ment élevées fur des piédeftaux , leur ex-
trémité fupérieure étant couronnée de figure
colodàlc , à Pexception de celle de l'hôtel de
Soiifoiis j ou l'ou voit les armatures de fer j
COL 525
propres à porter les inftrumens aftronomi-
ques dont cette reine faifoit ufage. (P )
Colonne , ( Hijî. anc. ) Dans la pre-
mière antiquité les colonnes ont fervi de mo-
numens hiftoriques. Jofeph ; liv. I, des
antiq/jud. ch. iij , rapporte que les enfans de
Seth érigèrent deux colonnes , l'une de pierre
& Pautre de brique , fur lefquelles ils gra-
vèrent les connoiflances qu'ils avoient .ac-
quifes dans l'aftrologie , & il ajoute que de
Ion temps on voyoit encore celle de pierre
dans la Syrie. Les Hébreux fe fervoient de
colonnes pour borner leurs héritages , de les
Perfes & les Grecs pour marquer les limites
des provinces. On écrivoit fur des colonnes
les loix , les coutumes , les traités de paix ,
ôc les alliances. Les Grecs en pofoient ordi-
nairement fur les tombeaux , avec des inf-
criptions ou des figures relatives aux morts
qu'ils renfermoienf, ôc les Latins imitèrent
cet ufage. Ils en érigeoient encore aux vain-
queurs , aux empereurs , ornées de bas-re-
liefs & de fculptures qui repréfentoient leurs
exploits. Telle eft la colonne trajane, monu-
ment élevé à la gloire de Trajan. On en
mettoit encore fur les grands chemins de
mille en mille pas , qu'on nommoit par cette
raifon colonnes milliaires. Les Romains dé-
iîgnoient ces milles par ces deux lettres , M.
P. avec un chiffre qui marquoit le nombre
des milles ; par exemple , M. P. XXII ,
miîlia paffiium viginti duo. Et les Gaulois qui
comptoient par Heues , exprimoient les dif^
tances par la lettre L. avec le nombre des
heues : ainfi dans les colonnes milliaires dé-
couvertes en France , \.. VII , fignifie leugce
ou leucce feptèm , fept lieues. ( G )
^ Colonne Antonine : elle flit éle-aé^ à
l'honneur de M. Aurele Antonin. Elle eft
creufe : on a pratiqué en dedans un efca-
lier de 206 marches. Elle a 175 piésgL hau-
teur , mefure ancienne , ou 1 60 memre ro-
maine d'aujourd'*hui , cmquante-fîx petites
fenêtres leclâiroienr. Le temps & le feu l'a-
voientbeaucf iip endommagée. On la répara
fous Sixte V. Ce pontife fit placer au haut
une ftatue de S. Paul fondue en bronze ôc
cioré £•; ornement afîèz barbare : car qu'y a-r-il
de plus mauvais goût , pour ne rien dire de
pis ;, que la ftatue d'un apôtre du chriftianifine
au haut d'an monument chargé desaétions
militaires d'un empereur païen} On y voir b
51^ COL
légion fulminante ; un orage épouvantable
conferve l'armée romaine prête à périr de
fôif, ôc met en fuite Tennemi. Elle eft pla-
cée en deçà & à droite délia Jîrada del Corfo.
On y entre par une porte pratiquée à fon
piédeftal : une plate-forme quarrée portant
une grille de fer lui fert de chapiteau. On
lit fur les faces de la plate-forme, fur la
première, Sixtus V; fur la féconde, S. Paulo;
fur la troiiieme , ^;?o/?. fur la quatrième,
pont. A. IIII. Sur Tune des faces du piédef-
tal on a placé Tinfcription fuivante : Sixtus
V y pont. max. columnam hanc ab omni impie-
ta:e expurgatam , S, Paulo apojîolo œrea ejus
Jiatua inaurata à fimmovertice pofuit. D.D.
an. M. DLXXXIX , pont. ÎV. Sur la fé-
conde face : Columnam hanc cochlidem , imp.
Antonino dicatam^ mifere laceravit, ruinofam-
que primes forma, rejîituit , anno millefimo D.
IXXXIX , pont. IV. Sur la troifieme : M.
Aurelius imp. Armenis , Parthis , Germanif-
que bello maxime déviais , triumpliakm hanc
columnam rébus gejlis injîgnem , imp. Anto-
nino pio patri dicavit. Et fur la quatrième :
Triumphnlis & facra nunc fum Chrijîi ver}
pium difcipulumqueferens, quiper crucis prœ-
dicationtm de Romanis Barbarifque triumpha-
vit. C'td une erreur que d'avoir attribué
cette colonne à Antonin le Pieux ; celle-ci
a été trouvée dans la fuite fous des maifons ,
d où Clément XI la fit tirer. Elle eft de mar-
bre tacheté de rouge , & femblable à celui
qui vient de Sienne en Egypte : elle a cin-
uante -cinq pies de hauteur. On lit fur un
e fes côtés : Divo Amonino Augujîo Pio ,
Antonius Augujîus , & verus Augujlus ,
fila. On voit ailleurs l'apothéofed'Antonin
&^ie pompe funèbre conduite par des gens
à ^ , achevai , en chars , ce furent fes
fils qui firent fculpter ces bas-reliefs après la
mort d| leur père.
CoroNNE BELLiQ^UE , columTw. belUca ,
petite colonne placée devant le temple de
Bellone à Rome derrière le cirque Flaminien ,
où eft maintenant le couvent di Tor defpec-
chi. Quand on déclaroit la guerre à des
peuples , le conful lançoit de delïus ou
contre cette colonne un dard vers la contrée
qu'ils habitoient.
Hinc folet ha/fa manu belliprœnuntia mitti;
Jti regcm & génies , cum placet arma capi.
Ovide.
l
COL
CoLOKNE DE CÉsAR , columna Ccefaris:
elle étoit de marbre de Numidie ; elle avoic
vingt pies de hauteur : on Pavoit élevée in
fora Romano , à l'honneur de Jules-Céfar.
On y lifoit VmÇcïvpûon parenti patrice. Le
peuple l'avoit en telle vénération qu'il y fai-
foit des iacrificcs , qu'il y terminoit fes dif-
fcrens , de qu'il y juroit par Céfar. Dolabella
la fit abattre , ôc Cicéron l'en loue. Il y en a
qui prétendent que ce ne fut dans les commen-
cemens qu'un autel , que le peuple & le faux
Marius avoient fait conftruire, qu'Antoine
éleva la colonne fur cet autel , & qae l'infcrip-
tion étoit parenti optimè merito.
■^.^OLONNE DE FEU Ù CoLONNE DE FU-
MEE , c'eft la même qui obfcure pendant le
jour , lumineufe pendant la nuit , fervit de
ligne au peuple juif pendant fa marche au
iortir d'Egypte , & pendant les quarante ans
de fon féjour dans le délert.
Colonnes du Tabernacle , columnce
atrii , piliers fur lefquels les rideaux furent
tendus autour du tabernacle : les uns difent
qu'ils étoient de bronze ; d'autres , de bois :
il y en avoit vingt du côté du nord , vingt
du côté du midi , dix à l'occident , dix à
l'orient ce qui fait foixante 5 à moins qu'en
comptant les piliers des angles pour deux ,
cela ne réduife le nombre à cinquante-lix.
Ces piliers avoient des appuis d'airain.
^ Colonne d'Hercule. On dit qu'Her-
cule arrivé à Gades, aujourd'hui Cadix en
Efpagne , fe crut aux extrémités de la terre j
qu'il fépara deux montagnes qui fe tou-
choient , Calpé & Abyla , l'une en Afrique
& l'autre en Europe , qu'il fit communiquer
l'Océan &: la Ivléditerranée \ & qu'il éleva
fur ces montagnes deux colonnes , avec cette
infcription ; non ultra. Quoi qu'il en foit , on
nomma cet enjroit/jorr^ Gaditancs ^ portes
de Gadita. Charles V, fuccefleur de Ferdi-
nand & d'ifabelle , fous qui la découverte
de l'Amérique s'étoit faite , changea l'infcrip-
tion , & liibftitua plus ultra au non ultra
d'Hercule.
Colonne lactaire , columna laclaria ,
elle étoit dans la onzième région de Rome :
toutes les mères y portoient leurs enfans par
fuperftition \ quelques-unes les y laiflbient
expofés par indigence ou par inhumanité :
onappelle maintenante lieu de cette colonne
la Pia^a Montanara,
COL
Colonnes légales , ( Hijî. anc. )éroient
chez les Lacédémoniens des colonnes élevées
dans les places publiques , où étoient gra-
vées fur des tables d'airain les loix fondamen-
tales de l'état.
Colonne Maenienne, columnaMœnia;
elle étoit dans la huitième région ; elle fut
élevée , félon quelques-uns , à l'honneur du
conful Maenius , après une vidoire rempor-
tée fur les Antiates ; félon d'autres , par un
certain Maenius qui s'étoit réfervé ce droit
en vendant fa maifon aux cenfeurs Caton
&: Flaccon , afin de voir de-là le combat
des gladiateurs \ comme la forme en étoit
particulière , on donna dans la fuite aux édi-
fices femblables le nom de Mceniana , dont
on a fait le nom mignani. Il eft mention de
deux colonnes ifiœnienncs ; c'eft au pié d'une
de ces deux colonnes que les triumvirs fur-
nommés capitales , jugeoient les voleurs &
autres bandits.
Colonnes rostrees ^columnœrojlratœ ;
c'étoit là qu'on attachoit les éperons des vaif-
féaux pris fur Pennemi. La première fut
élevée à l'occafion de la vidoire fur mer de
C . Duilius fur les Carthaginois. Elle étoit dans
le marché romain ; on la trouva en 1260
près de l'arc Septimien. Lé cardinal Alexan-
dre Farnefe la fit porter au capitole \ elle eft
de marbre blanc. Augufte en avoir fait conf-
truire au même lieu quatre autres femblables
des éperons des navires qui furent pris fur
Cléopatre.
Colonne Trajane , ( Uifi. anc. arch. )
monument à l'honneur de Trajan , mort
l'an y 17 de J. C. à l'âge de 64 ans, dans
une ville de Cilicie alors nommée Selinunte ,
depuis la ville de Trajan , TrajanopoVs , &
que les Turcs appellent à préient Tjlenos.
Un des plus fuperbes reftes de la magni-
ficence romaine eft la colonne Trajane , qui
a plus immortalifé l'empereur Trajan , que
toutes les plumes des hiftoriens n^auroient
pu faire.
Elle avoir 118 pies de haut, & l'on y
montoit par unefcalierde 1 8 5 degrés, éclairé
de 4 ç fenêtres : on y voyoit tout autour en
bas reliefs tous les exploits de Trajan , dont
après fa mort les cendres furent placées au
haut de cette colonne dans une urne d'or.
Un prince <qui le premier avoit ajouté de
fonordre cectt; expreflè condition aux yioeux
COL 5-17
publics qu*on feroit pour fa perfônne , " qu&
» ce ne feroit qu'autant qu'il veilleroit à la
» confervation de la patrie ; & que s'ilfai-
» foit rien qui y fut contraire , les dieux
» détournaflènt de defliis lui leurs regards Sc^
» leur protedion : » Ut Trajanum d'à fof-
pitem incolumenque prccjîarent yjî ben} rem-
publicam ex utilitate omnium rexerit ; fin con-
tra , ut ab illius cufîodia oculos dimoverent :
un prince qui penloit que le fouverain bon-
heur étoit de pouvoir faire tout le bien qu'on
veut , & le comble de la grandeur de pou-
voir faire tout le bien qu'on peut ; un prince
enfin qui , comme le remarque Pline le jeune
fonami , n'avoit point de plus grand modèle
à fe propofer que lui-même , un tel prince
méritoitfans doute les plus fublimes efforts
de Parchitedure , pour célébrer fa gloire &c
fes vertus.
Aufli le fénat & le peuple romain lui éri-
gèrent avec zèle ce maufolée , fi Pon peur
parler ainfi , en reconnoiftance de fes rares
qualités , & des grands fervices qu'il avoit
rendus à la république. ''
De plus , dit M. Rollin , dont je ne puis
m'empêcher de tranfcrire ici les réflexions ,
" le fénat & le peuple réunis voulant que la
mémoire de Trajan fût préfenre à tous les
fiecles , & qu'elle durât autant que l'empire ,
ils ordonnèrent que fes adions feroient gra-
vées fur le marbre du plus riche ftyle qui ait
jamais été employé. »
L'architedure fut hiftoriographe de cet
ingénieux genre d'hiftoire ; & parce qu'elle
devoir préconifer un romain , elle ne fe fervit
pas des ordres grecs, quoiqu'ils fuflènt incom-
parablement plus parfaits Se plus en ufage dans
l'Italie même, queles deux autres originaires
du pays , de peur que la gloire de ce mo-
nument admirable ne fe trouvât en quelque
façon partagée , & pour faire voir àudî qu'il
n'y a rien de ii fimple que l'art ne (ache perfec-
tionner. Elle choiiit donc la colonne de l'ordre
tofcan,quijufqu'alors n'a voit eu place quç
dans les chofes grolîîeres & ruftiques ; & de
cette maftè informe elle en fit naître le pl^s
riche&le plus noble chef-d'œuvre du monde,
que le temps a épargne &confervé tout entier
jufqu'à pré^nt , au milieu d'une infinité de
ruines dont Rome eft remplie.
C'eft: en effet , ajoute JvL Rollin , une es-
pèce de ôierveUle , <le. voir que le colyiee 3 le
jig COL
théâtre de Marcellus , ces grands cirques ,
ces rhermes de Dioclécien , de Caracalla , &
d'Antonin , ce fuperbe mole de la fépulture
d'Adrien , le feptizone de Sévère , le mau-
folée d'*Augufl:e , & tant d'autres édifices
qui fèmbloient être bâtis pour 1 éternité,
Ibient maintenant (î caducs & fi délabrés ,
qu'à peine peut-on remarquer leur ancienne
forme , pendant que la colonne Trajane , dont
la ftruéture paroiflbit beaucoup moins du-
rable , fubfifte encore en Ton entier.
Tout le monde fait que le pape Sixte V
a relevé cette colonne fous fbn pontificat , &
a fait mettre au-delfus la ftatue de S. Pierre :
on en trouve par-tout des eftampes. Voye-^
celles qui ont été gravées à Rome , & co-
piées dans nos beaux ouvrages des antiquités
romaines. {M. le chev. de Jau court.)
Obfervations fur la force des colonnes.
Comme on ne bâtit pas feulement avec le
bois y mais aulTi avec la pierre & le marbre ,
il icroit à (buhaiter pour le bien de l'archi-
tedrure , que nous eufïions des expériences
bien faites fur la force des colonnes de pierre.
M. Van Muflchenbroek a déjà là-deflus
fait quelques expériences , qu'il rapporte dans
izs Ejf. de phyf. il a pris une colonne quarrée
faite de terre glaife , & aufïï dure que la
brique rouge durcie par le feu : cette colonne
qui avoit onze pouces & demi de long, &
dont chaque côté étoit de tV d'un pouce ,
fut rompue par 195 livres : une pierre de
brème longue de douze pouces K- » & dont
chaque côté étoit de iV d'un pouce , fut rom-
pue par 150 livres : un marbre blanc un peu
veiné , long de treize pouces | , épais d'un
côté de î\ d'un pouce , & qui avoit de l'au-
tre côté l'épaiiTeur de ïV d'un pouce , fut
rompu par 150 liv.
Si l'on prend un pilier de pierre fait de
demi-pierres pofées les unes iur les autres ,
ayant l'épaifl'eur de trois pouces , la largeur
de fept pouces , & la hauteur de dix pies ,
on demande quelle charge pourra fuppor-
ter ce pilier de pierre , en fuppolant qu'il foit
bâti de briques rouges durcies par le feu.
Si ce pilier étoit de la même épaiflèur que
celle qu'avoit la colonne dans l'expérience
précédente , & qu'il fiit de la hauteur de dix
pies , il ne pourroit fupporter deux livres ,
parce que les forces (ont en raifbn inverfe
(des quarrés des hauteurs : mais fi l'on compte |
COL
qu'une pierre cft de la longueur de 7 pou-
ces, c'elt-à-diredix-feptfois plus large que
n'eft la colonne dans l'expérience ; alors ce
même pilier de mur qui a l'épaifleur de iV de
pouce , ôc la largeur de fept pouces, pourra
lupporter trente livres. Mais la pierre efi:
de l'épaiffeur de trois pouces , qui eftle côté
courbé par le poids dont il elt chargé ; ce
côté eft donc à celui de la colonne rompue
comme 36 à ; , dont les quarrés font
comme 1196 à 2 5 : c'eft pourquoi le pilier
de mur qui eft de la hauteur de dix pies , ne
pourra être chargé que de i/yj livres j
mais s'il étoit de l'épaifleur d'une pierre
entière , il pourroit iùpporrer un fardeau
quatre fois plus pefant.
Par conféquent un mur qui fera de l'épaiH
feur d'une demi-pierre , Ôc qui aura dix
piés de haut, pourra être chargé de i;;;
livres , autant de fois qu'il ferade la longueur
des pierres entières ou de fept pouces. Il eft
certain que s'il étoit fait de pierres plus
dures , il pourroit fupporter une charge
encore plus pefante avant que d'être renverfé.
Si l on compare la force d'un pilier de pierre
avec celle d'un pilier de bois de chêne , qui
foit aulfi de la hauteur de dix piés , Ôc donc
les côtés aient trois pouces ôc fept pouces ,
on trouvera que le bois de chêne pourra
fupçorter beaucoup davantage , ôc même
prelque 1800 livres.
Comme on élevé dans les églifes plufieurs
colonnes qui foutiennent tout le bâtiment ,
il l'on prenoit une colonne de marbre blanc
de la hauteur de quarante piés , Ôc dont
le diamètre feroit de 4 piés , elle pourroit
fupporter à-peu- près le poids de 10 j , oi i ,
085 livres. Ainfi l'on eft en état de calculer
quel poids étoient capables de foutenir les 1 17
colonnes du. temple de la Diane d'Ephefe,
qui étoient toutes d'une pièce de foixante
piés de hauteur.
Comme on bâtit fou vent des maisons à
deux portes qui donnent fur le coin des
rues , de forte que tout le poids de la fa-
çade repofe fur le poteau de ce coin , il n'eft
pas indifférent de favoir l'épaifleur qu'il
convient de donner à ce poteau ; mais il
leroit encore bon de calculer les avantages ,
les défavantages qu'il y auroit aie former
en colonnes de pierre par préférence , parce
que ce poteau doit fupporter fans aucun
danget
COL
danger le poids de la façade qui rcpole
fur lui. Voyt:^ Résistance des Solides.
{M. le chevalier de Jau COURT.)
Colonne de Cussy , {Antiq.) on ad-
mire en Bourgogne un des plus beaux mo-
numens de Tantiquité, unique en France &
peut-être dans le monde ; c'eft la colonne de
Cujfy , dont le P. Montfiucon attribue fauf-
fementla découverte à M. Moreiu deMau-
tour. Le dode Saumaife qui y fit un voyage
en iGzcf , connut le prix de ce bel ouvrage ;
après en avoir examiné le dellîn , la ftruc-
ture & les figures , il jugea que cette colonne
avoit été élevée en mémoire de la viétoire
que Célar gagna fur les Suilfes, à quatre ou
cinq lieues de Bibraéie. M. le confeiller de
la Mare la fit de(ïîner par le célèbre Jean
Dubois. Samfon la marque dans la carte du
dioceie d'Autun , qu'il donna en 1659. D.
Alartin en a inféré le plan dans iareZ/^/o/z des
Gaulois ; Sc M. Rollin en a fait mention
dans Y HiJIoire ancienne. M. Pafumot , lavant
profelleur de phylique à Auxerre,& connu
par fes do6tes recherches fur leg voies ro-
maines, a long-temps étudié cet antique,
qu'il a deflîné , & qu'il doit donner au
public avec une diflertation. En attendant
j'ai cru pouvoir donner la delcription qu'en
a faite M. ThomalTin , fameux ingénieur,
habile dans la connoiflance des antiquités ;
j'ajouterai plufieurs remarques à la delcrip-
tion de ce beau monument.
Cujfy-la -colonne , ainii nommé pour le
diftinguer de plufieurs autres villages de
mêmenom dans la province , eft uneparoilîe
du bailliage de Beaune, à trois lieues oueft-
nord-oueffc de Beaune , cinq d'Autun , &
à un quart du village d'Yvry, où palïent en
été les voitures de Paris à Lyon.
A deux portées de fufil de CuJfy , tirant
droit au nord , dans un fonds aflèz ouvert ,
au pié des chaumes d*Auvenet , connues par
le gibier & les plantes curieufes qu'on y
trouve , & par la voie romaine qui traverfe
ce canton , on voie une colonne de pierres en
plufieurs alïifes : elle a deux pies trois pou-
ces & demi de diamètre par le bas, & elle
eft élevée fur un double piédeftal.
Il ne refte de ce monument que les deux
piédeftaux , &: environ les deux tiers de la
hauteur de la colonne ; le refte y manque ,
favoir , le chapiteau & l'entablement.
Tome Vin.
COL 51-^
Le premier piédeftal n'eft qu'un foubaf-
fement , il a fept pies de hauteur , compris
fa bafe , qui n'eft qu'un chanfrein , (ànsmou-
lure & fans corniche , qui fe termine en
gorge ; il fait un plan quatre , ayant cepen-
dant les angles en pans-coupés & les races
concaves ; fa corniche eft un plinthe de fept
pouces d'épaifi^ur,faifant le même plan que
le deflous , & fur lequel polè le fécond pié-
deftal , qui eft celui de la colonne. Dans le
père Montfaucon , les trous ronds qui font
marqués fur ce plinthe , font imaginaires ,
il n'y en a point fur le lieu.
Le fécond piédeftal eft différent du fbu-
baflèment , en ce qu'il fait un plan oétogonc
parfait ; c'eft-à-dire , qu'il a nuit faces éga-
les , fur lefquelles il y a de belles figures en
demi-reliefs , qui repré (entent des divinités,
& dont on verra l'explication plus bas ; il n'a
point de bafe , & il a quatre pies neuf pou-
ces de hauteur, compris fa corniche , qui le
termine aulli en gorge , & qui eft très-belle ;
on y voit trois modillons fur chaque face
avec des rofes entre deux.
Sur ce piédeftal s'élève la colonne , dont la
bafe qui eft attique eft d'une très-belle pro-
portion , le refte du fuft de la colonne com-
pris. La bafe eft de treize pies trois pouces de
hauteur , faifant prefque les deux tiers de là
hauteur entière. Celle de tout l'édifice eft à
préfent de vingt-cinq pies fept pouces , non
compris le chapiteau &c l'entablement qui
manquent. Le P. Montfaucon n'eft pasexaâ:,
en portant la hauteur à vingt-huit pies. Le P.
Lempereur , jéfuite, dit, dans fes Dijfcrta^
dons , imprimées chez Cot, Paris, \joG ,
que les gens de Cz/^afluroient de fbn temps,
que la colonne étoit une fois auflî haute lorf-
qu'elle étoit entière ; mais c'eft une erreur ,
les proportions ne permettent pas de le croire.
Le fuft entier de la colonne étoit orné de
fculpture , à en juger par ce qui refte ; le bas
eft une efpece de moiaïque qui a troi^ pies
deux pouces de hauteur deftus la bafe ; cette
mofaïque eft compofée de plufieurs petites
bandelettes d'un pouce de largeur qui fe croi- ^
fent en rempanu autour de \xcolonne, & dont
les vuides forment de grands lofanges , rem-
plis par de beaux fleurons ; le refte de la co-
lonne eft chargé de plufieurs feuilles d'eau ,
la pointe en bas : on en compte encore feize
étages. Toute cette partie de l'édifice eft mal
Xxx
K
530 COL
repréfèntée dans le plan qu'en donne le P.
Montfaucon , SuppL t. II , page ZZ^f ; les
bandelettes formant les lofanges n'y font
point exprimées , & il prend les feuilles d'eau
pour de petites écailles , ce qui fait im mau-
vais effet.
Tout ce monument efl conftruit d'une
fort belle pierre rouflatre qui a pu être polie
comme du marbre; chaque alTife efl d'une
feule pierre , elles font toutes pofees à (te ,
c'efl-à-dire 5 fans mortier ni ciment , ma-
nière de bâtir volontiers obfervée parles an-
ciens dans les bâtimens de conféquence. Le
P. Lempereur dit que fes affiles étoient rete-
nues par des grampons d'airain qui ont été
enlevés par un feigneur de Cujfy.
M. ThomalTin avoir toujours regardé
cette colonne comme étant d'ordre corin-
thien par fon renflement , qui eft toujours
au tiers de fa hauteur par en bas ; car ce tiers
fe trouve ici de peu plus de deux diamètres
& demi du bas de la colonne : cette conjec-
ture fe vérifia par la découverte qu'il fît en
feprembre 17^4 , de Li partie fupérieure du
chapiteau de cette co/o/z/2e , qui eft à la grange
d'Auvenet , métairie à une lieue de la
Colonne, où un feigneur de Ciijfy la fît tranf-
porrer pour faire une margelle au puits de
cette métairie. M. Thomaffîn trompé parla
mauvailedefcription du prétendu chapiteau,
donnée par le P. Lempereur & par la ridi-
cule anecdote q^u^on en débitoitdans le pays,
avoit négligé d'aller vifîter cette pierre ;mais
s'y étant trouvé par hazard, il fut furpris d'y
voir la figure du chapiteau corinthien ; en
ayant pris les dimenfîons , il trouva que
cette margelle ne pouvoir venir que de la
colonne de CuJfy : même goût de travail &
même pierre. Suivant le diamètre du bas
de la colonne , ce chapiteau de voit avoir ^1
pouces de hauteur ; il étoit apparemment de
deux afiîles , car la partie fupérieure , la
feule qui fe trouve , n*à que. vingt pouces,
celle du deflous devoit en avoir douze de
hauteur ; 8c félon toutes les apparences elle
^ portoit les premières feuilles du cl-tapiteau,
mais on n'en voit plus aucun veftige.
Ce chapiteau déplacé n'eft pas moins fym-
bolique que le piédeftal de la colonne; au
lieu des rofes du tailloir on y voit fur cha-
cune des quatre faces une tête de divinité
païenne, auxquelles on a donné une grof-
COL
feur confidérable pour les mieux faire diftin-
guer d'en bas de h colonne, en forte qu'elles
occupent une bonne partie des faces du cha-
piteau , ce qui a empêché d'y mettre des vo-
lutes , desygettes, des colicoles , S-c. ce font
feulement de grandes feuilles d'acanthe qui
garni (lent le refte de chaque face du cha-
piteau , dont les revers du fommet qui fe
recourbent fous les angles du taillant , font
l'eifet des volutes. On voit dans Vignole des,
exemples de pareils fymboles fur des chapi-
teaux corinthiens anciens, où au lieu de
rofes du tailloir , ce font des têtes de divi-
nités, quoiqu'elles ne loient pas d'une pro-
portion i\ grofl'e que celle du chapiteau en.
queftion. L'une de ces têtes eft environnée
de rayons & n'a point de barbe , ce qui l'a
fait aifément reconnoître pour celle d'A-
pollon ; l'autre tête ayant une barbe fort
toufïue&: un air majeftueux fembleroit être
celle de Jupiter -Jatroifieme tête ,quoiqu'af-
fez effacée , eft auffi d'un homme barbu :.
elle eft frufte & porte quelque chofe qui peut
donner l'idée d'une dépouille de Uon & an-
noncer Hercule; pour la dernière tête il
n'y refte que la place , &: l'on n'y peut rien
diftinguer : les trois autres font belles & de
grand goût.
Il eftaifé de fe convaincre que cette pierre ,.
que M. Thomaftin affure être le chapiteau
de la. colonne (elle n'eft point furie dellîn),
a été portée à Auvenet pour en faire la mar-
gelle du puits , puifque le diamètre du puits
eft plus grand que celui de l'ouverture de la
pierre , qui n'a pas permis d'en faire une plus
grande. Suivant la tradition du pays , la mé-
tairie d'Auvenet appartenoit autrefois à un
feigneur de la Rochepot &c de Cufty, fans
goût pour les belles chofes , qui détruifit , i\
y a plus d'un fîecle , ce qui manque de cette
colonne , pour en prendre des matériaux à
bâtir ; on lui a du moins l'obligation de ne
pas l'avoir entièrement détruite. Le P. Lem-
pereur, qui tient le fait des gens du lieu ,
dit que ce feigneur mériteroit bien d'être
nommé, & qu'on fit fon éloge ;c'eft en
effet cette ftupide ignorance qui a occa-
fîoné la deftrudion des plus beaux monu*
mens de l'antiquité , dont on employoit à
de nouvelles eonftruâions les matérieux tout
préparés.
Il y a une autre grande jicrre dans le cime-
COL
tiere de CuJJy , qu'on peut voir fur le plan ,
& qu'on donne ordinairement pour le cha-
piteau de la colonne ; mais il eft aifé de voir
que c'eft une erreur dans laquelle ont donné
les PP. Lempereur & Montfaucon ; le pre-
mier dit que cette pierre a huit pies de dia-
mètre , & qu'elle a la forme d'un paraiol à
l'antique, avec des compones d'efpace en
efpace , au nombre de dix \ le fécond en
donne le plan comme étant celui du cou-
ronnement de la colonne ; dans le fait cette
pierre eft octogone , ayant fcpt pies un pouce
d'un angle extérieur à l'autre , ôc dix-neuf
pouces d'épailleur. Il eft vraifemblable qu'el-
le portoit fur huit petits piliers ou colonnes ,
qui avec les cintres qui font à chacune des
huit faces , formoient autant d'arcades , &
qu'elle fervoitde couronnement à un maufo-
lée ; car il n'y a ni ftruAure ni caradtere qui
puifle en donner connoiftànce. Il y a au mi-
lieu de cette pierre un trou rond d'un demi-
pouce d'épaifleur ôc de quatorze pouces de
diamètre , qui annonce qu'elle étoit encore
foutenue dans fon milieu , ou par une colonne
plus grofïc que les autres , ou par une grande
urne quirenfermoit des cendres, mais jamais
elle n'a pu fervir de chapiteau à la colonne
de Cujfy.
Pour revenir à cette colonne , les figures
de fbn piédeftal (ont des efpeces de niches
peu enfoncées terminées alternativement,
les unes en pointe , les autres en cintres fur-
baiiTés ( ce qui n'eft point diftingué dans le
plan du P. Monfaucon ) , ces figures étant
prifes dans l'épaifteur de la pierre ont peu
de relief.
La première qui regarde le midi , repré-
fente Minerve j fon cafque & fa chouette la
font aifément connoître.
La féconde tournant à droite eft Junon ,
habillée en matrone , qui tient de la droite
une patere qu'elle femble préfènrer à fon
paon , & de la gauche une hajîa pura , qui
eft une pique fans fer , marque de fà divinité.
La troifieme eft un jeune homme prefque
nu, qui a le pié gauche monté fur une
pierre ou fur un cippe , Se la main droite éle-
vée; il eft difficile d'expliquer cette figure ,
parce que les fymboles en font prefque en-
tièrement efficés : cependant M. Thomaflin
croit avoir apperçu un foudre à fa main
droite j en ce cas ce feroit un Jupiter fans
COL j3r
barbe , aînfî qu'il eft repréfenté fur quelques
médailles, avec la légende Jovi crefcenti.
La quatrième figure eft un homme ,
tenant Ibus fon bras gauche un poulet , au-
quel il donne à manger dans une patere qu'il
tient de la main droite , au lieu d'un cafque,
ce qui achevé de le faire connoitrc pour un
augure.
La cinquième figure repréfenté un jeune
Bacchus , appuyé fur fon bâton , qui pou-
voir être un thyrfe ; il eft orné de la dépouille
d'un tigre , & il a un jeune mâtin à fes pics.
La iîxieme femble%inoncer une divinité
marine , c'eft une femme prefque nue , ap-
puyée de la main droite fur un timon ou gou-
vernail de navire , & fbutenant de la gauche
une urne renveriée , qui répand del'eau juf-
qu'en bas.
La feptieme eft un Hercule , appuyé de
la droite fur fa clave ou malfue , &c tenant
de la gauche la dépouille du lion ; ce n'eft
point un Hercule Gaulois , dont il n'a pas
les fymboles.
La huitième & dernière figure eft un cap-
tif qui a l'air abattu & les mains liées : il n'eft
couvert que d'une fimplc tunique, ceinte
par le milieu du corps , Se qui ne le couvre
que depuis les épaules jufqu'aux genoux,
ayant les bras & les jambes découvertes. Cec
habit ne défigne ni un Romain , ni un Gau-
lois, car les Gaulois portoient leurs habilk-
mens fort longs avec de grandes manches :
feroit-ce l'habit d'un Helvétien ? en ce cas
laconjeéluredu grand Saumai(è feroit plei-
nement vérifiée. M. Thomaflin le foupçonne
auffi , & il ajoute que la beauté de ces figu-
res ne permet pas de douter qu'elles ne foient
du haut empire, vers Augufte ou Tibère au
plus tard.
On voit que la defcription de ce beau mo-
nument eft allez différente de celle qu'en
donne le père Montfaucon , & même de
le figure qui m'a été communiquée par
un ami; mais j'ai cru devoir préférer ce
qu'en ont dit d'habiles gens qui ont examiné
cette colonne avec attention , à des delîîns
fouvent altérés par les defïînateurs. Le P.
Lempereur ne donne aucune defcription de
ces figures : il dit qu'elles ont fouftert des
injures de l'air, qu'on y diftingué feulement
j un hommequia le doigt fur la bouche (c'eft
i apparemment l'attitude de la Minerve qui
X XX 2
531 COL
iui a fait faire cette bévue ) , & un autre en
habit facerdotal : on croiroit que ce jéfuite
n'a parlé aufïi légèrement de ce monument
que parce qu'il ne Pa pas vu.
Je vais ajouter quelques éclaircilTèmens
pris dans une lettre écrite le 1 5 octobre 1755,
à M. Lardilion, par M. Tiflerand, ancien
curé de Crugé & de Savigny, mort fort âgé
en 1760 j il étoit allé viiirer la colonne avec
M. Parifot de Crugey , maître des requêtes ,
qui y fit f lire des fouilles en 170 3 .
Selon M. Tilîeraii|lj la baie de \z colonne
qui eft d'une feule pierre , eft de quinze à
feize pies de circonférence : elle a été pofée ,
comme on le reccfnnût par les fouilles , fur
un fondement de couroy ou maftic,dans
lequel on avoir jeté à pierres perdues du
laverin en pointe.
Dans la fouille du côté du levant , on trou-
va à un pié de profondeur , les oflemens de
trois corps , la tête contre la colonne , & cha-
que oflement dans fa place, avec fix médail-
les , dont trois de petit bronze , & trois
de moyen bronze , toutes repréfentant An-
tonin le pieux , dont le nom étoit dans la
légende , c'étoit apparemment pour payer le
droit de Caron. En creufant au couchant ,
on trouva encore des oflemens & des mé-
dailles d'Antonin le pieux : on fit aulîî creu-
fer fous la colonne même , enforre qu^on paf-
foit pardeflous , mais on n'y trouva rien. Le
nouvel hiftorien de Eeaune dit que dans les
différentes fouilles on n'eutpas l'attention de
foumurer les deux grandes pierres qui por-
tent la cdunne, & forment un quarré de iix
pies de chaque face , ce qui les a fait fur-
bailîer au milieu où elles fe j oignent, cnforte
qu'il eft à craindre que cette inattention ne
caufe un jour la ruine de^e monument : il
rapporte aufli qu'on a trouvé par la fuite,
aux environs de cette colonne , des médailles
d'Augufte & d'autres empereurs. M. Tilîè-
rand , qui étoit préfent à ces fouilles , & qui
les place en 1703 & non en 1716 _, comme
Phillorien de Beaune , ne fait point mention
de ces pierres quarrées qui fervent de fonda-
tion à la colonne.
Lors de la vifite de M . Parifot de Crugey ,
çn l'aflura que dans le bois voifin , appelle
la Pompéiane, à deux cents pasde la colonne ^
en montant le coteau qui conduit aux chau-
mes d'Auvenet , on trouvoit beaucoup d-e
COL
corps humains 6c des tombeaux, de dif-
tance cndiftance,avec leurs couvercles, qui
fembloientêtre les cercueils des chefs, parce
que fur le même alignement on trouvoit
des corps de foldats , ayant feulement des
pierres rangées pour couvrir la tête ; la plu-
parc de ces tombeaux avoient été enlevés par
lespayfans pour en faire des auges. M. Parifot
s'y étant fait conduire, on en trouva un en-
tier , dont on avoit feulement cafle un coin
du couvercle pour y fouiller , on y trouva
des olTèmens , une boucle de ceinturon , &
des armes rongées par la rouille.
En quel temps & à quelle occafion la
colonne de Cujfy a-t-elle été élevée ? voilà ce
qui exerce les favans depuis long-temps ,
parce qu'il n'y a aucune inlcription apparente
qui puifle donner des éclairciiîemens fur
cette queftion.
Le P. Lempereur met cette colonne au
rang des tombeaux qu'on élevoit lur les cen-
dres des princes; ce qui lembleroit donner
quelque lieu de croire que cette colonne eft
un tombeau , c'eft qu'elle n'eftqu'à cent pas
de l'ancienne voie Romaine, quiconduiloit
de Befançon à Autun , ôc que Pulage étoit
alors de placer les fepulcres le long des voies
publiques : on fait d'ailleurs qu'on élevoit ces
iojjjtes de monumens iur les tombeaux. C'eft
ainli , dit le P. Lempereur , que les cendres
de Trajan furent enfermées fous la colonne qui
porte fon nom , & celles de Klarcien dans
un vafe de pierre qui étoit au dcflhs de la
iienne. Foje:^^ les vojû^e^ de Spon , liv.I,
page rx^ ; il penfe en conféquence qi^e la
colonne de Cu£y a été érigée à la mémoire de
quelque prince Gaulois ; il n'en apporte au-
cune preuve , & le peu qu'il dit de ce mo-
nument eft il pitoyable , qu'on ne doit pns
s'y arrêter. Les divinités qui l'ornent iont
plus Romaines que Gauloifes , & l'ouvrage
eft d'ailleurs des plus beaux jours de Rome ;
ce n'eft pas non plus un maufolée, puifque
l'on n'a trouvé fous la colonne ni urne , ni
oflemens, ùc.
Le P. Montfaucon , loco citato , regarde
cet édifice comme un monument de la dé-
votion des Gaulois; Pinterprétation qu'iî
donne des figures fe rapporte toute à cette
idée : le captif eft peut-être une de ces divi-
nités enchaînées , dont il eft fait mention
dans la Mythologie ,ùc,\^ nombre déduit.
COL
qui forme celui de ces divinités, eft: myfté-
rieux ; elles lont placées d'ailleurs de manière
qu''on en a toujours une en face ^ de quelque
coté que Ton aborde la colonne , &c. &c.
On voit que cette explication forcée n^a rien
de fatisfailant 5 ainii je ne m'y arrêterai pas ,
outre que l'obfervation générale , qu'il n'y a
aucune divinité Gauloile parmi ces figures ,
fufïît pour faire rejeter l'interprétation du
{avant religieux.
Il ne relie donc que Topinion du grand
Saumaife , qui , après avoir bien examiné
cette colonne , la regarde comme un trophée
élevé en mémoire de la célèbre vidloire de
Céfar lur les Helvétiens-, c'eft aulTi le lenti-
ment de MM. Tillèrand ik Thomalïin , qui
penfent que ce monument a été élevé par
Augufte ou par Antonin le pieux , qui étoit
Gaulois d'origine , en l'honneur de Céfar ,
& de la victoire qu'il remporta dans ce lieu
même fur les Helvétiens: on ne peu c douter,
en liiant les commentaires de Céfar , que ce
ne foir là le lieu où ce général Romain les
barrit ; les tombeaux &c les oflèmens qui font
fur la colline en fi grande quantité , annon-
cent qu'il y a eu là un combat. M. Cotin ,
curé de Monceaux , à une demi-lieue de la
colonne , ailura M. ThomafTin , qu'en faifant
rétablir ion jardin, il trou va les oflèmens de
plus de trente corps morts dans une auiïi
petite étendue , & que les cadavres étoient
aufH fréquens dans le reftc de la campagne
des environs de Cufly.
Les Romains enterrés au pie de la co/o/z/ze,
du temps d'Anronin le pieux , marquent
ièulementl'ufage où étoit ce peuple de fe faire
enterrer auprès des monumens érigés en
l'honneur de leur république. On ne fau -
roit attribuer cet édifice aux Gaulois , ils y
auroient mêlé quelques-unes de leurs divini-
tés 5 quant aux médailles d' Antonin le pieux ,
on ne peut en tirer aucune conféquencepour
le temps auquel a été élevée la colonne , puif-
qu'on trouve dans le même lieu des médail-
les de fes prédécefleurs & de fes fuccefleurs :
M. Thomaffin en avoir d' Augufte & d'A-
drien , trouvées dans un endroit peu éloigné
de la Colonne.
Le même auteur applique les figures fym-
boliques de ce monument à la vidoire de
Céfar j il prétend que l'augure qui fuit Mi-
nerve , Junon Se Jupiter , marque un vœu
COL 53^
fait à CCS trois divinités pour Leur offrir des
facrifices , en reconnoilîknce de la vidoire
qu'il en efpéroiil que Bacchus qui fuit l'au-
gure annonce qu'elle a été remportée dans
un pays de vignoble 5 que la nymphe qui
tient un gouvernail , marque que c'eft après
le paflage delà Saône ; PHercule défigneCé-
fir & fa valeur ; de le captif prouve la dé-
faite entière d'un peuple en cet endroit-là ,
&c. ùc.
M. Moreau de Mautour , favant anti-
quaire de Pacadémie des infcriptions , né à
Beaune , donna vers le même temps , une
diflértation , imprimée au mercure de juin
IJ16 , dans laquelle il prend aulïl Xz colonne
de Cujfy pour un trophée militaire , mais il
interprète différemment les fymboles ; il
prend le captif pour Saturne , enchaîné par
fon père; Bacchus pour le chafTeur Adonis;
la nymphe pour une Vénus marine, é'c. &c.
Et comme il avoit vu plufieurs médailles
du bas-empire , trouvées aux environs de la
colonne , qui repréfenroient Gallien , Claude
le gothique & Tetricus , il penfc que ce
monument a été élevé en l'honneur de la
vidoire remportée par Tetricus , l'an 167 ,
fur les troupes du parti de Claude , après
laquelle Tetricus s'empara d'Autun , dont il
avoit formé le fiege , qui dura fept mois ,
félon Eumenes.
L'antiquaire parle, danscettedilîertation,
des recherches de M. Parifot de Crugey ,
faites fous la colonne en 1 70 5 , & rapporte
au {fi une autre fouille ajitérieure , faite en
1700 par M. Joly , feigneur d'Ecutigny , &
M. Moreîet , qui trouvèrent beaucoup d'of^
femens , de médailles , 6c des figures de
bronze de quatorze pouces de hauteur , que
le favant académicien croit être des dieux
Lares.
L'hiftorien de Beaune qui parle de cette
fouille , faite en 1 700 par M AI. Morelet &
d'Ecutigny , dit qu'elle fut faite au midi de
la colonne , & qu'on trouva à trois pies en
terre lîx petites ftatues de pierre blanche, au
cou defquelles pendoit le fymbole de Priape ,
avec quelques médailles du bas empire ; ces
ftatues font-elles les mêmes que celles que M.
de Mautour prenoit pour des dieux Lares ?
Les médailles du bas-empire , trouvéesaux
environs de la colonne , ont donné lieu à
quelques antiquaires de fixer Téredion de ce
534 C O t
monument fur la fin du troifieme /îecîe. On
voit , par une note manufcrite de M. le pré-
/îdent Bouhier, que M. pfigenbach , favant
profefîeur à Zurich , lui écrivit , le premier
îcptembre 1723, qu^ilcroyoitquelaco/o/z/ze
de Cujfy avoitété érigée pour monument de
la vidtoire remportée par Maximien Hercu-
les fur les Bagaudes.
Maison a déjà remarqué qu'on y trouve
également des médailles des premiers empe-
reurs , 6c que l'ouvrage de la colonne eft des
plus beaux jours de Rome -, M. ThomafTin
allure même que la beauté des figures ne
permet pas d'en retarder l'érection plus bas
que Tibère j c'eft auiTi le fentiment de M.
Halée Gandelot y qui vient de donner la
nouvelle hijioire de Beaune ; il croit que cette
colonne a été élevée par Augufte , en mé-
moire de la célèbre vidoire remportée fur
les Suiflès par Céfar , (on père adoptif ; &c il
ajoute que la médaille qui en fixe l'époque
doit fe trouver entre la première & la féconde
pierre de l'édifice.
Ce fentiment doit acquérir d''autant plus
de créance , que c'étoit celui du grand Sau-
maife & de MM. Tifferand 6c Thomaflin
qui «voient examiné la colonne avec loin.
La dilfertation que M. Pafumot doit bien-
tôt faire paroître , fur un monument qu'il a
étudié pendant plufieursannécs, lèvera tou-
tes nos incertitudes. (M. Beguilzet. )
Colonne , en terme millitnire, eft un corps
de troupes rangé fur beaucoup de hauteur
& peu de front , qui marche d'un même
mouvement , en lailïant aflèz d'intervalle
entre les rangs & les files pour éviter la con-
fufion.
Une armée marche fur une , deux , trois ,
ou un plus grand nombre de colonnes , fui-
vant la nature du terrain , & le but que le
général fè propoie.
Il ne convient point à une armée de mar-
cher en bataille , hors le moment d'un com-
bat , quand même , ce qui eft fort rare , le
terrain le permettroit ; fouvent même la
marche ne fe fait point en avant de l'armée :
il eft donc nécelTaire de rompre l'armée
pour faire pafl'er les troupes les unes après
les autres. Comme il y en a un grand nom-
bre , ce ne feroit pas aflez ii on ne la rom-
poit que pour faire pafler toutes les troupes
dans un même endroit j il; faut , pour la
COL
facilité de la marche , divifer l'armée en plu-
fîeurs portions ou parties, qui prennent des
chemins différens pour aller le rallèmbler
au lieu où l'on a réfolu de le faire , l'exé-
cution de cette manœuvre s'appelle meurt
l'armée en colonnes.
La méthode de bien diftribuer une ar-
mée fur un nombre de colonnes convenable ,
tant par rapport à l'armée conlîdérée en
elle-même , que par rapport au pays qu'elle
a à traverfer, eft un objet des plus coniidé-
rables & des plus importans, qui mérite toute
l'attention ^es plus habiles généraux. Ceux
qui voudront voir ce que l'on a de meilleur
fur ce fujet , pourront confulter Vart de la.
guerre & par règles & par principes de feu
M. le maréchal de Puyfegur , imprimé chez
Jombert à Paris en 1748.
La colonne eft encore un corps d'infante-
rie ferré & fupprellé , c'eft-à-dire un corps
rangé fur un quarré long , dont le front eft
beaucoup moindre que la hauteur, qui n'eft
pas moins redoutable par la pefanteur de
(on choc , que par la force avec laquelle il
perce de réhfte également par-tout , & con-
tre toutes fortes d'efforts. Les rangs & les
files doivent être tellement ferrés & conden-
fés , que les foldats ne confervent qu'autant
d'efpace qu'il leur en faut pour marcher &
fe fervir de leurs armes.
Cette colonne eft celle de M. le cheva-
her de Folard , & c'eft fa propre définition
ou defcription qu'on vient de donner. Elle
eft compofée de plufîeurs bataillons à la
queue les uns des autres , depuis un batail-
lon jufqu'à fîx , fur plus ou moins de files
& de rangs , félon la fit nation du pays où
l'on fe trouve obHgé d'agir & de combattre..
On a prétendu qu'à la bataille de Fontenoy ,
gagnée par Louis XV en perfonne le 1 1
mai 1745 y l^s Anglois avoient combattu
en colonne ; mais on fait que leur colonne
s'étoit trouvée formée fans deflein , plufîeurs
de leurs bataillons voulant éviter le feu des
François qui les prenoit en flanc , fe pofte-
rent , pour l'éviter , les uns derrière les au-
tres ; ce qui forma ainfi la colonne de M. de
Folard. Au refte les plus habiles militaires
conviennent que cette colonne eft excellente
dans plufieurs cas , mais qu'on ne doit pas la
regarder comme devant être employée in-
différemment dans toutes fortes d'attaques.
<^
COL
ployer te traité de la colonne du chevalier de
Folard , tome I, defon comment, fur Polybe ,
Se le livre 'mût\Aé fentiment d'un homme de
guerre fur le nouveau fyjîéme du chevalier dit
f olard , par rapport à la colonne , Sec. ( Q )
Colonne Militaire , écoit chez les ro-
mains une colonne fur laquelle étoit gravé le
dénombrement des troupes d'une armée ro -
maine par légions , félon leur rang., Koye^
Colonne. (Q)
Colonne , Marcher en colonne ,
( Marine ) c^eft lorfqu'uue armée navale
marche fur deux ou trois lignes , & que
les vaiilèaux de chaque ligne fe fuivent les
uns derrière les autres. Voye:^ Ordre de
JMARCHE. (Z)
Colonne, f. f. columna , œ , {terme de
hlafon. ) meuble qui repréfcnte une colonne
d'archite6ture ; la colonne efi: toujours de pro-
porticHi tofcane dans les armoiries , c'eft-à-
dire qu'elle a fept diamètres de hauteur ; on
ta poie fur un louballement ou fbcle d'un
diamètre , ce qui lui donne en totalhuir dia-
mètres de haut..
On, ne nomme point le chapiteau , la
bafe , ni lefocle , que lorfqu'il fièitrouved'un
autre émail que le fuft.
La colonne cft l'hiéroglyphe de la folidité
& de la fermeté. Dans les édifices , elle an-
nonce la magnificence , étant proportionnée
fuivant les préceptesMe l'art. ^
Colonne d'Ornano à Aubenas en Vîva-
rais; de gueules ^ aune colonne d'argent , une
couronne d'or antique poféefur le chapiteau.
Le nom & les armes de Colonne vien-
uenr , félon la tradition , de ce que l'un de
leurs ancêtrps apporta à Rome la fainte co-
illb/z/iede la Judée.
De Lionne de Clevefon en Dauphiné > de
gueules ,àla colonne d'argent , le chapiteau , i.a
bafe & lefocle d'or. ( G.D. L.T.) N
Colonnes du Chatelet, (Jîirifpr.)
ne font autre choie que des diviiions ou dif-
tributionsque l'on fait de cinquante-fix con-
ieillersau châtelet de Paris en pluiieurs fer-
vices difïerens , que chaque colonne ou divi-
fion remplit alternativement. Se. fucceilive-
ment de mois en mois..
Ce terme de cohnnesvltnx. {ans doute de
œ ç[ue le. tableau o.u. lifte qui marque cet
COL J3J
arrangement eft divifé en autant de colonnes
qu'il y a de fervices différens.
La diftind:ion de ces colonnes eft fort an-
cienne 5 mais elle n'a pas toujours été faite de
la même manière : pour mieux faire entendre
les changemens qu'il y a eu à cet égard , il
faut expliquer féparément d'abord la diftinc-
tion des différens fervices , enfuite le nom-
bre des confeillers qui y eft employé, & en-
fin la durée de chaque fervice.
Premièrement pour ce qui eft de la diffé-
rence des fervices , anciennement il n'y en
avoir que deux au châtelet , favoir le civil-
Se le criminel.,
La confervation des privilèges royaux de
Puniverfîté qui avoit été démembrée du:
châtelet 5 y fut réunie^ar édin de 15.16 ,.
regiftré au parlement en 1 5 5.2 : mais non-
obftant cette réunion , Se quoique les juges,
de la confervation fuflent transférés au châ-
telet , ils continuèrent à connoître feuls des;
caufes de l'univerlité , &les juges de la pré-
voté continuèrent à connoître feuls des ma-
tières de la prévoté i ce ne fut qu'en 1543
qu'on ordonna le mélange des confeillers
des deux iieges , Se qu'à cet eftet ils feroient
tous infcrits dans un.même tableau paror--
dre de réception;
Au moyen de ce mélange il y eut alors,
trois fervices au châtelet; favoir celui de la
prévôté pour le civil ordinaire , celui de la
confervation pour les caufesdel'univeriité.
Se le fervice de la chambre criminelle.
Les chofes demeurèrent en cet état j u fq u^'à
rétabliflèmentdespréfidiaux.en 15 5,1 ; alors
le châtelet. étant érigé en préfidial , il coiir
tinua d'y avoir trois feivices, celui du pré-
fidial ayant pris la place de. celui de la conr
fervation qui fut fupprimé rSe il eft à pré-
fumer que la chambre, du confeil fut alops.
étabhe , Se forma un quatrième fervice pour
juger ; comme il paroît par une délibération^
de 1678 , qui porte que fuivant ràncieiii
ufàge , les confeillers demeureront divifés em
quatre colonnes.
Au mois d'avril i6ij y. if y eut un édir
portant augmentation de quelques officiers;
en chaque préfidial , pour être avec les an*--
ciens divifés en deux fervices femeftres; ^:
fuivant un autre édit du mois de février
1643 , onavoitcréé plufîeurs nouveaux of-
ficiers au châcelerde Paris , gouL avec. les.
53(^ COL
anciens former deux femeftrcs ; mais ces
deux édits ne furent point vérifiés.
En 1 674 le chârelet fut divifé en deux
fieges , fous le nom à'ancien & de nouveau
châtelet : on obferva dans chaque tribunal
la diftindion des quatre fervices; les affaires
de rapport , tant de la prévoté & du pré-
(idial , que de la police , ce qui vraiièmbla-
blement n avoit point encore eu beu ; le fer-
vice^ civil de la prévôté ayant pu , avant
1153,) uger tes affaires d-*audicnce & de rap-
port de la prévoté , comme celui de la con-
/èrvation depuis 1543 pouvoit juger les
affaires d'audience & de rapport de la con-
fervation , en fuppofant que ce fut à des
jours différens omà des heures différentes j
& les deux châtelets ayant été réunis en
1 684 , leshuit fervices furent réduits à qua-
tre , comme ils étoient avant la divifion du
châtelet ; 6c tel eft encore le dernier état con-
firmé par Pédit du mois de janvier 1685.
2°. Pour le nombre des conseils employés
à chaque fervice, il a dû néceflairement va-
rier à proportion que le nombre total des
confeillers a été augmenté.
On ignore de quelle manière les confeil-
lers étoient diftribucs , du temps qu'il n'y
avoit que le fervice du civil &;.du criminel^
il y a néanmoins apparence qu'ils étoient
diftribués également pour ces deux fervices.
Quand la confervation eut été réunie à la
prévôté , & que l'on eut fait le mélange des
confeillers des deux fieges , ce qui n'arriva ,
comme on l'a déjà dit , qu'en 1 543 , il n^y
avoit plus qi* vingt confeillers , dont dix
fervoient à la prévoté , & dix à la conferva-
tion ; on en prenoit alternativement un cer-
tain nombre de ceux qui fervoient à la pré-
vôté , & enfuite de ceux de la confervation ,
pour faire le fervice du criminel.
Le nombre des confeillers n'étant plus que
de dix -neuf , lorfque le châtelet fut érige en
préiîdial en i j 5 1 , on en ajouta ^lors cinq ,
pour faire le nombre de vingt-quatre porté
par l'édit , dont il y en avoit quatre feule-
ment pour le fervice du criminel , & les
vingt autres étoient diftribués pour les trois
autres fervices : ils avoient néanmoins la
liberté d'alTîfter &c d'opiner au criminel. Il
y a apparence que de ces vingt confeillers
m fervoient à laudience de la prévoté , fix
CO L
à celle du préfidial , &c les huit autres en k
chambre du conleil.
Il fut arrêté en 1668 qu'il y auroit à l'a-
venir huit confeillers au criminel : il y avoit
alors en tout trente-quatre confeillers.
En 1 67 1 on arrêta qu'il y en auroit pareil
nombre de huit à ^audience , ce qui (e doit
entendre du parc civil & autant pour le pré-
fidial , ôc que le furplus des conseillers qui
n^étoient point de fervice à l'audience ni au
criminel , lerviroit es chambres du confeil
ôc de la police. Il n'y avoit toujours que
trente-quatre confeillers ; ainfî il y en avoit
dix à la chambre du confeil , de huit pour
chacun des trois autres fervices.
il eft bon de remarquer à cette occafion
que la chambre de la police n'a jamais formé
une Cvlunae particulière pour les confeillers ,
mais qu^ils rapportent en la chambre du
confeil toutes les affaires criminelles qui font
du rellort de la police.
Le nouveau châtelet qui fut établi en 1 674
étant compofé du même nombre d^ofïiciers
que Tancien , & les fervices divifés de mê-
me dans les deux fieges, il y a lieu de croire
aufli que le nombre de confeillers employé à
chaque fervice étoit aufli le même dans les
deux fieges , fi ce n^eft que la chambre du
conleil de chaque fîège devoir être compoféc
de onze confeillers , attendu qu'ils étoient
Éors en touttrenie-cinq.
; En 1 678 il fut arrêté dans l'un des deux
châtelets , qu'au heu de huit confeillers au
criminel il y en auroit dix, &c que les deux
d'augmentation feroient pris de la chambre
du confeil j ce qui dut néceflàirement ré-
duire le fervice de la chambre du confeil de
OHze à neuf: ainfi de trente-cinq confeillers
il y en avoit huit à Paudience du parc civil ,
huit à celle du préfidial , dix au criminel ,
& neuf à la chambre du confeil.
il y a lieu de croire que le même arrange-
ment fut (ibfervé dans l'autre châtelet.
Depuis la réunion du nouveau châtelet
à l'ancien , faite en 1684 , le nombre des
confeillers ayant été réduit de foixante & dix
à cinquante-fix , chacune des quatre co/0/2-
nes ou fervices a été fixée à quatorze con-
feillers , fuivant l'édit du mois de jan-
vier 1685.
3°. Quant à la durée du temps pendant
le<juel les confeillers font employés à chaque
fervice
COL
/èrvice , il efl: à préfumer qu'au commence-
ment, lorfqu'il n'y avoit que le civil ôc le
criminel, les conieillers iervoient tour-à-
cour , de mois en mois.
Lorfque la confervation fut réunie au
châtelet , les confeillers fervoicnt un an en la
prévoté, ôc Pannée fuivante à la confer-
vation ; de l'on prenoit alternativement un
certain nombre de conieillers de la prévôté
ôc enfuite de la confervation , pour faire
de mois en mois le fervice du criminel.
Depuis 1 55 1 le fervice de la chambre cri-
minelle fut fixé à deux mois ; les trois autres
fervices étoient probablement de même
durée.
En 1 668 le fervice criminel fut fixé à trois
mois} ce qui fait encore juger que les autres
fervicesétoientauffi chacun de trois mois.
Mais en 1678 on remit le fervice criminel
à deux mois, pour être fait alternativement
par les quatre colonnes ; ôc il fut arrêté que
les trois colonnes qui ne leroient point de fer-
vice au criminel, ferviroient par iemaine à
l'audience auffi fuccefïivement l'une à l'autre.
A l'égard de la chambre du confeil , il y
a apparence que le fervice s'en f lifoit alors par
femaine alternativement par chacune des co-
lonnes qui n'étoient pas de fervice au criminel.
Il efl auflî à préfumer que Ton obfervoit
alors la même chofè dans le nouveau châte-
let pour la durée des fervices.
Enfin Pédit de 1685 qui confirme la divi-
Cion des confeillers en quatre colonnes , or-
donne qu'elles ferviront le premier mois à la
prévôté , le fécond au préfidial , le troifîe-
me à la chambre du confeil , ôc le quatrième
à la chambre criminelle.
Enfinl'édit de 1685 qui confirme la ^vi-
fion des confeillers en quatre colonnes,
ordonne qu^elles ferviront le premier mois à
la prévôté, le fécond au préfidial, le troifieme
à la chambre du confeil , le quatrième à la
chambre criminelle.
Suivant ce même édit l'arrangement des
colonnes fe fait félon l'ordre de réception ;
cnforte que le premier de la lifte efl: le doyen
de la première colonne; le fécond efl: le
doyen de la féconde colonne ; le troifieme
î'efl: de la troifieme i & le quatrième Tefl; de
la quatrième colonne; le cinquième efl le
fécond de la première colonne , ôc ainiî des
«utres. J
Tome VIIL
Quand il arrive une mutation par le
décès d'un confeiiler , ou que l'un d'eux eft
reçu dans un autre office , ou qu'ayant
vendu fa charge le nouveau titulaire a obtenu
fur fes provifions une ordonnance de foit
montré; alors tous ceux qui fout poflérieurs
en réception à celui qui opère la mutation ,
changent de colonne , ôc vont de la pre-
mière à la quatrième , de la féconde à la
première, de la troifieme à la féconde , ÔC
de la quatrième à la troifieme.
Ces quatre colonnes ou fervices (è réunif-
fent dans les occafions , foit pour les affaires
de la compagnie , réception d'officierj ,
ou autres matières importantes ; ôc alors
l'afîèmblée le tient dans la chambre du
confeil.
Colonnes charnues, en terme d'Ana-
tomie , appellées quelquefois lacenuU ôc co-
lumncscordisy font plufieurs petits mufcles
des ventricules du cœur qui font comme
détachés de leurs parois , Ôc joints par des
extrémités tendineufes aux valvules du cœur.
?^oje^ CœuR.
Ces petites colonnes ou piliers étant atta^
chés d'un côté aux parois du cœ-ur , ÔC de
l'autre aux valrulestricufpides ôc mitrales, fe
raccourci ffent dans la fy fiole du cœur, pouf^
fènt les valvules , ôc ferment par ce moyen
non feulement les orifices des veines , mais
encore les ventricules dans leur fyflole. V,
Systole, Diastole, & Circulation.
Colonne , ( Hydraulique. ) On dillingue
dans rhydraulique deux fortes de colonnes ,
la co/o/z/ze d'air ôc celle de l'eau.
La colonne d'air efl l'air même qui entoure
une fontaine; c'efl: l'atmofphere qui nous
environne jufqu'à la plus haute région de
l'air. Le poids de cette atmofphere efl: égal à
une co/o/z^e d'eau de bafe égale , ôc de trente-
deux pies de haut , ou à une colonne de mer-
cure de vingt-huit pouces de haut ôc de
même bafe, ce que l'on connoit par le
baromètre.
Une colonne d'eau efl le contenu d'un
tuyau qui monte l'eau d'une rivière ou d'un
puits dans un réfèrvoir , par le moyen d'une
machine hydraulique : c'eft de même le
volume d'eau du tuyau qui defcend d'un
réfèrvoir , ôc qui à la fortie de l'ajutage
tend à regagner la hauteur dont il eft parti ,
Yyy
538 COL
en farmant un jet d'eau : ce même jet d'eau
cft une véritable colonne d^eau qui réfifte à la
colonne d'air dont il cft environné. Voye{^
Air. 6" Atmosphère. ( JC)
* COLOPHONE, C f. ( Pharm. ù Arts
méch/in. ) préparation de térébenthine qu'on
a fait cuire dans de l'eau jufqu'à ce qu'elle ait
pris la confiftance néceflaire.
Cette préparation cft d'ufage en médecine;
l'oy^c;^ TÉRÉBENTHINE.
Les joueurs d'inftrumens à cordes de
boyau s'en fervent auiïî pour frotter leurs
archets , ou ce qui en fait la fondion ; l'en-
duit de colophane dont fe chargent les crins
de l'archet , les rend âpres, & les fait prendre
plus fortement fur les cordes qui en devien-
nent plus fonores fous l'archet.
Les mufîciens ont leur colophane enfermée
dans une petite boîte ; quand leur archet ,
ou ce qui tient heu d'archet, a befoin d'être
frotté , ils ouvrent la boîte , & le paftent for-
tement à plufieurs allées avenues fur la colo-
phone qui déborde la boîte.
J'ai dit leur archet ou ce qui en tient lieu ,
parce que les joueurs de vielle fe fervent de
colophane ainfi que les joueurs de violon.
COLOQUINTE , f . f . ( Hiji. nat. Bot. )
colocynthis , genre degplante qui diffère des
autres cucurbitacées en ce que fes feuilles
font profondément découpées, que fon
fruit cft amer , & qu'il n'eft pas bon à man-
ger. Tournefort, injiitut, rei herh. Voye-^
Plante. (J)
La plante de ce genre qui s'appelle colo-
cynthis fruclus ratundo minor , C. B. C. B.
T. Tourn. ùc. coloquinte à fruit rond , fe
répand fur la terre par des franches rudes &
cannelées. Les feuilles naiflent feules , éloi-
gnées les unes des autres , attachées à de
longues queues ; elles font rudes , blan-
châtres, velues 5 découpées comme les feuil-
les du melon d'eau , mais plus petites. Aux
aiftèlles de ces feuilles naiftent des vrilles.
Les fleurs font jaunes, évafëes en cloche,
découpées en cinq quartiers : les unes font
ftériles , & ne portent point fur un embryon ;
les autres font fécondes , foutenues fur un
calice , & un embryon qui fe change enfuite
en un fruit d'une couleur herbacée d'abord,
& jaunâtre lorfqu'il eft parfaitement mûr ,
d'une odeur fort défagréable & d'un goût
amer. Ce fruit fous une écorce mince ,
COL
coriace , renferme une moelle blanche divî-
fée en trois parties , dont chacune contient
deux loges dans Icfquelles fe trouvent de
petites graines renfermant une amende blan-
che , huileufe &. douce.
La coloquinte naît dans les îles de PArchi-
pel , fur les côtes maritimes de POrient , &
dans les deux Indes où il y en a plufieurs va-
riétés. Ceux qui feroient curieux de la culti-
ver dans nos climats , doivent en femer les
graines dans des lits chauds de terre préparée,
&: en diriger la culture comme celle des con-
combres dont on veut hâter la maturité.
Par M, le chevalier de J AU court.
Coloquinte. ( Mat. médic. & Pharm^^
La coloquinte eft un médicament aufli ancien
que la médecine , très-connu d'Hippocrate ,
de Diofcoride , de Galien , de Pline , des
Grecs , & enfin des Arabes. C'eft un purgatif
très-fort & très-violent. Tous les médecins
le recommandent pour évacuer les humeurs
épaiftes & vifqueufes , &: fur-tout la pituite
qu'ils croient que la coloquinte tire des parties
les plus éloignées & \t^ plus cachées. P. Egi-
nette dit que la coloquinte wç. purge pas tant
le fang que les nerfs. On en recommande
l'ufage dans les maladies invétérées & opi-
niâtres , que Pagaric &: le turbith n'*ont pu
guérir ; dans les maladies des nerfs , des
articulations , dans les obftrudions des
vifceres , dans les migraines invétérées ,
dans l'apoplexie , l'épilepfie , le vertige ,
l'afthme , la difficulté derefpirer, les miala-
dies froides des articulations , les douleurs
de la fciatique & de la coHque venteufej
l'hydropifie , la leprc , la gale ; & enfin dans
tous les cas où il faut fe tirer d'un danger
par un autre, dit C. HofFman j &il ajoute ,
d'après Maflaria , que nous ne guériflons
jamais les grandes maladies, parce que nous
nous en tenons toujours aux adouciflàns,
Geoffroy , mat. médic.
On ne fauroit trop infifter fur Pimportance
de cette dernière réflexion , mais elle eft
d'une application trop étendue , pour que
nous devions nous y arrêter dans cet article
particulier. Voye^ Remède Héroïque ,
medicatio heroïca , fous le mot HÉROÏQUE ;
voye:^ aujfi Evacuant & Purgatif.
Quelques médecins, fansdoutede laclafte
de ceux qui négligent de s'inftruire de l'ac^
tion des remèdes par l'obfervation , ^ qui
COL
arrêtés par des préjugés invincibles puifés
dans les livres des théoriciens ôc dans les
écoles, (e croiroient coupables de la plus
haute témérité , s'ils ofoient éprouver 1 e-
nergie des remèdes de cette efpecc : des
médecins de cette claflè, dis-je , ont voulu
chafler la coloquinte de la médecine com-
me un poifon des plus funeftes • mais l'ex-
périence & l'autorité des praticiens les plus
confommés doit ralTurer contre cette vaine
terreur ; il ne s'agit que de l'appliquer avec
difcernement dans les cas convenables ; &
CCS cas ne (ont pas très-rares dans la pra-
tique de la médecine , comme on peut
voir par l'énumération des maladies con-
tenues dans le partage de la matière mé-
dicale de M. Geoffroy , que nous venons de
rapporter.
Au refte , il fufïit pour les médecins de
fàvoir que la coloquinte eft un purgatif très-
violent pour fe diriger lagement dans Ton
adminiftration , tant par rapport aux cas
où elle convient, que par rapport à Tes
différentes dofes & à la forme fous laquelle
ils la doivent prefcrire.
La déco6lion de coloquinte Se fbn infu-
iîon dans l'eau ou dans le vin , font des
purgatifs efficaces , mais moins violens que
la coloquinte en fubftance. Au refte , il eft
très-peu de gens pour qui la grande amer-
tume de ce remède foit fupportable ; c'eft
pourquoi il vaudroit mieux en ce cas em-
ployer l'extrait de coloquinte fous la forme
de pilules.
La coloquinte , foit en fubftance , fbit en
extrait , eft très-rarement employée feule; on
la donne le plus fouvent mêlée en petite dofe
avec les autres purgatifs.
On peut établir en général que fous cette
dernière forme même, on ne doit guère
la donner qu'aux gens robuftes , & qui
(ont dans la fleur de leur âge : il faut
s'abftenir de la donner aux femmes grof-
(es ; car on prétend qu'elle eft abfolument
mortelle pour le fœtus, quand même on
ne l'emploiroit qu'en lavement ou en fup-
pofîtoire.
L'ufage de la coloquinte n'a que très-rare-
ment lieu dans les maladies; mais Van-
hclmont la regarde comme un des plus
grands remèdes qu'on puiftè employer dans
les maladies chroniques j il la met avec
la icammonee a la tête des autres purgatil^ ,
ôc il obferve avec raifbn que c'eft à ces deux
drogues que doivent leurs vertus réelles tou-
tes les préparatiom officinales purgatives,
dont l'ancienne célébrité fe foutient encore
aujourd'hui à fi jufte titre, que ce font mê-
me ces deux chefs , nntefigaani , qui ont fait
un nom aux laxatifs doux, comme la man-
ne , la cafte, la rhubarbe, ùc. V^oye^ Pur-
gatifs.
Les anciens 5c les nouveaux Grecs, les
Arabes , de quelques-uns de nos auteurs de
pharmacie qui font venus après eux , ont
propofé différentes correcbions de la colo^
quinte, comme de la faire macérer dans
les liqueurs acides , alkahnes , fpiritueufes,
&c. Rivière la faifoit macérer dans de l'u-
rine ; mais ces efpeces de corredifs qui
châtrent la vertu du remède, & prefquc
toujours à un degré indéterminé, vont
diredement contre le but qu'on fe propofe
dans l'adrniniftration des remèdes violens ,
& fourniflent d'ailleurs des médicamenstou-
jours infidèles. Fb^e:^ Correctif.
La feule correction qui foit encore en
ufage dans nos boutiques , ôc qui ne four-
nit proprement qu'un moyen pour réduire
en poudre la coloquinte , qui , fans ce fe-
cours , fcroic très-difficile à pulvérifer : cette
unique corredion , dis-je , confifte à incor-
porer la pulpe de coloquinte mondée de fcs
femences & coupée menu avec une fuffi-
fante quantité de mucilage de gomme adra-
gant , à faire fécher exadtement la maffe qui
en réfulte , à la mettre en poudre , à incor-
porer cette poudre une féconde fois avec de
nouveau mucilage , à faire fécher cette nou-
velle maflè & la réduire en poudre fine ou
pafféeau tamis , qu'on peut garder fouS cette
forme dans une bouteille exadement bou-
chée, ou qu'on peut incorporer avec de
nouveau mucilage de gomme adragantpour
en former des trochifques ( voye^TB. ochïs-
QUEs ) , connus dans l'art fous le nom de'
trochifques alhandal , du nom arabe de la
Coloquinte,
Il n'eft pas inutile d'obferver qae cetxe
dernière opération eft au moins fuperflue,
& qu'il eft plus commode pour l'artifte , èc
peut-être plus sûr pour le malade, que cette
préparation foit confervée fous la forme de
poudre , puifqu'il faudra bien pulvérifer ié*
Yyy 2
540 COL
petit trochifque pour le mêler avec Texci-
pient dans lequel il fera prefcric , Se qu'on
ne 'peut pas iè flatter qu'il foit réduit en
poudre auffi fixe par la pulvérilàtion ex-
temporanée d'une petite madè de 4 ou j
grains , que parle tamis fin employé dans la
pulvérifation officinale , & que par confé-
quent le trçchifque pulvérifé fera diftribué
moins également dans deux ou trois pilules ,
par exernple , que fi on employoit une pou-
dre plus fubtile.
On trouve dans le? mémoires de Vacad.
des fciences , année lyoî , une analyfe de
la coloquinte par M. Boulduc le per& , qui
procéda à cet examen par la voie des
menftrues auflï-bien que par celle de la
diftillatioii.
De huit onces de pulpe de coloquinte il a
retiré par l'eau trois onces d'extr.<it , que cet
auteur appelle extrait gommeuçc ^ félon le lan-
gage ufité dans ce temps-là ; & de la même
quantité de pulpe , par le moyen de l'efprit-
de-vin , une demi-once de réfine, qu'il ap-
pelle extrait réfineux.
Il eft à remaïquer que refprit-de-vin n'a
pas touché à la pulpe de coloquinte y qui a voit
très-long-temps macéré dans de l'eau bouil-
lante , & qu'au contraire l'eau appliquée à
cette pulpe, auparavant macérée dans de
l'efprit-de-vin , en a tiré près de deux onces
d'extrait.
Il eft clair par cette analyfe , que l'eau
peut fe charger de toutes les parties folu-
Bles dans Pefprit-dc-vin , & que ce der-
nier menftrue au contraire n'attaque que les
parties de la coloquinte qui font vraiment
réfineufes.
L'extrait de coloquinte donné à la dofe
de 10 grains, purge allez doucement, fans
violence , fans douleur , & en même temps
très-copieufement î la réfine de coloquinte
au contraire purge très-peu , excite de très-
grandes douleurs dans le ventre; aufli
cft-elle abfolument exclue de l'ulàge mé-
dicinal.
La dofe de la coloquinte en fubftance , ou
plutôt celle des trochifques alhandal ou de la
poudre que nous avons recommandée à leur
place , eft de 4 ou 5 grains jufqu'à i z ou i y.
Un ou deux grains de ces trochifques réduits
en poudre fine , donnés avec un abforbant
leireux pendaijt dix ou douze marins, coa-
C O L
fécutifs , eft un remède éprouvé contre
l'afthme.
On donnelaco/o^'/r/2/eendéco(5tion pour
un lavement , à la dofe d'un gros ou de deux
dans l'apoplexie & les autres a£fe6tions fopo-
reufès.
La pulpe de coloquinte entre dans la con-
feârion Hamech , les pilules de Rudius ,
l extrait panchimagogue de CroUius , l'on-
guent d'Arthanita. Les trochifques alhan-
dal entrent dans les pilules foctides , co-
chées Se de fagapenum. Outre cela il y a
un éleétuaire qui porte le nom de la colo-
quinte, & qui eft connu dans les bou-
tiques fous le nom de hiera diacolocyn"
tkidos , dont voici la compofition : ^ ftae-
chas arabique , marrube blanc , cLimae-
dris , agaric , coloquinte , de chacun dix
gros ; opopanax , fagapenum , femence de
perfil, ariftoloche ronde , poivre blanc, de
chacun cinq gros ; canelle , fpicanard 5 myr-
rhe, polium, fafran , de chacun quatre gros ;
miel écume , trois livres : faites du tout un
éleétuaire félon l'art.
Cet éleduaire eft un puiflant hydra-
gogue qu'on peut donner dans les cas où
ces remèdes font indiqués , depuis deux
gros jufqu'à une once par la bouche , èc
depuis \ once jufqu'à une once & I en lave-
ment.* (h)
COLOR , f m. {Hijîoire naturelle.^ Ich-
thyologie. ) poiflbn des îles Moluques , fort
bien gravé & enluminé fous ce nom , &: fous
celui de color foufounam , par Coyett , au n°,
106 > de^ la première partie de fon Recueil
d'hijîoire naturelle.
Il a le corps elliptique , court , extrême-
ment comprimé par les côtés, pointu vers
la queue , arrondi vers la tête , couvert de
petites écailles ; la tête , la bouche & les
yeux petits.
Ses nageoires font au nombre de fopr}
favoir , deux ventrales , petites , fous le milieu
du ventre , loin derrière les pedorales , qui
font triangulaires \ une dorfale triangulaire ,
plus longue que profonde . à rayons anté-
rieurs, plus courts ; une derrière l'anus , de
même forme & grandeur; enfin une arron-
die à la queue.
La moitié antérieure du corps eft rouge ,,
avec une tache bleue fur la tête ; la moitié pof.
, téiieuie noire , à q.U€LUC rouge i les nageoires
COL
pedorales &: ventrales font jaunes; celle du
QOci & ce '.e de lanus font bleues. La pru-
nelle de Toeil eft blanche, entourée d'un
iris jaune.
Mœurs. Le coîor ell: commun dans la
mer d'Amboine , autour des rochers.
Remarques. Ce poilïon forme , avec ce-
lui qu'on nomme ekor dans le même pays,
un genre particulier , qui fe range natu-
rellement dans la famille des carpes, où
nous l'avons placé dans notre Ichthyologie.
{M. AnANSON.)
COLORATION , f. f. COLORER ,
( Pharmaeie. ) On colore , ea pharmacie ,
diiFérentes préparations. Toit pour leur don-
ner de l'élégance , foit pour les dcguifer
ou cacher leur compoiltionj c'eft dans la
première vue qu'on colore plufieurs ratafias ,
6c fur -tout ceux qu'on ne fauroit avoir
parfaitement limpides {voye-^ PvAtafia) ;
pluiieurs remèdes extérieurs , comme huiles,
onguens , & fur-tout ceux qui font deftinés
à i'embeUiflèment du corps, comme la
pommade pour les lèvres qu'ion colore avec
Torcanette , la poudre dentrifique qu'on
colore avec la cochenille ou le carmin.
Le peu de cinnabre qui entre dans la
poudre tempérante de Stalh , & dans quel-
ques autres poudres rougies par ce minéral ,
ne paroît pas avoir été employé dans leur
compofition dans la vue d'en augmenter
la vertu, mais plutôt dans celle de maf-
quer les ingrédiens.
C'eft apparemment parce que quelques
médecins ou le public ont imaginé que
l'huile ou l'onguent rofat devoit avoir la
couleur des roies avec lefquelles on les pré-
pare, & qu'il a été facile de les contenter
à cet égard, que les apothicaires fe font
mis dans l'ufage de colorer avec l'orcanette
ces préparations dans lefquelles il ne paflè
prefque rien de la partie colorante des rofes.
La coloration des matières fèches , comme
des poudres, fe fait pas un iimple mélange;
mais celle des préparations liquides ou
molles (è fait par la diflblution de différentes
parties colorantes ; c'eft aind que la partie
colorante de l'orcanette foluble dans toutes
les fubftances huileufès parte dans l'onguent
©u dans l'huile rofat dont nous venons de
parler ; que la fécule ou partie colorante
i^£ce des plantes > colore ceitaius emplâtxes
COL 54.r
&c onguens , tels que l'emplâtre de ciguë,
Ponguent martiatum , &c. •
La coloration fe fait au (Il quelquefois
par cette adion des acides &; des alkalis ,
par laquelle ils exaltent certaines couleurs
végétales , ou les changent rnême entière-
ment ; c'eft ainii qu'on exalte la couleur
de la conferve de rofes rouges par quelques
gouttes d'acide vitriolique , celle de Pinfa-
iion de rhubarbe par l'addition, d'une très-
petite quantité d'alkali fixe ; qu'on pourroit
donner un julep rouge préparé avec le
fyrop de violettes rougi par deux ou trois-
goutres d'acide, ùc. {b)
COLORBASIENS, v. Colarbasiens.
_ COLORÉ , adj. {Jurifp. ) fe dit d'un
titre qui paroît valable , Ôc qui néanmoins
par l'événement ne l'eft pas ; conîme quand
un particulier a acquis de celui qu'il croyoit
être propriétaire , il n'a qu'un titre coloré :
mais ce titre, joint à une poflèfîion de dix
ans entre préfens &c vingt ans entre abfens ,
fuffit pour prefcrire. Fbje:(^ Prescription:
&" TITRE. (A) .
COLORER , terme de Marqueterie ù
de Menuijerie de placage ; c'eft donner de
la couleur aux pierres &: aux bois qu'on
emploie dans ces fortes d'ouvrages , fuivant
les teintes dont l'ouvrier a befoin , ou pour
fes clairs ou pour Çts ombres. V. Mar-
queterie & Pièces D8 rapport. Voyer
aujfi Vernis. Diâ. de Trév.
COLORIS , f. m. {Peinture.) Le terme
coloris eft diftingué du mot de couleur : la.
couleur eft ce qui rend les objets fcnfîbles à
la vue , 6c le coloris eft l'art d'imiter les-
couleurs des objets naturels , relativement à.
leur pofition. Par relativement à leur pofition ,
j'entends la façon dont ils font frappés par
la lumière , C(i qu'ils paroi fient perdre ou
acquérir de leur couleur locale , par l'effet
que produit fur eux l'aârion de l'air qui les
entoure 6c la réflexion des corps qui les.
environnent , 6c enfin , Péloignement dans-
lequel ils font de l'œil; car l'air qui eft entre
nous ôc les objets , nous les fait paroître'
. de couleur moins entière , à proportion,
-qu'ils font éloignés de nous. Les lumières.
è>c les ombres font beaucoup moins fenfibles-
'.dans les objets éloignes que dans ceux quï
i font proches.
I^ partie du c<il(;iris qui comprend auJpGi
541 COL
celle du clair-obfcur , eft une des plus efleii-
tielles de la peinture , &c d autant plus re-
commandable , qu'on ne peut que la per-
fedionner par l^écude , mais non l'acquérir,
liiutilement un tableau réuniroit-il tout^es
les autres parties de la peinture , s'il efl: mé-
diocrement colorié il ne produira jamais
qu'un médiocre effet; &c quand bien les
autres parties léroient foibles , la fédudion
fera toujours infaillible fi le coloris y efl:
au fouvcrain degré. V. de Piles & le diâ.
de Peint.
Quoique le terme de colorié s'étende fur
tous les objets, on l'emploie plus générale-
ment fur les carnations , par la raifbn qu'é-
tant plus fenfible que toutes les autres par-
ties , on diftingue plus aifément les teintes ,
les demi-teintes, le travail de la peau, la
fonte du pinceau, enfin, tout ce qu^exige
cette grande partie de Tart. Le coloris étoit
comiu & pratiqué avant Homère; r. fa dt(-
cription du bouclier d'Achille : on y voyoit,
dit-il , un laboureur ; le coutre de la charrue
fendoit la terre , & à mefure qu*il avançoit,
la terre , de jaune qu'elle étoit , fembloit de-
venir noire; & ailleurs il peint une vigne d'or,
dont les raifinsannonçoient leur maturité par
une teinte de noir , 5c des lions qui s'abreu-
vent du fang noirâtre d'un taureau. {R)
C'eft par le coloris qwt la peinture fe dif-
tingue du fimple <lemn &: de l'eftampe. Si
la nature n'avoit qu'une couleur pour tous
les objets , comme la gravure en taille
douce , elle lèroit fans doute privée d'une
partie confidérable de fa beauté. Il y a dans
les couleurs un attrait qui fouvent ne le cède
guère à celui qui réfijltc de la beauté des
formes. Rien dans la nature inanimée n'é-
gale la beauté d'un foleil couchant , ou le
gracieux d'une aurore riante. Même dans la
nature animée , les charmes des couleurs
qui brillent fur le vifage d'une belle jeuiief-
fe , ne le cèdent point aux appas de la figure.
Tous les effets qui réfultent des formes, font
aufTi produits par les couleurs , & peut-être
avec la même énergie. La pâleur mortelle
réveille la compaflîon ; &: certaines couleurs
qui révoltent par leur désharmonic, font
très-capables d'exciter l'horreur.
Ceux qui n'admirent que le deiTîn , font
peu de cas du coloris , méconnoiflent la
beauté qui réfide dans les couleurs, ôc
COL
oublient que dans les ou vrages de l'art , c'eft:
l'illulion qui produit le plus haut degré
d'énergie. Or, il n'y a point d'illufion où
la vérité n'efl pas parfaitement repréfentée ,
& par conféquent en fait d'objets vilibles ,
la j)erfcdion du coloris eft un article très-
eflentiel pour atteindre au grand but de
Tarr. On eft frappé à la vue du Laocoon de
marbre : cet afpeâ: excite en nous divers
fentimens très-vifs. Mais que ne feroit-ce
pas fi ce grouppe commençoit à s'animer ?
Si nous appcrcevions la pâleur d'une an-
goiflè mortelle fur le vifage &c fur toutes les
chairs, les traces du fang fur la peau, l'é-
cume venim.eufe du ferpent, collée fur le
bandeau du malheureux prêtre, c'eft alors
feulement que l'impreflîon feroit à fon plus
haut degré, & qu'il nous fembleroit enten-
dre les pénibles accens d'une refpiration fuf-
foquée. La Niobé de marbre excite la plus
forte compalTîon ; mais qu'on y ajoute le co-
loris de Teffroi, des yeux hagards, fixes &
mornes, perfonne ne pourra foutenir l'afped
d'un pareil tableau. L'Apollon du Belvé-
dère eft aduellement d'une beauté ravi {fante;
qu'on conçoive l'effet qu'il pourroit pro-
duire , fi à tout ce qu'il a d'attrayant , fc
joignoit encore le coloris d'une divine jeu-
nefîè , & l'éclat éblouiffant du père de la
lumière. Convenons donc que le coloris par-
fait a un prix indépendant de la beauté des
formes , & qu'il conftitue une partie aufli
efientielle de l'art du peintre que le defTîn.
Mais en quoi confifle cette perfedion du
coloris ? ôc par quelle voie , par quelle étude
le peintre parvient-il à la pofïéder? C'eft
peut-être là le problême le plus difficile de
l'art. Le Titien lui -même auroit fans doute
été embarraffé à exprimer ce qu'il fcntoit fur
la beauté & l'énergie du coloris. Puifqu'il eft
déjà fi mal-aifé de déterminer en quoi con-
Ciûe la beauté dans les formes, quoique l'on
ait diverfes notions diftindes fur les figures,
comment feroit - il poflîble de décrire la
beauté qui réfulte du mélange & de l'har-
monie des couleurs , fur lesquelles on ne
peut avoir que des notions confufesî Les
proportions du corps humain , pour me fer-
vir des exprefïîons d'un grand connoiffeur
( M. de Hagedorn ) , nous font beaucoup
moins inconnues que les phénomènes de la
nature qui fontconftamnjeut fous nos yeux.
COL
& que les effets de la lumière relativement
à la peinture. Qu'on ne demande point com-
ment les couleurs impriment dans l'ame l'a-
mour, la volupté , une douce langueur, une
délicieufe extafe : on peut le fentir, mais on
ne lauroit l'exprimer.
C'ell ce qui rend l'étude du coloris Ci diffi-
cile. Je ne parle point encore de l'art d'ap-
pliquer les couleurs , mais de celui d'exercer
l'œil à bien fentir leur beauté j car quiconque
n'a pas ce fentiment du beau à l'égard des
couleurs , maniât-il toute fa vie le pinceau ,
ne fera jamais ni un Titien ni un Corregei
auflî peu, qu'à force de s'exercer au delTin,
l'on peut devenir un Raphaël , fi l'on ne fent
pas la beauté qui réfide dans les formes. Pour
s'élever au defîus du fimple deiTinateur ,
pour deveioir peintre , il faut donc com-
mencer par accoutumer l'œU à fentir la
beauté du coloris,
C'eft à l'école de la nature que l^artifte
doit recourir i il y verra , fous toutes les for-
mes polTibles , les plus parfaits modèles dans
tous les genres du beau. Ceft dans cette
école qu'il pourra fe former un coup d'œil
(ur ôc pénétrant, comme le deffinateur grec
fe formoit le fien dans les gymnafes, dans
les ieux publics & dans les fêtes folennelles,
à force d'avoir fous Tes yeux la belle nature
diverfifiéc en mille manières. Dans ces heu-
feufes contrées où la nature femble rajeunie,
où elle eft iuépuifable en beautés de divers
genres, un amateur de belles vues, qui aux
différentes heures du jour , & dans toutes
les fàifons de l'année, les cherchera d'un œil
empreffé & contemplatif, tantôt dans un
vallon folitaire, tantôt fur le haut d'une
colline , d'où il pourra découvrir au loin une
infinie variété d'objets diftingués par l'éclat
des couleurs , fe livrera d'abord aux douces
imprejffions de ce raviflànt fpedaclc; il com-
mencera par (èntir i mais en examinant de
plus près la caufe du fentiment qu'il éprouve,
il reconnoîtra enfin que du fimple mélange
des couleurs réfulte une efpece particulière
de beauté qui ne le cède point aux beautés
d'une nature différente.
Des oblèrvations fouvent répétées lui fe-
ront enfin démêler une partie des raifons qui
rendent ces fenfations fi délicieufçs. Il re-
marquera que les mêmes objets , apperçus
d'au même point de vue, forment tantôt le
COL 543
fpcdacle le plus raviflànt, & d'autres fois
n'ont rien qui l'émeuve , quoique les mêmes
couleurs femblcnt fixées aux mêmes places :
il découvrira deux caufes de cette difpariré >
l'une dans l'efpece de lumière que les objets
lui renvoient , & l'autre dans la manière que
ces objets la reçoivent.
La plus grande beauté de la lumière réfide
dans la fource même d'où la lumière émane j
mais les organes de notre œil font trop foibles
pour foutenir l'éclat de cette beauté ; fenv-
blable aux divinités , elle éblouiroit les mor-
tels, fi elle fe préfentoit fans voile. Quand
l'air eft trop pur , les rayons, du foieil répan-
dent une lumière trop fijrte fur les objets , 6c
les ombres en deviennent trop tranchantes.
D'un autre côté , quand toute l'atmofphere
eft enveloppée d'un épais nuage, l'éclat de I^
lumière en eft totalement éteint , & les cou*
leurs naturelles perdent toute leur force. Une
contrée n'eft jamais plus riante à la vue , que
lor 'qu'elle eft im.médiatement éclairée par les
rayons du foieil modérément amortis dans
les va|)eurs de l'air, & que l'obfcurité des
ombres eft adoucie parles rayons que l'azur
du ciel y réfléchit. Cette obfervationenfeigne
au peintre qu'une des principales caufes de la
beauté du coloris, eft le ton gracieux d'une
lumière adoucie. Elle lui en feigne encore
que le tableau entier de la fcene qui s'offre à
les regards, & chaque grande partie de cette
fcene tire la beauté de fon coloris de deux
jours principaux , l'un qui eft la lumière im-
^ médiate du fbleil, mais bien tempérée; &
l'autre le reflet d'un ciel ferein qui répand fur
les ombres une douceur agréable ôc variée.
Notre obfervateur découvrirarune féconde
caufe principale de la beauté du coloris dans
la direction des rayons qui éclairent les ob-
jets de la fcene; telle contrée qui, à certaine
heure du jour, fe repréfente à l'œil comm.e
k tableau le plus riant , paroît fans beauté
quelques heures après, bien que le ciel con-
ferve la même férénité. Un petit nombre
d'obfervations fur ce phénomène , feront
connoitre au peinrje différentes fources du'
beau dans le coloris. Il apprendra qu'un objet
{wroit dans fa plus grande beauté , lorfque la
lumière incidente le divMe en deux grandes
maflès bien proportionnées , l'une claire , ÔC
l'autre obfcure. Il fentira que l'œil ne fe re-
pofe avec plaifir.fur une contrée, que lorfquê.
544 COL -
les diverfes couleurs qu'il y apperçoît , en
tant qu'elles font claires & obicures , ne font
pas cparlès au hafard ôc fans ordre , mais
qu'elles font diftinguées en deux grouppes
principaux , enforte que le clair foit oppoié
à loblcur. Cette remarque le conduira à la
connoiilance générale des effets du clair-
obfcur Se des malTes ( F. les articles Clair-
obscur , &c.) , d'où il parviendra à recon-
noîrre des myfteres plus profondément ca-
chés fur la beauté du coloris.
En comparant ces deux mafïes oppofées ,
il s'appercevra qu'elles difputent entre elles
de la préférence, tant fur la beauté que fur
la variété. Le clair le charmera par le riant
& le gracieux de fesielles couleurs, & par
l'harmonie de leur dmriburion ; l'obfcur le
.touchera par une beauté plus mâle , par la
variété des couleurs 8^ par leur feu ; il admi-
rera le fingulier mélange des parties brillantes
avec des parxies fombres. Au milieu d'une
infinité de couleurs fans nom , diverfiliées
ôc multipliées encore par mille reflets difFé-
rens, il fera vivement frappé deséclaits qui
contraftent çà &c là'flvec l obfcurité du fond
d'où ils femblent partir ; il fentira que c'eft là
ce qui donne de la vie à Tenlemble , &: qui
f n rend l'effet allure.
Muni de ces notions fur la beauté du cc/o-
i'arti/te pafle de la contemplation de la
ns
nature à celle de l'art. Il obferve comment
les grands maîtres des écoles vénitiennes &
flamandes, ont lu tranfporter fur le bois
& 1a "toile les beautés de la nature par un
heureux choix de. couleurs bien afîbrties ; il
admire chez l'une la vérité portée au ^lus
•haut degré, & chez l'autre la beauté du
coloris élevée même au-delà du vrai jufqu'à
l'idéal. Il commence alors à rechercher par
quels moyens ces peintres font parvenus à
produire cet effet magiq^ue. C'eft alors qu-'il
reconnoît qu'un coloris parfait demande un
aufii grand génie qu'en fuppofe le delTin
correét des formes; que la peinture efl bien
moins Pouvrage d'une main exercée, qu^elle
n'eft la production d'un jaeureux génie, d'un
efprit éclairé par des obfervations fines & des
recherches profondes, & d'un goût épuré
qui faifit toujours le bon & choiiit toujours
le meilleur.
Après que le peintre aura formé fbn goût
à regardée la vérité 6c de la beauté du
COL
co/orh, par l'obfervation de la nature & des
ouvrages de l'art; il fe fervira encore de ce
double fecours pour apprendre l'art difficile
de colorier. A Pimitation de Léonard de
Vinci , il obfcrvera d'un œil éclairé par le
génie &c la fagacité , chaque effet particulier
des couleurs dans la nature ; ôc ce qui après
les obfervations reftera encore douteux ou
indécis , il s'en aflurera par des elfais ôc des
expériences faites à delfein.
D^abord il recherche avec attention com-
ment ce qu'on nomme l'effet eft produit
uniquement au moyen des jours ôc des om-
bres ; il confidere enfuite comment , à l'aide
des couleurs claires ôc obicures , on produit
un effet analogue au premier , qui réfultoic
de la lumière ôc de Pombre. Il ié forme un
recueil des obfervations que la nature lui
fournit là - defllis ;, & il l'augmente de fes
propres e liais; enfuite il remarque les cas où
il arrive qu'un corps éclairé, oppofé à un
fond obfcur, ou un corps obfcur placé fur
un fond clair , produit l'effet fingulier , ôc
prefquc magique , d'éloigner les objets ôc
de les repoufler en arrière.
Enfin , il obferve en général les modifica-
tions ôc la dégradation des couleurs à mefure
quePccil s'en éloigne davantage; comment
chaque corps dans fon cloignement fucceilif
reçoit de plus en plus la teinte de la couleur
de l'air ; ôc comment enfin des corps de cou-
leurs tout-à-fait différentes , vus à des gran-
des diftances, prennent tous la couleur com-
mune d'une perfpeétive aérienne. C'eft un
phénomène pittorefque elTentiel à obferver.
La recherche des caufes qui produifenc
^harmonie de couleurs, n'exige pas une étude
moins longue ni moins profonde. Notre
peintre apprendra ^ les découvrir , s'il ob-
'ferve bien comment un objet , à l'aide de fa
liimiere ou de fa couleur, femble s'avancer
hors du refte de la mafïe , ôc s'en détache de
manière à ne pouvoir être confondu ni réuni
avec les autres objets : dès-là il commencera
à fentir comment par un effet contraire, di-
vers objets peuvent fe perdre dans une feule
mafle ; ôc il comprendra pourquoi il faut en
tel endroit un jour ou une couleuFplus vive,
ôc en tel autre une lumière ou une couleur
plus tempérée.
La plus grande difficulté fera d'acquérir
une connoifïànce exade de l'afFoibliflèment
fucceffif
COL
fuccelTif des couleurs propres de chaque
objet, depuis le point le plus éclairé jufqu'à
Tombre la plus forte. La fcience des demi-
teintes ( Fbye^ Demi -teintes) eft peur-
être ce que l'art du coloris a de plus difficile.
Ce n eft qu'à force d^obferver avec de bons
yeux la nature & les ouvrages des maîtres de
lart qu'on peut fe flatter d'y réuflir.
A ces études fe joint enfin celle des reflets.
Ce font les reflets qui produifent le plus
haut degré de vérité , accompagné de la plus
grande variété. Cette partie , au refte , n'a
dans la théorie que peu de difficultés 5 mais
elle eft d'un détail pénible dans l'exécution.
L'homme étant l'objet le plus intérefîànt,
les perfonnages font aulïi le fujet principal
de la peinture j &: la partie du coloris qui
les concerne , exige une étude particulière
de la part du peintre. ( Voye':^ci-devantQAK-
NATioN. ) Heureufement on a dans cette
partie les plus excellcns modèles. Le Titien
a porté l'art des carnations au plus haut
degré de beauté, même de la beauté idéale,
bc Pon peut dire fans exagérer , qu'il a (ur-
pafle en cela la nature elle - même. Van-
Dyck s'eft contenté de la repréfenter dans
toute fa perfection. Ces deux grands maîtres
font en ce genre des oracles que le colorifl:c
ne fàuroit trop confulter.
Quand on réfléchit qu'à toutes ces con-
noiflances que le co/om exige, il faut en-
core y ajouter celle des couleurs matérielles,
de leur manipulation, de leurs mélanges,
de leur conftance ou de leur altération fuc-
ceffive; chofe qui, de même que le manie-
ment du pinceau , ne s'apprennent que par
un long ufage , on ne fera plus furpris qu'il
foit fi rare de voir un peintre excellent dans
le coloris. ( Voye^ ci-aprh Couleurs. )
C'cft ici où la maxime d'Apelle , nulla dies
fine linea , eft plus indifpcnfable que par-
tout ailleurs , & où l'art eft le plus inépui-
sable. Le célèbre Pefne , l'un des meilleurs
coloriftes de nos jours , bien que feptuagé-
naire , s'appliquoit très- fou vent encore avec
tout l'empreflement & l'étude d'un com-
mençant , pour acquérir un plus haut degré
de perfedtion dans la partie du coloris.
Les caradleres d'un coloris parfait ne (t
rcflemblent pas néceflàirement. Le Titien ,
le Correge & le Giorgion, ont porté le
coloris jufqu'au beau idéal. Van-Dyck, &
Tome Vni,
COL 54J
divers peintres flamands aflèz connus , ont
un cojoris de la plus grande vérité. Rubens
a même prêté encore à la nature quelque
cho e du feu de fon génie i il y a dans Çqs
meilleurs tableaux un coloris qui étonne
Claude Gillot , Nicolas Eerghem , Cornélius
Poelembourg & divers autres peintres de
payfages , fe font diftingués pour le gracieux
de leur coloris. Celui de Rembrand eft en-
chanteur :^ & bien qu'on n'ait point de nom
pour le défigner , il fait cependant un genre
à part, digne d'être remarqué. Il y a encore
un coloris févere & férieux , qu'on poûrroic
nommer le coloris folide : il n'a prefque point
de couleurs claires j c'eft un brun-clair, avec
un agréable mélange de bleu, de verdâtre
& de beau rouge : à en juger fur une fimple
copie , le meilleur modèle en ce genre de
Coloris y ed un tableau du Titien dans l'églife
de Santa-Maria délia Salute à Venife, dont
le fujet eft la defcente du Saint-Efprit fur
les apôtres.
Il feroit à fouhaiter qu'on pût donner une
clafnfication plus complète des divers genres
de coloris. Les noms font d'une grande ref-
fource , lorfqu'on ne peut pas mettre l'objet
même fous les yeux. On voudroit fouvent
indiquer au peintre le genre de coloris qui
convient à tel fujet; mais ce genre n;a point
de nom fixe : la fimple dénomination ne ren-
droit pas fans doute l'artifte plus habile ; mais
elle ferviroit à diriger fon habileté du coté le
plus avantageux. {Cet article ejl tiré delà théo-
rie générale des beaux-arts de M. SULZER.) •
Coloris , (Jardinage. ) il fe dit des fruits
qui mûriflènt &c qui prennent de la couleur ,
tels que les pêches, les prunes, les poires
& les abricots : même pour la leur faire
prendre, fouvent on d%arnit les feuilles
autour da fruit, qu'alors le foleil frappe
plus vivement Ôc dore mieux. Il y a des
curieux qui, avec un pinceau trempé dans
l'eau, le mouillent plufieurs fois dans la
plus grande ardeur du foleil. (K)
* COLORITE, f. m. ( Hi/f. eccléf.)
congrégation d'auguftins, ainfi àppellée de
Colorito , petite montagne voifine du village
de Morano y au diocefe de Caflàno, dans
la Calabre citérieure : ce fut dans une
cabane proche d'une églife dédiée à la
Vierge lur le Colorito , que fe retira eil
1530 Bernard de Rogliano, & qu'il com*
Zzz
54^ COL
mença l'inftitution de la congrégation des '
Colorites.
COLORNO , {Géog. mod.) petite ville
d'Italie , dans le duché de Parme près du
V6. Long. 2,7, ^o; lat, 44, 54.
COLOSSE, terme dArchiteclure^ du
grec Kohoffooi , compofé de koKo? , grand , &
israoi y œil , c'eft-à-dire , grand à la vue.
On entend foub ce nom un bâtiment d'une
grandeur conndérable , tels qu^étoient les
pyramides en Egypte , les amphithéâtres en
Grèce & en Italie. Colojfei fe dit aulïï d une
iîgure dont la proportion eft fort au-deflus
de la naturelle , telle qu'étoit celle du foleil
à Rhodes & les ftatues des empereurs Né-
ron & Commode , dont il refte encore quel-
ques fragmens dans la cour du capifole à
Rome. On dit auffi qu'une colonne eft co-
loflàle, lorfqu^elle furpalTe deux ou trois
pies de diamètre. Fbye:(_ Colonne. (P)
Colosse de Rhodes , {Hijl. anc.) ftatue
d'airain'd'une grandeur prodigieufe, lîtuée
à l'entrée du port de Rhodes, & qui paf-
ioit pour une des lept merveilles du monde.
En voici l'hiftoire tirée principalement
de M. Prideaux , part. II, liv. II.
Cette ftatue étoit dédiée au foleil; elle
avoit 70 coudées ou 105 pies de haut, &
le refte à proportion j peu de gens pou-
\oient embrallèr Ton pouce ; les navires
paflbient à pleines voiles entre fes jambes.
Démétrius , après avoir affiégé vivement
la ville de Rhodes pendaiit un an fans pou-
voir h prendre , las d'un fi long fiege, fit la
paix avec les Rhodiens , & en s'en retour-
nant il leur donna en préfent toutes les
machines de guerre qu'il avoit envoyées à
ce fiege. Ils les^endirent dans la fuite
pour 300 talens C^n million loo mille liv.
ou environ), dont ils fe fervirent, avec
l'argent qu'on y ajouta , pour faire ce colojfe.
Ce fut l'ouvrage de Charès de Lindo , dif-
ciple du fameux Lyfippe , qui y employa
1 2 ans. Mais 6G ans après l'exécution de fon
entreprife, le colojfe fut abattu par un grand
tremblement de terre qui fe fit fentir en
Orient & qui caufa des défolations prodi-
gieufes, fur-tout dans la Carie "& dans Pile
de Rhodes. On commença à travailler à ce
fameux colojfe Vzn 300 avant Jefus-Chriftj
il fut achevé l'an 188 , & renverfé l'an 122.
' Les Rhodiens i pour réparer le dommage
c ot.
que cet accident leur avoit caufé, quêtèrent
chez tous les princes & les états grecs de
nom ou d'origine , & exagérèrent telle-
ment leurs pertes , que la collecte qui Ce
fit pour eux , fur-tout chez les rois d'Egypte,
de Macédoine, de Syrie, du Pont Se de
Bithynie , alla pour le moins à cinq fois
autant que la véritable fomme à laquelle
ces pertes fe montoient.
En effet , Pémulation qui régna entre les
princes pour foulager cette ville défolée ,
eft fans exemple dans l'hiftoire : Ptolémée ,
roi d'Egypte, fournit feul 3 00 talens,que nous
n'évaluerons ici que 350000 écus, un mil-
lion de mefures de froment , des matériaux
pour bâtir vingt galères , tant à cinq rames
qu'à trois rames , une quantité infinie de
bois pour d'autres bâtimens, & en parti-
culier pour rétablir le colojfe, 30CO talens,
t'eft-à-dire, 9000000 fuivant.M. Rollin,
& plus de 1 0000000 fuivant le doâreur
Bernard. Outre les rois, toutes les villes
fignalerent leurs libéralités : les particuliers
voulurent auffi entrer en part de cette gloirej
& l'on cite une dame appellée Chryféis ,
véritablement digne de fon nom , qui four-
nit feule looGoo mefures de froment. Qiie
les princes d'à préfent., dit Polybe , & nous
pouvons dire 2000 ans après lui , que les
princes de nos jours comprennent combien
ils font éloignés de ceux dont on vient de
parler. En aftèz peu d'années , Rhodes fut
rétablie dans un état plus magnifique qu'elle
n'a voit jamais été, à l'exception du colojfe;
car les Rhodiens au lieu d'employer une
partie de cet argent , comme c'étoit la
principale intention de ceux qui l'avoient
donné , à relever le coloffe , prétendirent
fort fàgement que l'oracle de Delphes le
leur avoit défendu, & gardèrent toutes
ces fommes , dont ils s'enrichirent.
Le colojfe demeura abattu comme il étoit
fans qu'on y touchât pendant 894 ans, au
bou,t defquels, l'an de Jefus-Chrift 672 ,.
Moawias, le fixieme caHfe ou empereur
des Sarraiins, ayant pris Rhodes, le vendit:
à un marchand juif qui en eut la charge
de 900 chameaux ,» c'eft - à - dire , qu'eri
comptant huit quintaux pour une charge ,
Pairain de cette ftatue , après le déchet de
\ tant d'années par la rouille , ùc. & ce qui
vraifemblablement en avoit été volé, fè
COL
^ontoît encore à 720000 liv. ou à 7100
guintauf.
Ces faits prefque tous rapportés par M.
Prideaux , font appuyés des témoignages
d'Eufebe, ckron. d'Orofe, lib. IV^ cap. xiij;
de Polybe, lib. V; de Pline, Ub. XXXIV,
cap. vij; de Strabon, lib. XVI; de Zonare,
annal, fub rcgno Confiant, imper. Heraclii.
nepot. de Ccdrenus, annal, 6c de Scaliger,
animadv. in Eufeb. chron. n. IJS4.
Le coloffe de Rhodes n'eft pas le feul dont
il ioit fait mention dans les antiquités. Il y
avoit à Memphis en Egypte plufieurs ftatucs
.coloflales de Séioftris & de fa famille^ à Apol-
lonie dans le Pont , une ftatue d'Apollon de
trente coudées , que LucuUus fit tranfporter
à Rome \ dans cette ville , fept colojfes, deux
d'Apollon , deux de Jupiter, un de Néron ,
un de Domitien, un du Soleil. Article de
M. le Chevalier de Jaucourt.
COLOSTRE, colojlrum, {Phyfrologie.)
premier lait qui fè trouve dans le fein des
femmes après leur délivrance. V. Lait.
COLOSTRUM, {Pharmacie.) quelques
auteurs ont donné ce nom à une efpece
d'émulfion créparée avec la térébenthine &
le jaune d'oeuf. Blancard. V. Emulsion.
. COLOURI , {Géog. mod.) île de la Grèce
dans le golfe d'Angia. Lon(r. 42, 40; lat.^8.
COLPORTAGE, f. m. {Comm.) em-
ploi ou fonction de celui qui eft colpor-
teur. V, Colporteur.
COLPORTER, porter des marchan-
difes dans les rues ou de maifon en mai-
fon; il fîgnifie auffi porter pendues à (on
cou dans une manne , de petites & me-
nues merceries, comme couteaux , peignes ,
cileaux , ùc.
Colporter , en termes de Librairie ,
c'eft porter des livres dans les maifons pour
les y vendre ; c'eft auiïî vendre dans les
rues des feuilles volantes ou papiers publics ,
comme arrêts > fentences , gazettes, loterie,
€'c. V. Colporteurs.
COLPORTEURS , f. m. c'éroient an-
ciennement des gens de mauvaife foi, qui
rodoient de ville en villc^ vendant & ache-
tant de la vaiflèlle de cuivre , d'étain &
autres femblables marchandifes , qu'on ne
doit vendre qu'en plein marché. C'eft en
ce fens que ce mot eft employé dans des
réglemens de la z;®. année de Henri VIII,
COL 547
ckap. vjy Se par d'autres de la 53^^ année
du règne du mcme prince , chap. iv. C'efl:
ce qu'on appelle en Vxznce. perte -balles ,
coureurs y mercelots ou brocanteurs. .
Nous nommons aujourd'hui colporteurs,
des gens qui font métier de porter dans
les maifons des marchandifes , comm.e
étoffes , pommades , linge , ùc.
Ou de petits marchands qui les crient
dans les rues ; on les appelle ain/i , parce
qu'ils portent & étalent ce qu'ils ont à
vendre dans une petite manne ou caflètre
pendue à leur cou avec une large courroie
de cu*r, ou une fangle.
Ou des gens qui font métier de porter
à^s livres dans les maifons ou de vendre
des papiers pubHcs dans les rues. Comme
ce font pour l'ordinaire ces fortes de gens
qui font le commerce des livres ou papiers
volans non autorifés , leur état à Paris a
attiré l'attention du gouvernement : leur
nombre eft fixé ; leurs noms doivent être ciî-
régiftrés à la chambre royale & fyndicale de
la librairie. V. Colporteurs {Jurifpr.)
_ Colporteurs, {Jurifpr.) dans les an-
ciennes ordonnances font nommes compor-
teurs , quia fecum portant les chofes qu'ils
vendent par la ville. On trouve pluficurs
ordonnances qui les mettent dans la même
clafle que les menus feneftriers , c'eft-à-dire ,
les petits marchands qui expofent des den-
rées à vendre feulement fur une fenêtre. Le
commerce des uns & des autres étant peu
confidérable , ils étoient exempts de certaines
impofitions. Les lettres de Ph'ilipe VI, du 17
février 1349, difent que menus feneftriers,
petits conujorteurs aval la ville de Paris, ne
feront tenus de rien payer de l'impo/ition
qui étoit établie fur les marchandifes & den-
rées qui fe vendent à Paris, s'ils ne vendent
en un jour dix (buS de denrées; que s'ils les
vendent, ils feront tenus de payer; & que
s'ils vendent au-de(Ious , ils ne feront tenus
de rien payer. Les lettres du roi , du 3 mai
175 1 , portent la même chofe , à Poccafion
d'une nouvelle aide ou impofition accordée
,au roi par la ville de Paris.
Les revendeufes , petits-merciers & autres
qui portent dans les rues des marchandifes
vieilles ou neuves à vendre , étoient autrefois
tous compris fous ce terme de colporteurs.
En temps de contagion, les colporteurs &c
Zzz 1
54» C O L
revendeufes ne peuvent vendre ni porter
pai- la ville aucunes hardes . habits , linges ,
ni autres meubles , fur peine de la hart. Il
eft défendu à routes perfonnes , même aux
fripiers d'en acheter, fur peine d'amende
'de de punition corporelle. Ordonnance de
police du ^0 oclobre IS9^' Traité de la po-
lice , tome I, page 6^^.
Les colporteurs qui vendent des livres
dans les maifons, & les imprimés qui fe
crient dans les rues, tels que les ordon-
nances , édits , déclarations , arrêts de ré-
glemens , fentences de police , condamna-
tions à mort , & autres chofes qui doivent
être rendues publiques , vendent aulTi d'au-
tres imprimés qui ne font faits que pour
amufer le peuple : ceux qui s'adonnent à ce
métier, ont pour cet effet une attache
de la police , & portent à leur habit une
pièce de cuivre qui annonce leur état. L'arrêt
du confcil du 4 mai 1669, fait défenfe à
tous colporteurs de vendre ni colporter ou
afficher aucunes feuilles & placards, fans
peî-mifTîon du lieutenant de police j & l'or-
donnance de police, du 17 mai 1680, leur
réitère les mêmes défenfes par rapport aux
affiches. Voye^ le tr. de la police , tom. /,
pag. %S2 à ^84
On permet quelquefois aux colporteurs de
vendre certaines pièces , qu'on leur défend
néanmoins de crier, pour éviter le grand
éclat qu'elles pourroient faire parmi le bas
peuple. Il ne leur eft pas permis d'annoncer
les pièces qu'ils vendent. fous un autre titre
que celui qu'elles portent , ou de la manière
qui leur eft prefcrite 5 Se ils doivent fe con-
former en tout aux ordres de la police. {j4)
COLRAINE, {Géog. mo^.) ville d'Ir-
lande dans la province d'Ulfter, au comté
de Londondery , fur la rivière de Banne.
^ COLSAT, f. m. {^agriculture.) efpece
de chou fauvagc qui ne pomme point, 6c
dont la graine fournit de l'huile.
La plus nojre , la plus féche, la plus pleine
Se qui paroît la plus ondueufe en l'écra-
fant , efl là nieilleure pour le moulin ; elle
peut être feméc avec de moindres qualités.
Elle eft fouvent mêlée par le défaut de
maturité égale , & l'on diftingue la moins
mûre à fa couleur un peu rouge.
On attribue cette inégalité aux vers qui
fc jettent dans les racines des jeunes plantes i
COL
il faut y regarder quand on les tranfplante/
& rebuter celles qui en font attaquées i le
ver doit fe trouver dans le nœud.
Son prix varie félon l'abondance ou la
difette j il dépend aufli des recherches que
l'on en fait plus ou moins grandes, félon
la réufïite des huiles de noix Se autres ,
dans les pays qui en tirent.
On pourroit l'apprécier à 7 liv. lo f. la
rafîere , année commune, depuis dix ans :
elle en vaut aujourd'hui iz : elle pourroit
monter jufqu'à 16 llv. par extraordinaire.
La rafiere eft une mefure qui doit contenir
à-peu-près cent livres poids de marc, la grai-
ne étant bien feche , deux rafieres font un
fac de ce pays , & fix avots font une rafiere.
Il en faut une livre pour femer un cent
de terre, qui fait zi toifes 4 pies 8 pouces
quarrés. C'eft fur cette mefure que l'on fe
déterminera, & fur laquelle on peut em-
ployer les plus grands terrains.
La terre légère eft la meilleure , pourvu
qu'elle n'ait pas moins d'un pié de bon
fonds , & qu'elle ne fbit pas pierreufe.
Celle où l'on fème n'eft pas celle oii Ton
plante. ' ,
On doit préparer la première en la fumant;
quatre charretées de fumier fuffiront : cha-
cune peut pefer environ 1400 livres.
Le fumier bien étendu , on y paflè la
herfe pour faire prendre nourriture à la
terre; on laboure peu après deux ou trois
fois, félon qu'elle eft chargée d'ordures;
enfin , on l'applanit en y ramenant de nou-
veau la herfe pour recevoir la femence >
dont une livre fur un cent de terre pro-
duira dequoi planter une pièce de 300.
Si-tôt après la moiflbn , on fume & on
prépare, comme nous avons dit, la terre
deftinée à planter.
Au furplus, tout le monde fait que l'on
fume plus ou moins, félon la chaleur des
terres.
Il faut que la terre foit repofée.
On feme vers le io de juillet , vieille
ou nouvelle femence , pourvu qu'elle foit
afïez bonne , & l'on plante au commen-
cement d'oÂobre.
Qiiand la terre eft enfèmencée , il n'eft
plus queftion que de laiffer croître les,
plantes , qui doivent être fuffifamment
montées à la fin de feptembre.
COL
On les déplante pour lors par un beau
îour ; on rebute les véreufes ôc les langui (Tan-
tes , & on les tranfporte fur Tautre terre pré-
parée comme il a été dit : on y fait des trous
avec un plantoir , à ladiftance de^ demi-pié
en ligne perpendiculaire, Ôcd'unpié en ligne
horizontale : chaque trou reçoit ia plante ,
qu'un homme reflèrre avec le pié à mefure
qu'un enfant la place.
Tousles huit pies, on fait une rigole en
talur d'un pié d'ouverture, & autant de pro-
fondeur ; on en jette la terre à droite & à
gauche , fur la diftance d'un pié qu'on a
laide pour cela entre chaque plante: c'eftce
qu'on appelle recouvrir. Cela fe fait pour l'é-
coulement des eaux, ôc pour garantir de la
gelée.
Il n'y a plus d'autre façon à donner , à
moins que d'arracher les mauvaifes herbes ,
s'il en poulloitaflez pour étouffer.
Il n'y a que des événemens extraordinai-
res qui puiiiènt nuire zucolfat dans toutes les
faifonsitous les temps lui font propres, fi
l'on en excepte les gelées trop fortes & tar-
dives , les grands orages , la grêle , & les
grands brouillards , dans le temps de fa ma-
turité. •*
On fait la récolte à la fin de juin , quand
la graine eft prête à épiler j & pour éviter cet
accident , on fè garde de la laiflèr trop
mûrir pour recueillir.
On fcie avec la faucille , & Ton couche
les tiges fur terre comme le blé , on les y
lailïè pendant deux beaux jours 5 fi la pluie
ne permet pas de les relever après ce temps ,
il faut attendre.
On les relevé dans un drap, ôc on les
porte au lieu préparé -pour faire la meule
fur la même pièce de terre , afin de ne pas
perdre la graine j on y fait autant de meu-
les que la dépouille en demande : celle de
huit cents déterre doit fufïire pourune meu-
le ;& pour la faire , on forme une terraflè
bien feche Se bien battue, de vingt pies
quarrés ; on y met un lit de paille , fur lequel
on arrange les tiges la tête en dedans -, on ar-
rondit cette meule dès le pié jufqu'à la hau-
teur de trois toifes plus ou moins , en termi-
nant en pain de fucrc , & l'on couvre le def-
fus pour être à l'abri de la pluie.
Quand les grands venrJa mettent en dan-
ger de culbuter , on a foin de l'étayer.
COL 549
Le colfût repofe ainfi juiqu'apres la moif^
fon , à moins que l'on n'ait lieu de crain-
dre l'échauffement de la graine ; ce qui pour- ^
roit arriver par des temps fort plufieux , ou
pour l'avoir recueillie trop verte.
Il efl efTentiel de choifir un beau jour pour
défaire la meule ; mais avant tout on prépare
au pié une plate-forme battue , auflî dure
que les battines de grange i & c'eft U-Jcdus
que l'on bat à mefure que la meule fe défiic
avec la précaution de n'en lever les tiges
que dans un drap.
Dès qu'on en a battu une certaine quan-
tité , il feut retirer avec un râteau la paille
écrafée ; cela aide à bien battre le refte , &c
fait perdre moins de graine.
Qiiand tout efl battu , on la nettoie par
le moyen d''un puroir.
îl y en a de deux fortes. L'un eft un grand
tambour troué en rond , pour y faire pafler
la graine : c'eft le premier dont on feferr,
& on jette au rebut ce qui refte dans le
tambour.
Le fécond eft aufîi un tambour dont les
trous font en long , pour y fiire pafler la
poufliere , en y mettant ce qui a pafle par .♦
le premier.
En tamifant , on a foin de retirer vers les
bords ce qui peut reft'er de gros marc , & l'on
fait toujours la même chofe jufqu'à la fin.
La graine ainfi purifiée , on la porte dans
des facs au grenier , Se on l'y garde comme
le blé , jufqu'à ce qu'on la vende. Si 1 on y
trouvoit un peu d'humidité , il faudroit la
remuer.
Le plancher du grenier doic être d'autant
moins ouvert , que la graine eft petite. Bien
des gens y étendent une grande toile pour
l'y renverfer.
Il eft bon d'obferver qu'elle ne profite pas
dansle grenier ; c'eft pourquoi l'on s'en défait
le plutôt que l'on en trouve i^i prix.
Tout ce- qui refte de paille courte ou ha-
chée , on le donne aux pauvres , ou bien on le
brûle fur les lieux : c'eft un engrais.
Les tiges battuesferventàéchaufferle four,
ou pour le feu des pauvres. Les fermiers qui
n'en font pas cet ufage , les vendent afTez
ordinairement.
Il ne faut à la* graine aucune façon , après
quelle eft recueillie : pour la porter au mou-
lin , tous les temps font: propres quand il y
5P
COL
a du vent , excepté par les gelées fortes.
Vingt rafieres de graine rendent année
commune quatre tonnes d'huile , chaque
tonne pefant ico livres poids de marc, ians
y comprendre la futaille.
■ Il faut encore oblerver que le marc de
rhuile fe met à profit : on en fait des tour-
teaux qui entretiennent le lait des vaches
pendant l'hiver, en les délayant^ dans le
boire.
On s'en fert aulTi à fumer les terres , en
les réduifant en poufTiere. C'eft un engrais
un peu cher.
Ces tourteaux font de la figure d'une
gauffre de quatorze pouces de long ôc huit
de large , fur demi - pouce d'épail^èur : ils
doivent pe.'er chacun huit livres & demie
poids de marc, félon les ordonnances de la
province.
Ils fe font à la preflè, que Le vent fait
agir dans le moulin.
Vingt raiieres de co//i? rapportent ordinai-
rement 550 tourteaux. Dans un pays où l'on
ne feroit point cas des tourteaux , la dimi-
nution du profit feroit bien grande.
* § COLTIS , f. m. ( Architecl, navale. )
Le ccltis eft le premier couple de l'avant du
vailîeau ; il porte ordinairement fur le haut
du brion , & plus fouvent il eft avancé fur
l'élancement de l'étrave , afin qu'il donne
plus d'appui aux alonges d'écubiers ; cepen-
dant la pofition &c la coupe du coltis font
foumifesau travail duconftrudeur : car on
ne pourroit prétnter que des principes trop
généraux pour la coupe des façons de l'avant
du vaillèau , flans lefquels eft comprife &
influe eflêntiellement la coupe du coltis Se
même fa pofition.
Le couple du coltis n'eft pas établi per-
pendiculairement comme les autres couples,
fa fituation eft oblique , en forte qu'il fait
avec la quille un angle d'environ vingt
degrés. Ce dévoiement lui procurc plus de
ftabilité ôc diminue l'équerfage des couples
de cette partie du vaifteau.
La grande fortie de l'alonge de revers du
coltis donne plus de faillie & de folidité aux
bofioirs, plus de facilité pour Pabordage dans
un combat, plus d'aifènce rour la manœuvre
du gaillard - d'avant , &z (ert enfin à rejeter
en dehors leslam>esqui., fins cette réfiftance,
fe brifcroiçnt fur le gaillard -d'avant. Les
COL
couples de rempliflage placé en arrière du
col:is y participent beaucoup de fes contours.
Inpruclicn élémentaire 6 raijonnéejar la ccnf-
rruclion praàquj des vmjfeauxy par M. Du-
ranti de Lironcourt.
COLOMBO , C m.iHiJÏ. nat. Tchthyo^
log.) nom que les habitansd'Amboine don-
nent à un poiflbn qui a été paflablement
gravé par Ruyich, darsfa Colàâion nouvelle
des poijjuns a'Amboiney pt. XIX; n°. XO ^
P^g^ SS-
II a le corps cylindr-que , pointu aux deux
extrémités , trois fois pius long que large , la
tête médiocrement longue , les yeux petits ,
le mufeau alongé en cylindre , de manière
que la mâchoire fupérieureeft beaucoup plus
longue q;!e l'inférieure.
Ses nageoires font au nombre de fept ;
(avoir , deux ventrales petites , placées fous
le milieu du ventre , loin derrière les pedo-
rales qui iont quarréesjune dorfale étendue
de la tête à la queue , un peu plus haute de-
vant que derrière; une derrière l'anus aflèz
longue, enfin une à la queue creufée en arc
jufqu'au quart de fa longueur.
Son corps eft jaune marqué de neuf an-
neaux noirs; fa queue a de chaque côté
quatre lignes longitudinales noires ; fa mâ-
choire fupérieurea aufifi deux anneaux noirs.
Mœurs. Le Colombo eft commun aux îles
Moluques, fur-tout autour deCeram fur les
cotes couvertes de vafos.
Qualités. Il a la chair in/îpide , ^ fî molle
qu'elle tombe en putréfaction , fans pouvoir *
lécher, comme il arrive aux autres poiftbns
lorfqu'on les expofe au foleil.
Remarque. Ce poiflbn forme un genre
particulier dans la famille des carpes. ( M.
Ad AN SON.)
COLUG A , ( Géog, moà. ) viUe de Pem-
jDire rufïien aux confins du duché de Rezan,
Fur la rivière d'Occa.
/^COLUMBARIA, {Wjl. anc.) c'eïï
ainfi qu'on appelloit des trous pratiqués aux
flancs des vaiflcaux vers leurs Bords , par où
paflbient les rames : ce nom leur venoit de
leur reflemblance avec l'entrée des boulins
ronds des colombiers.
On donnoit encore le même nom à des
maufoléesde familles de diftindion, ou l'on
avoit pratiqué des cellules , & dans ces cellu-*
les des rangées dt iiiches, placées les unes
COL COL 551
fur les autres, comme les boulins dans un | aux riges, fans aucun pédicule, à des dif-
colombier. Ces niches renfermoienc des tances égales à le^jr longueur.
urnes rondes , offce ; il y en avoit auiïi de
quarrées. Un columbaria contenoit fouvent
pluiieurs urnes. V. l'antiq. expliq.
COLUMNA , ( Géogr. mod. ) ville de
r^mpire ruiïien fur la rivière d^Occa. Long.
55, çl; lat. 54, 50.
COLUiMNEA, {Wjî.nat. hot.) genre
de plante , dont le nom a été dérivé de ce- '
lui de Fabius Colomne. La fleur des plantes
de ce genre eft monopétalc, & faite en
forme de mafque , dont la lèvre fupérieure
eft un peu voiitée &: concave , & l'inférieure
eft diviféc en trois parties. Il fort du calice
un piftil qui eft attaché comme un clou
à la partie poftérieure de la fleur, & qui
devient dans la fuite un fruit globuleux ,
mou & rempli de petites femences oblon-
gues. Plumier , nova plant. Americ. gêner.
Voyei Plante. (J)
COLUPPA* f m. {Hfjf. nat. Satan.)
plante du Malabar , alTez bien gravée fous
ce nom par Van-Rheede dans fon Hortus
Malabaricus , volume X , planche XI, page
%i ; J. Commelin dans fes Notes fur cet
ouvrage , l'appelle perjîcarico folio , repens
Malabar ica , flore globofo albefcente. M.
Linné , dans fon Species plantarum , impri-
mé en 1 7 5" 3 , page zz^, Pappelle gromphrena
jfeJfHis^ caule repente, folii s lanceolatis fejji-
libus, capitulis oblongis fejfilibus aphyllis ; &
il le confond avec X'amaranthus humilis foliis
cppojitis , fiofculis in aliis glomeratis, Bur-
. niann. Thef. Zeyl. tab. iP^ fig. z.
C'eft une plante vivace à tige cylindrique
longue de 3 à 4 pies , fur 3 à 4 lignes de
diamètre, rampaïite, ramifiée de quelques
branches alternes , élevées d'un dcmi-pié ,
vertes , jetant de chaque noeud un faifceau
de 15 à 20 racines capillaires, "blanches
d'abord, enfuite rougeâtres, longues d'un
pouce. •
La racine principale eft cylindrique lon-
gue de 3 à 6 pouces, fur 5 à 6 lignes de
diamètre.
Les feuilles font oppofées deux à deux,
difpofées parallèlement fur le même plan,
elliptiques , pointues aux deux extrémités ,
longues de 1 pouCes à x pouces & demi,
trois à quatre fois moins larges, entières,
ifpallfes, molles, attachées horizontalement
Des aillclles alternes de chaque paire de
feuilles , fort une tête fphérique feffile ,
de 4 lighes de diamètre, compofée de 20
à 30 fleurs fefliies contiguës, imbriquées,
très-ferrées , blanchâtres , à centre verd ,
longues d'une Hgne , ouvertes Ibus un an-
gle de 45 degrés.
Chaque" flçur eft hermaphrodite , polypé-
tale incomplète , pofée autour de l'ovaire :
elle coniîfte en un caHce à 8 feuilles , dont
cinq intérieures aflez égales , triangulaires ,
concaves, pointues, une à deux fois plus
longues que Irftges , blanchkres , perfif-
tantes, en trois étamines à anthères jaunes,
réunies en bas par leurs filets , en une mem-
brane courte; du centre du calice s'élève
un ovaire fphérique, terminé par un ftyle
cylindrique , couronné par un ftigmate cy-
lindrique, tronqué, velu.
L'ovaire en mûrilîant devient une caplule
lenticulaire comprim.ée en forme de cœur,
membraneufe, blanc- jaunâtre, à une loge,
ne «'ouvrant point & contenant une graine
lenticulaire dune demi-ligne de diamètre,
d^abord roufle , enfuite bleue-terne , ayant
fur fes bords un petit tubercule Uanchâtre ,
tranfparent, par lequel elle eft attachée
droite , élevée au fond de la capfule.- ; *
Culture. Le coluppa croit au Malabar dans
les terres humides & aqueufes , où elle
rampe au fond de l'eau, en élevant fes
branches un peu au deftus de la furface.
Qualités. Cette plante n'a ni faveur , ni
odeur , à moins qu'elle ne croifle fur des
terrains faHns de la côte maritime j alors
elle prend un goût de fel.
Vfages. Les Malabares la pilent ôc Pap-
pliquent en cataplafme fur la tête pour dif-
fiper la migraine ; fon fuc exprimé fe boit
dans l'eau tiède , dans les coliques venteufes >
fa racine pilée &c mêlée avec le cumin Se
le fucre , fe prend avec le lait ou Peau de
coco pour réparer les forces.
Renu^ques. Le coluppa du Malabar n'efè
donc jPl la même plante que le mugunu-
venna de Ceylan , figurée par M. Burmann ,
dans fon Thefaurus Zeylanicus , planche IV,
fig. Z, fous le nom à'amaranthus , dcc. qui
a cinq étamines &c cinq denticules entre
elles. Ce n'eft pas non plus une efpece der
551 COL
grompkrena, c'eft-à-dire, du wadapu, comme
la penfé M. Linné , mais un genre parti-
culier qui vient naturellement dans la fa-
mille des amaranthes où nous l'avons placé.
Voy e'^nos Familles des plantes y volume II,
page %6q. ( M. Adanson. )
COLURE , f. m. fe dit , en terme de
Géographie & d'ajironomie , de deux grands
cercles, que Pon fuppofe s'entrecouper à
angles droits aux pôles du monde. Voyei^
Cercle.
L'un paflè par les points folfticiaux , c'eft-
à-dire par les points où l'écliptique touche
les deux tropiques ;* de l'autre par les points
équinoxiaux, c'cft-à-dire^^par les points où
l'écliptique coupe l'équateur ; ce qui a fait
donner au premier le nom de colure des
folftices , &: au fécond celui de colure des
équinoxes. V. Solstice ù Equinoxe.
Les colures en coupant ainii l-'équateur,
marquent les quatre làifons de l'année ; car
ils divifent l'écliptique en quatre parties
égales , à commencer par le point de î'équi-
noxe du printemps. Comme ces cercles
pafïènt par les pôles du monde , il eft évi-
dent qu'ils font l'un ôc l'autre au nombre
des méridiens. F". Saisons.
Au rcfte , ces cercles étoient plus d-'ufàge
dans Paftronomie ancienne qu'ils ne font
. aujourd'hui. Ce n'eft prefque plus que par
habitude qu'on en fait mention dans les
ouvrages fur la fphere. ( O )
COLUTEA, {Jard.) plante de Pefpece
du baguenaudier : elle s'élève peu, & donne
des fleurs de couleur pourpre très-agréablesj
fa feuille petite , d'un verd pâle , & faite
en ombelle , ne tombe point pendant l'hiver^
fon bois eft mélangé de verd & de rouge ,
& fa forme eft pyramidale; fà graine eft
renfermée dans de groftes gonfles.
On a foin de le ferrer pendant l'hiver avec
les autres arbres qui craignent le froid. (K)
COLYBES, f m. pi. {Hijl. eccléf.) nom
que les Grecs , dans leur lithurgie , ont
donné à une offrande de froment 8c de
légumes cuits , qu'ils font en l'honneur des
faints & en mémoire des mortag|
Balfamon , le P. Goar & Léon mlatius ,
ont écrit fur cette matière. Voici ce qu'ils en
difent en fubftance : les Grecs font bouillir
une certaine quantité de froment , & la
mettent en petits morceaux fur une affiette j
C O M
ils y ajoutent des pois piles, des noîx coupées
en fort petits morceaux , & des pépins de
raiiîns : ilsdivilèntle tout en pluficurs com-
partimens féparés par des feuilles de perfil ;
& c'eft à cette compoiition qu'ils donnent
le nom de Ko\iCcc.
Ils ont pour la bénédivtlon des colybes
une formule particulière , dans laquelle ils
font des vœux pour que Dieu béniflè ces
fruits & ceux qui en mangeront \ parce qu'ils
font offerts à la gloire en mémoire de tel
ou tel faint , & de quelques fidèles décédés.
Balfamon attribue à S. Athanafe l'inftitu-
tion de cette cérémonie : mais le fînaxaire ,
qui eft un abrégé de la vie des faints , en fixe
l'origine au tempsde Julien l'Apoftat , & dit
que ce prince ayant fait profaner le pain &
les autres denrées qui fe vendoient aux mar-
chés de Conftantinople au commencement
du carême , par le fang des viandes immo-
lées , le patriarche Eudoxe ordonna aux
chrétiens de ne manger que des colybes ou
du froment cuit , & que c'eft en mémoire
de cet événement qu'on a coutume de bénir
& de diftribuer les colybes aux fidèles le
premier fàmedi de carême. Au refte , les
Grecs donnent encore à cet ufage des in-
terprétations myftiques , difaiit que les coly^
bes font des fymboles d'une réfurredion
générale , & les divers ingrédiens qu'on y
mêle avec le froment, des figures d'autant
de différentes vertus. C'eft ce qu'on peut
voir dans un petit traité des colybes écrit
par Gabriel de Philadelphie, pour ré-
pondre aux imputations de quelques écri-
vains de l'églife latine , qui défapprouvoient
cet ufàge, & que M. Simon a fait impri-
mer à Paris en grec &; en latin , avec des
remarques. ( G )
COMA, {Méd. pratiq.) efpece d'affec-
tion foporeufè , que les anciens ont fubdi-
vifee en coma vigd, & en coma fomnolen-
tum, Le# autres affeétions du même genre ,
que l'exadtitude de l'école a érigées en au-
tant de maladies diftin6tes, & dont on nous
a donné des hiftoires & des traitemens par-
ticuliers , font le larus , la léthargie , l'apo-
plexie : mais il vaut beaucoup mieux, avec
les médecins exaâs, ne les regarder que com-
me les différens degrés d'une même maladie
du fommeil contre nature. Voy, Soporeuse
(Affection). (^ )
Coma
C O M
Coma aurea , f. f. {Hifî. nat^ bot.)
genre de plante qui porte des têtes écail-
leufes &: inégales , qui contiennent des fleurs
monopétaies en fleurons proprement dits.
Les embryons deviennent des lemences, qui
font terminées par des écailles ou de petites
membranes : ces lemences mûriflent entre
les écailles qui font fur la couche. Pontedera ,
dijf. oB. Foje:(^ Plante. ( J)
COMACHIO , ( Géog. mod. ) petite ville
d'Italie au Ferrarois , dans Técat de l'Eglife.
Long: zg , 45 ; lût. 44 , 4f .
COMAGENE , f. f. ( Géog. anc.) con-
trée delà Syrie, volilne de TEuphrate: ce qui
l'a fait appeller Euphrateufe. Elle étoit bor-
née d'un coté par le mont Amman , de l'au-
tre par l'Euphratc , & reflerrce par derrière
parle mont Taurus : au refte , ces limites ne
font pas bien certaines. La capitale de cette
contrée ou de ce royaume portoit le même
nom , lelon quelques autres : d'autres difent
que c'écoit Samofate^aujourd'huiSiemprat,
patrie de Lucien.
COMANA , {Géog. mod.) ville de l'Amé-
rique méridionale fur la côte des Caraques ^
dans la Terre-Ferme.
COMANE , f f. ( Géog. anc. ù mod. )
nom propre de ville : il y avoir une Comane
dans les vallées de l'anti-Taurus : une dans
l'Arménie mineure , ou Ç^Xon d'autres dans
la Cappadocc : on l'appelloit Comane la Pon-
tique ; unetroifieme dans la Taprobane ; une
quatrième en Phrygie ; une cinquième en
Pyiidie. Celle de l'anti-Taurus s'appelle au-
jourd'hui Corn on Tubachi^an; celle de l'Ar-
ménie mineure eft au confluent du Jar 6c
de Firis, & s'appelle Arminiacha. Voye'^le
DiB. de Trév. iic la Martiniere.
COMANIE , {Géog. mod.) pays d'Afie
borné par la mer Cafpiennc , la Circaflîe , la
Mofcovie , &; la Géorgie. Les habitans en
font mahométans , &; fous la protedion du
roi de Perfe.
COMARCIOS, {Mufiq. des anc.) air
ou nome dejlûte des Grecs. T'^oye^ Flute.
COMAROIDES , {HiJI. nat. bot. ) genre
de plante dont les fleurs îont compofées de
cinq pétales difpofées en rofc , & loutenues
par un calice découpé : cette fleur a des éra-
mines & des fommets ; fa partie intérieure
eft garnie de plufieurs embryons, dont cha-
cun a une trompe , & devient une femence
Tome VJIL
COM 555
nue.P'onteder3,^^/^r/l/?^. ///. F^Plânte-CJ)
COM ARQUE, f. f. ju (lices fubalternes
de Portugal , qui y font au nombre de vingt-
quatre, & qui ont beaucoup de rapport avec
nos bailliages de France. Voy. ledicl. de Trév.
ÔC le Quien de J^euville.
^ COMASQUE , {Géogr.) leComafyuê
qui tire fon nom de la ville de Côme , Co-
menfîsager, efl: entouré du Bergamafque, des
montagnes des Gri(ons,& de celles delà Val-
teline. Le lac appelle par les Romains larius
lacus , z dans fà longueur qui eft: du nord aw
fud , environ quinze Heues ; mais il n'a pas
plus de deux ou trois lieues de largeur.
COMATEUX , adj. en Médecine , fe dît
de ce qui prpduit ou annonce le Coma. Voyc^
Coma.
COM ATI, f. m. {HiJ}. nat. BoranJgue.)
nom Brame d'un arbre du MaUbnr , allez
bien gravé , avec la plupart de (es détails par
Van-R heede, dans (on Hortus Malabaricus,
volume V ipage ffj , planche XXXI l , fous
le nom de watta-tali ; les Portugais l'appel-
\Qnx.folhas da minta , 6<: les HoUandois loog"
boom.
Cet arbre s'élève à la hauteur de vingt-cinq
pies environ; fon tronc en a flx à huit , (ur
un pié à deux pies de diamètre , & eft cou-
ronné par une cime Iphérique compofée de
branches peu nombreufes , alterne», épaifles,
courtes , cylindriques , écartées d'abord fous
un angle de 45 degrés , en fuite horizontale-
ment , dont le bois eft blanc , denlè , moel-
leux au centre , à moelle jaune , recouverte
d'une écorce épaifle , brune.
Sa racine eft brune.
Ses feuilles font alternes , raflemblées au
nombre de dix à douz;e, fort ferrées vers
le bout des branches, taillées à-peu-près
comme celles du peuplier blanc en forme dfc
cœur arrondi , un peu échancré à leur ori*
gine, avec une petite pointe à l'extrémité bp-
pofée , de trois à quatre pouces de longueur,
fort peu moins larges , marquées de fept à
huit ondes ou dentelures obtufes de chaque
coté de leurs bords , lilfes , luifantes , verd-
claires deflus , plus foncées deflous où elles
font velues, relevées de trois côtes principales
& portées d'abord , relevées fous un angle
de 45 degrés , enl uite horizontalement , 6c
pendantes fur un péduncule cylindrique de
moitié plus court qu'elles.
Aaaa
554 C O M
De l'aififèlle de chaque feuille fort un épi
une fois plus court qu'elle ,, compofé d'une
vingtaine de fleurs fefiiiesairez ferrées, verd-
jaunes , ouvertes en étoile , de quatre à cinq
lignes de diamètre.
Chaque fleur eft hermaphrodite , polypé-
tale incomplète, régulière , difpofée autour
de Povaire ; elle conlifte en un calice perfif-
lant à deux feuilles , fans corolle , en vingt à
trente étamines à anthères jaunes , &c en un
ovaire fphérique d'une ligne de diamètre,
couronné par deux fligraates cylindriques ,
longs, épanouis horizontalement, blanchâ-
tres , veloutés , ou liériflés en aigrette en
defl'us.
L'ovaire en mûriflànt devient une baie
fphériq ue de quatre lignes de diamètre, verd-
jaune, à chair épaifie, d'une demi-ligne au
plus , à une loge , ne s'ouvrant point , con-
tenant un oflelet de même forme de trois
lignes de diamètre , verdâire ; cet ovaire eft
communément accompagné furie côté d'un
appendice en tubercule velouté , qui a l'air
■d'une féconde loge avortée.
Culture. Cet arbre croît en plufieurs en-
droits de la côte du Malabar, fur-tout auprès
de Cranganor ; il eîl toujours verd ; il fleurit
& fructifie une fois Tan ; fes fruits font mûrs
en janvier & février.
Qualités. Toutes les parties de cet arbre
font fans faveur & fans odeur ; fes racines
feules ont une faveur faline & mucilagineufe.
Ufages. Ses feuilles pilées avec le tabac
verd & Pinfu/îon de riz , s'appliquent avec
fuccès fur les ulcères invétérés & vermi-
neux ; la décoétion de ces mêmes feuilles
dans l'eau fe prend en bain dans les fièvres
froides j fes fleurs & fes fruits piles mis en
nouet , & cuits dans le lait de femme , fbur-
nifîènt un fternutatoire qui guérit, dit -on,
les fièvres froides.
Remarque. Le comati fait donc un genre
.particulier de plante , voifindu micacoulier,
xTe/z/^sdans la famille des châtaigniers où nous
l'avons placé. Voye':^ nos Familles des plantes y
volume II, p. -^jj. {M. Adanson.)
: § COMBAT, {Art militaire.) on dif-
.tingue deux fortes de combats : les uns géné-
raux , qu'on nomme batailles , où les troupes
dedeux armées qui fè choquent agilîent tou-
tes, ou en grande partie de part oc d''autre j les ,
autres particuliers , où Taclion fepafle , tan-
C OM
tôt entre les avant-gardes de deux armées,
tantôt entre l'avant-ga rde de l'une & l'arriere-
garde de Pautre , tantôt entre leurs détache-
mens ; tels font les efcarmouches, Pattaque
ou la dcfcnfe d'un pofte , d un retranclie-
mentj d'un pont, d'un fourrage, d'un con-
voi , les embuicades , les furpnfes , les ren-
contres imprévues : mais ces deux fortes de
combats ne différent que par le nombre des
troupes qu'on y emploie, ou qui s'y trou-
vent j & les règles générales à obferver dans
Pune' comme dans l'autre font les mêmes»
Nous renvcrronsdonc les lecteursauxar//c/ej
Bataille ù Ordre de bataille , dont
les détails font également relatifs à l'article
Combat. Voye:^ aujjî Escarmouche ,
Embuscade, Surprise, Fourrage ,
Convoi j Retraite.
" Ungénéral, dit le marquis de Feuquiercs,
peut avoir différentes vues pour engager un
comb-it particulier ; mais il ne doit jamais en
venir là malgré lui , ni fans favoir bien pré-
cifément quelle eft la force du corps ennemi
qu'il veut combattre , afin de le faire attaquet
par un corps fi fupérieur , que l'événement
n'en puifle point être balancé \ » car , ajoute
cet auteur , " fa réputation , & la confiance
des troupes en fa conduite , dépendent tou*
jours de la manière dont il les engage dans
des affaires particulières, qui coûtent fbuvent
beaucoup,quand elles ne font pas entrepriiès
avec prudence & connoiflance. »>
Cette maxime eft,on ne peut pasplus fage ;
mais il faut avouer qu'un commandant en
chef d'une armée , qui ne fauroit pas stn
écarter quelquefois , çourroit rifque de ne
pas faire grand'chofe : nous avons quantité
d'exemples où à nombre égal & même infé-
rieur , un général a attaqué & battu un corps
d'ennemis , foit parce qu'il en avoir bien
examiné la pofition , qu'il a fu profiter des
défauts qu'il y avoit remarqués , ou de la né-
gligence de ion adverfaire à occuper certains
poftes eflèntiels pour fa fureté , foit parce
qu'il connoiflôit le caraâere timide de ce
dernier , ou le peu d'expérience ou de fer-
meté de fes troupes , foit par fes talens fupé-
rieurs & la confiance que les troupes avoient
en lui , foit enfin parce qu'avec une capacité
ordinaire , il étoit entreprenant , hardi , &
qu'ilvoyoit des moyensderéufTiroù un autre
n'eût trouvé que des obftades. Le maféchal
C O M
oe Villars difbit qu'il falloir quelquefois fup-
plcer au manque de force parla hardiefTè.
" Un corps peu confidérable , dit l'auteur
que j''ai cité ci-devant , quoiqu'il fe croie à
porte'e de Tarmée de laquelle il a été détaché,
ne doit jamais s'opiniatrer à fe tenir trop près
dé Tennemi , qui eft en plaine & qui marche
avec toute Ton armée , à moins que ce corps
n'ait un bon défilé devant Iri ■■, fans quoi cette
préfomption le fait toujours battre. » Voye:^
dans les mémoires de cet autcurles réflexions
qu'il fait fur les combats particuliers donnés
par des armées entières , à deflèin d'engager
des affaires générales j tome II ^ chap, LXIII.
(M.D.L.R.)
Combat naval , (Jlf^r//?^.) c'efl: la ren-
contre d'un ou plufieurs vaifleaux ennemis
qui fe canonent & fe batient. On le dit éga-
lement desarmées navales & des efcadres qui
fe livrent un co/ni^û/'. Fbje:^ Ordre de ba-
taille. (Z)
Combat , {Hijï. mod.) ou combat jiiigu-
lier , (îgnifie une épreuve formelle entre deux
champions , qui le faifoit par l'épée ou par le
bâton pour décider quelque caufe ou quel-
que différent douteux.
Cette manière de procéder étoit autrefois
fort ordinaire , &: avoit lieu non feulement
en matière criminelle , mais encore dans les
eau Tes civiles : elle étoit fondée fur cette pré-
fomption, que Dieu n'accorderoit la victoire
qu'à celui qui auroit le meilleur droit. Voye^
Duel.
On trouve que cette efpece de ^rom^^rn'eft
pas moins ancien que le règne d'Othon. Le
dernier que l'on ait admis en Angleterre , fe
pafîa la fixieme année du règne de Charles I ,
entre Danald lord Rhée ou Rey , & David
Ramfey , écuyer dans la chambre peinte.
On peut voir ce qui fe trouve à ce fujet
dans le coutumicr de Normandie , ou la cé-
rémonie de ce combat eft décrite. L'accufa-
teur étoit obligé de protefter avec ferment de
la vérité de fon accufation : l'accufie lui don-
noit le démenti , alors chacun jetoit fbn gage
du combat, 8c l'on conftituoit les parties pri-
fonnieres jufqu'au jour du combat. Voye^
Champion,
Les hiftoricns nous apprennent qu'Al-
phonfe , roi de Caflille , defirant abolir la
lithurgie mofarabique & introduire l'office
romain 3" comme le peuple s'y ôppofoit , il fut
COM îjj
convenu de terminer le différent par la voie
(\\x combat y & d'en remettre la caufe à la dé-
cifîon du ciel.
Philippe le Bel , en 1 505 , avoit défendu
ces combats : malgré cette défenfe , le roi
Henri II permit en fa préfence le combat de
Jarnac & la Chateigneraye ; mais depuis ces
duels ont été totalement prohibes , parce
qu'il étoit très-poffibli; que k coupable de-
meurât vainqueur.
Ce terme de combat exprime aufîî les jeujJ
fblemnels des anciens Grecs &: Romains, tels
étoient les jeux olympiques,les jeux pythiens/
iflhmiens & néméens , ludi aâiaci Circen/es ,
&c. Voye:ç^z\ix articles qui leur font propres,
comme aux mOtsOLYMPIQUESjIsTHMIENS,
&c. Les combats que l'on y célébroit étoient la
courfc , la lutte , le combat à coups de poing ,
le cefte. Les combattans , que Pon appelloit
athlètes , faifoient une profellîon particulière
mais fervile ; & dès leur jeunefle, ilss'accou-
tumoicnt à une nourriture groiïïere , à un
régime fort févere ; ils ne buv oient point de
vin , & fe privoient du commerce des fem-
mes. Leur travail , comme tout le rcfte de
leur vie , fe faifoit régulièrement. F". Ath-
lète, Gladiateur, 6'c. Chambers 6* Trév,
(G)
^ Combat du pont de Pisb, (HiJl. mod.f
à la Saint Antoine , un quartier du côté du
pont défie un quartier de l'autre côté j Les
combattans s'appellent les Guelfes & les Gi-
belins ; ils font divifés comme une armée ,
en troupe qui a fes officiers ; chaque fbldàt
eft armé de cuirafle & de cafque , avec une
maffue de bois en forme de palette. Le pont
efl fcparé en deux par une barricade ; les
troupes s'avancent vers le pont étendards dé-
ployés ; on donne le fignal ; la barrière s'ou-
vre : alors les combattans s'avancent & fe
frappent avec leurs maflues , &c tâchent à
gagner le terrain les uns fur les autres. Il y
en a d'armés de crocs , avec lefquels ils accro-
chent leurs antagonifles & les tirent de leur
côté ; celui qui eft accroché & tiré eft fait
prifbnnier : d'autres s'élancent ; d'autres
montent fur les parapets , d'où ils font préci-
pités dans la rivière : le combat dure jufqu'à
ce quel'un des partis fbit chafTe hors du pont.
Le parti vaincu met bas les armes & fe ca-
che ; l'autre marche triomphant. Ce combat
ne finit guère fans accident. Les vainqueurs
Aaaa t
5 5^ COM
font maîrres du quartier vaincu. Il fe fait
beaucoup de paris.
Combat -A -PLAISANCE, {Hijî.mod.)
Les combats -à- pLiifance étoient des tour-
nois qui fe faifoient autrefois dans les occa-
fions d'une réjouillance publique, ou à Thon-
neur des fouverains , ou pour foutenir la
beauté Se le mérite d'une maîtrellè, de fur-
tout , au rapport de la Colombiere ( Théat.
d'honneur & de c/ievnkrie , ch.j.) , " pour fe
'j garantir de Toiliveté , laquelle nos ancêtres
« avoient en fi grande horreur , que nous
*» lifonstoujoursau commencement des def-
" criptions de leurs entreprises , que c'ctoit
>' principalement pour la fuir de toute leur
" puiflànce , comme la principale ennemie
»> de leurs cœurs généreux. » Article de M.
le chevalier de Jaucourt.
Combat de fief , {Juri/prud.) eft la
conteftation qui fe meut entre deux leigneurs
de fief, qui prétendent refpedivement la
mouvance d'un même héritage , foit en fief
ou en cenlive. Vo^ e^ Fief. {-A)
COMBATTANT , f. m, c'eft un terme
héraldique c\m fe dit de deux animaux , lions
ou fanglicrs , que l^on porte fur un écullbn
d^armoiries , dans l'attitude de combatians ,
dreflés fur les pies de derrière Se affrontés ,
ou les faces tournées l'une contre l'autre. ( V)
COMBINAISON , f. f. {Mathémat) ne
dcvroit fe dire proprement que de l'afifem-
blagede pluiieurs cKofesdeux à deux ; mais
on l'applique dans les mathématiques à toutes
Içs manières poOTihles de pjendie unnombre
de quantités données.
Le P. Merfènne a donné les combina- fons
de toutes le^ notes & fons de la mufique au
nombre de 64 \ la fomme qui en vient ne
peut s'exprimer, félon lui,qu'avec <?o chiffres
ou figures.
Le P. Sébaftien a montre dans les mémoires
de t académie 1704, que deux carreaux par-
tagés chacun par leurs diagonales en deux
triangles de différentes couleurs , fburnif-
ioient 64arrangemens difFérens d'échiquier :
ce qui doit étonner , lorfqu'on coniîdere
que deux figures ne fauroient fe combmer
que de deux manières. Fbye;(_CARREAu.
On peut fair^ufage de cette remarque du
P. Sébaftien, pour carreler des appartemens»
Docîrine des combinai fons. Un nombre
de quantités étant donné avec celui des quan-
C O M
tirés qui doit entrer dans chaque comhinai-
fon y trouver le nombre de combinai fons.
Une feule quantité , comme il eft évident ,
n'admet point de ccmbinaifon; dcuxquantités
a & adonnent une combinaifon; trois quantités
a , b , c j combinées deux à deux , donnent
trois combinai fons a by a c , b c ; quatre en
donneroient fix ab,aCybCyadybdyCd;
cinq en donneroient dix a b, aCy bc , ad,
bdyCdyaeybcyCeyde.
En général , la fuite des nombres des com-
binaifons eft i , 3,6,10, ùc. c'eft-à-dire ,
la fuite des nombres triangulaires ; ainti q
repréfentant le nombre des quantités à com-
biner , X fera le nombre de leurs
I 2
combinaifons deux à deux. Koje:^^ Nombres
triangulaires.
Si on a trois quantités a , b y c y à combi-
ner trois à trois , elles ne fourniront qu'une
feule combinaifon abc; qu'on prenne une
quatrième quantité d , les combinaifons que
ces quatre quantités peuvent avoir trois à
trois , feront les quatre a b c y a b d y b c n y
a c d; qu'on en prenne une cinquième , on
aura les dix combinaifons abc y ab dyb c d y
ac d y abeybdcybccyaccyade; qu'on
en mette une fixicme, on aura vingt combi-
naifons y &c. Enforte que la fuite des combi-
naifons trois à trois eft celle des nombres py ra-
midaux i & que q exprimant toujours le
nombre des quantirés données , ^-^ X '^- — X
7—0 _ _ . .
~~^ y eft celui dç leurs combinaifons trois à trois.
Le nombre des combinaifons quatre à qua-
tre des mêmes quantités fe trouvcroit de l*
même manière ''-—■ X '^-^ X ^ X -^ \
8c en général n exprimant le nombre de let-
tres qu'on veut faire entrer dans chaque terme
de la combinaifon , la quantité -^ A
<7
'LZ-l+iv i
n-V? ff-/» -f-4 y^
exprimera le nombre demandé des combi-
naifons.
.Qvve l'on demande , par exemple , en com-
bien de manières fix quantités peuvent fe
prendre quatre à quatre, on fera q=i6 &c
n=:^y Se l'on fubftituera ces nombres dans,
la formule précédente , ce qui donnera
6-4+1, ' • ' ....
4+26- 4+"3 v6-4 + 4.
1 ^""1 * A
li-
C O M
Corollaire. Si on veut avoir toures les com-
binaifons poiïlbles d'un nombre de lettres
quelconque , prifes tant deux à deux que trois
à trois , que 434, frc. il faudra ajouter tou-
tes les formules précédentes
ç _ I 9-o;<7-ix<7-ix <y-0
3 '
X ?
'-^ X
I , ^c. c'eft-à-dire que
^' le nombre de toutes ces combinaisons fera
exprime par
t 9x7-1
I.
+
7. 7-1.7-2 , 7x7-1. 7-2. 7-3
(yc.
Si on compare préientement cette fuite
avec celle qui repréfcnte l'élévation d'un
binôme quelconque à la puilïànce ^, on verra
qu'en faifant égal à l'unité chacun des ter-
mes de ce binôme , les deux fuites font les
mêmes aux deux premiers termes près i , &
q . qui manquent à la fuite précédente. De-
là il fuit qu'au lieu de cette fuite , on peut
écrire z^ — i — q -, ce qui donne une ma-
nière bien fimple d'avoir toutes les combinai-
fons pofPibles d'un nombre q de lettres. Qiie
ce nombre foit, par exemple $ , on aura donc
, pour le nom.bre total de fes combinaifons
2' — 5 — 1= 32 — 6 = i6. Fbyei^ Binôme.
ifn nombre quelconque de quantités étant
donné i trouver le nombre des combinaiions ù
d'alternat ions qu'elles peuvent recevoir , en les
prerMnt de toutes les manières pojfiblcs,
Suppofons d'ubord qu'il n'y ait que deux
quantités a , b ^ on aura d'abord a b Se b a ^
c'ell-à-dire le nombre 2 ; &: comme chacune
. de ces quantités peut aulTi fè combiner avec
elle-même , on aura encore a a^k. bb , c'eft-
à-dire que le nombre des combinaifons & al-
ternations eft en ce cas 2 + z = 4. S'il y a
trois quantités a ^b , c , Se que l'expofant de
leur variation foit 2 , on aura trois termes
pour leurs combinaifons , lefquels feront a b,
b c yoc : à ces trois termes on en ajoutera
encore trois autres ba yCb ^c a^ pour les alter-
nations : & enfin trois autres pour les combi-
naifons aa ,blb j ce y des lettres^, b^c , prifes
chacune avec elle-même , ce qui donnera
3 "4- 3 + 3 = 9. En général , il fera aifé de
voir que fî le nombre des quantités tkn , d<.
que l'expofant de la variation foit 2 , n fera
celui de toutes leurs combinaifons & de leurs
alternations.
Si l'expofant de la variation ed 3 , & qu'on
BC fuppofe d'abord que trois lettres a» ^ j c ^
C O M 557
on aura pour toutes les combinaifons ôc alter-
nations aaa y aab , ab a , baa y abb y aac y
acaycaay abc y b ac y bc ay acbyCab,
cb a y acc y cac y ce a y bb a y bab , b bb y
bbcy cbby bcby bcCy cbCy ccb, ccc ,
c'eft-à-dire le nombre 27 ou 3'.
De la même manière , iî le nombre des
lettres étoit 4, l'expofant de la variation 3 ,
4^ y ou 64 j feroit le nombre des combinai-
fons &c alternations ; & en général fi le nom-
bre des lettres étoit n , n^ feroit celui des com-
binaifons ôc alternations pour l'expofant 3,.
Enfin , fi l'expofant eft un nombre quelcon-
que , m , /z*" exprimera toutes les combinaifons
ôc alternations pour cet expofànt.
Si on veut donc avoir toutes les combinai-
fons & alternations d'un nombre n de lettres
dans toutes les variétés poiïibles , il faudra
prendre la fomme de la férié «"H-zz " -f-
n -+-/Z -f-n •+-n -f-zz -+-C/C.
jufqu'à ce que le dernier terme foit n.
Cr , comme tous les termes de cette fuite
font en progrelTion géométrique , & qu'on a
le premier terme n" , le fécond /z""' Se te
dernier /2, il s'eniuit qu'on aura aulTi la ibmm'e
de cette progrefïion , laquelle fera n ^
— I.
Que n y par exemple , foit égal à 4 , le
nombre de toutes les combinaifons Se alterna-
4 ^ I I 02.^
tions poflibles fera = = 340.Que
n foit 24, on aura alors par toutes les com-
binaifons Se alternations pofïiblcs
14 — i
}2oo9ff 5.8*44^ cff 8 I 89 8*7779 5 î J48 Î7 îtf 00 ,
-_
i3tji7i4zSS887zyz95)94Z5iz84c;3402zco;
Se c'eft cet énorme nombre qui exprime les
combinaifons de toutes les lettres de l'alphabet
entre elles.
Voyez Vars conjectandi de Jacques Ber-
noulli y Se Vanatyfe des jeux de hasard de
Montmort. Ces deux auteurs , fur-tout le
premier , ont traité avec beaucoup de foiiï
la matière des combinaifons. Cette théorie eft:
en effet très-utile dans le calcul des jeux de
hazard ; Se c'eft fur elle que roule toute la
fcience des probabilités. Voye^^ Jeu , Pari ,
Avantage , Probabilité, Certitudf^
Il eft vifible que la fcience des anagram-
mes {voj. Anagramme) dépend de celles
5^8 COM
àes combinnifons. Par exemple , dans Rotna , 1
qui eft compofé de quatre lettres , ily a vingt-
quatre combinaifons {voy. Alternation) ;
& de ces vingt-quatre combinaifons on en
trouvera plui-leurs qui forment des noms la-
tins , armo , rama , mora , amor , maro ; on y
trouve aulH omar ; de même dans Rome ,
on trouve more , orner , &c. ( O )
On ne fera peut-être pas fâché de lire
récrit fuivant de M. de Mairan , fur le nom-
bre confidérablede manières différentes dont
certains mots françois peuvent être écrits.
Manières difereiues d'écrire le /tzoïHain aux
en françois , dans la fuppofition que l'\i ne
s'afpire pas.
1°. Par h y ou fans h i man.
1°. e, ee , ei , ai , ey,onay 6
Dont le produit eft 2 X ($ , &
donne 12, man.
3°. Enfuite avec n^oxinn . 2.
Produit. . li X 2 &: donne 24 man.
4**. Dans le cas d'une feule n , il
peut être précédé de/, ou x, ce
qui fe combine avec la moitié du
dernier produit , &; donne 24
à ajouter audit produit , fommc 48 man.
5°. Dans les deux cas de /z , ou
nn , il peut y avoir après , ou n'y
avoir pas un h 2,
Produit. . 48 X 2 , & donne 96 man.
6°. Dans tous les casprécédens
on peut finir le mot par o, au om
eau , fans confonne , ce qui fait 5
cas qui fe combinent, &:c. ci. ?
Produit. . 96 X 5 , &: donne 28 8 man.
7°. Enfin on peut terminer ce
mot par ces confonnes Syt,l,ls:,
xjt.th, Ith ; cela fait 8 nou-
veaux cas , qui par leur combi-
naifon avec les précédens , don-
nent le produit 288x8 , ou. . . 1^0^ man.
Le mot Hainaut peut donc être écrit de
2304 différentes manières fans qu un Fran-
çois le prononce différemment.
Combinaison , {Chymie.) mot générique
exprimant l'union chymique de deux ou de
plufieuis principes de nature différente. Les
chymiftcs prennent fouvcnt le mot mixtion
dans le même fens. Foye^ Mixtion &
Principes. (^) ^ / ^ .„ • \ j
COMBLON , f. m. {Artillerie.) cordage
COM
qui fert , (bit à traîner l'artillerie , foit à l'éle-
ver ; c'eft le fynonyme de combleau.
COMBLE , f. m. {Architeâure. ) du latin
culmen , fommet , ou culmus , chaume. Ce
terme en général déligne la forme des cou-
vertures de toutes les elpeces de bâtimens
civils & militaires : on les appelle aullî toit ,
du latin teclum , fait de tegere , couvrir.
Ordinairement la conflruétion des combles
eft de charpente recouverte de cuivre , de
plomb , d'ardoife , de tuile , &c. VoyeiQvi-
VRE , Plomb , Ardoise , Tuile , ùc. Leur
hauteur dépend de l'ufage intérieur qu'on
en veut faire , & de l'importance du bâti-
ment dans lequel ces fortes d'ouvrages entrent
pour quelque chofe quant à la décoration des
façades , félon qu'ils les terminent avec plus
ou moins de luccès.
Dans le dernier iiecle,on regardoit comme
un genre de beauté dans nos édifices , de faire
des combles d'une élévation extraordinaire,
tels qu'il s'en voit aux châteaux de Verfailles
du côté de l'entrée , de Mcudon , de Mai-
fons , ùe. &c à Paris aux palais des Tuileries
&; du Luxembou rg j au j ou rd'hui au contrai re
l'on regarde comme une beauté réelle de
mafquer les couvertures par des baluftrades,
à l'imitation des bâtimens d'Italie , tels que
fe voient à Verfailles la nouvelle façade du
coté des jardins , le palais Bourbon à Paris ,
l'hôtel de Lallày , ùc. Ce qui eft certain ,
c'cft que la néceffité d'écouler les eaux du
ciel doit déterminer leur hauteur , relative-
ment, à leur largeur , afin de leur procurer
une pente convenable à cette nécefïité. Cette
pente doit être déterminée fclon la tempéra-
ture du climat où l'on bâtit , de forte que dans
le nord l'on peut faire leur hauteur égale à
leur bafe , afin d'écouler plus promptement
les neiges qui y font abondantes : dans les
pays chauds au contraire , leur hauteur peut
être réduite au quart de leur bafe ; & dans
les paystempérés , tels que la France , le tiers
ou la moitié au plus fuffit pour fe préferver
de Pintempérie des faifons.
Sous le nom de combles , Pon comprend
aufTi les dômes de forme quadrangulaire Se
circulaire qui terminent les principaux avant-
corps des façades , tels que fe remarquent
ceux des châteaux des Tuileries , & de la
Meute , les ambles à l'impériale , en plate-
forme , 6'c.
C O M
Dans les combles les plus ordinaires on en
compte de trois efpeces : favoir , les combles
à deux égoûts formés d'un triangle ifocele ,
les combles brifés ou à manfivrdes , dont la
partie fupérieure eft formée d'un triangle
ifocele, & Pinférieure d'un rrapézoïde; les
combles en terrafïes font formés feulement par
un trapézoïde. (P)
CoiviBLE , terme de Mefureiir , ufité fur-
It tout dans le comm.erce des grains. Il fe dit
de ce qui refte enfaité au defius des bords
de la mefure après que le mefurcur Ta rem-
plie. Il y a deux manières de mefurer , Punc
à mefure comble ^ &c Pautre à m-efiue raie.
La mefure comble eft quand on donne à
l'acheteur ce qui refte au deflus des bords
avec la mefure mêm.e -, & la mefure ra(e ,
quand avant de la délivrer le vendeur la racle
avec un morceau de bois qu'on appelle ra-
doire & ailleurs rouleau , & en fait tomber
ce qui eft au deflus des bords. Il y a des
grains & des légumes qui le vendent à me-
fure rafe , 5c d'autres à mefure comble. Le
charbon , le plâtre , la chaux fc vendent à
mefure comble. Voy. Mesure & Mesurer.
Diclionn. du Comm. Disk. Ù Trév.
Comble , pié comble. Foye:^]?ii.
Combles , ce font , che-^les vanniers , tous
les intervalles à jours ou pleins qu'il y a entre
les faîtes d'un ouvrage.
COMBLER y v. ad. c'eft remplir autant
qu'il eft poiTible.
COMBLETTE , f. f. ( Vénerie. ) c'efl
ainfi qu'on appelle la fente du milieu du pié
du cerf.
' COM-BOURGEOIS , f. m. ( Comm.erce.
àe mer.) c'eft celui qui a part avec un autre
à la propriété d''un vaiflèau. On dit plus
communément co-bourgeois. V. Co-bour-
GEOîs & Bourgeois. Dicl. du Com. & Trév.
(G)
COMBR AILLES, {Géog. mod.) petit
diftriét en France , dans le Limofin.
COMBRIERE, fub. f. ( P/cAe. ) filet à
prendre de grands poilTons, tels que les thons,
d^ufage fur les cotes de Provence. Voye^
t'anjcle T HOU , fa pêche.
COMBUGER des futailles , c'eft les rem-
plir d'eau pour les en imbiber avant que de
ks faire fervir. ( Z )
COMBUSTION, {Ckymie. Pkyfique.)
Quelques fubftancesne conciennenr , avec le
C o M 559
phlogiftique qu'une matière trop pefànte,
pour qu'il puifle élever une quantité capable
de produire la flamme en retardant fa vola-
tilité , Se lui donnant un corps vifible , c'efl
ce qu'on peut appeller pmprement calcina-
tien ; d "autres fubftances à raifon d'une conv
binaiîbn plus intime , d'une moindre denfîté
ou d'une quantité plus confîdérable de phlo-
giftique perdent en brûlant une partie fen-
fible des matières dans lefquelles il étoit en-
gagé , de le terme de combujîion paroît leur
convenir davantage : cette diftincfcion eft
fondée fur i'impoiîibilité d'enflammer le
phlogiftique pur ; il y a donc combufiion ,
quand on fait détonner les métaux avec le
nitre, & même lorfqu'onexpofe flmplement
au feu le régule d'antimoine & le zinc : dans
la première opération , le phlogiftique de
métal enlevé quelques parties falines; dans la
féconde la terre métallique fuit &; marque le
courant du phlogiftique par une fumée
épaifle , ou par une flamme.
La condition qui fait le principe de cette
diftinélion, peut changer par le feul procédé,
& c'eft ce qui arrive par rapport au foie de
foufre : expofé à un feu violent , il brûle avec
fumée & flamme , parce que le phlogiftique
enlevé en très-peu de temps beaucoup de
parties falines j rfxpofe à un feu très-modéré ,
il fe calcine feulement , parce qu'il ne perd que
peu de parties falines , & pendant un temps
allez long , pour que la fomme de chaque
inftant ne puiflè produire un eifet vifîble.
De-là la différence des réfultats dans les
expériences fur la calcination des corps les
plus fixes. Voye-{_ Calcination & Phlo-
GISTIQUE.
L'air eft nécefïàire à la combujîion ; mais
ce n'eft pas comme aliment. Voyei^^ Air. Il
ne fert qu'à entretenir le mouvement ofcilla-
roire , & dès qu'il devient ou trop rare ou
trop dcnfe , il ceffè également de favorifer la
combujîion , parce qu'il lui faut un fluide qui
cède & réagi ffe continuellement. Cette pre-
mière vérité reconnue , on peut , à l'aide d'un
feul principe méchanique , donner une expli-
cation farisfaifante du charbon , qui n'é-
prouve aucune altération , aucun déchet
quand on l'expofe en vaiflèaux clos au feu le
plus violent : ce principe eft que l'effort de
dilatation dans un cfpace borné équivaut à;
denfité. Plus il paftè de feu dans rincérieur
5^0 C O M
ciu vailleau , plus 1 air qu'il contient tend à
Je raréfier ; cet efîort étant continu &c fans
iiueivallc, comme lacaufequi le produit ,
il ne laide à l'air qu^une force confiante de
comprefTîon en toucfens, i! cède d^êtreélaf-
rique par la trop grande tenfion de Ton ref-
iort , èc cette tenfion continue à unepuillancc
ép;ile , foit à la plus grande denlité , fbit à
l"a(5l;ion d'une pe'anteur équivalente. L'expé-
rience confirme cette théorie , i°. en ce qu'un
charbon allumé s'éteint fur le champ dans
refprit-de-vin, quoique ce fluide foit inflam-
mable , parce qu^il eft trop denfe pour céder
au mouvement igné ; i°. en ce que le char-
bon fe confume lenfîblement , fi l'on adapte
au vaifleau un tuyau long & étroit , par où
l'air nouveau ne peut rentrer , mais qui per-
met feulemenrl'expanfion de celui qui eft ren-
fermé j 5°. en ce que la calcination , qui fe
fait en vaiflcaux fermés , eft en proportion
de leur capacité ; 4°. enfin en ce que le char-
bon fe confume de fiit une perte confidéra-
ble , fi la réunion des deux vaifleaux qui le
renferment fe fait fous le récipient de la ma-
chine pneumatique après avoir pompé l'air.
( Cet article eji de M. DE MoRVAU.)
Combustion , terme de l'ancienne Ajlro-
nomic : quand une planète eft en conjonc-
tion avec le foleil , ôc que lesicentres de ces
aftres font éloignés l'un de Fautre de moins
que la fomme de leurs demà-diametres , on
dit que la planète eft en ccmbuflion. Ce mot
vient du latin comkirere, briller, parce qu'une
planète qui eft en cet état doit paroitre palier
fur le difque du foleil ou derrière le corps
de cet aftre , & par conféquent fe plonger ,
pour ainfi dire , daiîs les rayons , 6c en être
comme brûlée.
Suivant Argolus , une planète eft en ccm-
buftion y quand elle n'eft pas éloignée du fo-
leil de plus de huit degrés trente minutes,
à l'orient ou à Poccident. On ne fe fert
plus de ce mot , qui n'a été inventé que
par les aftrologues. Harris &c Chambers.
COMCHE , ( Gécg. mod. ) grande ville
d'Afie , au royaume de Perfe , fur la route
d'ifpahan à Ormus.
§ COME , {Géogr.) cette ville eft fîtuée
à la pointe méridionale du lac de Côme , &
paflèpourunedcspluspeuplées& des mieux
foitifiécs qu'il y ait dans le Milanez. Son
C O M
évêque eft fuffragant d'Aquiiée ; fes habitans
font réputés les meilleurs foldats de lltalie.
On dit que le voliinagc des montagnes les
rend moins polis que les habitans de Milan.
Cette ville ibuffrit beaucoup dans le temps
de l'invalion d'Annibal ; mais les Romains ,
pour les récompenfer de leur fidélité , rebâ-
tirent leur ville , & c'cft depuis ce nouvel
établiflement qu'elle prie ie nom de Kova
Corna. C'eft la patrie du pcece comique Ceci-
lius , de Pline le jeune , de Paul Jove , & du
pape Innocent XI.
COMÉDIE , Cf. ( Belles-Lettres. ) c'eft
Pimitation des mœurs mife en aélion : imi-
tation des mœurs , en quoi elle diffère de
la tragédie & du poëme héroïque : imi-
tation en action , en quoi elle diffère du
poëme didactique , moral , Ôc du fimplc
dialogue.
Elle diffère particulièrement de la tragédie
dans fon principe, dans fès moyens & dans
fa fin. La fenfibilité humaine eft le principe
d'où part la tragédie : le pathétique en eft
le moyen ; l'horreur des grands crimes &c
l'amour des fublimes vertus font les fins
qu'elle fe propofe. La ma'ice naturelle aux
bornâmes eft le principe de la comédie. Nous
voyons les défauts de nos fembbbles avec
une complaifance mêlée de mépris , lorfque
ces défauts ne font ni afî'ez aftligeans pour
exciter la compafïion , ni allez révoltans
pour donner de la haine , ni allez dange-
reux pour infpirer de l'eftroi. Ces images
nous font fourire , fi elles font peintes avec
fineflè : elles nous font rire , fi les traits de
cette maligne joie , aufTi firappans qu'inat-
tendus , font aiguifés par la furprife. De
cette difpoiîtion à faifir le ridicule , la co^
méde tire la force & fes moyens. Il eût
été fans doute plus avantageux de changer eu
nous cette complaifance vicieufe en une pi-
tié philofophique ; mais on a trouvé plus fa-
cile & plus fur de faire fervir la malice hu-
maine à corriger les autres vices de l'huma-
nité 5 à-peu-près comme on emploie les
pointes du diamant à polir le diamant
même. C'eft -là l'objet ou la fin de la
comédie.
Mal à propos l'a-t-on diftinguée de la
tragédie par la qualité des perfonnages : k
roi de Thebes, & Jupiter lui-même , font
des perfonnages comiques dans PAmphy-
trion ;
COM
trions Se Spartacus de la même condition
que Solie , fèroit un perfonnage tragique
à la tête de fes conjurés. Le degré des paf-
fions ne diftingue pas mieux la comédie de
la tragédie. Le défefpoir de l'Avare lorf-
qu'il a perdu fa caflètte , ne le cède en rien
au défefpoir de Philoâiete à qui on enlevé les
flèches d'Hercule. Des malheurs , des pé-
rils, des ièntimens extraordinaires caradléri-
fknt la tragédie '■, des intérêts & de^ carac-
tères communs conftituent la comédie. L'une
peint les hommes comme ils ont été quel-
quefois , l'autre , conwne ils ont coutume
d'être. La tragédie eft un tableau d'hiftoire ,
la comédie eft un portrait ^ non le portrait
d'un feul homme , comme la fatyre , mais
d'une efpcce d'hommes répandus dans la
fbciété dont les traits les plus, marqués font
réunis dans une même figure. Enfin le vice
n'appartient à la comédie , qu'autant qu'il eft
ridicule & méprifable. Dès que le vice eft
odieux , il eft du relTort de la tragédie ^
c'eft ainfî que Molière a fait de l'impof-
teur un perfonnage comique dans Tartufe ,
& Shakefpear un perfonnage tragique dans
Glocejire. Si Molière a rendu Tartufe odieux
au 5^ a6ie , c'eft , comme Roulfeau le re-
marque, par la nécejjité de donner le der-
nier coup de pinceau à fon perfonnage.
On demande fi la comédie eft un poème y
queftion aufli difficile à réfoudre qu'inutile à
propofer , comme toutes les diiputes de mots.
Veut-on approfondir un fon , qui n'eft qu'un
fon , comme s'ilrenfermoit la nature des cho-
ies ? La comédie n'eft point un poëme pour ce-
lui qui ne donne ce nom qu'à l'héroïque & au
merveilleux \ elle en eft un pour celui qui
met l'eflence de la poéfie dans la peinture :
un troifîeme donne le nom de poème à la
comédie en vers , & le refufe à la comédie
en profe , fur ce principe que la melure n'eft
pas moins elfentielle à la poéfie qu'à la mu-
fique. Mais qu'importe qu'on diffère fur le
nom , pourvu qu'on ait la même idée de
la chofè ? YJ Avare ainfi que le Télémaque
fera ou ne fera point un poëme , il n'en fera
pas moins un ouvTage excellent.. On difpu-
toit à Adiffon que le Paradis perdu fût un
poëme héroïque : hé bien y dit-'û , ce fera un
poème divin.
Comme prefque toutes les règles du
poème dramatique concourent à rapprocher
Tome VUh
C O M 5^t
par la vraifemblance la fiâiion de la réalité,
î'aôion de la comédie nous étant plus fami-
lière que celle de la tragédie , Se le défaut
de vraifemblance plus facile à remarquer y.
les règles y doivent être plus rigoureufement
obfervées. Delà cette unité , cette continuité
de caractère , cette aifànce , cette fimplicité
dans le tiffu de l'intrigue , ce naturel dans le
dialogue y cette vérité dans les fcntimens ,
cet art de cacher l'art même dans l'enchaî-
nement des fituations , d'où réfulte rillufiott
théâtrale.
Si l'on confidere le nombre des traits qui
caraélérifent un perfonnage comique , on
peut dire que la comédie eft une imitation
exagérée. Il eft bien difficile en effet , qu'il
échappe en un jour à un feul homme au-
tant de traits d'avarice que Molière en a raf-
femblés dans Harpagon ^ mais cette exagé-
ration rentre dans la vraifemblance lorfque
les traits font multipliés par des circonftances
ménagées avec art. Quant à la force de cha-
que trait, la vraifemblance a des bornes.
L'Avare de Plante examinant les mains
de fon valet lui dit, voyons la troifitme'y
ce qui eft choquant : Molière a traduit ,
t autre , ce qui eft naturel , attendu que la
précipitation de l'avare a pu lui faire oublier
qu'ail a déjà examiné deux mains, Se pren-
dre celle-ci pour la féconde. Les autres , eft
une faute du comédien qui s'eft ^\&iQ. dans
l'impreffion.
Il eft vrai que la perfjpeâ:ive du théâtre
exige un coloris fort & de grandes touches ,
mais dans de juftes proportions , c'eft-à-dire y
telles que l'œil du fpeÂateur \q^ réduife fans
peine à la vérité de la nature. Le Bourgeois
gentilhomme paie les titres que lui donne
un complaifant mercenaire , c'eft ce qu'on
voit tous les jours ^ mais il avoue qu'il \qs
paie , voilà pour le monfeigneur ; c'eft en quoi
il renchérit fur fès modèles. Molière tire
d'un foî l'aveu de ceridicule, pour le mieux
faire appercevoir dans ceux qui ont l'efprit
de le difïïmuler. Cette çfpece d'exagération
demande une grande juftefTe de raifbn Sc
de goût. Le théâtre a fon optique , Se le
tableau eft manqué dès que le fpedateur
s'apperçoit qu'on a outré la nature.
Par la même raifbn , il nefiiffit pas pour
rendre l'intrigue Se le dialogue vraifèmbla-
hÏQS , d'en exclure ces à parte , que tout Iq
Bbbb
5^1 C O M
monde entend excepté l'interlocuteur, & ces
méprifes fondées fiir une refTeinblance ou un
dégaifement prétendu , fuppofïtion que tous
les yeux démentent , hors ceux du perfon-
iiage qu'on a defTein de tromper ^ il faut en-
core que tout ce qui fe pafTe & fe dit fur la
fcene fbit une peinture fi naïve de la fociété ,
qu'on oublie qu'on eft au fpedacle. Un ta-
bleau eft mal peint , fi au premier coup d'œil
on penfe à la toile , & fi l'on remarque la
dégradation des couleurs avant que de voir
des contours , des reliefs & des lointains. Le
prefiiige de l'art , c'eft de le faire difparoitre
au point que non-feulement l'illufion pré-
cède la réflexion, mais qu'elle la repoufl~e
& l'écarté. Telle devoit être l'illufion des
Grecs & des Romains aux comédies de Ale-
xandre & de Térence , non à celle d'Arifl:o-
phane & de Plante. Obfervons cependant ,
à propos de Térence , que le pofiible qui
fijffit à la vraifèinblance d'un caraâ:ere ou d'un
événement tragique , ne iùffit pas à la vérité
des mœurs de la comédie. Ce n'eft point un
père comme il peut y en avoir , m.ais un
père comme il y en a ^ ce n'efl point un in-
dividu, mais une efpece qu'il faut prendre
pour modèle 3 contre cette règle pêche le
caraftere unique du bourreau de lui-même.
Ce n'efi: point une combinaifon pofiible
à la rigueur ^ c'efi une fuite naturelle d'évé-
nemens familiers qui doivent former l'intri-
gue de la comédie , principe qui ^condamne
f intrigue de ÏHecyre : fi toutefois Térence a
eu delfein de faire une comédie d'une action
toute pathétique , & d'où il écarte jufqu'à la
fin avec une précaution marquée le feul per-
fonnage qui pouvoit être plaifant.
D'après cqs règles que nous allons avoir
occafion de développer & d'appliquer , on
peut juger des progrès de la comédie , ou
plutôt de fès révolutions.
Sur le chariot de Thefpis la comédie n'é-
toit qu'un tiifu d'injures adrelTées aux pafTans
par des vendangeurs barbouillés de lie. Cra-
«ès , à l'exem.ple d'Epicharmus & de Phor-
mis , poètes Siciliens , l'éleva fur un théâtre
plus décent , & dans un ordre plus régu-
lier. Alors la comédie prit pour modèle la
tragédie inventée par Efchyle , ou plutôt
VimQ & l'autre fe formèrent fur les poéfies
d'Homère , l'une fur l'Iliade & l'Odyffée ,
îautre fur le Margitès , poème .fatyrique
C O M
du même auteur ^ 8c c'eft-là proprement l'é-
poque de la naiflance de la comédie greque.
On la divifè eu. ancienne , moyenne & nou-
velle , moins par fes âges que par les diffé-
rentes modifications qu'on y obferva fuccef-
fiVem.ent dans la peinture des mœurs. D'a-
bord on ofa mettre fur le théâtre d'Athènes
des fatyres en aftion , c'eft-à-dire , des per-
fonnages connus & nommés , dont on imi-
toit les ridicules & les vices ; telle fut la
comédie ancienne. Les loix , pour réprimer
cette licence , défendirent de nommer. La
malignité des poëtes^ii celle des fpeftateurs
ne perdit rienàcette défcnfe ^ lareifemblance
desmafques, des vêtemens , de l'aâiion , dé-
fignerent Çi bien les perlbnnages , qu'on les
nommoit en les voyant : telle fut la comédie
moyenne , où le poè'ie n'ayant plus à crain-
dre le reproche de la perfbnnalité, n'en étoit
que plus hardi dans fes infulîes 5 d'autant
plus fur d'ailleurs d'être applaudi , qu'en
repaiifant la malice des fpeâiateurs par la
noirceur de fes portraits , il ménageoit encore
à leur vanité le plaifir de deviner les modèles.
C'eî^ dans ces deux genres qu'Arifiephane
triompha tantde fois àlahontedesAthéniens.
La comédie fatyrique préfentoit d'abord
une face avantageufe. Il ertdes vices con-
tre lefquels les loix n'ont point févi : l'in-
gratitude , l'infidélité au fecret & à là pa-
role , l'ufurpation tacite & artificieufe du
mérite d'autrui , l'intérêt pcrfoiinel dans les
affaires publiques , échappent à la fevérité
des loix ^ Vu. corné die fatyrique y a'ttachoit une
peine d'autant plus terrible , qu'il falloit la
fiibir en plein théâtre. Le coupable y étoit
traduit , & le public fè faifoit juiiice. C'é-
toit fans doute pour entretenir une terreur fi
falutaire , que non feulement les poètes ià-
tyriques furent d'abord tolérés , mais gagés
par \zs magifi:rats comme cenfèurs de la ré-
publique. Platon lui-même s'étoit laifié fé-
duire à cet avantage apparent , lorfqu'il ad-
mit Arifi:ophane dans fbn banquet , li toute-
fois l'Arifiophane comique eft l'Ariftophane
du banquet , ce qu'on peut au moins rcvo-
queî- en doute. 11 eft vrai que Platon con-
fèilloit à Denis la leâure des comédies de ce
poète , pour comioître \es mœurs de la ré-
publique d'Athènes ; mais c'étoit lui indi-,
quer un bon délateur ,'un efjjion adroit ,
qu'il u'ea eftimoit pas davantage.
C O M
Quant aux fufFrages des Athéniens , un
peuple ennemi de toute domination devoit
craindre fur-tout la fupériorité du mérite.
La plus fanglante fatyre étoit donc fûre de
plaire à ce peuple jaloux , lorfqu'elle tomboit
fur l'objet de fa jaloulie. Il eft deux chofes
que les hommes vains ne trouvent jamais
trop fortes ^ la flatterie pour eux-mêmes , la
médifance contre les autres : ainfl tout con-
courut d'abord à favorifer la comédie faty-
rique. Ou ne fut pas long-temps à s'apper-
cevoir que le talent de cenfurer le vice pour
être utile , devoit être dirigé par la vertu ^
& que la liberté de la fatyre accordée à un
mal honnête homme , étoit un poignard
dans les mains d'un furieux: mais ce furieux
confoloit l'envie. Voilà pourquoi dans Athè-
nes , comme ailleurs , les méchans ont
trouvé tant d'indulgence & les bons tant
de fevérité. Témoin la comédie des Nuées ,
exemple mémorable de la fcélérateife àe^
envieux , & des combats que doit fè pré-
parer à foutenir celui qui ofe être plus fage
& plus vertueux que fon fiecle.
La fligcffe & la vertu de Socrate étoient
parvenues à un fi haut point de fùblimité ,
qu'il ne falloit pas moins qu'un opprobre
folemnel pour en confolcr fa patrie. Arifto-
phane fut chargé de l'infâme emploi de ca-
lomnier Socrate en plein théâtre j & ce peu-
ple qui profcrivoit un jufte , par la feul©
raifon qu'il fc laflbit de fentcndre appeller
jufie , courut en foule à ce i^îc^acle. So-
crate y affifta debout.
Telle étoit la comédie à Athènes , dans le
même temps que Sophocle & Eurypide s'y
diiputoient la gloire de rendre la vertu inté-
reffante , & le crime odieux , par des ta-
bleaux touchans ou terribles. Comment fe
pouvoit-il que les mêmes fpeftateurs applau-
diffent à des mœurs fi oppoiees ? Les héros cé-
lébrés par Sophocle & par Eurypide étoient
morts ^ le fage calomnié par Ariftophane
ctoit vivant : on loue les grands hommes
d'avoir été ^ on ne leur pardonne pas d'être.
Mais ce qui eft inconcevable, c'eft qu'un
comique groflier , rampant & obfcene , fans
goût, fans mœurs, fans vraifemblance , ait
trouvé des enthoufiaftes dans le fiecle de
Molière. Il ne faut que lire ce qui nous refte
d' Ariftophane , pour juger , comme Plutar-
que , que ceji moins pour les honnêtes gens
C O M 5^3
quil a écrit , que pour la vile populace ,
pour des hommes perdus d'envie , de noirceur ,
& de débauche. Qu'on life après cela l'éloge
qu'en fait madame DviCÏQV : jamais homme
na eu plus de fineffe ^ ni un tour plus ingé-
nieux ; leflyle £ Ariftophane eft aufti agréable
que fon efprit;fi ton napas lu Ariftophane ^
on ne connaît pas encore tous les charmes &
toutes les beautés du grec , &c.
Les magiftrats s'apperçurent , mais trop
tard , que dans la comédie appellée moyenne
les poètes n'avoient fait qu'éluder la loi qui
défendoit de nommer j ils en portèrent une
féconde , qui bannifl'ant du théâtre toute
imitation perlbnnelle , borna la comédie à la
peinture générale des mœurs.
C'eft alors que la comédie nouvelle celîk
d'être une fatyre , &; prit la forme honnête
& décente qu'elle a confèrvée depuis. C'eft
dans ce genre que fleurit Ménandre , poète
aufli pur , aufli élégant , aufil naturel , aufti
fimple , qu'Ariftophane l'étoit peu. On ne
peut , fans regrcter fenfiblement les ouvra-
ges de ce poète , lire l'éloge qu'en a fait
Plutarque , d'accord avec toute l'antiquité :
ceft une prairie émaillée de fleurs , ou ton
aime h rçfpirer un air pur. . ., La mufe d'A-
ri/lophane rejjemblea une femme perdue ^ celle
de Ménandre a une honnête femme.
Mais comme il eft plus aifé d'imiter le
groffier & le bas , que le délicat & le no-
ble , les premiers poètes latins , enhardis
par la liberté & la jaloufie républicaine ,
fuivirent les traces d' Ariftophane. De ce
nombre fut Plante lui-même ^ fà muiè eft ,
comme celle d'Ariftophane , de l'aveu non
fufpeâ: de l'un de leurs apologiftes , une bac-
chante , pour ne rien dire de pis , dont la
langue eft détrempée de fiel,
Térence qui fuivit Plante , comme Mé-
nandre Ariftophane , imita Ménandre fans
l'égaler. Céfar l'appelloit un demi-Ménan-
dre , & lui reprochoit de n'avoir pas la force
comique ; expreffion que les commentateurs
ont interprétée à leur façon , mais qui doit
s'entendre de ces grands traits qui appro-
fondifîènt les caraôeres , & qui vont cher-
cher le vice jufque dans les replis dei'ame,
pour l'expofer en plein théâtre au mépris
des fpeétateurs.
Plante eft plus vif, plus gai, plus fort,
plus varié j Térence plus fin , plus vrai, plus
Bbbb 2
5^4 C O M
pur , plus élégant : l'un a l'avantage que
donne l'imagination qui n'efl: captivée ni par
les règles de l'art ni par celles des mœurs ,
iiir le talent affujetti à toutes ces règles;, l'au-
tre a le mérite d'avoir concilié l'agrément
& la décence , la politelTe & la plaifante-
rie , i'exaâiitude & la facilité : Plante tou-
jours varié , n'a pas toujours l'art de plaire j
Tércnce trop femblable à lui-même , a le
îdon de paroître toujours nouveau : on fou-
haiteroit à Plaute i'am.e de Térence , à Té-
Tence l'eiprit de Plaute.
Les révolutions que la comédie a éprou-
vées dans fes premiers âges , &. les différen-
ces qu^on y obferve encore aujourd'hui ,
jjrennent leur fburce dans le génie des peu-
ples & dans la forme des gouvernemens :
Tadminiftration des affaires publiques , &
■par conféquent la conduite des chefs , étant
l'objet principal de l'envie & de la cenfure
■dans mi état démocratique , le peuple d'A-
thènes, toujours inquiet &: mécontent, de-
voit fe plaire à voir expofer fur la fcene , non
^ feulement les vices des particuliers , mais
i'intérieur du gouvernement , les prévarica-
tions des magiftrats , les fautes des généraux ,
& fa propre facilité à ië laiffer corrompre
X)u féduire. C'eft ainii qu'il a couronné Iqs
Satyres politiques d'Ariftophane.
Cette licence devoit être réprimée à me-
fure que le gouvernement devenoit moins
populaire ^ & l'on s'apperçoit de cette mo-
dération dans les dernières comédies du même
^uteiff , mais plus encore dans l'idée qui
nous reflc de celles de Ménandre , où l'é-
tat fut toujours reipeâié f, & où les intrigues
privées prirent la place des affaires publiques.
Les Rom.ains fous les confùls , aufli ja-
loux de leur liberté que les Athéniens , mais
plus jaloux de la dignité de leur gouverne-
Tnent, n'ouroient janrais permis que la ré-
publique fût expofée aux traits rn£?ltans de
leurs poètes. Ainfi les premiers comiques la-
tins bazardèrent la fatyre perfonnelle , mais
jamais la fatyre politique.
Dès que l'abondance '& le luxe eurent
adouci les mœurs de Rome, la comédie çMq-
tnême changea fon âpreté en douceur ^ &
•comme les vices des Grecs avoient paffé
chez les Romains , Térence , pour les imi-
ter , ne fit. que copier Ménandre.
JLemênie rapport de conveiiattçe adéter-
C O M
mîné le cara£lere de la comédie ilir tous les
théâtres de l'Europe , depuis la renaiffance
des lettres.
Un peuple qui affeôoit autrefois dans ks
mœurs une gravite fuperbe , &c dans fes fen-
timens une enflure romanelque , a dû fer-
vir de modèle à des intrigues pleines d'in-
cidens & de carafteres hyperboliques. Tel
eft le théâtre eipagnol j c'eft-là feulement
que fcroit vraifemblable le caraâere de cet
amant ( Villa Mediana. )
Qui brûla famaifon pour emhrajfer fa dame^
L'emportant a travers la flamme.
Mais ni ces exagérations forcées , ni une li-
cence d'imagination qui viole toutes les rè-
gles , ni un raffinement de plaifanterie fou-
vent puérile , n'ont pu faire refufèr à Lo-
pès de Vega une des premières places parmi
les poètes comiques modernes. Il joint en
effet à la plus heureufe fagacité dans le chois
des caractères , une force d'imagination que
le grand Corneille admiroit lui-même. C'eft
de I.opès de Vega qu'il a emprunté le ca-
raftere du menteur , dont il difoit avec tant
de modeftie & iî peu de raifon , quil don-
nerait -deux de fes meilleures piec<s peur Sa-
voir imaginé.
Un peuple qui a mis long-temps fon hon-
neur dans la fidélité des femmes , & dans
une vengeance cruelle de l'atJront d'être trahi
en amour, a dû fournir des intrigues péril-
ieufès pour les amans , & capables d'exercer
la fourberie des valets : ce peuple d'ailleurs
pantomime , a donné lieu à ce jeu muet,
qui quelquefois par une expreiîion vive &:
plaifante , & fouvent par des grimaces qui
rapprochent l'homme du finge , foutient
feul une intrigue dépourvue d'art , de fens ,
d'e^it & de goût. Tel eft le comique ita-
lien , aufîî chargé d'incidens , mais moins
bien intrigué que le comique efpagnol. Ce
qui caraôérife encore plus le comique ita-
lien , eft ce mélange de mœurs nationales ,
que la communication & la jaloufie mu-
tuelle àes petits états d'Italie a fait imaginer
a leurs poètes. On voit dans une même m-
trige un bolonnois , un vénitien , un napo-
litain , un bergamafque , chacun avec le
ridicule dominant de fa patrie. Ce mélange
bizarre ne pouvoit manquer de réuffir dans
ià Jiouveauîé. Les Italiens en firent ujîc
C O M
tegic efTenticIle de leur théâtre , & la coml-
■die s'y vit par-là condamnée à la grofTiere
«uniformité qu'elle avoit eue dans fon ori-
rgine. AuiTi dans le recueil immenfe de leurs
^pièces , n'en trouve-t- on pas une feule dont
.un homme de goût foutieune la ledure. Les
Italiens ont eux-mêmes reconnu la fupério-
rité du comique François : & tandis qiie
deurs liiftrions le fbutiennent dans le centre
•ÀQS beaux arts , Florence les a profcritsdans
ion théâtre , Se a fubftitué à leurs farces les
;metlleures comédies de Molière traduites en
Italien. A l'exemple de Florence , Rome &
Naples admirent fur leur théâtre les chefs-
-d'œuvre du nôtre. Venife fe défend encore
de la révolution j mais elle cédera bientôt
.au torrent de l'exemple & à l'attrait du plaifir.
Paris feul ne verra-t-il plus jouer Molière ?
Un état où chaque citoyen fè fait gloire
vde penfer avec indépendance , a dû four-
ni ir un grand nombre d'originaux à pein-
dre. L'afîédtation de ne reifembler à per-
ribnne fait fouvent qu'on ne jefTemble pas à
** Xoi-même , & qu'on outre ibn propre carac-
tère , de peur de £b plier au caradtere d'au-
-trui. Là ce ne font point des ridicules cou-
•rans j ce font àes fingularités perfbnnelles ,
qui donnent priiè à la plaifanteris ; le
vice dominant de la fbciété eJft de n'être
.pas ibciable. Telle eft la fource du comi-
que Anglais., d'ailleurs plus iîmple, &plus
jiaturel , plus philofophique que les deux au-
-tres j & dans lequel la vraifemblance eft ri-
-goureufement obfervée, aux dépens même
ide la pudeur.
Mais une nation douce & polie -, où cha-
cun fe fait un devoir de conformer fes fèn-
itimens & iks idées aux mœurs de la focicté ,
.où des préjugés font des principes , où les
■ufàges font des loix , où Ton eft condamné
à vivre fèul dès qu'on veut vivre pour foi-
•jnême ^ cette nation ne doit préfènter que
ides caraâeres adoucis par les égards, &
•que des vices palliés par les bienféances.
Tel eu le comique firançois , dont le théâtre
anglois s'eft enrichi autant que l'oppolîtioii
•des mœurs a pu le permettre.
Le comique françois fe divife., fiiivantles
mœurs qu'il peint , en comique bas , comique
^bourgeois , & haut comique. V, COMIQUE.
Mais une divifion plus elTentielle fe tire
:dfiiaxiiâféreiice des objets que la comédie fc
€ O M 5^5:5'
propofe : ou elle peint le vice qu'elle rend
méprifable , comm.e la tragédie rend le crime
odieux ^ de-là le comique de caraôere : ou
elle fait les hommes le jouet des événemensj
de-là le comique de fituation : ou &\\q pré-
fente les vertus communes avec des traits qui
les font aimer ,& dans des périls ou des mal-
heurs qui les rendent intéreifantes 3 de-là le
comique attendriffant.
De ces trois genres , le premier eft le plus
utile aux mœurs , le plus fort , le plus difiî-
cile, & par conféquent le plus rare : le plus
utile aux mœurs , en ce qu'il remonte à la
fburce des vices , & les attaque dans leur
principe 3 le plus fort , en ce qu^il préfente
le miroir aux hommes , & les fait rougir de
leur propre image 3 le plus difficile & le plus
rare , en ce qu'il feppofe dans fon auteur
une étude confe)mmée des mœurs de fon
iiecle , un difeernemient jufte & prompt, 8c
une force d'imagination qui réunifie fous un
feul point de vue les traits que ià pénétra-
tion n'a pu faifir qu'en détail. Ce qui man-
que à la plupart des peintres de carafteres,
& ce que Molière , ce grand modèle ea
tout genre , pofTédoit éminemment 3 c'eft
ce coup d'œil philofophique , qui failît non
feulement \qs extrêmes , mais le milieu des
chofes ; entre l'hypocrite fcélérat , & le dévot
crédule , on voit l'homme de bien qui démaf^
que la feélérateffe de l'un , & qui plaint la
crédulité de l'autre. Molière met en opposi-
tion les mœurs corrompues de la fociété , &
la probité farouche du Mifantrope : entre ces
deux excès paroît la modération du fage , qui
hait le vice & qui ne hait pas les hommes.
Quel fonds de philofophie ne faut-il point
pour faifir le point ainfî fîx« de la vertu ! C'eft
à cette précifion qu'on reconnoît Molière ,
bien mieux qu'un peintre de l'antiquité ne
reconnut fon rival au trait de pinceau qu'iî
avoit tracé fur une toile.
Si l'on nous demande pourquoi le comi-
que de fituation nous excite à rire , même
fous le concours du comique de caraftere ,
nous demanderons à notre tour d'où vient
qu'on rit de la chute imprévue d'un paffant.
C'eft de ce genre deplaifanterie que Henfîus
a eu raifon de dire ypîebis aucupiumeji 6?
abuÇus, Voyei Rire. Il n'^en eft pasainiî
du comique attendriffant ;, peut-être mêtnc
elVilplus utile aux mœurs que kira^idie.
^66 C O M
vu qu'il nous intérefTedeplus près,&qu'ainfi
les exemples qu'il nous propofe nous tou-
chent plus ièniiblement : c'eft du moins l'o-
pinion de Corneille. Mais comme ce genre
ne peut être ni foutenu par la grandeur des
objets, ni animé par la force des fituations,
& qu'il doit être à la fois familier & inté-
reflant , il eft difficile d'y éviter le double
écueil d'être froid ou romanefque ^ c'eft la
fimple nature qu'il faut faifir ^ & c'eft le
dernier effort de l'art d'imiter la fimple na-
ture. Quant à l'origine du comique atten-^
driftànt , il faut n'avoir jamais lu les anciens
pour en attribuer l'invention à notre Ciecle ^
on ne conçoit mêirie pas que cette erreur ait
pu fubfifter un inftant chez une nation ac-
coutumée à voir jouer l'Andrienne de Té-
rence , où l'on pleure dès le premier aâ:e.
Quelque critique pour condamner ce genre ,
a oie dire qu'il étoit nouveau '^ on l'en a cru
fur fa parole , tant la légèreté & l'indifférence
d'un certain public fur les opinions littérai-
res , donne beau jeu à l'eftronterie & à l'igno-
rance.
Tels font les trois genres de comiques ,
parmi lefquels nous ne comptons ni le comi-
que de mots fi fort en ufage dans la fbciété ,
foible reffource des efprits fans talent , fans
étude & fans goût ^ ni ce comique obfcene ,
qui n'eft plus fouffert fur notre théâtre que
par une forte de prefcription , & auquel les
honnêtes gens ne peuvent rire fans rougir j
ni cette efpece de traveftiffement , où le pa-
rodifte fe traîne après l'original pour avilir
par une imitation burlefque , ra6tion la plus
noble & la plus touchante : genres méprifa-
bles, dont Ariftophane eft l'auteur.
Mais un genre fupérieur à tous les autres ,
eft celui qui réunit le comique de fituation
& le comique de caraftere , c'eft-à-dire dans
lequel les perfonnages font engagés par les
vices du cœur , ou par les travers de i'e^irit ,
dans les cirçonftances humiliantes qui les ex-
pofènt à la rifée & au mépris des ipeâa-
teurs. Tel eft , dans l'Avare de Molière , la
rencontre d'Harpagon avec fon fils , lorfque
iàns Ce connoître ils viennent traiter enfem-
ble , l'un comme ufurier , l'autre comme
difîipateur.
Il eft des cara6i:eres trop peu marqués
pour foui ir unea6Hon foutenue; les habiles
peintres les ont groupés avec des caractères
C OM
dominans ; c'eft l'art de Molière : ou ils
ont fait contrafter plufieurs de ces petits ca-
raderes entre eux ^ c'eft là manière de Du-
freny , qui , quoique moins heureux dans
l'économie de l'intrigue ^ eft celui de nos
auteurs comiques , après Molière , qui a le
mieux -faifi la nature ^ avec cette différence
que nous croyons tous avoir apperçu les traits
que nous peint Molière , & que nous nous
étonnons de n'avoir pas remarqué ceux que
Dufreny nous fait appercevoir.
Mais combien Molière n'eft- il pas au
defîiis de tous ceux qui l'ont précédé , ou
qui l'ont fuivi ? Qu'on life le parallèle qu'en
a fait , avec Térence , l'auteur du fiecîe de
Louis XIV , le plus digne de les juger , la
Bruyère. // na , dit-il , manqué h Térence
que d'être moins froid : quelle pureté ! quelle
exaclitude ! quelle politeffe ! quelle élégance !
quels caractères ! Il na manqué à Molière que
d'éviter ie jargon , & d'écrire purement : quel
feu ! quelle naïveté ! quelle fource de la bonne
plaifanterie ! quelle imitation des moeurs ! &
quel fléau de ridicule ! mais quel homme on
aurait pu faire de ces deux comiques !
La difficulté de faifir comme eux les ridi-
cules & les vices , a fait dire qu'il n'étoit
plus poffible de faire des comédies de carac-
tères. On prétend que les grands traits ont
été rendus , & qu'il ne refte plus que des
nuances imperceptibles : c'eft avoir bien peu
étudié les mœurs du fiecle , que de n'y voir
aucun nouveau caractère à peindre. L'hypo-
crifie de la vertu eft-elle moins facile à dé-
mafquer que l'hypocrifîe de la dévotion?
lemifantropeparaireft-il moins ridicule que
le mifantrope par principes ? le fat modefte,
le petit feigneur , le faux magnifique , le
défiant , l'ami de cour , & tant d'autres ,
viennent s'offrir en foule à qui aura le talent
& le courage de les traiter, La politeffe gafe
les vices j mais c'eft une efpece de draperie
légère , à travers laquelle les grands maîtres
favent bien deffiner le nu.
■ Quant à l'utilité de la comédie morale &
décente , comme elle l'eft aujourd'hui fiir
notre théâtre , la ré^'oquer en doute , c'eft
prétendre que les hommes foient infenfibles
au mépris & à la honte ^ c'eft fuppofer , ou
qu'ils ne peuvent rougir , ou qu'ils ne peu-
vent fè corriger des défauts dont ils rougif-
fènt \ c'eft rendre les. caraéteres indépendans
CO M
de l'amour propre qui en eft l'ame , & nous
Ipnettre au defîiis de l'opinion publique ,
dont la foibleffe & l'orgueil font les efcla-
ves , & dont la vertu même a tant de peine
à s'affranchir.
Les hommes , dit-on , ne fe recônnoiffent
pas à leur image : c'eft ce qu'on peut nier
hardiment. On croit tromper les autres ,
mais on ne fe trompe jamais ^ & tel prétend
à l'eftime publique , qui n'ofercit fe mon-
trer s'il croyoit être connu comme il fe con^
iioît Ini-m.ême.
Perfonne ne fe corrige , dit-on encore :
malheur à ceux pour qui ce principe eii une
vérité de fentim.ent ^ mais fi en efièt le fond
du naturel eft incorrigible , du moins le de-
hors ne l'eft pas. Les homjmes ne fc touchent
que par la furface ^ & tout feroit dans l'or-
dre , il on poKvoit réduire ceux qui font nés
vicieux , ridicules ou mxéchans 3 à ne l'être
qu'au dedans d'eux-mêmes. C'eft le but que
fe propofe la comédie ; &: le théâtre eft pour
le vice & le ridicule , ce que font pour le
crime les tribunaux où il eft jugé, & les
échafauds où il eft puni.
On pourroit encore divifer la comédie re-
lativement aux états , & on verroit naître
de cette divifion , la comédie dont nous ve-
nons de parler dans cet article , la pajîorale
& la féerie : mais la paftorale & la féerie ne
méritent guère le nom de comédie que par
une forte d'abus. Fby. ies articles FÉERIE &
PASTORALE.Cf/ûr/. f/?ife M. de Marmontel.
* Comédie 5 CH//?. anc) ha. comédie
des anciens prit différens noms , relative-
ment à différentes circonftances dent nous
allons faire mention.
Ils eurent les comédies Atellanes , ainfî
nommées d'Atella , dans la Cam.panie :
c'étoit un tilfu de plaifanteries ^ la langue en
étoit oicique j elle étoit divifée en aâ:es 3 il
y avoit de la mufique , de la pantomime ,
& de la danfë ^ de jeunes romains en étoient
lesafteurs. F'oj^^Âtellanes.
Les comédies mixtes , où une partie fe
paifoit en écrit , une autre en adiicn j ils
difoient qu'elles éto'xQwt partimjiatariae ^par-
tim mctoriœ , & ils citoisnt en exemple
VEunuque de Térence.
■ Les comédies appcllées motorice , celles
où tout étoit en action , comme dansl'y^/r.-
vhytrion de Plaute,
C OM 5^7
Les comédies appellées palliatœ , où le
fujet & les perfonnages étoient grecs , où
les habits étoient grecs , où l'on fe fervoit
du pailium : ^ les appelloit au^x crepidae y
chaulfure commune des Grecs.
Les comédies appellées planipedice , cel-
les qui fe jouoient à pies nus , ou plutôt fur
un théâtre de plain-pié avec le rez-dc-
chauifée.
Les comédies appellées prœtextatœ , où le
fîijet & les perfonnages étoient pris dans
l'état de la nobleife , & de ceux qui por-
toient les togœ prmextœ.
Les comédies appellées rhintonic.v , ou
comique larmoyant , qui s'appelloit encore
hitnro tragedia , ou latina comedia^ ou co-
media italien. L'inventeur fut un bouffon de
Tarente nommé Rhintone.
Les comédies a^-^elléQs Jfatariœ , celles où
il y a beaucoup de dialogue & peu d'aétion ,
telles que YHecyre de Térence & XAjinairt
de Plaute.
Les comédies appellées tabernariœ , dont
le fujet & \ç.% perfonnages étoient pris du bas
peuple , &. tirés des tavernes. Les acleurs y
jouoient en robes longues , togis^ fans man-
teaux à la greque , palliis. .Afranius & En-
nius fe difèinguerent dans ce genre.
Les comédies appellées togatœ , où les ac-
teurs étoient habillés de la toge. Ste^hanius
fit \^s premières j on les fubdivifk en togatœ
proprement dites , prœtextatœ , tabernariœ ,
&: Atellanœ, Les togatœ tenoient propre-
ment le \ri)Siç:\\ç.\\Xxc\QS prœtextatœ &:les ta-
bernariœ : c'étoient les oppofées depalliatœ.
Les comédies appellées trabcatœ : on en
attribue l'invention à Caïus Melifliis. Les
adeursyparoiffoient/Vz trabeis^ & y jouoient
àQs triomphateurs, des chevaliers. La dignité
de ces perfoiuiages fi propres au comique ,
a répandu bien de l'obfcurité fur la nature
de ce fpedacle.
Mettons fous les yeux du lecîeur les ob~
fervations de M. Sulzer fur le même
fujct : cet écrivain auffi judicieux qu élégant ^
rend tout ce qiiil traite trop intérejpint pour
être omis.
Si fans s'attacher ni à la nature dé la comé-
die greque , ni aux différentes formes de la
comédie moderne , on veut fe faire la notion
la plus générale de ce qui peut être compris
ibus ce nom , ou définir 3.1 a comédie en difaat
5(Î8 COM
que c'eft la repréfentation d'une aâiott qui
amufe & injiruit le fpcâateur ^ tant par la va-
riété des événemens , que par le car acier e , les
mœurs , & la conduite des ff$rfonnages. On
entend fouvent dire que le but de la comédie
eft de tourner en ridicule les folies des hom-
mes j mais cela n'eft vrai ni de la comédie
ancienne , ni de celle d'aujourd'hui. Com-
bien ne voit-on pas de bonnes comédies , qui
font très-amufantes , &qui néamnoins n'ont
point ce but-là ?. Dans plufieurs pièces de
Plaute , ce qu'elles ont de rifible roule plutôt
iijr les idées comiques y & quelquefois gigan-
tesques du poëte , que fur le fujet même : &
fî l'on raflemble les traits les plus amufans
de Térence , on trouvera que cet excellent
comique n'a eu que bien rarement en vue de
jouer les ridicules. Ce peut être là un des ob-
jets de la comédie , fouvent elle a amufé les
fpedateurs au dépens des fous , ou des per-
fonnes que le poëte n'aimôit pas ;, mais cet
objet n'eft pas elî'entiel à la bonne comédie :
Non fatis ejï rifu diducere riclum
Auditoris : 6" eft quœdam tamen hic quoque
virtus. ( Horat. Serm. l. X. )
Toute action mife fur la fcene, qui peut
amufer agréablement des perfonnes d'eiprit
&; de goût , fans remuer le fentiment avec
trop de véhémence, ni exciter fortement des
paiîions férieufes , eft une bonne comédie.
Plus enfiiite l'auteur aura fu traiter cette ac-
tion d'une manière fine, fpirituelle, & inf-
truâive , plus fa pièce ièra eftimée des con-
noifteurs.
Pour déterminer donc avec plus de préci-
fîon le caraâ:ere & la nature de la comédie ,
il faut examiner attentivement ce qu'il peut
y avoir d'amufant , d'intéreiTant , & d'inf-
truâif dans les aéiions , les mœurs , le ca-
raftere & la conduite des hommes , fans
remuer trop fortement le cœur.
Ariftote a donné de la comédie une idée
conforme à ce qu'elle étoit de fon temps ^
félon lui c'eft la repréfentation de ce qu'il y a
de ridicule , de repréhenfible , ou de bizarre
dans lecaradere&dans les avions des hom-
mes. Nous difons que c'eft plutôt la repréfen-
tation de ce que la vie civile , les caradleres ,
les mœurs & les a£Hons ont d'amufant & de
rcjouiflànt. Chacun fait par expérience que
des allions raifoiinables & vertueufes , des
COM
' mœurs- coirformes à la nature , des cara^Veiirs.
exempts de ridicule & de bizarrerie , pcuvci^
plaire fur le théâtre ;, nous voyons que la co-
médie romaine a déjà iii employer des ftjjets
un peu nobles. La vie civile préfente plus
d'une fact fous laquelle on la voit avec plai-
fir. La nature toute pure peut même déjà
fournir des mœurs & des actions qui nous
amufent. Comment ne trouverions-nous pas
plus d'intérêt encore à voir agir les hommes
dans l'immeufe variété des conjondtures de
la vie ? Tout tableau moral qui nous pré-
fente l'homme dans fon véritable caraâ:ere y
toute fcene qui exprime bien les fentimens ,
les pcnfées , les projets & les entreprifes des
hommes ^ font pour le ipeâiateur qui peniè^
un coup d'œil agréable. Pourquoi interdire
au peintre des mœurs , tout fujet qui ne fera
pas rifible ^ pourquoi verrions-nous avec
moins de plaiiir le côté aimable & raifbii-
nable de l'homme , que fes défauts & fes
ridicules ?
Il eft très-utile fans doute d'^expofèr les
folies des hommes dans leur vrai jour j mais
feroit-il moins utile de mettre fous nos yeux
des exemples de procédés honnêtes , de fen-
timens nobles , de droiture , de toutes les
vertus civiles j en forte que ces exemples nous
touchent , nous attendriiîent , & fafîènt fur
nous une imprefîion durable ? Et qu'on ne
craigne pas que le beau & l'honnête foient
moins propres à donner du plaifir , que le ri-
dicule ^ nous voyons au contraire que Plaute
& Molière n'excellent nulle part davantage
que dans le férieux. Ainfî fans rien retrancher
de fon prix à la comédie fatyrique & enjouée ,
ne fermons pas nos théâtres à la comédie qui
nous amufe par des tableaux plus nobles ,
& qui, au lieu de nous faire rire des foiblef^
fès de l'humanité , nous réjouit par la vue
de fes perfeâions.
Ne nous laifTons pas alarmer par les in-
quiétudes de quelques critiques , qui fem-
blent craindre que l'introdudiion du genre
férieux ne confondît les limites qu'on a miles
entre la comédie & la tragédie , & ne pro-
duisît un ambigu monftrueux. La nature ne
connoît point ces limites j aufTi peu que la
critique pourroit en afîigner entre le haut &
le bas , le grand & le petit , la chanfon &
l'ode 5 aufli peu a-t-elle droit d'en mettre en-
, tre le tragique & le comique 3 ils ne différent
point
C 0 M
point en efleiice , ce u'efl; que le àegrê qtiî <
les dillingue.
La règle fondamentale qu'Ariftophane
fcniblc s'être propcfée, ctoit de railler &
d'exciter des éclu.s de rire , & du mépris. Celle
du poète comique doit être Aq peindre des
mœurs & de dejfincrdes caractères qui puijfent
intércjjer le fpecîateur judicieux & fenfihle.
En confëquence de cette règle , le premier
foin du comique fera d'obferver attentive-
ment les mœurs des hotr.tncs de tout état ,
afin de mettre de la vérité & de la force
<îans lès portraits. Il cherchera à corriger ,
par une fine raillerie , les défauts qu'il aura
obièrvés ;, il placera dans un jour attrayant
ce qu'il aura remarqué de beau & de noble ,
& fes tableaux nous feront fcntir d'un côté
ce que les m^œurs ont d'aifé, d'aimable , de
grand & d'élevé , & de l'autre ce qu'elles
oiit de ridicule , de gêné , de bas , de ram-
pant & de méprifàble. Nous nous verrons
nous-mêmes , 6c nos contemporains , dans
un point de vue qui nous permettra d'appré •
cier nos mœurs avec impartialité.
Le poè'te comique fera enfuite une étude
très-particulière des divers carafteres des
homnies. Il obfervcra comment ces carac-
tères font encore modiîlés par le genre de
vie , les liaifons extérieures , \qs égards , les
tlevoirs & autres circonlîances. Pour exciter
notre attention, il fera coutraîlcr enfèmbîe
les caraéieres, les devoirs, les palfions &
les ntuations ^ il nous préfenîcra fouvent le
combat de la raifon & du penchant j il dé-
niàfquera à nos yeux le fourbe Z4. l'hypocrite ,
& nous les montrera fous leurs véritables
traits^ il placera l'honnête homjne dans les
diverfes fituations critiques de la vie , & il
aura foin de le mettre dans un jour qui nous
pénètre d'eftime & d'affeclion pour lui.
Tous ces objets font très intcreiî'nn-s par eux-
mêmes, Se peuvent \?. devenir infiniment da-
vantage par l'art du poète ^ il trouvera encore
une fource très-abondante de tableaux intc-
reflans dans les divers accidens de la vie hu-
maine, & dans la manière différente dont
les divers carafteres en font affêftés.
La grande diverfité des fujets comiques
doit néceiïhiremxnt produire des comédies de
plufieurs efpeces différentes. Il ne feroit pas
inutile de déterminer plus précifément ces
Tome VJII,
C O M 5^f
efpeces , 8c de rechercher le cara£lere dil-
thidif qui convient à chscune.
Une de ces efpeces , c'eft la comédie deçà-
radere , qui s'occupe principalem.ent à dé-
veîoppper un caradere particulier , & à le
defîiner corredement ^ nous en avons déjà
plufieurs de cette efpece , comme ï Avare ,
le Glorieux , le Meraeur , &c. mais il y a
encore un très-grand nombre de caradleres,
qui quoiqu'intéreflans n'ont point été traités.
Et comme les nuances à<is, caraderes varient
à l'infini , on peut dire que cette efpece
feule leroit déjà inépuifable.
On a fait pour les peintres en hifloire un
recueil des fujets les pins intérelTans , tirés ou
des hiiloriens , ou àcs poètes , ou ôjq.z roman-
ciers^ il fèroit bien plus importî'mt de for-
mer, pour le théâtre, un pareil recifeil des
caraderes remarquables qui n'ont point en-
core été mis fi^r la Icenc.
Dans les comédies de ce getire , il faut faire
choix d'une adion qui place le peribnnagc
principal dans des cireonflances oppofées ii
fon caradere. Il faut , comm.e f obierve M.
Diderot, que le miifantrope foit amoureux
d'une coquette, & Harpagon d'une fijlequi
eft dans l'indigence. La plupart des critiques
exigent que le poète comique falfe contrafter
les caractères pour donner plus de faillie an
caradere qu'il veut peindre. Mais l'auteur
que je viens de citer , remarque , avec beau-
coup de iligacité, que le contrafte doit être >
non dans les diffcrcns caraderes , mais dans
les fituations. îlefi; très-elfentieldans ic> pic-
ces de ce genre , qu'il n'y ait qu'un feul ca-
radere principal , auquel toîit le relie foit
fubordonné , c'eft là ce qui conftitue l'unité
du fjjet, qui eft beaucoup plus elfentielîe
que celle du temps ou du.lieu. Le plan d'iuic
telle comédie fèroit , de placer un homme
dans une fituation qui fût exadement en
conflit avec (on caradere dominant ^ dès-
lors il faut ou que le caradere plie fous l'ef-
fort des circonftances , ou qu-i#par des ac-
tions conformes au caradere , ks circonf-
tances prennent une tournure qui fc prête au
caradere ; en un inot, ou la fituation ou le
caradere doivent enfin avoir le deffus.
Il eft aifé de voir qu'un tel plan bien con-
duit doit iutérefler pendant toute la ô-wriQ de
Fadion , & que les perfonnages fiîbr.îrernes
peuvent encore y répandre une grande va.-
C c c c
570 C O M
riété d'idées. Le Tartufe de Molière tient
un peu de ceplauçinais fon Avare (mt un
plan tout dilîerent, auffi eft-iifort inférieur
au Tartuffe. Car d'amener à chaque inftant
une nouvelle fituation , qui ne réfulte point
de l'aâiion principale , uniquement pour la
mettre en oppofition avec le caradlere , c'eft
caudre des fcenes détachées pour en former
une comédie. Le poëte pèche toujours contre
l'unité d'aâ:ion, dès qu'il fuppofe des événe-
mens qui ne font pas une fuite naturelle de
la pofition des chofes dans l'aéïion principale ,
quoique ces événemens répondent exafte-
mcnt au caraftere de fes perifonnages ;, car c'eft
écarter le fpeélateur de l'adiion qui feule doit
l'occ^iper. Ain»idans rJ5'z//;z/^//fde Térence,
la première fcene du troifieme ad:e a ce dé-
faut ; elle eft très-propre à bien caraâ:ériièr
Thrafon , mais elle ne tient point à l'acSèion.
Le but des comédies de caraélere peut être ,
ou fîmplement d'amufcrpar la bizarrerie du
jcaraciere , ou d'infpirer du mépris & de l'a-
verfion pour les caractères hailfables , ou de
jnonîrer ceux qui font bons & nobles , fous
un jour propre à \qs faire aimer. Il eft donc
iiifé de voir que cette première efpece de
comédie eft ilifceptible d'une grande variété.
L9 féconde efpece eft la comédie des mœurs.
Elle a pour objet de mettre fous \&s yeux du
fpeèiateur un tableau frappant & vrai des
iifagesoudugenre dévie particulier, que les
hommes d'un certain état ou condition ont
généralement adoptés. Ce fera , par exem-
ple , le tableau de la cour , celui des mœurs
ties gens opulens , celui d'une nation entière.
Les comédies de toutes les efpeces repréfen-
tent à la vérité des mœurs ;, mais cette efpece
particulière fait fon objet principal de tracer
les mœurs d'un genre de vie déterminé. C'eft
ainli que Gay , dans fon opéra des Bcggars ,
ou des Gueux , qui a eu tant de fiiccès en
Angleterre , donne le tableau des mœurs de
l'état le plus vil dans la fociété , celui des
mendians. uLes fpeètacles fatyriques des
Grecs étoient des comédies de ce genre : on
y repréfontoit \&5 mœurs des fatyres.
Cette efpece de cow.édie admet une grande
variété de caraderes , & elle eft fiifceptible
de beaucoup d'agrémens. Les mœurs à^s
diverfes nations &. des diiïerens états de la
vie civile font un à^^ plus agréables & des
plus intéreilàns objets de nos réflexions. Il y
C O M
â à^^ fnœurs ridicules , il y en a de déteftables^
mais il y en a auln d'ingénues &d'aim.ables :
il y en a même dont la defcription enchante.
On peut , fans faire de grands efforts d'efprit ,
imaginer une aétion propre à bien peindre
les mœurs qu'on fe propofë de repréfenter.
Il n'eft pas befoin de détailler ici l'avantage
que de pareils tableaux peuvent produire ,
indépendamment du plaifîr qu'ils donnent.
Chacun font , pour ne citer que ce feul exem-
ple , de quelle utilité il feroit de repréfenter
fiir la fcene \^s mœurs & le fort de cette
clafTe de perfbnnes perdues , que Hogarth a
il bien dcilinées dans fes eftampes , connues
fous le nom de Harlofs-Progreff. Térence
avoit déjà fonti cet avantage, & l'a admi-
rablement bien exprimé dans les vers que
nous croyons devoir rappeller ici.
Id vero efi^ quodego mihi putopalmarium
Me reperiife , quomodo adolefccntulus
Meretricum ingénia & mores pcj/et notare :
Mature ut eam cognorit ^ perpetuh oderit
Quœ dumforisfunt , nihil videtur mundius ,
liée magis compofitum quidquam , nec ma^
gis elegans ,
Quœ cum amatore fuo cum cœnant , li-
guriunt.
Harum videre ingluviem ^fardes , inopiam ,
Quam inhonefix folœ Jlnt demi , atque
avidœ cibi ;
Quo pacîo ex jure hejierno , panera atrum
verrent :
NofTe omnia hase , falus eft adoîefcentulis.
Eu nue A. aci. V , je. 4.
Mais pour retirer cet important avantage
de la comédie , il faudroit fans doute que le
poète & les adeurs excellalFent égale m.ent
dans l'art de peindre ^ dans cette fuppoii-
tion , on croit pouvoir dire que de tous hs
ipeâacles dramatiques , la comédie àcs
mœurs foroit la plus utile.
Une troifieme efpece de comédie foroit
celle qui s'attacheroit à repréfenter une
fîtuatioH particulière & intérefTante. Celle
d'un pcre malheureux , d'un homme ré-
duit à l'indigence, ou aufîi la fituation plus
particulière à laquelle peut conduire telle ou
telle aélion bonne ou mauvaife.
Il ne fomble pas difficile d'inventer une
aâion qui donne lieu au poète de mettre
daas tout fon jour la iituatiou c^u'ii aura
C G M
eTioI/îe. Des comédies daus ce goût forftie-
roient un tableau vivant des bieiis & des
maux de la vie humaine.
La moindre efpace de toutes , c'eft la co-
médie d'intrigue ^ laâion n'en eft établie ni
iùr le caraitere , ni fur la fituatioii des psr-
fonnao^es ; elle n'intérelTe que par la fingula-
rité àzî événcmen'j j & le merveilleux de
l'intrigue, & des incidens , une fuite variée
d'aventures extraordinaires , inattendues ,
fouvent romanefquc3,quife fuccedent coup
fur coup , 8c qui font croître l'embarras ,
font très-propres à foutenir l'attention an
lpeâ:a^èur jusqu'au moment où • l'adHon fe
termiae par un dénouement imprévu. Ce
genre eft le plus facile de tous ^ il exige jîlus
d'imagination que de jugement. Il ne faut
mêïîje qu'un degré d'imagination aifez mé-
diocre , pour trouver une foule d'incidens ,
qui en fe croifant réciproquem.ent , mettent
obftacle à des delîeins prêts à s'accomplir ,
donnent lieu à des intrigues bizarres, &c re-
tardent ainfil'a^èion pendant quelques aâes.
Les comédies de cette efpece ne font néan-
moins pas à rebuter '^ elles fervent à l'amu-
fement Stàladiverlité ;, elles font d'ailleurs
propres à fournir de très-jolies fcenes à tiroir.
Ce petit nombre de remarques peut fuf-
fire , pour montrer quel vafte champ eil ou-
vert au poète comique , & quels font les
avantages & les pîailirs variés qu'on peut
retirer de cette ièule branche des beaux arts.
Toutes ces remarques ne roulent encore
que fur le fujet général de la comédie. En
examinant la chofe de plus près , il fe trou-
vera peut-être que le prix de la comédie dé-
pend moins du fiijet , que de la manière de
le traiter. De la meilleure pièce qui ait ja-
mais été mife fur la fcene , on pourroit aifé-
ment faire une pièce déteftable fans rien
changer , ni au fujet , ni même à l'ordon-
nance , & à la plupart des fituations. Tout
comme un traduâeur mal-adroit feroit de
Y Iliade une maulfade épopée j ou comme un
mauvais peintre feroit d'un des meilleurs ta-
bleaux de Raphaël , une copie infupporta-
ble aux yeux des connoilTeurs.
Il réfulte delà que l'invention , le plan &
l'ordonnance du fujet ne font encore que la
moindre partie de l'ouvrage ^ ce n'eft que la
charpente d'une comédie. Il lui faut fans doute
im corps , & ce corps doit avoir une forme
C O M . 571
agréable , Se i}f-B membres bien proportioîi-
nés. Mais il lui faut principalement de la vie,
une ame qui penfe , & qui ait du icntiment.
Or cette vie fe manifefte par le dialogue ,
par la manière dont les perfonnages expri-
ment ce quifepaife en eux, par des impreP
lions exadfement conformes à la nature des
circonliances. Un ipe£l:ateur intelligent fré-
quente le fpeôacle, bien moins pour y voir
des événemens remarquables , ou des fitua-
tions fingulieret' qu'il imagiueroit lui-même
en cent manières tout aufîi amufantes , que
pour oblèrver l'effet que ces événemens ou
ces lîtuations font fur des hommes d'un cer-
tain génie , ou d'un certain caraé-tere. Il fè
plaît à rembarquer l'attitude , les geftes , la
phyfionomie , les diicours & la contenance
entière d'inie perfonne dont l'ame doit être
agitée par telle ou telle paillon.
Delà naifiènt les principales règles que le
poè'te comique doit fuivre dans fon travail.
La première , &: la plus importante , c'eil que
ces perfonnages fuivent exactement la nature
dans leurs difcours & dans leurs actions. Il
faut que dans tout fpeftacle dramatique , le
ipeâateur puilfe oublier que ce n'ell qu'une
produdion de l'art qu'il a fous les yeux \ il
ne goûte parfaitement le plaifir du fpectacie
qu'autant qu'il ne voit ni le poète , ni l'ac-
teur. Aulîi-tôt qu'il apperçoit quelque chofe
qui n'eft pas dans l'ordre de la nature , il fort
de fon agréable illufion , il fe retrouve au
théâtre j le ijjeâacle fait place à la critique ^
toutes les imprelTions fe diflîpent à l'inftant ,
parce que le lped:ateur fent que d'un monde
réel qu'il penfoit obferver , il a paflé dans
un monde imaginaire.
Si le fimple doute iùr la réalité de ce que
le Ipeâacle nous montre , fiiffit déjà pour
produire un fi mauvais effet , que lèra-ce
lorfqu'on y remarquera des chofes qui font
manifeftementoppofées à la nature? Le fpec-
tateur en fera indigné , & il n'aura pas tort.
Voilà pourquoi on n'aime point à voir àzs
perfonnages affe£èer de la gaieté , lorsqu'ils
n'ont aucun fujet de rire : & qu'on fe dépite
contre le poète qui veut emporter de force ce
que nous ne pouvons accorder qu'à l'adreffe.
Qu'un auteur ait eu en certaines rencontres
une heureufe faillie, une penfée ingénieufe,
unfentiment vif & délicat , cela eft très bien j
mais pourquoi faut-il qu'il mette ces belles
Cccc 2
57^ , C O M
eholcs dans h boi'.ehe d'un de Ces perfbnna-
gcs , q'.îi par fon caraftere , ou par fa fîtuation
lî^liueile , ne dcvroit poiîit les dire ? Qu'y
a-t-il. par exemple^ de plus iiifipide que
cette froide plaifanterie que Plaute met dans
4a bouche d'un amant affligé de la perte de
ia maîtrefle ?
Ira miki in pcclore & in corde facit amor
incendium
Ni lacrumjc os défendant y^m ardeat credo
cap ut.
Chaque difcours , chaque mot qui n'a pas
wn rapport fenfibîe & naturel aucaraâere &
n la.vîtuation de la perfonne qui parle , bielFe
un auditeur intelligent.
Il ne TufTit pas même que les Y)Qn[éQs , les
fentimcns . les actions foicnt naturelles , la
manière de les exprimer doit l'être encore ç, il
faut que l'acceur , fur la fccne - s'exprime
précifément comme celui qu'il rcpréfente a
i\i\ s'énonctr. Un feul terme trop haut, trop
recherché, ou qui aiibrtit mal au caractère
<ki perlbnnaje , gâte toute une fcene , il le.
t^n du dialogue n'eft pas naturel, la pièce
Cîitiere fera froide. C'eft l'un des points les
plus difficiles de l'art dramatique. Peu de
]>erfonnes même, dans les convcrfations or-
dinaires , favent rendre le dialogue intéref-
£lnt. La plupart manquent dans leur manière
de s'énoncer, ou de brié l'été ou de précilîon y
ou d'énergie j leur difcours efllanguiffant ,
ou vague , ou fans force. Le poète qui fènt
ces défauts , & qui voudroit mieux faire ,
tombe fouvent dans l'excès oppofé ^ il donne
dans le fablime , le précieux , le méthodique ,
& s'écarte du vrai. Horace a raffemblé dans
les vers que nous allons citer , tout ce qu'on
peut pi-cfcrire d'efîéntiei fiir le ftyle & k ton
de la cotnédit.
Eft brevitate opusy ut cur rat fente ntia neuf
Impediat vcrbis laffas cnerantibus aures.
Etfermone opus tfi modo trifti , fœpe }ocofo.
Dcfendente viccm modo rhetoris y ctque
Foi ta? ,
Interdum urbaniy parcentis viribus j aîquc
E'xtenuantisi- eas ccnfulto.
Sermon. /. XX.
■- Si fa comédie exige qiie tout y ibit naturel ,
elle ne demande pas moins que tout y foit
feiérejûknt* Maliieur au poëte comiqijc ^ui
C O M
fera bâiller une feule fois les fpe£îatcurs. lî
n'efl cependant pas pofTible que l'action fbit
dans tous les momens de fa durée également
vi\'e & également digne d'attention. Il y a
néceifairement des fcenes peu importantes ^
des perfonnages fubalternes , de petits inci-
dens qui n'influeiît que foiblement fiir l'ac-
tion principale. Tous ces acceiîbires néan-
moins doivent iutéreffer chacun d'eux à fa
manière.
On fait comment s'y prennent les poètes
médiocres , les bons même , lorfque quelque-
fois ilî s'oublient, pour répandre de l'intérêt
fjr CC3 petits détails. Ils imaginent quelques
fcenes épifcdiqucs qui ne tiennent point au
iujef, ils donnent aux perfonnages fiîbalternes
des caraîlsres burlefques , pour amufer le-
fïîe£^ateur par leurs faillies pendant que l'ac-
tion languit. Delà la plupart de ces fcenes
toujours au fond trcs-infipides , entre les
valets &iles fuivantes qui s'épuifènt en plai-
fanteries. Delà les carafteres d'arlequin , de
fcaraîiîouche , fi'c. qu'on retrouve dans tant
de comédies , quoique leurs habits n'y pa-
roiiient pas. Il ne fiiflit pas peur excufer le
poète de dire que ces fcenes détachées font
dans la nature , que les domefliques en ont
fouvent de telles , ta:*dis que leurs maîtres
s'occupent des plus grands intérêts , & que
ceux-ci au inilicu de l'aétion principale font
quelquefois interrompus par des afîâires
étrangères. L'auteur n'efl pas plus nutorifé
à faire entrer ces épifodes dans fon plan y
on ne lui demande pas de nous montrer les,
vhofès de la manière commune dont elles
arrivent tous les jours , aycc tout faccom-
pagnement qui peut s'y trouver ^ mais on
exige de lui qu'il les repréfcntc de la manière
qu'elles ont pu fe paffer, & qu'elles ont dii-.
le faire pour produire furunfpeélateur intel-
ligent & de bon goût le plailîr le plus vif Se
la fatisfaâicnla plus complète.
Ces défauts de recourir aux fcen-es épifb-
diques , ou à dés reinj^liluiges languiffans »,
pour cacher le vuide de l'aétion , font pour
l'ordinaire la fuite d'un manf}uc de juge-
ment ou de talent comique dans l'auteur de-
la pièce. Pour réuffir dans ce genre , il faut
plus qu'en tout autre un grand fonds d'idée»
& d'imagination. SI en développant l'aélioii
dans l'ordre naturel, il ne s'offre rien à l'ef-
prit du pocte ^ue te cjiii fc ]^)rérçiit^Qit a
C O M
feiprit de tout le monde , fi fon intelligence
ne pénètre pas plus avant dans l'intérieur de
fou fujet ^ que juiqu'où le iiinple bon fens
peut aller fans effort j (Iles objets ne font fur
fon imagination & Rir fon cœur , que des
impreflions ordinaires & communes , il peut
en épargner le détail aux Ipeôateurs. Ceux-
ci s'attendent à voir fur la icene des perfon-
iiages qui dans toutes les conjon61:ures , les
iituations , les circonitanccs iè diftinguent
du commun des hommes par leur raifon ,
leur elprit, ou leurs fëntimens , &qui par
ce moyen paroiifent dignes de nous intéref-
fêr. De tels perfonnages font toujours fûrs
rie plaire , on les voit , on les écoute avec
fatisfaâiion ; & bien que leurs occupations
actuelles n'aient rien d'intérefiànt , leur ma-
nière de penfer &. de fentir répand ds l'in-
térêt fiir la fcene la moins importante. L'intel-
Vigence, l'efjjrit, l'humeur joviale, le carac-
tère font des chofcs qui excitent notre atten-
tion , même dans les événem.cns de la vie
les plus comm.uns. Les moindres actions d'un
homme fingulier amulent , & chaque m.ot
d'un homme diftingué par fon efprit ou par
fcs lumières , fait une imprcïïion agréable.
Ainfi les fcenes accelToircs , pourvu qu'elles
tiennent réellement à l'ad^ion, peuvent très-
bien foutenir l'attention des ipeélateurs. Il
efî; même poffiblede donner de l'importance
à des fcenes qui au fond ne font placées que
pour remplir le vuide de l'aéticii , loriquc'
celle-ci eft arrêtée par quelque caufè inévi-
table. On peut employer ces fcenes à faire
raifonner im ou plusieurs perfonnages fur ce
qui a précédé , fiir la pofition actuelle des
chofes, fur ce qui va fuivre , ou fur le carac-
tère des autres aêleurs.C'eft-là le lieu propre
à placer des réflexions lumineufesfur ce que
la pièce contient de moral & d'inftruétif;,
mais il faut que le poète foit affez judicieux
pour mettre âsins la bouche de fis perfon-
nages , au lieu de penfées triviales & com-
munes , des remarques fines , & d'une appli
cation bien jufie qui , répandant un nouveau
jour fur les vérités morales & philofophiqucs,
& leur donnant un plus haut degré d'énergie,
puilfent les graver dans l'efprit & le cœur
d'une manière forte 8c ineffaçable. C'eft
dans ces fcencs-là que les belles maximes ,
fes fentences mémorables , que les bons
Fges regardent winme l'obiet ic plus iutércf-
C O M 575
faut de la poéfie , font véritablement à leur
place. Il y a en effet très-peu de ces vérités
pratiques , qu'il importe tant à l'homme
d'avoir conftamment préfentes à l'efprit ,
qu'un poète comique ne puiffc développer
d'une manière également frappante & con-
vaincante , dans des fcenes de l'efpece dont
nous parlons. Quoique peu vives , ces fcenes
deviennent très-intcrefiantcs pour des fpec-
tateurs qui cherchent quelque chofè de plus
que le fimple amufemcnt des yeux bc de
rim.agination. Ce n'efl que dans le bas co-
mique où l'on ne fauroitfupportcrdesfaenes
vuides d'aftion.
La comédie eft beaucoup plus propre que
la tragédie à donner des fcenes inftruélives.
Les événemens tragiques font hors du cours
ordinaire de la nature , au lieu qu'il fe pré-
fente tous les jours des cas où l'heureux flic-
cès dépend du bon ièns , de la prudence ,
de la modération , de la connoilTance du
monde , de la droiture ou de quelque vertu
particulière , & où l'oppofé de ces qualités
produit le défbrdre oC l'embarras, il n y a
point d'homme qui , par fès liaifons civiles
& morales , ne puiffe à tout luom.ent fe
trouver dans des conjonélures où fon pro-
cédé envers les autres , & fa façon de penfer
en général , aient une influence fcnfible fur
fon fort. Si notre corps eft chaque jour cxpofé
à divers accidens , notre état moral ne
l'eft pas moins. Pouvons-nous un fèul mo-
ment nous promettre de n'avoir ni procès ,
ni infultes , ni difjnites , de ne nous point
faire d'ennemis , ou de n'être pas la dupe
d'autrui ? Tantôt pour nous épargner des
embarras & des chagrins , la priidenceexiga
que nous fâchions plier , tantôt que nous
ayons une fermeté convenable, &: que nous
fâchions même contre-quarrer des pcrfbnnes
c[ue nous n'ofbns ni ne voulons offenfcr.
'l'antôt il s'agit de nous calmer nous-mêmes,
tantôt de calmer les autres ^ ici c'eft à nous
à fi^Jre entendre raifon à une perfbnne préoc-
civ^ée , là c'eft à nous à écouter les avis
d'autnii , & à les pelé* avec impartialité :, un
jour nous fommes appelles à pacifier les que-
relles des autres j le lendemjain nous dei eus.
nous îaiffer réconcilier. Veniam dare fctere-
que vicijfim , c'eft la plus fréquente occupa-
tion de la vie focialc.
Q.ui feront i'bainine aiîcz. dépourvu de
57+ C O U^
r.iilaii j on pDiirroit dire rôTcz brutal , pour
ne pas defirer d'avoir fous les yeux des mo-
dèles e>:a<Els & bien defiinés , qui lui indi-
quent d'une manière lumineufe ce qu'il lui
convient de faire & d'éviter eu mille rencon-
tre;; d'où dépendent (a ttanquillitc, fon hon-
neur , fouvent tout le bonheur de fh vie ?
Ce feroit vainement qu'il voudroit confulter
les traités de morale : ces ouvrages , quelque
cxccllens- qu'ils foient , s'énoncent d'une
manière trop générale ^ l'application de leurs
préceptes, au cas particulier qui fepréfènte,
xi'cft ni fûre ni facile. Il n'y a que le théâtre
comique qui, pour toutes les fcenes delà vie
humaine , puiffe fournir les vrais modèles du
bon & du mauvais ç, d'un procédé raifon-
iiable & d'un procédé fou ;, d'ailleurs les cas
y font déterminés par descirconftances fi pré-
cifes , que le fpcâateur n'y apprend pas
ilmplement ce qu'il doit faire ;, mai3 encore
comment il doit le faire:Ja comédie ne fe borne
pas à un jugement fpéculatif , elle joint le
jugement pratique, qui efl le feui utile dans
la vie.
Perfonne ne doutera que ces importans
objets dont nous venons de parler , ne foient
les véritables fojeîs dont la comédie devroit
s'occuper. C'eft à l'intelligence & au génie
du poè'te comique à les traiter de manière
qu'ils deviennent très-inftruélifs , & parcon-
féquent très-intéreffans pour tout homme
qui aime à réfléchir j mais coin me d'après
cette notionh. comédie ne feroit que ia phiio-
fophie pratique mifc en aftion , il eiï clair
que pour y travailler avec fuccès , les talens
du poète doivent être accompagnés des con-
uollfances du vrai philofophe moral ^ c'efl ici
qu'on peut dire avec Horace ;
.... Ne>/i/e enim concludere verfum
Dixeris ejje fatis
Le génie poétique dénué d'autres fecours ,
feroit d'une foible reflburce , fi l'auteur ne
fait pas embrafier d'un coup d'œil l'enfem-
ble de la vie civile , s'il n'a pas afîéz appro-
fondi la nature humaiue , s'il ne connoît pas
tous les replis du cœur de l'homme, s'il n'a
pas le don d'apprécier la fageffe , la vertu ,
l'honnêteté, fous quelque forme qu'elles pa-
roiflent \ & s'il n'a pas encore démêlé les
fources morales & psychologiques d'où dé-
coulent les travers , les folies & les fottifes
; C O M
des hoîriir.es , ii ni; lera jamais un eîrceîîent
poëte comique.
Faut-il s'étomier après cela que ce X^Q.\\t
foit fi rare ? Il n'y a qusi les meilleures xkxzs
de la nation qui puiiîènt exceller dans ce
genre. Nous ne parlons pas ici du génie 5
car le génie feul, fans une grande expé-
rience du monde , ne fauroit donner tout ce
que !c théâtre comique exige , il demande
des connoilîances qu'on n'acquiert point
dmis la retraite d'un cabinet. Pour \^% acqué-
rir , il faut avoir vu \qs hommes fous leurs
diverfes relations mutuelles , avoir cblèrvé
leurs aélions & leurs mouvemens en mille
rencontres , & avoir été foi-même aéleur
avec eux. Sans cette connoiifance pratique,
on auroiî étudié toute la vie les règles du
théâtre , qu'on nepourroitpas compolërune
iccne vraiment bpnne. Les règles ne font
utiles qu'à celui qui a fa provjlion de maté-
riaux , Se qui n'eft plus occupé qu!à leur
donner une forme régulière.
Après ce que nous avons dit jufqu'ici fur
la nature de la comédie , il feroit très-fuperflu
de traiter au long de fbn utilité. Il eft évident
qu'elle ne le cède en importance à aucun
autre genre de poéfie. Si la comédie n'efi: en-
core nullepart tout ce qu'elle devroit être ,
on ne peut l'attribuer qu'à la négligence de
ceux qui ont en leur main le fort des beaux
arts , & qui nefentent pas alfez l'importance
de celte heureufe invention pour égayer &
infiruire leshonunes. On envifage le théâtre
comme un aiilufcment : c'en eft un , la chofo
cft hors de doute ;, mais puifque fans rien
diminuer de l'amuîénient qu'il procure , il
pourroit iwq'xx une puiflante influence for les
m.œurs , qu'il ferviroit à étendre l'empire de
la raifon , & les fentimicns de l'honnêteté ,
à réprimer les folies , & à corriger \t% vices
des hommes \ ne pas en tirer un parti fi utile,
c'eft imiter cet empereur romain , qui menoit
à grands frais une belle armée dans les Gau-
les , pour ne l'occuper qu'à ramaifer des co-
quillages.
Quant à l'origine de la comédie , on n'a
pas de relations bien fûres du lieu & du temps
de cette invention. Les Athéniens fe l'attri-
buoient \ mais Ariftote a déjà obfervé qu'on
n'avoit pas di.Q% mémoires auflî certains for
l'origine de la comédie , qu'on en avoit à
l'égard de la tragédie.Il nous apprend qu'Epi-
CO M
charme & Phormys , tous deux Siciliens ,
avoient été les premiers à introduire dans
la comédie une aftion fuivie & déterminée.
C eft à leur imitation que Cratès , athénien ,
qui n'a précédé Ariftophane que de quel-
ques années , corapofà des pièces comiques
d'une forme régulière. Jufqu'alors ce n'avoit
été apparemment qu'un fimpie divertifTe-
ment de fêtes bacchanales , comme prefqiie
tous les peuples libres en ont eu dans tous
\es temps. Il eft vraifèmblable que ces diver-
tiffemens dans lefquels on fe permettoit ,
comme on le fait encore aujourd'hui en
divers lieux , d'attaquer par des brocards &
des injures tous les pafl'ans , ont donné la
première idée de la comédie. C'eft au moins
la plus ancienne forme fous laquelle elle pa-
rut à Athènes \ Ariftophane reproche aux
poètes comiques qui l'avoient précédé , &
même à fes contemporains de faire conliiter
leurs comédies' en pures bouffonneries , & en
farces propres à faire rire les enfans. Il fe
peut encore que la comédie tire fa première
origine des îètes que le peuple faifoit apr^s
la récolte de la moilîbn ^ & des fatires per-
fonnelles qu'on, y toléroit , pour lailîèr un
cours libre à la gaieté grofliere des moif-
fonneurs qui fouvent n'épargnoient par leurs
propres rxiaîtres.
La comédie proprement dite eut £ucce^\-
vement trois formes différentes à Athènes.
L'ajicienne comédie s'y introduifît vers la
quatre-vingt-deuxième olympiade. Horace
ne nous nomime que trois poètes qui fe ibient
diflingués dans ce genre : Eupolis,Cratinus ,
8c Ariftophane. Il ne nous refte que des
pièces de ce dernier , & en petit nombre f,
mais elles fufBfent pour donner une idée de
ce premier genre. L'adion y roule fur des
événemens réels , arrivés dans le temps
même , les peribnnages y font défîgnés par
leur véritable nom , & les mafques imitoient
iîiême leurs traits , aufîî exaâ:ement que la
chofe pouvoit fe faire. On y jouoit des per-
fonnes ad:uellement vivantes , & qui fou-
vent étoient préfentes au fpcs^cle. La pièce
entière n'étoit qu'une latire continuelle.
Quiconque avoit fait une fottife mémorable ,
ibit dans le maniment de la chofè publique ,
foit dans les affaires particulières , ou qui
avoit le malheur de déplaire au poète , étoit
bafoué eu plein diéatr^ , Se expofé à la rifée
C O M J7J
"de la populace. Le gouvernement , les ins-
titutions politiques , la religion mêmie n'e-
toient point épargnés. Horace nous a traCé
le caradere de l'ancienne comédie dans les
vers fuivans :
Eupolis atque Cratinus^AriJîophanefquepoétce
Atque alii quorum comœdiaprifca virorum efl ,
Si quis trat dignus defcribi^quod malus autfur^
Quod mœchus foret , autficarius aut alioqui
Famcfus , multa cum libertate notabant.
Serm. 1. VI.
Ainfi le fond de cette comédie rouloit flir
des railleries mordantes du caraâere & de
la conduite des Athéniens , ou ne s'y atta-
choit à aucune forme régulière dans l'ordon- '
nance du fujet. Souvent celui-ci étoit allé-
gorique : on y intrcduifbit en fonr.e de per-
fonnages des nuées, des grenouilles , des
oiièaux, des guêpes , &c.
On a de la peine à concevoir aujourd'hui
qu'une licence fi effrénée ait jamais pu être
tolérée ^ mal en prendroit dans notre fiecle
au poète dramatique qui auroit l'iniblence
de traduire fiir la fcene le moindre des ci-
toyens. Il eft fur-tout difSciie de compren-
dre qu'Ariftophanc ait ofé impunément in-
(ulxei la nation entière par les railleries les
plus ameres , & ofTenlèr par coniéquent tous
les fpeâateurs. On a cru que cette impunité
étoit due au penchant décidé des Athéniens
pour les railleries ingénieufes , penchant qui
les portoit à tout pardonner pourvu qu'on
•les lit rire. Le père Brumoi a penfé que c'é-
toit par politique qu'on accordoit cette li-
cence aux poètes , & que les principaux
chefs de la république aimoient bien que le
peuple plaifantât fur leur adminiflration ,
pour l'empêcher de l'examiner trop férieufe-
ment» Mais ces explications ne fèmiblent pas
affez fàtisfaifantes , & elles font en partie
faulTes ^ car fi le peuple d'Athènes avoit ap-
prouvé les fatires perfonnelles , il ne les
auroit pas réprimées par un édit public ^ &:
l'on voit à quel point il étoit lènfible à la li-
cence des poètes qui attaquoient le gouver-
nement , puifqu'il fit condamner à mort ■
Anaximandride pour un feul vers fatirique ,
moins offenfant que ce qu'Ariftophanc avoit
dit en mille endroits de £es comédies impu-
nément. Anaximandride n'avoit fait que
parodier ce vers d'Euripide ;
c.(; c o M
Tout&n cHme étoit d'avoir fubftitiic dans
et vers 'Ts'oKii à ma-ts , le g-ou\'ernement po-
litique à la nature , ck: d'avoir dit par-là :
Le magijîrat ta voulu , il ne fe fouc'u point
des loix.
Si Ariftophane a eu plus de li}3erté , c'eft
que de fou temps la comédie jouiiîbit encore
du droit attaché à fa première forme. Cette
licence faifoit alors partie de la fête pour la-
quelle la comédie étoit compofée ^ hors de
.C3 tetr.ps-Ià , & loin du théaTe , Ariilo-
pliane n'eût pas ofc faire le plaifant : c'eli
parce qu'il étoit autorifé ou par la loi , ou
du moins par un anci2n ufagc , qu'il fallut
dans la fiiite un édit exprès pour prohiber de
pareille? licences fur la fccne.
L'édit dont nous venons de parler intro-
(luifit à Athènes la comédie moyenne. Le
goiiverncm.ent devenu ariltocratique défendit
de traduire fur la fcene des perfonnes aéhiel-
Icment vivantes. Ainfî on donnoit des cvé-
Ecmens vrais fous des noms déguifés ou iiip-
pofés , à cela près cette comédie n'étoit pas
moins mordante que l'ancienne -, on y reprc-
fentoit les adfions 3c les perfonnes avec tant
de vérité , qu'on ne pcuvoit guère s'y trom-
per. Ariilrophane ck a autres qui continuèrent
à compofer après la publicarion de l'cdit ,
furent l'éhider par cette rufe , & n'en furent
pas moins licencieux 3 il fallut un fécond cdit
pour réformer ce nouvel abus.
La comédie prit alors ia troiflcmc formé
chez les Grecs : c'efc celle qu'on nomma la
nouvîlh comédie. Elle n'ofa plus prendre fon
fujet dans un événement véritable & récent.
L'aétion Se les perfbnnages dévoient être
d'invention , comme ils le font aujourd'hui \
&c parce que la fiftion a beaucoup moins
d'attraits que la réalité , les poètes durent fup-
pléer au défaut d'intérêt , par des intrigues
ingénieuiês , & une exécution plus travail-
lée 5 ce n'eft qu'alors que la comédie devint
véritablement un ouvrage de l'art , cftreint
à un plan , & à des règles fixes. Ménandre ,
parmi les Grecs , fut celui qui acquit la plus
grande gloire dans ce nouveau genre , &qui ,
à ce qu'on a lieu de croire , donna en effet
d'excellentes pièces au théâtre : les fragmens
qui nous en reftent augmentent nos regrets,
ôc inlpirent la plus haute idée pour l'auteur.
Il paroît qvc dans la Crccc prcprô , Atî:c« '
res feule a eu ia véïiv<ihlc comédie ; on igîicre
julqu'à quel temps elle s'y toutinr. Elle ne
s'intrcduifit à Rome que long-temps après ,
dans la cent trente-cinquième olyn-'piade ,
l'nn de Rome 5 14 ; on l'y fit aufii fcrvir aux
icîcs facrées , Se on l'employa , au rapport
de Tite-Live, comme un moyen propre à
appaiferla colère des dieux. Ludi Jcenici in^
ter alia cœlejlis irœ placamina injlituti dicun-
tur. Les Romains l'avoieut reçue des Etruf-
ques : Primi fcenici ex Hetruria acciti ; mais
on ne fait ni d'cù , ni à quelle cccafion l.i
comédie avoit padé en Etriirie. Les premiers
poètes comiques chez les Romains furtnt
Livius Andronicus , Naccnis & enfjite En-
niiis , ils ctoient à la fois auteurs & afteurs :
la forme de leurs comédies n'efi: pas connue.
Au jugement de Cicéron , ks pièces de Li-
vins ne foutenoient pas une féconde lechire :
Livianœ fahulcc non fctis dignœ quœ iterum
legantur. A Ennius fuccéderent Plante &
Ceecilius , qui , de m.êmie que Térence après
eux , prirent leurs comédies du théâtre des
Grecs : ces pièces n'étoient pour la plupart
qu'une traduéticn libre des comédies greques
de la nouvelle ferme. Sous le regn^ d'Au-
gufte, lepcëte Afranius devint célèbre pour
fes comédies , mais il n'en elt parveiui aucune
jufqua nous : il difîeroit de Térence, en ce
qu'il avoit choifi des perfonnages romains.
La comédie romiaine étoit diftinguée en
diverfès elpeces , d'après la condition & l'ha-
billement des perfonnages. Quand ceux-ci
remplifibient les premiers emplois de l'état,
la comédie étoit nomm.ée prœtcxtata ou tra-
beata ; étoit-ce des particuliers d'unrangdif-
tinguc , elle fe nom.m.oit togata ; enfin on
l'appelloit tabernaria , quand les perfonnages
étoientpris d'entre le comirun du peuple ;
celle-ci le fjbdivifoit encore en deux espè-
ces , ïatîcllana & la palliata : cette dernière
diipallium ou du'mianteau à la greque , &
l'autre de ia ville d'Attella en Italie.
On n'a rien de bien certain fur l'origine de
la comédie m>odernc • il eft probable que du-
rant les fieclcs du moyen âge il fs conferva
toujours en Italie quelque relie de la comédie
romaine , qui fe rapprocha petit à petit de
l'ancienne fonre,lorfque le goût commença
à renaître. Il n'eft pas impofTible néanmoins
que la comédie ait pri » naiifance chez quelques
nationi
cou
ques nations modernes , de la même manière
qu'autrefois chez les Grecs , fans aucune imi-
tation ^ quoi qu'il en foit , ce n'eft pas la
peine de faire de longues recherches fur l'o-
rigine & les progrès de la comédie moderne
avant le feizieme iîecle , puifqu'on fait que
ce fiecle-làn'avoit que de mifcrables farces ,
fans goût ni régularité. Il faut cependant ob-
ferverque déjà fous le pontificat de Léon X ,
le célèbre Machiavel compofa quelques co-
médies où l'on retrouve des vertiges de l'ef-
prit de Tcrence. Une pièce françoife de plus
ancienne date encore , dans le genre du bas-
comique , c'eft Yavocat Patelin . qu'ondonne
encore aujourd'hui au théâtre françois. Ce
n'eft qu'au fiecle palfé que la cemédie reprit
une forme fupportable ^ ce ne fut d'abord
que par des tours d'intrigues , des incidens
bizarres, des traveftiiremcns, des reconnoif
fances , & des aventures noéiurnes qu'elle
plut : les poètes e^agnols brillèrent fur-tout
dans ce genres, mais vers le milieu du dernier
fiecle la comédie parut fous une meilleure
forme , & avec la dignité qui lui convient.
Molière en France mit des pièces fur la
fcene, qui s'y foutiendront aufîi -loijfc- temps
que le fpeâracle comique fubfifterWF Notre
liecle a produit les comédies du genre férieux,
touchant , & qui donne dans le tragique \
mais il femble que même dans ce haut co-
mique , on n'eft pas encore revenu du pré-
jugé qui regarde la comédie comme un {pec-
tacle burlefque , puifque dans les pièces les
plus férieufes on retrouve des valets bouffons ,
& des fuivantes qui les agacent. C Cet article
eji tiré de la théorie générale des beaux-arts
de M. SvLZEJi. )
Comédie sainte , {Hift- mod. Théat.)
Les comédies faintes étoient des cfpeces de
farces fur des fujets de piété , qu'on re-
préfentoit publiquement dans le quinzième
& le feizieme fiecle. Tous les hiftoriens en
parlent.
C//f{ nos dévots a'ieux le théâtre abhorré
Fut long- temps dans la F ronce unplaifir
ignoré.
De pèlerins , dit-on , une troupe grojfierc
En public a Paris y monta la première ,
Et fottement "{élée tn fa [implicite
Joua les Saints , la Vierge , & Dieu par
piété. Art poétiq.
Tome FUI,
CO M 577
La fin du règne de Charles V , ayant vu
naître le chant royal , genre de poéfie de
même conftruôion que la ballade , & qui
iè' faifoit en l'honneur de Dieu ou de la
Vierge , il fe forma des fociétés , qui , fous
Charles VI , en compoferent des pièces dif-
tribuées en aftes, en fcenes , & en autant de
différens perfonnages qu'il étoit nécelTaire
pour la repréfentation. Le premier effai fe
fit au bourg Saint-Maur , ils prh-ent powr
fujct la paflion de notre-Seigneur. Le prévôt
de Paris en fut averti., & leur défendit de
continuer : mais ils fe pourvurent à la cour ^
& pour fè la rendre plus favorable , ils érigè-
rent leur fociété en confrérie , fous le titre
des confrères de la pajfion de notre-Seigneur.
Le roi Charles VI voulut voir quelques-
unes de leurs pièces : elles lui plurent , & ils
obtinrent des lettres patentes du 4 décembre
1402 , pour leur établilTement à Paris. M.
de la Mare les rapporte dans fon tr. de pol.
l. III. tom. III ^ ch. iv. Charles \l lelir ac-
corda par ces lettres patentes , la liberté de
continuer publiquement les repréfentstions
de leurs comédies pieufes^ en y appellant quel-
ques-uns de fès officiers ^ il leur perm.it
même d'aller & de venir par la ville habillés
fuivant le fujet & la qualité des myfteres
qu'ils dévoient repréfènter.
Après cette permifiion , la fociété de la
pafi^ion fonda dans la chapelle de la Sainte
Trinité le fèrvice de la confrérie, La maifon
dont dépendoit cette chapelle avoit été bâtie
hors la porte de Paris du côté de Saint-De-
nis , par deux gentilshommes allemands ,
frères utérins , pour recevoir les pékrins &
les pauvres voyageurs qui arrivoient trop
tard pour entrer dans la ville , dont les por-
tes fe fermoient alors. Dans cette maifon il
y avoit une grande falle que les confrères de
la. pafîîon louèrent : ils y conftxuifirent un
théâtre & y repréfènterent leurs jeux , qu'ils
nommèrent d'abord moralités , & enfuite
myjleres , comme le myftere de la paflion ,
le myftere des adles des apôtres , le myftere
de l'apocalypfè , Çic. Ces fortes de comédies
prirent tant de faveur , que bientôt elles fu-
rent jouées en plufieurs endroits du royaume
fur des théâtres publics \ & la Fétc-Dieu
d'Aix en Provence en eft encore de nos jours
un refte ridicule.
Alain Chartier , dans îon hijîoire de Charles.
Dddd
J78 C O M
/-"// , parlant de l'entrée de ce roi à Paris en
l'année 1437, pag. 109, dit que , « tout
au lon,^ de la grande rue Saint-Denis , au-
près d'un jeâ: de pierre l'wn de l'autre ,
étoient des échafîaulds bien & richement
tendus , où eftoient fait par perfonnages
l'annonciation Notre - Dame , la nativité
Notre-Seigneur , fa pafilon , fa réfurrec-
tion. la pentecofte , & le jugement qui féoit
très-bien :'car il fè jouoit devant le chaftelet
où eft la juftice du roi. Et emmy la ville ,
y avoit pluficurs autres jeux de divers myf-
teres , qui (broient très-longs à racompter.
Et là venoient gens de toutes parts criant
Noei , & les autres pleuroient de joie. »
En l'ann-ée i486 , le chapitre de l'églife
de Lyon ordonna fbixante livres à ceux qui
avoient jouélemyfterede la pafllon de Jefus-
Chrift, /iv. XXFIII j des actes capitulaires ,
fol. 153. De Rubis , dans fon hiftoire de la
même ville , liv. lll., chap. liij , fait mention
d'un théâtre public drelië à Lyon en 1 540.
« Et là 5 dit-il , par l'efpace de trois ou
quatre ans , les jours de dimanches & les
fctes après le difiier , furent repréfentée? la
plupart des hiftoires du vieil & nouveau
tcftament , avec la farce au bout , pour re-
créer les afllftans. » Le peuple nommoit ce
théâtre le paradis.
François I , qui prenoit grand pîaifir à la
représentation de ces fortes de comédies
faintes , confirma les privilèges des confrères
de la paiïion par lettres patentes du mots de
janvier 1518. Voici le titre de deux de ces
pièces , par où le leâieur pourra s'en former
quelque idée. S'enfuit hmyjiere de lapaffion
de Notre- Seigneur Jefus-Chriji , nouvellement
reveu & corrige' outre les précédentes im-
preffîons , avec les additions faites par très-
éloquent &Jcientifique maifire Jean Michel \
lequel myjiere fut joué à Angiers moult trium-
phamment , 6» dernièrement à Paris j avec le
nombre des perfonnages qui font a la fin dudit
livre ^ & font en nombre cxlj. 1541 j in-^.
L'autre pièce contient le myftere des
aôes des apôtres : il fut imprimé à Paris en
15A0 , in-é^. & on marqua dans le titre
qu'il étoit joué a Bourges. L'année fiiivante
il fut réimprimé in- fol. à Paris , où il iè jouoit.
Cette comédie eft divifée en deux parties \ la
première cil intitulée : Le premier volume des
€atkoliqMes œuvres & acies des apôtres^ rédige^
CO M
en efcrip par faint Luc évangélifle ^ 6» hyfl»-
rio graphe^ député par le faint-Efprit ^ icellui
faint Luc efcripvant a Théophile^ avec pluficurs
hipoires en icellui inférées des geftes des Ce fars.
Le tout veu & corrigé bien &du€went félon la
vraie vérité , & joué par perfonnages à Paris
en thofîel de Flandres , fan mil cinq cents
XLI , avec privilège du roi. On les vend à la
grand-falle du palais par Arnould & Charles
les Angeliers . frères , tenons leurs boutiques
au premier & deuxième pilier , devant la cha-
pelle des mejfeigneurs lespréfdens ; in-fol. La
féconde partie a pour titre : Le fécond volume
du magnifique myjiere des aâes des apôtres ,
continuant la narration de leurs faits & gefes
félon tEfcripiure faincle , avecques pluficurs
hi foires en icellui inférées desgefies des Ce far s,
Veu & corrigé bien& duementfelonla vraie vé-
rité^ & ainfique le myflere efijouéa Paris cette
préfente année mil cinq cents quarante-ung.
Cet ouvrage fut commencé vers le milieu
du xv^ fiecle par Arnoul Greban, chanoine
du Mans , & continué par Simon Greban
fon frère , fecrétaire de Charles d'Anjou
comte du Maine ; il fiit enfiiite revu , cor-
rigé , âc imprimé par les foins de Pierre
Cuevr^ou Curet , chanoine du Mans , qui
vivoit au commencement du xvj^ fiecle. V,
la bibliothèque de la Croix du Maine , pag,
24, 391 6' 456.
Quelques particuliers entreprirent de faire
jouer de cette manière en 1542 , à Paris ^
le myftere de l'ancien teftament , & Fran-
çois I avoit approuvé leur deffein ^ mais le
parlement s'y oppofa par afte du 9 décem-
bre 1541 , & ce morceau des regiftres du
parlement eft très-curieux y au jugement de
M. du Montcil.
La repréfentation de ces pièces férieufès
dura près d'un fiecls & demi ^ mais infenfî-
blement les joueurs y mêlèrent quelques far-
ces tirées de fujcts burlefques , quiamufoient
beaucoup le peuple , & qu'on nomina lei
jeux des poils piles , apparemment par allu-
fion à quelque fcene d'une des pièces.
Ce mélange de religion & de bouftbn-
nerie déplut aux gens fages. En 1 545 la mai-
fon de la Trinité fut de nouveau convertie
en hôpital , fuivant fa fondation : ce qui fut
ordonné par un arrêt du parlement. Alors
les confrères de la paflîon, obligés de quitter
■ leur falle , choifîrent un autre lieu pour leitf
C O M
théâtre ^ & comme ils avoient fait des gains
conficlérablcs , ils achetèrent en 1548 la
place & les mafiires de l'hôtel de Bourgogne ,
où ils bâtirent un nouveau théâtre. Le parle-
ment leur permit de s'y établir par arrêt du
19 novembre 1548 , à condition de n'y
jouer que des fujets profanes, licites, &
honnêtes , & leur fit de très-expreffes défen-
fes d'y repréfenter aucun myftere de la paf-
fion , ni autre myftere facré ; il les confirma
néanmoins dans tous leurs privilèges , & fit
défenfes à tous autres , qu'aux confrères de
la pafllon , de jouer , ni repréfenter aucuns
jeux , tant dans la ville , fauxbourgs , que
banlieue de Paris , finon fous le nom & au
profit de la confrérie : ce qui fut confirmé
par lettres patentes d'Henri II , du mois de
mars 1559.
Les confrères de la pafllon qui avoient
feuls le privilège , cefTerent de monter eux-
mêmes fiir le théâtre ^ ils trouvèrent que les
pièces profanes ne con\'enoient plus au titre
religieux qui caradlérifbit leur compagnie.
Une troupe d'autres comédiens fe forma
pour la première fois , & prit d'eux à loyer
le privilège , & l'hôtel de Bourgogne. Les
bailleurs s'y réferverent feulement deux lo-
ges pour eux & pour leurs amis : c'étoient
les plus proches du théâtre , diftinguées par
des barreaux , & ou les nommoit les loges
des maîtres. La farce de Patelin y fut jouée :
mais le premier plan de comédie profane eft
dû à Etienne Jodelle , qui compofa la pièce
intitulé la rencontre , qui plut fort à Henri
II , devant lequel elle fut repréfentée. Cléo-
patre & Didon font deux tragédies du même
auteur, qui parurent des premières fur le
théâtre au lieu & place des tragédies faintes.
Dès qu'Henri III fut monté fur le trône ,
il infefta le royaume de farceurs 3 il fit venir
de Venife les comédiens italiens fùrnommés
//' Gelofi , lefquels au rapport de M. de l'E-
toile ( que je vais copier ici ) , commencè-
rent le dimanche 29 mai 1577 leurs comé-
dies en l'hôtel de Bourbon à Paris ^ ils pre-
noient quatre fous de falaire par tête de tous
ies françois . & il y avoit tel concours , que
\cs quatre meilleurs prédicateurs de Paris
n'en avoient pas tous enfemble autant quand
ils prêchoient.... Le mercredi 2,6 juin, la cour
affeinblée aux Mercuriales , fit défenfcs ai:x
Gélofi de plus jouer leurs comédies , pour ce
C O M 579
qu'elles n'enfeignoient que paillardifes.... Le
famedi 27 juillet , // Geloji^ après avoir pré-
(ènté à la cour les lettres patentes , par eux
obtenues du roi , afin qu'il leur ft'it permis
de jouer leurs comédies , nonobftant les dé-
fenfes de la cour , furent renvoyés par fin
de non-recevoir , & défenfes à eux faites de
plus obtenir & préfènter à la cour de telles
lettres , fbus peine de dix mille livres parifis
d'amende , applicables à la boîte des pau-
vres ^ nonobftant lefquelles défenfes , au com-
mencement de feptembre fuivant, ils recom-
mencèrent à jouer leurs comédies en l'hôtel
de Bourbon , comme auparavant , par la
jufllou exprefle du roi : la corruption de ce
temps étant telle , que les farceurs , bouf-
fons , put.... & magnons , avoient tout crédit
auprès du roi. Journal d'Henri III , par
Pierre de l'Etoile, à la Haye , 1744 , //z-8°.
tome /, page 106 , 209 6' 211.
La licence s'étant également gliftee dans
toutes les autres troupes de comédiens , le
parlement refufe pendant long-temps d'enré-
giftrer leurs lettres patentes , &: il permit
feulement en 1 596 aux comédiens de pro-
vince , de jouer à la foire Saint-Germain , à
la charge de payer par chacune année qu'ils
joueroient , deux écus aux adminiftrateurs
de la confrérie de la paflion. En 1609, une
ordonnance de police défendit à tous comé-
diens de repréfenter aucunes comédies ou
farces , qu'ils ne les euifent communiquées
au procureur du roi. Enfin on réunit le re-
venu de la confrérie de la paflion à l'hôpital
général. Voye^ fur tout ceci Pafquier , rech.
liv VII. ch, V. De la Mare , traité de pol.
liv. III , tome III. ouvres de Defpréaux ,
1747^ m- 8°. &c.
Les accroiiîèmens de Paris ayant obligé
les comédiens à fe féparer en deux bandes ^
les uns reftcrent à l'hôtel de Bourgogne , &c
les autres allèrent à l'hôtel d'argent au Ma-
rais. On y jouoit encore \z% pièces de Jo-
delle, de Garnier , & de leurs fèmblables ,
quand Corneille vint à donner fa Méliie ,
qui fut fiiivie du Menteur , pièce de carac-
tère & d'intrigue. Alors parut Molière , le
plus parfait des poètes comiques , & qui a
remporté le prix de fonart malgré ^qs jaloux
Se ÏQ% contem.porains.
Le comique né d'une dévotion ignorante,
paiTa dans uuc bouffonnerie ridicule 3 eii-
Dddd 2
580 C O M
£iite tomba dans une licence groiTiere , &
demeura tel , ou baibouilié de lie , jufqu'aii
coinmencement du iïecle de Louis XIV. Le
cardinal de Richelieu , par ics libéralités ,
l'habilla cVun mafqne plus honnête ^ Molière
en le chauiîant de brodequins , jufqu'uicrs
inconnus , l'éleva au plus haut point de gloire ;,
& à fa mort , la nature l'enievelit avec lui.
Article de M. le chevalier de J au court.
Comédie ballet: on donne ce nom au
théâtre François , aux comédies qui ont des
intermedes'comme Pfyché , la princelîe d'E-
lide , &c. Voyei Intermède. Autrefois ,
& dans fa nouveauté , Georges Dandin cC
le Malade imaginaire étoient appelles de ce
nom , parce qu'ils avoient des intermèdes.
Au théâtre lyrique , la comédie ballet eft
une eipece de comédie en trois ou quatre
aôes , précédés d'un prologue.
Le Carnaval de Venife de Renard , mis en
muiique par Campra , eft la première come'-
die ballet , qu'on ait repréfentée fur le théâtre
de l'opéra: elle le fut en 1699. Nous n'avons
dans ce^enre que le Carnaval & la Folie ,
ouvrage de la Mothe , fort ingénieux & très-
bien écrit, donné en 1704 , qui Ibit refté
au théâtre. La mufique eft deDeftouchés.
Cet ouvrage n'eft point copie d'un genre
trouvé. La Mothe a manié fon ftijet d'une
manière originale. L'allégorie eft le fond de
fa pièce , & c'eft prefque un genre neuf qu'il
a créé. C'eft dans ces fortes d'ouvrages qu'il
a imaginés , où il a été excellent. Il étoit
foibje quand il marchoit ftir les pas d^au-
trui , ôc prelque toujours parfait , quelque-
fois même fublime y loriqu'il fuivoit le feu
de {es propres idées. Voye^ PASTORALE &
Ballet. (B)
COMEDIEN, f. m. i Belles-lettres. )
perfonne qui fait profeflion de repréfènter
des pièces de théâtre , compofées pour l'inf-
truâion & l'amufement du public.
On donne ce nom , en général , aux ac-
teurs & actrices qui montent fur le théâtre ,
& jouent des rôles tant dans le comique que
dans le tragique , dans les fpeétacles où l'on
déclame : car à l'opéra on ne leuf donne que
le nom à'aâeurs ou d'aârices , danfeurs ^
filles des choeurs , &c.
Nos premiers comédiens ont été les Trou-
badours , connus aufti fous le nom de Trou-
reurs & Jongleurs , ils étoiçnt tout à la. fois
CO M
auteurs & a£lcurs , comme on a vu Molière ,
Dancour , Montfleury , le Grand, &c. Aux
Jongleurs fuccéderent les confrères de la
paillon , qui repréfentoient les pièces ap-
pellées myjleres , dont il a été parlé plus
haut. F"oje;{ Comédie sainte.
A ces confrères ont fuccédé les troupes de
comédiens , qui font ou fédentiures comme
les comédiens françois j les comédiens italiens
établis à Paris , & plulîeurs autres troupes
qui ont des théâtres fixes dans plufieurs
grandes villes du royaume , comme Stras-
bourg , Lille , ùc. & les comédiens qui cou-
rent les provinces , & vont de ville en ville y
& qu'on nomme comédiens de campagne.
La profeifion de comédien eft honorée en
Angleterre j on n'y a point fait difticultc
d'accorder à M"« Olfilds un tombeau à Weft-
minfter à côté de Newton & des rois. En
France , elle eft moins honorée. L'églifè
romaine les excommunie , & leiu* refuiè la
fépulture chrétienne , s'ils n'ont pas renoncé
au théâtre avant leur mort. Voyei^ k<z-
TEURS. (G)
* Si l'on confîdere le but de nos ipeéla-
clés , & les tajens nécelfaires dans celui qui
fait y faire un rôle avec iiicccs, l'état de co^
médien prendra néceftairement dans tout bon
efprit le degré de conftdération qui lui eft
dû. Il s'agit maintenant, fur notre théâtre
françois particulièrement , d'exciter à la
vertu , d'infpirer l'horreur du vice , & d'ex-
pofer les ridicules : ceux qui l'occupent font
les organes àcs premiers génies & des hom-
mes \qs plus célebresde la nation , Corneille ,
Racine , Molière , Renard , M. de Voltaire ,
&c. leur fonâ:ion exige , pour y exceller ,
de la figure , de la dignité , de la voix , de
la mémoire , du gefte , de la fenfibilité ,. de
l'intelligence , de la comioilfance même des
mœurs & des caraâieres , en un mot un grand
nombre de qualités quqjia nature réunit fi
rarement dans une même perfonne , qu'on
compte phis de grands auteurs que de grands
comédiens. Malgré tout cela , ils ont été trai-
tés t!:ès-durement par quelques-unes de nos
loix , que nous allons expolèr dans la fuite
de cet article , pour fatisfaire à la nature de
notre ouvrage. Fbjf:{ Geste, Déclama-
tion , Intonation, &c.
Comédiens, ( Jurifpr. ) Chez \qs Ro-
, mains, les comédiens étoient dans uneeipece
C O M
d'incapacité de s'obliger , tellement que
quoiqu'ils le biffent engagés fous caution ,
& même par ferment , ils pouvoient fe re-
tirer. Novell. 51. Cette loi ne s'obferve
point parmi nous.
Il a toujours été défendu aux comédiens de
repréfcnter fijr le théâtre \qs ecclélîaftiques
&: les religieux. Novell. 123 , ch. xliv. Et
/. minus cod. de epifcop. aud. §. omnibus auth.
de fanâijf. epifcop.
Les comédiens étoient autrefois regardés
comme infâmes ( l.fi fratres cod. ex quitus
caufis infamia irrogat. C. lib. II , cap. xij ; )
& par cette raifononles a regardés comme
incapables de rendre témoignage, f^oy. Per-
chambaut , fur îart. i-^^i de la coutume de
Bretagne. Le canon defînimus , 4, quœfî.j ,
dit qu'un comédien n'ell pas recevable à in-
tenter une accufation : & le §. caufas auth.
ut cum de appell. cognof. porte qu'un fils qui ,
contre la volonté d.Q £on père , s'eft fait co-
médien , encourt fon indignation.
Cliarlemagne , par une ordonnance de l'an
789 5 mit aulTi les hiftoriens au nombre des
perfonnes infimes , & auxquelles il n'étoit
pas permis de former aucune accufation en
jufticc.
Les conciles de Mayence , de Tours , de
Rheims , de Châlons-fur-Saône , tenus en
813 , défendirent aux évêques, aux prêtres
& autres eccléiiaftiques , d'alîîiler à aucini
fpedlacle , à peine de fùfpenlion , &: d'être
mis en pénitence j & Charlemagne autorifa
cette difp®fition par une ordonnance de la
même année. Voye[ les capitul. tom. / , col.
219, 1163 ^ 1170.
Mais il faut avouer que la plupart de ces
peines ont moins été prononcées contre àes
comédiens proprement dits , que contre des
hiilrions ou farceurs publics , qui mêloient
^ans leurs jeux toutes fortes dobfcénitési &
que le théâtre étant devenu plus, épuré , on
a conçu une idée moins défavantageiiiè des
comédiens.
On tient néanmoins toujours pour certain
que les comédiens dérogent ^ mais il en faut
excepter ceux du roi qui ne dérogent point,
comme il réfulte d'une déclaration deLouis
XIII , du 16 avril 1641 , regiftrée en
parlement le 24 du même mois , & d'un
arrêt da confeil du 10 feptembre 1668 ,
rçiidu en faveur de Floridor comédien du
C O M 581
roi , qui éîoit gentilhomme ; par lequel il
lui fut accordé un an pour rapporter {^qs titres
de nobielfe , & cependant défenles furent
faites au traitant de l'inquiéter pour la qua-
lité d'écuyer.
Les aéieiirs & a£lrices de l'opéra ne dé-
rogent pas non plus , attendu que ce ijjec-
tacle eft établi fous le titre d'académie royale
de mufique.
La part que chaque comédien a dai:s les
profits peut être faifie par k% créanciers.
Arrêt du 2 juin 1^92. Journ. des audiences.
Il y a plufieurs régîem.ens pour la profef-
fion dQ5 comédiens & pour les (peftacles en
général , qui font rapportés ou cités dans le
tr. de la police , tome I , liv. III , tit. iij , d»
dans le dicîionnaire des arrêts , au mot comé-
dien. {A)
COMENOLITARI (Le ), Géogr. mod.
grand pays de la Turquie en Europe , dans
la Grèce , qui comprend la Theiîalie an-
cienne & la Macédoine.
COMETE ,LÎ.{ Phyfq. & Aflron. )
corps célefte de la nature des planètes , qui
paroît foudaineîiient & difparoîtde même ,
& qui pendant le tcm.ps de fon apparition fe
meut dans une orbite de même nature que
celles des planètes , m.ais très- excentrique,
f^oyei Etoile & Planète.
Les comètes font diftinguces principale-
ment des autres aftres, en ce qu'elles font
ordinairement accompagnées d'une queue
ou traînée de lumière toujours oppofée au
foleil , & qui diminue de vivacité à mefure
qu'elle s'éloigi-ie du corps de la comète. C'efl
cette traînée de lumière qui a occafioné Ja
divifion^ vulgaire des comètes en come:es à
queue , à barbe & à chevelure : mais cette di-
vifion convient plutôt aux différens états
d'une mêm.c comète, qu'aux phenom.encs
diftindifs de différentes comètes.
Ainfi lorfque la comète fe meut à l'orient
du foleil & s'en écarte , on dit que la comète
efi barbue , parce que fa lumière va devant
elle. F. Barbe.
Quand la comète va à Toccidcnt du foleil ,
& qu'elle le fijit , on dit que la comète a une
queue , parce que fa lumière la fuit.
Enfin quand la ro;72^r€ & le ^ok'dîonX. dia-
métralement oppofés,(la terre étant entr'eux)
la traînée de lumière qui accompagne la cp-
metc étant cachée par le corps de la comète.
5S2 cou
excepté les parties les plus extérieures qui
débordent un peu la comète & l'environnent,
on dit que la comète a une chevelure. Voy. la
fie' T^S •) plo.nche ajironom.
'Nature des comètes. Les philofophes ont été
fort embarraiTés fur la nature àes comètes ^
à caufe de la rareté de ces aftres , & des irré-
gularités apparentes de leurs phénomènes.
Avant Arilloîe on regardoit les efpaces célef-
tes comme remplis d'un nombre infini d'é-
toiles qui avoient chacune leur mouvement
particulier , & dont la plupart étoient trop
éloignées ou trop petites pour pouvoir être
apperçues ^ & l'on s'imaginoit qu'un certain
nombre de ces petites étoiles venant à fe ren-
contrer , & à ne faire pour les yeux qu'une
feule maiTe , elles formoient par ce moyen
l'apparence d'ime comète ^ jufqu'àce qu'elles
fë féparalTent pour cotitinuer leurs cours.
Mais comment fë peut faire la rencontre &
la réunion de ces étoiles ? comment peut-il
en naître un corps en forme de queue qui
s'oppofe toujours au foleil , & comment
ces étoiles peuvent-elles enfuite fe féparer
après la réunion ? c'eft ce qui ell: difficile à
concevoir,
Ariftote a aifément réfuté cette hypothefè,
& lui en a fubftitué une autre où il prétend
que les cor^etes font des feux palTagers , ou
des météores compofés d'exhalaifons élevées
au delTus de la région de l'air dans le lieu où ,
fuivant lui , efi: le feu j & il regardoit dans
cette hypothefè \&s comètes comme beaucoup
au delfous de la lune.
Cette hypothefè n'a cependant pas plus de
réalité que la première j car il enréfulte que
la lumière de la comète eft indépendante du
foleil \ d'où il s'enfuit évidemment que cette
lumière devroit fe répandre de tous les côtés
fans fe difpofer en forme de queue , ainfi
qu'il arrive réellement : d'ailleurs , les comè-
tes font apperçues en même tem.ps des en-
droits de la terre les plus éloignés ; elles font
par confëqucnt fort élevées au-deffus de l'at-
mofphere terreftre , au contraire de ce qui
arrive à l'égard de quelque météore que ce
foit formé dans notre air , à caufe de fon
peu d'élévation au deffus de la furface de la
terre.
Pe plus le peu de parallaxe des comètes
prouve qu'elles font à une plus grande hau-
C O M
I teur que la lune. On peut prendre pour exem-
ple la comète de 1 577 ; Tycho Brahé l'ob-
iërvoit à Uranibourg , & Hagecius à Prague
en Bohême, c'eft-à-dire àenviron 150 lieues
fous le même méridien. Or , ils trouvèrent
que la diftance de la comète à la luifante du
vautour étoit la même au même inftant :
d'où ils ont conclu que la. comète ïinvo'w^o'mt
de parallaxe fènfible ç, & comme la lune en
a une fort confidérable , il s'enfuit que cette
com.ete étoit fort au delà de la lune par rap-
port à la terre. V. les infi. aJîr.de'bA.lQ. Mon-
nier.
Comme c'eft par le défaut de parallaxe du
mouvement diurne qu'on eft parvenu à prou-
ver que les comètes étoient dans àes régions
fort au deffus de la lune , c'eft au contraire
par la quantité obfervée d'im autre paral-
laxe , qui eft celle de l'orbe annuel , qu'on
peut prouver que ces aftres defcendent dans
la région des planètes. Car les comètes qui
s'avancent félon la fiiite des figues , nous
femblent vers la fin de leurs apparitions, ou
ralentir trop fenfiblement leurs mouvemiens,
ou même rétrograder , & cela Icrfque la
terre eft entr'elles & le foleil. Au contraire ,
elles paroifTent fe mouvoir trop rapidement,
fi la terre eft en oppofition , c'efî-à-dire fi
elles fe trouvent en conjonéîioH avec le fo-
leil : or , c'eft précifémentce que nous obfer-
vons à l'égard des planètes. D'un autre côté
celles qu'en nomme rétrogrades, parce qu'el-
les fe meuvent en efîèt contre l'ordre des
fignes , femblent plus rapides vers la fin de
leur apparition , fi la terre eft entr'elles & le
foleil. Enfin elles paroiffent ou ralentir très-
fènfiblement leur cours , ou m.ême rétrogra-
der, fi la terre eft dans une fituation oppofée,
c'eft-à-dire fi la comète paroît en conjonftiou
avec le foleil. Il eft donc aifé de voir que la
caufe de ces apparences eft le mouvement d^
la terre dans fbn orbite , de la même manière
qu'il arrive à l'égard des planètes : car félon
que le mouvement de la terre fë fait dans le
même fèns , ou eft contraire à celui delà pla-
nète , elle paroît tantôt rétrograder , tantôt
fè mouvoir trop lentement , & avec trop de
rapidité. Newton , /. ///.
Hévélius qui a fait un grand nombre d'ob-
fèrvations fur les comètes , prétend qu'elles
fortent du foleil ^ que ce font les exhalaifons
les plus grofîieres que produit cet aftre , ôc
CO M
qu'elles font de même nature que les taches
du foleil.
Kepler penfe , comme Ariflote , que les
comètes font des exhalaifons , & croit
qu'elles font difperfées fans nombre dans le
ciel ^ 8c que fi elles ne font pas toutes viu-
bles , c'eil à caufè de leur petitefTe , ou parce
qu'elles font long-temps fous l'horizon.
Mais indépendamment de la réfutation
précédente , M. Newton a fait voir lafaulfeté
de cette hypothefb , en prouvant que la comere
de 1680 auroit été entièrement difllpée dans
fon paffage auprès du foleil , fi elle n'avoit
été qu'un corps compofé d'exhalaifons , foit
du foleil, fbit des planètes : car la chaleur du
foleil , comme on le fait,'eft enraifbn réci-
proque des quarrés des difiances du foleil^
& la diftance de cette comète au foleil dans
ion périhélie le 8 décembre , étoit à la dif-
tance de la terre au foleil comme 6 à 1000 ;
d'où il fiiit que la chaleur communiquée par
le foleil à la comète , devoit être alors à celle
qu'on éprouve fur la terre au milieu de l'été ,
comme loooooo à 36, ou comme 28000 à
I : fâchant enfuite par l'expérience que la
chaleur de l'eau bouillante eft un peu plus
que triple de celle de la terre échauffée par
\qs rayons du foleil au fort de l'été , & pre-
nant la chaleur du fer rouge pour trois ou
quatre fois plus grande que celle de l'eau
bouillante , il en conclut que la chaleur du
corps de la comète dans le temps de fon
périhélie , devoit être 2000 fois plus grande
que celle du fer rouge.
La comète ayant acquis une auflî grande
chaleur , doit être un temps immenfe à iè
refroidir. Le même auteur a calculé qu'un
globe de fer rouge de la grolfeur de la terre
ièroit à peine refroidi en 50000 ans. Ainfi
quand même la comète fe refroidiroit cent
fois plus vite que le fer rouge , elle ne laifl^-
roit pas encore , à caufe que fa chaleur eft
2000 fois plus grande , de mettre un mil-
lion d'années à fe refroidir.
Jacq. BernouUi , dans fon conamen novi
fyjiematis cometarum , imagine une planète
principale qui fait fa révolution autour du fo-
leil dans l'eipace de quatre années & 157
jours , & qui eft éloignée de cet aftre de 2 5 8 3
demi-diametres du grand orbe ^ il veut
que cette planète invifible par l'immenfité de
fa diftance , ou par lapetiteffe de fon difque j
C O M <^%^
foit accompagnée de différens fatellites plus
ou moins éloignés 3 & félon lui , ces fatel-
lites defcendent quelquefois dans leur péri-
gée aufli bas que l'orbite de Saturne , de-
viennent alors vifibîes pour nous, & ce
font ce que nous appelions comètes.
Defcartes penfe que les comètes font des
étoiles qui étoient d'abord fixes comme les
autres , mais qui s'étant enfuite couvertes de
taches & de croûtes ont à la fin perdu en-
tièrement leur lumière '^ & que ne pouvant
plus alors conièrver leurs places , elles ont
été entraînées par les tourbillons des étoiles
voifines ^ enforte que fuivant leurs différen-
tes grandeurs & folidités elles ont pu être
portées jufqu'à l'orbe de Saturne , diftance
à laquelle recevant les rayons du foleil
avec aflbz de force , elles deviennent vifi-
bîes. Voyei Cartésianisme.
Mais le peu de vérité de toutes ces hypo-
thefès faute aux yeux par les phénomeneg
des comètes : nous allons expofer les princi-
paux de ces phénomènes , comme étant la
pierre de touche de toutes les théories.
I °. On obferve des altérations fenjibles dans
la vitejfe apparente des comètes ^ félon quelles
font fituées par rapport a la terre ; cefi ce que
nous avons déjà remarqué plus haut,
2*^.- Tant que leur viteffe augmente , elles
paroijfent décrire à-peu-pres de grands cer-
cles ; mais vers la fin de leuK courfe elles sé~
cartent un peu de ces cercles ; & dans le cas
ou la terre va du même côté quelles y elles pa-
roijfent aller du côté oppofé. s
3°. Elles fe meuvent dans les ellipfes qui
ont le foleil pour un de leurs foyers , 6' dé-
crivent autour de ce foyer des aires propor-
tionnelles aux temps.
4°. La lumière de leur corps central ou
tête augmente quoiquelles s'éloignent de la
terre , lorf quelles s approchent du foleil ; &
elle décroît au contraire lorfgu elles s éloi-
gnent du foleil , quoiquelles deviennent plus
proches de la terre.
5°. Leurs queues font les plus grandes &
les plus brillantes immédiatement après leur
périhélie. "
6°. Leurs queues s^ écartent un peu de la di'
reSion du foleil au noyau ou corps de la.
comète ^ & fe courbent vers le côté que l(t
comète vient de quitter^
7°. Cette déviation ^toutes chef es égales ^efi
584 C O M
la plus petite lorfque la tête de la comete ap-
proche le plus du foleil ; & elle ejl moindre au-
près de la tête que vers t extrémité de la queue.
8°. Les queues font un peu plus brillantes
6' plus dijiinclement terminées dans leur partie
convexe que dans la concave,
9°. Les queues paroijfent toujours plus
larges vers textrémité qu auprès du centre
de la comete.
10^. Les queues fonttranfparentcs^Ç^lesplus
petites étoiles peuvent s appercevoir .au travers.
Ce font-là \qz principaux phénomènes des
comètes , que l'on voit aifément démentir les
opinions étranges que les anciens avoientde
ces aftres , & peu quadrer avec les foibles
conjeâiures de la plupart des auteurs moder-
nes. A la vérité il y a eu quelques anciens ,
comme Pline le rapporte , qui ont eu à^s idées
plus juftes fur les comètes , qui ont penfé que
c'étoient des aftres perpétuels qui failbient
leurs révolutions dans des orbites particuliè-
res : ilparoît même que les plus anciens phi-
lofophes avoient placé les comètes dans ces
vaftss régions du ciel qui font au-delfus de
l'orbite de la lune , félon le témoignage d'A-
riftote , de Plurarque , & de divers auteurs
tant grecs que latins \ c'étoit le fentimentdes
pythagoriciens & des autres philofophes de la
feâ:e italique \ c'étoit aufli celui d'Hippocrate
de Chio , célèbre par la quadrature des lunu-
les qui portent fon nom ( voye\^ LuNULE ) :,
c'étoit enfin l'opinion de Démocrite. Sénë-
que nous rapporte au liv. Vil , ck. iij defes
que/lions naturelles , ce qui en avoit été dit
par ce philofophe , l'un des plus ingénieux ,
& peut-être le plus profond de toute l'anti-
quité : il dit qu'entre tous les aftres qu'on
a\'oit obfervés , on pourroit foupçonner qu'il
y a encore un grand nombre d'autres planè-
tes différentes de celles que nous connoiftons ^
ce qui doit s'entendre , comme l'on voit, des
comètes^ que l'on regardoit alors comme des
étoiles errantes , c'eft-à-dire qu'on mettoit au
nombre des plauetes. On ignore cependant
fî le nombre en a été fixé ^ ni fi plufieurs de
ces comètes ont été diftinguées par des noms
particuliers ^ il eft d'ailleurs incertain fi l'on
avoit quelque théorie du mouvement des
cinq planètes qui nous environnent. Cepen-
dant Séneque ajoutejencore qu'Apollonius le
Myndien 5 l'nn de ceux qui avoient le plus
de connoiffance dans la phyfiqne , étoit per-
C O M
fîiadé que les Chaldéens plaçoient depuis
long-temps les comètes au nombre des étoi»
les errantes , qu'elles avoient un cours régie ,
& dans des orbites particulières qui leur
étoient connues. Le même Apollonius fbu-
tenoit aufîi que les comètes étoient de véri-
tables aftres femblables au foleil & à la lune :
leur cours , ajoute-t-il , ne fe fait pas dans l'u-
nivers fans être aifujetti à quelque loi conf-
tante ;, elles defcendent & remontent alter-
nativement au plus haut des cieux j mais lorf-
qu'elles achèvent de defcendre , il nous eft
permis de les appcrcevoir, parce qu'elles dé-
crivent la partie la plus bafib de leur orbite.
Séneque paroît avoir adopté ce ièntiment :
« Je ne fuis pas , dit-il , de l'opinion com-
mune fur les comètes ; je ne les regarde pas
comme des feux pafikgers , mais comme des
ouvrages éternels de la nature. Chaque comete
a un certain efpace alîigné à parcourir. Les
comètes ne font point détruites , mais elles fe
trouvent bientôt hors de la portée de notre
vue. Si on les met au nombre des planètes ,
il ièmbîe qu'elles ne devroient jamais fortir
du zodiaque. Mais pourquoi le, zodiaque
renfermeroit-il le cours de tous les aftres ?
pourquoi les reftreindre à un fi petit elpace ?
Le petit nombre des corps céleftes, qui font
les feuls qui paroiftent fe mouvoir , décrivent
des orbites diftcrentes les unes des autres ^
pourquoi donc n'yauroit-ilpas d'autres corps
céleftes qui auroient chacun leurs routes parti-
culières à parcourir , quoique fort éloignées
de celles des planètes ? » Ce philofophe ajoute
encore qu'il faudroit, pour les reconnoître ,
avoir recueilli une fu ite non interrompue d'ob-
fervations des anciennes comètes qu'on auroit
vues 3 mais que faute d'un tel fecours , ces ob-
fervations ne lui étant pas parvenues, & l'ap-
parition des comètes étant d'ailleurs alfez rare ,
il ne croyoit pas qu'il fûtpofiible , dans le fie-
cle où il vivoit , de parvenir à régler leurs
mouvemens , ni le temps de leurs révolu-
tions périodiques ;, qu'ainfi il ignore entière-
ment le temps de leurs apparitions, & la loi
fuivant laquelle elles doivent revenir à la
même diftance de la terre ou du foleil. Enfin
il ajoute : (( Le temps viendra que les fecrets
les plus cachés de la nature feront dévoilés
& mis au plus grand jour, par la vigilance ôc
par l'attention que les hommes y apporteront
pendant une longue fuite d'années. Un fiecle
ou
C O M
mi deux Î12 avaient pas pour une aufTÎ grancîe
reclnrchs : un jour la poilcrité fera étonnée
de ce que nous avons cherché l'explication
d'un phénomène fî (Impie , fur-tout lorfqn'a-
près avoir trouvé la vraie méuiocie d'étudier
la nature , quelque grand philofophe ièra
parvenu à dimoatrer dans quels endroits des
cieux les comètes fe répandent , &. parmi
quelles efpcces de corps céleiles on doit les
ranger. )> Quoique ce paffage fait un peu
long ,j ai cru devoir le rapporter dans un ou-
vrage delliîîé pri'.icipalement à l'hiftoiredes
Sciences & de refprit. Je l'ai tiré des inji. aji.
de M. le Monnisr.
La prédiction de Séneque aété accomplie
de nos jours par M. Newton, dont la doc-
trine eft celle-ci.
Les comcus font des corps foîides , fixes
& durables \ en un mot c'eft une efpsce par-
ticulière de planètes qui fe ineiivent librement
& vers toutes les parties du ciel dans d&^ or-
bites très-excentriques , & faiîanî de fort
grands angles avec l'éclipîique. Les comètes
pcrféverent dans leur mouvement, aufli-bien
quand elles vont contre le cours des planètes
ordinaires , que lorfqu'elies fe meuvent du
même côté ^ & leurs queues font des vapeurs
fortfubtilcs qui s'exhalent delà tôteau noyau
de la comète échauffée par la chaleur du foleil.
Ce faitune fois étabii,explique tous les phéno-
mènes. Car 1°. nous avons déjà fait voir que
les irrégularicés dans la vîtcfïe apparente des
co/;2i?/^.f, viennent de ce qu'elles ne font point
dans les régions des fixes, mais au contraire
dans celles des planètes, ou fuivant qu'elles
ont i\Qs mouvemeiis confpirans avec celui de
la terre , ou de dircâ:ionoppofce , elles doi-
vent avoir les apparences d'accélération &
de rétrogradation que l'on remarque dans les
planètes. F. RétrogRx\DATION , &c.
2?. Si les comètes paroiffent fe mouvoir le
plus vite lorfque leur courfe eji reclilignc , &c.
ia raifon en eft qu'à la Ç\\\ de leur courfe, lorf
qu'elles s'éloignent directement du foleil , la
partie du mouvement apparent qui vient de
la parallaxe , a dans ces cas une plus grande
proportion à la totalité du mouvement appa-
rent j c'cft-à-dire cette partie de leur mouve-
ment apparent qui vient de la parallaxe de
l'orbe annuel , devient trop confidérable par
rapport au mouvement propre de la comète ,
ou au mouvement qu'elle paroîtroit avoir fi
Tome VllU
C O M 5^5
îa terre demcuroitau mêine point de fonorbe :
alors ces aflres paroiffent fe détourner de leur
route ordinaire , ou s'écarter de la circonfé-
rence d'un grand cercle \ enforte que fi la
terre fe meut d'un côté, elles femblent au con-
traire être emî^ortées fuivant une direction
oppofée. Les différences des parallaxes qui
font caufces chaque jour par le mouvement
de la terre for fon orbe étant donc très-fenfi-
bles, l'obfervation quien aété faite plufieurs
fois aenfin faitconclure que vers le commen-
cement ou la fin de l'apparition des comètes ,
leur diO:ancen'étoitpas fi exceffive que quel-
ques philofophes l'avoient fiippofé , mais
qu'elles fo trouvoient alors bien au dellous
de l'orbite de Jupiter. De-îà on eft bientôt
parvenu à conclure qu'au temps de leur péri-
gée ou de leur périhélie , les comct\es paroiffanî
alors fous un bien plus grand angle , parce
qu'elles font beaucoup plus proch.es de la
terre , elles dévoient deicendre au deffous des
orbites de Mars & de la terre ^ quelques-unes
aufli ont defoendu au-delfous^ des platietes
inférieures. Inff.af}.
3^. Les comètes , fuivantles obfer/aîlons ,
fe meuvent dans des ellipfes qui ont le foleil à
un de leurs foyers , &c. cela fait bien voir
que ce ne font pas des aftres errans de tour-
billons en tourbillons , mais qu'elles font par-
tie du fyftême folaire , & qu'elles reviennent
fans celfe dans leurs mêmes orbes. V. Orbe.
Comme leurs orbites font tjès- allongées
& très-centriques-, elles deviennent invifibles
lorfqu'elies font dans ia partie la plus éloi-
gnée du foleil.
4°. La lumière de leur tête augmente en
s approchant du foleil , &c. cela s'accorde
avec les phénomènes des autres planètes.
Par les obfervations de la comète de i68o.,
M. Newton a trouvé que la vapeur qui étoît
à l'extrémité de la queue le 25 janvier , avoit
commencé à s'élever du corps a\'cint le 11
décembre précédent , & qu'anifi t.\\Q avoit
employé plus de quarante-cinq jours à s'é-
lever •, mais que toute ia queue qui avoit
paru le 10 décembre , s'étoit élevée dans
i'efpace de deux jours écoulés depuis le péri-
hélie.
Ainfi dans le commencement , lorfque
la conute étoit proche du foleil , la vapeur
?'élevoit prodigieufoment vite , & continuant
eiiihite de iiionter en fouffrant du retarde*
F ese
\
58^ C O M
ment dans fon mouvement par la gravité de
{es particules , elle augmentoit la longueur
de la qneue : Si cette queue, malgré l'im-
m.enfité de fon étendue , n'étoit autre chofe
qu'une Cmple vapeur exhalée pendant le
temps du périhélie ^ la vapeur qui s'étoit éle-
vée la première , &; qui compofoit l'extrémité
de la queue ,ne s'évanouit que lorlqu'eile fut
trop loin dufoleil pour réfléchir une lumière
lénlîble-
On voit aufll que les queues des comètes
qui font plus courtes , ne s'élèvent pas d'un
mouvement prompt & continuel pour dif-
paroître tout de liiite ;, mais que ce font des
colonnes permanentes de vapeurs qui fbrtent
de la tête avec un mouvement très-modéré
pendant un grand eipace de temps , & qui
en participant du mouvement qu'elles ont
d'abord reçu de la tcte , continuent à fe
mouvoir avec facilité dans les efpaces célef-
les 5 d'où l'on peut aifémeut inférer le vuide
de ces efpaces. J^. VuiDE.
5°. Les queues pcroijjent les plus grandes
& les plus brillantes immédiatement après quel-
les ont pajfé près dufoleil. Cela foit de ce que
le corps central étant alors le plus échaufté ,
doit exlialer le plus de vapeurs.
La lumière du noyau ou étoile apparente
de la comète , fait conclure que ces aftres font
dans notre fyflême, & qu'ils ne font en au-
cune manière dans la région des fixes, puif-
que dans ce cas leurs têtes ne feroient pas
plus éclairées par le foleil , que les planètes
ne le font par les étoiles fixes.
6". Les queues déclinent un peu delà ligne
■ tirée par le foleil & par la comète ^enfe rap-
prochant vers le coté que la comète vient de
quitter ; parce que toute fumée ou vapeur
poufTée par un corps en mouvement s'élève
obliquement, en s'éloignanî un peu du côté
vers lequel va le corps fumant.
7°. Cette déviation ejl plus petite auprès du
corps de la comète que vers l'extrémité de la
queue y & ejl la moindre lorfque la comète eft
dans fa plus petite difîancc 3U foleil ; parce
que la vapeur monte avec plus de vîtefle au-
près du corps de la comète qu'à l'extrémité
de la queue , & qu'elle s'élève aufîi avec
plus de vîtelTe lorfque la comète eil plus pro-
che du foleil.
8°. La queue eft plus brillante & mieux
îfrminée dans fa partie convexe que dans fa
G O M
partie concave; parce que la vapeur qui efl
dans la partie convexe s'étant élevée la pre-
mière , eit un peu plus denfe & plus propre
à réfléchir la lumière.
9°. Zû queue paroit plus large vers t extré-
mité qu auprès de la tête ; parce que la vapeur
qui eft dans un efpace libre fe raréfie & fo
dilate continuellement.
io°. Les queues font tranfparentes y parce
qu'elles ne font que des vapeurs très- déliées ,
&c.
On voit donc que cette hypothefe fur les
queues des comètes s'accorde avec tous IcjS
phénomènes.
Phafes des comètes. Le noyau qu'on ap-
pelle auffi corps ou tête de la comète , étant
regardé au travers d'un télefcope , paroît
d'une forme diftcrente de celle des étoiles,
fixes ou des planètes.
Sturmius rapporte qu'en obfèrvant la co-
mete de i68o avec un télefcope, il la trouva;
moins liirriineufe vers les bords que dans le-
centre, & qu'elle lui parut plutôt refferabler.
à un charbon enflammé d'un feu obfcur^ou
à une m.afiè informée de matière éclairée parr
une lumière accompagnée de fumée , qu'à-;
une étoile ronde & d'une lumière vive.
Hévéiius obfèrvant la comète de i66i y,
trouva que le corps étoit d'une lumière jau--
nâtre , brillante , & terminée , mais fans étin-
celer , ayant dans le milieu un noyau rou--
geâtre delà grofTcur de Jupiter , & environné
d'une matière beaucoup plus rare. Le 5 fé--
vrier fa tête étoit un peu plus foncée & plus..
brillante que la couleur d'or , mais d'une lu-
mière plus fbmibre que le refle des étoiles :,
de plus le noyau lui parut divifé en pîufieura
parties. Le 6 le difque étoit dimJnué , le
noyau toujours exiflant, mais moindre qu'au-
paravant : une de ces parties dont on vient:
de parler , celle qui étoit au bas de la comète
& fur la gauche , fembloit plus denfe & plus
lumincufè que le reile : le corps entier étoit
rond, & repréfentoit une étoile très peu lu-
mineufè, & le noyau paroiHoit toujours en-
\'ironné d'une matière clifîérente de la iienncé
Le lo la tête de la comète étoit m\ peu obf-
cure , & le noyau moins term.ir.é , mais-,
plus brillant vers le haut que vers le bas. Le'
i3latête étoit fort diminuée , tant en gran-
deur qu'en lumière. Le i miars fa rondeur
étoit altérée 5 & fcs bords dentelés , &ci Lo;
C O M
2.8 mars elle étoit très-pâle , & extrêmement
rare , fa matière fort diiperfée , & faiis
noyau diftingué du reftc.
Weigelius qui en obfervant la comète de
1664, vit dans le même moment la lune &
m\ petit nuage éclairé par le foleil , trouva
({iiQ. la comète , au lieu d'être d'une lumière
continue comme la lune , reffembloit au con-
traire à une efpece de nuage : c'eil ce qui lui
avoit fait conclure que les comètes étoient ,
ainfi que les taches du foleil , des exhalaifons
de cet aftre. La longueur de la queue des
comètes eft variable j celle de 1680 , fuivant
Sturmius , n'avoit guère le 20 décembre que
vingt degrés de longueur : en peu de temps
elle s'accrut jufqu'à foixante degrés j enfuite
elle diminua très-fenfîblement. Wolf.
Formation des queues des comètes. M.
Newton a fait voir que l'atmofphere àQS co-
mètes ^entïounÙY une vapeur fuffifante pour
former leurs queues j il fe fonde fur l'extrême
dilatation de l'air à une certaine diftance de
la terre ^ un pouce cube d'air commun cievé
à la diftance d'un demi-diametre de la terre ,
feroit fuffifant pour remplir un efpace aufii
grand que toute la région des étoiles , c'eft
ce qu'a démontré M. Gregory dans fon af-
tronomie phyfique. Puis donc que la cheve-
lure ou l'atmoiphere de la comcte eft dix fois
plus haute que la furface du noyau , qWq doit
être prodigieufement rare , & il eft tout fîm-
ple qu'on voie les étoiles au travers.
Quant à l'afcenfion à^s vapeurs qui for-
ment la queue des comètes , Newton la fup;
pofë occafionée par la raréfaâion de l'at-
inofphere au temps du périhélie. La fumée
comme tout le monde fut , s'élève par l'im-
pulfion de l'air dans lequel elle nage ^ l'air le
plus raréfié monte par la diminution de fa
pefanteur fpccifîque , & enlevé avec lui la
ftimée. Pourquoi ne fuppoferoit-on pas que
la queue d'une comète fèroit élevée de la
même manière par la chaleur du fokil?
Les queues étant ainfi produites , la force
qu'elles ont po"ur conferver leur mouvement
& celle qui les pouffe vers le foleil, les oblige
à décrire des ellipses ainfi que la comète
même , & à l'accompagner dans toute fon
orbite. En effet , la gravitation des vapeurs
vers le foleil , n'eft pas plus propre à déta-
cher la queue d'une comète de fa tête & à la
f^ire tomber fur le foleil, qu'à détachcM" la
C O M 5^7
terre de ion atmosphère ^ mais leur gravita-
tion commune cik caufe qu'elles fè m.euvent
également , & qu'elles font pouffées de la
miêmc manière.
Par ce moyen les queues des comètes pro-
duites pendant le temps de leurs périhélies,
peuvent être entraînées avec ces aftres dans
les régions du ciel les plus reculées , & reve-
nir enfuite avec les comètes au bout à'm\
grand nombre d'années : mais il eft plus
naturel qu'elles iè détruifent peu à peu en-
tièrement, & qu'en fè rapprochant du foleil
les comètes Qw reprennent de nouvelles, d'a-
bord très-peu fenfibles , enfuit&pîus gran-
des par degrés jufqu'au périhélie , temps
auquel elles reprennent toute leur grandeur ,
la comète étant alors le plus échauffée qu'il
eft pofîîble.
Les vapeurs dont zç.% queues font compo-
iô.QS^ fe dilatant & fe répandant dans toutes
\qs régions céleftes , font vraifèmbîablement ,
ainfi que M. Newton l'obferve, attirées par
les planètes , & mêlées avec leurs atmofphe-
res. Il ajoute que les comètes femblent nécef-
faires pour l'entretien des liquides qui fbïit
fur \c^ planètes , le/quels s'évaporent conti-
nuellement par les végétations & \(^s putré-
factions , & fè convertiffent en terre feche.
Car comme tous \^.% végétaux fë nourriffent
& s'accroifiënt par \^s fluides, & qu'ils re-
deviennent terre pour la plus grande partie
par la putréfaftion ( comme on le peut voir
par le limon que \zs liqueurs putréfiantes dé-
pofènt continuellement ) , il s'enfuitque pen-
dant que la terre s'accroît fans ceffe , reali
diminueroit en même proportion, fila perte
n'en étoit pas rétablie par d'autres matières.
M. Newton foupçonne que cette partie , la
plus fubtile & la meilleure de notre air ,' la-
quelle eft abfolument néceffaire pour la vie
& l'entretien de tous les êtres , vient princi-
palement des comètes.
D'après ce principe , il y auroit quelque
fondement aux opinions populaires des pré-
fages des comètes , puifque \qs queues des
comètes (c mêlant ainfi avec notre atmofphe-
re , pourroient avoir des influences fenfibles
fur les corps animaux & végétaux.
Il y a beaucoup de variétés dans la gran-
deur des comètes. Quelques-unes , indépen-
damment de leur queue , paroilfent fiirpaf-
ièi" daiis certaines circonftances favorables
E e e e 2
V
588 C O M
cie leur apparition 5 les étoiles de la première
& de la féconde grandeur. Enfin , fi on coii-
iiilte les hiftoriens qui en ont parlé , il fëm-
ble qu'aucune comète n'ait jamais paru aufll
grande que celle qui fut obfervée du temps
de Néron : cette comète , félon Séneque ,
égaloit le foleil en groflcur. Hévélius en a
cependant obfervé une autre en 1651 pref-
qu'aufîi grande que la lune , mais elle étoit
bien inférieure en lumière à cette planète ,
étant extraordinairement pâle & comme en-
veloppée de fumées , qui , loin de lui lailîèr
quelque éclat , rendoient fon afpe6è allez
trille & peu agréable aux yeux.
M. Fatio remarque que quelques-unes des
comètes ayant leurs nœuds proche de l'or-
bite de la terre , il pourroit arriver que la
terre fe trouveroit dans la partie de fon or-
bite , qui feroit voifîne de ce nœud au temps
où la coOTf re viendroit àypaficr^ & comme
le mouvement apparent de la comète fèroit
alors fi prom.pt , que fa parallaxe feroit très-
fènfible, & que la proportion de cette paral-
laxe à celle du foleil leroit donnée, on pour-
roit avoir en ce cas la parallaxe du Ibleil
déterminée plusexad^ement que par aucune
méthode.
La comète de 1472. , par exemple , avoit
une parallaxe qui furpalfoit plus de vingt
fois celle du foleil j & celle de 1 5 1 3 en auroit
eu une beaucoup plus fènfible , fi elle fût
arrivée à fon nceud au commencement de
niars. Quoi qu'il en foit , aucune n'a plus
menacé la terre de fon voifinage que celle
de 1680^ car M. Halley a trouvé par le cal-
cul , que le 1 1 novembre cette comète avoit
paifé au nord de l'orbite de la terre à envi-
ron 60 derai-diametres de la terre , enforte
que H dans ce temps la terre avoit été dans
cette partie de fon orbite , la parallaxe de
la comète auroit égalé celle de la lune j & il
feroit peut-être réiiilté de ce voifinage un
conta£^ ou un choc des deux planètes : fui-
vant M. Whifton il en feroit rcfulté mi dé-
luge. Voye[ plus bas.
Mouvement des comètes. Le mouvement
propre de chaque comète ne iê fait pas , à
beaucoup près , dans le même fens , puifqu'il
eft varié à l'infini , les unes s'avançant d'oc-
cident en orient , lorfqu'au contraire les au-
tres fe trouvent emportées contre l'ordre des
iignes^ c'ej8:-à-dirc dans unfeûs oppofé à ce-
C O M
lui des planètes. Bien plus , depuis que l'em
obièr^'e le cours des comètes avec quelque at-
tention , on s'efi: apperçu qu'il le dirigeoit
tantôt vers le nord , & tantôt vers le midi ,
& cela avec des iiiclinaifons fi différentes ,
qu'il n'a pas été poffible de les renfermer dans
un zodiaque de la même manière que les pla-
nètes j car fi elles fe trouvent une fois dans ce
zodiaque , elles en fortent bientôt avec plus
on moins de vîtefie & par différens côtés..
Regiom.ontanus en a obfervé une qui paroif-
foit avoir une vîteffe bien extraordinaire ,
puisqu'elle parcourut en un jour 40 degrés.
Enfin j il y a des comètes dont le mouvement
efc plus rapide au commencement qu'à la fin
de leur cours \ d'autres au contraire fe meu-
vent très-rapidement au milieu , & très-len -
temeut , foit au commencement , foit à la
fin de leur apparition. Toutes ces variétés,
dans le mouvement des comètes , fiir-tout la
diverfité de l'iuclinaifon de leurs orbites , 6c
la direûion fi variée de leurs mouvemens ,
prouvent bien qu'elles ne font point empor-
tées par un fluide en tourbillon , qui devroit
les diriger toutes dans le m,ênie fens , & à
peu-près dans le même plan ^ aulTi eft-ce une
des objei^ions des plus fortes contre le fyf-
tême des Cartéfiens , & à laquelle ils n'ont
jamais répondu.
Si on fùppofe avec quelques auteurs que
les comètes parcourent des lignes exactement
paraboliques , elles doivent venir d'une dif-
tance infiniment éloignée , en s'apprcchant
continuellement du foleil par la force centri-
pète , & acquérir par ce moyen affez de vî-
tefie pour remonter l'autre branche de la pa-
rabole en s'éloignant du foleil jufqu'à l'infi-
ni , & de cette manière ne revenir jamais.
Mais la fréquence de leur apparition fembie
mettre hors de doute qu'elles fe meuvent
comme les planètes dans des orbites ellipti-
ques fort excentriques, & qu'elles reviennent
dans des périodes fixes quoique très-longues»
Voyei Orbite & Planète.
Les aftronomes font partagés £m leur re-
tour : Newton , Flamfteed , Halley & tous
les afironomes anglois font pour le retour de
ces aflres j Caffini & plufieurs autres aftro-
nomes de France l'ont regardé auffi comme
très -probable^ la Hire s'y oppofe avec quel-
ques aflronomes , &c. Ceux qui fon-t pour le
retQur veulent que les comctcs décrivent des
C O M
orbes fort excentriques : félon eux ce n'eft
que dans une très -petite partie de leur révo-
lution que nous les pouvons appercevoir j
au delà de cette partie on ne fauroit plus les
découvrir , ni à la vue fimple , ni avec les
meilleurs télefcopes. La queftion du retour
des comètes cft du nombre de celles que no-
tre poftérité feule pourra réfoudre. Cepen-
dant l'opinion de Newton eft la plus vrai-
ièmblable. En voici les preuves.
On ne fauroit regarder comme deux diffé-
rentes planètes , celles dont les orbites cou-
pent leeliptique fous le même angle, & dont
la vîtefîé eft la même dans le périhélie ^ il faut
donc aufll que deux comètes vues dans diffé-
rens temps , mais qui s'accordent à l'égard
de ces trois circonftances , ne puillént être
autre chofe que la même comète ; c'eit ce
qu'on a obfervé , fuivant quelques auteurs ,
pour différentes comètes , comme on le verra
dans la fuite de cet article ^ cependant il n'eft
pas néceffaire que l'accord foit ft exad pour
conclure que deux comètes font la même. La
lune qui eft fi irréguliere dans toutes ces cir-
conftances , fait penfer à M. CaiTini qu'il en
pourroitêtre de même dss comètes , & qu'on
en a pris pour de différentes plulieurs qui
li'éroient que les mêmes.
La grande objedlion qu'on fait contre le
retour des comètes , c'eft la rareté de leurs
apparitions par rapport au nsmbre de révo-
lutions qu'on leur fuppofe.
En 1702 on vit à Rome une comète , ou
plutôt la queue d'une comète, que M.Caftîni
prit pour la même que celle qui fut obfervée
par Ariftote , & qui avoit reparu depuis en
166'i , enibrte que fa révolution feroit de
34 ans ^ mais il paroît bien étrange qu'une
comète qui a une révolution II courte , & qui
revient par conféquent fî fouvent , fe«montre
cependant fi rarement.
Dans le mois d'avril de la même année
1702 , MM. Bianchini & Maraldi cbfer-
verentune comète , qu'ils regardèrent comme
la même que celle de 1664 , tant par rap-
port à fon mouvement qu'à fa vîteiTe & à fe
direction. M. de la Hire voulut que cette
comète eût quelque relation à une autre qu'il
avoit obfervée en 1698 , tk que M. Caflîni
rapporte à celle de i<552. Dans cette /fiip-
pofition la période de cette comète feroit de
43 mois j &le nombre des révolutions qu'elle
C O M 5S5
auroit euesdel'année 1652 à l'année 1698 ,
feroit de quatorze.
Mais on ne peut fuppofer que dans un
temps où le ciel eft obfervé fi foigneufement,
un aftre fît quatorze révolutions fans qu'on
s'en apperçût , & fur-tout un aftre dont les
apparitions feroieut de plus d'un mois , &
fouvent dégagées des crépufcules.
C'eft pour cette raifon que M. Caflîni eft
très-réfervé dans l'affertion du retour des
comètes ; il regarde ces aftres comme des
planètes , à la vérité , mais fujettes à beau-
coup d'irrégularités.
M. de la Hire fait une objeâ:ion géné-
rale contre le fyftême entier des comètes ,
qui ièmbleroit retrancher ces aftres du nom-
bre des planètes \ c'eft que par la diipofition
donnée néceffairement à leur cours , elles
devroient paroître auffi petites au com.men-
cement qu'à la fin , & augmenter jufqu'à ce
qu'elles arrivent à leur plus grande proxi-
mité de la terre ^ ou du moins que s il ne
leur arrive d'être obfervées que lorfqu'clles
font d'une certaine grandeur, faute d'y avoir
fait attention auparavant , il faudroit au
moins qu'on les apperçût fouvent avant qu'el-
les fuffent arrivées à leur plus grand éclat ;
cependant, ajoute-t-il, aucune n'a été ob-
fervée avant d'être arrivée à ce point.
Mais la comète que l'on a vue dans le
mois d'oâiobre 1723 , à une fi grande dif-
tance qu'elle étoit trop petite & trop obfcure
pour être apperçue fans télefcope , peut fer-
vir à réfuter cette objeftion & à rétablir les
comètes au rang des planètes.
Le dofteur Halley a donné une table des
élémens aftronomiques de toutes les comètes
qui ont été observées avec quelque foin , par
le fecours de laquelle on pourra toujours re-
connoître fi quelque comète qu'on viendra
à obferver nepourroit pas être quelqu'une
de celles qu'il a calculées , & favoir par con-
séquent & la période &: la pofition de l'axe
de fon orbite.
La comète obfervée en 1532 a plufieurs
circonftances qui la doivent faire croire la
même que celle qui a été obfervée en 1607,
par Kepler & par Longomoutan , &: que
celle que le doâ:eur Hailey a obfervée en-
fuite en 1682. Tous les élémens s'accordent y
& rien ne s'oppofe à cette opinion que l'iné-
I galité des temps des révolutions : mais fiiv;
55-3
C O M
vaut le cîodleur Halley on pourrolt expîiqi:er'
par des caiifes phyfiqaes cette inégalité 3 &
l'on en a un exemple clans Saturne , dont le
mouvement eft tellement troublé par les au-
tres planètes , & principalement par Jupiter ,
que fa période varie de plufieurs jours. Pour-
quoi donc ne fuppoferoit-on pas de pareil-
les altérations dans les comètes , qui font beau-
coup plus éloignées que Saturne , & dont la
Vi telle , avec la plus petite augmicntation ,
pourroit donner au lieu d'un orbe ellipti-
que un orbe parabolique ?
Ce qui confirme le plus cette identité ,
c'eft l'apparition d'une autre co;;:^/^ dans l'été
de 1456 , qui à la vérité n'a pas été obfervée
a\"ec préciiîcn , mais fe rencontre tellement
avec les trois autres par rapport à la période
& aux circonftances de fa route , que Hal-
ley ne fait point de difficulté de les regar-
der toutes comme la même comète , & il
s'eft avancé jufqu'à prédire le retour de cette
co//'2£'i'e pour Tannée 1758.
La période de cette comète , félon M.
Halley , eft de 75 ans 1 , & il en a déjà
eompté quatre révolutions , fa période fe fai-
fanî en beaucoup moins de temps que celle
des comètes. M. Machin croit que celle de
1737 a une période d'environ 180 ans ,
parce qu'elle lui paroît la même que celle
qui a paru en 1556. Voye^ les Tranfaâions
philofophiqiies ^ rP.â^G. M. Halley a remar-
qué de plus qu'il avoit paru quatre fois
de fuite une comète dans l'intervalle de 575
ans ^ favoir au mois de Icptembre , im.mé-
diatement après la mort de Juîes-Céfar ,
enfuite l'an de Jefus-Chift 531 fous le con-
fulat de Lampadius & d'Oreftes , puis au
mois de février 1106, & en dernier lieu
fur la fin de l'année 1680 j ce favant af-
tronome conje£iure de- là que la période
de la fameufe comète de 1680 pourroit bien
^tre de 575 ans \ c'eft ce que nos defcen-
dans pourront vérifier. Il y a une chofe
finguliere fur cette période , c'eft qu'en re-
montant de 575 ans en 575 depuis l'année
de la mort de Jules-Céfar , où on croit
que cette comète a paru , on tombe dans
l'année du déluge ^ c'eft ce qui a fait pen-
fer à Whifton que le déluge univerfel pour-
roit bien avoir été occafioné par la rencon-
tre ou l'approche de la comète , qui fe trouva
apparemment alors fort près de la terre j
C O M
& cette opinion qui au fond ne doit être
regardée que comme une conjecture aflèz
légère , n'a rien en foi de contraire ni à
la faine philofophie qui nous apprend ( quel-
que fyftême que l'on fuive ) que l'appro-
che d'une telle comète cft capable de bou-
leverfer le globe que nous habitons : ni à
la foi 5 qui nous apprend que Dieu fe fer-
vit du déluge pour punir les crimes des
hommes. Car Dieu qui avoit prévu de toute
éternité cette punition , avoit pu diipofer
le mouvement de "cette comète de manière
que par fon approche elle fervît à fa ven-
geance. Whifton croit cependant que cette
queue de comète auroit fait courir à l'arche
un grand péril ^ mais Dieu qui avoit fait
conftruire l'arche veilloit à fa confervation.
Voyei^ le fjjlême folaire de Whifton où les
orbites des différentes comètes font tracées ,
& où l'on trouve les périodes de plufieurs
qui font connues.
Déterminer le lieu 6* le cours dtune comète»
Obfervez la diftance d'une comète à deux
étoiles fixes dont \q.s longitudes &: \&z lati-
tudes font connues. Par le moyen de ces
diftances ainfi trouvées , calculez le lieu de
la comète par la trigonométrie , en fuivant
la nîéthode enfeignée à Vanicle Planete^
Répétant enfiiite ces obfèrvations & ces
opérations pendant pluiîeurs jours confécu-
tifs , le cours de la comète fera déterminé.
Déterminer le cours d'une Comète mécha-
niquement 6» fans les injirumens ordinaires,
L'ingénieufe méthode que nous allons
expliquer , eft due à Longcmontan : elle
confîfte à obfcrver , par le fecours d'un fil
la comète dans l'interfediion des deux lignes
qui pallént par deux étoiles : ce qui eft
fort facile dans la pratique. Suppofons,par
exemple , que le lieu de la comète foit en
A X P. aftron. fig. 2^.^, entre les quatre
étoiles B j C , D , E , dans l'interfeâiioii
de la ligne qui pafteroit par B & par D ,
& de celle qui pafîeroit par C & par E,
Ayant pris un globe où ces quatre étoi-
les foient marquées, on tendra un fil qui
paflé par B & par D , & un autre par D
& par E : le point d'interfeftion fera le
lieu de la comète. Répétant cette opération
pendant phifieurs jours, on aura fur le globe
le cours de la comète , qui fè trouvera
un grand cercle , par deux points duquel
CO M
on trouvera aîfément rincliiialfon à 1 eclip-
tique , & ie lien des nœuds , en obicrvant
limplement le lieu où un fil tendu fur ces deux
points coupe 1 ecliptique. Pour déterminer la
parallaxe d'une comcte^ voye^ PAR.ALLAXE.
Voilà à-peu-près tout ce que nous pou-
vons dire fur les ccmetes , dans un ouvrage
de la nature de celui-ci. Tout ce que nous
avons dit fur la nature des orbites que ces
corps décrivent , & fur leurs mouvemcns ,
peut être regardé comme vrai géométrique-
ment. Il n'en eft pas de même de leurs
queues , & de la nature des particules qui
les compofent : nous n'avons fait qu'expo-
fer fur cela les conjeftures les plus proba-
bles. Les obfervations nous apprendront
dans la fuite ce qu'on doit penièr de leur
retour. Ce qu'on peut au moins aiTurer ,
c'eft qu'il réiiilte des obfervations que les
comètes décrivent des orbites à-peu-près pa-
raboliques , c'efl-à-dire qui peuvent être
traitées comme paraboliques dans la par-
tie de l'orbite de la comète que nous pou-
vons appercevoir. Si ces orbites font des
ellipfes , le retour de la comète eft certain f,
fi ce font des paraboles ou des hyperboles ,
le retour eft impoflible. Le célèbre M.
Newton nous a donné la méthode de cal-
culer leurs mouvemens ^ 8c ce problême ,
Win des plus difficiles de l'aftronomie , eft
expliqué fort au long à la fin du troifieme
livre de ks principes. M. le Monnier , de
l'académie royale des fciences , nous a
auiîî donné, en 1743 , un ouvrage intitulé
la théorie des comètes ^ in-%^: Cet ouvrage
peut être conçu com.me divifé en cinq par-
ties. Dans la première , qui a pour titre
difcours fur la théorie des comètes^ M. le
Monnier expofc les principaux phénomènes
du mouvement des comètes , & les plus in>
portans préceptes de l'aftronomie qui leur
eft propre. Il donne enfuite un précis de
la doftrine de M. Newton fur les comètes-^
& il termiine ce difcours par le calcul de
l'orbite de la comète de 1742 , d'après la
méthode de M. Newton , à laquelle il a
fait quelques changemens.
La ^zovAq partie contient l'abrégé de
Faftronomie cométique , ou la cométogra-
phie de M. Halley , qui eft imprimée en
latin à la fin de l'allronomie de Grégori ,
§c dpiit M, le Moiuiier nous douue. la
G O M ^^ p
tradudion a\'ec les notes de M. Whiftoii
hiférées dans le texte , & accompagnées
chs remarques & des explications'du tra-
dudeur.
La troifieme partie eft un fupplém.cnt
qui contient une hiftoire abrégée de ce
qu'on a fait depuis le commencement de
ce fiecle , pour perfedionner la théorie des
comètes.
Les deux autres parties contiennent ^es
recherches iîir les pofitions de différentes
étoiles , & fur les tables du foleil , qui
n'ont qu'un rapport indired au fond de
l'ouvrage, mais qui n'en font pas moins,
utiles ni moins importantes. Cet ouvrage
eft encore orné du planifphere de Whiftoii
où font repréièntées les trajeâ:oires ou or-
bites de toutes les comètes les mieux con-
nues , & les deux planifpheres céleftes de-
Flamfteed , réduits en petit avec beaucoup-
d'art & de propreté. Ainfi on peut afiurer
qu'il eft peu de livres qui dans un fi petit
volume , contiennent tant de choies eu-
rieufes & utiles fur la fcience qui en fait,
l'objet. Auflî l'académie a-t-elle jugé ,.
comme on le voit par l'extrait de fes re-
giftres , imprimé au commencement de ce-
livre , qu'un ouvrage fi utile à l'avancement
de l'aftronomie & au progrès de la vraie-
phyfique célefte , ne pouvoit que faire hon-
neur à fon auteur , & étoit très - digne de .
i'imprefllon.
Ceux qui voudront fe contenter d'une ■
expofition plus générale & plus fimple de
la théorie des comètes , pourront avoir re-
cours au petit ouvrage de M. de Mauper-
tuis , intitulé lettre fur la comète qui parut
en 1742 ,. à l'occafion de la comète de cette
année. L'auteur y explique avec beaucoup-
d'élégance & de clarté , le fyftême de M;.
Newton fur \qs comètes <, ^ y met ce lyf-"-
tême à la portée du commun des leâreurs,.
M. Euler, géomètre £ célèbre aujour-
d'hui dans toute l'Europe , aauftî fait im-
primer à Berlin , en 1744, un ouvrage in-
tixulé theoria plane/arum & cometarum , dans-
lequel il donne une méthode nouvelle &
différente de celle de M. Newton, poun-
déterminer le mouvement des comètes^
Il a paru ^depuis le commencement de
ce fiecle un affez grand nombre de come-^
jes ^ks principales Qnt clé celle, de rji-J.^;
55)1 C O M
do-At M. Bradloy a donné le calcul dans
les Tranfaclions pkilofophiques de la fbcicté
royale de Londres^ celle de 172.9, celle de
1737 , & celle de 1744. La première a
éré calcules par M. Deliile, la féconde pir
M. Bradley , la troideme par M. le Mon-
iiier , &: plufrjurs autres altronomes. Celic
de 1723 a été rétrograde , les autres ont été
directes ^ celle de 1744 cft la plus brillante
& la plus remarquable qu'on ait vue depuii;
1060.
Fininbds cG long- article par une obfer-
varion bien propre à humilier les philofo
phcs. En 1596, dans un temps où l'on
étoit fort ignorant fiir les comètes , parut un
traité des cotr.cres du fîeur Jean-Bernard
Lo!it^ae, pliilofophe & médecin, où font
réiiités hs abus & témérités des vains afîro-
log-ues qui prédilent ordinairement mal-
heurs à l'apparition d'icellcs , traduit par
Charles Ne[)vcu chirurgien du roi ^ cepen-
dant en 1680,' les philofbphes étoient en-
core tellement dans l'erreur fur ce ftîjet ,
que le fameux Jacques Bernoulli dit dans
fbn ouvrage far les comètes , que lî le corps
de la comète n'eft pas un fîgne vifible de
la colère du ciel, la queue en pourroit bien
être un. Dans ce même traité , il prédit le
retour de la comète de 1680 pour le 17
mai 1710 , dans le figue de la balance. Au-
cun agronome . dit M. de Voltaire , ne {c
coucha cette nuit j mais la comète ne pa-
rut point. ( O )
ce Si cet article lailfoit encore quelque
chofe à délirer, on peut voir dans ce qui fuit ,00
que M. de la Lande a écrit fur cette matière. »
Le retour de la comète de 1682 , obfervée
en 1759 , a donné le dernier degré de certi-
tude & d'évidence à la théorie que Fon vient
d'expliquer:/a période s'eft trouvée à la vérité
plus longue que la précédente d'environ 600
jours j mais il eft prouvé que \es attractions
ièules de Jupiter & de Saturne pouvoient pro-
duire une aulTi grande diiîerence. Je propofai
en 1757 à iVl. Clairauî de lui calculer une
table des diftances de la comète à Jupiter & à
Saturne depuis I53iju{qu"'à 1759 avec les
angles de commutation & les forces attrad:i-
ves de ces deux planètes fur la comète , afin
qu'il y appliquât fa théorie du problême des
trois corps, & que nous puffions voir fi cette
atîradion devoit accélérer ou retarder le
C O M
retour de hicomcte qu'on attendoJt pour 1757
ou 1759. Ce travail immenfè eut tout le ii;c-
cèsquc nous enefpérioas, comme je l'ai ex-
pliqué fort au long dans Xhifloive & dans les
mémoires de l'académie pour 1769. M. Clai-
rauî trouva que la révolution de la comète
devoit être de 6r r jours plus grande que celle
de 1607 à 1682, dont 100 jours pourl'aétion
de Saturne , & 511 pour l'elfet de Jupiter.
Suivant ces premiers calculs, elle devoit palfer
dans fbn périhélie au milieu d'avril. [Voye-^^
tna Théorie des comètes , à la fuite des Telles
de Halky , 17 59 , page 1 10. ) Elle y paiia le
13 mars : & malgré rimmenfilé des calculs
que nous fîmes, M. Cîairauttk moi, les quan-
tités négligées produifircnt un mois d'erreur
dans la prédidtion ^ mais M. Clairaut l'avoit
prévu , ôc il a fait voir enfuite que l'erreur le
réduifoit à 22 jours , &: qu'il y auroit des
moyens de pouflèr l'approximation allez loin,
pour rendre l'erreur encore moindre , à moins
que d'autres attradionsnefè joignent à celles
de Jupiter & de Saturne. Les recherches de
M. Clairaut fur cette matière , fe trouvent en
abrégé dans une pièce qui a remiporté le prix
de l'académie à Pétersbc» irgen 1762 , & plus
en détail dans fa Théorie du mouvement des
comètes \, C/>z-8°, 1760, 1^1 pag. A Paris,
chez Lam.bert. ) On trouvera aufli de très-
belles recherches de M. d'Alembert , fur le
même liijeî , dans le iècond volume de fes
Opufcules mathématiques ^pag. 97 &fuivantes
& dans la pièce de M. Albert Euler, qui a
remporté en 1762 le prix propofé par l'aca-
démie de Pétersbourg , concurremment avec
M. Clairaut.
Il y a encore deux comètes dont la période pa-
raît connue , & dont o'i efpere le retour -^ celle
de 153 1 & 1661 qu'on attend pour 1789 ou
1790^ celle de 1264 &de 15 56 qu'on attend
pour 1 848. Au fujeî de cette dernière , on peut
voir les Mém. detacad. 1760 , pag. 192. La
grande comète de 1680, fuivant M. Halley ,
devroitreparoître en 2254. Il croit quec'eft
celle qui parut du temps de Céfar ; dans ce
cas-là ce feroit aufii celle dont parle Hom.ere
( lliad.lV ^ 75. ) & cWq. auroit paru 619 ans
avant J. C. Si cette comète de 1680 achevé
lèpt révolutions en 4028 ans , elle a dû palfer
près de nous 2349 ans avant J. C. , & peut
ferviràceux qui veulent expliquer phyfique-
mcnt le déluge, comme M. Whifton , {t^ew
theory
COM
theory ofthe tarth , page i8(5. ) Mais il y a 1
des doutes fur celle-ci. Voye^ à ce fujet ma
Théorie des comptes , page 92. Quoi qu'il en
foit de cette dernière , il eft évident par le
retour de la comète de 1682 , que les comètes
font périodiques , que leurs orbites font
elliptiques , de même quecelles des planètes.
Àinli les comètes ^eiivQnt fe calculer par les
mêmes règles que les planètes, en cherchant
leurs anomalies , leurs excentricités , leurs
rayons vefteurs , & leurs longitudes géocen-
triques. Mais comme \qs ellipfes des comètes
font très-alongées, & que nous n'en voyons
que la partie inférieure qui approche de beau-
coup d'un iègment de parabole , tous les artro-
nonies fe fervent de la parabole , dont le
calcul eft beaucoup plus (impie , & qui donne
à-peii-près les mômes réfultats. Nous allons
expliquer les principales règles du mouve-
ment parabolique des comètes , eu ren-
voyant feulement pour les démonftrations à
notre Aflronomie , liv. XIX.
Suppofbns une comète qui tourne dans une
jîarabolc , dont le foyer ou le centre d'attrac-
tion foit au centre S du foleil , {Suppl, des
planches ajiron.fig. 8. ) & que cette parabole
P D ait une diftance périhélie S P^ égale à
la diftance moyenne du foleil à la terre , ou
au rayon du cercle PA , que la terre eft fup-
pofée décrire quand on néglige l'excentricité
de fon orbite. La vîteife de la comète en P
eft à celle de la terre dans fon cercle , à pa-
reille diftance , comme la racine de deux eft
à l'unité , environ comme fept eft à cinq ^
tel eft le rapport des aires ou des furfaces dé-
crites qui ont lieu perpétuellement dans la
parabol* & dans le cercle.
Les aires étant proportionnelles au temps ,
liiivant la loi générale & univerfelle des
mouvemens planétaires , on a toujours pour
un temps donné l'aire parabolique PSD,
aufti~tôt qu'on fait le temps que la comète a
employé à aller du périhélie P au point D
de fa parabole.
Connoiflant le temps qui répond à 90^^
d'anomalie vraie, ou à l'angle droit P S R,
on trouve le temps qui répond à une autre
anomalie quelconque , ou à un autre angle
P S Dj car nommant t la tangente de la
moitié de l'anomalie vraie , il fuffit de mul-
tiplier le quart de r^ -|- 3 ^ par le temps qui
répond à 90 , pour avoir le temps qui répond
à l'angle propofé. Par ce moyen qui eft fort
Tome FUI,
COM ^9i
fimple , on conftruit des tables , où pour cha- '
que jour on marque l'anomalie vraie corref-
pondante , & l'on diviiè en jours de grandes
figures , où l'on marque la fituation d'une
comète fur fon orbite , comme on le voit fur
la parabole PUD, pour 10 jours, 20, 30,
&c, de diftance au périhélie.
Par conféquent on trouve le palTage d'une
comète à fon périhélie , lorfqu'on connoît le
jour où elle étoit en un point D de fa para-
bole, & l'angle PSD, d'anomalie vraie ;
ainfi dès qu'on connoît l'anomalie d'une co-
mète pour un jour donné , il eft aifé d'en con-
clure quel jour elle a paffé par fon périhélie ,
& nous en ferons bientôt ufage dans la dé-
termination de ces orbites.
Le rayon veôeur <S D de la comète, ou fâ
diftance au foleil ,eft égale à la diftance péri-
hélie S P , divifée par le carré du cofînus ,
de la moitié de l'anomalie vraie , ou de l'angle
PSD, par une autre propriété de la para-
bole. Ainfi , quand pour un temps donné
l'on a trouvé l'anomalie vraie d'une comète
dans fon orbite , on a le rayon veâeur S D ,
en divifant la diftance périhélie S P , par le
carré du cofinus , de la moitié de cette ano-
malie , & fi l'on a un rayon vecteur S D avec
l'anomalie correfpondante PSD, on peut
également trouver la diftance périhélie S P
de cette même comète.
Enfin il y a une dernière propriété de la
parabole , qui eft d'un grand ufage dans la
détermination des orbites descometes. Quand
on connoît deux rayons vecteurs d'une para-
bole , avec l'angle compris , on peut trouver
la diftance périhélie , & les deux anomalies
qui répondent aux rayons veâeurs. En fai-
fant cette proportion , la fomme des racines
des rayons vecteurs eft à leur différence ,
comme la cotangente de la demi-fomme
des demi-anomalies vraies eft à la tangente
de leur demi-différence. Quand on a la
fbmme & la différence , il eft aifé d'avoir
chacune des anomalies vraies , & de trotiver,
par le temps qui leur répond , le moment du
paffage par le périhélie , en même temps que
le lieu clu périhélie de la comète. Au moyen
d^ théorèmes précédens , on peut trouver
une parabole qui fatisfaffe à deux longitudes
d'une comète obfcrvée de la terre , & c'eft en
quoi confifte le problême important de la
détermination des orbites des comètes , quC
j'ai expliquées fort au long dans mon Aftro- '
Ffff
^94 C O M
nome. Supposons que la terre fort en 2' à i
une di tance T S da foleil . & qu'elle voie le
lieu àz la comète réduit à l'écliptique fur un
rayon T D , enforte que l'angle ST D foit
l'angle d'élongation , ou la différence entre
la longitude du foleil , &: celle de la comète.
On ne connoît dans le triangle T S D qu'ua^
côté & un angle ; on eft obligé de faire une
fuppoiîtion ou une hypothefe iiir la valeur
du côté S D , diilance accourcie de la comète
au foleil ^ d'après cette iiippofitioi-î arbitraire ,
fi l'on veut , mais qui fera vérifiée ou réfor-
mée par la fuite du calcul , on cherche l'angle
au foleil, fous la commutation T S D, eu
réfolvaut le triangle 2' S D, &l l'on a la lon-
gitude héliocentrique de la comète ; on en
conchit fa latitude héliocentrique , f i dillancc
vraie , OM le rayon veéreur. On fait la même
çliofc pour um féconde obfervation , & l'on
a deux longitudes héliocentriqucs comptées
fur l'orbite de la comète , & par confequent
l'angle des deux rayons veâreurs , qui efi né-
ceiliiirem.ent la fomnie ou la différence de
deux anomalies vraies f, on en conclura cha-
cune des deux anoixiaiies par la règle précé-
dente, & par confequent le lieu du périhélie
P, la diftance périhélie S F, ^le temps qui
répond à cqs deux anomalies dans Thypo-
thefe qu'on a faite fur la dillance 5" Z> de la
comète au foleil. Si l'intervalle de temps trouvé
par le moyen de ces deux anomidies n'cil
pas d'accord avec Fintervalie donné des deux
qbfervations , c'cft une preuve qu'une des
deux diilancesau foleil , qui ont été fuppo-
féss , doit être changée : on en confervera
une , & l'on fera varier l'autre par diverfes
fuppoiitions , jufqu'à ce qu'a la fin du calcu!
on trouve un intervalle de tempségal à celui
des deux obfervationsj alors on aura une pa-
rabole qui fatisfait à tontes deux dans la pre-
mière hypothefe faite fur la diftance de la
comète au foleil.
Mais il ne fuffit pas d'avoir une parabole
qui fatisfalîë à l'intervalle de deux obfèrva-
tions , car il y en a une infinité", & à chaque
hypothefe qu'on aura faite fur la première
diftance SD de la comète au foleil , on trou-
vera par les diverfes fuppofitions de la fecont^
diftance , ou de la diftance au foleil , dans ra
féconde obfervation , une parabole qui fatis-
fçra aux deux mêmes obfervations. La diffi-
cplté qui refte eft de fe déterminer par une
troiiîeme obfervation , c'eft-à-dire ^ de faire
C O M
un choix tntte toutes ces paraboles qui repré-
ientcntles deux premières oblèrvations, mais:
dont une feule s'accorde avec la troiiieme.
Quand on a trois obfervations d'une co-
mète , on peut déterminer fon orbite avi
moyen des théorèmes préccdens, car Ton eft
en état de trouver quelle eft la parabole qui
fatisfait à trois obfervations , quand on en a
plufieurs qui fatisfont à deux de ces obferva-
tions. On choiiit d'abord deux longitudes &
deux latitudes géocentriques obicrvécs. On
cherche des paraboles qui puiflènt fetisfaire
à ces deu^K cbfervations : quand on a deux
ou trois paraboles ,c'eft- à-dire, deux ou trois
hypothefès qui s'accordent égalem.ent bien
avec les deux obfenations , on calcule dans
chacune de ces trois hypothefès le lieu de la
comète au temps de la troifieme obfor\'ation ,
en cherchant le lieu du périhélie , la diftance
aphélie , le rayon veâeur , la longitude hélio-
centrique & enfin la longitude géocentri-
que au temps de la troifieme obfervation ,
comme pour les planètes. Celle des différen-
tes hypothefès , qui s'accorde le mieux avec
la longitude de la troifieme obfervation, eft
la m.eilleure , &c une fimple proportion fuftiî ,
quelquefois pour trouver une autre hypothefe
qui fatisfalîë exaéteiricnt à toutes les trois
obfervations. Cette méthode indirefte & de
faulîè pofiticn, me paroît plus fimpîe & plus
commode que les méthodes plus directes &
plus élégantes , données par MM. Euler ^
Fontaine , &c. <Sv. J'en ai donné les détaib ,
!es préceptes , & les exemples dans le XIX
l'ivre de mon ^^honcmie^ je ne pcuvois don-
ner ici que i'eijîriî de la méthode.
C'eft par des eftais à-peu-près feiif^Iables ,
inais bien plus longs fans doute , que M.
Halley détermina par les anciennes obfer-
vations vingt- quatre paraboles ou orbites
cométaires , y compris celle de 1698. M.
Bradiey, M. Maraldi , M. de la Caille, M.
Struyck , M. Pingre , & moi , en avons
calcule plufieurs autres , enforte que le
nombre s'eft accru jufqu'à 61 , y compris
celle de 1772 ^ mais je ne compte que pour
une feule toutes les apparitions de celles
dont les périodes font connues.
Les élémens d'une comète font les fix arti-
cîesgui déterminent la lituation & la gran-
deur de forbite qu'elle décrit, & qui établif-
font fil théorie , c'eft-à-dire , le lieu du nœud
vu du foleil j rincliiiaifoii 5 le lieu du péri-
C O M
hélie, la diilance périh lie , & le temps moyen
du paflkge par le périh -1 ie qui tient lieu d'épo-
que 3 enfin la diredion de fon mouvement
qui peut être direéèe ou rétrograde : j'ai
donné une grande table de tous les élémens
pour les <5i comètes connues dans mon Agro-
nomie.
Ce calcul fondé fur l'hypothefe paraboli-
que donne affez exaé^ement la diftance péri-
hélie S F d'une comète au fbleil , & le tem.ps
où elle y a palTé. Quand on voit enfuite que
deux comètes ont eu la même diftance péri-
hélie & les mêmes élémens , on en conclut
que c'eftune feule & même comète; la diffé-
rence des deux palfages au périhélie donne
la durée de fa révolution. Ainli la comète de
1682 paffapar fon périhélie le 14 (èptembre,
& l'on en a vu en 1759 une qui , fuivant la
même orbite , a paffé par fon périhélie le 12
mars f, la différence eft de jô ans & demi ,
c'eft la durée de fa révolution.
Connoiffant la durée de fa révolution, on
trouve la diftance moyenne au foleil par la
loi de Kepler , que les carrés des temps
font comme les cubes des diftances j on con-
noît donc le grand axe de l'ellipic que la co-
mète a réellement parcourue , de même que
la diftance périhélie , & par conféquent l'ex-
centricité : on en conclut facilement fon ano-
inalie m.oyenne &eniiiite fon anomalie vraie
•& fon rayon ve£ieur , par les méthodes que
nous avons expl iquées pour les planètes j ainfi
Von calcule le lieu d'une comète de la même
manière.
Unefeule apparition d'une comète obfervée
pendant quelques mois , pourroit fufiTre à la
rigueur pour déterminer cette ellipfe toute
entière , & par conféquent pour connoître
la diftance^oyenne & la révolution , & pré-
dire le retour de la comète; mais la partie PD
que nous pouvons appercevoir de la terre ,
eft /î petite en comparaifon de la partie de
l'orbite qui échappe à notre vue, que les
erreurs inévitables de nos obfervations pro-
duiroient des erreurs énormes dans de fem-
blables prédirions.. Il eft inutile de lesentre-
prendre,ni de chercher le retour d'une comète ,
il ce n'eft quand on l'a déjà vue deux fois.
Quoique nous ne connoiflions encore (en
Ï773 j que foixante Scune comètes , il eft évi-
dent qu'il y en a un bien plus grand nombre
dans le fyftême folaire. Il n'y a pas un iiecle
cju'on obierve les comètes avec foin j or leur»
C O M ^9ç
j périodes font ccrtainem.ent plus longues :
voilà pourquoi il n'y en a qu'une feule qu'on
ait vue deux fois depuis un fîeclc. Depuis
quinze ans qu'on obierve les cowetes avec
encore plus d'attention , & qu'il y a plus
d'r.ftronomes attentifs , on en a vu jufijn'à
quinze , iJ peut donc fe faire qu'il y en ait
plus de trois cents.
Whifton , M. de Buffon , M.'de Mauper-
tuis , (S'c. avoient déjà remarqué que les co-
mètes pourroient fe rencontrer , ou rencon-
trer la terre, & y produire les plus étranges
révolutions ^ mais on n'avoit fait à cet égard
que des conjeftures vagues. J'ai voulu exa-
miner parmi les comètes déjà connues , s'il y
en avoit qui naturellement puffent rencon-
trer la terre , ou en approcher de manière à
nous mettre en danger; j'ai trouvé qu'il y en
avoit huit dont les orbites paffent très-près
de celle de la terre ^ & fi nous ne connoif-
fons que la cinquième partie des comètes , il
peut y en avoir plus de quarante dans ce cas-
là. Les dérangemens que les attrapions étran-
gères produifent fiir le mouvement des co/;??-
tes^ fuffifent pour rapprocher leurs nœuds de
la route de la terre , & par conféquent pour
faire concourir les circonférences de leurs
orbites avec la pôtre ; dans ce cas-là , chacune
de ces comètes pourroit venir choquer la terre,
ou du moins en paffer fi près que la mer en
feroit foulevée , com>me elle l'eft tous les jours
par le foleil & par la lune,& qu'une partie delà
terre pourroit en être fubmergéc : c'eft l'objet
d'un mémoire que j'ai publié cette année , &
qui a pour titre : Réflexions furies comètes qui
peuvent approcher de la terre ^ à Paris , chez
Gibcrt. Ces calculs qui avoient été annoncés
dans quelques converfations , occafionerent
dans Paris la terreur & ks bruits les plus
étranges ^ on prétendoit que j'avois prédit la
fin du monde , & il a fallu que mon mémoire
fût publié pour diffper les bruits populaires.
J'ai fait voir dans cet écrit que , quoique ces
rencontres de planètes foicnt très-poffibles ,
elles fiippofont tant de circonftances réirnies ,
qu'on ne fauroit en faire un objet de terreur.
J'ai d'ailleurs obièrvé que la terre parcou-
rant fix cents mille lieues par jour dans feu
orbite , elle ne pouvoit être au plus qu'une
heure de temps expofée à l'attraciiion d'une
comète , & qu'il étoit difficile qu'en fi peu de
remips les eaux puffent s'élever à une bien
gramle hauteur. Cependant , il me paraît
Ffffi
^c^6 C O M
que (î Ton cherche une caufc phyfîque & na-
turelle des révolutions anciennes de notre
globe , dont on trouve des traces dans le fein
de la terre comme au fommet des monta-
gnes , on la peut trouver dans les approches
de quelques-unes de ces comètes.
On a vu précédemment , que ces corps
font des planètes qui tendent à décrire au-
tour du folsil des ellipfes fort alongées , qu'on
peut même regarder la partie de leurs orbites
où nous les pouvons obferver , comme une
partie de parabole , & déterminer dans cette
hypothcfe le lieu de fon périhélie , fadiftance
du foleii à ce lieu & la pofîtion de l'orbite.
Le temps d'une révolution périodique eft le
feul élé'ment qu'on ne puifTe déduire d'une
feule apparition , parce que rellipfe décrite
par la com^/f, ne diffère d'une parabole , dans
toute la partie oii l'on peut l'obferver , que
d'une quantité qui échappe aux obfervateursi,
ainfi , tout ce qu'on peut déterminer dans ce
cas, c'eft un temps en-deçà duquel il eft im-
pçffible que la comète reparoiffe.
Ainfi , le premier problême qu'on fe doive
propofer , c'eft de déterminer par les obfer-
vations l'orbite d'une comète , fuppofce para-
bolique ^ & le fécond eft de s'alfurer ii une
foule apparition ne peut point faire détermi-
ner l'orbite elliptique |, ou du moins forvir à
en déterminer les limites.
Comme la parabole , dont le foyer eft au
foleii 5 n'a que quatre élémens -4 déterminer,
favoir , fon ^paramètre , l'angle qiie fait avec
l'écliptique le plan delà parabole ^l'interfec-
tion de ce plan avec une ligne prife fur l'éclip-
tique, & l'angle que fait l'axe de la parabole
avec cette interfèâ:ion ou toute autre ligne
donnée de pofition ;, fi on rapporte l'équation
d'une parabole quelconque fur un plan quel-
conque à l'écliptique & à une ligne donnée
for î ecliptique , il fuffira de fubftituer dans
cette équation trois valeurs obforvées des
coordonnées , ce qui donne trois équations
pour déterminer les quatre inconnues ^ en-
foite fe fervant de l'équation qui fournit la
proportionnalité des aires & des temps , on
aura , en fubftltuant les valeurs obfervées ,
quatre équations pour déterminer les quatre
inconnues.
Si on cherchoit ainfi à réfoudre direéle-
rnent le problême , on trouveroit bientôt que
les quatre inconnues dépendent d'équations
trop élevées pour que cette méthode puiffe
C O M
être employée f, aufli les géomètres fe font-ils
occupés d'en chercher de plus commodes.
r-Iewton a propofé de regarder d'abord l'or-
bite comme rediligne , ce qui eft aflez exa£l:
lorfque les obfervations fontvoifînes ^ Cafilni
même , guidé par l'obfervation feule , avoit
cru trouver que les comètes fe mouvoient en
ligne droite ^ on fe fort enfuite de cette pre-
mière approximation pour trouver les autres.
Halley aperfeâiionné la méthode de fon maî-
tre j le père Bofcovitz a publié deux difl'erta-
tions, dont l'objet eft de rendre cette mé-
thode plus ufuelle &. plus fûre. M. Fontaine
&:M. Eulerontauffi travaillé forcettematie-
re , & M. Laixell , digne élevé de cet homme
illuftre , vient , d'après fes idées & fes vues ,
de donner un ouvrage particulier &: très-'
étendu fur ce fujet.
Il feroit étranger au but de cet ouvrage
d'entrer ici dans des difcufîîons for le mérite
de ces différentes méthodes^ toutes font très-
ingénievffes , mais leur principal mérite doit
être leur utilité pratique , & il n'y a que le
tem^ps qui puiffe en décider f, je dis le temps ,
parce que les aftronomes , accoutumés à cer-
taines méthodes, fe déterminent difficilement
à en adopter d'autres;, en effet, il n'y a qu'une
longue habitude qui rende praticables des
opérations auffi longues & aufii compliquées
que celles qu'exige maintenant l'aftronomie.
Le focond problème a été examiné par plu-
fieurs géomètres italiens, & ils ont prétendu
avoir trouvé que lapparition qu'ils avoient
calculée, fuffifoit feule pour déterminer l'or-
bite elliptique : il eft aifé de voir qu'alors il
faut quatre obforvations.
Lorfque la même comète a paru deux fors ,
& qu'on connoît la diftance de temps qui
s'eft écoulé entre fes deux partages au péri-
hélie 5 on peut en déduire l'excenn-icité de fon
orbite elliptique & la calculer.
Il peut arriver que ces planètes foient dé-
rangées dans leurs cours par TattradHoii
d'une planète ou par celle d'une Siutre ccmete^
Halley , en calculant dans une cllipfe le
mouvement de la comète de 1682 , avoit
remarqué que le temps de fon retour pou-
voit être retardé par l'aârion de Jupiter &. par
celle de Saturne. Il calcula l'altération qui
pouvoit être produite par Jupiter, l'évalua à
un an environ , & annonça par conféquent
que la demi- période foroit à-peu-près de 76
^ ans environ 3 il laiffcit quelque latitude, foit
C O M
à ca-iife de Taftion de Saturne , à laquelle il
n'avoit point eu égard, foit à caufe de l'ine-
xaétitude de fon calcul pour celle de Jupiter ^
& cette inexaétitude qu'il attribua au peu de
foin avec lequel il a fait lès calculs , venoit en
grande partie de l'infuffifance de fa méthode.
M. Clairault , en étendant aux comètes la
méthode qu'il a donnée pour les équations
de l'orbite lunaire , l'a appliquée à cette
inêine comète de 1682 ^ il s'eft trouvé trente-
trois jours d'crrejir entre le retour au péri-
hélie , & le temps que fa théorie donnoit \,
cette erreur , quieft d'undix-huitieme, puif-
que la quantité qu'on cherche eftla différence
des deux périodes , vient en partie de la na-
ture du problême qui eft telle qu'on ne peut
calculer cette différence , qu'en calculant les
deux révolutions , enforte qu'une petite er-
reur répandue fur tout cet eipace , en pro-
duit une très-fenfible.
Les théories que M. d'Alembert & M.
Albert Euler ont auffi données des perturba-
tions de comètes , n'ont été appliquées en dé-
tail à aucune comète ; ainli on ne peut en ju-
ger encore que comme de méthodes ana-
lytiques , dignes du nom de ceux qui les
ont propofées.
Nous verrons à Yarticle PROBLEME des
trois corps , que pourvu que nous ayons
une quantité incomparablement plus petite
qu'une autre , tant que cette incomparabilité
aura lieu , le rapport de ces deux qualités
pourra être regardé commue très-petit , & fes
puiffauces négligées en comparaifbn du temps
ou de l'arc parcouru.
Pour appliquer cela aux comètes , nous dif-
tinguerons plufieufs cas dans leurs perturba-
tions j le premier où la force perturbatrice
fera incomparablement plus petite que la
forme principale ^ alors on emploiera la fup-
pofition de l'orbite à-peu- près elliptique par
toute la partie de fbn orbite où la comète eft
dans ce cas.
2^. Le cas où Ve&et de la force perturba-
trice d'iine planète fur une comète , eft beau-
coup plus grand que celui de la planette prin-
cipale ^ & ce cas , comme l'a obfervé M.
d'Alembert , eft celui d'un fatellite ^ on fup-
pofera donc que l'orbite de la comète , rap-
portée à la planète , eft à-peu-près elliptique.
Le troifieme cas eft celui qui échappe aux
deux autres ^ dans le dernier cas , fi la planète
©u la comète perturbatrice font d'une piaiTe
COM 557
incomparablement plus petite que le foleil ,
elles retomberont dans le premier cas, tant
que leur diftance ne fera pas incomparable
avec celle du foleil ç, donc lorfqu'elles ne fe-
ront plus dans ce cas , leurs diftances au fo-
leil pourront être regardées comme égales
à très-peu-près ^ & par conféquent la folu-
tion du problême des trois corps pourra en-
core s'appliquer à ce cas.
Il ne refte plus qu'à obferver que les arbi-
traires néceffaires à la folution du problême
des trois corps , devant varier ici par chaque
partie de l'orbite qui exige une méthode dif^
férenteç,& toutes ces parties ne pouvant pas
être obfèrvées, il en rcfiilte,que la détermi-
nation de ces arbitraires devient très-difficile
& très-incertaine ^ dans ce cas , il faut déter-
miner les arbitraires de la partie où ces ob-
fêrvations ne peuvent fè faire par les valeurs
approchées que donne la folution de la par-
tie précédente , & cette comparaifbn doit fè
faire dans la partie qu'on peut regarder
comme commiune aux deux foîutions. ( 0 )
Comète , ( Artificier. ) Les artificiers
appellent ainfî les fiifées volantes dont la
tête eft lumineufe aufli-bien que la queue ,
à l'imitation des comètes : quelques-uns les
appellent Jlaml^oyantes.V. FusÉE VOLANTE.
Comète ou de Manille , {Jeu de la )
jeu de cartes qui fe joue de la manière
fuivante : l'enjeu ordinaire eft de neuf fi-
ches , qui valent dix jetons chacmie , &
de dix jetons l'on peut , comme l'on voit ,
perdre au jeu deux ou trois m.ille j«tons
dans une féance. On fè fert de toutes les
cartes , c'eft-à-dire des cinquante- deux : &
l'on peut y jouer depuis deux perfonnes
jufqu'à cinq \ le jeu à deux n eft cependant
pas fi beau qu'à trois & au deffus. Il y a
de l'avantagera faife au jeu de la comète.
Les cartes battues , coupées à l'ordinaire ,
fe partagent aux joueurs trois à trois , ou
quatre à quatre , & de cette manière \ vingt-
fix à chacun , ii on joue deux perfonnes \
dix-fept , fi c'eft à trois , & il en refte
une qu'on ne peut pas voir -% à quatre ,
treize ^ & à cinq , dix , & il en reftêra encore
deux qu'on ne pourra point voir non phis.
Toutes les cartes étant données , on les
arrange félon l'ordre naturel en commen-
çant par Tas , qui dans ce jeu , ne vaut qu'un,
par le deux , le trois , ainfî du refte juf-
qu'au roi. On coïnmence à jouer par telle
yjî C O M
carte qu'on veut , mais il efl plus avanta-
geux cle jouer d'abord celle dont il y a le
plus de cartes de faite : ainfi en fuppofant
qu'il y ait depuis le fix des cartes qui fè
fuivent jnfqu'au roi , on les jettera toutes
l'une après l'autre , en difaiit fix , fept ,
huit, neuf, dix, valet, dame, & roi j
mais s'il manquoit une de ces cartes , on
nommeroit celle qui efè immédiatement
devant , & on diroit y2z/z5 tel/e cane , qui fe-
roit celle qui devroit fliivre celle qu'on dé-
clare ^ il c'étoit le huit , par exemple , qui
manquât dans ûi féquence , on diroit fept
fans huit , &c. le joueur fliivant qui auroit
\ù. carte dont l'autre manqueroit , continue-
roit en la jetant , & diroit comme le pre-
mier jufqu'à ce qu'il lui manquât quelque
nombre dans fa fuite ^ auquel cas un au-
tre qui auroit ce nombre , rccommenccroit
de la même manière \ s'il avoit poulfc juf-
qu'au roi , il continueroit de jouer p.ir telle
carte qu'il voudroit. La différence des cou-
leurs ne fait rien à ce jeu , pourvu que les
cartes que l'on a forment une fuite jufte.
Le joueur qui vient après celui qui dit huit
fans neuf ^ ou toute autre carte , reprend le
jeu s'il a le nombre manquant ^ fi ni lui ,
ni les autres ne l'ont , le premier qui a dit
huit fans neuf ^ continue à jouer le refte de
fou ]su par telle carte qu'il lui plaît , & fe
fait donner un jeton de chaque joueur. Il
faut , autant qu'on le peut , fe défaire de ^zs
cartes les plus hautes en point , parce que
l'on paie autant de jetons que l'on a de
points dans toutes les cartes quireftcnt dans
la main à la fin du coup. Ceux qui jouent
petit jeu , ne donnent qu'autant de jetons
qu'il leur refte de cartes. Il n'eft pas moins
avantageux de fe défaire des as , parce que
fi l'on attend trop tard à les jouer , on ne
fe remet dedans qu'avec peine , à moins
qu'on n'ait un roi pour rentrer. On doit don-
ner une fiche ou mohis , félon la convention
à celui qui joue la comète ; il n'eil plus reçu
à la demander dès qu'elle eft couverte de
quelque carte , Se elle efl perdue pour lui.
Celui qui gagne la partie fe fait donner une
fiche & neuf jetons , qui font la valeur
de la comète de celui qui l'ayant dans fbn
jeu , ne s'en efi: point défait dans le tour.
Celui qui jette fur la table des rois qu'il a dans
ihn jeu, gagne un jeton de chaque joueur
pour chacun de £qs rois ; au lieu qu'il paie
C O M
un jeton à chaque joueur , & dix au ga-
gnant , pour chacun des rois qui lui reftcnt :
fi l'on paie par point , c'eft celui qui a plu-
tôt joué {es cartes qui gagne la partie & les
fiches que chaque joueur a mifes au jeu , fans
parler des marques qu'il fë fait payer de
chacun , félon qu'il a plus ou moins de car-
tes ou de points dans fa main.
Il n'eft pas permis de voir les cartes qu'on
a déjà jouées , pour conduire fbn jeu & jouer
plus avantageufement pour foi , à peine de
donner un jeton à chaque joueur ; à moins
qu'on ne lait décidé autreiiîent avant de
commencer.
Voilà les principales &: premières règles
du Jeu de la comète ; elles ont beaucoup
changé , & vraifemblablem.ent elles change-
ront encore beaucoup , fi ce jeu continue
d'être à la mode. On paiera plus ou moins ,
quand on fera opéra : faire opéra , c'cil jouer
toutes fes cartes fans interruption j oi\ char-
gera de conditions l'em.ploi de la comète ; on
fera payer plus ou moins félon la carte pour
laquelle on la mettra : à préiènt on peut la
mettre pour toute carte : on fera perdre plus
ou moins à celui dans la main de qui on la
fera gorger , ou refter , c'eft la même chofe ,
&c. Nous ne nous piquons guère d'exadiitude
fur ces chofes , elles en valent peu la peine ',
d'ailleurs ce qui feroitcxadt dans le moment
où nous écrivons , ceflèroit bientôt de l'être
par le caprice des joueurs , qui ajoutent , ôtent
des conditions au jeu , ou les altèrent.
* COMETE , {terme de Blafon. ) Voyei
Meubles d'armoiries.
COMETE 5 adj. terme de Blafon : on dit
face cometée , pour dire qu'elle a un rayon
ondoyant , tel que celui delà comète caudée.
Les pals comètes différent des flaniboyans ^
en ce que les comètes font mouvans du chef,
& les flamboyans de la pointe en haut. {V)
* COMEUS , ( Myth. ) fiirnom d'Apol-
lon fous lequel il étoit adoré à Seîeucie , d'où
fa ftafue fut portée à Rome , & placée dans le
temple d'Apollon-Palatin. On dit que les fol-
dats qui prirent Seîeucie s'étant mis à chercher
dans le temple d'Apollon Comeus àzs tréfors
qu'ils y fuppofoient cachés , il fortit par une
ouverture qu'ils avoient faite , une vapeur
empoifonnée qui répandit la pefte depuis
cette ville jufques fur \q^ bords du Rhin \ c'efl-
à-dire , que ce pillage & cette pefte (fi elle efl
vraie ) arrivèrent en même temps , & que
C O M
le peuple toujours {uperftitieux & r aifonnant |
à fa manière ordinaire , regarda 1 un de ces
événemens comme la caufe de l'autre.
Apollon-Comeus , c'eft-à-dirc Apollon a
belU chevelure : l'idée poétique de donner à
Apollon une belle chevelure blonde , vient ,
félon toute apparence, de la manière éparfe
dont on vpit fes rayons lorfqu'ils tombent
obliquement fur une forêt épaiffe , & qu'ils
pallènt entre les feuilles des arbres comme
de longs filets lumineux & blonds. Les Nau-
cratiens célcbroient fa fête en habit blanc.
COMICES, f. m. plur. (H/y?. anc. ) c'eft
ainfi qu'on appelloit les aifemblées du peuple
romain , qui avoient pour objet les affaires
de l'état , comiîia. Elles étoicnt convoquées
& dirigées ou par un des deux confuls , ou
dans la vacance du confulat ,* par l'interrex ,
par un préteur , un didateur , un tribun du
peuple , un fouverain pontife , ce qui n'étoit
pas ordinaire , un décemvir , ou un édile.
Les comices Çk tenoientou pourlekclion
(d'un magiilratjOU pour quelque innovation
dans les loix, ou pour une réfolution de
guerre , l'addition d'un gouvernement , la
dépofition d'un général , le jugement d'im
citoyen. On s'afTcmbloit ou dans le champ
de Mars , ou dans le marché , ou au capi-
role. Les citoyens h^itans de Rome & les
étrangers y étoient in(liftin£l:ement admis :
il n'y avoit point de comices les jours de fétcs ,
les jours de foires , ni les jours malheureux.
On ne comptoit dans l'année que 184 jours
de comices. Ils étoicnt rem.is quand il tonnoit
ou faifoit mauvais temps ;, lorfque les augu-
res ne pouvoient ou commencer ou conti-
nuer leurs obfervations. La liberté des aifem-
blées romaines fut très- gênée fous Jules
Céfàr , mioins fous Augufle , plus ou moins
dans la fu ite ,{èlon le caradere des empereurs.
La diftinftion des comices fuivit la diflribu-
tion du peuple romain. Le peuple rom.ain étoit
divifé en centuries , en curies & en tribus : il
y eut donc , fur-tout dans les commencemens ,
les comices appelles comitia tributa , les cu-
riata , & les centuriata. Ils prirent auffi des
nom.s différeiis, fuivant les magiflratures
auxquelles il falloit pourvoir ^ & il y eut les
comices dits confularia , les prœtoria , les
œdiiuia , cenforia ^ pontificia ^proconfularia ,
proprceîoria , & tribunitia , fans compter
d'autres comices dont l'objet étant particu-
lier j le nom l'étoit auITi; tels ^ue ks (:aiata%
C O M 599
Comices dits cediliria , afï'emblées où l'on
élifoit les édiles curules & plébéiens j elles
étoient quelquefois convoquées par les tri-
buns , quelquefois par les édiles j le peuple
y éîoit diflribué par tribus.
Comices dits calata ; le peuple y étoit dif^
tribué par curies ou par centuries. C'étoit un
Iiâ:eur qui appelloit les curies :, c'étoit un cor-
nicen qui appelloit les centuries \ elles étoient
demandées par le collège des prêtres ; on y
élifoit dans les centuries un rex facrificulus ,
& dans les curies un flamine ; on n'appelloit
que dix-fept tribus : ce n'étoit donc pas pro-
prem.entdes affemblées qu'on pût appeller
comitia , mais conftlia ; on y faifoit X'zz a£les
appelles adrogations , ou adoptions de ceux
qui étoient leurs maîtres , fui juris ; on y paf
foit les teftamens appelles de ce nom , tejla-
menta calata ; on y agitoit de la cérémonie
appellée detefiatio facrorum , ou de l'accom-
pliffement des legs delHnés aux choies fa-
crées , félon quelques-uns, ou de la confë-
cration des édifices , félon d'autres.
Comùces dits cenforia , aifemblées où l'on
élifoit les cenfèurs : le peuple y étoit diflri-
bué par centuries ^ un des confols y préfî-
doit j le cenfeur élu entrcit en charge ini -
médiatement après l'élecèion , à m.oins qu'il
n'y eût quelque caufe de nullité.
Comices dits centuriata , affemblées où le
peuple étoit diftribué en 193 centuries :^ on
y décidoit les affaires à la pluralité des voix
des centuries j on en fait remonter l'infti-
tutioii jufques fous le roi Servius Jullius 5
on y élifoit , au temps de la république ,
\qs confuls , les préteurs , les cenfèurs , les
proconfiils , le rex facrorum 3 on y délibéroit
des loix , des traités de paix , des déclara-
tions de guerre , du jugement d'un citoyen
in crimine perduellionis. Les coniîils y pré fi-
doient ^ en leur abfence c'étoient \^s diéta-
teurs, les tribuns militaires qui avoient puif^
fance confulaire , les décemvirs appelles le-
gibus fcribendis , l'interrex ^ on les annonçoit
au peuple par des crieurs, eu par des afî^ehes
ou publications faites dans trois marchés con-
fécutifs^ on ne lestenoit point dans la ville ,
parce qu'une partie du peuple s'y trouvoiten
annes ^ c'étoit au champ de Mars j quand
les quefleurs ou tribuns du peuple préfî-
doient, il ne s'agifîbit que du jugement
d'un citoyen : cependant il falloit que le
çomiçç fût ^îv^ifé par le cozifentement d'im
^00 C O M
cônfiil. Lorfque l'objet de raiTemblée étoit
ou la publication d'une loi , ou le juge-
ment d'un citoyen , elle n'avoit point de jour
£xe j s'il s'agilloit de l'éleftion d'un magif-
trat , elle fe faifbit néceflairement avant que
le temps de la fonâion de cette magiftra-
ture fût expiré. Il n'y eut cependant de jour
fixe qu'en 600 \ on prit le premier janvier.
Il falloir toujours l'agrément du fcnat , &
il dépendoit de lui d'infirmer ou de con-
firmer la délibération du comice. Ces aftes
de defpotifme déplaifoient au peuple j &
Quintus Pubiius Philo parvint , pour les ré-
primer, à faire propofer au peuple les fujets
de délibération , & les fentimens du fénat ,
par le fénat même ;, ce qu'on appelloit au-
torcsfieii. Le peuple devint aufli juge des
délibérations du fénat , au lieu que le fénat
avoit été jufqu'alors juge des fiennes. Quand
le fénat vouloit Aqs comices , on les publioit
comme nous avons dit j le jour venu , on
confultoit les augures , on facrifioit^ & s'il
ne furvenoit aucun obftacle , le préfident
conduifoit le peuple au champ de Mars ;
là il propofoit le fujet de la délibération ,
& l'avis du fénat , & difoit au peuple : rogo
rosy quirites , velitis ^ jubeatis ^ &c. Aufli-
tôt chaque citoyen fe rangeoit dans fa claiTe
& dans fa centurie ;, on commènçoit à pren-
dre les voix par la première claife , & dans
cette clafle par les dix-huit centuries des
chevaliers j on paiToit enfuite aux quatre-
xîingt centuries reftantes. Quand le confen-
tement étoit unanime , l'alFaire étoit pref-
que terminée. Si les fentimens étoient par-
tagés, on prenoit les voix de la féconde
claffe j en cas de partage des voix , on pre-
noit celle de la troifiem.e ^ & ainfî de fuite
jufqu'à la quatre- vingt- dix-fept. En cas d'é-
galité de voix dans les cinq premières claf-
fes ou dans les 192 centuries qui les com-
pofoient , la fixieme claife décidoit. On al-
îoit rarement jufqu'à la quatrième ou cin-
quième clafle.
Sous la république, on mettoit tous les
noms des centuries dans un vaiifeau , &
l'on en tiroit au fort le rang de voter. La
première centurie tirée , s'appelloit centuria
prcerogativa. Les autres centuries adhéroient
ordinairement à fon avis , & cette centu-
rie à l'avis de celui qui votoit le premier.
Les candidats ne négligeoient donc pas de
«'affurer de cette première voix. Les cen-
C O M
turies qui donnoient leurs voix après la pre-
mière , félon que le fort en avoit ordonné ,
s'appelloient jure vocatce. Il importoit en-
core beaucoup de s'aifurer de la voix du pre-
mier de chaque jure vocata.
Ces comices par curies repréfenterent dans
la fuite les comices par tribus ^ au lieu qu'an-
ciennement on n'enfroit point en charge ,
fans avoir été élu par les comices appelles
trihutaria èc centuriata. Alors le peuple vq-
toit à haute voix \ comme cela n'étoit pas
^ài\s inconvénient , il fut arrêté en 61 1 , fur
les repréfentations du tribun Gabinius , que
les voix fe prendroient autrement. On em-
ploya des tablettes. S'il s'agiflbit des loix ,
il y avoit defliis la tablette les lettres V, R.
uîi rogas , ou la lettre A antiquo. Pour l'é-
leéiion d'un magiftrat , on mettoit fur la
tablette la première lettre de fon no m. On
diftribuoit de ces tablettes au peuple , par
\qs diribiteurs ^ puis lacenturiediteT^/'^roij^-
tiva , appellée par un crieur , approchoit 8c
entroit dans une enceinte \ on en recevoit
les tables fur le pont à mefure qu'elle paf-
foit \, on les jetoit dans des urnes gardées
par les cujîodes , pour empêcher la fraude :
quand \qs tablettes étoient toutes reçues ,
les cujîodes ou gardiens les tiroient des urnes,
& féparoient celles qui étoient pour & con-
tre 5 ce qui s appelloit dirimere fujfragia ; ils
marquoient les fuffrages par différence , par
le moyen de points j d'où l'on a fait omne tulit
punâum. On annonçoit au peuple le côté
pour lequel étoit la différence , & de combien
qWq étoit de points ^ & ainfi des autres
centuries : quand il y avoit égalité de voix
pour & contre , & que par conféquent la
différence étoit nulle , on n'annonçoit point
cette centurie , on la paffoit fans mot dire ,
excepté dans les affaires capitales, ou quand
il s'agiffoit d'emploi ^ alors on faifoit tirer au
fort les candidats. Pour le confulat, il falloit
avoir non feulement l'avantage des fuffrages
fur fes compétiteurs , mais réunir plus de la
moitié des fuffrages de chaque centurie.
Quand l'éledion étoit valable , celui qui
tenoit les comices difoit : quod mihi , //la-
gijiratuique meo , populo , plebique romance
bene atque féliciter eveniat^ L. Murcenamcon-
fulem renuntio. Cela fait , les cow/Vm fè fépa«
roient \ on accompagnoit l'élu jufques chez
lui avec des acclamations , & l'on rendoit les
mêmes honneurs à celui qui fortuit décharge.
CQmicis
C O M
Comices confalaires : le peuple y ^toit diftri-
hxxé par centuries ; ony elifokies confuls. Les
premiers fe tinrent en 245 par Sp. Lucretius ,
interrex pour lors, & on y nomma confuls
M. Jun. Brutus & Tarquinius Collatinus. On
créa fouvent un interrex pour préfider à ces
cornlcesy quand l'éledion des confuls ne fe
pouvoir taire au temps marqué. L'interrex fous
lequel l'éleflion des confuls fe commençoit,
n'en voyoit pas ordinairement la concluiion ,
fon règne n'étant que de cinq jours. On en
créoit un fécond. Ce fut dans la fuite â un
exconful à tenir les comices confulaires. Au
défaut d'exconful , on faifoit un didateur. Ils
fe tenoient à la fin du mois de juillet , ou au
commencement d'août. Lorfque les féances
étoient interrompues, l'éleélion duroit juf-
qu'au mois d'odobre. Cependaat les candi-
dats au confulat s'appelloientcc/z/u/j defignésy
confules defignati ; & la fondion des dida-
teurs ne fîniflbit qu'au premier janvier ; &
avant qu'on eut fixé le premier janvier , qu'au
commencement de mars. Alors les confuls
défignés entroient en exercice.
Comices dits cwiata y aflèmblées où le
peuple étoit diflriftlié dans fes trente curies ,
& où l'on terminoit les affaires félon le plus
grand nombre de voix des curies. On en fait
remonter l'origine jufques fous Romulus. On
dit qu'à la mort d'un roi , on en élifoit un
autre par curies : c'étoit alors un interrex qui
tenoit les comices ^ dans la fuite ce furent les
confuls, les préteurs, les didateurs, les in-
terrex, les fouverains pontifes, auxquels ce-
pendant les hifloriens n'attribuent pas ce
droit unanimement. On délibéra dans ces
comices des loix & des affaires capitales des
citoyens ; on y procéda à l'éledion des pre-
miers magiftrats , jufqu'à ce que Servius Tul-
lius inflitua les comices dits centuriata , & y
transféra les aifaires les plus importantes. Les
augures y étoient appelles, parce qu'ils ne fe
tenoient jamais fans les avoir confultés. On y
décidoit de ce qui concerne le commande-
ment des armées , les forces des arrflées , des
légions qu'on accordcroit aux confuls , du
gouvernement des provinces , & autres affai-
res relatives à la police & à la guerre. C'étoit
encore dans ces alfemblées que fe faifoient
les adoptions , les teftamens , l'éledion des
fiamines y &c. elles n'étoient compofées que
des habitans de Rome , parce qu'il n'y avoic
Tome VIIL
C q M ^01
qu*eux qui fufTent divifés en curies : le marche
romain en étoit le lieu. On y étoit convoqué
par des crieurs. Celui qui y préfidoit , propo-
foit l'affaire ; puis il ajoutoit : fi ita vobis vi-
detury Quintes y difcedite in carias ^ fuffra~
gLum imie : chacun fe rangeoit dans fa curie ;
on tiroit au fort le rang des curies ; elles don-
noient leurs fufîrages , qu'on ne prenoit que
jufqu'à ce qu'il y eût feize curies d'un mémo
avis. Les délibérations étoient précédées par
des augures , & elles n'avoient lieu qu'en cas
qu'il ne s'opposât rien de leur part. Lorfqu'on
eut inftitué les comices dits tributia, les droits
des comices dits curiata fe réduisirent à fi peu
de chofe , que les trente lideurs des curies
s'aiîemblerent feuls , & décidèrent des affaires
pour lefquelles on avoir auparavant convoqué
les curies. Au refle ils ne fe tinrent jamais qu'aux
jours comitiaux , fans égard pour la faifon.
Comices dits pontificia : le peuple y étoic
par tribus; on élifoit un fouverain pontife; on
tiroit le rang des tribus au fort; l'unanimit»
de dix-fept tribus fufhfoit pour l'éledion. Ce
fut un pontife qui les convoqua , & qui les tint
jufqu'à ce que ce droit eût été transféré aux
confuls par la loi domitienne.
Comices dits prcetoria : le peuple y étoit
par centurie ; on y élifoit les préteurs : ils
étoient tenus par un conful. Comme il y avoit
quelquefois jufqu'à dix préteurs à nommer, &
que le nombre des candidats étoit grand , les
féances duroient fi long-temps qu'on divifoic
l'éledion , & qu'on difîeroit celle de quelques
préteurs. Ces comices fe tenoient un , deux,
trois jours ,.& rarement plus tard, après les
comices confulaires.
Comices dits proconfularia & proprtxtoria :
le peuple y étoit par tribus ; on y élifoit les
proconfuls& les propréteurs, lorfque les cas?
î'exigeoient, comme pîufieurs gouvernemens
de provinces à remplir , pîufietirs guerres à
conduire , une feule guerre ou un (eul gou-
vernement, auquel les deux confuls ou pré-
teurs prétendoient en même temps. Quant**^
la manière de les tenir , voye\ les comices dits
centuriata.
Comices dits quœjîoria : le peuplé y fut paf
curies; on *y élut les quefleurs jufqu'à ce que
ce droit fut transféré aux comices par tribus.
Ils étoient tenus par un conful ; on y procé-
doit par curies dans le marché romain ; & par
tribus dans le champ de Mars.
6oi C O M
Comices àksfacerdotu/n : le peuple y étoit
par tribus ; on y elifoit les prêtres ; le conful
y préiidoit.
Comices dits tribunitia : i!s fe tenoient par
tribus; on y elifoit les tribuns militaires. Ils
commencèrent en 393 ; les uns étoient au
choix du peuple , les autres au choix du géné-
ral , & on les diftinguoic des premiers par le
Rom de trihuni rafuli. Il ne faut pas confondre
ces comices ni avec ceux où l'on elifoit les
tribuns militaires confulari potefiaie , ceux-ci
étoient par centuries ; n; avec ceux où l'on
créoit les tribuns du peuple. Quoique le peuple
y fût par tribus , ils n'étoient point tenus par
un conful , mais par un tribun.
Comices dits tiibuta : afîèmblées où le .
peuple éroit divife^ en fes trente- cin; tribus;
ils commencèrent en 2^3, dans l'cifFaire de
Marcius Coriolan , & la loi publilia les auto-
rifa en 18:. Dans les comices par centuries,
tout dépendoit, comme on a vu, de la pre- :
miere clafTe ; dans ceux-ci , au contraire , !
c'étoir le peuple entier qui décidoit. Les capi- .
tecenfi ou pwletarii y ou ceux de la fixieme .
clafle , pouvoient autant que ceux de la pre- i
iniere. On y elifoit tous les magiftrats compris '
fous la dénomination de magifiratus urbani \
minores ordinani ; favoir les édiles curules I
& plébéiens , les tribuns du peuple, les quef- !
teurs , les triumvirs dits capitales , les trium- i
virs noâurnes , les triumvirs dits monetales ; ;
les magiftrats dits urbani minores extraordi' j
narii , comme les préfets des vivres , les
duumvirs dits navales ^ les quefteurs du parri- I
cide ,' les infpeâeurs des rues & chemins , les
quinquevirs mûris turribufque reficiendis y \
les triumvirs ou quinquevirs dits menfarii^ \
les magiftrats dits provinciales ordinarii y \
comme les proconfuïs , propréteurs , & prù-
quefteurs ; les magiftrats dits provinciales ex-
traordinarii ,' comme les triumvirs , les quin-
quevirs ou feptemvirs colonice deducendce aut
cgris dividiindis _, quelques-uns des tribuns
r^itaires qu'on appelloit par cette raifon tri-
huni comitiati , & les prêtres des collèges.
On y faifoic auiTi les loix SippelUes plébifcites j
on y jugeoit les citoyens , mais non pour caufe
capitale; ils pouvoient y être cdndamnés à
l'amende ou à l'exil: on y décernoit le triom-
phe ; on y traitoit des privilèges des citoyens ,
des alliances , de l'exemption de la loi , éc Ils
étoient tenus par les dièateurs , les confuls ,
C O M
les tribuns militaires confulari poteftate , les
préteurs , & les tribuns du peuple , avec cette
différence que ces derniers ne pouvoient que
décider des affaires , & qu'il appartenoit aux
premiers à pourvoir aux dignités. Ces afîèra-
blées fe pouvoient faire fans le confentement
du fénat, & les augures ne pouvoient ni les
empêcher, ni les retarder. On y elifoit les
magiftrats dans le champ de Mars ; on y expé-
dioit les autres affaires , ou au capitole , ou
dans le marché romain. Ils fe tenoient les
jours comitiaux ; on n'afîèmbloit que dix-fept
tribus pour l'éledion d'un prêtre ; & celui qui
en a'voit neuf pour lui, étoit nommé. Ces
comices par tribus ne méritoient , à propre-
ment parler , que le nom de concilia plebis ;
aucun patricien n'y affiftoit, n'étant point
formés du peuple en entitr, mais feulement
du commun du peuple , plebsy Hed. lex.
* Comice , {Hijî. ancj endroit de Rome
dans la vii)*^ région, au pié du mont Palatin ,
vers le capitole , proche le marché romain , où
fe tenoient ordinairement les comices par cu-
ries ; il n'étoit, félon toute apparence , fermé
que d'un mur percé de deux portes , par une
defquelles une curie fortoit, tandis que la curie
fuivante entroit par fautre, félon l'ordre gardé
dans les ovilia ou fepta au champ de Mars. Il
ne fut couvert qu'en 545. On y fit aufîi des
portiques ; on y éleva des ftatues : c'étoit-là
qu'éroit le puteal libonis y ou l'autel où les.
magiftrats prêroient ferment; le figuier fau-
vage fous lequel la louve avoir alaité Remus
& Romulus ; la grande pierre noire que Ro-
mulus choifit de fon vivant pour fa tombe , Ùc^
On y puniffoit les malfaiteurs ; on y fouettoit
à mort ceux qui avoient corrompu des vefîa-
les : il fe voit aujourd'hui entre les églifes de
fainte Marie la Libératrice & de faint Théo-
dore. Les anciens y jouoient à la paume ; &
Caton s'y exerçoit quelquefois.
COMILLAN, (GéogJ V. Comittan.
COMIQUE , adj. plaifam, qui excite à
rire , qui appartient à la comédie ; aventure-
comique y propos comique y figure comique y
flyle comique.
Comique, fubft. un comique y c'eft-à-dire,
un acteur comique y un poète comique. Le-
comique y c'eft-à-dire, le genre de la co-^
médie. C'eft le comique de la troupe. Mo-
lière eft le modèle des comiques. Le comique
corrige les mœurs*
C O M
Comique , pris pour le genre de la comé-
die ei\ un terme relatif. Ce qui eil comique '■
pour tel peuple , pour telle fociété , pour tel j
homme , peut ne pas l'être pour tel autre. 1
L'effet du comique réfulte de la comparaifon {
qu'on fait , même fans s'en appercevoir , de fes
mœurs avec les mœurs qu'on voit tourner en
ridicule , & fuppofe entre le fpedateur & le
perfonnage repréfenté une différence avanta-
geufe pour le premier. Ce n'efl pas que le
même homme ne puifTe cire de fa propre
image , lors même qu'il s'y reconnoît ; cela
vient d'une duplicité de caractère qui s'obferve
encore plus fenlîblement dans le combat des
pafîions , où l'homme eft fans cefTe en oppofl-
tion avec lui-même. On fe juge , on fe con-
damne , on fe plaifante , comme.un tiers, &
l'amour-propre y trouve fon compte. ï^oye\
Raison, Sentiment, Identité.
Le comique n'étant qu'une relation , il doit
perdre à être tranfplanté ; mais il perd plus ou
moins en raifon de fa bonté eflèntielle. S'il efl
peint avec force & vérité, il aura toujours ,
comme les portraits de Vandeyk & de Latour,
le mérite de la peinture , lors même qu'on ne
fera plus en état de juger de la refTemblance ;
& les connoifTeurs y appercevront cette ame
& cette vie , qu'on ne rend jamais qu'en imi-
tant la nature. D'ailleurs fî le comique porte
fur* des caraderes généraux & fur quelque vice
radical de Thumanicé , il ne fera que trop ref-
femblant dans tous les pays & dans tous les
iîecles. L'avocat patelin femble peint de nos
jours. L'avare de Plante a fes originaux à
Paris. Le mifanthrope de Molière eût trouvé
les fiens à Rome. Tels font malheureufement
chez tous les hommes le contrafte & le mé-
lange de l'amour-propre & de la raifon , que
la théorie des bonnes mœurs & la pratique des
mauvaifes , font prefque toujours & par- tout
les mêmes. L'avarice, cette avidité infatiable
qui fait qu'on fe prive de tout pour ne manquer
de rien ; l'envie , ce mélange d'eflime & de
haine pour les avantages qu'on n'a pas ; l'hy-
pocrilie , ce mafque du vice déguifé en vertu ;
la fîatrerie , ce commerce infâme entre la baf-
feffe & la vanité: tous ces vices & une infinité
d'autres, exifleront par-tout où il y aura des
hommes, & par-tout ils feront regardés comme |
des vices. Chaque homme méprifera dans fon j
femblable ceux dont il fe croira exempt , & {
prendra un plaifir malin à les voir humilier ; '
C O M 605
ce qui afTure à jamais le fuccés du comique qui
attaque les mœurs générales.
Il n'en eft pas ainfi du comique local &
momentané. Il efî borné pour les lieux & pour
les temps , au cercle du ridicule qu'il attaque j
mais il n'en efl fouvent que plus louable , at-
tendu que c'efl lui qui empêche le ridicule de
fe perpétuer & de fe répandre , en détruifant
fes propres modèles ; & que s'il ne refTemble
plus à perfonne , c'efl que perfonne n'ofe plus
lui reffembler. Ménage qui a dit tant de mots ,
& qui en a dit fi peu de bons , avoit pourtant
raifon de s'écrier à la première repréftn ration
des précieufes ridicules : courage , Mol ère ,
voilà le bon comique. Obfervons , à propos de
cette pièce , qu'il y a quelquefois un grand art
à charger les portraits. La méprife des deux
provinciales, leur emprefTement, pour deux
valets traveftis , les coups de barons qui font le
dénouement , exagèrent fans doute le mépris
attaché aux airs & au ton précieux ; mais Mo-
lière , pour arrêter la contagion , a ufé du plus
violent remède. C'eft ainfi que dans un dénoue-
ment qui a efTuyé tant de critiques, & qui
mérite les plus grands éloges , il a ofé envoyer
l'hypocrite à la grève. Son exemple doit ap-
prendre à fes imitateurs à ne pas ménager le
vice , & à traiter un méchant homme fur le
théâtre comme il doit l'être dans la fociété.
Par exemple , il n'y a qu'une façon de ren-
voyer de deffus la fcene un fcélérat qui faic
gloire de féduire une femine pour la désho-
norer : ceux qui lui refîèmblent trouveront
mauvais le dénouement; tant mieux pour
l'auteur & pour l'ouvrage.
Le genre comique françois , le feul dont nous
traiterons ici , comme étant le plus parfait de
tous ( voyei CoMÉDIE ) , fe divife en comi"
que noble, comique bourgeois y & bas comi-
que. Comme on n'a fait qu'indiquer cette di-
vifion dans Vanicle CoMÉDiE, on va la dé-
velopper dans celui-ci. C'efl d'une connoif-
fance profonde de leurs objets, que les arts
tirent leurs règles, & les auteurs leur fécondité.
Le comique noble peint les mœurs des
grands, & celles-ci différent àcs mœurs du
peuple & de la bourgeoifie, moins par le fond
que par la forme. Les vices des grands font
moins groJÏîers, leurs ridicules moins cho-
quans ; ils font même, pour la plupart, fi bien
colorés par la polirefïè , qu'ils entrent dans le
caractère de l'homme aimable : ce font de«
Gggg 2
6o4 COU
poifons aflaifonnés que le fpe'culateur d^com-
pofe ; mais peu de perfonnes font à portée de
les étudier, moins encore en état de les faifir..
On s'amufe à recopier le /)^r/r/;2tz/rre fur lequel
tous les traits du ridicule fontépuifés, &dont
la peinture n'eft plus qu'une école pour les
jeunes gens qui ont quelque difpofition à le
devenir ; cependant on laiflè en paix V intri-
gante, le bas orgueilleux , le preneur de lui-
même , & une infinité d'autres dont le monde
eft rempli : il eft vrai qu'il ne faut pas moins
de courage que de talent pour toucher à ces
caraderes; & les auteurs du/it:/2:-/TrtC(?nf& du
glorkux ont eu befoin de l'un & de Tautre :
mais aulFi ce n'eil: pas fans efFort qu'on peut
marcher fur les pas de l'intrépide auteur du
tartufe. Boileau racontoit que Molière , après
lui avoir lu le mifamhrope , luiavoit dit: vous
j-'errei bien autre chofe. Qu'auroit-il donc fait
fî la mort ne Tavoit furpris , cet homme qui
voyojt: quelque chofe au delà du mifamhrope ?
Ce problème qui confondoit Boileau , devroit
être pour les auteurs comiques un objet conti-
nuel d'émulation & de recherches ; & ne fût-ce
pour eux que la pierre philofophale , ils fe-
roient du moins en la cherchant inutilement ,
mille autres découvertes utiles.
Indépendamment de l'étude réfléchie des
mœurs du grand monde , fans laquelle on ne
fauroit faire un pas dans la carrière du haut
comique, ce genre préfente un obflacle qui lui
eft propre, & dont un auteur eft d'abord effrayé.
La plupart des ridicules des grands fontfi bien
compofés, qu'ils font à peine vifibles. Leurs
vices fur-tout ont je ne fais quoi d'impofant
qui refufe à la plaifanterie : mais les firuations
les mettent en jeu. Quoi de plusférieuxen foi
que le mifanthrope? Molière le rend amoureux
d'une coquette ; il efl comique. Le tartufe eft
un chef-d'œuvre plus furprenant encore dans
.l'art des contraftes : dans cette intrigue fî co-
mique y aucun àes principaux perfonnages ne
le feroit , pris féparément ; ils le deviennent
tous par leur oppofition. En général , les carac-
tères ne fe développent que par leurs mélanges.
Les prétentions déplacées & les faux airs
font l'objet principal du comique bourgeois.
Le. progrès de la politefTe & du luxe l'ont rap-
proché du comique noble, mais ne les ont point
confondus. La vanité qui a pris dans la bour-
geoifie uii ton plus haut qu'autrefois , traite de
grofîier tout ce qui n'a pas l'air du beau monde.
C O M
C'eft un ridicule de plus , qui ne doit pas em-
pêcher un auteur de peindre les bourgeois
avec les mœurs bourgeoifes. Qu'il lailTe mettre
au rang des farces Georges iandin, le malade
imaginaire, \qs fourberies de fcapin, le bour-
geois gemilnomme , & qu'il tâche de les imiter.
La farce eft l'infipide exagération , ou l'imita-
tion groffiere d'une nature indigne d'être pré-
fentée aux yeux des honnêtes gens.^ Le choix
àts objets & la vérité de la peinture caradéri-
fent la bonne comédie. Le malade imaginaire,
auquel les médecins doivent plus qu'ils ne pen-
fent, eft un tableau aufti frappant & aulïï
moral qu'il y en ait au théâtre. Georges dan-
din , où font peintes avec tant de fagefTe les
mœurs les plus licencieufes , eft un chef-
d'œuvre de naturel & d'intrigue; & ce n'eft
pas la faute de Molière 11 le fot orgueil plus
fort que fes leçons , perpétue encore l'alliance
des dandins avec les foteni'illes. Si dans ces
modèles on trouve quelques traits qui ne peu-
vent amufer que le peuple , en revanche com-
bien de fcencs dignes des connoifieurs les plus
déHcars ?
Boileau a eu tort, s'il n'a pas reconnu l'auteur
du Mifanthrope dans l'éloquence de Scapiii
avec le père de fon maître ; dans l'avarice de
ce vieillard ; dans la fcene des deux pères ;
dans l'amour des deux fils, tableaux dignes de
Térence ; dans la confeftion de Scapm qui fe
croit convaincu ; dans fon infolence dès qu'il
fent que fon maître a befoin de lui, Ùc Boi-
leau a eu raifon , s'il n'a regardé comme in-
' digne de Molière que le fac oij le vieillard eft
: enveloppé : encore eût-il mieux fait d'en faire
la critique à fon ami vivant , que d'attendre
! qu'il fût mort pour lui en faire le reproche.
1 Pourceaugnac eft la feule pièce de Molière
I qu'on puifTe mettre au rang des farces ; & dans
' cette farce même on trouve des caraâeres ;
; tel que celui de Sbiigani , &c des fîtuations
telles que celle de Pourceaugnac entre les deux
i médecins , qui décèlent le grand maître.^
j Le com-qae 'bas, ainfi nom.mé parce qu'il
i imite les mœurs du bas peuple, peut avoir,
comme les tableaux flamands, le mérite du
coloris , de la vérité & de la gaieté. Il a auffi
fa finefTe & fes grâces ; & il ne faut pas le
1 confondre avec le comique groffier : celui-ci
j confîfîe dan:, la manere; ce n'eft point un
; genre à part , c'eft nn défaut de tous les genres.
: Les amours d'une bourgeoife & l'ivreflè d'un
C O M
marquis, peuvent être du comique grojjîer ^
comme coût ce qui bleffs le goût & les mœurs.
Le comique bas au concraire eil: fufceptible
de délicatefTe & d'honnêteté ; il donne même
une nouvelle force au comique bourgeois &
au comique noble, lorfqu'ii contrafte avec
eux. Molière en fournit mille exemples. Voye:^
d^ns le dépit amoureux , la brouillerie & la
réconciliation entre Mat/iurine & gros.-René,
où font peints dans la {implicite villageoife
les mêmes mouvemens de dépit & les mêmes
retours de tendrefîè , qui viennent de fe pafTer
dans la fcene des deux amans. Molière , à la
vérité , mêle quelquefois le comique grojjler
avec le bas comique. Dans la fcene que nous
avons citée , voua ton demi-cent d'épingles
de Paris, eft du comique bas. Je poudrois
bien aujjl te rendre ton potage, eft du comique
grojjier. hz paille rompue yt^ un trait de^énie.
Ces fortes de fcenes font comme des miroirs
où la nature, ailleurs peinte avec le coloris
de l'art, fe répète dans toute fa {implicite.
Le fecret de ces miroirs feroit-il perdu depuis
Molière ? Il a tiré des contraftes encore plus
forts du mélange des comiques. C'eft ainfi que
dans \efefiin- de -Pierre , il nous peint la cré-
dulité de deux petites villageoifes , & leur
facilité à fe laifTer féduire par un fcélérat dont
la magnificence les éblouit. C'eft ain{i que
dans le bourgeois gentilhomme , la groffiéreté
de Nicole jette un nouveau ridicule fur les
prétentions impertinentes & l'éducation for-
cée de M. Jourdain. C'eft ain{i que dans
V école des femmes l'imbécillité d'Alain & de
Georgette {i bien nuancée avec l'ingénuité
d'Agnès , concourt à faire réufîir les entre-
prifes de l'amant , & à faire échouer les pré-
cautions du jaloux.
Qu'on nous pardonne de tirer tous nos
exemples de Molière ; fi Ménandre & Térence
revenoientau monde, ils étudieroient ce grand
maîcre , & n'étudieroient que lui. Cet article
ejî de M. de Marmontel.
COMIRS, f.m.pl. (Littér.) farceurs la
plupart provençaux, fâchant mufique , jouant
des inftrumens , & débitant les ouvrages des
troubadours : ils fuccéderent en France aux
hiftrions , où on leur donna encore les noms
de conteurs , jongleurs , mufars , plaifan-
tins y pantomimes , &c.
COMITE, f m. C^^^firie.) officier de
galère qui commande la chiourme, & qui a le
C O M 605
j foin de faire ramer les forçats. V. Marine y
PL II y lett. Z y \e comité en fondion fur
une galère à la rame. (Z)
COxMITÉ du Parlement y ( Jurijp.) eft
l'afTemblée des commifîaires nommés par le
parlement pour examiner d'abord entr'eux
quelqu'afFaire publique ou de la compagnie ,
& en rendre compte enfuite à tout le parle-
ment affemblé. Kqye:^ Commissaires dit
Parlement ù Parlement. (A)
^ COMITTAN, (Geogr. mod.) ville de
TAmérique feptentrionale dans la nouvelle
Efpagne, province de Chiapa. Cette ville eft
appeîlée Comillan par M. de Lille.
COMMA , f m. terme de Gram. ù d'Impr.
Ce mot eft grec, ««'«,««, fegmen y incifum.
Quintilien , vers le commencement du ch. iv
du liv. IX y fait mention des incifes & des
membres de la période , incifa quce KÎfiuurx ,
membra quce KuXtu. Les incifes font un fens
partiel qui entre dans la compofition du fens
total de la période , ou d'un membre de pé-
riode. V. Construction & Période.
On donne aufti le nom d'incife aux divers
fens particuliers du ftyle coupé : Turenne eJî
mort; la vicloire s'arrête; la fortune chan^
celé; c'eft ce que Cicéron appelle incifim
dicere. Cic. orat. cap. Ixij ^ Ixvij.
On appelle auflî comma une forte de ponc-
tuation qui fe marque avec les deux points:
c'eft de toutes les ponduations celles qui après
le point indique une plus forte féparation. Le
{leurLcroi, ce fameux protede Poitiers, dans
fon traité de l'orthographe qui vient d'avoir
l'honneur d'être augmenté par M. Reftaut; le'
fieur Leroi , dis-je , foutient que la ponâua-
tîon des deux points doit être appeliée comma,
& que ceux qui' donnent ce nom au point-
virgule Çont dans l'erreur. Apparemment
l'ufage a varié; car Martin Fertel , Richeîet,
& le didionnaîredeTrevoux, édition de 1721,
difent que le comma eft la ponâuation qui fe
marque avec un point & une virgule: le fîeur
Leroi foutient au contraire que malgré le
fentiment de ces auteurs, la ponduation du
point- virgule eft aip^eWée petit que par tous les
imprimeurs ; parce qu'en effet ce fîgne fert à
abréger la particule latine que , quand à la
fuite d'un mot elle fignifie Ù : par exemple
illaq; hominefq; deofq; au lieu de illaque
hominefque, deofque. Icx'û ne s'agit que d'un
fait y on n'a qu'à confulter les imprimeurs '
6o6 C O M
ainfi le prote de Poitiers pourroit bien avoir
raifon.Noiis verrons <zu/7zof Orthographe
s'il eft auffi heureux quand il s'agit de raifon-
nement. (F)
§ COMMA , (Mujjq.) Si quelqu un pre-
noit pour rapport du diamètre à la circonfé-
rence du cercle , les différentes approxima-
tions qui en ont été données, il pourroit dire
que ce rapport eft à la fois it) fff > Hl » ^'^•
de même on pourroit dire que le rapport de
la diagonale au côté du quarré^, eft 7 , j , 77 ,
±1 ^ il ^ &c. quoique dans le fait il ne foitque
V"T~. D'après cette réflexion , M. de Boifge-
!ou , confeiller au grand confeil de Paris , &
habile géomètre , mort en 17154,3 imaginé
que le rapport d'un intervalle devoit être in-
commenfurable , lorfque les mufîciens lui
aftîgnoient plufieurs expreflions , dont la diffé-
rence eft ce qu'on appelle un comma. En effet ,
pour déterminer les rapports de tous les inter-
valles , on part de la fuppofîtion , que ceux de
la cierce majeure & de la quinte font connus
par expérience , & dans chaque calcul , on
combine ces deux rapports concurremment:
cependant chacun des deux doit dépendre de
l'autre : il ne faut recourir à l'expérience que
pour en connoître un , & le fécond doit être
tiré du premier par le calcul : de même que
quand on a mefuré le diamètre d'un cercle ,
on connoît fuffifamment fa circonférence ,
Jont la mefure aduelie ne donneroit qu'une
approximation. Je prends donc pour connu le
rapport de la tierce majeure , dont la jufteffe
eft la moins douteufe , & je nomme celui de
la quinte : : /z ; z. Je parcours toutes les notes
par ordre de quinte, & je forme la table
fuivante :
b b b b b h \)
fa> ut>M> re, la y mi, fi y fa y ut, fol y
% >K X % XK ^ M
Te y la, mi, fi, fa, ut, fol, re, la, mi, fi,
dont les notes auront refpedivement pour va-
876543 210
leurs numériques n, n, n, 11, n, n, n, n, n,
i^-a— 3 — 4 — î — 6 — 7 — 8 — 9 — 10— II — Il
n , n , n , n , n , n , n , n , n , n, n, n;
enfuite pour ramener tous ces fons à une
fnême oûave , je confîdere que ut , par exem-
pie, dont la valeur eft /z, eft à la quatrième
C O M
oftava de Vat qui fuit immédiatement Vut na-
, j 1 , , 3ié 4-7
turel , donc la valeur de cet ut eft 2. n. Pat
cette méthode, je conftruis la table fui v^nta:
ut, ut, re, re, re, mi, mi, mi, fa, fa, fa^
t m ^ K b n b
fol} fol, fol, la, la, la, fi, fi, fi, ut, ut,
dont les notes ont refpedivement pour va-
00 4—7 35 1—25—9
leurs numériques xn, zn, zn, zn, zn,
23 2— 46 II — 58 — 113 — 6 — 46014—8
zn, Zn, zn, zn, Zn, Zn, zn,zn, zn,
-341—3 5—10—222—56 — 12^—57 — 10
zn , Zn , zn , zn , zn , zn , z n, zn.
Il ne faut donc plus que déterminer n : pour
y parvenir je fais : : 5 : 4 le rapport de la tierce
o o 2—4 4
majeure , & j'ai zn: zn:: 5 : 4 ; donc n =
4— 4 —
5 & n = V 5. Or V 5 a dû naturellement
être confondue avec | qui en eft une ap-
proximation très- forte. Il eft aifé maintenant
d'avoir le rapport numérique d'un inter-
valle quelconque : fî dans fon exprefîîon Tex-
pofant de n eft une puifîànce de 4 , le rap-
port eft jufte & commenfurable ; li l'expofant
eft tout autre nombre , le rapport eft incom-
menfurable, & il faut fubftituer 7 à /i comme
approximation. Ainfi le rapport de la tierce
3 4
mineure eft : : 4 : « ou : : 4 /z .- n , c'eft-à-
dire : : 4 /z ; 5. Si on fubftitue 7 à n, le pre-
mier rapport devient : : 32 : 27, & le fé-
cond : : 6 : 5 ; ce font ces deux approxima-
tions qui ont été prifes pour des valeurs réel-
les. Le rapport de la féconde mineure eft : :
3 5 3 3 3 833
2:/i;:2:5/2::2/z;7z::2/z : 25. L'ap-
3
proximation du rapport : ; 2 : 5 ra eft : : 16:
3 3
15 , & celle de : : 2 n; 25 eft : : 27 : 25. Ce
font ces deux rapports qui ont été donnés
pour vrais. Le rapport de la féconde majeure
2 4 z 2
eft : : /Z : 2 : : n : 2 /i : : 5 : 2 /i. Par la fubfti-
2 2
tution de I à /z le rapport : : n : z devient : :
9 ; 8 , & le rapport : : 5 : 2 n devient : : 10 :
9 qu'on reconnoît pour les deux qui ont été
trouvés.M.deBoifgelou appuyoit cette théorie
C O M
fur une foule d'autres preuves qu'il feroit trop
long d'inférer ici. Remarquons qu'un inter-
valle eft diatonique, fi dans fon exprefîion l'ex-
pofant de n eft depuis o jufqu'à 6 ; chromati-
que , fi rexpofant eft depuis 6 jufqu'à 12; en-
harmonique, depuis 1 2 jufqu'à 1 8. Si l'expofant
de n eft pre'cifcment 6 , l'intervalle eft à la fois
diatonique & chromatique ; c'eft le pafTage de
l'un à l'autre : fi l'expofant eft 12 , l'intervalle
eft à la fois chromatique & enharmonique.
Voyei Tempérament. (G. C.J
COMMAND , f. m. (Jurifp.J ce terme
(jgnifie quelquefois celui qui , foit dans un
contrat d'acquifition volontaire , foit dans une
adjudication par décret , déclare qu'il acheté
pour lui ou pour un ami élu ou à élire, & qu'il
nommera dans la fuite. Ce même terme co/72-
mand fignifie plus fouvent celui qui a donné
charge à un autre d'acquérir pour lui.
Cette manière d'acquérir eft fort commune
en Anjou & au Maine. Les coutumes de
Peronne , Cambrai , & Artois , en parlent
nommément ; & elle eft permife dans toutes
les autres coutumes qui ne la prohibent pas
expreftement.
La déclaration de ce que l'on acheté pour
foi ou pour un autre , doit être faite dans le
contrat même , fi c'eft une vente volontaire.
A l'égard des ventes par décret , comme
l'adjudicataire n'eft pas tenu de figner l'adjudi-
cation avec fon procureur , on tient que s'il ne
l'a pas fignée , il peut , en confignant dans les
délais portés par les réglemens , c'eft-à-dire ,
dans la huitaine , ou quinzaine au plus, faire
fa déclaration de command , c'eft-à-dire , que
l'adjudication eft pour lui ou pour fon ami
i\u ou à élire ; ce que la coutume d'Auvergne
appelle ^cAer^r pour foi ou pour fon mieux :
ce mieux fignifie le droit que l'acquéreur fc
réferve de chôifir un command ou ami pour
acquéreur à fa place.
A l'égard du temps dans lequel l'acquéreur
ou adjudicataire doit nommer le command ,
c'eft-à-dire , l'ami pour lequel il a fait l'acquifi-
tion, les coutumes ne font pas uniformes ; quel-
ques-unes veulent que cette déclaration foit
faite dans quarante jours , telle que Peronne,
art. 88, celle d'Amiens accorde un an , art. 3 j
& 34y celle d'Artois ne fixe point le temps:
dans celle de Cambrai il n'y a que quarante
)ours pour les fiefs , & un an pour les autres
héritages : le délai de quarante jours paroît
le plus convenable.
C O M 607
Il eft indiffèrent que l'acquéreur ou adjudi-
cataire ait configné de fes deniers ou de ceux
de fon ami , pourvia qu'en confignant il ait
fait la déclaration de command.
La nomination du command doit être faite
pour le même prix, charges, claufes, & condi-
tions : autrement ce feroit une revente qui pro-
duiroit de nouveaux droits feigneuriaux.
Il faut auffi que lors de la nomination les
chofes foient entières, c'eft-à-dire, que l'acqué-
reur n'ait pas fait ade de propriétaire en fon
nom , par exemple , qu'il ne fe foit pas fait re-
cevoir en foi & hommage , & payé les droits.
Si le command ou ami nomme n'ayant pas
donné de pouvoir pour acquérir , reflifoit
d'accepter l'acquifition , le premier acqué-
reur demeureroit propriétaire , fans que pour
cela il fût dû doubles droits. Voye\ le tr. des
fiefs de Guyot , tome III , ch. ii> y fecl. 3 , Ù
la pratique des terriers de M. de Freminville ,
tome I y p. ii$o. (AJ
COMMANDS , (grandsy hauts, ou petits^
Jurifpr, font les injondions ou commande-
mens que les fecretaires & fergens font de
l'ordonnance de juftice & par fon mande-
ment , pour faire déhvrer la poifelfion. Il en
eft parlé au ftyle de Liège , & en la coutume
de Namur, art. z&, &: dans les coutum.es
des fiefs de ce comté. ("AJ
COMMANDANT , f . m. fHiJi. mod. ù
Art, milit.J Ce nom pris en général , fignifie
un officier militaire qui a autorité fur une
armée , un corps de troupes , & tant fur les
officiers que fur les foldats.
En le reftreignant à un fens plus particulier,
il fignifie dans les troupes de France un officier
qui commande en chef à tout un bataillon. Qia-
que bataillon a un commandant, qui eft ordi-
nairement le plus ancien capitaine ou le capitai-
ne des grenadiers de ce même bataillon-. fO )
COMMx\NDATAIRE ou COMMEN-
DATAIRE , fubft. mafc. Cette dernière
orthographe eft plus ordinaire. On appelle v'e
ce nom en Jurifprudence un eccléfiaftique
féculier qui eft pourvu par le pape à titre de
commende d'un bénéfice régulier , tel qu'une
abbaye ou un prieuré , avec le droit de pro-
fiter des fruits du bénéfice tant qu'il en fera
polTeflëur. La qualité de commendataire eft
oppofée à celle de titulaire. Le bénéficiée
titulaire eft celui qui eft pourvu en titre du
bénéfice ; le commendataire eft celui qui en
eft pourvu en commende feulement. Il ^ a
6o8 C O M
des abbés & des prieurs commendataires. A
l'égard des évéchés & cures , on ne peut pas
les conférer en commende.
Le concile d'Aix tena en 158^ , veut que
les bénéficiers commendataires tiennent un
milieu entre la vie des réguliers & celle des
eccléfiaftiques féculiers , tant dajis leur vête-
ment que dans leur nourriture &: leurs meu-
bles : il veut qu'ils portent la tonfure plus
grande que les féculiers ; qu'ils fallènt atten-
tion que l'adminiftration des biens des monaf-
teres ne leur a pas été confiée pour vivre dans
le luxe , dans la prodigalité, ni pour enrichir
leurs familles ; mais pour en faire un pieux
ufage , comme d'un bien dont ils n'ont pas
la propriété , & dont ils doivent rendre
compte à Dieu. Biblioth. canàn. au mot abbé.
Les abbés commendataires font confidérés
dans réglife corpme conftitués en dignité,
& comme de vrais prélacs ; ils prennent pof-
feiîïon de leurs églifes abbatiales , baii'ent
l'autel , touchent les livres & ornemens ,
prennent féance au chœur en leur première
place; ils peuvent être juges délégués , & ont
féance dans les conciles & autres affemblées.
Dans les abbayes qui ont territoire & jurif-
didion , ils exercent la jurifdiûion fpiri-
tuelle : ils jouiflent des mêmes honneurs que
les abbés titulaires, excepté qu'ils ne portant
point la croix pedorale. Ils ont rang au ïief-
fus de tous les prélats inférieurs , même tiru-
laires ; & lorfqu'ils décèdent , leur églile eil j
dite vacante. 1
Suivant la difpoficion de plufieurs conciles j
depuis le concile de Trente , les abbés com-
mendataires font tenus de fe faire promou-
voir à l'ordre de prétrife dans l'an de hurs
provifions , faute de quoi au bout de deux
ans leurs bénéfices font déclarés vacans &
împétfables. Mais plufieurs obtiennenn en
cour de Rome des difpenfes de non promo-
vendo j' ces difpenfes ne font que pour un
temps , mais elles fe réitèrent plufieurs fois.
Les abbés commendataires y quand même
ils feroient cardinaux , n'ont point le droit
de vifîte ni de correûion fur les religieux de
leur abbaye : ils peuvent néanmoins difpofer
des places m.onacliales dans les monalleres
qui ne font pas en congrégation , à moins
que les religieux ne juftifient d'un ufage &
pofTefïion contraire ; & dans les monafteres
même où les abbés commendataires ont cédé
C O M
aux religieux le droit de nommer aux places
monachales , ils peuvent obliger les fupé-
rieuts d'y mettre un certain nombre de re-
ligieux. Ils peuvent aufïï nommer aux béné-
fices dépendans de leur abbaye , & aux of-
fices de juftice, pourvu que la juftice foit
dans leur lot.
Il faut appliquer tout ce qui vient d'être
I dit des abbés aux prieurs commendataires y
qui font fujets aux mêmes règles , & jouif-
fent àes mêmes droits en tant qu'ils peuvent
appartenir à la qualité de prieur.
Les religieux ont leur menfe conventuelle
féparée de cdle de l'abbé ou prieur commen-
dataire : fi leur part confiile en une penfion ,
ils font toujours reçus à demander un partage
en nature. »•
Lqs commendataires ne peuvent , en faveur
des religieux, diminuer les droits de leur bé-
néfice , au préjudice de leurs fucceffeurs.
Voye\ le traité des matières bénéf. de Fuet ,
liv. ly ch. des abb. & liv. II y Ù ch. ij y de la
divif. des bénéf. & le tr. de F abbé commendat,
par de Bois- franc. (A)
COMMANDE ou COMMENDE, (Mat,
hénéfic.J fignifie garde-dépôt. Donner un béné-
fice en commende, c'eft donner en garde à un
féculier un bénéfice régulier , lequel ne peut
être conféré en titre qu'à un régulier, fuivant
la règle fecularia fecularibus ) regularia regu-
laribus , qui étoit la difcipline obfervée dans
les premiers fîecles de l'églife.
Quelques-uns rapportent l'établifTement
des commendes à Urbain II , d'autres à Clé-
ment V, d'autres encore à Léon IV, mais
i'ulàge en.paroît encore plus ancien.
En efïèt, on voit que dès le temps du troi-
fieme concile d'Orléans , tenu fous Childe-
bert en 53S , l^^'^ évêques donnoient à des
clercs féculiers les monafîeres qui étoient
dans leurs diocefes , de même qu'ils leur don-
noient des cures & des chapelles , & que l'é-
vêque avoir le pouvoir de conferver au clerc
qu'il avoit mis à la tête d'un monafiere , la
part qu'il avoit dans les revenus de l'églife
féculiere à laquelle il étoit attaché , ou de
l'obliger à fe contenter de ce qu'il pourroit
avoir du monaftere.
S. Grégoire le grand qui fiégeoit fur la fin
du fixieme fiecle , admettoit qu'il y a des cas
où la charité , qui eft au defîus des règles ,
autorife l'ufage de donner des monafteres en
conimendt
C O M
commende â des clercs féculiers : Paulin évê-
que de Tour en Sicile , s'étant retiré en Sicile,
ce S. pontife lui donna la conduite d'un mo-
naftere , comme le defiroit levêque du lieu.
Du temps de Clotaire , S. Léger étant ar-
chidiacre de Poitiers , eut par Tordre de fon
évêque l'adminiftration de l'abbaye de S.
Maixent , qu'il gouverna pendant fix ans.
On voit par-là que le pape n'étoit pas le
lèul qui conférât des bénéfices réguliers en
commende , que les évêques en conféroient
aufli fous le même titre.
Les princes donnèrent même àes abbayes
à des laïques : Charles Martel maire du palais
fut le premier qui dilpofa ainfi des abbayes ,
de même que des dîmes , en faveur des prin-
ces & fèigneurs , pour les récompenfer de la
dépeniè qu'ils avoient faite dans la guerre
contre les Sarrafins. C'eft de-là que vinrent
les noms âHabbates milites ou abbi-comitts :
ceux-ci établiffoient un doyen ou prieur pour
gouverner des moines. Ces e^eces de com-
mendes laïques continuèrent fous les rois ,
leurs enfans , & fous leurs fucceffeurs , juf-
qu'à Hugues Capet, qui rétablit les élcftions
dans les églifes & monafteres , & reftitua
autant qu'il fut poflîble les revenus qui avoient
été pris par les derniers rois de la race carlo-
vingienne.
Pour ce qui eft des commendes eccléfiafti-
ques , elles n'ont jamais été pratiquées parmi
nous pour les évêchés ni pour les cures ,
mais feulement pour les abbayes & prieu-
rés, tant fimples que conventuels.
Les commendes eccléfiaftiques ne furent
introduites que pour l'utilité de l'églife, c'eft
pourquoi le commendataire n'avoit pas la
jouiffance , mais feulement l'adminiftration
des fruits : d'abord la commende ne duroit
que jufqu'à la provilîon ^ enfuite on la donna
pour un temps limité , quelquefois aiTez long.
Le pape défendit aux évêques de donner un
bénéfice en commende pour plus de fix mois :
mais la loi ne fut point pour le légiflateur j
les papes donnoient en commende jufqu'à ce
que le commendataire eût acquis les qualités
nécefTaires. Enfin en 1350 les papes , fans
permettre aux évêques de donner en com-
mende pour plus de fix mois , en donnèrent
à vie. Difcip. de Frapaolo , ». 148.
Tant que les papes & les évêques , en con-
férant des bénéfices réguliers en commende ,
n'ont eu eu vue que le biea de l'égtife & ce-
Tome nu.
C O M ^op
lui des monafteres , les pères & les conciles
n'ont point condamné cet ufàge : mais vers
les viij & ixe fiecles elles dégénérèrent en
abus \ & lorfqu'on vit que ces commendaCai-
reslaifToient tomber en ruine les monafteres ,
que le fèrvice divin étoit abandonné , les re-
ligieux fans chef, & manquant du nécefTaire,
l'églife s'eft élevée fortement contre les com-
mendes, par rapport au mauvais ufàge que
les commendataires en faifoient, & a or-
donné en différentes occafions que les ab-
bayes ne fèroient plus conférées qu'à des ré-
guliers : c'eft ce que l'on trouve dans le conb-
cile de Thionville , tenu en 844.
Jean VIII , préfident au concile de Troyes
fous le règne de Louis le Bègue , y fit rece-
voir une conftitution , qui en conformité
d'un précédent concile de Rome , portoit que
les abbayes , terres, & fonds de l'églife , -ne
fèroient plus donnés qu'à ceux qui fèroient
capables de les pofléder fuivant les canons.
Le concile de Troley tenu fous Charles le
Simple , s'expliqua encore plus clairement
fur ce point : après s'être élevé fortement
contre l'abus que l'on avoit fait des commen-
des , il ordonna que l'on obfèrveroit exac-
tement la règle de S. Benoît , qui veut que
les religieux choifîffent un d'entre eux pour
gouverner le monaftere en qualité d'abbé.
L'ufàge des commendes laïques cefîa y
comme nous l'avons dit , du temps de Hu-
gues Capet, mais l'abus des commendes con-
tinua encore par rapport aux eccléfiaftiques :
les évêques , foit de leur autorité ou de celle
du pape , retenoient encore les abbayes fbus
le titre de commende ; & il arriva fi-équem-
ment dans les xij & xiije fiecles que les évê-
ques titulaires en la Terre-fainte en étant
chaf les par les infidèles , le pape leur donnoit
d'autres évêchés ou des monafteres en com-
mende perpétuelle.
Des cardinaux & autres prélats demandè-
rent ces monafteres en commende , fous pré-
texte d'y mettre la réforme j ce qu'ils ne fi-
rent point.
Les commendes devinrent très-communes
dans le xive fiecle , tandis que le faint-fiege
étoit à Avignon : Clément V les avoit telle-
ment multipliées , qu'il crut ne pouvoir répa-
rer le tort que fa trop grande facilité avoit
fait à l'églife , qu'en révoquant lui-même
toutes les commendes qu'il avoit accordées.
Benoît XII révoqua celles de Jean XXII -
H h h h
éio C O M
fon prédéceiTeur ) & Innocent VI celles de )
Benoît XII. Elles fuient néanmoins rétablies 1
par Urbain VI , & par Boniface IX , mais
ïculement pour un temps. Paul II , eu 1462 ,
les rendit perpétuelles.
Le cinquième concile de I.atran tenu en
1512 , défendit que les monafteres qui n'é-
toient point en commende y fulfent donnés à
l'avenir ; mais le pape s'étant réfervé la fa-
culté d'y déroger 5 l'uiage des commendes con-
tinua comme auparavant : il fembloit encore
abrogé , du moins pour la France , par le
concordat fait en 15 16 entre Léon X &
François I , cependant les chofes font ref-
tées iur le même pié.
Le concile de Trente & les conciles pro-
vinciaux qui ont été tenus depuis , notam-
ment celui de Rouen en 1581 , & celui de
Rkeims en 1583 , fe font contentés de faire
des vœux pour le rétablillément de l'ancienne
di£'ipline.
II y a préfentement en France deux fortes
de commendes , qui ne font plus pour un
temps comme autrefois , mais à vie.
Les premières font celles des abbayes &
des prieurés conventuels , auxquels le roi
nomme en vertu du concordat.
Les autres font des prieurés fimples ou
conventuels , qui font à la nomination des
princes , cardinaux , abbés , & autres qui
ont des induits du pape enrégiflrés & recon-
nus au parlement pour les donner en corfi-
mende. Mais comme les provifions en com-
mende ibnt contre la difpoiîtion du droit ca-
nonique 5 & que le pape fèul peut diipenfer
de l'inhabilité des perfonnes , Q n'y a que lui
qui puiflé conférer en commende avec lapleine
diipofîtion des fruits.
Au refte la commende ne change point le
bénéfice de nature , quelque temps qu'il ait
été polTédé en commende.
Un bénéfice autrefois en commende , qui
eft depuis retourné en règle , c'eft-à-dire qui
a été conféré à un régulier , ne peut plus
être pofTédé en commende (ans obtenir une
nouvelle difpeufe du pape.
On diftingue encore deux fortes de co/72-
mendes , fàvoir la commende libre , & la com-
mende décrétée.
La commende libre eft celle à laquelle le
pape n'a appofé aucune reHriâion , de ma-
nière que le bénéfice peut palfer d'un béné-
ficier à un autre à titre de commende fùns nou-
C o M
velle difpenfè du pape , lequel en ce cas ne
peut refufer de le conférer en commende.
La commende décrétée eft lorfque dans les
provifions données par le pape d'un bénéfice
régulier , il y a le décret irritant ou claufe
que le bénéfice retournera en règle par la
démifiion , réfignation , ou décès du titu-
laire , cedente vel decedente.
Celui qui poflède un bénéfice en commende
décrétée , ne peut le réfigner en commende li-
bre ; cependant s'il y a voit eu trois titulaires
qui euffent fiicceflivement poflédé en com-
mende y le quatrième ne fèroit pas obligé de
faire mention du décret irritant.
Quand un bénéfice pofledé en commende
vient à vaquer , le collateur ordinaire peut y
pourvoir en titre , c'eft-à-dire le conférer à
un régulier.
Un féculier pourvu en commende fe faifant
religieux , fon bénéfice vaque par fa profef-
fion. Voye^la bib. can. t. II. , p. 1 59. Duper-
ray , moyens can. t. Il , ckap. xj ^ P^g' 328.
Dumoulin , de public, rejlg. n. 302. Loiiet y.
ibid. Fuet 5 liv. Ill , ch. ij. le diclionn. de
Brillon , au mot bénéfice , §. commend. le tr,
des loix eccléfiaji. de M. d'Héricourt , aux
différensendroits indiqués dans la table , aux
articles abbayes & abbés commendataires ; &
la jurifpr. cajion. au mot commende. [A)
Commande ou Commende , (Jurifpr.) •
en la coutume de Bayonne , titre iij , article
I , Çignï^Q dépôt.
Commande , en quelques coutumes , eft un
droit qui fe levé fur les ferfs affranchis par
leur fèigneur. Coût, de Chateauneuf^art. 22 y.
la charte de tan 1278 , ch. Ixviij , des coût*,
locales de Berry.
Commande , eft auffî en quelques lieux la
taille due par des hommes de condition fer-
vile \ elle eft ainfi nommée dans t article 2^
des coutumes locales de Château- Mellian en
Berry , dans la charte d! afi'ranchijfement des
habitons de Gournay , de fan 1278 , publiée
par la Thaumaftîere entre fès anciennes cou-
tumes , part. I , ch. Ixxiv , p. 109.
Droit de commande , en l'ancienne cou-
tume de Mehun en Berry , art. 2 , tit. ij , eft
le droit que le fèigneur prend chacun an fur
les veuves de condition ièrvile , durant leur
viduité , pour connoifiance bc confervation
de fon droit de fèrvitude ^ il eft de deux de-
niers parifîspar an. Dans la coutume de Châ-
tcauneuf iQcale de Eerry y titre ij , art. 22 ,
C O M
ce droit fè levé furies femmes fèrves mariées
à autres qu'à ceux de la condition & fervi-
tude du feigneur ^ ce droit y eft de quatre
deniers par an. F'oyei Lauriere , ghjàire ,
au mot Commande.
Commande , en matière bénéficiai e, voye^
Commande.
Commande de bejiiaux , eft un contrat par
lequel ou donne à un laboureur ou à un paf-
teur une certaine quantité de bétail , tels que
bœufs , vaches & moutons , à la charge que
le preneur les nourrira & en jouira comme un
bon père de famille , & qu'au bout d'un cer-
tain temps il le repréfèntera afin que le bail-
leur prélevé defiusl'eftimation, &:quelefiir-
plus ou le croît fe partage entre lui &: le pre-
neur. Quelques-uns confidcrent ce contrat
comme une vente , d'autres comme une fo-
ciété , d'autres enfin comme un louage. Cette
queftion eft amplement traitée par RevelyLrr
lesjiatuts de Bugey. Voyei ChePTEL. (A)
Commande , ( Commerce. ) ordre , com-
mifîîon qu'un marchand donne à fbn com-
miflîonnaire de lui acheter , vendre ou négo-
cier des marchandifes. DiSionn. de Comm. de
tacad. franc. & Trév.
Commande , fè dit aufll des ouvrages
que les manufaéiuriers , marchands ou arti-
isiws font ou font faire par ordre exprès j ce
qui \ts diftingue des ouvrages fabriqués pour
la boutique ou le magafin , qui fe vendent
au premier venu. On dit une étoffe de com-
mande , &c. Diâionn. de Comm. ù de Trév.
Commande , (Marine. ) ce mot eft crié
par l'équipage pour répondre au maître , qui
a appelle de la voix ou du fifflet pour quel-
que commandement qu'il va faire. ( Z )
Commande , (Marine. >c'eft ainfî qu'on
appelle de petites cordes de merlin , dont
les garçons de navire font toujours munis à
la ceinture afin de s'en pouvoir fervir au
befoin ^ elles fervent à ferrer les voiles , &
à renforcer les autres manœuvres. Elles
font faites de deux fils à la main dans le
bond. On les appelle autrement rabans. Il y
a des commandes de palans. ( Z )
COMMANDEMENT , f. m. ( Gram-
maire. ) il fe dit , & de l'aftion de celui qui
commande, comme dans cette phrafe , // eft
abfolu dans fon commandement ; & de la
chofe commandée , comme dans celle-ci ,
voici les commandemens de Dieu ; & du di'oit
de commander ôc de fe faire obéir, comme
C O M êit
\ dans celle-ci, le roi lui a confié le commande-
ment defes armées. Voye[^ quant à cette der-
nière acception, l'article COMMANDANT.
Commandement , en terme defortifica^
tion, c'eft une éminence ou une élévation de
terre qui a la vue fur quelque pofte ou fur
quelque place forte.
On diftingue trois fortes de commande-
mens : 1°. le commandement de front ^ c'eft
une hauteur oppofée à la face du pofte ^
qu'elle bat par le front , voye[ FRONT :
2°. le commandement de revers , qui peut
battre un pofte ou une place par derrière :
3°. le commandement d'enfilade , ou le com-
mandement de courtine ; c'eft une hauteur
qui peut battre d'un feul coup toute la lon-
gueur d'une ligne droite. V. Enfilade.
Le commandement e& fimple lorfque la hau-
teur qui commande eft élevée de 9 pies plus
que le terrain commandé. Il eft double lorf-
qu'elle eft élevée de 1 8 pies \ triple quand
elle l'eft de 27 , & ainfi de fuite en prenant
toujours 9 pies pour un commandement.
Comme les commandemens dans les envi-
rons des places , pourroient fervir très-avan-
tageufement à l'ennemi pour en foudroyer
les ouvrages , on unit autant qu'il eft poflible
le terrain autour des places à la diftance de
1000 ou 12000 toifes , qu'on peut confidérer
comme la portée ordinaire du canon. On ne
foufFre dans cet efpace ni arbres , ni hauteurs ,
nicheminscreuxoù l'ennemi puiflefe cacher j
lorfqu'il s'en trouve on \qs fait combler. On
rafe les hauteurs , finon on s'en faifit parjquel-
que ouvrage ou quelque pièce de fortification,
ou bien l'on couvre les endroits commandés
par des traverfes. Voye^ TRAVERSES. (Q)
Commandement , ( Jurifpr. ) fignifie
en général une injonétion faite à quelqu'un
de la part du roi ou de la juftice.
Arrêt en commandement , eft un arrêt du
confeil d'en haut , qui eft figné en comman^
dément par un fecretaire d'état.
Il y a aufti d'autres dépêches que les fe-
cretaires d'état fignent en commandement ,
telles que les lettres patentes portant règle-
ment général , les lettres de cachet , les bre-
vets & dons du roi , & les provifions \ les
princes ont des fecretaires des commandemens
dont les fondions font de contre-figner &
de feeller leurs ordonnances, mandemens,
commiflions , provifions d'offices & de bé-
néfices.
Hhhh 1
€ii C O M
Commandement , en terme de pratique^
eft un adte extrajudiciaire fait par un huif-
fîer ou fergent , en vertu d'un jugement ou
d'une obligation en forme exécutoire , par
lequel CQt officier interpelle quelqu'un de
faire , donner ou payer quelque chofe. Le
commandement diffère d'une fimple fomma-
tion en ce que celle-ci peut être faite , iàns
titre exécutoire , & même fans titre , au lieu
que le commandement ne peut être fait qu'en
vertu d'un titre paré , dont l'huiflier doit être
porteur. Quoique ce commandement fe faffe
à la requête d'une partie , il eft toujours dit
que c'eft de par le roi & jujiice ^ parce qu'il
n'y a que le roi &: la juftice au nom defquels
on puifle ufer de contrainte.
Toute exécution que l'on veut faire fur la
perfonne ou iiir les biens d'un débiteur doit
être précédée d'un commandement de payer
à peine de nullité ^ il faut qu'il y ait du moins
un jçnir d'intervalle entre le commandement
& la faifie , ou l'emprifonnement.
Dans l'ufage commun un fimple comman-
dement , non fuivi d'afîîgnation , interrompt
la prefcription pendant 30-ans^ parce que ce
n'eft qu'un ade extrajudiciaire qui ne tombe
point en péremption^ mais au parlement de
Bordeaux le commandement eft fujet à lapé-
remption de même que les autres procédu-
res, c'eft pourquoi on le renouvelle tous les
trois ans ,& il n'interrompt point la prefcrip-
tion trentenaire. Lapeyrere , lett.. P , n. 87.
C'eft aufîi une jurifprudence particulière
à ce parlement, qu'un fimple commandement
fait courir les intérêts , au lieu qu'ailleurs
il faut une demande judiciaire. V, Bretonnier
en fon recueil de quejiions , au mot intérêt,
' Itératif commandement , eft celui qui a été
précédé d'un autre commandement; c'eft or-
dinairement celui qui précède immédiate-
ment la faifîe-exécution , faifîe-réelle ou em-
prifonnement : on fait néanmoins quelque-
fois plufieurs itératifs commandemens , mais
deux commandemens fiifîifènt pour en venir
aux contraintes ^ favoir le premier qui doit
précéder de 14 heures , & Vïtéï2^.\ï comman-
dement qui fe fait lors des contraintes.
Commandement recordé , eft celui pour le-
quel l'huifTier ou fergent eft afTifîé de deux
records ou témoins qui fignent avec lui le
commandement. Cette formalité qui s'obfer-
voit autrefois dans tous les exploits , a été
abrogée par l'ordonnance de 1667 3 mais elle
C O M
a été confèrvée pour certains exploits , du
nombre defquels font les commandemens qui
précèdent une faifîe-réelle. Voye^déclaration
du zi mars l6ji ^ & tacle de notoriété du
châtelet , du 1^ mai 1699. (A)
COMMANDER, {Gramm.) v. aa. qui
a plufieurs acceptions difTérentes , qu'on peut
voir aux articles COMMANDEMENS.
Commander a la route 3 {Marine.)
c'eft donner la route , & prefcrire celle que
doivent tenir les vaifTeaux.
Dans une armée navale c'eft l'amiral qui
commande la route qu'il faut faire j dans une
efcadre c'eft le commandant j dans un vaif-
fèau de guerre c'efè le capitaine '■, dans un
vaiflèau marchand c'eft le pilote. (2)
COMMANDERIE ,. f. f. {Hifi.mod.)
efpece de bénéfice deftiné pour récompen-
fer les fervices de quelque membre d'ua
ordre militaire. Voyei CHEVALIER.
Il y a des commanderies régulières obte-
nues par l'ancienneté & par le mérite , il y
en a d'autres de grâce accordées par la vo-
lonté du grand-maître. Voye\ Comman-
de rie. [Jurifprud.)
Il y en a aufîi pour les religieux des or--
dres de S. Bernard & de S. Antoine. Les
rois de France ont converti plufieurs hôpi-
taux de lépreux en commanderies de l'ordre;
de S. Lazare. V. Lépreux ^ S.Lazare.
Je ne com.pare point les commanderies
avec les prieurés , parce que ces derniers fe
peuvent réfigner , à moins que ce ne foient
des prieurés de nomination royale , mais de
quelque nature que foit une commanderie j
elle ne fauroit être réfîgnée. Ce font donc
des biens afïeftés pour l'entretien du che-
valier & pour le fèrvice de l'ordre.
Il y a des commanderies dans l'ordre de
Malte de différentes efpeces j les unes pour
les chevaliers , les autres pour \ç^% chape-
lains , d'autres enfin pour les frères fervans»
Le nom de commandeur donné à ceux
qui pollèdent les bénéfices appelles comman-
deries , répond affez bien au nom de prœpo^
fitus , donné à ceux qui avoient infpeftion
fur les moines des lieux éloignés du monaf-
tere principal , & dont l'adminiftration étoit
appellée obedientia , parce qu'elles dépen-
doient entièrement de l'abbé qui leur avoit
donné \à.Q,ovi\m\^\ox\.\-.Q% commanderies fîm-
ples deMalte font de même plutôt des fermes
de l'ordre que des bénéfices. Ik paient une
CO M
tehte ou tribut appelle refponfion , au tréfor
commun de l'ordre. Dans l'ordre du S. Ef-
prit , les prélats qui en font revêtus font
nommés commandeurs de tordre du S. Ef-
prit , & les grands officiers font qualifiés de
commandeurs des ordres du roi , comme les
chevaliers font nommés Amplement c/ieva-
liers des ordres du roi : mais ce titre de com-
mandeur n'emporte avec foi nul bénéfice.
Henri III avoit delTein d'affigner un titre
de bénéfice ou commanderie à chaque cheva-
lier ^ mais les affaires dont il fut accablé
après l'inititution de cet ordre , & fa mort
fatale arrivée en 1 589 , empêchèrent la réuf
fite de ce deffein. Par provifion il affeda
une fomme pour chaque chevalier ou com-
mandeur , & aujourd'hui l'on taxe aufli a
quelque fomme la plupart des charges du
royaume pour le même fujct, &cesfommes
particulières fe portent chez les tréforiers du
Hiarc d'or , qui font les fonâ:ions de tréfo-
riers pour les ordres du roi. Il n'en eft pas
de même dans les ordres militaires en Efpa-
gne , où les commandeurs jouiifent réelle-
inent d'un revenu plus ou moins fort , atta-
ché aux commanderies dont le roi en qualité
dp grand- maître les a gratifiés.
Les commanderies des trois ordres d'Efpa-
gne font des conquêtes que les chevaliers de
ces ordres ont faites fur les infidelles , & ces
commanderies font différentes félon la nature
&la valeur du terrain qui fut conquis par ces
chevaliers. (G) [a)
Commanderie , (/z/r(//jr.) dans l'origine
n'étoit qu'une fimple adminiftration des re-
venus d'un bénéfice que l'on donnoitenco/7z-
mende , en dépôt.
Préfentement il y en a de deux fortes^ les
unes qu'on appelle régulières ; d'autres, qu'on
^Y>pe\\Qfécu/ieres. Les commanderies réguliè-
res font celles qui font établies dans certains
ordres religieux en faveur y pour être confé-
rées à des religieux du même ordre. Il y en
a dans l'ordre régulier & hofpitalier du S.
Efprit de Montpellier ^ ces commanderiesÇont
de vrais titres de bénéfices perpétuels & non
révocables par le grand-maître ni par les
autres fupérieurs majeurs, elles ne peuvent
être conférées en commende , c'eft-à-dire à
des fécuiiers , pas même à des cardinaux ,
mais doivent être remplies par les religieux
profès du même ordre. Arrêt du grand-con-
fdl y du 14 mai 1710, Ces bénéfices exi-
C O M ^15
gent une adminiftration perfonnelle , une
réfidence a<^uelle & un vœu particulier dans
la perfonne du pourvu , qu'on appelle le vcpu
d' hofpitalité y & qui eft le quatrième que les
religieux de cet ordre font obligés de pro-
feffer. Ceux qui font pour^'us de ces comman-
deries font obligés de faire \&^ fondions curia-
les dans leurs hôpitaux , & d'adminiftrer le
fpirituel comme le temporel : ils ne gagnent
point tous les fruits comme les autres com-
mandeurs & commendataires , mais ne pren-
nent que viclum & vejiitum , 8c appliquent lé
furplus au foulagement des pauvres.
Il y a aufli des commanderies régulières
dans l'ordre de S. Antoine de Viennois, qui.
font éleâiives , confirmatives , & ne font pas
fujettes à 'la nomination du roi. Arrêt du
confeil du ^ feptembre 1585,
Les commanderies feculieres font celles qui
fout établies en faveur de certains ordres mi-
litaires , dont quelques-uns font en même
temps réguliers & hofpitaliers , tels que celui
de S. Lazare , celui de Malte , & autres^
ces commanderies ne font point de vrais bé-
néfices , mais feulement le droit de jouir
des revenus d'un bénéfice que l'on confère
à des laïques qui font chevaliers profès du
même ordre. Il y a des commanderies de ri-
gueur que les plus anciens chevaliers obtien-
nent à leur rang ^ & d'autres de grâce , que
le grand- maître confrère. Dans l'ordre de
Malte il y a plufîeurs fortes de co/Tz/Tza/z^er/w ;
il y en a d'aiîêâées à des religieux du même
ordre , d'autres aux chapelains , d'autres aux
chevaliers , d'autres aux frères fèrvans.
Dans Xqs ordres du S. Efprit & de S. Louis ,
les grands ofîiciers appelles commandeurs ne
;le font que de nom , n'y ayant aucune com-
manderie attachée à leur dignité , mais feu-
lement des penfions. {A)
COMMANDEUR , f. m. {Kift. mod.) on
donne ce nom à celui qui a été pourvu d'une
commanderie.
Commandeur, (Comm.) nom que les
Holîandois donnent ordinairement aux chefs
des comptoirs qu'ils ont dans les Indes , en
'Perfe , & autres lieux de l'Orient où ils ont
porté leur commerce. Diâ. de Com. & T'rév,
Commandeur, (Cbw/n.) eft aufîi le nom
qu'on donne dans les îles françoifes de l'A-
mérique , à celui qui a infpeéèionfiir le détail
d'une habitation en général, ou d'une fucrerie
en particulier. V. JIabitatjon ^ Sucre.
6i4- C O M
Quelques habltans veulent que leur corn- '
mandeurfoh un blanc , d'autres le choifilTcnt
parmi les noirs.
Les fonctions du commandeur font d'être
toujours avec les nègres fans les abandonner
jamais ^ de preiFer le travail & d'avoir l'oeil
à ce qu'il foit bien fait j d'empêcher le dé-
fordre & les querelles très fréquentes , fur-
tout parmi les négreflcs ^ de vifiter ceux qui
travaillent dans les boisj d'éveiller les nègres,
de les faire affifter à la prière foir &: matin &
au catéchifme qui s'y fait, de les conduire à
la mefTe fêtes & dimanches j de voir fi leurs
maifons font propres & leurs jardins bien
entretenus ;, d'appaifer les différens qui naif-
fent dans les ménages j de faire conduire les
malades à l'infirmerie : d'empêcher les nègres
étrangers de Ce retirer dans les cafés de l'ha-
bitation ^ enfin de donner avis au maître de
tout ce qui fe pafle. Diâ. du Corn.
COMMANDITE , f. f. (Comm.) c'eft
une fociété de commerce , dans laquelle une
partie des intéreffés n'étant point dénommés
dans laraifonou fignature , n'eft engagée &
folidaire avec les autres intéreffés que jufqu'à
la fomme portée par l'aé^e de fociété. C'eft
proprement cette reftridèion qui forme la
commandite ;C2X un particulier peut faire avec
un autre une fociété générale de pertes & de
profits , fans que fon nom paroifTe , vo jeç So-
ciété jcela ne fe pratique pas ordinairement,
mais aucune loi ne le défend.
Il eft du bon ordre que cette eipece de fo-
ciété foit enrégiftrée au greffe du confulat
comme la fociété collective j tédit de 1673 ,
art. iv , le prefcrit ^ cependant l'inexécution
de cette formalité n'annullc point l'aûe en
lui-même , relativement aux affociés ou à
leurs ayans caufe. Il feroit fans doute à fou-
haiter pour la confiance publique , que toutes
les fociétés quelconques fuffent enrégiftrées^
mais le moyeu de nullité feroit trop violent
& rendroit les propriétés trop incertaines.
Cette fociété non plus que les autres , n'eft
point cenfée continuée fi elle ne l'eft par écrit.
Cette forme eft fortufitée en Italie & dans
les pays abondans en argent j c'eft commu-
nément celle dont on fe fert pour établir des
faveurs dans un pays étranger.
\]n. négociant prudent s'informe exafte-
ment des changemens qui furviennent dans
les afTociations de Ces correfpondans ^ car
il arrive fouvent qu'un riche commanditaire
C O M
retire fès fonds tout-à-coup , & qu'il eft fuivi
d'un autre qui n'eft pas en état de foutenir
les mêmes enXve^riÇes.V. le parfait négociant y
& le dicl. du Corn. Art. de M. V. D. F.
COMMANDO, {Comm.) terme origi-
nairement italien, mais ufité dans les provin-
ces de France les plus voifines de l'Italie. On
s'en fèrt dans les écritures mercantiles pour
fignifier ordre ou commande , c'eft-à-dire la
commifTion qu'un négociant donne à fon
commifîîonnàire. V, Ordre, Commande,
Commission , ^c. dicl. de Comm.
COMMANI , {Géog. mod.) petit royaume
d'Afrique , fur la côte de Guinée.
COMMASSE , f. m. ( Commerce. ) petite
monnoie qui fè fabrique , & qui a cours à
Mocha. Elle vaut environ trois fous deux
deniers , argent de France.
* COMMEAT , f. m..( HiJI. anc.) per-
mifTion à un foldat de s'abfenter de fa légion
pendant un certain temps.Elle étoit accordée
parle tribun ou fon vice- gèrent , ou par l'em-
pereur. On donnoit aufti le même nom de
comméat , commeatus ou de cataplus , aux vi-
vres de l'armée , à la flotte qui les portoit ,
fur-tout d'Egypte & d'Afrique j il défignoit
aufîi une compagnie de voyageurs.
COMMELINA , ( Hiji. nat. bot. ) genre
de plante dont le nom a été dérivé de celui
de Jean Commelin , fénateur d'Amfterdam ,
& de Gafpar Commelin médecin de la même
ville. La fleur des plantes de ce genre eft com-
pofée de deux pétales fitués du même côte , '
& pofés fur un calice à quatre feuilles ^ il s'é-
lève du milieu de ce calice un piftil qui de-
vient dans la fiiite un fruit membraneux à
trois coques , ou divifé en trois loges qui
renferment chacune une fèmence ronde. On
peut ajouter aux caraéteres de ce genre , que
plufieurs fleurs font rafiémblées dans un
même endroit en forme de conque. Plumier,
nova plant, amer, gêner. K. PlanTE. (/)
COMMÉMORAISON , eft le nom d'une
fête que nous appelions le jour des morts , &
qui fe célèbre le 2 novembre en mémoire
de tous les fidèles trcpaftes. Elle futinftituée
dans le onzième fiecle par S. Odilon abbé de
Ciuny. V. Fête. (G)
COMMEMORATIF (figne), adj. {Méd.)
Les fignes cow.mémoratifs ou anamneftiques
nous apprennent ce qui s'eft paffé avant la
maladie,, & fe tirent de tout ce qui l'a pré-
1 cédée : favoir de la manière de vivre du ma-
c o M ;
lade , du pays qu'il a habité , de la conftitu-
tiou de Tes père & mère , des maladies auK-
qiielles il a été iujet , ou de celles qu'il a con-
traftées ^ &: s'il s'agit d'une plaie , de la pofi-
tion du bleHé au temps de fa bleiture , de la
Situation de la perfonne ou de la chofe qui
l'a bleffée , de la grolTeur & de la figure de
rinilruraent qui a fait la plaie , qu'on a foin
de comparer avec la plaie méuie , &c.
Ces lignes conduifent a une connoiflance
plus fûre de la maladie , de {qs caufes , de l'if-
fue qu'elle peut avoir , & nous indiquent
conjointement avec les diagnoftics à em-
ployer les remèdes convenables. Les lignes
£ommémoratifs en iriédecine reviennent à ce
qu'on nomme indices en matière de droit ^
mais avec cette différence qu'ils ne peuvent
jamais que porter la lum.iere dans l'efprit du
médecin , bc que les indices peuvent cruelle-
ment égarer le juge : témoin en France la
trifte affaire du ïieur d'Anglade & de fa
femme ^ témoin celle du pauvre Lebrun.
Art. de M. U chevalier DE Javcourt.
COMMÉMORATION, f. f. {Hijfoire
eccl, & théol. ) fouvenir que l'on a de quel-
qu'un , ce qu'on fait en l'honneur de fa mé-
moire. Voyei^ Monument.
C'eft une coutume parmi les catholiques
romains , que ceux qui meurent font quel-
quefois des legs à l'églifè , à la charge de
dire tant de meffes , "& de faire commémo-
ration d'eux dans les prières. Voye^ Obit ,
Anniversaire.
Commémoration fe dit encore particulière-
ment de la mémoire qu'on fait dans la récita-
tion du bréviaire , d'un faiut ou quelquefois
de la férié , par une antienne , un verfet , une
oraifon aux premières vêpres , aux laudes , &
aux fécondes vêpres ^ 8c par une colleâ:c , &
une poft-communion à la meffe. Koye^ Bré-
viaire, Férie , Antienne , Verset , ê'c.
COMMENCEMENT, (Beaux-Arts.)
Ariftote a fait la rei»arque qu'en tout objet
qui forme un beau tout , il y a un commence-
ment & une fin : le commencement , ielon lui ,
eft ce qui dans l'objet précède tout le refte ,
& que rien ne doit précéder ^ ainfi le com-
mencement des événemens qui forment l'ac-
tion de l'Iliade, c'eft la dilpute entre Achille
& Agamemnon ^ car tous les événemens qui
vont fuivre , font une fuite de cette difpute :
tout ce qui l'a précédé , au contraire , n'ap-
partient point à l'adHon : elle eft parfaite -
C O M 6i^
ment intelligible, quand on ignoreroit tout
ce qui s'eft paffé avant ce commencement.
C'eft donc le commencement qui fert à don-
ner aux chofes une liaifon , & qui rend rai-
fon de leur exiftence. Un ouvrage de goût ,
pour être parfait , doit avoir un commence-
me/2/ bien marqué. Si Homère nous eût chanté
les événemens de l'Iliade , fans nousinftruire
du fujet qui avoit engagé Achille à quitter
l'armée ù. à s'irriter contre les Atrides , une
partie principale de l'aftion nous manque -
roit^ mais cq commencement pofé nous expli-
que tout le refte : nous avons une notion
complète du fujet que le poète a voulu chan-
ter j nous en voyons le commencement , le
progrès & la fin , & ce coup d'œil nous fa-
tisfait.
Il réfult-e de là que le poète épique qui met
en récit , ou le dramatique , qui met en ac-
tion un événement complet, doit être atten-
tif à mettre diftinâiement fous nos yeux le
commencement de l'aâiion ^ mais la manière
de le faire n'eft pas indifférente , pour que
l'effet ioit le meilleur poffible , la chofe mé-
rite d'être développée avec quelque détail.
Le commencement étant ce qu'il y a de pre-
mier dans un ftijet , l'adion ne doit pas dé-
buter par des choies qui l'ont précédé , ce
fèroit une abondance vicieufè, l'imagination
fèroit occupée mal-à-propos par des hors-
d'ceuvres : c'eft une faute dans laquelle Euri-
pide eft tombé quelquefois. Jlécube , dans la
tragédie qui porte ion nom , ouvre la icene
par des lamentations auxquelles le ipeâiateur
ne comprend rien , parce qu'il ignore encore
quel eft précifément le malheur qui menace
cette reine , & qui doit faire le iùjet de la
pièce. lL.Qvént3h\s,commencem€ntdQ. l'aftion,
c'eft la réfblution que les Grecs ont formée
d'immoler la fille de la reine fur le tombeay
d'Achille. C'étoit par-là que le poète devoit
débuter : toutes les plaintes d'Hécube fur iès
malheurs précédens ne font rien au iiijet.
On remarque le même défaut dans l'Iphigé-
nie en Tauride : la princeffe paroit fur le
théâtre avant d'avoir appris l'arrivée de Py-
lade & d'Orefte , & cependant l'adion ne
commence que par l'arrivée de ces deux prin-
ces. De tels débuts font réellement détachés
de l'aftion &détruifent l'unité de l'enièmble.
Un autre défaut à éviter dans le poème
épique 8c dans le dramatique , c'eft de faire
remonter le commencement de l'action trc^
€ië CO M
haut. Il feroit ridicule 5 dit Horace, départir
de l'œuf d'où Hélène étoit fortie pour racon-
ter la guerre de Troie. Ce n'eft pas là la caufe
immédiate de cette guerre : le poète doit fè
hâter de venir au fait , & débuter par ce qui
• eft le commencement prochain de l'action ^ de
longs détours ennuient le lecteur judicieux ,
& rendent l'ouvrage imparfait.
Tous les événemens de l'univers tiennent
fans doute les uns aux autres ; & dans la ri-
gueur métaphyfîque , aucun événement dé-
taché de l'hilloire générale , ne forme un tout
abfolu ouifoié; mais c'eft à l'art du poète à
arranger fon plan de manière que l'aéHon
paroiite être un tout complet ^ pour cet effet ,
il doit choifir un commencement qui contente
notre curiofité , enforte que nous n'ayons
rien à demander au-delà. Quand le poète fe
défie de la fécondité de fbn imagination , il
prend l'aâion de plus loin , afin que la mul-
titude des événemens fijpplée au défaut de
l'invention. Peut-être Homère auroit com-
mencé Y Enéide par l'arrivée de fon héros en
Italie. Virgile a cru avoir befoin de placer le
commencement plus haut. Un poète moins
fertile en relfources que Klopftock , n'eût
ofé commencer la Mejfiade par la dernière
entrée du Mefîie dans Jérufalem.
Le poète a donc la liberté de placer le
commencement plus ou moins loin du dé-
nouement de l'action : mais ce commencement
doit toujours être bien marqué, complet, &
indiffolublement lié à l'aition ^ plus il fera
proche de la fin, plus l'aftion eft concentrée,
& mieux on en découvre l'cnfemble'd'unfeul
coupd'œil. Si au contraire , le commencement
eft fort éloigné de la fin , l'ouvrage en acquiert
trop d'étendue , ou bien il fe forme des vui-
des dans l'action , elle languit , & l'effet
qu'elle devoit produire , perd de fa vivacité.
• Le drame exige nécefTairement que le
commencement ne foit pas éloigné de la fin de.
l'aftion. Si le poète manque à cette règle , il
eft réduit ou à ne donner que le fquelettc
d'une action décharnée & fans fuc , ou à
placer la meilleure partie des événemens der-
rière la fcene ^ dans l'un & l'autre cas , il ne
lui eft pas poiîîble de bien développer le ca-
raétere de fès perfonnages. Les anciens ont
été pour l'ordinaire très-exadts à fuivre ce
précepte : delà vient que les caractères font
îî bien exprimés dans leurs pièces dramati-
ques. Nlus pouvons aufli les propofer aux
C O M
dramatiques modernes , comme des modè-
les dans l'art de marquer avec précifion le
commencement delà pièce. Lapremiere icene
chez les anciens , expofe ordinairement avec
tant de netteté le commencement del'adtion,
que l'on eft inllruit dès l'entrée du fujet qui
fera l'aétion , & du carad:ere des principaux
aéteurs : c'eft ce qui manque fouvent aux
pièces modernes \ on eft long-temps à fa-
voir fur quoi l'action doit précifément rou-
ler. Pour fentir cette diftérence , on n'a qu'à
comparer le début de Y(Ëdipe de Sophocle ,
avec le commencement de VCEdipe de M. de
Voltaire.
En mufique , chaque pièce doit commen-
cer de manière que foreille fente que rien
n'a dû précéder : l'harmonie doit être com-
plète , & la marche fans interruption : au-
tant qu'il eft poffible , il faut que la première
période annonce déjà le caractère de toute
la pièce. Il y a néanmoins des cas où cette
règle fouffre des exceptions : quand par
exemple une ariette fuccede à un récitatif ,
il peut arriver très- fouvent que le même
fentiment continue j & alors l'ariette n'a
point de commencement décidé.
La danfè exige de même un commence-
ment fixe. Il n'eft pas agréable de penfèr
qu'on ne voit que la fuite d'un moux'ement
qui a dû précéder. Nos ballets pèchent fou-
vent contre cette règle : les danfèurs fautent
hors des couliffes de manière à nous faire
croire que les pas qu'ils vont faire , tiennent
à une aâ:ion commencée hors de la portée
de notre vue.
En général , tout ouvrage de goût doit
avoir un commencement qui prévienne en nous
l'inquiétude de favoir ce qui a pu précéder
ce que nous voyons ou ce que nous enten-
dons. Lorfque cette queftiou s'élève naturel-
lement dans notre e^^rit , c'eft une preuve
évidente qu'on ne nous a pas préfenté un tout ,
mais feulement le fragment d'un' tout.
Hermogene , à^nsYowTfûité de t invention
( liv. II , càap. I ) obfèrve , à la vérité , qu'il
y a de la groffiéreté & de la mal-adreffe d'en-
trer de plein faut en matière dans une pièce
d'éloquence : mais il faut remarquer que
dans un difcours d'apparat , où l'on va trai-
ter un fujet avec quelque étendue , ce n'eft
pas l'exorde , mais la propofition, qui conf
titue levéritahlecommencement de l'ouvrage.
Dans les productions des arts du defîin
COM
Sf de la fciîîpture , où l'ouvrage entier fe prë-
fente à la fois, il fembîe qu'on n'y fauroit
diftinguer ni commencement ni fin. Il faut
cependant de toute nécefïité y concevoir
* quelque chofe d'analogue à ces deux notions,
pour que ces ouvrages foient des touts ifoiés
& entièrement déterminés. ÇCet article efl
tiré Je La théorie gcnéraîe des b^aux ans di
M.SULZER.)
COMMENCER un Cheval, {Maneg.)
c'eft lui apprendre fes premières leçons de
, manège. Pourco/n/7/e/zçeAuncheval fougueux
il faut lui mettre un caveçon Oc le mettre au-
tour du pilier. V. Caveçon, Pilier. On
attache le cheval avec une grande corde ou
longe qu'on tient autour du pilier, pour le
dénouer , le dégourdir , &c lui affouplir le
corps. V. Assouplir. Il faut le troter à
r«ntour fans perfonne deiTus , pour lui ap-
prendre à fuir la chambrière , & à ne pas ga-
lopper à faux ni défuni. y. CHAMBRIE-
RE, Galopper. On peut le monter enfuite
autour du pilier & le faire marcher en avant,
fans qu'il puifle fe cabrer ni s'arrêter pour
faire des contretemps; car la peur de la cham-
brière préviendra tous lesdéfordres, & l'em-
pêchera de s'arrêter. Dans les manèges qui
n'ont point de pilier, un homme tientlebout
delà longe , & fe met au milieu du terrain.
On d:t cheval commencé^ acheminé^ achevé^
pour marquer un cheval qu'on commence à
dreffer, celui quieft déjà monté, rompu &f
dégourdi , & celui quieftdreflé ôc confirmé
dans le manège. ÇV)
COMMENSAL, adj. c'eft ainfi qu'on
défigne ceux des officiers du roi qui font de
Service, & qui ont bouche en cour pendant
ce temps.
COMMENSAUX df. la Maison pu
Roi,delaReine,desEnfans&cPetits-
ENFANS DE FRANCE, {Jurifpr.) & autres
pi inces qui ont une maifen couchée fur l'état
du roi , jouiiTent de plufieurs privilèges.
i*^. Par l'édit de juillet 1653 , leurs char-
ges ont été exemptées de tous privilèges &:
hypothèques, &;de tous partages & rapports
dans les fucceffions , ce qui a été confiimé
par éditdu mois de janvier 1678, & par deux
arrêts duconféil du 13 août 1665 & 1706I0-
bre 1679, ^"^ déclarent en outre que les
gages & émolumens de ces charges ne font
pas faifilfables.
Tome niL
COM 61^
2*. Cqs officiers , &: leurs veuves durant
leur viduité, font exempts de toutes contri-
butions pour vivres, munitions, Recondui-
tes de gens de gverre; tailles, aides, gros
quatrième, huitième, dixième, ôcappétif-
fement de vin ; de guet, gardes àts portes &
murailles , ponts, paffages, travers, détroits,
fournitures, & contributions; d'étapes, loge-
ment de gens de guerre; charrois & chevaux
d'artillerie, ban & arriere-ban, fouchet,
traites foraines , péages, paffages, & de tou-
tes chofes de leur crû; francs- fiefs, & atitres
fubfides, contributions & fubventions quel-
conques.
Mais par un arrêt de la cour des aides du
10 mai 1607, leur exemption a été reftreinte
aux impofitions qui exifloient lors de la con-
ceflion; on les a déclarés fujets aux répara-
tions des chemins, fortifications des villes,
ponts, chauffées, Vautres ouvrages publics;
au droit d'appétiffement de pinte , traites &c
impofitions foraines pour marchandifes qui
ne font de leur crû , & à toutes criées &
lev^s de deniers auxquelles leurs prédécef-
feun ont contribué.
3^. Ils font exempts de tutelle.
4*^. Ils peuvent faire valoir par leurs mains
une ferme de deux charrues , fans payer de
taille.
5^. Pour jouir des exemptions de taille,
il faut que les commenfaux aient au moins
60 liv. de gages, & qu'ils fervent aduelle-
ment ; néanmoins les officiers des fept offices
de la maifon du roi en jouiflent , quoique
leurs gages foient moindres de 60 Hv. Ceux
qui n'ont point de dignité attachée à leur
office , peuvent même faire trafic de mar-
chandife , mais non pas tenir ferme d'autrui.
6^. Les commenfaux ne peuvent être dif-
penfés du fervice que pour caule de mala-
die certifiée par les médecins & par le juge
&: procureur du roi de leur demeure, par
a(5te figné du greffier, qui fera fignifié aux
habitans du litu de leur domicile , à l'iffue
de la grand'meffe un jour de fête ou diman-
che, ôc à leur procureur fyndic,& encore au
fubftitut du procureur général en l'éleêlion.
7°. Ceux qui, au bout de vingt-cinq ans
de fervice, obtiennent des lettres de vété-.
rance duem.ent regiftrées , continuent à
jouir de tous les privilèges.
8°. Les commenfaux titulaires ou vétérans
ne jouiffent de l'exemption des tailles qu'au
I i i i •
éi8 C'O M
nombre de huit , dans les paroiïïes où le
principal de la taille eft de 900 liv. &; au
deffus , & quatre feulement dans les lieux
où la taille eft moindre. Ceux qui font établis
les premiers jouifTent des privilèges; les fur-
numéraires en jouiffent à leur tour; les veu-
ves ne font pas comprifes dans ce nombre
de huit ou quatre.
9°. Faute de payer leur capitation , ils
font déchus de tous leurs privilèges.
10°. Ceux qui ont des bénéfices font dif-
penfés d'y réfider pendant qu'ils fervent au-
près du prince.
1 1 °.Les commenfaux ont la préféance dans
les cérémonies fur tous les officiers même
royaux , & autres perf bnnes dont l'état efl:
inférieur à celui des commenfaux : par exem-
ple, les écuyers ordinaires du roiontrang
après les confëillers des bailliages royaux, &
avant les officiers des élevions & greniers à
fel, & autres inférieurs en ordre. V. le code
des privilèges ; le mémorial alphabétique des
tailles, aux mots Commenfaux ; le diclionn.
des arrêts , au même article; le traité des ma-
tières bénéfic. de Fuet , liv. ///, ch. iv. (A)
COMMENSAUX^^J évêques y {Jurifpr.)
fuivant la difpofition du droit canonique,
font exemptsde la réfîdence à leurs bénéfices,
& gagnent les gros fruits; mais ce privilège
ne s'étend qu'à deux chanoines , foit de la
cathédrale ou d'une collégiale. Cap. adaud.
tS , X' de cleric. non refîd. Fuet , des mat.
bénéf. liv. III, ch. iv. (A)
COMMENSURABLE, adj. Les quanti-
tés commenfurahleSytn mathémat. font celles
qui ont quelque partie aliquote commune,
ou qui peuvent être mefurées par quelque
mefure commune fans laiflTer aucun refte
dans l'une ni dans l'autre. V, MESURE &
Incommensurable.
Ainfi unpié & un autre font commenfura-
hles, parce qu'il y a une troifieme quantité qui
peut les mefurerfun & l'autre exa<ftement ;
favoir un pouce , lequel pris douze fois fait
un pié , -& pris quarante-quatre fois donne
une aune. V. Quantité.
Les quantités commenfUrables font l'une à
l'autre comme l'unité eft à un nombre entier
rationel, ou comme un nombre entier ratio-
nel-eft à un autre entier rationeh En effet ,
puifque les quantités commenfurables ont
une partie commune qui les mefure exafte-
menr, elles contiennent donc exaâement
C O M
I cette partie: l'une, un certain nombre de f.(<\%%
l'autre , un autre nombre de fois : donc elles
font entre elles comme ces deux nombres. Il
en eft autrement dans lesincommenfurables.
V. Incommensurable, Nombre, Ra-
tionel.
Les nombres commenfurables font ceux
qui ont quelque autre nombre qui les me-
fure , ou qui les divife fans aucun refte. V,
Nombre.
Ainfi 6 &8fontrun par rapport à l'autre,'
des nombres commenfurables , parce que 2;
les divife.
Commenfurable en puiftance. On dit que?
des lignes droites font commenfurables en
puiffance , quand leurs quarrés font mefu-
rés exa(5lement par un même efpace ou une
même furface; ou , ce qui revient au même,
quand les quarrés de ces lignes ont entr'eux
un rapport de nombre à nombre. F. LiGNE
6- Puissance.
Les nombres fourds commenfurables, font
ceux , qui étant réduits à leurs plus petits
ternies, fontentr'e\ix comme une quantité
rationelleeft à une autre quantité rationelle.
f^. Sourd. Ainfi 3 / 2 & 2 v^ 2 font des
nombres fourds commenfurables, parce qu'ils
font entr'eux comme 332.
Les nombres commenfurables font propre-
ment les feuls & vrais nombres. En effet tout
nombre enferme l'idée d'un rapport, voycT^^
Nombre; & tout rapport réel entre deux
quantitésfuppofe une partie a'iquotequiieur
foit commune ; c'eft ce qui fera plus détaillé
àl'ar/.lNCOMMENSURABLE.v'in'eftpoint
un nombre proprement dit, c'eft une quan-^
tité qui n'exifte point, & qu'il eftimpoffible
de trouver. Les fraftions même ne font des
nombres commenfurables, que parce que ces
fraélionsrepréféritent proprement des nom-
bres entiers. En effet qu'eft-ce quecette frac-
tion \ } c'eft trois fois le quart d'un tout , &
ce quart eft ici pris pour i'unité : il eft vrai
que ce quart lui-même eft partie d'une autre
unitédans laquelle il eft contenu quatre fois.
Mais cela n'empêche pas ce quart d'être
regardé comme une féconde unité dans la
fradion \ ; cela eft fi vrai , qu'on en trouve
I la preuve dans la définition même des frac-
! tions; le dénominateur, dit-on, compte le
i nombre des parties dans lefquels le tout eft-
I divife, & le numérateur compte combien oti
prend de ces parties j ou ce qui eft la même
C O M
chofe , combien de Fois on en prend une.
Cette partie eft donc ici une véritable unité.
Après cela , on ne doit pas être furpris que
pour comparer entr'elles les fraftions , on
change leur rapport en celui de nombres en-
tiers co/nz/z^/z/'^^^^/e^. Par exemple,pour avoir
le rapport de ^ à | , on trouve par les règles
ordinaires que ce rapport eft celui de 9 à 8 :
cela eft évident. Qu'eft-ce que ^ ? c'eft la
même chofe que tt , ou 8 fois le douzième de
l'unité. Qu'eft-ce que \ ? c'eft la même chofe
que y'ï ou 8 fois le douzième de l'unité : donc
ks deux fractions comparées à la même unité
(favoir ^), la contiennent9 &8fois; donc
elles font entr'elles comme 9 à 8 , c'eft-à-
dire que la partie aliquote commune qui me-
fure, par exemple, lesl & les| d'un pié,eft
la douzième partie, du pié, & que cette dou-
zième partie eft contenue 9 fois dans la pre-
mière & 8 dans la féconde.
Delà on peut conclure que non-feulement
les nombres commenJ'urabUs font proprement
les feuls & vrais nombres, mais que les nom-
bres entiers font proprement les feuls vrais
nombres commenfurabUs , puifque tous les
nombres font proprement des nombres en-
tiers, y. Nombre, Fraction, &c. ÇO)
* COMMENTAIRE , f. m. (Hift. anc.J
livret fur lequel on jetoit tout ce qu'on
craignoit d'oublier. On appelloit aulîi de ce
nom les regiftres des commcntarienfcs. Voy.
Comment ARiENSis.
* Commentaire , (Lïttlr.) éclaircifte-
mentfur les endroits obfcurs d'un auteur.
On donne encore le même nom à des
ouvrages hiftoriquesoù les faits font rapportés
avec rapidité , & qui font écrits par ceux qui
ont eu le plus de part à ce qu'on y raconte.
* COMMENTARIENSISJHift. anc.)
fecretaire de l'empereur chargé d infcrire fur
un regiftre tous les noms de ceux qui occu-
poient quelque dignité dans l'empire. On
donnoit le même nom à celui qui tenoit le
journal des audiences; à celui qui notoit l'or-
dre des gardes montées & defcendues, & la
diftribution des vivres ; aux concierges des
prifons , &c.
* COMMENTATEURS , f. m. pi. gens
très-utiles dans la république des lettres , s'ils
y faifoient bien leur métier, qui eft d'expli-
quer les endroits obfcurs des auteurs anciens,
& de ne pas obfcurcir les endroits clairs par
yn fatras.de verbiage.
C O M 619
COMMEQUIERS , (Giog. rroJ.) petit
ville de France dans le Poitou, dans les Sables
d'Olonne.
COMMERÇANT , f m. celui qui com-
merce, qui négocie, qui trafique. Voyei^
Commerce.
COMMERCE, f. m. On entend parce
mot , dans le fens général , une commuriica"
lion réciproque. Il s'applique plus particuliè-
rement à la communication que les hommes
fe font entr'eux des produdions de leurs ter-
res & de leur induftrie.
La providence infinie , dont la nature eft
l'ouvrage , a voulu , par la variété qu'elle y
répand , mettre les hommes dans la dépen-
dance les uns des autres : l'Etre fuprême en
a formé les liens, afin de porter les peuples à
conferver la paix entr'eux & à s'aimer , &
afin de réunir le tribut de leurs louanges, en
leur manifeftant fon amour & fa grandeur
par laconnoiftance des merveilles dont il a
rempli l'univers. C'eft ainfi que les vues &
les pafllons humaines rentrent dans l'ordre
inaltérable des décrets éternels.
Cette dépendance réciproque des hommes,'
par la variété des denrées qu'ils peuvent fe
fournir, s'étend fur des befoins réels ou fur
des befoins d'opinion.
Les denrées d'un pays en général, font les
produ(5lions naturelles de fes terres , de (qs
rivières , de fes mers Se de fon induftrie.
Les produirions de la terre, telles que nous
les recevons des mains de la nature , appar-
tiennent à l'agriculture. V. Agriculture.
Les produ^ions de l'induftrie fe varient à
l'infini : mais on peut les ranger fous deux
claftes.
Lorfque rinduftrie s'applique à perfection-
ner les produirions de la terre , ou à changer
leur forme, elle s'appelle manufaclun, 1^,
Manufacture.
Lesmatieres qui fervent aux manufa^ures
s'appellent madères premières. V. MATIE-
RES PREMIERES.
Lorfque findurtrie crée de fon propre
fonds , fans autre matière que l'étude de la
nature , elle appartient aux arts libéraux,
V. Art.
Les productions des rivières ou des mers
appartiennent à la pêche. V. PÈCHE.
La nourriture &Ie vêtement font nos feuls
befoins réels : l'idée de la commodité n'eft
dans les hommes qu'une fuite de ce premier
liii 2
620
cou
fentiment , comme la luxe à Ton tour eft une
fuite de la comparaifon des commodités
Cuperflues dont jouiiTent quelques particuliers.
Le commerce doit ibn origine à ces trois
fortes de befoins ou de nécçiîités que les
hommes fe font impofées: l'indurtrie en efl:
le fruit & le foutien tout à la fois : chaque
chofequi peut être communiquée à un hom-
me par unaurre pour fon utilité ou pour Ton
agrément, ^ft la matière du commerce; il eft
iufte de donner un équivalent de ce que l'on
reçoit. Telle eft l'eiTence du commerce^ qui
confifte dans un échange ; fon objet général
cft d'établir l'abondance des matières nécef-
faires ou commodes ; enfin fon effet eft de
procurer à ceux qu'il occupe les moyens de
îatisfaire leurs befbins.
La communication générale entre les hom-
mes répandus fur la terre , fuppofe l'art de
traverfer les m.ers qui les féparent , ou la na-
V vigation : elle fait un nouveau genre d'in-
duftrie & d'occupation entre les hom.mes.
F". Navigation.
Les hommes étant convenus que l'or &
l'argent feroient le figne des marchandifes,
& depuis ayant invenré une repréfentation
des métaux mêmes, ces métaux devinrent
Hiarchandife ; le commem qui s'en fait eft
appelié commerce d'argent ou du change. V.
Change.
Les peuples intelligens qui n'ont pas trouvé
dans leurs terres de quoi fuppléer aux trois
cfpeces de befoins , ontacquis des terres dans
les climats prop-es aux denrées qui leur man-
quoient ; ils y ont envoyé une partie de leurs
hommes pour les cultiver, en leur impofant la
loi deconfommerles productions du pays de
la domination. Ces étabiiffemens font appel-
lés colonies. Voye{^ CoLONlE.
Ainfi l'agriculture, les manufa^ures, les
arts libéraux , la pèche, la navigation, les
colonies , & le change , forment fept bran-
ches du commc'Ci-, le produit de chacune
ji'eft point égal , mais tous les fruits en font
précieux.
Lorfque le commerce eftco.nfidéré par rap-
port à un corps pohtique, fon opération con-
iîfte dans la circulation inférieure des den-
rées du pays ou des colonks , l'exportation
«le leur fuperflu , & l'importation des denrées
étrangères , foit pour les confommer , foit
pour les réexporter.
Lerfque le commerce ejdcoBÛdéfé ccmïce
C O M
roccupatlon d'im citoyen dans un cofps polî'^t
tique, fon opération confifte dans l'achat ,
la vente, ou l'échange àe^ marchandifes
dont d'autres hommes ont befoin , dans le
dedein d'y faire un profit.
Nous examinerons le commerce fous ces
deux points de vue particuliers-, mais aupa-
ravant il eft bon de connoître comment il
s'eft érabli dans le monde , & les diverfes
révolutions qu'il a effuyées.
D'après l'idée générale que nous venons
d'en donner, il eft confiant qu'il a dû exif-
ter dèsquela terre a eu des habitans; fa pre-
mière époque aétéle partage des différentes
occupations entr'eux.
Caïn cultivoit la terre , Abel gardoit les
troupeaux; depuis Tubalca'in donna des for-
mes au fer & à l'airain ; ces divers arts fup-
pofent des échanges.
Dans les premiers temps ces échanges fe
firent en nature , c'eft-à-dire que telle quan-
tité d'une denrée équivaloir à telle quantité
d'une autre denrée ; tousles homm.es étoient
égaux, & chacun par fon travail fex>rocuroit
l'équivalent des fecours qu'il attenooit d 'au-
trui. Mais dans ces années d'innocence & de
paix , on fongeoit moins à évaluer la matière
des échanges, qu'à s'en aider réciproquement.
Avant & après le déluge les échanges
durent fe multiplier avec la population ; alors
l'abondance ou la rareté de certaines produc-
tions , foit de l'art , foit de la nature , en
augmenta ou en diminua l'équivalent ;
l'échange en nature devint enibarrafîanr.
L'inconvénient s'accrut encore avec le corn-
merce^ c'eft-à-dire lorfque la formation des fo-
ciétés eut diftingué les propriétés , & apporté
des modifications à l'égalité ab'oluequi rég-
noit entre les hommes. La fuh^ivifion inégale
des propriétés par le partage des enfans, les
différences dans le terroir, dans les forces &
dansl'induftrie, occafionerent unfuperfiude
befoin chez les uns deplusquechezles autres:
ce fupeiftudurêtre payé par le travail de ceux
quienavoient befoin, ou par de nouvelles
commodités inventées par l'art; fon ufage
fut borné cependant tant que les hommes
fe contentèrent de ce qui étoit jimple.
Sujets à l'injuftice, ils avoient eu befoin de
i^iflateurs : la confiance établit des juges,
le refpeélles diftingua , & bientôt la crainte
les fépara en quelque façon de leurs fembla-
bkï. L'appareil & la pompe furent un des;
C O M
apanages de ces hommespuiiïans ; leschofes
rares furent deftinée*; à leur ufa^ie, & le
luxe fut connu; il devint Tobjet de l'ambition
"des inférieurs , parce que chacun aime à fe
diftinguer. La cupidité anima Tinduftrie : pour
fe procurer quelques fuperfluités, on en ima-
gina de nouvelles, on parcourut la terre pour
en découvrir: l'extrême inégalité qui fe trou-
voit: entre les hommes pafTa jufque dans leurs
befoins.
Les échanges en nature devinrent réelle-
ment impoiîibles : l'on convint de donner
aux marchandifes une mefure commune.
L'or^ l'argent, & le cuivre furent choifis pour
les repréfenter. Alors il y eut deux fortes de
richelîes ; les ricbeffes naturelles, c'eft-à-dlre
les produftions de l'agriculture &: de l'in-
duftrie ; les richeffes de convention ou les
métaux.
Ce changement n'altéra point la nature du
commerce ^c[\.\\ confifta toujours dans l'échan-
ge d'une denrée , foit pour une autre , foit
pour des métaux. On peut le regarder com-
me une féconde époque du commerce.
L'Afie qui avoir été le berceau du genre
humain , fe vit peup'ée bien avant que les
autres parties du monde fuffent connues ; elle
futaufïîle premier théatredu commerce^ des
grands empires, & d'un luxe dont le nôtre
eft effrayé.
Les vaftes conquêtes des Any riens dans ces
riches contrées , le luxe de leurs rois , Se les
merveilles de Babylone , nous font garans
d'une grande perfedion dans les arts, & par
conféquent d'un grand commerce : mais il
paroît qu'il étoit borné à l'intérieur de ces
états & à leurs produclions.
Les Phéniciens habitans d'une petite con-
trée de la Syrie, oferent les premiers franchir
la barrière que les mers oppofoient à leur
cupidité, & s'approprier les denrées de tous
les peuples , afin d'acquérir ce qui en faifoit
la mefure.
Les richefTes de l'Orienr, de PAfrique, &
de l'Europe, feraiïemblerentàTyr&àSydon,
d'où leurs vaifTeaux répandoient dans chaque
contrée du monde le fupcrflu des autres. Ce
commerce^ dont les Phéniciens n'étcient en
quelque façon que les commiflîonnaires, puif-
qu'ils n'y fourniffoient que très-peu de pro-
duftions de leur cru , doit être diftingué de
celui '\qs nations qui trafiquent de leurs pro-
pres denrées \ ainli il a été appelle commtrcc
COU 6ii
d'économie', c'a été celui de prefque tous les
anciens navigateurs.
Les Phéniciens s'ouvrirent parles ports
d'Elath & d'Efiongaber fur la mer Rouge , le
commerce d.ts côtes orientales de l'Afrique,
abondantes en or, &: celui de l'Arabie (1
renommée par fes parfums. Leur colonie de
Tyle , dans un île du golfe Per{k|ue, nous
indique qu'ils avoient étendu leur trafic fur
ces cotes.
Par la navigation de la Méditerranée ils
établirent des colonies (voy.CoLONiE) dans
toutes ces îles , en Grèce , le long des côtes
de l'Afrique , en Efpagne.
La découverte de ce dernier pays fut la
principale fource de leurs richefles; outre les
cotons, les laines, les fruits, le fer & le plomb
qu'ils en retiroient, les mines d'or &: d'argent
de l'Andaloufie les rendoient maîtres du prix
8sC de la préférence des denrées de tous les
pays.
Ils pénétrèrent dans l'Océan le long des
côtes, & allèrent chercher fétain dans les
îles Cafïiterides, aujourd'hui connues fous
le nom delà Grande-Bretagne : ils remontè-
rent même jufqu'à Thule, que Ton croit
communément être l'Irlande,
Tyr effaça par (di fplendeur ik par fon com-
merce toutes les autres villas des Phénicien?.
Enorgueillie de fa longue profpérité , elle ofa
faliguer contre ié^ anciens maîrres : toutes
les forces de Nabuchodonofor roi deB.'.by-
lone fuffirent à peine à la foumettre, après
un fiege de treize ans. Le vairiqueur ne détrui-
fir que fe» murailles & {q% édifices ; les effets
les plus précieux avoient été tranfportés dans
une île à tme demi-lieue de la côte. Les
Tyriens y fondèrent une nouvelle ville , à
laquelle ra<5i:ivité du fow/Tî^rcf donna bientôt
plus de réputation que l'ancienne n'en
avoit eu.
Carthage, colonie desTyriens,fui vit-à-peu
près le même plan, & s'étendit le long de»
côtes occidentales de l'Af-ique. Pour accroî-
tre même fon commerce général, &: n€ le
partager qu'avec fa métropole, elle devint
conquérante.
La Grèce cependant par fon indùf^rie &
fa population , vint à figurer parmi les puii-
fances rl'invafion des Perfes lui apprit à con-
noître fesYorces & fes avsntag-es; fa marine
la rendit redoutable à fon tour aux maîtres
de l'Afie ; mais remplie de djvilîons ou de
^li
C O M
projets de gloire, elle ne fongea point à éten-
dre Ton commerce.
Celui d'Athènes , la plus puiflfante des villes
maritimes de la Grèce, fe bornoit preCqu'à
fa iiibfiftance qu'elle tiroit delà Grèce même
ôc du Pont-Euxin. Corinthe , par fa fitua-
tion, fut l'entrepôt des marchandifes deTAiie
oc de l'Italie; mais fes marchands ne tentè-
rent aucune navigation éloignée : elle s'en-
richit cependant par l'indifférence des autres
Grecs pour le commerce , & par les commo-
dités qu elle lui offroit , beaucoup plus que
par fon induftrie.
Les habitans de Phocée , colonie d'Athè-
nes , chaffés de leur pays , fondèrent Mar-
feille lur les côtes méridionales des Gaules.
Cette nouvelle république, forcée par la fté-
rilité de fon territoire de s'adonner à la pêche
&; au commerce, y réufîit ; elle donna même
falarme à Carthage , dont elle repoulTa
yigoureufementles attaques.
. Alexandre parut; il aima mieux être le
chef des Grecs que leur maître : à leur tête il
fonda un nouvel empire fur la ruine de celui
des Perfes. Les fuites de fa conquête forment
la troifieme époque du commmerce.
Quatre grands événemens contribuèrent
à la révolution qu'éprouva le commerce fous
le règne de ce pri:.ce.
Il détruiiit la ville de Tyr, & la navigation
de la Syrie fut anéantie avec elle. ,
. L'Egypte qui jufqu'alors ennemie des
étrangers s'étoit fuffi à e'ie-même, commu-
niqua avec les autres peuples après fa con-
quête.
La découverte des Indes & celle de la mer
qui eft au midi de ce pays en ouvrirent le
commerce.
Alexandrie bâtie à l'entrée de l'Egypte ,
devint la clé An commerce àts Inàes , & le
centre de celui de l'Occident.
. Après la mort d'Alexandre, \qs Ptolémées
fes fuccelTeursen Egypte fui virent afîidument
les vues de ce prince ; ils s'en affurerent le
fuccès parleurs flottes fur la mer Rouge & fur
la méditerranée.
Pendant ces révolutions, Rome jetoitîes
fondemcns d'une domination encore plus
vafte.
. Les petites républiques commerçantes s'ap-
puyerent de fon alliance contre les Cartha-
ginois, dont elles minoient fourdemenr l'em-
pire maritime. L'intérêt comjnun les uniiToit.
CO M
Rhodes déjà célcbre par fon commerce,'
& plus encore par la fageffe de fes loix pour
les gens de m.er, fut de ce nombre, Marfeille,
l'ancienne alliée des romains , leur rendit
de grands fervices par fes colonies d'Efpagne:
réciproquement foutenue par eux, elle accrut
toujours fa richeffe &. fon crédit, jufqu'aux
temps où forcée de prendreparti dans leurs
guerres civiles , elle fe vit leur fujette. Lors
de fon abaiffement, Arles, Narbonne, & les
autres colonies romaines dans les Gaules,
démembrèrent fon commerce.
Enfin le génie de Rome prévalut: le com-
merce de Carthage fut enfeveli fous {qs
ruines. Bientôt l'TLfpagne, la Grèce, l'Afie ,
& l'Egypte à fon tour, furent des provinces
romaines. Mais la maîtreiTe de l'univers dé-
daigna de s'enrichir autrement que par les
tributs qu'elle impofoit aux nations vaincues;
elle fe contenta de favorifer le commerce des
peuples qui le faifoient fous fa protedion,
La navigation qu'elle entretenoit pour tirer
des grains de l'Afrique, ne peut être regardée
que comme un objet de police.
Le fiege de l'empire transféré à Bizance ,
n'apporta par conféquent prefque aucun
changement zn commerce de Rome : mais la
fituaîion de cette vil!e rebâtie par Conftantin
fur le détroit de l'Hellefpont , y en établir
un coniidérable. Il fe foutint long-temps de-
puis fous les empereurs grecs , Se même il
trouva grâce devant la politique deftruélive
des Turcs.
La chute de Tempire d'Occident par
l'inondation des peuples du Nord , & les in-
vafionsdes Sarrafins, forment une quatrième
époque pour le commerce.
Il s'anéantit comme les autres arts fous le
joug de la barbarie ; réduit prefque par- tout
à la circulation intérieure néceffaire dans un
pays où il y a des hommes , il fe réfugia en
Italie. Ce pays conferva une navigation , 6c
fit feul le commeiceào. l'Europe.
Venife, Gènes, Florence, Pife,fedifpu-
terent l'empire de la mer , & la fupériorité
dans les manufactures. Elles firent long-
temps en concurrence le commerce de la Mo-
rée , du Levant, de la mer Noire ; celui de
l'Inde & de l'Arabie par Alexandrie. Les
cahfes d Egypte entreprirent en vain de dé-
tourner le commerce de cette dernière ville en
faveur du Caire , ils ne firent que le gêner:
elle rentra fous les Mammeius en pofleifion
âe fes droits, & elle en jouit encore aujour-
d'hui.
L'Occixient étoit toujours tributaire des
marchands italiens ; chaque pays recevoir
d'eux les étoffes même dont il leur fournifToit
la matière : mais ils perdirent une partie de
ce commerce , pour n'avoir pas eu le courage
de l'augmenter. Ils avoient confervé le fyftê-
medes Egyptiens & àts Romains, de finir
leurs voyages da^ une même année. A me-
fure que leur navigation s'étendit dans le
Nord , il leur fut impoffible de revenir auffi
fouvent dans leurs ports ; ils firent de la Flan-
dre l'entrepôt de leurs marchandifes: elle de-
vint par conféquent celui déroutes les matiè-
res que lesltaliens avoient coutume d'enlever.
Les foires de Flandre furent lemagafin géné-
ral du Nord, de l'Allemagne, de l'Angleterre,
de la France. La néceffiié établit entre ces
pays une petite navigation qui s'accrut d'elle-
même. Les Flamands , peuple nombreux &;
déjà riche par des produclions naturelles de
fes terres , entreprirent l'emploi des laines
d'Angleterre , de leurs lins & de leurs chan-
vres , à l'exemple de l'Italie. Vers l'an 960
on y fabriqua des draps & àes toiles. Les
franchifes que Baudouin le jeune comte de
Flandre accorda à l'induftrie, l'encourageren*
aupointque ces nouvelles manufaftures don-
nèrent Texclufion à toutes les autres dans
l'Occident. L'Italie fe confolade cette perte
parla récolte des foies qu'elle entreprit, avec
iuccès, de fairedans fes terres dès l'an 1 1 30,
par la confervation du commerce de Cafa, du
Levant, & d'Alexandrie, qui entretinrent
fa navigation. Mais la Flandre devint le
centre des échanges de l'Europe. A mefure
^ue la communication augmentoit entre ces
divers états, les vues s'étendoient, le co.tz-
7;j^rce prenoit par- tout de nouveHts forces.
En 11641a ville de Bremen s'afTocia avec
quelques autres, pour fe foutenir mutuelle-
ment dans le commerce qu'elles faifoient en
Livonie. La forme & les premiers fuccès
de cette aifociation promirent tant d'avan-
tages , que toutes les villes de l'Allemagne
qui faifoient quelque commerce voulurent y
être agrégées. En 1106 on en comptoir
foixante-deux , depuis Nerva en Livonie juf-
qu'au Rhm, fous le nom de villes anféatlques.
V. Hanse.
Plufieurs villes des Pays-Bas, de France,
d'Angleterre, de Portugal, d'Eipagne, &
C O M ^25
d'Italie , s'y incorporèrent. La Hanfe teuto-
nique fit alors prefque tout le commerce ^•aX^k'^
rieur de l'Europe.
Celui de l'intérieur dans la plupart àt%
états avoit été jufque-là entre les mains d'un
peuple errant, pour qui l'on pouiïbit la haine
jufqu'à l'inhumanité. Les Juift tour-à-tour
bannis & rappelles , fuivant les befoins des
princes, eurent recours à l'invention des lettres
de change , dès 1 181 , pour fouftraire leurs
rurhefTes à la cupidité & aux recherches*
V, Lettre de change.
Cette nouvelle repéfentation de la me-*
fure commune des marchandifes, en fa-
cilita les échanges ; depuis elle forma une
nouvelle branche de Commerce, Voye-^
Change.
Tandis que la Hanfe fe rendoit formida-'
ble aux princes mêmes, les comtes de Flan-
dre, en 130 1 ,effarouchoient l'induftrie par la
révocation de fes franchifes. Les ducs de
Brabant l'attirèrent par les moyens qu'y avoit
employés Baudouin le jeune en Flandre, & là
perdirent par la même imprudence dont les
f ucce/Teurs de ce comte avoient donnél'exem-
ple. En 1404 , après la fédition de Louvain ,
les ouvriers fe répandirent en Hollande &
en Angleterre ; d'autres ouvriers de Flandre
les y fuivirent; tels furent les commmence-*
mens des célèbres manufaâ:ures de la Grande-»
Bretagne.
La manière de faler les harengs , inventée
en 1400 , foutint encore quelque temps à
Bruges & à l'Eclnfe le commerce & les ma-
nufa<ftures de Flandre , à la faveur d'une-
grande navigation. '
Pendant le cours de ce fiecle , Amfterdain
& Anvers s'élevèrent par le commerce. En
1420 les Portugais, à l'aide de la bouffole
déjà perfeftionnée {yoy. BoussoleJ, firent
de grands établifïemens fur les côtes occiden-
tales de l'Afrique. Les navigateurs de Dieppe
y avoient entretenu quelque commerce dès'
l'an 1364; mais les guerres des Anglois nous
firent perdre le fruit de cette découverte. La-'
France un peu plus tranquilîeen 1480, vit
s'établira Tours uhemanufail:uredefoieries;'
&: fans les guerres dltalie , fuivies d'autres
malheurs plus grands encore , il eft vrai--
femblable que la nation auroitdès ce temps
acquis dans le commerce le rang que lui mé--
ritoient foa indullrie & la fertilité de i^^-
terres, •■ ■ *
6i4 C O M
Bruges par fa profpérité continuoit d'effa
cer toutes les autres viiles commerçantes de |
roccident de l'Europe : Ik révolce contre ion
prince en 1487 en fut le terme; fa r^ine fut
le fceau de la grandeur d'Anvers & d'Amf-
terdam ; mais Anvers l'emporta par fon heu-
reufe fituation.
La fin de ce fiecle fut célèbre par deux
grands événemens qui changèrent la face du
commerce, A cette cinquième époque fan
hiftoire devint une partie de celle des états.
En 14^*7 Barthelmi Diaz, capitaine por-
tugais , doubla le cap de Bonne-Efpérance,
& s'ouvrit la route des Indes orientales.
Après lui Vafco de Gama parcourut en
conquérant les prefqu'îles en de^à & au
delà du Gange : Lisbonne fut le' magafin
exclufîf des épiceries &c des riches produc-
tions de ces contrées, qu'elle diftribuoit dans
Anvers.
L'Egypte qui bornoit fa navigation aux
premières côtes de la mer des Indes, He fut
pas en état de foutenir laconcurrcnce des Por-
tugais ; la diminution de fon commerce en-
traîna la chute de celui des Italiens.
En 1491 Chriftophe Colomb , génois ,
découvrit l'Amérique pour le roi de Caftille,
dont les fujets coururent en foule conquérir
les tréfors de ce nouveau monde.
Les Efpagnols comme les premiers à habi-
ter l'Amérique, y eurent les plus riches & les
plus amples poiTeflîons.
Dès I ^o I le naufrage d'Alvarès Cabra, ca-
pitaine portugais , fur les côtes du Brefil, va-
lu: à fa patrie la poifelïion de ce vafte pays &
de (qs mines.
Ces deux nations négligèrent les arts & la
culture d'Europe , pour moifTonner l'or &
l'argent dans ces nouvelles provinces, per-
fuadées que propriétaires des métaux qui font
la mefure de toute chofe , elles feroientles
maîtreffesdu monde. Elles ont apfJ\is depuis
que ce qui eft la mefure des denrées appar-
tient néceffairement à celui qui vend ces
denrées.
Les François ne tardèrent pas à faire des
découvertes dans la partie feptentrionale. En
i«{04 nos navigateurs découvrirent le grand
banc de Terre-neuve ; &: pendant ie cours
de ce fiecle , les Bafques , les Bretons, & les
Normand^ prirent pofTeflion de plufieurs
pays au nom de nos rois. La France déchirée
dans fon fein par les guerres de religion, fut
CO M
fourdeâ tout autre fentiment qu'à celui de fa
douleur.
La liberté de confcience & les franchifes
dont jouiffent les Pays-Bas, & fur-tout la
ville d'Anvers , y avoient attiré un nombre
infini de François & d'Allemands, qui dans
cette terre étrangère n'eurent de reffource
que le commerce. Il étott immenfè dans ces
provinces, lorfque Philippe II le troubla par
l'établififement de nouveaux impôts <k de
l'inquifition.
La révolte fut générale; fept provinces
fe réunirent pour défendre la liberté, &dès
1 579 s'érigèrent en république fédérative.
Tandis que TEfpagne faifoit la guerre à
(qs fujets, fon prince envahit en i<;8o la
fuccemon du Portugal -& de fes poffeffions.
Ce qui fembloit accroître les forces de cette
monarchie , fut depuis le falut de (es, ennemis.
La néceffité cependant avoii forcé les Hol-
landois, reflerrés dans un territoire flérile ÔC
en proie aux horreurs de la guerre , de fe pro-
curer leurs befoins avec économie. La pêche
les nourrilToit , & leur avoit ouvert une na-
vigation confidérable du nord au midi de
l'Europe, même en Efpagne fous pavil-
lon étranger , lorfque deux événemens nou-
veaux concoururent à élever leur commerce.
Les Ei'pagnols prirent Anvers en 1584, 8c
fermèrent l'Efcaut pour détourner leco/«wercc
en faveur des autres villes de Flandre. Leur
politique ne réuffit qu'à leurs ennemis; la
Hollande profita feul de la pêche, de ia na-
vigation, des manufaâiures de toile & de lai-
ne : celles de foie paflTerent en Angleterre , où
il n'y en avoit point encore.
L'abaifTement delà Hanfe teutonique fut
le fécond événement dont les Hollandois pro-
fitèrent. Depuis l'expédition qu'elle fit en
1418 contre Erik, roi de Danemarck, fa
puilTance déchna imperceptiblement. Les
princes virent avec quelque jaloufie leurs prin-
cipales villes engagées dans une aflbciation
aulîi formidable, & les forcèrent de s'en reti-
rer. Elle fe borna aux villes de l'Allemagne.
En Angleterre lés privilèges furent révoqués
fous la reine Marie ; & dès i "588 les Anglois ,
fous le règne d'Elifabeth , parvinrent à com-
mercer dans le Nord : Hambou«'g même les
reçut dans fon port. La délunion fe mit en-
tre les villes afTociées. Malgré leurs plaintes
impuiffantes , les Anglois pénétrèrent dans
la mer Baltique, dont les Hollandois
partagèrent
C O M
partagèrent depuis le commerce avec eux pres-
que exciuiivemenr aux autres peuples. Au-
jourd'hui les villes anféatiques lont réduites
au nombre de iix , dont quatre ont confervé
un afTez bon commerce dans le nord. Tou-
jours traverfées par les Hollandoisdans celui
du midi , elles n'y ont quelque part qu'à
la faveur des intérêts politiques de l'Europe.
L'interdiction à^^ ports de l'Efpagne &du
Portugal aux fujets des Provinces-Unies,
porta leur défefpoir & leur fortune à fon com-
ble. Quatre vnin'eauv partis du Texel en 1 594
& 1595, allèrent chercher dans l'Inde, à tra-
vers des périls infinis , les marchandiles dont
ces provinces étoient rigoureufement privées.
Trop foibles encore pour n'être pas des mar-
chands pacifiques , ces habiles républicains
intérefîerent pour eux les rois Indiens , qui
gémiflbient fous le* joug impérieux des Por-
tugais. Ceux-ci «nployerent en vain la force
&la rufe contre leurs nouvealix concurrens,
que rien ne dégoûta. Le premier ufàge auquel
la compagnie hoUandoife delHna (ts richel-
(es , ce fut d'attaquer ces rivaux à ion tour.
Son premier effort la rendit maîtrefled'Am-
boine & des autres îles Moluques en 1605.
Déjà afliirée du commerce des principales
épiceries , (qs conquêtes furent immenlès &
rapides , tant fur les Portugais que fur les In-
diens mêmes, qui trouvèrent bientôt dans ces
alliés de nouveaux maîtres plus durs encore.
D'autres négocians hoUandois avoient en-
trepris avec le même fuccès de -partager le
commerce de l'Afrique avec les Portugais.
Une trêve de douze ans conclue en 1609 en-
tre l'Eljaagne & les Provinces-Unies , leur
donna le temps d'accroître & d'affermir
leur commerce dans toutes les parties du
monde. Dès 16 1 2 elles obtinrent des capitula-
tions très-avantageufes dans le Levant.
En 1 62 1 les conquêtes de la Hollande com-
Tnencerent avec la guerre. Une nouvelle fo-
"ciété de négocians , fous le nom de compa-
-gnie des Indes Occidentales , s'empara
d'une partie du Brefil, de Curaçao, de Saint-
Euilache, & fît des prifes immenfes fur le
commerce des Efpagnols & des Portugais.
Le Portugal , vidime d'une querelle qui
n'étoit point la iienne , s'affranchit en 1640
<le la domination espagnole. Jean IV , légi-
time héritier de cette couronne , conclut en
1641 une trêve avec les HoUandois.
Cette trêve mal obfervée de part & d'au-
Tome Vin.
C O M €1^
fre , coûta aux Portugais ce qui leur refioit
dans l'île de Ceyip.n , où croît la canelle. Ils
ne conlerverent dans l'Inde qu'un petit nom-
bre de places peu importantes , dont ils re-
perdirent depuis une partie pour toujours.
Plus heureux en Afrique , ils y reprirent une
partie de leurs établiifemens. 13ans l'Améri-
que leur fuccès fut complet ; les HoUandois
furent entièrement chalfés du Breiil.
Ceux-ci plus occupés du commerce àes
Indes, formèrent un étahliffement conlidé-
rable au cap de Bonne-Eipérance qui en eil
la clé , & ne gardèrent dans l'Amérique de
pofics principaux que Surinam danslnCuia-
ne, les îles de Curaçao & de Saint-Euflacbe.
Ces colonies font peu importantes pour la
culture, mais elles font la lource d'un grand
commerce avec \ts colonies étrangères.
Pendant que \ts HoUandois combattoient
en Europe pour avoir une patrie^ & dans
l'Inde pour y régner, l'Angleterre s'éroit en-
richie d'une manière mams bruyante &
moins hazardeuiè : fes manufactures de laine,
commerce auflî lucratif , & qui l'étoit encore
plus dans cts temps, portèrent rapidement fa
marine à un degré de puifïànce qui fit échouer
toutes les forces de l'Efpagne , & la rendit
l'arbitre de l'Europe.
Dès l'an 1599 , la reine Elifabeth y avoit
formé une compagnie pour le commerceàts
Indes orientales. Mais fa profpérité ne lui
donna aucune vue de conquête ; elle établit
paifiblement divers comptoirs pour Iba
commerce , que l'état prit foin de faire reir-
peder par ks efcadres.
Quoique l'Angleterre eût pris pofTefuon
de la Virginie en 1584, & qu'elle eût difputé
la Jamaïque aux Efpagnols dès l'an 1596, ce
ne fut guère que vers le milieu du dix-fep-
tieme fiecle qu'elle fit de grands établifî'emens
dans l'Amérique. La partie méridionale étoit
occupée par les Efpagnols & les Portugais ,
trop forts pour les en chafîer. Mais les An-
glois ne cherchoient point de mines; contens
de jouir de celles de ces deux nations par la
confommation de leurs manufadures , ils
cherchoient à augmenter leur induftrie en ou-
vrant de nouveaux débouchés. La pêche & la
navigation furent leur fécond objet. L'Amé-
rique feptentrionale étoit plus propre à leurs
delfeins ; ils s'y répandirent & enlevèrent
I aux François fans beaucoup de réfif lance des
i terres donc ils ne faifoient point d'uiagc» i
K kkk
6i6 COM
En France, le c<irdinal de Rickelîeu portît ;
<3ès les premiers iniVsns de la tranquillité pu-
blique les vues du coté des colonies & du
commerce. En i6x6 il le forma par Tes foins
une compagnie pour l'érabliiTcmenr de Stùnt-
Chrifloplile & des autres Antilles, depuis le
dixierse degré de Féquateur jufqu'au trentie-
ffne; en i6z8, une autre compagnie fut char-
gée de l'établiiTement delà nouvelle France^
ciepuis les coniins de la Floride jufqu'au pôle
aràique.
Mais ce puiflant génie affervi aux intrigues
des courtifans, n'eut jamais le loifir de fuivrc
lesvailes projets qu'il avoitembrafles pour le
bien de la monarchie. C'eft cependant à ces
îbibles commencemens que la France doit le
iàlut de ion commerce , puifqu'ils luiafîbre-
rcnt ce qui lui relie de poiTefllons dans l'Amé-
rique , excepté la Louifiane qui ne fut dé-
couverte qu'à la fin de ce fiecle.
Les Anglois , & fur-tout les Hollandois^
curent long-temps le profit de ces colonies
naiffantfs.; c'eii aufîl d'eux qu'elles, reçurent
les premiers fecours qui favorifer.ent leur cuir
ïure. L'année 1^64 eii proprement l'époque
de notre commerce; h grande influence qu'il
donna àla France dans les affaires de l'Eu-
rope , en fait une fixierae époque générale.
Louis XIV communiqua à tout ce qui
l'environnoit un caractère. de grandeur ; fon
habileté lui développa M. Colbert ;.facon'
fiance fut entière ;.tout lui réuflît.
Les manufactures, lanavigation,, les ajts
de toute efpece furent en peu d'années portés,
il une perfedion qui étonna l'Europe & l'a-
larma. Les colon^ies furent peuplées; le com-
merce en fut exclufif à leurs maîtres. Les mar-
chands de l'Angleterre & de la Hollande
virent par-tout ceux de la France entrer en
concurrence avec eux. Mais plus anciens que
nous, ils y ccnferverentla.fupériorité ;.plus
expérimentés , ils prévirent que le commerce
deviendroit la bafe des intérêts politiques &
de l'équilibre des puiflances, ils en firent une
fcfence& leur objet capital, dans le temps que
nous ne fongions encore cfu'à imiter leurs opé-
rations fans en dévoiler le principe : Tadivité
de notre induHrie équivalut à des mqximts ,
lorfquek révocation de l'édit de Nantes la
diminua par la perte d'un grand nombre de
iujets, & par le partage qui s'en fît dans tous
\t& pays où l'on vouloit s'enrichir ; jamais
plus graad iacriike ne tut offert, à la religion.-
COM *
Depuis, cîiaque état de l'Europe a en de*
intérêts de commerce , & a cherché à les.
agrandir refpeâiyement à fes forces ou à
celles de fes voiiins , tandis que la France,.
i^Angleterre & la. Hollande ie difputent le-
commerce général.
La France à qui la nature a donné un fu-
perflu coniidérable , femble s'occuper plus
particulièrement du commerce de luxe.
L'Angleterre, quoique très-riche , craint
toujours la pauvreté, ou.feint de la craindre;;
elle ne néglige aucune efpece de profit , au-
cuns moyens de fournir aux befoins des au--
tres nations,.elle voudroit feuley pourvoir,,
tandis qu'elle diminue fans cefîe les liens ^
La Hollande fupplée par la vente exclufive
des épiceries à la médiocrité de (^is autres
produâions naturelles ; fon objet eft d'cnle--
ver avec économie celles de tous les peuples
pour les répandre avec profit. Elle efl plus
jaloufe qu'aucun autre état de la concur-
rence desétrangers, parce que fon commerce
ne fubfille que par ladeflxudion de celui des
autres nations..
L'hifloiredu commercerions pr.éfente trois;
réflexions importantes..
t°. On y a vu des peuples fuppléer par
l'induifrie au défaut des productions de la
terre , & pofleder plus de richefî'es de con?
vention , que ceux qui étoient propriétaires;
àQs richefTes naturelles.. Mais cette induffrie
coniifioit toujours à diflribuer dans chaque:
pays \ts richeiîès naturelles dont il étoit dé,--
pourvu ; &; réciproquement fans induflriej
aucun peuple n'a poflédé abondamment l'or-
ée l'argent qui fon fies richefTes de conventiom.
2°. Un peuple perd infenfiblement ibn;
commerce ^ s Ant fait pas tout celui qu'rli
pourroit entreprendre. En.efTet toute branche:
de commerce luppofe un befoin , foit réel, y,.
ibit d'opinion ; fon profit donne les moyens.-
d'une autre entreprife; & rienn'eflfi danger-,
reux que de forcer d'autres peuples à fepror
curer eux-mêmes leurs befoins , ou ày fup--
pléer. L'on a toujours vu les. prodiges de l'in-
duftrie éclore du fein de la nécefCté ; le»,
grands efïbrts qu'elle occafionefbnt femblar
blés au cours d'un torrent impétueux, dont les,
ieaux luttent avec violence contre les digues
qui les reiferrent, les renverfent à la finr.& fe;
r-épandent dans les plaines.
3°. Une grande population efl inféparab.le
d'un grand commerce , dont le paiTage. eifc
COM
îbujours marqué par l'opulence. Ilefl cenA
tant que les commodités de la vie font pour
ies hommes l'attrait le plus puifl'anr. Si l'on
•fuppofe un peuple commerçant environné de
peuples qui ne le font pas , le premier aura
fcientôt tous les étrangers auxquels Ton com-
merce pourra donner un travail & unfalaire.
Ces trois réflexions nous indiquent les
principes du commerce dans un corps politi-
que en particulier. L'agriculture & l'induftrie
en fontl'eirence ;leur union eft telle, que fi
l'une l'emporte fur l'autre, elle vient à le dé-
truire elle-même. Sans l'induflrie , les fruits
tle la terre n'auront point de valeur; fi l'agri-
culture efl négligée, les fources du commerce
ibnt taries.
L'objet du commerce dans un état ef! d'en-
tretenir dans l'aifance par le travail le plus
grand nombre d'hommes qu'il eftpoflible.
L'agriculture & l'indultrie font les feuls
moyens de fubfifter : fi l'une & l'autre font
avantageufes à celui qu'elles occupent, on ne
manquera jamais d'hommes.
L'efîèt du commerce ç.^àt revêtir un corps
politique de toute la force qu'il eft capable
•de recevoir; Cette force confifte dans la po-
pulation qui lui attire {ts richeirés politi-
ques , c'cft-à-dire réelles & relatives tout à
îa fois.
La richeffè réelle d'un état eft le plus grand
degré d'indépendance où il eft des autres
états pour {^s befoins , & le plus grand fu-
perflu qu'il a à exporter. Sa richcfl^ relative
dépend de la quantité des richelîes de conven-
tions que lui attire fon commerce^ comparé
avec la quantité des mêmes richciîès que le
commerce attire dans les états voifins. C'eft
la combinïiifon de ces richefîes réelles &
relatives qui conftitue l'art & la fcience de
î'adminiftration du commerce poHtique.
Toute opération dans le commerce d'un
état contraire à ces principes , eft une opéra-
tion deftrudive àwcommerce même.
Ainfi il y a \m.commerce utile & un qui ne
l'eft pas : pour s'en convaincre , il faut dif-
tingucr le gain du marchand du'gain de l'é-
tat. Si le marchand introduit dans fon pays
des marchandifes étrangères qui nuifent à la
confommation des manuladures nationales,
jfeft conftant que ce marchand gagnera fur
la vente de {ts marchandifes : mais l'état per-
dra , I®. la valeur de ce qu'elles ont coûté
chez l'étranger ; i". les falaires que l'emploi
des marchandifes nationales auroît procuré à
divers ouvriers ; 3°. la valeur que la matière
première auroit produite aux terres du pays
ou des colonies ; 4**. le bénéfice de la circu-
lation de toutes ces valeurs, c'eft- à-dire l'ai*
(ance qu'elle eût répandue par les confom-
mations fur divers autres fujcts ; 5°. les ref-
fources que le prince eft en droit d'attendre
de l'aifance de {ç.^ fujets.
Si les matières premières, font du crû des
colonies , l'état perdra en outre le bénéfice
de la navigation. Si ce font des matières
étrangères , cette dernière perte fubfifte éga--
lement \ & au lieu de la perte du produit des
terres, ce fera celle de l'échange àts mar-
chandifes nationales que l'on auroit fournies
en retour de ces matières premières. Le gain
de l'état eft donc précifément tout ce que
nous venons de dire qu'il perdroit dans l'hy-
pothefe propofée ; le gain du marchand eft
feulement l'excédant du prix de la vente fur
le prix d'achat.
Réciproquement le marchand peut per-
dre , lorfque l'état gagne. Si un négociant
envoie imprudemment des marchandifes de
fon pays dans un autre où elles ne font pas
de défaite, il pourra perdre fur la vente; mais
l'état gagnera toujours le montant qui en fera
payé par l'étranger , ce qui aura été paye
aux terres pour le prix de la matière première,
les falaires des ouvriers employés à la manu-
fadure ; le prix de la navigation, fi c'eft par
mer que l'exportation s'eft faite, le bénéfice
de la circulation , & le tribut que l'aifance
pubhque doit à la patrie.
Le gain que le marchand fait fur l'état des
autres fùjets, eft donc abfolument indifférent
à l'état qui n'y gagne rien : mais ce gain ne
lui eft pas indifférent , lorfqu'il groffit la
dette des étrangers , & qu'il fert d'encoura-
gement à d'autres entreprifes lucratives à la
fbciété.
Avant d'examiner comment les légifla-
teurs parviennent à remplir l'objet & l'efîèf
du commerce^ j'expoferai neuf principes qut
les Anglois, c'eft-à-dire le peuple le plus
favant dans le commerce , propofent dans
leurs livres pour juger de l'utilité oudéfavan-
tage des opérations de commerce.
1. L'expoitarion du fùperflu eft le gain le
plus clair que puiffe faire une nation.
2. La manière la plus avantageufe d'ex-
porter les produdions fuperflues de la terre,
Klckk 2
^2 8 C O M
c'eft de les mettre en œuvre auparavant, ou
de les manufacturer.
3. L'importation des matières étrangères
pour être employées dans des manufadures,
au lieu de les tirer toutes miles en œuvre,
épargne beaucoup d'argent.
4. L'échange de marchandifcs contre
marchandil'es eft avantageux en général ,
hors les cas où il eft contraire à ces principes
mêmes.
$. L'importation àss marchandifcs qui
empêchent- la conlbmmation de celles du
pays, ou qui nuifent au progrès de Ces manu-
fadures"& de fa culture, entraîne nécefîâire-
ment la ruine d'une nation.
6. L'importation des marchandifcs étran-
gères de pur luxe eiï une véritable perte pour
. état.
7. L'importation des chofes de nécellîté
abfolue ne peut être elHmée un mal ; mais
une nation n'en eft pas moins appauvrie.
8. L'importation des marchandifcs étran-
gères pour les réexporter enfuite , procure
un bénéfice réel.
9. C'eft un commerce avantageux que de
donner fes vailîeaux à fret aux autres nations.
Od\ fur ce plan qiie doit être guidée l'o-
pération générale du commerce.
Nous avons défini cette opération , la cir-
culation intérieure des denrées d'un pays ou
de {es colonies , l'exportation de leur fuper-
flu, & l'importation des denrées étrangères ^
Jfoit pour les confbmmer , fokpour les réex-
porter.
Cette définition partage naturellement le
commerce en deux parties, le commerce inté-
rieur & r extérieur. Leurs principes font dif-
férens , & ne peuvent être confondus fans un
grand défordre.
Le commerce intérieur eu celui que les
membres d'une focjété font entr'cux. Il tient
le premier rang dans le commerce général ,
comme l'on prife le nécefîàire avant le Hiper-
flu , qui n'en eil pas moins recherché.
Cette circulation intérieure eu la confom-
mationque les citoyens font des produdions
de leurs terres & de leur induftrie , dont elle
cû le premier foutien. Nous avons déjà ob-
lervé que la richefle réelle d'une nation eu à
fbn plus haut degré, forfqu'elle n'a recours à
aucune autre pour (es befoins. Les règles éta-
blies en conféquence dans les divers états ,
varient fuivant i'abondance des ri£|îelïès na-
C O M
tutelles ; & l'habileté de plufieurs a fupplé4
par l'indultric aux refus de la nature.
La valeur du commerce intérieur eft pré-
cifément la fomme des dépenfes particuheres
de chaque citoyen pour fe nourrir , fe loger ,
fe vêtir , fe procurer des commodités , &
entretenir fon luxe. Mais il faut déduire de
cette valeur tout ce qui efl confommé de
denrées étrangères, qui font une perte réelle
pour la nation, fi le commerce extérieur ne
la répare.
La population efll'amede cette circulation
intérieure; fà perfedion confifle dans l'abon-
• dance des denrées du crû du pays en propor-
tion de leur néceiilté; fa confervation dépend
^ du profit que ces denrées donnent à leur pro-
priétaire , & de l'encouragement que l'état
leur donne.
Tant que les terres reçoivent la plus grande
& la meilleure culture pofiible , l'ufage des
denrées de commodité & de luxe ne fauroit
: être trop grand , pourvu qu'elles foient du
: crû du pays ou de {es colonies.
Leur valeur augmente la (omme des dé-
penfes particulières , & le répartit entre les
divers citoyens qu'elles occupent.
Il efl: bon qu'un peuple ne manque d'au-
cun des agrémcns de la vie , parce qu'il en
efl plus-heureux. ll^cefîêroit de l'être , fi ces
agrémens & Ces commodités épuifoient fâ
richefïè ; il en feroit même bientôt privé ,
parce que les befoins réels font des créan-
ciers barbnres & impatiens : mais lorfqueles.
commodités & le luxe font une produdion
du pays , leur agrément efl accompagné de
plufieurs avantages ; leur appas attire ks
étrangers, les féduit, & procure à l'état qui
les poflede la matière d'une nouvelle expor-
tation.
Qu'il me foit permis d'étendre ce prin-
cipe aux fciences , aux produdions de Tef-
prit , aux arts libéraux : ce n'efl point les
avihr que de les envifager fous une nouvelle
face d'utilité. Les hommes ont befoin d'inf-
trudion & d'am'ufemenr : toute nation obli-
gée d'avoir recours à une autre pour fe les
procurer , efl appauvrie de cette dépenfe qui
tourne toute entière au profit de la nation qui
les procure.
L'art le plus frivole aux yeux de la raifon,,
& la denrée la plus commune , font des ob^
Jets très-eiîentiels dans le commerce politique.
Philippe IIj polfelTeur des mines du Potozi,
€ O M
rendit deux ordonnances pendant Ton règne,
uniquement pour défendre l'entrée des pou-
pées , des verroteries , des peignes , & des
épingles , nommément de France.
Que les modes & leurs caprices foient , fi
l'on veut , le fruit de l'inconllance & de la
légéreré d'un peuple ; il n'en eft pas moins
fur qu'il ne pourroit fe conduire plus fage-
ment pour l'intérêt de fon commerce & de la
circulation. La folie elt toute entière du côté
des citoyens qui s'y aiîûjettifî'ent , lorfque la
fortune le leur défend ; le vrai ridicule elt de
fe plaindre des modes ou du faite , & non
pas de s'en priver.
L'abus du luxe n'eftpas impoffible cepen-
dant, à beaucoup près , & fon excès feroit
l'abandon des terres & des arts de première
néceliité , pour s'occuper des cultures & its
arts moins utiles.
Le légiflateur eft toujours en état de ré-
primer cet excès en corrigeant fon principe :
il {aura toujours maintenir l'équilibre entre
les diverfes occupations de fon peuple , fou-
lager par des franchifes & par des privilèges
ia partie qui fouflre , & rejeter les impôts
fur la confommation intérieure des denrées
de luxe.
Cette partie du commerce efl foumife aux
loix particulières du corps politique; il peut à
fon gré permettre, reltreindre, ou abolir l'u-
fage des denrées , foit nationales, foit étran-
gères, lorfqu'il le juge convenable à ^es in-
térêts. C'eft pour cette raifon que fes colonies
font toujours dans un état de prohibition.
Enfin il fautfe fouvenir continuellement ,
que le commerce intérieur s'applique particu-
liéremefit à entretenir la ricbefle réelle d'un
état.
"Lt commerce extérieur eft celui qu'une fo-
ciété politique fait avec les autres : il concourt
au même but que le commerce intérieur, mais
il s'applique plus particulièrement à procurer
les richelîes relatives. En effet , fi nous fup-
pofons un peuple commerçant très - riche
réellement en denrées dont les autres peuples
ne veuillent faire que très-peu d'ufage , le
commerce intérieur entretiendra foigneufe-
ment cette culture ou cette induftrie par la
confommation du peuple ; mais le commerce
extérieur ne s'attachera qu'à la favorifer, fans
lui facrifier les occafions d'augmenter les ri-
chefles relatives de l'état. Cette partie exté-
rieure du commerce eft fi étroitement liée avec
COM <^29
les intérêts politiques , qu'elle contrade de
leur nature.
Les princes font toujours dans un état
forcé refpedivement aux autres princes i
& ceux qui veulent procurer à leurs fu-
jets une grande exportât ion de leurs denrées^
font obligés d-efe régler fur les circonftances,
fur les principes , & les intérêts des autres
peuples commerçans , enfin iur le goût & le
caprice du confommateur.
L'opération du commerce extérieur confifte
à fournir aux befoins àes autres peuples , &
à en tirer de quoifatistaire aux fiens. Sa per-
fedion confifte à fournir le plus qu'il eft
poflible , & de la manière la plus avanta-
geufe. Sa confervation dépend de la manière
dont il eft conduit.
Les produdions de la terre & de l'induf-
^rie font la bafe de tout commerce , comme
nous l'avons obfervé plufieurs fois. Les pays
fertiles ont néceflairement un avantage pour
l'exportation , fur ceux qui le font moins.
Enfin plus les denrées feront nccelïaires &
parfaites , plus la dépendance des étrangers
fera grande.
Une grande population eft un des avanta-.
ges qui met un peuple en état de fournir le
plus qu'il eft pofCble aux befoins des autres
peuples ; & réciproquement , fon commerce
extérieur occupe tous les hommes que le
commerce intérieur n'auroit pu nourrir.
La population dépend de la facilité que
trouvent les citoyens à fe procurer une fub-
fiftance aifée par le travail, & de leur fureté.
Si ce travail ne fuffit pas à leur fubliftance y
il eft d'expérience qu'ils vont fe la procurer
dans d'autres états. Aulil lorfque des circonf-
tances extraordinaires ont caufé cts non-va-
leurs , le légiflateur a foin d'en prévenir les
effets : il nourrit {es ouvriers , ou leur fournit
du travail. De ce que la population eft lî
nécefTaire , il s'enfuit que l'oifiveté doit être
réprimée , les maifons de travail font le
principal remède que les peuples policés y
emploient.
Un peuple ne fournira rien aux autres, s'il
ne donne {qs denrées à auflî bon marché
que les autres peuples qui poffedenc les
mêmes denrées : s'il les vend moins cher , il
aura la préférence dans leur pi-opre pays.
Quatre moyens y conduifent fûrcment :
la concurrence , l'économie du travail des
hommes , la modicité des frais d'exporta*
^3o C O M
tlon & le bas prix de l'intérêt de Targent.
La concurrence produit l'abondance , &
celle-ci le bon marché des vivres, des ma-
tières premières , des artiftes, & de l'argent.
La concurrence eft un des plus «mportans
principes du commerce^ & une partie confi-
dérable de fa liberté. Tout ce qui la gêne ou
l'altère dans ces quatre points , eft ruineux
pour l'état , diamétralement oppofé à fon
objet , qui eft le bonheur & la fubfiftance
aifée du plus grand nombre d'hommes
poflible.
L'économie du travail des hommes con-
fifte à le fuppléer par celui des machines &
des animaux^ lorfqu'on le peut à moins de
frais, ou que cela les conlèrve : c'eft multi-
pher la population bien-loin de la détruire.
Ce dernier préjugé s'eft foutenu plus long-
temps dans les pays qui ne s'occupoient que
du commerce intérieur : en effet li le com-
merce çxiéntur eft médiocre , l'objet général
ne feroit pas rempli fi l'intérieur n'occupoit le
plus d'hommes qu'il eft poflible. Mais fi le
commerce extérieur , c'eft-à-dire la naviga-
tion , les colonies , & les befoins des autres
peuples peuvent occuper encore plus de ci-
toyens qu'il ne s'en trouve, il eft nécelïaire
d'économifer leur travail pour remplir de fon
mieux tous ces objets. L'expérience démon-
tre , comme nous l'avons déjà remarqué ,
que l'on perd Ton commerce lorfque l'on ne
cultive pas tout celui que l'on pourroit entre-
prendre. Enfin il eft évident que la force d'un
corps politique dépend du meilleur & du
plus grand emploi des hommes , qui lui atti-
rent fes richefTes politiques : combinaifon
■qu'il ne faut jamais perdre de vue. L'écono-
mie du travail des hommes ne détruira donc
point la population, lorfque le légiflateur ne
fera que détourner avec précaution leur tra-
vail d'un objet à un autre : ce qui eft la roa-
riere d'une poHce iJarticuHere.
La modicité des Frais d'exportation eft la
troifieme fource du bon marché , & par
conféquent de la vente des produâions d'un
Ces frais font ceux du tranfport , & les
droits de fortie. Le tranfport fe fait ou par
terre, ou par eau. Il eft reconnu que la voi-
ture par terre eft infiniment plus coûteufc.
Ainfi dans les états commerçans , les canaux
pour fuppléer au défaut des rivières naviga-
bles, l'entretien & la commodité de celbs-ci, |
C O M
la franchife abfolue de cette navigation inté-
rieure , font une partie eiîentielle de l'admi-
niftration.
Les droits des douanes {voy. DouÀNE),
foit à la fortie , foit dans l'intérieur , fur les
produdions d'une nation , font les frais
auxquels les étrangers fe foumettent avec le
plus de peine. Le négociant les regarde
comme un excédant de la valeur réelle , &c la
pohtique les envifage comme une augmen-
tation de richefle relative.
Les peuples intelligens, ou fuppriment
ces droits à la fortie de leurs produdions, ou
les proportionnent au befoin que les autres
peuples en ont ; fur-tout ils comparent le
prix de leurs produftions rendues dans le
lieu de la confommation , avec le prix des
mêmes produdions fournies en concurrence
par les nations rivales. Cette comparaifon eft
très-importante : quoiqu'entre deux peu-
ples manufacturiers la quaHté & le prix d'a-
chat des étoffes foient femblables , les droits
de forrie ne doivent pas être les mêmes, fi le
prix du tranfport n'eft pas égal : la plus pe-
tite différence décide le confommateun
Quelquefois le légiflateur , au lieu de
prendre des droits fur l'exportation, l'encou-
rage par àts récompenfes. L'objet de ces
récompenfes eft d'augmenter le profit de
l'ouvrier, lorfqu'ii n'eft pas affez confidérable
pour foutenir un genre de travail utile en
concurrence : fi la gratification va jufqu'â
diminuer le prix , la préférence de l'étranger
pendant quelques années , fuffit pour établir
cette nouvelle branche de commerce , qui
n'aurabientôtplus befoin de foutien. L'efîèt
eft certain ; & la pratique n'en peut être que
falutaire au corps politique , comme l'eft
dans le corps humain la communication
qu'un membre fait à l'autre de (à chaleur ,
lorfqu'ii en a befoin.
Un peuple ne fourniroit point aux autres
le plus qu'il eft poflible , s'il ne faifoit que le
commerce de (qs propres denrées. Chacun
fait par (a propre expérience, qu'il eft naturel
de fe pourvoir de fes befoins dans le magafin
qui a les plus grands aflbrtimens, & que la
variété des raarchandifes provoque les be-
foins. Ce qui fe pafîe chez un marchand ,
arrive dans la communication générale.
Les peuples commerçans vont chercher
chez d'autres peuples les denrées qui leur
manquent , pour les diftribuer à ceux qui les
C O M
confomment. Cette efpece de commerce eft
proprement le commerce d^ économie. Une
nation habik ne renonce à aucun; & quoi-
qu'elle ait un grand commerce de luxe , li
elle a beaucoup d'hommes & beaucoup d'ar-
gent à bon marché, il cil évident qu'elle les
tcra tous avec fuccès. J'avancerai plus : le
moment où Tes négocians y trouveront de
l'avantage , fera l'époque la plus fùre de fa
richeiîe.
Parmi ces denrées étrarrgeres , il en efl-
dont le légiflateur a défendu l'ufagedans le
commerce intérieur ; mais , comme nous
Favons remarqué , il eft dans un état forcé
dans la partie du commerce extérieur.
Pour ne pas priver la nation du profit
qu'elle peut faire furies marchandifes étran-
gères , & accroître conféquemment ia ri-
eheffe relative, dans quelques états on a éta-
bli des ports où l'on permet l'importation
franche de tout ce qu'il eft avantageux de
réexporter : on les appelle ports-francs.
Voy. Port-franc
Dans d'autres états on entrepolè ces-mar-
chandifes; & pour faciliter la réexportation
générale des denrées étrangères , même per-
mifes , lorfqu'elle fe fait on rend. la totalité
ou partie àts droits d^èntrée.
Le commerce extérieur d'un peuple ne
fera point à fon plus haut degré de perfec-
tion , fi ion fuperflu n'eft exporté, & fi fes be-
soins ne lui Ibnt importés de la manière la
plus avantageufe..
Cettt exportation: & cette importation fe
lonr ou par Çqs propres vaiiTeaux , ou par
ceux d'une autre nation, ^'qyf;^ NAVIGA-
TION; par des commiffionnaires nationaux,
ou par des commiflionnaifes étrangers^ f^.
GOMMISSLON#AIJlES.
Ainfi il y a un commerce arfif ^ un com-
■mercepajfif. Il eft évident que le commerce
paiîif diminue le bénéfice de l'exportation, &
augmente le prix de l'importation. Il eft
contraire à l'objet du commerce dans un état ,
puifqu'il dérobe à fon peuple le travail &
les moyens defubfifter ; il en arrête l'effet,
puilqu!il diminue la.riehefîe relative de cet
état..
Le êommerce paflîf produit encore un aur-
tre défavantage-: la nation qui s'eft emparée
du co/;2/72erce adif d'une autre , latient dans
Éi dépendance ; fi leur union vient à ceflèr ,
ceUe-qjiijr'a qu'un. ccv7z/22rrce.pafli£ relie. fiins.
C DM <^3î
vigucvu* : fbs agriculture, fon jnduftrie >
fes colonies font dans l'inaétion , fa popu-
lation diminue, jufqu'à ce que par des
efforts dont les progrès font toujours lents &
incertains , elle reprenne un commerce paflif.
La différence qui réfulte de la compenf i-
tion des exportations & des importations-,
pendant un certain efpace de temps , s'ap-
pelle la balance du commerce. Elle eft toujours,
payée ou reçue en argent ; puifque l'échange
des denrées contre les métaux qui en font
la mefure , eft indifpenfable lorfque l'on n'a
plus d'autre équivalent à donner. Les états;
foldent entr'cux comme les particuliers.
Ainfi lorfque la balance du. commerce
d'une nation lui eft avantageufe , fon fonds-
capital des richeffes de convention eft aug-
menté du. montant de cette balance: fi elle eft
défavantageufe, le fonds capital eft diminué
de toute la fomme qui a été payée.
Cette balance doit être envifagée comme
particulière & comme générale.
La balance paniculiere eft celle du com-^
. merce entre deux états : elle eft l'objet des
traités qu'ils fonrentr'eux , pburrétablirau-
tant qu'il fepeut l'égalité dvLCommercc. Ces
traités règlent la nature des denrées qu'ils
pourront fe communiquer l'un à l'autre ; les
facihtés qu'ils apporteront réciproquement à
leur introdudion ; les droits que les mar-
chandifes paieront aux douanes foit d'cn-^
trée , foit de l'intérieur.
Si deux nations n'avoicnt queles tnêmes-
efpeces de produdions à. fe communiquer ,
elles n'auroient point de traités entre elles
que celui de l'humanité & du bon traitemeat
desperfonnes ; parce que celle des deux qui
auroit l'avantage fur l'autre , envahiroit enfin
fon commerce intérieur & extérieur :. alors:
le commerce eftréduiit entre ces deux nations
à celui qu'une troifieme leur occafione par
la, réexportation dont nous avons parlé.
L'égalité parfaite du commarce entre deux
peuples eft celle des valeurs, & du nombre-
d'hommes néceffairement occupés de part
& d'autre. Il eft prefqu'impoffible qu'elle fe
rencontre ,.& l!on ne. calcule ordinairemenr
que l'égahté des valeurs..
Quoiquel'on n'évalue pas le nombre des>
hommes , il lemble qu'il devroit être confir
déré fuivant la néceffité réciproque de l'e—
cl"iange..Si la balance n'eft. pas ég^le ,ladifr^
I férenc£:du aornbiaï. des-liommes réd^mqueç-
6^1 COU
mcnr employés , ne doit point être conÇ- *
déréc par celui qui la gagne : car ileft certain
que la fomme payée en argent augmentera
chez lui la circulation intérieure , & par con-
féquent procurera une {ubfiftancc aifëe à un
plus grand nombre d'hommes.
Lorfqu'un pays cfl dans la diiette abfolue
<3'une denrée , la facilité que l'on apporte
pour le rapprocher de l'égalité du commerce
dépend du point de concurrence où eft cette
denrée : car fi d'autres peuples la poflfedent
également , &: qu'ils offrent de meilleures
conditions , on perdra l'occalion de vendre
la fienne. 5i cet état n'a d'échange à offrir
que des marchandifes de même genre & de
même efpece, il convient d'abord de com-
parer le produit & les avantages de la vente
que l'on peut y faire de fa propre denrée,
avec la perte qui pourroit réfuker de Fintro-
dudion des denrées étrangères ; enfuite les
moyens que l'on a pour foutenir leur concur-
rence, & la rendre nulle.
Enfin la confeâion d'un pareil traité exige
une profonde connoiffance du commerce des
deux nations contradantes, de leurs reflbur-
ces réciproques, de leur population , du prix
& de la qualité des matières premières , du
prix àts vivres & de la main-d'œuvre , du
genre d'induftrie , des beloins réciproques,
des balances particulières & générales , des
■finances , du taux de l'intérêt , qui étant bas
chez une nation & haut chez l'autre , fait
que celle-ci perd où la première gagne : il
peut arriver que la balance du co/;7;nerf^ avec
un pays foit défavantageufe , & que le com-
merce en foit utile, c'elt-à-dire qu'il loit l'oc-
cafion ou le moyen cécefîaire d'un commerce
qui dédommage avec profit de cette perte.
La balance générale du commerce d'une
nation efl la perte ou le gain qui réfulte de
la compcnfation des balances particulières.
Quand même le montant des exportations
générales auroit diminué , fi celui des impor-
tations l'eft dans la même proportion, l'état
n'a point perdu de fon commerce utile; parce
^uec'eft ordinairement une preuve que fon
commerce intérieur aura occupe un plus
grand nombre d'hommes.
Par la même raifon , quoique les expor-
tations générales foient moindres , fi les im-
portations ont diminué dans une plus grande
proportion, le (TomOT^rce utile s'eft accru.
Il eft évident qu'entre divers peupks ,
C O M
celui dont la balance générale efl conflam-
ment la plus avanragcufe , deviendra le
plus pui{îî\nt ; il aura plus de richefîés de
convention , & ces richefles en circulant
dans l'intérieur , procureront une fubfif-
tance ailée à un plus grand nombre de ci-
toyens. Tel eft l'effet du commerce^ quand
il eft porté à fa pcrfedion dans un corps poli-
tique : c'ell à les lui procurer que tendent les
foins de l'adminiltration ; c'eft par une
grande fupériorité de vues , par une vigi-
lance afCdue fur les démarches , les régle-
mens , & les motifs des peuples en concur-
rence, enfin par la combinailon des richefles
réelles & relatives , qu'elle y parvient. Les
circonllances varient à l'infini, mais les prin-
cipes font toujours les mêmes; leur applica-
tion eft le fruit du génie qui en embraflè tou-
tes les faces.
Les reftridionsque l'intérêt politique ap-
porte au commerce , ne peuvent être appcl-
lées une gêne ; cette liberté fi fou vent citée
& fi rarement entendue, confifte feulement
à faire facilement le commerce qvie permet
l'intérêt général de la fociété bien entendu.
Le fuperflu eft une licence deftrudive du
commerce même. J'ai parlé de V intérêt gêné'
rai bien entendu^ parce que l'apparence d'un
bien n'en eft pas toujours un.
Lestraudes & la mauvaiie foi ne peuvent
êtreprofcrites trop févérement ; l'examen de
ces points exige des formalités : leur excès
détruit la liberté, leur oubli total introduit
la hcence : on ne doit donc pas les retrancher
tout-à-fait ces formalités , mais les reftrein-
dre , & pourvoir à l'extrême facilité de leur
exécution.
Nous avons déjà prouvé la néceflité de la
concurrence ; elle eftl'amWela hberté bien
entendue.
Cette partie de l'adminiftration eft une
des plus délicates : mais fes principes rentrent
toujours dans le plan qui procure à l'état une
balance générale plus avantageufe qu'à fes
voifins.
Nous nous fommes propofé d'examiner
le commerce comme l'occupation d'un ci-
toyen. Nous n'en parlerons que relativement
au corps politique.
Puifque le commerce en eft l'ame, Toccu-
pation qu'un citoyen s'en fait eft honnête ,
comme toutes celles qui font utiles : mais k
mefure que les dtoyens rcndeo: de plus
grands
C O M
grands fervîces , ils doivent être plus dif-
tingués ; &c le commerce ne fera point en-
couragé dans les pays qui ne favent point
faire ces différences.
On peut s'occuper perfonnellement du
commerce de trois manières.
Le premier objet eft d'acheter les pro-
du<5lions de la terre & de l'jnduftrie , pour
les revendre par petites parties aux autres
citoyens. Ceux qui exercent cefte profef-
iion font appelles dkailLeurs, Voye-{ DÉ-
TAILLEURS.
Cette occupation plus commode que né-
ceffiire pour la fociété , concourt à la cir-
culation intérieure.
Le fécond objet du commerce eft celui
d'an citoyen dont i'induftrie entreprend de
guider le travail d*un nombre d'autres ci-
toyens, pour donner des formes aux ma-
tières premières. Ceux qui s'y appliquent
s'appeRent manufacturiers, Voje:^ Manu-
facturiers.
Cette induftrie eft très-nécefîkire , parce
qu'elle augmente les richeffes réelles & re-
latives.
La troifieme efpece de commerce eft l*oc-
cnpation d'un citoyen qui fait paftèr chez
l'étranger les productions de fa patrie, pour
les échanger contre d'autres produélions né-
cefîaires , ou contre de l'argent. Soit que
ce commerce fe faffe par terre ou par mer,
«n Europe , ou dans d'autres parties du
monde, on le diftingue fous le nom de
commerce en gros. Celui qui s'y applique eft
appelle négociant. Voye^ NÉGOCIANT.
Cette profelfion eft très-néceflfaire, parce
qu'elle eft l'aœe de la navigation , & qu'die
augmente les richeftes relatives à l'état.
Ces trois manières d'exercer le commerce
ont un devoir com:Tiun qui en fait l'adivité;
c'eft une bonne- foi fcrupuleufe : leur objet
eft également commun, c'eft le gain: leur
«ffet eft différent en ce qu'il contribue plus
ou moins à l'effet général du commerce dans
un corps politique. C'eft cet effet qui doit
les diftinguer aux yeux de la patrie , & qui
rend plus recominandable chaque particu-
lier, à mefure qu'il y coopère davantage.
Ce n'eft pas que le plan immédiat du
légiflateur foit d'avoir des négocians très-
puiftans , ils lui font précieux , parce qu'ils
ont beaucoup concouru à ifis vues : mais il
Tonu FUI,
CO M 635
feroît encore plus utile , dans le cas où le
commerce (exonhoméy d'en avoir beaucoup
de riches , qu'un moindre nombre de très-
riches. Vingr négocians qui ont chacun cent
mille écus, font plus d'affaires & ont entre
eux une plus grande femme de crédit que
(ix millionnaires. D'ailleurs, les fortunes
partagées font d'une reftource infiniment
plus grande pour la circulation & pour les
richeftés réelles : cependant la grande dif-
p-oportion des fortunes par le commerce
n'eft pas onéreufe à l'état , en ce qu'elle
circule ordinairement toute entière au pro-
fit des arts utiles ; il ferolt même à fouhai-
ter qu'elles reftaffent dans le commerce ,
parce qu'elles établiflent beaucoup <le fac-
} teuTS chez l'étranger : ces fadeurs y aug-
; mentent les branches du commerce de leur
j nation , ôcenoutre lui rapportent le bénéfice
qu'ils ont fait dans le commerce dont le
, pays qu'ils habitent eft fufceptible. Ces
j fortunes ne fortiroient point du commerce ,
fi l'état de négociant étoit auffi lionoré qu'il
mérite de l'être.
A l'égard des grandes entreprifes de com-
merce pour le gouvernement , il n'a befoin
que de fon propre crédit : dès qu'il offrira
du profit &dela fureté, des fociétés folides
s'en chargeront an rabais.
Savoir faire le commerce ou favoir le con-
duire , font 4cuK chofes très - diftinftes.
Pour le bien conduire , il faut favoir com-
ment il fe fait; pour le faire avec profit, il eft
inutile de favoir comment il doitfeconduire.
La fcience du négociant eft celle des détails
dont il s'occupe ; la fcience du politique eft le
parti que l'on peut tirer de ces détails : il faut
donc les connoître , & -ce n'eft que par les
négocians que Ton peut s'en inftruire. On ne
fàufoittropcojiverfer avec eux pour appren-
dre, pour délibérer, leurs confeils doivent
être admis avec précaution. Nous avons déjà
diftingue le gain du marchand & le gain de
l'état ; & il eft clair qu'abforbés dans les dé-
tails , les négocians ont rarement le coup
d'œil général, à moins que par leurs voya-
ges, ou par une pratique étendue & raifon-
née , ils ne l'aient acquis. Ceux qui font
dans le cas peuvent décider furement.
Le négociant doit à la (bciété dont il eft
membre, les fentimens qu'un honnête hom-
me, c'eft- à-dire un vrai citoyen , a toujours
LUI
6^4- e OM
pour elle ; la roumiffion à Tes loix , & un '
amour de préfétence. C'eft être coupable ,
<levant Dieu & devant les hommes , que j
d'y manquer, quelque profeflion que l'on '
exerce ; mais ce principe ne fauroit être trop !
profondément gravé dans le cœur de ceux
qui font toujours dans une occafion pro-
chaine d'y manquer.
Cependant ce n'eft point manquer à cet
amour de préférence, que de faire pafTer
<l\m pays étranger à un autre les marchan-
difes néceflaires à Ces alTortimens , quand
même ces marchandifes feroient pro'':rites
par la fociété dont on eft membre : il cil é-vi-
dent que puifque les marchandifes ont été
néceffaires , c'eft contribuer à la richefle
relative de fa patrie , que de faire le profit
qu'elles auroient donné à la nation qui les
pofTede, iî elle en eût fait elle-même la
•vente.
J'influe fur cet article particulièrement ,
par rapport aux négocians d'une nation ré-
pandus chez l'étranger : on leur reproche
quelquefois ce genre de commerce , par [q-
quel même affez fouvent ils font parvenus
à acquérir à leur nation la fupériorité dans le
pays qu'ils habitent. C'eft malconnoltre la
nature du commerce ^ & confondre les prin-
cipes du commerce extérieur avec ceux du
commerce intérieur.
On en peut dire autant de la proteflion
qu'un négociant particuher cherche à fe pro-
curer dans un pays étranger : c'eft un mau-
vais citoyen, s'il en préfère une étrangère;
mais il a befoin d'en avoir u le.
• La matière du commerce eft immenfe ; on
n'a pu qu'ébaucher les premiers principes ,
dont un efpiit droit &: réfléchlftant tirera
aifément les conféquences. Pour s'mftruire
davantage, on peut confulterl'excellent ejjai
de M. Melon ; les réflexions politiques de
M. Dutot , avec leur examen ; le parfait
négociant ; le dictionnaire du commerce ; \'ef-
prit des loix; les réglemens & les ordonnan-
ces de France ; les flatuts d'Angleterre , &
prefque tous les livres anglois fur le commer-
ce , font les fources les plus fûres.
Pour le commerce particulier de chaque état,
voy. les mo/i France, Grande-Breta-
gne, Hollande, Espagne, Venise,
Naples, Gènes, État ecclésiasti-
que, PiÉMOî^, Alleiviague, Dane-
' G O M
MARCK, StJEDE , MoSCOVïE. ( M. île
V. D. FJ
Co M MERCE (Confeil de)yHift:mod. eft
un confeil que le roi établit en 1700 pour
les affaires de commerce. Il le compofa de
deux confeillers d'état, & du confeirttryal
des finances, d'un fecretaire d*état , de deux
maîtres des requêtes , &c de douze anciens
marchands députés des villes les plus com-
merçantes du royaume , à favoir deux de
Paris, un de Rouen, un de Lyon , un de
Bordeaux ,un de Marfeille , un de Nantes ,
un de la Rochelle , un de Saint-Malo , un
de Lille , un de Bayonne , un de Dunker-
que. Ce confeil ne décide pas par lui-
même fouvérainement fur les affaires de
commerce : mais les délibérations qu'on y
prend font préfentées au roi pour y pour-
voir félon qu'il le juge à propos. (^H)
Commerce {Jeu du) , ce jeu prend
fon nom de l'efpece de trafic qu'on y fait des
cartes , en les changeant pour d'autres ou
pour de l'argent. Le jeu dont on fe fert eft
un jeu entier ; les cartes confervent leur va-
leur naturelle & ordinaire , excepté que l'as
y vaut onze , & emporte le roi, la dame, &c.
On peut jouer au commerce jufqu'à dix ,
mais non audeftbusde trois. Après avoir vu
à qui fera, celui qui donne les cartes en donne
trois à chaque joueur félon leur rang , en
commençant par fa droite, les donnant tou-
-tes trois à la fois ou féparément, ccrnsne il
lui plaît. Chacun met au jeu un des jetons
qu'il a devant foi, & dont les joueurs ont
d'abord déterminé la valeur. On ne doit fe
propofer que le point , ou bien de fe faire
fequence ou tricon , voy. PoiNT , SE-
QUENCE, Tricon; & l'adrefte du joueur
confifte à arranger fon jeu de façon qu'il fafte
l'un de ces trois jeux ; parce qu'il n'y a qu'un
d'eux qui puifiTe gagner. Quand il n'y a point
de fequence ni tricon , c'eft le plus grand
point ; s'il y a plufîeurs féquences , c'eft la
plus haute ; ainfi que le plus haut tricon ,
lorfqu'il y en a plus d'un au jeu : ainfi l'on
voit que le tricon gagne par préférence au
point & à la fequence , & la fequence au
point feulement. Les règles font aîfez mani-
feftées dans ce que nous avons dit de ce jeu,
&c de fon banquier ; nous n'ajourerons donc
ici qu'une choie qui lui eft commune , néan-
moins avec pref^}XQ tous les autres jeux ; c'eft
C O M
de refaire ior'q''e.îe jeu efcfaux, ou qu'il y
a quelque c ■! c ;':;:ournée.
L'on joiioi:' quelquefois ce jeu jufqu'à ce
qu'un joueur cie la compagnie eût perdu Ton
enjeu; ce qui faifoit durer la partie fort
long-temps , '& d'autres fois la faifoit finir
fur le champ , félon !e malheur d'un joueur,
ou le bonheur de tous.
COMMERCER , NÉGOCÎER, TR.A-
FIQUER, EXERCER LE COMMER-
CE, vojc:^ COMMER.CE.
CoMMEB.CER pour argent ^^ au jeu de
commeru\ c'efl: prendre une carre. de la
banque , en payant un jeton au banquier.
Commercer ûf U banque^ c'eft ache-
ter k première carte. du talon pour un jeton
qu'on donne au banquier.
Commercer troc pour troc^ c'eft de-
mander une carte à celui qui eft à fa droite
pour une autre qu'on lui donne, fans qu'il
puiiîe rien exiger pour cet échange. Chacun
peut commercer troc pour troc , félon fa
place & fon rang, jufqu'à ce que quelqu'un
ait trouvé dans le jeu des autres ce qu'il
cherchoit pour faire le (îen.
COMMERCY , (Géogr, modj petite
ville de France, au duché de Bar, avec titre
de principauté, fur la Meufe. Long. 23 ,
16 ; lat. ^8 , 40.
COMMERE ACCOMMODEZ- MOI
ijeu dt)\ ce jeu ainfi appelle, parce que toute
l'habileté du joueur eft de chercher à accom-
moder fon jeu , a beaucoup de rapport à ce-
lui du commerce, &c ne laiiîe pas d'être amu-
iant, quoique en juger par fon nom il ne
foit guère joué que par les petites gens.
On fe fert d'un jeu de cartes tout ender.
Ow peuty jouer fept ou huit perfonnes. Cha-
cun prend autant de jetons que l'on veut ,
& dont on a déterminé la valeur. On met
peu ou beaucoup au jeu, félon que l'on a
intention de perdre ou de gagner de même.
Celui à qui il eft échu de faire , ayant mêlé
& fait couper à l'ordinaire, donne trois car-
tes à chaque joueur , toutes enfemble ou fé-
parément. Les cartes ainfi diftribuées on ne
fonge plus qu'à tirer au point , à la fequénce
& au tricon, la fequénce emportant le point,
& le tricon la fequénce & le point. Le plus
fort gagne le plus foible , & s'ils font égaux ,
c'-eft celui qui eft le plus proche de celui qui
a mêlé à droite. L'as vaut onze au jeu &. eft
C O M (J35
la première de routes les cartes. Voy. Tri-
con, Séquence & Point.
Cel:;z qui gagne la partie par le point ne
rire que la poule; celui qui gagne par une
fequénce, gagne un jeton de chaque joueur,
avec la poule, & celui qui gagne avec tri-
con , en gagne deux outre la poule.
Souvent les joueurs ne trouvent point à
s'accommoder dès la première donne, mal-
gré tous les échanges qu'ils aient pu faire,
& pour lors celui qui a fait prend le talon &
donne une carte à chaque joueur , qui luien
rend une autre à la place , en com.mençant
par la droite & mettant toujours les cartes
échangées fous le talon ; mais il faut que tous
les joueurs y confentent , fmon l'on refait.
Quand on a reçu cette carre du talon , on
fait l'échange comme auparavant, en s'ac-
commodant l'un l'autre jufqu'à ce qu'un des
joueurs ait fait fon jeu. Si les joueurs ne
s'accommodoient point encore , on pourroit
donner une féconde carte , ce qui pourtant
n'arrive guère , non plus que de faire plus de
deux donnes à ce jeu.
Celui qui donne mal n'eft tenu que de
refaire. Lorfque le jeu eft reconnu faux , le
coup eft nul , mais les pnscédens font bons ;
& (i même le coup où l'on s'apperçoit que
le jeu eft incomplet étoit fini, &: que quel-
qu'un eût gagné, lecoup feroit eftimé valide.
COMMETAGE , ( Corderie. ) réunion
de plufteurs fils ou cordons par le tortille-"
menc. V, Commettre & Corderie. :
* COMMETTRE, CGa^/tzJ a plufieurs
fignifications; il eft fynonyme à faire ; il
marque feulement plus de mauvailé inten-
tion : je dis mauvaife , parce qu'alors il ne
fe prend qu'en mauvaife part, au lieu que
faire fe prend en bonne & en mauvaife ;
on dit faire une bonne aciion , faire une
mauvaife aciion^ mais on ne dit point com-
mettre une bonne action : exemple , quelle,
aciion ave^-vous commife ?
Commettre fon jïef^ (Juri/p.) dans
certaines coutumes c'eft le confifquer, ou
pour mieux dire , en encourir la confifca-
tion. V^oye:^ C ancienne coutume d^ Amiens,
art. iy; Bar, art. 20; Troyes , j^; Chau-
mont, art. 24; celle ^^ Artois ^ an. z', dit
commettre ^ for faire. fAJ
Commettre , en terme de commerce ,
c'eft.confîer quelque chofe à la conduite , à
- LUI 2
6}6 COU
la prudence, à la fidélité d'une perfonne.
Un marchand commet à fa femme & à fon
garçon le foin de fa boutique.
Co M METTRE fîgnifieauffi employer quel-
qu'un à quelque négoce, à quelque emre-
priCe, mrinuidCtnre , &c. ainfi l'on dit, j'r.i
commis telle perfonne pour ie recouvrement
des femmes qui me fc^nt dues. DiHionn. de
Comm, & di Trév.
Commettre, eft une des opérations
principales de la corder'u \ c*eft celle par îa-
q«;jclle on réunit cnfeinble, au moyen du
tortillemeiit , cïes 61s pour f^irc iSt^ ficelles ,
des torons pour faire des auff.eres, des cor-
dons peur faire des gielins. Voy. P article
CORUERIH»
* COMMILITON, f. m. (Hift. anc.J
fbldat d'une îSicmc ccmur-e. Les généraux
s'en fervoienr volontiers; il revient à notre
€amaTadi. Ouan-.l tis vouî« ient ôter à ce moî
l'air de fanuiiaii-é , c>: lui faire p;.endre un ca-
ra«51êrededi'j:5ité,,d horrrrecr & ds^religiern-^
ils y ajouioient i'épithete (\(î f.icmtus ^ qui
rapp'clloit au loldar fon fermenî.Ccux qji au-
ront jeté les yeux !ur TouvragL' original que
M. le Maréclîal de Sa;Le a laiifé fous le ti:re
de mes rci'eries^ femiront tou:erimpo' tance
de ces relfources fi petites en apparence.
COMMINATOIRE, ad). [Juripr.) {k
dît de certaiiU'S peines ou claufes pép;a!es
appoiécs dans Ijssaiclcs &coi\'rats , dans les
lettres de chancellerie , dan^ les jugemens ,
contre ceux qui contreviendront à quelque
claufe ou di'pofifion , lefquelles peines ne
font pas néanmoins encourues de plein droit,
& ne s'exécutenx pas toujours à la rigueur».
Les claufes pénales appolees dans les a<ftes
font ordinairement réptuées comminatoires^
à moins que la partie intéreifce ne prouve en
juftice qu'elle a fouffert un préjudice réel par
l'inexécution de la convention de la part de
l'obligé;, car engénéralces fortes de cbufes
ne doivent tenir lieu que de dommages &
intérêts ; il dépend donc de la prudence du
juge de voir s*il y a liettd'eaad^iger , & s'ils
riC doivent pas être modérés, nonobftant
qu'ils fuflent fixés par l'ade à une femme
plus forte.
Dans les lettres de chancellerie, telles que
les ordonnances , édits , déclarations & au-
feres lettres-patentes & commifïions , les pei-
Bfis. ne font pas toujours réputées commina-
C O M
toires ; par exemple ^ quand le roi prononce
la peine de nullité, la peine eft ordinaire-
ment de rigueur, fi ce n'eft dans certains édits
burfiuxoùîa ilu^îi-é p'- ut fe réparer en fatis-
faifai;t au droit pécuniaiie qui eft dû : mais
les peines pécuniaires , teîJes que du double,
triple &: quadruple droit, ne font ordinaire-
ment réputées que comminatoires; il dépend
du îoi , & même du fermier, de les remenre
ou modérer. Les peines pron.oncées par les
rcgleir>ens en matière de pol:ce,font auffi or-
dmairement xépwtéts comminatoires^ c'eft-à-
dire qu'e'.ies nefojir pas encourues de plein,
droit : le règlement prononce ordinairement
h peine la plus rigoureufe, dansla vue d'arrê-
ter la licence , mais lorfiqu'il s'agit de favc;r d
eî'e t([ encourue, on peut la remetîrc ou la
modérer, cela dépendde la prudence du juge.
Dans les jugemen.s rendus, foit en maàtre
civile ou criminelle, lorsqu'il y a queiquedif-
pofirion qui ordonne à une parrie de faire
(^ueique chcfe dans un certain temps à peina:
de déchéance deq'JclquedrcrityCC'tiedi,p<-fi-
tion n'cfl réputée que com.iùjiutoite^ c tll-à-
dire que celiîiqiù n'a pas exécuté le jugement
d^ns le temps y porté, n'ed pas pour cela
déchu d'vi Icti droit, à moins qu'à l'échéance
î'au-re: partie n'ait obtenu un ji:gement qui
roicKdime; iî.ii , ou que le premier jugement
Me portât la claufe qu'«^/7 vertu du prîferit>
j Hument ^ & fans qu i' en futbefoind'autrej,
la partie dL^me'jreroit déchue , 6-c. ÇA^
COMMINGE , f. f. {Artillerie.^ efpece
de mortier phis gros que les mortiers ordi-
naires , oc qui jette 6fùs bombes efent le
poids va jufqu'à 500 livres.. CQ.J
COMMLNGES, (G^^^.) petite con-
trit de la Gafcogjie , de dix-huit lieues de
long, fur fix de large. Convennce de conve-
nire , parce que les peuples qui Thabitoiene
tiroient leur origine de plufieurs brigands Ef-
pagnolsque Pompée ât deicendre des Pyré-
nées&obligeadedenïeurerenfembie,& for-
mèrent une ville qui fut nommée Convennce^,
(Hadrien de Vallois, Mi numenta GalL)
La fituatlon de cette ville fur une hauteur-
la fit appeller par les Gaulois Lugdununh
Convennarum.
Strabon & P toi ornée la nomment Conve-^
narum urbs Lugdunum , & la mettent au.
pié des Pyrénées. L'itinéraire d'Antonln la
place enue Acqs &; Seiches, à quarante-^
C OM
deyx milles de Lefcar, & 69 de Touloufe :
à la fin cette ville a pris le nom du pays
dont elle étoit la capitale : les Notices lui
donnèrent le quatrième rang parmi les douze
villes de la Novempopulanie : elle tut brû-
lée en 582 par l'armée du roi Contran; ce
qui fit que les évcques Te retirèrent à Saint
Bertrand , bâtie par l'évéque de ce nom.
Le fiege épifcopal de la métropole d'Auch
eft ancien, puiCqu'on voit Tévéque Suavis
foufcrire au concile d'Agde en 506 ; &
Profidius au deuxième concile d'Orléans ,
& Amelius au cinquième.
Ce comté fut réuni à la couronne en
1 548. Le principal commerce du pays eft en
beftiaux & en mulets. Lq haut-Commi^gcs
jouit du privilège de lies ai paj/c/ies a\'qc
les Espagnols. Le bas-Comminges eft Fer-
tile en blés & autres grains , qu'on fait def-
cendre à Touloufe. C^J
COMMIS, f. m. (Gramm. & Jurifpr.J
fe prend en général pour celui qui eft prépofé
par un autre pour faire en fon lieu & place
quelque chofe; il eft parlé de ces fortes de
commis ou prépofés dans les loix romaines :
le commis à\-\ propriétaire d'un navire eft ap-
pelle exercitor, le commis ou fafteur d'un
marchand fur terre eft appelle infticor, de
injiitorid & exercitoriâ aclione. Voyez an
code Liv, IV^ tit. xxv^ ^'^fi- li^- Xly'. tit.
ïij ^ 6* aux inft. liv. IV^ tit. vii ^ S 3* ^•
Mandat, Mandataire, Procura-
tion. {A)
CoM MIS , ( Comm, ) ce terme eft d'un
grand ufage chez les financiers, dans les bu-
reaux des douanes, dans ceux des entrées &
lorties, ik chez les marchands, négocians,
banquiers, agens de change, &: autres per-
fonnes qui fe mêlent du commerce ou d'af-
faires qui y ont rapport; mais ces commis
font amovibles , auifi-bien que ceux qui tra-
vaillent danslesbureauxdesfecreîairesd'état.
Les principaux commis des douanes , &
particulièrement de celle de Paris , font , le
leceveur général & le receveur particulier,
trois direfteurs généraux des comptes , un
contrô'eur, les vifiteurs, & un infpeâieur
général, Voj^e^ tous ces noms fur leurs titres
particuliers.
Commis AMBULANT, eft un commis
dont l'emploi <;onfifte à parcourir certain
nombre de bureaux, à y v»ir 6c examiner
COM (^37
les regiftre*; des receveurs & contrôleurs ,
pour en cas de malverfation en faire fon pro-
cès-verbal ou fon rapport, fuivant l'exigence
& l'importance de ce qu'il a remarqué.
Commis aux portes; ce font ceux
qui font chargés de veiller aux portes &L bar-
rières des villes où fe paient des entrées pour
certaines fortes de marchandifes , dont ils
reçoivent les droits & donnent des acquits.
V'oyei Droit & Acquit.
Commis aux descentes ; ce font
certaines perfonnes prépofées par les fer-
miers des gabelles , pour affifter à la defcente
des fels lorfqu*on les fort des bateaux pour
les porter aux greniers.
Commis aux recherches; on nom-
me ainfi en Hollande, dan les bureaux du^
convoi & Licenten , ce qu'à la douane de
Paris on nomme vijiteurs, C'eft à ces corn-'
mis que les marchands qui veulent charger
ou décharger des marchandifes doivent re-
mettre la déclaration qu'ils en ant faie , afin
que ces commis en faflent la vlfice & jufti-
fient fi elles font conformes à la déclaration.
CoM MIS , en terme de commerce de mer^
fignifie fur les vaifteaux marchan.is, celui
qui a la direftion de la vente des marchan-
difes qui en font Ist cargaifon.
Les comrrûs àts marchands , négocians ,
banquiers, agens de change , font ceux qui
' tiennent ou leur caiile, ou leurs livres , ou
qui ont foin de leursafFarres. On les nomme
autrement caijjiers , teneurs de livres, 6*
facteurs. Voyez ces noms fous leurs titrer
particuliers.
Sous-commis ., eft cehfi qui fait îa fonction
du commis en cas de mort , de maladre , oa
autres empéchemens.. Z)/t7iV/z/2. du Comm.
Coisï MIS aux aides , font ceux que les
fermiers & fous-fermiers des aides prépofent
fous euxjpour la perception desdroiûsd'aides.
L'ordonnance des aides du mois de juin
1680, tit. V, veut que les commis auxaides^
■ foiert âgés au moins de 20 ans , non parens
ni alliés du fermier,, ni inréreftes dans la
ferme ; qu'ils prêtent ferment à réle<5lion
dans le reffort de laquelle ils feront employés
ou devant un autre juge des droits du roi,
le tout fans information de vie & mœurs.
Si fans conclufions du miniftere public. Ils-
peuvent auffi prêter ferment à la cour des aiV
. . des , auquel cas ii fuflit qu'ils faffent enfuite
<^38 COU
enrégiflfer leur fe: nient c-îtis i'éleifiion de
liiir exercice.
Les it'rmiL\-r:; ou fous-fermiers qui les nom-
ment, demeurent civilement reiponlables
de leur adminiftration.
Les commis aux ai^es dovent être deux
enfemble lorfqu'ils font leurs exercices, vifî-
tes ^ procès-verbaux, & tous deux doi-
vent fur leiirs re^iftres & procès-verbaux,
les affirmer véritables dans le délai prefcrir
par l'ordonnance.
Néanmoins , un procès-verbal fait par un
feul commis qH valable , pourvu qu'il foit
afiifté d'un huiffier.
Les vendaiis vins font obligés à la première
fommation de leurouvrir leurs caves, cell'ers
& autres lieux de leur maifon pour y faire
h vifi;e.
lis jouiffent de tous les privilèges accor-
dés aux commis des fermes en général. J^.
ci-après COMMIS DES FERMES; & le
eiicl. des Aides , au mot Commis, {A)
Commis des Fermes; on comprend
fous ce nom tous les direéfeurs , receveurs,
caiffiers, contrôleurs & autres (impies com-
mis ou prépofés par les fermiers & fous-fer-
miers des droits du roi , tels que les commis
aux aides , les commis à la recette du con-
trôle, des infinuations , &c.
L'ordonnance de 1681 , titre commun
pour toutes les fermes , ordonne que les fer-
miers & fous-fermiers auront contre leurs
commis les mêmes aftions, privilèges, hy-
pothèque & droits de contrainte que le roi
a contre (es fermiers , & que ceux-ci ont
contre leurs fous-fermiers.
Chaque fermier ou fous-fermier efl: tqÇ-
ponfable civilement du fait de (qs commis.
Il efl: permis aux commis des fermes^ ayant
ferment à juftice, de porter des épées &c
autres armes ; ils font fous la fauve-garde du
roi & des juges , maires & échevins ; tous
juges royaux , officiers des maréchauffées ,
prévôts & autres , font obligés de leurprê-
ter main-forte en cas de befoin.
Il efl: défendu par une déclaration de lyi 4
à tous juges de faire aucunes pourfuites
contre les commis qui auroient tué des
fraudeurs ou leurs complices , en leur fai-
fant violence ou rébellion.
Ils font exempts de tutelle & curatelle,
collège, logement de gens de guerre , de
C O M
guet &: de garde ; i!s ne peuvent être impo-
(és i:i augnicnîés à Ki uiilie pour raifon de
leurcommiliion, ik jouilTent généralcn:.nt
de tous les autres privilèges & exemptions
accordées aux fermiers & fous-fermiers par
les baux, réfultatsdu confcîl, ordonnances
& réglemens. ^
Le fermier peut décerner des cotitrainte.î
contre fes commis , qui font en detneiire de
compter ou de payer, en vertu defquelles ils
peuvent être conflltués prifonniers, & ils
ne font point reçus au bénéfice de ceflion.
Les gages dus commis des fermes ne peu-
vent être failis à la requête de leurs créan-
ciers, fauf à ceux-ci à fe pourvoir fur leurs
autres biens.
Ils doivent délivrer gratis les congés , ac-
quits , pafia vans, certificats, billets d'envoi ,
vu des lettres de voitures, (k autres nEies de
pareille qualité : il leur efl défendu de rien
exiger ni recevoir que ce qui leur efl permis
par les réglemens , à peine de concuflion ;
ils peuvent feulement fe faire rembourfer
des frais pour le timbre du papier.
Les marques & démarques doivent être fai-
tes par eux fans frais furies vailTeaux & fu-
tailles,fous peine pareillement de concuflîon.
Les commis des fermes doivent être âgés
au moins de 20 ans; ils doivent prêter fer^
ment comme on l'a dit ci-devant pour L^s
commis des aides ; ils n'ont pas befoin de
juftiher qu'ils font de la religion catholique,
apoftolique & romaine ; ils peuvent fe faire
affifler de tels huifliiers que bon leur femble ;
ils peuvent même , fans aucun miniftere
d'huiflier , dénoncer leurs procès-verbaux ,
&: afïigner aux fins d'iceux , mais ils ne
peuvent faire aucuns autres exploits.
Leurs procès-verbaux , bien &:duement
faits & affirmés en juftice, font crus jufqu'à
infcription de faux. V^oj, ci-devant COM-
MIS AUX AIDES.
L'ordonnance veut que ceux qui auront
fabriqué ou fait fabriquer de faux regiftres ,
ou qui en auront délivré de faux extraits
fignés d'eux , ou contrefait les figatures des
juges , foient punis de mort.
La même peine eft prononcée contre
ceux qui ayant en maniement des deniers
des fermes , feront convaincus de les avoir
emportés, lorfque la fomme fera de 300a
livres & au-deffus ; & fi la fomme eft
C O M
moindre, ils feront punis de peine affliâ:l\«e
telle que les juges l'arbitreront.
Les commis ayant ferment à juftlce , ne
peuvent être décrétés pour quelque délit
que ce foit par eux commis ààns l'exercice
de leur emploi , iinon par les officiers des
éleâ:ions , greniers à fel, juges des traites &
autres de pareille qualité , chacun pour ce
qui le concerne.
Il eft enjoint aux commis de mettre au
dihors fur la porte du bureau ou en autre
lieu apparent , un tableau contenant les
droits de la ferme pour lefquels le bureau eft
établi , &: un tarif exaâ: de fes droits, f^oy.
ci-dei'ûnt au mot COMMIS AUX AIDES;
V ordonnance, des gabelles , celle des aides &
des fermes , le dictionnaire des aides , au
mot commis', & le diclionn, des arrêts ^ au
mot commis des fermes. ÇA)
(31^ M MIS (droit de) , Jurifpr. efl une
efpece de confifcation qui a lieu en certains
pays, tant coutumiers que de droit écrit, &
en vertu duquel le fief, cens , bourdelage ,
ou héritage de main-mo;te , eft acquis..^
çonfifqué au feigneur pour le forfait ou dé-
faveu du va0al ou emphytéote. Il en eft parlé
dans les coutumes des duché & comté de
Bourgogne, Rheims , Nivernois & Bor-
deaux ; & en l'ancienne coutume d'Auxerre
quelquefois on dit commifc pour commis.
Au parlement de Touloufe , le droit de com-
mis n'a pas lieu pour les peines ftipulées par
les fcigneurs dans les baux &: reconnoiftan-
ces du paiement du double de la rente, taute
par l'emphytéote de la payer , & même de
la perte du fonds emphytéoàquej, s'illaifte
pafter trois années fans payer; mais le droit
de commis y a lieu pour la félonie de l'em-
phytéote;ce qui s'obfervepréfentement dans
la ville, gardiage & viguerie de louloufe,
de même que dans le refte du parlement.
Fbye^ Geraud, des droits feign. liv. II ,
xh. 8 y n.jy f p. ji^. Maynard,/iv. Vl,
ch. 60. Larochetî. arrêt du 6 mai i6^C) ;
.& la coutume de Paris , art. 43 . )A)
Commis eft dans la congrégation de
Saint Maur, ce qu'on appelle dans d'autres
' ordrGS frère donné; & qu'on appelloit an-
ciennement, o^^/a/ , un laïque qui fe donne
au couvent fans faire des vœux ni prendre
l'habit , fous la cotidition de rendre quelque
^fervice à la maifou 6c quelquefois d'y payer
C O M 639
penfion. C'eft ainfi qu'étoit un desmefîieurs
Bulteau dans la congrégation de faint Maur,
qui nous a donné une hiftoire abrégée de
l'ordre de faint Benoît , l'hiftoire monaftique
d'Orient, &. quelques autres ouvrages de
littérature eccléfiaftique. (1GJ {a)
COMMISE,/, m. (Jurifpr.) en général
lignifie confifcation d^une chofe au profit de
quelqaun\ ce terme vient du latin commif-
fum., qui fignifie confifcation. Il y a au ff.
/. XXXIX ^ le tit. iv , de public andis vec-
tigalibus & commijjîs : la loi ij parle de
marcbandifesconfifquées , merces commiffœ.
Voyez aufti la loi 1 ^ & la loi /6^, §. 8 ,
& au code , liy. /K, ///. Ixj ; l. j. Parmi
nous le terme de commife ne fe dit que
pour la confifcation d'un héritage : cette
peine eft encourue de différentes manières,
félon la nature des héritages : c'eft pourquoi
on diftingue différentes fortes de commifesy
que nous allons expliquer dans les fubdivi-
(ions fuivantes.
Commise active , eft le droit que le
feigneur a d'ufer de commife fur l'héritage de
celui qui a encouru cette peine. La commife
paffwe eft la peine de la confifcation de l'hé-
ritage , encourue par le vaffal ou tenancier
qui fe trouve dans le cas de la commife.
Commise bordeliere, ou d'un hé-
ritage tenu en bordelage ou bourdelage , eft
la confifcation de l'héritage tenu à ce titre ,
au profit du feigneur contre le propriétaire,
faute parce dernier de payer pendant trois
ans la redevance due au feigneur pour le
bordelage. Cette commife a lieu dans quel-
ques coutumes où le bordelage eft ufité,telles
que celle de Nivernois , titre des bordela-
ges , art. S ., & celle de Bourbonnois , titre
XXX , des tailles réelles , art. 5 02 , où le dé-
faut de paiement du bordelage pendant trois
ans eonfécutifs , emporte commife : dans la
première, la commife a lieu parle feul défaut
du paiement , fans que le feigneur foit
obligé d'interpeller le débiteur de payer;
celle de Bourbonnois eft plus mitigée , 6>c
veut que le feigneur, avant de commettre ,
mette le débiteur en demeure de payer.
Si deux particuherspofTedentun héritage
en bordelage, il ne devroit, fuivant l'é-
quité, y avoir que la part de celui qui eft
en demeure de payer qui tombât en com-
mife ; néanmoins ft le feigneur n'a pas
640 C O M
confenti à la divifion de l'héritage , la com'
inij'i eft folidaire , c'eft-à-dire emporte la
totalité de l'héritage.
Le feigneur ne peut rentrer dans l'héri-
tage par droit de commlfc , faute de paie-
ment pendant trois ans , qu'en le faifant
ordonner par juftice ; & le tenancier de-
meure en pofleifion jufqu*au jugement.
Si le feigneur ne le plaint^pas, ou qu'il
remette la commifc , ce ne fera pas pour
cela un nouveau bail de bordelage ; c'eft
toujours le même qui continue.
Le tenancier peut purger fa contumace
ou demeure de payer , en offrant de payer
les arrérages au feigneur, pourvu que ce
foit avant la demande formée en juftice par
le feigneur à fin de commifc.
Pour empêcher la commifc , il faut payer
en entier les arrérages qui Ibnt dûs : le paie-
ment d'une partie ne fuffiroir pas.
Si le tenancier eft créancier du feigneur
bordelier, il doit, pour éviter la commifc ,
demander la compenfation ; car en ce cas
elle ne fe fait pas de plein droit, à caufe
de la nature de la dette, & que le tenan-
cier doit reconnoître le bordelage envers
le feigneur.
Au cas que celui-ci refusât le paiement
pour ufer de commifc ^ le tenancier doit lui
faire des offres réelles , S: le faire affigner
pour voir ordonner la confignation ; &
lorfqu'elle eft ordonnée, Teffedluer &c la
Signifier au (éigneur.
Les amélioraiioçs faites fur l'héritage qui
tombe en commifc , fui vent le fonds, ^fans
que le feigneur foit tenu d'en faire raifon
au tenancier. VoyciQo<\\i^.Q fur le Niver-
nais , loc. cit. & Defpommiers , art. S02
de celle de Bourbonnois.
Commise censuelle ou en censi-
^ VE , eft la confifcation qui fe fait au profit
du feigneur direft d'un héritage roturier tenu
de lui encenfive , pour caufe de défaveu ou
félonie du cenfitaire : cette forte de com-
mifc n'a pas lieu dans le droit commun ,
Suivant lequel il n'y a que les fiefs qui font
fujets à tomber en commifc , au profit du
feigneur ; elle eft feulement reçue dans quel-
ques coutumes, comme celle de Norman-
die ; voye^ BiinsLgQ^fur l''art. cxxv de cette
coutume : & dans celle d'Anjou & Maine ,
ffoyci Poquet de Livoniere, des fiefs ^ liv.
C O M
//, ch, ij , fccl. 4 ; Guyot , des fiefs , tr. de
la commifc ,p. ^oG\ elle fe règle en tout
comme la commifc fcodale\ voyez M. de
Boutaric, en fon tr. des dr.feign. part. III y
ch. V ^ de la commifc des cenfpcs.
Commise emphytéotique ou en
EMPHYTÉOSE, qu'on appelle 2M^\ commis
ou droit de commis , eft le droit que le bail-
leur a de rentrer dans l'héritage par lui donné
à titre d'emphyîéofe , faute de paiement de
la redevance pendant un certain temps.
Cette commifc eft fondée fur les loix fé-
conde & troifieme, au code de jure empliy-
teutico. La loi ij ouvre la commifc par le
défaut de paiement du canon ou redevance
emphytéotique pendant trois années con-
fécuiives , quand même la condition de
payer, & la peine du défaut de p:iiement ne
feroient pas écrites au contrat. Godefroy ,
fur cette loi, obiérve qu'il falloir un juge-
ment qui déclarât la commifc ouverte.
La loi iij marque un fécond cas , dans
lequel il y avoit ouverture à la commifc ;
favoir, lorfque l'emphytéote vendoit l'hé-
ritage à un autre fans le confentement du
bailleur: mais l'emphytéote avoit un moyen
pour éviter cette commife\ c'étoit lorfqu'il
vouîoit vendre, & qu'il avoit fait lepiix,
d'aller trouver le bailleur & de lui offrir aux
mêmes conditions. Le bailleur avoit deux
mois pour délibérer & demander la préla-
tion ou préférence ; fi le bailleur laiftbit
écouler les deux mois fans ufer de fon droit,
l'emphytéote pouvoit vendre librement, &
le bailleur ne pouvoit refufer d'admettre le
nouvel emphyîéote.
L'ufage de la commifc ou commis em-
phytéotique appartient plus aux pays de droit
écrit qu'aux pays coutumiers , attendu que
dans ceux-ci les baux emphytéotiqites ne
font ordinairement que de 99 ans , au lieu
que la vraie emphytéofe des pays de droit
écrit eft perpétuelle.
Cependant les parlemens de droit écrit
n'ont pas tous également adopté la difpo-
fition des loix dont on vient de parier fur
la commifc emphytéotique.
MM. Salvaing &c Expiliy difent qu'elle
n'a plus lieu en Dauphiné , même pour
les fiefs , foit faute de paiement de la re-
devance , foit pour la vente du fonds faite
fans le conièncement du bailleur.
Il
cou
Il en eft de même au parlement de Tou-
loufe : mais Defpeiiïes dit , que fi Temphy-
téote s'obilinoit à ne vouloir point payer le '
cens , il feroit évincé de l'héritage après quel-
ques condamnations comminatoires.
Le même auteur dit que la commife n'a
pas lieu à Montpellier , &: que dans le refte
du royaume elle ne s'obferve pas non plus à
la rigueur.
Cependant en Bourgogne la commife n*a
lieu , faute de paiement de la redevance ,
que quand cela eft ainfi ftipulé dans le bail
emphytéotique , auquel cas il n'efl: pas befoin
d'interpellation de payer : elle y a pareille-
ment lieu en cas de vente , fans le confen-
tement du feigneur , lorfque le bail le porte
expreffément. Voye^^ Us cahiers d& réforma-
tion de La coutume.
Dans l'emphytéofe d'un bien d'églife , la
commife a lieu par le défaut de paiement des
arrérages pendant deux années. Novclle vijy
CA. J.§ 2.
La commife a àufli lieu lorfque l'emphy-
téote détériore le fonds, de manière que la
rente ne foit plus affurée :cela s'obferve aux
parlemens de Touloufe & de Dijon.
L'emphytéotequieft évincé perd fes amé-
liorations. VoycT^ Defpeifîes , tome III ^ des
droits feigneuriaux , article v ; Guyot , des
fiefs , tome //^, titre du droit de commife en
émphythèote.
Commise féodale , eft laconfifcation
du fief du vaflal au profit du feigneur , au-
quel il appartient comme réuni à fa table.
Suivant l'ufage le plus général , cette com-
mife a lieu en deux cas ; favoir , pour caufe
de défaveu formel, & pour caufe de félonie.
Le droit de commife féodale paroi t avoir
été établi à l'inftar de la commife emphytéo-
tique , dont il eft parlé dans les loix ij &: iij ,
au code de jure emphyteutico.
Si ce que l'on dit de la commife encourue
par Clotaire II , eft vrai , l'ufage de ce droit
feroit fort ancien en France. V^oye'^ ci-après
Commise PASSIVE. •
Ce qui eft de certain eft qu'elle avoit déjà
lieu , fuivant l'ancien droit des fiefs qui le
trouve dans les livres des fiefs, compilés par
Obert de Ofto & Gerad le Noir , tous deux
jurifconfultes milanois , du temps de l'em-
pereur Frédéric qui régnoit vers l'an 1160.
Suivant ces loix dei fiefs, la commife féo-
Tome VIII.
C O M 64Ï
da/e avoit lieu en plufieurs cas, dont quel-
ques-uns font conformes à notre ufage : les
autres font encore ufités en Allemagne &
en Flandre.
La commife avoit lieiT , lorfque le nou-
veau vafîal négligeoit d'aller demander l'in-
veftiture dans l'an Ôc jour; ce qui doit s'en-
tendre de l'héritier du vafîal , &: non de
l'acquéreur : car il n'étoit pas permis alors de
vendre le fief fans le confentement du fu-
gueur dominanr. La prefcription de 30 ans
mettoit feulement à couvert de cette com-
mife,
2°. Celui qui aliénoit fon fief invito vel
irrequifùo domino , perdoit fon fief; & l'ac-
quéreur de fa part perdoit le prix qu'il en
avoit payé , lequel tournoit au profit du fifc :
ce qui a encore lieu en Bourgogne où les
fiefsfont en danger, non pas àla vérité pour
la vente , mais pour la prife de polTeflion.
^°. Si dans le combat , le vaflal abandon-
noit lâchement fon feigneur.
4'*. S'il avoit fu quelques attentats contre
fon feigrf^ur , & ne l'eut pas averti.
5°. S'il avoit été le délateur de fon fei-
gneur.
6'^. S'il manquoit à quelqu'un des fervices
auxquels ilétoit obligé , comme fervices de
plaids, auquel cas il falloir que le vaflal fût
contumace pour encourir la commife : ce
fervice de plaids eft encore ufité en Picardie :
le vaflal eft appelle /^er^ du fief dominant ;
mais s'il manque à ce fervice , il ne perd pas
pour cela fon fief.
j^. Si le vaflal entroit en religion ou fe
faiibit prêtre , il perdoit fon fief , parce qu'il
ne pouvoir plus en faire le fervice; mais en
cecaslefiefalloita^^_g'/z^W5. Ilyavoitmême
des fiefs affeftésà des eccléfiaftiques.
8". Lorfque le vaflal détérioroit confidé-
rablement fon fief, 6>c fur-tout s'il abufoit
du droit de juftice.
9*^. Le défaveu fait fciemmentemportoit
auffi perte de fief; mais la commife n'avoit
pas lieu lorfqu'il avouoit un autre feigneur.
lo*^. La commife avoit lieu pour feion.c ,
& ce crime fe commetîoit de plufieurs fa-
çons, par exemple, fl le valTal avoit vécu en
concubinage avec la femme de fon feigneur,
ouqu il eût pris avec elle quelques familiarités
déshonnêtes; s'il av^t débauché la fille ou
la petite-fille de fon feigneur : la même peine
Mm m m
^41 C O M
avoit lieu par rapport à la Cœur du Teigneur
non mariée, lorfqu'elle demeuroit avec fon
frère ; il y avoit nuffi félonie , lorfque le
vafTal attaquoit fon feigneur , ou le château
de fon feigneur , fâchant que le feigneur ou
la dame du lieu y étoient. Le meurtre du
frère du feigneur n'étoit pas feul une caufe
de commife , m.iis elle avoit lieu lorfque le
vaiTal avoit tué le frère ou le neveu du fei-
gneur , pour avoir feul une hérédité qui leur
étoit commune. Koye^ Félonie.
La commifi n'étoit point encourue de
plein droit, il falloitun jvigement qui la pro-
nonçât , & le vaffal pouvoit s'en défendre
par pliifieurs circonftances , comme pour
caufe de maladie , abfence, erreur de fait,
&c. iefquelles excufes recevoient leur appli-
cation félon les différens cas.
Il y avoit réciprocité de commife entre le
. feigneur & le valîal ; c'eft-à-dire , que la plu-
part des cas qui faifoient perdre au vaflal
ion fief, faifoient auffi perdre au feigneur la
mouvance, lorfqu'il manquoit à quelqu'un
^Q'i devoirs dont il étoit tenu envers fon
vaffal.
En France on ne connoît, comme nous
l'avons déjà dit , que deux caufes qui
donnent lieu à la commife , favoir , le défa-
veu &: la félonie.
Dans les pays de droit écrit , & dans la
coutume d'Angoumois qui les avoifine, le
défaveu ne fait pas encourir la commife; il
n'y a que la félonie.
En pays coutumier , le défaveu & la félo-
nie font ouvertes à la commife.
Dans quelques coutumes , comme Niver-
nois , Melun , Bourbonnois &: Bretagne,
il y a \\n troifieme cas où la commife a lieu ;
favoir, lorfque le vaffal , fciemment & par
dol, recelé quelque héritage ou droit qu'il
ne comprend pas dans fon aveu ôc dénom-
brement.
La commife n'a pas lieu lorfque le vaffal
foutient que fon fief relevé du roi , parce
que ce n'eff pas faire injure au feigneur que
de lui préférer le roi.
Mais fi le procureur du roi abandonne la
mouvance , &: que le vaffal perfifte dans fon
défaveu, il encourt la commife.
La coutume d'Orléans, art. Ixxxj ^ dit
que fi le feigneur prouve fa mouvance par
des titres qui remonttînt à plus de cent ans ,
CO M
il n'y a point de commife , parce que le vaffal
a pu ignorer ces titres.
Lorfque le vaffal dénie que l'héritage foit
tenu en fief, & prétend qu'il eft en roture ,
fi mieux n'aime le feigneur prouver qu'il eft
en fief, il n'y a point lieu à la commife.
Elle n'a pas lieu non plus lorfque le fei-
gneur prétend les droits extraordinaires, &
que le vaffal refufe de les payer, le feigneur
étant obligé d'inftruire fon vaffal.
La confifcation du fief ne fe fait pas de
plein droit , il faut qu'il y ait un jugement
qui l'ordonne.
Si le feigneur ne l'a point demandé pen-
dant la vie du vaffal, la peine eft cenfée
remife.
Il en eft de même lorfque le feigneur ne Ta
point demandé de fon vivant, (&s héritiers
ne font pas recevabies à la demander.
Le fief confifqué, & tout ce qui y a été
réuni, demeure acquis au fief dominant,
fans qu'il en foit dû aucune récompenfe à la
communauté.
Il demeure chargé des dettes hypothécai-
res du vaffal.
Un bénéficier ne peut pas commettre la
propriété du fief attaché à fon bénéfice ,
parce qu'il n'en eft qu'ufufruitier \ il ne perd
que les fruits.
Le mari peut par fon fait commettre
feul les conquéts de la communauté , mais il
ne peut pas par Ion fait perfonnel commettre
la propriété des propres de fa femme , à
moins qu'elle n'ait eu part au défaveu ou
félonie ; il encourt feulement la confifcation
des fruits.
La femme peut commettre Ces propres,
mais elle n'engage point les iruits au préju-
dice de fon mari.
Le baillifte ou gardien ne commet que les
fruits.
La commife n'eft point folidaire, c'eft-à-
dire , que fi le fief fervant appartient à plu-
fieurs vaffaux , il n'y a que celui qui, défa-
voue qui'^commet fa portion.
Le feigneur qui commet félonie envers
fon vaffal, perd la mouvance dufieffervanr.
V^oye^^ les livres des fiefs ; Struvius , dans
fon Syntagma juris feudaUs ^xh. xv , de
amijjionefiudi ; GudeYmus &i Zoezius, fur
les mêmes titres ; Julius Clarus , quœft. xlvi/.
§ feudum, Poquet de Livonniere 3 Guyot
C O M
& Biilecoq, en leurs Traites des fufs ; &
Us art. DÉSAVEU & FËLONIE.
Co xM M I3E (Tun hériiagc tailUibh , eft la
confiscation d'un héritage fujet au droit de
taille feigneuwale qui a lieu au profit du fei-
gaeur , lorfque le propriétaire de l'héritage
dirpole delà propriété fans le confentement
du feigneur. Cette commifc a lieu dans la
coutume de Bourbonnois, art, ccccxc y &
dans celle de la Marche , an, cxli'ii/.p3ins
ces coutumes , le tenancier d'un héritage
taillable ne le peut vendre en tout ni en par-
tie , ni le donner ou tranfporter , échanger ,
ou autrement aliéner, ou en difpoler Toit
entre-vifs ou par teftament , fans'le confen-
tement du feigneur taillablier , quand même
ce feroit pour fournir à la fubfiftance ôc aux
alimens du propriétaire.
On excepte néanmoins la donation en
avancement d'hoirie faite àundesenfans du
tenancier , laquelle ne tombe pas en com-
mife.
Il fautauffi excepter les taillabl es qui tien-
nent un héritage par indivis ; ils ne peuvent
à la vérité le démembrer , foit au profit de
l'un d'eux ou d'un étranger , fans le confen-
tement du feigneur ; mais chacun des co-
perfonniers peut céder fa part indivife à un
de ks co-perfonniers fans le confentement
du feigneur , parce que chacun d'eux avoit
déjà un droit indivis dans la totalité , &que
c'eft moins une nouvelle acquilition, que
Jure non decrefceridi.
Les co - perfonniers taillables peuvent
aufli, fans le confentement du feigneur,
faire entr'eux desarrangemenspourlajouif-
fance, mais non pas pour la propriété.
Au refte la prohibition d'aliéner l'héritage
taillable fans le confentement du feigneur ,
ne regarde que la propriété; car le tenancier
peut librement difpofer des fruits , &: (es
créanciers s'y venger , tant qu'il en eft pof-
fefTeur.
Quelques-uns tiennent que fi une maifon
menace ruine , Se que le tenancier ne foit pas
en état d'y faire les réparations , il peut l'of-
frir en vente au feigneur ; & que fi celui-ci
refufe de l'acheter , le tenancier peut la
vendre à un autre : ce qui paroît fondé fur
équité.
Lorfque le tenancier n'a difpofé fans le
confentement du feigneur que d'une partie
CO M 643
de î'Iiéritage , il n'y a que C'^tte portion qui
tombe en commife.
Il ne tljfnc pas pour prévenir h commife de
fiipuîer dans la vente ou autre difpofition ,
qu'elle n'eft faire que fous le bon plaifir &
confentement du feigneur ; fi le vendeur s'en
deiTaifit , & que l'acquéreur en prenne pof-
fefiion réelle avant d'avoir obtenu l'agré-
ment du feigneur, la commife efi: encourue
à fon profit.
Mais la vente ou difpofition ne fait pas
feule etîcourir la commife^ , quand même
l'acle contiendroit une réferved'ufufruitau
profit du vendeur, & que l'acquéreur auroit
par ce moyen une poirefiion fidive, parce
que le vendeur , à cet égard , n'eft cenfé dé-
pouillé que par la prife de poffefiion réelle
&: adluefle de l'acqnéreur : jiiique-là les par-
ties peuvent fe rétra(fter.
Celui qui a vendu ou autrement aliéné un
héritage taillable, fans le confentement du
feigneur , n'eft pas tenu de livrer l'héritage
fi le feigneur n'y confent ; attendu que l'hé-
ritage tomberoit en commife , & que par con-
féquent l'acquéreur n'enprofireroit pas : mais
fi l'acquéreur a pu ignorer & ignoroit effec-
tivement que l'héritage fût taillable , il peut
agir endommages & intérêts contre le ven-
deur pour l'inexécution du contrat.
Quoique quelques coutumes fuppofentla
commife encourue ipfo facto , néanmoins
l'ufage eft que le feigneur fafte prononcer
en juftice la commife; s'il n'en forme pas la
demande , fon fiîence pafie pour un confen-
tement tacite , tellement que l'acquéreur
n'eft tenu de rendre les fruits que du jour de
la demande , & non du jour que la commife
eft ouverte.
Lorfque le feigneur reçoit les droits , oti
approuve de quelqu'autre manière la vente,
la commife n'a pas lieu ; on tient même que le
confentement du mari fuffit pour les héri-
tages taillables qui font de la cenfive de fa
femme ; ce qui eft fondé fur ce que ces droits
font infriiclu , & appartiennent au mari.
Par une fuite du même principe , quand le
feigneur ufe de la commife , l'ufufruitier ou
fermier de la feigneurie jouit pendant le
temps de fa ferme de l'ufufruit de l'héri-
tage tombé en commife , parce que la com^
mife eft confidérée comme ufufruit.
Le droit de c-ommife étant de pure faculté^
M m mm 2
^44 C O M
ne ie prefcrit point pour n'en avoir pàsufé
dans certains cas ; la prefcription ne com-
mence à courir que du jour de la contradic-
tion faite par l'acquéreur ; mais l'exercice de
la commife qui eft ouverte , fe prefcrit par
trente ans comme toutes les allions perfon-
lîclles.
Le roi ni ceux qui le repréfentent , n'ufent
pas du droit de ccmmifc pour les héritages
taillables qui font tenus de lui -, mais ils ont
auffi un droit de lods éventes plus fort.
Pour ce qui eft de l'églife, elle n'ufe de
commife fur fes héritages taillables que dans
les lieux où elle eft en pofteftion de ie faire.
^.Defpommiers fur les art. ccccxc & ccccxcj
de la coutume de Bourbonnois , & Jabely fur
Vart. cxlv'ùj de celle de la Marche , & Cart.
Taille seigneuriale.
Commise passive eft oppofé à com-
mife aclive.N. ci'dev. COMMISE ACTIVE.
La commife paffive peut auffi s'entendre
de la confifcation qui a lieu contre le feigneur
pour la mouvance d'un fief, lorfqu'il s'eft
rendu coupable de félonie envers fon vaftal ,
c'eft-à-dire, lorfqu'il a commis contre lui
quelque forfait & déloyauté notable. On
trouve dans quelques-uns de nos hiftorie*ns
•un exemple fameux de cette forte de commife
faffîve ; favoir , celui de Clotaire II , qui Sui-
vant quelques-uns de nos hiftoriens, perdit
la mouvance de la feigneurie d'Yvetot dans
le pays de Caux , pour le meurtre par lui
commis en la perfonne de Gautier , feigneur
d'Yvetot. Le fait à la vérité paroît juftement
■contefté ; mais ce qui en eft dit prouve tou-
jours qu'on étoit dès-lors dans l'opinion que
la commife auroit lieu contre le feigneur en
pareil cas.
Commise TAILLABLIERE, voyei ci-
devant Commise d'un héritage taillablc
Co M M ISE du feigneur contre le vafjal &
cenfitaire. V. ci-devant COMMISE FÉO-
DALE & Commise censuelle.
Commise </« vafj'al contre le feigneur ,
voyez a-û'a'<zm Commise passive. {A)
COxMMISS AIRES , fub. m. pi. ( Junfp:)
eft le nom que l'on donne à certains officiers
qui font commis , foii par le roi direâ;ement ,
ibit par quelque juge , pour faire certaines
-fonélions de juftïce ou police. Il y en a de
plufieurs fortes : les uns qui font en titre d'of-
&e ou commiffion permanente, qui font
C O M
établis parle roi pour faire ordinairement cer-
taines foncf ions; les autres qui n'ont qu'une
fimpie commiflion pour un temps limité &
pour une affaire particulière , foit que la
commiffion émane du roi , 0>j qu'elle foit
feulement émanée de quelque juge.
La première ordonnance où l'on trouve le
terme de commifjaire employé, commiffarii^
eft celle de S. Louis en 1254; depuis ce
temps il eft devenu d'un ufage fréquent ; nous
expliquerons dans les fubdivifions fuivantes
les fondions des différentes fortes de com^
mifjaires qui ont rapport à la juftice. {A)
Commissaires AuCHATELET,(yi/-
rifprud. ) qu'on appelle auffi commijfaires-
enquêteurs-examinateurs , font des officiers
de robe longue établis pour faire certaines
inftruftions ou fondions de juftice & police ,
à la décharge des magiftrats du châtelet.
Le commiffaire de la Mare qui étoit fort
zélé pour l'honneur de fa compagnie , pré-
tend dans foîi Tr. de la police , tom. 1 , 1. 1 ^
tit. a:i/,que les enquêteurs-examinateurs font
plus anciens que les confeillers au châtelet.
Mais il eft certain , comme nous le prou-
verons ci-après au mot CONSEILLERS au
châtelet , que ceux-ci font plus anciens ; que
c'étoient eux qui faifoient autrefois les en-
quêtes, informations, partages,& toute l'inf-
trudion; que ce qui eft dit dans les anciens au-
teurs & dans les regiftres publics jufque vers
l'an 1300 au fujet des auditeurs & enquê-
teurs , ne doit point s'entendre d'officiers qui
fuffent en titre pour ces fondions , mais de
confeillers ou avocats qui étoient délégués à
cet t^et par le prévôt de Paris , & autres ju-
ges ; il n'eft donc pas étonnant qu'il foit dit en
plufieurs endroits que lesauditeurs & enquê-
teurs avoient féance & voix délibérative au
châtelet, puifque c'étoient ordinairement des
confeillers qui faifoient cette fondion , 5c
c'étoit comme confeillers qu'ils avoient
cette féance.
On ne trouve point de preuve certaine
qu'avant l'an 1300, il y eût au châtelet des
enquêteurs ou examinateurs en titre , &: dont
la fondion fur permanente & féparée de
celle des confeillers. {A)
Les examinateur?, appelles depuis com-
miffaires au châtelet , ont eux-mêmes re-
connu dans deux arrêts que les confeillers
du châtelet étoient plus anciens qu'eux.
CO M
On voltdans le [,re:nier de ces arrêts , qui
cft du 5 août 1434, qu'il fut dit par Chauvin
& conforts , examinateurs au châtelet , qu'^^
amiquo il n'y avoit nombre d'examinateurs
qui fût ordinaire ; mais que les confeillers
du châtelet , qui font douze , étoient comme
les confeillers de la cour; qu'eux-mêmes
faifoient les enquêtes , oc ne poftuloient
point en manière d'avocats ; & que depuis
fut mis certain nombre d'examinateurs.
Le fécond arrêt , qui eft du 10 mai 1 502 ,
fut rendu entre lesfeize examinateurs d'une
part , & les lieutenans civil & criminel , &
les confeillers au châtelet d'autre part. Les
examinateurs reconnurent , du moins taci-
tement , que leur éreâiion ne remontoit
pas plus haut que vers l'an 1 300. En effet , à
l'audience du 2 mai 1 502 , leur avocat parla
feulement de l'ordonnance qui avoit établi
les feize examinateurs ^ fans la dater : l'avo-
cat des confeillers au châtelet dit qu'on avoit
d'abord érigé au châtelet le prévôt de Paris
& douze confeillers ; que depuis flirent com-
mis deux lieutenans, l'un civil, l'autre cri-
minel : & l'avocat du lieutenant criminel dit
que de tout temps &; d'ancienneté ,plus de
deux cents ans, & long-temps avant l'érec-
tion des examinateurs , les lieutenans civil &
criminel de la prévôté avoient accoutumé de
faire jles enquêtes ; qu'il n'y avoit qu'eux
qui les fiffent , n'étoient les confeillers ou
avocats auxquels ils les cammettoient ; que
depuis pour le foulagement àes lieutenans ,
qui ne pouvoient bonnement entendre à faire
les enquêtes & expéditions des procès pen-
dans au châtelet, pour la grande multitude
des caufes & affluence du peuple , il fut or-
donné par le roi qu'il y auroit feize examina-
teurs dans cette ville es feize quartiers, fous
lefdits lieutenans , pour eux s'enquérir des va-
gabonds & maléfices , & le rapporter au châ-
telet , & aufîi pour faire nettoyer les rues ,
vifiter les boulangers , & entendre furie fait
de la police ; qu'il fut aufli dit qu'Us feroient
les enquêtes des procès pendans au châtelet.
Tels font les faits énoncés dans cet arrêt,
qui ne paroiffent point avoir été contredits
par les examinateurs ; ce qui confirme que
les confeillers ont été établis avant les exa-
minateurs en titre , & que ces derniers l'ont
eux-mêmes reconnu.
li paf oît par des lettres de Philippe-Ie-Bel,
C O M
du mois d'avril 1301 , que les notaires du
châtelet fe plaignirent de ce que le prévôt,
les auditeurs , 6»^ les enquêteurs ou exami-
nateurs faifoient écrire leurs expéditions par
d'autres perfonnes qu'eux ; & Philippe-!e-
Bel leur ordonne de fe fervir du miniftere
des notaires.
Au mois de mai 1313 , ce même prince
trouvant que les examinateurs qui éroient
alors en place avoient abufé de l|airs char-
ges , les fupprima , & ordonna que les en-
quêtes feroient faites par les notaires , ou
par d'autres perfonnes qui feroient nommées
par les auditeurs ou par le prévôt.
Philippe V , au mois de février 1310, or-
donna que les notaires du châtelet pour-
roient examiner témoins en toutes les caufes
mues & à mouvoir au châtelet, félon ce que le
prévôt & les auditeurs du châtelet leur com-
mettroient, & fpécialement ceux que les
parties requéreroient & nommeroient de
commun accord.
Il ordonna cependant en même temps
qu'il y auroit au châtelet huit examinateurs
feulement , qui feroient loyaux & difcretes
perfonnes choifiespar les gens de comptes;
que ces examinateurs pourroient examiner
les témoins en toutes caufes, ayant chacun
pcHjr adjoint un notaire. Leur falaire eft auffi
réglé par la même ordonnance.
Celle de Philippe de Valois , du mois de
février 1 3 2.7 ? fixa le nombre des examina-
teurs du châtelet à douze , qui étoient diftri-
bués deux à deux en fix chambres , où l'un
interrogeoit les témoins, & l'autre écrivoit
les dépofitipns.Cette ordonnance défend aux
examinateurs de fe mettre au rang du fiege du
prévôt de Paris : elle leur défend auili d'être
avocats , notaires , penfionnaires , ni procu-
reurs, &c détenir aucun autre office au châ-
telet. Elle règle aufii leurs falaires , & la ma-
nière de leur donner les faits & articles.
llfe trouva quelques années après jufqu'à
vingt- deux, examinateurs pourvus par le
roi; c'eft pourquoi Philippe de Valois, par
des lettres du 24 avril 1337, eniixa le nom-
bre à feize , qu'il choifit parmi ceux qui
exerçoient alors , & ordonna que les fix
furnuméraires rempliroient \qs places qui
deviendroient vacantes.
Ce nombre de feize fut confirmé par des
lettres du roi Jean, du premier juin 1353 ;
6^G C G M
de Charles V , du mois àz juin 1366 ;& de
Charles VI , du mois de juin 1 3 80.
Ces charges étoient recherchées avec tant
d'empreiTeinent , que Louis XI en attendant
qu'il y en eût de vacantes , en créa quatre
extraordinaires , par édit du mois de janvier
1 464 : il en donna deux aux nommés AJfailly
& Chauvin , pour récompenfe des lervices
qu'ils lui avoient rendus. Mais les feize ordi-
naires s'é^ant oppofés à leur réception , cela
donna lieu à une longue conteftation;ce qui
engagea Louis XI à fupprimer les quatre
nouveaux offices , par un édit du mois de
mars 1473.
AfTaiîly eut cependant le crédit de faire ré-
tablir pour lui un de ces offices , & y fut reçu.
Comme il s'éleva encore à ce fujet des
difficultés; LouisXI,au mois de juin 1374,
créa quatre offices d'examinateurs ordinai-
res, & en donna un à ce nouveau pourvu.
Il y eut oppofition à l'enrégiftrement , &
cette nouvelle création n'eut pas lieu.
Au mois de décembre 1477, Louis XI
créa encore deux nouvelles charges d'exa-
minateurs , & au'mois de février fuivant un
office d'examinateur extraordinaire.
Mais Charles VIII, par des lettres du 27
feptembre 1393 , rétablit l'ancien nombre
de feize , & fupprima les furnuméraires : &
Louis XII au mois d'oftobre 1 507 , ordonna
que ce nombre demeureroit fixe , fans pou-
voir être augmenté.
Cependant François I, pas fon édit du
mois de février i^ii , en créa feize nou-
veaux , & leur donna à tous le titre de cnm-
mijfaires ^qm renferme tous les autres titres
qu'ils portoient autrefois. Il y eut plufieurs
conteftations entre les anciens & les nou-
veaux , qui furent terminées par farrêt du
grand-confeil , du premier août' 1 534 , por-
tant que les uns & les autres jouiroient des
mêmes droits & prérogatives.
Il fut créé le 7 feptembre i«;70,untrente-
troifieme office de commijfaire au châteîet,
& au mois de juin 1586 huit autres ,qui par
une déclaration du même mois furent réduits
àfept; ce qui fit en tout le nombre de 40.
Dans la fuite ce nombre ayant paru excef-
{îf, eu égard à l'état où étoit alors la ville de
Paris , il fut ordonné par un édit d'oélobre
1603 , que ceux qui vaqueroient feroient
fupprimés , jufqu'à c& qu'Us fuffent réduits à (
C O M
trente-deux; mais il n'y en eut qu'un qui
fut rembourfé.
Au mois de décembre 1635 , Louis XIII
créa vingt-un offices de comm'ijjairc au châ-
teîet , pour faire avec les trente-neuf qui
fubfiftoient , le nombre de foixante. Par des
lettres du mois de juillet 1638, les vingt-un
nouveaux offices fiirent réduits à neuf, au
moyen de quoi il y avoit alors quarante- huit
commiffaires.
Ils prennent tous le titre de maîtres ; Se
depuis 1668 ils prennent auffile titre de con-
fciUcrs du roi , en vertu de lettres-patentes
du mois de juin de ladite année , qui leur ont
donné le titre de confeiUers du roi , commif-
faires enquêteurs examinateurs au châteîet
de Paris.
Ces lettres leur accordent auffi le droit
de parler couverts aux audiences ; le droit
de vétérance au bout de vingt années d'exer-
cice , la confirmation de leur franc-falé , &
l'extenfion de leurs privilèges à leurs veuves.
Le roi accorda auffi une penfion à la compa-
gnie , &c en fit efpérer de particulières à ceux
qui fe diftingueroient dans leur emploi.
En 1674, lorfque l'on créa le nouveau
châteîet , on créa en même temps dix-neuf
commijfaires qui furent incorporés aux an-
ciens, pour fervir en l'un & l'autre iiege.
Par une déclaration du 23 d'avril de la même
année , les dix-neuf nouveaux offices fu-
rent réduits à fept , pour ne compofer
qu'un même corps avec les quarante-huit
anciens. Enfin par fucceffion de temps , le
nombre des charges a été réduit à cinquante ,
dont deux ont été acquifes par la compagnie,
enforte qu'il ne refle que quarante-huit titu-
laires.
La foncflion àes commiffaires en matière
civile, confifte à appofer & lever les fcellés
dans la ville , fauxbourgs & banlieue de
Paris , & par fuite dans toute l'étendue du
royaume. Ils font les enquêtes & interroga-
toires fur faits & articles , entendent les
comptes de tutelle , de commufiauté , d'exé-
cution teflamentaire ; font les partages entre
héritiers, les ordres & contributions, les
liquidations dédommages & intérêts, &les
taxes des dépens.
Par rapporta la police , ils font diftribués
dans les vingt-un quartiers difFérens de la
ville , pour veiller au bon ordre 6c à la fureté
C O M
publique. Il y en a communément deux ou
trois dans chaque quartier. Ils fontauffi pré-
pofés pour tenir la main à l'exécution des
réglemens de police , &: peuvent faire affi-
gner les contrevenans à la police pour être
condamnés en l'apnende , & en telle autre
peine qu'il y échet.
En matière criminelle ils ont auffi plu-
fieurs fondions, qui confiftent entre autres
à recevoir les plaintes qui leur font portées ,
à faire d'office les informations , interroga-
toires , &: procès-verbaux préparatoires ;
lorfque l'accufé eft pris en flagrant délit, ils
peuvent même le faire conduire en prifon,
mais ils ne peuvent pas le faire écrouer. Ils
font aufli en vertu d'ordonnance du lieute-
nant criminel , toutes informations , procès-
verbaux , interrogatoires de ceux qui font
décrétés d'ajournement perfonnel. Ils ren-
dent des ordonnances pour faire affigner les
témoins en vertu d'ordonnance du juge qui
permet d'informer , & pour affigner à com-
paroître au tribunal dans certains cas ,
comme pour répondre au rapport d'une
plainte , foit au civil ou au criminel , & pour
affigner en leur hôtel dans les matières de
comptes , partages , ordres , &c.
Enfin ils font prépofés pour exécuter tous
les ordres , mandemens , & commiffions des
iieutenans civil, de police & criminel.
Ils jouiffient de plufieurs prérogatives &
privilèges , tels que le droit d'avoir une
féance marquée aux audiences aux pies des
juges, & à toutes les affi^mblées générales
de police ; &c ils peuvent fe couvrir en fai-
fant leur rapport.
Ils ont auffi le droit de garde-gardienne ,
committimus aux requêtes de l'hôtel & du
palais, le franc-falé, exemptions du droit
d'aides & autres impofîtionspour les vins &
grains de leur crû; exemptions de tailles,
emprunts , & autres fubiicfes ordinaires &:
extraordinaires; exemption de logement de
gens de guerre & de fuite de la cour, de
toutes charges de ville & publiques, de tu-
telle & curatelle. Le roi les difpenfe de payer
leur paulette, au moyen d'un acquit patent
qui leur eft délivré, ainfi qu'à plufieurs auires
officiers du châtelet. Ils jouiflTeat auffi du
droit de vétérance , &: de plufieurs autres.
Oii trouvera un plus ample détail de ce qui
concerne l'établiflement, les fondions ÔC
COU 647
privilèges des commijfairesau chdtelct\ dans
le Tr. de la police , tome I , liv. /, lit. xij.
Commissaires du conseil, voye^^
ci-après CoNSEiL DU ROI , à l'article Com-
miJJ aires. •
X^OMMISS AIRES conferi-'aeeurs gériéraux
des décrets volontaires , étoient des officiers
établis parédit du mois de janvieriyoS, dans
toutes les juftices royales, pour avoir inf-
peclion fur tous les décrets volontaires qui
fe feroient dans leur reflort, confcrver les
droits des vendeurs & acquéreurs des hérita-
ges Vautres immeubles décrétés volontaire-
ment, & empêcher que par dol , fraude,
collufion , ni autrement. Ces décrets volon-
taires ne devinrent forcés. L'acquéreur qui
pourfuivoir un décret volontaire, étoit obligé
de faire enrégiftrer fa faifie réelle & fon con-
trat d'acquifition au bureau de ces commif-
faires , avant de faire procéder aux criées.
Onleur donna des contrôleurs, & on attribua
aux uns & aux autres des droits fur les dé-
crets , & différens privilèges. Mais les con-
trôleurs furent réunis aux commijjaires pour
toutes les jufiices de la ville , fauxbourgs &
généralité de Paris, par une déclaration di\
19 février 1709; & par une autre déclaration
du 9 avril îliivanf, il fut ordonné que les
offices de commijfaires des décrets volon-
taires anciens , alternatifs & triennaux , dans
les cours & jurifdidions de la ville, faux-
bourgs &: généralité de Paris, & ceux de
leurs contrôleurs , feroient exercés fous les
titres à^ anciens mi-triennaux , & ai alterna-
tifs mi-triennaux.
Ces offices àe commijfaires furent fuppri-
méspour la Bourgogne , par un éditdu mois
de mai 1708 ; & par un autre édit du mois
d'août 171 8 , ils forent fupprimés dans tout
le refte du royaume. Cet édit a feulement
réfervé la moitié du droit qui fe payoit pour
les décrets volontaires. Voye:^ ce qui eft dit
de ces offices , dans le Traité de la vente
des immeubles par décret de M. d'Héricourt,
pan, I , ckap. dernier , n. S.
Commissaires DES dé ci mes, furent
créés par édit de novembre 1703 » pour faire
dans chaque diocefe le recouvrement des
décimes : mais par déclaration du 4 mars
1704 , ils furent réunis aux offices de rece-
veurs généraux & particuliers.
Commissaires aux décrets yo-
^45 C O M
LONTArnES, V. ci-dcv. Commissaires
confevatèurs généraux des décrets volon-
taires.
Co M MISS AiRïS départis par le roi dans
les provinces. ^^07^:5; IntENDANS.
Commissaires enquêteurs exa-
minateurs, (Jwifp.J font des officiers
de robe longue, établis pour faire certaines
inftruftions & fonctions de juftice & poli-
ce, à la décharge des juges tant civils que
criminels , & de police.
De la Mare , en fon Tr. delà police , tom,
/, liv. ly tit. xij , fait remonter l'origine dt
ces officiers jurqu'aux temps les plus reculés.
Il y avoit , feloniui , de femblables officiers
chez les Hébreux , chez les Grecs Se chez les
Romains. Il prétend que chez tous ces peu-
ples , & en particulier chez les Romains , il
y avoit deux fortes d'officiers principaux
établis auprès des magiftrats , & qui en-
troient en participation de foins & de leurs
tondions; que les uns, qui font toujours
nommés ûjfejfores magiftratuum , étoient
établis pour affifter le magiftrat au tribunal,
& lui donner avis & confeil dans le juge-
ment & la décifion des affaires les plus im-
portantes; & que c'eft de-là que le nom de
confdlUr tire fon origine ; que les autres
étoient deftinés à veiller fur le peuple , à faire
une partie des inftruftions néceffaires , &: à
décharger les magiftrats de certaines fonc-
tions auxquelles ils ne pouvoient fuffire ; que
ces officiers étoient prépofés pour faire les
enquêtes & entendre les témoins , & en gé-
néral pour la recherche des preuves ; que c e-
\.6\QT\\^\ix(\\x^^ on-à^^z'X6\iadjutores magif-
tratuum , fervatores loci^ curatores urbis ,
vicarii magiflratuum , defcnfores civitatis ,
quœJîtoreSy inquijltores ^ auditores y difcuf-
fores.
11 ajoute que les Romains ayant conquis les
Gaules , & y ayant établi le même ordre que
dans l'empire pour l'adminiftrationdelajuf-
tice , y inftituerent des enquêteurs examina-
teurs ", & que nos rois ayant trouvé cet ufage
établi dans les Gaules, le conferverent.
Il cite un édit de Clotaire II , de l'an 615,
& plufieurs autres ordonnances rendues en
différens temps , &qui font rapportées dans
les capitulaires, où il eft parlé de ces offi-
ciers , appelles mijjl^ difcujfores , inqui/ùo- 1
Tes y adjutores , A« vicarii comitum , &c.
C O M
De-là il pafTe au détail des différentes fonc-
tions de police qui étoient remplies par ces
officiers , dont les principales étoient , dit-il ,
de recevoir les loix & les ordonnances par
les mains des comtes , pour les faire enfuite
entendre &: oblerver aux citoyens ; de veil-^
1er à ce que rien ne fût entrepris , ni aucuns
difcours tenus contre le fervice du roi ou le
bien public ; de maintenir le bon ordre 6>:la
difcipline en toutes chofes , enforte que les
gens de mauvaife volonté fuftent contenus
dans leur devoir, les vagabonds chaffés , les
pauvres protégés, & que les gens de bien
vécufTent en lûreté &c en paix; de recher-
cher tous les abus , malve! fations & crimes
qui fecommettoientdans le public; de faire
arrêter les coupables, en informer & faire
les autres inftruclions pour parvenir à les
faire corriger ou punir, d'interroger les mal-
faiteurs qui étoient arrêtés , Se dévoient
d'abord être conduits devant eux ; d'empê-
cher le port des armes défendues ; & qu'on
n'en tranfportât aux étrangers fans ordre du
roi: de veiller fur les étrangers qui arrivoient
dans leurs départemens, en- tenir regiftre,
ai. ne les y foufFrir demeurer que le temps
permis par les loix; d'avoir l'infpedion fur
e commerce , les arts &: métiers , pour y faire
obferver l'ordre établi par les réglemens ;
vifiter les marchés , y procurer l'abondance
des vivres & autres denrées néceffaires à la
fubfiftance des citoyens,empêcher qu'il nefe
commît aucune fraude , fait en la qualité ou
au prix , foit au poids ou en la mefure , &
fur-tout pour les grains , le pain , le vin èf
la viande ; pour faire entretenir le pavé , net-
toyer les rues, réparer les grands chemins.
Enfin félon lui, ces comrriijffaires avoient
toute l'autorité des comtes en leur abfence ,
& les repréfentoient dans toutes leurs fonc-
tions, Ilstenoientmême,à ce qu'il dit , leurs
audiences; mansilsne connoiffoientquedes
caufes pures , perfonnelles i & jufqu'à une
certaine fomme.
M, de la Mare convient que dans ce même
temps les comtes avoient des confeillers
qui affiftoient au jugement des affaires , au
nombre de fept ou de douze , félon l'impor-
tance de la matière ; que ceux-ci furent
nommés en certains l'ieux/cabini^ & end'au-
t:es ruckimburgi , noms dérivés de la langue
allemande : mais, feion lui , les commiJJ'aires
ou
CO M
C O M
^49
èhï enquêteurs étoicnt des officiers differensT refit encore long-temps unies ; enfin que fi
i_^ r-ii .^ I' !^ I 1- : r-:.._ i__ -..
des confeillers
Depuis l'an 922 , temps auquel finiflent
les capitulaires , jufqu'au règne de Philippe-
Auguftc , l'état fut 11 agité de troubles
domefliques ou de guerres étrangères , que
l'adminiltration de la juftice fut fort négli-
gée : les juges établis par les feigneurs en
changèrent la forme ; & M. de la Mare
tient que ce ne fut plus que dans les villes
royaks ^ ou dans celles que nos rois don-
noient en partage aux princes de leur fang
que l'ufage des commijjaires examinateurs &
àQs confeillers des magiflrats fut confervé.
Pour preuve de ce qu'il avance , il cite
deux auteurs ; favoir Ughellus contempo-
rain de Henri I , qui écrivoit l'an 1033 , &
Baldricus fous Philippe I , l'an 1039 ; lefquels
rapportent que de leur temps il y avoit des
officiers établis pour aider les juges dans la
recherche & la découverte de la vérité ; que
les affaires leur étoient renvoyées pour les
inftruire ; qu'ils entendoient les témoins , en
référoient aux juges, affifloient enfuite avec
eux au jugement ; & que par rapport à leurs
fondions , ils étoient nommés inquijitores &
auditores.
M. de la Mare {îippofe donc comme cer-
tain , que dès le commencement de la mo-
narchie il y avoit à Paris des auditeurs ou
enquêteurs examinateurs , & que la fonc-
tion de cts officiers étoit diftinde & féparée
de celle des confeillers , qu'il prétend n'avoir
été établis qu'en 13^7* Mais nous avons déjà
obfervé ci-devant au /720i COMMISSAIRES
AU Chatelet , qu'il n'y a point de preuve
certaine qu'il y eût des commijjaires en titre
avant l'an 1 300 , & l'on étabhra ci-après au
mot Conseillers au Chatelet , que
ceux-ci font beaucoup plus anciens que les
enquêteurs examinateurs.
Il y a donc heu de croire que tout ce qui
efl dit dans les anciens auteurs des enquê-
teurs & examinateurs , ne doit s'entendre
que des afïèfleurs ou confeillers des juges ,
qui réunilToient alors les fondions de con-
jfeillers &: celles de commijjaires enquêteurs
examinateurs ; & que ce ne fut que vers l'an
1300 que la fondion de ces derniers com-
mença -1 être féparée à Paris , à caufe de la
grande affluence des affaires ; que dans les
jproviiices cts diverfes fondions demeure-»
Tome VIIL
l'on nommoit quelquefois pour faire les en-
quêtes d'autres perfonnes que des confeillers,
la fondion de ces commijjaires n'étoit que
momentanée , & que ce n'étoienr point des
officiers ordinaires ni en titre. Voye:[ ce qui
eil dit ci-devant au mot CoMMTSSAIE.ES.
Nous ne nous étendrons pas davantage ici
fur ce qui concerne les commijjaires enquê-
teurs examinateurs de Paris , ayant déjà
traité cet objet au mot COMMISSAIRES AU
Chatelet.
A l'égard des autres commijjaires enquê-
teurs examinateurs ^ les différentes créations
de ces offices font marquées dans le didion-
naire des arrêts , au mot commijjaires , «. 13.
Leurs fondions font à-peu-près les mêmes
que celles des commijjaires au chatelet. Les
réglemens intervenus à ce (u jet font rapporté»
par Joly , tome II y liv. III y tit. xvj.
Il y a eu des commijjaires examinateiirs
créés pour les éledions , & d'autres pour les
greniers à fel ; mais ces offices ont été fup-
primés. {A)
Commissaires envoyés par le
Roi, royf:^ Intend ans.
Commissaires-experts : on donne
quelquefois aux experts la qualité de commij-
jaires y parce qu'en effet ils font commis par
jnffice pour faire leur rapport liir quelque
chofe. Vojei la pratique d'Imbert , iiy. I y
ch. Ixj y & aux notes. {A)
Commissaires DES foires, omdes
Gardes des Foires de Champagne
ET DE Brie , étoient des officiers députés
par le roi aux foires de Champagne & de
Brie , pour la confervation des privilèges de>
CCS foires. Ils avoient à leur tête un maître ou
garde des foires, comme on voit par des lettres
de Philippe VI, du mois de décembre 133 1.
Ils étoient chargés de faire exécuter les man*
démens du maître des foires ; comme il eff
dit dans une ordonnance du même roi , da
mois de juillet 1344, art, xvj. {A)
Commissaires {Grands) , voyei Par-
lement ù Commissaires. {A)
Commissaires AUX Inventaires,
étoient des officiers créés pour la confedion
des inventaires qui fe font des biens des dé-
funts. Par édits des mois de mai 1622 , &;
décembre 1639 , il enfiJt créé dans les re(^
l forts des parleoaens de Touloufe , Bordeaiu^
Nnnft
^50 C O M
& Aix , & des greffiers pour écrire fous eux
ces inventaires. Il n'y eut qu'un très-petit
nombre de ces offices qui furent levés , &
cette création n'eut point lieu dans le reffort
àes autres parlemens. Ces premiers offices de
4:ommîJJaires aux inventaires & leurs gref-
fiers furent fupprimés par édit du mois de
mars 172.0 ; lequel au lieu de ces offices, en
créa d'autres fous le titre de confeiilers du roi
eommijfaires aux inventaires , dans tous les
îieux où la juftice appartient au roi , à l'ex-
ception de la ville de Paris , où îes notaires
furent confirmés dans la pofïeffion où ils font
de faire (èuls les inventaires. On créa quatre
de ces nouveaux commijj aires dans les villes
où il y a cour fupérieure , deux dans chacune
des autres villes où il y a préfidial , bailliage
ou fénéchauffée rcffornfTant es cours y &
un dans chaque ville & bourg où il y a jurif-
didion royale ordinaire, pour procéder feuls,
à l'exclufion de tous autres officiers, lorfqu'ils
€n feroient requis , à l'appofition & levée des
fceilés & aux inventaires des biens meubles
& immeubles , titres , papiers & enfeigne-
ftiens des défunts, même aux inventaires
qui feroient ordonnés par }.uffice lors des
banqueroutes & faillites des marchands ,. né-
gocians , ou autres cas femblables ,j à l'effet
de quoi ils dévoient avoir chacun leur fceau
pour i'appofirion des fceilés. On créa par le
même édit pareil nombre de greffiers dans
chaque ville pour écrire les inventaires. Cet
^ditne fut pas exécuté dans quelques provin-
ces , comme en Artois ; & les inconvéniens
que l'on reconnut par la fuite dans cts offi-
ces , déterminererM: à les fupprimer par une
déclaration du "j décembre 1714.. (^)
Commissaires aux Main-mises, font
ceux ét.iblis aux failles féodales qui fe font
en Flandre & dans le Hainaut , que l'on
appelle main-mifes au lieu de faijîe Jéodale.
Par l'éditde février 1692 , on créa des eom-
mijfaires receveurs des faiiies réelles en Flan-
dre & Hainaut ; & par une déclaration du 2
janvier 1694 , il fut ordonné que ce^ mêmes
eommijfaires feroient établis à toutes \e^
main-mifes qui fe feroient tant en Hainaut
qu'en Flandre. {A)
Commissaires JURÉS de la Marée,
font ceux qui ont infpedion & jurifdidiort
fur èies vendeurs de marée. 11 en eiî parlé
4ans une ordonnance du roi Jean , du moi&
C O M
de févfîcr i3^o,.amWe ^5).. Foyq CHAM-
BRE DE LA Marée., (yi)
Commissaires députés sur le.
FAIT des MoNNOIES, V. MONNOIES»-
Commissaires nommés par le Roi ,
font des magifîrats commis par S. M. pour-
certaines afiaires , comme pour la vente ,
échange ou autre aliénation de quelques do-
maines, de rentes affignées fur les revenus,
du roi , ou pour connoitre d'une affaire par-
culiere , fbit civile ou criminelle , ou de
toutes les affaires d'une certaine nature. Voy^
c/-a/rr<?i Conseil , à tajuldivifionCoM.-
missaires. {a)
Commissaires sur les Ordonnan-
ces du Roi , étoient ài:s gens du confèil 5,.
que le roi commertoit pour délibérer avec le
parlement fur les nouvelles ordonnances. Le
roi Jean finit une c>rdonnance de 1351 , en
difant que s^il y a quelque chofè à y ajouter ^
changer ou interpréter j, cela fe fa*a par des
co/:^/72/^^Vej' qu'il députera à cet efièt , &:
qui en délibéreront avec les gens dti parle-
ment. Ordonnance de la. troijieme race ^ tome-
II y pagejSo. {A)
Commissaires nu parlement ; V.
âVart^ Parlement , le §. Commijfaires^
[A)
Commissaires^!? partes , font ceux:
que l'on choifit dans le lieu mêm.e cù fe doir
remplir la commiffion , à la difiérence de ceux
qui fe tranfportent à ctt effet fur les Heux,. On.
nomme autant que l'on peut des eommijfaires
ad partes , pour éviter aux parties les frais dtt
tranlport. Cela le pratique en- plufieurs cas y.
comme lorfqu'il s'agit de faire une enquête ou*
une information , un interrogatoire fur faits
& articles ,%n procès-verbal. L'ordonnance-
de Philippe V , du mois de février 13 18 , art^.
s, y dit qu'au cas que les parties feront d'ac-
cord en parlement de prendre àes commif-^
faire s en leur pays, il leur en fera odroyé ,
afin que chacun puiffe pourfuivre fa cauiê à
moins de frais , Ùc. Voye-^ la pratique d'Ln-
bert , liv. I , ch. xxxix. {A)
Commissaires {Petits)^ voy. Parle^
MENT au §. Çommijfaires^ (A)
Commissaires de Police , font dé»
officiers de robe établis dans certaines villes
pour aider le juge dé police dans fes fonc-
tions ; commç pour faire la police dans. le$
C O M
Tues & marchés , faire des vifites & procès-
verbaux. Les commijfaires au châtelet de
Paris & les CGmmiJJaires enquêteurs & exa-
minareurs établis dans plufieurs autres villes ,
font des commijfaires de police qui ont des
titres plus ou moins étendus , lèlon les édits de
création de leurs charges. Voye\ ce qui eft
dit ci-devant awarmofj- COMMISSAIRES AU
Chatelet , &:aî/x/7zorj Commissaires
ENQUÊTEURS EXAMINATEURS. {A)
COMM,ISSAIRES RECEVEURS ET GAR-
DES DÉPOSITAIRES DANS LES SiEGES
d'Amirauté , furent fupprimés par l'édit
du mois d'odobre 17 16. (^A)
Commissaires réformateurs, K.
Réformateurs. [A)
Commissaires aux Requêtes du
Palais , voye-{ Parlement & Requè--
tes du palais, {a)
Commissaires aux Saisies réel-
les , voye\ Saisies réelles. {A)
Commissaires séquestres , voye\
Séquestres. [A)
Commissaires du Roi contre les ufu-
res y étoient ceux à qui le roi donnoit com-
mifîîon de réprimer les ufures des Lombards ,
Italiens & autres qui prêtoient à un intérêt
plus fort que celui qui étoit permis par les
ordonnances. On trouve dans le fécond vo-
lume des ordonnances de la troifieme race ,
un mandement du roi Jean , du mois d'avril
13 50 , adrefTé à l'abbé de Saint-Pierre d'Au-
xerre , commijfaire fur le fait des Lombards
& Italiens ufuricrs. {A)
Commissaires des Tailles , furent
créés par édit du mois de Juin 1702, pour
faire dans chaque éleâion l'exécution de toutes
les contraintes décernées par les receveurs
des tailles & leurs commis pour le recouvre-
îiicnt des tailles , crues y jointes & autres
impoiîtions. Ces commijfaires furent fubfti-
îués aux huiffiers des tailles, pour la faculté
que ceux-ci avoient de faire tous exploits en
matière de tailles : ils ont depuis été iuppri-
més. i^A)
Commissaire vérificateur des
RÔLES des tailles ; ce titre étoit attaché
à l'office de confèiller lieutenant-criminel ,
créé dans chaque éledion par édit du mois
d'août 1693. Sa fondion , en qualité de <:»/7Z-
mijffaire pe'rificateur , étoit de faire la vérifi-
cation & fignaturc des rôles des tailles , tail-
C O M ^51
Ion , fubfides , Ùc. faites par les afTécurs &:
coUedleurs ; mais ces offices de lieutenans-
criminels commiffaives-^vérificateurs , ont
été fupprimés par un édit du mois d'août
17M. {A)
Commissaires provinciaux , dans
l artillerie^ font des officiers qui commandent:
les équipages de l'artillerie en Tabfence des
lieutenans, 6c qui doivent être préfens k tous
les raouvemens qui fe font dans les arfenaux.
Leurs principaux foins font :
Devoir fi les armes de guerre font bien
claires & bien entretenues;
Si Its magafms font bien fermés de portes
& de fenêtres ;
S'il ne manque rien aux afïuts des pièces ;
& fi l'on pourroit s'en iervir en cas de befoin;
Si les armes pour les pièces font en bon état;
Si les pièces ne font point engorgées ou
chambrées ;
S'il y a fuffifamment de poudre dans la
place pour fa défenfe en cas d'attaque , enfin
il doit examiner fi toutes les chofês qui con-
cernent l'artillerie font en bon état & en
quantité fuffifantc.
Il doit avoir une clé du magafin ; le gou-
verneur une autre ; le contrôleur , s'il y en a
un dans la place , la troifieme ; & le garde-.
magafin la quatrième. Ils ne doivent pas en-
trer dans le magafm les uns fans les autres.
Après les commijjaires proi'inciaux ij y a
\ei commijfaires ordinaires , qui ont les mê--
mes fondions , & qu'on répand indifFérem-.
ment dans les places & dans les équipages.
Il y aaufli àts commijfaire s extraordinaires
qui fervent de même. (Ç)
Commissaire général des Fontes,
eft un titre qui , dans X artillerie , efl ordinai-
rement la récompenfe àts anciens & habiles
fondeurs. Il dépend , aufG-bien que les appoin-
remens & les privilèges qui s'y attachent , de
la pure volonté du grand-maître. (O)
Commissaire général de la Ca-
valerie"", efl un officier , qui cft le troifie-
me de la cavalerie n'ayant au-defîîis de lui .■
que le meflre-de-camp général & le colonel
général. La principale fondion du commif^
faire général efl de tenir un état de la cava-
lerie , d'en taire la revue lorfqu'il lui plaît ; de
rendre compte au- roi de la force des rcgi-
mens & de la conduire des officiers. Il com-
mande ordinairement la cavalerie dans l'ai-
N n n n 2
€^1 C O M
mée , où il fert avec la même autorité que le
colonel général & le mefîre-cie-camp général ;
il a les mêmes honneurs &. les mêmes appoin-
temens de campagne. Cette charge vaut fix
mille liv. par an fans le cafuel. Il a un régi-
ment qui lui eft affeâé fous le nom de régiment
iie commijpiire général, {Q)
Commissaire des Guerres, font des
officiers chargés de la conduite , police &
difcipline des troupes , & de leur faire obfer-
ver les ordonnances militaires. Ils peuvent
procéder contre ceux qui contreviennent aux
■ordonnances , par interdiction d'officiers ,
arrêts d'appointemens & même àcs pcrfon-
nes , fuivant l'exigence des cas : ces interdic-
tions & arrêfs des perfonnes , ne peuvent être
levées fans ordre de fa majcflé.
Ils marchent en toute occaiion à la gauche
du commandant de la troupe, dont ils ont
la conduite & police. Dans une place de
guerre ils marchent après le lieutenant de roi ;
& en fon abfence , après celui qui commande
dans la place-.
Ceux qui font employés dans les armées
ont le détail des hôpitaux y. du pain y de la
viande , &<;. fous les ordres de l'intendant.
Ils font les inventaires du grain qui fe trouve
dans les lieux voifms de l'armée , & ils ont
la conduite des convois qui fe font par voi-
ture. M. d'Héricourt , élém. de Van. milit.
Commissaire GÉNÉRAL DES Vivres,
c'eft à l'armée celui qui eft chargé de tout ce
qui concerne la fubfiftance des troupes. Il
doit faire les magafms dans les lieux les plus
convenables , pour erre prêt à faire fes four-,
nitures lors de l'ouverture de la campagne,
il prend l'ordre du général pour la marche
des convois ; il fait faire la difîribution du
pain de munition par àts commis qui Çonz
il la fuite des caifTons , ou dans les villes ;
lefquels commis tiennent des regifires de ce
qu*ils délivrent aux majors ou aux aides-ma-
jors des régimens , fuivant la revue des com~
mijjaires. Le pain de munition-doit pefer trois
livres; il fert pour deux jours. Il y a deux tiers
de froment & un tiers de feigle , dont on tire
trois livres de fon & quinze livres de farine
qu'on pétrit avec dix livres d'eau. (Q)
Commissaire des Montres , ( Ma-
rine. ) officier dont la fondion ttt de faire
4«s revue» (ur les vaiHèaux hgliaEKioi^ ^
C O M
nu défaut d'un confeiller de ramiratuef.
On appelle encore en Hollande commif-
faires des ports , ceux qui ont l'infpedion fur
tout ce qui entre ou fort ^qs ports des Pays-
bas ; & commijj'aires des ventes , ceux qui
ont foin d'annoncer les ventes des choies
confifquées, & d'y veiller. Chamhers.
Commissaire général des Re-
vues , ( Art militaire. ) eft en Angleterre ,
celui qui fe tait rendre un compte exad de
l'état de chaque régiment , les pafîë en revue ,
prend foin que les cavaliers foient bien mon-
tés , & que toutes les troupes foient bien ar-
mées & bien équipées. Ibid.
Nous n'avons point en France de pareil
officier ; il n'y a que le commiflaire général
de la cavalerie qui a bien les mêmes fonc-
tions , mais pour la cavalerie feulement. V.
Revue. {Q)
Commissaires de la Chambre des
Assurances ; on nomme ainfi en Hollande
à^s juges commis pour régler les affaires de la
chambre des afîurances , établie à Arafter.*
dam en 159^- ^^s juges font au nombre de-
trois , qui doivent juger conformément aux
réglemens flatués touchant le fait des aflu—
rances , particulièrement fur ce qui regarde
It^ avaries , dont ils ne peuvent charger les
aflureurs au-delà de ce qui eft porté dans ces
r-églemens. Ils ont néanmoins le pouvoir de
condamner aux dépens. !>/(?. ^f Comm. V^,
Chambre des Assurances.
Commissaires des Manufactu-
res ;, ce font ceux qui fontcommis de la pare
du roi à Paris & dans les provinces, pour,
tenir la main à l'exécufion dès réglemens con-
cernant la fabrique des étoffes & des toiles,.
Ils font plus connus fous le nom à^infpecleurs-
des manufactures. Voye-\ INSPECTEURS;
Id. ibid.
Commissaire des Pauvres , (Hifl:.
rnod. ) bourgeois chargé de recueillir les de-
niers de la taxe pour les pauvres. Cette taxe
le fait tous les ans à un bureau général. Cha-
que paroifl'e a fon commijjaire. Il efl le diftri--
buteur d'une partie des aumônes de cette pa-
roilfe; il a foin quand un pauvre meurt , dé-
faire vendre les meubles , & d'en porter les
deniers au bureau. On donne le titre de com-
rrtijfaires du grand bureau des pauvres , à
ceux qui ont la voix adive & paffive à ce bu-
reau* le commiiTarkc des {>auvres cp&duifi-
C O M
au tîrre de rcargu illier, & le commîflariat du
grand bureau conduit à la direction d'hô-
pital.
* COMMISSION , C f. ( Gram. ) fe dit
1°. d'un ordre qu'un fupérieur dans une mai-
fbn donne à un inférieur , pour être exécuté
au dehors ; 20. de la charge de quelque achat,
ou d'une autre affaire légère , & de pareille
nature , donnée à quelqu'un qui veut bien la
prendre ; 3**. d'un emploi ou conilant ou
palîàger , auquel on a attaché des devoirs &
«les éraolumens. Voyei COMMIS , & ks ar-
ticles fuip ans.
* Commission , ( Ilifl. anc ) d'où nous
avons fait notre verbe commettre ; c'étoit
chez les anciens l'adion de naettre publique-
ment aux prifes deux gladiateurs , deux lut-
teurs , deux poètes., Ùc. pour difputer le prix
de l'habileté.
Commission ^ {Jurifpr. ) efl un mande-
ment par lequel le roi ou quelqu'un de (qs
officiers de julHce commet un juge ou autre
officier de juffice, pour faire quelque fonc-
tion qui a rapport à, i'adminillration de la
juffice.
Quelquefois, le terme de commijjion fe
prend pour la fonélion même qui ell, délé-
guée à remplir.
Toute commijjion en général doit être par
écrit ; autrement celui qui l'a donnée, pour-
roit la défavouer.
Le coramifîaire > c'efl-à-dire celui qui efl
commis pour le fait dont il s'agit , doit ayant
d'y procéder faire apparoir de fa commijjion,
& en faire mention, dans l'ade»..
Lorfqu'une commijjion eft adreflee au lieu-
tenant-général d'un liège-, ou au lieutenant
particulier & premier des confeillers fur ce
requis, l'exécution. de la i:o/n/72i//?o« appar-
tient d'abord au premier officier , & à fon
défaut au fécond ; & ainli fucceifivement aux
autres , fuivant l'ordre du tableau.
Si \iiCommiJJion eft adreflee au premiei»huif-
fierou fergent royal fur ce requis,, tout huif-
lier ou fergent de cetçe quaUté peut la mettre
à exécution.
Mais lorfqu'elle ejft adreflee à un juge nom-^
niément , il ne peut déléguer ni en commet-
tre un autre à fa place : un autre officier du
fiege ne peut fe charger pour lui de l'exécu-
tion fi ce n'efl en cas d'abfence ou. autre lé-
gitime, çmi^ê.cheiTieat , .
C O M ^f^
Il y a plufieurs fortes àc commijjions , qui
font la plupart diflinguées par quelque épithete
particulière : nous allons expliquer les prin-
cipales dans les fubdivifions fuivantes.
Commission attributive de jurifdiclion ,
eft celle qui renvoie le jugement d'une con-
tellation devant quelqu'un , foit qu'il n'eût en
aucune façon le caradere de juge , ou qu'il
ne fût pas le juge naturel de l'affaire.
Le roi peut donner de telles commijjîons 2
qui bon lui femble.
Pour ce qui eft des juges , ils ne peuvent
intervertir l'ordre des jurifdidions , fi ce n'eiî
que le juge fupérieur ait quelque caufe légiti-
me pour commettre un juge inférieur autre
que le juge naturel. Voye'^ ci-après Com-
mission EXCITATIVE.
Commission de la Chancellerie »
font des lettres royaux qu'on obtient en clian-
cellerie , portant perraiffion d'aflïgner, de>
mettre un jugement à exécution , ou de faire
quel qu'autre exploit.
Lorfqu'on veut faire aflîgner quelqu'un
diieâement au parlement, on ne peut
le faire qu'en vectu d'ordonnance ou arrêt de
la cGur , ou en vertu d'une commijjion de Ix
chancellerie.
De même lorfqu'on veut mettre un arrêt à
exécution dans le reffort du parlement , on
obtient une commijjion en chancellerie , por-
tant pouvoir au premier buiflier ou fergent
royal lur ce requis de le mettre à exécution ,
n'y ayant que les huiflîers de la cour qui puif-
fent les mettre en exécution dans tout le
reflôrt fans commijjion..
On obtient aufli en chancellerie des com-^
mijjions pour divers autres objets, comme
pour le parachèvement d'un terrier , pour an-
ticiper fur un appel , Ùc,
Il y a deux Çontsàt commijjîons de-chan-
cellerie ; les unes que l'on obtient dans les
chancelleries-établies près les cours fùpérieu-
rçs ou près des préfidiaux , fuivant que la ma-
tière eft de leur reffort ; les autres que l'on ob-
tient en la grande chancellerie de France ;
l'effet de celles-ci- eft qu'elles peuvent être
mifes à exécution dan« tout le royaume, fans
aucun l'ija mpareatis.._
Commission en comm-andeMent ,
ou par lettre de commandement efl celle
qu'un juge donne à un autre juge qui lui efl
l^fubordooaé, pour Éaii'equelqu'iiâte de jullice;
^54 C O M
comme une enquête , information , interfo-
gatoire , procès-verbal , ôv.
Ces fortes de commijjlons font oppofées à
celles que l'on appelle rogaioires.
Commission de dettes des communautés
de Bourgogne y ell une jurifdidion établie à
Dijon par commiffion du confeil , & exercée
par k gouverneur du duché de Bourgogne &
par l'intendant de la même province pour la
vérification des dettes & affaires des commu-
nautés Ats, villes , bourgs , & paroifles du du-
ché de Bourgogne , & des comtés de Charo-
lois , Mâcon , Auxerr^ , & Bar-fur-feine. On
y porte aufli les infiances qui concernent la
levée des odrois des villes & bourgs , de
même que ceile des odrois de la province
de Bourgogne fur la rivière de Saône , &
îes comptes par état des oétrois des villes &
i)0urgs du duché , & àts quatre comtés ad-
jaccns. VoycT^^ la. defcription de Bourgogne
par Carreau.
Commission ^«c-o/z/è//;, ou Commis-
sions extraordinaires du confeil y voyez ci-
après au mot Conseil du Roi , à l'article
commijjlons.
Commission e:r^/f^«Vf de ]urif diction y
efl celle qui ne contient point ^'attribution de
jurifdidion & ne fait que provoquer le juge
auquel elle efl adreffé^ à taire ce qui lui efl
indiqué par la commijjion. C'efl ainfi que
Loy'èau , en ion tr. des off. liv, IV y ch. v yn.
yo y qualifie toutes les co/nmi^o/zj- -expédiées
dans les petites chancelleries.
Commission en fom.mation , c'eft une
commijjion de chancellerie pour fair« affigner
quelqu'un en fommation ou garantie.
Commission de pacijicis pojjejforihus y
font des lettres obtenues en chancellerie
adreffantes à un juge royal ; par lefquelles il lui
cfi mandé , que fi le bénéficier qui a im-
pétré ces lettres efl pofTefTeur triennal du
bénéfice contentieux , il ait à le mainte-
nir & garder en la pofTeffion de ce béné-
fice , fans préjudice du droit des parties au '
|).rincipàl.
Commission rogatoire, eil celle qui efl
donnée & adreffée par un juge à un autre
juge fur lequel il n'a point de pouvoir , par
laquelle il le prie de mettre à exécution quel-
que jugement, ordonnance, ou autre man-
dement , décret ou appointemcnt de juf-
itice dans l'étendue de fa jurifdiâion , ou
C O M
d'informer de quelque fait , d'interroger
quelqu'un fur faits & articles , d'enrégiflrer
quelqu'aftc , ou faire quelqu'autre chofe. (A)
Commission dans le commerce y ou droit
de commijjion , c'efi le droit qu'un commif-
fionnaire reçoit pour fon faiaire ; & ce droit
efl plus ou moins fort , fuivant le prix àts
marchandifes , ou félon la convention que le
marchand a faite avec fon commiflîonnaire
de lui donner tant pour cent , ou telle fora-
me fixée pour telle affaire.
En fait de banque , on fc fert plus or-
dinairement du terme de proi'ijion y que de
celui de commijjion , cp\ ne fe dit guère que
pour les marchandifes. Ainfi l'on dit , il
m'en coûte demi pour cent de commijjion des
marchandifes que je fais venir de Lyon ; &
pour affaires de banque , on dit : je donne
un demi pour cent de provijion à celui à que
je fais mes remifes à Venife y & qui me re-
met ici l'argent qu'il refoit pour moi. Voye\
Commissionnaire. Diâionn.de Com-
merce & de Trévoux.
Commission , emploi qu'exerce un com-
mis. Voye\ Commis.
Commission fe dit auflï des lettres , pro-
vifions , ou pouvoir que les fùpérieurs don-
nent à leurs commis pour qu'ils foient reçus
h leur emploi , & qu'ils aient droit de l'exer-
cer. On dit en ce fens , je lui ai fait ea>
pédierja commijfion. Diclionn. de Comm.
Commission fignifie auffi la charge ou
X ordre qu'on donne à quelqu'un , pour l'a-
chat ou la vente de quelque marchandife ,
ou pour quelque négociation <ie banque, id,
ihid. (G)
* COMMISSIONNAIRE , f. m. ( Ccm^
merce. ) celui qui efl «liargé de commifîions.
Voy, Commission. Si la commiffion cor-
fifle à acheter des marchandifes pour le
compte d'un autre à qui on les envoie ,
moyennant tant peur cent , ce qu'on appelle
droit de commijjion; le commifflonnaire s'ap-
pelle commijjîonnaire d'achat : fi elle confifle
à vendre des marchandifes pour le compte
d'un autre de qui on les reçoit , moyennant
tant pour cent , le commijjîonnaire s'appelle
commijfionnaire de vente : fi elle confille à
recevoir de correfpondans négocians , ou
banquiers , des lettres de change , pour en
procurer l'acceptation & le paiement , &
pour en faire pafïèr la valeur en des lieux
C OM
marqués moyennant un falaireje commijjiori'-
naire s'appelle commijjionnaire de banque :
ï\ elle conilfte à recevoir dans des magafins
des marchandifes , pour les envoyer àt-là.
à leur deilination , moyennant aufli un falai-
,re , le commijjlonnaire s'appelle commijjion-
naire d'entrepôt : fi elle coniille à prendre des
voituriers les marchandifes dont ils font char-
gés , & à les diftribuer dans une ville aux
perfonnes à qui elles font adreflées , le com-
mijjhnnaire s'appelle commijjlonnaire de
voituriers. On donne encore le nom de com-
mijjionnaires , & de compagnie de commij-
Jionnaires , à des fadeurs anglois établis dans
le Levant : ce font des perfonnes alliées aux
familles de la première dillinélion , qui après
un apprentiflage paflent principalement à
Smyrne : le préjugé de la noble fle qui con-
traint ailleurs , fous peine de déroger , de
vivre dans l'ignorance , l'inutilité & la
pauvreté , permet là de trafiquer pour fon
compte , de fervir l'état , & de faire des for-
tunes confidérables , fans manquer à ce qu'on
doit à fa naifîance.
COMMISSOIRE, (/«n7>. )v9yeiL0l
coMMissoiRE , & Pacte de la Loi
COMMISSOIRE.
* COMMISSURE , f. f. terme peu ufité ,
mais qui étant le figne d'une idée trés-réelle ,
mériteroit d'être adopté : c'eft la ligne fé-
lon laquelle deux corps appliqués font unis
enfemble.
Commissure , ( Anatem. & Chirur.)
Ce mot lignifie le lieu où s'abouchent certai-
nes parties du corps , comme les lèvres. Les
commijjures des lèvres font les endroits où
elles fe joignent enfemble du côté des joues.
Les endroits où les ailes de la vulve s'unif^
fent en haut & en bas , fe nomment auffi
commijjures. Le lieu où les paupières (è joi-
gnent porte encore le même nom. Immé-
diatement au deffous de la bafe du pilier
antérieur du cerveau , on apperçoit un gros
cordon médullaire très-blanc , court , &
pofé tranfverfalement d'un hémiiphere à
l'autre : onï ap^WecommiJfure antérieure du
cerveau. Sur' quoi je n£ puis m'empêcher de .
remarquer que quand on eft contraint d'a-
grandir l'ouverture de la fiftule lacrymale ,
ou d'y faire une incifion , on doit avoir
pour principe de ménager cette commijfure
des paupières > parce que fa deûrudioacaule
C O M ^5î
l'éraiîlement de l'œil , bien plutôt que k
lèdion du mufcle orbiculaire , qu'il ne faut
pas craindre de couper s'ileiî néceffaire; ce
que je remarque en pafTant , contre l'opinion
commune.
Le mot commijjure efl une très-bonne ex-
preilion , dont la chirurgie moderne a enrichi
notre langue : les termes à^ articulation & de
jointure, s'emploient pour l'emboîtement
àts os. ( M. le chev. DE Ja uco urt. )
COMMITTIMUS , f. m. {Jurijp. >
Ce mot latin , qui fignifie nous commettons ,
eft confacré dans le lîyle de la chancellerie &
du palais , pour exprimer Un droit ou pri-
vilège que le roi accorde aux officiers de
fa maifon & à quelques autres perfonnes ,•;
& à certaines communautés , de plaider
en première infiance aux requêtes du palais
ou del'hôtel , dans les matières pures per-
fonnelles , poiîèffoires , ou mixtes , & d'y^
faire retivoyer ou évoquer celles où ils ont
intérêt , qui feroient commencées devant
d'autres juges , pourvu que la caufe foit en-
core entière , &: non conteflée à l'égard du
privilégié. On entend quelquefois par le ter-
me de committimus y les lettres de chanceU
lerie qui autorifent à ufer de ce dr»it , & que
Loyfeau ,dans fbn traité des offices y appelle
Vorijîamme de la pratique.
Le droit de committimus a beaucoup de
rapport avec ce que les jurifconfultes ap-
pt^entprii'ilegium/oris , autjus revocandi.
domum : ce privilège conliftoit à plaider de-
vant un juge plus relevé que le juge ordinaire y
ou devant un jugeauquel la connoiiîance de^
certaines matiei-es-étoit attribuée. Ainfi chezr
les Romains les foîdats avoient leurs caufes
commifes devant l'olficier appelle magijîer
militum. Il y avoit un préteur particulier
pour les étrangers ; un autre qui ne connoif^
foit que du crime de faux , un autre qui ne"
connoiiîbit que des fidéi-corarais.
Les empereurs romains avoient auflî pour
les matières civiles un magiftrat appeUé/jro
curator C<sjaris y & pour les madères crimi-
nelles un autre appelle prœjes y devant lef-
quels les officiers de leur maifon devoienr
être traduits , félon la matière dont il s'agifl^
(bit. Les fénatcurs avoient aulïi un juge de:
privilège en matière civife & ennuaiiere cri-
minelle; ils avoient pour ji^e celui q^ui étOJf
délégué par le prince^
L'origine des committimus en France elî
fort ancienne. Comme rérabliilement des
maîtres des requêtes d^ l'hôtel eft beaucoup
plus ancienque celui des requêtes du palais ,
î'ufage du committimus aux requêtes de l'hô-
tel efl auffi beaucoup plus ancien que pour
les requêtes du palais. Les maîtres des re-
quêtes avoient anciennement le droit de con-
ïioître de toutes les requêtes qui étoient pré-
fentées au roi ; mais Philippe de Valois , par
Une ordonnance de I344 > régla que dans la
fuite on ne pourroit plus afligner de parties
devant les maîtres des requêtes de l'hôtel , fi
ce n'étoit de la'certaine fcience du roi , ou
dans lescaufes des offices donnés par le roi, ,
ou dans les caufes purement perfonnelles qui
s'éléveroient entre des officiers de l'hôtel du
roi ; ou enfin lorfque quelques autres per-
fonnes intenteroient contre les officiers de
l'hôtel du roi des adions purement perfon-
nelles , & qui regarderoient leurs offices ; ce
•qu'il prefcrivit de nouveau en 134').
La chambre des requêtes du palais ne fiit
établie que fous Philippe-le-Long , vers Tan
132.0, pour connoître des requêtes préfen-
tées au parlement , comme les maîtres Aqs
requêtes de l'hôtel du roi connoiffoient àç.s
requêtes pré Tentées au roi.
Les officiers commenfaux de la maifon
du roi penfant avoir plus prompte expédi-
tion aux requêtes du palais , obtinrent en
chancellerie des commiilîons pour intenter
aux requêtes du palais leurs caufes perfon-
nelles , tant en demandant qu'en défendant ,
Tnême pour y faire renvoyer celles qui étoient
intentées devant les maîtres des requêtes de
l'hôtel.
Ces commiffions furent dès leur naifîance
iappellées committimus ; & par fucceffion de
temps on en étendit I'ufage aux matières pef-
ièffoires & mixtes : on en accordoit déjà fré-
quemment dès 13^4 , fuivant une ordon-
nance de Charles V , du mois de novem-
bre de cette année , qui porte que les requê-
tes du palais étoient déjà fijrchargées de cau-
ses touchant fes officiers, & autres qu'il leur
commettoit journellement par fes lettres ; &
les fecrctaires du roi y avoient déjà leurs
caufes commifes dès l'an 1365.
Ces committimus étoient d'abord tous au
grand fceau , attendu qu'il n'y avoit encore
qu'une feule chancellerie. .
COM
On donna même aux requêtes du paîaîf m
le droit d'être juges de leur propre compé- ^
tcnce , par rapport à ceux qui y viennent
plaider en vertu de committimus ; ce qui fut
ainfi ju^é par arrêt du 8 juillet 1367.
Les maîtres des requêtes de l'hôtel ne vou-
lant pas endurer que leur jurifdidion fût
ainfi divifée , Charles VII , en 1453 > évo-
qua aux requêtes du palais toutes les caufes
de la nature dont on a parlé , qui étoient
pendantes & indécifes devant les maîtres des
requêtes de l'hôtel.
Néanmoins dans I'ufage , il eft au choix
de ceux qui ont committimus de fe pourvoir
aux requêtes de l'hôtel ou aux requêtes, du
palais , excepté que les officiers des requêtes
du palais de Paris doivent fe pourvoir aux
requêtes de l'hôtel ; & pareillement ceux Aq's
requêtes de l'hôtel ont leur committimus aux
requêtes du palais. Les officiers des requê-
tes du palais des autres parlemens ont pour
juge de leur privilège le principal fiege de
leur refTort.
Les requêtes de l'hôtel connoiflent auffi
privativement aux requêtes du palais de ce
qui concerne les offices.
Charles VI , voyant que chacun ufurpoit
le privilège du committimus , ordonna que
dorénavant nul n'en jouiroit plus qu'il n'eût
aduellement des gages du roi.
Le chancelier Briçonnet déclara auffi en
plein parlement , le i<5 février 1497 , qu'il ne
délivreroit plus de committimus qu'aux do-
mefiiques du roi ; cependant il y a encore
plufieurs autres perfonnes qui en jouifTent.
L'édit de Moulins de l'an 1566 , faitl'é-
numération de ceux qui avoient alors droit
de committimus ; ce qui a reçu plufieurs ex-
tenfions , tant par l'ordonnance de i66<) ap-
pellée des committimus , qui contient un
titre exprès fur cette matière , que par divers
édits & déclarations poftérieurs.
Depuis l'établifîèment des petites chan-
celleries on a diffingué deux fortes de com»
mittimus , fàvoir au grand fceau & au petit
fceau.
Le committimus au grand fceau efl celui
qui le délivre en la grande chancellerie J il
s'exécute par tout le royaume , & attire auffi
de tout le royaume aux requêtes de l'hôtel
ou aux requêtes du palais à Paris, au choix
du privilégié. On ne peut en ufer iorfqu'il
'' s'agit
C O M
s'agit de dl{lradion d'un parlement , que I
pour la ibmme de mille livres & au de(îus.
On ne l'accordoit autrefois qu'aux comraen-
faux du roi ; mais il a été étendu à plufieurs
autres perfcmnes.
Ceux qui en jouiflent font les princes du
fang , & autres princes reconnus en France ,
les ducs & pairs , & autres officiers de la cou-
ronne ; les chevaliers & officiers de l'ordre
du S. Efprit ; les deux plus anciens cheva-
liers de l'ordre de S. Michel ; les confeillers
d'état qui fervent aâuellement au confeil ;
ceux qui font employés dans les ambaflades ;
les maîtres des requêtes , les préfidens , con-
feillers , avocats & procureurs généraux de
fa majefîé ; le greffier en chef , & prjeffîier
huiffier du parlement & du grand confeil ;
le grand prévôt de l'hôtel , fes lieutenans ,
avocats & procureurs de fa majefté , &
greffier ; les lécretaires , audienciers , & con-
trôleurs du roi de la grande chancellerie ;
les avocats au confeil ; les agens généraux
du clergé pendant leur agence ; les doyen ,
dignitaires , & chanoines de Notre-Dame
de Paris , les quarante de l'académie fran-
çoife , les officiers , commifTaires , fergent
major & fon aide , les prévôt & maréchal
des logis du régiment des gardes ; les offi-
ciers , domefHques , & commenfaux de la
maifon du roi , de celles de reines , enfans
de France , & premier prince du fang , dont
les états font portés à la cour des aides , &
qui fervent ordinairement ou par quartier
aux gages de 60 liv. au moins. Tous ces
officiers & domeffiques font tenus faire ap-
pari^ir par certificat en bonne forme qu'ils
font employés dans ces états.
Ceux qui jouifïènt du commitùmus au petit
fceau ; font les officiers des parlemens autres
que celui de Paris ; favoir les préfidens , con-
seillers , avocats & procureurs généraux ,
greffier en chef civil & criminel , & des
préfentations , fecretaires & premier huiffier ;
les commis & clercs du greffe ; l'avocat &
' le procureur général , & le greffier en chef
Ats requêtes de l'hôtel , & le greffier en chef
des requêtes du palais ; les officiers des cham-
bres des comptes , favoir les préfidens , maî-
tres , correcteurs & auditeurs ; les avocat &
procureur généraux , greffier en chef , &
premier huiffier ; les officiers des cours des
aides , lavoir les préfidens , confeillers , avo-
Tome VIII,
C O M ^J7
cats & procureurs généraux , gi'effier en chef
& premier huiffier ; les officiers de la cour
desmonnoiesde Pari^ , favoir les préfidens ,
confeillers , avocat & procureur généraux ,
greffier en chef & premier huiffier ; les tri-
Ibriers de France de Paris ; les quatre anciens?
de chaque autre généralité , entre lefquels
pourront être compris le premier avocat &c
procureur du roi , iliivant l'ordre de leur ré- -
ception ; les fecretaires du roi près des par-
lemens , chambres des comptes , cour des
aides ; le prévôt de Paris , fes lieutenans gé-
néraux , civil , de police , criminel & parti-
culier , & le procureur du roi au châtelet ;
le bailli , le lieutenant & le procureur du rot
du bailliage du palais à Paris ; les préfidens
& confeillers de l'éledion de Paris , les offi-
ciers vétérans de la qualité ci-deffiis , pourvu
qu'ils en aient obtenu des lettres du roi; le col-
lège de Navarre , pour les affaires communes;
& les diredeurs de l'hôpital général de Paris.
Le prévôt des marchands & les échevins
de Paris pendant leurs charges , les confeil-
lers de ville , le procureur du roi , le rece-
veur & greffier, le colonel des trois cents
archers de ville , jouifïènt auffi du commit-
timus au petit fceau.
Les douze anciens avocats du parlement
de Paris , & fix de chacun des autres parle-
mens de ceux qui font fur le tableau , jouif^
fènt du même droit.
Il y a encore quelques officiers & commu-
nautés qui jouilfent du droit de committi"
mus , en vertu de titres particuhers.
Les maris ne peuvent pas ufer du droit de
committimus appartenant à leurs femmes fer-
vant dans les maifons royales , & employées
dans lis états envoyés à la cour des aides ;
mais les femmes féparées jouiffent du com-
mittimus de leur mari : il efl en de même des
veuves , tant qu'elles demeurent en viduité.
Les privilégiés peuvent ufer de leur com"
mittimus , foit en demandant , foit en défen-
dant , pour renvoyer la demande formée
contre eux dans un autre fiege , foit pour in-
tervenir & renvoyer pareillement la caufb ;
lequel renvoi le fait par l'exploit même en
vertu du committimus , fans qu'il foit befoia
d'ordonnance du juge. >
Les lettres de committimus ne font plus
valables après l'année , & l'exploit fait en
vertu des lettres furannées feroit nul.
O 000
^5S C O M
Il y a certains cas dans lefquels îcs privilé-
giés ne peuvent ufer de leur committimus.
1°. Pour tranfports à eux faits , fi ce n'eft
pour dettes véritables & par ades palTés de-
vant notaires , & lignifiés trois ans avant
l'aâion intentée ; & les privilégiés font tenus
de donner copie de ces tranfports avec l'af-
iignation , & même'd'en affirmer la vérité
en jugement , en cas de déciinatoire & s'ils
en font requis , à peine de 500 livres d'a-
mende contre ceux qui auront abufé de leur
privilège.
On excepte néanmoins de la règle précé-
dente , pour la date des tranfports , ceux qui
ièroïent faits par contrat de mariage , par
des partages , ou à titre de donations bien
& duement infmuées , à l'égard defquels les
privilégiés peuvent u fer de leur committimus
quand bon leur femble.
2®. Les privilégiés ne peuvent pas fè fcr-
vir de leur committimus pour alîîgner aux
fcquêres de i'hôiel ou du palais les débiteurs
de leurs débiteurs , pour affirmer ce qu'ils
doivent , 11 la créance n'efî: établie par pièces
authentiques paHees trois années avant l'af-
iignation donnée ; & ils font de plus tenus
d'afBrmer , s'ils en font requis , que leur
créance eft véritable , & qu'ils ne prêtent
point leur nom , le tout fous les peines c\-
cclTus expliquées.
3°. Les committimus n ont point lieu aux
«îemandes pour palier déclaration ou titre
nouvel de cenlives ou rentes foncières , ni
peur paiement des arrérages qui en font dus ,
à quelque fomme qu'ils puilTent monter , ni
£iux fins de quitter la polleifion d'héritages
ou immeubles , ni pour les élevions , tutel-
les , curatelles , fcellés & inventaires , accep-
tation de garde-noble , ou pour matières
réelles , quand même la demande feroit aulii
à fin de relHtution des fruits.
4°. Les affiiires concernant le domaine ,
^ celles où le procureur du roi eft feul par-
lie , ne peuvent auffiêtre évoquées des fieges
ordinaires en vertu des committimus.
5°. Il en eft de même à l'égard du grand
confeil , des chambres des comptes , cours
des aides , cours des monnoies , éledions ,
greniers à fel , juges extraordinaires , pour
les affaires qui y font pendantes , & dont la
connoiffànce leur appartient par le titre de
kur établilTement ou par attribution.
C O M
S'^. Les tuteurs honoraires ou onéraires ,
& les curateurs , ne peu vent fe fervir de leur
committimus pour les affaires de ceux dont
ils ont l'adminiftration.
7®. Les committimus r\ ont pas lieu en ma-
tière criminelle & de pohce.
8®. Ils n'ont pas lieu en Bretagne ni en
Artois.
9°. On ne peut pas s'en fervir fur les de-
mandes formées aux confuls , ou en la con-
fervation de Lyon , ou en la connétabhe. À
io<*. Enfin les bénéficiers qui ont droit de 1
committimus ne peuvent s'en fervir que pour
ce qui concerne leur bénéfice ; il faut néan-
moins excepter les chanoines de Notre-Dame
de Paris , qui peuvent s'en fervir dans toutes
leurs affaires ; ce qui eft apparemment fondé
fur quelque titre particulier. Voye^ Pordon-
nance de i 66 q , tit. iv y des committimus \
<& Bornier , ibid. Pafquier , recherches de la.
France y liv. IV ^ ch. i:j ; dictionnaire des
arrêts , au mot committimus. {A)
■ COMMITTlTUR,{Jurifpr.) QÛimQ
ordonnance de celui qui préfide à un tribu-
nal , appofée au bas d'une requête , par la-
quelle il commet un confeiller du fiege pour
faire quelque inftrudion dans une affaire ,
foit civile ou criminelle , comme pour faire
une enquête ou une information , un inter-
rogatoire fur faits & articles , un procès-
verbal.
Dans les petites jurifdiâions où il n'y a
qu'un feul juge , ou lorfque les autres .font
retenus par quelque empêchement , le jugé
qui répond la requête fe commet lui-même
pourl'aire Pinftrucl:ion , c'eft-à-dire qu'il or-
donne qu'il procédera à l'audition des té-
moins , ou qu'il fe tranfportera , ^c. (A)
COMMODAT , f. m. {Junfpr.) amiï
nommé du latin commodatum ^ eft un con-
trat par lequel on prête à quelqu'un un corps
certain gratuitement &: pour un certain
temps , à condition qu'après ce temps ex-
piré la chofe fera rendue en elpece à celui
qui l'a prêtée.
Le commodat eft , comme on voit , une
efpece de prêt ; & dans le langage ordinaire
on le confond communément avec le prêt\f
mais en droit on diftingue trois fortes de
prêts ; favoir , le précaire , le prêt propre^-
ment dit , & le commodat.
Dans le contrat appelle^ refaire , on pref&
C OM
une chofe à conditioii de la rendre en eC-
pcce , mais fans limiter le temps pour lequel
.rufagc en eft cédé ; enforte que celui qui l'a
confiée , peut la redemander quand bon lui
fcmble.
Le prêt proprement dit , appelle chez les
Homa'msmumum y eu un contrat par lequel-
quclqu'un prête à un autre une chofe qui fe
coniume par l'ulage , mais que l'on peut rem-
placer par une autre de même qualité ; pour
quoi on l'appelle chofe fiingible , comme de
l'iirgent , du blé , du vin , de l'huile.
Le commodat , au contraire , n'a lieu que
pour les chofes qui ne fe confument point
par l'ulage , & que l'on doit rendre en ef^
pece , comme une tapilTerie , un cl:eval , &
autres femblablcs ; & la chofe ne peut être
répétée avant l'expiration du temps conve-
nu , à moins que le commodataire n'en
abufe.
. Ce contrat eu fynnallagmatique , c'efî-à-
dire obligatoire des deux cotés ; en effet il
produit de part & d'autre une aciion , favoir
l'adion appellée <i/re^^ au profit du proprié-
taire de la chofe prêtée , qui conclut ;t la
reftitution de cette chofe avec dépens , dom-
mages & intérêts ; & l'aclion appellée con-
traire au profit du commodataire , qui con-
clut à ce que le propriétaire de la chofe
foit tenu de lui payer les frais qu'il a été
obligé de faire pour la conférvation de la
chofe qu'il lui a prêtée ; par exemple , fi c'efl
un cheval qui a été prêté à titre de commo-
dat , & qu'il foit tombé malade , le com-
modataire peut répéter les panfemens &
médicamens qu'il a débourfés , à moins que
la maladie n'eût été occafionée par fa fau-
te ; mais il ne peut pas répéter les nourritures
du cheval ; ni autres impenfes femblables ,
(ans lefquelles il ne peut faire ufage de la
chofe prêtée.
Toutes fortes de perfonnes peuvent prêter
à titre de commodat ; la femme non com-
mune en biens peut prêter à fon mari. On
peut prêter une chofe que l'on poiTede , quoi-
que l'on fâche qu'elle appartienne à autrui.
Non feulement les effets mobiliei s & les droits
incorporels , mais auflî les biens-fonds fo/it
propres au commodat ; on peut même prêter
«n elclave afin que l'on fe ierve de fon mi-
niftere.
Celui qui prête à ce titre ne.ccfïê point
C O M ^)9
d'être propriétaire de la chofe , il lui e(I libre
de ne pas prêter ; mais le commodat çtant
fait , il ne peut plus le réfoudre avant le
temps convenu , à moins que le coninioda-
taire n'abuie de la chofe.
I^a chofe prêtée à titre de commodat , ne
peut pas être retenue par forme de compen-
fation avec une dette , même liquide , duc
au commodataire , &: encore moins pour, ce
qui feroit dû à un tiers ; parce que ce feroit
manquer à la bonne foi qu'exige ce prêt gra-
tuit , & que la condition étant de rendre la
chofe en efpece , elle ne peut point être fup-
pléée par une autre ; mais la cliofe peut ètro
retenue pour raifon àes impenies nécelTâircs
que le commodataire. 5' a laites , auquel cas
il doit la faire faifir entre (es mains , en vertu
d'ordonnance de juflice , pour sûreté de ce
qui lui efl du , ne pouvant la retenir de (oa
autorité privée.
Le véritable propriétaire de la chofe 4
aufiî une adion pour la répéter , quoique c»
ne foit pas lui qui l'ait prêtée ; il n'efî pas
même aflrcint aux conditions qui avoieac
été arrêtées fans lui.
Le commodataire efî refponfable du dom-
mage qui arrive à la chofe prêtée , foit par
fou dol ou par fa faute , même la plus légère»
Le comm.odat ne fiait point par la mort
du commodant ni du commodataire , mais
feulement par l'expiration du temps convenu.
Voye-^ ail code , liv. IV y tit. xxii] y &" au
digefle , IU>. XIII , tit. pj y & aux injlît,
lii'.ni,tit.xv.{A)
COMMODATAIRE , ( Jmifp.^ ) efî
celui qui emprunte quelque chofe à titre
de commodat. Voy.\ ci-devant COMMO-
DAT. ( A)
COMiMODAU , ( Gcog. mod.) ville de
Bohême , dans le cercle de Satz , remarqua-
ble parfes mines. Long, jz , lat. £o , ^o,
COMMODE , ( Hifioire Romaine. ) Lu-
cius-Aurelius Co^nmode , après la mort dé
fon père Antonin le philofophe , fut proclamé
empereur l'an 161 de Jefus-Chrift. Son édu-
cation confiée à des maîtres fagcs & éclairés ,
là phyfionomic intérefîànte, là taille majcfr
lueufe , annonçoient qu'il étoitné pour com-
mander aux hommes. Cet efpcir fut bientôt
évanoui : le nouvel empereur eut tous les
vices de Caligula , de Néron & de Domitien^ ,
dont il furpalîa les atrocités. Laperver|jii
O 0 o o i ' ■
é6o COU
de fes pencbans fît croire qu'il ne pouvoit
être le fils d'Amonin , & que d'une fource
aufll pure il ne pouvoit fortir des eaux em-
poifonn^es. La vieîlicencieufe de fa mère ac-
crédita tous ces bruits , & quand on repré-
fentoit fes débordemens à l'empereur , il avoit
coutume de répondre : " Je ne puis faire di-
vorce avec elle fans lui rendre fa dot. » Le
facrifice eût été pénible , puifque l'empire
avoit fait fa dot. C'efl dans le choix de leurs
miniflres , que les maîtres de la terre mani-
fellent leurs penchans & leur difcernement :
Commode les tira de la claife des efclaves ,
complices de fes débauches. La comparaifon
qu'on faifoit de fes vices avec les vertus de
fon père, le fit rougir de fanaifïance ; & dans
l'ivreiTe de fon orgueil infenfé , il prit le nom
A' Hercule , fils de Jupiter. Il fe monrroit dans
les rues & les places de Rome , vêtu d'une
peau de lion , s'élançantfur les paffans , qu'il
frappoit avec fa maffue , fous prétexte de dé-
truire les monftres. Il fe faifoit un amufe-
ment barbare de faire afTembler les malades
&leseftropiés dans la place publique , où ,
après leur avoir fait lier les jambes , il leur
donnoit àts éponges pour les lui jeter à la
tête : enfuite il fe précipitoit fur eux & les
exterminoit à coups de maifue , pour les pu-
nir d'avoir ofFenfé la majel^é de l'empire
dans fa perfonne.
Tandis qu'il abandonnoit les foins de l'em
pire à Perennis , efclave Pannonien , qu'il
avoit fait préfet du prétoire , il fe tpontroit
iur l'arène , confondu avec les gladiateurs :
c'étoit iiir-tout à tirer de l'arc qu'il faifoit
éclater fon adrefle. Un jour il fit lâcher cent
lions qu'il tua tous de cent flèches , qu'il avoit
jprifes pour donner au peuple le fpedacle de
fon talent : une autre rois il fit lâcher cent
autruches , à qui il coupa la tête avec des
ilechcs faites en forme de croiffant. Cette
adrefTe devint fouvent fatale aux fpedateurs
dont il fit fouvent un grand carnage dans
l'amphithéâtre. Il oublioit quelquefois qu'il
^toit Hercule > & alors il fe montroir avec
tous les attributs de Mercure ou d'Apollon.
On le vit plufieurs fois combattre nu l'épée
à la main contre des gladiateurs ; & comme
ils av oient foin de l'épargner, il fc conten-
toit de les blelTer fans les tuer : c'étoit la feule
cfpece d'hommes qui excitât fa pitié. Un
jeaa^ romain de diitiudion , le rencontrant
C O M
dans un lieu obfcur ,lui montra un poignard ,
en lui difant : « voilà ce que le fénat icn-^
voie. » Tout tyran efl: fans courage. Corn-
mode efïi-ayé, conçut contre les fénateurs une
haine qui fe convertit en fureur : il fuppofa
des conjurations pour avoir droit de les pu-
nir. Rome devint une arène arrofée du fang
des plus vertueux citoyens. Ce monflre en-
touré de vidimes , s'abandonnoit encore à
toutes les brutahtés de l'amour ; trois cents
femmes & autant de jeunes garçons, furent
defîinés à fervir à l'infamie de (ts débau-
ches ; & (qs propres fœurs ne fe dérobèrent
à la mort que par une incefhieulè proflitu-
tion. Il avoit commis trop d'atrocités pour
fe diflimuler qu'il étoit haï : il regarda tous
les hommes comme fes ennemis ; & n'ofant
plus fe fier à perfonne pour fe faire rafer , il
fe brûloit lui-même la barbe.
C'étoit une ancienne coutume que le fé-
nat , au renouvellement de l'année , accom-
pagnât l'empereur dans la piaco publique où
il haranguoit le peuple Ce prince , qui pré-
féroit le plaifir barbare de torraficr les lions
& les tigres à la gloire de régir un empire ,
fe rendit la veille à l'amphithéâtre des gladia-
teurs , où s'étant retiré dans fa chambre , il
écrivit la lifle des cenfeurs de fon adminil^
tration, dont il prononça l'arrêt de mort. Il
s'ouvrit de fon deffein à Martia fa concn-
bine , qui avoit un empire abfolu fur lui ; il
exigeoit même qu'on lui rendît les mêmes
honneurs qu'à l'impératrice , excepté qu'on
ne portoit point devant elle le feu (àcré.
Cette femme , qui avoit partagé l'opprobre
de^ fon lit , ne voulut point être a fociée à i'çs
afîaflinats : elle forma une conjuration avec
L^tus & Eledus , qui préfenterent au tyran
un breuvage empoifonné ; & voyant que la
mort étoit trop lente , ils l'étranglèrent à
l'âge de trente-deux ans , dont il en avoit
régné treize. Sa mémoire inipira tant d'hor-
reur , qu'après fa mort il fut déclaré ennemi
du genre humain. ( T-N. )
COMMODEVES , f. f. plur. ( Myth. )
furnom de quelques divinités champêtres.
COMMODITES , f. f. pi. en bâtiment ,
efî un petit endroit dégagé des autres pie-
ces d'un appartement , ordinairement au
deflus d'un efcaher ou au bas , dans lequel
efl un fiege d'aifance , dont le haut du tuyau
ou conduit de poterie , efl garni d'une
C O M
planche percée en rond ; il fe nomme aufîî
lieux. Foxf;^LATRiNEè Aisance. {P)
COMMODU , f. m. ( Hijh nat. botan. )
Les Brames appellent de ce nom une plante
du Malabar que Van-Rlieede a fort bien
gravée , avec la plupart de Tes dérails , dans
fbn Hortus Malabaricus^ volume II, planche
JCXVlTIypage ^ ^ , fous le nom de nedel
amhel. C'eil le nymphœx minons affinis In-
dicUy flore albo pilofo de Jean Commelin ; &
le menyanthes z Indica,foLiis cordatis fub-
crenatis petiolis florïferis , corollis interne
pilojis de M. Linné , dans fon Syflema na~
turce , édit. I2, imprimé en 1767 , p. z £2,.
D'une racine en tubercule rond , accom-
pagnée d'un autre petit tubercule deltiné à
la propagation , & environné en defî'us d'un
faifceau de vingt à quarante fibres capillai-
res , cylindriques , fiituleufes , blanches ,
longues de deux pouces , s'élève un faifceau
de huit à dix pédicules cyhndriques , long
d'un pié , de trois lignes de diamètre , fiftu-
leux , terminés chacun par une feuille orbi-
culaire de trois à fix pouces de diamètre , en-
tière , verd-claire , entaillée à ion origine juf-
qu'au quart de fa longueur , légèrement pa-
voifée , c'eft-à-dire , attachée au pédicule
un peu au-delà de l'échancrure , HÂc , lui-
fan te , mince , relevée en defîbus de fix
côtes rayonnantes & flottantes (ùr l'eau.
Au fommet du pédicule , à un pouce en-
viron de la feuille , on voit une petite fente
d'où fort une ombelle de neuf à dix fleurs
blanches , longues d'un pouce un quart ,
ouvertes en cloche d'un pouce un quart de
diamètre , portées chacune fur un pédicule
cylindrique , trois ou quatre fois plus -court ,
& une fois plus court que les feuilles.
Chaque fleur efl hermaphrodite , com-
plète , monopétale , régulière , difpofée au-
tour d'un difque un peu au deffous de l'o-
vaire. Elle confifte en un calice verd-clair ,
a cinq feuilles perfiftantes triangulaires , trois
à quatre fois plus courtes que la corolIe,dont
le tube efl très-court , blanc , partagé en
cinq diviflons triangulaires , deux à trois fois
plus longues que larges , très-velues , arquées
en demi-cercle. Du bas du tube de la corolle
s'élèvent dix étamines dont cinq alternes avec
fes divifions font au niveau du bord du tube ,
& cinq oppofeés à elles font une fois plus
courtes. Au fond du calice on apjpçrçoit un
C O M 66î
pedt difque , portant un ovaire conique verd
couronné par un ftyle à quatre ftigraates
fphériques.
L'ovaire , en mûrifïant , devient une cap-
flile conique , longue de quatre lignes , une
fois moins large , à une loge , s'ouvrant par
le haut en deux valves , & contenant une
vingtaine de graines ovoïdes , longues de
deux tiers de ligne , de moitié moins larges ,
blanches d'abord , enfuite jaunes , luifantes.
Culture. Le commodu croît au Malabar
dans les mares des terres fablonneufes &
argilleufes.
Qualités. Toute la plante a une faveur
amere.
Vf âges. Pilée & cuite avec le beurre , elle
fe donne intérieurement contre les morfures
du ferpent appelle co^raca/îf //a.
Remarques. Cette plante a beaucoup d&
rapports avec le menyante ; elle en diffère
cependant en ce que i®. le menyante a les
feuilles digitées ; 2,°. fes fleurs font en épi \
3**. le tube de la corolle elt plus long à pro-
portion ; 4''. fes étamines font au nombre
de cinq feulement ; 5°. enfin fes ffigmatcs
font au nombre de deux lames feulement.
D'où il fuit qu'elle doit former un genre
particuHer , & que M. Linné , au lieu de la
confondre avec le menyante qui efl dans fa
claffe de la pentandrie , c'elf-à-dire , des
plantes à cinq étamines , auroit dû , fjivant
(&s principes , la placer dans la claflê de la
décandrie , c'efl-à-dire des plantes qui ont
dix étamines.
Le commodu doit donc être placé auprès
du menyante dans la féconde lèéfion de la
famille des apocins. Voye:^ nos Familles des
plantes _, volume II , pages iji ^ £Oî ,
(M. Adanson.)
* COMMOTACULUM ou COM^
MENTACULUM ou COMMET A-
C UL UM , ( Hifl. anc. ) petit bâton que les
flamines avoient à la mai n , & avec lequel
ils écartoient le peuple dans leurs facrifices.
*COMMOTIy€ ^{.f.pl{Myth.}nom
des nymphes qui habitoient le lac Cutdienfisi
comme il y avoir dans ce lac une île flottan-
te , on donna à ces déeflês l'épithete ou le
flirnom de commotije.
COMMOTION , fubfl. f. ( Gramm. &
Chir. ) fecoufle ou ébranlement de quelque
objet ou partie. La commotion du cerveau
t6i C O M
produit des accidens auxquels un chi-
rurgien doit être très- attentif. Lorfque le
crâne cfl frappé par quelque corps dur ,
il communique nu cerveau une partie du
mouvement qu'il a reçu. Plus le crâne réfifîe,
plus l'ébranlement du cerveau eft confidé-
rable , ainfi la commotion eft proportionnée
à la violence du coup , & à la réfiffance du
crâne : on a remarqué que les coups avec
grand fracas d'os , ne cauient ordinairement
û:c\}nccommotio7i. V. Ame Ê'CerVEAU.
- La commotion du cerveau produit la rup-
ture; d'une infinité de petits vaifleaux qui
arrofcnt le cerveau & Tes membranes ; il en
ré'-ulte une perte de connoilîànce & unaflou-
pificment léthargique. Ces accidens n'indi-
quent point l'opération du trépan lorfqu'ils
arrivent dans finflant du coup , parce qu'ils
font l'eiTet de la commotion. Le iaignemcnt
du nez , des yeux , de la boucbe , & è^zs,
oreilles ; le vomiilèment bilieux , l'ilTue invo-
lontaire des déjeélions^ font les efFets de cet
accident primitif. Dans ce cas on n'a de ref-
fource que dans les faignées ; on les a fouvent
faites avec (uccès de deux heures en deux
heures , peur procurer la réfolution du fang
épanché. Lorfque la perte de connoifTance
& l'aflbupinèment font des accidens confé-
•cutifs , ils indiquent l'opération du trépan ,
quand même il n'y auroit point de fradure ,
parce qu'ils font l'effet d'un épanchement
qui s'eft tait à la longue , ou le produit d une
ifuppuration qui n'a pu erre un fymptome
primitif. On a vu des personnes frappées lé-
gèrement à la x.Lt.t , étourdies feulement par
le coup ; on a vu , dis-je ces perfonnes
mourir plufieurs mois après par des acci-
-dcns furvenus peu de jours avant leur mort.
On a trouvé à l'ouverture un épanchement
de fang ou i;n abcès dans quelque coin
• du cerveau. Il y a apparence que cela n'ar-
rive que parce que les vailTeaux qui ont
foufrert du coup étoient fi fins , qu'il a fallu
un temps affez long pour qu'il pût s'échap-
per une quantité de liqueur fuffifante pour
produire des accidens & caufer la mort.
De pareils exemples doivent faire recourir
à la (aignée & aux remèdes généraux dans
les plus petits coups qu'on reçoit à la tête ,
pour prévenit les accidens funcftes , qui ne
iont que trop fouvent la fuite de la négli-
^gcncc de ces moyens. Voyei^ TréPAN.
C O M
On trouve dans le premier volume des
mémoires de l'académie royale de chirurgie
un précis des obfervations envoyées à cette
aca ^émie , fur lelquelles M. Queliiay a fondé
plufieurs dogmes qui regardent l'applica-
tion du trépan dans les cas douteux. Les
égards dus à la commotion y Iont expoiés
dans tout leur jour ; & on tâche de décou-
vrir les cas où il faut prendre fon parti pour
ou contre l'opération du trépan , d'après
les bons & mauvais fuccès déterminés par
les circonflances ou les particularités qui pa-
roilTent en faire di/hnguer la caufe. ( J^)
Addition à V article précédent. L'expé-
rience, adoptée pour expliquer l'effet de la
commotion au cerveau , a répandu beaucoup
de confufion en chirurgie fur cette matière ;
car il efî certain que les praticiens qui ont
écrit fur les léfions de la tête , ont toujours
confondu xlans Fhiflolre de leurs obferva-
tions , la comm.otion , avec le contre-coup.
Cependant la diiîérence en efl bien cer-
taine par rapport à leurs effets ; étoient-ils
inilruirs éralem,ent de l'événement mecha-
nique du choc des corps , ou ne l'étoient-ils
pas ? cela ne fait rien à la queflion ; mais il
efl certain que l'expérience qu'ils avoient
adoptée pour expliquer cette aûion , n'elt
point celle-là.
M. de la Faye ( Opérât, de chirurgie , p.
43^) ^ pour faire concevoir l'idée qu'on
doit s'en former , dit , " il l'on prend par
un bout une planche mince , comme celle
dont l'on fait les tonnçaux , & qu'on frappe
avec force quelque corps dur , li elle ne fe
caffe point , une bonne partie du mouve-
ment palTe dans les mains qui la tiennent &.
y caufe un engourdifiement fort doulou-
reux ; mais fi elle fe caflè , les mains ne
refTèntent point le coup , ou ne le reffentent
qu'à proportion qu'elle eil plus ou moins
brifée ; » de-là , il en conclut , que plus le
crâne réfifie à l'effort du coup , plus la corn'-
motion eft grande , 6' vice versa. Mais en fai-
faut l'application de cette expérience à la
matière qu'on trftite , on fentira aifément
qu'elle ne produit qu'un contre- coup. Par
exemple , qu'une planche égale en force ou
folidité dans tous fes points A , tombe ou
foit frappée violemment fur une maffe plus
dure B , elle doit néceffairement fe réfléchir
dans rinllant de la percufiion , comme o»
{
C O M
le voit dunsh figure z , planche II de phy-
jique , Suppl. des planches , fuivant la ponc-
tuation -E", qui décrit une courbe vers C ;
parce que dans un corps également folide ,
ce mouvement ne fauroit arriver , que Tex-
trémité jD , y^f , qui regarde vers D , ne dé-
crive une courbe de réflexion parallèle , fi la
planche ne fe cafie pas dans l'inilant ^u
choc ; c'eft donc la furface du corps A , par
fa courbure de réflexion , qui frappe pour
produire le contre-coup dans la main ; le
coup confond , rompt ou déchire , c'eft-là
fon propre ; la commotion au contraire fe-
coue , ébranle & produit des vibrations in-
déterminées , qui (ont auiîî le propre ou le
figne caraâérifl:ique de la commotion.
C'ell ce qu'il falloit démontrer pour faire
fentir qu'il ne s'agit dans l'expérience de M.
de la Faye que d'un contre-coup , puifqu'il
refaite un engourdiiîement tort douloureux
imprimé aux mains qui tiennent la planche ,
fur-tout dans l'idée où nous fommes que par
ce mot , l'on ne conçoit d'autre adion qu'un
choc à la partie oppofée où fe termine la per-
cuffion , ou bien dans une partie où les fibres
ne/ont point capables de le prêter au chan-
gement de figure qu'exige l'adion du choc.
L'on doit entendre par commotion , un
ébranlement avec une agitaiion confufe &
indéterminée, produite par la continuité d'un
mouvement quelconque , jufqu'aux plus pe-
tites parties d'un corps qui en eff frappé ,
fans néanmoins le contondre , le divifer ou
le rompre.
La conflifion & l'indétermination d'éy-
branlement font fon caraftere diilindif ,
toujours en raifon de l'homogénéité des par-
ties dures & molles qui la reçoivent ; elles
n'arrivent donc au cerveau que par la tranf-
miflion du mouvement jufqu'aux plus peti-
tes ramifications des nerfs qui adhèrent à ce
vilcere , parcequc l'inertie de la capacité of-
fenfée ne fauroit s'oppofer d'une manière
vidorieufe à i'impreflion du mouvement
qu'elle a reçu , à moins que la force avec
laquelle elle réfifteroit au choc ne fût pro-
portionnée à fa mafle ; c'efl ce qu'on pour-
roit apprécier & donner à entendre par un
fait bien naturel & aifé à concevoir : par
exemple , fi quelqu'un jetoit une pierre con-
tre un arbre de médiocre groffeur , il cff
certain qu'elle cauferoit une émotion par fon
C O M 6^^
choc , qui pafîèroit fenfiblement jufqu'aux
plus petites branches de l'arbre , parce que
fi réliflance trop foible n'ayant pu s'oppo-
fer à la force qui l'a follicité à fe mouvoir ,
le coup a déterminé plus ou moins d'émo-
tion ou de vibrations confécutives , jufqu'»
ce que le mouvement fe foit réellement con-
fbmmé pour laiffer l'arbre dans fon premier
état de repos.
Il en arriveroit de même par rapport aux
fluides expofés à nos fens; car fi un corps étoit
poufl!e dans un volumt d'eau déterminé , la
percuffion de ce corps produiroit un dépla-
cement des particules du fluide , de manière
que toutes en feroient fuccelîîvement agi-
tées ; & il eff confiant que cette agitation ,
déterminée par l'effet de la percuifion , ne
reprendroit qu'après un certain temps fon
premier état de repos ; que cette confufion
de mouvement ne cefl'eroit aufii qu'à pro-
portion qu'il le perdroit , pour lai fier le fluide-
dans fon premier état de tranquillité.
Si nous comparions maintenant la tête &
l'épine vertébrale au tronc d'un arbre , dont
les extrémités du corps feroient comm.e Iqs
branches , nous pourrions rendre fenfible
l'explication dts effets que pourroit produire
la percuffion fur l'économie animale , c'efl-
à-dire , jufqu'où elle produiroit quelque dé-
rangement dans l'ordre de la circulation.
Il efi donc évident que lorfque i'impref^
fion d'un corps arrive fur une partie fèniible ,.
elle la tend ou elle la rompt , d'où il réfulte
une fenfation qui n'efi plus fimple , mais
compliquée & doulourcufe ; alors \qs orga-
nes àts fens qui font frappés par ce corps >.
étant irrités fuivant les divers degrés de la
flexibilité de la partie frappée , il doit ré-^
fulter que les chocs impriment un mouve-
ment proportionné à la force qui les fait agir ,
& à la nature foible ou forte de forgane qui
le reçoit. L'on voit par-là qLte l'aétion que
nous rapportons à la commotion , efi tout-à-
fait différente du contre-coup , parce que le
propre de ce dernier eff de contondre , de
rompre ou de divifer ; -au lieu que dcins la
commotion iln'y a ni fradure ni contre-coup.
Lorfque la percuffion fe fait fentir fur une
étendue peu élafiique , elle rompt la partie-
qui la reçoit , ou bien.fi la partie réfifie trop^
le coup efi intérieur & fe porte quelquefois-
fort avant ;, mais fi le corps choquant agit
6^4- C O M
fur une large furiace , cettQ imprefîion ne
trouble réellement nos folides que par une
impuHîon lèmblable à une agitation confufe
& indéterminée , laquelle eliauffi Tpécifique-
ment le propre de la commotion. Ainli, ces
principes pofés , examinons ce que doit pro-
duire un coup appliqué fur la tête , afin de
concevoir ta révolution qu'éprouvent nos
fluides dans leurs diamètres-
Toute la tête eft ébranlée à l'inflant du
coup , les liqueurs fouffrenc auiii un mouve-
ment invcrfe , qui co«|tinue tant qu'elles trou-
vent des vaifTeaux de communication ; la
commotion qui arrive à l'inftant au cerveau ,
l'oblige à s'abaifîèr en quelque forte , & à
s'éloigner de la dure-mere ; les vaiflêaux qui
l'unifToient ( pour ainfi dire) , avec ceux de
la pie-mere , le gorgent plus ou moins , mais
ne fe rompent pas, fans cela ily auroit contre-
coup ; il s'enfuit non-feulement la ftagnation
des liqueurs dans ces vaiflêaux , mais même
dans ceux du cerveau , qui produit engorge-
ment ; cette comprellïon alors eft accom-
pagnée de fymptomes qui ne font plus équi-
voques ; le malade fans connoifîance & fans
mouvement , touche bientôt à fa fin , s'il
n'efl fecouru promptement.
L'on fent très-bien que les caufes qui peu-
vent déterminer de femblables maladies , ne
manqueroient pas d'arriver , d'après la pref-
fion fubite & violente de l'air contre nos foli-
des , foit que cela fût occafioné par l'explolion
de la poudre ou du tonnerre , foit encore que
cela arrivât par la chute d'une botte de paille
ou de foin , d'un matelas ou d'un lit de plume ,
ou bien encore^par la réfiftance d'un volume
d'eau aflez coniidérable qui ofFriroit une
furface plane , dans laquelle l'on fe précipi-
teroit d'aflez haut la tête la première-; car
c'eft pour s'en garantir que les nageurs ont
l'attention de joindre les mains au-deflus de
la tête pour fendre la colonne d'eau. Il n'ar-
riveroit pas non plus d'accident à celui qui
feroit tombé fur fes pies , fur fes genoux ou
fur fes fefles , fi la colonne vertébrale n'eût
point frappé l'occipital , & déterminé l'é-
branlement fur une large (iirface du crâne.
Il n'y a point de doute que ce ne foit à
l'impreflionde femblables mouvemens qu'on
doive attribuer l'effet de la commotion , parce
que les folides n'ayant pu être divifés , il
s'efl engendré ( pour ainfi dire ) des mouve- ,
C a) Mem. de l'acad. des Se. de Berlin ,(ow?. ^ , ^.
C 0 M
rnens ifochrones , qui ont fuccefllvcmcnt
ébranlé tous les organes des lènlations , pour
produire les dérangemens que nous avons
expliqués précédemment. De plus , les nerfs
qui fortent par les trous fymmétriques de la
bafe du crâne , ne recevant pas moins les
mêmes impreiiîons & fcnfations qui , comme
nous l'avons remarqué , pafl'cnt jufqu'aux
plus petites extrémités de l'arbre frappé , il
doit coniécutivement en réfulter que l'ébran-
lement que les nerfs ont foufièrt , ainfi que
les ganglions fphéno-palatins, découverts par
M. Meckel ( u), d'où iortent les rameaux
de la cinquième paire , pour former l'inter-
coflal avec fès communications , peuvent
nous fournir matière à l'explication des ac-
cidens les plus urgens qui arrivent par l'effet
de la commotion : nous devons donc confi-
dérerles nerfs , lorfqu'ils Ibrtcntdu cerveau ,
ainfi que leurs ganglions , comme autant de
divifions de branches de ramifications ou
de filets de nerfs qui partent d'un même
tronc , afin que nous rendions raifon des
mouvemens fj'mpathiques qui arrivent à fé-
conoraie animale , dans l'inffant où quelque
partie eff afFedée par la percufllon de quel-
que corps , lorf qu'elle ell capable de produire
des dérangemens.
Nous voyons d'après tous ces raifonne-
mens , que les exemples que nous fourniflènt
tous les efFets de la percufiion , nous font
juger , avec beaucoup de certitude , qu'ils
ne fauroient arriver dans aucunes parties de
la tète , que le jeu de l'hydrauhque , qui
s'exerçoit auparavant , n'en foit dérangé ; car
tous les fluides , pour ainfi dire , refoulés
dans leurs diamètres , n'ayant pas le temps
de céder librement à fébranlement déter-
miné , & de vuider les lieux du cerveau com-
primé , une partie du fluide par fon reflux
précipité , s'infiltre & s'extravafe dans la fubf-
tance des parties , pour produire par la flag-
nation des liqueurs , le coma , le carus , fa-
poplexie , la paralyjie , l'opprefîion , les fiè-
vres irrégulieres , les lyncopes , les douleurs
fixes & poignantes dans les parties où cet
ébranlement fe fait feniir.
Lorlque dans l'inftant du choc il arrive le^
fîiignement du nez , des yeux, delà bouche
& des oreilles , avec le vomiflèment ou l'iffue
involontaire des déjeâions ; ces accidens
font les effets de i'efFervefcence ou du mou-
44» vement
C O M
verhent inverfe , & pour ainfi dire tumul-
tueux de nos liqueurs ; c'eft pourquoi , dans
ces fymptomes , les faignées font d'une gran-
de reflburce , puifque fou vent , d'après la
complexion du malade , l'on tire du fang de
deux en deux heures , pour arrêter & s'op-
pofer à l'effet du mouvement inverfe du fang:
c'efl auffi dans ce cas , que confécutivement
l'on amis en ufage l'application des ventou-
fes , des fêtons , des véficatoires , des topi-
ques , des douches , des bains & des purga-
tifs , pour débarraffer le cerveau d'un relte
d'engorgemens que les faignées n'avoient pu
obtenir dans la cure de la commotion.
Mais s'il arrive , malgré ces moyens , que
le dérangement de l'économie animale per-
fifîe avec perte de connoifTance , délire ,
afîbupifTement , agitation involontaire , dou-
leur fixe & poignante , & une irrégularité
confiante dans le pouls, on peut prononcer
avec certitude que ces accidens confécutifs
font des fymptomes certains d'une maladie
par contre-coup, parce que fûrementles par-
ties qui auront reçu l'effet de la percuiïîon
auront fouffert , dans l'inflant du choc , une
contufion violente, qui aura occafioné la
rupture des parties folides , ou la diviiion de
quelques vailîeaux qui aura produit un épan-
chement de fang , ou un -abcès dans quel-
que endroit du cerveau; auquel cas il faudroit
très-promptement avoir recours à l'opération
du trépan. V T RÉF Aii^ (cet article eji de M.
Chabrol , ancien chirurgien-aide-major
des camps & armées du roiychirurgien-major
du corps de Génie, aj/bcie' correfpondant du
collège royal de chirurgie de Nancy , détaché
à Vécoleroyale du corps deGénie àMe\ieres.)
Commotion, (Phy/iq.) ce mot s'em-
ploie auflî aujourd'hui , en parlant de ce .que
l'on reffent , ou que l'on éprouve en faifant
une expérience de l'éledricîté , qui de-là
même a pris le nom ^expérience de la com-
motion ; elle s'appelle encore le coup fou-
droyant. V. ce mot , & Van, ÉLECTRI-
CITÉ, (r)
COMMOTE , f. f. {Hifl. mod.) étoit un
terme anciennementulité dans la province de
Galles, qui lignifie un demi-hundred, c'efl-à-
dire cinquante villages ; car hundred fignifie
cent.
Autrefois la province de Galles étoit di-
vifée en trois provinces , chacune defquel-
Tome VIJL ,
C O M €€^
les étoit divifée en cautreds ou hundreds ,
ce qui efl la même cl ofe , & chaque hun-
dred ou caudred en deux commotes.
Sylvtflre Girard dit cependant dans fon
itinéraire ^ que la commote v^e^ qu'un quart
de hundred. Chamb.
COMMUER , [Jurifp.) fignifie chan^
ger une peine en une autre , ce que le prince
lèul peut faire. Voye^ ci-après CohlMU TA"
TION DE PEINE. (A)
COMMUN , ad). ( Gram. ) fe dit du
genre par rapport aux noms , & fe dit de
la lignification à l'égard des verbes.
Pour bien entendre ce que les grammai-
riens appeilentg'^/2reco/72;7ZM/2,il faut obferver
que les individus de chaque efpece d'animal
font divifés en deux ordres; l'ordre des mâles,
& l'ordre des feraelles.Un nom efl dit être du
genre mafculin dans les animaux, quand il efl
dit de l'individu de l'ordre des mâles ; au
contraire il efl du genre féminin quand il
efl de l'ordre des femelles ; ainfi coq efl du
genre mafculin , & poule efl du féminin.
A l'égard des noms d'êtres inanimés , tels
que foleil , lune , terre , &c. ces fortes de
noms n'ont point de genre proprement dit.
Cependant on dit que foleil efl du genre
mafcuhn , & que lune efl du féminin , ce
qui ne veut dire autre chofe , finon que lorf-
qu'on voudra joindre un adjedif à foleil ,
l'ufàge veut en France que des deux termi-
naifons de l'adjedif on choififîè celle qui
efl déjà confacrée aux noms fubflantifs des
mâles dans l'ordre des animaux ; ainfi on
dira beau foleil j comme on dit beau coq, 6c
l'on dira belle lune comme on dit belle poule.
J'ai dit en France , car en Allemagne , par
exemple ,foleil eu du genre féminin ; ce qui
fait voir que cette forte de genre efl pure-
ment arbitraire , & dépend uniquement du
choix aveugle que l'ufage a fait de la ter-
minaifon mafcuhne de l'adjeâif ou de la
féminine ; en adoptant l'une plutôt que l'au-
tre à tel ou tel nom.
A l'égard du genre commun, on dit qu'ua
nom efl de ce genre , c'efl-à-dire de cette
clalTe ou forte , lorfqu'il y a une terminaifon
qui convient également au mâle & à la fe-
melle: ainfï auteur efl du genre commun ; on
dit d'une dame qu'elle efl auteur d'un tel ou-
vrage : notre qui efl du genre commun ; on
diit un homme qui, &c. une femme qui , ôcc.
Pppp
€6$ C O M
Fideîe , fage , font des adjedifs du genre
.commun\un amant fidèle^ une femme fidelle.
En latin , civis fe dit également d'un ci-
toyen & d'une cito5^enne. Conjux , fe dit
du mari & aufli de la femme. Parens , fe dit
du père & fe dit auffi de la raere. Bos y fe
ilit également du bœuf & de la vache. Canis
du chien ou de la chienne. Fêles ^ fe dit d'un
^haf ou d'une chatte.
Ainii Ton dit.de tous ces noms4à , qu'ils
font du genre commun.
Obfervez que homo cfl un nom commun
quant à la lignification , c'eft-à-dire , qu'il
fignifie également l'/ioz/zme ou lafemme-^mAis
on ne dira pas en latin mala homo, pour dire
une méchante femme\3^mÇi homo qW. du genre
mafculin par rapport à la conflrudion gram-
maticale. C'eft ainfi qu'en françois perfonne
eft du genre féminin en confliudion , quoi-
que par rapport à la fignification ce mot
défigoe également un homme ou une femme.
A l'égard àts verbes , on appelle verbes
communs ceux qui, fous une même termi-
naifon , ont la fignificarion adive & la paf-
live , ce qui fe connoît par les adjoints.
V. la quatrième Ufie de la méthode de P. R.
p. ^SZy des déponens qui fe prennent palîl-
vement. Il y a apparence que ces verbes ont
eu autrefois la terminaifon adive & paflive :
en effet on trouve criminare , crimino y &
criminari y criminor y blâmer.
En grec ; les verbes qui fous une même
terminaifon ont la fignification adive & la
paflive , font appelles verbes moyens ou ver-
bes de la voix moyenne. (F)
Commun (le) , Beaux-Arts. C'eft ce
qui ne fe diflingue par aucun degré fènfible
de beauté ou de perfeâion des autres objets
du même genre , ou ce qui n*k que le degré
médiocre de perfedion , qui eft commun à
la plupart des chofes de la même efpece. Le
commun c{\ par conféquent, en toutes chofes,
ce qu'on voit le plus ordinairement ; par
cette raifon il nous touche peu , & n'a point
d'énergie efthétique. Des pen(ées communes,
des peintures ordinaires de la nature ou des
mœurs , des événemens de tous les jours ,
ne font pas des fujets propres aux ouvrages
de l'art. Auflî les critiques recommandent-
ils à l'artifle de choilir unfujet noble , grand ,
& s'il fe peut neuf , & d'éviter le trivial &
k commun»
C O M
Mais une chofc peut être commune en demt
manières , ou par fa nature , ou par Ces de-
hors, c'efl-à-dire, en faits d'arts, par la façon
dont elle efl repréfentée. Une penfée relevée
peut être exprimée d'une manière commune ;
& une penlée commune peut être relevée paf
la noblefîe de l'expreffion.
On ne doit pas exclure des arts tout fujec
commun; il eft fouvent néceffaire à complé-
ter l'enfemble. Dans un tableau hiflorique ,
dans une tragédie , dans une épopée ,' tous
les objets ne peuvent pas être également no-
bles. Il fufïît que le commun n'y entre qu'au-
tant qu'il gÛ néceffaire , qu'il n'y domine
jamais , & qu'on l'évite le plus qu'on pourra,
puifqu'il ne contribue point- au plàifir.
Il y a des ouvrages qui, par le choix du.
fujet , font communs y mais qui deviennent-
grands & excellens par la manière de le trai--
ter. Tels font les tableaux hifloriques d'un
Rcmbrant , d'un Tenieres , d'un Gérard:
Dou , & de plufieurs peintres Hollandois ,,
dont on fait néanmoins un grand cas. Tel
efl encore le Therfite d'Horriere , fujet bas ,
& commun y mais qu'on tolère entre tant de
héros , parce que le poëte a fu le peindre de
main de maître..
Dans tous ces cas , ce n'eft pas l'objet qui
plaît , c'efl l'habileté de l'artifte qui donne-
dû plailir ; mais comme cette habileté n'cfli
pas précifément le but dired des beaux-arts , ,
le plaifir qu'on trouve à, de pareils ouvrages-
n'empêche pas que le commun ne fbit blâma-
ble. On regrette avec raifon , àla vuedeces.
produdions , que l'artifle n'ait pas confacré.
fes précieux talens à des objets plus dignes,
d'être perpétués.
Le défaut oppofé , c'efl d'être trop fcru-»
pul^ux à admettre le commun y lorfqu'il fert
à là liaifbn de l'enfemble. S'imaginer qu'il
n'efl: jamais permis de baiffer le ton dans ce
qui n'efl qu'accefibire , c'efl le moyen d'être
fouvent guindé , gêné & enflée Lorfqu'il
faut employer des ô\oits-communes , le plus
sûr eft de les repréfènter dans leur air natu-
rel. Il efl plus ridicule d'étaler avec pompe
un objet commun, que d'exprimer baffement
unfujet relevé. La meilleure règle à fuivre
ici , c'efl de ne placer l'objet commun que
dans un jour médiocre , & de ne le préfenter
que fous des couleurs peu vives ; qu'il ne foit
que foiblement apperçu , & qu'il n'ait riea
C O M
qui puîflè trop long-temps fixer l'attention.
Un limple particulier peut aifément fe glifler
à la (ùite d'un grand , en fe mêlant dans la
foule ; mais Ça. préfence choqueroit s'il mar-
choit de front au milieu des principaux fei-
gneurs , ou qu'il fe diflinguât dans la foule
par la richeffè de fes habits. {Cet article efl
tiré de la théorie générale des beaux-arts de
M. SULZER, )
Commun, en Géométrie , s'entend d'un
angle , d'une ligne , d'une furface , ou de
quelque chofe de femblable qui appartient
également à deux figures , & qui fait une
partie néceflaire de l'une & de l'autre. Fby.
Figure.
Les parties communes à deux figures fer-
vent à trouver fouvent l'égalité entre deux
figures différentes , comme dans le théorème
des parallélogrammes fur même bafe & de
même hauteur , dans celui de la quadrature
Acs lunules d'Hippocrate , &c. V. PARAL-
LÉLOGRAMME , Lunule , àc (O)
Commun , (Jurifprud.) fe dit des cho-
fes dont la propriété ou l'ufage , & quel-
quefois l'un & l'autre , appartiennent à plu-
fieurs perfonnes. F". CHOSES COMMUNES.
Etre commun en biens avec quelqu'un ,
fignifie être & avoir des biens en commun
avec lui , comme cela efl fréquent entre mari
& femme dans les pays coutumiers; ces for-
tes de fociétés ont auffi lieu entre d'autres
perfonnes dans certaines coutumes. Voye-{
ci-après COMMUNAUTÉS & SOCIÉTÉS
TACITES.
Délit commun , voye\ DÉLIT.
Droit commun y voye'{ Y) KOIT.
Commun de paix, {Jurifprud.) eft un
droit qui appartient au roi comme comte de
Rhodez , au pays de Rouergue , en vertu
duquel il levé annuellement 6 deniers fur
chaque homme ayant atteint l'âge de 14 ans;
lur chaque homme marié , 12 deniers ; fur
chaque paire tJe bœufs labourans , 2, fous ;
fur chaque vache ou bœuf non labourant ,
6 deniers ; fur chaque âne , 12. deniers ; fur
chaque brebis ou mouton y i denier ; fur
chaque chèvre ou pourceau , i denier ; &
fur chaque moulin , 2 fous.
M. Dolive , qui traite au long de ce droit
en fes quefl. not. liv. II , ch. ix^ prétend que
ce droit a été ainfi appelle , parce que les
habitans du Rouergue s'obligèrent de le payer
C O M €6f
au foi , en reconnoifTance de ce qu'en les
défendant del'invafion des Anglois, il main-
tenoit leur communauté en paix.
Mais M. de Lauriere enfon glojjaire , a»
mot commun de paix , foutient que ce droit
n'a été établi dans le Rouergue que pour y
abolir entièrement les guerres privées , ou
pour y rendre continuelle cette fufpenfioti
d'armes que l'on appelloit la Trêve de Dieu,
qui ne duroit que depuis le mercredi au foir
de chaque femaine , jufqu'au lundi matin
delà femaine fuivante ; c'ell en effet ce que
prouve une décrétale d'Alexandre III , pu-
bliée par M. de Marca dans Çts notes fur le
premier canon du concile de Clermom , pag*
S.8 1 /elle eff rapportée par M. de Lauriere,
loco cit. {A)
* Commun , adj. {Myth.) épithete que
l'on donnoit à plufieurs divinités , mais fur-
tout à Mars , à Bèlionne & à la Vidoire ;
parce que fans aucun égard pour le culte
qu'on leur rendoit , elles protégeoient indif-
tindement & l'ami & l'ennemi. Les latins
appelloient encore dii communes ; ceux que
les Grecs nommoient a^eavoi ; ils n'avoient
aucun département particulier au ciel ; on,
les honoroit toutefois fur la terre d'un culte
qui leur étoit propre ; telle étoit Cybele. On
donnoit auffi l'épithete de corûmuns y aux
dieux reconnus de toutes les nations, comme
le Soleil , la Lune , Pluton , Mars , ^c.
Commun , en Architecl^ure^ eft un corps
de bâtiment avec cuifines & offices , où l'oa
apprête les viandes pour la bouche du roi
& les offices de (à majefté. Dans un hôtel
c'eft une ou plufieurs pièces où mangent les
officiers & les gens de livrée. V. Salle.
Dans une maifbn religieufe on appelle
commun^ le lieu où mangent les domeftiques.
Il y a chez le roi le grand commun & le
petit commun.
Commun, {Hifi. mod.) chez le roi & les
grands feigneurs. Le grand commun eft un
vafte corps de bâtiment ifolé , & élevé fur la
gauche du château de Verfaiiles ; & ce bâ-
timent fert de demeure à un grand nombre
d'officiers deftinés pour la perfonne de nos
rois.
Le petit commun eft une autre cuifine ou
table , établie en 1664. > différente de celle
qu'on appelle le grand commun.Le petit com^
mun ne regarde dcnc queles tables du grand-
Pppp 2
é62 C O M
maître & du grand-chambellan , aiïtrefois
lupprimées , & depuis rétablies par le roi
Louis XIV; & ce petit commun ^ dont les dé-
penfes font réglées par ordc>nnance du roi
en 1726 , a comme 1-e grand-commun tous
les officiers néceflaires pour le fervice de
leurs tables. {G) (a)
COMMUNAGES owCOxMMUNAUX,
{Jurifp.) Voyei COMMUNAL.
COMxMUNAL, \jurifpr.) fe dit d'un
héritage qui efl commun à tous les habitans
d'un même lieu , tel qu'un pré ou un bois.
On appelle cependant plus ordinairement
le prés de cette qualité , des communes.
Voyei ci-aprês COMMUNAUX & COM-
MUNES. (A)
COMMUNAUTÉ , f. f. {Junfp.) en
tant que ce terme fe prend pour corps poli-
tique , cfi l'aflèmblée de plufieurs perfonnes
unies en un corps , formé par la permiiiion
dés puiiîîincesqui ont droit d'en autoriîer ou
empêcher l'établiflement. On ne donne pas
le nom de communauté aune nation entière ,
ni même aux habitans de toute une pro-
vince , mais à '.'eux d'une ville , bourg , ou
paroifle, & à d'autres corps particuliers , qui
font membres d'une ville ou paroifle , & qui
font diftingués des autres particuliers & corps
du même lieu.
Les communaute's ont été établies pour le
l)ien commun de ceux qui en font membres ;
elles ont auflî ordinairement quelque rapport
au bien public: c'eit pourquoi elles font de
leur nature perpétuelles, à la différence des
fociétés qui ibnt bien une efpece de com-
munauté tntrt plufieurs perfonnes , mais feu-
lement pour un temps.
Il y avoit chez les Romains grand nom-
bre de communautés ou confréries , que l'on
appelloitco/Zé'gej ou unii'erjités. On tient que
ce fut Numa qui divifa ainfi le peuple en
différens corps ou communaute's , afin de les
divifer auili d'intérêts , & d'empêcher qu'ils
ne s'uniflent tous enlèmble pour troubler le
repos public. Les gens d'un même état ou
profeflion formoient entre eux un collège ,
tel que le collège des augures , celui des arti-
fans de chaque efpece , 6*c. Ces collèges ou
iro/72/72w/2awrfVpouvQientavoir leurs juges pro-
pres; & lorfqu'ils en avoient , ceux qui en
ctoient membres ne pouvoient pas décliner la
juriiliiâion* Le collège fuccédoit à ^ts mem- I
C O M
bres décédés inteflati ; il pouvoit aufK être-
inftitué héritier & légataire : mais les collèges
prohibés , tels que ceux des juifs & des héré-
tiques , étoient incapables de fucceffion. On
ne pouvoit en établir fans l'autorité de l'em-
pereur , ni. au préjudice des loix & fénatuf^
confultes quiledéfendoient. Cescommunau-
tés ou collèges fe mettoient chacune fous la
proteâion de quelque famille patricienne.
Le devoir des patrons étoit de veiller aux
intérêts de la communauté y d'en foutenir
ou augmenter les privilèges.
A l'égard des communaute's , elles étoient
perpétuelles, & pouvoient pofféder des biens;,
avoir un coffre commun pour y mettre leurs
deniers ; agir par les fyndics ; députer
auprès des magiflrats , même de faire des
Ifatuts & réglemens , pourvu qu'ils ne fuf^
fent pas contraires aux loix.
En France , il y a deux fortes de commu-m
naute's , favoir eccléfiafliques & laïques. ^,
ci-après COMMUNAUTÉS ECCLÉSIASTI-
QUES Ê? Communautés laïques.
hcscommunautés eccléjiaftiques fc divifenf
en féculieres & réguheres. l^ oyei^ au mot
Communautés ecclésiastiques.
Il n'y a point de communauté quiioit véri-
tablement mixte , c'efl-à-dire partie eccléliaf^
tiçue & parne laïque; car les univerfités,
que r n dit quelquefois être mixtes , parce
qu'elles font compofées d'eccléfiafliques &
de laïques, font néanmoins des corps laïques,
de même que les compagnies de Jullice où il
y a des confeillers-clercs.
L'objet que l'on fe propofe dans Fétablif-
fement àts^communautés , efl de pourvoir à
quelque bien utile au public , par le con-
cours de plufieurs perfonnes unies en un.
même corps.
- L'établifîèmenr de certaines communautés
fe rapporte à la religion ; tels que les chapi-
tres des égiifes cathédrales & collégiales , \qs
monafleres , & autres communautés ecclé-
fiafliques ;, les contréries & congrégations , .
qui font des communautés laïques , ont aufli
le même objet.
La plupart des autres^OT/TZi/naz/fe'j laïques,
ont rapport ^ la police temporelle ; telles que:
les communautés de marcliands & artilàns , ,
les corps de ville , les compagnies de juf^
tice , ^c.
Il y à néanmoins quelques communautés^.
C O M.
laïques qui ont pour objet & la religion &
la police temporelle ; telles que les univerfi-
tés dans lefquelles , outre la théologie , on
enfeigne aufll les fciences humaines.
Aucune communauté y foit laïque ou
eccléliaflique, ne peut être établie fans l'^ttres
patentes du prince , duement enregistrées ;
&li c'efl une communauté tcc\èï\i^^\(\\it , ou
une co/72/7zw/2awf/ laïque qui ait rapport à la
religion , comme une confrérie , il faut aufli
la permiffion de l'évêque diocéfain.
Quoique l'état foit compofé de plufieurs
membres qui forment tous enfemble une
nation , cependant cette nation n'eft point
confidérée comme une communauté ; mais
dans les provinces qu'on appellepoyi- d'états^
les habitans forment un corps oucommunauté
pour ce q\ii regarde l'intérêt commun de la
province.
II y a dans l'état certains ordres compofés
de plufieurs membres , qui ne forment point
un corps , tels que le clergé & la noblelTe ;
c'efl pourquoi le clergé ne peut s'afTembler
fans permiilion du roi. Les avocats font
aufli un ordre & non une communauté. V.
ce qui en efl dit au mot COMMUNAUTÉ
DES Avocats ê? Procureurs.
Les communautés font perpétuelles, telle-
ment que quand tou.v ceux qui compofent
une communauté viendroient à mourir en
même temps , par une pefte ou dans une
guerre , on rctabliroit la communauté en y
mettant d'autres perlbnnes de la qualité
requife.
Chaque communauté a {çs biens ,. {ts
droits, & fes flatuts.
Il ne leur efl pas permis d'acquérir à quel-
que titre que ce foit aucuns immeubles, fans
y ê'^re autorifés par lettres patentes du roi
duement enregiflrées, & fans payer au roi
un droit d'amortifîement.. Voy. AMORTIS-
SEMENT 6" Main.- MORTE ,. & \Udit
dlaoût 1^4-9'
Les biens & droits appartiennent à toute
la communauté y & non. à chaque, membre
qpi n'en a que Tufage..
Les flatuts des communautés- ^omv ttrc
valables, doivent être revêtus de lettres
patentes du roi duement enregiflrées. .
Il efl d'ufage dans chaque commiinautéàQ
npramer certains officiers ou prépofés , pour
gérer les atfaires communes confoirmément
C O M ^9
auxfîatufs &délibérationsdeIa^om;nj//7aMre';:
& ces délibérations pour être valables , doi-
vent être faites en la forme portée par les
réglemens généraux, & par l:s flatuts parti-
culiers de la communauté. Vojr^ ci-après
Communautés d'habitans. Fqyqaa
d'igeûe quod cujufq. unii^erf. nom. Domat^
loix cii^iles , part. II , lip. I , tit. xv.
Communauté d'anifans, ou d'ans &'
métiers, voyez ci-ap,ès COMMUNAUTÉ-
(Commerce.)
Communauté des Avocats et
Procureurs de lacour, c'efl-à-dire du
parlement , eft une jurifdiûion économique
déléguée par la cour aux avocats & procu-
reurs , pour avoir entr'eux l'infpeftion fur ce
qu ils doivent obferver par rapport à l'ordre
judiciaire , pour maintenir les règles qui leur
font prefcrites , recevoir les plaintes qui leur
font portées contre ceux qui y contrevien-
nent, & donner leur avis fur ces plaintes.-
Ces avis font donnés fous le bon plaifir de la
cour ; & pour les mettra à exécution , on Iqs-
fait homologuer en la cour.
Sous le nom de communauté des avocats &^ .
procureurs , on entend quelquefois la cham--
bre où fe tient cette jurifdidion , quelque--
fois la jurifdiélion même, & quelquefois
ceux qui la compofent.
Beaucoup de perfonnes entendant parler
delà communauté des avocats Ù procureurs,
s'imaginent que ce terme communauté figni--.
fie que les avocats & procureurs ne forment
qu'une même communauté ou corn], agnie: ce
qui eii une erreur manifelle ; les avocats ne'
formant point un corps même entr'eux, mais .
feulement un ordre plus ancien que l'état des
procureurs , dont il a toujours été féparé au-
parlement ; les procureurs au contra-re for--,
mant entr'eux un corps ou compagnie qui n'a*
rien de commun avec les avocats, que cenç^-
jurildidion appellée la communauté, qu'ils-,
exercent conjoi; tement pour In manutentioniç
d'une bonne dilclphne dans ie~ palais , par-
rapport à 1 exercice deleur<; fondions.
Pour bien entendre ce que c'efl que cette '
jurifd'dion, & de quelle manière elle s'efl '
établie , il faur obferver qu'il y avoir en^.
France des avocats dès le commencement-
de la monarchie, qui alloient plnjder au^
parleinent dans les di'féren-s endroits où ill
I tenoit lès léauces ; & depuis quePiiilipp.e-le-«f-; 1
^7© C O M
Bel eut en 1310 rendu le parlement féden-
taire à Paris , il y eut des avocats qui s'y atta-
chèrent ; & ce fut le commencement de
l'ordre des avocats au parlement.
L'inftitution des procureurs ad Utes n'efl
pas 11 ancienne.Les établifî'emens de S. Louis,
faits en 1270 , font la première ordonnance
qui en parle ; encore falloit-il alors une dif-
penfe pour plaider par procureur. L'ordon-
nance des états tenus à Tours en 1484 , fut
la première qui permit à toutes fortes de per-
fonnes d'eller en jugement par procureur.
Il paroît néanmoins que dès 1341 les pro-
cureurs au parlement , au nombre de vingt-
fept , paflèrent un contrat avec le curé de
Sainte-Croix en la cité , pour établir entr'eux
une confrérie dans fon églife.
Cette confrérie fut confirmée par des let-
tres de Philippe VI, du mois d'avril 1342..
Les avocats n'étoient point de cette con-
frérie.
Cette confrérie de procureurs fut le pre-
mier commencement de leur communauté ,
de même que la plupart des autres corps &
communautés ^Q^\ ont commencé par de fem-
blables confréries.
Celle-ci ayant dans la fuite été transférée
en la chapelle de S. Nicolas du palais , les
avocats fe mirent de la confrérie , où ils ont
toujours tenu le premier rang ; & depuis ce
temps , il a toujours été d'ufage de choifir
un des anciens avocats pour être le premier
marguillier de la confrérie ; & on lui a
donné le nom de bâtonnier y à caufe que
c'étoit lui autrefois qui portoit le bâton de
S.Nicolas,
Jufqu'alors les avocats & les procureurs
n'avoient encore de commun entr'eux que
cette confrérie.
Les procureurs étoient déjà unis plus par-
ticulièrement entr'eux , & formoient une
efpece de corps , au moyen du contrat qu'ils
avoient paiTé enfemble , & des lettres paten-
tes de Philippe VI, confirmatives de ce con-
trat & de leur première confrérie.
Ils s'afTembloient en une chambre du pa-
lais pour délibérer entr'eux , tant des afiàires
de la confrérie dont ils étoient principale-
ment chargés , que de ce qui concernoit leur
difcipline entr'eux dans l'exercice de leurs
fondions ; & cette aflemblée fut appellée la
commwiAiUd des procureurs, La compagnie
C O M
elifoîf un de fes membres , pour veiller aux
intérêts communs ; & le procureur charge
de ce foin, fut appelle \q procureur de lacom->
munauté.
Il paroît même que l'on en nommoit plu-
fleurs pour faire la même fondion.
M. Boyer, procureur au parlement , dans
Ufiyle du parlement qu'il a donné au public,
fait mention d'un arrêt du 18 mars 1508 ,
rendu fur les remontrances faites à la CQur
par le procureur général du roi , qui enjoint
aux procureurs de la communauté de faire
afîèmblée entre les avocats & procureurs ,
pour entendre les plaintes , chicaneries de
ceux qui ne fuivent les formes anciennes , &
contreviennent au flyle & ordonnances de
la cour; & de faire regiftre, le communiquer
au procureur général pour en faire rapport
à la cour.
Les avocats ayant été appelles à cette
afïemblée avec les procureurs , elle a été
nommée la communauté des avocats Ù pro-
cureurs. Cette alTemblee fè tient dans la
chambre de S. Louis , & non dans la cham-
bre dite de la comwMnamé y où les procu-
reurs délibèrent entr'eux des affaires qui
intéreflent feulement leur compagnie.
Le bâtonnier des avocats préfide à la com"
munauté des avocats Ù procureurs ^ & s'y fait
affifler , quand il le juge à propos , d'un cer-
tain nombre d'anciens bâtonniers & autres
anciens avocats , en nombre égal à celui des
procureurs de communauté :c^ti\ ce qui ré-
fulte d'un arrêt de règlement du 9 janvier
1710, par lequel, en conformité d'une déli-
bération de la comrnunauté des avocats Ù
procureurs de la cour, du 9 defdits mois &
an, homologuée par ledit arrêt, il a été arrêté
que l'état de diflribution des aumônes feroit
arrêté dans la chambre de la communauté, en
préfence & de l'avis tant du bâtonnier des
avocats & de l'ancien procureur de commu-
nauté, que de quatre anciens avocats qui y
feront invités par le bâtonnier , dont il y en
aura deux au moins anciens bâtonniers, &
de quatre procureurs de communauté^ que fi
le procureur de communauté fe fait aflifler
d'autres procureurs, le bâtonnier fe fera pa-
reillement afCfter d'avocats en nombre égal
à celui des procureurs : que s'ils fe trouvent
partagés d'opinions , ils fe retireront au par-
quet des gens du roi , pour y être réglés.
C O M
Le bâtonnier des avocats & les anciens
|)âtonniers & autres avocats qu'il appelle
avec lui, vont, quand ils le jugent à propos ,
à la communauté y pour y juger les plaintes ,
conjointement avec les procureurs de com-
munauté : mais comme il eft rare qu'il y ait
quelque chofe qui inrérefîê les fondions
d'avocat,ils laifîènt ordinairement ce foin aux
procureurs de communauté^ c'eft pourquoi le
plus ancien d'entre eux fe qualifie de préfî-
dent de fa communauté'^ ce qui ne doit néan-
moins s'entendre c^uQàtlQwx communauté ou
compagnie particulière , & non de la com-
munauté des avocats Ù procureurs y où ces
derniers ne préfident qu'en l'abfence des
avocats.
Communauté de hiens entre conjoints^
ell une fociété. établie entr'eux par la loi ou
par le contrat de mariage , en conféquence
de laquelle tous les meubles qu'ils ont de part
& d'autre , & les meubles &; immeubles
qu'ils acquièrent pendant le mariage , font
communs entr'eux. Il y a même des co/72-
inunautés de tous biens indiftin(3ement:.ce
qui dépend de la convention.
La communauté de hiens entre conjoints
n'étoit point abfolument inconnue aux Ro-
mains ; on en trouve des vertiges dans une loi
attribuée àRomulus,oii la femme efl appellée
focia fortunarum.* Mulier viro fecundum
facratas leges conluncià ^fortunarum Ù fa^
crorum focia illi ejio, utque domus ille domi- .
nus , ita hçec. domino y filia. ut patris y ita
defuncfo marito y hceres efto. Voye^ Càtal:
kg. antiq. pag. Q, Comme la femme étoit
en la puiflânce de fon» mari, il étoit le
maître de la fociété ou communauté..
Il faut néanmoins convenir que ce qui eft
dit dans les loix romaines de la fociété du
mari & de la femme , doit s'entendre feule-
ment de la vie commune qui eft l'objet du
mariage, plutôt- que d'une communauté de
biens proprement dite; au moins n'y avoit-il
point parmi eux de communauté légale^.
On pouvoir à la vérité en établir par con-
vention. Il y en a une preuve en la loi ali-
menta^ au digeftei^e a/z;;2e7z^ qui parle d'un
mari & d'une fename qui avoient été en com^
munauté de tous biens. Cette communauté
contradée pendant le mariage , ne fut fans
doute^ approuvée qu'à caufe qu'il y avoir
^^alité de biens ; car il n'étoit pas permis .aux
C O M ^71
conjoints de fe faire aucun avantage entre-
vifs , même fous prétexte de s'aflocier. lib.
JCXXJIj § de donat. intervir. & ux.Ainii la
communauté ne pouvoit régulièrement être
fîipulée que par contrat de mariage ; mais la
donation faite entre conjoints par forme de
fociété , étoit confirmée comme donatioa
par la mort d'un des conjoints.
IJ n'y a pas d'apparence cependant que la
communauté de biens ufitée entre conjoints,
dans la plupart des pays coutumiers , ait été
empruntée des Romains , d'autant qu'elle
n'a point lieu fans une convention expreiîe
dans les pays de droit écrit qui avoifinent le-
plus l'Italie , &. où l'on obferve les loixr:
romaines.
Quelques-uns prétendent tirer l'origine-
Je h communauté y de ce qui fe pratiquoit
chez les Gaulois : ils fe fondent fur ce que:-
Céfar , en (es commentaires, de bello gallicoy^
hv. VI ., n. 4 , dit en parlant des mœurs des.;
Gaulois, que le mari en fe mariant étoitr
obligé de donner à fa femme autant qu'elle
lui apportoit en, dot , & que le tout apparre—
noit au furvivant , avec le profit qui en étoit-
furvenu: Quantas pecunias ab uxoribus dotis
nomine acceperunt^ tantas exhis bonis ûs/h-
matione facfâ cum dotibus communicant».
Hujus omnis pecunice conjunciim ratio ha-»-
beturfrucfufquefervamur. . Uter eorum vitâ '
fuperai-'itj ad eum pars utriufque cumfrucli- -
bus fuperiorum temporum pervenit. Mais il
eft aifé d'appcrcevoir que ce don réciproque
de furvie eit tout différent de notre, «rom-
munauté.
Il y a plutôt lieu de croire que lès pays
coutumiers , qui font plus voifins de l'Alle-
magne que les pays de droit écrit, ont em-
prunté cet ufage des anciens Germains, chez •
lefquels le tiers ou la moitié des acquêts faits
pendant le mariage, appartenoit à la femme,
fuivantlewVre ï-'i// dé la loi des Saxons: De
eo quod vir Ù mulierfimul acquijierim^ mu-
lie r mediam partem accipiat ; & lé- f/V.,
xxix de la loi ripuaire : Mulier tertiam
partem de omni re quam conjuges Jîmul.
collahoraverint y fiudeat revindicare.
', Sous la première &• là féconde race dé
nos rois , la femme n'avoit que le tiers des
biens acquis pendant le mariage; ce qui
étoit conforme à la loi des ripuaires. La com-
.munautényoïthm alors pour les reines ; ; e^.
^7* C O M
^fFeton lit daps Aimion, que lors du partage
qui fut fait de lafucceflion de Dagobert entre
i'esenfans, on réfervale tiers des acquihtions
■qu'il avoir faites pour la reine fa veuve ; ce
•qui confirme que l'ufage étoit alors de donner
aux femmes le tiers de la communauté. Louis
le ]3éboni.iaire & Lothaire Ion fils , en firent
une loi générale: l^olumus iitiixores defunc-
torum paji obitum maritorum tertiam par-
tem collaboradonis ^ quam fimul in benefi-
icio collaboraverunt , accipiant.
Cette loi fut encore obfervée pour les veu-
ves des rois iubféquens, comme Flodoard
le fait connoître en parlant de Raoul roi de
France , lequel aumônant une partie de fes
biens à diverfes églifes , réferva la part de la
reine fon-époulè; mais il ne dit pas quelle
étoit la quotité de cette part. Ce paflage juf-
tifie auffi qu'il n'étoit pas au pouvoir du mari
çie difpolèr des biens de \^ communauté y au
préjudice de fa femme.
Préfentement il n'y a plus de communauté
entre les rois & les reines ; elles partagent
feulement L s conquêts faits avant l'avéne-
ment du roi à la couronne.
Le mari peut diipofer àes biens dq la com'
munauùépar ade entre-vifs , pourvu que ce
foit à perlonne capable & fans fraude ; mais
par teflament il ne peut difpofer que de fa
xnoitié.
Les coutumes de Bourgogne , rédigées en
1459 1 ^cmf l^s premières où il foit parlé de
la communauté de biens j dont elles donnent
à la femme moitié ; ce qui eft conforme à
la loi des Saxons. Cet ufage nouveau par
tapport à la part de la femme , adopté dans
ces coutumes & dans la plupart de celles qui
ont été rédigées dans la fuite , pourroit bien
avoir été introduit en France par les Anglois,
qui , comme l'on fait , font Saxons d'origi-
ne ; & fous k règne dp Charles VI, s'étoient
emparés d'une partie du;-oyaume.
Le droit de communauté eft accordé à la
femme , en coinfidération de la commune
collaboration qu'elle fait , ou eft préfumée
faire, foit en aidant réellement fon mari dans
fon compierce , s'il en a , foit par fon induf-
irieperfonnelle, ou par fes foins & fon éco-
nomie dans le ménage.
La plupart àes coutumes étaKlifîênt de
f)lein droit la communauté entre conjoints : il
^ ,#.n .j^ néanmoins quelques-unes , comme
C O M
Normandie & Rheims , qui excluent cètTt
communauté', mais elles ont pourvu autre-
ment à la fubfiftance de la femme en cas de
viduité.
Les contrats de mariage étant (ufceptibles
de toutes fortes de claulés qui ne font pas
contre les bonnes mœurs , il eft permis aux
futurs conjoints de ftipuler la communauté
de biens entr'eux, même dans les pays de
droit , & dans les coutumes où elle n'a pas
lieu de plein droit.
Il leur eft pareillement permis de l'admet-
tre ou de l'exclure dans les coutumes où elle
a lieu ; fi la femme eft exclue de la commu-
nauté ^ fes enfans & autres héritiers le font
auffi.
Lorfque le contrat de mariage ne règle
rien à ce fujet : pour favoir s'il y a commu~
nautéy on doit fuivre la loi du lieu du domi-
cile du mari au temps de la célébration du
mariage , ou de celui où il avoit intention
d'établir fon domicile en fe mariant , \ts
conjoints étant préfumés avoir voulu fc
régler fuivânt la loi de ce lieu.
Quoique de Aro\tcommMn.\2i communauté
fe partage par moitié entre le furvivant &
les héritiers du prédécédé , il eft permis aux
futurs conjoints , par contrat de mariage ,
de régler autrement la part de chacun 6es
conjoints. On peut ftipuler que la femme
n'aura que le tiers, ou autre moindre por-
tion; ou que le furvivant jouira feul de toute
la communauté y foit en ufufruir ou en pro-
priété , & autres claufes femblables.
J^a communauté \ega\c ou conventionnelle
a lieu du moment de la bénédiftion nup-
tiale , & non du jour du contrat. Il y a néan-
moins quelques coutumes , comme Anjou
& Bretagne , où elle n'a lieu qu'après l'an &
jour; c'eft-à-dire , que fi l'un des Conjoints
décède pendant ce temps , la communauté
n'a point lieu : mais s'il ne décède qu'après
l'année , la communauté a lieu , & a eftèt
rétroadif au jour du mariage.
Les claufes les plus ordinaires que Kon in-
fère dans les contrats de mariage par rapport
à \n communauté f font:
Que les futurs époux feront uns & com-
muns en tous biens , meubles & conquêts
immeubles, fuivant ]a coufume de leur
domicile.
Qu'ils ne feront néanmoins tenus des
dette*
C O M
tes l'un de l'autre créées avant le mariage ,
lefquelles feront acquittées par celui qui les
aura faites , & fur fcs biens.
Que de la dot de la future il entrera une
telle fomme tn communauté ^ & que le fur-
plus lui demeurera propre à elle & aux fiens
de fon côté & ligne.
Que le furvivant prendra par préciput , &
avant partage de la communauté , des meu-
bles pour une certaine fomme , fuivant la
prifce de l'inventaire & fans crue , ou ladite
fomme en deniers à fon choix.
Que s'il eft vendu ou aliéné quelque pro-
pre pendant le mariage , le remploi en fera
fait fur la communauté ; & s'ils ne fuffifent
pas à l'égai'd de la femme , fur les autres
biens du mari : que l'adion de ce remploi
lera propre aux conjoints & à leurs enfans ,
& à ceux de leur côté & ligne.
Qu'il fera permis à la future & à fes en-
fans qui naîtront de ce mariage , de renon-
cer à la communauté ; Ù en ce faifant , de
reprendre franchement & quittement tout
ce qu'elle y aura apporté , & ce qui lui fera
échu pendant le mariage , en meubles &
immeubles , parfùcceffion , donation, legs ,
ou autrement : même la future , fi elle fur-
vit , fcs douaire & préciput , le tout franc
& quitte de toutes dettes , encore qu'elle y
eût parlé ou y eût été condamnée ; dont audit
cas elle & Ces enfans feront indemnifés far
les biens du mari , pour raifon de quoi il y
aura hypothèque du jour du contrat.
Il eft aufli d'ufage que le mari fixe la por-
tion de fon mobilier qu'il veut mettre en
communauté , & il flipule que le furplus lui
demeurera propre , & aux fiens de fon côté
& ligne.
Le mariage une fois célébré , les conjoints
ne peuvent plus faire aucune convention
pour changer leurs droits par rapport à la
communauté.
Un mariage nul , ou qui ne produit pas
d'effets civils , ne produit pas non plus de
communauté.
Quant au^iens qui entrent en la commu-
nauté , il faut diflinguer.
'Lîi communauté légale , c'efî-à-dire' celle
qui a lieu en vertu de la coutume feule , &
celle qui efl flipulée conformément à la cou-
tume , comprend tous les meubles préfens
&i à venir des conjoints , & tous les con-
Tome VUL
C O M Cy^
quêts immeubles , c'efl-à-dire ceux qu'ils
acquièrent pendant le mariage , à quelque
titre que cefoit , lorfqu'ils ne leur font pas
propres.
La communauté conventionnelle , c'efî-à-
dire celle qui n'efl fondée que fur la conven-
tion , & qui n'eft point établie par la cou-
tume du lieu , ne corapread point les meu-
bles préfens , mais feulement les meubles à
venir , & les conquéts immeubles.
Il efl d'ufage que les conjoints en fe ma-
riant mettent chacun une certaine fomme
en communauté ; cette mife peut être iné-
gale. Celui des conjoints qui n'a point de
meubles à mettre en communauté ^ ameublit
ordinairement par fidion une portion de
fes immeubles , & cette portion ainfi ameu-
blie efl réputée meuble à l'égard de la com-
munauté.
Quand au contraire les conjoints n'ont
que des meubles , ils peuvent en réaHfer
par fidion une partie pour l'empêchej*
d'entrer en communauté ; cette réalifa-
tion fe peut faire , ou par une claufè ex-
preffe de réalifation , ou par une fimple
flipulation d'emploi , ou par une claufe
que les deniers ou autres meubles que l'on-
vdut excepter de la communauté demeu-
reront propres a-ux conjoints.
La flipulation de propre fimplement, ne
conferveroit le miobilier flipulé propre qu'aii
conjoint feulement : pour tranfmcttre lé
même droit à fes enfans , il faut ajouterpro-
pre à lui ù aux fiens ; & fi on veut étendre
l'efïèt de la claufe aux collatéraux du con-
joint, il faut encore a]ouzer de fon c6t/& li^né.
La pratique d'un office entre en lacommu"
nauté comme , les autres meubles ; & les
offices comme les autres immeubles , excepté
néanmoins les offices de la maifon du roi &
des gouvernemens , qui n'entrent point en
communauté , fuivant l'édif du mois de
janvier 2678.
Les rentes foncières entrent pareillement'
en la communauté comme les autres im-
meubles ; à l'égard des rentes conflituées ,
elles y entrent comme meubles ou immeu-
bles , fuivant que la coutume du domicile
du créancier leur donne l'une ou l'autre
qualité.
Les immeubles , foit propres ou acquêts ,
que les conjoints pofîldoient au temps du
Qqqq
^74 C O M
mariage , & ceux qui leur font <^chus depuis
par fucceflion direde ou coliarérale , même
par legs ou donation direélc , qui font tous
biens propres , n'entrent point en commu-
nauté , à moins qu'il'n'y eût claufe contraire
dans le contrat de mariage : il en efl de même
des biens qui ont été échangés contre des
propres , & de ceux qui font échus à un
des conjoints par licitation , les uns & les
autres étant propres.
Pc«ir ce qui eft des fruits des propres &
acquêts , ils entrent de droit en la commu-
nauté , auffi-bien que les fruits des con-
quêts immeubles.
Tous biens meubles ou immeubles ac-
quis pendant le mariage font cenfés acquis
éQs deniers de la communauté , &: com-
muns entre les conjoints , (bit que l'ac-
quifition (bit faite par eux conjointement
©u pour eux deux , loit qu'elle ait été
faite au nom d'un des conjoints feulement.
Le mari Cil le maître delà communauté ,
c'efl pourquoi la femme ne peut pafl'er au-
cun ade , même en fa prélence , ni efter
en jugement , fans être autorifée dé lui ,
ou par juOice au refus du mari , s'il y a
lieu de le faire.
. En qualité de maître de la communauté' ,
le mari peut non-feulement faire feul tous
ades d'adminiilration , comme recevoir &
•donner quittance , faire des baux ; mais il
peut auffi difpofer feul entre-vifs des meu-
bles & immeubles de la communauté , foit
par obligation , aliénation , ou donation ,
& autrement , etiam perdendo , pourvu
que ce foit à perfonne capable &: fans fraude.
La femme , pendant la vie de fon mari ,
n'a qu'un droit éventuel fur la communauté,
pour partager ce qui fe trouvera au jour de
la diflblution ; ainfi elle ne peut dilpofer
d'aucun des effets de la communauté , &
fi elle le fait conjointement avec fon mari ,
c'ell: proprement lui feul qui difpofe , puif-
qu'il eft feul maître de la communauté.
Elle ne peut , par la même raifon , em-
pêcher fon mari de vendre ou aliéner les
bins de la communauté ; mais feulement ,
s'il y a dilfipation de la part du mari , de-
mander en juftiçc fa féparation de biens ,
dont l'eifet eft de difibudrc la communauté
pour l'avenir.
La femrae ne peut pas non plus obliger
C O M
la communauté par aucune emplette ou
emprunt , fi ce n'eft lorfqu'elle ell fac-
trice de fon mari , ou qu'au vu & au fti
de fon mari elle fait un commerce féparé ,
auquel cas elle oblige fon mari & la com-
munauté.
Autrefois les réparations civiles ou confif-
cations prononcées contre le mari , fe pre-
noient fur toute la com/rzz/waiif f' indifîinde-
ment ; mais fuivant des /f frrf j- du z6 dé-
cembre z^^z y données par Henri VI ,
roi d'Angleterre , & foi dilant roi France ,
il fut accordé en faveur des bourgeois de
Paris , que la moitié de la fem-me en la
communauté ne feroit pas flijette aux con-
lifcations prononcées contre le mari.
Quelques coutumes , comme celle de
Bretagne , donnoient feulement une provi-
fion à la femme fur les biens confiiqués :
DHmoulin s'éleva fort contre cet abus ;
& c'elf peut-être ce qui a donné lieu à far-
rêt de 1532 , qui a jugé que la confifcation
du mari ne préjudicie pas aux conventions
de la femme , ni même à fon droit en
la communauté.
La confifcation prononcée contre la fem-
me ne comprend qite (es propres , & non
fa part en la communauté , qui demeure au
mari par non décroifîément : à l'égard des
amendes & réparations civiles & des dépens
prononcés contre la femme , même en ma-
tière civile , lorfqu'elle n'a point été auto-
rifée par fon mari ^ ces condamnations ne
peuvent s'exécuter fur la part de la femme
en la communauté qu'après la diffolurion.
Pour ce qui eff des charges de la commu-
nauté , il faut diflinguer les dettes créées
avant le mariage , de celles qui font créées
depuis.
Les dettes immobiliaires créées avant le
mariage ^ ne font point une charge de com-
munauté ; chacun des conjoints efl tenu
d'acquitter celles qui le concernent.
A l'égard des dettes mobiliaires , auflî
créées avant le mariage , elles (ç^t à la charge
de la communauté , à moins qu'on n'ait IH-
pulé le contraire ; cette claufe n'empêche pas
néanmoins le créancier de fe pourvoir con-
tre le mari , & fur les biens de la communau-
té, quand même ce feroit une dette perfon-
nelle de la femme ; fon effet efl feulement
d'obliger celui des conjoints dont la dette a
C O M
été payée des deniers de la communauté ,
d'en taire raifon à l'autre ou k ies héritiers
lors àc la diffolution de la communauté.
Quant aux dettes contradées depuis le
mariage , foit mobiliaires ou immobiliaires ,
elles font toutes à la charge de la commu-
nauté : Il la femme n'y a pas parlé , elle
n'y eft obligée qu'en cas d'acceptation à la
communauté , & elle ne peut être tenue que
jufqu'à concurrence de ce qu'elle ou fes héri-
tiers amendent de la communauté , pourvu
qu'après le décès du premier mourant il foit
fait loyal inventaire ; à la diiiérencedu mari
qui eft toujours tenu folidairementdes dettes
de communauté envers les créanciers , fauf
fon recours contre les héritiers de (a femme ,
pour la part dqint ils en font tenus.
Si la femme s'efl: obhgée avec fon mari ,
elle n'a plus le privilège de n'être tenu qu'//z-
fra rires ,' elle doit remplir fon obligation ,
fauf fon recours contre les héritiers de fon
raari , pour ce qu'elle a été obligée de payer
au-delà de la part qu'elle devoit fupporter
des dettes.
Les frais de la dernière maladie du prédé-
cédé font une dette de communauté ; mais
les frais funéraires ne fe prennent que fur
la part du prédécédé & fur fes biens perion-
nels : le deuil delà veuve efî aufli à la charge
delà communauté y foit qu'elle accepte ou
qu'elle renonce.
Les dettes immobiliaires des fucceffions
échues aux conjoints pendant le mariage ,
ne font point à la charge de la communauté j
& à l'égaid des dettes mobiliaires , la com-
munauté nçn eft tenue qu'à proportion des
meubles dont elle amende de la même fuc-
celîion.
La communauté finit par la mort natu-
relle ou civile d'un des conjoints , & par
la iéparation.
La mort civile du mafi difTout tellement
la communauté, que le partage en peut être
?-uiîi-tôt demandé par la femme ; au lieu que
la mort civile de la femme difTout bien la
communauté , mais la totalité en demeure
au mari.
Pour que laféparation opère la diffolution
de lacommunauté , il faut qu'elle foit ordon-
née en juftice après une enquête; car les le-
parations volontaires font réprouvées.
Après la difïblution de lu' communauté y
C O M
7Î
la femme ou fes héritiers ont la libe-rté de
l'accepter ou d'y renoncer ; au lieu que le
mari n'a pas la liberté d'y renoncer , attendu
que tout eft cenië de fon fait.
Lorfque la femme ou fes héritiers accep-
tent lacommunauté , chacun commence par
reprendre Ces propres réels en nature ; enfuite
on reprend fur la maffe de la communauté le
remploi des propres aliénés , les deniers ftipu-
lés propres , les récompenfes que les con-
joints fe doivent pour leurs dettes perfonnel-
les qui ont été acquittées fur la communauté y
ou pour les impenfes faites fur leurs propres
des deniers de la communauté.
Sur le furplus de la communauté le furvî-
vant prélevé fon préciput en meubles ou en
argent , félon ce qui a été ftipulé , fans
être tenu de payer plus grande part des
dettes pour raifbn de ce préciput.
Dans la coutume de Paris , entre nobles ,
lefurvivant a de plus le droit de prendre le
préciput légal , qui comprend tous les meu-
bles étant hors la ville & fauxbourgs de
Paris , à la charge de payer les dettes
mobiliaires & frais funéraires du défunt ^ •
pourvu qu'il n'y ait point d'enfans ; &
s'il y a enfans , ils partagent par moitié.
Après tous ces prélevemens , le reftant de
la communauté Ce partage entre le furvivanc
& les héritiers du prédécédé , fuivant ce quî
a été convenu par le contrat.
La faculté de renoncer à la communauté ,
ne fut d'abord accordée qu'en faveur des no-
bles , des gentilshommes qui le croifoient
contre les Infidèles , lefquels étant obligés à
d'excefiives dépenfes ^ engageoient fouvent
tous leurs biens , ou la plus grande partie.
Cet ufage ne commença par conféquent au
plutôt que vers la fin du xj^ fiecle ; Monflre-
kt , la'. /, ch. ocviij de fon hifl. dit que Phi-
hppe I , duc de Bourgogne , étant mort cri
1363 , la veuve renonça à (es biens-meubles ,
craignant fes dettes , en métrant fur la repré-
fentation , l'a ceinture avec la bourfe & fes
clés comme il étoit de coutume , & qu'elle
en demanda acle à un notaire public. Bonne ,
veuve de Valeran comte de S. Poî , fit la
mêmechofe, au rapport du même auteur,'
ch. cxxxix. La veuve jetoit fa bourfe & fes
clés fur la fofîe ou fur la repréfcntntion de
fon mari , pour marquer qu'elle ne retenoit
rien de fa maifon. Il eft fait mention de cette
Qqqqi
^7^ G O M
formalité dnnsplufieurs coutumes , telles que
Meaux , Chaumont , Vkry , Laon , Châ-
lons , & autres , ce qui ne fe pratique plus
depuis long-temps. La forme nécefïaire pour
]a validité de la renonciation , efl qu'elle i'oit
faite au greffe ou devant notaire , qu'il yen
ait minute , & qu'elle foit inlinuée.
Ce privilège , qui n'étoit accordé qu'aux
veuves des nobles , a été étendu par la nou-
velle coutume de Paris aux veuves des rotu-
riers , & cela ell aujourd'hui de droit com-
mun.
La renonciation pour être valable , doit
être précédée d'un inventaire fait avec un
légitime contradideur.
Si la femme ou les héritiers renoncent à la
communauté , en ce cas ils reprennent , tant
fur \ts biens de la communauté , que fur tous
les autres biens du mari indillindement , les
deniers dotaux de la femme ftipulés propres ,
fon apport mobilier quand il y a claulé de
reprife , (ts remplois de propres , les répara-
tions qui font à faire fur ^qs propres exiftans ,
fon douaire préfix ou coutumier fi elle furvit ,
& même fon préciput au cas que cela ait été
flipulé ; elle reprend aufli fur ces mêmes biens
les dons qui lui ont été faits par fon mari par
contrat de mariage , & elle a fur ces mêmes
biens une indemnité contre fon mari ou fes
héritiers , pour les dettes auxquelles il l'a
fait obliger durant lacommunautéy avec hy-
pothèque pour cette indemnité du jour du
contrat de mariage.
La femme peut être privée de fon droit en
la communauté ^our caufe d'adultère , & dans
le cas où elle a abandonné fon mari , & a
perfiflé à vivre éloignée de lui , nonobllant
les fomraations qu'il lui a faites de revenir
dans fa maifon ; mais le défaut de paiement
de la dot n'eil: pas une raifon pour la priver
^e la iommunauté,
Lorfqu'au jour de la diflolution de la com-
munauté'A y a des enfans mineurs nés du fiir-
vivant & du prédécédé , & que le furvivant
néglige de faire inventaire , il eft au choix
àes mineurs de prendre la corn/;? w/za^f/ en
Fétat qu'elle étoitau^jour de la dilîblution ,
ou de demander la continuation de commu-
nauté jufqu'au jour de l'inventaire , s'il en a
été fait un depuis ; ou jufqu'au jour du par-
tage , Vil n'y a point eu d'inventaire.
La oaaiorité fur venue anK mineurs depuis
C O M
la difïblution de la communauté , n'empêche
pas qu'elle ne continue jufqu'à ce qu'il iit
fait inventaire valable. .ji
Quand les mineurs optent la continuation
àe communauté , les enfans majeurs peuvent
aulil faire la même option.
Pour empêcher la continuation de co/tz-
munauté, il faut que le furvivant fafîê faire
un inventaire folemnelavec un légitime con-
tradideur ; il faut même , à Paris & dans
quelques autres coutumes , que cet inventaire
foit clos en jufîice.
La communauté commuée efl compofée de
tous les meubles de la première communauté y
des fruits des conquêts , & des fruits des pro-
preij du prédécédé ; tout ce qui échoit au
furvivant , qui efl de nature A entrer en com--
munauté ^ entre aufli dans cette continuation ,
mais ce qui échoit aux enfans , ou qu'ils ac-
quièrent de leur chef depuis la difTolution de
la communauté^ n'entre point dans la conti-
nuation ni pour le fonds ni pour les fruits.
- Le fécond mariage du furvivant n'opère
point la difïblution àe\^ communauté conti-
nuée ; en ce cas fi les enfans mineurs optent
la continuation de communauté , elle fe par-
tage par tiers entr'eux avec le iur vivant &
fon fécond conjoint.
Après la diffolutionde la communauté , le
furvivant des conjoints doit rendre compte
delaco/n/;zw/2aMrf'auxhéritiersdu prédécédé ;
quand le furvivant a été tuteur de fes enfans ,
ce compte fe confond avec celui de la tutelle;
enfin après le compte on procède au par-
tage.
On peut voir fur cette matière les traités
de la communauté par de Renulfon & Le-
brun , &: les commentateurs des coutumes
fur le titre de la communauté ; Pafquier en-
fes recherches , liv. IV y ch. ocxj ; de Lau-
riere en fon glojf. au mot communauté de
biens , au mot ceinture , au mot clé. {A)
Communauté conjugale , efl hcom^
munauté àe biens qui a heu entre conjoints ,
en vertu de la coutume ou du contrat de ma-
riage. F". c/Wf^'.CoMMUNAUTÉDEBlENS.
Communauté continuée , J-'oye^
Communauté de biens.
Communauté conventionelle ^
eu celle qui eff flipulée entre conjoints par le
contrat de mariage. Fbjf;^CoMMUNAUTÉ.
DE BIENS.
C O M
Communauté coutumiëre oulé-
GALE , eH celle qui a lieu de plein droit en
vertu de la coutume , & qui n'a point été
réglée par le contrat de mariage. Voye\
ci-devant COMMUNAUTÉ DE BIENS , 6"
ci-après COMMUNAUTÉ LÉGALE. (^ )
Communautés Ecclésiastiques ,
{Wifi. eccl. & mod.) corps politiques compo-
lës de perfonnes eccléliaftique.s qui ont des
intérêts communs. Ces communautés font de
deux fortes ; favoir régulières , & féculieres.
Les communautés régulières font les collèges
ou chapitres de chanoines réguliers , les mai-
fons conventuelles de religieux , les couvents
de religieufes : ceux qui compofent ces com-
munautés régulières vivent enfemble & en
commun ; ils ne pofledent rien en propre.
Voyei Chanoines réguliers , Cou-
vent , Monastère , Religieux ,
Religieuses.
Les communautés ecclé/iaJliquesCécuWeres
font les chapitres des égliies cachédrales &
collégiales , les féminaires & autres maiions
compofées d'cccléfiaftiquei. qui ne font point
de vœux & ne font ailreinrs à aucune règle
particulière.
On ne peut établir aucune communauté
eccléjiafiique fans le concours des deux puil-
fànces : il faut la permiflion de l'évêque dio-
célain pour le fpiricuel , & des lettres pa-
tentes du roi duemcnt enregiilirées , pourau-
torifer l'établiflément quant au temporel.
Les univerfités font des corp<; mixtes , en
ce qu'ils font compofés de laïques & d'ecclé-
liafHques ; mais confidérés en général , ce
font des corps laïques. V. UNIVERSITÉS.
On attribue à S. Auguflin l'origine & f inf-
titution descommunaucé eccléjiafiiques fé-
culieres. Il eft certain qu'il en forma une des
clercs près de fa ville épifcopale , où ils man-
geoient & logeoicnt avec leur évêque , étant
tous nourris & vêtus aux dépens de la com-
munauté ^ ufant des habits & des meubles
ordinaires fans fe faire remarquer par aucune
fmgul^rité. Ils renonçoient à tout ce qu'ils
avoienten propre , mais ne faifoient vœu de
continence que quand ils recevoient les or-
dres auxquels il étoit attaché.
On trouve beaucoup d exemples de ces
communautés eccléjiafiiques dans l'Occident
depuis le temps de S. Auguflin ; & l'on croit
qu'elles ont fervi de modèle aux chanûioes
C O M Cjy
* réguliers , qui fe font aujourd'hui honneur
de porter le nom de S. Auguflin; mais on n'en
trouve qu'un dans Thifloire de l'églife grc-
que. Il efl vrai qu'en Orient le grand nom-
bre de monafleres fuppléoit à ces commu^
nautés.
Julien dé Pomere dit qu'il y avoît des com"
munautés compofées de trois fortes de clercs:
\&s uns n'avoient jamais eu de patrimoine ,
\qs autres avoient abandonné celui qui leur
appartenoit , d'autres l'avoient confervé &
en faifoient part à la communauté. En Efpa-
gne il y avoir plufieurs communautés ecclé-
jiafiiques , où l'on formoit les jeunes clercs
aux lettres & à la piété , comme il paroît
par le II concile de Tolède. C'étoient ce
que font aujourd'hui nos féminaires.
L'hiltoire eccléfiaflique fait aufïi mention
de communautés eccléjiafiiques & monajli-
ques tout enfemble ; tels étoient les monaf^
teres de S. Fulgence , évêque de Rufpe en
Afrique , & celui de S. Grégoire le grand.
Nous appelions aujourd'hui communautés
eccléjiafiiques , toutes celles qui ne tiennent
à aucun ordre ou congrégation étabhe par
lettres patentes. Il y a aufli plufieurs commu-
nautés religieuiés de l'un & de l'autre fexe ,.
qui forment àe^ maifons particulières ; &
d'autres de lilles ou veuves qui ne font point
de vœux , ou au moins de vœux folemnels^
& qui font en très-grand nombre. Thoraafîl
difcip, eccléf. part. I , lip'. I y ch. xxxix y
Xl £ Xlj y pan. II y //>. I y cIl. XXX. (G)
Communauté d'Habitans : c'elHe
corps des habitans d une ville , bourg , ou
fimple paroiffe , confidérés colledivemenc
pour leurs intérêts communs. Quoiqu'il ne
foit pas permis d'établir dans le royaume au-
cune communauté fans lettres patentes , ce—
P'?ndanr les habitans de chaque ville , bourg , •
ou paroiffe , formeni entre eux une commu-
nauté ^ quand même ils n'auroient point de
chart re de commune : Fobjet de cette commit^
naitté con{\^Q feulemem à pouvoir s'afîèmbler
pour délibérer de leurs aflàires communes , &
avoir un lieu dcffiné à cet eftèt ; à nommer
des maire & échevins , confuls & fyndics ^
ou autres ofîiciers , félon l'ufage du lieu y
pour adminiiîrer les aŒiires communes ; de»
afîéeurs & colledeurs dans les heux tailla*
blés , pour Tafliette & recouvrement de la
taille , des nieiiiers , & autres prépofcspoujr
€;S C O M
la garde des moiiTons , des vignes , & autres
fruits.
Les aflignations que l'on donne aux com-
munautés dliabitans doivent être données un
jour de dimanche ou fête , à l'ifîbe de la
mefîè paroiffiale ou des vêpres , en parlant
au lyndic , ou en l'on ablence au marguil-
iier , en préfence de deux habitans au moins
que le fergent doit nommer dans l'exploit ,
il peine de nullité ; & à l'égard des villes où
il y a maire & échevins , les aflîgnarions doi-
vent être données à leurs peribnnesou do-
miciles.
Les communautés d'hahltans ne peuvent
jntenDer aucun procès fans y être autorifées
par le commiflaire départi dans la province;
& en général ils ne peuvent entreprendre au-
cune affaire , foit en demandant ou défen-
dant , ni faire aucune députation ou autre
chofe concernant la communauté, fans que
cela ait été arrêté par une délibération en
bonne forme , & du confentemcnt de la
majeure partie des habitans.
Ces délibérations doivent être faites dans
une aflemblée convoquée régulièrement ,
c'eft-à-dire que l'affemblée loit convoquée
au fon de la cloche ou du tambour , lelon
l'ufage du lieu , à Tiflue de la méfié paroif-
fiale , un jour de dimanche ou iète , &: que
Tade d'aflemblée & délibération (bit rédigé
par un notaire , & (igné ats habitans qui
étoient préfens & qui lavoient figner ; &
pour ceux qui ne le. favoient pas , qu'on en
fafîe mention.
La manière dont ils doivent nommer les
afféeurs & colleâeurs, eflexphquée ci-devant
au mot Collecteur ; & ce qui concerne
les furtaux & la taille , fera dit aux mots
Surtaux & taille.
Les communautés cT habitans poflèdent en
certains lieux des biens communaux ,
tels que des maifons , terres , bois , prés ,
pâturages, dont la propriété appartient à route
la communauté , & l'ufage à chacun des ha-
bitans , à moins qu'ils ne Ibient loués au pro-
fit de la communauté , comme celafe prati-
que ordinairement pour les maiions & les
terres : les revenus communs qu'ils en re-
tirent font ce que l'on appelle Us deniers
patrimoniaux.
Dans la plupart des villes les habitans pof-
(êde;it des odrois , c'ell-à-dire certains
C O M
droits qui leur ont été concédés par le roi
à prendre fur marchandifes & denrées qui
entrent ou iortent de ces villes , ou qui s'y
débitent.
L'édit de 16S3 , & k déclaration du 2
août 1687 , détendent aux communautés
cThabitansde faire aucunes ventes ni aliéna-
tions de leurs biens patrimoniaux , commu-
naux , & d'oclroi , ni d'emprunter aucuns
deniers pour quelque caufe que ce foit , fi-
non en cas de perte , ou pour logement &
ufleniiles des troupes , & réédificarion des
nefs des éghfes tombées par vêtu fié ou in-
cendie , & dont ils peuvent être tenus ; &
dans ces cas mêmes il faut une affemblée en
la manière accoutumée , que l'affaire pafle
à la piurahîé des voix , &c que le greffier de
la ville , s'il y en a un , fmon un notaire ,
rédige l'ade , & qu'on y falîê mention de
ce qui doit erre fait. Cet aâ:e doit être en-
fuite porté à l'intendant , pour être par lui
autorifé , s'il le juge à-propos ; & s'il s'agit
d'un emprunt , il en donne avis au roi , pour
être par lui pourvu au rembourfement.
La forme en laquelle on doit faire le pro-
cès aux communautés d' habitans & autres ,
lorfqu'il y a lieu , efl prefcrice par l'ordon-
nance de 1670 , tit. xxj. Il faut que la com-
munauté nomme un lyndic ou député , fui-
vant ce qui fera ordonné , finon on nomme
d'office un curateur. Le fyndic député , ou
curateur , iubit interrogatoire , & la con-
froBi^non àz^ témoins ; il elf employé dans
toutes les procédures en la même qualité :
maisledifpofitif du jugement ell rendu con-
tre la communauté même. Les condamna-
tions ne peuvent être que de réparation ci-
vile , dommages & intérêts envers la partie ,
d'amende envers le roi , privation de leur
privilège, & autres punitions qui marquent
publiquement la peine que la communauté a
encourue par ion crime. On fait aufli en par-
ticulier le procès aux principaux auteurs du
crime & à leurs complices ; & s'ils fbnt con-
damnés à quelques peines pécuniaires , ils ne
font pas tenus de celles qui ont été pronon-
cées contre la communauté.
Communautés laïques , qu'on ap-
pelle auSî communautés féculieres y font des
corps & compagnies compofees deperfbnnes
laïques unies pour leurs intérêts communs \
, telles font 'les corps de ville &.les commua
C OM
nantis dl-iabitans ; les compagnies de
jufîice compofées des magiftrats d'un même
tribunal ; les autres compagnies d'officiers ,
telles que celles des procureurs , notaires ,
huiffiers , & autres femblables ; le collège
des fecretaires du roi , les univerfités , &
même chaque collège qui en dépend , les
hôpitaux , & autres corps femblables.
Communauté légale de biens , eft celle
qui a lieu de plein droit entre conjoints , en
vertu de la loi ou de la coutume , fans qu'elle
ait été flipulée par le contrat de mariage.
Communauté de Marchands ,
voye^ ci F article COMMUNAUTÉ ( Com-
merce , <& ci-après MARCHAND.
Communauté des Procureurs ,
eft l'allemblée de ceux des procureurs au
parlement qui font prépofés pour adminiftrer
les alîliires de la com.pagnie , & qu'on appelle
par cette raifon />/'c»an"£'£/rj de communauté.
Cette afîèmblée fe tient dans une chambre
du palais qui eft près de la chapelle de S. Ni-
colas , & qu'on appelle la communauté. On
ne doit pas confondre cette afîèmblée avec
la communauté des avocats & procureurs.
Voyei ci-devant COMMUNAUTÉ DES
Avocats , ùc.
COMMUliAVTÈ (Procureurs de ) , poye:[
ci-devant au mot COMMUNAUTÉ DES
Avocats & Procureurs , & ci-après
au woz^Procureurs.
Communautés régulières , font
des maifons compolées de pcrfonnes unies
en un même corps , qui_ vivent félon une
règle canonique ou monaftique ; tels font
les chapitres de chanoines réguliers , les cou-
vens de chanoineffes régulières , & tous les
couvens & monafteres de religieux & de re-
ligieufes en général
Communautés séculières. On
comprend (ous ce nom deux fortes de commu-
nautés ; favoir les communautés laïques &
les communautés eccléjiafiiques féculieres ,
(jue l'on appelle ainfi. par oppofition aux
communautés régulières.
Communautés tacites , font des
fociétés qui lé forment fans contrat par écrit
dans certaines coutumes & entre certaines
perfonnes , par la demeure & vie commune
pendant un an & jour , avec intention de
vivre en communauté.
Ces fociétés ou communautés tacites avoient
C O M ^75)
j lieu autrefois dans tout le pays coutumier ;
mais lors de la rédadion des coutumes par
écrit l'ulage n'en a été retenu que dans un
petit nombre de coutumes , où il fè pratique
mêmediverfement. Ces coutumes font An-
goumois , Saintonge , Poitou , Berri , Bour-'
bonnois , Nivernois , Auxerre , Sens , Mon-
targis , Chartres , Chateau-neuf , Dreux ,
Chaum.ont , & Troyes.
Quelques-unes de ces coutumes n'admet-
tent de communauté tacite qu'entre frères
demeuransenfemble , comme celles de Bour-
bonnois.
D'autres les'admettent entre tous parens &
lignagers , comme Montargis , Chartres ,.
Dreux , Ùc.
La plupart les reçoivent entre toutes fortes
de perlonnes , parens ou autres.
A Troyes elles ont lieu entre nobles &
roturiers ; en Angoumois , Saintonge , &
Poitou , entre roturiers feulement ; & d^ns
ces dernières coutumes , les eccléfiaftiques,
roturiers qui demeurent avec des perfonnes
de même condition , deviennent communs
de même que les féculiers.
Ceux entre lefquels fè forment cçscommu-
nautés tacites , font appelles communs y
communiers , coperfonniers ou comparfon-
niers ^ & perfonniers y conforts y &c.
Lorfqu'un des communiers fe marie , f^i
femme n'entre point en chef dans la commu-
nauté générÛQ ; elle ne fait qu'une tête avec
fon mari.
Les mineurs n'entrent point dans ces com-
munautés tacites , à moins que leur père n'eût
été de la communauté ; auquel cas , s'il n'y
a tpoint eu d'inventaire , les enfans mineurs
ont la facuké de demander la continuation
de la communauté.
Les conditions requifes par les coutumes
pour que la communauté ait lieu , font :
i*^. Que les parens ou autres afîbciés foienc
majeurs.
2°. Qu'ils foientufans de leurs droits : ainfî
un fils de famille ne peut être en communauté
avec fon père , en la puifîance duquel il eft ,
fi ce n'eft, qu'il mette fon pécule caflrenfe y
ou quqfi-cafirenfe , en communauté.
3^^. Les afTociés doivent avoir une même
demeure , & vivre en commun ; ce que les
coutumes appellent vivre à commun pot y
ffl 0 dépenfe. Quelques coutumes veulent
6^0
C O M
qu'outre la vie commune , il y ait auffi mé-
lange de biens , & communication de
gains & de pertes.
4°. Il faut avoir vécu enfemble de cette
manière pendant an & jour.
Enfin pour que la communauté tacite ait
lieu , il faut que ceux qui demeurent enfemble
n'aient point tait d'acte qui annonce une in-
tention de leur part d'exclure la co/;7;7îw/2ai^/'^';
qu'au contraire il paroifTe que leur intention
eft d'être en fociété , & qu€ les a<5tes qu'ils
paflent , foitnt faits au nom commun.
Quant aux biens qui entrent dans ces
communautés tacites , ce lont tous les
meubles préfens & à venir , & les conquêts
immeubles ; les propres n'y font pas compris,
à moins qu'il n'y eût quelqu'ade qui marquât
une intention des coperfonniers de mettre en
communauté tous leurs biens.
On établit ordinairement un maître ou
chef de la communauté tacite , lequel a le
pouvoir d'en régir les biens , & d'engager la
communauté : mais fi elle efl: de tous biens ,
on reilreint fon pouvoir à la libre difpofition
des meubles & conquêts immeubles ; il ne
peut même en aucun cas aliéner les immeu-
bles à titre gratuit.
Le fiîdeur ou agent de la communauté &. le
même droit que celui qui en eft le chef , pour
l'adminiflration & la difpofition des biens ;
il oblige pareillement les affociés.
S'il ni a n'y chef ni fadeur établi, cha-
cun âss perfonniers peut agir pour la com-
munauté.
La mort naturelle d'un aflbclé fait finir la
communauté , même à l'égard des autres
aiTociés , à moins qu'il n'y eût convention %u
contraire. ^
Elle finit auffi par la condarmation d'un
des afîbclés à une peine qui emporte mort
civile.
Elle fe difTout encore par l'inexécution de
la condition fous laquelle elle s'étoit formée.
Un des afl'ociés peut renoncer h la commu-
nauté , pourvu que ce ne foit pas en fraude
de ces aflbciés ; & dans le cas où la renon-
ciation eft valable , elle opère la difTolution
de la communauté^ tant à fon égard que pour
les autres affociés.
La difcuffion générale des biens d'un aflb-
cié opère auffi le même efFet.
Celui qui gère les biens & affaires de la
Ç O M
communauté peut être contraint d'en rendre
compte chaque année.
En cas de diffolution delà communauté y
chaque aflbcié peut demander partage des
biens qui font de nature à pouvoir être par-
tagés. Voje:^ le traité des communautés oufo-
ciétés tacites <^e Lebrun ;Boucheul , fur Van.
Z'^î delà coutume de Poitou ; Ù ci-dei'ant
ûi/a-/72ofjCoMMUNAUx , Communauté
DHABITANS,&i:/-apr^jCOMMUNES.(^),
Communauté , ( Commerce. ) On en-
tend par ce mot la réunion des particuliers qui
exercent un même art ou un même métier ,
fous certaines règles communes qui en for-
ment un corps politique.
Les Romains font le feul peuple qui nous
fournifTe dans l'antiquité l'exemple de ces
fortes de corporations : l'origine en étoit due
à la fage poh tique de Numa. Il les imagina ,
ditPlutarque , pour multiplier les intérêts
particuliers dans une fociété compofée de
deux nations , & pour détourner les efprits
d'une partialité qui féparoit trop entr'eux les
defcendans des Romains & des Sabins , de-
venus citoyens de la ville. Ces communautés
étoient connues à Piome fous le nom de col-
lèges. Ce mot s'eil long-temps confervé dans
les villes anféatiques , pour lignifier l'o//^/;?-
blée des marchands , & enfin le lieu où
ils s* ajjemblent pour négocier entr'eux.
Il eflaflez difficile de décider quelle a été
l'origine du renouvellement des communautés
dans les empires fondés par les Barbares fur
les ruines de celui des Romains : il efi vrai-
femblable que la tradition confcrva le fou-
venir de cet ufage des Romains , & que les
feigneurs particuliers le firent revivre dans
leurs diflrièls par un motif différent. D'a-
bord ce fut fans doute pour honorer les arts ,
& les encourager par àes privilèges ou des
diffindions. On en voit m.cme encore quel-
ques traces dans l'efprit aftuel de ces diverfes
communautés , qui fe difputent fans cefîc
de prééminence, d'ancienneté, & qui cher-
chent à s'ifoler ; à moins que ce ne foit l'idée
générale de tout ce qui forme une fociété par-
ticulière.
Ces corps politiques n'entrèrent pas tou-
jours dans les vues des légiflateurs , & dans
les temps de troubles ils facilitèrent quel-
quefois la rébellion. On les a vu ii Gand
s'armer contre leurs maîtres en 1301. Jacques
d'Artevel j
C O M
d'Ârtevel , et)J^^6, de brafTeur de bière ,
devint le chef des Flamands par fon crédit
parmi les communautés ; en 1404, les ouvriers
de Louvain égorgèrent leurs magifirats.
Chez des peuples plus fidèles , les fouve-
rams en ont retiré d'aflez grands fecours.
En Angleterre cqs privilèges forment une
partie de la liberté politique. Ces corporations
s'y appellent mijîery , nom qui convient aflez
à leur efprit. Par-tout il s'y eft introduit des
abus. En effet ces communautés ont des loix
particulières, qui font prefque toutes oppo-
{éts au bien général & aux vues du légifla-
teur. La première & la plus dangereufe , efl
celle qui oppofe des barrières a l'induftrie ,
en multipliant les frais & les formalités des
réceptions. Dans quek^ues communautés
même où le nombre des membres eft limité,
& dans celles où la faculté d'en être mem-
bre eft reftreinte aux fils des maîtres , on ne
voit qu'un monopole contraire aux loix de
la raifon & de l'état , une occafion prochaine
de manquer à celles de la confcience & de
la religion.
Le premier principe du commerce efl la
concurrence ; c'eil par elle feule que les arts
fe pertedionnent , que les denrées abondent ,
que l'étift fe procure un grand fuperflu à ex-
porter , qu'il obtient la préférence parle bon
marché, enfin qu'il remplit fon objet im-
médiat d'occuper & de nourrir le plus grand
nombre d'hommes qu'il lui eft poflible.
Il n'eft aucune exception à cette règle,
pas même dans les communautés où ilfe pré-
fènte de grandes entreprilès. Dans ces cir-
conllances , les petites fortunes fe réunilTent
pour former un capital confidérable , les in-
térêts de la fociéxé en font plus mêlés : le cré-
dit de CCS fortunes divifées eft plus grand que
s'il étoic réuni fur deux ou trois têtes ; & dans
le cas même où elles ne fe rcuniroient pas ,
àhs qu'il y a beaucoup d'argent dans une
nation , il eft conftant qu'aucune entreprife
lucrative ne manquera d'adionnaires.
Les profits àcs particuhers diminueront ,
mais la maTe générale du gain fera augmen-
tée ; c'eft le but de l'état.
On ne peut citer dans ces matières une
autorité plus refpedable que celle du célèbre
Jean de Wit : voici ce qu'il dit au ch. x de
la première partie de fes mémoires.
<* Le gain afîuré des corps de métiers ou 1
Tome VIIL
C O M C%\
de marchands y les rend indoîens & paref-
feux , pendant qu'ils excluent des gens fort
habiles , à qui la néceffité donneront de Tin-
duftrie : car il eft conftant que la Hollande
qui eft fi chargée , et peur conferver l'avan-
tage de tenir les autres peuples hors du com-
merce , que par le travail , l'induftrie , la
hardiefïè , le bon ménage , & la fobriété des
habitaris Il eft certain que les Hollan-
dois n'ont jamais perdu aucun commerce en
Europe par le trop grand tranfport de mar-
chandifes , tant que le trafic a été fibre à
chacun. »
Ce qu'a dit ce grand homme pour le com-
merce àts manufactures de fa patrie , peut
être appliqué à tous \ts pays. L'expérience
feule peut ajouter à l'évidence de fon prin-
cipe : comme de voir àts communautés dont
les apprentis ne peuvent être mariés ; règle-
ment deftruftif de la population d'un état :
des métiers où il faut paiîêr ièpt années de fa
vie en apprentiffage ; ftatut qui décourage
l'induftrie, qui diminue le nombre èits ar-
tiftes , ou qui les fait pafter chez des peuples
qui ne leur refufent pas un droit que mérite
leur habileté.
Si les communautés Ats marchands ou àizs
artiftes veulent fe diftinguer , ce doit être en
concourant de tout leur pouvoir au bien
général de la grande fociété : elles deman-
deront la fupprelîion de ceux de leurs ftatuts
qui ferment la porte à l'induftrie : elles di-
minueront leurs frais , leurs dettes , leurs
revenus ; revenus prefque toujours confom-
més en mauvais procès , en repas entre les
jurés, ou en autres dépenfès inuriles ; elles
conferveront ceux qu'emploient les occafions
néceflltées , ou quelque chofe de plus , pour
récompenfer d'une main équit;ible , foit les
découvertes utiles relatives à leur art , foit les
ouvriers qui fe feront le plus diftingués cha-
que année pi<r leurs ouvrages.
L'abus n'eft pas qu'il y ait des comrnunaU"
tés y puifqu'il faut une police; mais qu'elles
foienr indifférentes fur le progrès àts arts
mêmes dont elles s'occupent ; que l'intérêt
pardculier y abforbe l'intérêt public , c'eff un
inconvénient très-honteux pour elles. Sur le
détail des communautés , confultez le diclion.
du Comm.. Ù les différens articles de celui-ci,
(Tkr.V.D.F.)
COMMUNAUX , ( Jurifprud. ) poje:^
Pvr rr
^6îi C O M
ci'd^j^. Communal , & d-aprês Comum-
NES.
COMMUNE ou COxMMUNES, ( Ju-
TÏ/prud. ) fignifie quelquefois le menu peuple
d'une ville ou bourg. C'eûauffi une efpece
de fociéré que les habitan?T)ubourgeois d'un
même lieu contraclent entr'eux par la pcr-
miffion de leur fei^neur , au moyen de la-
ijuelle ils forment tous enferable un corps ,
ont droit de s'aiTembler & de délibérer de
leurs affaires communes , de fe choifu" des
officiers pour les gouverner , percevoir les
revenus communs , d'avoir un iceau & un
coffre commun , &c.
L'origine des concédions de communes eft
-^fort ancienne : on tient que les Gaulois joulf-
foient de ce droit fous les Romains ; &: il y
a quelques privilèges femblables accordés
par les rois de la féconde race.
Louis-Ie-Gros pafîe néanmoins commu-
nément pour le premier qui les ait établies. La
plupart de (es lujets , même de ceux qui
habitoient les villes , étoient encore ferfs : ils
ne formoient point de corps entre eux , &
ne pouvoient par conféquent s'aflemblcr :
c'ell pourquoi ils fe rachetèrent , moyennant
une lomme conlidérable qu'ils payoient au
roi ou autre feigneur pour toute redevance.
La première charte de commune qui foit
connue , eft celle que Louis-le-Gros accorda
à la ville de Laon en 1 1 12 ; elle excita une
{édition contre l'évêque. La commune d'A-
miens lut établie en 1114. Louis-le- Jeune
& Philippe Augufte multiplièrent l'étaMlflè-
nient de ces communes , dont l'objet étoit de
mettre les fujets à couvert de l'oppreffion &
des violences des feigneurs particuliers , de
donner aux villes des citoyens & des juges ,
& aux rois des affranchis en état de porter
les armes.
Ceux qui compofoient la commune fe nom-
jnoient proprement bourgeois , & élifoientde
leur corps des officiers pour les gouverner ,
lôus les noms de maire Jures ,échepins , & c.
c'eft l'origine des corps de ville. Ces officiers
rendoient la juftice entre les bourgeois.
La commune tenon fur pié une milice ré-
glée où tous les habitans étoient enrôlés , &
impofoit, lorfqu'il étoit nécefTaire , des tail-
les extraordinaires.
Le roi n'établifToit des communes que
dans Çqs domaines , & non dans les villes des
C OM
hauts feigneurs , excep'té à Soinbns , dont le-
comte n'étoit pas alTez puilTant pour l'empê-
cher.
Il n'y en avoit cependant pas dans toutes
les villes : c'eft ce que dit Philippe VI , dans
des lettres du mois de mars I33^' Ces villes
qui n'avoient point de communes étoient
gouvernées par les officiers du roi.
Les villes de communes étoient toutes répu-
tées en la feigneurie du roi : elles ne pou-
voient fans la permiffion prêter àperfonne,
ni faire aucun préfent , excepté de vin , en
pots ou en barils. La commune ne pouvoit
députer en cour que le maire , le greffier , &
deux autres perfonnes ; & ces députés ne dé-
voient pas faire plus de dépenfe que û c'eût
été pour eux. Les deniers de la commune dé-
voient être mis dans un coffre. La commune
pouvoit lever annuellement une taille fur elle-
même pour fes bcfoins. C'eft ce que l'on
trouve dans deux réglemcns faits par S. Louis
en 1256.
Quelques villes du premier ordre , telles
que Paris , étoient tenues pour libres , &
avoient leurs officiers, fans avoir jamais ob-
tenu de charte ou conceffion de commune.
Les feigneurs, & fur-tout les eccléliafti-
ques , conçurent bientôt de l'ombsage de
l'établifièment des communes, parce que leurs
terres devenoient défertes par le grand nom-
bre de leurs fujets qui fe réfugioient dans les
lieux de franchife : mais les efforts qu'ils fi-
rent pour ôter aux villes & bourgs ie droit
de commune , hâtèrent ladeftrudion de leur
tyrannie ; car dès que les villes prenoien^ les
armes , le roi venoità leur fecours ; & Louis
VIII déclara qu'il regardoit comme à lui
appartenantes toutes les villes danslelquelles
il y avoit des communes.
La plupart des feigneurs , à l'imitation de
nos rois , affranchirent auffi leurs fujets , &
les hauts feigneurs établirent des communes
dans les lieux de leur dépendance. Le comte
de Champagne en accorda une en 1179
pour la ville de Meaux.
Il ne faut cependant pas confondre les fîm-
ples afiranchllfemens avec les conceflions de
commune : la Rochelle étoit libre dès 1 199 ,
avant l'établiflèraent de la commune.
Les concédions de communes taites parle
roi , & celles faites par les feigneurs, lorfqu'el*
les ont été confirmées par le roi , font perpé-
C O M
celles & irrévocables , à moins que les com-
munautés n'aient mérité d'en être privées
par quelque mauvaife adion ; comme il ar-
riva aux habitans de la ville de Laon fous
Louis VI , pour avoir tué leur évêquc , & aux
Rochelois fous Louis XIII , à caule de leur
rébellion.
La plupart des privilèges qui avoient été
accordés aux communes , tels que la jullice ,
le droit d'entretenir une milice fur pié , de
faire de^ levées extraordinaires , leur ont été
6tés peu à peu par nos rois. L'ordonnance de
Moulins , an. j i , leur ôta la julHce civile ,
leur laifTant encore l'exercice de la juflice
criminelle & de la police. Mais cela a en-
core depuis été beaucoup reilreint, & dans
la plupart àt^ villes les officiers municipaux
n'ont plus aucune jurildidion ; quelques-uns
onr lèulement une portion de la police.
Sur l'établifTement des commurtes , voyei^^
Chopin , de dom. lih. III , tit. xx ^n. ^ ,&
feq. La Thaumaflîere ,/i/r/fi coutumes loca-
les de Berri , ch. xix ; Ducange y glojf. lat.
verb. communanda ; Hauteferre , de ducibus^
cap. /V, in fine; Defid. Heraldus , qucefi. que-
tid. p. S 3 6" 5>4 , /f^ auteurs de la préface
de la bibliothèque des coutumes^ le recueil des
ordonnances de la troijieme rdce ; hifi. eccle'f.
de Fleury, tome XIV, in-iz , liv. LXVI ,
p. t ^J (i i ^8 ; le preJidentBouKier , en/es
obferi>. fur la coutume de Bourgogne , ch. Ij,
p. ^ z , & le préfident Hénault , à la fin
defon abrégé de Vhifioire de France. {A)
Commune , ( Jurifprud. ) en tant que ce
terme s'applique à quelque pâturage , lignifie
tout pâturage appartenant à une communauté
d'iiabitans , foit que ce pâturage foit un bas
pré , ou que ce foit quelque autre lieu de
pafcage , tel que les landes & bruyères ; foit
en plaine ou fur les montagnes & coteaux.
En quelques endroits on les nomme ufelles ,
quaji ufalia ; en d'autres ujines : ce qui vient
toujours du mot ufage.
• La propriété des communes appartient à
toute la communauté enfemble , de manière
<|ue chaque habitant en particulier ne peut dif-
pofer feuldu droit qu'il a dans la propriété : la
Communauté même nepeut en général aliéner
fes communes ; & s'il fe trouve des cas où elle
cfl autorifée en juftice à le faire , ce n'eft qu'a-
vec toutes les formalités étabhes pour l'a-lié-
ûation des biens des gens de main-morte.
C O M
^^5
On rient aufîî pour maxime , que les coz/z-
munes ne peuvent être faifies réellement ,
ni vendues par décret , même pour dettes de
la communauté; que l'on peut feulement
impofer la dette commune (ùr les habitans ,
pour être par eux acquittée aux portions &
dettes convenables. Voye\ci- devant COM-
MUNAUTÉ d'Habitans.
Quant â l'ufage des communes , il appar-
tient à chaque habitant , tellement que cha-
curi peut y faire paître tel nombre de beftiaux
qu'il veut , niême un troupeau étranger ,
pourvu qu'il foit hébergé dans le lieu dont
dépend la com.mune , en quoi il y a une dif-
férence eflenticlle entre les communes & les
terres des particuliers fujettes à la vaine pâ-
ture : car dans ces dernières auxquelles on
n'a droit de pafcage que par une fociété
tacite , l'ufàge de ce droit doit être propor-
tionné aux terres que chacun pofîede dans
le lieu ; enforte que ceux qui n'y ont point
de terres , ne peuvent faire pâturer leurs bet
tiaux fur celles des autres ; & ceux qui ont
des terres , ne peuvent envoyer des beltiaux
dans les vaines pâtures , qu'à proportion de
la quantité de terres qu'ils polTedent dans
la paroifîe : ils ne peuvent avoir qu'aune bête
à laine par arpent de terre en labour ; & à
l'égard des autres Sefiiaux, ils ne peuvent
y envoyer que ceux qui font nécefîàires pour
leur ufage , & qu'ils font en état de nourrir
pendant l'hiver du produit de leur récolte :
au lieu que dans les communes , chaque ha-
bitant a la liberté d'envoyer tant de befliaux
que bon lui femble , pourvu néanmoins que
le pâturage y puiffe fuffire ; autrement cha-^
cun ne pourroit en ufcr qu'à proportion de ce
qu'il lùpporte de charges dans la paroiiTe.
Le féigneur du lieu participe à l'ufage des
communes , comme premier habitant ; il peut
même demander qu'il lui en foit fait un tria-
ge , c'efl-à-dire qu'on en diftingue un tiers
qui ne foit que pour fon ufage : mais pour
favoir en quel cas il peut demander ce tria-
ge , il faitt dilHnguer :
. Si la commune a été cédée aux habitans A
la charge de la tenir du féigneur , moyen-
nant un cens ou autre redevance , foit en
argent, grain, corvées, ou autrement; en
ce cas la conceffion eft préfumée faite à titre
onéreux, quand même le titre primitif n'en
feroit pas rapporté par les habitans ; & comme
Rrrr 2
6^4 C O M
il y a eu aliénation de la propriété utile de h
part du feigneur au profit des habitans , le fei-
gneur ne peut pas rentrer dans cette propriété
entout ni en partie; & par une fuite du même
principe , il ne peut demander partage ou
triage pour jouir de Ton tiers féparément.
Mais fi la conceffion deh commune a été
fliite gratuitement par le feigneur ou par fes
auteurs , qu'ils n'aient donné aux habitans
que l'ufage de la commune , & non la pro-
priété ; en ce cas le feigneur eft toujours ré-
puté propriétaire de la commune ; il peut en
tout temps demander un partage ou triage
pour avoir fon tiers à part & divis , pourvu
que les deux autres tiers fuffifent pour l'ufage
des habitans , finon le partage n'auroit pas
lieu , ou du moins on le régleroit autrement.
Ce partage ou triage neil admis que pour
les communes de grande étendue, parce qu'on
.ne préfume pas qu'il foit préjudiciable : mais
pour les petites communes , par exemple au-
deflous de cinquante arpens , on ne reçoit
pas le feigneur à en demander le triage.
Quand il y a plulieurs feigneurs , il faut
qu'ils demandent tous conjointement à faire
le triage.
Les feigneurs qui ont leur tiers à part , nî
peuvent plus ni eux , ni leurs fermiers , ufer
du furplus des communes.
^ Lorfqu'une même commune fèrt pour plu-
lieurs paroifles , villages , hameaux , les ha-
bitans de ces difFérens lieux peuvent aufli
demander qu'il foit fait un triage ou parta-
ge, pourvu qu'il foit fait avec toutes les par-
ties inîéreiïees , préfentes ou duement appel-
lées au moyen du partage qui cft fait cntr'cux:
chaque paroifîe , chaque village ou hameau ,
& même quelquefois chaque canton de vil-
lage , a fon triage diflind & féparé ; auquel
cas , le terme de triage ne fignifie pas tou-
jours un tiers de la commune : car les parts
que l'on afïigne aux habitans de chaque lieu ,
font plus ou moins fortes , félon le nombre
des lieux & des habitans qui les compofènt.
L'ordonnance de 1669 , tit. xxij/ , art. 7 ,
porte que li dans les pâtures , marais , prés ,
& pâtis échus au triage des habitans , ou
tenus en commun fans partage , il fe trou-
voit quelques endroits inutiles & fuperflus
dont la communauté pût profiter fans in-
commoder le pâturage , ils pourront être
donnés à ferme , après un rcfultat d'afTena-
C O M
blée faite dans les formes , pouf une , deuir,"
ou trois années par adjudication des offi-
ciers des heux , fans frais ; & le prix employa
aux réparations des paroifTes dont les habi-
tans font tenus , ou autres urgentes affaire»
de la communauté.
Chaque habitant en particulier ne peut de-
mander qu'on lui affigne fà part de la co/tï-
mune ; ce feroit contrevenir diredement à
l'objet que l'on a eu lors de la conceilion
delà commune y & anéantir l'avantage que
la cornmunauté en doit retirer à perpétuité.
Mais chaque habitant peut céder ou louer
fondroitindivisdepâturagedanslaco/7z/ni//ie
à un étranger , pourvu que celui-ci en
ufe comme auroit fait fon cédant , & n'y
mette pas plus de befliaux qu'il en auroit mis.
V. lejourn. des aud. arrêt du z fept. lyo ^,
En 1^67 le roi fit remifè aux communau-
tés d'habitans du tiers ou triage , qu'il étoit
en droit de leur demander dans les commu^
nés relevantes de lui. La même chofe fut or-
donnée pour les droits de tiers ou triage , que
\qs feigneurs particuliers pouvoient s'être t'ait
faire depuis l'an 1630. Les triages plus an-
ciens furent confervés aux feigneurs , en rap-
portant leur titre. Voy, le Journal des aud.
aux arrêts des 2. 5 avril z G ^ z , & z/f.
mai z G £8 j DefpeifTes , tom. I , pag. z z^.;
Bzfmge p fur Tanicle Ixxxij delà coût, de
Normandie ; Ù le die}, des arrêts ^ au mot
communes & ufages.
Les amendes & confifcations qui s'adju-
gent pour les prés & pâtis communs contre
\ts particuliers , appartiennent au feigneur
haut-juflicicr , excepté en cas de réformation
où elles appartiennent au roi ; mais les refli-
tutions & dommages & intérêts appartien-
nent toujours à la paroifîe , & doivent être
mis es mains d'un fyndic ou d'un notable
habitant , nommé à cet effet à la pluraUté
des iufïrages , pour être employés aux répa-
rations & nécefîités pubHques. Ordonn. de
zGGq y tit. xxii> , art. zz & zz.
On comprend auflî quelquefois les bois
àts communautés fous le titre de communes ;
mais on les appelle plus ordinairement hois
communs , ou bois communaux. V^oye^ Por-
donn. de z GGg , tit. xxiv.
Commune , Çfurifpr.) femme commune
ou commune en biens , eft celle qui efl en
communauté de biens avec fon mari , ou
C O M
en continuation de communauté avec les en-
fans de ion mari décédé.
Femme non commune , ed celle qui a été
mariée dans un pays où la communauté n'a
pas lieu , ou qui a llipulé en le manant qu'il
n'y auroit point de communauté.
Il ne faut pas confondre la femme fépa-
rée de biens , avec la femme non commune.
Une femme peut être féparée de biens par
contrat de mariage , ou depuis ; & dans l'un
& l'autre cas , elle a l'adminilhation de fon
bien : au lieu que la femme qui efl ample-
ment non commune , ne peut devenir telle
que par le contrat exprès ou tacite du ma-
riage ; & elle n'a pas pour ce l'adminifira-
tion de (es biens , li ce n'ed de fes parapher-
naux. Voyei ci-devant COMMUNAUTÉ,
6" ci-après PaRAPHERNAUX. {A)
Commune renommée j/i/r/Tp^. voy.
Vreuye par commune renommée. {A)
Communes , ( Nijh mod. ) nom qu'on
donne en Angleterre à la féconde chambre
du parlement , ou à la chambre baffe , com-
pofée des députés des provinces ou comtés
des villes , & des bourgs. V. PARLEMENT ,
Chambre haute , Député.
Tout le peuple donnoit anciennement fa
voix aux éledions de ces députés. Mais ,
dans le xv^ liecle , le roi Henri VI pour évi-
ter le tumulte trop ordinaire dans les grandes
aflemblées tenues à ce fujet , ordonna le pre-
mier , que perfonne ne pourroit voter pour
la nomination des députés de la province ,
que les ycomans ou les pofîèfleurs de francsr
fiefs au moins de 40 fchelins de revenu an-
nuel , & qui habitoient dans la même pro-
vince ; que les perfonnes élues pour les pro-
vinces, (eroient de condition noble; & au
mo'ns écuyers ou gentilshommes , qualifiés
pour être chevaliers , anglois de naiflance ,
ou au moins naturalifés , de l'âge de vingt-un
ans & non au-deflbus , & que perfonne ne
pourroit prendre féance dans la chambre des
communes , s'il étoit juge ou prévôt d'un
comté , ou eccléfiafiique.
Pendant la féance du parlement , tous les
membres de la chambre baffe jouiiTent des
mêmes privilèges que ceux de la chambre
haute ; c'eft-à-dire qu'eux , & tous les fer-
viteurs & domefiiques , font exempts de
toutes pouriuites , arrêts , & emprifcnne-
mcns , à moins qu'ils ne foient accufés de
C O M (?8j
trahifon , de meurtre , ou de rupture de paix.
Tous les meubles néceffaires qu'ils tranfpor-
tent avec eux pendant la féance, font aufîi
exernpts de faifie. Ce privilège s'étendoit au-
trefois depuis le moment de leur départ de
chez eux, jufqu'à celui de leur retour : mais
par un ade du parlement , paffé de nos jours
fous le règne de Georges I , il fut ordonné
qu'aufiî-tôt que le parlement feroit diflbus
ou prorogé , les créanciers feroient en droit
de pourluivre tous les membres qui auroient
contradé des dettes.
Les membres de la chambre des corn"
munes n'ont ni robes de cérémonie comme
les pairs , ni rang & places marquées dans
leur chambre ; ils y fiegent tous confufément :^
il n'y a que l'orateur qui ait un fauteuil ou
une efpece de fiege à bras , fitué vers le haut
bout de la chambre ; fon clerc & fon affif^
tant font aflis à coté de Ini. Ces trois oificiers
font auffi les feuls qui aient des robes , aulll-
bien que les députés pour la ville de Londres ,
& quelquefois les profeflèurs en droit pen-
dant le temps de la plaidoirie.
Le premier jour que s'afTemble un nou-
veau parlement , avant qu'on entame aucune
affaire , tous les membres des communes
prêtent ferment entre les mains du grand-
maître de la maifon du roi , & dans la cour
des pupiles. Enfuite ils procèdent à l'éledion
d'un orateur ; & après cette éledion , &;
que l'orateur a été agréé par le roi , ils prêtent
ferment une féconde fois. V. ORATEUR.
Les principaux privilèges de la chambre
des communes font , que tou? les bils pour
lever de l'argent fur les fujets , fortent immé-
diatement de la chambre des communes ;
parce que c'efl fur eux que fc levé la plus
grande partie des impofitions : ils ne fouf-
trent pas même que les feigneurs fafTent au-
cun changement à ces fortes de bils. Les
communes Çom {^oprement les grandes en-
quêtes du royaume ; elles ont le privilège de
propofer des loix , de repréfenter les cala-
mités publiques , d'accufer les criminels
d'état , même les plus grands officiers du
royaume , & de les pourfuivre comme partie
publique à la chambre des feigneurs , qui efl
la fùprême chambre de jufiice de la nation ;
mais elles n'ont pas droit de juger , comme
elles l'ont elles-mêmes reconnu en i68QfQus
le roi Charles U.
€U COU
Autrefois on accordoit aux membres àQS
communes , des fomroes pour leurs dépenfes
pendant la leance du parlement ; radonabiles
expenfas : ce font les termes des lettres circu-
laires ; c'cfl-à-dire tels appointemens que le
roi, en coniidérant le prix des chofes , ju-
gera à propos d'impoler au peuple , que ces
députés repréfentent , &; aux dépens duquel
ceux-ci dévoient être défrayés. Ti^ns^ article
xvij du règlement d'Edouard II , ces appoin-
temens étoient alors de dix groats pour cha-
que député de la province, & de cinq pour
ceux des bourgs , fomme modique relative-
ment au taux préfent des monnoies , & au prix
Acs choies ; mais qui étoit alors fuffifante ,
& même conlidérable. Depuis ils montèrent
jurqu'à4 fchelins par jour pour ceux qui
étoient chevaliers, & 2- fchelins pour les
autres. Aujourd'hui \qs communes ne reçoi-
vent plus d'appointemens ; l'impôt ne laifîe
pas que de le lever : mais ces fonds font
employés à d'autres dépenfes. On a cru que
de bons citoyens étoient afTez indemnifés par
l'honneur qu'ils reçoivent de foutenir les inté-
rêts de la nation , fans vendre leurs fervices
pour une modique rétribution.
Les communes , ou plutôt le tiers ctat , en
Angleterre ^ fe dit par oppofition aux nobles
& aux pairs , c'efl-à-dire de toures fortes de
perfonnes au-delîbus du rang de baron ; car
dans ce royaume il n'y a de nobles , fuivant
la loi , que les barons ou les feigneurs mem-
bres de la chambre haute : tout le refîe,
comme les chevaliers , écuyers , &<:. ne font
pas nobles ; on les regarde feulement comme
étant d'une bonne famille. Ainii un gentil-
homme n'eft autre chofe qu'un homme ilTu
d'une famillehonnête , qui porte des armes ,
& qui a un certain revenu. Le tiers état com-
prend donc, les chevaliers , les écuyers , les
gentilshommes , les fils de la noblelîè qui
ne font pas titrés , & les vcomans. Voye\
ÉcuYER, Gentilhomme , YcoMAN
çu Yeman. [G]
COMMUNJBUS LOCIS , terme
latin aflèz fréquemment en ufagc chez les
phydciens , & fignifiant une efpcce de mi-
lieu , ou un rapport moyen qui rcfulte de la
Combinaifon de plufieurs rapports.
Ainli on ht dans quelques auteurs anglois ,
que l'Océan efl un quart de mille de pro-
â)ndeur , communibus locis , dans les lieux ,
C O M
moyens ou communs , en prenant un milieu
entre \ts profondeurs de dillérens endroits de
l'Océan. Le mille d'Angleterre eft le tiers
d'une heue commune de France ; de forte
qu'un quart de mille répond à environ un
douzierne de nos lieues , ou à peu près deux
cents toifes. Nous dout ons que la profondeur
moyenne de l'Océan ne foit pas plus grande.
(O)
COMMUNICANS , f. m. pi. ( Hifl.
eccUf. ) fede d'anabaptifles dans le feizieme
fiecle : ils furent ainfi nommes de la commu-
nauté de femmes & d'enfans qu'ils avoient
établie entre eux , à l'exemple des Nicolaïtes.
Prateole , 5 comm. Sanderus ^ /zer. 1^8,
Gautier, dans fa chron, xvj* fiecle. (G)
* COMMUNICATION , ( Gram. ) ce
terme a un grand nombre d'acceptions ,
qu'on trouvera ci-après. Il déligne quelque-
fois Vidée départage y ou de cejfion , comme
dans communication du mouvement ; celle
de contiguïté , de communauté ., & de conti-
nuité ^ comme dans communication de deux
canaux , portes de communication ; celle
à' exhibition par une perfonne d une autre ,
comme dans communication de pièces y &c.
Communication du mouvement,
eff l'adion par laquelle un corps qui en frappe
un autre , met en mouvement le corps qu'il
frappe.
L'expérience nous fait voir tous les jours ,
que les corps fe communiquent du mouve-
m.ent les uns aux autres. Les philofophes
ont enfin découvert les loix fuivant lelquelles
fe fait cette communication y après avoir
long-temps ignoré qu'il y en eût, & après
s'être long-temps trompé fur les véritables.
Ces loix confirmées par l'expérience & par
le raiibnnement , ne font plus révoquées en
doute de la plus faine partie àç.s phyficiens.
Mais la raifbn métaphyfique, & le principe
primitif de làcommunication dumouvement^
ïbntfujets à beaucoup de difficultés.
Le P. Mallebranche prétend que la commu-
nication du moui'ement ridï point nécefllùrc-'
ment dépendante de principes phyfiques , ou
d'aucune propriété des corps , mais qu'elle
procède de la volonté & de l'adion immé-
diate de Dieu. Selon lui , il n'y a pas plus de
connexion entre le mouvement ou le repos
d'un corps , & le mouvement ou le repos
d'un autre , qu'il n'y en a entre la forme , la
C OM
couleur , la grandeur , Ùc, d'un corps & celle
d'un autre ; & ce phiiorophe conclut de-là ,
que le mouvement du corps choquant n'ell:
point la caufe phyfique du mouvement du
corps choqué.
Il n'y a point de doute que la volonté du
Créateur nefoit la caufe primitive & immé-
diate de la communication du mouvement ,
comme de tous les autres effets de la nature.
Mais s'il nous efl: permis d'entrer dans les
vues de l'Être fuprême^ nous devons croire
que les loix de la communication du mouve-
ment qu'il a établies , font celles qui conve-
noient le mieux à la fagefle & à la fimplicité
defes defleins. Ce principe du P. Mallebran-
che , qu'// n^y a pas plus de connexion entre
le mouvement d'un corps & celui d'un autre,
qu'entre la figure & la couleur de ces corps ,
ne paroît pas exadement vrai : car il eft certain
que la figure & la couleur d'un corpsn'infîuent
point fur celles d'un autre; au lieu que quand
un corps A en choque un au tre B , il fautné-
celîîiirement qu'il arrive quelque changement
• dans l'état aduel de l'un de ces corps , ou
dans l'état de tous les deux ; car le corps B
étant impénétrable, le corps ^ ne peut con-
tinuer fon chemin fuivant la direction qu'il
avoit , à moins que le corps B ne foit dé-
placé ; ou fi le corps 54 perd tout fon mou-
vement , en ce cas ce corps A change par la
rencontre du corps B fon état de mouvement
en celui de repos. C'efl: pourquoi il faut né-
cefl'airement que l'état du corps B change ,
ou que l'état du corps A change.
De-là on peut tirer une autre conféquence;
c'ell: que l'impénétrabilité des corps , qui efl
une^de leurs propriétés efTentielles , deman-
dant nécelTairement que le choc de deux
corps produife du changement dans leur état,
il a été nécefTaire au Créateur d'établir <ies
loix générales pour ces changemens : or quel-
ques-unes de ces loix ont dû nécefïairement
être déterminées par la feule impénétrabihté,
& en général par la feule effence des corps ;
par exemple , deux corps égaux & femblables
lans refîbrt , venant fe frapper dircdement
avec des vîtefTes égales , c'efl une fuite né-
cefTaire de leur impénétrabihté qu'ils refient
en repos. Il en efl de même , fi les malTes de
ces corps font en rai'bn inverfe de leurs vî-
tefTes. Or fi d'après ce principe , on peut dé-
terminer généralement les loix de la commu-
C O M ^87
nication du mouvement^ ne fera-t-il pas bien
vraifemblable que ces loix font celles que le
Créateur a dû établir par préférence , puifque
ces loix feroient fondées fur des principes
aufîl fimples qu'on pourroit le defircr , &
liées en quelque manière à une propriété des
corps auifi efTentlelle que l'impénétrahiliré ?
On peut voir ce raifonnement plus dévdoppé
dans V article PERCUSSION.
Loix de communication du mouvement.
Dans la fuite de cet article nous appellerons
mouvement d'un corps ou degré de mouve~
ment , un nombre qui exprime le produit de
la mafTe de ce corps par fà vîtefTe ; & en effet
il efl évident que le mouvement d'un corps
efl d'autant plus grand que fa maffe efl plus
grande , & que là vîtefi'e efl plus grande ;
puifque plus fa mafTe & fa vîtefïê font gran-
des , plus il a de parties qui fe meuvent , &
plus chacune de ces parties a de vîtefïê.
Si un corps qui fe meut frappe un autre
corps déjà en mouvement , & qui fe meuve
dans la même diredion , le premier augmen-
tera la vîtefîè du fécond , mais perdra moins
de {a. vîtefTe propre , que fi ce dernier avoit
été abfolument en repos.
Par exemple , fi un corps en mouvement
triple d'un autre corps en repos , le frappe
avec 32,dde mouvement, il lui communi-
quera 8^ de fon mouvement, & n'en gar-
dera que 24 • ^1 l'autre corps avoit eu déjà
4^ de mouvement , le premierne lui en auroit
communiqué que 5 > & en auroit gardé 27,
puifque ces 5** auroient été luHifans par rap-
port à l'inégalité de ces corps , pour \çs faire
continuer à fe mouvoir avec la même vîtefîè.
En effet dans le premier cas , les mouvemens
après le choc étant 8 & 24 , & les mafîes i
& 3 , les vîtefîés feront 8 & 8 , c'efl-a-dire
égales ;& dans le fécond cas, on trouvera
de même que les vîtefTes feront 9 & 9.
On peut déterminer de la même manière
les autres loix de la communication du mou-
vement y pour les corps parfaitement durs
& deffitués de toute élaflicité. Mais tous \ts
corps durs que nous connoilTons étant en
même temps élafliques , cette propriété rend
XtsXdxs. àt\â.communication du mouvement
fort différentes , & beaucoup plus compli-
quées. F. ÉLASTICITÉ & Percussion.
Tout corps qui en rencontre un autre,
perdnécefTairement une partie plus ou moing.
<?88
C O M
grande du mouvemcnr qu'il a su moment
de la rencontre. Ainfi, un corps qui a déjà
perdu une partie de Ton mouvement par la
rencontre d'un autre corps , en perdra encore
davantage par la rencontre d'un lecond ,
d'un rroiiieme. C'elt pour cette raifon qu'un
corpsg^ui le meut dans un fluide , perd con-
tinuellement de fa vîtefle , parce qu'il ren-
contre continuellement des corpufcules aux-
quels il en communique une partie.
D'où il s'enfuit , i°. que lî deux corps ho-
mogènes de différentes mafles, fe meuvent en
ligne droite dans un fluide avec la même
vîtefle , le plus grand conferveraplus long-
temps fon mouvement que le plus petit : car
lesvîtefl'es étant égales par la fuppofition, les
mouvemens de ces corps font comme leurs
mafles , & chacun communique de fon mou-
vement aux corps qui l'environnent, & qui
touchent fa furface en raifon de la grandeur
de ctttQ même furface. Or quoique le plus
grand corps ait plus de furface abfolument
que le plus p:tit , il en a moins à propor-
tion , comme nousl'allons prouver ; donc il
perdra à chaque inftant moins de fon mou-
vement que le plus petit.
Suppofons, par exemple , que le côté d'un
cube A foit de deux pies , & celui d'un cube
-S d'un pié ; les furfaces feront comme 4- à i;
& les mafl!es comme 8 à i ; c'eiî pourquoi fi
ces corps fe meuvent avec la même vîtefle ,
le cube A aura huit fois plus de mouvement
que le cube B : donc , afin que chacun par-
vienne au repos en môme temps , le cube yi
doit perdre à chaque moment huit fois plus
de fon mouvement que le cube B : mais
cela efl impoflible ; car leurs furfaces étant
l'une à l'autre comme 4 a i , le corps A ne
doit perdre que quatre fois plus de mouve-
ment que le corps B , en fuppofant ( ce qui
n'efl pas fort éloigné du vrai) que la quan-
tité de mouvement perdue efl proportion-
nelle à la furface : c'efl pourquoi quand le
cube B deviendra parfaitement en repos, A
aura encore une grande'partie de fon mou-
vement.
2°. De-là nous voyons la raifon pourquoi
un corps fort long , comme un dard , lancé
félon fa longueur , demeure en mouvement
beaucoup plus long-temps , que quand il efl
lancé tranlverfalcment ; car quand il efl lancé
iîiivant fà longueur , il rencontre dans fa
COU.
dire<îl:ion un p!us petit nombre de corps aux-
quels il efl obligé de communiquer fon mou-
vement , que quand il efl lancé tranfverla-
icment. Dans le premier cas , il ne choque
que fort peu de corpufcules par fa pointe ;
& dans le fécond cas , il choque tous les
corpufcules qui font diipofés fuivantfa lon-
gueur.
3°. De-là il fuit qu'un corps qui fe meut
prelque entièrement fur lui-même , de lorte
qu'il communique peu de Ion mouvement
aux corps cnvironnans , doit confervcr fon
mouvement pendant un long temps. C'efl
pour cette raifon qu'une boule de laiton
polie , d'un demi-pié de diamètre, portée
fur un axe déUé & poU , & ayant reçu une
aflez petite impulfion, tournera fur elle-r
même pendant un temps confidérable. V^oy.
Résistance , ùc.
Au refle, quoique l'expérience & le rai-
fonnement nous aient inflruits fur les loix
de la communication du mouvement , nous
n'en fommes pas plus éclairés fur le prin-
cipe métaphylique de cette communication.
Nous ignorons par quelle vertu un corps
partage , pour ainfi dire , avec un autre
le mouvement qu'il a ; le mouvement n'é-
tant rien de réel en lui-même , mais une
Ample manière d'être du corps , dont la
communication efl aufll diflScile à compren-
dre que le feroit celle du repos d'un corps
à un autre corps. Plufieurs philofophes ont
imaginé les mots à^ force ^ de puijfance y
a*acîion , &c. qui ont embrouillé cette ma-
tière au lieu de l'éclaircir. Voye\ êes mots.
Tenons-nous en donc au (impie fait , &
avouons de bonne foi notre ignorance •fur
la caufe première. ( O ) '
C O M M U N I C AT ION d'i D I O M E S,
( Théol. ) terme confacré parmi les théolo-
giens en traitantlemyflere de l'Incarnation;
pour exprimer l'application d'un attribut
d'une des deux natures en Jtfus-Chrifl à
l'autre nature.
La communication d* idiomes efl fondée
fur l'union hypoflatique des deux natures en
Jefus-Chrifl. C'efl par communication d^i-
diomes qu'on dit que Dieuafoujfert ^ que
Dieu efl mort , &c. chofes qui à la rigueur ne
fe peuvent-dire que de la nature humaine , &
flgnifient que Dieu efl mort quant à fon hu-
manité , qu'iZ a foujfen en tant qu'homme ;
car >
C O M
car , difent les théologiens , les dériommâ-
tioiis qui fignificnt les natures ou les pro-
priétés de nature , font des dénominations
de fuppofita y c'eft-à-dirc , de perfonnes. Or
comme il n'y a en Jefus-Chrift qu une feule
perfbnne , qui eft celle du Verbe , c'eft à
cette perfonne qu'il faut attribuer les dé-
nominations des deux natures , & de leurs
propriétés. Mais on ne {àuroit par la commu-
nication d'idiomes attribuer à J. C. ce qui
feroit fuppofer qu'il ne feroit pas Dieu; car
ce feroit détruite l'union hypoftatique , qui
eft le fondement de la communication d'i-
diomes. Ainii Ton ne fauroit dire que Jefus-
Chrift foit un pur homme, qu'il loit fàiUi-
ble j ùc.
. Les Neftoriens rejetoient cette communi-
cation d'idiomes , ne pouvant fouffrir qu'on
dî.que Dieu aroitfoujff'ert y qu'il étoit mort:
autTi admettoient-ils dans Jefus-Chrift deux
perfonnes. Fbje:(_NESTORiENS. 0
Les Luthériens font tombés dans l'excès
oppofé , en pouflant la communication d'i-
diomes , &c en prétendant que Jefus-Chrift ,
non-feulement en tant qu'il eft une des trois
perfonnes divines , &: à raifon de fa divi-
nité , mais encore en tant qu'homme , ôc
à raiion de fon humanité , eft immortel ,
immenfe. Fbje:^^ Ubiquistes & Ufiicyji-
.TÉ.(G)
Communication, {Belles-lett.) figure
de rhétorique par laquelle l'orateur, fur de
la bonté de fa caufe ou affectant de l'être ,
s'en rapporte fur quelque point à la déci-
fion des juges , des auditeurs , même à
celle de fon adverfaire. Cicéron l'emploie
fouvent ainfi dans l'oraifon pour Ligarius :
Qu'en penfe^-vous , dit-il à Céfar , croye:(-
vous que je fois fort emharrajfé à défendre Li-
garius ? Vousfemble-t-il que je fois unique-
ment occupe de fa jujîificaîion ? Ce qu'il dit
"après avoir poufte vivement fon accufateur
Tuberon. Et dans celle pour Caius Rabî-
rius , il s'adrefle ainfi à Labienus fon ad
verfaire : Q^u euiJie';^vous fait dans une occajlor^
aujfi délicate , vous gui prîtes la fuite par lâ-
cheté, tandis que la fureur ù la méchanceté
de Saturnin vous appzlloient d'un coté au ca-
pitale y Ù que d'un autre les confuls implo-
COM 6%^
Ù dé ïa Hier té ? Quelle autorité aurie'^vcus
refpeâée ? Quelle voix aur ejj-vous écoutée ?
Quel parti aurieT^vous embr.a£e? Aux ordres
de qui vousferie[-v<msfoumis ? Cette ligure :
peut produire an très-grand effet , pourvu
qu'elle fbit placée à propos. ( G )
Communication de Pièces , {Jurif-
prud. ) eft l'exhibition , & même quelque-
fois la remife qui eft faite d'une pièce à la
partie intérellee pour l'examiner ; fous ce
terme de pièces on entend toutes fortes
d'écrits , foit publics ou privés , tels que des
billets & obligations , des contrats , juge-
mens , procédures , 6'c.
On ne doit pas confondre la fîgnifîcation
de l'adle de baillé copie d'une pièce avec la
communication ; on iîgnifie une pièce en noti-
fiant en fubftance , par un exploit , ce qu'elle
contient;avec cette lignification on donne or-
dinairement en même temps copie de la pie-
ce •) mais tout cela n'eft pas encore la ccmniunr-
cation de lapiece même . Celui qui en a copie a
fouvent intérêt d'en voir l'original pour exa-
miner s'il y a des ratures ou interlignes , des
renvois & apoftilles , fi l'écriture & lesfîgna-
tures font véritables ; c'eft pour ceîaque l'on
communique la pièce même. Cette commu-
nication fe fait ou de la main à la raain fam
autre formalité , ou fous le récépiile du pro-
cureur , ou par la voie du greffe , ou devant
le rapporteur ; le greffier remet quelquefois
la pièce fous le récépiffé du procureur , quel-,
quefois auffi la communication fe ^zit fans
déplacer ; enfin on donne quelqu efois en com-
niunication les facs entiers , & même tout un
procès ; on communique au (Il au parquet :
nous expliquerons féparément chacune de
ces différentes fortes de communications.
Un des principaux e^ets de la communia
cation y eft qu'elle rend les pièces communes
à toutes les parties , c'eft-à-dire que celui
contre qui on s'en eft férvi peut aufTi argu-
menter de ces pièces en ce qu'elles lui font
vorables \ Se cela a lieu , quand même
^elui qui a produit les pièces les retireroit de
fondoffierou de fon fac& produdion, 8c
quoiqu'il n'en auroit pas été donné copie.
Communication s ANS déplacer , eft
celle qui fe fait au greffe , ou en l'horel du
$We
raient votre fecour s pour la défenfede la patrie j rapporteur ou autre juge , en exhibant feu-
Tome VUl, . . ^^^^
6po cou
lement ks pièces pour les cxafnnî€F en pré-
iencedu )uge ou greffier, fans qu il foit per-
mis à la partie ni à Ton procureur d'empor-
ter ces pièces, pour les examiner ailleurs.
Communication aux Gens du Roi ,
ou au minifiere public , ou au parquet , eft k
remile que Fon fait aux gens du roi dans les
juftiees royales , ou aux avocats àc procu-
reurs fifcaux dans les juftiees feigneurialcs ,
des pièces fur lerquelles ils doivent donner
des conclulions, afan qu'ils puifleui aupara-
vant les examiner.
Cette ccmmurJcatkn fe fait cn plufieurs
manières & pour difftrens objets. .
L'on ccmmu nique au minifliere public ks
ordonnances , édiïs , déclarations , lettres pa-
tentes , pour l'ewrcgiftrerasnt defquels ils
doivent dominer des conclullons. Le roi en-
voie ordinairement ces nom-eaux réglemens
à (on procureur général dans les cours fou-
veraines ; pour les autres fieges royaux infé-
rieurs , &c autres reHortiflant nuémeut es
cours fouvecaines, c'eft le procureur général
qui envoie les réglemens au procureur du
roi de chaque li^ge.
Dans les affiiires civSes où le miniftere pu-
blic doit porter la parole , qui font celles où
le roi , Pcgîile ou le public a intérêt, les par-
tics font obligées de ccmmuniquer leurs pie-
ces au minifiere pnbbc, quand même la par-
tie n'auroit point d'autre contradi^eur :
cette communication fe fait par le mini frère
d'es avocats ; & lorlque le miwiftere public
cft partie , il communique auffi les pièces à
I avocat qui eft cliargé contre lui.
Cette communicaticn de pièces entre le
miniftere public & les avocats , fe fiit de la
main à la main (ans aucun récépiiîe , & c'eft
une fuite de la confiance réciproque que les
avocats ont mutuellement entr'eux ; en effet
ceux qui font chargés du miniftere public
ont toujours étéchoifîs parmi les avocats, &
confidérés comme membres de l''ordre
avocats.
On appelle auffi communication au minif-
iere publie , une brieve expoiâtion que les
avocats font verbalement de leurs moyens
à celui qui doit porter la parole pour le minif-
COM
înftpuk de l'affaire : cette communication vet-
bale des moyens n'eft point d'obligation de
la parc des avocats j en effet tes arKiennes
ordonnaïKcs portent bien que (i dans les
eau* es dont les avocats font chargés , ils
trouvent quelque chofè qui touche les inté-
rêts du roi ou du public , ^e hoc curiam avi^
fahunt; mais il n'y a aucune ordonnance qut
oblige les avocats d'aller au parquet commu-
niq-uer leurs moyens \ & loriqu il eft ordonné
par quelque jugement que les parties commu-
niqueront au parquet , on n'entend autre
chofe finon qu'elles donneront leurs pièces :
en un mot il n'y a aucune loi qui oblige les
avocats de faire ouverture de leurs moyens
ailleurs qu'à Paudience.
Il eft vrai qu'ordinairement les avocats ,
foit pir confidération perionneile pour ceux
qui exercent le miniftere public , foit pour
Tiiitérêc même de leurs parties , commuai-
qu^ leurs moyens en remettant leurs pièces :
mais eîicore une fois ccZtQ communication des
moyens eft volontaire j & lorlque les avocats
le contentent de remettre Leurs pièces , on ne
'. peut rien exiger de plus.
L'ufa ge des communicatiens , (bit de pièces
ou de moyens, au miniftere public, cil Isns
doute foiT ancien ; cn en trouve des exem-
ples dans les rcgiftres du châtelet des l'an
1 5 1 3 , où il eft dit que les ftatu-ts des Megif-
liers furent faits après avoir oui les avocats èc
procureur du |oi qui en avoient eu commu^
iiication.
Autrefois les communications descaufes le
failoient avec moins d^appareil qu'aujour-
d'hui. Dans les premiers temps où le parle-
ment de Paris fut rendu fédentaire à Paris ,
les avocats du roi qui n'étoient point encore
en titse d'office , n'avoient point encore
de parquet ou lieu particulier defiiné à rece-
voir ces communications : ils plridoient eux-
mêmesfouvent pour les parties dans les cau-
fes où le miniftere public n'éroit pas inté-
refle , au moyen de quoi les communications
'e pièces 5^: de moyens fe fiifbienr debout S<.
en (è promenant dans lagrand'falle en atten-
dant l'heure de l'audience.
Mais depuis que les ordonnances ont at-
tribué aux avocats du roi la connoi fiance de
certiines affaires que les avocats vont plai-fer
Kie pubiic j afin que celui-ci foit pleinement 1 devant, eux , & que Pon c établis, pour ks.
C O M
gens du roi , ditis chatjue (itgt, Un parquet
ou lieu dans lequel ils s'âflettibieht pour va-
<|uet- à leurs affaires , on à aulli conftruit
dans chaque parquet Uli (iege où les gens du
roi fe placent avec un bureau devant eux ,
fbit pour entendre les caufes dont ils ibnt
juges , foit pour recevoir les communications :
il fèmble néanmoins que ce fiege ait été éta-
bli pour juger plutôt que pour recevoir les
communications , Cette dernière fonébion
n'étant point un afte de puiflànce publique^
Mais comme l'expédition des caufes & les
communications fe font fuivant qu'elles le
préfentent (ans diftinébion , les gens du roi
relient ordinairement à leur bureau pour les
unes comme pour les autres , ii ce n'eft en
hiver où ils fe tiennent debout à la cheminée
du parquet , & y entendent également les
caufes dont ils font juges & les communica-
tions.
Au parlement te dans les autres fiejcs
royaux où les gens du roi ont quelque forte
de jurifdiftion , les avocats leur communi-
quent debout ; mais ils ont droit de fe cou-
vrir , quoiqu'ils ne le fallent pas toujours :
ks procureurs qui y plaident ou commùni-
f[uent , doivent toujours parler découverts.
Dans les autres fieges inférieurs lorlque
ceux qui exercent le miniftere public s af-
fèient à leur bureau , les avocats qui com-
ftiuniquenr y prennent place à côte d'eux.
En temps de vacations c'eft un fubftitut
ou procureur général qui reçoit les commu-
nications au parquet; maisPufage elt que
l'on y obferve une parfaite égalité , c'eft-
à-dire , que , s'il s'afTied au bureau , l'avo-
CM qui communique doit être alîis à côté
de lui:
On observe aulTi une efpece de confra-
ternité dans les communications qui le font
^x avocats généraux &: avocats du roi ;
car en parlant aux avocats ils les appellent
OîeJJieurs , à la différence des procureurs ,
^ue les avocats y qualifient feulement de
maîtres , & que les gens du roi appellent
amplement par leur nom,
L'ordonnance de Moulins , article ^i ,
veut que les requêtes civiles ne foient plai-
éées qu'après avoir été comiftuftiquécs aux
C O M è^ t
avocats ^ pîocurears généraux, à peine de
nullité.
L'ordonnance de \56j , tit. xxxv , an. %J ,
ordonne la même choie.
L'article fuivant veut que lors de la com^
munication au parquet aux avocats & procu-
reur généraux , l'avocat qui communique
pour le demandeur en requête civile , re-
pré fente l'avis des avocats qui ont été con-
iukés fur la requête civile.
L'article xxxiv met au nombre des ou-
vertures de requêtes civiles, ii es chofes qui
concernent le roi , l'églife , le public ou la
police , ii n'y a point eu de communicatiomMU,
avocats ou procureur généraux.
Dans quelques tribunaux on communique
auffi les caufes où il y a des mineurs , ou
lorfqu'il s'agit de lettres de refciiion. Les
arrêts des J feptanbre 1 6So , 6* %G février
i6$i , rapportés au journal des audiences ,
rendus l'un pour le lîege royal de Dreux ,
l'autre pour la duché-pairie de la Rochfi-
fur-Yon , ont ordonné de communiquer aux
gens du roi les caufes où il s'agit d'aliéna-
tions de biens des mineurs : on les commu-
nique auiîî au châtelet de Paris , mais noo
pas au parlement ; ainfî cela dépend de Tu-
fage de chaque fiege , les ordonnances ne
. prefcrivant rien à ce fujet.
Au parlement, toutes les caufes qui fc
plaident aux grandes audiences des lundi ,
mardi & jeudi matin , font communiquées
fans diftindion j cd qui vient apparemment
de ce que ces caules étant ordinairement àt
celles qu'on appelle majeures , le public el^
toujours préfumé y avoir intérêt.
Dans les^nftancésou procès appointésdans
lefquelsle procureur général ou Ion fubftitut
doit donner des conclufions , on leur com-
munique tout le procès lorfqu'il efi: fur le
point d'être jugé , pour l'examiner & donner
leurs conclufions.
L^èdit du mois de janvier î ^8^ , portant
règlement pour l'adminiftration de la juftice
au châtelet , ordonne , ati^le xxiv , que le
plus ancien des avocats du roi refondra en
l'abience ou autre empêchement du procu-
reur du roi , toutes les cojiclufions prépa-
ratoires 5c définitives fur les informations Sc
Ssss 1
é^i C O M
procès criminels, de fur les procès civils qui
ont accoutumé d'être communiqués au pro-
cureur du roi , ùc. Il y a eu divers autres
réglemens à ce fujet pour les gens du roi de
difiérens iîeges royaux.
En matière criminelle on communique
aux gers du roi les chai-ges & informa-
tions, c'eil ce G u^'on appelle cpyr7r//er/e5 o'r^r-
gcs aux gens du roi. L'ordonnance de Louis
XII j du mois de mars 14,^8 , art, C)8 , or-
donne aux baillis , fcnéchiux & autres ju
ges avant de donner commiilion fur les in
formations , de les communiquer aux avo-
cats ik procureurs de fa majefté , ce qui a
été confirmé par pluiicurs ordonnances pof-
térieures.
C O M
lité , qu'il eft fans exemple qu'il y ait jamais
eu aucune plainte contre un avocat pour rai-
fon de ces fortes de communications. Dans
les caufes où le miniftere public eft partie ,•
l'avocat général ou l'avocat du roi qui doit,
porrer la parole , 6c les avocats des autres
parties, (é communiquent de même mu-
tueUement leurs pièces de la main àlamain ;
au lieu que le miniftere public ne comm.u-
nique aucune pièce aux procureursque (ous.
leur récépiflé ou par la voie du grefte , & les.
Communication au Greffe ou par
LA VOIE DU Greffe 5 eft l'exhibition qui fe
fait d'une pièce au greffe •■, ce qui arrive lorf-
qu'ui:>e partie demande à voir une pièce ori-
-ginale , & qu'on ne veut pas la lui commu-
niquer lous le récépiflé de (on procureur :
on met la pièce au greffe , dont le greffier
drefle un a été que l'on fignifie, afin que ce-
lui qui a demandé la pièce l'aille voir entre
les mains du greffier.
CoîvlMUNICATION DU JuCEMENT , cft la
connoilïànce que le greffier donne aux par-
ties de la teneur du jugement qui eft inter-
venu entre les parties. \J ordonnance de î 66q ,
titre des épices ù vacations , art. vj , veut que
Ton donne cette communication aux parties ,
quoique les épices n'aient pas été payées.
. avocats ne leur communiquent point leurs
pièces en aucune façon : lorfqu'un procureur
veut avoir communication des pièces qui font
entre les mains de l'avocat de fa partie ad-
verfe , l'avocat remet les pièces au procureur
de fa partie , & celui-ci les communique à
fon confrère fous fon récépiflé ou par la voie
du greft'e.
Communication au Parquet, rojc^^.
ci~dev. Communication aux Gens du
Roi.
Communication d^une Production 9
Instance ou Procès ; ce font les procureurs
qui prennent en communication les inftances
&c procès , & les productions nouvelles &'.
autres , pour les examiner & débattre , &.
fournir de leur part des réponfes , contre-
dits , falvations Vautres écritures néceflaires.
Suivant V ordonnance de îGGj , titre xiv ,
art. Q , la communication de pièces produites
par une partie , ne doit être donnée à l'autre
I qu'après que celle qui la demande a produit
de (a part ou renoncé de produire , par un
. „ ., ç. . , ade ifgné de fon procureur & lignifié.
MAIN , elt celle qui le fait en conhant des
pièces pour les examiiner , fans en exiger de
récépiflé ou reconnoiflance de celui auquel
on les remet ; comme cette confiance eft Vo-
lontaire , la juftice n'ordonne point que les
psrtics ni leurs procureurs fe communiquè-
rent de la main à la main , mais par la voie
du greffe ou fous le récépiffé du procureur.
Il n'eft pas non plus d'ufage entre les procu-
reurs , de fe communiquer leurs pièces de la
main à la main \ ils ne le font que par l'une
des deux voies que l'on vient de dire. Pour
ce qui eft des avocats , ils fe communiquent
entr'eux de la m^ain à la main toutes les pie-
ces même les plus importantes de leurs cliens ,
ce qui fe fait aveo tant d'honneur ôc de fidé-
iigné de fon procureur & iigi
1J article 10 du même titre , ordonne que
cette communication fe fera par les mains du
rapporteur, & non pas fous un fîmpk récé-
piflé de procureur à procureur.
Lorfqu'un procureur qui a pris des pieceS'
en communication les retient trop long-temps
pour éloigner le jugement , on obtient con-
tre lui une contrainte pour lui faire rendre
les pièces ; ce qui s'exécute contre lui-même,
par corps.
Les procureurs au parlement prennent auflft
quelquefois entr'eux lavoiede rendre plainte
à la communauté des avocats & procureurs
contre celui qui retient les pièces : on rend
COM
jufqu'à trois plaintes: fur la première, la
compagnie ordonne que le procureur vien-
dra répandre àla plainte \ fur la féconde , on
ordonne que le procureur rendra les pièces
dans tel temps & fous telle peine \ Se fur la
troifieme plainte, la peine eft déclarée en-
courue. Voyeii le recueilles réglemens concer-
nant les procureurs y pag. zzA , zyz £>' 130 3
où il y a pluiieurs délibérations de la com-
munauté à ce fujet.
Communication des sacs , eft celle
qui fe fût entre les avocats des différentes
puties , qui fe confient ^mutuellement leurs
facs de la main à la maîn pour les examiner
avant la plaidoierie delà caufe. Voye^Cou-
MUNICATION DE LA MAIN A LA MAIN.
Communication, en terme de Fortifi-
cation , eft louverture fai^te pour aller à un
fort , un baftlon ou lieu femblable , ou un
partage pour y aller & pour en venir Voy.
Fort , Bastion , Fortification , û'c.
On appelle communication , dans Tatraque
des places, des chemins en forme de tran-
chées ou de parallèles qu'on conftruit pour
joindre les différentes parties des attaques &
deslogemens. On f^it aufïi de ces communi-
cations pour joindre les batteries aux places
d'armes , c'eft-à-dire pour aller à couvert
de ces places ou parallèles aux batteries. Ces
communications fervent à lier enfembletous
les travaux de l'attaque; elles fervent auffi à
donner plus defûrctc aux affiégeans pour
aller d'un endroit à un autre. Voyei{^ Batte-
ries ; voye[auJJî les articles Tranchée,
Parallèle , ùc. {Q)
COMMUNION , f. f. ( Théol. ) créance
uniforme de plufieurs perfonnes , qui les
unit fous un même chef dans une même
égïiCe. Foye;{^ Unité, Eglise.
C'eft dans ce fens que l'on dit çue les
Luthériens & les Calvinifîes ont été retranchés
de la communion de Véglife romaine. Dès
les premiers temps le mot de communion eft
pris en ce fens , comme il paroit par les
canons du concile d'Elvire. Le pape eft le
chef de la communion catholique , & Péglife
ou le fiege de Rome en eft le centre : on ne
peut s'en féparer fans être fchifniatiquc. Voy.
Unité & Schisme,
C O M ^5)3
Coii£MUNioN DES SAîNTS,c'eft l'union,
la communication qu'ont en rr 'elles Tcglifè
triomphante , l eglife militante , Se Pégliie
fouffrants , c'cft-à- dire les fainrsqui regiienr
dans le ciel , les r^mes qui font daiis lepurga-'
toire , & les fidèles qui viven: lur la terre :
ces trois parties d'une feule & même églife
forment un corps do]it Jefus-Chrift eft le chef
inviUble le pape , vicaire de Tefus-Chrift ,
le chef vifible , & dont les membres fcjnt unis
entre eux par les liens de la charité, & par
une correfpondance mutuelle d'interceiïiou
& de prières. De-là l'invocation des fiims,
la prière pour les défunts , Se la confiance
au pouvoir des bienheureux auprès" du trône
de Dieu. La communion des faints eft uil
dogme de foi , un des articles du fymbole
des apôtres. Credo fanclorum commu-
nionem. Elle fe trouve afïèz clairement ex-
primée au Jlliv. des Macchab.ch.xij\rerf,
^A&fuiv. & elle a a été conftamment recon-
ntre par toute la tradition.
Communion eft auflîl'adion par laquelle
on reçoit le corps Se lefang de Jefus-Chrift
au très-faint facrementdePeuchariftie. Cette
action , la plus auguftcdc notre religion, eft
ainfî décrite par faint Paul , prem. aux Cor,
ch.x: Calix benediâionis cui benedicimus ^
nonne communicatio fanguinis Chrijii efi ? &
panis quemfrangimus , nonne par ticipatiocor-
poris Domini ejî ? L'apôtre au même endroit
explique refprit de cette cérémonie religieu-
fe : Unus panis & unum corpus multi fumus _,
omnes qui de unopane Ù de uno calice parti-
cipamus. On peut voir dans l'apologétique
de TertuUien , Se dans la féconde apologie
de S. Juftin , avec quelle ferveur Se quelle
pureté les premiers fidèles célébroient cette
adion , à l'occafion de laquelle les païens
lesnoircifToientdes plus horribles calomnies.
Foye;(^EucHARiSTiE & Présence réelleI
Communion sous les deux espèces >
c'eft-à-direfousl'efpece dupain& fous l'ef-
pece du vin. Il eft conftant par plufieurs mo-
numens des premiers fiecles, quePéglife n'a
pas jugé la communion fous les deux efpeces
nccefl'aire , Se qu'elle a cru que Jefus-Chrift
étant touft entier fous chaque efpece , on le
recevoir également fous chaque efpece fcpa^»
rée, comme fous les deux efpeces réunies.
^^4 C G M
Mais ia difcipline a varié fur ctt article,
qoioique fa foi ai: toujours été la même.
Dans le ixe iiecle on donnoit la communion
fous les deux efpeces , ou plutôt on donnoit
i'eipece du pain trempée dans celle du vin.
jiâa SS. Bencd.fcec, iij. M. de Marca dans
Ton hiftoire de Béarn , liv. V, ch. :r, §. 3 , ob-
fervc aulTi qu'on la recevoir dans la main ;
& il croit que la communion fous une feule
cfpece a commencé en Occident fous le pape
Urbain II , l'an 1096 , au temps de b con-
^ête de la Terre-fainte.
Le vingt-huiticme Canon du concile de
Clermont auquel ce pape préiida , ordonne
quel on communie fous les deux espèces fé-
parémenc : mais il ajoute cependant deux
exceptions, l'une de nécelTiré , & Tautre de
précaution , nifiper necejfuatemaut cautelam ;
la première pour les malades, &la féconde
en faveur des abftemes , ou de ceux qui au-
roient horreur du vin. ♦
Cette obfervation prouve combien étoicnt
mal fondées les inftances qu'ont faites par la
fuite les Huffites , les Calixtins , & après eux
Carlofrad , pour faire rétablir l'ufage de la
Communion fous les deux efpeces. Le retran-
chement de la coupe étoit une difcipline de-
puis long-temps établie pour remédier à mille
abus, & fur-tout au dangerde la profanation
du fang de Jefus-Chrift. L'indulgence qu'eût
l'églife de s'en relâcher parle compaclatum du
concile de Confiance en faveur des Huflîtes,
ne produiiît aucun des bons effets qu'on s'en
étoit promis : ces hérétiques perlevérerent
dans leur révolte contre Péglifc , & n'en fu-
rent pas moins acharnés à inonder de fàng
leur patrie. La même quefiion fut agitée
depuis au concile de Trente , où Pempereur
Ferdinand & le roi de France Charles IX ,
demandoient qu'on rendît au peuple Pufàge
de là coupe. Le fentiment contraire prévalut
d'abord , maisà la fin de la vingt-deuxième
feflîon les pères laifîerent à la prudence du
pape à décider s'il étoit expédient ou non
d'accorder cette grâce. En conféquence Pie
IV , à la prière de l'empereur Ferdinand,
l'accorda à quelques peu pies d^ Allemagne ,
qui n'ufbienr pas mieux de cette condefcen-
dance que n'avoient fait les Bohémiens. Une
foule de monumens d'antiquité eccléiîafti-
quc , qu'on peut voir dans les théolo-
C O M
gienà Catholiques , prouvent que la cow-
munio.'ifous les deux efpec s n'ç,ik wéc^Çùht
ni de précepte divin ni de précepte eccli-
iiaftique , &c par coniéquent qu il n'y a
nulle nccefîité de changer la dirciyline pré-
sente de l'cglife romaine , qUc les Procef-
tans n'attaquent d'ailleurs que par de mau-
vaifes railons.
Communion fréquentf.. La commu-
nion eft de précepte diviii pour les adultes ,
félon ces paroles de Jefus-Chr.ft , en S.
Jean , ch. vj, verf. ^5. Nifi manducaveritis
carnem Filii hominis , Ù hibcriiis fanguinem ,
non habebitis vitam'in vobis. Mais Jefus-
Chrift n'ayant fixé ni le temps ni les cir-
conftances où ce précepte oblige, c'eft à
l'églife leule à les déterminer. Dans les pre-
miers lîecles de l'églife la ferveur & la piété
des fidèles étoient fi grandes , qu'ils parti-
cipoient fréquemment à l'euchariflie. Onf
voit dans les ades des apôtres que les fidè-
les de Jcrufàiem perfcvéïoient dans la prière
Se dans la fra6bion du pain ; ce que les
interprètes entendent de l'euchariflie. Lorf-
que la perfécution étoit allumée , les chré-
tiens fe munilloient tous les jours de ce
pain des fores, pour réfîfler à la fureur deS
tyrans ; confiderantes ideirco , dit S. Cyprien ,
épir. $6 jje quotidie calicem fanguinis Chrifrt
bibere , utpo{jïnt 6' ipfipr opter Chrijîum fan-
guinem fundere. Mais quand la paix eut été
rendue à l'églife , cette ferveur fe ralentit ,
l'éghfe même fut obligée défaire des loix
pour fixer le temps de la communion. Le dix-
huitieme canon du concile d'Agdc enjoint
aux clercs de communier toutes les fois qu'ils
ferviront au f^crifice de la mefle , tomz TV,
concil. p. Î^ê6. Mais, il ne paro't pas qu'il y
en eût encore de bien prccife pour obliger
les bïques à la communion fréquente. S. Am*
broife en exhortîtnt les fidèles à s'approcher
louvent de la fainte table , remarque qu'en
Orient il y en avoir beaucoup qui ne com-
munioient qu'une fois l'année: Siquotidia-
dus efîpanis, cur pofl annumfumis , quemad*
moàum Grcecifacere in Oriente Con\'ue\'erunt?
Ib. V y defacram. c. iv. Et S. Chryfbftcir.tf
rapporte que de fon temps les uns ne com-
munioient qu'une fois l'année , les autres
deux fois , ^ d'autres enfin plus fouvent :
Muli hujus facrifîcii fcmel intoto annofunt
participes , alii autem bis y alii fcep}. HvmiL
C O M
tf . tit fptfi, (iâ Hebr. Et le jugement qu'en
porte ce père eft très-remarquable: Quid crgo,
ajouie-r-jl , tjuinamerunt mbismagis aceepti?
an qui femd? an qui fcepè ? an qui rnro ?
nec hi , me illi ,-fed qui cum munda ccnfciai-
tia , qui cum mundo corde , qui cum vita qux
miUi ejl af^nis reprehenjîuni.
Genade prêtre de Mirfeille , qui vivoit
au \^ fiecle, dans Ion livre des dogmesecclé-
fîaftiques qu'on aautrefoisatrribué à S. Au-
guftin , <lk qui Te trouve imprimé dans Tap-
pendix du tome Vill des ouvrages de ce
père , parle ainii de la communion journa-
lière: Quotidiè eucharijiice communionemper-
cipcre , nec lai:do , nsc ritupci-o : omnibus
tamen dvminicis diebus communicandum [ua^
eeo ù hortor ; fi tamenmciis in ajfeâu pec can-
di non fit : nam habentem adhuc voluntatem
p.eccandi , gravaridico magis eucharijlice per-
cepîione, quû m pu rifica ri. Cas pères, & une in-
finité d^iutres que nous pourrions citer , en
ex hortaiu les fidèles à hi commun on fréquente,
ôc même très- fréquente , &c leur intimant
la menace de Jeius-Chrift , nifi manducave-
ritis carnem , &LC. ne manquoient jamais de
leur remettre fous les yeux ces paroles terri-
bles de S. Paul aux Corinthiens : Quicumque
manducaverit pancm hune , velbiberit calicem
Dominiindign} , reus eritcorporis Ùfanguinis
Dcmini. . . Probet autemfe ipfiim homo. . . .
JTon pct^fîis participes ejfe menfiv Domini , &
menfje dccmG.ncrum. C'eil:-à-dii'e qu^'ils ne
féparoicnt jamais ces deux chofes , le defir
ou la ircquent.ocion du facrement , &: le re(-
pect ou les diipofirioiisnéccflaires pour s'en
approcher dignement , & le recevoir avec
ftfuit. Mais iis n'ont jamais perlé de h. corn-'
munion fréquente , encore moins de la ccm-
munioa journnliere , comme d''une chofe
prefcrite par aucuupiécepte divin ou ecclé-
îiallique.
Ce ne fut que vers le huitième fiecle que
l'cglife voyant la communion devenue très-
nire , obligea les chrétiens à communier trois
fois Tannée, c'eft-à-dire à Pâque, à la Pen-
tecôte , & à Noël, C'eft ce que nous voyons
par le chafitTÇ etfi nonfrequentius , de confecr .
dijl.fecund. & par la décrétale que Gratien
attribue nu pape S. Fabien , mais que la criti-
que a fait voir être un ouvrage du huitième
iîecic» Vers le treizieœs ûecle la tiédeur des
C O M (?5>T
fidetes ^toit encore devenge plus grande , cq>
qui obligea le quatrième concile de Latran
à ordonner de recevoir au moins à Pâque
le facrement de Teuchariftie, fous les peines
portées par le canon fuivant ; Omnis utriufi
que jexus fidelis , pof.quam ad annQS difcretio^
nis pcrvenerit , omnia fua peecata , faltem.
feinel in anno , conjiteatur proprio facerdoti ,
& injunêam fibi pcsnitentiamfiudeat pro viiÀ
bus adimplere ,fufcipiens reverem'er ad minus
inpafcha cucharifiicc facrameritum , nifi for it
de confilio proprii f ccrdvtis vb nliquc n ra-
tionabilem caufam , ad tempus ab eji:?percep~
tione duxerit abfiimndum ; alioquin iV vivens
abingrcjfuçcclefice arceatur , ù moricns chrif-
îianâ careat fepuliurâ. Il eft bon de re-
marquer daiis ce canon , que parle mot ad
minusle concile moucre o^u'il fou h ai le que
les fidèles ne fe bornent point à commu-
nier à p/.que , mais qu'ils le faficnt plus,
iouvent , pour ramener la pratique des pre-
miers fiecles où l'on communioit plus fré-
quemment ; 2*. que le concile lailfe à la
prudence du corifcllèur à décider il dana
certaines occalions il n'eft pas expédient
de différer la communion même pafchale ,
eu égard aux difpofirions du pénitent ; ce
qui prouve que le concile n'a pas eu moins
d'attention que les pères à la néceflîté de
ces difpofitions.
Le concile de Trente a renouvcBé le même
canon , fejf. z^ , ck. xix. Mais pour ce qui
regarde la communion fréquente , voici comme
il s'exprime dans !a mémefelTîon , ch. viij t
Paterno aJfcBM. admonet fiancfa fynodus per
vifcera mifertcordiœ Dei nofiri :i/
panem illum fuperfuhfianliahm fréquenter fi~
deles percipere pojjint. Ht dans laTefllon 22 »
chap. vj ; Op:aret quidemfanâa fynodus ut in
fingalis mijfis fi.detes adfianies , f^n folum.
fpirituali ajjïctu , fcd facramenîaii eiiam eu^
charifiiiV perceptions ccmmunicarent , quo cd
eos fanclijjimi hujus facrificii fruftus uberior
perveniret. Tel eft le vœu de l'églife fur la.
fréquente communion ; mais cen'eft ni une or-
donnance ni un décret formel Quant aux
difpofirionsà la communion en général , outre
que le, concile exige l'état de grâce ou
l'exemption de pkhé moitel pour ne pas
recevoir indignement l'euchariftie , qui ,
félon le langage de Técole , eft un facrement
des viviins Se Don des morts, il exige eijcoat
ôc^ô C O M
pour comn|i||ier avec fruît , on
:c des
que
aoprocheavecaes ailpGÛtior.s pius émmea-
ZtiSi(kqu:iiïi à h.co:rtmunionfré.^ucnt.e^\Oiâ.
ce qu ii enfeigne , fcjf. 13 , ch. viij : îLxc
facra myfieria corpcris Ù fanguinis Dcmini
'cmaes ùfinguli , ea fidci confiantia ùfir/ru-
taie , ea aiumi dévouons ac pi et aie & cuUu
a-edanî & venereatur , ut pansm lUumfupzr-
tlantiakm frequenw fufcipere pcffi^f . îl en-
rne encore dans la même (eiîîon , qu'un
chrétien ne doit pas s'approcher de i^eucha
riftie fans un grand reiped ôc une grande
lainteté. Nous verrons bientôt ce que les
pères &c les maîtres de la vie fpirituelle en-
tendent par cette fainreté
La nécelTîté ou la lumiance des dnpo-
fitionsrequiies pour la communiQU fréquente ,
ont jeté divers théologiens modernes dans
des excès & des erreurs bien oppofées à la
dodrine des pères & à Pefprit de réglilè.
Lesuns uniquement occupés de la grandeur
& de la dignité du facrement , & de la
diftance infinie qu'il y a entre la m.ajefté de
Dieu & la baflellè de Thomme, ont exigé des
difpofitions (i fublimes^que non feulement
lesiuftes, mais les plus grands faints, ne pour-
roiént communier même à pâque. Te'.le eft
la pernicieufe dodrine condarnnée dans ces
deux propolitions par le pape Alexandre Vilî.
Sacrikgi judicandi funt , qui jus ad commu-
nicttcm pcrcipiendam prxîendunt , antequam
condignam de déliais fuis pœnitentiam ege-
rint .... Similiter arccndi funt à facra
communione quitus nondum itieji amor Dci
purijjimus , 6r ornais mixtionis expers. Les
autres, oubliant le refpeddù à J.C. préfent
dans l'euchariftie , &c uniquement attentifs
aux avantages qu'on retire ou qu'on peut
retirer de la communion fréquente ik même
journalière , n'ont cherché qu'à faciliter la
pratique, en négligeant d'infifter ou d'ap-
puyer fur les diipoiitions que demande un
facrement fiaugufte. Ils ont donc en feigne
nue la feule exemption du péché mortel
fufïît pour communier fouvent , très-fou-
vcnt , & même tous les jours ; que les difpofi-
tions aduelles de refped, d'attention, de
defir, 8c la pureté d'intention, ne fonr que de
confeil ; qu'il eft meilleur de plus falutaire
de recevoir la comm-inion , & même tous les
jours , fans ces difpofitions , que de la difï">
C o M
en ^ ' rîr : que jamais , & dans aucune occaiîon ,
il n elc permis à un jufte de s'éloigner de
la communion "ÇQcc re'peél: que touç pécheur
coupable même de crimes énormes & mul-
lipliés , doit communier aufïi-tot après Pab-
■olution reçue : qu'il ne faut ni plus de difpo-
iition ni plus de perfection pourcommunier
tous les jours que pour communier rare-
ment : que les confelleurs ne doivent ja-
mais impofer pour pénitence le délai de la
communion , quelque court qu'il puiflè être ;
que les pénitcns (ont Iculs juges par rapport
\ eux dans cette matière : que pour commu-
nier plus ou moins fouvent , ils ne doivent
ni demander confeil à leurs direéteurs , ni
%ivre leur avis , (ur-rout s'il tend à les éloi-
gner de la lainte t^sbie , ne fut-ce que pour
quelque temps ; cn^w ils taxent d'impru-
dence les règles des communautés religieu-
ses qui fixent le nombre des communions ,
quoique ces règles loient approuvées par
les iouverains pontifes , &: autorifées
par l'uiage conrtant*de tous les ordres
religieux.
Comme on a accufé M. Arnauld d''a-
voir établi le rigorifme dans fon livre de
la fréquente cotnmunion & qu'on taxe le
père Pichon jéfuite de favorifer ouverte-
ment le relâchement dans fon ouvrage
indtulé l'efprit de Jefus^Ckrijî (j deVéglife
fur la fréquente communion , nous allons
donner au ledteur une idée de ces deux
fameux écrits.
Le livre de la fréquente communion fut
compofé par M. Arnauld à cette occafion.
Le père de Saifmaifons jéfuite , ayant vu par
le moyen d'une de fes pénitentes , une inf-
trudionque M. de S. Cyran avoir drelîee
pour la diredion de madame la princefle de
Guimené quife conduifoit par les avis , crut
y trouver des maximes dangereufes , & en-
treprit aufïi-ror de le réfuter par un écrit
intitulé, queflion , s^il efi meilleur de commu"
nier fouvent que rarement. Cette réfutation
étant tombée ertrre les mains de M. Ar-
nauld, il fe crut obligé d'y répondre.
Cet ouvrage eft divifé en trois parties. Dans
la première , M. Arnauld traite de la vérita-
ble intelligence de l'écTÎture & des pères ,
que le pcre de Saifmaifons allègue pour la
fréquente communion \ z°. des conditions d'un
îer pendant quelque temps pour les acqué-1 bon diredeur pour régler les communions j
3 2
C O M
5**. fi l'on doit porter îndifrcremment tou-
tes fortes de perionnes à commun er tous
les huit jours; 4°. de Imdi policion que
les péchés véniels peuvent apporcer à la/re-
quente communion. Dans les vingt-fept
premiers cliapitres ce dodeur difcute les
partages de l'écriture èc des perc» allégués
par le jéfuite. Depuis le chapitre xxviij
jufqu'au xxxiv incluliYement , on expofe
les qualités prefcrites par le père de Saif-
maifons mûme pour un ban direéleur.
Le troiiieme objet remplit les chapitres
XXXV, xxxvj , xxxvij & xxxviij , où Ion
combat encore des raifons allez légères
que le père de Saifmaifons avoit alléguées
pour prouver qu'on peut permettre indif-
fc:remment la communion à toutes lortes
de perfonnes tous les huit jours. Les deux
chapitres fuivans font deftincs à prouver ,
par des témoignages des pères & par des
exemples des faints , qu on a eu égard aux
péchés véniels pour régler les communions.
Daiis la féconde partie M. Arnauld
examine cette queftioii , s'il eft meilleur
6i. plus utile aux âmes qui fe fentent
coupables de péchés mortels de commu-
nier aulTi-tot qu'elles fe font confelfees ,
ou de prendre quelque temps pour fe
purifier par la pénitence avant que de le
préfenter au fàint autel. Il divife fa réponlè
en trois points : 1°. il examine les auto-
rités de l écriture , des pères , & des
conciles , dont le P. de Saifmaifons ap-
puyoit fon fentiment : z°. il examine ii
ce n'a jamais été la pratique de l'églife
de faire pénitence plulîeurs jours avant
que de communier ; & fur ce point il conclut
de la difcipline de Téglife primitive fur la pé-
nitence , à l'ufage préfent de l'églife j & c'eft
fans doute ce quia donné occafion à cerigo-
rifme introduit dans la fpéculation & dans
la pratique , & qui a fait dire fans diftinc-
tion , que c'eft une conduite pleine defagejfe ,
de lumière ù de charité , de donner aux
âmes le temps de porter oi'ec humilité 6'
de fentir Vétat du péché , de demander Vef-
prit de pénitence & de contrition ^ & de com-
mencer au moins à fatisfaire à la jujîice
de Dieu avant que de les réconcilier ; c'eft
la quatre - vingt -(eptieme proportion du
P. Qiicfnel condamnée par la bulle , &
évidemment faulîe dans fa généralité : 3°.
Tome VI IL
C O M Ccf-j
M. Arnauld s'efforce de prouver que c'eft
à tort qu'on condamne de témérité ceux
qui s'efforcent de fléchir la miféricorde
de Dieu par la mortification de leur cliair
& Pexercice des bonnes œuvres avant
que de s'approcher du fancStuaire : & il le
prouve allez bien par différentes autorités
qui concernent les péchés mortels public»
ou d'habitude. Mais on fait allez juf-
qu'où les rigoriftes ont porté les confé-
e|uences de ce principe , qui eft vrai 8û
inconteftable à quelques égards.
La troiiieme partie roule fur quelques
difpofitions plus particulières pour com-
munier avec fruit ; M. Arnauld y exami-
ne il l'on doit s'approcher de l'euchariftie
fans aucune crainte , dans quelque froi-
deur , indévotion , inapplication aux cho-
fes de Dieu , privation de g race, plénitude
de Pamour de foi-même , & prodigieux
attachement au monde que l'on fe trouve,
& fi le délai ne peut point fèrvir à com*
munier avec plus de révérence & meil-
leure difpoiition : il montre qu'au moins
pour la communion fréquence on doit avoir
beaucoup d'égards à toutes ces indiipoiitions.
Il rélulte de cet ouvrage que M. Ar-
nauld , & tous ceux qui penfent comme
lui , exigent pour la fréquente communion
des dilpofltions bien fublimes , & par con-
féquent rares dans la plupart des chrétiens r
auiïî leurs adverfaires les ont-ils accufés de
retirer d'une main la communiomxyyi fidèles,
tandis qu'ils la leur préfentoient de l'autre.
Quoi qu'il en puillè être des intentions &
de la conduite de M. Arnauld & de fes
partifans , dans la pratique , le livre de la
fréquente Communion parut imprimé en 1 643 ^
muni des approbations de feize archevê-
ques & évêques de Frajice , & de vingt-
quatre dodleurs de Sorbonne : on peut les
voir à la tête de Pouvrage. A ces premiers
prélats fe joignit deux ans après , la pro-
vince eccléiiaftique d'Aufch , compofée de
fon archevêque & de dix évêques fuffra-
gans , qui avec quantité d'eccléfiaftiques
du fécond ordre , approuvèrent le livre
tout d'une voix dans une alTemblée provin-
ciale tenue en i64j'.
Cet ouvrage dès là nai (Tance excita
des plaintes très - vives. Il fut dénoncé à
Rome. Les feize évêques premiers appro*-
*Ssss
^5>g C O M
Kîtcurs. en écrivirent , en 1 644 , au pape
Urbain Vlll , une longue lercre , où ils
font l'éloge du livre , &c s'en déclarent
les défenfeurs. Les mêmes évêques , excep-
té trois qui écoient morts , écrivirent Tan-
née d'^après , fur le même fujet , au pape
Innocent X , qui avoit fuccédé à Urbain
VIII. Ces deux lettres furent rendues
au pape par M. Bourgeois , l'un des vingt-
quatre dofteurs de Sorbonne qui avoient
approuvé le livre ; & il lui prcfenta de-
puis une procuration fignée de quatre ar-
chevêques ôc de feize évêques , qui lui
donnoit le pouvoir de comparoitre pour
eux ôc en leur nom devant le pape ,
pour y défendre le livre de la fréquente
communion. Ce doéheur fut reçu par la
congrégation en qualité de contradicteur ,
on lui communiqua les plaintes & accu-
fations : il y répondit par des mémoires :
il inftruilît les cardinaux , les officiers j&
les théologiens de la congrégation ; 6c
enfin Taffaire ayant été rapportée & mife
en délibération , tous les cardinaux con-
clurent d^une voix à laifler le livre fans
atteinte ; & jamais depuis le livre de la
fréquente communion n'a été condamné à
Rome. Les lettres des évêques approba-
teurs aux papes Urbain VIÎI 6c Inno-
cent X , fe trouvent à la fin des nouvelles
éditions de cet ouvrage.
Cependant le père Nouet , jéfuite ,
avoit prêché publiquement dans Paris con-
tre le livre de .Li fréquente communion^
fans ménager Tauteur ni les évêques appro-
bateurs. D'un autre côté le fameux père
Petau entra en lice , tant par une lettre
qu'il adrelïà . à la reine régente Marie-
Anne d'Autriche , que par un autre écrit
plus étendu , où il combattit méthodique-
ment le livre de M. Arnauld : celui-ci
répondit à l'un & à l'autre \ 1°. par un
avertiflement fur quelques fermons prê-
ches à Paris ", z°. p^jr une lettre à la reine ,
ôc par une préface qu'on trouve à la tête
de la tradition de l'églife , fur le fujet
delà pénitence ôc de la communion.
Le livre du père Pichon , jéfuite , dont
nous avons déjà rapporté le titre , parut
en 1745 j muni des approbations ordi-
naire? , ôc annoncé avec éloge par le iour-
^iiUfte de T/évoux , oâo^re ij^^ , art»
C O M
îxxxn'ij. Il fut depuis approuvé formelle-
m.ent par M. l'archevêque de Befançon ,
par M. Têvêque de Marfeille ôc par M.
Pévêque & prince de Bâle. Les archevêques
de Paris , de Sens , de Tours, de Rouen j les
évêques d'Evreux,dc Lodeve,de Saint- Pons,
6'c. n'en portèrent pas le même jugement.
Ces prélats furent donc cboquçs d'en-
tendre le père Pichon enfeigner , 1°.
que lorfque l'apôtre dit , probet autem fe
ipfum homo , c'eft comme s'il difoit ;
" avant de communier tous les jours , à
quoi il exhorte , examinez bien iî vous
êtes exempt de péché mortel i ôc fî vous
Pêtes , communiez \ fi vous ne Têtes pas ,
purihez-vous au plutôt , afin de ne pas
manquer à la communion quotidienne. »
Entrct. II, page ÇLîZ.
1°. " Que la coutume de Téglife déclare
que cette épreuve confifte en ce que nulle
perfonne tentant là confcience fouillée
d\m péché mortel , quelque contrition
qu'il lui lemble en avoir , ne doit s'ap-
procher de la fainte euchariftie fans avoir
fait précéder Pabfolution facramentelle ;
ce que le iaint concile de Trente ordonne
devoir être obfervé par tous les chré-
tiens , ôc même par . les prêtres q.ui fe
trouvent obligés de célébrer par le devoir
de leur emploi. » Les évêques déclarent
que le père Pichon a pui^ cette maxi-
me dans le livre de Molinos fur la fré-
quente communion, ÔC ils la condamnent,
aulïi-bien que le commentaire fuivant qu'en
fait le jéfuite à la pj^e z5j de fon ouvrage.
» Le concile ne demande point en ri-
gueur d'autre difpofition , parce qu'il n'en
connoît point d'autre qui foit abfolument
nécelTàire : autrement il n'auroit pas man-
qué un point d'une aufïî grande confé-
quence , fur-tout pour les prêtres qui
communient tous les jours. L'exemption
du péché mortel , ou l'état de grâce , eft
donc la feule difpofition néceflaire : elle
eft donc une difpofition fuffifante pour
bien communier. Bien plus , le concile
exhorte à .la communion de tous les jours ,
fans dire un mot d'une plus grande dif-
pofition : il le pouvoit , ôc s'il eût été
néceflaire, il le devoir ; cependant il fe
tient ferme à dire , que les prêtres obli-
gés par office de célébrer tous les jours.
C O M
font obligés feulement , s'ils font coupa-
bles d'un péché mortel , de s'en confeflèr ,
fans quoi ils ne peuvent pas célébrer.
Avec cette dilpolition ils peuvent donc le
faire. Cette difpolition eft donc fuffi-
fante , ôc feule commandée. Une com-
paraifbn , ajoute le père Pichon , ren-
dra la chofe fenfible. Vous voulez ache-
ter une charge , on exige dix mille
livres ; ce n'eft qu^\ ce prix que vous
la poficderez : ne fuflît-il pas de donner
ce qu'on exige ? Ell-il néceflàire de donner
quelque chofe de plus , puifqu'on n'exige
rien au-delà ? Concluons : les PP. aflem-
blés au concile de Trente , ne deman-
dent point d'autre difpofition que l'exemp-
tion du péché mortel La fain-
teté commandée par Jefus-Chrift , par
l'apôtre , & par l'églife , pour recevoir
dignement l'euchariftie conlifte donc pré-
cifement à être en état de grâce , &
exempt de péché mortel. Voilà l'oracle
qui a parlé , qui ofera dire le con-
traire ? >î
3". De la diftinction de fainteté com-
mandée &c de fainteté xonfeillée ou de
bienféance , qui eft la clé de tout l'ou-
vrage & la bafe du fyftême du P. Pi-
chon. Il eft néceflàire de rapporter ici
le texte de l'auteur , quoique fort éten-
du. Il fe trouve aux pages %6^ , 2.%
6* fuiv. de fon Hvre.
" L'abbé. Il faut être faint pour com-
munier dignement j les facrés myfteres
ne ie donnent qu'aux faints , fancîa fanais ,
difoit autrefois le diacre à ceux qui dé-
voient communier.
" Le doâeur. Je le dis aufli-bien que
vous ^ aufli-bien que l'égUfe par la bou-
che du diacre j mais de quelle fainteté
eft-il ici queftion : Diftinguons-en de deux
fortes ; fainteté de précepte , ou fainteté
confeillée : la fainteté de précepte eft ab-
folument néceflàire , & fans elle on com-
munie indignement & facrilégement : elle
confifte dans l'aduelle exemption du
péché mortel , & à être par une foi ani-
mée de la charité en état de grâce. La
fainteté du confeil eft l'aéluelle exemp-
tion de péchés véniels , dans une actuelle
difpofition de ferveur , de dévotion pro-
portionnée aux grâces prcfentes. On a la
C O M
^09
fainteté commandée quand on eft en état
de grâce : alors on eft jufte, on eft (àint,
on eft féparé des pécheurs : c'eft en ce
fens que les apôtres ont appelle les fidè-
les des faints. .
L'abbé. Quoi , la feule néceflàire &
indifpenfable difpofition pour recevoir di-
gnement Jefus-Chrift , c'eft l'exemption
de tout péché mortel , enforte qu'étant
en état de grâce , & poflédant I>ieu par
la charité, je puis communier & efpérer
que ma communion fera bonne , chré-
tienne , qu'elle plaira à Dieu , qu'elle
augmentera la grâce en moi ? cela fup-
pofe , tout jufte peut donc approcher' de
ce facrement ; c'eft-là votre fentiment ?
" Le doâeur. C'eft mon fentiment ,
parce que c'eft celui de Jefus-Chrift &
celui de l'églife , ni l'un ni l'autre ne
demandent rien davantage : c'eft-là une
vérité catholique qu'on ne peut combattre
fans errer dans la foi. Concevez bien ma
penfée. »
" L'abbé. Je la conçois bien : vous ne
parlez que de la fainteté commandée , &
vous dites que l'état de grâce fufïît, &
qu'il eft néceflàirement requis pour com-
munier dignement ; & vous ajoutez que
c'eft-là une vérité catholique que l'on ne
peut combattre fans errer dans la foi :
vos idées font nettes , & faute de cela je
vois bien maintenant que l'on confond tout ,
que l'on brouille tout ; c'eft la reflburce des
novateurs, que j'ai trop écoutés pour mon
malheur
« L'abbé. Cela eftpofîtif , j'en conviens :
mais ne déguifons rien ; les faints pères
font bien contraires à cette décifion j
que d'années de pénitence n'exigeoient-ils
pas avant que d'admettre à la communion ? >»
" Le docteur. Errez-vous toujours avec
vos novateurs ? 1°. Il n'eft queftion ici
que des juftes , que des âmes exemptes
de péché , que des chrétiens en état de
grâce. i°. Tous les pères ont toujours
penfé que félon J. C. l'exemption du
péché mortel étoit une difpofition indif-
penfable pour la fréquente communion ,
mais ils ont aufli penfe que cette difpofi-
tion étott fuffifànte
•* S s s s z
700 C O M
Voici donc la véricé catholique décidée
par réglife : l'exemption de tout péchi
mortel dont on a obtenu la rémillion dans
le facrement de pénitence , c'eft la grande
faintcté qui nous rend dignes de commu-
nier ; tout le refte eft confeillé , tout lé
refte eft une fainteté qui n'eft pas com-
mandée pour pouvoir communier. Je me
fixe là avec l'églife , &c je conclus : dès-
lors que ma confcience ne me reproche
aucun péché mortel , foit à caufe de l'in-
jiocence de ma vie , foit à caufe d'une
bonne tonfcffion où je me fuis purifié ,
j'ai la grande fainteté commandée , la fain-
teté néceflàire 6c fuffifante pour commu-
nier de bien communier : je ne profane-
rai donc pas le facrement ; je n'y rece-
vrai donc pas ma mort , ma condamna-
tion , mon jugement; ma communion no:
fera donc pas indigne ni facrilege. Si je
luis donc aflez heureux pour être iou-
yent exempt de fautes mortelles par la
denieure du S. Efprit en moi _, je puis
ibuvent communier , & communier digne-
ment. Et fi par un bonheur encore plus
digne d'envie , je fuis toujours exempt de
feutes mortelles , je puis toujours com-
munier , & j'aurai la confol.ition d'appor-
ter à la communion la grande fainteté
commandée par l'égli'e. Voilà ma religion, [
c'eft réglife qui me l'enfeigne. »>
" L abbé. Excluez- vous la fainteté con-
leillée j & pourvu que l'on foit . fans
péché mortel , ne demanderiez- vous rien
autre chofe ? Si cela eft , n'eft-ce pas
donner dans un autre excès , & permettre
les communions imparfaites , & même
celles que l'on feroit avec des péchés
ycniels î »j
" Xe docteur. La fainteté confeillée , ou
rexemption du péché véniel , & d'afFedion
au péché véniel ou à des imperfections,
■Je les confeillé auffi , autant ^ue la fragi-
lité humaine en eft capable. «
« Vûbbé. S. François de Sales ordonne
"que pour communier fouvenr, Se même
tous les huit jours , on foit exempt de tout
■péché véniel , & même de toute affedion
au péché vén;el. »
" Le docieur. Jefus-Chrift ni l'églife ne
r ordonnant p: s , ce faint n'avoit garde de le
"faire 3 ^ ctoittrop habile théologien pour
C o M
cela ; inais il le confeillé. Cette affedic-n eft
une volonté délibérée de perfévérer dans
fes fautes : or quel chrétien communiant
en chtétien , ne tâche pas de fe purifier
de tout ce qui peut en lui déplaire à Dieu. »
» Vabbé. Dieu me parle par votre bou-
che , & je me fens animé de plus en plus
à communier fouvent. Vous exigez avec
l'églife une préparation fage , digne de
Dieu , qui ne défefpere point , qui ote toute
inquiétude : vous fixez pour tous une fainteté
commandée , une fiinteté que tous peuvent
aifément avoir : car qui voudroit communier
en haïftànt Dieu? Vous conleillez toujours
une fainteté plus parRiite ; vous y exhortez ,
& vous en donnez le moyen dans là fréquente
communion : c'eft le vrai efprit de Jeius-
Chrift & de l'églife. »
4°. On a été révolté d'entendre dire au
père Pichon, "qu'on peut donner pour
pénitence de communier fouvent , puifque
félon les (zintsconcA&sX^ fréquente commu^
/2.'o/2 eft le moyen le plus efficace & le plus
abrégé de converfion & de fandlification j
qu'un pénitent , jquand il eft aiîèz heureux
pour trouver un directeur qui lui impofe pa-
reille pénitence , eft fur d'être conduit par
l'efprit de Jefus-Chrift & de l'églife ; qu'il
n'y a que l'enfer , les libertins , les mauvais
chrétiens , les novateurs , qui blâment cette
pratique. Pag. 4S)6 ^ 4^7. »
En conféquence d'avoir fubftitué ^a. fré-
quente communion aux œuvres fatisfadtoires ,
voici fes paroles, pages ^^6, "Vous ne comp-
tez pour pénitence que de vivre dans un
dé ert , de coucher fur la dure , de porter
leciiice : ah , meffieurs , ce n'eft-là quePex-
térieur de la pénitence ! » Et aux pages 47^
& 474. « Pour la plupart des chrétiens il n'y
a guère , moralement parlant, d'autre moyen
de fàluz queh fréçuentecommunion . Venons
à la preuve. Combien ne peuvent pas jeûner.,
combien ne peuvent pas faire de longues
prières ? l'aumône eft impofTible à tous les
pauvres : la folitude ôc la fui-e du monde
ne conviennertpas à ceux qui font mariés y
& à ceux qui font en place. Pour fe fauver ,
ajoute-t-il , il faudroit une prière fervente &:
con. nuelle , les gens du monde font trop
occupés, trop difîipés : il faudroit faire l'au-
mône j une nombre ufe fifniUe met hors
CO M
d'crat delà faîrc : il faudroir jeûner , Homptef
la chair rebelle ; un tempérament: délicat &
infirme s y oppofe : il faudroit par un tra-
vail affidu fe tirer d'une dangercufe oifive-
té y les riclielïès donnent un funefte repos :
votre lalut demanderoitla fuicc du monde ,
une profonde iblitude ; une époufe , des en-
tans retiennent dans le tracas du fiecle. Que
faire donc ? Comparons dit-il , page 36^ ,
Jes moyens de iàlut marqués dans revangile :
auquel de ces moyens vous déterraincrez-
vous ? eft-ce à une prière continuelle , à un
jeune continuel , à une folitude profonde ,
à la diftribution de tout votre bien aux pau-
vres , aux exercices les plus humilians de la
charité dans les hôpitaux , dans les prifons ,
à la pratique d'une pureté virginale? chacun
de ces moyens alarme l'amour - propre ,
effraie les fens , & défefpcre une foible vo-
lonté comme la notre : mais communier
fouvent , fouvent nous unir h. Jelus-Clirift ,
eft une voie bien plus aifée. Et à la p. ^j% ,
le pauvre & le riche , l'homme d'épée &
l'homme de robe , Partilan & le marchand ,
' tout le monde enfin peut aifément partici-
per à ce facrement adorable , fans ruiner fa
iànté j ians abandonner fa famille , fon com-
merce , fbn emploi ; on ne peut y oppofer
i^aifonnablement aucune impof libilité ; di-
fbns-mieux , on a pour communier fouvent ,
toutes les facilités imaginables. D'où cet au-
teur conclut , p/7(g^e 471, que c'efl un grand ;
mal que de ne pas employer un remède qui
eft , pour ainfî dire , àla main , qui nous efl
C O M 701
<>*'. D'avoir parlé avec peu de décence de
la pénitence publique autrefois en ufage dans
l'égliie i en l'appellant , page J3.J , une perd-'
tence de cérémonie.
7°. D^'avoir tronqué , altéré , falfifié des
partages des pères , des papes , des conciles ,
pour en tirer des preuves ai faveur de Ion
lèntiment.
8°. D'avoir imaginé ou allégué des hif^
toires apocryphes , pour i'appiiyer & eu
tirer des conféquences favorables à (f^s opi-
nions.
Ce livre fit tant de bruit , que l'auteur fe
crut obligé de fe rétrader : &: c'eft ce qu'il
fit par une lettre datée de Strasbourg , le 24
de janvier 1748 , & adrefTée à M. l'arche-
vêque de Paris , qui la rendit publique.
Cette rétraélation mit à couvert la perfonlÉl
de l'auteur ; mais elle ne garantit pas fon
livre de la condamnation qu'en portèrent
vingt évoques de France , les uns par des
remarques , les autres par des mandemens
ou inftru6bions paftorales , par lefquels ils
interdirent la ledure de ce livre dans leurs
dioceies. M. l'archevêque de Befançon
& M. l'évêque de Marfeille rétraélerent
les approbations qu'ils avoient d'abord
données à Touvrage j & les évêques fe
crurent d'autant plus en droit de le con-
damner , malgré la foumifîion de l'au-
teur , que 5 comme dit l'un d'entre ces
; prélats , " un auteur qui condamne de
bonne foi fbn ouvrage , qui fe répent
fi porportionne & qui peut fuppleer a tons^^^^^,^^^,,, devant Di?u de l'avoir domié
les autres remèdes. Or il avoir dit de ce re- ■
mede , page ^yo , qu'il corrige nos défauts
fans amertume \ qu'il guérit nos plaies fans
douleurs •■, qu'il purifie notre cœur fans vio-
lence ; qu'il fanétifie fans alarme , & pref-
que fans combat \ qu'il nous détache & fé-
f are de nous-mêmes, fans nous donner les'
convulfions de la mort ; & qu'il nous arra-
che aux créatures & nous unit à Dieu fans
agonie. N'eft-ce pasenfeigner allez claire-
ment qu'il n'y a guère pour les gens du
monde de pénitence plus facile !k plusabré-
gée que Xs. fréquente communion ? "
5°. On lui a reproché d'avoir dit , page
355 ) 9.^ i^ C" ^^ de l'eu char iflie comme du
baptême , qui agit fur les enfans & donne la
^race fans aucune autre difpoiîtion.
au public j defire fîncirement qu'il ne fbit
point épargné : plein d'indignation contre
les mallieureufès produdions , qui ont
alarmé tous les gens de bien , il les livre à
l'autorité de la juftice la plus refpediable :
plus il détefte toutes les erreurs qui lui ont
échappé y plus il fouhaite qu'il n'y en ait au-
cune qui foit exempte de condamnation. >>
Avis de M. l'archevêque de Tours aux fidèles
de fon diocefe.
Les principales autorités qu'on a oppo-
fées au père Pichon , font, outre lespafîiges
de S. Chryfoftome Se deGennade, que nous
avons rapportés au commencement de cet
article , 1°. cet endroit de la dix-feptieme
homélie de S. Chryfoilome fur l'épître aux
701 C O M
Hébreux : " Les chofes faintes font pour
les faints , fancia fanBis : le cri plein de
majeftc que le diacre , élevant fa main &
fe tenant debout , fait retentir au milieu
du iîlence qui règne dans la célébration
des faints myfteres , eft comme une main
inviiible qui repouffe les uns , pendant
qu'elle appelle & feit approcher les au-
tres : comme fi le miniftre facré difoit ,
fi quelqu'un neji pas faint , qu'il fe reti-
re. Il ne dit pas , fi quelqu'un n*ejl pas
purifié de fes péchés , mais fi quelqu'un
n'efi pas faint ; car c*eft la leule habita-
tion du faint-Efprit , & l'abondance des
bonnes œuvres , & non la feule exemp-
tion du péché , qui fait les faints. Ce n'efl:
donc pas affez que vous foye^ lavés de la
boue , j'exige encore que vous foyez écla-
4^ns par la blancheur & par la beauté
de votre ame. Que ceux-là donc appro-
chent , & touchent avec refped à la coupe
facrée du roi. » Cet endroit de faint
Thomas , /« 4 , difl-^ ix , art. 4 : Non
effet confukndum alicui quod flatim pqft
veccatum mortale , etiam contritus & confef-
fus , ad eucharifliam accederet ; fed debe-
ret , nifi magna necejfitas urgeret , per ali-
quod tempus propter reverentiam abflinere.
Autorités qui paroiflent bien diamétra-
lement oppofées à ce qu'a avancé le P.
Pichon , que Vexemption du péché mor-
tel étoit la feule difpofition néceffaire Ù fuf-
fifante pour communier fréquemment.
i°. Qu'outre cette exemption de pé-
ché mortel , le concile de Trente exige ,
du moins pour \d. communion fréquente ,
d autres difpofitions de ferveur : Si non de-
cet ad facras ullas funâiones quempiam ac-
cedere nifi fanâè ; certè quo magis fanc-
titas & divinitas caeleftis hujus facramenti
viro chrifiano comperta eft , diligentiùs ca-
vcre débet , ne abfque magna reverentiâ &
fanâitate ad id percipiendum accédât. Seff.
l^ ych. vij.
5°. A fa diftindion de fainteté cotn-
mandée & de fainteté confeillée , on a op-
pofé ce paflàge de Salazar jéfuite , dans
ion traité de la pratique & de l'ufage de la
communion , ch. viij , où à l'exemption du
péché m.ortel il ajoute la droiture d'in-
tention , l'attention » la révérence &c la
dévotion ou defir. " Prétendre , ccftnme
C O M
le difent quelques-uns , que le défaut
d'attention n'eft pas contraire à la fainte
communion , eft une dodtrine fàufle , con-
traire à la raifbn , à la dodrine des faints
pcrcs , & de S. Thomas en particulier. " Et
à la fin du même chapitre : ". Il fe collige
clairement de tout ce qui a été dit jufqu'ici :
Combien fe trompent lourdement ceux
qui difent que toutes ces difpofitions font
feulement de confeil , & précifément volon--
ta ires , excepté Vétat de grâce & la con-
feffion facramentelle , fuppofé quelque péché
mortel. Car cela eft grandement éloigne
de la vérité , & ce font doctrines qui
n'ont jamais été ouies en l'églifc de Dieu ,
qui font contraires à ce que nous ont enfeigné
les SS, pères & les doâeurs fcholaftiques.»
A ce que le P. Pichon avoir répondu à
fon interlocuteur , que S. François de Sales
étoit trop habile théologien pour avoir exigé
l'exemption de toute affedion au péché
véniel , comme une difpofition néceflàirc
à la fréquente communion , mais qu'il la
confeilloit feulement , on lui a oppofé ce
texte du faint évêque de Genève , qui n'a
pas befoinde commentaire. " De recevoir la
communion de l'euchariftie tous les jours, ni
je ne loue , ni je ne blâme : mais de com-
munier tous les jours de dimanche, je \<^
confeille, & y exhorte un chacun, pourvu
que l'efprit foit fans aucune affecîion de pé-
cher .... Pour communier tous les huit
jours , il eft requis de n'avoir ni péché mor-
tel y ni aucune affecîion au péché véniel , Ô€
d'avoir un grand defir de communier :
mais pour communier tous les jours , il
faut avoir furmonté la plupart des mau-
vaifes inclinations , & que ce foit par l'avis
du père fpirituel ». Ces mots , // ejft requis,
ne peuvent jamais s'entendre d'une fain-
teté de confeil & de bien/eance.
4°. On a fait voir par une foule de pafîà-
ges de l'écriture , des pères ôc des conciles,
que la pénitence étant un baptême laborieux -,
qui demande des combats , des efforts , qui
coûte à la nature, on ne pouvoir regarder
comme une pénitence l'euchariftie, qui eft
le prix de ces combats & de ces efforts , ni
afiigner comme un moyen de cônverfion ,
un facrement qui fuppofe la cônverfion ; &
l'on a fait voir que tant par la communion
en général,que pour la communion fréquente.
CO M
il falloic avoir égard aux dirpofitions des pé-
lairens ; qu'il étoit quelquefois à propos
de leur différer la communion , fuivant Tef-
prit du concile de Trente fur la péniten-
ce , & les règles prefcrites par S. Char-
les Borromée aux confclfeurs 5 règles adop-
tées par le clergé de France en 1700 ,
Se renouvellées par les évêques dans leurs
mandemens , qu'on peut confulter à cet
égard : on y verra qu'ils ont aurti pris la
iage précaution de ne pas faire dégénérer
cette épreuve en une févérité outrée , pro-
pre à déiefpércr le pécheur j Se dans quel
fens Taflemblée de 17 14 a condamné la
quatre - vingt - feptieme propofition du P.
Quefnel.
5°. On n'a pas eu de peine à faire fentir
le faux de la comparaifon entre le baptême
& l'cuchariftie: c'eft une des premières no-
tions du catéchifme , que Pun agit fur
les enfans fans aucune dilpofition , & que
l'autre en demande de très-grandes dans les
adultes.
6°. On a cru que le P. Pichbn en appel-
ant l'ancienne pénitence publique une péni-
tence de cérémonie , approchoit beaucoup de
ces exprelTions de Mclanchton : Sckoîajîici
viderunt in ecclejia ejfc fatisfacliones , fed
non animadverterunt illa fpeâacula inftituta
e(fe , tàm exempli caufa , îûm ad probandos
hos qui petebant recipi ab ecclejia : infumma
non viderunt ejfe difciplinam h rem prorfus
politicaw.. Apolog. confcjf. Auguji. art. de con-
M.&fatisf ^
Quant au ieptieme & au huitième article,
on peut confulter les remarques de M. l'ar-
chevêque de Sens , ôc les mandemens des
autres prélats. (G)
Communion laïque : c'étoit autrefois
une efpece de châtiment pour les clercs qui
• avoienr commis quelque faute , que d'ê-
tre réduits à la communion des laïques ,
c'eft-à-dire à la communion fous une ieule
efpece.
Communion étrangère , étoit auffi un
châtiment de même nature , quoique fous
un nom différent , auquel les canons con-
damnoient fouvent les évêques & les clercs.
Cette peine n*étoit ni une excommunication,
ni une dépofition , mais une efpece de fuf-
penfe de fondions de Pordre , avec la perte
du rang que l'on tenoit. Ce nom de commu-
C O M ' 70J
nion étrangère vient de ce qu'on n'accordoit
la communion à ces clercs , que comme on la
donnoit aux clercs étran^rs. Si un prê-
tre étoit réduit à la communion étrangère ,
il avoit le dernier rang parmi les prêtres , &
avant les diacres , comme l'auroit eu un
prêtre étranger ; & ainfi des diacres & dos
fous-diacres. Le fécond concile d'Agde
veut qu'un clerc qui refufe de fréquenter
l'églife 5 foit réduit à la communion étran-
gère.
Communion, dans la Litkurgie ,e([h
partie de la mciTe où le prêtre prend &con-
fume le corps Se le ikng de N. S. J. C. con-
facré fous les efpeces du pain Se du vin. Ce
terme fe prend auffi pour le moment où
l'on adminiure aux fidèles le facrement de
l'euchariilie. On dit en ce fens , la mejfe ejî à
la Communion.
Communion fe dit auffi de l'antienne
que récite le prêtre après avoir pris les ablu-
tions ,'Sc avant les dernières oraifons qu'on
nomme pojî-communicn. V, Post-commu-
nion. (G)
Communion, f. f. {Jurifp.) fe prend
quelquefois pour fociéié de biens entre toutes
fortes de perfonnes ; c'efl fous ce nom qu'elle
eft le plus'connue dans les deux Bourgognes.
C'eft une maxime en droit , que in commu-
nione nemo invitus detinetur ; cod. lib. JJI y
tit. xxxvij y /. 5. Dans quelques provinces ,
comme dans les deux Bourgognes , la com-
munauté de biens entre mari Si femme n'eft
guère connue que fous le terme de commu-
nion. OnÇe (ertaulli quelquefois de ce même
terme en Bourgogne , pour déiigner la por-
tion de la dot qui entre en communauté :
enfin c'efè le nom que l'on donne aux aiîo-
ciations qui ont lieu en certaines provinces
entre toutes fortes de perfonnes, &: fîngulié-
rement entre main-mortables. Qe.x.ttcomnm.-
nion entre main-mortables efl une efpece de
fociété qui a fes règles particulières ; elle doit
être de tous biens ; elle fe contracte expref-
fément ou tacitement. La communion tacite
eft celle qui fe contradbe par le fèul fait, par
le mélange des biens Si la demeure com-
mune par an Se jour. Cette communiontacite
a lieu entre le père Se les enfans main-morta-
bles , Se entre les enfans de l'un des commu-
niers décédé Se les autres communiers fur\à-
vans. Si les enfans font mineurs Se que la
704 C O M
contipuation de communion leur (oit one-
reufe , ils foi^ rcftiruables dans la cou-
tume de Nivernois. La communion tacite
a lieu entre les père &c mère & leurs en-
fans mariés lorfqu'ils contiiiuent de de-
meurer avec eux par an & jour , à moins
qu'il n'y ait quelque ade à ce contrai-
re ; en Bourgogne la communion n'a pas
lieu dans ce cas. La communion par con-
vention exprelle fe peut contrafter entre
toutes fortes de perfonnes capables de con-
tradler , foit parens entr'eux ou étrangers ,
foit avec une perfonne franche ou avec
un main-morta'ole i ils n'ont même pas be-
foin pour cet effet du confentement du fei-
gneur de la main-morte. Cependant la
coutume de Bourgogne veut que les com-
muniers qui fe font féparés ne puiîfent fe
remettre en communion fans le confente-
ment du feigneur ; mais cette difpofition
exorbitante du droit commun doit être
renfermée dans ce cas particulier. Il faut
auffi excepter les communions qui ne fe-
roient contradbécs qu'en fraude du fei-
gneur , & pour le fruftrer d'une fucceilion
qui lui feroit échue. Le fils émancipé peut
contracter une communion expjefle avec
fon père , & la femme de ce fils parti-
cipe à cette fociété ; mais les mineurs ne
peêvent contrarier aucune nouvelle com-
munion , foit exprefle ou tacite. Pour que
l?s main-mortables foient en communion
de biens à l'effet d'exclure le feigneur de
fon droit d'échute , il ne fufifit pas qu'ils
fe communiquent tous leurs revenus &
le produit de leur travail , il faut de plus
qu'ils demeurent enfemble , & qu'ils aient
un même pain & un même feu. L'ab-
fence d'un des communiers ne rompt point
la Communion , tant qu'il n'a point pris
aÉleurs d'établiflement pour perpétuelle de-
meure. L'émancipation exprefle ou tacite
ne rompt pas non plus la communion du
père avec le fils , à moins qu'il n'y ait
habitation féparée i & une féparation vo-
lontaire , ou que le père en mariant fon
fils ait fouffert que celui-ci ait ftipulc une
communauté pr.rtiCuHere de biens entre
lut & fa femme. L'habitation féparée rompt
auflî la communion entre les héritiers ,
foit directs ou collatéraux : la vente &
le partage produifent auifi le même cftet
C O M
Cette matière efc amplement traitée par
M. le préfident Bouhier , en fes oi>Jerva-
, tions fur la coutume de -Bourgogne , ar-
ticle Ixix , où l'on trouvera encore beaucoup
d'autres queftions qui y ont rapport. Voyez
aujfi CoqiiWli: fur Nivernois , ch. viij , §, 7 ;
Dunod 5 de la msin-morte , ch. iij ,Jecl. î ,
p. 77- C-^)
COMMUT-ATION , fubft. f. (Ajlron.)
V angle de commutation efl: la diftance entre
le véritable lieu du foleil vu de la terre , &
le lieu d'une planète réduit à 1 ecliptique.
Voyci Lieu.
Ainfi l'angle ESR( Plane. d'Aflron.fig.
%€.) qui a pour bafe la diil:ance entre le
vrai lieu du foleil S vu de la Terre en Q ,
& celui d'une planète réduit à l'écliptique en
R , Q^ l'angle de commutation.
C'efl pourquoi on trouve Y angle de com-
mutation en foufîrayant la longitude du fb-
ieil , de la longitude héliocentrlque de la
planète , ou au contraire. Voy. Héliocen-
T RI QUE. Harris & Chambers. ( O)
Commutation de peine, {Jurifprud.)
efl le changement qui fe fiit d'une peine af-
fliélive à laquelle un criminel a été condam-
né , en une moindre peine ; par exemple ,
lorfqu'au Hsu d'une peine qui emportoit la
mort naturelle , on ordonne que le condamne
fubira feulement la peine des galères ou du
bannifleKient , foit perpétuel ou à temps ,
ou qu'il gardera prifon , ou enfin qu'il fubira
quelque peine pécuniaire.
Cette commutation £^e/7ei/zene(epeut faire
que par l'autorité du prince , en obtenant de
la part du condamné des lettres en la grande
chancellerie , portant commutation de veine ^
& ces lettres , pour avoir leur exécution i
doivent être entérinées.
La Commutation de peine ne donne point
atteinte au jugement de condamnation, de '
forte que le condamné ne recouvre point la
vie civile , fi le jugement efl de nature à la
lui faire perdre ; il n'efl pas non plus relevé
de l'infamie , ce n'efl que la peine corporelle
qui efl adoucie. Fojc:^ Anne robert, Uv. II y
cfiap. XV ; ordonnance d'Henri II , de 25^9,
art. 7 ; Louet & Brodeau , lett. Q , n. 8 ;
Maynard , Uv, VIIT, chap. xlv & xlvj. Ferre-
rius ifur la quellion îjg de Guypape ; Bou-
chel , en fa bibliothèque , au mot commuta ,
tion.i^A)
COMMUTATIVE ,
C O M C O M
COMMUTATIVE, {Jurifpr.) Voyei de modération pour la refufe
Justice commutative.
COMNENE (IsAAc), Hift. du Sas-
Empire , d'une des plus illuftres familles de
PEmpire , fut placé fur le trône de Conftan-
tinoplc en 1059 , par une fa<5tion qui obli-
gea Michel-lc-viewx à en defecndre pour
embrafïèr la vie monaftique. Le patriarche
de Conftanrinople qui avoir eu le plus de
parc à cette révolution , fit la trifte expé-
rience que l'ambitieux qui profite de la
trahifon , en punit fouvent Pauteur : au lieu
de jouir de la confidération ôc du crédit ^
dont il s'étoit flatté , il fut chalïc de Ton
liège ôc envoyé en exil avec toute (a fa-
mille. Comnene , également fait pour la
guerre & les affaires , avoir l'ame élevée &
capable d'embrafl,r tous les objets. Les
envieux de (a gloire ne lui conteftoient
point d être le plus gra'nd capitaine de Ton
ïiecle } mais l'éclat de fes vertus fut un peu
obfcurci par un orgueil altier qui le fit
détefter par ceux même qui étoient forcés
de l'admirer. Tous les hiftoriens font Péloge
de fa chafteté ; ils racontent quêtant
éloigné de l'impératrice , il fut attaqué
d'une maladie occafionée par fon tempé-
rament trop brûlant : les médecins qu'il
confulta , décidèrent qu'il ne pouvoit iau-
ver fa vie que par un commerce charnel
avec une femme , ou qu'en fe fbumettant à
une mutilation douloureufe qui le mettroit
dans l'impuiflance d'avoir des enfans. Il
confentit à ceflèr d'être homme en difant :
Faites Vopcration , fans la chajïeté Von ne
peut entrer dans le royaume du ciel ; mais
Von peut y arriver fans avoir des enfans.
Ce prince politique fe rendit odieux aux
moines , qu'il dépouilla de leurs riche dès
Superflues , pour les réduire au nécefTaire
pour vivre dans l'état de pauvreté qu'ils
avoient embrafTé. Il ne fit ni rebelles , ni
murmurateurs , parce que fes mœurs , con-
formes aux maximes évangéliques , ne don-
noient aucune prife à la cenfure. L'ambition
l'avoit placé fur un trône ufurpé , il eut
des remords qui empoifonnerent le refïe de
fa vie. Ce fut pour expier fa faute , qu'il
forma le projet d'embrafler là vie monaf-
tique^ : une colique dont il fut attaqué en
chafîànt , hâta l'exécution de ce projet. Il
offrit la couronne à fon frère, qui eut afîez
Tome VIIJ.
705
il fixa fon
choix fur Conflantin Ducas, à qui il re-
commanda fa famille avant de dépofer la
pourpre , dont il revêtit lui-même Ion fuc-
cefleur. Dès qu'il eut fait fon abdication ,
il fe retira dans ua.monaftere , où il donna
l'exemple de routes les vertus évangéliques.
Sa femme & fa fille fe firent rcligieufes. Il
mourut peu de temps après.
CoMNENE (Alexis) , fils de l'empereur
Ifaac , étoit âgé de trente-fept ans , lorf-
qu'après l'abdication forcée de Nicéphore
le botoniate , il parvint à l'empire. Il
fignala les premiers jours de fon règne par
des vidoires fur les Turcs ; mais il ne fut pas
au fil heureux contre les Normands qui ,
fous la conduite de Robert- Guifcard , duc
de la Fouille , lui enlevèrent plufîcurs villes
confidérables. Tandis qu'il étoit acharné
contre cette race de conquérans , les Tar-
tares & les Comans faifoient des courfes
julqu'aux portes de Conftantinople. Les
Turcs établifloient leur domination dans
l'orient ; ôc aufïi puiflàns fur mer que fur
terre , ils fe promcttoient l'empire du
monde. Alexis , trop foible contre tant d'en-
nemis , implora l'aflift:ancc des princes
d'occident. Le pape Urbain II publia une
croifade , ôc trois cents mille hommes mar-
chèrent vers la Paleftinc. Des alliés fi nom-
breux parurent plus redoutables à Alexi»
que fes anciens ennemis. Leur conduite
impérieufe fit connoîtrc qu'ils étoient ve-
nus moins pour défendre les Grecs que
pour les opprimer. Cette multitude fans
frein ôc fans difcipline , défola tous les
lieux de fon pafTage , Se quiconque ofa fe
plaindre , fut traité en ennemi. Ils avoient
promis de rendre aux Grecs les villes qu'ils
enleveroient aux infidèles; mais ces con-
quérans parjures, violèrent la faintcté de
leur ferment. Les principaux fèigneurs
d'occident s'érigèrent en princes indépen-
dans , ôc l'empire des Grecs ne fut plus
qu'un trône m-Utilé , qu'ils avoient dé-
pouillé de fes rameaux.
Alexis , aufïi humilié de leur hauteur
infultante que de leurs parjures, employa
la force ôc les artifices pour s'oppofer à
leurs ufurpations. Les croifés , qui avoient
tout enfreint , fe plaignirent de la perfidie
des Grecs qui ne vouloient pas être leurs
Tttt
-joC C O M
efclaves. Les Grecs , à leur tour , firent ,
poiur fe juftifier, un tableau affreux, mais
reflemblant, des brigandages des occiden-
taux qui , la croix fur leurs habits , violoient
les femmes & malfacroient les enfans. Alexis
accablé également par Tes alliés & par les in-
fidèles , ne put être que malheureux dans
la guerre 5 mais on ne put lui contefter
les talens d*un prince véritablement né
pour occuper le trône. Son malheur fut de
naître d^ns un fiecle où il y avoir plus de
férocité que de grandeur d'ame , plus de
perfidie que de candeur. Il fit éclater fa
bienfaifance & fon amour pour l'humanité ,
p;ir la fagciîè de fes établlflèmens : il fonda
des hofpices où les orphelins de Tun &
Tautre fexe étoient élevés aux dépens du
tréfor public. Indulgent pour les coupa-
bles , il eut tant d'horreur pour les fup-
plices, qu'il kifla fouvent la licence impu-
nie. Sa clémence fut taxée de foiblefle par
un peuple familiarifé avec les empoifonne-
mens & les afifaflinats. Cette humanité, qui
fait plutôt l'éloge de (on cœur que de fa
politique , eft la feule foiblefle que l'hiftoire
puifle lui reprocher. Ce prince , ami des
iavans , & favant lui-même , en eût été le
prote<5teur , fi les dépenfes de la guerre
n'euilènt épuifé fes tréfors. Il tomba dans
une maladie de langueur qui l'emporta
^ans fa foixante & dixième année : il avoit
régné trente-trois ans.
CoMNENE (Calo-Jean), fils d'Alexis ,
lui fuccéda en m 6. Irène fa mère , qui
avoit des fentimens de prédilection , em-
jîloya de criminelles intrigues pour placer
iur le trône fon gendre Nicéphore Briene.
Cette mère dénaturée paya des aiTafifuis qui
furent découverts avant d'exécuter leur
crime. On prétend que ce Nicéphore prellé
par fes remords , s'oppofa lui-même à cette
atrocité dont il auroit retiré tout le fruit.
Cette modération le fit tomber dans le rné-
pris de fa femme , qui étoit plus ambitieufe
que lui. Calo- Jean , héritier de la clémence
de fon père , fut aflez maître de lui pour
ne punir les çonfpirateurs que par la con-
fifcation de leurs biens : il crut que les mé-
chans étoient fuffifamment châtiés quand
ils étoient réduits à l'impuilîànce de nuire.
Il eut en fuite des guerres à foutenir contre
les Turcs j les Pcrfes, les Servieusi &; les
C O M
Patzinaces , qu'il vainquit dans plufieurs
combats fans pouvoir les détruire. Des
ennemis plus redoutables profitèrent de
fes embarras pour l'attaquer. Les François
ligués avec les Vénitiens , lui enlevèrent
les îles de Samos , d'Andros , de Rhodes
&: de Lesbos. Ce prince, qui avoit trop
d'ennemis pour faire la guerre avec gloire,
avoit toute la capacité d'un grand capitaine ,
comme il en avoit la valeur : fa palTion pour
la chaflè lui devint funefte. Un jour qu'il
pourfuivoit un cerf dans une forêt de Ci-
îicie , une flèche empoifonnée lui perça la
main : les médeci«is furent d'avis de la
couper , & affurerent que c'étoit le feul
moyen de confervcr fa vie : Calo- Jean leur
répondit avec une intrépidité tranquille ,
qu'il préférait la mort à cette mutilation ,
6" qu'il ne convenait pas à un empereur de.
tenir d'une main les*rénes du gouvernement.
Le poifon fit de prompts ravages. Alors,
fentant approcher fa fin , il fit venir les
officiers , &: nomma en leur préfencc pour
fon fuccefièur le plus jeune de fes fils, en
difànt : que fi fes frères avaient fur lui le privi-
lège d*ainejje, il leur étoit fupérieur en courage
& en capacité pour les affaires. Ce choix dicté
par fon amour pour fes fujets, fut généra-
lement applaudi , 6c fut le dernier de Çts.
bienfaits. Il mourut en 1145, âgé de foi-
xante & fix ans : ce fut le plus grand em-
pereur de la maifon des Comnenes. Les
occidentaux , accoutumés à défigurer les
traits des princes Grecs , ont refpeété la
mémoire.
CoMNENE (Manuel ou Emanuel),
étoit le plus jeune des fils de Calo- Jean ,
dont quelques-uns prétendent qu'il étoit
le frère. Les penchans heureux qu'il ma-
nifefta dans fon enfance , déterminèrent fon
père à le choifir pour foii fuccefleur.
Conrad, empereur d'Allemagne, rechercha
fon alliance contre Roger , roi de Sicile ,
leur ennemi commun. Ce prince Normand
détruifoit la domination Allemande dans
Pltalie, tandis que fes flottes ravageoient
toutes les côtes' de la Grèce. Conrad 81C
Manuel réuniient enfuitc leurs forces pour
chaflèr les Mufulmnns de la Paleftine. Ils
eurent d'abord quelques fuccès, mais la
jalouiîe du commandement en fit d'impla-
cables ennemis» Manuel qui étoit au milieu
C O M
de (es états , ne vouloit point avoir un
maître dans Ton allié. Conrad qui avoir des
forces fupérieures , ne reconnoiflbit point
d'égal : il eut bientôt à fe repentir de cette
hauteur imprudente. Son armée , preflée par
la famine , n'avoir d'autres reflburces que
dans la générolité de Manuel , il fallut fe
dépouiller de Ton orgueil 8c defcendre à la
prière. Le prince Grec , pour fe venger des
humiliations qu'il avoit elTuyées , parut
compatir au malheur de fon allié : il lui
fournit des farines mêlées de plâtre , dont
le foldat fe ralTafia avec avidité. Ce fecours
meurtrier fît périr plus de la moitié de l'ar-
mée Allemande. Cette perfidie l'a rendu
odieux à tous les peuples d'occident ; mais
les Grecs le juftifient par la nécelTîté de fe
délivrer de fes hôtes altiers , qui le tenoient
dans l'abaifiement. L^ politique luiconfeil-
loit de les affoiblir pour n'être pas leur
efclave. Il ufa quelque temps après de la
même perfidie envers les François , qui
croyoient avoir droit d'enlever les femmes ,
ôc de maltraiter les maris dans tous les lieux
dont ils étoient les maîtres. Les'lieutenans
de Roger , roi de Sicile , étendirent leurs
conquêtes j ufques fous les murs de Conftan-
tinople. Ils lançoient par dérifion des flèches
d'or & d'argent dans les jardins de l'empe-
reur. Les Vénitiens lui envoyèrent des am-
baffadeurs pour régler d'anciennes préten-
tions. Manuel, fans refpeét pour leur carac-
tère , les fit mettre en prifon : cet attentat ne
refta point impuni. Les Vénitiens portèrent
le fer & la flamme dans (es états , & il n'ob-
tint la paix qu'en fe foumettant à leur payer
un tribut annuel. Ce prince , qu'on ne pour-
roit jufl:ifier de perfidie , fi ce crime n'eût
pas été celui de fon fiecle barbare , mena
fur le trône la vie d'un moine auftere. Sa
crédulité fuperflitieufe étouffa en lui le
germe des talens & du génie. Il eut cette
foi morte de fl:érile qui rétrécit Pefprit fans
excirer à la vertu. Il mourut dans fon lit ,
après un règne de trente-huit ans.
CoMNENE (Alexis), fils de Manuel,
n^avoit que douze ans , lorfque la mort de
fon pcre le rendit pofleffeur de l'empire. Sa
tutelle fut confiée à Andronic Comnene , Ion
parent , qui n'ufa de ce titre que pour dé-
pouiller fon pupile. Ce prince ambitieux
le fit d'abord afiocier à l'empire : ce premier
C O M 707
pas l'enhardit à commettre un plus grand
crime. Quelque temps après , il fit maflàcrer
le jeune prince , dont le corps fut jeté dans
la mer,. afin qu'il ne reftât fur la terre au-
cun vertige de cette atrocité. Il ne régna que
trois ans.
Comnene (Andronic')» fils d'lfaac&
neveu de Calo-Jean , monta fur le trône de
Conftantinople après la mort du jeune
Alexis , qu'il avoit fait empoifonner. Guil-
laume , roi de Sicile , lui déclara la guerre
fous prétexte de venger le meurtre du prince
infortuné. Andronic , après un mélange de
fuccès ôc de revers , fut vaincu ôc fait pri-
fonnier. Le vainqueur , avant de l'envoyer
au fupplice , lui fit efluyer les plus cruels
outrages. Il ordonna de lui crever un œil
& de lui laiffer l'autre , afin qu'il fût le
fpeétateur des humiliations auxquelles il
étoit condamné. Ce rafinement de cruauté
déshonore fon ennemi , qui le fit promener
dans les rues de Conftantinople , monté fur
un âne , la tête tournée en arrière , tenant
dans fa main la queue de l'animal pour lui
fervir de fceptrej ôc au lieu de diadème , ou
ceignit fon front d'une botte d'ail. Les fem-
mes , infultant à fon malheur , vomifibient
contre lui les plus horribles imprécations ;
les enfans lui jetoicnt les plus fales ordures
au vifagc. Son plus grand fupplice fut de
n'exciter aucun fentimerit de pitié. Il fut en-
fuite étranglé. Le peuple furieux mit fon
cadavre en pièces. Les femmes furent les
plus acharnées à lui porter des coups. Il
n'étoit que dans la féconde année de fon
règne, qui fut encore trop long pour le bon-
heur des peuples. La famille des Comnenes
fut éteinte par fà mort. ( T-N. )
COMODI, f m. {Hijl. nat. Botamq.)
Les Brames nomment ainfi une plante du.
Malabar que Van-Rheede a fait graver,
avec la plupart de fes détails , dans fon Hor-
tus Malabaricus , volume. II,plancheLlf pag.
J^ , fous le nom de nir carambu ; c'efl le
jujjicea repens , floribus pentapatalis decan-
driSfpedunculisfoliolongioribusde M. Linné,
dans fon Syjlcma naturœ , édition in~î% ,
imprimée en 1 767 , page i-SJ.
C'eft une plante vivace , à tige cylindri-
que , rampante , de trois à quatre pies de
longueur , fur trois à trois lignes & demie
de diamètre , ramifiée en nombre de
T 1 1 1* z
7o8 C O M
branches alternes , cylindriques , (impies ,
relevées , fongueufes , fiftuleufès , lifles ,
luifances , verd-blanchârres du côté expofé
à l'ombre , ôc rougeâtres du côté expofé au
foleil.
Au delïbus de chaque branche fort un
faifceau de racines fibreufes, blanchâtres &
rougeâtres , aqueufes & fiftuleufès, longues
d'un pouce , accompagnées de trois ou qua-
tre tubercules ovoïdes , longs d'un à deux
pouces , deux à iîx fois moins larges.
Les feuilles font difpofées alternative-
ment &c circulairemcnt le long des tiges
elliptiques , obtufes à Vexrrémité , pointues
à leur origine, une à deux fois plus longues
que larges, entières, tendres, verd-bru-
nes , luifantes , relevées en deflbus d'une
côte ramifiée de trois à quatre paires de ner-
vures alternes , & attachées aux tiges fans
pédicule , fous un angle de quarante-cinq
degrés , à des diftances égales , à-peu-près ,
à la moitié de leur longueur.
De l'aiflelle de chacune des feuilles fupé-
rieures , fort une fleur une fois plus lon-
gue qu'elles , y compris le péduncule qui
les porte ôc qui eft prefque égal à leur lon-
gueur.
Chaque fleur eft: hermaphrodite , poly-
pétale, complète, régulière, pofée au delfus
de l'ovaire. Elle confifte en un ovaire cy-
Mndrique , long dehuit à neuf lignes, deux
à. trois fois moins large i en un calice verd ,
à cinq feuilles triangulaires ; en une corolle
trois fois plus longue , à cinq pétales orbi-
culaires blancs , à racine jaune , ouverte en
étoiled'^un pouce &c un quart de diamètre, &
en dix étaminesaufli courtes, verd-claires ,
à anthères jaunes. Le ftyle de Povaire s'élève
un peu plus haut que les étamines , & eft
terminé par un ftigmate cubique jaune ,
marqué de cinq filions rayçnnans en étoile,
' L'ovaire en mûriiTant devient une capfule
ovoïde, longue d'un pouce, deux fois moins
large , à cinq loges , ne s'ouvrant point , &
contenant un grand nombre de graines
ovoïdes , longues d'une ligne , blanchâtres.
Culture. Le comodi croît au Malabar , au
bord des rivières , à une petite profondeur
fous les eaux.
Ufagcs. Les Malabares n'en font aucun
ufage.
Remarque. Lc comodi fait un genre parti-
C O xM
culier de plante , qui fe range naturellement
dans la famille des onagres , où nous l'avons
placé . Voye-;^ nos familles des plantes , vol. Il,
pag. 8§.iM, Adanson. )
COMORE , ( Géog. mod.) grande ville
de la haute Hongrie , capitale d'un comté
de même nom , dans une ile formée par
le Danube. Long. ^6 ; lat. 47 , 50.
COMORIN ( LE Cap ) , Gêog. mod. pro-
montoire de l'Inde , en deçà du Gange.
COMMORES (les îles), Géog. mod.
îles de la mer des Indes , dans le canal de
Mozambique , entre le Zanguebar &c l'île
de Madagafcar.
COMPACT , iJurifpr.) on appelle
ainfi un accord ou pa6Ve , compaclum , fait
entre les cardinaux avant l'éleétion de
Paul IV , que celui qui ieroit élu ne pour-
roit déroger aux induits des cardinaux par
quelques paroles & en quelque manière
que ce fut. Paul IV , après fon élection ,
ratifia , en i ^55 , cet accord, par une bulle
fameufe , appellée bulle du compaâ ; elle
fut regiftrée au grand-confeil le 1 3 février
15" 5 8, en 'conféquence àts lettres patentes
du roi Henri II, du 1 6 janvier précédent.
Les articles principaux de ce compacî fonr
1°. que le nombre des cardinaux fera ré-
duit par mort à 40 j que deux frères ,
ni oncle & neveu , ne pourront être
cardinaux en même temps. i°. Qu'ils pour-
ront difpofer de leurs biens par donation
ou teftiament ; èc que s'ils meurent intef-
tats , leurs biens ne feront point appliqués
à la chambre apoftolique , mais appartien-
dront à leurs héritiers. 3°. Qu'il fera pourvu
aux cardinaux pauvres , de biens ou de
penfions jufqu'à 6coo ducats de rente.
4°. Qu'ils feront exempts de toutes décimes
& gabelles dans l'état eccléfiaftique (fous
ce mot gabelles , on entend ici toutes fortes
d'impofîtions). 5°. Qu'ils pourront con-
férer librement tous bénéfices étant de leur
collation , excepté la réferve continuas fami-
Uaritatis du pape ; & enfin que les papes
ne pourront, au préjudice de la collation
des cardinaux , déroger à la règle des io
jours , feu de injirmis rjjignantibus , qui
eft la dix-huitieme règle de chancellerie ,
ni déroger à aucun des induits accordés
aux cardinaux ad injlantiam regum & prin-
dpum. Voyez la pratique de cour de Rome >
C O M
de Cartel , tome I y page ^4 ù fiiiv. Brillon , •
dicî. des arrêts , au mot Bulle , n. 2^. i^A)
Compact de l'alternative , eft un
accord qui fut fait entre Martin V &
Charles VI pour ufer en France de la règle
de la chancellerie dite de \ alternative , qui
avoit été faite par Innocent VII dès 1 404 ,
qui établit Talternative pour la collation
des bénéfices entre le pape & les évc-
ques, en faveur de la réiidence. Enfuite
du compaâ de Martin V , il y eut une
ordonnance de Charles VI en vertu de
laquelle Pon commença à ufer de l'alter-
native pour cinq ans. V'oyei^ le tr. des
mat. bénéfic. de Fuet , liv. IV , ch. vj , p.
434' (^)
Compact Breton, eft un accord fait
entre le pape & le S. (iege d'une part ,
& tous les coliateurs & la nation bretonne
d'autre part , pour la partition des mois par
rapport à la collation des bénéfices. Suivant
cet accord, les coliateurs ordinaires ont
droit de conférer les bénéfices qui vaquent
pendant quatre mois de Tannée , qui font
le^ derniers de chaque quartier , favoir ,
mars, juin, feptembre &c décembre, &
les huit autres mois appartiennent au pape ,
lequel eft obligé de conférer dans les 6 mois
de la vacance , fuivant le concile de Latran ;
& au moyen de cet accord il s'eft départi
du droit de concours & de prévention.
Quelques-uns ont prétendu que ce fut au
concile de Conftance que fut dreflé ce
compacl ; mais M. le préfident Henault
tient qu'on doit rapporter cet arrange-
ment à une bulle d'Eugène IV , & il eft
certain que ce n'eft point en vertu de h.
règle de menfibus que le pape jouit en
Bretagne des mois réfervés; c'eft en vertu
d'un édit de Henri II du 14 juin 2^4^,
qui ordonne , entr'autres chofes , que les
réferves apoftoliques ôc autres règles de
chancellerie foient reçues en Bretagne ; ce
qu'il confirma par différentes déclarations
des ^9 juillet 1$^^^ î8 avril & %Q oSobre
Les coliateurs ordmaires de Bretagne ,
autres que les Evêques, n'ont fuivant le
compaâ que quatre mois pour conférer
les bénéfices vacans per obitum , (ans
pouvoir être prévenus -, les huit autres
mois appartiennent au pape : mais les cvê-
C O M 70^
ques qui ont les iîx mois de Falternative ,
ont en outre ces quatre mois , dont deux ,
favoir juin & décembre , font partie de
leurs fix mois d'alternative; & les deux
autres , qui font mars & feptembre , en
vertu du compaâ; ce qui fait en tout pour
eux huit mois.
On tient en Bretagne que les évéques
peuvent être prévenus dans les deux mois
qui leur font accordés par le compaâ oa
partition , outres leurs fix mois d'alternative.
Lorfqu'un fiege épifcopal en Bretagne
eft vacant , le chapitre ne peut pas conférer
les bénéfices qui viennent à vaquer per
obitum y dans les mois de l'alternative de
l'évêque , & qui ne font pas fujets à la
régale ; mais il peut conférer ceux dont la
collation auroit appartenu à Tévêque par le
compaâ OM partition des mois pendant les
quatre mois. {A)
COMPACTE , adj. en Fhyfique figni-
fie un corps dcnfe , pefant , dont les par-
ties font fort ferrées , & dont les pores
font petits ou en petite quantité , au moins
par rapport à un autre corps. Koje:^^ Corps ,
Pore , Densité , &c:.
Les métaux les plus pelàns , comme Tor
& le plomb , font les plus compaâes , c'eft-
à-dire , font ceux qui ont le plus de mitiere
propre.
Le mot compaâe n'eft proprement qu'un
terme relatif; car il n''y a point de corps
abfolument compaâe , puifqu'il n'y en a
point qui ne renferme beaucoup plus de po-
res que de parties folides. Voj. Pore. ( O)
COMPAGNE DE LA CYCLOIDE,
( Géom. ) voyf:^^ Trochoïde. ( O)
^COMPAGNIE, f. f. {Gram,) fe dit
en général d'une aftociation libre de plu-
iîcurs particuliers , qui ont un ou plusieurs
objets communs. Il y a des aftociations de
perfonnes religieufes, militaires , com-
merçantes , ùc. ce qui forme plufieurs
fortes de compagnies différentes par leur
objet.
Compagnie , c'eft, dsaisV Art militaire ,
un certain nombre de gens de guerre fous
la conduite d'un chef appelle capitaine. Les
régimens font compofés de compagnies.
Il y à plufieurs compagnies en France qui
ne font point' enrégimentées , ou qui ne
compoleot poiiit de régimens; telles foot
7IO C O M C O M
celles des grcnadiers-à -cheval:, des gardes- le cruel, roi de Caftille , en faveur du
du-corps , des gendarmes & chevaux-légers
de la garde , des moufquetaires , des gen-
darmes , des compagnies d'ordonnance , ùc.
Voyei^^ toutes ces compagnies aux articles qui
leur conviennent , c'eft-à-dire, vojc;(;Gre-
NADIERS-A-CHEVAL , GaRDE-DU-CORPS ,
Compagnie d^Ordonnance ; c'étoit
dans Torigine quinze compagnies de gendar-
' mes créés par Charles VII de cent hommes
d'armes chacune. Voye:^ Ho"mme d'armes.
Ces compagnies , dont plufieurs princes
& grands feigneurs croient capitaines, ont
fubiiftc jufque vers le temps de la paix des
Pyrénées fous le règne de Louis XIV. Cel-
les des feigneurs furent alors fuppriméesj
on ne confèrva que celles des princes.
Le roi eft aujourd'hui capitaine de toutes
les compagnies de gendarmerie , & les com-
manda ns de ces compagnies n'ont ^ que le
titre de capitaine-lieutenant. Elles font fort
différentes des anciennes compagnies d'or-
donnance ; cependant, pour diflinguer les
gendarmes qui les compofent , des gendar-
mes de la garde du roi , on les appelle or-
dinairement gendarmes des compagnies d'or-
donnance. Fbje:(^ Gendarme ù Gendar-
merie.
Compagnies- On a aînlî appelle autre-
fois en France des efpeces de troupes de
brigands , que les princes prenoient à leur
fblde dans le befoin , pour s'en fervir dans
les armées.
Ces troupes n^étoient ni angîoifes ni fran-
çoifes , mais mélée^de diverfes nations. On
leur donne dans l'hiftoire divers noms ,
tantôt on les appelle cotteraux*^ coterelli ,
tantôt routiers , ruptarii , rutarii , & tantôt
Brabançons , Brabantiones. Nos anciens hif^
toriens françois appelloient ces troupes les
routes ou les compagnies.
Cette milice, dont le P. Daniel croit que
Philippe Auguftc fut le premier qui com-
mença à fe fervir, fubiifta jufqu'au règne
deCharles V. Ce prince furnommé le Sage,
6c dont en effet la fagcflè fut le principal
caradtere , trouva le moyen de délivrer la
France de ces brigands par l'entremifc de
Bertrand du Guefclin. Ce feigneur engagea
les compagnies ôc les routes à le fuivre en
comte de Tranftamare frère bâtard de ce
prince. Du Guefclin réuffit fi bien , qu'il
détrôna Pierre le cruel, & mit fur Iç
trône Henri de Tranftamare. Les ccm--
pagnies dans les deux expéditions d'Efpa-
gne périrent prefque toutes ou fe dilTipe-
rent; & le roi donna de fi bons ordres
par-tout, qu'en peu d'années elles furent
entièrement exterminées en France. Le P.
Daniel , hijioire de la milice françoife.
(Q)
Compagnie , (jurifpr.) on appelle com-
pagnies de jujiice , les tribunaux qui font
corhpofés de plufieurs juges. Ils ne fe qua-
lifient pas de compagnie dans les jugemens ;
les cours fbuveraines ufent du terme de
cour ^ Se les juges inférieurs du terme
colleétif yzow^. Mais dans les délibérations
qui regardent les affaires particulières du
tribunal, de lorfqu'il s'agit de cérémonies,
les tribunaux , fouverains ou inférieurs ,
fe qualifient de compagnie ; ils en ufent de
même pour certains arrêtés concernant leur
difcipline ou leur jurifprudence; ces arrê-
tés portent que la compagnie a arrêté , &c.
{A)
Compagnies semestres , font des cours
ou autres corps de juftice , dont les offi-
ciers font partagés en deux colonnes , qui
fervent chacune alternativement pendant
fix mois de l'année. Voy. Semestres. (^)
Compagnies souveraines ou Cours
SUPÉRIEURES , font cellcs qui , fous le nom
& l'autorité du roi, jugent fouverainement
& fans appel dans tous les cas , de ma-
nière qu'elles ne reconnoifiènt point de ju-
ges fupérieurs auxquels elles refiortiflent . j
tels font les parlemens , le grand- confèil ,
les chambres des comptes , cours des aides ;
cours des monnoiesj les confeils fupé-
rieurs , ùc.
Les préfidiaux ne font pas des compas
gnies fouver aines , quoiqu'ils jugent en der-
nier refîort au premier chef de l'édit ; parce
que leur pouvoir eft limité à certains ob-
jets. Voye-^ Loifeau , des feign. chap. iij,
n. Z^. (A)
Compagnie de Commerce : on entend
par ce mot une alïbciation formée pour
entreprendre , exercer ou conduire des 0^6-
Efpagne , pour aller faire la guerre à Pierre | rations quelconques de commerce»
C O M
Ces compagnies font de deux fortes , ou
particulières , ou privilégiées.
Les compagnies particulières font ordinai-
rement formées entre un petit nombre
d'individus, qui fourniflent chacun une
portion des fonds capitiiux , ou limplement
leurs confeils Ôc leur temps, c[uelquefois
le tout enfemble , à des conditions dont on
convient par le contrat d'ail'ociation. Ces
compagnies portent plus communément la
dénomination de fociétés. J^oye^ Société.
L'ufage a cependant confervé le nom de
compagnies , à des ailociations ou fociétés
particulières , lorfque les membres font en
grand nombre , les capitaux confidérables ,
de les entreprifes relevées , foit par leur rif-
que , foit par leur importance. Ces fortes
dt fociè tés-compagnies font le plus fbuvent
comportes de perfonnes de diverfes pro-
fcfîions , qui., peu entendues dans le com-
merce , confient la direction des entrepri-
fes à des aflbciés , ou à des commifïionnai-
res capables , fous un plan général. Quoi-
que les opérations de ces compagnies ne re-
çoivent aucune préférence publique fur les
opérations particulières , elles font cepen-
dant toujours regardées d'un œil mécontent
dans les places de commerce; parce que
toute concurrence diminue les bénéfices.
Mais cette raifon même doit les rendre
très-agréables à Pétat, dont le commerce
ne peut être étendu & perfcdionné que
par la concurrence des ncgocians.
Ces Compagnies font utiles aux commer-
çans , même en général ; parce qu'elles
étendent les lumières &: l'intérêt d'une na-
tion fur cette partie toujours enviée &
fouvent méprifée, quoiqu'elle foit l'unique
reflbrt de toutes les autres.
L'abondance de l'argent , le bas prix de
fon intérêt , le bon état du crédit public ,
l'accroiflement du luxe , tous fignes évidens
de la prolpériré publique , font l'épo-
que ordinaire de»ces fortes d'établifïemens :
ils contribuent à leur tour à cette proipé-
ritc , en mukipliant les divers genres d'oc-
cupation pour le peuple , fon aifance , fes
confommations , 6c eniin les revenus de
Pétat.
Il eft un cas cependant où ils pourroieni
être nuifibles -, c'ell lorfque les intérêts Ibnt
partagés en actions , qui fe négocient 5c fe
C O M 711
tranfportent fans autre formalité; par ce
moyen les étrangers peuvent éluder cette
loi fi fage , qui , dans les états policés, défend
d'ailbcier les étrangers non-naturalifés ou
njn - domicilias dans les armejien<". Les
peuples qui ont Pintérêt de l'argent à meil-
leur marché que leurs voifins , peuvent à
la faveur des adtions s'attirer de loin tout le
bénéfice du commerce de ces voifins,
quelquefois même le ruiner , fi c'efl leur
intérêt ; c'efl' yniquemeiit alors que les né-
gocians ont droit de fc plaindre. Autre
règle générale : tout ce qui peut être la.
mc'.iere d'un agiotage , eft dangereux dans
une nation qui paie l'intérêt de l'argent
plus cher que les aurf:res.
L'utilité que ces afîociations portent aux
intéreflés , eft bien plus équivoque que
celle qui en revient à l'état. Cependant il
eft injufte de fe prévenir contre tous les
projets, parce que le plus grand* nombre
de ceux qu'on a vu éclore en divers
temps , . a échoué. Les écueils ordinaires
font le défaut d'économie , inféparable des
grandes opérations ; les dépenfes faftueufes
en établiflèmens , avant d'avoir afiuré les
profits ; l'impatience de voir le gain ; le
dégoût précipité ; enfin la méfîntelligence.
La crédulité , fille de l'ignorance , eft im-
prudente; mais il eft inconféquent d'a-
bandonner une entreprifè qu'on favoit rif-
quable , uniquement parce que fes rifques
!e font déployés. La fortune femble pren-
dre plaifir à faire pafïer par des épreuves
ceux qui la follicitent ; fes largelfes ne
font point réfervées à ceux que rebutent
l'es premiers caprices.
Il eft quelques règles générales , dont
les gens qui ne font point au fait du com-
merce , & qui veulent s'y intérefïer ,
peuvent fe prémunir. 1°. Dans un temps
où les capitaux d'une nation fbnt augmen-
tés ^sî^s toutes les claHes du peuple , quoi-
qu'avec quelque difproportion entr'elles,
les genres de comvnerce qui ont élevé de
grandes fortunes, & qui foutiennent une
grande concurrence de négocians , ne pro-
curent jamais des profits bien confidéra-
bles ; plus cette concurrence augmente ,
plus le défavantage devient fenfible. z°. Il
eft imprudent d'employer dans des com-
* merces éloignés 6c rifquables , les capitaux
•^11 C O M
dont les rerenus ne font point fuperflus à la
fubfîftancei car fi les intérefles retirent
annuellement ou leurs bénéfices, ou fim-
plement leurs intérêts à un taux un peu
confidérable , les pertes qui peuvent (ur-
A'enir retombent immédiatement fur le capi-
tal j ce capital lui-même fe trouve quel-
quefois déjà diminué par les dépenfes ex-
traordinaires des premières années ; les opé-
rations languiflènt ou font timides ; le plan
projeté ne peut être rempli , & les béné-
fices feront certainement médiocres , même
avec du bonheur. 3°. Tout projet qui ne
préfente que des profits , eft drelTé par un
homme ou peu fage, ou peu iincere.
4°. Une excellente opération de commerce
crt celle où , fuivant le cours ordinaire des
événemens , les capitaux ne courent point
de rifquc. 5°. Le gain d'un commerce eft
prefque toujours proportionné à Pincerti-
tude du fuccès ; & Popération eft bonne ,
fi cette proportion eft bien claire. 6°. Le
choix des lu jets qui doivent être chargés
de la conduite d'une entreprife , eft le point
le plus effentiel à fon fuccès. Tel eft capa-
ble d'emibraller la totalité des vues , &c de
diriger celles de chaque opération particu-
lière à l'avantage commun , qui réullira
très-mal dans les détails ; l'aptitude à ceux-
ci marque du talent , mais louvent ne mar-
que que cela. On peut fans lavoir le com-
merce s'être enrichi par fon moyen j Ci les
loix n'étoient point chargées de formalités ,
un habile négociant feroit fùrement un bon
juge; il feroit dans tous les cas un grand
financier, mais parce qu'un homme fait
les loix , parce qu'il a bien adminiftré les
revenus publics , ou qu'il a beaucoup gagné
dans un genre de négoce , il ne s'enfuit pas
que fon jugement doive prévaloir dans
toutes les délibérations de commerce.
On n'a jamais vu tant de plans & de
projets de cette efpece , que depuis le re-
nouvellement de la paix ; & il eft; remar-
quable que prefque tous ont tourné leurs
vues vers Cadix , la Martinique , & Saint-
Domingue. Cela n'exigeoit pas une grande
habileté i & pour peu qu'on eijt voulu rai-
fonner ,ilétoit facile de prévoir le fort qu'ont
éprouvé les intéreftés. Il ena réfulté que beau-
coup plus de capitaux font fortis de ces com-
merces ^ qu'il n'en étoit entré d'excédans. s
C O M
Si l'on s'étoit occupé à découvrir de
nouvelles mines , qu'on eût établi de foli-
des faélories dans des villes moins con-
nues , comme à Naples , à Hambourg ; fi des
compagnies avoient employé de grands ca-
pitaux, fagement conduits dans le com-
merce de la Louifiane ou du Nord ; fi
elles avoient formé des entreprifes dans nos
Antilles qui en font fufceptibles , comme à
la Guadeloupe, à Cayenne , on eût bien-
tôt reconnu qu'il y a encore. plus de gran-
des fortunes lolides à faire dans les bran-
ches de commerce qui ne font pas ouver-
tes , qu'il n'en a été fait jufqu'à préfent.
Les moyens de fubfiftance pour le peuple Se
les reflburces des familles , euftent doublé
en moins de dix ans.
Ces détails ne feroiefit. peut-être pas
faits pour un dictionnaire ordinaire ; mais
le but de l'encyclopédie eft d'inftruire , &c
il eft important de difculper le commerce
des fautes de ceux qui l'ont entrepris.
Les compagnies ou communautés privi-
légiées , font celles qui ont reçu de l'état
un droit- ou des faveurs particulières pour
certaines entreprifes , à l'exclulion des au-
tres fujets. Elles ont commencé dans des
temps de barbarie & d'ignorance, où les
mers étoient couvertes de pirates , l'art de
la navigation groftfier 8c incertain , & où
l'ufàge des aflurances n'étoit- pas bien con-
nu. Alors il étoit néceftaire à ceux qui
tenoient la fortune au milieu de tant de
périls , de les diminuer en les partageant ,
de ie foutenir mutuellement , de de Ce réu-
nir en corps politique. L'avantage que les
états en retiroient , fit accorder des encou-
ragemens ôc une protection fpéciale à ces
corps ; enfuite les befoins de ces états &
l'avidité des marchands, perpétuèrent in-
fenfiblement ces privilèges , fous prétexte
que le commerce ne pouvoir fe faire autre-
ment.
Gc préjugé ne fe diffipa point entière-
ment à mefure que les peuples fe poli-
çoient , &c que les connoiflànces humaines
fe perfed:ionnoient ; parce qu'il eft plus
commode d'imiter que de raifomier : &
encore aujourd'hui bien des gens penfent
que, dans certains cas, il eft utile de rcf-
treindre la concurrence.
Un de ces cas particuliers que l'on cite,
eft
C OM
eft celui d'une entreprife nouvelle , rlfqui-
ble ou coûteufe. Tout le monde convien-
dra fans douce que celles de ce genre de-
mandent des encouragemens ôc des grâces
particulières de 1 état.
Si ces grâces ôc ces encouragemens font
des exemptions de droits, il elt clair que
Tctat ne perd rien à ce qu^un plus grand
nombre de fujets en profite , puifque c*t:î\:
une induftrie nouvelle qu'il favorite. Si ce
font des dépenfès , des gratifications , ce
qui eft le plus sûr ôc même indilpenfable ,
on fent qu'il réfulte trois conféquences
abfolues de la concurrence. La première,
qu'un plus grand nombre s'enrichiflànt ,
les avances de l'état lui rentrent plus sûre- ■
ment , plus promptement. La féconde ,
que rétabliflement fera porté plutôt à la
perfection , qui eft l'objet des dépenfes , à
mefure que de plus grands efforts y contri-
bueront. La troifieme , que ces dépenfes
cefîeront plutôt.
Le leâ:eur fera mieux inftruit fur cette
matière , en mettant fous les yeux le fenti-
ment d'un des plus habiles hommes de l'An-
gleterre dans le commerce ; je parle de M.
Jofias Child , au ch. iij d'un de fes traités,
intitulé Trade, and intereji of money conji-
dered.
Perfbnne n'eft en droit de fe flatter de
penfer mieux ; ^ ce que je veux dire, fou-
tenu d'une pareille autorité , donnera moins
de prife à la critique. Il eft bon d'obferver
que l'auteur écrivoit en 1669 , ôc que plu-
sieurs chofes ont changé depuis ; mais pref^
que toutes en extenfîon de Tes principes.
*' Nous avons parmi nous, dit M. J.
Child , deux fortes de compagnies de com-
merce. Dans les unes , les capitaux font réu-
nis comme dans la compagnie des indes
orientales; dans celle de la Morée, qui
eft une branche de celle de Turquie ; ôc dans
celle de Groenland , qui eft une branche de
la compagnie de Mofcovie. Dans les autres
aflbciations ou compagnies de commerce , les
particuliers qui en font membres trafiquent
avec des capitaux féparés, mais fous une
direction & des règles communes. C^eft ainfi
que fe font les commerces de Hambourg ,
de Turquie , du Nord & de Mofcovie.
» Depuis plufieurs années , on difpute
beaucoup fur cette queftion , fàvoir, s'il eft
Tome nu
COM 713
utile au public de réunir les marchands en
corps politiques.
Voici mon opinion à ce fujer.
1°. Les compagnies me paroifïènt abfôlu-
ment néceflàires pour faire le commerce dans
les pays avec lefquels S. M. n'a point d'al-
liance, ou n'en peut avoir , fbit à raifon des
diftances , foit à caufe de la barbarie des
peuples qui habitent ces contrées, ou du peu
de communication qu'ils ont avec les princes
de la chrétienté; enfin par-tout oii il eft
néceflaire d'entretenir des forts ôc des gar-
nifons. Tel eft le cas des commerces à la côte
d'Afrique ôc aux Indes orientales.
" 2°. Il me paroît évident que la plus
grande partie de ces deux commerces doit
être faite par une compagnie dont les fonds
foient réunies. » {Depuis ce temps les Anglais
ont trouvé le fecret de mettre d'accord la.
liberté & la proteclion du commerce à la cotc^
d'Afrique. Voye^^ Grande-Bretagne ,foit
commerce. )
" 3°. Il me paroît fort difficile de décider
qu'aucune autre compagnie decommerce privi-
légiée , foit utile ou dommageable au public.
» 4°. Je ne laifîe pas de conclure en géné-
ral , que toutes les reftridions de commerce
font nuifibles ; ôc conféquemment que nulle
compagnie quelconque , foit qu'elle trafique
avec des capitaux réunis ou fîmplement fous
des règles communes , n'eft utile au public ,
à moins que chaque fujet de S. M. n'ait en
tout temps la faculté de s'y faire admettre à
très-peu de frais. Si ces frais excédent au
total la valeur de vingt Uvres fterlings , c'eft
beaucoup trop , pour trois raifons.
» La première , parce que les HoUandois
dont le commerce eft le plus florifîànt en
Europe , ôc qui ont les règles les plus fûres
pour s'enrichir par fbn moyen , admettent
librement ôc indifféremment , dans toutes
leurs aftociations de marchands ôc même
de villes, non feulement tous les fujets de
l'état , mais encore les juifs Ôc toutes fortes
d'étrangers.
La féconde , parce que rien au monde ne
peut nous mettre en état de foutenir la con-
currence des HoUandois dans le commerce,
que l'augmentation des commerçans ôc des
capitaux ; c'eft ce que nous procurera
une entrée libre dans les communautés
qui s'en occupent. Le grand nombre dps
V YV T
714 C O M
hommes & la richefle des capitaux Tonr
aufTî néceflàires pour poulfcr avantageufe-
ment un commerce, que pour faire la
guerre.
Troifiémement , le feulbien qu'on puifle
efpércr des communautés ou aiîbciiitions ,
c'cH: de régler & dje guider le commerce. Si
Ton rend libre l'entrée à des compagnies ,
es membres n'en feront pas moins loumis
à cet ordre qu'on veut établir; ainfi la
nation en retirera tous les avantages qu'elle
a pu fè promettre.
Le commerce du Nord consomme , ou-
tre une grande quantité de nos produdions ,
une infinité de denrées d'Italie , d'Efpagne,
du Portugal & de France. Le nombre de
nosnégocians qui font ce commerce, cft
bien peu de chofe, fi nous le comparons
avec le nombre des négocians qui , en Hol-
lande , font le même commerce. Nos négo-
cians du Nord s'occupent principalement
de ce commerce au dedans & au dehors, &
conféquemment ils font bien moins au fait
de ces denrées étrangères ; peut-être même
ne font-ils pas afTez riches pour en enirc-
Çrendre *le négoce. Si d'un autre côté on
iait attention que , par les chartes de cette
compagnie , nos„ autres négocians qui con-
lîoiflènt parfaitement bien les denrées d'I-
talie , d'Èrpagne , du Portugal & de France ,
font exclus d'en faire commerce dans le
Nord ; ou qu'au moins, s''ils reçoivent
permiffion de hicompagnieà'y en envoyer,
ils ne l'ont pas d'en recevoir les retours ,
il fera facile de concevoir que les HoUan-
dois doivent fournir par préférence le Da-
neiiiark , la Suéde & toutes les côtes de la
mer Baltique, de ces mêmes denrées étran-
gères. C'eft ce qui arrive réellement. Quoi-
que les Hollandois n'aient point de com-
pagnies du Nord , ils y font dix fois plus de
commerce que nous.
Notre commerce en Portugal , en Ef-
pagne , en Italie , n'eft point en compagnies y
& il eft égal à celui que la Hollande
fait dans ces pays , s'il n'eft plus coniî-
dérable. »
( Si , dans cette pojition des chofes , le com-
merce de V Angleterre était égal à. celui de
la Hollande dans les pays qu'on vient de nom-
mer , /■/ ejî évident , ou que ce commerce eût
€ugmsnte par la liberté de la navigation du
CO M
Nord , ou que l'Angleterre revendait a ta
Hollande une partie de fes retours y ^ fe pri-
vait ainji d'une portion confidérable de leur
bénéfice. C'eji l'effet de toutes les navigations
rejîreintes , parce que les grands ajfortimens
procurent Jouis de grandes ventes. )
» Nous avons des compagnies pour le
commerce de la Ruilie & du Groenland ;
mais il eft prefque entièrement perdu pour
nous , & nous n'y en faifons pas la quaran-
tième partie autant que les Hollandois , qui
n'ont point eu recours aux compagnies pour
rétablir.
De ces faits il réfulte ,
. 1°. Que les compagnies reftreintes & limi-
tées ne font pas capables de conferver oa
d'accroître une branche de commerce.
2°. Qu'il arrive que des compagnies limi-
tées , quoiqu'établies & protégées par l'état,
font perdre à la nation une branche de fou
commerce.
3°. Qu'on peut étendre avec fuccès notre
commerce dans toute la chrétienté, fans
établir de com.pagnies.
4°. Que nous avons plus déchu , ou fî
l'on veut, que nous avons fait moins de
progrès dans les branches confiées à desco^-
pagnies limitées , que dans celles où tous les
fujets de S. M. indifféremment ont eu la
liberté du négoce.
On fait contre cette liberté divcrfes
objeétions, auxquelles il eft facile de ré-
pondre. '>
Première objection. Si tous ceux qui
veulent faire un commerce en ont la liberté ,
il arrivera que de jeunes gens , des détaillans ,
& d'autres voudront s'ériger en marchands ,
leur inexpérience caufera leur ruine & por-
tera préjudice au commerce , parce qu'ils
achèteront cher ici pour vendre à bon mar-
ché dans Tétranger ; ou bien ils achèteront
à haut prix les denrées étrangères , pour les.
revendre à leur perte.
'» A cela je réponds, que c'eft une affaire
perionnelie , oii chacun doit être fon propre
tuteur. Ces perfonnes, après tout, ne fe-
ront dans les branches de commerce qui
font aujourd'hui en compagnies ^ que ce
qu'elles ont fait dans celles qui font ou-
vertes à tous les fujets. Les foins des légif^
lateurs embraftènt la totalité du peuple»,
5c lie s'érendenr pas aux affaires, domeftï»'
C G M
ques. Si ce qu^on allègue fe trouve vrai , '
que nos marchandifes fe vendront au de-
hors à bon marché, & que les denrées
étrangères feront données ici à bas prix ,
jV vois deux grands avantages pour la
nation. "
// objeclion. Si la liberté eft établie,
les boutiquiers ou détaillans qui reven-
dent les denrées que nous importent en
retour les compagnies , auront un tel avan-
tage dans ces commerces fur les mar-
chands , qu'ils s'empareront de toutes les
affaires.
" Nous ne voyons rien de pareil en Hol-
lande , ni dans nos commerces libres ; tels
que celui de France, de Portugal, d'Ef-
pagne , d'Italie , & de toutes nos colonies :
de plus , cela ne peut arriver. Un bon détail
exige des capitaux fouvent confidérables , &:
il elt d'une grande fuiettionj le commerce
en gros de fon coté revendique les mêmes
foins : ain(î il eft très-difficile qu'un homme
ait tout à la fois affez de temps & d'argent
pour fuivre également ces deux objets. De
pluiîeurs centaines de détaillans qu'on a
vu entreprendre le commerce étranger , il
en eft très-peu qui , au bout de deux ou
trois ans d'expérience , n'aient renoncé à
l'une de ces occupations pour s^adonner
entièrement à l'autre. Quoi qu'il en fbit. cette
coniidération eft peu touchante pour la
nation , dont l'intérêt général eft d'acheter
à bon marché , quel que foit le nom ou la
qualité du vendeur; Ibit gentilhomme,
négociant ou détaillant.»
/// objeclion. Si les boutiquiers ou au-
tres gens ignorans dans le commerce étran-
ger , le peuvent Elire librement , ils néglige-
ront l'exportation de nos produétions , &
feront entrer au contraire des marchandifes
étrangères , qu'ils paieront en argent pu . en
lettres de change ; ce qui fera une perte évi-
dente pour la nation.
« Il eft clair que ces perfonnes ont comme
toutes les autres , leur intérêt perfonnel pour
première loi ; fi elles trouvent de l'avantage
à exporter nos productions , elles le feront \
s'il leur convient mieux de remettre de l'ar-
gent ou des lettres de change à l'étranger ,
elles n'y manqueront pas : dans toutes ces
chofes^les négocians ne fuivront point d'au-
tres principes. »*
C O M yif
IV objeclion. Si le commefce eft libre ,
que gagnera-t-on par l'engagement de fept
années de fervices, 3c par les femmes
que les parens paient à un marchand pour
mettre leurs enfans en apprentiftàge i quels
font ceux qui prendront un tel parti ?
» Le fervice de fept années , & Targenç
que donnent les apprentis , n'ont pour objet
quel'inftrudion de la jeunellè qui veut ap-
prendre l'art ou la fcience du commerce , ôc
nonpasl'acquifition d'un monopole ruineux
pour la patrie. Cela eil: fi vrai , qu'on con-
tracte ces engagemens avec des négociant
qui ne font incorporés dans aucune commu-
nauté ou compagnie ; ôc parmi ceux qui y
font incorporés , il en eft auxquels on ne vou-
droit pour rien au monde confier des appren-
tis ; parce que c'eft la condition du maître
que l'on recherche , fuivant fa capacité, fa
probité, le nombre ôc la nature des affaire»
qu'il fait, fa bonne ou fa mauvaife conduite ,
tant perfonnelie que dans fon domcftique.
y objcâion. Si le commerce eft rendu
libre , ne fera- ce pas une inj uftice manifeftô
à l'égard des compagnies de négocians, qui j
par eux-mêmes ou par leurs prédéceflcurs
ont dépenlé de grandes fommes pour obte-
nir des privilèges au dehors , comme font la
compagnie àt Turquie & celle de Hambourg ?
„ Je n'ai jamais entendu dire qu aucune
compagnie fans réunion de capitaux ait dé^
bourfe d'argent pour obtenir fes privilèges ,
qu'elle ait conftruit des forterefîes , ou faitla
guerre à fes dépens. Je fais bien que la com-
pagnie de Turquie entretient à les frais un
amballadeur 6c deux confuls; que de temps
en temps elle eft obligée de faire des préfens
au grand-feigneur , ou à fes principaux
officiers; que la compagnie de Hambourg eft
également tenue à l'encrctiende fbnminiftre
ou député de cette ville : auffi je penfe qu'il
feroit injufte que des particuliers euftènt la
liberté d'entreprendre ces négoces , fans êtra
fournis à leur quote-part des charges des corn»
pagnies refpedlives. Mais je ne conçois point
par quelle raifon un fujet feroit privé de ces
\ mêmes négoces , en fe foamettant aux régle-
1 mens & aux dépenfes communes des co/tz*
' pagnies , ni pourquoi fon aflbciation devrsiC
\ lui coûter fort cher. "
I Sixième objeâion. Si Pentrée des com-
' pagnies eu, libre, elles fe rempliront de boUti»
V V y V X
71^ C O M
quiers à un tel point , qu ils auront la plura-
lité des fufFragés dans les aflemblées : par
ce moyen les places de direéteurs & d'affii-
taijs feront occupées par des pcrfonnes inca-
pables , au préjudice des affaires communes.
y> Si ceux qui font cette abjedion font né-
gocians , ils lavent combien peu elle eft fon-
dée : car c'eft beaucoup fi une vingtaine de
détaillans entrent dans une année dans une
flHbciation ; & ce nombre n aura pas l'ni-
fîuence dans les éledions. S'il sVn préfente
un plus grand nombre , c'eft un bonheur
pour la nation , & ce n'eft point un inal pour
les compagnies; car l'intérêt eft l'appât com-
mun de tous les hommes ; car ce même
intérêtconimun fait defirer à tous ceux qui
s'engagent dans un commerce , de le voir
réglé & gouverné par des gens fages & expé-
rimentés. Les vœux fe réuniront toujours
pour cet objet j &: la compagnie des Indes
en fournit la preuve, depuis que tout An-
glois a pu y entrer en achetant une adion ,
& en payant cinq livres pour fon aflbcia-
tion. Les contradideurs fur cette matière
ont dû fe convaincre que la compagnie a été
appuyée fur de! meilleurs fondemens, &
infiniment mieux gouvernée que dans les
temps où l'affociationcoûtoit cinquante livres
fterlings.
Le hxcch a juftifié cet arrangement , puif-
que la nouvelle compagnie étayée par des
principesplus profitables, a triplé fon capi-
tal ; tandis que Pancienne plus limitée , a
déchu continuellement , enfin s'eft enfe-
velie fous fes ruines , quoique commencée
avec plus de fuccès. ,,
Ce qui regarde les diverfes compagnies de
PEurope, eft renvoyé au commerce decha-
que état. Cet article ejl de M.\ .Y>. F.
La règle Je Compagnie, en arithmétique ,
eft une règle dont l'ufage eft très-néccftàire
pour arrêter les comptes entre les marchands
Se propriétaires de vaifl'eaux ; lorfqu'un
certain nombre de perfonnes ayant fait
enfemble un fonds, on propofe de parta-
ger le gain ou la perte proportionnellement
entre eux.
La règle de trois répétée plufieurs fois eft
le fondement de la règle de compagnie , &
Satisfait pleinement à toutes les queftions de
cette efpecc ; car la mife de chaque parti-
culier doit être à fa part du gain ou de h
C O M
perte , comme le fonds total eft à la perte ,
ou au gain total : donc il faut additionner les
différentes fommes d'argent que les affociés
ont fournies, pour en faire le premier terme ;
le gain ou la perte commune fera le fécond j
chaque mife particulière "fera le troifieme ;
& il faudra répéter la règle de trois autant de
fois qu'il y a d'aflociés.
Cette règle a deux cas : il y a différens
temps à obierver , oii il n'y en a point.
La règle de compagnie , fans difîindtion de
temps , eft celle dans laquelle on ne confî-
dere que la quantité de fonds que chaque
aftbcié a fourni , fans avoir égard au temps
que cet argent a été employé , parce que l'on
fuppofe que tous les fonds ont été mis dans
le même temps. Un exemple rendra cette
opération fecile.
A , B , & C , ont chargé un vaiffeau de
212 tonneaux de vin^ A a fourni 1342 liv.
B 1178 liv. & C 630 liv. toute la cargai-
fon eft vendue à raifon de 5 2 liv. chaque
tonneau. 0\\ demande combien il revient à
chacun.
Trouvez le produit entier du vin en mul-
tipliant 212 par 32, qui revient à 6784 liv.
enfuite ajoutant enfemble les mifes particu-
lières 1342 liv, ,1178 & 630 liv. qui fonc
3150 liv. l'opération fera
/'1342 eft à 2890.
3150:678^4 ^ 1 178 eft à 2537.
( 630 eft à 1 356.
Preuve 3150
6783.
Chambers. {E)
La raifon pour laquelle on n'a point d'é-
gard aux temps dans cette règle , c'eft qu'é-
tant le même pour chaque mife , il doit in-
fluer également fur le gain ou la perte que
chacune doit porter. Mais il n'en eft pas de
même , lorfque le temps de chaque mife clt
différent.
C'eft ce qu'on appelle règle de compagnie
par temps , & qu'il eft bon d'expliquer avec
clarté , d'autant que plufieurs de ceux qui
en ont parlé y ont laiffé des difficultés. Sup-
pofoHS deux particuliers que , pour plus de
facilité , je diftinguerai par A èc par B , qui
aient fait enfemble une lociété. L'un met
au premier janvier la fomme a , & au pre-
mier avril la fbnime3; le fécond mer aa
premier janvier la fommc e, au premier
COM
juillet la fomme d ; & au bout de quinze
mois , il leur vient la fomme e , qu il faut
partager entre eux. On demande de quelle
manière on la doit partager.
Il eft évident que la mife de chacun doit
être regardée comme un fonds qui travaille
pendant tout le temps qui s'écoule depuis
cette mife jufqu'au temps du profit j que par
conféquent on peut la regarder comme de
l'argent placé à un certain denier x , dont la
quantité dépend de la fomme e. De plus , ce
denier doit être le même pour chacun des
intérelTés , il n'y aura que le plus ou moins
de temps qui fera varier le profit; enforte
que Cl X acù: le denier xde a pour un mois ,
X 5 , X c y X d y feront aufïl le denier de 3 c ,
ôcc. pour uij mois.
Il faut favoir maintenant fur quel pié
l'intérêt doit être envifagé ici , s'il eft fimple
ou compofé. Fby. Intérêt. C'eft unechofe
qui dépend uniquement de la convention
entre les intéreflés. C'eft ce qu'on a déjà fait
fentir à Vartkle Arrérages , ôc qui fera ex-
pliqué plus en détail à Vartick Intérêt.
On regarde ordinairement l'intérêt comme
fimple dans ces fortes de calculs ; nous allons
d'abord le confidércr fous ce point de vue.
1°. Suppofons que l'intérêt foit fimple ,
que X foit le denier de la fomme a pour un
mois , il eft certain que la fomme a^ mife au
1*"^ janvier , doit , au bout des quinze mois ,
produire a (i-hi5A:);quela fomme b mife
au i" avril , & travaillant pendant douze
mois , doit , au bout des douze mois , pro-
duire ( I + 12. -3^ ) j que la fomme c mife au
premier janvier produira c {i-^-i^ x)\ &c
que la fomme d mife au premier j uillet,& tra-
vaillant pendant neuf mois , doit produire
^ ( I + 9 ;c). Or CCS quatre quantités mifes
enfembie doivent être égales à la fomme re-
tirée e. Donc a + 3-|-c+if+ 15 ûAT-i- iz
3^;+ 15 cx-\- <) dx'=e.
e-a-b — c~ d
Donc X = ,7Tr7zT+T77TM'
Donc la fomme a-^i^ax-^-B-^iiBx
gagnée par le premier fera
a4- i + if ae - i'i a a — iK ha - i^ ae - l^ a d
T. ir llf+lib+îTcTTd
+ TTTTTTm-TTTTTÏ ^ laquelle fera
isae~-îba-6a , iiif + j abi^ bc-^jàb
C O M
7^
de^z (i-f- i5.r),ilfaudraû(i4-;«:)'5, Ce,
& l'on auraa ( i-hx)'' + 3 ( i -f-or)'* -h ;;
(i-^-x)" -{- d(i^xy=^e. Equation
beaucoup plus difficile à réfoudre que la
précédente , mais dont on peut venir à bouc
par approximation.
Il me femble que dans les règles de com-
pagnie on devroit traiter l'intérêt comme
compofé ; car tout intérêt eft tel par fa na-
ture, à moins qu'il n'y ait entre les inté-
reflés une convention formelle du contraire i
vojc:i[; Intérêt & Arrérages. Mais il fem-
ble que l'ufage , fans qu'on fâche trop pour-
quoi y eft de regarder l'intérêt comme fimple
dans ces fortes d'aflbciations.
Quand le temps des mifes eft égal y alors,
foit qu'on regarde l'intérêt comme fimple
ou comme compofé , il eft inutile d'avoir
égard au temps. En effet , fuppofons que les
deux mifes foient a &c c y on a dans le pre-
mier cas û ( 1 -h 1 5 ;,:) + c ( I 4- 1 5 a:) = e;
onc X == ; ÔC
t=
c+9<i"^
IÇ d +12* +15 c +9
ÔC ainfi des autres.
Si l'intérêt eft compofé, en ce cas, au lieu
1 s a + M c
i<; aa-^^1^ ac + ii; ae- i<; aa ~ i^ ae
a-i- li ax= — -T —
= j^ i d'où l'on voit que le gain de a eu. h.
la mile comme le gain total e eft à la mife
totale a-\-Cy ainfi que le donne la règle de com-
pagnie y OÙ l'on n'a point d'égard au temps.
Si l'intérêt eft compofé, on aura a{\'\-x"'')
H- c ( I 4- a:'' ) = e ; donc ( i + x)''
~fl"T^ > doncfl(i + i5;i:)" =f^^ :> ce
qui donne encore la même analogie.
Il y a cependant une obfervation à faire
dans la règle de compagnie par temps , quand
l'intérêt eft fimple. Je fuppofe , comme ci-
deffus , que l'intéreflé A mette a au mois de
janvier & 3 au mois d'avril , il eft évident
qu'au premier avril û ( i -f- 3 a: ) exprimera
ce que l'intéreflé A doit retirer , ou plutôt
fa véritable mife ; & cette mife étant aug-
mentée de by on aura a{i^3,x)'^b pour
fà mife au premier avril. Or cette mife
étant multipliée par ( i -f- iz :r) donnera
[^(1+5 x-f-3]x(i-f-izj;) pour la
mife totale de A à la fin des quinze mois ,
ce qui diffère àQa-\-\^ax-{~b'^iibx
qu'on a trouvé ci-deifus pour la mife totale
de A, puifquè cette mife eft plus petite de la
quantité 3 bax x ; comment accorder tout
cela î çn voici le dénouement.
7i8 C O M
Tout dépend ici de la convention mu-
tuelle des incérelîes ; c'eft précifémen: le
même cas que nous avons touché dans Var-
ticle Arrérages , cii fuppofant que le dé-
biteur rembourfe au créancier une partie
de Ton dii. En multipliant û ( i -4- 3 x ; par
( I + iz ;r ), l'intérêt celle .d'être limple ri-
goureuiement parlant , puifque l'intérêt de
a qui dcvroit être ly <z x , eft 15 ^ :r + 3
b a X X. C'eft pourquoi l'intérêt étant flip-
pofé fimple , il faut prendre ilmplement
û + 15 rfAT -h 3 -f- 12. ^^ pour la mile de A ,
à moins qu'il n'y ait entre les intéreflés une
convention formelle pour le contraire. Cet
inconvénient n'a pas lieu dans le cas de
Tintérêt compofé ; car a (i + a:) '' -^r b
(i4-^)""ou[û(i-f-^)'47'^]-+-(i4-A:)"
font la même chofe : ce qui prouve , pour
le dire en -patlànt , que l'intérêt doit p ir fa
nature êtr^ regardé comme compofé , puif-
qu on trouve le même réfultat de quelque
manière qu'on envifige la queftion.
Si l'un des intérellés , par exemple B ,
retire de la fociété la fomme/au bout de
trois mois , alors dans le cas de l'intérêt
compofé il faudra ajouter à la mile de A
la fomme/ ( i + a:) '\ & retrancher de la
mile de B la même fommc , &: achever le
calcul , comme ci - delTus , en faifant la
fomme des deux miles égale à e. Si l'intérêt
cft /impie , il faudra retrancher /(i -\-iix')
de la mife de B, & l'ajouter à la mife de A ,
ou (fi la convention entre les intérelfés
clt telle ) il faudra prendre pour la mife
de A [a (1 + 3 x)'\-f-\-b'\ (i + iza:) &
pour celle de B il faudra d'abord prendre
[c (i + 3 -v) — /] -H [i -i- 3 ^] ; ajouter cette
quantité à <f , oc multiplier le tout par
I -f- 9 ;c , puis faire la fomme des deux
mifes égales à e.
Il eft évident que , quel que foit le nombre
des intérellés , on pourra employer la même
méthode pour trouver le gain ou la perte de
chacun. Ainfi nous n'en dirons pas davan-
tage fur cette matière. Nous aurions voulu
employer un langage plus à la portée de tout
le monde que le langage algébrique ; mais
nous aurions été beaucoup plus longs , &
beaucoup moins clairs ; ceux qui enten-
dent cette langue n'auront aucune difficulté
^ nous fuivre.
0\\ peut rapporter aux règles de compagnie
C-O M
ou de partage cette queftion fouvent agitée.
Un .père en mourant lailfe fa femme en-
ceinte , & ordonne par ion tell:ament que (i
fa femme accouche d^in hls , elle partagera
Ion bien avec ce fils , de manière que la part
du fils foit à celle de la m'ere comme akb ^
& que fi elle accouche d'une fille , elle par-
tagera avec la fille , de manière que la part
de la mère foit à celle de la fille comme cd,d.
On fuppofe qu'elle accouche d'un fils &
d'une hlle , on demande comment le partage
doit fe faire.
Soit A le bien total du père , ^ , y , :? Jes
parts du fils , de la mère , & de la fille. Il
eft évident , 1°. que a: + J + ^ = -^ ; i".
que , fuivani l'intention du teftateur , x doit
être à y comme a eft à ^. Donc y = ~ >
3°. que fuivant l'intention du même tefta-
teur , y doit être à -i^ comme c 'k d. Donc
d y db X -^ , b X , dbx .
7= — == .Doac a: H Y-~~z=.A.
«- c flc^ ' a ac
Equation qui lervira à réibudre le problême.
Plufieurs arithméticiens ont écrit fur cette
queftion qui les a fort em.b.irraftés. La rai-
Ibn de leur difficulté étoit qu'ils vouloient
la réfoudre de manière que les deux parts
du fids de de La fille fuflènt entre elles comme
a eft à <f , & qu'outre cela la part du fils fùc
à celle de la mère comme ^ eft à ^ , ôc celle
de la mère à celle de la fille comme c eft à
d. Or cela ne peut avoir lieu que quand
h=- c. Leur difficulté fe feroit évanouie s'ils
avoient pris garde que le cas du fils & de
la fille n'ayant été nullement prévu par le
teftateur , il n'a eu aucune intention de ré-
gler le partage entre le fils àc la fille , c'cft
uniquement entre le fils & la mère ou en-
tre la fille & la mère , qu'il a voulu faire
un partage. Auifi , en faifant x : y '.: a : b y
& y : :(^ : : c : d , on a fatisfait à la queftion
fuivant l'intention du teftateur , & il ne
fmt point s'embarraller du rapport qu'il
doit y avoir entre a: & ;(. Une preuve que
ce prétendu rapport eft illufoire , c'eft que
fi , au lieu du rapport de c à ^ , on mettoit
celui de ne à n d , qui lui eft égal , il fau-
droit donc alors que x de :^, au lieu d'être
entre eux comme ^ eft à d , fufiènt entre eux
comme aed à. nd. Ainfi comme n peut être
pris pour un nombre quelconque , la quef-
tion auroit une infinité de folutions , ce qui
feroit ridicule. {O)
C O M
^ COMPAGNON , r. m. Ce dit de çeîui
qui en accompagne un autre , foit en voya-
ge , ibit dans un travail , (oit dans quelque
autre action pu circonftance. On dit compa-
gnon de fortune; mais il déligne particulière-
ment dans les arts , ceux qui , au forcir de
leur apprentiflage , travaillent chez les maî-
tres , ïoit à la journée , foit à leurs pièces. Il ,
y a encore les compagnons de marine , &
compagnons de rivière : les premiers font ma-
telots de l'équipage ; les ieconds font ceux
qui travaillent fur les ports à charger ôc dé-
charger les marchandilès.
* COMPAGNONAGE , f. m. (^m
méch. ) c'eft le temps qu'il faut travailler
chez les maîtres avant que d'afpîrer à la
maîtrife. Ce temps varie lelon les difFérens
corps de métiers j il y en a même où l'on
n'exige point de compagnonage : alors on peut
fe préfenter au chef- d'œuvre immédiate-
ment après Papprentiflage.
COMPAIR , adj. (i^fz//^^.) corrélatif de
lui-même. Les tons compairs dans le plein-
chant , font l'authente ôc le plagal qui lui
correfpond. Ainli le premier ton eft compair
avec le fécond , le troiiieme avec le qua-
trième , & ainiî de fuite : chaque ton pair
eft compair avec Pimpair qui le précède.
Fbye^ToNS de l'église, {Mufiq.) (S)
CÔMPAN , f. m. ( Comm.) petite mon-
noie d'argent fabriquée , qui a cours à Patane
& dans quelques autres endroits des Indes
orientales. Elle vaut argent de France neuf
fous cinq deniers ; & quelquefois elle baille
jufqu'à quatre deniers. Fbye;^ les diâionn.
du Com. & de Trév.
COMPARAISON, f f. {Philof.log.)
opération de l'efprit dans laquelle nous con-
fidérons diverfes idées pour en connoîrre
les relations par rapport à l'étendue , aux
degrés, au temps, au lieu , ou à quelque autre
circonftance.
Nous comparons en portant alternative-
ment notre attention d'une idée à Pau-
tre , ou même en la fixant en même-temps
fur pluiieurs. Quand des notions peu com-
pofées font une impreflîon allez fenfible
pour attirer notre attention fans efforu de
notre part , la comparaifbn n'eft pas diffi-
cile : mais on y trouve de plus grandes diffi-
cultés à melure qu'elles fe compofent
davantage , & qu'elles font uiie impreilion
COM 715^
plus légère. Elles font , par exemple , com-
munément plus aifées en géométrie qu'en
métaphyfique.
Avec le fecours de cette opération de
l'efprit , nous rapprochons les idées les moins
familières de celles qui le font davantage j
& les rapports que nous y trouvons éta-
bHflènt entre elles des liaifons très-propres
à augmenter ôc à fortifier la mémoire , l'ima-
gination , & par contre-coup la réflexion.
Quelquefois, après avoir diftingué plu-
f leurs idées , nous les confidérons comme ne
faifant qu'une même notion : d'autres fois
nous retranchons d'une notion quelques-
unes des idées qui la compofent j c'eft ce
qu'on nomme compofer ôc décompofer [es
idées. Par le moyen de ces opérations nous
pouvons les comparer fous toutes fortes de
rapports , &,en faire tous les jours de nou-
velles combinaifons.
Il n'eft pas aifé de déterminer jufqu'à quel
point cette faculté de comparer le trouve
dans les bêtes ; mais il eft certain qu'elles ne
la pollèdent pas dans un fort grand de-
gré , ôc qu'elles ne comparent leurs idées que
par rapport à quelques circonftances ienli-
bles attachées aux objets mêmes. Pour ce-
qui eft de la puillance de comparer qu'on
obferve dans les hommes , qui roule fur les
idées générales , ôc ne fert que pour les rai-
fonnemens abftraits , nous pouvons alfurer
probablement qu'elle ne fe rencontre pas-
dans les animaux.
Il n'y a rien que l'efprit humain fafïè Ct
fou vent que des comparaifons : il compare-
les fubftances avec les modes ; il compare
les fubftances entre elles , ôc les modes en-
tre eux ; il s'applique à démêler ce qu'ils ont
de commun d'avec ce qu'ils ont de diffé-
rent, ce qu'ils ont de liaifon d'avec ce qu'ils
ont de contrariété ; Ôc par tous ces exa-
mens il tâche Je découvrir les relations que.
les objets ont entre eux.
Toute comparaifon roule pour le moins-
fur deux objets ; ôc il faut 1°. que ces ob-
jets que l'on compare exiftent, ou puillènc
exifter : car l'impoffible ne fe conçoit pas »
ôc fî on le concevoir , il ne feroit pas impof^
fible : 2°. il faut avoir l'idée de l'un ôc àe
l'autre, fans quoi l'efprit ne fauroit ce qu'iÊ
feit quand il hs compare ; 5°. appacevoijf
710 COM
ces deux idées d'un feul coup , ôc fe les
rendre préfentes en même temps.
Quand on compare , par exemple , deux
pièces de monnoie , ou on les regarde l'une
& l'autre d'un feul coup-d'ocil , ou Pon
conferve Pidée de la première qu'on a vue ,
ik on la confulre dans le temps qu'on jette
les yeux fur la féconde ; car il Ton n'avoit
plus d'idée de cette première , il ne leroit
j)as poiTible de décider li elle eft égale à la
ieconde , ou iî elle en diffère.
Deux objets peuvent nous être préfens en
même temps , fans que nous les compa-
rions : il y a donc un aAe de l'efprit qui
fait la comparaifon ; & c'eft cet ade qui
conftitue Tedence de ce qu'on appelle rela-
tion y rapport , lequel ade eft tout entier
chez nous. ^
Comme en comparant des objets enfem-
ble , il 'règne entre eux divers rapports de
figure , d'étendue , de durée j & d'autres
accidens , on fe fert de ces rapports en
qualité d'images &: d'exemples pour illuf-
trer i^s penfées , foit en converlation , (bit
par écrit : mais il ne faut pas leur donner
une valeur plus étendue , ni prendre les
fimilitudes pour des identités j ce feroit une
fource féconde d'erreurs & de méprifes ,
dont on doit d'autant plus fe garder , que
nous fommes naturellement difpofés à y
donner notre acquiefcement. Il eft commo-
de à l'efprit humain de trouver dans une
idée familière, l'image relfemblantc d'un
objet nouveau : voilà pourquoi ces images
qui roulent fur les rapports lui plaifent j &
comme il les aime , parce qu'elles lui épar-
gnent du travail , il ne fe fatigue pas à les
examiner , & il fe perfuade aifément
qu'elles font exades. Bientôt il fe livre aux
charmes de cette idée , qui ne peut cepen-
dant tendre qu'à gâter le jugement , &: à
rendre l'efprit faux.
Quelquefois même ce goût à chercher
des rapports de reffemblance , fait qu'on
en fuppofe où il n'y en a point , & qu'on
voit dans les objets tout ce que l'imagina-
tion préfente. Mais quand on ne fuppofè-
roit rien , quand ces reffemblances exifte-
roient , quelque exades qu'elles puiflent être
entre deux objets de différente efpece , elles
»e forment point une identité 5 elles ne con-
cluent donc rien en matière de raifonne-
C O M
ment. C'eft pourquoi la logique abandonne
les images, les reilemblances , à la rhétori-
que & à la poéiie , qui s'en font emparées
fous le nom de comparaifons , pour en faire
le plus brillant ufage , ainli qu'on le verra
dans l'article fuivant. Cet article eft de M. le
chevalier DE Jaucoujlt.
Comparaison, f. f. {Rhét. & Poéf.)
figure de rhétorique & de poéfic , qai
fert à l'ornement &c à l'éclaircilfement d'un
difcours ou d'un poëme.
Les comparaifons font appelléespar Longin,
& par d'autre? rhéteurs, icônes, c'eft-à-dire
iraagçs ou reffemblances. Telle eft cttt&
image , pareil à la foudre , il frappe, Ôcc. il
fe jette comme un lion, ôcc. Toute comparaifon
eft donc une efpece de métaphore. Mais
voici la différence. Quand Homère dit
quAc/iille va comme un lion , c'eft une corn-
paraifcn ; mais quand il dit du même hé-
ros, ce lion s' élançoit , c'eft une métaphore.
Dans la comparaifon, ce héros rclTèmble a*
lion j & dans la métaphore , le héros eft u»
lion. On voit par-là que quoique la compa-
raifon fe contente de nous apprendre à quoi
une chofe reffemble , fans indiquer fa na-
ture , elle peut cependant avoir l'avantage
au deffus de la métaphore, d'ajouter, quand
elle eft jufte, un nouveau jour à la penfée.
Pour rendre une comparaifon jufte , il
faut 1°. que la chofe que l'on y emploie
foit plus connue , ou plus aifée à conce-
voir que celle qu'on veut faire connoître *
2°. qu'il y ait un rapport convenable entre
l'une & l'autre : 5°. que la comparaifon foie
courte autant qu'il eft pofïible , & relevée
par la jufteffe des exprefîrons. Ariftote re-
connoit dans fa rhétorique , que fi les
comparaifons font un grand ornement dans
un ouvrage quand elles font juftes , elles le
rendent ridicule quand elles ne le font pas :
il en rapporte cet exemple ; fes jambes font
tortues ainfî que le perjil.
Non feulement les comparaifons doivent
être juftes , mais elles ne doivent être ni
baffes, ni triviales, niufées, ni miles faHs
néceflité , ni trop étendues , ni trop fouv^nt
répétées. Elles doivent être bien choifies.
On peut les tirer de toutes fortes de fujets \
ôc de tous les ouvrages de la nature. Les
doubles comparaifons qui font nobles &
bien prifcs , font un bel e&t en poéfie ;
mais
T O M
maïs en profe Ton ne doit s'en fervir qu'îTvcc
beaucoup de circonfpedion. Les curieux
peuvent s'inftruire plus amplement dans
Quintilien , liv. V^ ch. ij, ù liv. VIII, ch. iij.
Quoique nous adoptions les comparaifons
dans toutes fortes d'écrits en profe, il eft
pourtant vrai que nous les goûtons encore
davantage dans ceux qui tracent la peinture
des hommes, de leurs pafïions, de leurs
vices & de leurs vertus. Article de M. le
chevalier DE Jaucourt.
" Comme c'eft à la belle imagination à
faifir & à fournir les fujets de comparaifon,
écoutons encore là - defl'us M. de Mar-
montel. »»
Dans la comparaifon , tantôt l'on ne voit
l'objet qa'^ travers l'image qui l'enveloppe,
tantôt l'objet fenfible^ar lui-même fe ré-
pète comme dans un miroir.
La première eipece eft ce qu'on appelle
métaphore ou allégorie ; la féconde eft plus
proprement limilitudc ou comparaifon.
Le mérite de la comparaifon eft. dans un
rapport imprévu & frappant. Les hommes
ont peur de la mort , dit Bacon , comme les
en fans ont peur des ténèbres (i). La fleur
de la jeuneflè Athénienne ayant péri au
fiegede Syracuie, Périclès comparoir cette
perte à celle que feroit Tannée iî on lui
ôtoit le printemps.
L'intention la plus commune dans l'em-
ploi des comparaifons , eft de rendre l'objet
plus feniible.
Lucain veut exprimer le refpedl qu'avoir
Rome pour la vieillefle de Pompée : il le
compare à un vieux chêne chargé d'offrandes
& de trophées. " Il ne tient plus à la terre
que par de foibles racines, ion poids feul
Py attache encore ; c'eft de fon bois, non de
fon feuillage , qu'il couvre les lieux d'alen-
tour; mais quoiqu'il foit prêt à tomber fous
le premier effort des vents , quoiqu'il s'élève
autour de lui des forêts d'arbres dont la
jeunefte eft dans toute fa vigueur , c'eft
encore lui feul qu'on révère. »
Le Tafîè avoit à peindre l'effet des char-
mes d'Armide, quoiqu'à demi- voilés, fur
(i) Lucrèce l'avoit dit avant lui:
Ndm veluti pueri trepihat , atçue omnk citcîs
In tenelrii metuun: ; fie nos in luce rimcmus ,
Inrerdutn nihilè quiPjunt metuenda mjg's quam.
QiL(e pueri in tenebris pavitant , fugianti^iu furun.
Tome FIJI.
C O M 721
Pâme des guerriers qui la virent paroîtrc
dans le camp de Godefroy.
Comeper aqua oper crijialo intero
Trapajfa ilraggio, e non divide , o parte;
Per dentro ilchiaro manto ofa ilpenfuro
Si penetrar, nella vietata parte.
Ivifîfpa-^a^ ivi contempla il ver o.
Si la comparaifon peint vivement fon ob-
jet, c'eft aflèz : il n'eft pas befoin qu elle le
relevé : ainfi cette comparaifon de Moyfe eft
fublime, quoiqu'au deffous de fon objet :
fîcut aquilaprovocans ad volandum pullosfuos
&fuper eos voUtans^ expandit alasfuas, {Deus)
& ajfumpjît eum ( Jacob ) atque portavit in
humerisfuis. Ainfi , pourvu que les fourmis
&; que les abeilles nous donnent une jufte
idée de la diligence des Troyens & de l'in-
duftrie des Tyriens , on n'a plus rien à de-
mander à Virgile. Tout ce qu'on peut exiger,
c'eft que les images foient nobles , c'efl-à-
dire , que l'opinion commune n'y ait point
attaché l'idée fadice de balfelfe. Mais l'opi-
nion change d'un fiecle à l'autre , 6: à cet
égard , le iiecle préfent n'a pas droit de juger
les fiecles palfés. Si l'on a raifon de reprocher
à Homère & à Virgile, d'avoir comparé
Ajax & Turnus à un âne , ce n'eft' donc pas
à caufe de la balfeflè de ces images; car ces
poètes fa voient mieu x que nous li elles éroient
viles aux yeux des Grecs & des Romains , &c
leur choix fait du moins préfumer qu'elles
ne Pétoient pas. Mais ce qu'on peut défa-
vouer, c'eft que lobftination de Tâne ne
peint qu'à demi l'acharnement d'Ajax. Ce
que l'ardeur d'un guerrier a de fier , d'im-
pétueux , de terrible , n'y eft point exprimé :
voilà par où la comparaifon eft défeélueufe.
L'intention du poè'te , en employant une
image , n'eft remplie que lorfque tout fon
objet s'y fait voir, au moins dans ce qu'il
a de relatif aux fentimens qu'il veut exciter.
Or , les fentimens qui naiflènt de la peinture
des combats , font l'étonnement , la pitié ,
la crainte. Il eft donc décidé par la nature
même , & indépendamment de l'opinion
que les images du lion , du tigre , de l'aigle
ou du vautour , rendent mieux l'adion d'un
guerrier au milieu du carnage , que celle de
l'âne qui ne peint qu'une patiente ftupidité.
Je dis la même chofe de la comparaifon d'A-
mat avec un fabot que fouette un enfiuit :
Xx X X
712 C O M
j'y vois la rapidité du mouvement, mah ce
n'eft point afltz ; & Tcgarement de Didon eft
bien mieux rendu par Tirnage de la biche que
le chafîenr a bleflée, & qui, courant dans
les forêts, empone le trait mortel avec elle.
C'eft la plénitude de Pidée qui fait la beauté
de la comparai fun ; &, en fuppofant même
que le poëte ne voulût que rendre <on objet
plus fendble, la comparaifon qui l'embraflè
le mieux , eft celle qu'il doit préférer. Je lais
qu'il n'eft pns be^oii que l'image présente
toutes les faces de l'objet , mais la f^ce qu'elle
pr^^ente doit ^c peindre vivemem /> Pefprit;
& c^eft l affo bljr que d*en retrancher ce qui
en f?it la force ou la grâce.
Une épreuve fùre de la bonté ou du v'ce
des ccw- araifcn.y c'eft de cacher ie premier
terme, & de demander à Tes ji'ges à quoi
refT( mble le fécond. Si le rapport eft jufte
& fenfible, il ^e préfentera naturellement.
Qu'on donne à lirt n un homme intelligent
Ces beaux, vers de l'ilnéide :
•
Çualis , vhi alrvpûs fugii prœfepia vincUs ,
Tandem Lber equu<;^ campoquc potitus aperto ,
Autilleinpnfius^ai meruaquetaditequarum;
Aut cjjuctus aqaœ , pcrfundijlumine noto
Emicct , ai récit [que fr mit ccrvicibiis ahe
Zuxurians , ludunique jubcc per colla , per
armos.
ou ces beaux vers de la Henriade :
Tel qu'échappé dufein d*L n riant pâturage ,
Au bruit de ta trempette animant Ccn courage ,
'Dans les champs de la Thiace un courjicr
orgueilleux ,
Indocile y inquiet , plein d'un feu belliqueux^
Levant les crins mouvons ce fu J.eii verbe ,
Impatient du frein , vok ù bondit fur l herbe,
OU ceux du même poëme :
- Tels aufnd des frets pr'cipitant l^urs /7<z.c ,
Ces animaux hardi -^nourri.' pour lesccmbats^
Fiers efclàves de l'homme , & nés pour le car-
nage ,
. Trejfent unfanglier, en raniment la rage :■
Ignorant le danger^ aveugles , furieux ,
le cor excite au loin leur injlincl belliqueux.
on n'aura pas befbin de lui dire que ce
CGurfkr eft un jeune héros,. ^ que ces
chiens font des combattans réunis contre
un ennemi terrible.
Il eft difficile qu'un objet vil & lx:s ait
C O M
une parfaite reftemblance avec un objet Im-
portant & noble; & l'analogie de l'un à
Pautre , eft une preuve que fi l'image a été
avihe par le caprjce de l'opinion , c'eft une
tache paflagere que le bon fens efficera. Par
exemple, le chien n^eft pas chez nous un ani-
mal aflez noble pour l'épopée : M. de Vol-
taire, en ne le nommant pas , a ménagé notre ,
délicatefle ; mais il l'a peint avec des traits
qui le vengent de ce mépris , ^^. qui l'ano-
bliflent à nos yeux mêmes. C'eft ainfi qu'on
doit en uler toutes les fois que l'aviliftèment
eft injufte ; car alors le préjug" s'attache aux
mots , &: on l'élude en les évitant.
Nous n'nvons vu encore dans la comparai^
fon qu'un miroir fimple & fidèle ; mais fou-
vent elle errbellit , relevé , agrandit fon ob-
jet. Telle eft dans une ode d"-^orace la com-
paraifon de Dru^us avec Poireau qui porte la
foudre. Telle eft dans 1 1 Pharf-'îe la compa-
raifon de l'ame de Célar avec la foudre elle-
m^m.e :
Magnamque cadens , magnamque rêver tens.
Dat flrag m !at} , fpat fo^que recoll git ignés.
Quelquefois au fTî l'intenrion d'ur: poète eft.
de rava er ce qu'il peint , comme dans cette
compara fon li nouvelle & li jufte des Seize,
avec le limon qui s clcve du fond des eaux :.
Ainfi , lorfqut les ven: s y fougueux tyrans des
eaux ,
De lafeinc ou du rhôm ont fouler é hsjlo^sy
le Lmon croupif'ant dans leurs grotus pro»
ft ndes ,
S'élève en bouillonnant fur la face des ondes ^.
Mais alors, & cet exemple c n eft la preuve,
l'objet eft vil & i'imngc eft noble : ce'a dé-
pend du choix des mots j car la noblellè
des termes tft indépendante de l'id'=^e. C'eft
l'u âge qui la donne ou qui la refu'e à fon,
gr? ; témoins la boue & le limon qu'il a reçus,
dans îe ilyle h ^roque. En cela l'usage n'a
d'autre règle que fon caprice, & c'elt lui'
qu'il faut conîukcr.
Enfin, la comparaifon s'amplô e quelque-
fois à liifîemb.er en un tab eau circon'crit &
fruppant, une colledlion d'idées arbitraires,,,
que le 'prit, f^ns cet artifice , auroit de la-.
peine a faifîr. Ainfi , Bayle cvr p?re 'e peuple ■
aux fiocs de la mer, & les p, ftîons àt^
grands aux vents qui les ^oultvent. Ainfi
Fléchier, dans l'Eloge de. Turenne, dit, en.
C O M
s'adreHant à Dieu : Comme il s'élève du fond
dfes vallées des vapeurs groflicres , dont fe
forme la foudre qui tombe furies montagnes,
il fort du cœur des peuplesdes iniquités dont
vous déchargez le châtiment lur la tête de
ceux qui les gouvernent ou qui les dé-
fendent. "
De ni5me , Lucain , pour exprimer l'incli-
natiou des peuples à fuivre Pompée , quoi-
qu'épouvantés des progrès de Céfar, fe feit
de l'image des flots qui obéiflent encore au
premier vent qui les a poulïés , quoiqu'un
vent oppofé fè levé & règne dans les airs :
Ut cum mare pojfidet aufier
Flatibus hori^^onnis , hune cequora tota fe-
quuntur.
Si rurfus tellus pulfu laxata tridentis
j^ul/i y tumidis immitatjlucîibus Eurum ;
Quamvis icla novo , ventum tenuerepriorem
JEjuora ; nubiferoque polus cum cejjerit
aujîro ,
Vindicat utùa notum.
Que ceux qui refiifent à Lucain le nom
de poète, nous difent fi cette façon d'ex-
primer une réflexion politique eft d'un
lîmple hiftiorien.
Dans la comparaifon , c'eft: le plus fbuvent
une idée , un fentiment , une vérité abftraite
qu'on veut rendre fenfible par une image.
Mais il arrive aufli quelquefois que la com-
paraifon. eft: inverfe , je veux dire qu'elle em-
ploie le terme abft:rait pour mieux peindre
l'objet fenfible. Ainfi, dans une ode au
printemps y on lui dit : " Ton fourire fait
fleurir la rofe qui , belle comme les jours de
V innocence^ répand une odeur embaumée. »
On voit là une image commune rendue
nouvelle, délicate & piquante, par le ren-
verfement du rapport ufité.
Il eft: de Teflence de la comparaifon de
-circonfcrifc (on objet : tout ce qui en ex-
cède l'image eft: fuperflu , & par conféquent
nuifible au deflèin du poète. La comparaifon
finit où finiflènt les rapports. Homère ,
emporté par le talent & le plaifir d'imiter
la nature , oublioit Ibuvent que le tableau
qu'il peignoit avec feu, n'étoit placé qu'au-
tant qu'il étoit relatif, & dans la chaleur de
la compofition , il l'achevoit comme abfolu
Se intéreflant par lui-même. C'eft: un beau
défaut, il l'on y&xx. ; mais c'en* eft un grand
C O M 723
que d'introduire dans un récit ^es circonl^
tances & des détails qui n'ont aucun trait à
la choie. Le bon fens eft la première qualité
du génie, & Pà propos la première* loi du
bon feus : auffi , quoiqu'on ait excufé k
furabondance des comparaifons d'Homère ,
aucun des poètes célèbres ne l'a imitée , non
pas même dans l'ode qui, de fa nature, eft:
plus vagabonde que le poème épique.
Au reft:e, la comparaifon eft elle-même
une excuriîon du génie du poète , &: cette
excuriion n'efl: pas également naturelle dans
tous les genres. Plus l'ame eft occupée de
Ion objet direâ: , moins elle regarde autour
d'elle; plus le mouvement qui l'emporte eft:
rapide , plus il eft impatient des obftacles &;
des détours ; enfin , plus le fentiment a de
chaleur &: de force , plus il maîtrife l'ima-
gination & l'empêche de s'égarer. Il s'enfuit
que la narration tranquille admet des com-
paraifons fréquentes , développées , étendues
&; pri{ès de loin ; qu'à mefure qu'elle s'anime
elle en veut moins , les veut plus concifes &:
apperçues de plus près ; que dans le pathé-
tique, elles ne doivent être qu'indiquées
par un trait rapide ; & que , s'il s'en pré-
fente quelques-unes dans la véhémence de
la palTion , un feul mot les doit exprimer.
Quant à la fource de la comparaifon y elle
eft: prife communément dans la réalité des
chofes, mais quelquefois aulîi dans l'opi-
nion & dans l'hypothefè du merveilleux.
Ainfi M. de Voltaire compare les liqueurs
aux géants: ainfi après avoir dit du vertueux
Mornai :
Jamais Vair de la cour , ^ fonfouffle infeâé\
N' citera defon cœur V aufier e pureté,
il ajoute : •
Belle Aréthufe , aîaji ton onde fortunée
Roule au fein furieux d* Ampkitrite étonnée.
Un cryflal toujours pur ù des flots toujours
clairs ,
Que jamais ne corrompt l'amertume des mert.
Finiftbns cet article par la plus belle &
la plus touchajite comparaifon qu'il foit
pofïibic de tranfmettre à la mémoire des
hommes ; elle eft de notre bon roi Henri
IV. Il s'agifloit de prendre d'aflàut la ville
de Paris , il ne le voulut pas , & voici fa
réponfe : « Je fuis, difoit-il> le vrai père
Xxxx 2
714 C O M
de mon peuple , je reflemble à cette vraie
mère dans Salomon, j'aimeroisquafi mieux
n'avoir point de Paris , que de Tavoir tout
ruiné. ." ( M. Marmontel. )
Comparaison d'Ecritures, (Jurifp.)
eft la vérification qui fe fait d'une écriture ou
fignature dont on ne connoît pas l'auteur ,
en la comparant avec une autre écriture ou
Signature reconnue pour être de la main de
celui auquel on attribue Récriture ou figna-
ture conteftée.
C*eft une des preuves que l'on peut em-
ployer pour connoître quel eft le véritable
auteur d'une écriture ou lignature , car la vé-
rification peut en être faite en trois manières j
fàvoir, par la dépofition des témoins qui
atteftent avoir vu faire en leur préfence l'é-
criture dont il s'agit , ou par la dépolition de
témoins qui n'ont pas à la vérité vu faire
Pécrit , mais qui atteftent qu'ils connoiflent
que l'écriture & fignature eft d'un tel , pour
l'avoir vu écrire & figner plufieurs fois; &
enfin , la dernière forte de preuve que l'on
emploie en cette matière , eft la dépolition
des experts , qui , après comparaifon faite de
deux écritures , déclarent fi elles leur pa-
roi fient de la même main ou de deux mains
différentes.
La compcraifon d'écritures eft ufitée , tant
en matière civile qu'en criminelle.
L'ufage de cette preuve en matière civile
eft fort ancien ; il en eft parlé en quelques
endroits du code & des novelles.
Comme on admettoit pour pièces de
compcraifon des écritures privées, Juftinien
ordonna d'abord par la loi comparât iones,
ch. de fide infirum. qu'on fe ferviroit des
f)ieces authentiques , & qu'on ne pourroit
ïè fervir d'écritures privées qu'elles ne fufïènt
iignées de trois témoins.
Par fa novelle ^g, il mit deux exceptions
à cette loi pour les écritures privées , qu'il
permit d'employer pour les pièces de ccm-
paraifon , lorfqu'elles étoient produites par
celui contre lequel on vouloir fe fervir de
pièces de comparaifon, ou lorfque l'écriture
privée étoit tirée d'un dépôt public.
Mais par fa novelle 75, il reftreignit telle-
ment l'ufage de la preuve par comparaifon
d'écritures, qu'il eft vrai de dire que fon
intention étoit qu'on y eût peu d'^égard ,
du moiiis en matière civile.
C O M
Dans la préface de cette novelle , il dit que
quelques-uns de fes prcdécefteurs avoient
admis cette preuve , que d'autres l'avoient
rejetée -, que ces derniers en avoient reconnu
l'abus , en ce que les fauflkires s-'exerçoient à
contrefaire toutes fortes d'écritures; & qu'on
ne peut bien juger de la qualité d'un ade
faux par le feul rappor: qu'il a avec un ade
véritable, attendu que la fauffeté n'eft autre
choie que l'imitation d'une chofe vraie; qu'il
avoir lui-même reconnu les inconvéniens de
cette preuve , étant arrivé qu'en Arménie un
contrat d'échange tenu pour faux par les
experts , fut néanmoins reconnu véritable
par tous les témoins qui l'avoient figné. ^
La difpof-îtion de cette novelle eft aflèz
compliquée : l'empereur défend de vérifier
aucune pièce par comparaifon d'écritures , fî
la pièce que l'on veut faire vérifier n'eft
fignée de trois témoins dignes de foi, ou
d'un notaire , ou de deux témoins fans
rcproclie, ou du moins fi elle n'eft pafic'e
en préfence de trois témoins irréprochables.
Il veuf de plus que le notaire &c les témoins
qui auront i^gné avec la partie , reconnoiilent
leur fignature au bas de l'acte ; que fi le nor-
taire reconnoit la fienne , en ce cas c'eft un.e
pièce publique , qui n'a point bc^foin d'être
vérifiée par comparaifon; que h c'eft un aâe
figné de trois témoins , ou ieulem.ent écrit
ci^ leur préfence fans être figné d'eux , ou
même s'il eft reçu par un notaire en préfence
de deux témoins , mais que le notaire foît
depuis décédé ou ne foit plus en état de dé-
pofer ; en ce cas Juftinien veut qu'outre la
vérification par comparaifon d'écritures , les
témoins qui ont figné reconnoifient tous
leur f eing ; & qu'en outre , fbit qu'ils aient
figné ou non, ils dépofent fi l'écriture vérifiée
par experts a été faite en leur préfence de Ja
même main dont les experts ont jugé qu'elle
étoit écrite ; que fi les témoins & le notaire
ne font plus vivans , leur fignature ferait
vérifiée , ainfi que celle de la partie; que fi
l'ade ne fe trouve pas figné du nombre de
perfonnes publiques ou de témoins qui eft
ordonné , îa feule comparaifon d'écritures ne
fera jamais fufl[îfante pour que l'on y ajoute
foi ; ôc qu'en ce cas , après la vérification
faite , le juge s'en rapportera au ferment
décifoire de la partie qui veut fe fervir de la
pièce coHttftée. Enfin 3 la novelle ajioiue
C O M
encore que fi les contrats font de peu d'im-
portance , ou palTés à la campagne , on n'y
délire pas ces formalités; mais qu'à Tcgard
de tous les autres , la feule comparaifon d'é-
critures ne fuffit pas pour y ajouter foi ; & la
raifon qu'en donne la loi , c'eft que la reiîèm-
blance des écritures eft trop fufpedbe; que
c'eft une voie qui a Ibuvent induit en erreur,
& que l 'on ne doit pas s'y rapporter tant que
Ton ne voit pas de meilleure preuve.
Les interprètes du droit ont tous parlé
de la comparaifon d'écritures , conformé-
ment à la novelle 75, & entre autres Cujas ,
qui tient que la (impie comparaifon d'écri-
tures ne fait point de foi; qu'elle ne peut
être regardée au plus que comme une femi-
preuve j qui peut obliger le juge de déférer
le ferment à la partie qui foufient la vérité
de Pa6te ; & que pour faire preuve , il faut
que le rapport des experts foit appuyé de la
lignaturc des témoins &c de leur dépoiition.
Il y a beaucoup de doAeurs qui penfent
que , dans les cas mêmes portés par la novel'e
J2 i oi"^ doit encore être fort rétervé fur la
foi qu'on ajoute à la reflèmblance des écri-
tures ; d'autres vont jufqu'à dire qu'elle ne
fait par toujours une lemi-preuve ; & quel-
ques-uns enfin nient qu'elle fafle même la
plus légère préfomption.
Il eil néanmoins certain , dans notre
ufage , que la preuve pat comparaifon d'é-
critures eft admife , tant en matière civile
qu'en matière criminelle.
Elle eft admile en matière civile par l'or-
donnance d'Orléans, art. 245; par celle de
1539, art. ^çi; par celle de Charles IX,
du mois de Janvier 1565; de enfin, par
l'ordonnance de 1667, tit. xij , art. 5.
La forme en eft réglée pour les matières
civiles , par cette dernière ordonnance : il
y eft dit que les reconnoiftîmces &: vérifi-
cations d'écritures privées fe feront partie
préfenre ou duement appellée, pardevant
le rapporteur, ou s'il n'y en a point, par-
devant l'un des juges qui fera commis fur
une fimple requête, pourvu, & non au-
trement , que la partie contre laquelle on
prétend fe fervir des pièces, foit domiciliée
ou préfente au lieu où l'affaire eft pcjidaiite ,
linon que la reconnoiftance ie fera devant
le juge royal ordinaire du domicile de la
partie,, & que s'il échet de faire quelque
C O M 725
vérification , elle fera faite pardevant le j uge
où le procès eft pendant.
Les pièces & écritures dont on pourfuit
la reconnoiflance ou vérificarion , doivent
être communiquées à la partie en piéfence
du juge ou commifl'aire.
Faute par le défendeur de comparoir à
l'alîignation , on donne défaut contre lui,
pour le profit duquel , fi l'on prérend que
l'écriture foit de fa main, elle eft tenue
pour reconnue \ &c fi elle eft d'une autre
main , on permet de la vérifier , tant par
témoins que par comparaifon d'écritures pu-
bliques ou authentiques.
La vérification par comparaifon d'écritures
fe fait par experts fur les pièces de comparai-.
fon dont les parties conviennent , & à cette
fin on les aiîigne au premier jour.
Enfin, fi au jour de l'alîignation l'une
des parties ne comparoit pas, ou ne veut
pas nommer des experts, b vérification ie
fait iur les pièces de comparaifon par les
experts nommés par la partie prélentc , 6c
par ceux qui feront nommés par le juge au
lieu de la partie reftifante & défaillante. ',
Telles font les formalités prefcrites par
l'ordonnance de 1 667, pour les vérifications
d'écritures privées par pièce de comparaifon.
en matière civile.
Cette preuve étoit aulTi admife en matière
criminelle chez les Romains , du moins en
matière de faux , comme il parok par une
loi de l'empereur Conftantin , qui eft la
féconde au code théodofien , ik la iz^.
dans le code juftinien , ad legem corneliam
de faljîs.
M. le Vayer de Boutigay , célèbre avo-
cat au Parlement , &: depuis maître dt"î
requêtes, a fait une favaiue diflertation dans
la caufe fameufe de Jean îvLaillart, où il
s'attache d'abord à faire voir en général
qu'il y a peu de certitude dans la comparai-
fon d'écritures , &i qu'elle ne fait pas preuve
feule , même en matière civile : il prétend
qu'elle ne doit ix>int avoir lieu , fur-tout
en matière criminelle ; qu'elle n'a point été
admife par aucune loi dans ces fortes de
matières; que la loi n'y admet que trois
fortes de preuves ; favair , la preuve pai-
titres , la preuve par témoins , & les in
dices indubitables &c plus clairs que le joui*.
Mais m^ilgré l'érudition qui règne daits
n^
G O M
cet ouvrage , il eft certain préfentement
qae la preuve par camparaifon d'écritures eft
admiiè en matière criminelle au (ïi- bien
qu'en matière civile, a-nli qu'il relulte de
l'ordonnance orimineile de 1670 , & de
l'ordonnance du mois de juillet 1737, con-
cernant le ftux priricipal 6c incident.
La première de ces deux ordonnances,
tit. ix du faux principal & incident, ne dit
autre choie de la preuve par comparai/on
d'écritures , finon que les moyens de faux
étant trouvés perrinens ou admillibles , la
preuve en fera ordonnée , tant par titres que
par témoins , & par comparaijun d'écritures
& iignaturcs, par experts qui feront nom-
més d'office par le même jugement, fauf
à les reçu fer ; que les pièces infcrites de
•faux & celles de comparaifon , feront mifes
entre les mains des experts, après avoir
prêté ferment & leur rapport délivré au
juge , fuivant qu'il eft prefcrit par l'art,
tz du titre de la defcente fur les lieux ^ de
l'ordonnance de 1667; que s'il y a charge,
les juges pourront décréter & ordonner
que les experts feront répétés féparément
en leur rapport , recollés &: confrontés
aind que les autres témoins.
L'ordonnance du faux règle les formalités
de la preuve par comparaifon d'écritures.
Il eft dit , titre j du faux principal , que
fur la requête ou plainte en faux , foit par
5a partie publique ou par la partie civile,
il fera ordonné qu'il fera informé des £iits
portés en la requête ou plainte , & ce , tant
par titre que par témoins , comme aufTî
par experts , enfemble par comparaifon d'é-
critures ou fignatures , le tout félon que le
cas le requerra; que lorfque le juge n'aura
pas ordonné en même terhps ces différens
genres de preuve , il pourra y être fuppléé ,
^'il y échet, par une ordonnance ou un
jugement.
Que quand la preuve par comparaifon
d'écritures aura été ordonnée, les procu
reurs du roi eu ceux des hauts-jufticiers,
i& la partie civile , s'il y en a , pourront
feuls fournir les pièces de comparaifon y ji^ns
que l'accufé puilTe être reçu à en préfi-
xer de fa part , fi ce n'eft comme il fera
■dit ci-après , & ceci doit être obfervé , à
.peine de nullité^
' ïQ^ ne peut admettre pour pièces de corn-
CO M
paraifon , que celles qui font authentiques
par elles-mêmes j & on regarde comme telles
les lignaturesappoféesaux aétespafles devant
notaires ou autres perfonnes publiques , tant
léculieres qu'eccléliaftiques dans les cas où
elles ont droit de recevoir 'des ades en cette
quahté.
On répute auflî authentiques à cet effet
les fignatures étant aux adtes j udiciaires faits
en préfence du juge & du greffier ,& auflî
les pièces écrites &c fignées par celui dont
il s'agit de comparer l'écriture , en qualité
de juge , greffier ,- notaire , procureur , huiC
fier , fergent , & en général comme faifant ,
à quelque titre que ce (bit , fonction de per-
fbnne publique.
On peut auffi admettre pour pièces de
comparaifon , les écritures ou fignatures
privées qui auroient été reconnues par l'ac-
culé ; mais hors ce cas , ces fortes d'écritu-
res &; fignatures ne peuvent être reçues
pour pièces de comparaifon , quand même
elles auroient été vérifiées avec l'accufé fur
la dénégation qu'il en auroit faite , à peuie
de nullité.
L'ordonnance laifTe à la prudence du juge,
fuivant l'exigence des cas, & notamment
lorfque l'accufation de faux ne tombe que
fur un endroit de la pièce qu'on prétend
être faux ou falfifié, d'ordonner que le
furplus de la pièce fervira de pièce de compas
raifon.
Si les pièces indiquées ^onr comparaifon.
font entre les mains dedépofîtaires publics ou
autres, le juge doit ordonner qu'elles ièront
apportées , fuivant ce qui eft ordonné pour
les pièces arguées de faux ; & les pièces admi-
fes pour comparaifon doivent demeurer au
greffe pour fèrvir à l'inftrudion, &: ce, quand
même les dépoiîtaires d'icelles offriroient de
les repréfenter toutes les fois qu'il feroit né-
ceflàire , fauf aux juges à y pourvoir autre-
ment , s'il y échet, pour les regiftres de bap-
têmes , mariages &: fépultures , & autres
dont les dépofitaiîes auroient continuelle-
ment befoin.
Sur la préfentation des pièces de compa-
raifon par la partie publique ou civile , &;
fans qu'il foit befoin de requête , il doit
être dreffé procès-verbal de ces pièces au
greffe ou autre lieu du fiege deftiné aux
inib:u<3;ions , en préfence de la partie
C O M
publique ^ de la partie civile , s'il y en a ,
à peine de nullité.
L'ace ufé ne peut être préfent à ce procès-
verbal , auffi à peine de nullité.
A la hn de ce procès-verbal , & fur la re-
quûtionoules conclaiions de la partie pu-
blique , le jugedoit ftrifiier rurl'admijGfion ou
rejc: des pièces, à moins qu'il n'ordonne qu il
en 'era référé ptrlu' au fiege , auquel cas il y
do r être pourvu parle confeil , après que le
procès verbal a et: communiqué à la partie
publique & civile.
Si les p-ecesdece"; ^-raifon ^nt rejetées ,
k partie civile s'il y en a , ou la partie pu-
blique , {ont ^enues ^ en r.'pporter ou indi-
qui r 'i uires dans 'e déhi qui leur a été pref-
cri., Imcm il y 'era pourvu.
Dans tous Itsc s oiilejpiccesdeC'C772p<7r^/-
fon font admiOfS; elles doivent être paraphées,
tant p-'r le juge qae par la p ;rtie publ-que &
par la partie civile , s'il y en a & i\ el'e peut
ligner ; (inonil faut enfa.re mention , le tout
à peine de nullité.
En proc'dant à l'audition des experts, ce
qui Te fait toujours danscette matière parvo't
d'information & non de rrpport les pièces
de ctmparoifon , lorO^u'il en .i été fourni , le
procès-verbal de pr^ienration de ces pièces .
& ! ordonnance ou jugement qui lésa reçus
doivent ^re remis à chacun (^es experts,
pour les voir & examiner fcpar'^ment & en
particulier 'ans déplacer ; & il faut fa^'re
mention de la remife & examen de cçs pie-
ces dans la dépoiition de ch; que expert
fans qu'il en ioit drellé aucun procès-
vetbul..
On ne doit point repréfenter les pièces
de comparaifi.n lux autres témoins à moins
qut: le juge en proc^-l-mt 4 l'information,
ré. ' ivment ou co;- frontaron de ces té-
moins , pe juge à-propos de leur représenter
ces p'tc'-^s ou quelques-unes d'icelles , au-
quel ci s elles doivent être piujplves par les
témoins.
• Les pièces âe compara- Ton on autres qui
doivent être repré^ntées aux experts . ne
peuvent crr repr%.*rentces aux acculés avant la
confronta tion.
- Ln touc crat de can'e les juges peuvent
ordonner d'office ou lir la requête de la
partie pub- que ou civile 5 que l'pccufé fera
Gmu de faire, un corps d'écriture tel qu'il
C O M 727
lui feradiébé par les experts, ce qui fera
tait par procès-verbal au greffe; Se à la fin
du procès- verbal le juge peur ordonner que
ce corps d écriture fera reçu par pièce de
campa r ai fon^ & que les experts feront en-
tendus par voie de dépoiition fur ce qui
peut rélulter du corps d'écriture comparé
avec les pièces fa ufTès; ce qui a lieu quand
même ils auroient déjà dépofé fur d'autres
peces de comparai fon : le juge peut néan-
moins en ce cas nommer d'autres experts,
ou en adjoindre de nouveaux aux premiers ,
mais cela doit être fait par délibération dii
iîege.
Si les experts font incertains ou d'avis diffé-
rens , le juge peut ordonner qu'il ^era fourni
ie nouvelles pièces de comparai fon.
Lors du recollement des experts 5c de la
confrontation, les piecesde<;om;ûr.^//^/i doi-
vent êire^ repréfentées aux experts &c aux
accufés , à peine de nullité.
En casque laccufe demande par requête
qu'il foit remis de nouvelles pièces de com-
parai fon entre les mains des experts , les ju-
ges ne pourront y avoir ég-id qu'après l'inf-
trudlion achevée & par délibération de con-
feil fur le vu du procès, à peine de nullité.
Si la requête de Paccu'e eft admife, lé-
jugement doit lui être prononcé dans leS-
24 heures, & le juge l'interpellera cf'indiquer.
les pièces , ce qu'il fera tenu défaire fur le-
ch.imp . le juge peut néanmoins lui accorder:
un d '-lai , mais ce délai ne peut être pro-
rogerj & l'accuCé ne peut préfcnter dans la
luiTe d'autres pièces que celles qu'il a indi-
quées, ^aufà la partie publique ou civile à
les conte fter.
Les écritures ou /îgnaturcs privées de Tac-
cufé ne peuvent être rerues ponr picces de
comnarnifon ^ encore q-.i'elles euflènt été par'
lui reconnuesouvérih esavec.lui . (i ce n eft
du çon''entement le la partie publique & ci-
vile, s'il y en a , à peine H( nullité.
■_ Le pro,rs-verb il de pr- ent:tion des pièces -
'n.fiq r es parl'^'cuf '•, "ioit erre fiiren 'a pré-
sence St p r.lu: paraphé , s'il le peut ou veutr
frire ;li: ->n il en 'ern frt ment-on , à peine.
le nuilit- ; -t^ ii T ccufé n'eft p,is pri'onnier:
& ne e pr i- 'ente p s au • procès - vcrb 4 , il i
y fc'î procédé en lonabience , luiduementi
appelle.
En. procédant, à. l'information fur.» ces-
7i8 COM
pièces , on remettra auffi les anciennes aux
experts , avec les procès verbaux depréfènta-
tion & les ordonnances ou jugemens de
riceprion.
La partie civile &: publique peuvent pro-
duire de nouvelles pièces de comparaifon en
tout état de caufe , quand même on n auroit
pas permis à l'accufé d'en indiquer.
Lorfqu^il y a des pièces indiquées de part
& d'autre , le juge peut ordonner fur le tout
une même information par experts.
Si Paccufé demande de nouveaux experts
fur les pièces de comparaifon anciennes ou
nouvelles , on ne peut l'ordonner qu'après
Pinftruébion achevée par délibération de con-
feil , à peine de nullité.
Les nouveaux experts doivent toujours être
nommés d'office , à peine de nullité.
La nouvelle information peut être jointe
au procès.
Dans le cas du faux incident , l'ordon-
nance veut que fi les moyens de faux font
jugés admifliblcs , il foit ordonné qu'on en
informera tant par titres que par témoins ,
par experts & par comparaifon d'écritures ou
llgnatares, fans qu'il puifle être ordonné
que les experts feront leur rapport fur les
pièces prétendues faufles, ou qu'il fera pro-
cédé préalablement à la vérification d'icelles ,
à peine d*e nullité.
Les pièces de comparaifon doivent être four-
nies par le demandeur ; & celles que préfen-
reroit le défendeur ne peuvent être reçues, il
ce n'eft du confentement du demandeur &
de la partie publique , à peine de nullité ;
faufaux juges, après l'inftruétion achevée, à
admettre le défendeur à fournir de nouvelles
pièces de comparaifon , s'il y échet.
On obferve au furplus dans cette matière ,
les mêmes règles qu'en matière de faux prin-
cipal , fur la qualité des pièces de comparai-
fon y & fur l'apport de ces pièces, fur larepré-
fentation qui en eft faite aux témoins, & fur
le paraphe des pièces.
Le procès-verbal de préfèntation des pie-
ces de comparaifon doit être fait en préfencc
des parties , ou elles duement appellées ; les
parties peuvent y comparoître par procu-
reur, à moins que cela ne foit autrement
ordonné : on y fait mention fi le défendeur
convient ou non des pièces : fi elles ne font
pas reçues, on ordonne que Iç demandeur
COM
en fournira d'autres dans un certain délai.
Les pièces de comparaifonComTçimCes aux
experts de la même manière qu'il a été die
ci-devant.
On obferve auflî les mêmes règles quand
le défendeur ou accufé demande à four-
nir de nouvelles pièces de comparaifon , ou
qu'il foit entendu de nouveaux experts.
Lorfqu'il s'agit de procéder à la recon-
noiflance des écritures & fignatures en ma-
tière criminelle , Ci l'accufé nie l'écriture , ou
s'il eft en défaut ou contumace , on ordonne
que l'écriture fera vérifiée fur pièces de
comparaifon.
Le procès verbal de préfèntation de pie-
ces de comparaifon fe fait en préfence de la
partie publique & civile , s'il y en a , &
de l'accule , lequel pour cet effet eft ame-
né des prifons par ordre du juge , pour ailîf-
ter au procès-verbal fans aucune fomma-
tion préalable ; on n'en fait point non plus
lorfque la contumace eft inftruite contre
l'accule.
Qiiand il n'eft pas dans les prifons & que
la contumace n'eft pas inftruite, on le fom-
me de comparoître au procès-verbal , com-
me en matière de faux principal i cette fom-
mation fe fait en la forme prefcrite par Védit
de décembre 1 68o , concernant l'inftruiSlion
de la contumace ; & faute par l'accufé
de comparoître , on paffe outre au procès-
verbal.
Si l'accufé y eft préfent, on lui repréfènte
les pièces de co/np^ra/yo/z pour en convenir ou
les contefter fur le champ; on ne lui accorde
ni délai ni confeil. Les pièces qui (ont admi-
fes doivent être par lui paraphées, s'il le peut
ou veut faire , finon l'on en fait mention ; &
dans tous les cas elles font auffi paraphées
par le juge , par la partie publique, & par la
partie civile , fi elle peut &: veut les para-
pher , finon l'on doit en faire mention , à
peine de nullité.
Au cas que les pièces ne fbient par reçues ,
la partie civile , s'il y en a , ou la partie pu-
blique , doivent en rapporter d'autres dans
le délai qui fera prefcrit , finon il fera paffé
outre.
Les experts qui procèdent à la vérifica-
tion , doivent être nommés d'office & en-
tendus féparément par forme de.dépofition :
on ne peut pas ordotiner qu'ils feront préa-
lablement
C O M
labîement leur rapport , le tout à peine de
liullicé.
En procédant à l'audition des experts ,
on doit leur repréfenter les pièces de com-
paru if on.
On peut auiïî dans cette matière ordon-
ner que Faccufé fera tenu de faire un corps
d'écriture.
Enfin , on y fuit une grande partie des
règles prefcrites pour la comparaijon d'écri-
tures en matière de fiux principal, ainfî
que Tordonnance de 1737 l'explique , ce
qu'il feroit trop long de détailler ici.
De ces différentes formalités prefcrites
par les ordonnances pour la preuve par com-
paraifon d'écritures , il réiulte bien claire-
ment que cette preuve eft admile , tant
en matière civile qu'en matière criminelle ,
èc non feulement dans le cas du faux prin-
cipal ou incident , mais auflî lorfqu'il s'agit
de reconnoifl'ance d'écriture ou iignature
en général.
Mais il cft certain que la déposition
même uniforme des experts , ne fait jamais
feule une preuve complète ; elle n'eft con-
iîdérée que comme une femi-preuve , à
caufe de l'incertitude de leur nrt pour la
vérification des écritures. Voyelle commen-
taire de Boiceau , fur l'article liv de l'ordon-
nance de Moulins y chap. v; Ù Danty , de la
preuve par témoins , ibid. le traité de la preuve
par comparaifon d'écritures , de M. Levaycr ;
celui de la vérification des écritures , par M.
de Blegny, 6c les ordoimances qui ont été
citées. {A)
COMPARANT, adj. pris fub. (.Jurifpr.)
ce terme qui vient de comparoir ou com-
paroitrc , a deux ufages differens en ftyle
de pratique. Dans les qualités des jugemens
où l on dénomme d'abord les parties litigan-
tes 5 chaque partie eft dite comparante par tel
& tel fes avocat & procureur , c'eft-à-dire,
qu'elle eft repréfcntée par eux dans les pro-
cès-verbaux qui ie font devant un juge ou
devant notaire. Onappelie quelquefois com-
parant la partie même qui comparoît , &
non-comparant celui qui ne fe préfente pas.
V. ci-après Comparoir , Déiaut faute
DE COMPAROIR. {A)
COMPARATIF, adj.pris fubft. terme
de Grammaire. Pour bien entendre ce mot ,
ikfeut obferver que les objets peuvent éure
Tome VI ÏL
C O M 71^
qualifiés ou abfolument fans aucun rapport
à d'autres objets , ou relativement , c eft-à-
dire , par rapport à d'autres.
1°. Lorfque l'on qualifie un objet abfolu-
ment, l'adjedif qualificatif eft dit être au
pofitif. Ce premier degré eft appelle ;7q/Z/-/f,
parce qu'il eft comme la première pierre qui
eft pofée pour fervir de fondement aux au-
tres degrés de fignification ; ces degrés font
appelles communément degrés de comparai-
fon : Céfar étoit vaillant , le foleil eft bril-
lant ; vaillant ôc brillant lont au pofitif.
En fécond lieu , quand on qualifie un
objet relativement à un autre , ou à d'autres,
alors il y a entre ces objets ou un rapport
d'égalité , ou un rapport de fupériorité , ou
enfin un rapport de prééminence.
S -"il y a un rapport d'égalité , l'adj eârif
qualificatif eft toujours regardé comme
étant au pofitif; alors l'égalité eft marquée
par des adverbes œque ac , tdm quam , ita ut ,
& en françois par autant que , auffi que : Céfar
étoit aufiTi brave qu'Alexandre Pavoit été ;
(î nous étions plus proche des étoiles , elles
nous paroîtroieiit aulïî brillantes que le fo-
leil ; aux folftices , les nuits font auflî lon-
gues que les jours.
1°. Lorlqu'on obierve un rapport de plus
ou un rapport de moins dans la qualité de
deux chofes comparées , alors l'adjeéèif qui
énonce ce rapport eft dit au comparatif; c'eft
le fécond degré de fignification , ou, comme
on dit , de comparaifon , Petrus efî doâior
Paulo y Pierre eft plus (avant que Paul -
le foleil eft plus brillant que la lune ; 011
vous voyez qu'en latin le comparatif ç{i dii-
tingué du pofitif par une îerminaifon par-
ticulière, &: qu'en françois il eft diftingué
par l'addition du moi plus ou du mot moins.
Enfin , le troificme degré eft appelle fu^
perlatif. Ce mot eft formé de deux mots
latins fuper , au delTus , & latus , porté ,
ainfi le fu perlatif marque la qualité portée
au fuprême degré de plus ou de moins.
Il y a deux fortes de fuperlatifs en fran-
çois , 1°. le fuperlatif abfolu que nous for-
mons avec les mots très ou 2iv&cfort ; extrê-
mement ; & quand il y a admiration , avec
bien : il efl bien raifonnable ; très vient du la-
tin /-er , trois fois très-grand , c'eft-à-dire,
trois fois grand j fort eft un abrégé de /or-
tcment, , ■ . • ..
Yyyy
730 C O M C O M
2°. Nous avons encore le fuperlarif rela- \ difpnr , egertf/s, Ôcc. Qiiand on veut ex'prî-
tif • /■/ efl le plus raifonnabk de fes frères. \ mer un degré de ccmparaifon , & que le
Nous n'avons en françois de comparatifs
en un Icul mot que meilleur , pire èc
moindre.
« Notre langue , dit le père Eouhours , n'a
poins pris de luperlatifs du latin , elle n'en
a point d'autre que généralijfimc , qui eft
tout françois , & que M. le cardinal de Ri-
chelieu fit de Ton autorité , allant comman-
der les armées de France en Italie , il nous
en croyons M. de Balzac. » Doutes fur la
langue françaife , p. C'a.
Nous avons emprunté des Italiens cinq
ou fix termes de dignité , dont nous nous
fervons en certaines form.ules , &c auxquels
nous nous contentons de donner une termi-
nai lon françoife , qui n'empêche pas de re-
coiinoirre leur origine latine ; tels font ,
révérendijjime , illujlrijfime , excellentijjîmt ,
éminentifjime.
Il y a bien de L'apparence que (1 le ccm-
foraùf èc le fuperlatif des latins n'avoient
pas été diftingués du poiitif par des termi-
iwifons particulières , comme le rapport
d'égalité ne l'efl; point \ il y a , dis-je , bien
cie Pnpparence que les termes de comparât f
& de Juper lai if nous feroient inconnus.
Les Grammairiens ont obfervé qu'en la-
tin le Comparatif &c le fuperlatif fe forment
du cas en / , du pofitif en ajoumnt or pour
le mafcijlin ôc pour le féminin , & us pour
le genre neutre. On zioute JJimus au cas en /
f our form.er le fuperlatif: ainfi l'on dit fane-
tus , fancîi ; fanûior , fancîius , fancliJJ'imus ;
for fis , fortis , forti ; foi'tior , fortius , for-
tijfmus.
Les adjectifs dont le poiitif eft terminé en
er , forment aufli leur comparatif du cas en /;
pulckcr , pukhri ^pulchrior ,pulchrius ; mais
le iupcrlatiffc forme en ajoutant r:jnus au
nominatif maiculin du Tpo{^ïf,]>uk/ier,pu!
therrimus.
Les adjeftifs en lis fuirent la règle géné-
rale pour le comparatif j facilis , facilior ,
facilius ; humilis , humilior ;fimilis ,fimilior :
mais au luperlatif on dit yfacillimus , humil-
limus , fimillimus ; d'auires fuivent la règle
générale , utilis , utilior , utilijfimus,
Pluiieurs noms adjectifs n'ont ni compara-
tif t ni fuperlatif , tels font , Romanus ,
f air lus 3 dufkx , legitimus , claudus , unicus j i de mêlUîior ^ plus doux que le miel j comipfi
poiitif n^^ ni compare: if :, ni fuperlatif, on fe
Tcrtde magi s ^oviï m^arquer le comparatifs
ôc de valdè ou de maxime pour le fuperlatif,
ainii l'on dit , magis pius , ou maxime pins.
On peut auffi fe fervir des adverbes
magis ôc maxime y avec les adje6i;its qui ont
un comparatif ôc un fuperbtit : on dit fort
bien , magis doclus , ôc valdè , ou m.axim^
doclus.
Les nom.s adjectifs qui ont au pofitif une
voyelle devant us , comme crduus y pius ^
n'ont point ordinairement de comparatif y ni
de fuperlatif. On évite ain(i le bâillement
que feroit la rencontre de plusieurs voyelles
de fuite , il on difoit arduior y piior : on
dit plutôt magis arduus , magis pius ; ce-
pendant on dix pnjfmus , qui nVft pas ià rare
que piior. Ce uioi piiffimus étoit nouveau du
temps de Cicéron. Marc Antoine l'ayant
iiazardé , Cicéron le lui reprocha en plein
fénat {Philipp. XIII , chap. xix , n. /fz ,) :
Piijfimos quœris ; & quod verbum omninh
nullum. in linguâ latinâ ejî, id pr opter tuant
divinam pietatem novum inducis. On trouve
ce mot dans les anciennes infcriptions , ôc
^ dans les meilleurs auteurs poftérieurs à Ci-
céron. Ainii ce mot qui commençoit à s^in-
:roduirc dans le temçs de Cicéron , fut en-
suite autorifé par l'uf'age.
Il ne fera pas inutile d'obferver les quatre
adjeélifs fuivans bonus y malus y magnus ^
parvus ; ils n'ont ni comparatif, ni fuperlatif
qui dérivent d'eux-mêmes : on y fupplce
par d'autres m.ots qui ont chacun une ori-
gine parnculiere.
COMPARATIF.
MelicT, . . , meilleur.
Fejcr, pire, plus mau-
vais.
Major, plus grand,
& de-là majeur.
Miner , plus petit ,
mineur.
Vofïîus croit que melior vient de magis
velim ou malim ; Martinius & Faber le font
venir de /usaw , qui veut dire curœ c/? , gra^
tum eJî y fAiKirtt , cura. Quand une choie efl
meilleure qu'une autre , on en a plus de
loin , elle nous efl pius chère , mea cura j
fe difoit en latin de ce cp^on oimoit. Per-
rotus dit que mel/or efl une contraction
POSITIF.
B:nus, . . bc»
Malus, mauvais.
A'Iiignus, grand.
Panrus, . . petit.
SUPERLATIF.
Optimits , fort bon.
Pefùmui, très-mau-
vais.
Mjximus, . . très-
grand.
Minimus , fort pe-
tit.
CO M
on a dit iTe^nior , plus cruel que Nér<
Plaute a die Pœnior , plus Carthaginol
c'eft-à-dire , plus fourbe qu'un Carthagi-
nois i & c'eft ainfi que Malherbe a êài ,plus
Mars que Mars de la Thrace.
Ilidore le fait venir de molUor , non dur ,
plus tendre. M. Dacier croit qu'il vient du
grec a/jcuvQv , qui fignifîe meilleur. C'efl: le
fentiment de Scaliger 6c de l'auteur du
N^ovitius.
Optimus , vient de optaîijfirnus , maxime
optatus , très-fouhaité , dciirable , & par
cxtenfion, très-bon, le meilleur.
A Pégard depejor , Martinius dit qu'en
faxon l>eus veut dire malus ; qu'ainiî on
pourroii bien avoir dit autrefois en latin p:us
pour malus : ©n lait le rapport qu'il y a en-
tre le è de p ; :imCipeus, génitif, pcï, com-
paratif , peïor y &c pour plus de facilité
pejor.
Pejfimus vient de pejfum , en bas , (ous
les pies , qui doit être foulé aux pies ; ou
bien de pejor , on a fait poiJJImus , ôc en-
(iikt pejjim us par contraction.
Major vient naturellement de magnus ,
prononcé en mouillant le gn à la manière
des Itahens , ôc comme nous le prononçons
en magnifique feigneur , enfcigner , àcc, Ainfi
on a dit ma-ignior , major.
Maximus vient aulTî de magnus ; car le
X eft une lettre double qui vaut autant que
es , & fouvent^j : ainfi , au lieu de magiif-
fimus y on a écrit par la lettre double
maximus.
Minor vient du grec fJLiwffoç , parvus.
Minimus vient de minor ; on trouve
même dans Arnobe miniffimus digitus , le
f)lus petit doigt. Les mots qui reviennent
ibuvent dans Tufage iont fujets à être
abrégés.
Au relie , les adverbes ont auiïi des de-
grés de lignification , bien y mieux , fort
bien ; ben} , melius , optimè.
Les Anglois, dans la formation de la plu-
part de leurs comparatifs &c de leurs fuperla-
tifs , ont fait comme les Latins ; ils ajou-
tent er au pofitif pour former le comparatif,
& ils ajoutent e/? pour le fuperlatif Rich ,
riche; richer , plus riche j Me richeji, le
plus riche.
Ils fe fervent aulïî à notre manière de
more, qui veut dire plus , & de mojl , qui
C O M 75Ï
fignifie très-fort , le plus ; honeff , honnête ;
mcre honejî , plus honnête ; mojî honef. , très-
honnête , le plus honnête.
Les Italiens ajoutent au pofitif p/i , plus ,
ou mena, moins, félon que la chofe doit
être ou élevée ou abaifiée. Ils fe fervent
auffi de molto pour le fuperlatif, quoiqu'ils
aient des fuperktifs à la manière des Latins :
belliffimo ., très-beau \ bellrjfnna , très-belle ;
buonijfîmo , très - bon ; buonijjima , très-
bonne.
Chaque langue a fiir ces points fès ufa-
ges j qui font expliqués dans les grammaires
particulières. {F)
COMPARATJONE ;punc}um ex com^
paratione, c'eft ainli quAppollonius appelle
l'un d^s foyers de l'ellipfe ou de l'hyperbole.
^cje:(_ Foyer. (O)
COMPARER , V. ad. quî défigne racte
de l'entendement , appelle comparaifon. V.
Comparaison.
Comparer des équations , eft une exprell
fion dont on fe fert quelquefois dans Tana-
lyfe pour réduire plufieurs équations en
une ièule. Soit , par exemple , x-=^ ayy^
x=a a — y y , comparant enfemble les deux
valeurs de x que fournifient ces équations, on
a. 2 ayy=^aa — yy; équation qui nÊ ren-
ferme plus qu'une inconnue. Cet exemple
très-fimple fuffit pour en faire imaginer
d'autres. Foye^ Evanouissement & Ré-
duction. (O)
COMPARES, f. f pi. {Jurifpr.) font
des ufages & des redevances prétendues par
les vicomtes de Narbonne contre Pévêque
du même lieu. Il en eft parlé dans la vie
d' Aymeri IIl , liv. IV , des mém. de Langue"
doc , page £8G. {A)
COMPAROIR ou COMPAROITRE,
V. n. {Jurifpr.) fignifie ih préfemer devant
le juge , greffier, notaire, ou autre offi-
cier public , pour répondre à une fomma-
tion ou affignatioH. Voye^ ci'devam Com-
parant.
Il y a des défauts faute de comparoir. V.
au mot Défaut.
Anciennement lorfqu'un bourgeois de
Bourges, mandé par le prévôt ou par le
voyer, n'avoit pas comparu , &; étoit con-
damné à l'amende ; fi ce bourgeois vouloit
être déchargé de l'amende , prétendant qu'il
n'avoit pas reçu PavertilTement , il faîloic
Yyyy i
75*
C O M
qu'il fe battît en duel , fuivant la coutume
barbare de ce temps-là , où le duel paflbit
pour un moyen de s'afTurcr de la vérité des
laits. Louis VI abolit cette mauvaife cou-
tume , ik ordonna que quand un bourgeois
de Bourges aflSrmeroit qu'il n'avoit pas reçu
l'avertiflèment , il feroit quitte de l'amende ,
ôc qu'il n'y auroit plus de duel comme aupa-
ravant. Cette ordonnance de Louis VI fut
confirmée par Louis VII en 1 145 , de par
Louis VIII en 1224. Voye^ le recueil des
vrdonnnn es de la troifîeme race. {A)
COMPARTIMENT, f. f. en architec-
ture , peinture , fculpture , & autres arts ,
eft la dépofîtion de figures régulières , for-
mées de lignes droites ou courbes & pa-
rallèles , & divifées avec fymmécrie p<»urles
lambris, les plafonds de plâtre, de ftuc,
de bois, &c. êc pour les pavemens de pierre
dure , de marbre , de mofaïque , &x.
Compariimens polygones , font cebx qui
ibnt formés de figures régulières & répétées,
ëc qui peuvent être compris dans un cercle ,
comme les compartimens du Val-de-Grace
^ de l'Aflom-ption à Paris,
Compartimens des rues , eft la diftribution
régulière des rues , îles , &: quartiers d^une
ville.
Compartimens de tuiles , eft l'arrangement
/"ymmétrifé de tuiles blanches , rouges , de
verniflees , pour la décoration des couver-
tures & des combles.
Compartimens de vitres ^ font les diffé-
rentes figures que forment les panneaux
de vitres blanches ou peintes.
Compartimens de parterre , ce font les dif-
férentes pièces qui donnent la forme à un
parterre dans un jardin. (P)
; COMPARTITEUR, r. m. (Jz//7/^/-.)
quafi partitor , eft celui des juges qui a ou-
vert le premier un avis contraire à celui
du rapporteur , & qui a commencé le par-
tage d'opinions ; ce qui n'arrive que par
partage d'opinions dans les procès par écrit
ou inftances appointées en matière civile ;
car en matière criminelle il n'y a jamais de
partage, c'eft-à-dire, que quand les avis
font partagés , le jugement pafïè à l'avis
le plus doux ; & dans les affaires civiles
d'audience , lorfque les avis font partagés,
on ordonne un délibéré ou appointement.
Au parlement ;, lorfqu'une affaire fe
C O M
trouve partagée , elle eft portée dans une
autre chambre pour y être jugée \ le rap-
porteur & le compartiteur vont dans cette
chambre expofer chacun les motifs & les
raifons de leurs avis. Fbjeiç^ Partage. {A)
COMPARUIT, f. m. {Jurifpr.) eft un
adle que le juge délivre à l'une des parties
litigantes , pour certifier fa comparution ,
lorlque Pautre partie eft défaillante ou
décédée j pour faire appeller de nouveau
en caufe le défaillant ou (es héritiers i
pour reprendre l'inftance , & procéder fui-
vant les derniers erremens. Il en eft parlé
dans la coutume de Lille , art. cxxxvij de
l'ancienne i & en la nouvelle, titre de l' ac-
tion ^ art. XX y & en l'ancienne coutume
de Boulonnois , à la fin ; & celle de Dreux ,
art. Irij , où. ce terme femble fignlfier le
défaut que le demandeur fait à l'alïîgnation
qu'il a fait donner au défendeur. Dans
l'ufage préfènt , la cédule de prélentatioii
que le procureur de chaque partie doit
prendre au greffe , tient lieu d'ade de com-
paruit. Voyez le glojf. de M. de Lauriere à
ce mot comparuit. {A)
^ COMPARUTION, f f . {Jurifpr.) t^
l'ade que fiit celui qui fe préfence en juf-
tice , ou devant un notaire , ou autre ofîî-
cier public. Il y a des actes de juftice où la
Comparution doit être faite en perfonne : par
exemple , en matière civile , lorfqu'une par-
tie doit fubir interrogatoire ou prêter fer-
ment en matière criminelle , lorfque l'ac-
cufé eft décrété d'affigné pour être oui ,.
ou d'ajournement perfonnel.
Il y a d'autres a(àes de juftice où la com-
parution eft néanmoins différente de la
préfentation proprement dite , par laquelle
on entend l'adte par lequel un procureur fo
conftitue pour fa partie.
La comparution peut être faite par la par-
tie en perfonne , ou par le miniftere de fon
avocat de de fon procureur , comme dans
les matières civiles ordinaires.
La comparution devant un notaire , ou
autre ofïicier public , pour des a6tes extra-
judiciaires , fe faitaulïi par la partie en per-
fonne , ou par le miniftere de fon procu-
reur ad lites ; mais elle peut aufîî être faite-
par le miniftere d'un procureur ad negotia ,
qu'on appelle communémait un fondé d&
procuration».
C O M
Le demandeur ou autre perfonne qui
provoque le miniftere du juge ou aurre
officier public , fait fa comparution de fon
propre mouvement j au lieu que le défen-
deur fait la lîenne en conféquence d'une
fommation çu d'une allignation , & quel-
quefois en conféquence d^une ordonnance
ou autre jugement , qui ordonne un procès-
verbal ou autre a6te extrajudiciaire , où les
parties doivent comparoitre en perfonne.
Dans les procès- verbaux & autres actes
faits par les juges notaires, ou autres of-
ficiers publics , dans lefquels les parties
doivent comparoitre en perfonne ou par
procureur, on donne adte refpedtivement
îiux parties ou à leurs procureurs , de leurs
comparutions , dires , & requilîtions , dé-
fenfes au contraire ; ôc s'il y a des défaillans ,
on donne défaut contre eux. Voye-^ci-devant
Comparant & Comparoir, ù Présen-
tation. ( A )
COMPAS, f. m. inftrument de mathé-
matique , dont on fe lert pour décrire des
cercles & mefurer des lignes , ùc. Voye^
Cercle, & Ligne, &c.
Le compas ordinaire eft compofé de deux
jambes ou branches de laiton , de fer , ou
de quelque autre métal , pointues par en-
bas, de jointes en-haut par un rivet , fur
lequel elles fe meuvent comme fur un
centre.
On attribue Pinvention du compas à Ta-
lalis , neveu de Dédale par fà fœur. Selon
les poètes. Dédale conçut une telle envie
contre Talaiis , qu ij le tua. L'auteur du
labyrinthe de Crète ne devoit pourtant point
être jaloux d'un compas.
Nous avons aujourd'hui des compas de
différentes efpeces & conftruâiions , com-
me des
Compas a trois branches. Leur conf-
tru6tion eft femblable à celle des compas or-
dinaires , excepté qu'ils ont une branche
de plus. Ils fervent à prendre trois points
à la fois, ôc à former ainïi des triangles ,
à placer trois pofîtiom à la fois d'une carte
que l'on veut copier, &c.
Le compas a verge confîfte en une
longue branche ou verge, portant deux
curfeurs ou boîtes de laiton , l'une fixée à
un bout , l'autre pouvant glilîer le long de
k verg.e avec uiie vis , pour l'airujettij; fuiyant
COM -}i
le befoin. On peut viffer à (es curfeurs des
pointes de toute efpece , foît d-'acier , ou
de quelqu^iutre chofe femblable. On s'en
ferc pour décrire de grands cercles , oa pren-
dre de grandes longueurs.
Le Compas D\ARTisAN€ft fort& foH-
de , fon ufage ordinaire étant de fervir à
couper le carton, le cuivre , &c. Il eft rra-
verfé par un quart de cercle , afin qu on
puilTe l'arrêter fixement à une ouverture , ^
en ferrant une vis qui appuie fur le quart de
cercle.
Le Compas a l'allemande a fes bran-
ches un peu courbées , enforte que les poin-
tes ne fe joignent que par les bouts.
Compas a pointes changeantes : on
appelle ainfi des compas qui onD dilfcrentes
pointes , que l'on peut ôter & remettre fe-
lonje befoin.^ Ils ibnr fon utiles dans les
delïins d'archîtedure , où il s'agit aflèz fou-
vent de faire des traits bien formés , bien
dillinds , &c très-déliés.
Compas a ressort : ce compas eft tout
fait d'acier trempé , & fa tête eft contour-
née de manière qu'il s'ouvre de lui-même
gar fon refTort j la vis qui le traverfe en arc ,
fert à l'ouvrir ôc à. h fermer à volonié par
le moyen d'un écrou. Cette forte de compas
eft fort commode pour prendre de petites
mefures, & faire de petites diviiîons : mais
ils doivent être un peu courts , & trempés
de manière qu'ils fafTent bien refïbrt , Ôc
qu'ils ne cafïent pas.
Compas a pointes tournantes ; c'eft
une nouvelle invention de compas pour évi-
ter l'embarras de changer de pointes ; fon
corps eft femblable au compas ordinaire ;
vers le bas ôc en-dehors , on ajoute aux
pointes ordinaires deux autres pointes,
dont l'une porte un crayon , & l'autre fert
de plume; elles font ajuftées toutes deux
de manière qu'on puifTc ks tourner au
befoin.
Quant à la rrempe de ces compas, les
pointes des petits fe trempent par le moyen
d'un chalumeau ôc d'une Limpe ; on les fait
chauffer jufqu'à ce qu'ils foient rouges; on
les laifîe refroidir ,. & elles font trempées ,
c'eft-à-dire, durcies. Les pointes plus
grofîes fé trempent au feu de chaiboiï
avec le chalumeau; on les chauffe jufqu'à
ce qu'elles foient d'un rou^e cerife , Se oa
7U C O M
les plonge enfuice dans l'eau. Voy. Trempe.
Harris Ù Ckambîrs. ( E)
Compas de proportion : cet inftru-
menr de mathématiques que les Anglois
appellent /èc7ci/r, eft d'un grand ufage pour
trouver des proportions entre des quantités
de même elpece , comme entre lignes &
lignes , iurfiices Ôc furfaces , &c. c'eft pour-
quoi on Pappelle en France , compas depro-
porùor.
Le grand avantage du compas de propor-
tion fur les échelles communes , confîfte en
ce qu'il eft fait de telle forte , qu^il convient
à tous les rayons & à toutes les échelles. Par
les lignes des cordes , des linus , ùc. qui
iont fur le compas de proportion , on a les
lignes des cordes , des linus , ùc. d'un
rayon quelconque , compriles entre la lon-
gueur & la largeur du /cc?ei/r ou compas de
proportion , quand il eft ouvert. V. Echelle
& Ligne.
'Lt compas de proportion eft fondé fur la
quatrième proportion du iixieme livre
d'Euclide , où il eft démontré que les trian-
gles femblables ont leurs côtés homologues
proportioiinels. Voici comment on peut en
prendre une idée. Suppofons que les lignes
AB , A C {fig. x6, Géom. ) foient les jambes
du compas ^ ôc que AD , A E repréfentcnt
deux ferions égales qui paflent parle centre ,
ou qui partent du centre ; fi alors on joint
les points C5 , & Z> £ , les lignes C B ,D
E feront parallèles : c'eft pourquoi les trian-
gles AD E, A CB font femblables , &
par conféquent les côtés A D , D E , AB ,
(k B C font proportionels ; c'eft-à-dire ,
que AD.DE :: A B.B C: donc Ci AD
eft la moitié , le tiers , oa le quart de A B ,
D ECera. aulli k moitié, letiers, ou le quart
de B C. Il en eft de même de tout le refte,
C'eft pourquoi fi -^ D eft corde , finus , ou
tangente d^un nombre quelconque de degrés
pour le rayon A B ,D E fera la mêmcchofe
pour le rayon B C. V. Corde j Sinus , ùc.
Defcription du eompas de proportion. Cet
inftrum.ent confifteen deux règles ou jam-
bes égales, de cuivre ou d'autre matière,
rivées l'une à l'autre , en forte néanmoins
qu'elles peuvent tourner librement fur leur
charnière. Voye':^ fa figure , Plan, géom, fig.
i£. Sur les furfaces de cet inftrument font
tracées plufieurs lignes, dont les principales |
C O M
font la ligne des parties égales , la ligne des
cordes, la ligne des finus , la ligne des tan-
gentes, la ligne des iecantes, ôc la ligne
des polygones.
La ligne des parties égales , que l'on ap-
pelle aulfi ligne des lignes , marquée X , eft
une ligne divifée en loo parties égales; &
quand la longueur de la jambe le permet ,
chaque partie eft fubdivifée en moitiés &
quarts. Cette ligne fe trouve fur chaque
jambe du compas ^ &c du même côté, avec
les diviiions marquées 1,1,3,4, &c. juf-
qu'à 10 , qui eft vers l'extrémité de chaque
jambe. Remarquez que dans la pratique , i
eft pris pour 10, ou ico , ou 1000, ou
loooo .&c. fuivant le befoin; en ce cas,
1 repréfente 20, ou 200, ou 2000 , 6'c. 8c
ainfi du refte. La ligne des cordes marquée
C fur chaque jambe eft divifée fuivant la
manière ordinaire, & numérotée 10, 20,
50 , &c. jufqu'à 60. Voye:(^ Corde. La ligne
des iînus marquée fur chaque jambe par la
lettre S , eft une ligne des finus naturels ,
numérotée 10, 20, 30, &c. jufqu'à 90,
^cyer Sinus.
La ligne des tangentes , marquée fur cha-
que jambe par la lettre T, eft une ligne des
tangentes naturelles, numérotée 10, 20,
30, &c. jufqu'à 45. Outre cela, il y a une
petite hgne des tangentes fur chaque jambe,
qui commence à 48°, ôc s'étend jufqu'à
7f°; elle eft marquée par la lettre t. Voye^
Tangente. La ligne des fécantes marquée
lur chaque jambe par la lettre S , eft une
ligne des fécantes naturelles numérotée , 1 o
20 , 30 , &c. juiqu'à 75 j cette ligne ne parc
pas du centre de l'inftrument j fon commen-
cement en eft diftant de deux pouces. Voye':^
Sécante. La Hgne des polygones marquée
par la lettre P far chaque jambe, eft nu-
mérotée, 4, 5, 6, ùc. jufqu'à 12; elle
commence à trois pouces du centre de l'inf-
trument. Voyc-;^ Polygone.
Outre CQs lignes , qui font eftentielles au
compas de proportion , il y en a d'autres pro-
che de fes bords extérieurs fur l'une &c l'au-
tre face , &: parallèles à ces bords ; elles fer-
vent aufTî à des ufages particuliers , dont
nous parlerons.
Les lignes que l'on trouve par le moyen
du compas de prcporiion font de deux elpe-
ces 'y elles font latérales bu parallèles. Les
C OM
premières font celles que l'on trouve fur
la longueur des cotés de cet inlmimcnt ,
comme A B , A C, ifig. Gx-,) &c les der-
niereSj celles qui traver'ènt d'une jambe à
l'autre , comme D P2, C ]3. P^emarquez que
Tordre ou l'arrangement des lignes fur les
compas de proportion les plus modernes , eft
différent de celui qui eft obfervé fur les
anciens; cnr la même ligne n^eft pas mifè
aujourd'hui à la même diftance du bord
de chaque côté ; mais la ligne des cordes ,
par exemple , eft la plus intérieure d^'un coté ,
& la ligne des tangentes fur TaUÉj^ L'avan-
tage eft que, quand Tinftrument eft mis à
un rayon pour les cordes , il fert auili pour
les iinus & les tangentes, fans que l'on foit
obligé d'en changer l'ouverture ; car la paral-
lèle entre les nombres 60 & 60 des cor-
des , celle qui entre les nombres 90 & 90
des iii>as , àc celle qui eft entre les nombres
45 ô^ 45 des tangentes , font toutes égales,
Chafnbers.
La defcription que Ton vient de donner
de cet inftrument , eft conforme à la conl-
rruâ:ion angloife. Les ccmpas de proportion
qui composent ce que Ton appelle en France
un étui de mathématiques , coniiftent aufîî
en deux reglesallemblées , comme ci-deflus,
dont chacune a pour Tordinaire G pouces de
' long , <3 à 7 lignes de large , & environ 1
lignes d'épaifleur. On en fait de plus petits,
pour avoir la commodité de les porter dans
la poche , & de plus grands pour travailler
fur le terrain , dont on proportionne la lar--
geur & Tépaillcur. On a coutume d'y tracer
C fortes de lignes ; favoir la Hgne des parties
égale , celle des plans & celle des poly-
gones d'un côté ; la ligne des cordes , celle
des folides & celle des métaux de l'autre
côté des jambes de cet inftrument.
On m^et encore ordinairement fur le bord
d'un côté une ligne divifée , qui fert à con-
noltre le calibre des canons , &c de l'autre
côté une ligne qui fert à connoître le diamè-
tre Se le poids des boulets de fer , depuis
un quart jufqu''à 64 Hvres.
Ufcge de la ligne des parties égales du com-
pas de proportion. Pour divifer une ligne
donnée en un nombre quelconque de par-
ties égales , par exemple , en fept ; prenez
la ligne donnée avec votre compas ; mettez
une de fcs pointes fm une divifion de la
C O M 735
ligne des parties égales , enforte que
cetre longueur puifle être exactement divi-
fée par 7 ; mettez-la , par exemple , fur
70 , dont la (eptieme partie eft 10 ; ouvrez
la iedbion ou plutôt le compas de proportion ,
jufqu'ài^e que l'autre pointe tombe exaéle-
ment fur le nombre 70 de la même ligne des
parties égales tracée fur l'autre jambe : dans
cette difpoiition , fi Ton met une pointe du
ccmpjs au nombre 10 de la m^ême ligne, Se
qu'on lui donne une ouverture telle que fon
autre pointe tombe au nombre 10 de la
même ligne tracée fur l'autre jambe, cette
ouverture fera la feptieme partie de la ligne
donnée. Remarquez que fi la ligne à diviler
eft trop longue pour être appliquée aux
jambes du compas de proportion, on en divi-
fera feulement une moitié ou une quatriè-
me partie par 7 , & le double ou le qua-
druple de cette ligne fera la feptieme partie
de la ligne totale.
1°. Pour mefurer les lignes du périmètre
d'un polygone , dont un des cotés contient
un nombre donné de parties égales ; prenez
la ligne donnée avec votre compas , & met-
tez-la fur la hgne des parties égales , au
nombre des parties for chaque côté qui
exprime fa longueur j le compas depropcrtion
reftant dans cet état , mettez la longueur de
chacune des autres lignes parallèlement à la
première , & les nombres où chacune d'elles
tombera , exprimeront la longueur de ces
lignes.
5°. Une ligne droite étant donnée & le
nombre des parties qu'elle contient, par
exemple 120 , pour en retrancher une plus
petite qui contienne un nombre quelconque
des mêmes parties égales , par exem.ple 15 ,
prenez la ligne donnée avec le compas ordi-
naire ; ouvrez le compas de proportion jus-
qu'à ce que les deux pointés tombent fur
1 20 de chaque côté ; alors la diftance de 25
à 2^ donnera la ligne demandée.
4°. Pour trouver une troifieme propor-
tionnelle à deux lignes données ou une qua-
trième à trois ; dans le premier cas , prenez
avec votre co/tî/;^^ la longueur de la première
ligne donnée , Se mettez-la fur la ligne des
parties égales depuis le centre jufqu'au nom-
bre oii elle fe termine ; alors ouvrez le com^
pas de proportion , jufqu'àçe que la longueur
, de la féconde Hgne foit renfermée dans Tou-
73^ COM ^ ^
verrurc comprife entre les extrémités de îa
première. Le compas de proportion reliant
ainfi ouvert , mettez la longueur de la fé-
conde ligne fur les deux jambes de l^inftru-
ment , en commençant au centre , & remar-
quez où elle fe termine; la diftance qui eft
comprife entre ce nombre & le même qui
lui répond fur l'autre jambe , donne la troi-
lieme proportionnelle : dans le fécond cas,
prenez la féconde ligne avec votre compas ,
& ouvrant le compas de proportion , appli-
quez cette étendue aux extrémités delà pre-
mière , que l'on a portée fur les deux jambes
de rinfrrument depuis le centre. Le compas
de proportion reflant ainlî ouvert , portez la
troiflem.e ligne comme ci-de(ïus depuis le
centre ; alors l'étendue qui eft entre le nom-
bre oii elle fe termine fur les deux jambes ,
eft la quatrième proportionnelle.
5°. Pourdivifer une ligne en une rai{bn
donnée quelconque , par exemple en deux
parties qui foientTune à l'autre comme 40
eft à 70 , ajoutez enfembleles deux nombres
donnés, leur fomme eft no ; alors prenez
avec votre compas la ligne propofée que l'on
fuppofe 165 , &: ouvrez Tinftrument juf-
qu'à ce que cette diftance s'étende 1 10 à 100
fur les deux jambes; le fecleur demeurant
ainli ouvert , prenez la diftance de 40 à 40 ,
comme aufîi celle de 70 à 70 ; la première
donnera 60 , & la dernière 105 , qui feront
les parties que Ton propofoit de trouver ;
car 40. 70 : : 60. loy.
6°. Y'our ouvrir ]e compas de proportion de
forte que les deux lignes des parties égales
fadent un angle droit , trouvez trois nom-
bres comme 3 , 4 & 5 , ou leurs équimul-
tibles, 60, 80, 100, qui puiflent expri-
mer les côtés d'un triangle redangle ; pre-
nez alors avec votre compas la diftance du
centre à loo , & ouvrez l'inftrument juf-
qu'à ce qu'une des pointes de votre compas
étant mife fur 80, l'autre pointe tombe
fur le point 60 de l'autre jambe, alors les
deux lignes des parties égales renferment
un angle droit.
7**. Pour trouver une ligiîe droite égale
à la circonférence d'un cercle ; comme le
diamètre d'un cercle eft à fa circonférence
à-peu-près comme yo eft à 157, prenez le
diamètre avec votre compas , 6c mettez ce
4iametre fur les jambes de Pinftrument de
C OM
yo à |o ; en le lailTant ainil ouvert , prenez
avec le compas la diftance de 1 57 à 1 57 ; elle
fera la circonférence demandée.
Ufage de la ligne des cordes du compas de
proportion. 1°. Pour ouvrir cet inftrument
enforte que les deux lignes des cordes faf-
lent un angle d'un nombre quelconque de
degrés , par exemple 40 ; prenez fur la ligne
des cordes la diftance depuis la charnière
jufqu'à 40, nombre des degrés propofés;
ouvrez l'inftrument jufqu'à ce que la di(-
tance de 6g à 60 fur chaque jambe foit égale
à la dift^ÉJ^ufdite de 40 ; alors la ligne des
cordes faSPnigle requis.
2°. L'inftrument étant ouvert , pour trou-
ver les degrés de fon ouverture, prenez
l'étendue de 60, à 60 ; mettez-la fur la ligne
des cordes en commençant au centre , le
nombre oli elle fe terminera fera voir les
degrés de (on ouverture. En mettant des
vifieres ou des pinnules fur la ligne des cor-
des , le Compas de proportion peut fervir à
prendre des angles fur le terrain , de même
que réquerre «d'arpenteur, le demi-cercle
ou le graphometre.
3°. Pour faire un angle d'un nombre don-
né de degrés quelconque fur une ligne don-
née , décrivez fur la ligne donnée un arc de
cercle , dont le centre eft le point où doit
être le fommet de l'angle ; mettez le rayon
de 60 à 60 ; ôc l'inftrument reftant daios
cette lituarion , prenez fur chaque jambe
la diftance des deux nombres qui expri-
ment les degrés propofés, & portez-la de
la ligne donnée fur Parc qui a été décrit ;
enfin , tirant une ligne du centre par l'ex-
trémité de l'arc , cette ligne fera l'anale
propoie.
4°. Pour trouver les degrés que contient
un angle donné , autour du fommet décri-
vez un arc, Ôc ouvrez le compas de propor-
tion jufqu'à ce que la diftance de 60 à 60
fur chaque jambe foit égale au rayon du
cercle ; prenant alors avec le compas ordi-
naire la corde de l'arc , & la portant fur
les jambes de cet inftrument , voyez à quel
même nombre de degrés fur chaque jambe
tombent les pointes du compas ; ce nom-
bre eft la quantité de degfés que contient
l'angle donné.
5°. Pour retrancher un arc d'une gran-
deur quelconque de la circonférence d'un-
cercle
C OM
cercle , ouvrez l'infiruraent j'ufqu'à ce que
la diftance de 60 à 60 foit égale au rayon
du cercle donné : prenez alors l'étendue de
la corde du nombre de degrés donné fur
chaque jambe de l'inllrument , & mettez-la
{urla circonférence du cercle donné. Par
ce moyen on peut infcrire dans un cercle
donné un polygone régulier quelconque ,
aufli-bien que par la ligne des polygones.
Ufage de la ligne des polygones du com-
pas de proportion 1°. Pour infcrire un poly-
gone régulier dans un cercle donné , prenez
avec le compas ordinaire le rayon du cercle
donné, & ajuftez-le au nombre 6 de la ligne
des polygones (ùr chaque jambe de l'ini-
trument ; en le laiflant ainfi ouvert , pre-
nez la diftance des deux mêmes nombres
qui expriment le nombre des côtés que doit
avoir le polygone ; par exemple , la diflance
de 5 à 5 pour un pentagone , de 7 à 7 pour
un eptagone , &c. c&s diiknces portées au-
tour de la circonférence du cercle, la di-
viferont en un pareil nombre de parties égales.
2°. Pour décrire un polygone régulier ,
par exemple un pentagone , fur une ligne
droite donnée , avec le compas ordinaire ,
prenez la longueur de la ligne , appliquez-
la à l'étendue des nombres 5 » 5 ^^^ l^s li-
gnes des polygones ; l'ihflrument demeu-
rant ainfi ouvert, prenez fur les mêmes li-
gnes l'étendue de 6 à 6 , cette diftance fera
le rayon du cercle dans lequel le polygone
propofé doit être infcrit ; alors, fi des extré-
mités de la ligne donnée l'on décrit avec ce
rayon deux arcs de cercle , leur interfedion
fera le centre du cercle cherché.
3°. Pour décrire fur une ligne droite un
triangle ifocele , dont les angles fur la bafe
foient doubles chacun de l'angle au fommet,
ouvrez l'inftrument jufqu'à ce que les extré-
mités de la ligne donnée tombent (ùr les
points 10 & 10 de chaque jambe ; prenez
alors la diftance de 6 à 6 , elle fera la lon-
gueur de chacun des deux côtés égaux du
triangle cherché.
Ufage de la ligne des plans du compas de
proportion. On voudroit conflruire un trian-
gle .^ 5 C femblable au triangle donné abc,
& triple en furface {Plane, d' arpentage, fig.
z J.) ; il n'y a qu';\ prendre avec un compas
commun la longueur du côté ab jla. porter
fur la ligne des plans à l'ouverture du p.'e-
Tome VIII.
COM 737
rnîer plan : le compas de proportion refiant
ainfi ouvert, on prendra avec le compas com-
mun l'ouverture du troifieme plan , & l'on
aura la longueur du côté homologue au côté
a b : on trouvera de la même matière les
côtés homologues aux deux autres côtés du
triangle propofé , & de ces trois côtés l'on
en formera le triangle ABC, qui fera fem-
blable au triangle donné a b c , &c triple en
furface.
Si le plan propofé a plus de trois côtés ,
on le réduira en triangles par une ou plu-
lîeurs diagonales : (i c'ert un cercle qu'il
s'agiiîè de diminuer ou d'augmenter y on
fera fur fon diamètre l'opération que nous
venons de décrire.
Etant données deux figures planes fera-
blables (/%•. 24.), trouver quel rapport elles
ont entr 'elles.
Prenez lequel vous voudrez des côtés de
l'une de ces figures , & le portez à l'ou-
verture de quelque plan; prenez enfliite le
côté homologue de l'autre figure , & voyez
à l'ouverture de quel plan il convient ; les
deux nombres auxquels conviennent les deux
côtés homologues , expriment la raifon que
les plans propofés onf^ entr'eux : û le côté
a b , par exemple , de la- plus petite , con--
vient au quatrième plan , & que le côté
homologue A B de l'autre convienne au
fixieme plan , les deux plans propofés fe-
ront entr'eux comme 4 eft à 6 , ou comme
2. efl à 3. Mais fî le côté d'une figure ayant
été mis à l'ouverture d'un plan , le côté
homologue ne peut s'ajufler à l'ouverture
d'aucun nombre entier , il faudra mettre
ledit côté de la première figure à l'ouver-
ture de quelque autre plarf , jufqu'à ce qu'on
trouvt un nombre entier , dont l'ouver-
ture convienne à la longueur du côté homo-
logue de l'autre figure y afin d'éviter les
fradions.
Si les figures propofées font fi grandes
qu'aucun de leurs côtés ne fè puilTe appli-
quer à l'ouverture des jamtes du compas
de proportion j prenez les moitiés , les tiers
ou les quarts , &c. de chacun des deux cô~
tés homologues defdites figures , & les com-
parant enfemble vous aurez la proportion
des plans.
Entre deux lignes droites données trou-
ver une moyenne proportionnelle. Portez
Z z z z
73? C O M
jchacune àes deux lignes données fur la li-
gne des parties égales du compas de propor-
tion y afin de favoir le nombre que chacu-
ne en contient ; & fuppofé , par exemple,
que la moindre ligne foit de 20 parties
égales , & la plus grande de 45 > portez
cette plus grande à l'ouverture du quarante-
cinquième plan , qui dénote le nombre de
fes parties : le compas de proportion refîant
ainfi ouvert , prenez l'ouverture du ving-
tième plan , qui marque le nombre des par-
fiei; égales de la plus petite ligne ; cette ou-
verturç qui doit contenir trente des mêmes
parties , donnera la moyenne proportion-
nelle ; car 2.0 font à 30 comme 30 lonf ià45.
Mais comme le plus grand nombre de
la ligne des plans ell 64 , fi quelqu'une àcs
lignes propofées contenoitun plus grand
nombre de parties égales , on pourroit faire
ladixe opération fur leurs moitiés , tiers ou
quarts , Ùc. en cette forte : fuppofant , par
exemple , que la moindre des lignes pro-
pofées foit de 32 & l'autre de 72 ; portez
la moitié de la grande ligne à l'ouverture
du trente-fixieme plan , & prenez l'ouver-
ture du feizieme ; cette ouverture étant dou-
blée donnera la moyenne proportionnelle
que l'on cherche.
Ufagede la ligne des foUdes du compas
de proportion. Augmenter ou diminuer des
folides femblables quelconques félon une
raifbn donnée.
Soit propofé , par exemple , un cube du-
quel on en demande un qui foit double en
folidité : portez le côté du cube donné fur
la ligne des folides à l'ouverture de tel
nombre que vous voudrez , comme , par
exemple , de 20 à 20 ; prenez enfuite l'ou-
verture d'un nombre double , comme efl
en cet exemple le nombre 40 ; cette ouver-
ture efl le Qoii d'un cube double du propofé.
Si l'on propofé un globe ou fphere , &
qu'on veuille en faire une autre qui foit
trois fois plus groffe , portez le diamètre de
la fphere propofée à l'ouverture de tel nom-
bre qui vous plaira , comme par exemple
de 20 à 20 , & prenez l'ouverture de 60 ,
ce fera le diamètre d'une autre Iphere tri-
ple en fofidité.
Si les lignes font trop grandes pour erre
.appliquées A l'ouverture du compas de pro-
portion , |)iei)ç;?;-,ç9 1^ jnaoitié j le tiers ou le
C O M
quart \ ce qui en proviendra après l'opéra-
tion , fera moitié , tiers ou quart des dimen-
fions que l'on demande.
Etsnt donnés deux corps femblables,
trouver quel rapport ils ont entr'eux. Pre-
nez lequel vous voudrez des côtés de l'uti
des corps propofés ; & l'ayant porté à Tou-
verture de quelque folide , prenez le côté
homologue de l'autre corps , & voyez %
quel nombre des folides il convient ; les
nombres auxquels ces deux côtés homolo-
gues conviennent , indiquent le rapport def
deux corps femblables propofés.
Si le premiier ayant été mis à l'ouverture
de quelque folide , le côté homologue du
fécond ne peut s'accommoder à l'ouverture
d'aucun nombre ; portez-le du côté du pre-
mier corps à l'ouverture de quclqu'autre
folide , jufqu'à ce que le côté homologue du
fécond corps s'accommode à l'ouverture de
quelque nombre des folides.
Ufage de la ligne des métaux. Etant
donné le diamètre d'un globe ou boulet de
quelqu'un Aqs fix métaux , trouver le dia-
mètre d'un autre globe de même poids , &
duquel on voudra defdits métaux.
Prenez le diamètre donné & le portez
à l'ouverture des deux points marqués du
caradere qui dénote le métal du boulet ^
& le compas de proportion demeurant ainû
ouvert , prenez l'ouverture des points cotés
du caradere qui fignifie le métal dont on
veut faire le boulet : cette ouverture fera
fon diamètre.
Si au lieu de globes on propofé des corps
femblables ayant plufieurs faces , faites la
même opération que ci-deffus pour trçuver
chacun des côtés homologues , les uns après
les autres , afin d'avoir les longueurs , lar-
geurs , & épaiffeurs des corps qu'on vevit .
conflruire.
Ufages des lignes desjinus y des tang£n~
tes y desfecœntes y lorjqu'il y en a de tracées
furie compas de proportion. Par plufieurs li-
gnes qui font placées fur cet infirument, nous
avons des échelles pour dijflférens rayons ;
enforte qu'ayant une longueur ou un rayon
donné , qui n'excède pas la plus grande
étendue de l'ouverture de l'infirumcnt , op
en trouve les cordes, les fmus, Ùc. Par exem-
ple , fuppofons que l'on demande la cor-
de , le finus , ou 1^ tangeçite de dix degrés
C O M
pour un rayon de trois pouces ; donnez trois
pouces à l'ouverture de l'inflrument entre
60 & 60 fur les lignes des cordes des deux
jambes , alors la même longueur s'étendra
de 45 à 4$ fur la ligne des tangentes , & de
^oà9orur la ligne des fmusde l'autre côté
de l'inflrument ; enforte que la ligne des
cordes étant mife à un rayon quelconque ,
toutes les autres fe trouvent mifes au même
rayon. C'ert pourquoi fi dans cette difpo-
fition on prencT avec le compas ordinaire
l'ouverture entre 10 & 10 fur [es lignes des
cordes , cela donnera la corde de dix de-
grés ; en prenant de la même manière l'ou-
verture de 10 en 10 fur les lignes des finus,
on aura le finus de dix degrés ; enfin ii l'on
prend encore de Iji mêm'e manière l'ouver-
ture de 10 en 10 fur les lignes des tangen-
tes , cette diftance donnera la tangente de
dix degrés.
Si l'on veut la corde ou la tangente de
70 degrés , pour la corde on peut prendre
l'ouverture de la moitié de cet arc , c'eft-
à-dire 3 5 ; cette diflance prife deux fois don-
ne la corde de 70^. Pour trouver la tan-
gente de 70^. pour le même rayon , on doit
faire ufage de la petite ligne des tangentes ,
l'autre s'étendant feulement jufqu'à 45^. :
c'eft pourquoi donnant trois pouces à l'ou-
verture entre 45 & 45 fur cette petite ligne,
la diilance de 70 & 70 degnés fur la même
ligne, fera la tangente de 70 degrés pour
un rayon de trois pouces.
Pour trouver la fecante d'un arc , faites
que le rayon donné foit l'ouverture de l'inf-
trument entre o & o fur la ligne des fecan-
tes ; alors l'ouverture de 10 en 10 , ou de 70
entre 70 fur lefdites lignes , donnera la tan-
gente de 10 ou de 70 degrés.
Si l'on demande la controverfc de quel-
qu'un des cas précédens , c'eft-à-dire fi l'on
demande le rayon dont une ligne donnée
eft le finus , la tangente ou la fecante , il n'y
a qu'à f;ire que la ligne donnée , fi c'eft
une corde , foit l'ouverture de la ligne des
cordes entre 10 & 10 , alors l'infirument
fera ouvert au rayon requis ; c'efi-à-dire
que le rayon demandé eft l'ouverture entre
00 & 60 fur ladite ligne. Si la ligne donnée
efi un finus , une tangente , ou une fecan-
te , il n'y a qu'à faire qu'elle foit l'ouverture
du nombre donné de degrés ; alors la difian-
C O M 75^
ce êe 90 à 90 fur les finos , de 4^ à 4^ fur
les tangentes , de oào (urjes fecantes , doa-
nera le rayon.
Ufage du compas de proportion entrlgo^
nomùrie. 1°. La bafe & la perpendiculaire
d'un triangle redangle étant données, trou-
ver l'hypothénufe. Suppofonsla bafc ^C(P/.
Trigonom. fig. s..) =40 milles, & laper-»
pendiculaire AB= 30; ouvrez l'infirument
jufqu'à ce que les deux lignes des lignes, c'eft-
à-dire les deux lignes des parties égales,
faflènt un angle droit ; puis pour la bafe pre-
nez 40 parties de la ligne des parties égales fur
une jambe , & pour la perpendiculaire 3*^
parties de la même ligne fur l'autre jambe ;
alors la diftance du nombre 40 fur l'une des
jambes _, au nombre 30 {ur l'autre jambe ,
étant prifè avec le compas ordinaire , fera
la longueur de l'hypothénufe , cette ligne (è
trouvera = 50 milles.
2.0. Etant donnée la perpendiculaire A 3
d'un triangle redangle A B C = 30 , fie
l'angle B C A = 37^ ; j>our trouver l'hypo-
thénufe B C , prenez le côté ^4 B donné ,
& mettez-le de chaque côté fur le finus de
l'angle donné A C B; alors la difiance pa-
rallèle du rayon , ou la diftance de 9c à 90,
fera l'hypothénufe B C, laquelle mefurera
ÇO fur la ligne des finus.
3°. L'hypothénufe & la bafe étant don-«
nées , trouver la perpendiculaire- Ouvrez
l'inftrument jufqu'à ce que les deux lignes
des lignes foient à angles droits ; alors met*
tezJa bafe donnée fijr l'une de ces lignes
depuis le centre ; prenez l'hypothénufe avec
votre compas y &c mettant l'une de fes pointe?
à l'extrémité de la bafe donnée , faites que
l'autre pointe tombe fur la ligne des lignes
de l'autre jambe ; la diftance depuis le centre
jufqu'au point où le compas tombe ,fera la
longueur de la perpendiculaire.
4°. L'hypothénufe étant donnée , & Tan*
gle A C By trouver la perpendiculaire. Fai-
tes que l'hypothénufe donnée foit un rayon
parallèle , c'eft-à-dire étendez-la de 90 à 90
fur les lignes des lignes ; alors le finus pa-
rallèle de l'angle A C B y fera la longueur
du côté A B.
5®. La bafe & la perpendiculaire A 3
étant données , trouver l'angle B C A. Met-
tez la bafe A C furies deux côtés de l'inftru-
ment depuis le centre , & remarquez fon
Z zzz i
740 C O M
étendue ; alors prenez la perpendiculaire
-donnée, ouvrez l'inilrument à l'étendue de
cette perpendiculaire placée aux extrémités
-de la bafe ; le rayon parallèle fera la tan-
gente de l'angle 3 C A.
6®. En tout triangle reâ:iligne , deux cô-
'.xàs étant donnés avec l'angle compris entre
cts côtés , troiiver le troiiieme côté. Sup-
.pofez le côté A C= 20 , le côté B C =30,
& l'angle compris -<4 CB=iJO degrés ;
.ouvrez l'inflrument jufqu'à ce que les deux
lignes des lignes faflent un triangle égal à l'an-
gle donné , c'efl- à-dire un angle de 110
degrés ; mettez les côtés donnés du triangle
.depuis le centre de l'inflruftient fur chaque
ligne des lignes ; l'étendue entre leurs ex-
trémités eiHa longueur du côtéAB cherché.
7°. Les angles CAB&cACB étant don-
.nés avec le côté C B , trouver la bafe A B.
Prenez le côté C B donné , & regardez-le
comme le linus parallèle de fon angle op-
poièCAB i & le fmus parallèle de l'an-
gle A C B fera la longueur de la bafe A B.
S*'. Les trois angles d'un triangle étant
donnés , trouver la proportion de fes côtés.
Prenez lesfinus latéraux de ces difFérens an-
gles, & mefurez-les fur la ligne des hgnes *
hs nombres qui y répandront donneront
la proportion des côtés.
• 9^. Les trois côtés étant donnés trouver
l'angle A .C B. Mettez les côtés AC,CB,
le long de la ligne des lignes depuis le cen-
tre , & placez le côté A B à leurs extré-
mités; l'ouverture de ces lignes fait que l'inf-
trument eft ouvert de la grandeur de l'an-
gle ^C^.
10°. L'hypothénufe -^Cifig. 3.) d'un
triangle redanglefphérique./4 B C donné ,
par exemple , de 43^ , &. l'angle C A B de
2.0^ y trouver le côté C B. La règle eu de
faire cette proportion : comme le rayon eu
«u fmus de l'hypothénufe donnée = 43'*;
ainli le fmus de l'angle donné = 20^ , eft
au flnus de la perpendiculaire C B. Prenez
alors 20"^ avec votre campas fur la ligne des
fmus depuis le centre , & mettez cette éten-
due de 90 à. 90 fur les deux jambes del'inf-
trument , le fmus parallèle de 43.^ qui eft
l'hypothénufe donnée , étant meluré depuis
.le centre fur la ligne des finus , donne«a
13^ 30' pour le côté cherché.
II". La perpendiculaire B C &c l'hypo-
C O M
thénufè A C itant données , pour trouver
la bafe A C faites cette proportion : com-
me le finus du complément de la perpen-
diculaire B C eft au rayon , ainfi le fmus
du complément de l'hypothénufe eft au fmus
du complément de la bafe.' C'eft pourquoi
faites que le rayon (bit au fmus parallèle
de la perpendiculaire donnée , par exem-
ple , de yô'^ 30' ;. alors le fmus parallèle du
complément de l'hypothémjfe , par exem-
ple , de 47^ , étant mefurJifùr la ligne des
finus, fera trouvé de 49^^ 25', qui eft le
complément delà bafe cherchée ; & parcon-
féquent la bafe elle-même fera de 40*1 3 5'.
U/ages particuliers du compas de propor-
tion en géométrie j &c. 1®. Pour faire un poly-
gone régulier donri'aire doit être d'une gran-
deur donnée quelconque , fuppofons que la
figure cherchée foit un pentagone dont
l'aire =125 pies; tirez la racine quarrée de |
de 12^ que l'on trouvera == 5 : faites un
quarré dont le côté ait 5 pJés , & par la
ligne des polygonies, ainfi qu'on l'a déjà preA
crit , faites le triangle ifocele C G D {PI,
ge'omet.fig. z^.n. z.)j tel que CG étant le
demi-diametre d'un cercle , C D puifTe être
le côté d'un pentagone régulier infcrit à ce
cercle , & abaiflez la perpendiculaire G E ,•
alors continuant les lignes £ G ^E C y faites
E F égal au côté du quarré que vous avez
conftruit , & d|^ point F tirez la ligne droite
/'-^ parallèle à G C; alors une moyenne
proportionnelle entre G E &c E F y fera
égale à la moitié du côté du polygone cher-
ché ; en le doublant on aura donc le côté
entier. Le côté du pentagone étant ainfi dé-
terminé , on pourra décrire le pentagone
lui-même , ainfi qu'on Ta prefcrit ci-delîùs»
2°, Un cercle étant donné , trouver un
quarré qui lui foit égal. Divilèz le diamètre,
en 14 parties égales , en vous fervant de la
ligne des lignes , comme on l'a dit; alors 12.
4 de ces parties trouvées par la même li-
gne feront le côté du quarré cherché.
3°. Un quarré étant donné , pour trou-
ver le diamètre d'un cercle égal à ce quarré,
divifèz le côté du quarré en 1 1 parties éga-
les par le moyen de la ligne des lignes , &
continuez ce côté jufqu'à, 12. 4 parties ; ce
fera le d tnmetre du cercle cherché. .
4°. Pour trouver le côté d'un quarré
égal à une ellipfe dont les diamètres tranP
CO M
verfe & conjugué font donnés , trouvez
une moyenne proportionnelle entre le dia-
mètre tranfverfe & le diamètre conjygué ,
divifez-la en 14 parties égales ; 12. t? de ces
parties feront le côté du quarré cherché.
Ç°. Pour décrire une ellipfe dont les dia-
mètres aient un rapport quelconque , &
qui foir égale en furface à un quarré donné,
fuppofons que le rapport requis du dia-
mètre tranfverfe au diamètre conjugu4 ,
foit égal au rapport de 2 à i ; divifez le
coxé du quarré donné en 1 1 parties égales;
nlors comme 2 efl à i , ainfi 11x14=154
efl à un quatrième nombre , dont le quarré
efl: le diamètre conjugué cherché : puis
comme i eil à 2 , ainfi le diamètre con-
jugué eft au diamètre tranfverfe. Préfen-
tement ,
6^, Pour décrire une ellipfe dont les
diamètres tranfverfe & conjugué font don-
nés , luppofons que A B ai E D {Planche
des coniq. fig. zi .) foient les diamètres don-
nés : prenez A C avec votre compas , don-
nez à l'inftruraent une ouverture égale à
cette ligne , c'eft-à-dire ouvrez i'inflrument
jufqu'à ce que la diftance de 90 à 90 fur \ts
lignes des finus ', foit égale à la ligne A C :
alors la ligne -«4 Cpeutêtre divifée en ligne
des finus , en prenant avec le compas \ç.s
étendues parallèles du finus de chaque de-
gré fur les jarïibes de i'inftrument , & les
mettant depuis le centre C. La ligne ainfi
divifée en finus (dans la figure on peut fe
contenter de la divifer de dix en dix) , de
chacun de ces finus élevez des perpendicu-
laires des deux côtés , alors trouvez de la
manière fuivante les points par-lefquels l'el-
lipfe doit pafler ; prenez entre les jambes de
votre compas l'étândue du demi-diametre
conjugué C E , &c ouvrez l'infirument juf-
qu'à ce que fon ouverture de 90 en 90 fijr
la ligne des finus foit égale à cette étendue;
prenez alors les finus parallèles de chaque
degré des lignes des finus au compas depro-
portion , & mettez-les fur ces perpendicu-
laires tirées pas leurs, compiémens dans les
lignes des finus, ^ C ; par-là vous aurez
deux points dans chaque perpendiculaire
^par lefquels l'ellipfe doitpaffer» Par exem-
ple, le compas de proportion reftant toujours
le même , prenez avec le compas ordinaire
k diilance de 80 à 80 fiir les ligaes des
C O M 74î
finus , mettant un pié de ce compas au
point 10 fur la ligne A C , avec l'autre,
marquez les points a , 772 fur les perpendi-
culaires qui paflent par ce point , alors a &
m feront deux points dans la perpendicu-
laire, par lefquels l'ellipfe doit pafTer. Si
l'on joint tous les autres points trouvés de
la même manière , ils donneront la derai-
ellipfeX> A E. Onconftruira l'autre moitié
de la même manière.
Ufage du compas de proportion dans Par-
pentage. Etant donnée la pofition refpeâive
de trois lieues, comme A,B, C, (PI. d' ar-
pent, fig. 4. jÎ. ;2..),c'efl-à-dire étant don-
nés \ts trois angles AB C ,B C A^&l C A
^ , & la diftance de chacun de ces endroiis
à un quatrième point D pris entr'eux ,
c'eft-à-dire les diftances BD,DC,AD,
étant données, trouver les diftances refpec-
tives des difFcrens endroits A ,B ^ C , c'eft-
à-dire déterminer les longueurs des .côtés
AB ,B C ^AC. Ayant fait le triangle E
F G [fig. 4.n. ^.) femblable au triangle A
B C, divifez le côté E G en H , de telle
forte que E /f foit k HG , comme A D eft
iiD C ^ ainfi qu'on l'a déjà prefcrit ; & de
la même manière £ F doit être divilé en I ;
tellement que E ICokàl F, comme AD
eft à Z> ^. Alors continuant les côtés E G y
E Fy dites : comme E H-—H G tHkH Gy
^nÇiE H-^HG eft à G i^; & comme
£/— /-Peft à/i^,ainfi£'H-/i='eftà
F M: ces proportions fe trouvent aifément
par la ligne des parties égales fur le compas
de proportion. Cela fait , coupez H K &c
I M aux points L ,N , ^ de ces points y
comme centres, avec les diftances L H àc
I N , décrivez deux cercles qui s'entrecou-
pent au point O , auquel du fommet des
angles E F G ^ tirez les lignes droites E O,
FO&c QGy qui auront entr'elles la même
I>roportion qu€ leâ lignes A D^ B DyD C.
Préfentement fi les lignes E 0,F OÔc G O,
font égales aux lignes données A D^B D y
D C, les diftances EF,FG,kEG, feront
les diftances des lieux que l'on demande»
Mais iîE O, O F,0 G y {ont plus petites
que AD , D B,DC y prolongez-les fufl
qu'à ce que P O, OR & O Ç, leur foient
égales; alors fi l'on joint les points P, Q, R
les diftances P R, R Q ëc P O , feront les
, diftances des lieux cherchés» Eafia û les,
74^ C O M
lignes E0,0 F ^O G, font plus grandes
que A D,D B^DC^ retranchez-en des par-
ties qui fuient égales aux lignes A D, B D ,
JD C y&c joignez les points de fedion par
trois lignes droites , les longueurs de ces
trois lignes droites feront les diflances des
trois endroits cherchés. Remarquez que fi
EH eûégékH G, ou, El à I F,ks
centres Z & N feront infiniment diftans de
iï& de / ,* c'eft-à-dire qu'aux points //"& I
il doit y avoir des perpendiculaires élevées fur*
les côtés E F , F G f SLU heu de cercles ,
jufqu'à ce qu'elles s'entrecoupent : mais fi
E H eu plus petit que //" G , le centre L
tombera fur l'autre côté de la bafe prolongée ;
& l'on doit entendre la même chofe de
E I &cl F.
Le compas de proportion fert particulière-
ment à faciliter la projedion , tant ortho-
graphique que fléréographique. VoyeT^KO-
jectiong-Stéréographie. (£■)
Compas a coulisse ou Compas de
RÉDUCTION ; ilconfifle en deux branches
{Pl.de géomet. fig. j.) dont ks bouts de
chacune font terminés par des pointes d'a-
cier. Ces branches font évidées dans leur
longueur pour admettre une boîte ou coulifle,
-que l'on puifîê faire gliffer à volonté dans
toute l'étendue de leur longueur ; au milieu
de la coulifîé il y a une vis qui fert à afîèm-
bler les branches , & à les fixer au point où
l'on veut.
Sur l'une àts branches du compas , il y a
des divifions qui fervent à divifer les lignes
dans un nombre quelconque de parties éga-
les , pour réduire àes figures , 6'c. fur l'au-
tre , il y a des nombres pour infcrire toute
forte de polygones réguhers dans un cercle
donné. L'ufage de la première branche efl:
aifé. Suppofez , par exemple , qu'on veuille
divifer une ligne droite en trois parties éga-
les ; poufTèz la coulifîé jufqu'à ce que la vis
foit diredement fur le nombre 3 ; & l'ayant
fixée là, prenez la longueur de la ligne
donnée yec les parties du compas les plus
longues; la diftance entre les deux plus cour-
tes , fera le tiers de la ligne donnée. On
peut de la même manière divifer une ligne
dans un nombre quelconque de parties.
UJage de la brandie pour les polygones.
Suppofez , par exemple , qu'on veuiUe inf-
crire un pentagone régulier dans un cercle;
C O M
pouffez la coulifîé Jufqu'à ce que le milieu *<
la vis foit vis-à-vis de 5 , nombre des côtés
d'un pentagone ; prenez avec les jambes du
compas les plus courtes , le rayon du cercle
donné; l'ouverture des pointes des jam-
bes les plus longues , fera le côté du pen-
tagone qu'on vouloit infcrire dans le cer-
cle. On en fera de même pour un polygone
quelconque.
Compas de réduction avec les lU
gnesdu compas de proportion. Laconflruc-
tion de ce compas, quoiqu'un peu plus par-
faite que celle du compas de réduâion ordi-
naire , lui efl cependant fi femblable, qu'elle
n'a pas beibin d'une defcription particulière.
{Fig. 4. PI. de géométrie.) VoycT^plus haut
l'article CoMPAS DE PROPORTION.
Sur la première face il y a la ligne des
cordes , marquées cordes , qui s'étend juf^
qu'à 60 : & la ligne des hgnes , marquées
lignes , qui efl divlfée en cent parties iné-
gales , dont chaque dixième partie efl nu-
mérotée.
Sur l'autre face font tracées la ligne des
finus qui va jufqu'à 90^ , & la ligne des
tangentes jufqu'à 45^*. Sur le premier côté
l'on trouve les tangentes dépuis 4$ jufqu'à
71*^ 34' ; fur l'autre les fecantes , depuis o'^
jufqu'à 7od 30'.
Manière de fe fervir de ce compas, i**.
Pour divifer une ligne dans un nombre quel-
conque de parties égales , moindre que 100;
divifèz ICO par le nombre des parties re-
quifes : faites avancer la coulifîé jufqu'à ce
que la ligne marquée fur la queue d'aronde
mobile , foit parvenue vis-à-vis le quotient
fur l'échelle des lignes : alors , prenant toute
la ligne entre les pointes les plus éloignées
du centre , l'ouverture cies autres donnera
ladivifion cherchée. 2°. Une ligne droite
étant donnée , que l'on fuppofe divifée en
100 parties; pour prendre un nombre quel-
conque de ces parties , avancez la ligne mar-
quée fur la queue d'aronde , jufqu'au nom-
bre des parties requifes , & prenez la ligne
entière avec les pointes du ccmpas les plus
diflantes du centre , l'ouverture des deux:
autres fera égale au nombre des parties de-
mandées. 3°. Un rayon étant donné, trou-
ver la corde de tout arc au deffous de 60^ ;
amenez la ligne marquée fur la queue d'a-
ronde , jufqu'au degré que l'on demande
C O M
fur la ligne des cordes , & prenez le rayon
entre les pointes les plus éloignées du cen-
tre de la coulifle , l'ouverture des autres
pointes donnera la corde cherchée , pourvu
que l'arc foit au deflus de 29** ; car s'ilétoit
au deflfous , la différence du rayon & de
cette ouverture feroit alors la corde ^imer-
chée. 4°. Si la corde d'un arc au defîbus
de 6od eft donnée , & qu'^pn en cherche le
rayon ; faites avancer la ligne marquée fur
la queue d'aronde , jufqu'au degré propofé
fur la ligne des cordes , prenez enfuite la
corde donnée entre les pointes les plus pro-
ches du centre , l'ouverture des autres poin-
tes donnera le rayon cherché. 5°. Un rayon
étant donné , trouver le linus d'un arc quel-
conque; amenez la ligne marquée fur la
queue d'aronde , jufqu'au degré de la ligne
des finus dont on veut avoir le linus; pre-
nez le rayon entre les pointes les plus éloi-
gées du centre, l'ouverture dos autres don-
nera le finus cherché : mais fi le finus cher-
ché étoit au delîbus de 30*^ , alors la diffé-
rence des ouvertures des pointes oppolées
donneroit le finus cherché. 6°. Un rayon
étant donné , trouver la tangente d'un arc
quelconque au deffous de 71^ , fi la tangente
cherchée eu au defîbus de ^6^ 30' ; faites
glifîêr la ligne de la* queue d'aronde julqu'au
degré propofé fur la ligne des tangentes ;
prenez le rayon entre les pointes les plus
dillantes du centre , l'ouverture des autres
donnera la tangente cherchée , fi la tangente
requife efl au deffus de 26^ 30' : mais au
deffous de 45^* , la ligne de la coulifîê doit
être amenée jufqu'au nombre de degrés don-
nés fur la ligne des tangentes; alors , en pre-
nant le rayon entre les pointes les plusdiflan-
tes du centre , l'ouverture des autres don-
nera la tangente , &c. (E)
Compas sphérique ou d'épais-
seur : on fe fert de cet inftrument pour
prendre les diamètres , l'épaiffeur , ou le
calibre des corps ronds ou cylindriques ; tels
que des canons , des tuyaux, &c. Ces fortes
de compas confifîent en quatre branches
affemblées en un centre , dcftit deux font cir-
culaires , & deux autres plates , un peu re-
courbées par les bouts.
Pour s'en fervir , on fa,it entrer une des
pointes plates dans le canon , & l'autre par-
debors ; lefquelles ét^t Cerréf 5 3 ieç ^c\i^
cou 745
pointes oppofées marquent Pépaiffeur. Voy,
Calibre.
Il y a aufli des compas fphériques , qui
ne différent des compas communs , qu'en
ce que leurs jambes font recourbées pour
prendre les diamètres des corps ronds.
Cliambcrs. (F)
Compas elliptiques : ils fervent à dé-
crire toutes fortes d'ellipfes ou d'ovales. Oa
en a imaginé de différentes fortes , dont 1«
conflrudion efl fondée fur difïeren tes pro-
priétés de l'ellipfe. Par exemple foient deux:
droites C G _, G L {fig. z. Géom.) égales
chacune à la moitié de la fomme , où de la
différence de deux axes C B^ ÇA., attlêhées
l'une à Tautre par leur extrémité commune
G, enforte qu'elles puiffent fe mouvoir au-
tour de ce point , comme les jambes d'un
compas autour de fa tête. Soit le point C fixe
au centre (k l'ellipfe , & foit L B = C A y
le point j5 décrira l'ellipfe. Cette conflruc-
tion efl démontrée article 6g desfeâ. coniq.
deyi.àe l'Hôpital , & nous y renvoyons le
ledeur. Au refle , cette efpece de compas ,
ainfi que tous les autres femblables , efl
affez peu commode par toutes fortes de
raifons.
Ceux qui ont befoin de décrire fouvent
• des ellipfes & autres fcdions coniques , dit
M. le marquis* de l'Hôpital, préfèrent la
méthode de les décrire par plufieurs points;
parce que les méthodes de les décrire par des
mouvemens continus font fautives, & peu
exades dans la pratique. (O)
Compas AZIMUTHAL; ce co772;jaj- revient
au compas de variation , & diffère du co/n-
pas de mer ordinaire de plufieurs manières :
en voici la defcription. Sur la boîte qui con-
tient la rofe efl adapté un large cercle A B
{Plan, delà Navigat. fig. i ^.) dont une
moitié eftdivifée en 90^ , & iûbdivifée dia-
gonalement en minutes. Sur le cercle A B
eft pofé un index b c mobile autour du cen-
tre ou point b , ayant une pinule b a élevéç
perpendiculairement , Sf mobile fur une
charnière. Une foie fort fine a e va du mi-
lieu de l'index au haut de la pinule , pour
former une ombre fur la ligne du milieu de
l'index. Enfin le cercle A B eu traverfé à
angles droits par deux fils , des extrémités
defquels quatre lignes font tirées dans l'inté-
, rieur de la boîte- & 5*îl«i jojjb, il y a pareilr
744- C O M
lemcnt quatre lignes tirées à angles droits.
La boîte ronde , (à rofe, le cercle gradué &
l'index ; tout cela efî fufpendu fur deux cer-
cles de laiton B B , Se ces cercles font ajufîés
dans la boîte quarrée c c.
Ufage . du compas a.7J.muthal pour trou-
ver L'a-{imuth dufoleily ou plutôt fon ampli-
tude magnétique y pour en déduire enfuite la
variation du compas. Si l'on veut, par exem-
ple , obferver l'amplitude orientale du Soleil,
ou fon azimuth, on fera parvenir le centre de
l'index b c fur la pointe oueft delà rofe ; de
forte ^ue les quatre lignes de l'extrémité de
la r^ , répondent aux quatre autres qui
fonrtrans l'intérieur de la boîte. Si au con-
traire on veut obferver Tamplitudc occiden-
tale , ou l'azimuth après midi , on tournera
le centre de l'index diredement au àe^us
de la pointe & de la rofe. Ceci étant fait ,
oiî tournera l'index b c jufqu'à Qg que l'om-
bre du fil a <? tombe pofitivement fur la fente
de la pinnle , & le long de la ligne du mi-
lieu de l'index : alors fon bord intérieur
marquera fur le cercle le degré & la minute
de rampljtude du Soleil, prife ou du côté
du nord , ou du eôté du fud.
Mais l'on remarquera que le compas étant
ainfi placé , l'azimuth du Soleil fe trouve
à moins de 45'^ du fud, l'index ne marquera
plus , paflant alors au delà des divifions du
limbe : en ce cas, on tournera le compas d'un
quart de tour , c'eft-à-dire qu'on fera ré-
pondre ie centre de l'index à la pointe nùrd
ou fud de la rofè, félon l'afpeâ du Soleil ;
alors le bord de l'index marquera le degré
de l'azimuth magnétique du Soleil , en
comptant du nord comme ci-devant. Voje:[
Amplitude.
L'amplitude magnétique étant une fois
trouvée, on déterminera la variation de
l'aiguille aimantée de cette façon. Exemple.
Etant en mer, le 15 mai 1715,3 45^ de
latitude nord, les tables me donnant la iati-
.tude du Soleil de 19*1 au nord , dr fon am-
plitude orientale de 27^ 25' nord , & je
trouve par le compas a:(//72r/f/ia/ l'amplitude
orientale dû Soleil entre 6i & 6^*^ , en
comptant depuis le nord vers l'eft , ceû-à-
dire entre 27^ & 28^ , en comptant de Teft
vers le nord ; partant l'amplitude magnéti-
que étant égale à la vraie amplitude, l'aiguille
o'aurji point de variation.
C O M
Mais fî l'amplitude orientale que donne
le compas s'étoit trouvée entre ^^-^ & ^3^>
en comptant toujours du nord ver» l'ell ,
on auroit eu en comptant deTefl vers le
nord , l'atnplifude magnétique entre 37^ &
38^1 ^lus grande de io<i que la vraie am-
pliti^; ce qui donne la variation de lo^ au
nord-eft.
Si l'amplitude orientale trouvée^par l'inf-
trument ell moindre que la vraie ampli-
tude , leur différence donnera la variation
occidentale.
Si la vraie amplitude orientale efl méri-'
dionale , de même que l'amplitude donnée'
par l'inlîrument y & que celle-ci foit la,plus
grande , la variation fera au nord-ouefl , &
vice verfâ.
Ce que l'on a dit de l'amplitude nord-eft
e{{\e même pour l'amplitude fud-ouefl :
comme ce que l'on a dit pour l'amplitude
fud-efl , eil vrai de l'amplitude nord-ouefi.
Voye\ Amplitude.
Enfin fi l'on trouve les amplitudes de dif-
férentes dénominations , comme par exem-
ple la vraie amplitude de 6'^ nord , & l'am-
plitude magnétique de 5^ fùd , la variation ,
qui dans ce cas-là efl nord-eft fera égale
à la forame des amplitudes vraies & magné-
tiques. On doit entendre la même chofe àts
amplitudes occidentales.
On peut trouver de même la variation par
les azimuths , mais il faut alors que la décli-
naifon du Soleil , la hauteur & la latitude
du lieu foient données , pour trouver l'azi-
muth. Voyei Azimuth. {T)
Compas de variation^ rojq Com-
pas AZIMUTHAL ^.VARIATION.
Compas de mer , voye^ Boussole.
Compas d'Appareilleur , ei\ un
inflrumentde fer compofé de deux branches
unies enfemble : aux extrémités il y a deux
pointes ; la branche femelle eft fendue poui-
recevoir la branche mâle. La rivure de ce
compas doit être aflez ferrée , pour que
l'ayant mis dans une certaine ouverture , il
ne s'en ôte pas facilement. Les branches
doivent être droites , afin que dans l'occu-
rence il puifîè fervir de fauterclle. {D)
Compas d'épaisseur , à Vufage des
arquebujlers; cecompas a la tête faite comme
les compas ordinaires, & les deux bran*-
ches recourbées en dedans au lieu d'être
droites ,
C O M'
droites , & fert aux arquebufiefs pouf me-
furer l'épaiflèur de quelque chofe.
Compas a lunette , à tufagedes ar-
quebuflers ; ce compas efl: fait comme un 8 ,
il eft arrêté au milieu avec un clou rivé ,
& s'ouvre des deux côtés. II fert aux ar-
quebufiers pour mefurer & compafTer
des chofes rondes , comme des chevilles ,
à^ts vis , &c.
Compas A pointe , à Cufagedes arque-
hufiers ; ce compas eft de fer , n'a rien de
particulier , & reiïemble au compas des fer-
ru riers , ^c. Les arquebuders s'en fervent à
difFérens ufages.
Compas a tête , à l'ufage desarquebu-
Jlers ,* ce compas eft de fer , a la tête faite
comme les petits compas ordinaires , & a
une branche pointue ; l'autre pointe efl
beaucoup plus grofle par en-bas , & faite
comme une fraife unie. Les arquebufiers
s'en fervent pour raefiirer une pièce qui efl
percée , en pofant la pointe à fraife dans le
trou, & pofant la branche pointue où ils
veulent.
COxMPAS A RESSORT , à Vufage des ar-
quebufiers ; c'eft une bande de fer plate qui
efl reployée par le milieu , & forme une
tête ronde & large. Les branches de ce com-
pas font un peu larges , &finifrent en pointe
comme un compas ordinaire : ces deux bran-
ches font percées par le milieu , & traver-
fces d'une vis qui efl arrêtée à demeure à
une des branches ; cette vis fe ferre avec
un écrou à oreille , & fait fermer & ouvrir
les branches de ter du compas félon le be-
foin. Les arquebufiers s'en fervent à difFé-
rens ufages.
Compas a quart de cercle , à tu-
fage des bijoutiers , efl: un compas garni d'un
quart de cercle fixe dans l'une des bran-
ches du compas , qui coule dans l'autre
& y efl retenu par une vis pour fixer le
compas au point où l'on veut le mettre.
Sqs deux pointes font pofliches , & font
retenues dans le corps du compas chacun
par une vis.
Les bijoutiers appellent aufîî compas , un
inflrument avec lequel ils mefurent les pie-
ces lorfqu'ils les taillent.
Compas {grand) à l'ufage des charrons;
ce font deux morceaux de fer pkts de la
longueur de deux ou trois pies , enchafics
Tome VIII.
C O M 745^
par en-haut , & arrêtés avec un clou rivé ,
& par en-bas les pointes de cts branches font
arrondies & pointues. Cela fert aux char-
rons pour égalifer', compafîèr , & arrondir
leurs ouvrages.
Cou.? ks\{pe lit) à Vufage des charrons ;
ce compas efl fait comme le grand , & fert
aux charrons pour les mêmes ufages , excepté
qu'il eft plus petit.
Compas , ^' Vufage des charpentiers ; il
efl ordinaire : cts ouvriers s'en fervent à
prendre de petites mefures pour tracer leurs
ouvrages.
Compas a cylindre , efl un compas
par le moyen duquel on peut connoître les
plus petites différences des diamètres d'un
cylindre fait fur le tour , & qui l'empêchent
d'être un cylindre parfait.
Compas à l'ufage des Fondeurs de cloches ,
efl une règle de bois terminée d'un bout par
un talon du crochet , dans lequel on fait en-
trer un des bords de la cloche , pendant que
l'on frotte l'autre bout de la règle , qui efl
divifée en pies & pouces , contre le bord
de la cloche diamétralement oppofé. Le
point le plus éloigné du talon où la cloche
atteint , efl fon diamètre. Voye-{ Cloche.
Compas de construction à l'ufage
des fondeurs de cloches , efl un arbre de fer
qui a deux bras qui retiennent la planche fur
laquelle efl tracé le profil ou échantillon de
la cloche , laqi^lle fert à former le noyau ,
le modèle , la cnape , en faifant tourner cette
planche autour de l'axe , qui roule en-bas
par un pivot fur une crapaudine de fer , &
en-haut par un tourillon dans un collet de
même métal.
Compas à l'ufage des cordonniers ; ils s'en
fervent pour prendre les mefures. Il efl
compofé de deux coulifîês qui vont l'une
dans l'autre, de forte que les deux femblent
n'en faire qu'une ; au bout de l'une efl un.
talon fixe , & au bout de l'autre efl un ta-
lon pareil & auffi fixe fur fà branche; de
forte qu'en tirant une de ces branches , le
talon qui y efl fixé , la fuit & s'écarte de
l'autre talon , & laifTe un efpace entre les
deux qui efl la mefure du pié. La coulifîe
mobile efl marquée par parties é^^ales numé-
rotées ; enforte que l'ouvrier punTe retrou-
ver chez lui le même intervalle entre les
deux talons , pour choifir une t'orme de même
Aaaaa
74^ C O M
grandeur que le pie de celui pour qui fe
Fait la chauffure. (D)
Compas à l'ufage des Ecrivains ; c'efl un
compas ordinaire dont ils le fervent pour
Hielurer la hauteur ou longueur des lignes ,
des figures qui renferment les difterens
objets d'un état , d'un bordereau , d'un
compte , & pour fixer l'endroit où l'on doit
tracer chaque figure , afin d'obferver l'ordre
& la proportion.
Compas à l'ufage des eplngUers. Ces ou-
vriers s'en fervent pour tracer la lame d'é-
tain dont ils le propofent de faire des pla-
ques, voyei EpiNGLIER.
Compas à l'ufige des ferblantiers ; il efl
de fer , & fait comme tout autre compas.
Il fert aux ferblantiers pour mefurer , com-
paflêr , marquer des ronds & des demi-
cercles , félon le befoin , fur les feuilles de
fer-blanc qu'ils emploient.
Compas courbe àl'ufage des gainiers:
il efl fait par en haut comme le compas droit ,
& a les deux branches recourbées en de-
dans ; il fert aux gainiers pour compafler
le diamètre des moules de leurs ouvrages.
Compas droit à l'ufage des gainiers.
Ce compas n'a rien de particuHer ; il efl de
fer , & fert aux gainiers pour mefurer leurs
ouvrages.
Compas en horlogerie ; il yen a de deux
efpeces : le premier ne difïère des. compas
ordinaires que par foii arc qui iert à lui
donner plus de iblidité.
Les faifeurs d'inflrumens de mathéma-
tiques & les horlogers s'en fervent beaucoup ,
fur-tout ceux qui travaillent en pendule : ce
compas en général eft un des meilleurs.
Le compas d'acier trempé efl: plus en ufàge
parmi les horlogers en petit , ou qui travail-
lent en montres : ils l'appellent ordinaire-
ment compas d'Angleterre ou compas à ref-
fon.[T)
Compas d'épaisseur ou Huit de
CHIFFRE , c'cfl un compas qui fert à pren-
dre des grandeurs , des épaiffeurs , Ê'c. On
s*en fert dans la pratique de plufieurs arts ,
comme dans l'orfèvrerie y l'horlogerie , Ùc.
Les horlogers s'en fervent beaucoup pour
prendre l'épaiffeur de certaines parties cour-
bées , comme de la cuvette d'une boîte de
montre , de la virole d'un barillet , &c. Sa
f sxfcftion confifte.dflas la grande égalité des 1 appelle, amre..
C O M
difîances qui doivent être précifément les
mêmes , fans quoi l'on prend de faufTes épaif.
feurs , le compas ne. s'auvrant pas également,
des deux côtés.
Compas au tiers efl un outil dont fc
fervent les horlogers pour avoir tout d'un
coup le tiers d'une grandeur. Cet inflru-
ment efl compolé de deux branches mobi-
les fur un centre comme le calibre à pren-
dre les hauteurs ou maître à danfer ; la feule
différence , c'efl qu'au lieu que les parties
foient d'égale longueur comme dans ce ca-
hbre , elles font dans le rapport de 3 a i.
Cet inflrument fert particulièrement à
prendre la grolTer.r de l'arbre du barillet ,
dont le diamètre doit être le tiers du dia-
mètre interne du barillet. Il fert auffi pour
la rofette , que l'on fait aufli un tiers plus
petite , ou à-peu-près , que le râteau. ( T)
Compas à l'ufage des menuifiers y il n'a
rien de particulier ; ces ouvriers s'en fervent
pour prendre des mefures.
Compas d'épaisseur , à l'ufage des
orfci'res en grojjerie; il efl compofe de deux
branches retenues cnfemble vers le miliei*
par une charnière ; à une de leurs extrémités
elles forment un cercle parfait , & à l'autre
la moitié d'un quarré. C'efl au plus ou
moins d'éloignement de ces branches , que
l'on connoît l'égalité ou la différence d'épaif-
feur , en plaçant le compas fur plufieurs en-
droits de l'ouvrage fuccefUvement.
Compas à l'ufage des facteurs d orgues;
ils s'en fervent pour couper la partie arron-
die des bouches ovales des tuyaux de mon^
tre. Voyei BoU€HE OVALE. Ce compcks
efl compofé de deux équerres.
Compas à l'ufage des peintres ^ dejfina-*
teurs , &c. Il doit être pointu ^ ferme , &
.(es pointes d'acier très-déhcates : on s'en.
fert peu , mais il en faut avoir un pour le
befoin.
Compas gambré a ature , à l'ufage
àcs relieurs-doreurs ; ils s'en fervent pour
coucher l'or fur les tranches ; il doit être de
fer ; il a à la tête un clou rivé defTus &
, delîbus à 3, pouces de la tête ; ks branche»
. de 6 pouces de long ; il efl cambré dans (es
deux branches, pour avoir plus aifémcnt
moyen de s'en fervir dans les gouttières ^
dans les bouts des livres : c'efl: ce qu'opi
C O M
Les relîeui*s-doreurs fe ferrent aulTi d\m
compas ordinaire en cuivre , pour mefurer
k place où ils ont à mettre de l'or , &: n'en
couper qu'à proportion. Vqye^ DoRER.
Compas courbé & brisé à l'ufage des
fculpteurs ; ils s*en fervent pour mefurer les
grofleurs des corps ronds , parce qu'ils em-
braflent les parties , ce que ne peuvent pas
faire ceux à jambes droites.
Les graveurs s'en fervent auffi pour trou-
ver le véritable endroit d'une planche qu'ils
veulent repouflèr & graver. Vçyei GRA-
VURE ou Burin.
Compas de forge , h l'ufage des fer^
ruriers & autres ouvriers ; c'eft un grand
Compas ordinaire dont on ufe pour prendre
les longueurs fur le fer chaud.
Les {errurîers en ont d'autres de diffé-
rentes grandeurs , qu'ils appellent compas
d'établi.
Compas d'épaisseur, à l'ufage des
ffrruriers ; c'efl un compas àonx. les branches
font courbes , &: qui fert à l'uiàge indiqué
par (on nom.
Compas droit et courbe , à l'ufage
des ouvriers qui troj-' aillent en pierres de
rapport , & en tabletterie.
Compas , à l'ufage des tonneliers, eft un
indrumcnt dont ils fe fervent pour former
& marquer les douves des fonds de leurs
flftailles en figure fphérique. Cet inffrument
eft fait d'un feul jet de bois pliant , mais
ëlafliquc , dont les deux bouts fervent de
branches à l'inflrument , & font garnis cha-
cun d'une pointe & d'une virole de fer : ces
deux branches peuvent s'approcher & s'éloi-
gner au moyen d'un arc de bois à vis qui les
traverfe.
Les tonnehers ont auflî parmi les outils de
leur métier , des compas ordinaires qui font
de fer , & dont les branches n'ont pas plus
de hiiit pouc<;s de longueur.
Compas , à l'ufage des Vergmers , e(l
une efpece de mefure marquée de points ,
à chaque bout de laquelle efl en travers d'un
côté feulement , un morceau de bois tra-
vaillé , haut d'environ un pouce & demi ,
pour retenir le pié lur la mefure. Les cor-
donniers s'en fervent pour mefurer la lon-
gueur du pié de ceux qu'ils ont à chauffer.
Outre les compas dont nous venons de
faire jaientlon , il y eu a un grand nombre
C O M 74y
d'autres à l'ufage des difFérens ouvriers. Cc5
compas feront décrits aux articles où nous
ferons le détail des ouvrages , quand ils en
vaudront la peine. Il n'y a prelque point
d'artifle qui n'ait fon compas.
COMPASSER , V. ad. c'efl prendre âes
mefures avec le compas. Voyez CoMPAS.
_ COMPASSION , 1. f. (Morale.) afflic-
tion qu'on éprouve à la vue, au récit, ou
au fouvenir des maux de quelqu'un. C'efl
un fentiment auquel on fe livre avec unci
(brte de plaifir :
Non quia vexari quemquam ejl jucundct
voluptas ,
Sedquihus ipfe maliscareasy quia cernera
fuai'e eji.
Le plaifir qu'on y éprouve, vient encore du
témoignage qu'on fe rend à foi-même qu'oit
a de Thumanité.
Plus on a été malheureux , plus on cfî
fufceptible de compajjlon. Non ignara mali ,
&c. iN'on-feulement on ne fe refufè point à
ce fentiment , on cherche même quelquefois^
les occafions de l'exciter ; c'elf pour cela ,
& non par un fentiment barbare , que le
peuple court aux exécutions des crimi-
nels. (O)
COMPATIBILITÉ, f. f. (Jurifpr.) efî
la faculté qu'une même perfonne a de pofle-
der en même temps plufieurs bénéfices ou
offices , ou un bénéfice & un office. Les
bénéfices & offices entre lefquels il n'y a poinc
d'incompatibihté prononcée par aucune loi ,
i^ont de droit compatibles. Il y en a d'autres
qui le deviennent au moyen d'une difpenfc »
laquelle pour les bénéfices s'obtient en cour
de Rome. A l'égard des offices , on obtient
à cet efïèt en chancellerie des lettres , qu'oa
zppelle lettres de coTrrpatibilïté.Yoy. ci-après
Compatible <& Incompatible. (A)
COMPATIBLE , adj. [Junfpr. ) fê die
des bénéfices & des charges qui peuvent
être polfédés enfemble par une même per-
fonne fans difpenfe. Tous les bénéfices &:
offices , entre lefquels il n'y a point d'in-
compatibihté prononcée par la loi , font
compatibles : ainfi un bénéfice fin=iple efî
compatible avec un autre de même nature,
pourvu qu'il ne foit pas fub eodem tecfo.
L'office de fecretaire du roi efî compatible
avec celui de confeiller de cour fouveraine ^
, & avec plufieurs autres emplois , Ùc. Vo^ez
A a a a a 2
748 C O M
ci^divant COMPATIBILITÉ & INCOMPA-
TIBLE. {A)
* COMPENDIUM,{. m. (Philof.)
terme à l'ufage des écoles de philofophie ;
il défigne un abrégé des principales matières
contenues dans la logique. On commence
par-là , afin de faciliter l'étude même de la
logique aux écoliers qui s'inftruifent dans
cet abrégé des mots qui font le plus en ufage
dans cette partie de la philofophie , & qu'on
y exerce à la manière de raifonner iyllogifîi-
quc fur plufieurs queftions qui pourroient
£'tre mieux choifies & plus intérefîàntes.
Vqye:[ COLLEGE.
COMPENSATION, (Jurifpr.) eft la
confufion qui fè fait d'une dttze mobiliaire
liquide , avec une autre dette de même na-
ture. Elle tient lieu de paiement ; ou fi l'on
veut , c'efl un paiement réciproque , mais
fîâif & fans bourfe délier de part ni d'autre.
La compenfadon eft fondée fur l'équité
naturelle , & a pour objet d'éviter un cir-
cuit inutile , qui auroit lieu fi un débiteur
étoit obligé de payer à fon créancier la
même fomrae qu'il eft en état de lui deman-
der ; il y auroit même dans ce cas une
cfpece de dol à demander le paiement d'une
fomme qu'il faudroit à l'inflant rendre à la
même perfonne.
L'exception tirée de la compenfadon eft
admife en pays coutumier , aufli bien qu'en
pays de droit écrit ; & c'eft un moyen de
droit que l'on peut oppofer en tout état de
caufe , & fans qu'il foit befoin pour cet effet
de lettres de chancellerie.
Il n'eft pas non plus nécefïàire que les deux
dittes foient égales ; la compenfadon ne îaifle
pas d'avoir lieu jufqu'à due concurrence ; &
le créancier auquel étoit due la fomme la
plus forte , ne peut répéter que l'excédant
qui refte dû après la compenfadon faite.
C'eft une maxime fondamentale de cette
matière , que la compenfadon n'a lieu que
de liquide à liquide , c'eft-à-dire qu'il faut
que les deux dettes que l'on veut compenfer
foient toutes deux certaines , liquides , &
non litigieufes ; qu'elles foient l'une & l'au-
tre exigibles au temps où l'on prétend que
la compenfadon doit avoir lieu , & qu'elles
ne puiftènt point être annullées ou éteintes
par quelque exception pc'remptoirc , telle
que la prefcription.
C O M
Le ceflîonnaire eft fujet à la compenfadon,
de même que l'auroit été fon cédant ; mais
il ne peut pas obliger de compenfer une dette
exigible , telle qu'une obligation , contre
une dette non exigible , telle que le principal
d'une rente foncière ou conftituée.
De même , une dette dont le terme eft
incertain ou n'eft pas encore échu , ne peut
être compenfée avec une dette pure & lim-
ple & aduellement exigible ; une dette por-
tant intérêt ne peut être compenfée avec une
autre qui n'en porte point , à moins que les
intérêts ne foient comptés jufqu'au jour de
la compenfadon. Pareillement ce qui eft dû
en vertu d'une fentence dont il y a appel ,
ne peut être compenfé contre une dette due
par obligation ou jugement qui ne font point
atraqliés.
. Il y a encore plufieurs autres cas où la
compenfadon n'a pas lieu , quoique les deux-
dettes foient hquides de part & d'autre.
Par exemple , on ne peut obliger de corn- .
penfer une chofe fongible avec un corps
certain & déterminé ; ni une chofe fongible
d'une certaine efpece , centre une autre
chofe fongible d'une efpece différente , com-
me du blé contre du vin; mais quand ces
chofes font eftimées de part &: d'autre , la
compenfation a lieu pour l'eftimation.
La compenfation n'a lieu qu'entre perfon—
nés qui ont de leur chef la double qualité de
créancier & de débiteur ; de forte qu'un
tuteur qui demande ce qui eft dû à fon mi-
neur , ou un mandataire qui agit pour fon
commettant , ne font pas obligés de com-
penfer ce qui leur eft dû perfonncllemcnt
avec la Aent de celui pour lequel ils ftipulcnt.
On ne peut pas non plus oppofer la com-
penfation en matière de dépôt , fbit volon-
taire ou nécefTaire , ni en matière de com-
modat ; parce que ce feroit manquer de
bonne foi que d'ufer dans ces cas d'une
telle exception.
Elle n'a pas lieu non plus contre les droits
du roi , parce que ces droits font privi-
légiés.
De même en matière de retrait lignager >
parce que le rembourfement doit être aduel
& eft'eaif.
On ne peut aufîî compenfer les arrérages
de cens ni des rentes feigneuriales ou emphy-
téotiques, parce que ces rede^sinces font
C O M
dues principalement en reconoifTance delà
direde.
Les penfions viagères & alimens ne fe
compenlent point , à caufe de la faveur
de ces fortes de dettes qui ne doivent pas
foufFrir de retard ement.
En matière de complainte & de réinté-
grande il n'y a point de compenfadon , parce
c^XQ fpoliatiis ante omnia refiituendus efi.
Enfin la compenfadon n'a pas lieu en ma-
tière de délits , ce qui fe doit entendre par
rapport à la peine due pour lavindide pu-
blique ; mais les peines pécuniaires , telles que
réparations & intérêts civils , dommages &
intérêts , peuvent être compenfées. VoycT^
au digefte ôc au code , le tirre de compenfa-
tionibus ; Mornac ibid. Henriys , tom. II.
liv. II. quejî. xv. Guypape , quefi. dxxdj.
Ù dlxpij. Papon , liv. XII. dt. vj. Voye^
aujfi Defpeiflës , tom. I. part. IV. tit. iij.
les arrêtés de M. le P. P. de Lamoignon ; les
loix civiles , titre de la corhpenfation ;. Du-
moulin , tr. de ufuris , quœfl. xlij , n. 322.
Journ. des and. 1. 1. liv. l.ch. Ixxvj. [A).
COMPENSER , V. ad. qui exprime
î'adc de la compenfation. Voye^ COMPEN-
SATION.
COMPERSONNIERS , f. m. pi. ( Ju-
rifpr. ) font ceux qui tiennent enfemble un
même renement ou domaine , à la charge
d'une redevance envers le (eigneur , pour
laquelle ils font obligés folidairement.
On appelle aufll comperfonniers , ceux qui
vivent en commun & en fociété au même
pain & au même feu , comme cela fe pra-
tique fur-tout entre mainmortables dans quel-
ques provinces , telles que celles de Bour-
gogne , Nivernois , & Champagne. Voye\
le titre viij de la coutume de Nivernois ;
& Coquille , ibid. & le gloff. du droit fran-
çois , au mot perfonnier. {A)
* COMPES , f. m. pi. ( Manufaa. en
drap. ) efpeces de droguets croifés , dra-
pés , qui fe fabriquent au Treuil-barrer , la
Chafîeigneraye, ^c. qui doivent avoir \ aune
de large fur 40 de long , apprêtés ,* ou | de
large fur 48 de long en toile , au fortir du
métier. La chaîne en eft de 48 portées au
moins , & chaque portée de 16 fils. Voy. le
re'glem. des Manu foc}, tom. III. pag. z £.
* CoMFES f. m. ( Hifi, anc. ) efpecc
C O M 749
de chauflûre des Romains. Voye\ V article
Chaussure.
C'étoit auffi une forte d'entraves de fer
fort lourdes ; on les confacroit à Sanirne ,
quand oii en étoit délivré. Les efclaves qui
en étoit chargés , même en travaillant à la
culture des terres , s'appelloient compediti ,
alligati. C'étoit encore une manière de don-
ner la queftion aux criminels , qui confiftoit
à leur mettre les jambes dans des planches
percées de trous circulaires y qu'on ferroit
avec des coins.
COMPETENCE, f. f. ( Junfpr.) efl le
droit qui appartient à un juge de prendre
connoif/ance d'une affaire.
Le principe général , en matière de com-
pétence , elf que aclor fequitur forum rei ,
c'eft-à-dire , que le défendeur doit être afll-
gné devant le Juge de fon domicile. •
Il y a néanmoins plufieurs caules quipeu-
j \Qni rendre un autre juge compéient , pour
connoître de l'afTaire ; favoir ,
1°. Le privilège du demandeur ou du
défendeur : par exemple , ii le défendeur eit
eccléfiailique , & qu'il s'agifTe d'une matière,
perfonnelle , il peut demander fon renvoi
devant le Juge d'églife ; de m.ême fi le deman-
deur a droit de committimus, il peut affigner
devant le Ju^e de fon privilège ; ou fi c'elt le
défendeur qui a ce droit , il peut demander
fon renvoi.
29. L'attribution générale qui efl faite à
un juge de certaines matières , le rend feul
compétent pour en connoître : ainfi les élec-
tions"& les cours des aides connoillent fèuls
des tailles ; les Juges àzs eaux & forêts con-
noifî'ent feuls Aqs matières d'eaux & forêts ,
iàuf l'appel au parlement.
3°. Un juge peut être compétent en
vertu d'une attribution particulière qui lui
eit faite d'une feule affaire , ou de certai-
nes affaires qui ont rapport les unes aux
autres.
4^. En vertu d'une évocation ordonne'e
pour caufe de connexité ou litifpendance,'
un juge peut devenir compétent , quoi-
qu'il ne foit pas le juge du domicile du
défendeur.
5". En matière criminelle, la connoif^
lance du délit appartient au juge du lieu où
il a été commis , faufle privilège desgen-
, tiishommes , & de certains oiEciers qui
75© € O M ^
peuvent demander d'être rcnvoyés^devaht le
juge de leur privilège.
Tous juges font compétens pour infor-
mer d'un délit ; ce quia été établi pour em-
pêcher le dépérifîement de la preuve.
Un juge qui feroit compétent peut être
prévenu par un autre juge qui a droit de pré-
vention fur lui. Vqye:{ PRÉVENTION.
Les prévôts des maréchaux & les licute-
nans criminels ne peuvent juger en dernier
reflbrt un accufé qu'ils n'aient préalable-
ment fait juger leur compétence par le préfi-
dial ; fi le préfidial a prévenu , il efl lui-
même juge de fa compétence'^ & fil'accufé
attaque le jugement de compétence par la
voie de la caflàtion , c'efl au grand-confeil
qu'il doit fe pourvoir.
L'ordonnance criminelle , tit. j. ordonne
<^Q\d.dompétence fera jugée au préfidial dans
le^effort duquel la capture a été faite , dans
trois jours au plus tard , encore que l'accufé
n'ait point propofé de déclinatoire.
Que les jugemens de compétence ne pour-
ront être rendus que par fept juges au moins,
qtji figneront la minute.
Que la compétence ne pourra être jugée ,
que l'accufé n'ait été oui en la chambre en
préfence de tous les juges ; qu'il en fera fait
mention dans le jugement , ainfi que du
motif de la compétence.
Que le jugement de compétenée fera pro-
noncé &fignifié fur le champ à l'accufé.
Que fi le prévôt des maréchaux efî décla-
ré incompétent , l'accufé fera transféré dans
deux jours au plus tard es prifons du lieu du
délit.
Enfin , que le prévôt qui aura été déclare
compétent , fera tenu de procéder inceflam-
ment à la confedion du procès avec ion
affefleur , finon avec un confeiller du fiege
où il devra être jugé.
Les appels comme de juge incompétent ,
tant au civil qu'au criminel , fe relèvent au
parlement omijfo medio.
En matière civile , tous juges font com-
pétens pour reconnoîrre une promelîè ;
c'cfl-à-dire , que quoiqu'il y ait lieu de
renvoyer le fond devant le juge d'attribu-
tion ou du privilège , néanmoins le juge
qui eft faifi de l'aftàire , peut donner aûe
de la reconnoilîance ou dénégation d'une
promefTe.
C OM
Sur la compétence des juges , voyeT^-ci'apr,
Incompétence , Juge d'attribu-
tion , Juge d'église, Juge de privi-
lège,Juge DE SEIGNEUR, 6" Justice
seigneuriale. ; Prévôt des maré-
chaux ,Présidiai. , Procès crimi-
nel ; le DicHonncLire de droit , au mot com-
pétence y ^ le traité de la compétence des
juges en matière criminelle ; & aux décréta^'
les y le titre deforo competenti. {A)
COMPÉTENT, veyeici-depant Coyi-^
pétence.
COMPIEGNE , ( Géog. mod. ) ville de
France , dans l'île de France. Long. ;io^ ,
z^' , 4z";lat. 4sà^ ^^' ^ ^^"^
COMPILATEUR, f. m. {Belles-Let-
tres. ) écrivain qui ne compofe rien de gé-
nie , mais qui fe contente de recueillir & de
répéter ce que les autres ont écrit. La plu-
part des lexicographes ne font que des com^
pilateurs. Les qualités les plus néceftaires à
ceux qui font des compilations , font Texac-
titude & le difcernement , pour ne préfen-
ter au ledeur que des chofes dignes de fon
attention. Autrefois le nom àt compilateur
fe prenoit en mauvaife part , & équivaloit ;i
plagiaire. Horace a dit en ce fens a la fin de
fa première fatyre :
Ne me Crifpini fcrinialippi
CompilaJJe putes.
Quelques-uns fontvenir les mots compi.
lation & compilateur du grtcjihiiv qu\ figni-
fiC rejjerrer , condenfer ; parce que les vo-
leurs , difent-ils , reflerrent leur larcin en
plus petit volume qu'ils peuvent , afin de
l'emporter plus ailément. Les anciens latins
en avoient formé /?/7are , compilare ^ d'où
nous avons fait compilation & compilateur,
Voje^ Plagiaire. ( G )
COMPILATION , f f. ( Belles Lett. )
recueil formé de morceaux pris çà & là
dans le même ou dans divers auteurs. Plu-
fieurs ouvrages des modernes ne font que
des compilations de ceux des anciens. Il y
a des compilations efiimables : celles , par
exemple , où les textes de divers auteurs
dont le llyle n'ell pas uniforme , font ii
bien fondus qu'ils paroificnt erre fortis de
la même plume ; telle eft l'hifioire ancienne
de M. Rollin : d'autres neiont que des co-
pies feches ou informes de lambeaux mai
confus ; on peut les comparer à un amas
cou
lïe matériaux bruts , & les autres à un édi-
fice : celles-ci demandent du goût; les autres
ne iuppoient que du temps , des recherches ,
& la patience infatigable de copier mot à mot.
Fbyq Abrégé. ( G )
* COMPIT ALES. f. f. ( MythoL ) fêtes
inftituées en l'honneur des dieux lares ou
pénates. On les célébroit dans les carre-
tours , per compila. Les affranchis & les
efclaves en étoient les minières & les prê-
tres ; c'étoit un temps de liberté pour ces
derniers. Sous les rois on y iacrifioit des
cnfans ; mais Brutus , après l'expuliion des
Tarquins , fubilitua aux têtes humaines que
lesorad.es avoient demandées , & qui dé-
voient tomber dans les compitales y des têtes
d'ail & de pavot. Il y avoit dans les carre-
fours des poteaux élevés : on pîaçoit (ùr ces
poteaux des images & des figures d'hom-
mes & de femmes. Les figures repréfen-
toient les dieux lares , & il y avoit autant
d'images que de perfonnes hbres dans la
famille. Les compitales n'étoient que pour
les efclaves. Elles furent inftituées par Tar-
quin le premier ou par Servius Tullius. On.
voit dans Ciceron que ces têtes furent célé-
brées de fon temps au mois de décembre ;
mais elles fe célébroient ordinairement au
mois de mai , comme le prouve le calendrier ;
& c'eft fous le mois de mai qu'Ovide en fait
mention dans fes fafies ; le préteur en indi-
quolt le jour. On y facrinoit une truye» Les
efclaves offroient une balle de laine.
COMPLAIGN ANT , adj. pris du fubft.
( Jurifprud. ) fignifie la même chofe que
plaignant ou accufateur en matière crimi-
nelle ; il ne faut pas confondre le complai-
^nant avec le demandeuren complainte , foit
profane ou bénéficiaie ; celui-ci fembleroit
devoir être appelle complaignant plutôt que
l'autre , à caufe qu'il intente la complainte ;
ce terme efl même ufité en ce fens dans
quelques provinces , mais dans l'ulàge com-
mun , on n'entend par le terme de com-
plaignant , que i'accufateur \ celui qui in-
tente complainte efi qualifié demandeur en
complainte. {A)
COMPLAINTE , f. f. ( Jurifprud. ) efl
une adion poiTefToire , par laquelle celui
qui efi: troublé en la poiTeflîon d'un héritage
ou droit réel ^ ou d'un bénéfice , fe plaint
à la jujftice de ce trouble, & demanée coatre
C O M 7^1
celui qui en efl l'auteur , d'être maintenu
dans fa polfeilion , & que défenfes Ibient
faites de l'y troubler.
Le propriétaire , rufufruitier , l'ufager &:
l'emphytéote peuvent intenter complainte ;
mais il faut qu'ils aient pofTédé , non vi ,
non cldm , 710/2 precario y c'efi-à-dire publi-
quement & fans violence , à autre titre
que de poficfîêur précaire; c'efl pourquoi
un fimple fermier ou locataire ne peut pa«
ufer de complainte.
Aucun fujet ne peut l'intenter contre le
roi , parce qu'on ne préfume jamais que
le roi ait caufé de trouble ; l'apanager jouit
aufli à cet égard du même privilège que
le roi.
Les rafîaux & cenfitaires ne peuvent pa-
reillement intenter complainte contre leur
feigneur ^ Qipr raifon des héritages qui font
mouvans de lui.
Pouf intenter complainte , il faut avoir
pofîédé an & jour , former fa demande en
complainte dans l'an & jour du trouble , &
que cette demande foit formée & jugée avant
d'en venir au pétitoire.
Elle ne peut être intentée que pour héri-
tages ou droits réels; tels que des fervitudes,
dîmes inféodées , droits de patronage y
droits feigneuriaux & honorifiques, rentes
foncières , &c. Les rentes confîituées n'é-
tant point réelles , même dans les lieux où
elles font réputées immeubles , ne peuvent
faire la matière d'une- complainte.
Elle a lieu pour des bénéfices & droits,
qui y font attachés , tels que àts dîmes
eccléfiafiiques.
On ne peut intenter complainte pour cho>-
fes mobiliaires , à moins qu'il ne s'agifïè d'iwie
univerfalité de meubles.
On peut être troublé de fait , ou par pa-
roles , ou par quelque ade qui tend à former
un trouble, & dans tous CQscâsià complainte
a lieu.
Chaque juge connoît des complaintes dans
fon territoire , & les juges royaux n'ont à
cet égard aucune préférence ai préventioa
fur les juges du feigneur.
Le juge d'églife ne peut connoître à^M}--
cune complainte foit profane , foit bénéficia»
le , il faut fc pourvoir devant le juge laïque.
La complainte s'intente par exploit , &:
quelquefois par oppofuipa. Celui qui éi
7Ti
C O M
afligné en complainte ne peut pas intenter
lui-même complainte pour le même objet ,
en difant qu'il prend la demande en com-
plainte pour trouble.
Celui qui a été dépofledé de l'héritage
n'intente pas une firaple complainte , mais
l'adion appellée re'integrande. voye\ Louet
& Brodeau , lettre B.n. il ^ V ordonnance
de z66y , tit. xv. Papon , liv. VIII , tit.
iv. Loifel , lit-'' V , tit. jv. Belordeau y en
fes controverfes , lett. C. art.zj.
Complainte bénéficiale ou en
MATIERE BÉNÉFICIALE, eft une adion
pofTelToire par laquelle celui qui eft en pofïef^
'lion d'un bénéfice , de fait ou de droit feule-
ment, fe plaint du trouble qui lui efî lait 'par
un autre prétendant droit au même bénéfice,
& conclut à la fin d'être maintenu & gardé
en fa poiTeilion y avec défenfiw à fa partie
adverfe de l'y troubler ; & à ce que pour
l'avoir fait , il foit condamné en lès dom-
mages & intérêts & dépens.
Les juges royaux connoifîent de la com-
plainte en matière bénéficiale , parce que
d'eu une adion poiTelToire. On voit dans
une ordonnance de Philippe Augufte de
l'an 12,14, que dès ce temps-là c'étoit le
juge laïque qui connoilToit de ces fortes de
complaintes ; & le pape Martin V , par une
bulle de l'an 142.9 , a reconnu que c'étoit
au roi & à fes officiers à maintenir les pol-
felTeurs des bénéfices y & non au juge
d'églifc.
Anciennement le parlement connoilîbit
-en première infiance de toutes fortes de
complaintes , même en matière bénéficiale ,*
mais préfentement la connoifîance en ap-
partient aux juges royaux , & par appel au
parlement.
Les baillis & fénéchaux ctoient d'abord
les feuls qui en pufîènt connoître en pre-
mière infiance , fuivant un arrêt de l'an
1277 • mais fuivant l'édit de Cremieu , de*
l'an 153^, & l'édit d'Henri II du mois de
Juin 1559 > l^s juges royaux inférieurs en
peuvent connoître chacun dans leur rei^
fort ; les baillis & fénéchaux ont feulement
fur eux le droit 3e prévention pour ces
•matières.
Les juges des fèigneurs ne peuvent en
aucun cas prendre connoifîance d'une com-
ipUintc hénc'ficiale , quand même il s'agiroit
C O M
des bénéfices de la fondation àts fèigneurs
ou de leurs auteurs , & qu'ils en auroient la
préfentation ou collation. Ordonnance de
i 66 j , tit. XV , art. 4.
La connoiffance du pétitoire appartient
de droit au juge d'églife ; mais quand la
complainte eft jugée , celui des deux con-
tendans qui a perdu devant le juge laïque ,
ne peut plus fe pourvoir devant le juge
d'églife pour le pétitoire , parce que les
juges laïques ne jugent pas le pofîefToire en
matière bénéficiale fur les aâes de poffef^
fion feulement , mais aufli fur les titres des
parties dont ils examinent la validité : de
forte que le pofîefToire étant jugé par le
mérite du fond , il ne feroit pas jufle de
rapporter la même queflion devant le juge
d'éghfe.
La complainte bénéficiale diffère de la pro-
fane en ce que celle-ci ne peut être intentée
que par ceux qui font en pofïliiion aduelle
& de fait ; au lieu que celui qui a été pourvu
d'un bénéfice , trouvant la place remplie par
un autre, peut prendre poffeiîion de droit
feulement , & prendre pour trouble la poffef-
fion de fait de fon adverfaire , & intenter
complainte contre lui.
Il n'y a jamais de complainte contre le
roi ; c'efl pourquoi en matière de régale ,
l'état ou récréance efl toujours adjugé par
provifion au régalifle.
La complainte bénéficiale doit être intentée
dans l'an & jour du trouble , de même
qu'en matière profane^ Ordonnance de
ZS39 , art. 6i.
Le demandeur en complainte doit expri-
mer dans fa demande le titre de fa provi-
fion , & le genre de vacance fur lequel Jl
a été pourvu ; par exemple , fi c'efl par
mort , réfignation , permutation ou dé-
volut , & donner avec le même exploit au
défendeur copie de fes titres & capacités
fignée de lui & de l'huiffier ou du fergent.
Si le demandeur ignore le domicile de
fon adverfaire , & ne peut le faire affigner
en parlant à fa perfonne , il faut fignifier
l'exploit dans le chef-lieu du bénéfice.
On prenôit autrefois deux appointcmens
fur une complainte ; l'une pour communiquer
les titres & capacités , l'autre pour écrire
par mémoires : mais ces formes inutiles ont
été abrogées par l'ordonnance de 16^7.
tiorfque
C O M
Lorfque la caufe peut fe juger à Fau-
•dicnce , le juge maintient en la pofïèffion
vdu bënéfice celui qui le trouve en avoir été
canoniquement pourvu ; fi l'affaire ne peut
pas fe juger à l'audience , on appointe les
parties en droit, & cependant on adjuge la
récréancé à celui qui a le droit le plus ap-
parent; & Il le droit eft fort problémati-
que , on ordonne le fequeftre ; le grand-
confeil prend ordinairement ce parti , &
accorde rarement la récréance.
Pour la validité d'une lentence de main-
tenue ou de récréance & de fequeftre, il
faut qu'il y ait au moins cinq juges de nom-
més dans la fentence ,* & fi elle eft rendue
fur une inftance appointée , ils doivent tous
iigner la minute de la fentence : cela n'eft
cependant pas obièrvé aux requêtes de
l'hôtel & du palais.
La fentence de maintenue peut être exé-
-cutée nonobftant l'appel, pourvu qu'elle ait
été donnée par des juges refTortifîàns immé-
diatement en la cour , & qu'ils fuffent au
nombre de cinq , & en donnant par l'inti-
Tné bonne & jufîîfante caution de rendre
les fruits , s'il eft ainft ordonné fur l'appel:
•telle eft la dilpoiition de l'ordonnance de
JLouis XII de l'an 1498 , art. 8j.
Lorfque l'appel eft d'une fentence de
récréancé , elle doit être exécutée nonobf-
tant l'appel à la caution juratoire de celui au
profit duquel elle aura été rendue ; il étoit
autrefois obligé de donner bonne & fuffi-
fante caution , mais cela a été changé par
l'ordonnance de i66y.
La fentence de récréance doit être entiè-
rement exécutée avant que l'on puifTe pro-
céder fur la pleine maintenue. K. Vordonn.
de l 66 j^ tit. XV. & POSSESSOIRE. (A)
Complainte en matière profa-
ne , eft celle qui n'a point pour objet un bé-
néfice ni aucun droit annexé à un bénéfice.
Complainte en cas de nouvelle-
té, eft celle qui s'intente dans l'an & jour du
trouble , que l'on appelloit autrefois nou-
velleté; on appelle aufli complainte en cas de
faijîne & de nourellete\ ou complainte fîm-
plement. ^oyq COMPLAINTE.
Complainte possessoire, eft la
même chofe que ce qu'on appelle lim-
plement complainte , cette adion n'étant
^as toujours polTeifoire.
Tome VIIL
C O M 753
Complainte en cas de simple sai-
sine, étoit une complainte particulière, qui
pouvoit autrefois être intentée par celui qui
avoit joui d'une rente foncière fur un héri-
tage avant & depuis dix ans ; & pendant la
plus grande partie de ce temps , il pouvoit
intenter le cas de fimple faifine contre celui
qui l'avoit troublé, & demander d'être remis
en fa pofTefîion. Cette complainte avoit lieu ,
lorfque celui qui pouvoit intenter l'aâioii
de nouvelleté en avoit laifTé pafferle temps
ou y avoit fuccombé. Dans cettQ€omplainte^
il falloit prouver une polTeflîon qui remon-
tât au defius de dix ans ; la coutume de
Paris, art. s^ , fait mention de cette com-
plainte : mais préfèntement elle n'eft plus
d'ufage ; & quand celui qui pouvoit in-
tenter complainte en cas de nouvelleté en a
laifîe pafferle temps ou y a fuccombé, il
ne peut plus agir qu'au pétitoire &: doit
rapporter un titre. Voy. Brodeau , Tron-
çon, Guerin, & le Maiftre far Van. $8
de la coutume de Paris. {A}
COMPLAISANCE, f f. {Morale.) La
complaifance eft une condefcendance hon-
nête , par laquelle nous facrlfions notre vo-
lonté à celle des autres : je dis une eondef-
cendance honnête ,* car déférer en tout
indiftindement à la volonté d'autrui , ce
feroit plutôt lâcheté ou complicité que
complaifance.
La complaifance confifte à ne contrarier le
goût de qui que ce foit dans ce qui eft in-
différent pour les mœurs , à s'y prêter mê-
me autant que l'on peut , & à le prévenir
lorfqu'on l'a fu deviner. Ce n'eft peut-être
pas la plus excellente de toutes les vertus ,
mais c'en eft une du moins bien utile & bien
agréable dans lafociété. (C)
Complaisance , {Junfprud?) 'ho'it de
complaifance aux quatre cas , eft la même
chofe que les loyaux-aides que le vafïàl eft
tenu de payer au feigneur dans les quatre
cas, c'efl-à-dire , en cas de chevalerie du
fils aine , de mariage d'enfans ^ de voyage
d'outre-mer, & de rançon du feigneur. H
en eft parlé dans un arrêt du 2,0 Juillet 1^2.4,
dont M. de Lauriere fait mention en fon
glojfairey au mot complaifance. (A)
COMPLANT , f. m. {Jurifprud.) efl
la conceflîon que l'on fait à quelqu'un d'un •
héritage . à Id charge d'y faire quelque
J3bbbb
754 C O M
plantation d'arbres & fur-tout des vignes ,
moyennant la redevance d'une portion des
fruits qui fe perçoit dans le champ , comme
le terrage ou champart.
Quand le compiant eu (ait par le feigneur
de l'héritage , la redevance eft feigneuriale.
On comprend auffi fous le terme de corn-
plant y le droit même que le bailleur s\ïi
aéfervé de percevoir une portion des fruits.
Il eft fait mention de ce droit dans la cou-
tume de Saint-Jean d'Angely , art. i 8 , &c
dans celle de Poitou, art. an. (A)
COMFLANTER, v. neut. [Jmifprud.)
ï\gmÇie percevoir le droit de complant : il
n'eft pas permis d'enlever les fruits fujets à
ce droit avant que le feigneur ait comptante.
V , la coutume de Poitou y art. 8z & ci-de-
vant Complant. {A)
COMPLANTERIE, f. f. [Jurifp.) c'eft
le terroir où le feigneur a droit de percevoir
le droit de complant. Il en eft parlé dans
Vart. y ^y de la coutume de Poitou. Voyez
ci-devant COMPLANT.
COMPLÉMENT , f. m. fe dit en géné-
ral d'une partie qui , ajoutée à une autre,
formcroit un tout ou naturel ou artificiel.
Complément arithmétique d'un loga-
rithme, c'eft ce qui manque à un logarithme
pour être égal à lo. coococo, en fuppo-
fant les logarithmes dé neuf caraderes. î^.
Logarithme. Ainfile complément arith-
métique de 7.1079054 eft 2.8920946. (O)
Complément de la hauteur d'une étoile,
en ARronomie y fe dit de la diftance d'une
étoile au zénith , ou de l'arc compris entre
le lieu de l'étoile au-deflîis de l'horizon & le
zénith. V. ZÉNITH.
On appelle ainfi la diftance de l'étoile au
zénith, parce qu'elle eft véritablement le
complément à 90 degrés de la hauteur au-
defllis de l'horizon, c'eft-à-dire , l'excès de
<po degrés, ou de l'angle droit fur l'angle
ou l'arc qui donne la hauteur de l'étoile.
VojeT^ Complément. (O)
Complément de la courtine , fè
dit en Fortification , de la courtine augmen-
tée d'une demi-gorge , c'eft-à-dire , c'eft le
coté inférieur, du polygone diminué d'une
demi-gorge. Voye^ CoURTINE , Jwa
Gorge. (Ç) *^ ^
Complément d^un angle ou d'un arc, en
^éoméifiej eft ce qui refte. d'un angle droit
C O M
ou de quatre-vin£t-dix degrés , après qu^on
en a retranché cet angle ou cet arc. J^oy.
Arc , Angle.
Ainfi l'on dit que le complément d'un an^
gle ou d'un arc de ^o degrés , eji de 60
degrés , puifque 60 -f- 30 = 90.
L'arc & Ion complément font des termes
relatifs, qui ne fe difent que de l'un à l'égard
de l'autre.
On appelle co-Jinus le finus du complément
d'un arc ; & co-tangente , la tangente du
complément. V. Co-SINUS 6" Co-TAN-
GENTE,6'c.V. au^SlNUS. Chambers.{E)
On appelle complément d'un angle à 280
degrés, l'excès de 180 degrés fur cet angle:
ainfi le complément à 180 degrés d'un angle
de 100 degrés , eft 80 degrés ; mais complé-
ment tout court ne fe dit que du complément,
à 90. (O)
Les complémens d'un parallélogramme
font deux parallélogrammes que la diago-
nale ne traverfe pas , & qui réfultent de
la divifion de ce parallélogramme par deux
lignes tirées d'un point quelconque deU
diagonale parallèlement à ^chacun de les
côtés.^ Tels font les parallélogrammes C &,
My Plan, de géomét.fig. £. 77.2.. L'on a dé-
montré que dans tout parallélogramme les
complémens C & MÇom égaux: car Z-i-C')C
0=R'-{- M-\~ X à caufe que les deux grands
triangles font égaux (la diagonale divifant le
parallélogramme en deux égalemfentj ; &.
de même Z = R, &c 0 = x : c'eft pour-
quoi les parallélogrammes reftans C &c M
font égaux. F". PARALLÉLOGRAMME. (O)
Complément d'un intervalle, en
Mujique , eft la quantité qui lui manque
pour arriver à l'odave : ainfi le complément
de la féconde eft la feptieme ; de la tierce ,
la fixte ; & de la quarte , la quinte : & réci-
proquement le complément de la quarte ; àù
la fixte, la tierce; de la feptieme , la fé-
conde. Ainfi complément & renverfement fi-
gnifient la même chofe , toutes les fols qu'il
n'eft queftion que d'un intervalle. Voye\
Intervalle & Renversement. (iS)
Complément de route, terme de na-
vigation; c'eft le complément de l'angle que
fait la route ou le rhumb que l'on fuit avec le
méridien du lieu où l'on eft , c'eft-à-dire , la
différence de cet angle à 90 degrés. Voye\
CoJilPLÉMENT ea Géométrie. (O)
C O M
COMPLEXE, adj. terme de philofophie\
il fe dit d'une propofition , & des difîerens
termes d'une propofition : ces terrpes font
firaples quand ils ne défignent qu'une feule
idée ; ils font complexes quand ils en com-
prennent plufieurs. Il fe dit de la propo-
sition , lorfqu'elle a plufieurs membres.
Complexe : une quantité complexe , en
algèbre, efl une quantité comme a-f- b-c y
compofée de plufieurs parties, a, b, Cp
jointes enfemble par les fignes -+■&-. (O)
COxMPLEXION , f. f. figure de rhéto-
rique qui contient en même temps une répé-
tition & une converfion , c'efl-à-dire , dans
laquelle divers membres de phrafe com-
mencent & finifîent par le même mof,
comme dans ce trait de Cicéron , qui con-
tient de plus une interrogation : Q^uis legem
tulit ? Rullus. Q^uis majorempanem populi
fuffragiis privavit ? Rullus. Quis comitiis
prœfuit? Rullus. (Deleg. agr. contra Rull.)
Cette figure efl commune & triviale ,
parce que l'auditeur a à peine entendu la
queflion , qu'il prévient la réponfe. Voye-{
Conversion ù Répétition.
COMPLEXION , habitude , difpofition
naturelle du corps. Voy. CONSTITUTION.
Quelques anciens philofophes distinguent
qu'atre complexions générales & principales
dans l'homme : la complexion fanguine
répond , félon eux , à l'air ; elle en a les
qualités , elle efl chaude & humide. Elle efl
ainfi nommée parce que le fang y domine.
Fqytf;^ Sanguin.
La complexion flegmatique , qui tire fon
nom de la pituite ou du flegme dont elle
"abonde , répond à l'eau ; elle efl froide &:
humide. Fbjq FLEGMATIQUE.
La complexion bilieufe efl de la nature du
feu ; elle efl chaude & feche. Voye^ Cho-
tÉRIQUE.
La complexion mélancolique tient de la
nature de la terre : elle efl froide & feche.
Kqyq MÉLANCOLIQUE. Dic^. de Tre'v.
& Chambers.
On ne fait plus guère d'attention à toutes
ces fortes de divifions : l'expérience a ouvert
les yeux fur bien des préjugés ou des opi-
nions, dont il faut cependant rendre compte,
afin que chacun puifle en faire l'ufàge ou le
mépris qu'il jugera à-propos.
COAIPLÉXUS , en anatomie , nom de
C O M 755
quafre mufcles de la tête , dont deux ont
été appelles les grands complexus , & les
deux autres les petits complexus.
l.t grand complexus vient de la ligne demi-
circulaire inférieure de l'os occipital , &
fe termine aux apophyfes obliques des ver-
tèbres du cou , & de trois ou quatre des
vertèbres fijpérieures du dos.
Le petit complexus ou mafloïdien latéral ,
vient des apophyfes tranfverfes des fix ver-
tèbres inférieures du cou , & fe termine k
l'apophyfè mafloïde poflérieurement. {L)
COMPLICATION , f. f. terme plus
d'ufage -en médecine qu'en aucune autre
occaiion : il défigne généralement un afîèni-
blage de caules , d'effets , ou de circonl-
tances tellement liées les unes aux autres ,
qu'il efl difficile d'en appercevoir diflinde-
ment tous les rapports.
Complication, {médecine.) com-»
plexio y confujîo : ce terme efl employé en
difîerens fens par les Pathologifles.
Le plus grand nombre d'entre eux appel-
lent compliquée ^ une maladie à laquelle efl
jointe une autre maladie dans le même
fujet : ainfi une hémorrhagie habituelle des
narines qui dépend de la léfion de quelque
vifcere du bas-ventre , efl une maladie com-
pliquée ; de même que l'épilepiie , qui efl
produite conféquemment à une maladie de
la matrice : le virus vénérien joint avec le
virus fcrophuleux , conflitue une maladie
compliquée qui efl la vérole. 6v. Telle efl
l'idée que donnent des auteurs pathologif^
t^s , de ce qu'ils appellent malaaie compli-
quée ^ par oppofition à ce qu'ils nomment
maladie Jîmple, qui, quoiqu'elle foit accom*-
pagnée de plufieurs fymptoraes difîerens
qui en dépendent , n'efl jointe à aucune
autre maladie diflinguée. Ainfi la fièvre
tierce , la pleuréfie , la douleur aux dents ,
prifes fcparément , & confidérées comme
exiflantes feules dans un fujet , font des ma-
ladies fimples.
D'autres , tels que M. Aflruc , entendent
par maladies compliquées , celles qui , quoi-
que confidérées chacune en particulier ,
conflituentdes léfions de fondiondans l'éco-
nomie animale , de plufieurs manières , par
oppofition aux maladies fimples , qui ne
troublent les fondions que d'une manière.
Ainfi la péripneumonie , par exemple , eft
Bbbbbi
73^ C O M
tine maladie compliquée , pafce qu^elIe
afFeâe en même temps les parties folides &
les parties fluides des poumons , & chacune
de ces parties de différente manière ; i**.
entant qu'elle conftitue une tumeur inflam-
matoire , par laquelle ks folides font vitiés
«l'égard de leur volume qui eft augmenté ^
de leur figure qui eft changée, des con-
duits qui font engorgés ,. & des fibres
même dont ils font compolës. qui font ou
'relâchées & afFoiblies , ou reflerrées & ren-
dues trop roides : 2"; entant qu'elle donne
lieu à la fièvre , par laquelle- les folides font
vitiés à l'égard de leur mouvement qui eft
augmenté , de lachaleur qui efl-plus forte ,
de la qualité des humeurs qui eft différem-
ment altérée , & de leur volume qui eft
fou vent plus confidérable ,: à. caufe de la
pléthore vraie ou fauife.
Mais comme , dans ceS' différentes figni-
fications que l'on donne aux complications
des maladies ,, on n'y donne pas une idée
diftindè de ce qu'on appelle maladies y. &
de ce qui en eft le fymptome ,. de ce qui
caraétérife une maladie fimple & une mala-
die compliquée , il paroît plus utile & plus
clair d'appeller avec Pitcarne {élém. pJiyf.
mathém.) maladie fimple y ce que les auteurs
d'inûjtutioti de médecine appellent ^/y/;7/»fo-
me ; &cb-donner le- nom de maladiccom-
pliquée-y à ce qu'ils appellentiimplement ma--
ladie y c'eft-à-dire à la jonâion, au con-
cours de plufieurs . fymptomcs : par-là on
évite une grande confufioxi dans la. patho-f
logie. .
Il réfulte de ce qui vient d'être dît , que
Va complication dans les -maladies n'eft autre
chofe que la réunion des conditions requi-
fes pour former une maladie compliquée ,
«îans lequel des fens mentionnés qu'an puifl^
prendre ce terme»
Au refte il paroît que ,- ^r maladie com-
pliquée ^ les auteurs entendent la même chofe
que par maladie compofée. Galien , lib. de
typ. cap. il j. Koy-<f;( Maladie. Cet article ^
efl de- M. 7> 'Au M ONT.
Complication, (/Mr///7r.)fedirenma-
--^ere criminelle, lorfque l'accufé fe trouve
'-prcvenu de plufieurs crimes : on dit auifi
de la procédure ou d'une affaire en général ,
. c^n^ elle eji fort compliquée , lorfqu'il y a un
■grand nombre d'objets &:,de demandes, refr ^
C o m
pefltives qui fe croifent mutuellement. {A)
COMPLICE, f m. {Jurifpr,)e^ celui
auquel on impute d'avoir eu part à quelque
fraude ou à quelque délit, foit pour avoir
donné confeil , ou. avoir aidé- à commettre
l'aâion dont il; s'agit.
Quand on ordonne quelque informatiorv
contre les complices d'unaccufé, on joint
ordinairement au terme de complices , ceux
àe fauteurs y participes , & adhérens , pour,
déiigner toutes les différentes manières dont
les complices peuvent avoir eu part au délit..
Celui qui eft complice d'un délit ou de
quelque fraude repréhenfible , eft fouvent
autant coupable que l'auteur même du déht,,
&.dolt êcre puni également ; ce qui dépend
néanmoins des circonftanccs , par lefquelles
on connoît le plus ou moins de part que
le complice a eu à l'adion : par exemple ^,
.celui qui a fu le deflein qu'un autre avoit
de commettre un crime , & qui ne l'a pas
empêché pouvant le faire., eft coupable au
moins d'une négligence qui approche beau-
coup du délit ; mais celui qui a conlèillé le
défit, ou. qui a aidé aie commettre, eft
encore plus coupable^.
Un homme qui s'eft trouvé par. hafard
en la compagnie de quelqu'un qui a com-
mis un crime; , n'en eft pas pour cela
réputé complice , pourvu qu'il n'y ait eu en
eftèt aucune part.
La déclaration ou dép.ofition des com-
plices ne fait point une foi pleine & entière
contre le principal accufé , ni pour un com-
plice contre un. autre ; elle fert feulement ■
d'indice pour parvenir à tirer la preuve du
crime par le moyen de la queftion ou tor-*
ture; & fiLTaccufé-n'avoue rien, il doit être,
abfousi
Il faut même obferver que-la dépofition
d'un feul complice , qu^nd il n'y a pas quel-
que autre adminicule de preuve, n'eft pas
fufîifante pour faire appliquer fes complices
àJa queftion; il.faut dumoins en ce cas la .
dépofition de deux ou trois complices.
On excepte néannK)insde< cette règle cer-
tains crimes , tels que ceux de lefe-majefté ,
facrilege, conjuration , fauffemonnoie , hé-
réfie, & aflaflinat, oiY la dépofition d'un
complice fait pleine foi contre. un autre. K.
Clarus, lib. V'. fe/u. quœfl. xxj. n. 8. à feq-,
T-achlnylib, JX, cap, Ixxxviij, {A)
C O M
COMPLICITÉ, f. f. i^Jurifpr) efllapart
que quelqu'un a eue à la fraude ou au crime
commis par un autre. Voye\ ci-de^'ant
Complice. {A)
COMPLIES , f. f. pi. {Hifl, ecdéf.)ccû
dans l'églife romaine la dernière partie de
l'office du jour. Elle eft compofée du Deus
in adjutorium y de trois pfeaumes fous une
feule antienne , d'une hymne , d'un capitule
& d'un répons bref, puis du cantique de
Siméon ISunc dimittis y & de quelques priè-
res ou verfets, du confiteor avec l'abfolution,
d'un oremus , & enfin d'une antienne à la
Vierge , avec fon verfet & fon oraiforu
On ne connoît pas au jufle le temps de
l'inflitution dé cette partie de l'office , dans
laquelle l'églife a en vue d'honorer la mé-
moire de la fépulture de Jefus-Chrifl , ainfi
que le porte la glofe, cap. x. de celebr. mijfar,
tumulo compléta reponit.
Ce qu'il y a de certain, c'efl qu'elle étoit
inconnue dans la primitive églife , comme
lè prouve contre Bèllarmin le cardinal Bona,
de pfalmod. ch. xj. car les anciens termi-
noient leur office à none ;-& il paroît mêr-
me par S. Baille , major, regular. quœji. ^y.
qu'ils y chantoient le pfeaume 90 que nous
récitons aujourd'hui à compiles. On ne trou-
ve dans Tertullien & dans les autres
anciens nulle tmce des compiles: ileft vrai que
l'auteur des conftitutions-apoftoliques parle
de l'hymne du foir , & que Caffien décrit
là pratique des moines d'Egypte pour l'of-
fice du foir ; mais c'étoit ce que nous appel-
ions proprement vêpres. Fbjf^j Vepres.
Voyerles antiq. eccléf. de Bingham ; tome
V.lib.XIII.ch.jx.^.8.{G)
COMPLIMENT ,f. m. {MoraU) dl'f-
cours par lequel on témoigne de vive voix
ou par écrit à quelqu'un l'eflime qu'on a
pour lui , ou la part que l'on prend à quel-
que chofe d'intérefl'ant qui lui arrive. C'efl
ordinairement , ou une fadeur , ou une inu-
tilités, ou un menfonge ; ce qui n'empêche
pasquecenefôit quelquefois un devoir. (O)
COMPLIMENTAIRE , f. m. ttrme de
commerce : on appelle quelquefois 'le compli-
memaire d'une fociéte\ celui des afîociés fous
le nom duquel fe fait tout le commerce de
là fociété. Voyei^ SoGIÉTÉ. Diélion. du
Comm. Ù de 2^réi'.
^ COMPLIQUÉ, adj. {Gramm.)\\k
C O M 757
dit en général de tout ce qui contient un
grand nombre de rapports , qu'il efl diffi-
cile d'embrafTer & de concevoir diflinde-
ment. Il y a cette différence entre une
affaire délicate & une affaire compliquée y que
les rapports de la première peuvent être en
petit nombre , au lieu que ceux de la fé-
conde font nécelfairement en grand nombre.
COMPOIX , f ^ m. {Hifl. mod.) fynony-
me à cadaftre : c'ell en Languecioc & eri
Provence l'état des fonds de chaque com-
munauté , avec leur cflimation , leur qua-
lité , & les noms de ceux qui les tiennent.
COMPONCTION, terme de théologie,
douleur qu'on a dans l'ame d'avoir ofïenfé"
Dieu. Voye\ CONTRITION.
La confeflîon n'cfî bonne que quand on'
a un vif repentir, une grande componclioiî
de cœur. Koy^r;^ CONFESSION.
Componction , dans la vie fpirituelle , ar
une fignifîcation plus étendue ; elle fe prend
non-feulement pour la douleur qu'on a d'à-»
voir offenfé Dieu , mais aufli pour un fenti-
ment pieux de douleur , de trifîelîe , de dé-
goût, qui a diiïerêns ra'orifs. Les miferes de
la vie, le danger où l'on efl de fe perdre
dans le monde , l'aveuglement des mon-
dains , font pour \ts gens de bien des fujets
de componclion: Trév. Ù Chamb. [G)
COMPONÉ , adj. terme de Blafon. On
dit une bordure componée , de celle qui eft
formée ou compofée d'un rang de parties
angulaires, ou qui efl échiquetée de deux
couleurs.
Componé fe dit auflî généralement d'une
bordure , d'un pal , ou à^Vint fafce com-
pofée de deux difïerentes couleurs ou émauîè
difpofés alternativement , féparés & divifés
par des filets , excepté dans les coins , où les
jondions ont la figure d'un pié de chèvre:
Lîi bordure de Bourgogne & la bande dé
Vallin font compone'es : là bordure de Sève
efl contre^componéCy parce que leur écu étant
fafcé d'or & de fable, & la bordure co/72-
ponéeàé même, les compons d'or répon-
dent aux fafces de fable , & ceux de fable awi
fafces d'or.
Vallin en Dauphiné, dé gueules à là bande
componée d'argent & d'azur. ( V)
< COMPONENDE , f. f. (Juri/prud.) efl
une efpece de compofition ou taxe que l'oi^ -
paie à la chambre appflolique de - Rome -
75» COM
pour certains ades , tels que les dirpenfes
de mariage, les unions, fuppreffions, érec-
tions , coadjuroreries , penfions fans caufe ,
les abfolutions & nouvelles provifions , &
généralement pour tour ce qui procède de
fruits mal perçus par ceux qui ont joui fans
titre légitime des bénéfices , & qui n'ont pu
en gagner les fruits , comme font les con-
fidentiaires. Mais cette prétention de la cour
de Rome fur les fruits mal perçus n'eft point
reconnue en France ; car le pape n'a pas le
pouvoir d'appliquer à la chambre apoitoli-
que les fruits des bénéfices de ce royaume ,
& l'on n'y foutFre point que les intrus , les
confidentiaires , les fimoniaques , & autres
qui ont joui des fruits fans titre légitirne ,
en compofent au préjudice des églifes
auxquelles ils font tenus de les reftituer ,
pour être employés aux orneraens & aux
réparations.
Outre ces matières de grâce , abfolutions ,
ou reftitutions fujettes à la taxç des compo-
nendes y la plus grande partie des abbayes
confiiloriales paie la troifieme partie de la
taxe qui eil dans les livres de la chambre ,
lorfque les parties ne peuvent ou ne veulent
pas les faire paflerpar le confiftoire.
Amidenius , defiylo dat. cap. xvjii , dit
qu'Alexandre VI a été le premier auteur àcs
componendes , & qu'il avoit vu une lettre
d'Ifabelle & de Ferdinand roi d'Efpagne ,
où ils fe plaignoient de cette nouvelle char-
ge , à laquelle ils fe font néanmoins eniuite
fournis.
Il y a à la daterie un office ou bureau des
componendes ; c'ell le lieu où l'on compofè ,
c'e(l-à-dire où l'on règle \ts taxes appellées
de ce nom. Celui qui exerce cet office s'ap-
pelle le ^^/jo^ra/re, ou tréforier y ou préfet
lies componendes: c'elKm officier dépendant
du dataire , dont l'emploi eft de recevoir
les fommes taxées pour les matières fujettes
à componende : il avoit été créé en titre per-
pétuel par le pape Pie V , mais il fiit depuis
ïiipprimé pour être exercé par un officier
amovible. Il eft du devoir des revifeurs de
la daterie , lorfque les fuppliques qui paf-
fent par leurs mains font fujettes à compo-
nende y de mettre au bas de la fupplique un
C y pour marquer qu'il eft dû componende ,
auquel cas il faut les porter à l'office des
componendes. Voye-^ la pratique de cour de
COM
Rome de Caftel , tome lypcige 4^ Ù fuiv.
& page Zj^z, {a)
COMPOSÉ (ETRE), Metaphyfique'.c'cû
celui qui a plufieurs parties diftindes l'une
de l'autre. Le corps humain eft un compo~
fé y dont les parties font la tête , le tronc ,
Ùc. Chaque membre eft à fon tour un com~
pofé ; la tête des yeux , du nez , ^c. & cette
analyfe peut être pouflée tant qu'il refte
des parties diftindes dans celles que l'oar
confiderc.
Chaque être compofé eft un tout , dont
l'efTênce conlifte dans la manière dont cer-
taines parties données font liées entre elles.
Il faut d'abord certaines parties , douées de
telles ou telles qualités. On ne fauroit faire
une maifon avec de l'air , de l'eau , & du
feu ; il faut des pierres , des briques, & d'au-
tres matériaux convenables ; mais ces maté-
riaux étant donnés , pour achever de déter-
miner l'eftênce d'une maifon , il s'agit de
les arranger d'une certaine manière; car d'au-
tres afTemblages produiroient des ouvrages
différens d'une maifon. De même relTcnce
du triangle confifte d'abord en trois lignes ;
plus ou moins ne feroicnt pas cette figure :
mais de plus ces trois lignes doivent être
dilpofées d'une certaine façon qui complète
l'eiî'ence du triangle; laquelle, comme toutes
celles des hres compofés , confifte donc &
dans la qualité des parties , & dans leur liai-
fon. Ainfi ce n'eft pas aiTez pour connoître
l'eflence d'un compofé y de ne favoir que
Tune ou l'autre de ces chofes. Celui qui
voit toutes les pièces d'une montre étalées ,
ignore l'eflence de la montre , s'il ne fait
pas comment ces pièces s'ajuftent & influent
l'une fur l'autre ; tout de même que celui
qui voit la montre montée & en mouve-
' ment , en ignore l'efTence , s'il h'eft pas ins-
truit des différentes parties qui la compofent.
C'eft donc dans ces deux chofes , fàvoir la
qualité des parties & leur combinaifon , que
confifte la raifon de tout ce qui convient au
compofé. C'eft par la nature des pièces d'un
moulin , & par la ftrudure de cette machi-
ne , qu'on explique comment le blé peut
y être réduit en farine , & la farine être fé-
parée du fon. C'eft de même par les par-
ties du corps humain , des animaux , des
plantes , & par leur ftrudure , qu'on rend
C O M
rairon de ce qui fe pafTe dans ces corps
organifés.
Les êtres compofés font femblables , lî les
parties & l'arrangement àes parties fe ref-
îemblcnt ; ils font diflemblables , foit que
les parties différent, foit que l'arrange-
ment varie.
Les genres & les efpeces Ats compofés fe
déterminent par les qualités des parties, &
par leurliaifon. Les quadrupèdes, par exem-
ple , ont les mêmes parties : mais les quali-
tés de ces parties , longueur , grofîèur , cou-
leur, Ùc. fervent à les diftinguer.
Un être compofé eft produit , & pafle de
la limple poffibilité à l'ade , fans qu'aucune
création intervienne ; il cft détruit fans
anéantifiement , car les compofés ne font que
des affemblages de parties qui exiftent éga-
lement avant la naiflance & après la deflruc-
tion du compofé. Il y a une circulation per-
pétuelle dans la nature, & il ne s'y perd pas
le moindre atome de fubftance. Génération
& corruption ne font que des variations de
k fcene du monde, qui font paroîtrc les
ehofes fous diverfcs apparences , mais qu:
laiflent toujours fubfiiler la même quan-
tité de fubftancc , réelle. Article de M.
Forme Y.
CÇMPOSÉ , ÉE , adj. {Mufiq.) ce mot
a trois fens en mufique ; deux , rapport aux
intervalles , & un , rapport à la mefure.
1°. Tout intervalle qui pafTe l'étendue de
l'odave> eft un intervalle compofé , parce
qu'en retranchant l'odave on fimplifie l'in-
tervalle fans le changer. Ainii la neuvième ,
la dixième, la douzième font àt^ intervalles
compofés ; le premier , de la féconde & de
l'odave : le deuxième , de la tierce & de
l'odave ; le troifieme de la quinte & de
Todave , ^c,
2°. Tout intervalle qu'on peut divifer
ïMuficalement en deux intervalles , peut en-
core être confidéré comme compofé. Ainfi
la quinte eft compofée de deux tierces , la
tierce de deux fécondes , la féconde ma-
jeure de deux ferai- tons ; mais le iemi-ton
n'eft point compofé , parce qu'on ne peut
plus le divifer ni ilir le ckvier , ni par notes.
C'eft le fens du difcours qui , Aqs deux pré-
cédentes acceptions , doit déterminer celle
ielon laquelle un intervalle eft dit compcfé.
3. On appelle mefures <:ompofées ^ toutes
C O M 7f<?
celles qui font défignées par deux chiffres*
Voye\ Mesure , {Mufiq,) (S)
Composé, adj. {Arithmét.) On dit qu'un
nombre eft compofé, quand il peut être me-
fure ou divifé exaâement , & fans refte , par
quelque nombre différent de l'unité : tel eft
le nombre 12 , qui peut être mefuré ou di-
vifé par 2 , 3 , 4 , 6. ^
Les nombres compofés entr'eux (ont ceux
qui ont quelque mefure commune différente
de l'unité : comme les nombres 12 & 15,
dont l'un & l'autre peut être exadement me-
furé ou divifé par 3. Chambers. {E)
Au refte cette dénomination eft peu en
ufage. On fe fert plus communément des-
expreflîons fuivantes : tel nombre a des di-
v'ifeurs, ou n* eft pas un nombre premier; ces
deux nombres ont un divifeur commun. V,
Nombre, Premier, Diviseur.
La raifon compofée eft celle qui réfuîre
du produit des antécédens de deux ou de
plufieurs raifons , & de celui de leurs
conféquens.
Ainfi 6 eft à 12 en raifon compofée de 2 à
5, & de 3 à 2. V. Antécédent, Con-;-
sÉQUENT , Proportion. (O)
Composé, en méchanique ,* mouvement
compoféy eft le mouvement réfultant de l'ac-
tion de plufieurs puifîànces concourantes ou
confpirantes. V. PUISSANCE.
On dit que des puifTances confpircnt ou
concourent , lorfquc la direction de l'une
n'eft pas direâement oppolée à celle d&
l'autre ; comme lorfqu'on conçoit qu'un
point fe meut le long d'une ligne horizon-
tale qui fe meut elle-même verticalement.
V. à Varticle COMPOSITION DU MOUVE-
MENT , les loix du mouvement compofé.
Tout mouverrrenf dans une ligne courbe
eft compofé; car un corps tend de lui-même
à fe mouvoir en ligne droite , & il fe meut
en effet de cette manière tant que rien
ne l'en détourne : par conféquent pour
qu'il fe meuve en ligne courbe , il faut
néceflàirement qu'il foit pouffé au moins
par deux forces à chaque point de cette
courbe. K FORCE CENTRALE <& MOU-^
VEMENT. ^^
Tour le monde fait ce théorème de
méchanique, que dans un mouvement
i' co/;?^©// uniforme, lapuiiîànce unique pro-
duite par les puiftànces. concourantes ,, eil:
7^o C O M
-à chacune de ces puifîânces feparément,
comme la diagonale d'un parallélogram-
me , dont chaque côté exprime la diredion
& l'énergie dechaquepuifïânce, ei\ à chacun
de ces côtés. Voye^ MOUVEME-NT i&
Diagonale. (O)
Composé (pendule) y en mechanique ,
fignifie celui qui confifte enplufieurs poids,
confervant conlîamment la même poiition
cntr'eux & la même diflance au centre du
mouvement , autour duquel ils font leurs
•vibrations. Ainfi une verge A B [figure zz.
Mech.) chargée de plufieurs poids -6 , //,
■F, D y qui font attachés à cette verge, eu
-un pendule compofé , & tous les pendules
•font réellement de cette nature : car dans
un pendule même qui paroît fimple, c'efl-à-
<lire compoféiïunt verge & d'un feul poids ,
toutes les particules de la verge font cha-
cune autant de poids placés à différentes
diftances du centre de fufpenfion; & le
•poids même qui eft -attaché au bout n'é-
tant pas infiniment petit, cfl un c:o/72jPo/è' de
^plufieurs petits poids ^ dont les diflances
•au centre de fufpenfion font réellement
différentes. Le problême des centres d'of-
■cillation confifte à trouver les vibrations
•d'un pendule compofé. Voye^^^ OSCILLA-
^TION.(O)
Composé 6* Composition, (Phar-
imacie.) on nomme médicament compofé ou
xompojition , tout remède à la préparation
•duquel on a employé plufieurs drogues.
Les médicamens co/77po/^j font ouofEci-
;naux ou magiftraux.
Le plus grand nombre des préparations
officinales font des compofitions. Les élec-
.tualres , les confeâions, les pilules , les em-
.•plâtres, Ùc. font toujours des médicamens
xompofés ; & les apothicaires préparent des
-médicamens compo/îrj dans toutes les for-
mes fous lefquelles ils confervent leurs pré-
parations fimples : ainfi ils ont des firops
xompofés yAts eaux diftillées compoféesy des
■pouArcs compofées y &c. comme des firops
liraples, des eaux fimples, des poudres fim-
ples, ùc. V. Sirop, Poudre , Eau
'-ïusTiLLÉE, Vin, Extrait, & Simple
:( 'Pharmacie , ) &c.
Le mot compofé s'emploie fur-tout en
•pharmacie, par oppofition au mot Jimple,
.pour défignjar jjne |iréparation pharmaceu-
C O M
tique , qui porte le nom d'une des drogues
qui entrent dans fa compojîtion , lorfqu'il
exifte dans Part une autre préparation, dont
la même drogue fait l'unique ingrédient mé-
dicamenteux. C'eft ainfi qu'on appelle ^ro/>
de guimauve compofé, un firop dans lequel,
outre la guimauve , entrent auffi plufieurs
racines, feuilles , femences, &c. & qu'on le
dilHngue par cette dénomination An firop
de guimauve fimple , dans la préparation du-
quel on n'emploie que la guimauve.
On n'ajoute pas l'épithete de compofé au
nom des préparations compofées , lorfqu'il
n'en exifte point de fimple dans l'art ; c'efl
pour cela qu'on ne dira point/rrop de karabé
compofé -y quoique le firop qu'on connoît en
pharmacie fous le nom defirop de karabé y
foit compofé.
Au refte, il faut obferver qu'on ne compte
point au nombre des drogues, dont la plu-
ralité conflitue la qualité dQCompoféy dis-je.,
celle qui fait raffaifonnement , celle à la-
quelle eft due l'aromatifation ou la colo-
ration dans les préparations aromatifées ou
colorées ; on n'a égardqu'à la drogue qui
conflitue, ou qui eft cenfée conftitiier la
vertu du remède : ainfi l'on peut avoir des.
firops fimples , quoiqu'on ait befoin né-
ceffairemc^t d'çau &: de fucre pour mettre
un médicament fous cette forme, Ùc.
Les juleps , les potions , les mixtures , Us
apozemes , les bouillons médicamenteux ,
Ùc. font des compofitions magifirales. V",
la méthode générale de procéder aux com-
pofitions ofiicinales , aux articles MiX-»
TION {Pharmacie) , & DiSPENSATION
& les règles que le médecin doit obferver en
prefcrivant les compofitions magifirales , au
mot Formule ( Pharmacie ),
L'ufage général d'employer dans le trai-
tement des maladies ,, des remèdes prefque
toujours compofés , eft fans contredit un des
principaux obilacles au progrès de cette par-
tie de la médecine qui s'occupe de la vertu
des médicamens. Il ne feroit pourtant pas
fage de vouloir les abandonner abfolument
pour n'employer que les remèdes fimples ,
puifque l'obfervation eft favorable à beau-
coup de ces remèdes compofés, & que nous
ne favons pas afîez comment leurs difïerens
ingrédiens fe modifient entr'eux., pour çfer
C O M
prononcer qu'une certaine drogue fimple
pouvoit produire le même effet médicinal ,
qu'une ctnamecompo/ition. Ainfi , quoiqu'il
foit évident que c'eft A l'ignorance , au pré-
jugé , à la chariatanerie , que nous devons
la thériaque , le diafcordium , les potions
purgatives , les apozemes compofés , &c.
tant que robfervation raifonriée ne nous
aura pas fourni de remèdes fimples plus effi-
caces , ou au moins également efficaces ,
il faudra s'en tenir aux remèdes compofés
que l'obfervation empyrique aura déclarés
bons. (^) ^ .
Composé; quantités compofées , tn Al-
gèbre _, fe dit de l'aflTemblage de piuiieurs
quantités liées enfemble par les fignes X & — :
ainli a.y- b-c ^b b — a c y font des quanti-*
tés compofées.
On les appelle autrement quantités comw
plexes ou multinomes ; pour les diftinguer
desquantités fimples oumonomes, klquelles
ne confillent que dans un terme, l^^oye^ MO-
NOME &■ MULTINOME. (0)
Composée , maladie ^ (méd.) en aj>-
pelle maladie compofée , celle à la forma-
tion de laquelle diverfes aifeflions fimples
concourent enfemble , de manière qu'elles
n'en font qu''une. La maladie compofée a
donc , dans ce cas , autant de parties qu'il y
a d'affeclions fimples qui ont concouru à
fa naiiîànce ; elle prend leur nature. En
les connoifîant , on la connoît elle-même ,
& aucune d'elles ne peut être changée ou
(fftruite , fans qu'il arrive auffi change-
ment dans la nature de» la maladie qu'elles
compofcnt.
On peut donc en général , confidérer ici
trois efpeces de comportions , luivant que
\ts dilférens vices ou des Iblides ou des
fluides , concourent enfemble & entr'eux ,
ou avec les parties folides & fluides ; mais
il y a .un fi grand nombre d'efpeces de l'un
& l'autre genre , qu'il efl: à peine poffible de
trouver la quantité des combinaiibns poiîi-
bles , & d'expofer avec ordre les maladies
qui naillent de chacune.
De plus , on ne connoît pas aflez claire-
ment les caradercs des maladies : cette
matière cil: encore un grand fujet de difpute
& de difcuflîon ; de Ibrte qu'on fe tireroit
difficilement d'embarras , en voulant em-
ployer la dodrine fynthétique.
Tom VIII.
C O M 7^1
Il efl donc plus fenfé de tirer l'ordre con-
venable au traitement de cette qucftion , de
la partie la plus évidente de l'état morbi-
fique , & que les fens font découvrir. C'eft
ainfi qu'on peut , par une jnéthode régu-
lière , établir les caraderes certains , par
lefquels les différentes maladies fe i-appor-
tcnt réciproquement , oii différent les unes
des autres. C'efl: ainli qu'on peut connoîrre
leurs ciaflês , leurs efpeces & diflérences ;
enfbrte qu'on les diflinguc plus aifément
dans la pratique , & qu'on évite la confu-
fion & l'occafion de difputer ; aufîi con-
fidere-t-on plutôt les maladies compofées
comme le concours divers d'autant de
iymptomes , & on les renvoie avec raifon ,
à la matière des gens à fyflême , à cette par-
tie ipéciale de la pathologie qui traite en
particulier des fyraptomes. (G)
Composées de simples , glandes
compofées dejimples , en anatomie , ibnt
celles dans lefquelles plufieurs conduits con-
courent à la fortie de leur follicule , comme
des rameaux veineux , dans un grand con-
duit excréteur commun à plufieurs follicu-
les. On peut rapporter à ce genre les glande.%.
inteflinales , le trou borgne-. Kb>'e;j SÉCRÉ-
TION. (Z)
* COMPOSER , v. ad. qui défigne l'ac-
tion qu'on 7i^\iç[\tcompoJition, F". COMPO-
SITION. Une s'appliv^ue guère qu'aux pro-
nudions êiQS arts qui fuppofent de l'inven-
tion & du génie ; tels que les beaux arts y
la peinture , la fculpture , la méchani-
que , &c.
Composer , ( Comm. ) affembler plu-
fieurs parties pour faire un corps , plufieurs
fommcs pour en faire un total.
^- On dit , dans le llylc marchand , compofer
lacargaifon d'un vailfeau , compofer le fonds
d'une boutique , ^/Tz/îo/èrunefadure ; pour
défigner l'aftemblagc ou l'aflortiment des
diverfes marchandifes dont on charge un
vaifîeau , dont on fait le fonds d'une bou-
tique ; & de même , les marchandifes que
l'on comprend dans un état ou mémoire,
que les marchands appellent /^c^/z/r.
Compofer de fes dettes avec Ces créanciers ,
ou paffer avec eux un contrat , faire un ac-
commodement , en obtenir une remife , ou
du temps pour payer.
Compofer une Ibramé totale , foit de k
C c c ce
-)i% G O M
recette , foit de In depenfe , foit du finito (f un
compte , en termes de teneur de livres ,
c'eft ajouter enlemble les fommes qui font
toutes les, parties d un compte, les calculer ,
& par diverfe» opérations arithmétiques
voir à quoi toutes ces choies fe montent.
Dicfion. de Comm. de Trév. & de Chamh.
COMPOSITE , terme d'Architea. V.
Ordre.
COMPOSITEUR , f. m. {Jurifpr.)
amiable compojheur , efl celui quiefî choiii
par les parties pour juger leur différend ,
ou pour le terminer à l'amiable félon l'équi-
ré , fans être aflreint aux rigueurs du droit
ni de la forme , à la différence de l'arbitre
qui doit juger félon les loix. Voye\ ARBI-
TRE ù Arbitrateur. {a)
COMJPOSITE.UR ; quoique compojition fe
dife dans tous les arts libéraux , compojiteur
ne fe dit guère qu'en raufique & en impri-
mene ; c'efl celui qui compofe ou qui- fait
la Qpmpofition. V. au mot COMPOSITION ,
une eiquiiïè des connoiiïances néceilaires
pour lavoir compofer. Ce n'efi: pa. encore
allez pour faire le bon compojiteur. Toute la
fcience poflible ne fufîit point , fans le génie
qui la met en œuvre : quelque effort que
l'on puifle faire , il faut être né pour cet
art , atitremeiit on n'y fera jamais rien que
<k médiocre. Il en eft du compojiteur comme
du poëre , fi fon aftre en nailTant ne l'a for-
mé tel :
S'il n'4 rfçii du cie! l'infliience fccrette ;
Pour lui 1 hœbus eft fourd , & Pégafe eft rétif.
Cequej'entensparg'^/r/V , n'eff point ce
goût bizarre & capricieux qui feme par-tout
le baroque & le difficile , & qui ne fait em-
bellir ou varier l'harmonie qu'à force de bruit
ou de diflonances ; c'efl ce feu intérieur
qui infpire fans celle àts chants nouveaux &
toujours agréables ; des '^preflions vives ,
naturelles & qui vont au cœur ; une harmo-
nie pure , touchante , majeflueufe. C'eff
ce divin guide qui a conduit Corelli , Vinci ,
Haffe, Gluck & Rinaldodi Capua dans le
fanctuaire de l'harmonie ; Léo Pergolefe
^ TeiTadellas dans celui de l'exprefîion &
du beau chant. ( «S )
C'ert lui qui inljpira Lulli dans l'enfance
de la mufique , & qui brille encore en
France dans les opéra de M. Rameau à qui
ftçs oreilles ont tant d'obligatiop. (O)
C O M
Compositeur ( Mujiq. ) Aujourd'hui
les compojiteurs fe contentent de favoir la
routine de la compofition & médiocrement
les langues ; mais eff-ce tout ce qu'ils de-
vroieritpolTéder ? Un compoJiteurn\mi^-'x.-\\
pasune expreflion beaucoup plus énergique ,
fi fâchant la théorie de l'harmonie , il fait la
raifonner ? ( qu'on me paffe cette façon de
parler ) & non faire fuccéder un accord à un
autre , parce, qu'on a toujours fait ainfi. Si
le compofiteur n'efl pas bon déclamateur ,
comment notera-t-il une bonne déclamation ?
& comment fa mufique aura-t-elle de l'ex-
prefîion , fi elle ne contient pas une bonne
déclamation ?
he compojiteurne doit-il pas encore être
verfé dans la ledure des poètes anciens &
modernes ? comment (ans cela pourroit-il
cennoître le caraâere particulier de chacun
de ceux qu'il lait parler ? Comment pourra-
t-il faire d' Achille l'homme d'Horace :
împiger , iracundus , inexorabilis y acer}
Saura-t-il fans cette ledure bien peindre
Agamemnon difputant dans un duo avec
Achille au fujet d Iphigénie ? Donner an-
premier une colère plus majeflueufe , des
retours de tendreffe bientôt étouffes par
l'imprudente fureur d'Achille ? Non , il
leur fera froidement chanter ' l'un après
l'autre le même motif.
Le co/Tzpq/rVe'ur doit encore donner en gé-
néral un ton plus noble , plus touchant au,
premier perfonnage de fa pièce , & il doir
dégrader le ton k mefure que les Ç\x]tts (om
moins intérefîàns : & qu'on ne dife pas que
cela ne fe peut ; un des bons opéra de
Haffe bien exécuté , fera fentir toutes ces
nuances.
Voilà ce qu'un compojiteur devroit être,,
fi le goût des fpedateurs & du tnéatre ly-
rique en général n'étoit pas gâté ; mais au-'
jourd'hui qu'il ne s'agit pas feulement dé
bien faire , mais encore de* ramener le bon-
goût , & la vraie expreflion fur le théâtre ,
il faut qu'un compojiteur foit \e plus un vrai
fîoïcien , & qu'il oppo'e une fermeté iné-i
branlableaux clameurs des croquelols & des.
adeurs mcdiocres qui veulent fauver leur:
peud'ame à l'aide d'iin chant léger & gra-
cieux , mais qui ne dit rien. {F. D. G. )
COM? OSITEVR, dans lapratique de PIm--
.primeriey s'entend de l'ouvrier qui travaille.
C O M
uniquement à l'arrangement des cara6l:eres , •
c'eft-à-dire à la cafle , dans laquelle il levé ,
les unes après les autres , ce nombre prodi-
gieux de lettres dirperfées dans les différens
cafîètins , dont rafiemblage dirigé iuivant
la copie &: fuivant le tormat defiré , donne
les formes ou planches dellinées à être im-
primées.
COMVOSîTîOl^ , en Rhétorique, s'en-
tend de l'ordre & de la liaifon que doit
mettre l'orateur dans les parties d'un dif-
cours.
C'eil" à la compofnion qu'appartient l'art
d'alfembler & d'arranger les mots dont le
ityie eft formé , & qui fervent à le rendre
coulant , léger , harmonieux , vif , &c.
D'elle auiC dépend l'ordre que les matières
doiveçt garder entr'elles , fuivant leur na-
ture & leur dignité , conformément à ce
précepte d'Horace commun à l'éloquence &
a la poéiie ;
Smgula qi:aequeIocumtene'antfortit«decenter.
La grande règle impoféc par Cicéron aux
orateurs , quant au choix & à la diflribution
àts parties du difcours & des naoyens pro-
pres à perfuader , c'eft d'y oblèrver une forte
de gradation en commiençant par les chofes
moins importantes , & en s'élevant (liccef-
. fivement jufqu'à celles quj doivent faire le
plus d'impreflion :femper augeatur& crefcat
oratio. V. PÉRIODE & DISCOURS. (G)
Composition, en Arithmétique -. fup-
pofons que l'on ait deux rapports tels , que
. l'antécédent du premier foit à fon confé-
quent , comme Tantécédent du fécond efî:
à ion coniéquent ; alors on faura par com-
pojuion de raifon , que la fomme de l'antécé-
dent & du conféquent du premier rapport ,
eil à l'antécédent ou au conféquent du même
rapport , comme la fomme de l'antécédent
& du conféquent du l(;cond rapport àl'an-
, técédent , ou au conféquent du même rap-
port.
Par exemple , fi y4 : 5 : : C : JD , on aura
par compqfition de raifon cette autre propor-
tion ^-+-^:^ ou ^:: C+Z): Cou Z>. (O)
Composition du Mouvement eft
la rédudion de plufieurs mouvemens à un
feul. La compofuion du mouvement a lieu
lorfqu'un corps eft poufle ou tiré par plu-
fieurs puiflances à-la-fois. Voye^ MOUVE-
MENT. Ces diiîérentes puifTances peuvent
GOM 7<?5
agir toutes fuivant la même direclion , ou
Iuivant des direâions différentes ; ce qui
produit les loix fuivantes.
Si un point qui fe meut en ligne droite eft
pouHc par une ou pluiieurs puiflances dans
la diredion de fon mouvement , il fe mouvra
toujours dans la même ligne droite: favî-
telîe feule changera , c'eft-à-dire augmentera ,
ou diminuera toujours en raifon des forces
impulfives. Si les diredions font oppofëes ,
par exemple , fi Tune tend en-bas & l'autre
en-haut , la ligne de tendance du mouve-
ment fera cependant toujours la même. Mais
fi les mouvemens compofans , ou , ce qui
ell la même chofe , les puiiîances qui les
produifent , n'ont pas une même diredion ,
le mouvement compofé n'aura aucune de
leurs diredions particulières , mais en aura
une autre toute difiérente qui fera dans une
ligne ou droite ou courbe , félon la nature
& la diredion particulière des difîérens mou- ^
vemens compofans.
Si les deux mouvemens compofans font
toujours uniformes , quelque angle qu'ils
fafîént entr'eux , la ligne du mouvement
compofé iera une ligne droite , pourvu que
les mouvemens compofans faffkm toujours le
même angle. Il en efl de même , fi les mou- •
vemens ne font point uniform.es , pourvu
qu'ils foient femblables , c'efl-à-dire qu'ils
foient accélérés ou retardés en même pro-
portion , & pourvu qu'ils faflént toujours le
même angle entr'eux.
Ainfi fi le point a {Planche de Méchanir-
1^^^ ) fiS' ^' )^^ pouflé par deux forces de
diredions différentes , favoir en-Iîautvers /' ,
& en-avant vers d\ il efl clair'que quand il
aura été en-avant juiqu'en c , il devra nécel^
fairement être monté jufqu'au point c de la
lignées ; de Ibrte que fi les mouvemens ,
fuivant a d&cab y étoient unifonr.e^ , il (e
mouvroit toiîjours dans la diagonale a e c.
Car comme les lignes a i y ie , font toujours
en proportion confiante , & que par l'hypo-
thefe le mouvement , fuivant a d y & le
mouvemcwit perpendiculaire à celui-ci , font
tous deux uniformes ; il s'enfuit que les lignes
ai j i e , feront parcourues dans le même
temps ; & qu'ainfi , tandis que le point a
parcourra a i par un de fts mouvemens , il
parcourra en vertu de l'autre mouvement
la ligne c i. D'où il s'eniuit qu'il fe trouvera
Ccccc 2,
7% e O M
fuccefîîvcment fur tous les points e dé la dia-
gonale , fic-queparconféqucnt il parcourra
cette ligne.
Dans la yî^r. 6*. on a fait les lignes a i ^ e î y
égales entr'elles, c'eft-à-dire qu'on a fuppofé
que non-feulement les mouvemens étoient
uniformes , mais encore qu'ils étoient égaux.
Cependant la démonfiration précédente au-
roit toujours lieu , quand même les mouve-
tnens , fuivant ad 6cab , ne feroient point
é^aux , pourvu que ces mouvemens fufTent
uniformes , ou du moins qu'ils gardaffent
toujours entr'eux la même proportion. Par
exemple , fi le mouvement , fuivant a d ,
eu double du mouvement (tiivant a b \^u
commencement , le point a parcourra tou-
jours la diagonale a c , quelque variation
qu'il arrive dans chacun des mouvemens ,
fuivant a d ôi: a h , pourvu que le premier
demeure toujours double du fécond.
De plus , il çû évident que la diagonale
c c fera parcourue dans le même temps que
Yun des côtés .2 d ouah auroit été parcouru ,
fi le point a n'avoit eu qu'un feul des deux
mouvemens. Si un corps eft pouflé à-la-fois
par plus de deux forces , par exemple par
trois , on cherche d'abord le mouvement
f:(7/72po//quiréfulte de deux de ces forces ;
cnfuite regardant ce mouvement compofé
comme une force unique , on cherche le
nouveau monvtvatnt compofé qui réfultede
ce premier mouvement & de la troifieme
force. Par-là on a le mouvement compofé
qui réfulte des trois forces.
S'il y aYoit quatre forces au^licu de trois ,
il faudroit chercher le mouvement compofé
de la quatrième force & du fécond mouve-
ment compofé ^ & ainfi des autres.
Mais files mouvemens compofans ne gar-
dent pas entr'eux une proportion confiante ,
le pokit a décrira une courb» par fon mou-
vement compofé.
Si un corps comme 3 (/g-. 5.) efl pouffé
ou tiré par trois différentes forces dans trois
différentes diredions^a , ^c, 3 J, de forte
.qu'il ne cède à aucune , mais qu'il refîe en
équilibre ; alors ces trois forces ou puifïân-
ces feront entr'elles comme trois lignes droi-
tes parallèles à ces lignes , terminées par leur
concours mutuel , & exprimant leurs diffé-
rentes directions , c'eli-à-dire que ces trois
C O M
puJlTances feront entr'elles cdmmc les lignes
be ^ b c ^ b d..
Voilà dîs principes généraux dont tous
les m.échaniciens conviennent. Ils ne font
pas auffi parfaitement d'accord fur la ma-
nière de les démontrer. Il efl certain qu'un
corps pouffé par deux forces uniformes ,
qui ont différentes diredions & qui agiffent
continuellement fur lui , décrit la diagonale
d'un parallélogramme formé fur les direc-
tions de ces forces ; Car le point a , par
exemple , étant pouffé continuellement' ,
fuivant ad &: fuivant ab , ou plutôt fuivanjc
des diredions parallèles à ces deux lignes ,
ileffdans le même cas que s'il étoit fur une
règle ad qu'il parcourût d'un mouvement
uniforme , tandis que cette règle ad Çq
raouvroit toujours parallèlement à elle-
même , fuivant <i cou a 3.
Or dans cette fùppofltion , on démontre
fans peine que le point a décrit la diagonale
ac. jMah lorfque le point a reçoit une im-
pulfion fuivant ad , &c une autre en même
temps fuivant ab^&c que les forces qui lui
donnent ces impulfions l'abandonnent tout-
à-coup , il n'eff pas alors aufli facile de dé-
montrer en toute rigueur que ce point a
décrit la diagonale ac. Ileff vrai que pref^
que tous les auteurs ont voulu réduire ce
fécond cas au premier , & il efl vrai auflî
qu'il doit s'y réduire. Mais on ne voit pas ,
cemefemble , affez évidemment l'identité
de ces deux cas pour la fuppofer fans dé-
monflration. On peut prouver qu'ils revien-
nent au même , de la manière fuivante. Sup-
pofons que les deux puiffances agiffent fur
le point a durant un certain temps , &
qu'elles l'abandonnent enfuite , il cfl certain
que durant le premier temps il dfécrira' la
diagonale , & qu'étant abandonné par ces
puiffances , il tendra de même à la décrire ,
& continuera à s'y mouvoir avec un mouve-
ment uniforme , foit que le temps pendant
lequel elles ont agi ^ foit long ou court. Ainfi ,
puifque la longueur du temps pendant lequel
Iss puiffances agiffent , ne détermine rien
ni dans la diredion- du mcbile , ni dans le
àegré de fon mouvement , il s'enfuit qu'il
décrira la diagonale dans le cas même où il
n' auroit reçu des deux puiffances qu'une im-
pulfion fubite.
M. Daniel BçrnoulU a donn| dans le
C O M .
premier volume des mémoires de l'acadé-
mie de Pérersbourg , une difTerration où il dé-
montre la compojnion des mouvemens par
un affez long appareil de propofitions.
Comme il s'efl propofé de la démontrer d'une
manière abfolument rigoureufe , on doit
moins être furpris de la longueur de fa dé-
monlîration. Cependant il femble que le
principe dont il s'agit étant un des premiers
de laméclianique, il doitêtre fondé lijr àQs
preuves plus fimples & plus faciles ; car telle
efl la nature de prefque foutes les propofi-
tions dont l'énoncé eft fimple.
L'auteur du traité de Dynamique, im-
primé à Paris en 1743 , a aufli eiîayé de
démontrer en route rigueur le principe de
la compojition des rriquvemens. C'elt aux
favans à décider s'il a réufli.
Sa méthode confifle à fuppofer que le
corps foit llir un plan , & que ce plan puilîe
glifièr entre deux coulifles par un mouve-
ment égal & contraire à l'un des mouve-
mens co/w/'o/a/zj- , tandis que les deux cou-
liffes emportent le plan par un mouvement
égal & contraire "à l'autre mouvement-cro/Tz-
pofant. Il eft facile de voir que le corps dans
cette fuppofitlon demeure en repos dans
l'elpace abfolu. Or il n'y demeureroitpas ^
s'il ne décrii^oit la diagonale. Donc , ^c. On
peut voir ce raifonnement plus développé
dans l'ouvrage que nous venons de citer.
Pour lui donner encore plus de force , ou
plutôt pour ôter tout lieu à la chicane , il
n'y a qu'à fuppofer que la ligne que le corps
décrit envertu'des àt\i\ïotcç:scompofantes ,
foit tracée fur le plan en forme de rainure ;
en ce cas il arrivera de deux choies l'une :
ou cette rainure fera la diagonale même ,
& en ce cas il n'y a plus de difficulté ; ou^i
elle n'eft pas la diagonale , on n'aura nulle
peine à concevoir comment les parois de la
rainure agiflent fur le corps & lui commu-
niquent les deux mouvemens du plan pour
chaque inftant ; d'où l'on conclura par le
repos abfolu dans lequel le corps doit être ,
que cette rainure fera la diagonale même.
C'eft d'ailleurs une fuppoiition tres-ordinai-
re , que d'imaginer «un corps fur un plan
qui lui communique du mouvement^ &
qui l'emporte avec lui.
Au reftc, les loix de h compojition ^es
farces fuient celles de la compojition des
C O M 7^5
mouvemens , & on en déduit auffi Les loix
de l'équilibre des puilî'ances. Par exemple ,
que b e ( Jig. 5» } repréfente la force avec;
laquelle le corps b qÛ pouiTé de b vers a ,
alors la même ligne droite b e repréfèntera
la force contraire égale , par laquelle il doic
être poufïë de b vers e pour refter en repos ;
mais par ce qui a été dit ci-delTus , la force
b e Ce peut réfoudre dans deux forces agif-
fantes , félon les deux diredions b d &c b c ;
& la force pouffant de b vers e , eft à ces
forces comme beeûiibdj&iàb c on d e
refpeétivement. Donc les deux forces qui
agiffènt fuivant les directions b d ^ b c ^ feront
équivalentes à la force agilîant fuivant la di-
rediion b a, èi. elles feront à cette force agii-
fànt félon la diredion b a, comme b d y b c ,
font à ^ 3 ; c'eft-à-dire que fi le corps eft
poufié par trois diftéren tes puiiîances dans
les directions ba, b d , bc , lefquelles falfent
équihbre entr'elles , ces trois lorces feront
l'une à l'autre refpedivement comme b a^
b d , Se d e ou b c. Ce théorème & Ces corol-
laires fervent de fondement ;\ toute la
méchanique de M. Varignon , & on ea
peut déduire immédiatement la plupart
des théorèmes méchaniques de Borelli ,
dans fon traité de momanimahum , &'cal-
culer d'après ce théorème la force des
raufcles. (O) •
Composition , ( Hift. & droit des.
Barbar.) iàtisfac^ion, ftipulation qui fe faifoit
chez les nations barbares par une conventioa
réciproque entre les parens de la perfonne
odFenfée & ceux de l'oiFenfeur.
Cette» fatisfadion regardoit celui qui
avoit été ofîenfe , s'il pouvoit la recevoir ;
& les parens , fi l'injure ou le tort leur étoit
commun , ou fi par la mort de celui qui
avoit été offenfé la compojition leur étoit
dévolue. "
Tacite en parle dans les mœurs des Ger-
mains y de même que 1^ loi des Frifons ,
qui kiftbit le peuple , pour ainfi dire , dans
l'état de nature, & où chaque famille pour-
voit à fa fantaifle exercer fa vengeance ,
jufqu'à ce qu'elle eût été fdtisfaite par la
compojition.
Depuis, les fages des nations barbares
mirent un prix Jufte à la compojition que de- ,
voit recevoir celui à qui l'on avoit tait quel-
que tort ou quelque injure , & leurs loix y
7^^ C O M
pourvurent avec une exaditude admirable.
La principale compojuion étoit celle que le
meurtrier devoit payer au parent du mort.
La différence des coiiditions en mettoit une
dans les compojltions : ainli dans la loi des
Jongles, ia compojuion étoxt de fix cents Ibus
^ pour la mort d'un adalingue , de deux cents
pour celle d'un homme libre , & de trente
pour celle d'un ferf. Il femble que dans
notre façon de penter , nous avons retenu
-quelque chofe dans cetre loi. La grandeur
de la compojuion établie fur la tcte d'un
homme , conlhtuoit donc une de fes gran-
des prérogatives ; car ,' outre la diltindion
qu'elle iailoit de la perfonne, elle étabiifîbit
pour lui parmi des nations violentes une
plus grande lûreté. ^
. Toutes ces compojltions étoient à prix d'ar-
gent ou de denrées , dont la loi arbitroit
même la valeur :. ce qui explique comment
avec li peu d'argent, il y avoit chez les
peuples barbares tant de peines pécuniaires.
-Cts loix s'attachèrent à marquer avec préci-
ilon la difiérencedes torts, des injures , àts
crimes , afin que chacun connût au jufte le
montant de la compofition qu'il devoit avoir ,
& qu'il n'en reçût pas davantage. Dans ce
point de vue , celui qui ie vengeoit après la
iatisfadion reçue , commettoit un grand
crime. Un autre crime étoit de ne vouloir
point faire la iatisfadion. Nous voyons dans
divers codes àzs loix de ces peuples , que les
^égiflateurs y obligeoient abfolument.
Il auroit été injufte d'accorder une com-
pojuion aux parens d'un voleur tué dans
l'adion du vol , ou à ceux d'une femme
qui avoit été renvoyée après une féparation
pour crime d'adultère. La loi des Bavarois
^ ne donnoitpojnt de compojuion dans des cas
pareils , & puniiToit leurs parens qui en
^ourfuivoient la vengeance.
• Il n'eft pas rare de trouver dans leurs
codes è^ts compojiiions pour des adions in-
volontaires. La loi des Lomibards eft pref-
<\ut toujours fenfée ; elle vouloir que dans
ce cas on compofat fuivant {à générolité ,
&i que les parens ne puflent plus pourfuivre
ia vengeance.
Clotaire II fit un décret très-fage : il dé-
^ lendit à celui qui avoit été volé de recevoir
^a compojïtion en fecret y & (ans i'ordon-
îiaxice du juge. Voici ia raifon de cette dcr-
C O M
niere partie de la loi qui requéroit l'ordon-
nance du juge.
Il arriva par le laps de temps , qu'outre la
compojuion qu'on devoit payer aux parens
I pour les meurtres , les torts , ou les injures ,
\ il fallut payer en outre un certain droit que
I \t^ codes èiQ% loix des Barbares appellent
\J'redum ^ c'elt- à-dire , autant qu'on peut
rendre ce mot dans nos langues modernes ,
une récompenfe de la protedion accordée
contre le droit de vengeance.
Quand la loi ne fixoit pas ee frediim , il
étoit ordinairement le tiers de ce qu'on
donnoit pour la com.pojition , comme il pa-
roit dans la loi àts Ripuaires ; & c'étoit le
coupable qui payoit ce fredum , lequel étoit
un droit local pour celui qui jugcoit dans le
territoire. La grandeur du fredum fe pro-
portionna à la grandeur de la protedion ;
cela étoit tout f impie : ainfi le droit pour
la protedion du roi , fut plus grand que le
droit accordé pour la protedion du comte
ou des aun-es juges.
On voit déjà gaître ici la juflice des fei-
gneurs. Les fiefs comprenoient de grands
territoires; ctux qui obtinrent des fiefs, en
obtinrent tous \çs émolumens poflibles ; &
comme un à^s plus grands étoit les profits
judiciaires , Jreda , celui qui -jjvoit le fief
avoit aulli la juflice , c'efl-à-dire , le foin
de faire payer [q.s compojltions de la loi , &:
fur-tout celui d'en exiger les amendes. Ainfl
les compojuions ont produit par filiation les
jufllces des feigneurs.
Enfuite les églises ayant acquis des biens
très-confidérables , firent aufli payer les
droits àts compojuions dans leurs fiefs ; c'efl
encore ce qu'on devine fans peine : & com-
me ces droits emportoient néceflairement
celui d'empêcher les officiers royaux d'en-
trer dans leurs territoires pour exiger ces
freda , le droit qu'eurent les ecclélialliques
de rendre la juffice dans leurs domaines ,
fut appelle immunité dans le fîyle des for-
mules , àcs chartes & des capitulaires.
Voilà donc encore l'origine des immunités
eccléfiafliques ; .& je n'en dirai pas davanta-
ge , finon que cet article elf extrait de l'ef-
prit àts loix , livre où l'auteur dégage per-
pétuellement des inconnues , & en trouve
la valeur par des grandeurs connues. Art.
de M. le Chevalier de Ja ucoj^RT.
C O M
Composition, (Jurifpr.) fignifîe dans
cette matière accord , tranfuclion , remife ,
diminution. Il eu parlé dans plufieurs an-
ciennes ordonnances de compoji^ions hiires
avec des officiers qui avoient malverfé dans
leurs offices , & avec ceux qui avoient con-
trevenu aux ordonnances ilir le fait cVs mon-
noies , au moyen de quoi ils ne pourroient
plus être inquiétés à ce (ii)et^Le règlement
de Charles V , du mois de leprembre 1376 ,
défend aux officiers des eaux & forets de
plus faire de compofuions dans les procès
pcndans devant eux , & leur ordonne de
les juger conformément aux loix. Il y a auffi
àQs lettres de remiflion , du mois de feptem.-
bre 1374? accordées au maître particulier
de S. Aventin , qui avoir malverië dans (on
office , après que par compojition faite avec
les gens du grand confeil du roi & les|génc-
raux dQS maîtres des mionnoies , il eut pro-
mis de payer mille livres au roi. Ordon-
nance de la troijieme race y VI volume.
On voit par-là que le terme de com.pofiùon
fignifie quelquefois une amende qui n'eft
point décernée en jugement , mais dont
eelui qui efl en faute convient en quelque
forte il l'amiable. •
Compositions de rentes , à temps ,
à vie , à héritage , ou à volonté. Cette exprès-
fion fe trouve dans une ordonnance de
Charles V,.du dernier février 1378, &
paroît lignifier un ade par lequel une per-
fonne ;\ 4aquelle il efi dû une rente , con-
lênt de perdre une partie du fonds ou des
arrérages.
Compojition fignifie auffi quelquefois une
efpece d'impojitton qui a été concertée avec
les habitans d'une province ou d'une ville ,
ou certains impôts pour lefquels on avoir
lia liberté de s'abonner. Il en ell parlé com-
me d'une impofition en général , dans l'or-
donnance de Charles V du 2 Juin i jSo. {^A)
Composition , en Mujique ; c'eft l'art
d'inventer & noter des chants, de les ac-
compagner d'une harmonie convenable , &
de faire en un mot une pièce de.mufique
complète avec toutes Çq.s parties-.
La connoiffianoe de l'harmonie & de (es
règles , ell le fondement de la compojition ;
mais elle ne fuffit pas pour y réuffir : il laut
outre cela bien connoître la portée & le ca-
raélere des voix & des infîrumens ; les
C O M "jSj
chants qui font de facile ou difficile exécu-
tion : ce qui fait de l'effet & ce qui n'en fait
pas;fentir le caraâeredes différentes me-
iures , celui des difîérentes modulations y
pour appliquer toujours l'une & l'autre à
propos ; (avoir toutes les règles particuliè-
res que le goût a établies , comme les fu-
gues , les imitations , les canons , les balTes-
contrain tes ( voye\ cet mots ) ; & enfin être
capable de faifir ou de former l'ordonnance
de tout un ouvrage , d'en fuivre lev nuan-
ces , & de fe remplir en quelque manière"
del'efprirdu poète, fans s'amufer à courir
après les mots. C'eil avec raifon que nos
rriuficiens ont donné le nom de paroles aux
poèmes qu'ilis mettent en chant. On voit
bien en eliet par leur manière de les rendre j
que^cene (ontpour eux que ies paroles. '
Les règles fondamentales de la compofition.-
font toujours \e^ mêmes ; mais elles reçoi-J-
venr plus ou moins d'extenfion ou de relâ-
chement , ièlon le nombre des parties : cat*
à mefure qu'il y a plus de parties , la compo-
fition devient plus difficile , û. les règles
iont auffi moins féveres. La compofition à
deux parties s'appelle duo , quand les deux
parties chantent également , & que le fujer
\voye\ ce mot) eil: partagé entr'elles. Que-
fi le fujet efl: dans une partie feulement , &:
que' l'autre ne- falïè qu'accompagner , on
appelle alors la première récit ^ ou folo , &c ■
l'autre accompagnement j ou baj/e-continuc
fi c'efiune bafTe. Il en "ell de mêmedu trio ou
de la compofitionà trois parties du quatuor ,
au quinque y &c. Voye^ ces mots. »
On compofe , DU pour les voix feule-
ment, ou pour les feuls inflrumens , ou
pour les^ infirumens & les voix. Les chan-
fons font les ieulescompofitions qui ne fbient
que pour les voix ; encore y joint-on fou--
vent quelque accompagnement pour les foii--
tenir.. Vojer ACCOMPAGNEMENT. Les •
compofitions inftrumentales font pour un
cnœur d'orcheflre , & alors elles s'appellent'.
fymphonies\, concerto ; ou pour quelque ef--
•pece particuhered'inftrumenf , & elles s'ap—"
peWentfonates. P^oye^ces mots.
Quant aux compofirions defîinées pour."
lès voix & pour les iniirumens , elles Ce:
divifent parmi nous en deux efpeces prin--
cij aies ; favoir mufique latine ou mufiquo;^
d'églife, & mufique françoiiè.-
y6S COU
■ Les rauGques deltïnées pour l'églife , fbit
pfeauraes, hymnes , antiennes , répons , por-
tent le nom générique de motets. Voye\ ce
mot. La muliquefrançoife fe divife encore en
mulîque de théâtre , co'mme nos opéra , & en
mufique de chambre, comme nos cantates ou
cantp.tilies. voy. aufpi. les mots CANTATE ,
Opéra , Ùc. En gênerai la mufique latine
demande plus de fcience de compofition ; la
mufique françoifè , plus de génie & de
goût. {S)
Dans une compofuion , l'auteur a pour
fujet le Ton phyfiquement conlidéré , & pour
objet le feul plaifir de l'oreille , ou bien il
s'élève à la mufique imitative , 6c cherche à
émouvoir les auditeurs par des tÇ^ezs mo-
raux. Au premier égard il fuffit qu'il cher-
che de beaux fons & des accords agréables ;
mais au/iecond , il doit confidérer la mufi-
que par fes rapports aux accens- de la voix
humaine , & par les conformités poffibles
entre les ions harmoniquement combinés
& les objets imitables. On trouvera , dans
V article Oï'ÉRA , quelques idées fijr les
moyens ■ d'élever & d'ennoblir l'art ^ en
faifant de la mufique une langue plus élo-
quente que le difcours même. (tS')
COMPOSITIOM des corps , ( Chym. ) La
co/77/Jo/zr/o;2 chymique n'ell autre chofe que
i'union & la combinaifon de plufieurs fijbf-
. tances de nature difiérente , dont il réfulte
un corps compofé. C'ell: cette union de
parties de différente nature, de laquelle il
réfijlte un corps d'une nature mixte , que
Becket & Stahl ont nommé mixtion , &
c^u'on peut nommer combinaifon ou compo-
fuion chymique , pour éviter l'équivoque des
termes de mixte & de mixtion , par leiquels
on pourroit entendre un fimple mélange,
une fimple interpofition de parties, & qui
donneroit une idée très-^ufîe de la compo-
fuion chymique , dans laquelle il doit y
avoir de plus une adhérence mutuelle entre
les fubfiances qui fe combinent.
Les fubfîances que les chy milles regar-
dent comme fimples , ou les principes pri-
mitifs , en fe combinant enfemble , forment
les premiers compofés auxqufls JBecker &
Stahl donn<înt , par excellence, le nom de.
mixtes. Les mêmes çhymiftes donnent le
nom de compofés à ceux qui réfultent de
lunion de z^% premiers mixtçs.
C O M
En fuivant toujours ces comblnaifons de
plus en plus compliquées , on trouve les
corps plus compofés , qu'ils ont nommés
décompofés àc furdécompofés.
Cette difiribution de différentes efpeces
de corps plus ou moins compofés , eft elle-
même très-jufîe & très-conforme à ce que
démontre l'expérience. Mais il paroît que les
dénominations que Beclcer & Stahl leur ont
données manquent d'exactitude & de clarté,
faute d'être univoques.
Il femble donc qu'il efl: beaucoup plus
fimple & plus clair de défigner ces diffé-
rentes clafîès de corps par des nombres qui
puifîént indiquer leur degré àtcompojuion :
on peut les nommer , par exemple , compofés
du premier, du fécond, du troifieme , du
quatrième degré , ^c. ainfi que M. Macqo^r
le pr«jpofe dans {ts cours. ( -f- j .
'* Composition, en peinture, c'eft la
partie de cet art qui confifle à repréfenter
iijr la toile un fujet quel qu'il foif , de la
manière la plus avantageufe. Elle fuppofe
1°. qu'on connoît bien , ou dans la nature
ou dans l'hiflcire y ou dans l'imagination ,
tout ce qui appartient au fujet ; 2°. qu'on
a reçu le génie qui fait employer toutes ces
données avec le goût convenable; 3**. qu'on
tient de l'étude & de l'habitude au travail le
manuel de l'art , fans lequel les autres qua-
lités reffent fans c^ct.
Un tableau bien compofë eft un tout ren-
fermé fous un feul point de vue , où
les parties concourent à un même but , &
forment par leur correfpondance mutuelle
un enfemble aufli réel , que celui àcs mem-
bres dans un corps animal; enforte qu'un
morceau de peinture fait d'un grand nombre
de figures jetées au hafard , fans propor-
tion , fans intelligence , & fans unité, ne
mérite non plus le nom d'une véritable com-
pojuion, que des étendues éparfès de jambes ,
de nez , d'yeux , fur un même carton , ne
méritent celui de portrait , ou même de
figure humaine.
D'où il s'enfuit que le peintre eft aflujetti
dans fa compofition aux mêmes loix que le
poëte dans la fienne; & .que l'obfervation
des trois unités , ^aclion , de lieu , & de
temps , n'efî pas moins effentielle dans la
peinture hiftorique, que dans la poéfie dra-
matique*
Mais
C O M
Mais les loix cie h.compoJuionéiCint un peu
plus vagues dans les autres peintures que
dans rhiiloriquc , c'efl à celle-ci fur-tout que
nous nous attaclierons , obfervant feulement
de répandre dans le cours de cet article les
règles communes à la repréfèntanon de tous
les (lijets , hifroriques ou poétiques.
De Vanité de temps en peinture. La loi de
cette unité cil beaucoup plus févere encore
pour le peintre que pour le poL'te : on ac-
corde vingt-quatre heures à ceiui-ci , c'ed-
à-dire qu'il peut , lans pécher contre la vrai-
fciTiblance , raîlèmbier dans Finrcrvallc de
trois beures que dure une repréi'enration ,
tous les événeraens qui ont pu fe fliccéder
naturellement dans l'elpace d'un jour. Mais
le peintre n'a qu'un inllant prefque indivi-
Cble ; c'eft à cet inflant que tous ks mouve-
mens de fa compofition doivent le rappor-
ter : entre ces mouvemens , fi j'en reinar-
que quelques-uns qui foient de linllant qui
précède ou de i'infknt qui fuit , la loi dé
l'unité de temps eil enfreinte. Dans le mo-
ment où Calchas levé le couteau fur le (èin
d'Iphigénie , l'horreur , la compafiion , la
douleur , doivent fe montrer au plus haut
degré fur les vifages des aliiflans ; Clitem-
neilre hirieufe s'élancera vers l'autel , &
s'efforcera , malgré les bras des foidats qui
la retiendront , de laifir la main de Calchas ,
& de s'oppofer entre fa fille & lui ; Aga-
memnon aura la thz couverte de fon man-
teau , Ùc,
On peut diftinguer dans c'naque aûion
une multitude d'inilans difFércns , entre lef-
quels il y auroit de la mal-adrefle à ne pas
choiiir le plus intérefîant ; c'efî , félon U
nature du fujet , ou l'inilant le plus pathéti-
que , ou le plus gai , ou le plus comique , a
moins que des loix particulières à la pein-
ture n'en ordonnent autrement ; que Ton
regagne du côté de l'efl^t des couleurs , des
ombres & des lumières , de la difpoiltion
générale des figures , ce que Fon perd du
côté du choix de l'inflant & àes circonflan-
ces propres à l'adion , ou qu'on ne croie
devoir loumettre fon goût & fon génie à une
certaine puérilité nationale , qu'on n'honore
que trop fouvent du nom de délicatejje
du goût. Combien cette délicatefî'e qui ne
permet point au malheureux Philodetc de
poulîer des cris articulés fur notre fcene ,
Tome VJII,
C O M 7<?c>
* Se de fe fouler à l'entrée de fa cavertie ,
ne bannit-elle pas d'objets intéreirans de la
peinture î
Chaque Infîant a fes avantages &. défà-
vantages dans la peinture; l'inflant une fois
choifi , tout le relie cil donné. Prcxlicus
fuppole qu'Hercule dans fa jeuneiTc , après
la défaite du (anglier d'Erimanthe , fut ac-
cueilli dans un lieu foiitaire de la forêt par la
déefîe de la gloi'e & par oUe des plaifu-s ,
qui fe le difpjtercn': : combien d'infîansdif-
férens cette fable morale n'ofFrirolt-elle pas
à un peiiître qui la choifiroit pour c(Ékt ? on
en co;npoferoit une galerie. Il .y a linflant
où le héros efi accuedii par les déefïcs ; l'info
tant où la voix du plaifir fè fait entendre ;
celui où l'honneur parle à fon caur ; l'inf*
tant où il balance en lui-même la raifon de
l'honneur & celle à\i plaifir ; l'inflant où la
glorire commence A l'emporter ; l'inflant où
il efl entièrement décidé pour elle.
A l'afped des déefîes il doit être faifî
d'admiration & de fjrpril'e : il doit s'atten-
drir à la voix du plaifir; il doit s'enfiammcr
A celle de l'honneur : dans l'inllant où il ba-
lance leurs avantages , il eff rêveur, incer-
tain , fulpendu ; à mefure que le combat
intérieur augmente , & que le moment du
facrifice approche , le regret , l'agitation ,
\(y tjurment , les angoiffes s'en-^arent de
lui : d' premitur ratione unimus y vinciquc
lihorat.
Le peintre qui manquerait de goût au
point de prendre Ilinllant où Hercule eff en-
tièrement décidé pour la gloire, abando.n-
neroit tout le fubhme de cette fable , & fê-
roit contraint de donner un air affligé à ki
déefïe du plaifir qui auroit perdu fa caufe;
ce qui efl contre fon cara61ere. Le choix d'ua
inffant interdit au peintre tous les avantages
des autres. Lorfque Calchas aura enfoncé le
couteau i'acré dans le fein d'Iphigénie , fi
mère doit s'évanouir ; les efforts qu'elle fe-
roit pour arrêter le coup , font d'un infiant
paâé : revenir fur cet infiant d'une minute ,
c'efl pécher aufîi lourdement que d'anticiper
de mille ans l'ur l'avenir.
Il y a pourtant des occafions où la préfence
d'un infiant n'efl pas incompatible avec des
traces d'un infiant pafîe : des larmes de dou-
leur couvrent quelquefois un vifage dont la
joie commence à s'emparer. Un peintre-
Ddddd
770 C O M
habile faifit un vifage dans FinHant du paf-
fage de l'ame d'une pallion à une autre , &
fait un chef-d'œuvre. Telle eft Marie de
Médicis dans la galerie du Luxembourg ;
Rubens Ta peinte de manière , que la joie
d'avoir mis au monde un fils , n'a point
eliàcé l'impreâîon des douleurs de l'en-
fantement. De ces deux paffions contrai-
res , l'une efl préiente , & l'autre n'elî pas
iiblènte.
Comme il efî rare que notre ame foit
dans une aJÛiette ferme & déterminée , &
qu'il s^pfait prefque toujours un combat de
différens intérêts oppofés , ce n'clf pas afTez
que de iàvoir rendre une paflion fimple ; tous
les inftans délicats font perdus pour celui qui
ne porte fon talent que jufque-là: il ne lor-
tira de fon pinceau aucune de ces figures
qu'on n'a jamais alîèz vues , & dans lel^
quelles on apperçoit fans cefîê de nouvelles
finefîès à melijre qu'on les confidere , {es
caractères ieront trop décidés pour donner
ce plailir : ils frapperont plus au premier
coup-d'ail , mais ils appelleront moins.
Die Vumté d^aclion. Cette unité tient
Beaucoup à celle de temps : embrafler deux
îr.ifans , c'clf peindre à-la-fois un même fait
lous deux points de vue différens ; faute
moins fenfible , mais dans le fond plus lourde
que celle de la duplicité de (ùjet. Deux ac-
tions ou liées , ou même fepaiées , peuvent
iè pafler en même temps , dans un même
lieu ; mais la préfence de deux inffans diiîe-
rens implique contradiûion dans le même
f^it ; à moins qu'on ne veuille confidércr
l'un & l'autre cas comme la repréfcntation
de deux avions différentes fur une même
toile. Ceux d'entre nos poètes qui ne fe fen-
tent pas afîez de génie pour tirer cinq ades
intérefîans d'un objet fimple , fondent plu-
sieurs adions dans une , abondent en épifo-
des , & chargent leurs pièces à proportion
de leur flérilité. Les peintres tombent quel
quefois dans le même défaut. On ne nie
point qu'une adion principale n'en entraîne
d'accidentelles ; mais il faut que celles-ci
foient des circonftances cflentielles à la pré-
cédente , il faut qu'il y ait entr'elles tant de
liaifon & tant de fubordination , que le
fpedateur ne foit jamais perplexe. Variez le
maflàcre des Innocens en tant de manières
qu'il vous plaira j mais qu'en quelque endroit
CO M
de votre toile que je jette les yeux , je ren-
contre par-tout ce maffacre ; vos épifodes ,
ou m'attacheront au fujet , ou m'en écarte-
ront ; & le dernier de ces effets eff toujours
un vice. La loi d'unité d'adion efl encore
plus lévere pour le peintre que pour le poëte.
Un bon tableau ne fournira guère qu'un
fujet, ou même qu'une fcene de drame ; &
un feul dram.e peut fournir matière à cent
tableaux différens.
De l'unité de lieu. Cette unité eff plus
fîride en un fens &: moins en un autre pour
le peintre que pour le poëte. La fcene eff plus
étendue en peinture, mais elle eit plus une
qu'en poélie. Le poëte , qui n'efl pas rcflreint..
en un infiant indivifible comme le peintre ,
promené fucceflîvement l'auditeur d'un ap-
partement dans un autre ; au lieu que fi le
peintre s'eft établi dans un veflibule , dans
une falle , fous un portique , dans une cam-
pagne , il n'en fort plus. Il peut , à l'aide dé
la perfpedive , agrandir Ion théâtre autant
qu'il le juge à propos, mais fa décoration;
reffe ; il n'en change pas.
De la fubordination des figures. Il efl évi- -
dent que les figures doivent fe faire remar-
quer à proportion de l'intérêt que j'y dois
prendre; qu'il y a des lieux relatifs aux cir-
conf lances de l'adion,. qu'elles doivent oc-
cuper naturellement , ou dont elles doivenf^
être plus ou. moins éloignées ; que chacune
doit erre animée & de la paflion & du degré
de paillon qfii convient à fon caradere ; que '
s'il y en a une qui parle , il faut que \ts au-
tres écoutent ; que plufieurs interlocuteurs
à-la-fois font dans un tableau un aufli mau-
vais effet que dans une compagnie ; que tout
étant également parfait dans la nature , dans
un morceau parfait routes les parties doivent
être également foignées , & ne déterminer
l'attention que par le plus ou moins d'impor- •
tance feulement. Si le facrifice d'Abraham-
étoit préfent à vo's yeux,, le buiffon & le-
bouc n'y auroient pas moins de vérité que le-
facrificateur & fon fils ; qu'ils foient donc .
également vrais jiir votre toile , & ne crai-
gnez pas que ces objets fiibalternes faffenf
négliger les objets Importans. Ils ne produi—
fent point ces effets dans la nature, pour-
quoi le produiroient-ils dans l'imitation que.
vous en ferez?
Des ornemens ^ des draperies & autres^
C O M
'■objets accejfoires. On ne peut trop recom-
mander la Ibbriété & la convenance dans les
ornemens : il eft en peinture ainli qu'en poé-
fie une fécondité malheureufe ; vous avez une
crèche à peindre , à quoi bon l'uppuyer con-
tre les ruines de quelque grand édifice , &
m'élever des colonnes dans un endroit qii
je n'en peui fuppofer que par des con-
jedurcs forcées ? Combien le précepte d'em-
bellir la nature a gâté de tableaux ! ne
cherchez donc pas à embellir la nature.
Choilliîèz avec jugement celle qui vous
convient , & rendez-la avec fcrupule. Con-
formez-vous dans les habits à l'hifloire an-
cienne & moderne , & n'allez pas dans
une paflion mettre aux Juifs des chapeaux
chargés de plumets.
Chaffez de votre compojîtlon toute figure
oifeufe , qui ne l'échauffiint pas , la refroidi-
roit; que celles que vous emploierez ne
ibient point éparfes & ifolées ; rafîemblez-
les par grouppes ; que vos grouppcs foient liés
entr'eux ; que les figures y foient bien con-
traflées , non de ce contrafte de pofitions
académiques , où l'on voit l'écolier toujours
attentif au modèle & jamais à la nature ;
qu'elles foient projetées les unes fur les au-
tres, de manière que les parties cachées
n'empêchent point que l'œil de l'imagina-
tion ne les voie tout entières ; que les lu-
mières y foient bien entendues ; point de
petites lumières éparfes qui ne formeroient
point de mafîes , ou qui n'of&iroient que
des formes ovales , rondes , quarrées , pa-
rallèles ; CCS formes feroient auflî infuppor-
tcibles à l'œil , dans l'imitation des objets
qu'on ne veut point fymmétrifer , qu'il en
fcroit flatté dans un arrangement fymmétri-
quc. Obfervez rigoureufement les loix de
J V perfpedive ; lâchez profiter du jet des
draperies : fi vous les difpofez convena-
blement , elles contribueront beaucoup à
l'effet ; mais craignez que l'art ne s'ap-
perçoive & dans cette relTource , & dans
les autres que l'expérience vous iuggé-
rera , &c.
Telles font à-peu-près les règles géné-
rales de la compojhion ; elles font prefqu'in-
variables ; & celles de la pratique de la pein-
ture ne doivent y apporter que peu ou point
d'altération. J'obferverai feulement que , de
même que l'homme de lettres raconte un
C O M 771
fait en hlflorien ou en poëte , un peintre eiv
fait le fujet d'un tableau hiilorique ou poé-
tique. Dans le premier cas , il femble que
tous les êtres imaginaires , toutes les qualités
métaphyfiques perfonifiées , en doivent être
bannis ; l'hifloire veut plus de vérité ; il n'y
a pas un de ces écarts dans les batailles
d'Alexandre ; & il femble dans le fécond
cas , qu'il ne foit guère permis de perfoni-
fier que celles qui l'ont tojiiours été , à
moins qu'on ne veuille répandre une obfcu-
rité profonde dans un lujet fort clair. Auflî
je n'admire pas autant l'allégorie de Rubens
dans l'accouchement de la reine , que l'apo-
théofe de Henri : il m'a toujours paru que le
premier de ces objets demandait toute la vé-
rité de l'hifloire , & le fécond tout le mer-
veilleux de la poéfie.
On appelle compojitions extravagantes ,
celles où les figures ont des formes & des
mouvemens hors de la nature ; compojitions
forcées , celles où les mouvemens &: les paf^
fions pèchent par excès ; compofitions con-
fiifes y celles où la multitude des objets &
des incidens éclipfent le fujet principal ; com^
pofitions froides y celles où les figures man-
quent de pafllons & de mouvemens ; com-
pofitions maigres f celles où le peintre n'a pas
iu tirer parti de fon fujet, ou dont le lujet
eft ingrat ; compofitions chargées , celles où
le peintre a montré trop d'objets , &c.
Une compofition peut aifément être riche
en figures. & pauvre d'idées ; une autre com^
pofition excitera beaucoup d'idées, ou en
inculquera fortement une feule ,■ & n'aura
qu'une figure. Combien la repréien cation
d'un anachorète ou d'un philofophe abi'orbé
dans une méditation profonde , n'ajoutcra-
t-elle pas à la peinture d'une folitude? il
femble qu'une fohtude ne demande perfon-
ne ; cependant elle fera bien plus folirude
fi vous y mettez un être penfant. Si vous
faites tomber un torrent des montagnes , &
que vous vouhez que j'en fois effrayé , imi-
tez Homère , placez à l'écart un berger
dans la' montagne , qui en écoute le bruit
avec effi-oi.
Nous ne pouvons trop inviter les pein-
tres à la ledure des grands poètes , & réci-
proquement les poètes ne peuvent trop voir
les ouvrages des grands peintres ; les pre-
miers y gagneront du goût , des idées , de
Ddddd 2,
771 CO M
iclévarion ; les ieconds , de l'exaclitudc &:
de la vérité Combien de tableaux poétiques
qu'on admire, & dont on (entiroir bienrot
l'abfurdité fi on les exécutoit en peinture?
li n'y a preCque pas un de ces poèmes ap-
pelles temples ^ qui n'ait un peu ce défaut.
Nous lifons CCS temples avec plailir ; mais
rarchltede qui réalife dans ion imagination
les objets à mcTure que le poëte les lui oiîre ,
n'y voit félon )Çou\e apparence qu'un édifice
bien confus & bien mauflàde.
Un peintre qui aime le fimple , le vrai &
le grand , s'attachera particulièrement à Ho-
mère & à Platon. Je ne dirai rien d'Home-
re , perfonne n'ignore julqu'cù ce poëte a
porté l'imitation de la nature. Platon.elî un
peu moins connu de ce côté , j'olë^ pour-
tant alîurer qu'il ne le cède guère à Home-
r§. Pfefqut toutes les entrées de l'es dialo-
gues font des chefs-d'œuvre de vérité pit-
rorefque : on en rencontre même dans le
cours du dialogue ; je n'ea apporterai qu'un
exemple tiré du banquet. Le banquet qu'on
regarde communément comme une chaîne
d'hymnes à l'amour , chantés par une troupe
de phiîofophcs , ert une des apologies les
plus délicates de Socrate. On fait trop le
reproche injulle auquel fes liaifons étroi-
tes avec Aicibiadel'avoient expofé. Le crime
imputé à Socrate étoit de nature que l'apo-
logie d.ircde devenoit une injure ; auiîi Pla-
ton n'a-t-il garde d'en faire le fujet princi-
pal de fon dialogue. Il aflemble dits philo-
fophes dans un banquet: il leur fait chan-
ter l'amour. Le repas & l'hymne étoienr
fur la fin , lorfqu'on entend un grand bruit
dans le veflibule ; les portes s'ouvrent , &
l'on voit Alcibiade couronné de lierre &
environné d'une troupe de joueufes d'inf-
trumens. Platon lui fuppolè cette pointe de
vin qui ajoute à la gaieté & qui difpofe à
l'indiicrétion. Alcibiade entre ; il divife fa
couronne en deux autres ; il en remet une
fur fa xtit , & de l'autre il ceint le front de
Socraie : il s'informe du fujet de la conver-
fanon ; \ts philofophes ont tous chanté le
triomphe de l'amour. Alcibiade chante fa
défaite- par la. lagedè , ou les efforts inutiles
qu'il a faits pour corrompre Socrate.. Ce
récit efl conduit avec tant d'art , qu'on n'y
apperçoit par-tout quur^ jeune libertin que
riyjTQiie tait parler j & qui s.^accufe fans
C O M
; mcn.igcmrnr des deileins les plus corrompus
j & de la débauche la plus honteufe : mais
l'imprefllon qui refîe au fond de l'ame , fans
qu'on le ioupçonne pour le moment , c'eft^
que Socrate ell innocent , & qu'il eft très-
heureux de l'avoir été ; car Alcibiade entêté
de les propres charmes , n'eût pas manque
! d'en relever encore la puifîânce , en dévoi-
lant leur efRt pernicieux fur le plus fagedes
Athéniens. Quel tableau , que l'entrée d'Al-
c.biade & de fon cortège au milieu des phi-
lofophes ! n'en ièroit-ce pas encore un bien
Intéreflànt & bien digne du pinceau de Ra-
phaël ou de Vanloo , que la repréfentation
de cette aiîemblée d hommes vénérables
enchaînés par l'éloquence & les charmes
d'un jeune libertin , pendentes ab ore loquen--
tis ? Quant aux parties de la peinture dont
la compofition lijppofe la connoifîlince y
l'oyei Coloris , Dessin , Draperies ,
Perspective, Grouppes,Couleurs,
Peinture , Claip.-ouscur , Ombre ,
Lumières , &c. Nous n'avons dû expofer
dans cet article que ce qui en concernoit
l'objet particuher.
Composition, dans le commerce y fe
dit d'un contrat pafle entre un débiteur in-
(olvab}e& Çqs créanciers , par lequel ceux-ci
conientent à recevoir une partie de la dette
en compenfation du tout , & ea conféquence
donnent une quittance générale.
Compqhtion y fe dit auxii dj.ns le commer-^
ce , du bon marché gu'on donne d'une chofe ;
faire bonne compojuion de fa marchandife^
c'eil fc relâcher fur le prix.
Composition , ( Pharm. ) voy. Com-
posé.
Composition , en termes d^imprime-
rie y s'entend de l'arrangement dçs lettres ,
qui , levées les unes après les autres , forment
un nombre de lignes , de pages & de feuilles.
Un ouvri.er compofiteur , interrogé pour la-
voir où il en efî de la compofition , répond :
il me refle à taire 6 pages 20 lignes de corn-
pofcion pour parfaire ma Veuille.
COMPOSTELLE , ( Géog. rnod. ) ville
fameufe d'E'fpagne à caufe du pèlerinage de
S. Jacques , dont on croit que les reliques
y repolent , fur les rivières de Tambra &
d'LHla. Long. 5) , z8 ; lat. 4.Z , ^4.
CoM?OSTELLE{lanoia'elle) , Géog. mod.
YÏUc de l'Amcriquie feptentriDaal.e y. dans U
cou ^ cou 775
nouvelle' Efpagne , dans la province de Xa-l l'autre extrémité , on arrange les lettres à
lli'co. Long. a. j 8 j 25 '' ~' -^.-' i- i .
lat. zz
COMPOSTEUR ,î. m. inftrumentd*im.
primerie , & particulier à l'ouvrier compo-
fiteur. C'ejd: un morceau de Fer ou de cui-
vre , plat , poli , de neuf à dix pouces de
long , fur cinq à fix lignes de large , & por-
tant un rebord de deux à trois lignes de haut
dans toute fa longueur; il eil terminé à ion
extrémité antérieure en forme d'équerre ;
l'autre extrémité en efl: arrondie : le corps
eft une efpecc de lame percée de plufieurs
trous de diiîance en diibnce , pour rece-
voir pardelTous une vis , & pardefîus
l'écrou de cette vis ; cet écrou eft échancré
par les deux côtés , & defliné à ferrer ou
defierrer deux petites coulilîès de trois ou
quatre pouces de long pofées l'une fur l'au-
tre , & fur la lame , dont elles n*excedent
pas la largeur , maintenues entre la vis &
l'écrou , & appuyées contre le rebord , avec
lequel leurs extrémités antérieures forment
une autre équerre : ces couliiTes , ou plus ou
moins avancées fur la lam^e , déterminent la
longueur des lignes d'une page. C'eft dans
l'elpace que laiilèntentr'elles les deux équer-
res , que le compofiteur tient de la main
gsuche , qu'il pofe le pié de la lettre qu'il
levé de la main droite , jufqu'à ce qu'il ait
rempli fa ligne. Il y a une autre forte de
compofieur qui fert à compofer de la note ,
êiçs vignettes , de l'algèbre ; il ne diffère du
premier, qu'en ce que celui-ci porte un re-
bord de douze à quatorze lignes géométri-
ques , ce qui donne la faculté de pouvoir y
faire entrer cinq à fix lignes de compolition
les unes fur les autres.
Il y a auili un compofieur de bois de près
de deux pies de longueur , fait pour com-
pofer les greffes lettres ou caraderes des af-
fiches. Voyei Fanicle IMPRIMER.
Composteur , ( FonderU encaracleres
d'Imprimerie^ il fert à donner aux lettres les
derniei^es façons ; ce font des morceaux de
bois de dix-huit à vingt pouces de long ,
fur un de large. D'un côté , & dans toute la
longueur , eft un petit rebord pour arrêter
le pié de la lettre, qui eft arrêtée auflî au
commencement par une petite languette de
bois menu de deux pouces de long , qui eft
collée fur le compofieur qui fert à le tenir.
Depuis cette languette jufqu'à Un pouce de
côté les unes des autres , pour pouvoir en-
iiiite les faire tomber toutes à la fois dans le
juftifieur , les couper & les reprendre de
même à-la-fois. C'eft aulîl (lir des compof^
teurs qu'on leur donne la dernière façon,
t qu'on les apprête. Voyei^ Vanicle Ca-
ACTERE.
'*' Composteur , manufacture en foie y
petite baguette de bois, fur laquelle on pafîè
les portées de la chaîne pour la plier. Le
compofieur Çc place dans une cavité qu'on lui
a pratiquée dans Feniuple & oiiii eft retenu.
voy. les articles Chaque <& Velours.
COMPOTE , f. f. en terme de confifeur y
eft une forte de confiture de peu de garde ,
parce que les fruits dorit elle eft faite ne font
pas cuits au degré nécefîaire pou» être con-
îervés long-temps. Compote efî donc pro-
prement une confiture dont les fruits ne font;
pas affez confits.
Compote , en terme de cuifme , eft une
manière d'accommoder des pigeons & des-
canards, en les pafTant dans du lard, du
beurre , ou même du faindoux , & les em-
potant enfuite avec du jus ou du bouillon
afTaifonné , un bouquet de perfil , de l'écor-
ce de citron , Ùc.
COMPREHENSION , {.^ï. terme de
théologie : ce terme marque l'état de ceux
quijouiifent de lavifion béatifique, & qu'on
appelle compre'henfeurs , par oppofition à
ceux qui vivent fur la terre , & qu'on appelle
voyageurs. V oye ■{VlSlO'ii.
Compréhension, tn réthorique , trope
par lequel on donne au tout le nom de la
partie , ou à la partie le nom du tout , ou à
une chofe un nombre déterminé pour un
nombre indéterminé. Ainfi M. de Voltaire
a dit de l'Angleterre , en parlant du règne
d'Elifabeth:
Sur ce fanglam théâtre oii cent héros pe'rirenty
Sur ce thrône gliffant y dont cent rois def"
cendirent j
Une femme â fes pies enchaînant te s defiins ,
De V éclat defon règne étonnait les humains,
Henriad. ch.j.
Voyei Métonimie. (G)
* COMPRENDRE , v. ad. terme de phi-
lofophie ; c'eft appercevoir la liaifon d-es
idées dans un jugement, ou la liaifon (\ts
\ propofîrions dans un raifonnement. Ainli
774 <^ O M C O M
cet a£le de l'entendement doit précéder l'af- ges expulfifs , & font fort utiles. L*applica-
firraation ou la négation. Ce que l'on com-
prend peut être vrai ou faux : s'il ei\ vrai ,
on en convient ; s'il eft faux , on le nie. J^. \
Juger , Raisonner. Il a , en théologie ,
une autre acception relative à l'étaidue de
nos facultés ; ainfi comprendre Dieu , c'e
connoître de cet être infini tout ce qui er
peut être connu par une créature finie dans
ce monde & dans l'autre.
COMPRESSE , f. f. terme de chirurgie ,
eft un linge plié en plufieurs doubles & pofé
fous le bandage , pour empêcher la plaie de
faigner , ou pour y tenir les médicamens
appliqués.
Ce mot vient du latin comprimere y qui
fjgnific prejjer avec force.
Scultet , dans Ion Armam. chirurg. ob-
ferve que les anciens faifoient leurs com-
prejfes de lin cardé , ou de duvet de plume ,
couIljs entr» deux linges, & les appelloient
coujjins ou coujjinets. Chambers,
Les comprejfes font defîinées à être pla-
cées flir une partie olFenfée , fbit pour y
contenir les médicamens , y remplir les vui-
des , fervir d'appui aux bandes , ' foit pour
comprimer quelque partie molle ou dure.
Les comprejjes doivent avoir les mêmes
conditions que les bandes , c'eft-à-dire qu'il
faut qu'elles foient, de linge à demi-ufé ,
fans ourlet ni lifiere.
On divife les comprejfes en lîmples & en
.compofées. Les fimpies ne font faites que
d'un feul lai de linge , telles que font les
premières comprejfes dont on fe lert pour les
fraâiures fimpies de la jambe ou du bras.
Les compofées font de deux fortes , unies
ou irrégulieres. Les compofées unies font
^loyées également ; elles font de différente
figure & de diverfe grandeur. Les irrégulie-
res ou graduées font égales ou inégales.
Les égales font celles qui , étant de diffé-
rente grandeur & par degrés , s'appliquent
les unes fur les autres , commençant par les
plus étroites. Voye\ ce que nous en avons
dit au fujet de l'anévrifme qui peut fe guérir
-par compreffion.
Les comprejfes gréantes inégales font faites
■d'une feule pièce de linge , qui étant pioyée
-plufieurs fois fur elle-même , fe trouve plus
:€paifïe d'un côté que de l'autre. Ces fortes
■à.Q comprejfes s'emploient avec les b^^da-
tion méthodique àss comprejfes expulfives
vuides des finus , procure le recollement de
la peau dilacérée , empêche de faire plufieurs
fions & contre-ouvertures , & évite
par-là beaucoup de douleurs aux malades.
y. Contre-ouverture & Compres-
fSION.
On appelle aufîi les comprejfes y contemi-
ves y unifiantes y dif-'ijipes , &c. V. Plan-
che II. figure z z. de chirurgie , comprejfe
quarrée i figure z j. Ê? z 4- comprejfes oblon^
gués ; figure î 5? comprejfe triangulaire pour
l'œil , l'aine , &c.fig, z G. comprejfe en croix
de malte pour les amputations des mem-
bres & les extrémités des doigts. On fe fert
aufîi d'une comprejfe de cette figure pour
panfer l'extrémité de la verge ; on fait alors
un petit trou dans fon milieu , pour répon-
dre à l'orifice de l'urètre. Figure z j . com-
prejfes longuettes pour les amputations. Fi-
gure z 8. comprejfe fendue ou à deux chefs.
Figure I g. comprejfe à quatre chefs. Plan-
che XXXI. fig. z z , comprejfe graduée iné-
gale. ( r)
COMPRESSIBLE , adj. fe dit d'un corps
capable de compreffion. Voy. COMPRES-
SION. (O)
COMPRESSION , f. f. ( Phyfique. ) efl
l'adion de prefîèr ou de ferrer un corps ,
de laquelle il réfulte qu'il occupe moins
d'efpace , &: que fes parties fe trouvent plus
près les unes des autres. La compreffion eft
donc une preflion , dont l'effet elt une di-
minution de volume dans le corps preffé ;
& c'efl par-là que la comprejfion diffère de
la prefîlon prife en général. Koyci PRES-
SION ù Volume.
La comprefiion y félon quelques auteurs,
diffère de la condenfation , en ce que celle-
ci eff produite par l'aSion du froid , &
l'autre par celle d'une force extérieure. V^,
Condensation. Mais cette difîindion
paroit aifez frivole.
L'eau eff incapable de compreffion : après
qu'elle a été bien purgée d'air , iln'y a point
de force capable d'en rapprocher les parties ,
ni d'en diminuer le volume. L'eau ayant été
violemment preffée , dans une expérience de
facadémie del cimento , elle s'ouvrit un paf^
fage à travers les pores d'une boule d'or , plur
tôt que de fouffrir la compreffion. V. Eaî/.
C O M
La comprejjîon de l'air par fon propre
poids , eft très-furprenantc. Il paroît , par
le calcul , que l'air ordinaire que nous ref-
pirons proche la furface de la terre , efl con-
denfë par le poids de ratmofpHere jufqu'à
n'occuper plus que la 11^96 partie de l'el-
pace qu'il occuperoit , s'il étoit en liberté.
Voyiei Atmosphère.
Mais nous pouvons , par le fecours de
l'art , comprimer l'air encore davantage ; &
il paroît par les expériences de M. ï3oyle ,
que l'efpace que l'air remplit dans fa plus
grande dilatation , ell: à celui qu'il occupe
dans fa plus grande comprejjîon, comme cinq
cent cinquante mille eit à un. Voye-{ AiR.
M. Newton prétend qu'il eft impolîible
d'expliquer cette grande comprejjion & di-
latation de l'air , en fuppofant (es particules
élafliques & branchues , ou en forme de
petites aiguilles entrelacées en cercles. Cet
auteur l'explique par une force répulfive',
dont il Tuppolè ces parties revêtues ; & en
vertu de laquelle , quand elles font en li-
berté , elles fe fuient mutuellement \t^ unes
les autres. V. ATTRACTION Ù RÉPUL-
SION. Harris & Charniers.
Au refle il ne faut point ( rigoureufement
parlant ) confondre la comprejjion avec la
Gondenfation , quoique dans l'ufage ces mots
fe confondent afïez fouvent. Comprejjion d\
proprement l'adion d'une force qui prefîe
un corps , foit qu'elle le réduife en un moin-
dre volume ou non ; condenjation cft l'état
d'un corps qui par l'adion de quelque force
efl réduit à un moindre volume : ainfi cq.s
deux mots expriment, l'un la force , l'autre
FelTet qu'elle produit ou tend à produire. (O)
Compression, {Méd.) maladie, &
quelquefois excellent remède : c^tû ce qu'il
convient d'expliquer fuccindement.
La comprejjion y en tant que maladie , eft
le rétrecilîèment des parois oppoiées des
vaifîeaux ou des cavités , par une caufe quel-
conque qui les rapproche au point de fe tou-
cher, ou beaucoup plus que dans leur état
naturel.
Cette tnaladie peut être produite par une
infinité de caufes différentes, externes ou
internes.
Les vaiffeaux font extérieurement com-
primés par le poids du corps tranquillement
couché fur une partie , par des ligatures ,
C O M 775
par des bandages , par des vêtemens trop
étroits , par diverfes machines compriman-
tes , par l'air plus pefant , par le frottement ,
csV. Si de ces caufes comprimantes il en ré-
fulte l'interruption de la circulation des fîui-
dcs , l'embarras , l'obflrudion , la mortifî-
carion , il faut promptementôter la caufe qui
produit ces ravages , changer fouvent la pof-
ture du lit quand la comprejjion vient du
poids du corps , relâcher les ligatures , Ùc.
La comprejjion arrive intérieurement par
quelque os , par une fradure , une luxation ,
une efquiile , la diflorfion , la dillradion des
parties dures qui compriment des vailîèaux ,
une pierre , une excroiilance , une exoflofe ,
ùc. Le remède efl de recourir à une prompte
rédudion , ou d'enlever la caufe s'il eft
poffible.
La comprejpcon des vaiffeaux peut encore
arriver par une tumeur voiline , molle ou
dure , pléthorique , inflammatoire , emphy-
lémateulè , purulente , skirrheufe , chan-
creufe , œdémateufe , ampoullée , variqueu-
fe , ' anévrifmale , topheufe , lymphatique,
pituiteufe , calculeufe , calleufe ; il faut appli-
quer la méthode curative indiquée à chacune
de ces efpeces de tumeurs ; diminuer la-
pléthore , guérir l'inflammation , évacuer le ■
pus , la lymphe; extirper par l'art les apol^
thèmes qu'on ne peut réfoudre , ^c.
La comprejjion qui naît des excrémens en-
durcis, fe guérit en rendant le ventre libre ;.
celle qui vient de la grofîefl!ê , s'évanouit par
l'accouchement : ainfi dans quelque comprej-
jion que ce foit àts vaiffeaux & des vifceres ,
on doit employer les remèdes propres à dé-
truire la caufe comprimante connue.
Mais pour entendre le mal qu'occafione
une longue & trop forte comprejjion , il faut
bien connoître i**. les effets qui en dérivent,
2°. la nature de la partie comprimée. Or l'on <
conçoit qu'une violente comprejjion en rétre-
cilîant \ts parois du vailîeau au point de fe '
toucher , procure leur cohéfion, leur con-^
folidation , interrompt par confcquenr la '
circulation des humeurs. La circulation ne
peut être interrompue dans une partie , fans
caufer le froid , la ifupeur , l'infenfibiiité ,
la fcchereffe , la parah lie , &c. Les fluides
qui fe portoient continuellement dans cette '
partie , viennent à le jeter dans d'autres
.vailîèaux qu'ils dilatent plus qu'ils nei'étoient:
77^ C 0 M
(lins leur étrù naturel : ces vaiîlèaux ne p:ii- '
vent erre ainfi dilatés , que leur refïort ne
diminue , ne fe perde , ou qu'il n'arrive unz
rupture , félon que leur dilatation efl plus
ou moins grande , (ubiiile plus ou moins
long-temps ; ce qui produit l'embarras ,
l'cpanchcraent , la corruption , la corrofion ,
la (ùppuration , la mortificarion , le (phacele.
Les eiiets de la comprej/ion font plus ou
moins nuifibles , fuivant la nature , la fîruc-
turc , la fituation de la partie comprimée :
de-là vient le danger de la comprejjîon du
cerveau , dont l'importance exige un article
à part.
Cependant nous avons donné la compref-
fion pour un excellent remède , & cela cfl
encore très-vrai : mais celle que nous van-
tons ainii , doit être artificielle , générale ,
modérée , & mife en ufage pnr degrés ; c'eil:
alors qu'elle fournit à la médecine un àts
plus puifîàns fecours dans les maladies nom-
breufes qui naiflent de la débilité & du re-
lâchement des fibres. On a vu de telles ma-
ladies qu'on regardoit comme défefpérées,
guérir par la comprejfion générale de tous les
yaifîeaux affaiblis , prudemment ménagée ;
car en diminuant un peu de leur capacité ,
il arrive qu'ils acquièrent de l'élafliciré , &
qu'ils ne font plus trop dillendus par les
fluides qu'ils contiennent. Or par exemple ,
les vêtemens , les bandages & les appareils
qui preffètît fur la chair , en donnant aux
vaiîlèaux une efpece de foutien & de point
d'appui , produifent ce que ne fauroient
faire les folides trop afioiblis , c'efl-à-dire ,
qu'ils empêchent que les vaifTeaux ne fe di-
latent à l'excès.
Qui ne l'ait les avantages de cette compref-
fion dans les hydropifies anafarques & al-
cites ? Dans la première , dès que toute l'eau
ejfl écoulée , les cuifles & les jambes relient
immédiatement après , non-feulement flaf-
ques & plilTées , mais elles ne -tardent guère
enfuite à s'enfler de nouveau , à moins qu'el-
les ne foient fortifiées & foutenues par un
bandage convenable. Dans laleconde, quand
les eaux ont été évacuées par la ponélion de
l'abdomen , fi l'on n'a foin de comprimer
le ventre auffi-tôt par des bandages , il fuc-
cede quelquefois une fyncope mortelle , ou
du moins l'hydropifie redevient bientôt
aufll terrible qu'auparavant.
C O M
^ Q':' ne connoît dans les iambes qui de-
viennent variqueufes , l'utilité des bandages
ou des cliauflùres étrécies , pour prévenir
les accidens àzs varices , & pour empêcher
les fluides de fe loger dans les vaiffeaux trop
dilntés des parties ? Enfin , qui p«u ignorer
les belles cures opérées par les fridions , cette
elpece fimple de comprcjjion méchanique , &
de relâchement alternatif des vaifièaux , qui
rétablit l'ndion & la réadion àz^ folides &
des fluides , d'où dépendent l'intégrité de
toutes les fondions du corps. Article de M,
le chevalier DE Jaucourt.
Compression DU cer-Veau , (Chir.)
preflion de ce viicere par quelque coup vio-
lent qui a contus , enfoncé le crâne en de-
dans, avec f raclure ou fans fradure.
Lorfque la tête efi: frannée par quelque
coup , ou que dans une chute elle rencontre
quelque corps dur , il en peut réfulter deux
trilles effets : i**. la commotion du cerveau,
Foj. Commotion : i°. fa comprejjîon ^
dont voici les fignes & les fuites.
Symptômes de la comprejfion ducen'eau.
1°. La rougeur du vifage , l'inflammation
àts yeux, le faignement du nez, des oreil-
les , Ùc. 2°. le friflbnnement , 3°. l'engour-
diflement des fens , 4''. l'aflbupiflèment , 5°'
la léthargie , 6*^. le vertige , 7°. le tintement
dans les oreilles , 8°. le déhre, 9°- le vomif-
ièment bilieux , 10°. les douleurs de tête ,
1 1°. les convulfions , 12'*. la paralyfie , 13°.
la décharge involontaire àts urines & de la
matière fécale , 14°. l'apoplexie. Voilà les
fymptomes de la comprejfion du cerveau ,
qui le trouvent plus ou moins raffemblés , &:
dont nous allons tâcher de donner l'expli-
cation.
Explication phyjiologique de ces fymptO'
mes. On apprend , en géométrie , que de tou-
tes les figures d'une égale circonférence , le
cercle eft celle qui comprend le plus grand
efpaee : or la figure du crâne eft à-peu-prcs
fphérique ; par conféquent s'il eft preffé en
dedans , il faut que là capacité diminue. On
fait auffi par la Phyfiologie , que la cavité
du crâne eft toujours pleine dans l'état de
fanté. Si donc la figure du crâne eft changée
par la comprejfion , il faut néceflairement
que cette comprejjîon agiife aufll fur le cer-
veau qui y eft contenu. •
Comme k vie de l'homme & toutes fe$
fonûiops
# C O M
fondions naturelles i-îépenclent de ce qui art
contenu dans la capacité du crâne , & que
toutQ la fubftance du cerveau , extrêmement
molle , efl facile à comprimer , il eft clair
que toutes les fondions qui dépendent de
l'intégrité du cerveau , feront troublées par
la compiejjîon ; & comme le cervelet eft plus
à couvert que le cerveau , il s'enfuit que
les fâcheux effets de la comprejfion ne par-
viendront à détruire l'aâion du cervelet
à* où dépend la vie , qu'après avoir afFedé
auparavant les actions dépendantes du
cerveau.
Il eft fans difficulté que les effets de ce dé-
(brdre varient à raifon des ditFérentes por-
tions du cerveau qui font comprimées , ou
félon que la caufe comprimante agit avec
plus ou moins de violence , ou félon la
quantité de la liqueur épanchée par la com-
prejjion , ou enfin félon que les fragmens
aigus de l'os pénètrent plus ou moins avant
dans la fubffance du cerveau.
Il ell: vrai que la plus légère comprejjlon du
cerveau peut troubler fon adion ; c'eft ce
que juflifie un cas fort fingulier, rapporté
•dansl'/i/,^. deVacad. des Se. Une femme qui
avoir la moitié du crâne enlevé , ne laiiloit
pas d'aller en cet état dans les rues , mendiant
de porte en porte : fi quelqu'un lui touchoit
la dure-mere qu'elle avoir toute découverte,
avec le bout du doigt leulemenr , & le plus
légèrement qu'il îm poflible , elle faifoit un
^rand cri , & difoit qu'elle avoir vu mille
chandelles. Il ne- faut donc pas être furpris
que [acomprej/lon ducerreau puifïe produire
tous les fymptomes rafîemblés ici.
Premièrement , la rougeur du vifage ,
l'inflammation des yeux , le faignement^ài
nez, des oreilles , &c. pourront être les ef-
fets de hromprej/ion. La circulation du fang
dans les vaiffeaux du cerveau étant oblfruée,
les yeux deviennent rouges par la quantité
de fang qu'y portent les branches de la co-
ratide interne : cette quantité augmentant
infenfiblement par la cTCulation , il en ré-
fultera un faignement du nez , des yeux ,
ties oreilles , &c. d'ailleurs , le fang qui le
■décharge par ces parties , donne liçu de
craindre que les vaiffeaux fanguins qui en-
trent dans le cerveau , ne foient aulïi rompus.
2.°. Le f rifîbnnement ei\ un mauvais fym-
ptoîue , parce qu'il défigne qu'il le décharge
Tome VlIL
C O M 777
I du fang de vaiffeaux rompus , fiif-tout
j quand il n'efl: pas réglé , il indique encore
I un dérangement dans le fiege des fenfations.
j 3°« L'engourdilîement des fens efl un
' fymptome ordinaire , même de la plus lé-
' gère comprejjlon du cerveau \ parce que dès
' que la fubffance médullaire du cerveau efî
affedée , les fenfations qui en émanent doi-
, vent être engourdies : enforte que cet effet
réfultera proportionnellement à la force de
' la comprejjlon ; & de plus il durera pendant
toute la vie , fi la caufe comprimante fub-
fifle toujours. Nous avons un exemple qui
le prouve dans Hildanus , cent. III. obf. xxj.
On obferve même cet engourdifTement dans:
tous les fens , lorfque le fang trop abondant
dans les pléthoriques , dillend leurs gros
vaifîèaux ; ou dans les maladies aiguës , lorf-
que par fa vélocité il fe raréfie au point de
dilater les vaifTeaux , qui alors prefîentfur
' la fubflance médullaire du cerveau.
4*. Si la comprejjlon efl plus forte , l'af^
foupiifement fuit néceffairement ; parce que
la libre circulation des efprits & du fang
dans la fubffance corticale du cerveau efl
alors empêchée : ce qui produit l'afroupiiîè-
ment.
5°. La léthargie indique qu'il y a encore
une plus grande comprejfion fur le cerveau i
aufC-tôt que les caufes qui produifent l'af^
fbupifTement font augmentées , ^lles for-
ment la léthargie. Il faut remarquer ici
qu'elle efl plus confidérable quand la com^
prejjion vient de quelque portion d'os , ou
d'un épanchement , que lorfque la dure-
raere eft piquée ou déchirée par quelques
efquilies ; mais dans ce dernier cas la dou-
leur efl plus profonde, & la pefànteur de
la tête plus confidérable.
6^. Le vertige efl un des plus légers dé-
fordrcsqui arrivent au cerveau dansIacoA^z-
prejjlon. Si le malade perd la vue , c'efl une
marque que le mal augmente. Le cerveau
étant comprimé , les efprits ne coulent plus
aufC librement de l'origine de la moelle du
cerveau par les nerfs du cerveau; il en ré-
fulte une rotation apparente des objets. Si
le mouvement impétueux du fang prefîe
davantage le cerveau , & qu'il forme un
obflacle dans les vaifîèaux par lefquels le
fang proviciit dii cerveau > il s'enftiit Mn*
Eeces
77S C O M
vertige ténébreux , & à la fin le malade
tombe à terre.
7°. Le tintement dans les oreilles procedç
ici de la même caufe qui produit le vertige ,
il eft preique toujours la luite d'un violent
coup à la tête , qui a comprimé le cerveau.
Jl faut bien le diilinguer de ce tintement
d'oreilles qu'on éprouve en fanté , qu-i ne
vient que d'un léger délordre dans l'organe
de l'oliie ; défordre qu'on diffipe en enfon-
çant fmiplement le doigt dans l'oreille , ou
en le paiîànt autour , ou en comprimant le
tragus , ou en ôtant la cire des oreilles.
8^. Quant au délire , on fent bien que
dans la comprejjîon du cerveau il faut nécef-
fàiremcnt qu'il s'enfuive un dérangement dans
les perceptions de l'ame , qui dépendent de
l'adion libre & continue du cerveau , &
que nous nommons délire.
9°. A l'égard du vomiliément de la bile,
il naît delà commjLmication étonnante qu'il
y a entre la têre & les vifceres, puiiqu'ils
font àts impreffions fi réelles l'un fur l'autre.
Dans l'état même de fanté, quelqu'un qui
a'efl point accoutumé au mouvement d'un
bateau , ou qui tourne avec force pendant
quelque temps , éprouve d abord" un ver-
toge qui annonce que le cerveau ell afledé ,
& bientôt après il vomit de la bile. Il fuit
de-là que , comme le vomiffement de bile
procède de caufes ii légères , il ne faut pas
tirer un pronollic fatal de ce lyraptome
dans les coups de i^it^ à rnoins qu'il ne
ibit accompagné d'autres lymptomes dan-
gereux.
lo". Pour ce qui regarde les douleurs de
tête, illembleque ce ibit un défordre par-
ticulier au crâne & à ïts tégumen-s. Comme
elles dénotent que les fondions du cerveau
ne font pas détruites , ii ne faut pas les met-
tre au rang des mauvais préfâges: car quand
Içs fondions du cerveau font extrêmement
dérangées , on ne peut pas déterminer fi
l'on relient ou non , des douleurs dans cette
partie.
11°. Les. convulfîons marquent claire-
ment que la comprejjîon , la lefion du cer-
veau , a dérangé l'égalité de l'affluence des
cfprits dans les nerfs qui fervent au mou-
vement mufculaire.
Ii*». La paralylie arr've quand le cerveau
fil teilemem bleflTd, que cette lefion a to-
QOM #
talefnent arrêté le cours des efprits qui
affluent dans les nerfs qui donnent le mou-
vement aux mulcles ; félon qu'une partie
ou une autre du cerveau aura été Compri-
iTÎée , la paralyfie affedera , ou tous les.
mutcles , ou ceux d'un côté du corps feu-
lement , ou bien fimplement quelque
mulcle particulier : c'elt un trè-s-mauvais
pronoflic , puil'qu'il dénote la violente
comprejjîon de la llibilance médiilkire du
cerveau.
13,°. La décharge involontaire d'urine &
de matière fécale , eil ici un des plus fu-
nefîes lymptomes ; car les nerfs qui fervenî
aux mufcles iphinders de la veiiie ëc de
l'anus , tirent leur origine àcs derniers,
nerfs de la moelle fpinale , qui paffent par les
trous de l'os facrum : d'oii il eft naturel de
conclure que l'origine de la moelle fpinale
dans le cerreau doit être léfëe en même
temps.
14°. Pour ce qui efl de l'apoplexie & de
la fièvre qui l'accompagne , elle raoritre
une comprejjîon du cerveau qui a détruit
toutes \q,s iènfations internes & externes ,
auiTi-bien que les mouvemens fpontanés^
Cet état apopledique efl prefque toujours
accompagné d'un pouls fort & vif, pen-
dant lequel l'aâion du cervelet continue
encore ; parce qu'étant à Tabri fous la dures-
mère , il eft bien plus difficilement com-
primé.
15°. Enfin , quand le cervelet vient auflî a
être comprimé , parce que dans la com^
prejjîon du cerveau toute la force du fang,
qui devroit circuler agit prelqu'entiérement
fiir le cervelet ; la flructure tiu cervelet fe
détruit par une augmentation de mouve-
ment , d'où la mort fuit néceffairement..
Caufe de la comprejjîon du cerveau. Ces.
divers accidens que produit la comprejjîon ,
naifiènt dans les coups reçus à la tête , par
l'enfoncement du crâne avec ou fans frac-
ture. Alors ii peut arriver que du làng ou
quelque autre liqueur foit épanchée fur la
dure-mere , entre cette membrane & la
pie- mère , entre celle-ci & le cerveau ,,
ou dans la propre fùbflance du cerveau. Il
peut y avoir quelque portion d'os déplacée
entièrement , ou en partie ; une pointe d'os^
qui pique la dure-mere ; le corps qui a fait
: la plaie s'il reile dedans ; rinûammatioa des
C O M
rj^inmges occafîonée par une petite divi-
sion, ou par la contufion du péricrâne.
Voilà les cauies immédiates de la compref-
Jioii du cerveau.
Cure. La cure confifle à rétablir le crâne
dans Ton état naturel, & à l'y maintenir.
On connoît l'enfoncement du crâne par
l'attouchement , ou par la vue feule ,
fur -tout quand les tégumens font levés.
Il faut cependant ici quelquefois de
l'habileté & de la prudence pour ne pas
s'y méprendre. Si l'enfoncement du crâne
cft 11 fenfible qu'il ne faille que des yeux
pour le voir , il efl pour lors bien avéré ;
& quand , par la violence des fymptomes ,
on s'efl cru obligé de lever les tégumens &
de mettre l'os à nu , on voit bien auiii ce
qui en eft.
S'il n'eft queflion que de la contufion du
péricrâne , on y remédie par la faignée ; ou
fi elle ne réuflit pas , par une incifion cru-
ciale qu'on fait à cette partie avec un bif-
touri droit , dont on porte obliquement la
pointe fous la peau , afin que cette incifion
s'étende plus fur le péricrâne que fur le
cuir chevelu. Par ce moyen , on débride
cette membrane , on donne ifîûe aux li-
queurs, on fait ceiTer l'inflammation & les
fymptomes qui en font les fuites. On panfe
cette plaie fimplement ; on met fur l'os &
fur le péricrâne , un plumaceau trempé dans
une liqueur (piritueufè , telle que l'eau-de-
vie ; on couvre d'un digefiif fimple la plaie
des tégumens , & l'on apphque fur toute
la tête des réfolutifs fpiritueux.
Dans le cas d'épanchement , on a ordinai-
rement recours au trépan : mais avant que
de faire cette opération , il faut tâcher de
connoître le lieu où ell le défordre ^ & il
n'efl pas toujours aifé de le deviner ; cepen-
dant Il les fymptomes menaçans , caufés par
îa comprejjion du cerveau , font extrêmement
urgens,il faudra appliquer le trépan à un
endroit, ou à piufieurs endroits du crâne
s'il efl nécefîàire , pour taire ceffer la com^
prejjion , & évacuer la matière épanchée ;
car il paroît plus raifonnable, après avoir
prévenu les aflifians fur l'incertitude du fuc-
cès de l'opération , de tenter un remède
douteux dans cette conjondure , que de
n'en point tenter du tout.
Lorfque quelque pointe d'os pique la ,
C O M 77^
dure«.mere , ou blefîe le cerveau , il faut
l'ôter au plutôt ; car il en réfulte les plu»
cruels lymptomes. Lorique l'os enfoncé plie
ou cède fous le trépan , on doit faire un
trou dans le crâne à coté de la fradure,
par lequel trou on introduira l'élévatoire
pour foulever l'os enfoncé.
Kéflexion. Dans tous ces cas l'on ne peut
qu'être cffi-ayé de la plupart des trifles fym-
ptomes dont nous avons fait le détail : ce-
pendant l'on ne manque pas d'obfervations
d'heureufès cures arrivées dans des enfon-
cemens , des tradures de crâne très-confi-
dérables , dans le déchirement des ménin-
ges , dans la perte même d'une partie de la ,
(ubfîance du cerveau. Ces faits confolans
confondent notre foible raifon , & nous
prouvent que le Créateur , en cachant à nos
yeux le fiege de l'ame , lui a donné des rei-
fources pour fa confervation qui nous fe-
ront toujours inconnues. Article de M. le
chevalier DE Jaucourt.
Compression, terme de Chirurgie ,
adion de preflêr une partie par le moyen
d'un appareil & d'un bandage.
La comprejjion eft un des meilleurs moyens
d'arrêter le fang. Fbjf ^ HÉMORRHAGIE..
Un A'pçiiYtAcompreJJifA'p'çXiQ^é avec intel-
ligence fur la peau qui recouvre un finus ,
procure quelquefois le recollement de i'ts
parois , & évite des incifions douloureufes.
Fûi^. Compresse ^ Contre-ouver-
TITRE.
Il eft des cas où la comprejjion eft nécef^
faire pour retenir le pus dans le finus , afin
de mettre le chirurgien à portée de faire
plus fûrement les incifions & contre-ouver-
tures nécefiliires. C'eft ainfi que M. Petit a
imaginé de tamponner l'inteflin recfum dans
la fifiule interne de l'anus, pour faire féjour-
ner le pus dans le finus fifiuleux , & faire
prononcer une tumeur à la marge du fon-
dement , laquelle fert à indiquer le lieu où
il faut faire l'opération. Voy. FiSTULE A
l'anus.
Cette méthode de comprimer l'endroit par
où le pus lort , s'emploie avec iiccès. dans
-{'autres parties pour faire i'o.vcrture à.:s
lacs qui fourni fient les fuppura . i s. Le fé-
jour du pus qu'on occaiione par ce moyen ,,
procure fouvent très-t-lficace n( nr la fonte
des duretés caileufe- , ce qu dit'ienie de,
Eeeee i
70©
C O M
l'application des cathérétiques qu'il auroit
fallu employer enfuite pour parrenir à une
parfaite guérifon. ( 1^)
COMPROMETTRE, v. n. fe rappor-
ter de la décifion d'une condilration nu ju-
gement de quelqu'un , prendre Ôqs arbitres
pour régler Tes différends. Cette manière
de finir les aflRiires cfl: affez ordinaire entre
les marchands. Il y a même dans le règle-
ment pour les affureurs & les polices d'af-
furance un article exprès , qui oblige à com-
promettre & à s'en rapporter à des arbitres
fur les conteflations en fait d'aiîîiranccs. V.
Assurance & Assurer ; royei aujjl
COaMPROMIS. Diclionn. du Comm.
COMPROMIS , {Jurifprud) eft un écrit
ligné des parties , par lequel elles convien-
nent d'un ou de plufieurs arbitres, à la dé-
cifion defquels elles promettent de fe tenir ,
à peine par le contrevenant de payer la fomme
ipécifiée dans le compromis.
On peut par compromis ^ au lieu d'arbi-
tres , nommer un ou plufieurs arbitrateurs ,
c'efl:-à-dire amiables compofiteurs. Voye-^
ci-devant COMPOSITEUR.
Pour la validité du compromis , il faut ,
1°. Que l'on y fixe le temps dans lequel
lés arbitres doivent juger.
2®. Que l'on y exprime la foumiffion àt^
parties au jugement des arbitres.
3**. Que l'on y llipule une peine pécuniaire
contre la partie qui refufera d'exécuternic
jugement.
Le pouvoir réfultanf du compromis efi
borné aux objets qui y font exprimés , & ne
peut être étendu au-delà.
Celui qui n'eft pas content de la fentence
arbitrale, peut en interjerer appel, quand
même les parties y auroient renoncé par le
compromis^ ; mais Tappellant , avant de pou-
voir être écouté fur Ton appel, doit payer
la peine portée au compromis ; & elle fe-
roit toujours due , quand même il renon-
ceroit dans la fuite à fon appel , ou que par
l'événement la fentence feroit infirmée.
Il étoit libre chez les Romains de ftipu-
1er par le compromis une peine plus forte
que l'objet même du compromis ; mais parmi
nous , quand la peine paroît cxceflîve , le
parlement peut la modérer en jugeant l'appel.
On peut compromettre fur un procès à
lïiouvoir j de même que fur un procès dé]'^
C © M
mu , & généralement de toutes chofes qui
concernent les parties , & dont elles peu-
vent diipofer.
Il y a certaines chofcs dont il n'eft pas
permis de compromettre , telles que les
droits fpirituels d'une églife , les chofes qui
intéreflcnt lepublic , ni fur àts alimens lail-
fcs par teftament pour ce qui en doit écheoir
dans la fuite.
On ne peut pas non plus compromettre
fur la punition des crimes publics ; mais on
peut compromettre fur les intérêts civils ôc
fur les dépens d'un procès criminel, même
fur les délits que l'on ne pourfuit que civi-
lement.
Ceux qui ne peuvent pas s'engager , ne
peuvent pas compromettre , tels qu'une
femme en puiffance de mari , fi ce n'eft de fon
autorité • un londé de procuration ne le peut
fans un pouvoir fpécial; le prodigue ou
furieux ne le peut , fans être aflifté de fon
curateur.
Le mineur ne peut pareillement compro-
mettre; & s'il l'a fait , il eft aifément relevé
de la peine portée au compromis ; mais un
bénéficier mineur n'en feroit pas relevé ,.
étant réputé majeur pour les droits de fon
bénéfice.
Les communautés , foit laïques ou ccclé~
fiaftiques , ne (ont pas non plus relevées de
la peine portée au compromis , quoiqu'elles
jouifient ordinairement des mêmes priviie- •
ges que les mineurs.
Le compromis fubfiftant & fiiivi de pour-
fuites devant les arbitres , a l'effet d'empê-
cher la péremption & la prefcription , le
pouvoir donné aux arbitres ou arbitrateurs
par le compromis , eft rélblu.
I*. Par la mort d'un des arbitres ou arbi-
trateurs , ou par celle d'une des parties.
2.**. Par l'expiration du temps porté par
le compromis , à moins qu'il ne foit prorogé.
3*. Lorfque les parties tranfigent fur le
procès qui faifoit l'objet du compromis.
Anciennement , lorfque les évêques con-
noiffoient de différentes matières apparte-
nantes ii la jufrice lëculiere, c'étoit ieulc-
ment par voie de compromis , comme on
voit par àts lettres de PhiiippeJe-Bel du
15 Juin 1303.
Voye-^ au digefl, l. IV, tit. piij\ Ùaucod.
2, tit. Ivji les loix civiles ^ L Jj tit. xji'jfecl. i »
C O M
Brodeau lùr Louet, lett. c.fomm. 4,Cîiaf
fanée fur la coutume de Bourg, tït. des droits
des sens mariés , §. J'fr^oenpuiiîance , n. 19.
Barder , tome II , liv. V. ch. ij. Hevin fur
Frain ,p 31. de/es additions aux notes ; Pa-
pon , liv. VI, tit. iij ; la Peyrere, au mot
arbitre ; voye^ ARBITRE & SENTENCE
ARBITRALE i -A \
COMPROMISSAIRE ,{Jurifprud.) ce
terme efî ufité en droit y & dans quelques
pays de droit écrit , pour fignifier un arM-
tre. Ceux qui pafTent un compromis font
nomméscompromijfores j & les arbitres rj/;:-
promijfarii. Voyez le ^/z;//brdeBrederode ,
au mot compromijjarius. {A)
COMPS , ( Géog. ) petite ville de France
en Provence, fur la rivière de Nartabre.
COMPTABILITÉ , fub. f. {Junfprud.)
Voye^ ci-après V article de la chambre des
comptes qui eltà la fiiite du mot compte ,
vers la fin dudit article.
. COMPTABLE , f. m. {Jurifp. ) en gé-
néral eft celui qui manie des deniers dont il
doit rendfie compte. Ainli un tuteur efl
comptable envers fbn mineur , un héritier
bénéficiaire envers les créanciers de la fuc-
ceffionj un exécuteur teiiamentaire envers
les héritiers-légataires & créanciers ; un fe-
queflre ou gardien ell comptable des efîèts à
lui confiés & des fruits par lui perçus, en-
vers la partie faifie & les créanciers , & ainfi
àts autres.
Tout comptable efl réputé débiteur jufqu'à
ce qu'il ait rendu compte & payé le reli-
quat , s'il en eft dû un , & remis toutes les
pièces juftificatives. Ordonnance de i66j ,
tit. xxj'x. art. 2 .
L'article fuivant porte que le comptable
peut être pourfuivi de rendre compte de-
vant le juge qui l'a commis ; ou s'il n'a pas
été commis par juflice , devant le juge de
Ion domicile , &c.
Mais fi le comptable efî privilégié , il peut
demander Ton renvoi devant le juge de ion
privilège.
Pour ce qui concerne les comptables delà
chambre des comptes , poye^ ci-après Var-
ticle de cette chambre , qui ell: à la fuite du
mot compte , vers la fin de l'article. (A)
Comptable , ) Quittance. ) On appelle
quittances comptables les quittances & dé-
charges qui font en bonne forme j, &. qui
C O M 7S1
•peuvent être reçues dans un compfe pour
en juflifier les dépenfes. Au contraire les
quittances non comptables font celles que
l'oyant compte peut rejeter comme n'étant
pas en forme compétente ^ & ne jufîifiant
pas afTez l'emploi des deniers. (G)
Comptable fign^fie aûiTi en Guiennc ,
particuhérement à Bordeaux , le fermier ou
receveur du droit qu'on nomme comptablie,
Voy. ComPTABLIE àV article fuivam. (G)
COMPTABLIE DE BORDEAUX ,
{Jurifprud. ) Hilh & Finance ; ce terme pris
flridementfignifie le bureau où l'on compte
& paie les droits dûs au roi à Bordeaux ;
"mais on entend par le terme de comptable ,
ou ce qu'on appelle droit de comptablie ou
coutume de Bordeaux , le droit même qui (è
paie dans ce bureau , & qui fe perçoit au
profit du roi dans la fénéchaufîee de Bor-
ds^aux à l'entrée & à la fortie de toutes les
marchandifes , vivres & denrées contenues
au tarif qui en a été drefTé , fans exception
du fel.
• Pour entendre ce que c'efl que ce droit
de comptablie , & en quoi ildiiFere des droits
qui fe paient ailleurs, il faut obferver que
la> généralité de Bordeaux eft toute entière
hors l'étendue des cinq greffes fermes , &
par conféquent répurée étrangère à l'égard'
du refle du royaume. C*ef^ pourquoi l'on
a établi dans cette généralité divers droit.«i
d'entrée & de fortie pour toutes les mar-
chandifes. Les deux efpeces les plus géné-
rales de ces droits , font ceux de coutume
& de compt.blie y & ceux de convoi. Les
premiers, c'efl-à-dire les droits de coutume
& de comptablie , font locaux , & fe per-
çoivent fpécialement dans la fénéchauf—
fée de Bordeaux à l'entrée & à la fortie de
toutes les marchandifes, vivres & denrées*
Ce droit de comptablie qui produifoit peu
de chofe dans fon origine , appartenoit au-
trefois à l'abbaye de Sainre-Croix , les reli-
gieux s'en défirent en faveur de la ville de
Bordeaux y fur laquelle ce droit a été dans
la fuite confifqué avec celui de convoi au
profit du roi Louis XIV , lorfque cette ville
eut le malheur de lui déplaire.
Depuis ce temps , dans tous les baux des
fermes générales , on comprend nommé-^
ment la ferme du convoi & comptablie de
Bordeaux , de même que celles de:s douanes.
7^2 C O M
de Lyon & de Valence , Patente de Lan-
guedoc , &c.
Pour ce qui eft des droits de convoi ,
j-'oyei ci-après au mot CONVOI DE BOR-
DEAUX. {A )
COMPTANT , fub. m. terme qui dans
le commerce a plufieurs fignifications.
Il fe dit ordinairement entre négocians
pour lignifier <:/e V argent réel & effectif qu on
donne & qu'on reçoit fur le champ pour
le prix convenu de quelque marchandife.
J^ai rendu comptant , j'ai acheté comptant ;
& en ce fens il eft oppofé à crédit. V^oje^
Crédit. ^
2°. Comptant fignilie lefonds^qw fe trouve
en argent monnoyé chez un banquier ou né-
gociant , &c.
3°. Comptant, argent comptant , s'entend
des monnoies ayant cours j ou des efpeces
Tonnantes dont on llipule que certains paie-
mens feront faits , par oppofirion aux bil-
lets, écritures , ou papiers. Ainfi payer comp-
tant, c'ell payer en argent & non en lettres
de change ou promelîês.
Comptant, en terme de finances ; on ap-
pelle ordonnance de comptant , une ordon-
nance que k roi donne pour être pa3^ce & ac-
quittée au tréfor royal , où il n'efl point ex-
pliqué la deflination des fommes accor-
dées , & pour le paiement defquelles il
n'eft befoin d'aucunes formalités. Voye\
h dictionnaire du commerce y Trévoux &
Chambers.
COIVIPTE , f. m. {Commerce.) eft un état
calculé ou non calculé d'efîèts pofîedés ,
adminiflrés , acquis , reçus , dûs , ou dépen-
fés. Ce terme a un grand nombre d'accep-
tions différentes dans le commerce. On dit
tn ce fens que trois fortes de comptes font
abfolument nécefîaires pour la clôture des
livres en parties doubles ; le compte de capi-
tal , k compte de profits & pertes & le
compte de bilan.
■ Le compte de capital eft un compte parti-
culier ouvert au débit dû grand livre ; il con-
tient tous les effets d'un négociant , c'eft-à-
dire fon argent comptant , fes marchandi-
fes , billets , promefles , obligations , parties
arrêtées , meubles meublans , immeubles ,
& généralement tout ce qui lui appartient,
franc & quitte de toutes dettes & hypo-
thequcs-
C o M
Le compte de profits & pertes elî ouvert
fur le grand livre : il efl compofé de tous
les gains ou pertes qu'un négociant a pu faire
dans fon négoce. Les pertes s'écrivent au
crédit , & les profits fê portent au débit. V,
Crédit <& DÉBIT.
Le compte de bilan ne s*ouvre au grand
livre que pour la clôture des livres. Quand,
il s'agit de la forcie des livres , on l'appelle
compte de bilan de f ortie ; & lorfqu'il ell
queflion de prendre de nouveaux livres , on
le nomme comptt de bilan d'entrée. Dans le
premier on porte au dcbit tout ce qui efl
dû , & au crédit tout ce que l'on doit. Dans
le fécond on porte au débit tout ce qui efl
au crédit du compte de bilan de fortie , & au
crédit tout ce qui efl au débit de ce même
compte de bilan de fortie.
Comptes ( livres de), ce font des jour-
naux , regiflres , fur lefquels les marchands ,
négocians , banquiers , & autres , portent
leurs effets , leur recette , & leur»dépenfè.,
Ouvrir un compte, c\û le placer pour la
première fois dans le grand livre^ ce qui fe
fait en écrivant 'en gros caraderes les noms ,
furnoms & demeure de celui avec qui l'on-
entre en compte ouvert ; enfuite on le charge
àts articles , foit en débit , fbit en crédit , à
mefure que les affaires fe préfentent ; & l'on
fait en même temps mention de ce comptt
fur le répertoire ou alphabet. J^oyf;[ ALPHA-
BET & Répertoire.
Apofliller un compte , c'efl mettre des no-
tes & apoflilies à côté de chaque article,,
aux uns pour les allouer , aux autres pour
les débattre.
Vérifier un compte y c'efl l'examiner.
Clorrc un compte , c'efl l'arrêter , & en
fixer ie reliquat.
Finito de Compte y fè prend pour l'arrête
même du compte.
Coucher une fomme fur un compte , c'efl
enrégiflrer fur un grand livre , foit en crédit ,.
foit en débit , les parties dont les particuliers
deviennent débiteurs ou créditeurs.
Pointer les parties d'un compte , c'efl
mettre un point à côté de chaque partie que,
le teneur de livres vérifie , pour juflifier que
la rencontre efl jufle.
Contre~partie d'un compte y en termes de
banque & de commis aux bureaux dss fer-
mes du roi ; c'efl le regiilre que tient le,
C O M
contrôleur , fur lequel il enrégifîre toutes les
parties dont le teneur de livres , il c'eft pour
la banque , ou le receveur , li c'elt pour les
fermes du roi , charge le lien.
Ordre d'un compte , c'efl fe divifion en
chapitre de recette , dépenfe , & reprife.
Examiner un compte , c'efl: le lire exade-
ment , en pointer les articles , en vérifier
le calcul , pour voir s'il n'y a point d'erreur.
Solder un compte , c'efl: le calculer , le
régler , l'arrêter, en faire la balance. Voye^
Balance ^ Solde.
Pajfer en compte , c*efl tenir compte à
quelqu'un d'une îbmme qu'on a reçue de
lui ou pour lui.
Rendre compte , c'efl , lorfqu'on efl comp-
table , fournir l'état de fa recette & de là
dépenfe.
Apurer un compte , c'efl en juger tous les
débats , & en faire lever toutes ks foufFran-
ces ou apofîilles mifes en marge. V. SOUF-
FRANCE & Apostille.
Bordereau de compte, c'efl l'extrait d'un
compte, dans lequel on comprend toutes
les fommes d'un compte tirées hors de ligne ,
tant de la recette que de la dépenfe. voye'^
Bordereau.
Débet de compte , c'efl la fomme dont la
recette excède la dépenlè.
Solde de compte , c'efl la fomme dont le
débit excède le crédit , ou le crédit excède
ie débit , quand le compte efl bien vérifié &
arrêté , & que la balance en elt faite.
Ligne de compte , c'ell la lomme qu'on
tire à la marge blanche qu'on lailfe à côté
d'un compte lur la droite. Eiie contient en
chifii-es la fomme couchée en toutes lettres
dans le corps ou texte de fardcle qui y
répond.
Affirmer un compte , c'efl jurer & afTurer
qu'il eil véritable. L«s comptables , quand
ils prelentent leurs comptes y ont couiumc
de mettre à la marge de la première page
ces mots : préfemé 0 affirme véritable.
Débattre un^compte y c'efl faire des remar-
ques iiir les divers articles d'un compte , ibit
cour augmenter la recette y foir pour en
faire dimmu r la dépenie.
Compte en banque , c'efl un fonds
que les marchands négocians , banquiers ,
eu autres particuliers , dépofent dans la
caifiè conimune d'une banque , pour s'en
C O M 783
fervîr au paiement àz^ billets , lettres d«
change , ùc.
Compte EN PARTICIPATION, efl une
efpece'de compte qui fe fait entre deux mar-
chands ou négocians, pour raifon d'une Ib—
ciété anonyme qu'on appelle/oc/eVe/jamape
ou fociété par participation. V. SOCIÉTÉ.
Compte ellauili un terme relatif qui con-
cerne urie fociété , quand deux ou trois per-
fonnes font des recettes ou des dépenfes les
unes pour les autres. On dit en ce fens :
cet homme efl de bon compte.
Compte fe dit encore d'un calcul ou dé-r
nombrement qui fe fait dans plufieurs cho-
fes ou quantités féparées qui font d'une
même efpece. Dubois de compte y efl en ce
lèns une certaine quantité de bûches qui
coinpolént une voie.
Compte {grand), ou Compte mar-
chand , & PETIT Compte , fontdes ter-
mes ulités dans le Commerce , pour figni-
fier un certain nombre de morues ou de
poignées de morues. A Orléans & en Nor-
mandie le cent de morues efl de cent trente—
deux morues , ou de foixant^-fix poignées ^
c'efl ce qu'on nomme grand compte : & à.
Pans il n'elt que de cent huit morues ; ce
qui s'appcUe petit compte.
Comptes faits, font de certaines ta-
bles ou tarits où l'on trouve des réduâions
toutes fiiites de poids , de mefures , de chan-
ges , d'efcompres , d m ter cts , de mon noies >.
&c. tels Ibnt les comptes faits de Barrême.
Compte lignifie encore gain y profit ,
ai'antage , bon marcné. Faite fon compte ^
trouver fon compte y &c. Il fe dit encore des:
dcbourles & frais volontaires qu'on ne
pourra fe faire pailer en compte. S *il dépenfe
au-delà de f es ordies y ce fer a fur fon compte».
Compte fe dit encore de pluiieurs petites
choies qui le prennent à la main , ou ^u'on
jette enlembie pour compter avec plus de
promptitude. Ainii un ccru de noix ell
compoiè de vingt comptes , avec les quatre
au cent. Vqye7^^ les dicl, de Trév. du Com^
Disk. Chambers. {G)
Compte , {Jurifp. ) ilfe prend ici pour
l'état de recette & de dépenfe de biens dont
on a eu l'adminillrarion.
Toute perlbnne qui a géré le bien d'au*-
trui doit en rendre compte , lorique là gjjf^
tioû ell finie ;, & jufqu'à ce qiie ce coi7^tç>
784 C O M
{bit rendu & apuré , & les pièces juflifica-
tives remiiesj le comptable efl toujours ré-
puté débiteur.
Ainlî le mari ou lès héritiers , après la
diflblurion de la communauté, doivent en
rendre compte à la femme ou à fcs héritiers ;
le tuteur, protuteur , curateur, doit ''un
compte à Ton mineur après la tutelle finie ;
l'héritier bénéficiaire doit un compte de la
tucceflion aux créanâers ; celui des afîbciés
qui a géré l'atFaire commune , en doit ren-
dre (:o/72pre aux autres ;un marguillier comp-
t-able doit pareillement compter de Ton ad-
miniftration ; enfin un fondé de procura-
tion, les fermiers judiciaires, fequeflres,
gardiens , & généralement tous ceux qui
ont adminiliré le bien d'autrui , doivent un
compte.
Entre majeurs on peut rendre compte à
l'amiable ou en jufKce; mais on ne peut
compter qu'en juiHce vis-à-vis des mineurs
& autres qui jouifTent du même privilège.
Quand le compte eft rendu en juftice, il
eft exécutoire pour le reliquat, s'il y en a
un, fans qu'il îbit befoin d'attendre le ju-
gement pour cet objet , fauf en jugeant à
augmenter le reliquat, s'il y a lieu.
Le compte peut être rendu par bref état
ou être dreffé dans toutes les formes , par
recette , dépenfe , & reprife.
L'intitulé du compte contient les noms
& qualités du rendant compte & de l'oyant.
On exphque enfui te ordinairement dans
le préambule les objets du compte.
On porte enfuite fuccefllvement la re-
cette , la dépenfe & les reprilès , & chacun
Ûq ces objets efl quelquefois divifé en plu-
fieurs chapitres , félon que la matière y eil
difpofée.
Siie comptable a été commis par juflice,
on ne peut le pourfuivre que devant le même
juge pour rendre compte : mais quand il
n'a pas été commis par juflice, il faut le
pourfuivre devant fon juge.
Si le comptable refufe de rendre compte ,
on le condamne à payer quelque fomme ,
pour tenir lieu de ce qui pourroit en revenir
à l'oyant ; & fi c'ell: un dépofitaire de de-
niers royaux du public , on le condamne
par corps.
En matière de compte , on appointe ordi-
îujirement les parties à fournir débats &
C O M
foutenemens , parce que ces fortes cîe 3if^
enflions ne peuvent guère être ùtes à
l'audience. *'
Le jugement qui intervient fur un compte
doit en fixer le reliquat.
Le compte jugé , on ne peut point en de
mander la revifion ; mais s'il y a des erreurs
de calcul , omiflions de recette , faux &:
doubles emplois , on peut en demander la
réformation : ces fortes d'erreurs ne fe cou-
vrent point , mais elles fe réforment auK
frais du rendant ; excepté pour l'erreur du
calcul , au cas qu'elle ne vînt pas de fon fait ,
mais de celui du juge. voye\ Vordoiin. de
î 66 j , tit. xxjx.
Compte de bénéfice d'inven-
taire, j'. Bénéfice d'inventaire,
<S' Héritier bénéficiaire.
Compte par bref état , efl celui
qui fe rend par unfimple mémoire ; à ladifle-
rence d'un compte en règle , qui doit être en
la forme prefcrite parl'ordonnance'de 1667,
tit. xxjxj art. z j . Suivant l'arr. xx du même
tit. les majeurs peuvent compter devant des
arbitres ou à l'amiable ; on ordonne même
en jufHce que les parties compteront par
bref état , lorfque c'efl: entre les majeurs,
Voye\ ci-devant COMPTE.
Compte de clerc a maître, efl ce-
lui où le comptable porte en recette tout le
bénéfice qu'il a pu faire dans fa commiflîon »
& en dépenfe tous les frais qu'il a été obligé
de faire , & les pertes qu'il a cfîûyées. Les
fermiers du Roi font toujours reçus à comp-
ter de clerc à maître du produit de leurs
baux , & ne font point tenus d'en payer le
prix au-delà du bénéfice qu'ils en ont retiré ,
ou pu retirer.
Compte par colonnes ,efl celui dans
lequel la recette & la dépenfe , quoique li-
quidées à la fin de chaque année , ne font
compenfées qu'à la fin de la dernière année
feulement , ou de trois en trois ans ; à la
difîerence du compte par échelette , où la
compenfation fe fait année par année. Cho-
rier , en (zjurifpr. de Guypape , pag. ^^4>
,-apporte plufieurs arrêts pour l'une & l'autre
façon de compter : mais le compte par éc fie-
le tte efl le plus ufité , & paroît en effet le plus
équitable. Voye\ le dici, des arr. au mot
compte.
Compte
C O M
Compte des Comptables de la
Chambre des Comptes, i^oy. au Tome
VU l'article Chambre des Comptes.
Compte de Communauté , voye^
ci-deT'ant COMMVHAVTÈ DE BIENS.
Compte par échelette , eÛ celui
danslequeU'imputationde ladépenfefè fait
fur la recette année par année; à la différence
du compte par colonnes , où la dépenfe & la
recette font bien liquidées à la fin de chaque
année , mais la compenfation & imputation
ce s'en fait qu'à la dernière année feulement.
V. ci-devant COUVT'E PAR COLONNES.
Compte par livres , sous ù
DENIERS : l'ufage en fut introduit àhs l'an
755- ïl fut ordonné de le pratiquer par Phi-
lippe VI, le 22 Août 1343 , & encore le 26
Odobre fuivant , & en 1347 & 1348. Le
roi Jean ordonna la même chofe en 135 1,
I3')3&^3)4' ^oye\ le recueil des ordon-
nances de la troijieme race.
Cette manière de compter fut abrogée
par édit de l'an 1 577; ^^i ordonna de comp-
ter par écu.
Mais le compte par livres y fous & deniers,
fut rétabli par Henri IV , en 1602. EJ/ai
polit, fur le Corn. pag. 3.^.7.
Anciennement on avoit la liberté de fti-
puler & de compter par livres , fous & de-
niers parifis , ou en même valeur tournois ;
ce qui venoit de la différence de monnoies
parifis & tournois qui avoient cours en même
temps , ou qui l'avoient eu précédemment.
Mais l'ordonnance de 1667 , tit. xxvij ^
art. 1 5, ordonne de compter par livres, fous
ti deniers tournois , & non par parifis ; ce
qui s'entend pour les conventions nouvelles :
car pour les anciennes redevances qui font
dues en livres , fous & deniers parifis , il
eft toujours permis àt les compter fuivant
l'ancien ulage, conformément au titre , fauf
à les évaluer & réduire en fbmmes tournois.
Les HoUandois com.ptent par florins ou
livres de gros ; les Anglois , par livres fler-
iing; les Vénitiens par ducats, Ihid. p. ^80.
Compte NUMÉRAIRE,fignifiel€cro/;7p^e
d'une ou plufieurs lommes , par livres , fous
& deniers.
Compte de Société, roy. Société.
COMPTEDETuTELLEjVqy.TUTELLE.
COMPTEPAS, f m. inflrumentquiièrt
imefurer le chemin qu'on a fait à pié, ou
Tome VIIL
C O M 7S5
même en voiture. On l'appelle aufïî Odo^
mètre. V. OdometRE. (O)
COMPTER (Art de), Métaph. Logiq.
faculté de famé y attent. mém. opération de
l'efprit, qui joint par des noms & des fignes
dittérens , plufieurs choies d'une même
efpece , comme font les unités , & par ce
moyen forme l'idée dilHnde d'une dixaine ,
d'une vingtaine, d'une centaine; é:lix, 10^
vingt , 20 ; cent , 100.
La plupart des hommes favent compter y
fans entendre le moins du monde cette mé-
chanique , fans fe rappeller la peine & les
foins qu'ils ont eus pour l'apprendre , com-
ment ils y font parvenus y pourquoi ils ne
confondent pas les noms & les fignes, pour-
quoi cette variété de noms & de fignes ne
caufe cependant pas d'erreur , quelle en efl
larailbn, 6'c. Le ledeur pourra trouver ces
explications dans l'ouvrage de Locke fur
l'entendement humain , & dans celui de
M. de Condillac fur l'origine des connoif-
fances humaines. Nous nous bornerons à la
fimple expofition qu'ils donnent de l'opéra-
tion que l'efprit doit faire pour compter.
Compter, eft joindre à l'idée que nous
avons de l'unité qui efHa plus fimple , une
unité de plus dont nous faifons une idée col-
ledive que nous nommons deux ; enfuitc
avancer en ajoutant toujours une unité de
plus à la dernière idée coUedive ; enfin don-
ner au lïombre total , regardé comme com-
pris dans une feule idée , un nom & un
ligne nouveau & diflind , par lefquels on.
puifîè difcerner ce nombre de ceux qui font
devant & après , & le diflinguer de chaque
multitude d'unités , qui efl plus petite ou
plus grande.
Celui donc qui fait ajouter un à un , i à i ,
ce qui forme l'idée complexe de deux , 2 ,
& avancer de cette manière dans fon calcul ,
marquant toujours en lui-même les noms
difliiids qui appartiennent à chaque pro-
greflion , & qui d'autre part ôtant une unité
de chaque colledion , pour les diminuer au-
tant qu'il veut ; celui-là efl capable d'acqué-
rir toutes les idées des 'nombres dont \ts
noms &■ les lignes font en ufage dans fa lan-
gue ; car comme les difFérens modes des
nombres ne font dans notre efprit que tout
autant de combinaifons d'unités qui ne chan-«
gent point, & ne font capables d'aucune
Fffff
yî6 C O M
autre différence que du plus ou du moins ;
il s'enfuit que des noms & des fignes parti-
culiers font plus néceflaires à chacune de ces
combinaifons diftindes , qu'à aucune autre
etpece d'idées. La raifon de cela efl que fans
de tels noms & fignes qui les caraâérifent ,
nous ne pouvons faire aucun ufage des nom-
bres en comptant , fur-tout lorfque la com-
binaifon eu compofée d'une grande multi-
tude d'unités ; car alors il feroit difficile ,
ou prefque impoffible , d'empêcher que de
ces unités jointes enfemble fans avoir dif-
tingué cette colleâion particulière par un
nom & un figne précis , il ne s'en fafle un
parfait chaos.
C'eft-là la railon pourquoi certains peu-
ples ne peuvent en iiucune manière compter
au-delà de vingt , de cent , de mille ; parce
que leur langue, uniquement accommodée
au peu de befoins d'une pauvre & fimple
rie , n'a point de mots qui fignifient vingt ,
cent, mille; d^ forte que, lorfqu'ils font
obligés de parler de quelque grand nombre ,
ils montrent les cheveux de leur tête , pour
marquer en général une grande multitude
qu'ils ne peuvent nombrer.
Jean de Léry qui a été chez les Toupi-
nambes , peuple fauvage de l'Amérique mé-
ridionale au Brefil , nous apprend dans fon
voyage fait en la terre du Brefil , ch. xx.
qu'ils n'avoient point de nombre au-defîûs
de cinq ; & que lorfqu'ils vouloient expri-
mer quelque nombre au-delà , ils mon-
troient leurs doigts & les doigts des autres
perfonnes (^i étoient avec eux. -Leur cal-
cul n'alloit pas plus loin ; ce qui prouve qlie
des noms diilinâs font abfolument néce*^
fàires pour compter , & que pour aller aux
progrellîons les plus étendues du calcul ,
les langues ont befoin de dénominations
propres & de fignes propres , que nous
appelions chiffres , pour exprimer ces pro-
grefUons. Or voici comment cela s'exécute
dans notre langue,
Lorfqu'il y a plufieurs chiffres fur une
même ligne , pour éviter la confufion , on
les coupe de trois en trois par tranche t ou
feulement on laifîe un petit efpace vuide ,
& chaque tranche ou chaque ternaire a (on
nom. Le premier ternaire s'appelle uni te ;
le fécond y mille ; le troificme , million ; le
quatrième , billion i le cinquième , trillion /
C O M
le rixiemt,qitatrillion; puis quiiitilUor.^ fex-*
tillion^ feptilUon; ainfi de fuite , la dénomi-
nation des nombres & des fignes peut être
infinie.
Les enfans commencent affcz tard à comp-
ter y & ne comptent point fort avant ni
d'une manière fort aifurée , que long-temps
après qu'ils ont Tefprit rempli de quantité
d'autres idées ; foit que d'abord il leur man-
que des mots pour marquer les différentes
progreffions des nombres , ou qu'ils n'aient
pas encore la faculté de former des idées
complexes de plufieurs idées fimples & dé-
tachées les unes des autres ; de les difnofer
dans un certain ordre régulier, & de les
retenir ainii dans leur mémoire, comme il efl
nécefiaire pour bien compter. Quoi qu'il en
foit , on peut voir tous les jours des enfans
qui parlent & raifonnent affez bien , & ont
des notions fort claires de bien des chofes>
avant que de pouvoir compter jufqu'à vingt.
Il y a des perfonnes qui , faute de mémoire,
ne pouvant retenir différentes combinaifons
de nombres , avec les noms qu'on leur donne
parnpport aux rangs diftinds qui leur font
affignés , ni la dépendance d'une fi longue
fuite de progreffions numérales^ dans \st
relation qu'elles ont les unes avec les autres,,
font incapables durant toute leur vie de
compter y ou de fuivre régulièrement une
affez petite fuite de nombres : car qui veut
compter quatre-vingt , ou avoir une idée
de ce nombre , doit favoir que foixante-
dix-neuf le précède , & connoître le nom
ou le figne de ces deux nombres , félon qu'ils
font marqués dans leur ordre ; parce que ,
dès que cela vient à manquer , il fe fait une
brèche , la chaîne fe rompt , & il n'y a plus
aucune progreffion.
Il eft donc nécefîaire , pour bien compter^
1°. que l'efprit difiingue exactement deux
idées , qui ne différent l'une de l'autre que
par l'addition ou la fouf}raftion d'une unité :
2.°. qu'il conferve dans fa mémoire les noms
des différentes combinaifons depuis l'unité
jufqu'à ce nombre qu'il a à compter , & cela
fans aucune confufion , & félon cet ordre
exad dans lequel les nombres fe fuivent [es
uns les autres : 3**. qu'il connoiffe fans aucune
erreur chaque chifïre ou figne diftinâ ,
inventé pour repréfenter précifément la col-
leâion des diverfes unités , qui ont auiiii
C O M
chacune leurs noms diftiniâs & particuliers.
Il doit Cavo'ir bien que le figne 9 repréfente
la colledion que nous appelions neuf\ que
les deux chiffres i 9- repréfentent la col-
ledion que nous appelions dix-neuf ^ tandis
que les deux chiffres 91 repréfentent la col-
ledion que nous appelions quatre-vingt-on\e^
& ainfi de fuite pour raiîèmblagc de toutes
les colledions.
Nous ne difcernons différentes collec-
tions , que parce que nous avons des chif-
fres qui font eux-mêmes fort diflinds.
Otons ces chiffres , otons tous les fignes en
ufage , & nous appercevrons qu'il nous
eff impofnble d'en conferver les idées. Le
progrès de nos connoifîances dans les nom-
bres , vient uniquement de Texaditude avec
laquelle nous avons ajouté l'unité à elle-
même, en donnant à chaque pfogreffion un
nom & un figne qui la fait diitinguer de
celle qui la précède & de celle qui la fuit.
Je fais que cent ( locj^eff fupérieur d'une
unité à quatre-vingt-dix-neuf {^s) t^ in-
férieur d'une unité à cent un (loi) ; parce
que }e me fouviens que <)<) , ioo , loi ,
font les trois fignes choifis pour déligner
ces trois nombres qui fe fuivent.
II ne faut pas fe faire allufion , en s'ima-
ginant que les idées des nombres féparées
de leurs fignes foient quelque chofe de clair
& de déterminé : il efl même hors de doute
que , quand un homme ne voudroit compter
que pour lui , il feroit autant oWigé d'in-
venter des fignes , que s'il vouloit commu-
niquer (ts comptes.
Voilà comme s'exécute l'opération que
nous nommons compter. Cette opération cfï
la mefure de tout ce qui exiffe ; la méta-
phyfique , la morale , la phyfique , toutes
les fciences y font foumifes. Concluons avec
M, l'Abbé de Condillac , que pour avoir des
idées fur lefquelles nous puifïions réfléchir ,
nous avons befoin des fignes qui fervent de
liens aux différentes coUedions d'idées {im-
pies. ; & , pour le dire eji un mot , nos no-
tions ne font exades qu'autant que nous
avons inventé avec ordre les fignes qui doi-
vent les fixer. Des geffes , des fons , des
chiffres , des lettres , c'eff avec des inffru-
mens auffi étrangers à nos idées , que nous
les mettons en œuvre pour nous élever aux
connoifîances les plus fublimcs. Les maté-
C O M 787
riaux font les mêmes chez tous les hommes ;
mais l'adreffe à s'en fervir les diftingue. Voy.
Aritmétique , Binaire , Calcul ,
Caractère , Chiffre & Nombre,
Art. de M. le chevalier de Ja uco ur t.
Compter, {Comm?) on compte aux je-
tons ou à la plume ; c'efl dans l'un & l'autre
cas exécuter les différentes opérations d'aritiv
métique. Il fe dit i®. des paiemens qui fe
font en efpeces ou monnoies courantes ; /'/
m' a compté /^O livres : 2°. relativement aux
arrêtés de paiement ou de compte que font
entre eux les marchands ou négocians. Les
marchands doivent compter tous les lix mois,
tous les ans au moins avec les perfbnnes aux-
quelles ils font crédit , pour éviter les fins
de non-recevoir. *
Compter par bref état ; c'eft
compter fommairement fur de fimples mé-
moires ou bordereaux de compte. I^oye^^
Bordereau. "
Compter en forme ; c'eff lorfque le
compte qu'on prélente eft en bonne forme ,
ou bien libellé. On le dit encore lorfqu'on
examine un compte avec le légitime con-
tradideur.
Compter de Clerc a Maître ; c'eft
lorfqu'un comptable ne compte que de ce qu'il
a reçu , fans qu'on le rende refponfable d'au-
tre chofe que de la recette des deniers.
Compter une chofe à quelqu'un y c'eff
quelquefois lui en tenir compte, & quel-
quefois la mettre fur fon compte.
Compter PAR PIECE, c'cû compter en
détail ; ce qui eft oppofé d compter en gros,
VoyeT^ les dic^ionn. de Comm. Trév. Disti»
Chamb.
COMPTEUR , COMPTABLE ou RE-
CEVEUR , f m. ( Hifl. mod. ) eft un offi-
cier de l'échiquier , dont la fondion eff d*
recevoir tous les deniers qui font dûs à la
couronne d'Angleterre : à mefure qu'il re-
çoit y il fait paffer un billet par une pipe dans
la cour des tailles , où ce billet eff ramafîc
par les clercs de l'auditeur , qui fe tiennent
là pour écrire les mots portés par ledit bil-
let fur une taille , & pour remettre enfuite
le même billet aux clercs des peaux ou à fes
fubftituts. F. Echiquier , Taille , ùc.
Cela fait , les deux chamberlans députes
fendent la taille : ils ont chacun leur fceau ;
& pendant que le plus ancien député fak
Fffff2
7^8 C O xM
la ledure d'une moitié à-e la taille , le plus
jeune affiflé des deux autres clercs , exa-
mine l'autre partie.
Les compteurs font au nombre de quatre.
Leurs places fe donnent par le roi ; & outre
le maître clerc ou député , ils ont quatre
autres clercs pour faire les expéditions.
J^oy. Echiquier. Cet ufage eft fingulié-
rement propre à l'Angleterre ; les autres
nations ont une autre manière de recette
pour les revenus de leurs états ou fouve-
raineté. V. CHAMBRE DES COMPTES.
Chambers. (G)
Compteur , dans le commerce^ celui
qui compte , qui fait àts paiemens.
Compteur eft auffi le nom qu'on donne
il Paris à dix officiera de police , appelles
jurés compteurs Ù déchargeurs depoij^on de
mer frais , fec Ù falé , dont les tondions
font de compter & décharger toutes les
marchandifes de cette efpece , à mefure
qu'elles arrivent dans les halles & qu'elles
y font vendues, moyennant un certain
droit par chaque cent , millier , tonne ou
baril , fomme ou panier , de ces mar-
chandifes.
Les jurés mefureurs de fel , étalonneurs
des mefures de bois , qui font d'autres
officiers de police , font aulîi qualifiés de
compteurs de faline fur la rUiere ; parce
qu'ils font prépoiés pour compter toutes
ks marchandifes de ialines qui arrivent par
bateaux , & qui font déchargées dans les
ports. Die}, de Com. Trév. & Chamb. {G)
* COMP 1 OIR , f m. {Com.) a deux ac-
ceptions , l'une fimple , & l'autre figurée :
comptoir au fimple , c'efl une table ou un
bureau fur lequel un négociant expofe Çqs
marchandifes , paie ou reçoit de l'argent ,
Ùc. Au figuré , il fe dit d'un lieu que les
Européens ont fait , & qu'ils regardent
comme le centre de leur commerce dans
. l'Inde en Afrique , ^c,
COMPTORISTE, f. m. (Com.) terme
qui parmi les négocians fignifie un homme
de cabinet , expert dans les comptes , ou
un habile teneur de hvres.
COMPULSER, ( Jurifpr, > c'efî con-
traindre par autorité de ^fïice une peribnne.
publique à exhiber un afte quiefl entre ^ts
mains pour en tirer copie , partie préfente
ou duement appcllée ^ afin que cette copie
COM
fafle foi contre la partie qui a été préfente
ou appellée au compulfoire. Voye-{ ci-après
COMPULSOIRE. {A)
COMPULSEUR ,T. m. {hifl. anc.) nom
d'office fous les empereurs romains. Les
compulfeurs ctoient des gens envoyés par la
cour dans les provinces ,• pour faire payer à
l'épargne ce qui ne l'avoit pas été dans le
temps prefcrit.
Ces compulfeurs firent de fi grandes exac-
tions , lous prétexte de remplir leur devoir ,.
que l'empereur Honorius les cafîa par une
loi donnée en 412.
Les loix des Vifigoths font mention des
compulfeurs de l'armée Les Goihs appel-
loient ainfi ceux qui obligeoient les foldats
d'aller au combat ou à l attaque.
Caflien appelle aufii compulfeurs , ceux qui
dans les monaflere.^ indiquoient les heures
de l'office canonique , & qui avoient foin
que les moines fe rendifTent à l'office à ces
heures. C'ell ce qu'on nomme encore au-
jourd'hui dans les coiriraunautés eccléfiafti-
qucs , réglementaire y homme chargé de
veiller à l'exécution des réglemens. Cham-
bers. {G)
CuMI'UlSOIRE, {Jurifpr.y au htm
campe lleie , efl un mandement émané de
rautorité louveraine ou de jufHce , en vertu
duquel le dépofitaire d'une pièce efl tenu
de la reprélenter.
L ufac,e des compulfoires nous vient des
Romains : on^ en trouve des vefliges dans
le code théodofien , tit. de edend. L 6 &
au même titre du code de Juffinien , l. z.
Par cette loi, qui eft des empereurs Sé-
vère & Antonin , il é^l dit que le juge de^
vant lequel la caufe eft pendante , ordon-
nera que l'on repréiènte aux parties les ades
publics , tant civils que criminels , afin que
les parties les examinent , & puifïént s'éclair-
cir de la vérité d€ ces ades.
Il y a long-temps que les compulfoires
font aufîi d'ufage parmi nous ; en effet il en
eft parlé dans l'ordonnance de Charles VII
de l'an 1446 , art. ^G. qui porte que les
parties produiront dans trois jours", fans ef-
pérance d'autre délai , fous ombre àt com-
pulfoire ni autrement.
L'ordonnance de Charles VII de 1493 >
art. 5 J , ordonne qu'aucun délai & com-
pulfoire ne foit accordé par la cour , outre
C O M
les délais ordinaires pour produire , finon
que ce délai & compulfoire eût été demandé
en jugement en plaidant la caufe.
Le même règlement fut renouvelle par
Louis XII en 1507, art. 81 , & par Fran-
çois I en Odobre 153^ , ch. xv. art. z.
François I par fon ordonnance de i')39 »
art. z 77 , a encore prévu le cas du com-
pulfoire ^ en défendant aux notaires & ta-
bellions , de ne montrer & communiquer
leurs regiflres , livres &: protocoles , finon
aux contraâans , leurs héritiers & fuccel-
feurs , ou autres auxquels le droit de ces
contrats appartiendroit notoirement , ou
qu'il fut ordonné par juftice.
Enfin l'ordonnance de 1667 contient un
titre exprès des compulfoires & collations
de pièces ; c'ell: le titre xij.
A l'égard des coutumes , je ne connois
que celle de Bourboruiois , rédigée en 1 52.0,
qui fafle mention àes compulfoires. L'article
433 dit que les notaires & tabellions font
tenus & peuvent être contraints , par com-
pulfoire ou autrement , d'exhiber aux li-
gnagers , feigneurs féodaux & directs , la
note & contrat d'aliénation par eux reçu ,
& leur en donner copie à leurs dépens
s'ils en font requis , Ç^c.
La coutume de Nivernois , ex. xxxj. art.
15. contient une difpofition à-peu-près lèm-
blabie pour l'exhibition des pièces qui efl due
par \ts notaires ; mais elle ne parle pas
de compulfoire.
Anciennement l'ordonnance du juge fuf-
fifoit pour auforifer une partie à compulfer
une pièce ; mais depuis que l'on a introduit
l'ulage des lettres de juflice en chancellerie ,
il eft néceffaire d'obtenir des lettres de
compulfoire.
Ces lettres font adrefTécs à un huiffier ;
enforte qu'il n'y a qu'un huiffier qui puilïe
les mettre ii exécution.
Elles contiennent l'expofé qui a été fait
par l'impétrant , qu'il a intérêt d'avoir con-
noiflànce de certaines pièces , dont on lui
refufe ou dont on pourroit lui refufer la
communication fous de vains prétextes ;
qu'il délire en avoir une copie authentique ,
& qui puifle faire foi contre fa partie.
Les lettres donnent enfuite pouvoir à
Ihuiffier de faire commandement à tous
Biotaires , tabellions , greffiers , curés , vi-
C O M 7gp
caires , gard^s-regiflres , & autres perfonnes
publiques , de repréfenter tous les titres ,
contrats , aveux , regiftres , & autres ades
qui feront requis par l'impétrant , pour en
être par l'huillier fait des copies , extraits ,
vidimus & collations , partie préfente ou
duement appellée , pour fervir à l'impé-
trant au procès dont il s'agit , & par-tout
ailleurs ; & en cas d'oppoiition , refus ou
délai , l'huiffier eft autorifé à affigner pour
en dire les caufès.
On voir par-là qu'un compulfoire peut
avoir deux objets.
L'un d'avoir communication d'une pièce
que l'on n'a pas , pour en prendre une co-
pie en antier ou par extrait , ou pour vidi-
mer & collationner la copie que l'ona avec-
l'original , & confronter li elle efl pareille.
L'autre objet que l'impétrant fe propofe
en appeilant fa partie au compulfoire , eft
d'avoir une copie qui puifTe faire foi à l'égard
de celui contre lequel il veut s'en fervir ;
c'efl pour cela que l'on alligne la partie pour
être préfente, fi bon lui femble , au pro-
cès-verbal de compulfoire.
Autrefois on affignoit la partie à fe trou-^
ver à la porte d'une églifè ou autre lieu pu-^
blic , pour de-là le tranfporter ailleurs ; mais
1 ordonnance de i66j a abrogé un circuit
inutile , & veut que l'afîîgnation foit donnée
à comparoir au domicile d'un greffier ou
notaire, foit que les pièces foient en leur
poflefïion ou entre les mains d'autres per-
lonnes.
Quoique l'ordonnance ne nomme que les
greffiers & notaires, l'ufage efl que l'on'
peut auffi afligner au domicile des curés,
vicaires & autres perfonnes publiques , pour
■les pièces dont ils font dépolitaires.
Il en efl de même lorlque l'on veut com-
pulfer une pièce entre les mains de l'avocat
de la partie adverfe ; l'aiEgnation fe donne
au domicile de l'avocat, & le compulfoire
fe fait entre les mains du clerc, qui eftper-
fonne publique en cette partie.
Un avocat qui a en communication le fàc
de fon confrère , ne fait point compulfer les
pièces entre fes mains ; il commence par '
le remettre , pour ne point manquer à la*
fidéhté qu'ils obfervenr dans ces communia
cations : mais la partie peut faire compulfer"
la pièce, comme on vient de le dire^j
75?o C O M
entre les mains de ravocat adverfe , parce
que la communication des facs rend les pie-
ces communes , au moyen dequoi l'on ne
peut empêcher le compulfoire des pièces qui
Du refte on ne peut obliger un particulier
de laifler compulfer des pièces qu'il a entre
fes mains , mais qu'il n'a pas produites ni
communiquées ; car la règle en cette ma-
tière eil que nemo tenetur edere contra fe.
LU'. /. § 3. & leg. 4. cod. de edendo.
Ainfi , hors le cas de pièces produites ou
communiquées par la partie , oa ne peut
compulfer que les pièces qui font dans un
dépôt public , ou qu'un tiers veut bien re-
préfenter devant un officier public.
Les fenrences , arrêts & autres jugemens ,
les ordonnances , édits , déclarations , les
regifires des infinuations & autres aftes fem-
blabies , qui par leur nature font deflinés à
être publics , doivent être communiqués par
ceux qui en font dépofitaires , à toutes
fortes de perfonnes , fans qu'il foit befoin
pour cet effet de lettres de compulfoire.
Ces fortes de lettres ne font nécefîaires
que pour les contrats , telîamens & autres
ades privés ; lefquels , aux termes des or-
donnances , ne doivent être communiqués
qu'aux parties , leurs héritiers , fuccefîeurs
ou ayans caufe. C'efl pourquoi , lorfqu'un
tiers prétend avoir intérêt de les compullèr_,
il faut qu'il y foit autorifé par àts lettres.
Si celui qui eft dépolitaire de la pièce re-
fufe de la communiquer nonobflant les
lettres , en ce cas on le fait afligner pour dire
les caufes de fon refus , & la juftice en dé-
cide en connoiilance de caufe.
Les affignations données aux perfonnes
ou domiciles des procureurs des parties ,
ont le même effet pour les compulfoires que
fi elles avoient été données au domicile des
parties.
Le procès-verbal de compulfoire & de
collation de pièces , ne peut être commencé
qu'une heure après l'échéance de l'afllgna-
tion , & le procès-verbal doit en faire
mention.
Enfin fi la partie qui a requis le compuL
foire , ne compare pas , ou fon procureur
pour lui , à l'affignation qu'il a donnée , il
fera condamné à payer à la partie qui aura
£;oraparu , U fomme de vingt liv. pour fes
C O M
dépens , dommages & intérêts , & les frais
de fon voyage , s'il y échet : ce qui fera
payé comme frais préjudiciaux. Voye^^ le
recueil des ordonnances de Néron ; la confé-
rence de Guenois , liv. IlL tit. jv. des délais
& défauts y Bornier , fur le titre xij de V or-
donnance. {A)
* COMPURGATEUR , f m. {Jurif^
prudence. ) Dans l'ancienne Jurifprudencc
civile & criminelle , un accule étoit reçu à
fe purger par ferment de l'imputation
formée contre lui , toutes les fois que la
notoriété du fait ne préfentoit pas la preuve
la plus claire & la plus direde ; & s'il
déclaroit par ferment fon innocence , il
étoit abfous. Cet ufage étoit propre à
afliirer à la fraude le fecret de l'impunité ,
en rendant la tentation du parjure fi puif-
lante , qu'il n'étoit pas aifé d'y réfifter. On
éprouva bientôt les dangereux effets d'une
femblable coutume ; pour y remédier , lej
loix ordonnèrent que les fermens feroient
adminifirés avec un appareil impofant &
propre à infpirer aux hommes une crainte
falutaire de fe parjurer ; ce moyen fut d'un
foible fecours , on fe familiarifa bientôt
avec ces cérémonies , qui en irnpoferent
d'abord à l'imagination , mais dont l'effet
s'affoiblit infcnfiblement par l'habitude.
Ceux qui ne craignoient pas d'outrager la
vérité , ne pouvoient être" long-temps re-
tenus par l'appareil d'un ferment : alors on
exigea que l'accufé comparût avec un cer-
tain nombre d'hommes libres , {qs voifms
ou ics parcns qui , pour donner plus de
poids à fon ferment , jurafîent eux-mêmes
qu'ils croyoient que l'acculé difoit vrai :
ces efpeces de témoins furent appelles co/n-
purgateurs ; leur nombre varioir félon l'im-
portance de l'objet qui étoit en litige , ou
la nature du crime dont un homme étoit
accufé : dans certains cas , il ne fclloit pas
moins que le concours de trois cents de ces
témoins auxiliaires , pour faire abfoudre l'ac-
cufé. Cette nouvelle formalité d'appelier des
compurgateurs , n'offrit encore qu'une ref-
fource plus apparente que réelle contre le
menfongc & le parjure ; dans ces ficelés
d'ignorancç , où l'on n'avoit pas des idées
faines de morale , un accufé trouvoit fans
beaucoup de peine parmi ceux qui lui
étoient attachés par les liens du fang ou de
C O M
ramitië , des gens prêts à le fervir contre
leur confcicnce & aux dépens de k vérité.
COMPUT, f. m. {ChronoL) fignifie pro-
prement caleul\ mais ce mot s'applique par-
ticulièrement aux calculs chronologiques ,
néceflaires pour conftruire le calendrier ,
c'eil-à-dire pour déterminer le cycle fo-
laire , le nombre d'or , les épades , les
fêtes mobiles , &c. Voye-{ les différens
mots. (O)
COMPUTISTE , r. m. {Hifi. ecdef.)
efl un officier de la cour de Rome , dont
la fondion efl de recevoir les revenus du
facré collège.
* COMTE, f. m. {Hifl. anc.) lesuns font
remonter ce titre jufqu'au temps d'Augufte ;
d'autres jufqu'au temps d'Adrien. Les pre-
miers prétendent qu'Augufle prit plulieurs
fenateurs pour l'accompagner dans Tes
voyages , & lui fervir de confeil dans la
décifion des affaires ; ils ajoutent que Galien
fupprima ces comités ou comtes , défendit
aux fenateurs d'aller à l'armée , & que fes
fuccelî'eurs ne reprirent point de comités ou
comtes. Les féconds difent que les comtes
furent des officiers du palais , qui ne s'é-
loignoient jamais de la perfonne de l'em-
pereur , & qu'on en diftinguoit du premier y
du fécond & du troilieme ordre , félon le
degré de confidération & de faveur qu'ils
avoient auprès du prince.
Il y a apparence qu'en dérivant le nom
de comte du cornes des Latins , comme il eft
vraifemblable qu'il en vient , ce titre eft
beaucoup plus ancien qu'on ne le fait. Au
temps de la république , on appelloit c<?/;2/'/-^.r
les tribuns , les prâ:ets , les écrivains , Ùc.
qui accompagnoient les proconfuls , les
propréteurs , Ùc. dans les provinces qui leur
étoient départies , & ils étoient leurs vice-
gérens & leurs députés dans les occafions
où ces premiers magiftrats en avoient
befoin.
Sous quelques empereurs , le nom de
comte fut plutôt une marque de domefiicité ,
qu'un titre de dignité. Ce ne fut que fous
Conftantin qu'on commença à défigner par
le nom de comte une perfonne conftituée en
dignité. Eufebedit que ce prince en fît trois
claffes , dont la première fut des illufires y
la féconde des cîarijjîmes ou conjide're's , &
la troifieme des très-parfaits : ces deniers
C O M 791
avoient des privilèges particuliers ; mais il
n'y avoit que les premiers & les féconds qui
compofaiient le fénat.
Mais à peine le nom de comte fut-il un
titre , qu'il fut ambitionné par une infinité
de particuliers, & qu'il devint très-com-
mun , & par conféquent peu honorable. Il
y eut des comtes pour le fervice de terre ,
pour le fervice de mer , pour les affaires
civiles , pour celles de la rehgion , pour la
jurifprudence , Ùc. Nous allons expofer ea
peu de mots les titres & les fondions des
principaux officiers qui ont porté le nom
de comte , félon l'acception antérieure a
celle qu'il a aujour(^'hui dans l'Europe.
On nomma comes Egypti , un miniflre
chargé de la caifTè des impôts fur la foie ,
les perles , les aromates & autres marchan-
difes précieufes. Son pouvoir étoit grand ;
il ne rendoit compte qu'à l'empereur. Le
gouvernement d'Egypte étoit attaché à fa
dignité. On le défignoit auffi quelquefois
par comes rationalis fummarum. Cornes
aerariiy ou comes largitionum ; une efpece
d'intendant des finances , le garde de leurs
revenus , &: le diflributeur de leurs lar-
gefîès. Comes Africx ou dux limitaneus y
un gouverneur en Afrique des fortereifes
& places frontières ; il commandoit à
feJze fous-gouverneurs. Comes Alanus ,
le chef d'une compagnie de fbldats Alains ;
il étoit fubordonné au magijîer mili-
tum. Comes annonce. , un ofÉcier chargé
par l'empereur de l'approvifionnemcnt &
de la fubfift'ance générale de Conflantino-
ple. Comes archiatrorum facri palatii y un
chef des archiâtres du facré palais , ou le
premier médecin de l'empereur ; il fut du
premier , du fécond , ou du troifieme
ordre , félon le plus ou le moins de crédit
qu'il eut auprès du prince. Comes Argen-
toratenfis , un commandant de la garnifon
de Strasbourg. Comes auri , un garde de^
la vaiiTelie d'or <k d'argent de l'empereur ,
ou un officier chargé de mettre en or l'ar-
gent des coffres de l'empereur; on l'appel-
loit aulll, le diredeur fcrinii aureœ majf<& y
ou un infpedeur général des mines. Cornes
Britannice y celui qui commandoit fur les
côtes de cette province pour les Romains ;
il s'appeiloit 9XiS\comes maritimi trxcfàs y co^
mes littorisSaxonici nerBritanniam. Cornes
752 cou
buccinatorttm y un chef des trompettes , un
infpecteur &: juge de cette^ troupe. Cornes
cajîrenjis , un chef des officiers de cuifine
ou un pourvoyeur général du camp ; ou
dans àQs temps plus reculés , un -(eigneur
d'un château fortifié. Cornes cataphracîanus y
un chef des cuirailiers. Comescivitatis^ le pre-
mier magiftrat d'une ville. Cornes clibana-
rius y le même quQ cataphi aâarius . Cames
commerciorum y un infpcdeur général du
commerce \ il avoit fous lui les intendans
du commerce de l'Orient , de l'Egypte ,
de la Méfie , de la Scythie , du Pont , &
de l'Illyrie ; ils vdlloient tous aux impor-
tations , exportations yg^^c. & ils étoient
foutenus dans leurs fondions par une mi-
lice pai-riculiere. Cornes [facri conjifiorii ,
un officier de confiance de l'empereur ; il
aiïiftoit à la réception àts arabafladeurs ,
il] avoit place au confeil, lors même qu'on
y déiibéroit des affaires les plus lècrettes :
ce corme fîit du premier ordre. Cornes con-
tariorum , un chef des piquiers. Cornes
difpojinonum , un minillre de la guerre ;
il avoit fa caifïe , dont il étoit appelle prin-
ceps fui fcrinii y in capite conflitinus y prior
in fcrinio. Cornes dôme flicorum y un chef des
gardes de l'empereur : fa fonâion en paix
& en guerre étoit de veiller à la perfonne
de l'empereur , fans s'en éloigner : il abula
quelquefois de fa place. Il y avoit des gar-
der domefliques à pié & à cheval , on ap-
pelloit ceux-ci /?roff^or^j-^ & on les com-
prenoit fous le nom de prcctoriani. Cornes
domorum y un infpe<fl:eur des batimens
royaux ; il portolt en Cappadoce le nom de
cornes domûs divincc. Cornes (quorum regio-
Tum , un grand écuyer de l'empereur. Cornes
excubitorum y un chef des gardes de nuit.
Cornes exercitûs y cornes rei militaris y
un général d'armée. Comes fœderatorum y
un chef des foldats étrangers & dts fou-
doyés. Comes formarum , un infpedeur des
?.queducs ; on l'appelloit aufli œdilis , ou
curator formarum. Forma fignifioit une
charpente deffinée à foutenir un canal de
fcrique ou de pierre. Cet infpedcur étoit
fubordonné ^uprœfeciuswhis. Comes gildo-
niaciy un infpeâeur des domaines que Gildo
poffédoit en Efpagne , & qu'il perdit avec
la vie ; il étoit fubordonné au comes rerum
jfrivawnim. Cojjus horreorum,\xn infpe^eur
C O M
des greniers. Comes Italice , le gouverneur
des frontières de l'Italie. Comes Italicianus
ou C '..Uicanus y le tréforier de la chambre
des domaines des Gaules & d'Italie ; on
l'appel la quelquefois comes largitiônum, ,
quand fon difirid fut borné à un diocefe.
Comes largitionum comitatenjlum y un tré-
forier de l'empereur , & un difiributeur de
fês bienfaits privés ; il le fuivoit en voyage ;
(es commis s'appelloient largitionales cemi-
tatenfes y de largitionibus y de privatis , de
facris y de comitatenjibus y &c. (ynonyraes
entre eux, comme largitioy œrariumyfifcusy
&c. Comes largitionum pi ii'aturum, un con-
trôleur des revenus perfbnnels & propres de
l'empereur , & dont il ne devoit aucun
compte à l'état ; (es fubalternes s'appel-
loient rationales reiprii'atce ; leur chef por-
toit le nom de proefeclus ou procurator rei
privatce ; A veilloit aux bona caduca , vaga
municipia,^ c. Comeslargitionumfacrarum^
un contrôleur dts finances deffinées aux
charges de l'état , comme les honoraires dts
magjllrats , la paie des militaires, ^c. on
l'appelloit quelquefois co/nej-/j<:mrz//7Z , co^
mes largitionum y comes facrarum rémunéra-
tionum. Il régloit les affaires du fifc ; il en
faifoit exécuter les débiteurs ; il fournilîbit
à l'entretien des édifices publics ; il avoit
un dillrid très-étendu ; il jugeoit à mort ;
il connoifloit des trélors trouvés , des im-
pôts , des péages , du change , des répara-
tions , des confifcarions , Ùc. Comes legumy
un profefleur en droit. Comes limitis ou Hmi-
taneus, un gouverneur de forterefles limitro-
phes. Comes marcarum , le même que limi-
taneus. Comes maritimœ^un gouverneur des
côtes ; Ces fubalrernes s'appelloient rices-co^
mites maritimœ,C ornes matrona^un officier
chargé d'accompagner une femme ou une
fille ; c'étoit une imprudence que de n'en
pc int avoir. Comes metallorumperlllyricum^
un infpedeur des mines de ce pays ; il étoit
{ourmsmicomes largitionum facrarum. Comes
notariorum , un chef des gens de robe , au-
trefois un chancelier. Cowej- numeri cohortis^
un chef d'une troupe de fix compagnies de
foldats qu'on appelloit numerus .Comes obfe-
quii , un maréchal-des-logis de l'empereur
en voyage. Comes ojficiorum, le chef de tous
les officiers fervans au palais de l'empereur.
Comes Orientisj un vicergérent duprafec/us
pratorii
C O M
firatoru Orienùs ; Il s'appelloit ^vS^prafes
Oriemis. Cornes pagi , un bailli d'un village.
Cornes portuum , un infpedeur des ports ,
(ur-tout de Rome & de Ravennes. Cornes
palatinus , ou cornes â latere , un juge de
toutes les aiiaires qui concernoient l'empe-
reur , fès officiers , fon palais , la maifon ;
c'efl: delà que defcendent les princes pala-
tins d'aujourd'hui, & [ts comtes palatins. Il
yavoit quatre princes palatins , un en Ba-
vière , un en Suabe , un en Franconie, &
un en Saxe , il n'en refte que deux , qui
ont coniervé le vicariat de l'empire. V^oy. c/-
ûjDr^j Comtes Palatins,&cz Palatins
Tamc/e Princes Palatins. Comejpam-
moniifacri , contrôleur des revenus propres
de l'empire ; il ëtoit lubordonné au cornes
pnvatarum domûs divince. Cornes prœfens y
un chef des gardes de iervice. Cornes provin-
ciœ ^o\x recior prov'mci<z y un gouverneur de
province ; il étoit comte du premier ordre; il
commandoitles troupes en guerre ; il jugeoit
à mort pendant la paix : les landgraves de
l'Allemagne y font remonter leur origine.
Cornes reimilitarisÇeu exercitûs ou militum,
un général chargé de la confervarion d'une
province menacée de guerre. Comes rei pri-
vâtes ^ ou rerum priratarutm, ou largitionum,
voyez plus haut. Comes remiinerationum fa-
cmnim , voyez plus haut. Comes riparum ^
alvei , ou plus anciennement curator alvei ,
un infpeôeur du Tibre ; il étoit fubordonné
au préfet de la ville. Comes fagittarius , un
chef d'archers : ces archers faifoient partie
de la garde achevai de l'empereur. Cav^fj-
fcholœ , un chef de claiîe : les officiers du
palais étoient diflnbués en claffes ; il yavoit
celles des cutariorum ^ des vexillariorum ,
àçsjî'entiariorum^ des exceptorum,(^es char-
tulariorum y &c. Ceux qui compofoient ces
clafles fe nommoient fcholares ; & leurs
chefs , comités fcholarum. Ils étoientfubor-
donnés au magifter officiorum. Comes va-
cans , un officier vétéran. Comes vejliaii^ un
garde du linge de l'empereur ; il s'appelloit
auiiî lineœ l'eJJis magifler : il étoit lous le
comes largitionum privatarum.
Tous CQs comtes jettent beaucoup d'obf-
curité & d'embarrasidans les auteurs du droit
romain qui en ont fait mention. On honora
de ce titre , outre 1^ officiers dont nous ve-
nons de parler , ceux qui avoient biea mé-
Tome VIlL
C O M 7^1
rite de l*état ; comme des profefrcurs «n
droit qui avoient vingt-ans d'exercice. Dans
la bas de l'empire , le premier comte s'appella
protocomes.
*
Comte , ( Hijl, mod. ) U qualité de
comte diffère beaucoup aujourd'hui de ce
qu'elle étoit anciennement : elle n'efl ni auiS
importante qu'au temps des premiers comtes
de la nation , nitiuffi commune' qu'au temps
àts premiers comtes de l'empire.
Le comte que les Latins appelloient comes
à <:ommeanda , ou à comitando , que les
Allemands appelloientgrao/", que les anciens
Saxons ont appelle eoldermati , que les Da-
nois nomment ear/wj^, & les Anglois earl^ efl
parmi nous un homme noble qui poffede
une terre érigée en comté , & qui a droit de
porter dans fes armes une couronne perlée ,
ou un bandeau circulaire orné de trois pier-
res précieufes , & furmonté ou de trois
groffes perles , ou d'un rang de perles qu î
fe doublent ou fe triplent vers le milieu &
le bord (upérieur du bandeau , ôc font plus
élevées que les autres.
Ce titre d'honneur ou degré de noWefle ,
cft immédiatement au delîiis de celui de vi-
comte , & au deflbus de celui de marquis.
Les empereurs firent des premiers comtes
de leurs palais , des généraux d'armées , &
àts gouverneurs de provinces. Ctux qui
avoient été vraiment comtes de l'empereur
avant que de pafTerà d'autres dignités, re-
tinrent ce titre : d'où il arriva que ceux qui
leur fuccéderent dans ces dignités , fe firent
appeller co/;:^^ j', quoiqu'ils ne l'eufTent point
été réellement. Les anciens comtes du palais,
fous \qs empereurs , s'appeiloient d'abord
comités & magiflri ; ils fupprimerent dans la
' fuite le magiflri. Dans ces temps les ducs
n'étoient diflingués Acs comtes que par la
nature de leurs fondions. Les comtes éto'iQnt
pour les affaires de la paix ; les* ducs pour
celles de la guerre. La grande diflindion
qui exille maintenant entre ces dignités ,
n'eil pas fort ancienne.
Les François, les Allemands, £'<:. en fe
répandant dans les Gaules , n'abolirent point-
la forme du gouvernement romain , & cpn-
fcrverent les titres de comtes i^ àcduesqnQ
portoient les gouverneurs de provinces &
de villes. Sous Charlcmagne , les comtes
étoient gouverneurs & juges àes villes &
GgSSS
des provinces. Les comtes qui jugeoient &
gouvernoient des provinces , fupérieurs des
.comtes qui ne jugeoient & ne gouvernoient
que des villes , étoient les égaux des ducs
qui ne jugeoient & gouvernoient des pro-
vinces que comme eux , & qui étoient pa-
reillement amovibles.
Ce fut fous \qs derniers de nos rois de la
féconde race , que ces feigneurs rendirent
leurs dignités héréditaires ; ils en uiurperent
même la fouveraineté , lorfque Hugues
Capet , qui en avoit fait autant lui-même
pour le duché de France & le comté de Paris,
parvint à la couronne. Son autorité ne fut
pas d'abord alïèz affermie pour s'oppofer à
cts ufurpations ; & c'eft delà qu'eft venu
le privilège qu'ils ont encore de porter une
couronne dans leurs armes. Peu-à-peu les
comtés font revenus à la couronne , & le
titre de comte n'a plus été qu'un titre accordé
par le roi , en érigeant en comté une terre
où il fe réferve jurildiftion & fouveraineté.
D'abord la claufe de réverfion du comté
à la couronne au défaut d'enlans mâles , ne
fut point mife dans les lettres patentes d'é-
rcâ:ion ; mais pour obvier à la fréquence -de
ces titres , Charles IX l'ordonna en I5^4-
Cette réverfion ne regarde que le titre , &
non le domaine , c^ui paffe toujours à ceux
à qui il doit aller lelon les loix , mais fans
attribution de la dignité.
Il y a eu entre \qs marquis & les comtes
des contefîations pour la préféance. On allé-
guoit en faveur des c:o/72f^j- qu'il y avoit àcs
comtes pairs y & non des m.arquis ; cepen-
dant la chofe a été décidée pour les marquis :
ils précèdent les comtes , quoique leur titre
foit très-moderne en France ; il ne remonte
pas au delà de Louis XII , qui créa marquis
de Trans un feigneur de Fillufîre & ancienne
inaifon de Villeneuve. Le titre de marquis
eft originaire d'Italie.
Comme' l'on donnoit anciennement le
nom de comte aux gouverneurs de villes & de
provinces , dqnt une des fondions étoit de
conduire la nobleffe à l'armée , & que quel-
ques capitaines prirent le même titre , fans
y être autorifés^ par un gouvernement de
rilie ou de province j, on fit dans la fuite du
nom de comte celui de comité , qui eft refîé
â ceux qui commandent les forçats fur nos
galères ; on fit auffi celui de vicomte , qui, de
C O M
même que les anciens comtes étoient juges
dans leurs villes ou provinces , font refîés
juges dansquelques-unes de la Normandie »
& ailleurs ; à Paris même , le prévôt de la
ville délégué par le comte , eil encore juge
dans le vicomte de Paris.
Nos ambalfadeurs & plénipotentiaires
font dans l'ufagede prendre le titre de comte ^
quoiqu'ils n'ajent point de comté ; ils
croient ce relief néceflaire pour avoir dans
le cours de leur négociation ^ un degré de
confidération proportionné à l'importance
de leurs fondions.
En Angleterre , on appelle comtes les fils
des ducs , & vicomtes les fils des comtes.
Le titre de comte s'éteignoit originairement
avec celui qui le portoit. Guillaume le con-
quérant le rendit héréditaire , en récora-
penfa quelques grands de fa cour , l'annexa
à plufieurs provinces , & accorda au comte
pour fourenir (on rang , la troifieme partie
des deniers des plaidoieries , amendes , con-
fi (cations , & autres revenus propres du
prince ^ dans toute l'étendue de fbn comté.
Cette forame fe payoit par l'échevin de la
province. Aujourd'hui les comtes font créés
par chartre ; ils n'ont ni autorité , ni reve-
nus dans les comtés dont ils portent les
noms : le titre de comte ne leur vaut qu'une
penfion honoraire fur l'échiquier. Le nom-
bre des comtes étant devenu plus grand que
celui des comtés proprement dits ; il y en a
dont le comté efi: défigné par le nom d'une
portion diftinguée d'une province ou d'un
autre comté , par celui d'une ville , d'un
village, d'un bourg , d'un château, d'un parc.
Il y a même deux comtes ians nom de terre ;
\(^comte de Rivers, & le Comte Poulet. Il y a
une charge qui donne le titre de comte-maré-
chal V. ci-après COMTE-MARÉCHAL.
La cérémonie de création de comte fè fait
en Angleterre par le roi , en ceignant l'épée ,
mettant le manteau fur l'épaule , le bonnet
& la couronne fur la tête , & la lettre pa-
tente à la main , à celui qui eft créé , que le
roi nomme confanguineus nofler) mon cou-
fm, & à qui il donne le titre de très-haut Ù
très-noble feigneur. Les perles de la couronne
du comte anglois font placées fur des pointes
& extrémités de feuillages. On y fait moins
de façon en France. Lorfque la terre efl érigée
en comté par lettres patcates, le titulaire &
C O M
là poftérité légitime prennent le titre c^e
comte y {ans autre cérémonie que les enrégif-
tremens requis des lettres d'éredion.
* Comte-maréchal , (-^(^. mod.)
c'eil en Angleterre un officier de la cou-
ronne. Il avoit anciennement plufieurs tri-
bunaux , tels que la cour de chevalerie ,
prefqu'enfevelie dans l'oubli, & fa cour
d'honneur qu'on a rétablie depuis peu. Il
juge, à la cour delà maréchauffée , les cri-
minels pris dans les lieux privilégiés. L'offi-
oier immédiatement fous le comte-mare-
chai , s'appelle chei-'alier. -maréchal. Le col-
lège des hérauts d'armes efl fous la jurifdic-
tion du comte. Cette dignité efl héréditaire
dans la famille de Howard. La branche prin-
cipale en efl maintenant revêtue ; mais des
raifons d'état n'en permettent l'exercice que
par députés.
'^Comtes de Lyon, de Brioude ,
DE Saint-Pierre DE Maçon jèc. ce
font des chanoines décorés de ce titre, parce
qu'anciennement ils étoient feigneurs tem-
porels des villes où leurs chapitres font
fitués. Nos rois ont retiré la plupart de ces
feigneuries, & n'ont laiffc que le nom de
comtes aux chapitres. Il n'y a plus que quel-
ques prélats , comme les comtes Ù pairs , à
qui il refle , avec le titre , des droits feigneu-
riaux , mais fubordonnés à ceux de la fbu-
veraineté.
L'ordre des Comtes de Lyon fut inflitue
par le roi en vertu des lettres-patentes de
fa majeflé , données à Verfailles au mois
de mars 1745 , regiflrées au parlement le
7 avril fuivant.
La marque de CQt ordre efl une croix à
huit pointes, émaillées de blanc, bordées
d'or ; quatre fleurs-de-lis d'or dans les an-
gles aigus ; quatre couronnes de comtes ,
d'or , à neuf perles d'argent fur angles
obtus ; au centre efl l'image de faint Jean-
Baptifle , pofée fur une terrafTe de fynople,,
avec cette légende , prima fedes Galliarum\
au revers de la crt)ix efl la repréfentation
du martyre de faint Etienne , avec la légende
€cclejice comitum Lugduni. {G. D. L. T.)
Comtes Palatins, {Jurifpr. & Hifi.)
ïl y a dans l'Empire un titre de palatin qui
n'a rien de commun avec celui des princes
palatins du Rhin ; c'efl une dignité dont
l'empereur décore quelquefois des gens de
C O M 79 j
lettres : on les appelle comtes palatins ; &
félon le pouvoir que leur donnent les lettres
patentes de is'empereur , ils peuvent donner
le degré de dodeur , créer des notaires y,
légitimer des bâtards , donner des couron-
nes de laurier aux poètes , annoblir des ro-
turiers , donner des armoiries , autorifer
des adoptions & des émancipations , accor-
der des lettres de bénéfice d'âge , &c. mais
cette dignité de comte efl vénale & s'accor-
de facilement ; on fait aufïî peu de cas de
ce qui efl émané de ces comtes. Les papes
font aufîi de ces comtes palatins. Jean
Navar , chevalier & comte palatin , fut
condamné par arrêt du parlement de Tou-
loufe , prononcé le 2,5 mai 1462 , à faire
amende honorable & demander pardon au
roi pour les abus par lui commis , en oc-
troyant en France des lettres de légitima-
tion , de notariat , & autres chofec dont
il avoit puifîânce du pape ; ce qui étant
contraire à l'autorité du roi, le tout (ut
déclaré nul & abufif. Vojei le tableau de
l'empire germanique , page loy. ^ les
arrêts de Papon , page 2.4.8. {A)
* COMI'E , f m. {Hift. anc.) L'Em-
pire fut divifé fous Conflantin en deux dé-
partemens appelles comitatus ; ainii le mot
comté n'a pas dans cet article une acception
relative au mot comte^ Hift. anc. Ces com-
tés étoient des confeils dont les préfets
s'appelloient comités. Il y ea a cependant
qui font remonter l'origine de nos comtes à
ces préfets.
Comté , {Hifi. mod.) fignifîe le domai-
ne d'un feigneur qualifié du titre de comte»
Voyei Comte. ||
En Angleterre le mot de comté efl fyno-
nyme à celui de shire : or une shire efl une
52^. partie du royaume d'Angleterre , y
compris la province de Galles , le royaume
ayant été divifé en 52- portions , pour en
rendre le gouvernement plus facile , & l'ad-
miniflration de la juflice , dans les diffé-
rentes provinces, plus ponduelle & mieux
réglée.
Ces comtés font fubdivifés en râpes ,
comme l'efl celui de Sulîex , ou en lathes ,
ou en wapentakes , ou en hundreds^ c'efl-à-
dire en centaines ; & ces portions de com,"
tés en dixaines.
On nomme tous les ans , A la S. Michel,
Ggggga
79^ C O M
des officiers appelles shérif:^ pour la manu-
tention des loix dans ces différentes comtés'^
excepté celles de Cumberlandf de Wefl-
Morland , & de Durham.
Cet officier a deux font^ions diffierentcs ;
l'une de fimple exécuteur des ordres qui
lui font adrefles par l^^i cours de juftice ;
l'autre 5 de préfider lui-même A deux ditFé-
rens tribunaux , dont l'un s'appelle U fea/ice
du shérif, l'autre la cour de la comte. .
Les autres officiers des différeos comtés ^
font un lord-lieutenant , qui a le comman-
dement de la milice du comté , les gardes
àts rôles , les juges de paix , les baillis , le
grand connétable , & le coroner.
Des cinquante-deux comtés , il y en a
quatre dillingués parmi les autres , qu'on
appelle pour cette raifon comtés palatins ,
qui font Lancallre , Chefîer , Durham &
Ely. Pembroke & Hexam étoient autre-
fois auili ^Qs comtés palatins^ celui-ci appar-
tenoit à l'archevêque d'York , & a été dé-
membré de fon domaine & dépouillé de
fon privilège fous le règne d'Elil'abeth , &
p'efl plus à préfent qu'une portion du comté
de Northumberland.
Les gouverneurs en chef de ces «>m/f j
palatins par conceffion fpéciale du roi ,
adreffoient aux officiers du comté toutes les
ordonnances en leur nom, & adminiftroient
•îa juftice d'une manière auffi abfolue que
le roi lui-même dans les autres comtés^ fi
ce n'efl qu'ils le reconnoilTbient comme
leur maître : mais Henri VIII modéra
cette étendue de pouvoir. T^oye-{ PalATI-
NAT. Chambers. ( G )
N'oublions pas d'obf^'er que le mot
comté eft quelquefois féminin ; on dit la
Franclie-^o;;2r^' , &c. Tout cela dépend de
l'ufàge.
Comtés-Pairies, (/«r//pr.) Les <:o/;2-
tés-pairies font des grands fiefs de la cou-
ronne , de grandes dignités de même na-
ture que les duchés-pairies , & en tout fem-
blables à ces d'erniers excepté par le nom,
& auxquelles on a attaché une jurifdidion
femblable à celle des duchés-pairies.
Le privilège _ attaché à ces grands fiefs
-«11 de relever immédiatement de la cou-^-
rorine ; car il ne peut pas exiiler de pairie
Jîui ne (oit dans la mouvance direde &
immédiate de la couronAe , à U diJQTéreocQ
CO N
6csco/ntésCunp\es ou du fécond ordre , mais
qui ne font point pairies , & parmi lefquel-
les il peut y en avoir qui ne relèvent ni du
roi ni de la couronne.
Il y a eu dans le royaume un grand nom-
bre de comtés-pairies dont les unes ont été
éteintes , d'autres érigées en duchés-pai-
ries y & quelques-unes que Ton a fait re-
vivre par de nouvelles lettres d'éredion.
Il y en a trois que l'on peut appeller ec-
clejiafiiques \ elles font att^^chées aux évê-
chés de Beau vais , de Châlons , & de
Noyon.
Les juflices de ces grands fiefs , aînfi que
celles des duchés-pairies , font toutes julH-
ces royales. L'éredion d'une terre en co/n^e-
paine mettant néceiïairement cette terr«
dans la mouvance direde & immédiate de
la couronne , il feroit abfurde que la juilice
attachée à une dignité , à un fief de cette
nature , fût feigneuriale. VoycT^ JUSTICE
6" Pairie. {A)
* COMUS , f m. {Myth.) dieu àes
feflins. Il y a tout lieu de croire que c'étoit
le même que le chamos des Moabites , ou
beelphegor ou baalpéor , Priape & Bacchus.
On le repréfentoit fous la figure d'un jeune-
homme , le vifage rouge & échauffé , la
tête panchée & l'air alToupi , appuyé du
côté gauche far un dard de chaflèur , te-
pant de la main droite un flambeau renver-
fé , & la tête couronnée de fleurs. On pla-
çoit fà flatue à l'entrée de l'appartement de
l'époux & de la nouvelle mariée ; (on pié-
d'effal étoit jonché de fleurs. Il y en a qui
font venir le mot comédie de cornus , & qui
croient que no/j^iav , eft la même chofè
que como digna cancre. Cette étymologie eft
d'autant mieux fondée , que ce fut dans des
feftins que l'on joua les premières farces y
qui perfedionnées , produifirent la comé-
die telle que nous l'avons, V^oy. CoMÉDIE.
COMUS, {Mufiq. des anc.) nom d'un
air de danfe àes anciens. (-F. D. G.)
CONANI-FRANC;f m. ( Bifloire nat.
Botaniq.) on konani ou konami^ nom que
les Caraïbes donnent à un arbriffeau que les
habitans de Cayenne appellent/eu///^ à eny--
j-'rer. Bafrere fa indiqué dans jfon catalogue
des plantes de la France équinoxiales , page
50, fous la dénominaton ^eupatorium arbo-»
rejccns venenatum^^orihus albis glomerati^
CON CON
Cet nrbrifireau s'élève à la hautêuf de cinq
à fix pies , il a les feuilles oppofées en-
tières , les têtes ou enveloppes des fleurs
ralTemblées aux aiflTelles des feuilles y l'en-
veloppe des fleurs fimple , comporée de
cinq à l'ept feuilles larges , & radiée y c'efl-
â-dire , contenant au centre plufieurs fleurs
hermaphrodites blanches, à fleurons de qua-
tre à cinq dents & quatre à cinq étamines, &
dans fon contour plufieurs fleurs femelles
demi-fleuronnées , blanches , aufli à trois
dents , fans étamines , toutes portées fur
un ovaire couronné d'un calice à deux ou
trois foies , & iéparées les unes des autres
par des écailles larges , qui rempliflent le
fond de l'enveloppe ou du calice commun.
Culture. Le co/jani croît communément
au bord des rivières à Ca} enne , d'où ia
graine efl portée dans les jardins qui en font
pour l'orainaire remplis.
Qualités. Cette plante a une faveur pi-
quante & amere , qui la rend véniraeufe
pour les poillons.
Vfages. Les Caraïbes profitent de cette
propriété pour enivrer les poifîbns ; pour
cet effet ils en pilent la feuille fur une pierre
ou dans un trou , puis la jettent dans l'eau
dormante; fl l'eau ^fl courante, ils font
vers les bords du rivage un trou dans lequel
ils agitent le marc jufqu'à ce que l'eau en
devienne favonneufe. Le poiifon qui vient
à nager dans cette eau efl enivré ou plutôt
aftedé au point que fa veflie d'air ne pou-
vant plus renouveller l'air , ni le poufler
au-dehors , il furnage & meurt bientôt ^lus le même depuis l'établiflement du pré-
après; cepoifon n'a d'effet que fur le poifîcj' ^5" '•-^ial. Tous les ans ils obtenoient un arrêt
fans que les hommes en foient abl'olunà^ '''"^•'equête du parlement de Paris avant
incommodés, & ils mangent ces poiiTons^ i»- '-^-'^^t^Âflement de celui de Rouen , &: de
197
fait de cette plante , qu'elle efl une elpece
à'ukakoii dont le genre vient natnreliemcac
près du bidens dans la dixième feâion d^
la famille des plantes compofées , où nous
l'avons placé. Voy .ï\os familles des plantes ,
volume II, page i j zJftM. Adanson\)
CONARDS ou cdBjARDS , fub. m,
plur. nom d'une ancienne fociété qui fub-
lifloit autrefois dans les villes d'Evreux &
de Rouen , & qui y a fleuri pendant plus
d'un fiecle. L'objet de cette compagnie étoit
ridicule , & reflembloit alfez à celle des
fous & de la mère folle de Dijon.
Le premier but cependant étoit de cor-
riger les mœurs en riant ; mais cette liberté
ne demeura pas long-temps dans les bornes
qu'elle s'étoit prefcrites ; & les railleries, ou*
pour mieux dire les fatyres , devinrent fi
lànglantes , que l'autorité royale , de con-
cert avec la puiffance eccléfiaftique , détrui-
fit cette compagnie. On appelloit le chef
Vabbé des couards ou des cornards. Cette
place , qu'on n'obtenoit qu'à la pluralité des
voix , étoit fort enviée , comme on le voit
par deux vers de ce temps-là :
Conards font les Bufots 6'/2on /ej- Rabillis,
O fonuna potens quàm variabilis !
- Les bufots & les 'Rabillis font deux fa*
milles qui fubfiftent encore à Evreux ou
dans le pays , & qui avoicnt fourni des ab-
bés à la compagnie. Les conards avoient droit
de jurifdidion pendant leur divertiflement,
& ils l'exerçoient à Evreux dans le lieu où
ie tenoit alors le bailliage , mais qui n'efl
avec autant de délices que ceux qui font
pris aux filets.
Remarques. Dans le Para on trouve une
autre efpece de conani , dont l'efl^t eit trois
fois plus lent, & qui au Rapport de M.
Préfontaine a été rapporté par les habitans
du Para chez les fauvages Maillés, habi-
tans des pays noyés- d' Y apoë.
Le didionnaire intitulé dictionnaire d'hif-
toire naturelle , confond ces diverfes fca-tes
de conani.
Le conani n*a encore été rapporté par
aucun auteur à fa famille naturelle , & il
ceiui-ci depuis le xvj. fiecle, pour exercer
leurs facéties.. Taillcpied, dans (on livre
des antiquités & fingularités de la ville de
Rouen , dit que dans cette ville les conards
avoient leur confrairie à Notre-Dame de
bonnes-nouvelles , où ils avoient un bureau
pourconfulter de leurs affaires : " ils ontfuc-*
cédé , dit-il , aux Coque - luchiers , qui fe-
préfentoient le jour des rogations en diveri»'
lité d'habits ; mais parce qu'on s'amufbir
pkitôr à les regarder qu'à prier Dieu , cela:
fut réfcrvé pour les jours gras à ceux qui
jouent àts faits vicieux qu'on appelle vul-
nûUi» a paru par l'cxameo que nous avons [ gisif ement coiiardi ou coroArds j, auxqjjej*
75)§
C O N
bbe'
par choix & éleéHon prélîde un abbé mi-
tié , crofïfi ^ ^ cnnchi die perles , quand
folennellement il eft traîné en un charriot
à quatre chevaux le dimanche gras & autres
Jours de bachanales >> . A Evreux on le me-
noit avec beaucougade pompe ; on le pro-
menoit par toutes ira rues & dans tous les
villages de la banlieue , monté fur un âne &
habillé grotefquement. Il éfoit fuivi de fa
compagnie , qui pendant la marche chan-
toit des chanfons burlefques moitié latin
moitié François , & la plupart du temps très-
lâtyriques ; ce dernier excès fit fupprimer la
compagnie des conards , dont la principale
fête le célébroit à la faint Barnabe ; & à fa
place Paul de Capranic nommé à l'évêché
d'Evreux en 1420, établir unt confrairie
dite de S. Barnabe y pour réparer , dit-il ,
les crimes , malfaçons ^ e^cès & autres cas
inhumains commis par cette compagnie de
conards , au déshonneur & irrévérence de
Dieu notre créateur, de S. Barnabe y & de
fainte Eglife. Voyez le gloj/aire deDucan-
ge y Ù lefupplément de Moreri. Il y a dans
de vieux imprimés des arrêts de l'abbé dts co-
nards ou des cornards j lorfque ces pièces
miférables fe trouvent , on les acheté fort
chèrement. Quis leget hœc ? {G)
§ CONARION , C Anatomie. ) glande
pinéale des modernes.
Cette glande cfl corticale, elle a cependant
de la ^blancheur à fa bafe ; elle eft placée
obliquement de haut en bas & de derrière en
devant , recouverte d'un voile vafculaire ,
formé par la pie-mere : elle pofe fur le^,
ëminences jumelles antérieures.
Les petits filets médullaires, parlefqucls
cette glande tient au cerveau , ne font pas
toujours aifés à voir , ils fe terminent à la
ligne blanche des couches optiques , & aux
couches elles-mêmes : ils font plus gros dans
les quadrupèdes.
Cette glande prétendue eft certainement
un petit appendice du cerveau , elle eft:
corticale, elle fournit de la moelle : la glande
pituitaire eft une autre glande de cette
efpece , la moelle qu'elle produit , eft ap-
pellée entonnoir ; dans les poifîpns la der-
nière de ces glandes donne des branches
très-vifibles aux nerfs olfadifs,
Defcartes a cru que la glande pinéale
fsxÙQ , étoli impaire dans le cerveau ; la
CO N
pituitaire lui étoit apparemment inconnue ,
& il n'a pas penfé aux corps calleux , à la
voûte , aux deux commifïùres.
Elle ne fauroit être le fiege du principe
vital , elle manque à plufieurs quadrupèdes ,
aux oifêaux & à une partie des poilîbns :
l'homme , d'autres quadrupèdes , & d'au-
tres poiflbns en font pourvus : une partie
du corps animal , qui ne fe trouve que dans
une partie des animaux même les plus
compofés , ne fauroit être regardée comme
un organe eflêntiel à la vie.
La glande pinéale eft fujette à plufieurs
maladies ; elle s'endurcit allez fouvent , &
on y trouve de petites pierres. M. Mekel
& M. Gun s'accordent à remarquer que
ces concrétions font fort communes dans
les fous. Elle s'abreuve auili d'eau & de-
vient hydropique. ( M. le Baron DE
Haller.)
CONCA , ( Géog. mod. ) rivière d'Italie
qui prend fà fource dans l'état de l'Eghfe ,
& fe jette dans le golfe de Venife.
CONCARNEAUX, {Géog mod.) pçmc
ville de France en Bretagne , au pays de
Cornouaille.
CONCASSER , V. aa. ( Pharm. ) c'eft
réduire en poudre grofliere , ou même en
petits fragmens , par le moyen du pilon ou
du marteau , les matières affez dures & afïez
caftantes pour être divifées par ces inf«
trumens.
La concajjation eft une de ces opérations
méchaniques , que nous appellons^r^pam-
toires. Celle-ci eft employée dans l'art pour
0t;''Tir certains corps, multiplier leurs furfa-
ces ,. & les dilpofer ainfi à être plus facile-
ment attaqués par difFérens difîblvans qu'on
a deflêin de leur appliquer , foit qu'on (e
propofe de les diffoudre entièrement , foit
qu'on veuille en tirer des teintures ou àts
extraits.
C'eft ainfi qu'on concajje l'antimoine qu'on
veut faire bouillir avec une leflive alkaline
pour la préparation du kermès , certaines
racines , femences & écorces dont on veut
faire la décodion ou l'infufion , ^c. { b )
CONCAVE , adj. {Gram Géom. Phy
Jiq.) fe dit de la furface intérieure d'un
corps creux , particulièrement s'il eft circu-
laire.
Cgncare eft proprement un terme rela-
C O N
îlF: une ligne ou furface courbe concave vers
un côté , eft convexe du côté oppofé. Voy.
Surface, Convexité, &c.
Concaue , fe dit particulièrement des mi-
roirs & des verres optiques. Les verres <:o/2-
capes font ou concaves ats deux côtés, qu'on
appelle fimplemenr concaves ; ou concaves
d'un côté & pjans^ de l'autre , qu'on appelle
plans concaves ou concaves plans ; ou enfin
concaves d'un côté & convexes de l'autre.
Si dans ces derniers la convexité ell d'une
moindre fphere que la concavité, on les
appelle ménifques\ fi elle efl de la même
fphere , fphérlques concaves ; & fi elle ell
d'une fphere plus grande , convexe - conca-
ves. Foy^^ Plan CONCAVE, ùc.
Les verres concaves ont la propriété de
courber en-dehors , & d'écarter les uns des
autres les rayons qui les traversent , au lieu
que les verres convexes ont celle de les
courber en-dedans & de les rapprocher , &
cela d'autant plus, que leur concavité ou
leur convexité font des portions de moin-
dres cercles. Fqy. Lentille & Miroir.
D'où il s'enfuit que les rayons parallèles,
comme ceux du foleil , deviennent diver-
gens, c'efl-à-dire s'écartent les uns des autres
après avoir pafle à-travers un verre concave,
que les rayons déjà dlvergens le devien-
nent encore davantage , & que les rayons
convergens font rendus ou moins conver-
gçns ou parallèles , ou même divergens.
Fbjq Rayon.
C'efî pour cette raifon que les objets vus
à-travers des verres concaves, paroiiTent d'au-
tant plus petits^ que les concavités des verres
font des portions de plus petites fpheres.
J'^oy. un plus grand détail fur ce fujet aux
tfmW^j-LENTILLE, RÉFRACTION, &C..
Les miroirs concaves ont un effet con-
traire aux verres concaves ; ils relié chifîent
les rayons qu'ils reçoivent , de manière
qu'ils les rapprochent prefque toujours les
uns des autres , & qu'ils les rendent plus
convergens qu'avant l'incidence : & ces
rayons font d'autant plus convergens , que
le miroir efl portioTi d'une plus petite fphere.
Harris & Cliambers.
Je dis prefque toujours ; car cette règle
n'eft pas générale : quand l'objet efl entre le
fommet & le centre du miroir , les rayons
font rendus moins convergens par la réllec-
C O N 79>
tion. Mais quand les rayons viennent d'au-
delà du centre , ils font rendus plus con-
vergens ;& c'efl pour cela que les miroirs
concaves y expofés au foleil , brûlent les ob-
jets placés à leur foyer. Voye^ Varticle.
Ardent. { O)
CONCAVITÉ , f. f. {Gram. & Géom.)
fe dit de la furface concave d'un corps, ou
de l'efpace que cette furface renferme. V,
Concave. ( O)
CONCENTRATION , f. f. {Chymie.'^
on nomme ainfi certaines opérations chymi-
ques , lorlqu'on les confidere comme em-
ployées à rapprocher les parties d'un corps
difibus dans une quantité de liqueur plus
que fuffifante pour fa diflblution ; en enle-
vant entièrement ou en partie la portion fu-
rabondante du menflrue. C'efl ainfi qu'on
nornme concentration , l'évaporation ou la
diflillation par laquelle on fépare de l'huile
de vitriol une partie de l'eau dans laquelle-
l'acide y efl diflbus ; la diflillation , par la-
quelle on enlevé à une teinture une partie de
l'efprit-de-vin employé à la préparation de
cette teinture ; la congélation , par laquelle
on retire du vin ou du vinaigre une cer-
taine quantité de leur eau ; l'affufion de 1'*
cide vitriohque très-déllegmé dans un acide
moins avide d'eau , par exemple le nitreux ,
auquel le premier l'enlevé félon les loix d'af-
finité connues. Voy. AciDE VITRIOLI-
QUE^M /TZOf Vit RI OL. Voye\ VlN, VI-
NAIGRE , Teinture , Acide ni-
treux au mot NITRE. {b)
CONCENTRIQUE ,zà]. terme de géo-
métrie & a'aflronomie. On donne ce nom à
deux ou plufieurs cercles ou courbes qui ont
le même centre. Voye'{ CENTRE.
Ce mot efl principalement employé lorfl-
qu'on parle des figures & des corps circulai-
res ou elliptiques, Ùc. mais on peut s'enfer-
vir aufïï pour les polygones dont les côtés
font parallèles , & qui ont le même centre.
Voy. Cercle , Polygone , ùc
Concentrique efl oppofé à excentrique,
Voyei Excentrique. Barris & Cham-
bers. ( E)
CONCEPTION, f. f. {Logiq. ) La
conception ou la compréhenfîon , efl cette
opération de l'entenderiient par laquelle il
lie les idées des cb/ofes en les conlidé-
rant fous certaines faces , en failit les dif*
8oo C O N
férentes branches , les rapporfs , & Ten-
chaînement.
Elle réunifies fènfations & les perceptions
qui nous font fournies par l'exercice aduel
àes facultés aduelles. Mais fouvent l'efprit ,
faute d'avoir ces lenfations & ces percep-
tions bien dilpofées , faute d'attention &
de réflexion , ne faifit pas les rapports des
chofes fous leur rentable point de vue; d'où
il arrive qu'il ne les conçoit pas , ou les
conçoit mal. Suivant la judicieufe remar-
que de M. l'abbé de Condillac , une con-
dition efientielle pour bien concevoir , c'efl
de fe préfenter toujours les chofes fous les
rapports qui leur font propres. Quand les
fujets qu'on préfente à l'entendement lui
font familiers , il les conçoit avec prompti-
tude , il en connoj t les rapports ; il les em-
bralïe tous , pour ainfi dire , en même
temps ; & quand il en parle, l'efprit les par-
court avec afléz de rapidité pour devancer
toujours la parole , à-peu-près comme l'œil
de quelqu'un qui lit haut devance la pro-
nonciation.
Il arrive encore que l'ame eft quelque-
fois entraînée de conception en conception
par la liaifon des idées qui quadrent avec
fon intérêt préfent : alors il fe fait un enchaî-
nement (iicceflif de proche en proche d'une
étendue de compréhenlion à une autre ,
delà encore à une autre , & toujours
par le fecours de l'intérêt , qui lui four-
nit des connoiiîances félon lelquelles elle
fe détermine plus ou moins convena-
blement.
La progreflîon de la conception eu plus
ou moins étendue , félon le degré de perfec-
tion du fenforium commune : plus il elî par-
fait , plus l'ame peut recevoir de percep-
tions diftincles à-la-fois. L'étendue & le de-
gré de perfection de la conception^ règlent l'é-
tendue & la promptitude du bon fens ; elle
fournit même fouvent le fonds & la forme
des raifonnemens , fans le fecours de la rai-
Ibn : mais quand elle eft trop bornée , ou
trop irréguliere , elle tait toujours naître des
déciiions vicieufes.
Il réfulte de ce détail , qu'il efl très - im-
portant de tâcher de concevoir les chofes
fous les idées qui leur font propres , de fe
rendre la conception familière par l'attention ,
ôc de l'étftndre par l'exercice: elle ne fait pas
C O N
le génie , mais elle y contribue quand elle
agit promptement ; & Ibrfqu'elle efl adive ,
elle donne l'indufîrie , mère de l'invention y
Il nécelfaire dans les arts , & fi profitable à
certains peuples. Art. de M, le chevalier
x>E Jaucourt.
Conception , {Med, Phyfiol.) Voyei^
GENERATION & GROSSESSE.
Conception immaculée y{Theol.)
Voj. Immaculée Conception.
Conception {la) , Geogr. mod. ville
de l'Amérique méridionale dans le Chili ,
avec un bon port, fur la mer du Sud. Long.
304 , zj , jo ; lat. mérid. ^S , 4.Z.
Conception (/a), Geogr. mod. ville de
l'Amérique ièptentrionale dans la nouvelle
Efi>agne , dans l'audience du Guatimala.
Conception, (Gfbgr. mod.) ville de
l'Amérique méridionale dans le Paraguai , à
l'endroit où la rivière des Limaçons fe jette
dans celle de la Plata.
CONCERT, f. m. {Mufique. ) affem-
blée de voix & d'inflrumens qui exécutent
des morceaux de mufique. On le dit auiïî
pour exprimer la mufique même qu'on
exécute. Les Indes galantes font gravées
en concert y c'eli-à-dire qu'elles font dif^
pofées dans la gravure pour former des
concerts. (B)
On ne fe fert guère du mot concert que
pour une affemblée d'au-moins quatre ou
cinq mulîciens , & pour une mufique à
plufieurs parties , tant vocale qu'inflrumen-
tale. Quant aux anciens , comme il paroît
qu'ils ne connoiflbient pas la mufique à plu-
fieurs parties , leurs concerts ne s'exécu-
toient probablement qu'à l'uniffon ou à
l'odave. (6*)
On fait àes concerts d'inflrumens fans
voix , dans lefquels on n'exécute que des
fymphonies. Dans quelques villes confidé-
rables de province , plufieurs particuliers fe
réunifient pour entretenir à leurs dépens des
muficiens qui forment un concert. On dit
le concert de Marfeille , de Touloufe , de
Bordeaux, Ùc. Celui deJLyon efl étabhen
forme par lettres patentes , & a le titre d'a-
cadémie royale de mufique. Il efl: adminiflré
par des direcleurs élus par les particu-
liers alTociés , & c'efl un des meilleurs qu'il
I y ait en province. Par un des fîatuts de cet
1 établiffement , chaque concert doit finir par
C O N
un motet à grand chœur. Il n'efl: guère de
villes en Europe où l'on air autant de goût
pour les artSj dont les habitans foient aulîi
bons citoyens, "& où les grands principes
des mœurs foient fi bien confervés : l'opu-
lence ne les a point détruits , parce qu'elle
n'y fleurit que par le travail & l'induitrie.
Le commerce feul fait'la richefle de la ville
de Lyon , & la bonne foi eft le grand
reflbrt de cette utile & honnête manière
d'acquérir.
Le 24 août , veille de S. Louis _, on élevé
auprès de la grande porte des Tuileries , du
côté du jardin , une'efpece d'amphithéâtre :
tous les fymphoniftes de l'opéra s'y ren-
dent ; & à l'entrée de la nuit ou forme un
grand concert compofé des plus belles fym-
phonies des anciens maîtres françois. C'eft
un hommage quç l'académie royale de mu-
fiquc rend au roi. On ignore pourquoi
l'ancienne muiique , beaucoup moins bril-
lante que la nouvelle , & par cette raifon
moins propre aujourd'hui à former un beau
concert y efl pourtant la feule qu'on exécute
dans cette occalion : peut-être croit-oi> de-
voir la laifïêr jouir encore de cette préro-
gative , dans une circonflance où perfonne
n'écoute. (i5)
CONCERT Spirituel , f. m. ( Belles-
lettres. Poéjîe.) nous appelions ainfi un fpec-<
tacle où l'on n'entend que des lymphonies
& des chants religieux , & qui , dans
certains jours confacrés à la piété , tient
lieu des fpedacles profanes ; il répond à
ce qu'on appelle en Italie oratorio ; mais
il s'en faut bien que la mufique vocale y
foit portée au même degré de beauté.
Comme ce font les muliciens eux-mêmes
qui , fervilement attachés à leur ancienne
coutume , prennent comme au hazard , un
dgs pfeaumes ou àes cantiques, &: , fans fe
donner d'autre hberté que de l'abréger quel-
quefois y le mettent en chant tout de fuite ,
& le divifent tant bien que mal en récitatif ,
en duo & en chœur , il arrive que fur les
verfets qui n'ont point de caraderes , ils
font obhgés de mettre un chant qui ne dit
rien , ou dit tout autre chofe ; c'ell ainfi
qu'après ce début Ç\ fublime cœli enarrant ,
vient ce verfet , nonfunt loquelœ y fur lequel
Mondonville a mis précifément le babil de
deux commères ; c'efi: ainfi qii'à côté de ces
Tome Vni,
C O N S'oi
grandes im,ages, à f acte domlml mata ejlterra^
mare vidit & fugit , le même muficien a
tait faurer dans une a^-ierrc les montagnes
& les collines , en jouant fur les mots ,
exultaverumjicut arieces, Ùficut agni ovium.
i'on fent combien ce faux goût eft
éloigné du caraderc fimple & majeflueux
d'un cantique.
Quel génie àc quel art n'a-t-il pas fallu \
Pergolefe pour varier le Stabat ? Encore dans
ce morceau unique tout n'ell-il pas digne
d'une égale beauté : la plus belle profe de
l'églife , le dies ir^e y qui devroit être l'objet
de l'émulatioiujie tous les grands muliciens ,
auroit befoin^i-même d'être abrégé pour
être mis en mufique : les deux cantiques
de Moïfe , tout fubhmes qu'ils font, deman-
deroient qu'oni^t un choix de leurs traits
les plus analogues à l'expreflîon muficale.
Dans tous les pfeaumes de David , il n'y
en a peut-être pas un qui , d'un bout h
l'autre , foit fufceptiblc des beautés du
chant , & des contrafies qui rendent ces
beautés plus fenfibles & plus frappantes.
Il feroit donc k fouhaiter d'abord qu'on
abandonnât l'ufage de mettre en mufique
un pfeaume tel qu'il fe préiente , & qu'on
le donnât la liberté de choifir , non-(eu-
lement dans un même pfeaunie , mais dans
tous les pfeaumes , & fi l'on vouloit même ,
dans tout le texte àes livres flîints , des
verfets analogues à une idée principale , &
aflbrtis entr'eux pour former une belle
fuite de chants ; ces verfets pris çà & là •<
& raccordés avec intelligence , compo-
feroient un riche mélange de fentimens &
d'im.ages , qui donneroient à la mufique de
la couleur &: du caraôere , & le moyen
de varier fes formes & de difpofer à Ion
gré l'ordonnance de l'es tableaux.
La difficulté fc réduit à vaincre l'habi-
tude & peut-être l'opinion; mais pourquoi
ne feroit-on pas dans un motet ce qu'on a
fait dans les fermons , dans les prières de
l'églife , où j de divers pafl'ages de l'écriture
rapportés à un même objet , on a formé .
un fens analogue & fuivi?
Mais une difficulté plus grande poirr le
muficien y c'efi: d'élever fon ame à la hau-
teur de celle du prophète , de fe remplir ,
s'il eft poflible , du même efprit qui l'ani-
I raoit , & de faire parler à la mufique un
Hhhhh
Soi C O N
langage fubllm^ , un langage divin. Ocû \
là que tous les charmes de la mélodie ,
toure la pompe de la déclamation , toute
la puiiîance de l'harmonie , dans les pein-
tures de tous les genres , doivent fe dé-
ployer avec magnificence : un beau motet
doit être un ouvrage infpiré , & le mufi-
cien qui compofe de jolis chants & des
chœurs légers fur les paroles de David , me
femble profaner fa harpe.
Au lieu du moyen que je propofe , pour
former des chants religieux dignes de leur
objet , on a imaginé en Italie de faire de
petits drames pieux , qui n'étant pas re-
préfentés , mais feulement e^Butés en con-
cert ^ font affranchis par-là de toutes les con-
traintes de la fcene : ces drames font en petit"
ce que font en grand fu4||inos théâtres ,
Athalie , Eder & Jephté : on les appelle
oratorio ; & Métaftafe en a donné des mo-
dèles admirables , dont le plus célèbre efl: ,
^vec railôn , le facrifice d'Abraham.
On a fait au concert fpirituel de Paris
quelques foibles eflais dans ce genre ; mais
â préfent que la mufique va prendre en
France un plus grand elfor , & qu'on fait
mieux ce qu'elle demande pour être tou-
chante & fubhme , il y a tout lieu de croire
qu'elle fera dans le iacré les mêjnes progrès
que dans le profane. Voye^ LYRIQUE , &<:.
CM. Marmontel. )
CONCERTO , mot italien francifé ,
en mufique > fignifie une pièce de fympho-
jtie faite pour être exécutée par tout un
orcheftre.
Il y a des conce no iaits pour, quelque inf-
trument particulier qui joae feul de temps
en temps avec un (impie accompagnement ,
après quoi tout Porchcflre reprend , & la
pièce continue toujours, ainfi alternative-
ment entre le même infiniment & l'orchef^
tre. C'efl-là ce qu'on appelle proprement
concerto. Quant à ceux où tout fe joue
€n chœur , & où nul inflrument ne ré-
cite , les Italiens les appellent aufîl. J}'m-
phonies. {S)
CONCERTANT , adj. parties concer-
* Hontes y foat en mufique , félon l'abbé Brof-
facd , celles qui ont quelque chofe à réciter
dans la pièce , & ce mot fert à les dif-
tiJnguer des parties qui ne font que de
C O N
Ce mot efî vieilli en ce fcns ; on St au-
jourd'hui parties récitantes ; mais on fe ièrt
de celui de concertant en parlaijt du nombre
de muficiens qui exécutent dans un con-
cert , & l'on dit fort bien : Nous étions vingts
cinq concertans ; un concert de Jmit à dix
concertans. {S)
CONCESSION ; f. f. figure de rhéto-
rique par laquelle l'orateur . fur de la bonté
de facaufe, fèmble accoraer quelque chofe
à fon advcrfaire , mais pour en tirer foi-
même avantage , ou pour prévenir les inci-
dens inutiles par lefquels on pourroit l'ar-
rêter. Par exemple : je ne veux pas conte fter
la réalité du contrat , mais je me récrie con*
tre fon injufiice ; c'efi contre elle que j'im^
plore lefecours des loix .... Elle efi belle ,
il efi vrai y mais ne devroit-elle pas témoin
gner au ciel fa reconnoijfance des faveurs^^
qiUil lui a prodiguées , par un vertueux
ufage de fa beauté ?
Cette figure efl très-fréquente dans les
plaidoyers de Cicéron : nous n'en citerons
que' ce trait de la cinquième Verrine ; Eftoy
eripe hœreditatem propinquis ^ prcedare in
bonis alienis y everte leges y &:c. nùm etiam
amicum bonis exturbare oportuit? &c. (G)
Concession , ( Jurifp. ) c'efl ou ce qui
efl accordé par grâce y comme font les bre-
vets & privilèges accordés^par le prince y,
ou une certaine étendue de terrain que le
roi accorde à quelqu'un dan s^ les colonies
françoifes , à k-charge de le faire défricher ;
ou un abenevis , c'efl-à-dire la faculté de
prendre une certaine quantité d'eau d'un^
étang , ou d'une rivière ou ruiflfeau , pour
taire tourner un moulin ou autre artifice j,.
ou pour arrofer un pré ; ou la diflribution
que le bureau de la ville fait aux particuliers,
qui ont acheté de l'eau.. Voye^ PRIVI-
LEGE. {A)
Concession, (Comm.jc'efl ou toute
l'étendue d'un pays où il efl permis à unC'
compagnie de s'étabhr ou de faire fon né-
goce privativement à toute autre ; ou le ter*
rain que ces compagnies donnent aux habi-
tans pour lé défricher y le cultiver , & le
faire valoir , en leur rendant quelque rede-
vance ou droit annuel. Dans le premier-
fens X-Aconceffion doit être obtenue du prince^
qui l'accorde par les édits, déclarations, char*-
tes 3, lettres patentes ^ arrêts, du. confeili.^^
C ON
Dans le fécond (èns , ce font les cfireâeurs
qui donnent les concejjîons , par des contrats
ou arrêtés de leurs compagnies , dont ils
chargent le regiftre de leurs délibérations.
J^oye\ les diciionn. du Comm. de Trév. 6"
Chambers. {G)
CONCESSIONNAIRE , f. m. (Comm.)
celui à qui appartient une conceflion. En
France on las nomme autrement colons ou
habitans. En Angleterre on leur donne le
nom de planteurs. Voyej^ ïarticle PLAN-
TEURS. (G)
C'efl auflî le nom que Ton donne aux par-
ticuliers qui achètent de l'eau du prévôt des
marchands ^ échevins de la ville de Paris ;
ce droit d'avoir de l'eau s'appellant concef-
fion , comme on l'a dit.
CONCESSUM UT PETITUR,
( Jurifp. ) c'efl: la fignature de cour de Ro-
me , ou pour parler plus jufte , la réponfe
que le préfet de la fignature met entre la fup-
plique & les claufes des provifions ; il met
ces mots : Concejfum m petitur , in prce-
fentiâ domini nofiri papas ^ &c. & ligne:
au lieu que les fignatures qui doivent être don-
nées par le pape lui-même , telles que celles
qui portent difpenfe , celles qui concernent
les dignités d'une cathédrale ou collégiale ,
les prieurés conventuels , les canonicats
d'une cathédrale , font par lui appofées en
ces termes : Fiat ut petitur. Le chap. Jî â
Jede de prœbend. in 6'® & la règle de chan-
cellerie romaine de concurremibus in data y
qui en elî tirée , veulent qu'en cas de con-
cours de deux fignatures de cour de Rome ,
Vunt^pdiV concejfum y l'autre par ^ar, la der-
nière foit préférée. Mais cette diftindion n'efl
point reconnue en France , où l'on ne fuit
m\e ôxA'^.jiàfede , ni la règle de concur-
remibus. Voyez la pratique de cour de Rome
de Caflel , tome I. fur la féconde partie de la
fignature , aux notes. {A)
* CONCETTI , f. m. ( Gramm. & rhe-
toriq. ) Ce mot nous vient Ats Italiens , où
il n'efi pas pris en mauvaife part comme
parmi nous. Nous nous en fommes fervis
pour diftinguer indiftindement toutes les
pointes d'efprit recherchées que le bon goût
profcrit.
§ CONCHES , [Géogr.) petite ville dans
le pays ^Ouche. Cette ville nommée en
iatin Conchœ , efl à quatre lieues d'Evreux
C O N 803
& treize de Rouen ; il y a une riche abbaye
de Bénédidins _ fondée au onzième fiecle ,
un bailliage , vicomré & éledion qui com-
prend cent foixante-deux paroifîes : on y
fait un commerce affez confidérabîe ea
grains, en barres de fer, clous, alênes,
marmites , pots , Ùc. Lono;. 1 5^, a6", 6" :
lat.4S^,^Sf> 53"-
^ CONCHITE , f. m. {Hifl. nat:) efpece
de pétrification ,- c'eft , félon M. Tourne-
fort , une véritable pierre , dont les germes
liquides fe font infinués dans les creux de
la coquille appellée conque y dont ils ont pris
le relief. Voye\les mém. de Vacad. p. z/^z,
ann. ijox. D'autres prétendent au con-
traire que cette pétrification n'cfl qu'une
marne délayée qui efl entrée dans la coquille
vuide , elle ^z'i\. enfuite durcie. On voit en-
core dans des ruines de bâti mens à Mégare ,
de la pierre blanche appellée conchite ^ qu'on
ne trouvoit que dans cette contrée.
CONCHOIDE, Ç.î. (G^b/77.) c'efl le
nom d'une courbe géométrique qui a une
afymptote. V, ASYMPTOTE <& CoURBE.
En voici la defcription.
Ayant tiré deux lignes BD , AC ( PI,
Anal.jig. i .) perpendiculaires l'une à l'autre,
& placé fur la ligne AEC les trois points A^
F yC y dont les deux premiers foient à égale
diflance de E , on tirera par le point C au-
tant de droites CFEA , COM , CQN ,
CM, &c. qu'on voudra avoir de points de
la courbe • on prendra enfuite fur ces lignes ,
tant au-defîus de BD qu'au defîbus , les
parties QM , QN ^ QM, &g. toutes égales
à AE. Cela fait , les deux lignes MM A
MM y NFNttrm'méts par les extrémités
de ces lignes droites , feront les deux par-
ties d'une même courbe géométrique ap-
pellée conchoide ; le point C efl appelle le
pôle de cette conchoide ,• la ligne B Dt^ fon
afymptote , & la partie confiante AE Ça.
règle. Si EF=CE , la courbe a un point
de rebroulTement en F; ÛEF<CE , elle
a un nœud en F. Qn peut la tracer ainfi :
AEDKG , {jig. z.) eflune équerre dans
la branche AD de laquelle efl pratiquée une
couliflê qui repréfente l'afymptotc de la
courbe , & qui a dans fon autre branche un
clou K qui doit être le pôle de la conchoide.
CFKB y eflune règle à laquelle efl attaché
un clou F qui paflè dans la couliflê AD y
H h h h h 2
foj. C O N
où il a la liberté de glifler. C Se c font deux
ftylers ou crayons attachés à la même règle ,
& à égale diilance du clou F. OK elt une
couliiiè pratiquée dans cette règle , & dont
le comtnencement O efi pkcé à la même
diOance de F que K àtAD.
Cela pofé , fi l'on fait mouvoir la règle
CD , de manière que le clou i^ne forte Ja-
mais de la coulifTe AD , & que la coulifîê
OB pafîè toujours dans le clou K , les deux
crayons placés en C Se en c décriront les
deux branches CH, c hde la conchoïde. Nous
avons dit que la ligne AD elt alymptote de
cette courbe, ceft-à-dire, qu'elle en ap-
proche toujours fans jamais la rencontrer ;
cela cft aifé à comprendre par fa dcfcrip-
tion , pui.'que la ligne confiante CJPs'incli-
nant toujours lans fe coucher jamais fur
AB , le point C doit toujours approcher de
la droite AD fans jamais y arriver.
Nicomeue ell Tinvenreur de cette courbe ;
& l'on ajoure ordinairement au nom de con-
choïde ceiui de Nicomede , afin de la diflin-
guer d'autres courbes- analogues qui pour-
roient avoir ce nom.
Par exemple M coMvhQ MM AMiflg. i.)
que l'on formeroic en prenant ÇÀf , non
confiant comme on vient de faire , mais de
.tc''e grandeur que CE'^- : CÇ'" : : QM'^ :
AE'^ feroit une courbe qui auroit encore
BD pour alymptote , & qu'on peur nom-
mer auffi conchoïde. Voy. iiir les propriétés
génerales,de \^ conchoïde ^ la dernière fe^ion
de l'application de l'algèbre à la géométrie ^
par M. Guifnée.
MM. de la Hire & delà Condamme nous
ont donné plulieurs recherches fur les con-
choïdes ; l'un dans les mém. eVacadém. de
zjo8 ; l'autre dans ceux de 1733 ^' ^73.4-
M. de Mairan , dans \tsmém. de Vacadém.
de 1735 a remarqué avec raifon que l'elpacc
conchoïdale , c'efl-à-dire l'efpacc renfermé
par la conchoïd.e Sl fon afyraptote, étoit in-
fini & non fir» , comme quelques auteurs
ont prétendu. En efftt , foir AE=a,
CE=bj & EQ=x, on trouve que ^^Ç^lf
efl< que ^ ^ [ log. X -f- . xx-\- bb — log. 3.]
Or cette quantité ell 00 Lorfque a: =00.
Donc , ^c. (O}
CONCHOLEPAS y C m. {Hijf. nat.
Conchiliolog. ) efpece de lépas ou de coqui»!-
ïage univalvc, ainft comme parce que là
C O N
j coquille reflcmble en quelque forte à une
' valve de ces peéloncles , ou mieux encore
; de ces arches de Noé , dont le côté voifin
j du fommet efl applati : mais ce qui fait
j reconnoître cette coquille , & ce qui la
j diflingue des coquilles bivalves , c'ell qu'elle
n'a point ces denticules qui forment la
charnière au bord de ce côté qui ell ap-
. plati. Ce coquillage approche beaucoup des
ormiers ou oreilles de mer dont il fembîe
faire la liaifon avec le genre du lépas. V^oy.
ce que nous avons dit à ce fujet dans notre
hiftoire naturelle des coquillages du Sénégal^
publiée en 1757. {M. Adanson.)
CONCHY , f. m. efpece- dÇ cannelle des
Indes , dont il le fait commerce au Caire.
CONCHYLE, rq>r:[ Coquillage ,
Pourpre.
^ CONCIERGE , efl celui qui a la garde
d'une maifon royale ou feigneuriale. On
confond quelquefois les termes de concierge
& àc geôlier ; l'ordonnance de 1670 nomma
en quelques endroits , les concierges & geô-
liers conjointement ; en d'au très elle nomme
le geôlier avant le concierge ; en d'autres elle
ne parle que de geôlier : ce qui fait voir que
ces termes font fynonymes^Ét ,. en effet , le
concierge d'une prilôn efl le geôlier où garde
de la geôle ; ce n'ell que dans les prifons
l'is plus confidérables que l'on diflingue le
concierge des geôliers. Le concierge efl le
premier geôlier , & les geôliers & guiche-
tiers font ceux qui font prépofés ibus lui
pour la garde des prifons.
L'ordonnance de 1670 , tit. xiij. veut que
tous concierges & geôliers exercent en per-
fonne , & non par aucun commis ; qu'ils
fâchent lire & écrire , & que dans les lieux,
où ils ne le fauroient pas , il en foir nommé
d'autres .dans flx fcmaines , à peine contre;
les feîgncurs de la privation de leur droit..
Pour ce qui concerne les fondions des,
concierges & geôliers , Voy. GeOLE , GEO-
LIERS , Guichetiers , Prisons. (A)
Concierge du Palais , ( Hijl mod..
& Jurifprud. ) étoit un juge royal auquel a
fùccédé le bailli du palais. Sous la première
& la féconde race de nos rois , l'a jullice éfoit
rendue dans le palais par le maître ou maire
du palais , auquel fuccéda le comte. En
988 , cet office fut exercé , quant à la juf^
tice dans le palais , fous le titre dz.ccnciergs
C O N
dupahtis y avec moyenne & bafle-juftice ,
dontle territoire étoit peu étendu. Phiiippe-
Augufte , par des lettres de l'an 12.02 , y
ajouta le fauxbourgl'aint Jacques & Notre-
Dame des Champs , & le fief royal de S.
André qui y ell iitué. Le concierge ou bailli
du palais y avoit encore la juftice en 1^67.
Les mêmes lettr-es afiignent au concierge du
palais des gages , droits & privilèges.
En 1286, au commencement du règne
de Philippe-le-Bel , le palais que nous voj'ons
aujourd'hui , fut bâti par les Ibins d'Enguer-
rand de Marigny , général des finances. La
conciergerie qui fért aujourd'hui de prifon ,
étoit le logement du concierge du palais. Par
un arrêt de l'année 131^ , elle fut réunie au
domaine du roi , avec (qs appartenances. En
1348 , du temps de Phili'ppe-de-Valois , le
concierge fut érigé fous le titre de bailli; mais
on a joint le? deux titres de concierge-bailli.
En l'an 1348 , Philippe de Savoify , écuyer ,
(m concierge du palais royal h Paris. Joly,
en fes offices de France , a donné une lille
de tous ceux qui ont depuis rempli celui-ci
jufqu'en 1624 , dont plufieurs étoient des
perfonnes de grande confidération. Sous
le roi Jean , Charles V alors régent du
royaume , accorda , par àes lettres du mois
de Janvier 1358 , plufieurs droits au con-
cierge du palais ; ces lettres font mention qu'il
a juiîice moyenne & baflè dans l'enceinte du
palais ; qu'il y tient fa cour & jurifdidion
par lui , fon Heutenant ou garde de fa juf-
tice , & {qs officiers *, qu'il connoît entre
quelques perfonnes que ce foit , de tous les
cas civils , criminels , & de police ; que nul.
aucre juge n'a jurifdidion temporelle dans
l'enceinte du palais , fi n'ell les gens des
comptes-, du parlement, des requêtes du
palais , & des requêtes de l'hôtel : ces mê-
mes lui attribuent ditFérens droits , entr'au-
tres la juffice fur les aa vents ou petites bou-
tiques adoiiees aux murs du palais , des cens
&: rentes fur plufieurs mailons ; le droit de
donner & ôter les places aux merciers qui
vendent dans les allées de la mercerie , &
en-haut & en- bas au palais , & les lettres lui
permettent d en recevoir un prcfenr une
fois l'an : il y efl: encore dit qu'il a k juftice
moyenne & balîê , & la lèigneurie cenluelk
{ur treize maifons fituées à Notre-Dame des
Cliamps ; au lieu nommé les Mureaux{^ro-
C O N 80J
che les carmélites du fauxbourg faînt Jac-
ques ) différens droits. Quand on faifoit un
nouveau boucher en la boucherie du châ-
telet , le concierge du palais àtwQii^von- .^ a
caufe de fa conciergerie , trente livres &:
demie , la moitié d'un quarteron & la moi-
tié de demi -quarteron pefant de chair moi-
tié bœut & moitié porc ; la moitié d'un cha-
pon plumé, demi-feptier de vin , & deux
gâteaux : & celui qui les alloit chercher ,
devoit donner deux deniers au chanteur qui
étoit en la falle des bouchers. Il avoit feul
le droit de faire enlever les arbres fecs qui
étoient entre toutes les voiries & chemins
royaux de la banlieue & vicomte de Paris.
Il avoit auffi un droit de fouage dans la fo-
ret d'Yveline , & quelque inff)eâion furies
greniers à blé du roi. Lorfqu*il écrivoit h
Gonelîe pour faire venir du blé & autre
choie au grenier du roi , les écorcheurs de
la boucherie de Paris étoient tenus de porter
ou envoyer fes lettres à leurs frais , fous
peine d'amende. Il avoit toutes les clés du
palais , excepté ceiles de la porte de devant ,
& avoit infpeâion fur le portier & fur les
fentinelles du palais. Enfin , fuivant cts let-
tres , il étoit voyer dans l'étendue de Çà.
jullice. En 141 3 , la reine tint ]a concier-
gerie en lés mains , le roi lui en ayant fait
don ; & liir l'empêchement qui lui fijt fait
à ce lujet parle procureur-général , dilant
qu'entre mari & femme donation n'avoit
lieu , elle répondit que cette loi n'?voit pas
lieu pour elle , dont il y a arrêt des 29 juillet
1412 , & 22 rnaî 1413- Juvénal chevaliei
fieur de Traynel , fut lait concierge bailli di.
palais : mais par arrêt du 3 Janvier 1416 ,
cet office tut de nouveau uni au domaine >
& on ordonna qu'il n'y auroit plus au pa-
lais qu'un g;irdien , qui auroit trois fous pa-
nfis par jour & un muid de Wé par an. Ce-
pendant ceux qui ont été pourvus de cet
office depuis 146 1 , ont été qualifiés de bail-
lis du palais.
La jurifdidion de la conciergerie , qu'on
appelle 1 relcntemcnt \e bailliage du palais, eft
compolèe d'un bailli d'épée , d'un lieutenant-
général , un procureur du roi , un greffier ,
plufieurs huiiliers. Les avocats au parlement
y plaident , & les procureurs au parlement y
occupent. Cette juriididion ne s'étend pré-
ièntcmenx que dans l'enceinrc du paiajs..' .-
So^ C O N
CONCIERGERIE DU PALAIS , voj.
Concierge.
Conciergerie ou Geôle de la
Conciergerie du palais , ainji
qu^elle eft nommée par les ordonnances y eft
la prifon qui eft dans l'enceinte du palais :
on l'appelle ainlî , parce que le concierge du
palais y logeoit anciennement, avant qu'il
eût l'endroit appelle depuis l'hôtel du bail-
liage ^ & qu'il y avoit fa prifon. Il y fait en-
core mettre {es pnfonniers. (A)
* CONCILE, f m. conciliiim, {Hift.
anc. ) alTemblée publique chez les Romains ,
où il ne fe trouvoit aucun patricien r ^lle
itoit tenue & convoquée par les tribuns du
peuple ; s'il s'y trouvoit quelques patriciens
l'afTemblée s'appelloit comice. Voye\ Co-
MICE. Les auteurs ont fouvent confondu les
.comices avec les conciles.
Concile , ( Hift. ecclef. & Jurifp. cano-
fiiq. ) Le concile eft une aflemblée de prélats
•catholiques , convoquée pour décider les
queftions de foi , ou régler ce qui concerne
la difcipiine. Nous le définiflbns une ajfem-
hlée de prélats , parce que , fuivant la difci-
piine moderne , les {impies prêtres n'ont
point féance ni droit de fuffrage dans \ts
conciles. A l'égard des premiers fiecles de
l'églife , quelques-uns penfent que non-feu-
lement les évêques , mais même les prêtres &•
les diacres y étoient admis , & il faut conve-
nir que plulieurs textes leur font favorables.
Nous voyons dans le concile de Jérufalem ,
le plus ancien de tous , & dans lequel on
décida la fameufe queftion qui s'étoit élevée
à Antioche fur l'obfervation des cérémonies
légales ; nous voyons , dis-je , que les prêtres
y prirent féance avec les apôtres , convene-
runt apoftoli Ù feniores videre de l'erbohoc,
jdifent les adcs des apôtres , c. xv. verf. 6*. Le
jnot latin /^/ï/orej- , & le mot grec TÇiiCvrîfoi ,
iic fignifient point autre chofe que les prê-
tres. Au v,erlet 22 du même chapitre , où
l'on conclut d'envoyer à Antioche avec
Paul & Barnabe , deux hommes choifis &
-des premiers d'entre les frères , Barfabas &
Silas , & où on les charge d'une lettre qui
-contient la décifion du concile , cette réfo-
iution paroît être également l'avis des pî-ê-
tres comme celui des évêques ; tune placuit
■apeflolis ^ fenioribas ) &c. Suivant mên^e
^p texte grec, la lettre eft eonçu^ au nom
C O N
des apôtres , des prêtres , & de tous les frè-
res : 01 XTÔÇ'OhOl Ketï ol TfivCvTipl ol aj'ihpOl»
Il y a lieu de croire pareillement qu'au corz-
cile de Nicée les prêtres & les diacres pri-
rent féance avec les évêques , & que dans
le nombre des trois cent dix-huit pères dont
ce concile fut compofé , on ne doit compter
que deux cent cinquante évêques , cnfortc
que les autres étoient des prêtres & des
diacres. En efibt Eufebe , rie de Confiantin,
lii'. IIl. ch. viij. dit qu'il y eut à ce concile
plus de deux cent cinquante évêques , &
un nombre confidérable de prêtres , de
diacres , d'acoiytes & autres. Le témoignage
d'Euftathe rapporté par Théodoret , Up. I.
de fon hifl. eccl. chap. viij. vient à l'appui de
celui d'Eufcbe. Euftarhe prétend que plus:
de 270 évêques fe trouvèrent au concile de
Nicée. Or Eufebe de Céfarée & Euftathe
d' Antioche font des témoins oculaires. L'o-
pinion néanmoins la plus générale , eft que
les évêques étoient au nombre de trois cent
dix-huit , raflemblés de toutes les provinces
de l'empire. Voye-^ Socrate , liv. I. chap. v,
Théodoret , liv. I. chap. vij. Athanafe dans
)a lettre à l'empereur Jovien ; Epiphane,
héréfie l^cjx. Ruffin , liv. I. chap. j. Et fi dans
les actes qui nous reftent de ce concile , nous
ne trouvons pas ce nombre d'évêques par
les foufcriptions , il faut l'attribuer à l'injure
du temps. Mais quoi qu'il en foit , ceux qui
veulent que les prêtres & les diacres ont eu
anciennement droit de fliffrage conjointe-
ment avec les évêques , fe fondent fur ce
que ces dilîerens auteurs font mention
qu' Athanafe , pour lors diacre d'Alexandre,
patriarche d'Alexandrie , aflifta au concile &.
y foutint tout le poids des affaires ; que
Vite & Vincent , ftmples prêtres , y repré-
fenterent le pape Sylveftre;d'où ils concluent
en général que les prêtres & les diacres y
prirent féance, & y foulcrivirent. Ils s'au-
torifent encore d'im endroit des ades du
concile d^Aquilée tenu en l'année 381. S.
Vaférien d'Aquilée tenoit le premier rang
dans ce concile ^ 6c S. Ambroife en étoit
l'ame : celui-ci interrogeanr le prêtre Attale ,
lui demanda s'il avoir foufcrit au concile de
Nicée-; mais Attale qui favorifoit la caufe
de Pallade & des Ariens, gardant le filence y
faint Ambroife iafifta en ces termes : Atta-
lus pfefbyter^ lieet inter Arianosjit , tamen
C O N
hahetamoruatem loque ndi;p rofiteaturmrum
fubfcripferit in tractam concililfub epifcopo
fuo Aggrippino , an non : tome II des conci-
les, p. ^7<) Ùfuii'. Ces paroles', difejit-ils,
annoncent clairement que les fimples prêtres
avoient droit de parler dans les conciles y &
pouvoient foufcrire aux ades qp'on y drc(-
foit. Ils tirent un nouvel avantage de ce
qu'Eufebe , liv. VII. ch. xxjx & xxxjx dit
qu'on tint à Antioche un concile contre Paul
de Samofare ; que Malchion , qui de préfet
de l'école d' Antioche , avoit été promu à l'or-
dre de prètnfc à caufe de la pureté de
fa foi , & qui d'ailleurs étoit fort favant &
grand philolophe 5 convainquit l'iiéréfiar-
que , découvrit fes artifices , & manifefta
malgré lui (es fcntimens. Or il parott que
dans ce concile , les prêtres opinèrent auflî-
bien que les évêqyes , fi l'on fait attention
à l'infcription de la lettre adrelfée aux autres
eglifès après la condamnation dts dogmes
impies de PauLEufebe nous aconfervé cette
kttre , dont voici l'infcripcion : Di<miJio &
Maximo , & omnihits per univerfum orbem
comminifirïs , epifcopis , presbyte ris , & ec-
clejiœ quce fub cœlo eji , Helenus ù Hyjnœ-
neus , Theophylus , &c. Ù reliqui omnesqui
Kobifcum funt vicinasum urbium Ù prqi^'in-
ciarum epifcopi , presbyteri ac diaconi , &
ecclefiœ IDei : carijjimisfratribus in Domino
falmem. Enfin , pour dernière preuve de ce
qu'ils avancent , ils font valoir l'autorité que
Louis Aleman, vulgairement appelle le cardi-
nal d"" Arles , employa dans la harangue
qu'il prononça au concile de Baie , pour réfu-
ter Panorme & Louis Romain qui foutenoient
l'opinion contraire , & du témoignage que
cet illufîre prélat rend en cette occafion lur
un fait qui lui eft perfonnel. L'autorité qu'il
emploie eft celle de S. K\igui)jnin.traclatu
5°. in foan. cap. xij. Suivant ce faint doc-
teur , les clés ont été donaiées eri la per-
Ibnne de S. Pierre à toute l'églife , & par
Gonféquenrai*ic évêque &auxprêtress ; de-
là ce cardinal infère que les prêtres font
partie du concile , quoiqu'il foit principale-
ment compofé d'évêques. Enfuite il ajoute
que pour lui il s'eft trouvé & a donné fa
voix au concile de Confiance , dans le temps
qu'il n'étoit que doâeur & fimple prêtre ,
& que les conciles précédens fournifîênt
.d'autres exemples de ce genre, Celas'jiccorde
C O K go7
' parfaîternent avec le fyflême du célèbre Ger-
ibn chancelier de l'univerfité de Paris , d'Al-
main profefTeur en théologie à Navarre .
& de Simon Vigor confeiller au grand-con-
feil , qui penfent que les prélats du fécond
ordre , c'eft-à -dire les curés , doivent avoir
dans \QConcileyo\x déciiive. Fqy^:^Gerfon ,
de origine juris & legiim , Almain , de fu-
premâ potejlate ecclejiœ , & Vigor y deflam
Ù regimine ecclejiœ , liv. IV. cap. ult. Ce-
pendant M. Doujft , homme verfé dans les
m.atieres du droit canon , efl d'un fènti-
raent oppofé ; il prétend que les évêques
jouiffent feuls de la prérogative de donner*
leurs fuffrages , tant aux conciles œcuméni-
ques que nationaux & provinciaux ; & que
fi quelquefois dans les anciens conciles il eit
fait mention de prêtres & de clercs , ou
d'abbés & autres perfonnes religieufes , dans
ceux qui font plus récens , tels que les co/2-
ciles de Latran , on doit entendre fimple-
ment qu'ils étoient confultés ; & non pas
qu'ils aient eu voix. Prxnot. can. lib. IL
cap. j. Il s'appuie principalement fur ces pa-
roles du concile de Chalcédoine , fynodus
epifcoporum eJi , non clencGrum ; fuperflaos
foras mittite. Adion j. t. IV. des conc. /î.-
m. Mais on réplique que ces paroles ne.
font autre chofe que les clameurs qu'exci-
tèrent dans le concile les évêques d'Egypte.
Ils étoient du parti de Diofcore qui avoir
tenu le faux concile d'Ephefe contre Flavien
de Conftantinople. Les évêques voyant que
Diofcore ctoit fur le point d'être condamné ,.
& que les clercs qui avoient. affiflé au faux
concile d'Ephefe s'excufoient d'y avoir fouf^-
crit furies menaces & la violence qu'on leur
avoit faites , demandèrent à- grands cris
& en fe fervant de ces paroles , qiion chaf-
fât du concile. Ils ajoutoient pour raifon ,
que l'empereur n'avoir mandé que les évê-
ques , ibid. p. i 2 5- mais ils ne furent point,
écoutés , & les clercs ne fortirent point.
Cette réponfe efl celle que fit autrefois Ic
cardinal d'Arles à l'objeâion q'j'on tire de-
ce pafîage , dans la harangue citée ci-defl'us..
Enée Sylvius , depuis le pape Pie II , l'a rap-
portée toute entière , liv. I. des mém.fur ce-
qui s^eftpafï au concile de Sale. CettehiLm-
rangue efl.a une éloquence mâle , & mérite
d'être lue. Nous avoueronsici de bonne foii
que l'éloi^aernent des. temps jette, fur cette:
8gS C O N
matière une grande obscurité : fi d'un cote
l'on cire des exemples de fimples prêtres qui
ont foufcritaux conciles , & même ont opi-
né comme membres de i'alî'emblée ; d'un
autre côté Ton peut dire i°. que la (ouf-
cription toute feule n'eft pas une preuve
qu'on ait eu la qualité de juge dans le con-
cile ) mais uniqiiement une marqtae de ibu-
miliion & d'acquiefcement à Tes diciiions :
2'^. que même dans les cas où il efl: mani-
fefîe que des prêtres 0% 3es diacres ont
donné leur voix , ce font des exceptions
du droit commun , fondées vraifemblable-
ment fur ce qu'ils éroient desrepréfentans ,
foit du pape , comme dans le concile de
Nicée , foit des évêques. C'efl ainfi que les
Théologiens , pour la plupart , expliquent
les divers paflages qu'on allègue en faveur
des prêtres & autres clercs. Au refle , nous
nous abfiiendrons de prononcer fur cqs dit-
ficulrés , qui ne regardent , comme nous
l'avons déjà obfervé , que les premiers fiecles
de i'Eglife , la difcipline des temps porté-
rieurs étant certaine. Nous allons mainte-
nant examiner l'origine ^qs conciles , nous
paiîerons enfuite à leurs divifions , & nous
développerons les principes de chacun d'eux
eA particulier.
Ifidore , dans le premier canon d*e la dif-
tindion dix-feptieme du décret de Gratien ,
fait remonter l'origine des conciles au temps
de Conflantin. Avant lui , dit-il , pendant
le cours des perfécutions , on n'avoit pas la
liberté d'inftruire les peuples ; c^tH ce qui
donna lieu aux diverfes îtSits d'hérétiques
qui s'élevèrent parmi les chrétiens. Pour
rçmédier à ces défordres , Conflantin accorda
aux évêques la permiiîionde s'afîembler. On
célébra difFérens conciles , dont le plus
remarquable efl celui de Nicée , où l'on drefîâ
un fécond fymbole , à l'imitation des apô-
tres. Il faut avouer néanmoins qu'avant ci
concile il s'en étoit déjà tenu plulieurs na-
tjpnaux , par exemple en Afrique du temps
de Saint Cyprien ; & d'autres particuliers ,
tels que celui d'Elvire au commencement
du jv fiecle , & celui d'Iconc en l'an 251.
Ajnfi ce que dit Ifidore doit s'appliquer aux
conciles gen4faufe,,En effet, fi vous en excep-
tez celui de lérufflem , du temps des apô-
tres , le premier concile général eft celui de
NJc^e , célébré dans un temps oy la paixfyt
C O N
rendue à l'églife , où elle fe vit à l'abri
àcs perfécutions àcs païens. Mais quoiaiie
les conciles , & principalement ceux qui font
généraux , ne remontent de fait qu'au temps
où les prélats ont pu s'aff^mblcr & traiter ou-
vertement de la foi & delà difcipline , il n'en
ell pas moins vrai qu'ils prennent leur Iburcc
dans la nature même de réglifè. Le corps de
l'églife compofé de plufieurs membres , e(l
lié par la charité & la conmiunion âts Saints.
J. C. lui-même eft la bafe de cette union , &
le Saint-Eiprit y coopère , épitre première
aux Corii\th. ch. xij. Et dans X épure aux
Ephejîens , cli. v. il efl dit que J. C. efl le
chef & l'époux de TEgli 'e , dont il cfî le
fauveur , qu'il a aimé l'églife , & s'eft Hvré
à la mort pour elle ; qu'il l'a fait paroître
devant lui pleine de gloire , & n'ayant ni ta-
che , ni ride , ni rien de femblable , mais
étant fainte & irrépréhenfible ; qu'il la nour-
rit & l'entretient , parce que nous fommes
les membres de fon corps , formés de fa
chair & de i^ts os. Ce langage de l'apArre
efl conforme à celui de J. C. dans S. Mat-
thieu, ch. XV, verf. z 5. où , après avoir don-
né les clés à {^s difciples , c'eft-à-dire la puif^
fance de her &; de délier , il leur adrefle ces
paroles : Iterum dico vcbis , quia Ji duo
exvohis confenferint fuper terram ^ de omni
re quamcumque petierint J fict illis _à pâtre
meo qui efl in ccclis ; ubi enim funt duo l'el
trescongregatiin namine meo^ ibifum in me^
dioeorum. Et dans S. Jean , ch. xvij. après
avoir prié fon père pour les apôtres , il le
prie encore pour ceux qui doivent croire en
lui par leur parole,* & il ajoute verf. zj,
Ego in èis , & m in me , utfint confam-
mati in unum. Or l'EgHfe a toujours cru
qu'elle ne pouvoir jamais mieux repréfenter
cette unité , & n'avoit point de moyen plus
efficace pour l'alFcrmir , pour conferver la
communion de la foi , lorfque les impies
s'efïôrcent d'y porter atteinte , que de rai-
fembler les évêques envoyés par Jefus-
Chrill en la pcrfonne des apôtres , pour
apprendre aux nations la parole de la
foi qui leur a été rranfmile. Ce font eux
qui font les dépofitaires de la promeiîe
qu'il a faite d'être avec fon Eglife jufqu'à
la confommation des fiecles , d'empêcher
que les portes de l'enfer ne prévalent jamais
contr'elle ; S. Matthieu , ch. xvj. verf. z $,
ch. xxviij^
C O N C O N So^
ch, xxpîij. verf. zo. Auiîî voyons-nous que f qu*ll nous e{l facile de démontrej* en mar-
ie cardinal Bellarmin , lil>. I. de conciliis Ù
ecclejiâ y cap. ij. fonde la néceiEté des con-
ciles 1°. fur ces paroles de Jefus-Chrill ,
ubifunt duo vel ires , &c. qui doivent s'en-
tendre des conciles f fuivanc l'interprétation
<îu concile de Chalcédoine dans la lettre
fynodale au pape Léon : 2°. fur ce que \ts
apôtres ont pratiqué eux-mêmes : quoique
chacun d'eux eût une autorité fuffifànte pour
décider les contellations qui s'élevoient , ils
ne voulurent pas cejpendant , fans un concile ,
prononcer fui^ l'oblervation des cérémonies
légales , dans la crainte de paroître né-
gliger une vole que Jefus-Chrill leur avoit
cnieignée : 3°. fur la coutume que l'Eglife a
obfervée dans tous les fiecles , de (;enir con-
cile toutes les fois qu'il s'agiflbit de (ij^ueftions
douteufes. C'eft donc au foin important de
confèrver l'unité de la foi , c'eft à la nécef-
iitè d'avoir le fentiment général de l'EgUfè ,
qu'il faut rapporter l'origine des conciles.
Un nombre infmi de paifages àcs SS. pères ,
(ùr-tout l'homélie xxix. de S. Bafile , ad-
verfus calumniatores fanclce Trinuatis ,
& (à lettre Ixxxij. nous confirment que
l'ufage de les convoquer efl établi fur ces
puiiîan^ motifs. Les conciles £n font d'au-
tant plus refpeûables aux yeux des fidèles ,
puifqu'on leur doit la même vénération
qu'à l'Eglife qu'ils repréfentent.
On divife les conciles en généraux & par-
ticuliers. Les généraux ou œcuméniques font
ceux où l'on appelle les évêques de toute la
chrétienté. Ces conciles y qui tiennent avec
railbn le premier rang , offrent une matière
<iont les principes ne font pas admis univer-
fellement ; c'e'H pourquoi nous tâcherons de
les difcuter avec la plus fcrùpuleufe exac-
titude : voici l'ordre que nous nous propo-
fons de fuivre : Nous verrons 1°. par qui ces
conciles doivent être indiqués ; 2.°. comment
on doit les convoquer ; 3*^. quelle efl la
matière qu'on y traite ; 4°. la forme fuivant
laquelle fe tient le concile ; 5°. quelle eft l'au-
torité des conciles généraux. A l'égard de la
première queftion , fi l'on confultc les neuf
premiers fiecles de l'églife , ils femblent d'é-
pofer en faveur des princes. En effet , nous
Trouvons que pendant ce long cfpace de
temps , les princes ont été en poflèlCon de
quant la fuite des conciles. Le premier co/x-
c lie général y tenu à Nicsel'an 32,5 , fousîe
confùlat de Paulin & de Julien , fut indiqué
& convoqué par l'empereur Conftantin ,
fuivant le témoignage d'Eufebe auteur con-
temporain, vie de Conftantin, lip III. chap,
l'j. où il dit que ce prince convoqua le coU"
cile &c invita par [es lettres les évêques de
s'y trouver au plutôt. Socrate , liv. /, ch»
viij. Sozomene , liv. I , ch. xi-'ij. & enfin.
Théodoret, liv. I. ch. vij. non-feulemenc
font d'accord fur ce point avec Eulébe ,
mais même aucun de ces écrivains ne fait
mention que le pape Sylveftre eut part à
cette convocation ; ce qu'ils n'eufîcnt point
omis, s'il étoit vrai, qu'on eût alTemblé le
concile par les ordres du pape. M. Bignon ,
qui eildc cet avis , cite Ruffin , lit-'. JÇ*» ch.j^
où cet auteur rapporte que le concile fiit in-
diqué par Conflantin d'après le fentiment des
évêques. Mais les paroles de Ruffin ne ligni-
fient rien autre chofe , finon que l'empe-
reur avant d'alfembler le concile , demanda
aux évêques [eur avis ; ce qui n'empêche pas
qu'il n'ait , en le convoquant , fait un ade
d'autorité j les princes ne rougilîênt point
de confulter ceux de leurs fujets en qui ils
ont le plus de confiance , & les ordres qu'ils
donnent eniuite n'en font pas moins éma-
nés du trône. Le fécond concile général ^ ou
le premier de Conflanrinople , qui fe tinc
l'an 381 , fous le confùlat de Siagre & d'Eu-
cher , fut convoqué par 4'autorité feu!e de
Théodofe le Grand. Aucun hiflorien n'at-
tribue la convocation de ce concile au pape
Damafe , qui occupoit alors le faint fiege;
perfonne même n'y alîifla de fa part. M.
Doujat néanmoins penfe le contraire , fe
fondant fur le témoignage tiré de la lettre
fynodale que rapporte Théodoret , liv. I,
ch. ix. Dans cette lettre les PP. du concile
de Conflantinople afîurent le pape Damaie
qu'ils fe font affemblés dans cette ville ,
conformément , difent-ils , aux lettres que
votre révérence a écrite^ l'année précédent?,»
après le concile d'Aquilée , au très-religieux
empereur Théodofe. Mais il eff à remar-
quer 1°. que cette lettre n'efl pas fimplç-
ment adrelfée au pape Damafe, mais ea--
core à Ambroife , Britton & piufieurs au-
convoquer les conciles généraux \ c'eil ce | très , dpat les rtams fûiU à la tête de la ietup ^
Tome VIIL
\iiï
2io C O N
& même à tous les évêques qui pour
lors renoient un concile à Rome : 2°. que
cette lettre n'eii jJoint des PP. du premier
concile de Conftantinople , mais d'un autre
concile de Conllantinopie qu'on ne compte
point parmi les conciles œcuméniques , &
qui fe tint l'année fuivante 381 , après le
concile d'Aquilée. Dans le courant de Tan-
née 381, immédiatement après le premier
concile de Conflantinople , on avoit tenu
celui d'Aquilée ; & dans ce concile les PP.
écrivirent à Théodofe , & le fupplierent
d'afTembler un concile à Alexandrie pour
appaifer les diflèntions de l'églife d'Orient.
L'empereur touché de la milere des Occi-
dentaux , convoqua un autre concile ^ non
■ à Alexandrie , mais à Conftantinople ; c'ell
de la convocation de ce fécond concile de
Coniîantinople dont parlent les Orientaux
dans la lettre dont il eft ici queftion , &
qu'ils adreflerent aux mêmes évêques qui
s'étoient auparavant alîcmblés au concile
d'Aquilée. Le rroiiieme concile général y ou
le premier d'Ephefe , tenu l'an 43 1 , fous
le confulat d'Annius Ba{îus«& de Flavius
Antiochus , fut convoqué par Théodofe le
Î'eune ; nous en avons la preuve dans la
ettre de ce prince à Cyrille , patriarche
d'Alexandrie , & aux métropolitains , partie
première du concile d'Ephefe, ch. xxxij, tom.
III. des conciles y pag. 43^- Théodofe leur
ordonne par cette lettre , de fe trouver après
la Pâquc prochaine , le jour même de la
Pentecôte , dans la ville d'Ephefe pour y tenir
-concile. Le pape Céleflîn non4eulement en-
voya fes légats pour fe conformer aux in'-en-
tions de l'empereur , mais ilreconnoit encore
expreffément qpe le concile fut convoqué par
ce prince, dans la lettre qu'il lui écrit. Ces
paroles de la. lettre font remarquables : Huic
f y no do y dit le pape , quam ejje jujjifli y
nofiram prcefentiam in lus quos miaimus y
exhibemus : tome IH. des conciles , pag.
609. Le concile de Chalcedoine , ou le qua-
trième concile général , fût célébré l'an
451, à la vérité fur les vives infîances de
S. Léon , pour lors fouverain pontife ; mais
ce fut l'empereur Marcien qui le convo-
qua , comme le prouvent deux lettres im-
périales, à la tête defquelles font les noms
de Valentinien & de Marcien. L'une de cts
lettres efl aJreffée à tous les évoques de cd
COK
temps-Ii\, & l'autre à Anaiîafe eVcque ât
Conflantinople, partie première du concile
de Chalcedoine , ch. xxxij. & xxxvij. tom.
iVdes conciles y pp. 6'&& 6j. Marcien leur
enjoint de s'afîembler aux prochaines kalen-
des de Septembre , dans la ville de Nicée
de la province de Bithynie , pour y tenii:
concile. On a une autre lettre de l'empereur,
par laquelle il transfère le concile de Nicée à
Chalcedoine, fom. IV^. des conciles y p. jo.
La raifon de ce changement fut qu'il vouloit
affifler au concile y & que ne pouvant aller
à Nicée , il lui étoit plus commode qu'on le
tînt à Chalcedoine , ville fituée dans le voi-
fmage de la capitale de l'Empire. Le pape
Léon eft bien éloigné de defavouer que
cette convocation du concile ait été faite
par le prince : Fraterna unii'erjitas y dir-il ,
lettre Ixj. ou Ixxxviij. fuivant les nouvelles
éditions, 6" omnium fidelium corda cognof-
cant y me non foliim perfratres qui i^icem
m.eam exfecutifiint y fed etuim per approka^
tionem gefiorumfynodaliumpropriam vobif-
cum iRii'iJfe fententiam y infolâvldelicet
fidei caufâ y quod fœpè dicendum efi , pfap-
ter quàm générale concilium ex praccepro
chriflianorum principum ù ex confenfuapof-
tolicx fedis placuit congregari. On voit allez
clairement par ces paroles , que Léon dillin-
gue l'ordre des princes du confentement du
iàint fiege. D'ailleurs plufieurs autres lettres
de ce pape nous apprennent qu'il avoit con-
ienti avec peine que le concile fe tînt en
Orient , aimant mieux qu'il fc célébrât en
Italie. Or s'il eût cru que le droit d'indi-
quer le concile lui eût appartenu , il n'eût
pas manqué , vu les difpofitions où il étoit ,
de le convoquer dans une àçs villes d'Italie.
Le cinquième concile œcuménique , ou le
fécond de Conflantinople , fut indiqué par
Juflinien. Evagre , liv. IV. ch. xxxvij. Ni-
cephore , In*. XVII. ch. xxt'ij. Nous avons
de p'us une lettre de cet empereur , dans
laquelle il annonce qu'il a mandé à Conf-
tantinopïe les métropolitains ; &. , ce qui
efl digne de remarque , il y prefcrit aux
pères du concile l'ordre fuivant lequel on
y traitera les différentes affaires , tom. V.
des conciles y p. 419. Vigile , fous le ponti-
ficat duquel ie tint le concile l'an 553, étoit
pour lors à Conflantinople. Il fut invité d'y
aflifler , mais il le refufa ; & quoiqu'il eût
C O N
condamné par Ton judicatum la doârine
impie de Théodore deMopfuefte , il défap-
prouva au commencement la conduite du
concile y en ce qu'il prononçoit l'excommu-
nication & l'anathême contre Ats morts ,
qui , félon lui , dévoient être abandonnés
au jugement de Dieu. Cependant le pape
dans la fuite changea d'avis , & fix mois
après la conclufion du concile , ratifia tout
ce qui s'y étoit pafTé. Le fixieme concile gé-
néral y bu le troilieme de Conitantinople ,
fut indiqué par l'empereur Conltantin Po-
gonat , & tenu contre les Monothelites Tan
680 & 681, en préfence des légats d'Aga-
thon , fouverain pontife. Conllantin avoit
écrit à ce fujet au pape Domne , prédécef-
feur d'Agathon , & l'avoit invité d'envoyer
au concile des perfonnes qui puflènt y erre
utiles , qui fufl'ent veriées dans la connoif-
fance des faintes écritures , & rccomman-
dables par leur modeftie. La lettre efl rap-
portée tom. VI. des conciles , p. 594, on
y trouve aulii la réponle d'Agathon , fuc-
celTeur du pape Domne , dont on fit lec-
ture dans l'adion quatrième du même con-
cile y tom. V^I. p. 030. Il déclare dans cette
réponfe , que pour obéir efficacement &
comme il le doit aux ordres de l'empereur ,
il a fait choix de perfonnes telles que le
prince les demande , & qu'il les envoie à
Conilantinople. Le feptieme concile général y
ou le fécond de Nicée , fut convoqué l'an
785 par l'impératrice Irène & Conftanrin
fon fils. Cell ce que nous apprend la
lettre impériale adrefîée au pape Adrien
premier , par laquelle on l'invite dfe fe trou-
ver au concile qui devolt fe tenir incef-
famment , tom. VII. des conciles y p. 32.
Ce fouvej[ain pontife envoya en effet àts
légats qui "^ili fièrent au concile y & lui-
même enfuite en ratifia les ades. Enfin le
huitième concile général ou le quatrième
de Conflantinople , tut indiqué par l'empe-
reur Bafile furnpmmé le Macédonien , dans
un temps où Rome & l'Italie ne faifoient
plus partie de l'empire d'Orient. Ce con-
cile fe tint l'an 869 fous le pontificat d'A-
drien II , qui en approuva la décifion. Nous
trouvons la preuve que la convocation fijt
taite par l'empereur Bafile , dans l'hifloire
de ce concile écrite par Anafhfe le biblio-
thécaire , & dans i'adion cinquième du
C O N 8rr
mcme concile y telle qu'Anaflafe Ta traduite
en latin. On y rapporte qu'Hélie prêtre &
fyncelle de l'églile de Jérûfalem , voulant
prouver la légitimité du concile y adrefîa la
parole en ces termes aux PP. dont il étoit ^
compolé : Scitis quia in prceteritis tempori^
bus imperatores erantqui congregaBantJjnC"'
dos y &ex toto terrarum orbe vicarios addif-
pojitionem hujufmodicaufarum colligebant;
quorum more , Ù Dei cultor imperator nof^
ter univerfàlem hanc fynodura fecit , Ùc,
Anafîafè remarque dans une note margi-
nale qu'il efl ici queflion des conciles gêné'-
raux y & que les conciles particuliers n'ont
jamais , ou rarement , été convoqués par
les empereurs. Nous verrons dans la fuite
fi cette obfervation efl jufîe.
On ne peut donc pas douter que pendan^
un temps très - confidérable , les princes
n'aient convoqué les conciles généraux. Mais
étoient-ils en droit de le faire ? étoit-ce une
ufurpation de leur part ? c'cft ce qu'une fim-
ple réflexion va décider. Lesprinces ont été
établis par Dieu même pour gouverner les
peuples & maintenir l'ordre public dans
l'étendue de leur domination : d'un autre
côté, la confervation de la rel'gion contri-
bue au bien & à la tranquillité de l'état ;
or , il n'y a point de voie plus fûre pour
préferver la religion de toute atteinte , que
d'afTêmbler les conciles ; c'efi par eux que
la vérité fe fait jour, que la laine doârine
fe trouve raffermie jufque dans fes fonde-
mens , que les liens de la charité & de la
communion fraternelle font refîêrrés entre
les fidèles. Cela étant ainfi , on a cru avec
raifon pendant les premiers fiecles de l'égli-
fe , que le droit de convoquer les conciles
appartenoit à celui qui , en vertu de la di-
gnité dont il efl revêtu , le trouve chargé
du foin de veiller au bien de l'état. Ajoutez
à cela que , lorfqu'il s'agit de la foi & d'^s
mœurs, les hommes impies ou déréglés fe
fervent de toutes fortes de rufes , foit pour
éviter une condamnation , foit pour fe fouf^
traire à la peine prononcée contre eux ; que
d'ailleurs l'églife n'a point de puifTance coac-
tive , mais limplement la voie de l'exhor-
tation , & ne peut mettre en ufage que les
peines fpirituelles & médicinales. H eft donc
néceffaire de recourir à ceux qui font armés
du glaive , c'efl-à-dire aux princes , afin que
I i i i i i
«iz CON
^çi-Tonne n ofe rcMer aux conciles afîem-
blés par leur autorité.
Ce ientiment à la vérité efl entièrement
oppofé à celui qu'çmbralîe Gratien dans la
àftinûion dix-feptieme de Ton décret , où il
fuppofe comme un principe inconreftable ,
-que le droit de convoquer les co/i^ri/ej g-/«e-
raux n'appartient qu'au faint liège. De-là
jîiême les interprètes ont conçu ainfi la rubri-
que de cette dillinction : papœ eft generalia
concilia congregare. Gratien y a raflèmblé
tous les canons qu'il a cru favorables à cette
prétention des fouverains pontifes. Mais un
court examen de ces canons appuyé fur la
faine critique , en détruira bientôt l'authen-
ticité.
' Dans le premier canon , il efl dit que l'em-
pereur ne peut régulièrement célébrer un
concile fans l'autorité du pape , ni condam-
ner un évêque iitot qu'il a une fois appelle
au fàint fiege : mais ce can.on efl tiré de la
i^iufîé décrétale du pape Marcel au tyran
ivlaxence. Nous dirons qu'elle efl faufîe ,
non-feulement parce que ce vice efl com-
inun à toutes les décrétalts attribuées aux
fouverains pontifes qui ont précédé le pape
Sirice , mais encore parce que le contexte
ienticr de la lettre , qui eft remplie de barba-
tifmes, & qui contient divers paffages de
l'Ecriture tirés de la verfion appellée vulgate,
très-poftérieure au pape Marcel , nous four-
nit àts preuves de fauflété qui font parti-
"culieres à cette décrétale. D'ailleurs , eft-
îl vraifemblable que le tyran Maxence ,
prince idolâtre , ait jamais penfé à raffemblcr
un concile d'évêques , & conféquemment
■que le pape Marcel ait eu lieu de lui tenir
un pareil langage , favoir qu'il ne peut cé-
lébrer un concile fous l'autorité du faint
"ïiege ? Enfin , quand même Maxence n'auroit
point été livré à la fuperftition du paganifme ,
le pape auroit-il pu lui dire qu'il n'a plus
le droit de condamner un évcque , fitôt que
_<çelui-ci a appelle au faint fiege , comme
fi, du moins avant cet appel , la condam-
nation d'un évêque étoit du refîbrt de la
jurifdidion d'un prince féculier ? Le lècond
"canon renferme la même maxime , que l'au-
torité du pape eft néceffaire pour la célé-
bration des conciles généraux ; aulii n'a-t-il
jpas une fourcc plus pure. Il eft tiré d'une
lettre faulîèmenr attribuée au pape Jules I,
CON
qui contient un refcrit contre les Orientaux
en faveur d'Athanafe. M. Bignon dans Çqs.
notes , avoue que cette décrétale eft altérée ,
pleine de fautes , & compofée de difîerens
fragmens. Le père Labbe va plus loin , &
n'befite point à dire qu'elle eiî entièrement
fauffe , & forgée à plaifir , tome III. des
conciles , p. 483 Ê? 494.. Elle paroît écrite en
haine du concile ^ Am\oc\\Q , tenu l'an 341 ,
& c'eft ce qui en fait voir la faulTeté ; car
elle eft adreifée aux confiais Félicien & Ti-
tien, qui, fuivant les faftes confulaires ,.
étoient confuls en l'an 337 > P^r coniéqucnt
quatre ans avant la tenue du concile qu'elle
blâme. Les canons iij & iv , fur lelquels-
Gratien croit pouvoir fonder fon opinion ,
& qu'il cite dans cette vue , ne prouvent
nullement que le concile œcuménique doive
être convoqué par l'autorité du pape. Dans
le canon iij , on y flatue en général que
perfonne n'ait la' témérité de s'arroger ce
qui n'appartient qu'au fouverain pontife ,
fous peine d'être privé de tous les honneurs
eccltfiaftiques. Cette déciiion ainfi conçue
d'une façon géiiérale , ne regarde en aucune
manière les conciles , fi ce n'efl en ce qu'elle
eft tirée de la lettre qui pafîé pour être la
quatrième de celles qui font attribuées au
pape Darriafe , & adrefîees à Etienne arche-
vêque d'Afrique , & aux conciles de la même
province. Or , la fauflèté de cette lettre pa-
roît , tant par les réferves fréquentes qu'on
y fait au fàint fiege des caufes majeures
( quoiqu'elles fu fient alors inconnues de
nom &: d'effet , ) que par la date du confu-
lat qui rapporte la lettre à l'an 400 , quoi-
que le pape Damafe fût mort dès l'année-
384. Dans le canon i'v , il eft queftion de
quelques évêques qui , lorfqu'il s'élevoit des
doutes fur ce qui avoit été ftajjfé par les
conciles généraux y s'aflémbloient dans des
conciles particuliers, & là jugeoientlei:o/2a7tf
général , ce que le pape Pelage 1 condam-ne.
Il défapprouve donc qu'un concile particu-
lier oÇt juger un concile univerfel , dont la
décifion eft celle de toute l'églife ; & il or-
donne que dans le cs.s où les evêqucs auront
quelques doutes fur les ftatuts des conciles
généraux , ils en écrivent au plutôt aux
fieges apoftoliques , c'eft-à-dire fondés par
les apôtres , dans les archives defquels on
gardoit les vrais ades des xonciUs y afin
C O N
qu'ils trouvent U furement ce qu'ils cher- l
cKent. On ajoure dans ce canon , que li ces
ëvêques font tellement opiniâtres qu'ils re-
fusent d'être iniiruits , alors il cû nécefîaire
qu'ils foient attirés au falut de quelque façon
que ce loit par les fieges apofloliques , ou
qu'ils foient réprimés fuivant les canons par
les puifïànces féculieres. Cette addition nous
ferable fufpede , en ce que nous ne voyons
pas comment les fieges apoftoliques peuvent
attirer au falut ceux qui retufent opiniâtre-
ment d'être inflruits : ainfi nous préfumons
que la fin du canon n'efl point de Pelage I ;
peut-être même la lettre entière , d'où le
canon efi tiré , eft-elle faufle. Ce qu'il y a de
certain , c'eft qu'elle ne fe trouve pas parmi
les lettres de Pelage , & qu'elle n'a paru que
depuis environ un fiecle, temps auquel Luc
Holfîein nous l'a |^fituée d'après pluficurs
fragmens. Le canon v, efl tiré de la lettre qui
porte le nom de Pelage II avec cette infcrip-
tion : DilecîiJJfmis fratribus unii'erjis epifco-
pisquiUlicitâ P'ocatione Joannis Confianti-
nopolitani epifcopi adfynodum Conjîanti-
nopolimconvenerunt y Pelagius. On recon-
noît la fuppofition de cette lettre à tant de
marques , que le P. Labbe , tome V. des
conçues y p. 948 , afîure avec confiance dans
une note marginale , que ce feroit être de
mauvaife foi que de ne pas la mettre au
rang des faulfes décrétales , dont Ifidore
nous a infedés ; qu'à la vérité Pelage II
avoit écrit à ce fujet , mais qu'on a perdu la
véritable lettre , & qu'on y a fubflitué celle-
ci qui a été fabriquée à ce defl'ein , comme le
démontrent le ftyle, qui n'efî pas celui du
temps , & plufieurs autres cliofes renfermées
dans le contexte de la lettre. De-là on peut
juger de quel poids efl ce canon , lorfqu'il
prononce qu'on ne doit pas célébrer de con-
cile faiîs l'avis du fouverain pontife ; qu'au-
trement ce n'efl point un concile y mais un
conciliabule. Le mot latin fententia% dont
fe fert ici l'impofleur , fignific la convention
dans le fens qu'il lui donne, au lieu que
nous nous contentons de dire qu*il faut de-
mander le confentement du faint fiege. A
l'égard du canon iv , on ne peut lui impu-
ter d'être falfifié ; mais c'efl mal-à-propos
que Gratien le cite pour appuyer fon fyfïê-
me ; il n'en peut rien conclure qui lui foit
favorable. Voici en peu de mots l'hiiloire
C O N 813
& re.xpofîtîcn de ce canon. Les praticiens
Faullinus & Probinus intentèrent divers
chefs d'accufation contre le pape Simma-
que, pardevant Théodoric roi d'Italie, qui
renvoya la connoifîance de cette affaire au
concile de Rome. Simm.aque ayant été dé-
chargé de ces accufations dans le quatrième
concile de Rome , fcs ennemis écrivirent
contre le concile , & donnèrent ce titre à
leur ouvrage. Adverfiis fynodum abfolu-
tionis incongrues. Ennodius , évoque de
Pavie , entreprit l'apologie du concile y &
cette apologie tut approuvée dans le cin"
quieme concile. Dans cette apologie Ennodius
fait tous {ts efforts pour relever l'autorité du
faint fiege & du pape ; il lui arrive même
très-fouvent de paflér les bornes légitimes ;
par exemple , il prétend que le fucceffeur
de S. Pierre ne pèche jamais ; il fonde ce
privilège de ne point pécher , tant fur les
mérites du chef des apôtres , que fur la pré-
éminence de la dignité en laquelle le pape
lui a fuccédé. C'eff de cette apologie rappor-
tée , tcm. IV. des conc. p. 1 340 , jufqu'à la
page 1359» qu'efl tiré je canon dont nous
parlons ici. Les adverfaires d'Ennodius ob-
jedoient ce qui fe lit au commencement du
canon : Numqiiid ob id quod prcefentiam
papœ non habuerint y inftituta ex regulis
ecclejiafiicis perjingulos annos in quibufque
proviîiciis concilia y eâ ratione invalida Jint^
ce qui feroit abfurde , de l'aveu même des
correcteurs romains. Ennodius répond : Le-
gifiis y infanijjîmi y &cc. & il fe laiffe telle-
ment emporter à fon zeie , qu'il foutieçt qu'on
ne trouve rien d'établi dans les conciles pro-
vinciaux contre la décifion du faint fiege y
& même que les caufes majeures doivent y
être renvoyées ; ce qu'il faut entendre àes
provinces voifines de Rome , & non des
autres , où certainement on célébroit alors
des conciles provinciaux fhns que le pape
s'en mêlât , & qu'il y eût la moindre part. Il
eu donc évident qu'il ne s'agit point dans ce
canon des conciles œcuméniques ; &c d'ail-
leurs l'on voit par les faits qui ont donné
lieu à l'apologie d'Ennodius , combien dans
ces temps-là le pape étoit peu refpedé en
Italie.
Nous avons démontré le peu de fôliditë
; des autorités compilées par Gratien , peur
établir que le pape a le droit de convoquey
8i4 C O N
les conciles généraux à l'cxclufion de toute
autre puiflance. Nous fommes parvenus à ce
but en arrachant le mafque de l'antiquité
que por'toient la plupart de ces autorités,
ou en rendant fenfible la faufleté des appli-
cations. Par-là les réflexions que nous avons
faites pour juftifier la conduite des empe-
reurs qui ont convoqué des conciles , de-
meurent dans toute leur force : s'ils ont
cefle d'exercer ce droit après l'époque que
nous avons marquée , c'elt-à-dire , après les
huit premiers coaciUs , nous devons l'attri-
buer , fans doute , aux changemens arrivés
depuis dans la chrétienté. Lorfqu'elle n'o-
béilToit qu'à un iluverain , il lui étoit facile
d'ordonner par un éJit aux évêques de s'af-
fembler dans un certain lieu pour y tenir
concile ; mais depuis que l'empire a été di~
vifé , & que le monde chrétien s'eft partagé
en divers royaumes , cela eft devenu , pour
ainfi dire , impraticable ': car les évéques
étant foumis à difFérens princes , dont l'un
ell indépendant de l'autre , il faudroit au-
tant de convocations qu'il y a de fouverains;
qu'ils convinlïent d'abord du lieu de l'allêm-
b!ée , pour y convoquer enfuite les métro-
politains & les évêques de leur royaume. Les
inconvéniens qui auroient réfulté de la diffi-
culté de s'accorder entr'eux , ont été caufe
que le droit de convoquer les conciles œcu-
méniques a été déféré au pape par Tulage &
du confentement des égliiès. On a jugé con-
venable que celui qui occupe la chaire de
S. Pierre , d'où naît l'unité l'acerdotale , fût
.chargé <lu foin d'alïembler l'égUfe univer-
felle. Obfervons néanmoins à ce fujet que le
pape ne peut pas convoquer un concile géné-
ral, à moins que les princes chrétiens n'y
confentent ; premièrement parce que les
£vêques font fujets du prince , & par cette
raifon ne peuvent quitter leurs églifes fans
fon confentement ; fecondement parce que
c'ell le feul moyen de maintenir l'union entre
le facerdoce & l'empire , fans laquelle la
fociété ne peut fubfilter. Le concours des
deux puiflances , étant donc efîèntiel dans
les choies qui regardent la foi , il en faut
conclure que le confentement des prince^
chrétiens efl néceflaire toutes les fois qu'il
.eftqueflion de célébrer un concile œcumé-
nique. Ajoutez à cela que le confentement
^£5^ princes rcpréfente celui- des peuples j
C O N
car dans chaque état le prince efl le repré-
fentant de la nation. Or , ce confentement
àts peuples opère celui de toute l'EgUfe ,
qui , félon la réponfe de Philippe-le-Bel
à une bulle de Boniface VIII , n'eft pas feu-
lement compofée du clergé , ma*s encore
des laïques. Une autre oblèrvation à faire ,
elf que les princes chrétiens n'ont pas perdu
irrévocablement le droit de convoquer les
conciles œcuméniques. En efïet , comme ils
font obligés en qualité de magiflrats politi-
ques de veiller à ce que le bien de l'état ,
qui efl intimement lié avec celui de la reli-
gion , ne reçoive aucune atteinte ; il réfulte
de-là que s'il arrivoit qu'ils convinfîènt una-
nimement de la tenue d'un concile , du lieu
de l'aflèmblée , & qu'ils ordonnaient par
leurs édits aux évêque^Jpurs fujets de s'y
trouver , pour lors le co/we/e feroit convoque
légitimement ; un ufàge contraire , introduit
par la feule difficulté de fe conciher fur ua
même objet , n'ayant pu les faire décheoir
de leurs droits.
On a même été plus loin pendant le fchif^
me d'Avignon. La chaire de S. Pierre ,.
quoique indivifible , étant occupée dans ce
temps-là par deux contendans , dont l'un
fous le nom de Grégoire XII fiégeoit à,
Rome , l'autre à Avignon fous le nom de
Benoît XIII , & aucun des deux ne voulant
abdiquer le pontificat , ce qui étoit cepen-
dant le feul moyen de rétablir l'union & la
concorde , les cardinaux fe féparerent , tant
de Grégoire que de Benoît ; & s'étant af^
iémblés à Livourne afin de délibérer fur les
mefures à prendre pour éteindre le fchifme ,
& célébrer un concile , on éleva la queflion ,
fi , dans le cas où deux papes , au mépris
manifefle de leur ferment , diviferoient l'égli-
fè , & par une collufionfrauduleufe entretien-
droiênt le fchifme , les cardinaux ne pour-
roient^pas convoquer le concile. Sur ctttQ
queflion Laurent Rodolphe , célèbre dodeur
es droits , foutint dans une difpute qui dura
trois jours , que le concile convoqué dans
ce cas par les cardinaux feroit légitime ,
M. Lenfant , hifi. du conc. de Pife , liv,
III. ch. vij. Gerfon prouva la même chofe
dans fon traité de auferibilitate papae ab
Ecclef. favoir que dans un temps de fchifme ,
lorfqu'il s'agit de juger le pape , le droit
de convoquer le concile cçfîè de lui appar-^
C O N
tenir , comme étant partie intéreflee , &
que ce foin regarde les cardinaux & ks
évêques , conjointement avec les princes
'temporels. Dans le iîecle fuivant , lorfque
les fameufes divifions de Jules II & de
Louis XII éclatèrent , cinq cardinaux ,
Bernardin de Carjaval , François de Bor-
gia , René de Prié , Frédéric de S. Severin ,
& Guillaume Briçonnet , ne poiivant plus
fùpporter l'ambition de ce pontife , & mé-
contens de ce qu'il ne tenoit pas de concile
général , comme il avoit promis avec fer-
ment de le faire deux ans après foH exalta-
tion , l'abandonnerery: dans fon voyage de
Rome à Bologne , fe rendirent à Milan &
de-là à Pife , où ils aflemblerent un concile
l'an 1511 , fous le bon plaifir de Maximi-
lien empereur & de Louis XII. Dans ce
temps-là on agita de nouveau la quefiion ,
fi le pouvoir d'afîembler l'églife apparte
noit aux cardinaux , ou même ^ la plus
petite partie d'entr'eux. Philippe Décius de
Milan , dofteur es droits , alTez connu par
fes écrits , fe lignnlà dans cette occafion ,
& devint par-là fi agréable au roi Louis XII ,
Qu'il en obtint une place de confeiller au
parlement de Grenoble. On a fa confulta-
tion qui parut la môme année 15 11 , &
ledifcours qu'il publia enfuite pour la juf-
tification du copxile de Pife. Dans ces deux
ouvrages , Décius après avoir accumulé les
uns fur les autres & textes & gloffateurs ,
fuivant la méthode de raifonner de fon
temps , conclut qu'il y a des cas où les
cardinaux , même en plus petit nombre ,
font en droit de convoquer un concile ; par
exemple fi le pape & les cardinaux de ion
parti négligent ou refufént de le faire , quoi-
que les befoins de l'églife le demandent. Il
eût pris une voie plus fimple pour rendre
fenlible cette vérité , s'il fe fût reftreint à
dire , comme quelques-uns l'ofent avancer ,
que depuis long-temps les cardinaux conl-
tituent le collège de l'églife romaine , & que
le droit de convoquer le concile n'a pas tant
été accordé à la perfonne du pape , qu'au
fiege qu'il occupe ; qu'ainfidnns les cas dont
nous parlons , l'églile romaine à laquelle
préiident les cardinaux qui lui font demeu-
rés fidèlement attachés , peut inviter les
autres évêques à s'aflembler avec elle pour
tenir concile.
C O N 8,5
Mais fi ce droit app-J.rtient quelquefois aux
feuls cardinaux , à plus forte raifon un con-
cile géam^l peut-il en indiquer un autre ,
du confentement des princes , puifqu'il re-
préfente l'églife univerfelle , qui certaine-
menta le pouvoir de l'alfembler elle-même.
Nous en avons un exemple illufiredans la
refpcâable concile de Baie , que la France a
reçLifolemnellement, & dont Charles VII
a fait inférer les décrets dans la pragmatique-
i'andion. Ce concile fut indiqué par ceux de
Confiance & de Sienne , c'ell-à-dire, que
dans la felfion 24 du concile de Confiance ,
du 19 avril 1418 , on indiqua le concile X
Pavie , tom. Vil. des conc. pag. z^j.Wf
commença l'an 1423 ; mais à caufe de Lt
pefic qui ravageoit Pavie , il fut bientct
transféré à Sienne, où l'on convint le 19
février 1424 , que le prochain cdncih.
qu'on devoir aflerabler fept ans après en
exécution du décret du concile de Conf-
tance , fe >iendroit dans la ville de Baie.
Voye'^ tome XII. des conc. pag. 4ffj. où
l'on rapporte le décret du concile de Sienne ,
qui fut lu dans la première feflion de celui
de Bà!e.
Le droit de ceux auxquels il appartient de
convoquer les conciles , félon les diverfès
circonfiances , étant folidement établi , il
faut expliquer la manière dont fe fait cette
convocation. Les exemples dont nous nous
fommes fervis pour faire voir que les prin-
ces ont été en pofieflion d'indiquer les con-
ciles y prouvent en même-temps qu'ils ren-
doient à ce lùjet des édits par lefqueîs ils
mandoient au concile les prélats , fiir-tout
févêque de Rome & ceux des principaux
fieges , tels que Confiantinople , Alexan-
drie , Antioche , Jérulalem. A l'égard de
l'évêque de Rome ; comme il efi: de droit
divin le chef de l'églife , il efi de règle
qu'on ne peut tenir de concile générai., à
moins qu'on ne demande en lorrae fon con-
fentement , & qu'on ne l'invite d'y aflifier :
auiîî CQt ufage a-t-il été confiamment pra-
tiqué dans l'églife dès les premiers temps ,
fi nous en croyons tous les hifioriens ecclé*
fiafiiques, Socrate , lip. II. chap. liij. re-
proche entr'autres chofes au concile d'An-
tioche , que Jules évêque de Rome n'y^t
point afiîfié , ni envoyé perfonne à fa place ,
quoiqu'il foit , dit-il, ordonné par les canons
2iS C O N
de ne fîatuer fur rien dans l'églife fans
que l'évêque de Rome en ait connoilTance.
Sozomene ylip. II I. chap. x. rapporte qu'a-
près la condamnation d'Athanalè , le pape
Jules écrivit aux évêques qui avoient tenu
le concile d'Antioche , & fc plaignit amère-
ment de ce que , contre les loix ecclélialH-
ques , on ne i'avoit point appelle au concile.
On doit pareillement inviter les évêques de
l'univers entier ; car fi l'on ne convoque
que ceux d'une certaine nation , ou d'une
certaine province, alors le concile n'efl point
CECuménique , mais fimpl.^mert national ou
provincial : ainfi , pour qu'il ioit réputé uni-
verfel , il efl nécefTaire d'obferver les deux
règles que Bellarmin propolé, lib. I. deconc.
cap. xi'ij. La première de ces règles efl que
la convocation l'oit notifiée à toutes les gran-
des provinces de la chrétienté. Cette no-
tification ié fait par les métropolitains , qui
autrefois , après avoir reçu les ordres des em-
pereurs , les communiquoient aux évêques
deleurs provinces, & les amenoient avec eux
au concile. Depuis que la coutume a déféré
au pape le droit de convoquer les conciles ,
il adrefîe au prince & aux métropolitains
une bulle folennelle d'indidion , qui mar-
que le temps &c le lieu du concile. JPar cette
bulle il exhorte les princes d'y afîifier , ou
du moins d'envoyer leurs ambaffadeurs con-
jointement avec les évêques de leurs royau-
mes , & enjoint à ces mêmes évêques de
s'y trouver. Enfuite , lorfque les métropoli-
tains ont obtenu la permilllon du fouve-
rain , ils avertilTent leurs fullragans par des
lettres circulaires d'aller au concile. La fé-
conde règle de Bellarmin efi qu'on ne don-
ne l'exclufion va aucun éveque , de quel-
qu'endroit qu'il vienne , pourvu qu'il foit
confiant qu'il efiévêque,& qu'il n'efi pas
excommunié. Au refie , quoique tous les
ëvaaues doivent être appelles au concile , il
n'elt cependant pas nécefTaire que tous s'y
trouvent , autrement il n'y auroit pas encore
eu'dans l'églife de concile général. «N'efi-ce
pas aflez , dit M. Bofluet , qu'il en vienne
tant & de tant d'endroits , & que les autres
confentent fi évidemment à leur alîêm-
blée , qu'il fera clair qu'on y aura porté le
fta-.timent de toute la terre ? w Hijh des va-
riations , liv. Xl^. n°. zoo. Nous ne nous
étendrons pas davantage fur la manière de
C O N
convoquer les co/2c/7^j-, & nous verrons auSî
en peu de mots quelles font les matières
qu'on y traite.
Nous avons déjà indiqué au commence-
ment de cet article , en donnant la défini-
tion du concile que les décifions eccléfiafii-
ques ont deux objets principaux , la foi & la
difcipline ; ce qui eft conforme à la lettre des
pères du concile de Nicée aux Egyptiens ,
où ils fe fervent de ces deux mots grecs ,
Aatii^v^ /)/, KAi è oyiJiiri(^uy ^c Q^-^^àiYQ drejjer
des articles de foi ^ faire des canons \ ainfi
ces deux points font la matière des conciles
généraux. La foi q^ contenue dans les dogmes
qui la propofent , dans les fymboles ou for-
moles qui diftinguent les fidèles àes païens",
des juifs & des hérétiques , & qui font
comme la marque à laquelle on rcconnoît
\qs troupes de J. C. Elle efi auflî renfermée
dans les lettres fynodales dans lelquelles les
évêques aflemblés au concile expolent leur
cro}'ance ; & enfin dans les décrets & ana-
thêmes prononcés contre les hérétiques. On
ne peut rien ftatuer de nouveau par rapport
à la foi ; parce qu'elle efi un don de Dieu
auquel les hommes ne peuvent rien ajou-
ter , comme ils n'en peuvent rien ôter. L'é-
glife déclare feulement ce qui eft de foi ou
non ; mais elle fait des loix par rapport à la
difcipline. Or ce qui appartient à la difcipline
a coutume d'être expliqué dans les canons ,
ainfi appelles du mot grec Kctvav , qui fignific
règle. Ifidore , lib. VI. etymologiarum , cap,
xvj. nous apprend la railon pour laquelle on
s'efi fervi de ce mot : Régula dicta efi canon ,
eo quod reciè ducit^nec aliquando aliorfum
trahit', alii dixerunt regulam diclam^velquod
regat velquod normam rectèvivendiprcebeaty
velquod diftortum pravumque corrigat. Il y
a une autre différence très-remarquable en-
tre les dogmes & les canons. La foi eft une ,
& immuable ; régula fidei una efl y omnino
fola 5 immobilis & irreformabilis. Tertull.
lib. I. de velandis virginibus. La difcipline
au contraire peut être différente , fiiivant la
différence des nations & des lieux : car on
doit regarder comme indiffèrent , & ne faire
aucune peine d'obferver ce qui ne blefiè ni
la loi ni les bonnes mœurs , afin que par-là
on conferve l'union avec ceux avec qui l'on
vit. La diverfité de ces règles n'empêche pas
les églifes d'entretenir la concorde , lors-
qu'elles
C O N
Iju'cllôs font réunies dans la fol ; & pour
lious fervir des paroles de Fulbert évêque
de Chartres : Ubifidei non fcinditur unitas ,
nos non offendit ecclefiœ divcrjitas ; fie enim
fiât faHÊcta ecclejia regina à dextris Dei in
pefiitu deaurato circumdata varietate. De-U
naît encore une autre différence entre les dog-
fnes & les canons : les dogmes ont par eux-
mêmes le fceau de l'autorité , & ailreignent
également tous les fidèles ; au lieu que les
canons ont befoin d'acceptation & du con*
cours des deux puiflances , pour avoir à
l'extérieur leur exécution. Cette même rai-
son que la foi'eft une , & la dilbipline diffé-
rente , fuivant la différence des lieux , elt
caufe qu'on traite féparément dans les con-
ciles de ces deux objets. Ilel^ même arrivé que
dans plufieurs on n'a examiné que des quef-
tions de toi , & dans d'autres que ce qui re-
garde la difcipline. Par exemple , les cin-
quième &: fixieme conciles fe font contentés
de condamner les hérétiques ; & dans celui
de Trulle , qui a été comme une (ùite de ces
conciles , on n'a fait que des canons pour le
maintien de la difcipline , & il ne s'eft point
agi de la foi.
Quelquefois encore dans les conciles on
agite les caufes cccléfiaftiques , & elles y
font terminées par un jugement de l'églife
afîemblée. Souvent celui qui avoit été ex-
communié par fon évêque ou par un pre-
mier concile , obtenoit que fa caufe fèroit
examinée de nouveau ; & quelquefois il par-
venoit à fe faire abfoudre ; comme Théo-
doret , qui , après avoir été condamné dans
k concile d'Ephefe , fut admis & reflitué
dans çt\m de Chalcédoine. C'efl pourquoi
Zonare fur le canon 7 du concile de Laodi-
cée , obferve que les conciles fe tiennent pour
finir les difputes qui s'élèvent fur la vérité
des dogmes , ou fur l'équité des peines , ou
pour y traiter les autres affaires ; & attendu
que les générales intéreffent toute l'églife ,
il eft d'ufage qu'on traire d'abord de celles-
là avant de pafîer aux particulières , ainfi que
l'ordonne le premier canon du premier co/z-
a/f d'Auvergne , qui a été parmi nous un
concile national.
Ce que nous venons de dire fur la ma-
tière des conciles , nous paroît fuffire ; mais
nous ne pouvons nous difpenfer en parlant
de la forme fuivant laquelle fe tient le con- ,
TomeVllL - •
C O N 817
cite , d'entrer dans un plus grand détail. Cette
forme confifle principalement dans l'ordre
de la féance , dans le partage du concile en
différentes affemblées , & enfin dans la li-.
berté des fuffrages.
Il eft évident par la nature même du
concile œcuménique , que l'un des prélats
dont il efl compofé , doit y préfider • car
étant une afîemblée de l'églife univerfelle ,
il efl d'une nécefllté abfolue que quelqu'un
recueille les voix , & prononce les déciiions
du concile fur chaque queflion. Jéfus-Chrifl
efl le chef de toute l'églife. Dans chaque
églife particulière il efl repréfenté par l'évê-
que ; mais il s'agit de favoir , lorfque les évê-*
ques font affemblés, quel efl celui parmi
eux qui doit être à leur tête- Les pères du
concile de Chalcédoine nous l'apprennent
dans la lettre fynodale au pape Léon. Si
enim , difent-ils , ubifunt duo aut très con-
gregati in nomine ejus {Chrifli) , ibife Chrif-
tus in medio^orum fore perhibuit ^ quan-
tum circa quingentos vigintifacerdotesfami'^
liaritatem potuit demonjîrare , qui & patries
Ù laborifuœ confefiionis notitiam prcetule-
runtî Quibus tu quidem.ficut membris capat
prœeras , in his qui tuum tenebant ordinem ,
benevolentiam prœferens , imperatores verh
fidèles ad ordinandum decentijjimè proefidc'»
bant , ficut Zorobabel & Jefus , ecclefiœ tan-
quam Jerufalem , œdificationem , circa dogm
mata renovare annientes. Ce paffage fait voir
que les pères du concile de Chalcédoine dis-
tinguent deux fortes de préfidence dans lesï
conciles: l'une qui appartient aux pontifes,
& l'autre aux princes. En effet le prince étant
feul armé du glaive , & ayant feul la force
coadive , il doit y préfider , afin qqe tout s'y
pafîé d'une manière conforme aux loix éc
aux canons dont il eft le protedeur. Au
refle , pour ne parler ici que de la préfidence
hiérarchique , il paroît par ces paroles , ficut
membris caput prceeras in his qui tuum tene- '
bant ordinem , qu'elle efl déférée à l'évêque
de Rome. Cela mérite cependant quelque
explication. Il efl bien vrai que dans le cas
où le fouverain pontife affifle en perfonne
au concile , tous les canonifles reconnoifîênt
pour incontcflable le droit qu'il a d'y préfi-
der , comme étant l'évêque du premier fiege ,
le centre de l'unité catholique , & le
Ijef de toutes les églifes : mais ils ne coa-.
Kkkkk
8i8 COK
tiennent point également que cette proro-
gative dans les premiers temps ait paflë aux
légats. Plufieurs d'entr'eux ne font pas re-
monter l'origine de ce droit plus haut que
le concile de ChalcOdoine ; d'autres penfent
que dès le <:o/ïc^/V^ de Nicée , les légats du
pape ont préfKÎé.
Parmi ces derniers fe trouve M. de
Marea , qui dans Ton fameux traité de con-
cordia facerdotii & imperii, lip. V. cap. iij.
./jp. V. l'j. & vij. réduit la queftion de la préé-
minence du pape dans les conciles ^ à trois
chefs principaux qu'il s'efforce de démon-
trer ; favoir à la prérogative de la féance , au
droit de recueillir les voix , à la ratification
de tout ce qui a été fait ; & il prétend que
cette ratification ne nuit point à la hberté
des fufïrages qui eff abfolument nécefTaire ,
mais' il la compare au rapport qu'autrefois
les confùls & enfuite les princes faifoient
au fénat, afin qu'il eût à prononcer , en-
forte que le lenat néanmoins décidoit ce
qu'il jugeoit à propos. Le fouverain pontife ,
dit cet illuffre prélat, exerce un droit fem-
blable dans les conciles , ce qui n'empêche
pasqu'onn'y jouiffede la liberté des fuffra-
^es. Il ajoute, chap.vij. que cette préroga-
tive palfe à fes légats , & même nécefîaire-
ment , puifqu'il efl certain que les papes
n ont point été préfens aux premiers co/7-
ciles , & qu'ils fe font contentés (J'y envoyer
àts légats. La comparaifon que fait M., de
Marca , n'ert point du tout exaâe, & ne
s accorde pas avec ce que nous avoasprouvé
ci-deffus , que ce font les empereurs qui ont
convoqué les premiers concîhs , & y ont
mvité les papes par leurs édits. De plus fi
l'on attribuoit ce droit de rapport dans les
premiers fiecles au fouverain pontife , ce fc-
roit lui donner par-h\ une autorité fuprême
ck l'églife ; car ce droit de rapport faifoit
partie de la fouveraineté. Les termes de la
loi royale renouvellée fous Vefpaficn , que
cite M. de Marca , en font une preuve au-
thentique. Les voici : Ut eifenatum habsre ,
relationem facere , remittere ^fenamfconful-
tum per relaiionem , difeujjionemque facere
liceat. M. de Marca n'appelle-t-il pas lui-
même ce àro'ix jus imperatorium , & n'eft-il
pas confiant que fans ce rapport , le fénatus-
confulte ne pouvoit avoir lieu ? Nous en
avons un exemple dnns Tacite^ lib, ^V,
C O N
ann. e. 2.2,. où , après avoir rapporté le dif^
cours que Thrafeas prononça au fcnat , il
ajoute tout de fuite ces paroles : magno af-
fenfu celebrata fententia y non tamenfcitum
ea de re perfici potuit ^ abnuentibus ^nfuli-
bus eâ de re relatum. Ce pafïage montre affez
que quoique ce droit de rapport n'ôtât pas
tout-à-fait la liberté des fuffrages , cependant
celui de délibérer & de décider du temps
de la répubhque , dépendoit de la volonté
j à^s conluls , & dans la fuite , des eaipereurs »
' qui même en ont entièrement privé le fénat^
\ Novelle jS. de Léon fùrnommé le p/fZ/o/b--
phe. Or il efl manifefte que les conciles , fur-
tout dans les premiers fiecles y ne dépen--
doient en aucune façon de la volonté du pape.
Ainfi réduifons le droit de préfider à deux
chefs ; au droit de terir le premier rang dans
la féance, & à celui dé recueillir les voix ::
féparons-en celui delà ratification , puifquc:
nous venons de voir que c'efl pour concilier,
ce droit-là avec la liberté du concile , que M.
de Marca a imaginé le droit de rapport & la
.comparaifon qu'il en fait. Le même M. de
Marca veut prouver , d'après l'hifloire , que
le droit de préfidence a paffé aux légats des.
fouverains pontifes. H foutient- qu'Ofius j^,
évêque de Cordoue , préfida en cette qua-
lité au conc/'/e de Nicée. Il fe fonde fur ce
qu'Athanafe appelle cet évêque Vame & le-
chefdes conciles-, lib. defugàfua& epifio âad.
folitarios \ & fur ce que Socrate , liv. I. ch,,
jx de la v.erfion latine , ou ch. xiîj. de l'ori-
ginalgrec, enfaifant l'énumération des pré-
lats les plus diflingués qui affilièrent au
concile , corrmencc par Gfius évêque de
Cordoue , Vite & Vincent prêtre^ , &
nomme enfuite Alexandre d'Egypte , Eufla-
the d'Antioche, Macaire de Jérufalem. M.,
dé Marca ajoute , que perfbnne n'afîifîa de
la part du pape au fécond concile œcuméni-
I que , qui ne fut compoféque d'évêques orien--
1 taux y. & qu'il' ne devint^ général que par
' Pacquiefcement de l'églife d'occident à la.
décifion de celle d'orient : que Cyrille pré-
' fida au troifieme conciU ., & qu'il repréfen-
I toit le pape Céleflin I. comme l'annoncent
I les lettres de ce pontife adreffées tant au
clergé & au peuple de Gonflantinople , qu'à
: Cyrille lui-même.
I D'un autre côté Simon Vigor , lib. de con^
' cJliis i caj^. vij. prétend que la première place
C O M
3ans les conciles eft due aux patriarches , &
qu'ils y préildent tous conjointement; mais
que parmi eux la préféance eft réfervée au
fouverain pontife , de façon cependant que s'il
eft abfent , fes légats ne fuccedent point à fa
place , mais le fécond patriarche ; & au dé-
faut du fécond , le troifieme. Ainft ce ne fut
point, félon lui , le pape Sylveftre qui étoit
abfènt , qui préfida au concile de Nicée : ni
Alexandre , patriarche d'Alexandrie , qui en
quelque manière étoit partie intéreiïee , puis-
qu'il s'agiftbit d^Arius qu'il avoit le premier
condamné dans un concile tenu dans fon pa-
triarchat. Cet auteur conclud que le concile
fut préfidé par Euftathed'Antioche , & il le
prouve par la lettre qu'écrivit le pape Félix
III à l'empereur Zenon , contre Pierre
Fullon évêque d'Antioche. Cette lettre eft
conçue en ces termes : Petrus primogenitus
diabolifilius , & qui fanera; ecclefice Antio-
chenœfe indigni^mè ingejjît , fancfamque
fedem Ignatii manyris polluit , qui Pétri
^extrd ordinatus eft Euftathiique confejforis
ac prsftdentis , recentorum decem convene-
runt y au/us eftdicere , &c. vqye\ tome IV.
des conciles y pag. io6^. Il taut avouer
que Qts dernières paroles Ibnt favorables au
fentiment de Vigor,
Mais M. Richer , célèbre dodeur de
Sorbonne , contrebalance cette autorité dans
ïbn hiftoire des conciles généraux , liï\ I. c.
ij. num. 7. en rapportant d'après Socrate &
d'après Théodoret, liv, I. ch.jx.la lettre
lynodflledesPP. de Nicée auxAl^andrins,
où ils difent que fi le concile a ftatué quelque
chofe outre ce dont ils leur parlent, ils l'ap-
prendront d'Alexandre leur patriarche , qui
ayant eu part & ayant préfidé aux décifions
du concile ^ leur en rendra un compte plus
exad. Voilà le fens que donne Richer au
texte grec dans la tradudion qu'il en fait ,
& on ne peut difconvenir qu'il eft conforme
à l'original. Au refte ce do<Steur s'accorde
avec Vigor , en ce qu'il penfe , comme lui ,
que le pape doit préfîdcr au concile lorfqu'il
cftpréfent, mais que cette prérogative eft
attachée à la perfonne & au fiege qu'il oc-
cupe ; que (es légats n'y fuccedent point ,
>& qu'en eftèt ils n'ont pas préfidé aux conci-
les généraux jufqu'à celui de Chalcédoine ,
cù cela leur fut accordé pour la première fois.
j S^'d nous eft permis de dire notre fenti-
C O N «rp
ment à ce fujet , nous n'adoptons ni ne re-
jetons entièrement l'opinion de M. de
Marca; & nous faifons de même à l'é-
gard de celle de Vigor & de Richer. Nous
convenons avec chacun d'eux, que le droit
de préfider appartient au pape en vertu de
fa dignité , qu'il appartient encore aux autres
patriarches. Nous croyons pareillement avec
Richer & Vigor, que les légats n'ont point
préfidé jufqu'au concile de Chalcédoine:
qu'à l'e^jception cependant du premier con-
cile de Conftantinople , ils y ont aflifté , &
qu'ils ^ ont eu une place honorable , quoique
ce ne lût point la première. Examinons d'a-
bord la choie par rapport à Ofius. Il eft
certain qu'il futpréfent au concile de Nicée.
Eufebe , témoin oculaire , dit , liu, II. chap.
viij. delà vie de Conftantin, que cet homme
venu d'Efpagne & exalté par beaucoup de
perfonnes , ailifta au concile & prit féance
avec les autres ; que l'évêque de la ville im-
périale , c'eft-à-dire k pape Sylveftre ( fui-
vant l'interprétation d'Henri de Valois j , ne
s'y trouva point à caufe qu'il étoit d'un âge
fort avancé ; qu'il envoya des prêtres pour
le repréiènter. Socrate , d'après Eufebe ,
rapporte la même cholè lii'. I. c. v. Ni
l'un ni l'autre n'exprime fi Ofius aflifta au
concile comme légat de Sylveftre , ou bien
jure fuo , comme évêque de Cordoue. Et
même Sozomenc liv. I.chap. xvj. & Théo-^
doret , lit'. L ch. vij. fans faire aucune men-^
tion de lui y difent fimplement que Vite <Sc
Vincent prêtres , vinrent au concile à la placé
de l'évêque de Rome ; d'ailleurs Sozomenc
fcirompe en ce qu'il donne au pape le nom
de Jules , quoique ce ne fût point encore
lui , mais Sylveftre qui occupât pour lors le
faint fiege. Ces difïerens paflages femblent
prouver qu'Ofius ne fut point légat du fou-
verain pontife.
Mais , dira-t-on , Ofius eut la préféance
fiir tous [qs autres cvêques. Or elle n'etoit
certainement point due à fon fiege , inférieur
de beaucoup à ceux des patriarches , aux-
quels il convenoit de la céder j c'eft donc en
vertu de là légation qu'il a obtenu cette pré-
féance. Joignez à cela le témoignage de Ge-
lafe de Cyzique, qui vers l'an 889 a re-
cueilh les ades du concile de Nicée. Cet
auteur avance qu'Ofius tint la place de
Sylveftre évêque de l'ancienne Rome ^
Kkkkk 2
Sib C O N
conjointement avec les prêtres Vite & Vin-
cent. Pour répondre à ces objedions , nous
commencerons par obferver avec tous les fa-
vans ^ principalement avec l'auteur de l'a-
vertiffement qui eft à la tête de l'édition de
Rome des conciles , & qu'on trouve tom. II.
des conciles de Labbe , pag. 203. nous ob-
ferverons , dis-je , que l'hirtoire de Gelafe de
Cyzique ne mérite pas qu'on y apute foi ,
parce qu'elle renferme beaucoup de chofes
qui ne s'accordant pas avec ce quedifentles
meilleurs écrivains y la rendent fufpede à
jufle titre. C'eft pourquoi l'on ne doit point
afîurer qu'Ofius préfida au nom de Syl-
veftre , fur le feul témoignage de Gelafe.
Celui de S. Athanafe qui appelle l'évêque de
Cordoue , V.ame &: le chef des conciles ^ eft
iàns contredit d'une plus grande autorité ,
& jeteroit plus de doute furie rang que ce-
lui-ci eut au concile de Nlcée , ii ce n'eft qu'il
fuffifoir à S. Athanafe pour tenir un pareil
langage , d'envifager leperfonnage important
que fit OIîus dans l'affaire d'Arius. Cette
héréfie aj^ant excité dès fa nailTance beau-
coup de troubles & de divifionsdans l'églife ,
l'empereur Conflantin employa tous fes foins
pour rétablir, la paix. Ce fut dans cette vue ,
qu'avant de convoquer le concile de Nieée ,
il envoya à Alexandrie Ofius en qui il avoit
une confiance particulière , &. le chargea
d'une lettre adreflee conjointementà Alexan-
dre & à Arius , où il parle de leur différend
fuivant l'idée qu'on lui en avoit alors don-r
née , & les exhorte à fe réunir. Eufebe de
Nicomédie , parrifan feeret d'Arius , avoit
eu l'adrefTe de faire entendre à l'emperÊur
que la caufe du mal étoit l'averfion de l'évê-
que Alexandre contre le prêtre Arius , &
qu'il étoit de fa piété de faire ufage de fon
autorité pour lui impofer filence* Mais l'em-
pereur ayant appris par Ofius le peu d'effet
de fa lettre, & la grandeur des maux de
l'Eglife qui exigeoient un remède plus effi-
cace , il aflembla le concile où Ofius eut oc-
cafion de fefignaler. Quelque temps après ce
concile , le même Ofius fut encore le princi-
pal moteur de la tenue du concile de Sar-
dique , ce qui irrita contre lui les Ariens. Ils
le. déteffoient comme un de leurs plus puil-
fans adverf-àires , & ils mirent tout en œuvre
pour l'abattre. Il n'eft donc point étonnant
^ue S. Athaaafe parle en. tei*m^ extrême-
C O r^r
rhent honorables d'un vieillard digne de ve-*
nération , évêque depuis trente ans , Gon>-
fefieur dans la perfécutÎLon de .Maximien
renommé par toute l'égiiiè , & qui récem-
ment venoit de rendre à la bonne caufe des
fer vices efTentiels. Au relie il ne dit rien d'où
il faille abfolument conclure qu'Ofius tint
au concile la place de légat du pape. Enfin fi
à la tête des foufcriptions du concile , telles
que nous les avons aujourd'hui , nous trou-
vons le nom d'Ofius , & qu'il foit fuivi de
ceux de Vite & de Vincent , cela vient de
ce que les évêques ont foufcrit fuivant l'or-
dre de leurs provinces ; d'abord les occiden-
taux > & eniuite ceux des différentes pro-
vinces d'Orient. Les occidentaux foufcrivi-
rent les premiers , attendu quelepatriarchat
d'occident qui embraife la moitié du monde
chrétien, eÛ le premier de tous. Ofius efî à,
leur tête comme étant le feul évêque de ce.
patriarchat , & après lui fe trouvent les prê-
tres Viteck Vincent. Après les foufcriptions
des Latins , l'on compte celles des évêques
de la province d'Egypte , ayant à leur tête
Alexandre patriarche d'Alexandrie ; enfuite
les évêques qui lui font fournis , favoir ceux
de l'Egypte, de la Théhaïde , & de la Ly-
bie : pour lors le patriarchat d'Alexandrie
fuivoit immédiatement celui de Rome.
Après le. patriarchat d'Alexandrie , l'on
, trouve lès évêques de celui de Jérufalem
qui eff le troifieme , & à la tête Macaire leur
patriarche. Vient enfuite le patriarchat d'An^
tioche , àja tête duquel étoit Euffathe. Ainli;
les préfidens du concile furent Ofius, Ale-
xandre , Macaire & Euffathe , que nous
avons. vu ci-deffus- dénommé préfident par
le pape Félix III, & qui en cette quahtc
adrefïà un difcours à Conffantin.. Ofius &
les autres évêques fe trouvent tous au con-
cWejurefuo , en vertu de leur dignité , &
non d'aucun droit délégation. Cette defcrip-
tionde la préfidence du concile , faite d'après
le co/za/^. même , détruit entièrement la pré-
tendue préfidence de Vite & de Vincent.
Pour réfumer en deux mots tout ceci, fi
Ofius eût préfidé au concile comme légat du
pape Sylveftre , les prêtres Vite & Vincent ,
certainement envoyés par le pape en cette
quahté, euflent préfidé conjointement avec
lui. Nous venons de voir qu'ils n'ont' point
préfidé : donc ce n'eff point comme légat
C O N
qu'Ofius a ^té un des préfidens du concile.
Ûans les deux conciles généraux qui l'uivi-
rent , & qui fe tinrent avant celui de Chai-
cédoine , les légats du pape ne paroiflènt pas
y avoir préfidé. Nous avons vu pîus haut
qu'au premier concile de Conftanrinopîe , il
ne fe trouva aucun évêqae de Téglife d'occi-
dent , & que les Grecs même s^'en plaigni-
rent ; mais ce concile fut enfuite reçu par le
pape Damafe & les autres évêques de l'éghle
latine ; c'eft pourquoi on l'a toujours re-
connu pour œcuménique. Les légats du pape
Célefîin I. Arcadius & Projeûus évêques,
& Philippe prêtre , aifiilerent au concile
d'Ephefe ;• mais ils n'y préliderent point :
ce fut Cyrille d'Alexandrie qui prélida ; ce
droit lui appartenoit au défaut de Neftorius
patriarche de Conflantinople , qui étoit ab-
fcnt & accufé , car dès ce temps-là le pa-
triarche de Confîantinople avoit le fécond
rang.. Il efl: bien vrai que dans ce concile le
pape Céleflin commit Cyrille à fa place ;
mais comme il avoit d'ailleurs , à raifon de
fbn Hege , le droit de préiider , on ne peut
inférer d'un pareil exemple que les légats du
pape préfidaflent alors au concile jure fuo.
Enfin \q concile de Chalcédoine qui con-
damna & dépofa Diofcore , fut préfidé par
les légats du pape S. Léon , favoirPafchalin
& Lucentius évêques ,. & Boniface prêtre.
Vigor , lib. de conciliis ,. cap. w;. prétend
que cela fe paifa ainfi , parce que tous les pa-
triarches ,-à l'exception de celui de:Conflan-
tinople, étoient au nombre des accufés , vu
qu'ils s'étoient joints.à Diofcore pour con^
damner Flavien dans le faux concile d'Ephefe,
& parconféquent nepouvoient préfider à un
concile où ils dévoient être jugés. Mais il
paroît par les foufcriptions rapportées tom.
ï.y. des conciles , pag. 4.48. Ù fuivantes
qu'Anatole patriarche de Conflantinople ,
fôufcrivit après les légats , & après lui Ma-
xime d'Antioche : ce qui réfute l'opinion de
Vigor. Il efîtrès'-vraiièmbiable que l'empe-
reur Marciem , prince religieux, féconda la
déférence qu'on eut en cette oecaiion pour
le f>int fîege. Quoiqu'il en foit-, c'ert d'a-
près cet exemple que les légats.du pape ont
iîégé dans fous les conciles.
A l'égard "de l'ordre fuivant lequel les au-^
très évêques afUftent au concile y \z dernier
éjaionid? ia difUnâion. dix - fe^t du-décra
CON giT
de Gratien , établit pour règle que les évê-
ques doivent le conformer à la date deieur
ordination , tant pour le rang qu'ils occu-
pent dans la féance , que pour celui des ibuf^
criptions. On décida la même chofe dans le
premier concile de Prague, canonvj, & cette
difciphne fut pareillement obfervée dans l'é-
gljfe d'Afrique , où l'on ordonna que pour
terminer les contellations qui s'élevoient au
fujet de la préiéance , chaque évêque feroit \
tenu de rapporter àos lettres de celui dont
il auroit reçu la confécration , & qui en con*-
tinflent la date. Canons viij Ùjx du code des
canons de Véglife d^ Afrique, On s'eil néant-
moins quelquefois écarté de cette régie ea.
faveur de plufieurs fieges privilégiés.
Outre l'ordre de la féance r la forme da*
concile confilîe encore dans la divifion deç;
afTemblées , & la liberté des fufîrages.
Comme tout ce dont on doit traiter dans ua
concile y ne peut fe f nir en un jour,, on a
coutume de partager les affaires en differens
temps , & de cjilfinguer les diverfe^ afîem-
blées en adionsba feflîons-,. ainfi qu'on les
appelle aujourd'hui : dans ces-adions ou Çt(-
fions , on propofe les-quefhons &. on pro--
nonce les décrets ; ce qui ne fe fait cepen»-
dant-qu'après avoir tenu des congrégations v.
c'efl-à-dire des afferatlées privées d'éve-.
ques. Les pères d«u co/2ci/f délibèrent en-
tr' eux d'abord dans un&congrégation particu-
lière , fur ce qui fait la matière delà queffion.
Enfijite- on fait le rapport de ce qui y a été
agité dans une congrégation plus générale ,
où l'on convoque ceux même des évêques
qui n'ont point aiQîffé à la première. J3e
cette façon aucun d'eux n'ignore ce dont il
s'agit. On difcute de nouveau la queflion ,
& on la, décide avant que de la porter dans
la lèÏÏîon' publique. Cela a éxé introduit afin
qu'il nereff-âr plus aucun fujet- d'altercation
entre les évêques , & que les feffions publi-
quesfe paflafîent avec pius de décence : ctut
précaution néanmoins ne s'efl prife que dans
\cs àQYniQ^S' conciles. On ne trouve rien de
femblable dans les anciens, & chaque àfïàire
fe difcutoit dans les aélion^s publiques. Il
étoit pareillement d'ufage autrefois de pren-
dre les voix de chaque membre de l'aifem-^
blée; ce qui a été obfèrvé jufqu'au co/2a7e
dé Confknce , où il parirt néceiTaire de rer-
cyeiliirles fuffrages par nation , c'elî-à^dijre
«li C O N
que chaque évêque opinoitdans fa narion , &
qu'on rapportoit dans le concile les fulFrages
des nations. De puiflantes railons obligèrent
Jes pères du concile de Conftance d'intro-
duire cette nouveauté. Il y avoit pour lors
trois contendans à la papauté , Grégoire
Xn , Benoît XIII & Jean XXIII. Chacun
d'eux avoit Tes adhérans parmi les évêques.
Il étoit à craindre , 11 l'on comptoit les voix
fuivant l'ancien ufage , que les évêques d'une
nation l'emportant par le nombre liir les au-
tres , on ne pût parvenir au rétabhflemenr
de la paix & à l'extinûion du fchilrne , qui
étoient le but principal de la tenue du concile.
On liiivit la même méthode au concile de
Baie , & il efl fenfible que c'eft un moyen
sûr pour réunir le conlentement de toute
l'églife. Quant à la liberté des fufFrages , elle
doit être très-grande ; autrement le concile
cefle d'être œcuménique , & ne contient plus
Ja déciiion de l'églife univerfelle. Il n'y a
point de marque plus certaine pour connoî-
<re fi un concile a été œcuménique , ou
non , que la liberté des lùfFrages. Nous en
avons un exemple dans le faux concile d'E-
phcfe , tenu par Diofcore , & caffé par
celui de Chalcédoine. Ce faux concile avoit
été convoqué dans la même forme que les
trois précédens conciles généraux. Théodofe
le grand avoir interpofé fon autorité pour la
convocation de ce concile y le pape S. Léon
•avoit donné fon confentement & envoyé fes
légats ; ainfi rien ne paroilîoit manquer à
l'extérieur , de ce qui conflitue la forme des
conciles. Mais on n'y eut point la liberté de
délibérer ; les évêques , les prêtres & les
clercs furent forcés par les foldats à caups
d'épée & de bâton de fignerun papier blanc.
Plufieurs moururent de cette violence ,
cntr'autres Flavien de Conftantinople. Diol^
core avoit conipiréfa perte , & il le fit
condamner & dépofer par ces voies de fait
dans cette aflemblée ; c'eft pourquoi on l'a
toujours regardée comme un conciliabule.
Il eft donc très-important d'avoir une règle
sûre "pour difcerner fi le concile a la liberté
des fufFrages ; car il eft à craindre que fous
ce prétexte quelqu'un ne s'élève contre l'au-
torité àes conciles généraux la mieux fon-
jdée , & ne veuille s'y fouftraire , en difant
que le concile n'a pas étélibre. Or on peut ju-
ger qu'il a été libre par i'acquiefceraent de l'é-
CON
glife univerfelle : fi au contraire toutes les
éghfcs fe plaignent , & rejettent les décifioris
du concile , c'efi une preuve manifefte qu'il
n'a joui d'aucune liberté. Par exemple on
réclama de toutes parts contre le brigandage
du faux concile d'Ephefe ; on demanda un
au ire concile , &: il parut évident que
celui d'Ephefe n'avoit point été libre ; c'efl
ce que prouvent les adcs du concile de
Chalcédoine. L'églile univerfelle réclama
pareillement contre le faux concile de Ri-
mini , où l'on avoit également employé la
violence , & à la formule duquel le pape
Libère avoit foufcrit.
Maintenant , pour terminer ce qui con-
cerne les conciles généraux , nous allons
examiner quelle efl leur autorité. Divers
pafîàges de l'Ecriture , & la tradition conf^
tante de l'églife nous enfeignent , qu'il n'y
en a point de plus refpeélable. Nous avons
déjà eu occaiion de citer ces paroles de Je-
fus-Chrifl, ubifunt duQvel très y &c.Nous
avons vu que les pères de Chalcédoine en
font l'application aux conciles , & en tirent
cette conféquence , qu'à plus forte raifoa
Jefus-Chrifi: ne refufera point fon afTifianc'è
à cinq cents vingt évêques afTemblés en fon
nom. Nous ajouterons ici que le cinquième
concile général , ou le fécond de Conftanti-
nople , prend dans le même fens ce texte de
l'évangile , & reconnoît l'autorité fuprême
des conciles généraux , qu'il démontre en
fe fervant de différentes preuves. Il fe fonde
1®. fiir ce que les apôtres , quoiqu'ils fufîenc
tellement remplis de la grâce du S. Efprit
qu'ils n'eufîênt pas befoin les uns des autres
pour être inftruits de ce qu'ils dévoient faire ,
cependant ne voulurent rien ftatuer à l'égard
des cérémonies légales , qu'ils n'eufîênt dé-
libéré cnfèmble , & que chacun d'eux n'eût
appuyé fon avis fur les faintes Ecritures. 2,^.
Sur ce que la décifiôn des apôtres conçue en
ces termes, vifiim eflfpiritui fancio ^ ncbis y
&c. témoigne affez qu'elle eft faite & pro-
noncée en commun. L'on peut étendre plus
loin la réflexion àes pères de Conftantino-
ple , & avancer avec confiance comme une
fuite naturelle de cette réflexion , que les
apôtres , en attribuant à l'infpiration divine
ce qu'ils ont défini , nous autorifent à re-
garder comme décidé parle S. Efprit , tout
ce qui l'eft par l'églife aflêmbiée. 3^. Sur
C O N
l'exemple non interrompu de l'églife : car
les faints pères en difFérens temps ( c'efl le
concile qui parle ) , fe font alTemblés dans
\ts conciles pour décider en commun les
queftions qui s'étoient élevées : & pour con-
damner les héréfies , parce qu'ils étoient
fermement perfuadés rue les examens qui
fe font en commun , 6l où l'on pefe les
raifons alléguées de part & d'autre , fai-
foient briller la lumière de la vérité , & dif-
fipoient les ténèbres du menfonge; tom. V.
des conciles y page 4-^ ^ Ù fuivantes. Non-
feulement les pères de Chalcédoine & ceux
de Conflantinople relèvent l'autorité desco/z-
ciles œc-uméniques au - deiTous de toute
verains pontifes ont tenu le même langage.
Céleftin premier nous en donne une haute
idée dans une lettre au concile d'Ephefe , où
il dit que les apôtres ont été inftruits par Je-
fus-Chrift ; que les évêques ont fuccédé aux
apôtres , qu'ils ont reçu leur puiiîance du
même Jefus-Chrifl; que par conféquent le
concile efî faint , & mérite la plus profonde
vénération; fo/7Z. ///. des conciles, pag. 614.
Grégoire le grand efl encore plus énergique
liir ce fujetfc dans une lettre adreflée aux
patriarchesTean de Conflantinople , Elogius
d'Alexandrie, Jean de Jérufalem ^ Analkfe
d'Antioche , pour leur faire part de fon élec-
tion & leur envoyer fa profeflion àts foi ,
fiiivant l'ufage de ce temps-là , obfervé pat
les papes & autres évêques des grands liè-
ges , nouvellement élus. Voici comme ce
iaint pontife s'exprime vers la fin de cette
lettre : ficutjancli evangelii quatuor lihros ,
fie quatuor concilia fdfcipere ac venerari me
fateor . . . Ê? quifquis eorum foliditatem non
tenety etiamjl lapis ejfe c^ernitur, tamen ex-
tra œdificiumjacet...cunBas veroy quas prœ-
fata concilia veneranda perfonas refpuunt,
refpuo ; quas venerantur , amplecîor ; quia
dumuniverfali fum.confenfu confiitutay fe ,
dr/zo/i ilh defliuityquifquisprixfumit autfoU
rere quos ligant^aut ligare quos fohum.Lib.
T. regefiiy epift. 24, Le commencement du
canon '^.delà Jiflinclion 15 . renferme à-peu-
prcs les mêmes fentimens. Gratien attribue ce
canonàGélalè, mais il eft incertain qu'il foir
de ce pape ; quelques-uns le donnent à Da_
mnfe , & d'autres , fur la foi de plufieurs m^-
^uCqritSjpréteadeiit qu'il ell du pape. Hor-
C O N 815
mifdas. M. Baluze dans fa note fur ce ca-
non , conjedure que le décret qu'il con-'^
tient , a d'abord été fait par le pape Damaie ,
& enfuite renouvelle par Gelafe & Hor-
misdas. Quoi qu'il en foit , fauteur de ce
canon déclare que la fainte églife romaine
après les livres de l'ancien & dir'nouveau
Teftament , ne reçoit rien avec plus de ref-
ped que les quatre premiers conciles. En
elfet la vénération pour ces conciles a été
pouflee fi loin , que Grégoire le grand ,
comme nous venons de le voir , les com-
pare aux quatre évangiles ; & Ifidore de
Séville dans le canon premier , paragraphe
premier de la même diftincîion , afl lire qu'ils;
autre , mais nous voyons encore que les fou- renferment toute la foi , étant comme qua-
:t
tre évangiles , &: autant de fleuves du pa-
radis. Les papes ont reçu avec le même ref--
peâ: les quatre co/icZ/fj qui ontfuivicespre--
miers ; c'efl ce que prouve la profeflion de
foi qu'ils faifoient d'une manière folemnelle,
& fous la religion du ferment , fi-tôt qu'ils
étoient élevés au pontificat ,. avant même
que d'être confacrésw Cette profeilîon de
foi étoit enfuite rédigée par écrit pai* les;
notaires de l'églife. romaine ,. & dépofée
fur l'autel & le. corps de faint Pierre. On en
trouve la formule dans le diurual romain .
& dansles-notes de. M,.Bignon ftirlehui-.
rieme cp/zc//^ général ,• tome VIII ces,
conciles y.page 4.9a,. Suivant cette formule ,
le nouveau pape promettoit d'obicrver en
tout & avec le dernier fcrupule les buirco/z-
ciles généraux , d'avoir pour eux la. véuéra--
tion convenable , d'enfeigner ce qu'ils en-
feignoient, & de condamner de cœur &.
de bouche ce qu'ils, condamnoiem..
Ces témoignages non fufpeéls en faveur
des conciles y font voir combien il eft dérai-
lonnable de penfèr que Us conciles œcu-.
méniques foiçnt lujets à l'erreur. Ceux qui
n'ont pas là-defTus des idées faines , abu-
fent d'un paffagc de S. Augu/lin , lib. II.
de hapdfmo contra.Donatifias , cap. iij. où
ce faint doâeur enfeigne que les conciles
qui fe tiennent dans chaque province, ce-
dent ài'autoriré àes conciles univerfels com-
pofés de toute la chrétienté ; mais que
CCS mêmes conciles univerfels , lorfque
fexpérience nous a appris ce. que nous igno-
rons , font fouvent réformés par d'autres
qui leur font pofiérieurs , & qui ont égale-
Si4 C O N
ment l'avantage d'être ûecum^niques. Tpfa
concilia ( ce font les propres termes de ce
père) quce perjingulas religiones vel pro-
r-'incias fiunty plenariorum conciliorum au-
toritati y quce fiunt ex univerjo orbe chrif-
tiano 'y fine ullis ambagibus cedunt : ipfa-
que plenâriay fapè pnorapofterioribus emen-
dantur, cum aliqno expérimenta rerum ape-
ritur qiiod claufum erat , & cognofcitur quod
latebat. Quelques - uns croient écarter la
difficulté que ce pafTage femble faire naître ,
en l'appliquant au concile général d'une na-
tion , de l'Afrique par exemple ^ mais cette
conjeélure cft détruite par cela feul , que
S. Augulfin appelle ici Xtsconcdes généraux,
ceux qui font compofés de toute la chré-
tienté. On ne répond pas avec plus de fo-
lidité , en difant que ces paroles doivent
s'entendre des Hatuts à^s conciles généraux ,
dans les caufes de fait & de pure difcipline ,
& non des qucfîions de foi. En effet ce làint
père dans cet ouvrage traite la fameufc quef-
tion , fi l'on doit réitérer le baptême con-
féré par les hérétiques , qui avoit été -agitée
auparavant entre S. Cyprien & le pape
Etienne : or cette queftion appartient cer-
tainement à la foi & à la dodrine de l'églife,
& non à la (impie difcipline. S. Auguftin
réfute en cet endroit les Donatifîes , qui ob-
jedoient l'autorité de S. Cyprien & des con-
ciles tenus à l'oecafion de la difpute fur le
baptême , & il dit que les conciles , &c. Je
crois donc qu'il faut ici expliquer S. Au-
guftin , non par les noms , mais par la chofe
même , & la forme intérieure fuivant la-
quelleles conciles ont été célébrés. Il y a des
conciles qui paroiflent généraux à caufe de
la forme extérieure dont ils font revêtus ,
mais qui ont un vice intérieur qui porte
atteinte à leur validité. Ces conciles , eu
égard à ce vice, ne doivent point être ré-
putés généraux ; ils ne le font que de nom
& nullement d'effet ; tels font les feux con-
ciles d'Ephefe & de Rimini, dont nous
avons déjà parlé : les conciles de cette ef-
pece , peuvent être réformés par des conci-
les vraiment œcuméniques, & qui ne don-
nent aucune prife pour les attaquer. Voilà,
fi je ne me trompe , le fens de Saint Au-
guftin ; ces paroles , faspe priera pofieriori-
bus emendamury femblent l'indiquer. Sœpe^
dit-M , c'eft-à-dirc que cela arfivoit non cas
C O N
quelquefois , mais fréquemment ; & cepen-
dant nous ne trouvons nulle part aucun
exemple que des conciles reconnus pour
œcuméniques par toute l'églife , aient jamais
été réformés par d'autres conciles polîé-
rieurs ; ainfi c'eft une entreprife téméraire
que de vouloir jeter des doutes fur l'infail-
libilité des conciles généraux. Il n'eft pas
moins abfurde , & contraire à l'efprit des
anciens papes , de prétendre qu'ils n'ont de
validité qu'autant que les fouverains pontir-
fes les approuvent. Les défenfeurs de-^ette
opinion ont eu recours , pour établir leur
fyflême , aux canons de la diflindion 17 ;
la critique que nous en avons faire , fuffic
pour ruiner de fond en comble les induc-
tions qu'on veut tirer de ces canons. Nous
avons lieu au contraire de conclure , d'après
les pa{îâges que nous avons rapportés , que
les conciles tirent d'eux-mêmes leur auto-
rité , & qu'ils n'ont pas befoin de la Confir-
mation du pape.
Nous ne diffimulons point que le con-
fentement du fouverain pontife ne foit d'un
grand poids, & qu'il ne foit à defirer que
l'évêquedu premier fiege , le chef vifible &
minifîériel de l'Eglife catholiqii||| acquiefce
à ce qu'elle a décidé ; afin qu'o'n puiite op-
pofer avec plus de force & d'une façon plus
évidente le confentement de l'Eglife univer-
felle à ceux qui veulent en troubler la paix.
Mais fi le pape refufe de fe foufcrire au
concile , s'il n'adopte point la décifion de
l'Eglife univerfeile , alors le concile général
peut exercer envers lui fon autorité comme
envers les autres membres de l'Eglife ; c'eft
ce qu'a décidé formellement le concile de.
Confiance, /^^! j. & celui de Baie ^fejf. z.
Cette décifion , que les ultramontains quali-
fient d'erronée , contient la dodrine de l'é-
glife gallicane & des univerfités du royaume,
principalement de celle de Paris. Elle a>été
ioutenue par Gerfon , chancelier de cette
univerfité , par Pierre d'Ailly grand-maître
de la maifon de Navarre , enfuite évêque
de Cambrai & cardinal , & par un nombre
infini de théologiens & de canonifîe?. Char-
les VII roi de France , qui connoiffoit bien
les droits de fa couronne , l'a fait inférer
I l^ans la pragmatique fandion , de l'avis de
tous les ordres du royaume : voici les paro-
les tirées tant du décret du concile de Bâle ,
qu9
C O N
que (îe la pragmatique-fanâion. Et prlrnb
déclarât quodipf a fynodus , in Spiritufanao
légitimé congregata y générale, conciliumfa-
ciens, & ecclejîam militant em reprœfentans ,
poteflatem habetd Chrifio immédiate. Cui
quiiwet cujufcumquefiatùs , conditionis , vel
dignitatis , eriamlï papalis exiflat , ohedir&
tenetur in his quœ pertinent adfidem , & ex-
tirpationem fchifmatis , & generalem re-
formationem fchifmatis , & generalem re-
formationem ecclejiœ Dei , in capke & in
membris. prag. fand. tit. j. pag. j , èc 4..
On trouve cette doârine mifc dans tout Ton
jour dans le chapitre douzième des preuves
des libertés de l'ëglife ga:llicanc , & dans M.
Dupin , dofteur de Sorbonne, dijjert .'G , de
antiquâ ecclcjicv difciplinâ ; & l'etuflijfimce
difciplinœ monumentis , où il démontre i**.
que l'autorité du concile général eft Tupéneure
à celle du pape : 2°. que le concile général a
la puiflîince de faire des canons qui aftreigncnt
même le pape: 3°. que le concile général a
le droit de juger le pape , &: de le dépofer
s'il erre dans la foi. Il eft donc fuivant nos
mœurs permis d'appellcr des décifions du
pape au concile général , comme d'un juge
inférieur à un fupérieur , chap. z z , des
mêmes preuves , où l'on rapporte des exem-
ples très-remarquables de ces fortes d'ap-
pels , tels que celui de Philippe-Ie-Bel de la
bulle de Boniface VIII , celui des prélats ,
des fujets & des univeriités du royaume dans
la même caufe ; tels ibnt encore les appels
au futur concile , interjetés par les procu-
reurs généraux , lorfqu'il fut queftion d'a-
broger la pragmatique-fandion , & plufieurs
autres de cette efpece interjetés en diverfes
occafîons par l'univerfité de Paris , & con-
çus dans les termes les plus forts. Nous ren-
voyons le leéteur aux lources que nous ve-
nons d'indiquer.
Au refte , ce que nous avons dit de l'au-
rorité fuprême à^s conciles ne regarde qu^e
la foi qui eft immuable , & non la difcipline
qui peut changer ; & c'eft pourquoi les dif-
férentes églifcs ont reçu ou rejeté divers ca-
nons des conciles , fuivant qu'elles les ont
jugés conformes ou contraires à leurs ufages.
Par exemple , l'églife de Rome a reçu les
canons du concile de Sardique , en vertu
defquels ri étoit permis à un év^êque qui fè
icroyoitinjuikment coadamaé , de s'adref-
Tome Vin,
C O N 815
Ter au pape, •& et faire examrnor de nou-
veau fa caafe ': les Orientaux ■&: iu Grâcs
n'ont point voulu les admettre , cofrime
étant contraires au canon des conciles de
Nicée & d'Antiocke. De même ceux du
concile d*AntioGhe , ont été adoptés par l'E-
glife univerfelle , quoiqur'elie ait conftam»-
ment rejeté la foi de ce concile ^ où les Ariens
furent ks maîtres. D'un autre côté , l'églife
romaine a foufcrit au fymbole du fécond
concile général , mais elle a toujours refufë
d'admerti'e le cinquième canon de ccconcile^
qui ordonne que l'évêque dé Conflantino-
ple aura la place d'honneur après l'évêque
de Rome , attendu que Conftantinople étoit
la nouvelle Rome. Le canon vingt-huitième
àuconcile de Chalcédoine , par lequel on
étend & l'on augmente les privilèges déjà
accordés à l'églile de Conflanrinople , dé-
plut pareillement aux Romains ; les lé-gats
du pape S. Léon réfiHerent vigoureufement
à ce décret , & S. Léon lui-même témoigna
beaucoup de zèle contre cette entreprife.
A l'égard de la définition de foi, il fe hâta
d'en faire part aux églifès d'Occident , de
leur apprendre que la vérité avoit triomphé ,
& que l'hérelie avoit été condamnée avec
(es auteurs & lès partifans. Enfin la loi du
concile de Trente a été reçue par l'égUfe gal-
licane ; mais elle en a rejeté tous les points
de difcipline qui ne s'accordent ni avec l'an-
cienne ni avec nos mœurs.
Après avoir rempli les diflerens objets
que nous nous étions propofés par rapport
aux conciles généraux , il nous refie à parler
des conciles particuliers , fur lequels nous
nous étendrons peu , cette matière étant &
plus fimple & moins importante. Ces con-
ciles font de trois fortes , fàvoir les natio-
naux , les provinciaux , & les diocéfains. •
Les conciles nationaux font ceux qui font
convoqués , foit par le patriarche , Ibit par
le.primat , & où l'on raflemble les évêques
de toutes les provinces du royaume. Nou^
difons que ccsconcilesj omcorivoqués foitpar
le patriarche , ou même le primat ; car iln'efl
pas douteux que ce droit n'appartieniie aux
(buverains , nos conciles de France fournif^
fènt à ce fujct une foule d'exemples. Du
temps de l'empire romain , nous voyons les
conciles des Gaules convoqués parles empe-
reurs , comme le concile d'Arles qui fiît
XlUl
Si6 C O N
convoqué par Conftantin l'an 3^4 » ^^^^ la
caufe des Donatifîes; celui d'Aquilée , qwi eft
plutôt un concile d'Italie que des Gaules ,
convoqué par Gratien Tan '^Si. Nous lifons
dans les ades de ce concile ces paroles de S.
Ambroile : Nés in occidentis partibus conf-
tituti , convenimus ad/iquileienjium civita-
tem jjiixta impera.toris praceptum. Et dans
la \tnut fynodale du même concile adreflée
aux empereurs , les pères les remercient de
ce que pour terminer les difputes ils ont eu
foin de les aflèmbler. Cette forme de con-
voquer les conciles de France a lubfiflé fous
nos rois. Le premier concile d'Orléans a été
convoqué par Clovis l'an 5 1 1 ; le fécond ,
par Childebert & les rois ïes frères , l'an
^33 ; le concile d'Auvergne , par Théode-
berr, l'an ^49 i pour ne rien dire des 'autres
qui fe font tenus fréquemment fous la pre-
mière race , & qui ont été indiqués par nos
rois. Mais fous la féconde race principale-
jiient , la puiflance royale a paru à cet égard
dans tout fon éclat : c'eft dans les conciles
tenus fous cette race qu'ont été faits nos
capitulaires ; & non-feulement nos rois con-
voquoient ces conciles , mais même ils y
affifloient , & étoient les arbitres & les
moteurs de tout ce qui s'y paflbit. Nous
nous contenterons de citer V action première
du concile de Rome fous Léon III , contre
Félix évêquc d'Urgel , qui prouve que nos
rois , pouj* lors maîtres de l'Italie , ont pa-
reillement indiqué les conciles dans ce pays ,
& que les papes , conformément aux ordres
du prince, yontafiîfté. Depuis que latroi-
lîeme race a commencé à régner , les rois
ont continué de jouir de la même préroga-
tive , ils ont convoqué tous les conciles
qui le font tenus ; enlbrte que c'eft une
règle certaine parmi nous , que les évêques
ne peuvent s'aÂèmbler ni délibérer entr'eux
fur quoi que ce foit , fana la permiflion
du prince. Les papes les plus recomman-
dables par leur fainteté ont reconnu ce droit
dans la perfonne de nos rois ; entr'autres
S. Grégoire le grtuid , liv. vij. reg. ep, z i j
& ? / 4. Dans la première de ceslçttres , il
fupplie la reine Brunehaut d'ordonner la
len-.e d'un concile ; & dans la féconde , il
fait la même prière aux rois Théodoric
& Théodebert , afin qu'on y puiflfè pren-
iit les moyens d'abolir la pernicieufe cou-
C O N
tumc qui sVtoit introduite dans le royau-
me , de vendre les ordinations. Le ledeur
peut confulter fur ce droit de nos rois le
chap. xj , des preuves des libertés de Véglife
gallicane ; & M. de Marca , lib. VI, de
concordiâfacerdotii & imperii , cap. fpij &
fuir.
L'autorité des conciles nationaux efl con-
lidérable dans l'Egiife ; comme ils en font
une partie , ils approchent beaucoup des
conciles œcuméniques , & c'ell pour cela
qu'on leur a donné quelquefois ce nom.
Cette autorité eff plus grande dans le royau-
me où ils ont été célébrés , que chez les
autres nations de la Chrétienté. En effet,
une nation n'ayant aucun empire fur une
autre nation également libre & indépen-
dante , elle ne peut l'aflreindre par les loix;
& les règles qu'elle établit. Néanmoins les
conciles nationaux de France ont été en
grande vénération chez les peuples étran-
gers , & leur ont fouvent fervi de modèles :
c'efl le fruit de la fagefle' de l'églife gal-
licane , & de l'attachement inviolable qu'elle
a témoigné dans tous les temps pour l'an-
cienne difcipline.
Les conciles provinciaux font ceux qui
font convoqués par le métropolitain ou l'ar-
chevêque , & dans lefquels il raffemble tous
les évêques & autres clercs de fa province.
La lettre du clergé de Rome à S. Cyprien y
& qui efl la vingt-fixieme parmi celles de
ce père , nous apprend que les prêtres , les
diacres , & autres clercs , aififfoient & opi-
noient anciennement à ces conciles. Con^
fultis , dit la lettre , epifcopis , presbyteris y,
diaconis y confejjoribus , & ipjis ftamibus
laïcis. On agite & l'on décide dans ces conci-
les les queflions qui s'élèvent fur la foi ; on
y fait des ffatuts concernant la difcipline ,
l'adminifîration des biens eccléfiafliques , la
réformatron àt^ abus , & la perfeûion dés.
mœurs. Ils doivent être convoqués par les
métropolitains , canon xx du concile d'An-'
tioclie ; enforte qu'il n'efl pas permis aux
évêques de la province de célébrer un con-
cile faris le confentemenf de l'archevêque.
Mais d'un autre côté , fi celui-ci ne le con-
voque pas au moins une fois de l'année-^
il encourt les peines canoniques. Le canoiu
vj du feptieme concile général , excepte ce-
pendant les cas où la nécellité , la violence..
C O N
bu quelqu'autfe raiibn légitime , l'ont em-
pêché de le faire.
Lorfque le métropolitain veut convo-
quer un concile provincial , il avertit cha-
cun de Tes fuflragans de s'y trouver y &
cela par des lettres qu'on appclioit autre-
iois tracloires ou traclatoires , du même nom
que les ordonnances qu'on dclivroit à ceux
qui voyagoient par ordre du prince , & en
vertu defqueiles on leur fournifloit libéra-
lement les voitures , les chevaux , & la
commodité de ce que les Romains appel-
loient la courfe publique. Depuis on a donné
à ces lettres du métropolitain le nom de
lettres évacuatoires , encycliques ou circu-
laires.
Les évêques de la province convoqués
par le métropolitain font obligés de fe
trouver au concile y canon xL du concile de
Laodice'e ; & ce concile en donne une raifon
qui mérite d'être remarquée , favoir que
les évêques qui négligent de le faire paroif-
fent s'accufer eux-mêmes , c'eft-à-dire ,
avoir été détournés d'aller au concile par
les remords de leur conlbience , qui leur
font craindre qu'on n'y découvre les fautes
qu'ils OTît commifes , & qu'on ne leur in-
flige la peine qui leur elï due. Le canon
vj du concile de Chalcédoine prefcrit la
même chofe ; & il ajoute que ceux qui
ne s'y trouveront pas , fubiront l'admoni-
tion de la charité fraternelle. Les conciles
d'Afrique ont été plus féveres , comme il
paroît par le canon xxj du quatrième
concile de Carthage , & le canon x du cin-
quième. Suivant ces canons , ceux qui n'au-
ront point eu d'obftacle légitime , ou qui
n'en auront point* fait . mention dans la
lettre circulaire , ou enfin qui n'en auront
point rendu compte au primat , font me-
nacés de l'excommunication épifcopale.
Nous l'appelions épifcopale , parce qu'il ne
s'agit point ici d'une véritable excommu-
nication , qui retranche le coupable de la
communion des fidèles & du corps de
l'Eglife , ou le prive de la participation des
facremens ; fnais d'une forte d'excommu-
nication qui étoit en ufage alors entre les
évêques ; de façon que celui qui l'avoit
encourue ne coranaunioit avec aucun évê-
que , fi ce n'étoit dans l'étendue de fon
diocefe ; ktt. no^ de S. Auguft. n. 8 j ôc
C O N 827
pour me fervir des termes du canoîi x du
cinquième concile de Carthage , il devoit
fe contenter de la communion de fon églifè.
Nous avons un exemple de cette efpece
d'excommunication dans la lettre 40 (nouv.
(^édit. 60^. ) de faint Léon , adrefîée à Ana-
tole de Conftantinople. Ce pape ordonne
dans cette lettre que les évêques qui au-
ront eu part au faux concile d'Ephefc , fè
reftreignent à la communion de leur églife.
Nous en trouvons un autre exemple dans
le canon Ixxxvij du code des canons de l'é-
glife d' Afrique , dans l'affaire de Quod
vult deus : Placuit , dit le canon , omnibus
epifcopis ut nullus ei communicet ^ donec
caùfa ejus terminum fumât.
L'églife gallicane a tenu une conduite
auflî rigoureufè à l'égard des évêques qui
manquoient dé venir au concile de leur pro-
vince , canon xvij du concde d'Arles , Van
4-5^* ^^^^^ févérité s'eil: étendue à ceux qui
abandonnoient le concile avant qu'il fût ter-
miné , canon xxxi^ du concile d'Agde ; Van
£06. Ce qui a pareillement étéflatué dans
le premier canon du deuxième & troifiemc
concile de Tours. L'Efpagne a embrafîé la
même dilcipline dans (es conciles , & on y
a décidé que Tévêque qui étant averti par
{ox\ métropolitain négligeroit de venir au
concile , feroit privé julqu'à la tenue du
concile fuivant de la communion de tous
\qs évêques , canon vj du concile de Tarra-
gone , Van £iS. Les caufes qui peuvent di(^
penfer un évêque mandé au concile de s'y
trouver , font exprimées dans cts difFérens
conciles : telles font l'urgente néceflité , l'âge
avancé , l'infirmité habituelle , la maladie ,
les ordres du roi qui retiennent l 'évêque
dans un autre endroit.
Les conciles provinciaux , fuivant le ca-
non v du concile de Nicée , fe tcnoient
deux fois tous les ans ; une fois au prin-
temps , une fois à l'automne. Le- premier
devoit le tenir avant le carême , afin , dit
le concile , que toute animofité étant effa-
cée , on préfente à Dieu une offi-ande pure»
Ce canon a été long-temps en vigueur ; & il
n'étoit pas difficile de l'obferver , parce que
le nombre àts évêques étoit grand fous
chaque raétropoHtain , enforte qu'ils pou-
voient venir tour-à-tour , leurs confrères
réfidant pendant ce temps-là , & prenant
LllUa • ^
SiS
C O N
foin de l'cglife des abfens. Les coneiles fij-
rent négligés dans la fuite : les évêques les
moins zélés craignoienr la fatigue & k dé-
penfe de ces fréquens voyages ; & vers le
viij fiecle on (e réduifit à les obiiger de te-
nir au moins un concile par an ; c'eft l'or-
donnance du concile de Trulle , qui fut con-
firmée par les feptieme & huitième conciles
oecuméniques. En Occident les conciles
provinciaux furent rares fous la féconde race
de nos rois , tant A caufe des aflcrablées
d'état qui fe tenolent deux fois par an , &
où tous les évêques étoient obligés de fe
trouver , qu'à cr.ufe des guerres civiles , des
iiicurfions des Normands qui infefierent le
royaume depuis Charles-le-Chauve , & de
la divifion des petits feigneurs qui fut un
nouvel obflacle. Ainfi dans les onzième &
douzième fiecles on ne tint prefque pas de
ces conciles. Néanmoins Innocent ÎII au
concile de Latran renouvella la règle des
conciles annuels , mais elle fut mal obl'ervée.
Dans le fiecle fuivant un concile de Valence
en Efpagne les ordonna feulement tous les
deux ans , jufqu'A ce qu'enfin le concile de
Baie réduifit à trois ans l'obligation de les
tenir ; ce que le concile de Trente a confirmé
fous les peines portées par les canons. En
France l'édit de Melun , celui de 1610 , &
une déclaration de 1646 , ont ordonné
l'exécution du décret du concile de Trente.
Des loix audî Images ont été fans aucun
fruit & n'ont pu faire revivre la coutume
de célébrer , linon tous les trois ans , du
moins fréquemment , des conciles provin-
ciaux. De nos jours il ne s'en eu point tenu
d'autre que celui d'Embrun en 1728 , où
un des prélats les plus diflingués parmi les
appellans de la conflitution Unigenitus , fut
condamné , fufpendu des fondions d'évê-
que & de prctre , & réduit à k communion
Jaïque.
Les conciles diocéfains , qu'on appelle
proprement .(ynot/é-j- , fuivant l'ufage mo-
derne , font ceux qui font célébrés par cha-
que évêque , & compofés des abbés , des
prêtres , diaa^s , & autres clercs de fon
diocefe. Le canon v] du feizieme concile de
Tolède nous apprend la raifon pour laquelle
on tient ces fortes de conciles ; c'eft afin ,
dit-il , que l'évêque notifie A fon clergé &
- â fes ouailles tout ce qui s'efl pafle &
C O N
tout ce qui a été décidé au concile pro-
vincial ; & l'évêque qui manque à ce
devoir efl privé de k ccunmunion pen-
dant deux mois. Mais quoique les conciles
provjnciiiux ne foient-plus en ufage , néan-
moins on tient encore les fynodes , & l'on
doit les célébrer tous les ans dans chaque
diocele ; c'efl-là principalement que les pré-
lats veillent à réformer ou à prévenir les abus.
Nous n'en dirons pas davantage fur les
conciles particuliers. Au refle nous croyons
n avoir rien avancé dans tout cet article des
conciles ( telle a été du moins notre inten-
tion ) , qui ne foit conforme à l'efprit de
la religion , aux maximes du royaume , &
qu'on ne puiiTe concilier avec le vrai refped
dû au faint fiege. Cet article efi de M. Bo u-^
CHA UD y docltur agrégé en la faculté de
Droit.
CONCILIABULE, ( Jitrifp. ) diminutif
de concile , i^oje:^ CoNCILE. Il fe dit en gé-
néral de petits conciles tenus par des héré-
tiques , contre les règles & les formalités
ordinaires de la difcipline de l'Eglife.
* Conciliabule , f m. ( Bifl. anc. )
conciliabulum , endroit d'une province où.
les prêteurs , proconfuls , propréteurs , fai»
loient affembler le peuple des pays adja—
cens , pour leur rendre la juflice. On y te-
noit auffi des marchés indiqués par les me-
mes magiftrats , & on appelloit ces lieux
conciliabula , & non fora. Par la fuite cç
droit fut réfervé aux villes municipales.
* CONCLAMATION , f f [Hifl. anc.y
On appelloit ainfi le fignal qu'on donnoit
aux foldats romains pour plier bagage &
décamper , d'où Ton fit l'exprefîîon concla^
mare vafa : conclamari ad arma étoit au con--
traire le fignal de fe tenir prêts à donner ;
les foldats répondoient par des cris à cette
conclamacion, Coriclamen a encore une autre-
acception dans les aiiciens auteurs ktins :
lorfque quelqu'un 'étoit mort , on l'appel-
loit trois fois par fon nom ; & pour figni-
fier qu'il n'avoit pas répondu parce qu'il étoit
décédé , on difoit , conclamatum cfl.
C'efl dans ce fens , pris au figuré , que
quelques auteurs ont dit ,*de republicâ ro-^
mand conclamatum eft; pour dire k républi-
que romaine n'eff plus.
CONCLAVE , f m. ( Hifl. mod. ecclef. )
aiïèmblée de tous les cigc^uix <^ui foaÇ à
C O N
Rome poi:r faire l'éleâion du papt. yqye\
Pape, Election, ùc.
Le conclave n'a commencé qu'en 32.7©.
Clément IV étanr mort à Virerbe en 12.68 ,
\zs difficultés qui fiirvinrent à roccalîon de
i'éledion die Ton fucceffeur, déterminèrent
\ts cardinaux à fe iépivrer & à abandonner
Viterbe. Les habitans de cette ville ayant
eu connoifl^mce de cette réfolution , fermè-
rent les portes de la ville par le confeil de
S. Bonaventure , enfermèrent les cardinaux
dans le palais , & leur rirent favoir qu'ils
n'en fortiroient point que l'éledion ne tût
faite. C'efl de-là qu'eft venue la coutume de
renfermer les cardinaux dans un feul palais
pour l'éledion d'un pape.
Le conclave eft aufli le lieu où fe fait
î'éledion du pape. C'efl: une partie du palais
du Vatican que l'on choilir, félon la diver-
iité des faifons. Il eil: compofé de falles ,
de chambres , & de corridors qui fe ren-
contrent en cet endroit , & \ç:s (ailes & les
chambres font partagées en plufieurs petites
cellules pour les cardinaux , telle falle con-
tiendra fix chambres , & autant pour les
jconclavifles , & on en laifTe quelques-unes
de hbres pour y faire du feu , de Ibrtc que
les chambres des cardinaux n'ont point de
cheminée : elles font toutes, meublées fort
modeftement , d'une même ferge verte ou
violette : les armes font fur la porte des
chambres , qui font prefque toutes obfcures
à cauie que toutes les fenêtres font murées ,
à la réferve du panneau d'en-haut. Il y
a plufieurs officiers , comme médecins , &
chaque cardinal a deux conclavifles , ou
trois s'il ejl malade & qu'il le demande. Ils
font ferment de ne point révéler les fecrets
du conclave. On les reconnoît le lendemain
de la clôture. Il y a d'autres ferviteurs avec
une cafaque violette pour les ufages com-
muns. Les conclavifles ont tous une rob&
de chambre conforme. Il y a un guichet à
la porte du conclave que l'on ouvre pour
donner audience. Il y a cinq maîtres de
cérémonies qui jouifîent de ce bienfait ; cha-
que cardinal leur donne tous les jours deux
piftoles , outre quelque plat de régal. Rela-
tion du conclave d'Alexandre VII.
D^ns l'interrègne , le facré collège pré-
tend qu'il lui eft dû plus de refped qu'à
la perfofti^e même du pape , parce q^'éîâat
C O N %i^
comporé de toutes les nations chrétien-
nes , il rcpréTente toute la hivrarchiç de
rEdilc. C'efl pour • cette raifcn que les
ambafladeurs allant à l'audience àv. collège
metrcnt un genou en terre , & ne fe lèvent
qu'après que le cardinal doyen leur a fait
ligne.
Le chef de la maifon Savelli garde leç
clés du conclave , comme maréchal héré-
ditaire de l'Eglife. Mais les clés du dedans,
font gardées par le cardinal Camerlingue
& par le m^itte des cérémonies. Me'm. de
M. Anielot de la Houiîaye , tom. II. au
mot conclave.
CONCLAVISTE , f. m. (Jurl/prud.)
efl un domeflique qu'un cardinal enfermé
dans le conclave pour l'éleétion d'un pape,
tient avec lui pour le fervir. Chaque car-
dinal en peut avoir deux , & même trois
s'il efl: prince.
Quoique la qualité de domeflique pré-
fente une idée humiliante , les fondions
d'un conclavijîe ne le font pas. Ces places
font fort recherchées , & nos jeunes abbés
françois de la plus haute diflindion ne font
pas difficulté de s'y alTujettir, la connoif-
l^nce du conclave étant néceflaire à ui^
homme qui peut prétendre aux dignités
eccléfiaffiques les plus émlnentes. Quand le
conclave eil fini , on leur accorde ordinai-
rement le gratis pour les bulles d'un des
bénéfices confilloriaux qu'ils pourront
obtenir par la fuite.
CONCLURE , v. ad. & neut. a plu-
fieurs acceptions : quelquefois il eil fyno-
nyme à terminer , & l'on dit terminer (j
conclure une affaire > il fignifie quelquefois
tirer une confèquence des propojitions qUon
a avancées. En Junf prudence^ c'eil prendre
àt^ conclufions dans ime caufe , inilance ,
ou procès. V. ci-après CONCLUSIONS.
Conclure un procès par écrit , ou conclure
un procès ) c'eil paiîer , c'efl -à -dire fi-
gner un appointement appelle appointe-
ment de conclufion fur l'appel d'une fen-.
tence rendue en- procès par écrit : cet'
appointement porte que , le procès par écrit
d'entre tel & tel, eil reçu & conclu pour
juger en la manière accoutumée , & que
les parties font appointées à fournir griefs »
réppniès , faire productions nouv^les , Sic
icelles contredire s'il y échet , &:f^uf à f^ôre
8;o CON
collation. Cette dernière claufe vient de ce
qu'anciennement , lorfque les parties met-
toient au greffe leur produdion principale ,
avant de conclure le procès , le greffier la
collationnoit pour voir fi elle étoit com-
plète ; ce qui ne fe fait plus préfentement.
Congé faute de conclure, efi le défaut qui
eft donné à l'intimé lorfque l'appellant refufe
de conclure le procès par écrit. Le profit
de ce défaut emporte la déchéance de l'ap-
pel , & la confirmation de la fentence.
Défaut faute de conclure , ell le défaut
qui efi accordé à l'appellant lorfque l'intimé
refufe de conclure le procès par écrit : le
profit de ce défaut. eft que l'intimé eft dé-
claré déchu du profit de la fentence. {A)
* CONCLUSION , f. f (LogLq.) c'eft
ainfi qu'on appelle la propofition qu'on avoit
à prouver , & qu'on déduit des prémifles.
Voyei Syllogisme.
On donne aufll le même nom générale-
ment ee Logique , Métaphyfique , Morale ,
"&: Phyfique fcholaftiques , aux différentes
propofitions qu'on y démontre , & aux
démonftrations qu'on emploie à cet effet.
Ainfi l'exiftence de T3ieu eft une conclufion
de Métaphyfique. On intitule en ce fens
les thefes qui ne font que des pofitions de
Philofophie rédigées par paragraphes , con-
clufions de Philofophie y conclujiones Phi-
iofophiiV.
CONCLUSION) dans Vart Oratoire, c'eft
la dernière partie du difcours , celle qui le
termine. Elle comprend elle-même deux
parties , ou pour mieux dire elle a deux
fortes de fondions : la première confifte à
faire une^ courte récapitulation des princi-
pales preuves ; la féconde confifte à exciter
dans i'ame des juges ou des auditeurs les
fentimens qui peuvent conduire à la per-
fuafion. La première partie demande beau-
coup de préclfion , d'adreffe , & de difcer-
nement , pour ne dire que ce qu'il faut , &
pour rappeller en peu • de mots & par des
tours variés l'effentiel & la* fubftance des
preuves qu'on a déployées dans le difcours.
Mais l'éloquence rélerve fa plus grande
force pour la féconde partie : c'eft par le
/ecours du pathétique qu'elle domine &
qu'elle triomphe. V. AnacÉPHALÉOSE ,
Péroraison, Passion^ Récapitu-
CON
Conclusions , (Jurifp.) font les fins
auxquelles tend une demande formée en
juftice.
Un huiffier prend des conclujions par un
exploit de demande.
Les procureurs en prennent par des
requêtes verbales & autres , même par des
défenles , dires , brevets , & autres procé-
dures ; mais au parlement , où la procédure
fe fait plus régulièrement que dans la plu-
part des autres tribunaux , on ne reconnoit
de conclujions wd[^\ts en la forme que celles
qui font prifes par une requête , & qui (ont
dans la dernière partie de la requête deftinéc
à contenir les conclujions.
Les avocats prennent aufll des conclu-
jions en plaidant & en écrivant.
Le miniftere public prend pareillement
des concluions verbalement & par écrit.
^ Enfin il y a difïerentes fortes de conclu-
Jions que nous expliquerons chacune fépa-
rément.
La forme des conclujions eft auffi dift'é-
rente , félon les divers objets auxquels elles
tendent.
On peut corriger, changer, augmenter
ou reftreiiidre fes conclu/ions tant que les
choies font entières , c'eft-à-dire tant que
la partie adverfe n'en a pas demandé adé ,
ou qu'il ne lui a pas été odroyé.
Il y a encore un cas où l'on ne peut pas
changer fes conclujions , c'eft lorfqu'on s'eft
reftreint à la fomme de loo liv. pour être
admis à la preuve teftimoniale ; on ne peut
plus demander l'excédant lorfque la preuve
eft ordonnée.
Celui qui varie dans fes conclujions &
occafione par - là des dépens , doit les fijp-
porter comme frais fruftratoires.
Conclusions alternatives , font
celles où l'on donne à la partie adverfe l'op-
tion de deux chofes qu'on lui demande.
Conclusions des Avocats font de
deux fortes ; les unes qu'ils prennent en
plaidant , les autres en écrivant.
Ils ne peuvent à l'audience prendre d'au-
tres conclujions que celles qui font portées
par leurs pièces , à ^moins qu'ils ne foient
alCftés de la partie ou du procureur ; au-
quel, cas ils peuvent prendre de nouvelles
conclujions fur le barreau , qu'on appelle
aulïï conclùfwns judiciaires f parce qu'elles
C O N
font prifes en jugement , c'eil-à-dire à
l'audience.
Anciennement nu parlement de Paris Jes
avocats ne prenoienr point les çondujîons
des caufes qu'ils plaidoient ; c'étoit le pro-
cureur qui afiiftoit à la plaidoirie , lequel
à la fin de la caufe prenoit les concluions y
& l'on n'alloit aux opinions qu'après que
\qs conclu/ions avoient été prifes ; ccû ce
que l'on voit dans les anciens arrêts rédigés
en latin, où immédiatement avant le dif-
pofitif , il eft dit poftquam conclufum fuit in
caufâ.
Mais depuis long-temps il eft d'ufage que
les conclujions fe prennent au commence-
ment de la plaidoirie ; ce qui a été intro-
duit afin que les juges connoiflent tous d'a-
tord quel eft l'objet des faits & des moyens
qui vont leur être expofés; & pour faciliter
l'expédition des affaires , on a dilpenfé les
procureurs d'aflift|r à la plaidoirie des avo-
cats , lefquels en conféquence prennent
eux-mêmes les conclujions au commence-
ment de la plaidoirie ; & comme en cette
partie ils fuppléent le procureur abfent , il
eft d'ufage qu'ils foient découverts en pre-
nant les conclujions , au lieu qu'en plaidant
ils font toujours couverts.
Il eft néanmoins demeuré quelques vef-
tiges de l'ancien ufage , en ce que quand
les juges veulent aller aux opinions avant
que les plaidoiries foient finies , le préfi-
dent ordonne aux avocats de conclure ,
fur-tout pour ceux qui n'ont pas encore
parlé ; & dans les caufes tlu grand rôle ,
quoique les avocats prennent leurs conclu-
jions en commençant à plaider au barreau ,
ils les reprennent en finiflant , & pour cet
eflfèt defcendent du barreau où ils plaident ,
dans le parquet ou enceinte de l'audience.
Les avocats prennent auffi des conclu-
jions dans les écritures qui font de leur
miniftere ; mais pour la validité de la pro-
cédure , il faut qu'elles foient reprifes par
requête , parce que le procureur efl domi-
nus litis , & a feul le pouvoir d'engager fa
partie.
Conclusions sur le bap.reau ,
font celles que les avocats ou les procureurs
prennent verbalement fur le barreau , fans
qu'elles aient été prifes auparavant par
requête, ni par aucune autre procédure^
Ç Q N 831
VoyeTi ce qui en eft dit dans l'article pré-
cédent par rapport aux avocats.
Conclusions conditionnelles ,
font celles que l'on ne prend que relativement
aux cas & conditions qui y font exprimés.
Conclusions définitives , font
celles qui tendent à la décifion du fonci^e
1 affïiire , au lieu que \^s conclujions inter-
locutoires ou préparatoires ne tendent qu'à
faire ordonner quelque -inftrudion ou pro-
cédure qui paroît préalable à la décifion
du fond.
Le terme de conclujions déjinitives n'eft
guère ufité qu'en matière criminelle , où
le miniftere public , après avoir donné de
premières co;2c/r{/ro/2jpréparatoires,en donne
enfuite de défini tire s, \or{'<\ut le procès eft inii^
truit.Ces conclHjionsàoxvQ-cw. être données par
écrit & cachetées , & elles ne doivent point
expliquer les raifons lùr lefqueiles elles ibnt
fondées. Ordonnance de zèjo^ tit. xxii:
Quand ces conclujions font à la décharge
de l'accufé , elles commencent par ces mots,
je n'empêché pour le roi; & lorfqu'elles
tendent à quelque condamnation , elles-
commencent en ces termes , je requiers
pour le roi ,• & fi ces conclujions tendent à
peine affliclive , l'accufé eft interrogé fur la
feîette. Voye^ ci-après CONCLUSIONS
PRÉPARATOIRES.
Conclusions' JUDICIAIRES ou Sur
LE BARREAU, i'oye7^^ci-devantCoiiCl.\J^
sions sur le barreau.
Conclusions des Gens du Roi ^
ou DU Ministère public, ou du Par-
QUET , ou du Procureur général,
ou DU Procureur du roi , font celles
que le miniftere public prend dans les caufes
& procès , foit civils ou criminels , dans
lefquels le roi , l'églife , ou le public font
intéreftes. Il y a àes. tribunaux où le miniftere
public donne auffi des conclujions dans les
affaires des mineurs ; mais cela n'eft pas
d'utàge au parlement de Paris. «K^ CON-
CLUSIONS DÉFINITIVES ù Conclu-
sions PRÉPARATOIRES.
Conclusions préparatoires ^
font celles qui ne- tendent qu^5un interlocu-
toire , & à faire ordonner quelque inftruc^
tion ou procédure : ce terme eft principale-
ment ufité pour les conclujions prifes par
le miniftere public avant Ç^ condujioj^
831 C O N
définitives. Fy/e^j CONCLUSIO^îS DÉFI-
NITIVES.
Conclusions principales , font
les premières que l'on prend pour une
partie , & dont on demande radjudication
par préférence aux conclujions qui font
enfuite prifes fubfidiairement.
Conclusions subsidiaires , font
oppofées aux conclujions principales , & ne
font prifes que pour le cas où le juge
feroit difficulté d'adjuger les premières : on
peut prendre différentes conclujions fubji-
diaires les unes aux autres ; elles font prin-
cipalement uiitées dans les tribunaux qui
jugent en dernier refîbrt , parce qu'il faut
y défendre A toutes fins ou événeraens. [A)
CONCOMBRE, f. m..{HiJl. nat. bot.)
cucumis , genre de plante à fleurs monopé-
tales faites en forme de cloche , ouvertes
& découpées. Les unes font flériles & n'ont
point d'embryon ; les autres font fécondes
& portées fur un embryon qui devient dans
la fuite un fruit charnu , ordinairement
fort alongé , qui- eft divifé en trois ou qua-
tre loges , & qui renferme des femences
oblongues.' Tournefort , infUt. rei. herb.
V. Plante, (/)
CoNCOMBFvi:: , {Pharmac. & Diète.) le
concombre ordinaire eil beaucoup plus em-
ployé dans nos cuihnesque dans les bou-
tiques des apothicaires : on les fait entrer
dans les potages & dans difîerens ragoûts.
La chair de ce fruit efl réellement un peu
alimenreufe ; rnais' il ell peu d'cflomacs à
qui fa fadeur & fon inertie ne devinfTent
nuifibles à la longue : il efl: vrai qu'on
corrige ordinairement ces qualités par
divers afTaifonnemens , mais cette précau-
tion eft le 'plus fouvent infuffifante. V^oye\
Légumes & Digestion.
Quelques médecins recommandent l'ufage
interne des concombres dans les maladies
des reins & de la vefiie , & fur-tout dans
le calcul : mais il ne paroît pas qu'on doive
compter beaucoup fur cette vertu lython-
triptique ; au moins peut-on avancer que
fi cette qualité eil réelle , elle eil aiTurément
très-occulte.
La pulpe de concombre ap'pliquée exté-
rieurement lur la tête, eil fort vantée pour
la phrénéfie par Bartholet & Borelli.
La graine de concombre , qui ell émulfive,
C O N
efl une des quatre femences froides. V,
Semences froides.
hcs concombres verds , & lorfqu'ils ne
font encore gros que comme le pouce ou
à-peu-près , font appelles cornichons. Dans
cet état , on les conferve dans le vinaigre
& le fel , ou dans la fliumure , pour s'en
fervir dans le courant de l'année.
On mange les cornichons en falade, feuls
ou avec d'autres plantes ; on les fait entrer
aufii dans diflérens ragoûts.
A ce degré d'immaturité le concombre
ne peut guère paiTer que pour un afîàifon-
nement , en général aiîëz indiflerent- quant
à l'utilité ou aux inconvéniens diététiques ,
qui ne convient point cependant aux eito-
macs foibles & relâchés , ou peu familia-
riiés avec les légumes , je dirois prefque
avec les cornichons ; car iljr cette matière
nous fommes extrêmement pauvres en pré-
ceptes généraux , & l'expérience de chaque
particufier fur chaque aliment particulier ,
efl prefque le feul fondement fur lequel
nous pulflions établir encore les loix diététi-
ques. Voye\ DiETE, LÉGUME , AsSAI*
SONNEMENT. {b)
Concombre sauvage , voye^ Eza^
TERIUM.
CONCOMBRE marin, f. m. {HiJ^oire
nat.Zoophyte.yLQ livre intitulé Diclionnaire
d'hifloire naturelle , dit que cet animal efl
un poifTon ; mais ce que tous les narurahfles
connoilTcnt fous le nom de poilTon a du
fang , de la chair , des arêtes , & comme
des membres ou des nageoires ; cet animal
efl à proprement parler un zoophyte, c'efl-
à-dlre , un animal-plante de la famille des
holothuries qui n'ont ni fang coloré , ni
arêtes , ni aucuns membres.
Le nom de concombre marin, cucumis ma-
rinas, que lui a donné Rondelet, lui vient
à caufe de fa forme, qui repréfente un de
ces concombres appelles cornichons que l'on
confit au vinaigre ; cette cômparallon toute
groflîere qu'elle paroît au premier abord ,
donne cependant une idée afTez jiifle de cet
animal ; car il refîemble à une pyramide
renverféc , pointue à fon extrémité infé-
rieure , arrondie en-deflus , relevée fur toute
fa longueur de cinq côtes femées de
tubercules.
Mœurs. Cet animal d(l commun fur Te
rivage
a pointe en bas , Tes tuber-
G O N
rivage dans la mer méditerrane'e , où il refl
enfoncé verticalement jufqu'aux trois quarts
de la longueur
cules^rvant à le retenir.
Qualités. C'cft encore une erreur que de
dire , comme l'auteur du didionnaire inti-
tulé , dicHonnaire d^hifloire naturelle y que
cet animal a la couleur & l'odeur du con-
combre : il eft d'un blanc fale tant qu'il eft
vivant , & Ton odeur eit i'aline , fort appro-
chante de celle des plantes marines qu'on ap-
pelle varoes ou' fucus. {M. Adansojv.)
CONCOMITANT , adj. ( Granim. &
Théol ) qui accompagne , fe dit particuliè-
rement en Théologie , d'une grâce que Dieu
nous donne durant le cours d'une adion pour
la faire & la rendre méritoire. K. G RACE.
CONCORDANCE , f. f. Grammaire.
Ce que je vais dire ici iiir ce mot , & ce
que je dis ailleurs fur quelques autres de
même ei'pece ,' n'eft que pour les perfonnes
pour qui ces mots ont été faits , & qui ont à
en enfeigner ou en étudier la valeur & l'ulage ;
les autres feront mieux de pafîer à quelque
article plus intéreffant. Que fi malgré cet
G O N 835
Les Grammairiens dillingucnt plufieurs
fortes de concordance^^.
1°. La concordance ou convenance de
l'adjedif avec fon fubrtantif: Deus faji3us y
Dieu faint ; fancla Maria , fainte Marie.
2^*. La convenance du relatif: avec l'anté-
cédent : Deus quem adoramus , le Dieuquc
nous adorons.
3"^. La convenance du nominatif avec foa
verbe : Petrus legit , Pierre lit ; Petrus <J
Paulus legunt , Pierre & Paul lifent.
4°. La convenance du refponfif avec Tin-
terrogatif , c'eft-à-dire , de iaréponiè avec la
demande : D. Quis te redemit ? R. Chriflus.
5°. A ces concordances , la méthode de
P. R. en ajoute encore une autre , qui efl
celle de l'accu ("atlf avec l'infinitif , Petruni
ejje doclum ; ce qui fait un fens qui eit , oti
le fil] et de la propofition , ou le terme de
l'acfion d'un verbe. On en trouvera des
exemples au mot CONSTRUCTION.
A l'égard de la lyntaxe de régime , régir y
difent les Grammairiens , ceft lorfqu'unmot
en oblige un autre à occuper telle ou telle pla-
ce dans le dif cours , ou qu'il lui impofe la.
avis , ils veulent s'amufer à lire ce que je cj|w/oz de prendre une telle terminai/an y & non
fur la concordance , je les prie de fonger
qu'on parle en anatomifîe à S. Cofme , en
jurifconfulte aux écoles de Droit , & que je
dois parler en grammairien , quand j'expli-
que quelque terme de grammaire.
Pour bien entendre le mot de concordance ,
il faut obferver que félon le fyfîême com-
mun des Grammairiens , la fyntaxe fe di-
vife en deux ordres ; l'un de convenance ,
l'autre d<
méthode de P. R. à la
le reg'ime ,
tête du traité de la fyntaxe , pag. j ^ ^.hn
lyntaxe de convenance , c'efl l'uniformité
ou refîemblance qui doit fe trouver dans
la même propofition ou dans la même énon-
ciation , entre ce que les Grammairiens ap-
pellent les accidens des mots ^ diclionum ac-
cidentia ; tels font le genre , le cas ( dans
les langues qui ont des cas ) le nombre &
la perionne ; c'efl-à-dire , que fi un fubf-
tantif & un adjedif font un fens partiel dans
une propofition , & qu'ils concourent en-
fèrable à former le fens total de cette pro-
pofition , ils doivent être au même genre ,
au même nombre , & au même cas. C'elf ce
que j'appelle uniformité d' accidens y & c'cfi
ce qu'on appelle concordance ou accord.
Tome VIII. '
"une autre. Ceft ainfi que amo régit , gouverne
l'accufatif , & que les prépofitions de y ex ,
pi'Of &c. gouvernent l'ablatif.
Ce qu'on dit communément fur ces deux
fortes de fyntaxes ne me paroît qu'un lan-
gage métaphorique y qui n'éclaire pas l'ef-
pritdes jeunes gens , & qui les accoutume à
prendre des mots pour des chofes. Il eft vrai
que l'adjedif doit convenir en genre, en
nombre & en cas avec fon fubftantif : mais
pourquoi ? Voici ce me femble ce qui pour-
roît être utilement fdbftitué au langage com-
mun des Grammairiens.
Il faut d'abord établir comme un principe
certain , que les mots n'ont entr'eux de rap-
port grammatical , que pour concourir k
former un fens dans la même propofition,
& félon la conftrudion pleine ; car enfin les
terminaifons des mots & les autres fignes que
la Grammaire a trouvés établis en ch-aque
langue , ne font que des fignes du rapport
que l'efprit conçoit entre les mots , félon
le fens particulier qu'on veut lui faire
exprimer. Or , dès que l'enfemble des mots
énonce un fens , il fait une propofition ou
un^ énonciation.
M m m m m
.'^34 C ON
Ainfi celui qui veut faire entendre la rai- )
fon grammaticale de quelque phrafe , doit
commencer par ranger les mots félon l'ordre
fucceiîîf de leurs rapports , par lefquels feuls
on appcrçoit , après que la phrafe eft finie ,
comment chaque mot concourt à former le
fens total.
Enfui te on doit exprimer tous les mots
fous-cutendus. Ces mots font la caufe pour-
quoi un mot énoncé a une telle terminaifon
ou une telle pofition plutôt qu'une autre.
AdCafioris il cft évident que la caufe de ce
génitif Cafloris n*efl pas ad , c'efl œdem qui
efl Ibus-cntendu ; ad œdem Caftoris , au
temple de Caflor.
Voilà ce que j'entends ^^lt faire la conftruc-
tion ; c'efl ranger les mots félon l'ordre par le-
quel feul ils font un fens.
Je conviens que félon la conflruâion
ufuelle , cet ordre cit fouvent interrompu ;
mais obfervez que l'arraiagement le plus élé-
gant ne formeroit aucun fens , fi après que
la phrafe efl finie l'efprit n'appercevoit l'or-
dre dont nous parlons. Serpentem vidi. La
terminaifon àtferpentem annonce l'objet que
C O N
2.' A l'égard du rapport de détermination >
comme nous ne pouvons pas communément
énoncer notre penfée tout-d' un-coup en une
feule parole , la nécefîité de l'élocuti^in nous
fait recourir à plufieurs mots , dont l'un
ajoute à la fignification de l'autre , ou la
reflreint & la modifie ; enforte qu'alors c'efl
l'enfemble qui forme le fens que nous vou-
lons énoncer. Le rapport d'indentité n'exclut
pas le rapport de détermination. Quand je
dis V homme faï/ant , ou [q f avant homme ,
/avant modifié détermine homme ; cepen-
dant il y a un rapport d'identité entre homme
& favant ; piùfque ces deux mots n'énon-
cent qu'un même individu qui pourroit être
exprime en un feul mot , docîor.
Mais le rapport de détermination fe trou-
ve fouvent fans celui d'identité. Diane étoit
fceur d* Apollon ; il y a un rapport d'identité
entre Dîne &ifœur ; ces deux mots ne font
' qu'un feul & même individu ; & c'efl pour
cent feule raifon qu'en laùn ils font au
même cas , Ùç. Diana erat foror. Mais il
n'y a qu'un rapport de détermination encre
/(jciir & Apollon : ce rapport eft marqué en
pofition de ce mot qui efî après le verbe , efl
le figne qui indique ce que j'ai vu.
Obfervez qu'il n'y a que deux fortes de
rapports entre ces mots , relativement à la
conflruâion.
I. Rapport , ou raifon d'identité ( id. ) le
même).
IL Rapport de détermination.
I. A l'égard du rapport d'identlré, il efl
évident que le qualificatif ou adjeûit , auilî
bien que le verbe , ne font au fond que le
fubflantif même confidéré avec la qualité
que i'adjedif énonce , ou avec la manière
d'être que le verbe attribue au fubflantif :
ainf i l'adjeâif & le verbe doivent énoncer les
mêmes accidens de Grammaire , que le fubf-
mtif énoncé d'abord ; c'efl-à-dire , que fi le
je dis avoir vu ; au lieu qu'en françois laj latin par la terminaifon du génitif delHnée
__/:.! i„ ^ _..: „A x„ i L, „n i j: : j'„/: r ^_-7
tantil
fublkntif elt au fmguiier , l'adjedif & le
verbe doivent être au fingulier , puifqu'ils
ne font que le fubflantif même confidéré
fous telle ou telle vue de Fefprit.
Il en efl de même du genre , de la per-
fqnne &: du cas , dans les langues qui ont
des cas. Tel efl l'effet du rapport^d'identité ,
& c'eft ce qu'an' appelle concordance»
à déterminer un nom d'efpece ,/orc»r-^/>o/-
linis ; au lieu qu'en françois le mot d'Apol-
lon efl mis en rapport avec fœur par la pré-
pofition de , c'efl-à-dire , que cette prépo-
fition fait connoître que le mot qui la fuit
détermine le nom qui la précède.
Pierre aime la venu : il y a concordance ou
rapport d'identité entre Pierre & aime ; &
il y a rapport de détermination entre aime 6c
vertu. En françois , ce rapport efl marqué
par la place ou pofition du mot ; ainfi venu
efl après aime : au lieu qu'en latin ce rap-
port efl indiqué par la terminaifon virtutem ,
& il efl indittérent de placer le mot avant
ou après le verbe ; cela dépend ou du caprice
& du goût particulier de l'écrivain ; ou de
l'harmonie , ou du concours plus ou moins
agréable des fyllabes des mots qui précèdent
ou qui fuivent.
Il y a autant de fortes de rapports de
détermination , qu'il y a de queflions qu'un
mot à déterminer donne lieu de faire : par
exemple , le roi a donné y hé quoi? une pen-^
Jion : voilà la détermination de la chofe-
donnée ; mais comme penjion ell un nom
1 appeilatif ou d'efpece , ou le déterminô
C O N
encore plus précilément en ajourant , une
penjion de cent pifioles : c'eft la détermina-
tion du nom appellatif ou d'efpece. On de-
mande encore , à qui ? on répond , à N.
c'eft la détermination de la perfonne à qui ,
c'eft le rapport d'attribution. Ces trois fortes
de déterminations font auflî diredes Tune
que l'autre.
Un nom détermine i°. un nom d'efpece ,
foror Apollinis.
2.°. Un nom détermine un verbe , amo
Deum.
3°. Enfin un nom détermine une propo-
iifion ; d morte Ccefaris y depuis la mort de
Céfar.
Pour faire voir que ces principes font plus
féconds, plus lumineux , & même plus aifés
à faifir que ce qu'on dit communément ,
faifons-en la comparaifon & l'application à
la règle commune de concordance entre
l'interrogatif & le rcfpoi^f.
Lerefponfif , dir-on , doit être au même
cas que l'interrogatif. D. Quis te re démit ?
R. Chrijius : Chrijlus eft au nominatif,
dit-on , parce que l'interrogatif ^'U/V efl au
nominatif.
D. Cujus efi liber ? R. Pétri : Pétri efl au
génitif, parce que cujus efl au génitif.
Cène règle , ajoute-t-on , a deux excep-
tions, i**. Si vous répondez par un pro-
nom, ce pronom doit être au nominatif. D.
Cujus efl liber ? R. Meus. 2°. Si le refponfif
efl un nom de prix , on le met à l'ablatif. D.
Quanti emifli ? R. Decem ajjïbus.
Selon nos principes, ces trois mots quis
te redemit ïont un fens particulier, avec le-
quel les mots de la réponfe n'ont aucun rap-
port grammatical. Si l'on répond Chriflus ,
c'efl que le répondant a dans Fefprit Chrif^
tus redemit me : ainfi Chriflus eff au nomi-
natif, non à caufe de quis y mais parce que
Chriflus efl le fujet de la propofîtion du
répondant , qui auroit pu s'énoncer par la
voix pafCve , ou donner quelque autre tour
à fa réponfe fans en altérer le fens.
D. Cujus efl liber ? R. Pétri y c'efl-à-dire ,
hic liber efl liber Pétri.
D. Cujus efl liber? R. Meus y c'efl-à-
dire , hic liber efl liber meus.
D. Quanti emifli ? R. Decem aJJibus.
Voici la conflrudion de la demande &
eclie de la réponfç,
C O N ^3î
D. Pro prcetio quanti ceris emifli .? R.
Emi pro decem 'aJJlbus.
Les mots étant une fois trouvés, & leur
valeur aufîi bien que leur deflination , &
leur emploi étant déterminés par l'ufage ,
l'arrangement que l'on en fait dans la pro-
pofîtion félon l'ordre fiicceffif- de leurs rela-
tions , eft la manière la plus fmiple d'ana-
lyfer la penfée.
Je fais bien qu'il y a des Grammairiens
dont l'efprit efl: aifez peu philofopîiiquc
pour défapprouver la pratique dont je
parle , comme fî cette pratique avoit d'au-
tre but que d'éclairer le bon ufage, & de
le faire fuivre avec plus de lumière , & ,
par conféquenr , avec plus de goût : au lieu
que fans les connoifîances dont je parle ,
on n'a que èes obfervations méchaniques
qui ne produifent qu'une routine aveugle ,
& dont il ne réfulte aucun gain pour
l'efprit.
Prifcien , grammairien célèbre qui vivoit
à la fin du v. fiecle , dit que comme il y a
dans l'écriture une raifon de l'arrangement
des lettres pour en faire àes mots , il y a
également une raifon de l'ordre àes mots
pour former les fèns particuliers du dif^
cours , & que c'efl s'égarer étrangement que
d'avoir une autre penfêe.
Sicut recla ratio fcripturœ docet littera-
rum congruam juncturam y fie etiam reclam
orationis compofitionem ratio ordinationis
oflendit. Solet qiiceri caufa ordinis elemen-
torum , fie etiam de ordinatione cafuum ^
ipfarum partium orationis folet qiiceri. Qui-
dam fuae folatium imperitiœ quœremes y
aiant non oportere de hujufcemodi rebuj
quœrere , fufp ic âmes for tuitas effe ordina^
tionis pofitiones y quod exiflimare penitus
flulmm efl. Si autem in quibufdam conce-
dunt effe ordinationem y neceffe efl etiam
in omnibus eam concedere. (Prifcianus de
conflruclione y lib. XVII. jub initio. )
À l'autorité de cet ancien , je me con-
tenterai d'ajouter celle d'un célèbre gram-
mairien du XV. fiecle , qui avoit été pen-.
dant plus de trente ans principal d'un col-
lège d'Allemagne.
In grammatica diSionum Syntaxi y pue-
rorum plurimum interefl ut inter exponen-
dnm non modo fenfum pluribus verbis ut-,
cunquè ac confufè coacert'atis reddant yfed
Mmmmm 2»
s ^6 C O N
dirigant etiam ordine grammatico voces
aîicujiis periodi qiix alioqui apiid autores
acri aurium judicio confidentes , Rhetoricâ
compojitione ccmmiflce funt. Hune verbo-
Tiim ordinem à pueris in interpretando ad
iinguem exigere quidnam utilitatis ajferaty
ego ipfe qui duos Ù triginta jam annos
phrontifierii fardes ^ molefiias ac curas
pertuli y non femel expenus fum illi enim
hac via y fixis , m aiunt ^ oculis intuentur
accuratiufque animadvenunt quot voces fen-
fum ahfoh'ant y quo pacio diclionum fîruc-
tura cohœreaty quot modis fingulis omnibus
fingula verba refpondeant ; quod quidem
Jieri nequit , prœcipuê in longius aula pe-
riodo y niji hoc ordine veluti per fcalarum
gradus y perfingulas periodi panes progre-
diantur. ( Grammaticœ artis infiitutio per
Joannem Sufenbrotum Ravenfpurgii Ludi
magiftrum y jam denuo accuratè conjignata.
Bafileœ y anno i ^^S-)
C'efI ce qui fait qu'on trouve fi fouvent
dans les anciens commentateurs , tels que
Cornutus , Servius , Donat , ordo efl ; &c.
C'ell auflî le confeil que le P. Jouvenci
donne aux maîtres qui expliquent des au-
teurs latins aux jeunes gens : le point le
plus important , dit-il , eft de s'attacher à
bien faire la conftrudion. Explanatio in
duohus maxime confijlit : i°. in exponendo
verborum ordine ac ftruclura orationis : 2°.
in vocum obfcuriorum expofuione. ( Ratio
difcendi Ù docendi Jof Jouvenci S. J. Pa-
rijiis y 272.5.) Peut-être feroit-il plus à
propos de commencer par expliquer la
valeur des mots , avant que d'en faire la
conflruftion. M. Rollin , dans fon traita
des études y infifle auffi en plus d'un en-
droit fur l'importance de cette pratique ,
& fur l'utilité que les jeunes gens en reti--
rent.
Cet ufage efl fi bien fondé en raifon,
qu'il efl recommandé & fuivi par tous les
grands maîtres. Je voudrois feulement qu'au
lieu de fe borner au pur fentiment , on
s'éleva peu-à-peu à la connoilTance de la
propofition & de la période ; puifque cette
connoifTance efl la raifon de la conflrudion.
V. Construction. (F)
Concordance , ( Théolog. ) efl un
diûionnaire de la bible , où l'on a mis par
ordre alphabétique tous les mots de la
C O N
bible , afin de les pouvoir conférer enfem-
ble , & voir par ce moyen s'ils ont la même
fignification par-tout où ils font employés.
Ces fortes de concordances ont encore un
autre ulage , qui efl d'indiquer les paffages
dont on a befoin , lorfqu'on ne les fait qu'en
partie.
Ces didionnaires qui fervent à éclaircir
bien des difficultés , & qui font difparoître
les contradidions que les incrédules & les
prétendus efprits forts croieiit trouver dans
les livres faints , font d'une extrême uti-
lité : auffi il n'y a guère de langues favantes
dans lefquelks on n'en ait compofé. Il
y en a en latin , en grec , en hébreu , 6'c.
Voje7^-en le détail dans le dictionnaire de
Trévoux. (G)
CONCORDANT, adj. {Rhétorique.)
Vers concordans y ce font certains vers
qui ont quelques mots communs , & qui
renferment un fens oppofé ou différent ,
formé par d'autres nibts : tels que ceux-ci.
E^ [canis , "I ■ c; " Tvcnatur , l /. • f fervat. T
t lluFus , J '"^^"^ ' [nuctUur \ J ^ «'"""' ' [ "./?««. J
Dicl. de Trév.
Concordant ou Basse -taille.
( Mufiq. ) barytonans : celle des parties de
la Mufique qui tient le milieu entre la taille
& la balie. K. Partiçs. (S)
A l'opéra de Paris & dans les concerts ,
on donne proprement à la baffe le nom de
baffe-taille y & quelquefois celui de baffe-
contre y lorfqu'elle defcend fort bas ; &
on appelle concordant y la voix moyenne
entre la taille & la baffe-taille. La clé du
concordant efl la clé de fa fur la troifieme
ligne ; celle de la taille efl la clé d'«f fur la
quatrième , & celle de la baife-taille , la clé
de fa fur la quatrième.
La plupart de nos bafîès-tailles de l'opéra
ne font que êits concordans : il en faut ex-
cepter le fieur Chafîey , dont ia voix a eu
une étendue fmguhere tant en haut qu'en
bas. (O)
CONCORDAT, f. m. {Jurifpr. ) en
général lignifie accord _, tranfaclion\ce terme
n'efl guère ufité qu'en parlant d'ades fort
anciens. On qualifie de concordats y quel-
ques traités faits entre des princes féculiers ;
par exemple , il y en a un du 2 5 janvier
1571 pour le Barrois , paffé devant deux
C O N
nofaires au Chatelet de Paris , entre le roi |
& le duc de Lorraine comme duc de Bar :
néanmoins le terme de concordat efl plus
ufité en matière bénéficiale , pour exprimer
d'anciens accords qui ont été faits pour
régler la difpofition ou les droits fpiritucls
& temporels de quelques bénéfices. Ces
fortes de concordats doivent être faits gra-
tuitement , autrement ils font fymoniaques ;
c eft pourquoi s'ils contiennent quelque re-
ferve de penfion ou autre droit , il faut qu'ils
foient homologués en cour de Rome. Ils font
cependant bons entre ceux qui les ont paiTés ,
lefqueis ne peuvent pas le taire un moyen
d^ leur propre turpitude. Voye\ Louet &
Brodeau , lett. C. n"". j-O . & lett. P.
nP. 55. Duperray , de l'état b capacité des
ccclejiafiiques , tcm. II , lii^. IV y chap.
V y pag. Z37 Ù fuiv. {A)
Coi^ CORDAT pour la Bretagne y eftla
même chofe que ce qu'on appelle plus com-
rauném^ent Compact. Breton. Voye\ ci-de-
vant Compact Breton. {A)
Concordat /a/> entre le pape Léon X
& le roi François I y qu'on appelle com-
munément fimplem^ent le concordat, cû un
traité fait enrr'eux à Boulogne en Italie , en
1516 , dont le principal objet a été d'abolir
la pragmatique-fan6lion qui fut faite fous
Charles VII à Bourges , en 1438.
Les états aflembles à Bourges par ordre
de Cbarles VII , ayant examiné les vingt-
trois décrets que le concile de Baie avoit
faits jufqu'alors , les acceptèrent tous , &
en modifièrent feulement quelques - uns :
ce fut ce qui compofa la pragmatique-
fandion , qui entre autres chofcs rétablit
les éledions des bénéfices , prive le pape
àts annates , & foutient que les conciles
généraux ont le pouvoir de réformer le chef
& les membres.
Depuis CharlesVII, tous les papes avoient
foUicité la révocation de cette pragmatique.
Louis XI y avoit confenti ; mais les lettres
de révocation ne furent point vérifiées dans
les parlemens. Le clergé s'oppofa auffi for-
tement à la révocation de cette pragmatique ,
& fur-tout les univerfités. Charles VIII &
Louis XII firent obferver la pragmatique ,
& ce fut un des fujets du différend entre
Jules II & Louis XII.
Jules II cita ce prince au concile de La-
C O N 837
tran pour défendre la pragmatique , & étoit
fur le point de la condamner lorfqu'il
mourut.
François I étant pafTé en Italie en 1515 ,
pour reprendre le duché de Milan qui lui
appartcnoit , & ayant pris la ville de Milan ,
fut par fon ambafladeur , que le pape & le
concile de Latran avoient décerné contre
S. M. une citation finale & péremptoire ,
pour alléguer les raifons qui empêchoient
d'abolir la pragmatique. Il réfolut de traiter
avec Léon X , lequel de fon côté chercha à
faire fa paix avec ce prince , & pour cet
effet fe rendit à Boulogne , où ils eurent
une entrevue le 1 1 décembre 1 5 1 5 ; après
quoi François I retourna à Milan , lailTant
le chancelier du Prat pour convenir des con-
ditions du traité avec les cardinaux d'An-
cone & Sandiquatro que le pape avoit
commis pour cette négociation. Le concor-
dat fut ^.inù conclu le 15 août i^iéj; & in-
féré dans les ades du concile de Latran ,
comme une règle que les François doivent
fuivre à l'avenir en matière eccléfiaffique &
bénéficiale.
Ce traité ne parle point de l'autorité des
conciles. la pragmatique-fandion fut abo-
lie , non pas en entier , mais le nom de
pragmatique qui étoit odieux aux papes , fut
aboh , aufli bien que les articles qui étoient
contraires aux prétentions des papes. La
plupart des autres articles ont été con-
fervés.
Le concordat efl divifé en douze rubri-
ques ou titres.
Le premier abolit les éledions des .évê-
ques , abbés & prieurs conventuels , qui
étoient vraiment éledifs , &c accorde au
pape le droit d'y pourvoir fur la nomination
du roi ; & dit que quand ces mêmes béné-
fices vaqueront en cour de Rome , le pape
y pourvoira fans attendre la nomination du
roi.
Le fécond abolit les grâces expedatives ,
fpéciales ou générales ; & les réiërves pour
les bénéfices qui vaqueront , font abolies.
Le troilieme établit le droit des gradués.
Le quatrième réferve à chaque pape la
faculté de donner un mandat apoflohque ,
afin de pourvoir d'un bénéfice fur un col-
lateur qui aui'a dix bénéfices à fà colla-
tion ; & il efl dit que dans ks provifions des
S^^ C O N
bénéfices , on exprimera leur vraie vakur
ordinaire.
Le cinquième ordonne que les caufès &
appellations fbient terminées fur les lieux
par les juges qui ont droit d'en connoître
par coutume ou privilège , excepté les caufes
majeures qui font dénommées dans le droit ;
& pour les appellations de ceux qui font
fournis au S. fiege , il ei\ dit que l'on com-
mettra des juges fur les lieux jufqu'à la fin
du procès.
Les 6^^ y^y 8^, ^e ^ loe titres qui
traitent des podèfleurs pailibles , des con-
cubinaircs , des excommuniés , des inter-
dits , de la preuve que l'on peut tirer de
ce qui eu énoncé dans les lettres ou bulles
du pape , font conformes A ce qui cfl porté
parla pragmatique-fandion.
Le onzième titre eu pour l'abolition de la
Clémentine lineris.
Et le dernier elt pour alîlircr l'irrévoca-
bilité du concordat.
Le pape envoya à François I la révoca-
tion de la pragmatique & le concordat y &
demanda que ces deux ades fufïènt enré-
gifîrés par les parlemens de France. Le roi
ne voulut pas que l'on publiât la revoca-
tion de la pragmatique ; mais il alla lui-
même au parlement de Paris pour y faire
enrégiflrer le concordât , ce que le parlement
refui'a alors de faire : il y eut auffi de fortes i
oppofitions du clergé & de l'univerfité.
Les motifs des oppofitions étoient les in-
convéniens que l'on trouvoit dans l'aboli-
tion des élevions , l'évocation des caufes
majeures à Rome , & dans l'obligation d'ex-
primer la vraie valeur des bénéfices dans les
provifions.
Ces motifs furent expliqués dans des
remontrances , & envoyés au roi : mais le
chancelier du Prat répondit , que fi l'on
n'avoit pas fajt le concordat , la pragmati-
que n'auroit pas moins éré révoquée par le
concile , que la nomination du roi aux
grands bénéfices n'étoit pas un droit nou-
veau , que nos rois en avoient joui (bus les
deux premières races; que le roi nommoit
prefque toujours aux évêchés ; le droit de
nomination qui étoit d'abord commun à
tous les fidèles , ne s'exerçant pas bien en
çomrpun , pafta ^ fouvcrain comme ayant
C O N
le gouvernement de l'état, dont TEglifc fait
partie.
En conféquence le roi n'eut point d'é-
gard aux remontrances du parlement; il
envoya par le feigneur de la Tremoille un
ordre précis au parlement d'enrégiftrer le
concordat (ans délibérer davantage : ce qiri
fut fait enfin le 2.2 xMars 1517 , mais avec
proteftation que c'étoit du' très-exprè»
commandement du roi réitéré plufieurs fois ;
& que l'on continueroit d'obferver la prag-
matique.
En effet , dans les conteftations qui fe
prélenterent enlijite concernant les nomi-
nations aux évechés & abbayes , le parle-
ment jugeoit fuivant la pragmatique ; au
contraire , le grand-confeil auquel Louife
de Savoie , régente du royaume pendant
la prifon de François I , renvoya ces eau-"
fcs , les jugeoit fuivant le concordat : c'efl
pourquoi le roi , lorfqu'il fut de retour ,
par une déclaration de 15^5 attribua pouf
toujours la connoifîance de ces fortes de
matières au grand-confeil , ce qui contri-
bua beaucoup à augmenter cette jurifdic-
tion.
Par diverfes bulles poflérieures au concor-
dat , les difpofitions par rapport à l'expref^
fion de la valeur des bénéfices & aux man-
dats , furent révoquées ; la nomination du
roi fut étendue , même aux évêchés & ab-
bayes qui avoient privilège d'élire.
Le parlement , le clergé & les états aA
femblés , ont fait de temps en temps diverfes
inftances pour le rétablifîèment des élec-
tions ; on a même fait long-temps des prières
publiques, pour demander à Dieu l'aboli-
tion du concordat : mais le concordat efl de»-
meuré dans le même état , & eft préfente-
ment obfervé fans auaine contradiction.
Dans les pays conquis & autres qui ont
été réunis à la France poftérieuremen»- au
concordat) le roi nomme aux bénéfices en
vertu d'induits particuliers , qui ont été ac-
cordés tn divers temps par les papes.
Plufieurs auteurs ont écrit contre le con-
cordat & contre le chancelier du Prat ,
avec lequel il fut conclu.
Il feut néanmoins convenir , comme
l'obferve M. le préfident Henaut , que les
annates contre lefquelles on s'eit beaucoup '
récrié , n'ont point été établies par io
C O N
concordat y mais par une bulle qui fuivit de
près ; & elles furent depuis rellreintes aux
bénéfices confiftoriaux ; qu'à l'égard du con-
cordat p il eft jufte en ce que pour la no-
mination aux grands bénéfices , il n'a fait
que rendre au roi un droit dont {&s pré-
décefleurs avoient long-temps joui ; que nos
rois ayant fondé la plupart des grands bé-
néfices , la collation doit leur en apparte-
nir ; que c'eli au roi à exercer les droits
qu'exerçoient les premiers fidèles , & qu'ils
lui ont remis lorfque l'Eglife a été reçue
dans l'état pour prix de la protedion que
le roi accordoit à la religion ; que les élec-
tions étant devenues une fimonie publique ,
les grands fieges étoient fouvent remplis
par des gens de néant peu propres à gou-
verner ; & qu'à chofes égales , il vaut mieux
que ce foit la noblefîê. V^oycT;^ les hiftoriens
de France aux années l ^i ^ Ù fuivantes ;
le texte du concordat , le commentaire de
RebufFe & les traités de Genebrard &
Dupuy. (j4)
Concordat entre Sixte IV & Louis
XI eft un accord qui fut fait entr'eux en
14.72. Il eft rapporté dans les extravagantes
communes , ch. j. de trenga & pace , ch.j.
& commence par ces mots : ad univerfalis
ecclejits. Par ce concordat Sixte lY voulant
pacifier les diflêntions qui lubfiftoient entre
la cour de Rome & la France , à l'occafion
de la pragmatique-faaclion , donna aux col-
lateurs ordinaires lix mois libres pour con-
férer les bénéfices; favoir , février, avril ,
juin, août , odobre & décembre, au lieu
qu'ils n' avoient auparavant que quatre mois
libres , pendant lefqueis ils n'étoient pas
fijjets aux grâces expectatives ; il le réferva
néanmoins la faculté d'accorder fix grâces ;
il le relerva auiîi jufqu'à un certain temps
ladifpofition des bénéfices de France , pof-
fédés par les cardinaux & par leurs fami-
liers ; il fit aufii quelques réglemens fiar le
jugement des caufes & appellations , & or-
donna que les taxes faites par Jean XXII
pour les bénéfices feroient obfervées ; mais
ce concordat ne fut pas exécuté : le procu-
reur général de Saint-Romain s'y oppola,
comme étant contraire aux décrets des con-
ciles de Conilance & de Balle , félon la
remarque & note marginale de Dumoulin
fur l'extravag. ad uniyerfalis 3 fur le met
C O N 8^9
proh dolor. Vojc^ les notes fur les induits ,
par F'nfon , tome I y p. ^z. {A)
Concordat Germanique, eftun
accord tait en 1447 entre le légat du faint
fiege , l'empereur Frédéric III & les princes
d'Allemagne , pour raifon des églifes , mo*
nafieres & autres bénéfices d'Allemagne ,
confirmé par le pape Nicolas V.
V^ï et concordat y le pape le réferve tous
les bénéfices mentionnés dans les extrava-
gantes eX'Ccrabilis ^ & ad regimen z j aux
modifications fuivantes.
I®. Il conièrve ou plutôt il rétablit la li-
berté des éledions dans les égliiès cathedra- '
les , métropolitaines & monallefes , & s'obli-
ge de les confirmer , à moins que pour de
jufles caufes & de l'avis des cardinaux , il
ne fut néceffaire de pourvoir un lujet plus
digne & plus capable.
2°. Il laifle les confirmations des éledions
dans l'ordre commun aux fupérieurs , &
promet qu'il ne différa point des préla-
tures des moniales ^fk moins qu'elles ne
Ibient exemptes , auquel cas même il n'en
difpofera que par commifiion ad partes.
3°. Il abolit les expectatives pour tous
les autres bénéfices inférieurs , & en donne
aux ordinaires la libre difpofition pendant
fix mois , femblable à l'alternative des évê-
ques de Bretagne.
4°- Si dans les trois mois du Jour que la
vacance fera connue , le pape n'a pas pourvu
pendant ics mois qu'il s'dt réferve , il fera
permis à l'ordinaire de pourvoir.
5^. Il elt dit que le temps pour accepter
cette alternative commencera à courir à
l'égard du pape , à compter du premier
Juin lors prochain , & durera à l'avenir,
s'il n'en eii autrement ordonné du conlèn-
tement de la nation germanique dans le
prochain concile.
6^. Les fruits de la première année des
bénéfices vacans feront payés par forn>e
d'annate , luivant la taxe délivrée par la
chambre , appeliée communs ferpice s.
7". Que fi les taxes font exceffives , elles
feront modérées , & qu'à cet effet il fera
nommé des commiffaires qui informeront
de la qualité des choies , des circonllances ,
des temps & des lieux.
8°. Que les taxes feront payées moitié
dans l'an du jour de la pofleiiîon palfibie ,
840 C O N
& l'autre dans l'année fuivante ; & que fi
le bénéfice vaque plufieurs fois dans une
année , il ne fera néanmoins dû qu'une
feule taxe.
9". Que celle des autres bénéfices infé-
rieurs fe paiera pareillement dans l'an de la
polîeifioQ paifible ; mais qu'on ne paiera
rien pour les bénéfices qui n'excéderont
point vingt-quatre florins ou ducats d'or
de la chambre.
Enfin ce concordit veut que pour l'ob-
fervation de ce qui y eft réglé , l'Allemagne
proprement dite ne foit point dillingu^e de
la nation germanique en général.
Il y eut en 157^ une déclaration du pape
Grégoire XIII au fujet de la reverfion du
droit de conférer , en cas que le pape n'ait
pas pourvu dans les trois mois , par la-
quelle il efl dit que les trois mois commen-
cent du jour que la vacance eil: connue au
iàint fiege.
Le bénéfice doit ê^ obtenu dans les trois
mois , & conféré pdP^ faint fiege ; mais il
faut que la publication foit faite dans les
trois mois du jour de la vacance , comme
dans le lieu du bénéfice.
L'empereur Maximilien ordonna en 15 18 ,
que ce concordat feroit reçu à Liège; &
Charles-Quint , par édit de Février i)54,
en ordonna l'exécution dans l'éghfe de
Cambrai.
L'églife de Metz efî: auflî comprife fous ce
concordat , en vertu d'un induit ampliatif.
Il y a eu de lèmblables induits accordés
par difFérens papes , pour d'autres églifes ,
dont il eft fait mention dans le recueil des
principales decijions fur les bénéfices y par
Drappier, tome II. cli. xxij.p. 2.34; les
œuvres de Cochin , tom. I. 5. confult. [A)
Concordat triangulaire , eitun
accord fait entre trois bénéficiers , par le-
quel le premier réfigne fon bénéfice au fé-
cond ; celui-ci réfigne un autre bénéfice à
un troifiemc^ bénéficier , lequel en réfigne
aufïi un en faveur du premier des trois ré-
gnans : ces cercles de réfignations qu'on ap-
pelle concordats triangulaires ^ ne font point
conlidérés comme des permutations cano-
niques 4 parce que chacun des réfignans re-
çoit bien un bénéfice , mais il ne le tient
pas de celui auquel il réfigne le fien. 11 fe
tait auffi de ces concordats quatriangulaires ,
C O N
c'efî-à-dire , entre quatre bénéficiers. Sou-
vent ces concordats ne font point portés A
Rome , mais en conféquence chacun àts
réfignans pafl'e une procuration que l'on
fe contente de faire admettre en cour de
Rome y ce qui ne fufiît pas.
En effet , ces fortes de concordats ne font
point licites ; c'eit une elpece de fimonie ,
quce ex paâo oritur , à moins que pour des
confidérations particulières , ils ne foient ad-
mis en cour de Rome. Le concile de Ma-
lines tenu au commencement de ce fiecle ,
les a réprouvés. Les dodeurs les appellent
des contrats innommés , & tous les dodeurs
françois , efpagnols , italiens les condam-
nent. Gonzalès dit que de (on temps le pape
les rejetoit , & n'en admettoit aucun , ainli
qu'il l'afîùre fur la règle de menjihus & al-
ternativâ ^ &c il y a des arrêts qui les ont
profcrits : ils ne peuvent donc avoir leur
effet , A moins qu'ils n'aient été admis en
cour de Rome , & non pas feulement les
procurations. Voye^ Duperray , de l'état Ù
capacité des ecclefiajliq. tom. Il y liv. IV y
ch. V y page i ^i. {A) ■
Concordat Vénitien , efî un ac-
cord fait entre le pape & la république de
Venife , pour la nomination des principaux
bénéfices de cet état ; ce concordat efi à-peu-
près femblablc à celui qui tut fait entre
Léon X & François I. Voye\ Thuana y p,
354-' U)
* CONCORDE , f f déefTe : les Grecs
l'adoroient fous le nom de y-ovu. Elle avoit
un culte à Olimpie ; les Romains lui éle-
vèrent un temple fuperbe dans la huitième
région , à la perfuafion de Camille , lorf-
qu'il eut rétabli la tranquillité dans la ville.
Ce temple fut brûlé , & le fénat & le peu-
ple le firent réédifier. Tibère l'augmenta &
l'orna : on y tenoit quelquefois le confeil
ou les afiêmblées du lënat ; il en refle en-
core des vefîiges , entre autres lept colonnes
très-belles avec leurs chapiteaux; on doute
cependant qu'elles aient appartenu à ce
temple. La Concorde avoit encore deux au-
tres temples, l'un dans la troifieme région ,
& l'autre dans la quatrième. On célebroit
fa fête le 16 Janvier, jour auquel on avoit
fait la dédicace de fon temple. Elle étoit
repréfentée en femme en longue drape-
rie, entre deux étendards, quand elle étoit
militaire ;
C O N
militaire ; mais la Concorde civile ^toît une
femme aflîfe , portant dans fes mains une
branche d'olivier & un caducée , plus or-
dinairement une coquille & un fceptre , ou
une corne d'abondance dans la main gau-
che. Son fymbole étoit les deux mains unies ,
ou plus fimplement le caducée.
C ON c O R D E ( le pays delà) ^ Géog. mod.
les Hollandois la nomment t'iand van een-
racht ; c'eft un pays fur la côte des terres
auftrales , fous le tropique du capricorne ,
au midi de l'île de Java.
§ CONCORDE ( l'Ordre de la ) ,
fut inftitué par Erneft , margrave de Bran-
debourg en 1660.
Les chevaliers ont une croix d'or à huit
pointes pommetées & émaillées de blanc ;
à chaque angle il y- a deux C , entrelacés
en fautoft" ; au centre de cette croix eft une
médaille d'or émaillée , & deux rameaux
d'olivier adofîés , dont les extrémités fupé-
rieures & inférieures palîênt dans deux
couronnes auffi d'olivier , avec ce mot à
l'entour , concordant ; une couronne élec-
torale 'fur les deux pointes d'en haut , &
un ruban orangé ; au travers de la croix eft
le nom du margrave de Brandebourg, &
la date de l'inflitution. {G. D. L. T. )
CONCORDiA, i.Geog. mod) petite ville
d'Italie , au duché de la Mirandolé , fur
la Sechia. Long. 2.8 , 54 ,• lat. 4/^ , 52.
CONCOURANTES (Puissances) ,
Méchanïq. font celles- dont les diredions
concourent , c'eft-à-dire ne font point pa-
- ralleles , foit que les diredions de ces puif-
fances concourent eftedivement, foit qu'elles
tendent feulement à concourir , • & ne
concourent en eifet qu'étant prolongées. On
appelle âuSi puijfances concourantes celles
qui concourent à produire un effet , pour les
diftinguer des puiffances oppofées , qui ten-
dent à produire des effets contraires. V^oy.
Puissances conspirantes. ( O)
CONCOURIR. On dit en Géométrie
que deux hgnes , deux plans concourent ,
lorfqu'ils fe rencontrent & fe coupent , ou
du moins lorlqu'ils font tellement difpofés
qu'ils fe rêncontreroient étant prolongés.
^07f;j Concours. (O)
CONCOURS , Géométrie. Point de con-
cours de plujieurs lignes , efl le point dans
lequel elles fe rencontrent , ou dans lequel
Tome VIII.
C O N 84r
elles fè rencontreroient , fi elles étoient
prolongées. Point de concours de plufieurs
rayons. Voye^ FoYER. ( O)
Concours , f. m. ( Métaphyfiq. ) Le
concours efl l'adion réciproque de diffé-
rente;- perfonnes , ou chofes , agifîant en-
fembie pour un même effet & pour une
même fin. Les fcholafflques diflinguent
deux fortes de concours , le médiat , & l'im-
médiat ; le premier qui confiffe à donner
le pouvoir , ou la faculté d'agir ; le fécond
qui efl l'infîuence contemporaine de deux
caufes pour produire un effet ; ainfi l'aïeul
concourt médiatement , à la produdion du
petit-fils , parce qu'il a donné au père la
puiffance d'engendrer : mais le père concourt
immédiatement avec la mère pour le pro-
duire. On convient généralement que Dieu
concourt médiatement avec toutes les créa-
tures , pour les rendre capables d'agir : nous
ne penfons , nous ne parlons , & nous n'a-
giiîons que parce que Dieu nous en a don-
né la faculté , &" fans cette providence contre
laquelle les impies s'élèvent , ils fcroient en-
core dans le néant , & la terre ne fèroit
pas chargée du poids de ces ingrats. Mais
on diipute dans les écoles , fi le concours
médiat efl fufîîfant , &: s'il n'eff pas de plus
nécefîàire qu'elle concoure immédiatement
avec les créatures par une nouvelle influence ,
pour la produélion de chaque ade , de la
même manière que le père concourt avec la
raere pour la produdion de l'enfant.^ Le
torrent des fcholaftiques eft pour l'affirma-
tive. Durand de S. Portien évêque de Meaux ,
affez hardi pour le temps où il écrivoit , &
d'autant plus hardi que tous les efprits
étoient fubjugués , fe déclara pour le con-
cours médiat ; voici les railons fur lefquelles
il appuie fon fentiment. Si Dieu concou-
roit immédiatement avec les créatures -> ou
ce feroit par la même adion numérique ,
ou ce feroit par une adion différente ; on
ne peut dire ni l'un ni l'autre, i*. Ce n'efl
point par la même adion numérique que
Dieu concturt avec les créatures , parce que
l^ même adion numérique ne peut éma-
ner de deux agens , à moins qu'elles n'aient
la même faculté numérique , telle qu'elle
efl dans le Père & dans le Fils qui produi-
fent le Saint-Efprit par la même afpiratioa
numérique. En fécond lieu , Dieu ne
Nnnnn
S4i C O N
concourt point par une adio» qui lui feroit
perfonnelle ; car ou l'adion de Dieu pré-
cëderoit l'adion de la créature , ou elle en
feroit précédée , ou ces deux adions fc-
roient iimultanées. Si l'aâion de Dieu pré-
<;ede l'adion de la créature , il ne refte donc
rien à faire pour la créature ; dcmême fi
c'eft 'l'adion de la créature qui précède celle
de Dieu , l'influence de Dieu eft inutile ,
parce que l'effet eff produit par l'adion qui
Î recède , foit que cette adion vienne de
)ieu , foit qu'elle appartienne à la créature.
Enfin , fi les deux adions font fimultanées ,
l'une des deux devient inutile , parce qu'une
feule fuffit pour produire l'effet. Voilà ap-
paremment ce que nieront les auteurs qui
îbutiennent le concours immédiat ; ils en fon-
dent la néceflité fur le fouverain domaine
que Dieu a fur toutes les créatures , & plus
encore fur la confervation qui , félon eux ,
elt une création continuée. Voici comme
ils raifonnent. La confervation étant une
création continuée , Dieu ti\ obligé de pro-
duire des iublfances dans tous tes inffans.
Or Dieu ne peut pas produire des fublfan-
ces qu*il ne les produife revêtues de leur
modificarion ; il ne les produitpas làns doute
comme des êtres fans forme & comme des
cfpeces , ou quelqu' autre des univerlaux de
Logique. Or parmi les modifications dont
les fubflanees font douées , on y doit com-
prendre tous les ades par lelquels elles fe
modifient ; donc Dieu les produit immédia-
tement avec les créatures : donc il faut ad-
mettre le co/zcoarj- immédiat. Mais ce fen-
timent parott bleffer la liberté , c'efl du-
moins la conféquence que tire M. Bayle ;
jugez s'il efl conféquent dans fon railonne-
ment. Il me femble , dk ctt auteur , qu'il
en faut conclure que Dieu a fait tout ce qui
n'av%it point dans toutes les créatures , des
caufes premières , fécondes , & même oc-
cafionelles , comme il efî* aifé de le prou-
ver ; en ce moment où je parle , je fuis rel
que je fuis avec mes circonfîanees , avec
telle penfée , avec telle adion ,* aflis ou de-
bout r que li Dieu m'a créé ay commetce-
ment tel que je fuis , comme on doit né-
cefîairement le dire dans ce fyflême , il m'a
créé avec telle penfée , telle adion , telmour-
vement , & telle détermination ; on ne peut
«dire que Dieu m'a créé exiftant^ qu'il ne
C O N
produife avec moi mes mouvemens & mes
déterminations. Cela efl inconteflable pour
deux raifons. La première efl que quand il
me crée & me conferve à cet infiant , il ne
me conferve pas comme un être fans for-
me , comme une efpece , ou quelqu'autre
des univerlaux de Logique ; je fiiis un indi-
vidu , il me crée & me conferve comme tel y
étant tout ce que je fuis dans cet infiant.
M. Bayle poufîê encore davantage cette ob-
jedion. Quoi , dit-il , rejetterons-nous la
fubfiflance continue des créatures à caufe
des fâcheufes conféquences ? Sont -elles à
comparer avec celles dont nous venons de
parler ci-defîus ? L'hypothefe de ces gens-
là efl une pure imagination inconcevable.
Il vient au concours immédiat , qui efl
une "fuite de la création fans celîe renou-
vellée , & dit que fi l'on veut que^ieu foit
l'auteur immédiat de toutes les determinai-
fons & de toutes les adions , il (èra vrai aufS
que nous ferons de purs automates , de fin>-
ples fujets purement paflifs , & incapables
d'aucun penchant , ni d'aucune détermina-
tion ; & fi cela efl , que deviendra le pé-
ché ? Car enfin qu'il foit néant tant qu'il
voudra , l'homme ne fera néant que par
fon inadion qui lui efl elfentielle , & Djai
ne lui peut demander compte du mauvais
ufage d'une faculté qu'il ne lui a jamais don-
née ; ainfi ce fentiment n'efl pas compatible
avec l'idée la plus fàine qu'on puifîè avoir
du péché.
Telles font les objedions de M. Bayle
contre [q^ concours immédiat. Il- efl cer-
tain que quelque fyflême qu'on fuive fur
cet article , il refiera toujours de l'obf-
curité ; mais il efl encore plus certain
que la toute-purfîànce de Dieu & la li-
berté de l'homme /ont deux vérités in—
conteflables»
Le fyflême qui attribue aux âmes le*poa-
voir de remuer les corps , outre qu'il n'sft
pas chargé de fiicheuiés conféquences ,,
efl un f ntiment fi naturel & fi géné-
ral , qu'on ne devroir point s'y oppofer ,
à moins qu'il ne fût combattu par des rai-
fons convaincantes , ou tirées de la cpeflion^
en elle-même ,, ou prifes de la gloire de-
Dieu. Mais , dira -r- on , nous ne pou-
vons concevoir comment une ame qui efl
intelligente , peut remuer la matière qui efl:
■ C O N
ime fubfl'ance étendue. Mais conçoit-on
mieux le concours ? D'ailleurs eft-ce une
raifon fuffirante pour nier une chofe , de
dire je ne la conçois pas ? Savez-vous com-
ment l'ame forme Tes volitions ? Vous ne
la dépouillerez pas fans doute de ce pou-
voir , à moins que vous n'en faflîez une
lîmple machine.
Les anges font appelles dans l'Ecriture
les exécuteurs de la loi divine. Quand Dieu
envoya l'ange exterminateur qui fit mourir
tous les premiers nés d'Egypte , dans la fup-
polition que Dieu eft le principe de l'adi-
vité des intelligences & du mouvement du
cofps , que faifoit ctt ange ? Son defTein
ctoit de tuer tous les premiers nés , il venoit
de l'ordre de Dieu immédiatement , l'ac-
tion phyfique qui fit mourir les premiers
nés n'en venoit pas moinsi; c'étoitdoncDici
qui aglflbit alors immédiatement ; encor;^
un coup , qu'y faifoit la préfence de l'ange ?
S. Paul nous dit que la loi a été donnée
par le miniftere ies anges ; fi les intelligen-
ces n'ont aucun pouvoir de remuer la ma-
tière , ce fut Dieu lui-même qui immédia-
tement fit paroître ces éclairs , cts tonner-
res , cette voix éclatante qui a prononcé la
loi ; les démons même font repréfentés
comme ayant le pouvoir de remuer la ma-
tière : ferez-vous intervenir Dieu dans tou-
tes les aûions machinales du démon ? fera-
ce Dieu qui , à l'occafion àts polfédés , les
obligera à le jeter fur les pafTans ? Si cela efî ,
lorfque le diable par des prelliges tente tous
les hommes , ce fera par le miniftere de
Dieu même , puifque c'eft le preftige qui
féduit les hommes. Voici toutes \t^ confé-
quences que je tire de tout ce que je viens
de dire. Si les intelligences qui ne font pas
réunies à la matière ont le pouvoir de la re-
muer , pourquoi le refufcr à l'ame ? Une
autre conléquenee qui fuit de ce principe ,
eft que le concours immédiat , la prémotion
phyfique , la création renouvellée , tombent
par-là ,. fe détruifent & renverfent deux
partis , qui ne fâchant pas garder un jufte
milieu , tombent dans des excès fous pré-
texte de mieux combattre les propofitions
•de leurs adverfaires. On peut encore prefîêr
ainfi les défenfeurs du concours immédiat :
votre concours immédiat eft ou fimultané ,
ou prévenant \ il n'y a point U de iniHeu ;
C O N S45
or il ne peut être ni l'un ni Tautre. 1°. l£
ne peut être fimultané ; car en quoi con-
fiftele concours fimultané ? n'eft-ce pas dans
deux caufes parallèles , qui ne tirant leur
force & leur adivité que d'elles - mêmes ,
agiflent de concert pour produire le même
effet , de manière pourtant que l'cfiTet foit
divifé & partagé entr'elles ? Or ceci ne
peut point avoir lieu dans l'hypothefe du
concours immédiat ; 1°. p^rce que les créa-
tures étant fubordonnées à Dieu , tirent de
lui toutes leurs forces & toute leur adivité ;
2°. parce que les adions àts créatures étant
fpirituelles , & par-là fimples & indivifibl^s ,
Dieu les produit par l'influence qu'il verl'e
dans les créatures , il faut nécefîairement
qu'il \qs produife toutes entières ; deux con-
féquences qui renverfent abfolument. la
concours immédiat. Il refte donc que le
concours immédiat foit prévenant ou déter-
minant. Or ce concours le confond avec la
prémotion phyfique , & par conféquent il
doit être enveloppé dans les ruines. V oye:^
Varticle PrÉMOTION.
Concours , ( Jurifpr. ) en matière
civile , fe dit lorfque plufieurs perfon-
nes prétendent chacune avoir .droit au
même objet.
Le concours de privilèges attributif de
JurifdJdion opère que fi l'un des privilèges
eft plus fort que l'autre , le premier l'em-i
porte ; s'ils font égaux , ils fe détruifent
mutuellement : c'eft pourquoi l'on dit
auffique, concurfu mutuo fe fç impediunt
partes.
Plufieurs adions peuvent concourir en
faveur du créancier pour une même créan-
ce ; il peut avoir l'adion perfonnelle jointe
à l'hypothécaire , & dans ce cas ejle dure
quarante ans.
En cas de concours de privilèges entre
créanciers ; fi les privilèges ne font pas égaux ,
les plus favorables pafîènt les premiers ,
chacun félon leur rang ; s'ils font égaux , les
créanciers viennent par contribution. Il en
eft de même en cas de concours d'hypothè-
ques , ou de faifies qui font du même jour,
F(>yf;j Concurrence , Créancier,
Privilège , Saisie.
CONCOURS , ( Mufique ) affemblée de
muficiens &: de connoifTeurs autorifes . dans
laquelle une place vacante de maître de
Nnnnn 2,
§44 C O N
inufique ou d'organifte efî emportée à la
pluralité des fuftrages , par celui qui a fait
le meilleur motet , ou qui s'dl diflingué
par la meilleure exécution.
Le concours étoit en ufage autrefois dans
la plupart des cathédrales ; mais dans ces
temps malheureux où l'ei'prit d'intrigue
s'ell emparé de tous les états , il efl: naturel
que le concours s'aboliife infenfiblement ,
& qu'on lui fubflitue des moyens plus aifés
de donner à la faveur ou à l'intérêt , le prix
qu'on doit au talent & au mérite. (S)
Concours , en matière bénéficiale y ar-
rive de 'eux manières différentes ; lavoir lors-
qu'un coUateur a donné le même bénéfice
à deux perlonnes le même jour & lur le
même genre de vacance , ou lorfque deux
coUareurs difFérens ont pourvu en même
temps.
Au premier cas , c'eff-à-dire quand les
{)rovifions font du même coUateur , & que
'on ne peut juflifier par aucune circonl-
. tance laquelle àts deux eft la première ,
les deux provifions le detruiient mutuel-
lement , fuivant la maxime qui a été rap-
portée ci- devant en parlant du concours de
privilèges»
Il en feroit de même de deux fignatures
ou provifions de cour de Rome ; & l'on ne
donne pas plus de privilège en France à cel-
les qui Ibnt émanées du pape même ,' qu'à
celles qui ibnt faites par le chancelier ou
vice-chanceher.
Une lignature.ou provifion nulle ne fai'
pas de concours ; mais il faut que la nul-
lité foit intrinièque à la provifion.
Pour ne pas tomber dans Fmconvénienr
du concours dans les vacances , par mort
ou par dévolut , il eft d'ufage de retenir en
cour de Rome plufieurs dates , afin que fi
plufieurs impétrans ont obtenu des provi-
fions du même jour & fur un même genre
de vacance , on puiiîe enfin en obtenir lur
une date pour laquelle il n'y ait point de
concours^
En cas de concours entre le pape &
^ordinaire , le pourvu par l'ordinaire eft
préféré.
De deux pourvus le même jour ,, l'un
par l'évêque , l'autre par fon grand vi-
caire , le premier eft préféré ; mais fi le
l^urvu par le grand-vicaire a pris poiîeP
c 0 M
fion le premier , il fera préféré. Quelques
auteurs font néanmoins d'avis que le pour-
vu par l'évêque eft toujours préféré. Cap,
Ji âfede de prcebend. in 6°. Paflor , lib. II.
lit. xi'ij. Chopin , de facrâ polit, lib. I. tit.
rj. Bouchel , fomm. bénéf. verbo prife de
pojfejjîon. Cailel , defin. can. au mot con-
cours. Brodeau fur Louet , let. M. n. z o.
Papon , Rebufîè , Gonzalès , Drappier ,
des bénéf. tome I. ch. x.
Concours pour les cures , eft en
quelques provinces un examen que l'évê-
que ou les commiiîaires par lui nommés
font de tous ceux qui fe préfentent pour
remplir une cure vacante , à l'effet 'de
connoître celui qui en eft le plus digne &:
le plus capable.
Il fe pratique dans les évêchés de Metz
& de Toul , lorfqu'une cure vient à va-
quer au mois du pape ; l'évêque lait pu-
blier dans la ville de fon fiege le jour au-
quel il y aura C£>/zcoz/rj' ,& l'heure à laquelle
il commencera.
Le concours fini , l'évêque donne ade au
fujèt qu'il eftime le plus capable , foit fur fa
propre connoiflance ou fur le rapport de
ceux qu'il a commis pour aflifter au con-
cours ; & fur cet ade , celui qui eft préféré
obtient fans difficulté des bulles en cour de
Rome , pourvu qu'il ne s'y trouve d'ailleurs
aucun empêchement.
Si l'évêque laiiibit pafTer quatre mois fans
donner le concours , la cure feroit impétra-
ble en cour de Rome.
Ce concours avoit auffi lieu autrefois en
Artois ; mais depuis que cette province a
été réunie a la couronne , il y a été aboli par
i.rrêtdu il Janvier i66o.
Autrefois pour les cures de Bretagne , le
concours fe faifoit à Rome ; mais par une
bulle de Benoît XIV , revêtue de lettres pa-
tentes dûement enrégiftrées au parlement
de Bretagne , & fuivie d'une déclaration du
roi du n août 1742., le concours doit fe
faire devant l'évêque diocéfain , & fix exa-
minateurs par lui choifis , dont deux au
moins doivent être gradués ; & tous doivent
remplir ce miniftere gratuitement. Le con-
cours doit être ouvert dans lès quatre mois»
de la vacance de la cure Les originaires de
la province font feuls admis au concours ,v
& en cas d'égalité de mérite , les originaire*
C O N
eu dioce^ où efl: la cure doivent être pré-
férés. Nul n'efl admis au concours d'une
cure vacante , qu'il n'ait exercé les fonc-
tions curiales pendant deux années au moins
en qualité de vicaire ou dans une place équi-
valente , ou qu'il n'ait pendant trois ans
travaillé au miniftere des âmes ; & fi l'af-
pirant cû d'un autre dioccfe que celui où
elt la cure , il faut qu'il prouve quatre ans
de fervice. Les évêques peuvent néanmoins
accorder des difpenfes aux gradués en théo-
logie. Ceux qui font déjà pailibles pofïei-
fèurs d'une cure ne peuvent être admis au
concours. Il faut auffi , pour y être admis,
favoir & parler ailément la langue breton-
ne , Il la cure eft dans un lieu où l'on parle
cette langue. La déclaration ~ règle aufll la
forme du concours pour l'examen des afpi-
rans , & pour le choix d'un d'entr'eux. En-
fin le roi déclare qu'il ne fera rien innové
en ce qui concerne l'alternative dont les évê-
ques jouilfent en Bretagne , ni pour le droit
des patrons laïques ou eccléfiaitiques, & pour
les maximes & ufages reçus dans la provin-
ce , qui feront obfervés comme par le
paffé. (A)
Concours ENTRE gradués, c'efî
lorlque plufieurs gradués ont tous requis un
naême bénéfice en vertu de leurs grades.
Vojei Grades & Gradués. (A)
CONCRESSAUT , ( Geogr.' mod. )
petite ville de France en Berri , fur la
Sandre.
CONCRET , adj. {Gramm. & Philof.)
e'eft l'oppofé & le corrélatif à'abftrait. V. .
Abstraction.
Le terme concret marque la fubfîance
même revêtue de Ces qualités, & telle qu'elle
exifte dans la nature. L'a^/?m/>défigne quel-
qu'une de (es quahtés confidérée en- elk-
même , & féparée de fon fujet.
Concret ; nombre concret efl oppofé à
nombre abftraic : c'eil un nombre par lequel
on défigne telle ou telle chofe en particu
lier.. Foy.. Abstrait. Ainfi quand je dis
trois en géné^^al , fans l'appliquer à rien ,
c'eft un nombre abftrait ; mais fi je dis trois
hommes y ou trois heures ., ou trois pies , &c.
trois àe\\ent alors un . nombre concret. On
ne multiplie point des nombres concrets les
uns par les autres ; ainii c'efl une puérilité
<^e„de. demander, comme. font certains
C O N • §45
arithméticiens , le produit de 3 livres 3 fous
3 deniers , par 3 livres 3 fous 3 deniers. En
effet, la multiplication ne confilte qu'à pren-
dre un certain nombre de fois quelque chofe;
d'où il s'enfuit que dans la multiphca-
tion , le multiplicateur efl toujours cenfé
un nombre abllrait. On peut divifer des
concrets p^Y des abftraits ou par des concrets'y-
ainfi je puis divifer 6 lous par 2, fous,
c'efl-à-dire chercher combien de fois 2 fous
efl contenu ^ans 6 fous ; & le quotient fera
alors un nombre abflrait. On peut aufli di-
vifer un concret par un abflrait : par exem-
ple 6 fous par 3 , c'efl-à-dire chercher le
tiers de 6 fous ; & le quotient fera alors un
nombre concret , favoir 2, fous. Dans les
opérations arithmétiques on dépouille les
nombres des idées d'ab{l:rait& de concret ^
pour facihter ces opérations ; mais il faut
les leur rendre après l'opération pour fe
former àes idées bien nettes. Voye^ MUL-
TIPLICATION , Division , Arithmé-
tique , ùc. [oy
CON € R E T , ( C/iy/rz, yfynonyme à ^^a;^, .
condenfé. Voye\ CONCRÉTION.
CONCRÉTI9N , f f. fe dit en général,
^n phyf^ de l'adion par laquelle des corps
mous ou fluides deviennent du#; & fe
prend indifféremment pour condenfation ,
coagulation^ &c. Foy. CONDENSATION,
Coagulation ,. Ùc. Concrétion fe dit
aufli quelquefois de l'union de plufieurs pi ■*-
tites particules , pour former une mafîè fen-
fible , en vertu dequoi cette malle acquiert
telle ou telle figure , & a telles ou telles pro-
priétés. Ce mot efl d'ufage fur-tout en hii--
toire naturelle & en médecine. (O)
* Concrétion , {Hift. naturelle.) on\
appelle de ce nom les fubflances terreufes , .
pierreufes ou minérales , dont ks pfarties,
après avoir été defunies & décompofées fè •
font rapprochées & raflemblées pour former "
un nouveau tout , un autre corps ; ou plus ^
généralement des fubflances qui fe forment:
en des lieux particuliers de matières qu'on',
n y foupçonnoit pas. Elles ont en géné--
ral les propriétés fuivantes :• i^i ce font,
ou des fubllancesqui ont appartenu à quel-
qu'une àes clalîès du règne minéral ^ & qui 1
le iont reproduites avec la confiflance de^'
pierres ,. après avoir fouffert la décomi^ofi- •
-tionoa.la.défuûion ; , ou des fubfknces apr-
84<^ C O N
partenantes à d'autres règnes , qui fe font
unies avec des matières jdu règne minéral ,
ou des fubftances minérales déguifées par
àes -accidens fous des formes fingulieres
obfervées par les naturalises ; ou crfin des
liibftances tout-à-fait étrangères au règne mi-
nerai , & qu'on n'appelle concrétions , que
par la reflémblance & l'analogie qu'elles ont
avec quelques fubftances minérales. 2,°. Elles
font toutesjd'une compofition , d'un tifïîi ,
& d'une forme étrangère au règne minéral.
Ces corps ont troc occupé les Lythogra-
phes. On en peut tormer quatre diviiions ,
les pores ou pierres poreules , comme la
pierre-ponce , les incruilations ,1a ftalaélite ,
la pifolithe , l'oolithe , les tufs , &c. Voye\
Pores. Les pétrifications, comme les plan-
tes , les bois , les racines pétrifiées , minéra-
lifées , les lytophites ou coraux , les madré-
pores , les millepores , la tabulire , les af-
troïces , les hippwites , Ùc. Voy. PÉTRI-
FICATIONS. Les pierres figurées , dont ily
a beaucoup d'efpeces. Voy. PlERRES FI-
GURÉES. Et les calculs ou pierres Wgétales
& animales. V. Van. PlERRES.
Concrétion , (me'd.) maladie des par-
ties folides & des fluides. Parlons d'abord d*
çoncrétiWi des folides.
On entend généralement par concrétion ,
la jondion deplulieurs molécules d'un corps
réunies en une mafle prefquc folide ; mais en
particulier l'adhérence , l'union de nos par-
ties folides qui doivent être naturellement
féparées pour l'exercice aifé de leurs moil-
vemcns , elt ce qu'on appelle en médecine
concrétion. On peut citer pour exemple de
cette concrétion , l'union des doigts, Aqs na-
rines , des paupières , des parois du vagin ,
fifc. La feule force vitale eil la caufe qui
réunit* mais elle efl empêchée dans fon
adion par l'interpofition de l'épiderme , à
moins que ce rempart ne foit détruit par des
accidens, tels que la corrofion, l'exco-
riation , la brûlure , l'ulcère , &C. au con-
traire , tout ce qui conferve la cohérence des
parties nues , concourt à produire la concré-
tion. Si elle arrive dans les ouvertures na-
turelles , elles'oppofe àlafortie desraatieres
deftinées à pafler par ces ouvertures ; fi elle
fe fait dans les vaiflTeaux, il en réfulte la
i:eiration de la circulation , le changement
<Jw vaiflèau en ligament ; fi c'efl dans les
C O N
parties molles, il en provient rempêchement
de leur aèlion , la roideur , l'anchylofe , Ùc.
Comme la partie folide qui cft une fois co-
hérente ne perd point là concrétion d'elle-
même , il faut pour y remédier léparer fon
adhérence par une fedion artificielle. Paf-
fons à la concrétion àcs fluides.
On nomme concrétion des fluides , la co-
hérence de leurs parties portée au point d*^
la ceflation du mouvement entr'elles , par
l'aclion de la vie & de lafanté. h-â. concret ion
de nos humeurs efl: proprement le change-
ment de la figure fphérique de leurs par-
ties , par la réunion de plufieurs de leurs
molécules en une feule maffe. Ce défordre
procède d'une infinité de c^fes différentes *
du repos des humeurs , de leur mouvement
affoibli , fur-tout fi la violence de la circu-
lation a précédé , de l'évacuation , de la
tranfpiration , de la diflîpation , de l'abforp-
tion des parties les plus fluides , ou du defle-
chement ; d'une chaleur brûlante , ou d'un
froid glacial-; d'une forte compreffion du
vaiflèau , de l'ufage ou de l'applicadon des
coagulans ; des aflringens , des acides aus-
tères , fpiritueux ; de matières vifqueufes ,
huileufes , aglutinantes ; de poifons , ^c.
Or , fuivant la diverfité de la partie & le
genre de concrétion , il en réfulte un grand
nombre de différentes maladfes , mais né-
ceflairement la diminution ou la deflrudion
de la circulation du fluide , la flagnation ,
l'obflrudion , l'induration , &c. La cure
confifte donc à former infenfiblement , s'il
efl poffible , laréfolution de laconcrétion, &
à redonner enfuite aux humeurs leur pre-
mier mouvement.
Pour ce qui regarde les concrétions parti-
cuheres de tout genre , & principalement
les deux plus formidables au corps humain ,
connues fous les noms de pierre & de polype y
voyez ces articles. Cet article efl de M. le
Chevalier DE Ja uco ur t.
CONÇU , partie. ( Jurifpr. ) c'efl une
maxime en droit , que ceux qui font conçus
font cenfés nés , lorfqu'il s'agit de leur in-
térêt ; il fuflît donc qu'un enfant foit conçu
au temps que la fucceflîon ou fubftitution
efl ouverte , pour qu'il foit habile à la re-
cueillir.
Mais la conception d'u'n enfant qui n'ef!
pas encore né , n'efl d'aucune confidéra-r
C O N
don pour procurer à un tiers quelque avan-
tage. Voyei^ leg. y ff. de ftatu hominum ;
Henrys , tom. II. liv. VI. quefî. x6 . (A)
CONCUBINAGE , f.m. {/unfprud. &
hift. anc.) ce terme a deux fignifications
différentes ; il lignifie quelquefois' une çC-
pece de mariage moins iblemnel, qui avoit
lieu chez les anciens , & qui le pratique en-
core en quelques pays. Parmi nous il figni-
fie ordinairement le commerce charnel d'un
homme & d'une femme libres , c'efi:-à-dire
qui ne font point mariés enfemble ni avec
un autre.
Si nous remontons au prunier âge du
monde , nous voyons que quelques-uns des
patriarches avoient en même temps plufieurs
femmes. Le premier qui en ufa de la forte
fut Lamech fils de Mathufael (c'étoit la cin-
quième génération de l'homme ). Lamech
eut deux femmes nommées AdaÙ Sella ,
qui font également qualifiées uxores.
Il paroît que les defcendans de Seth en
uferent autrement; qu'ils avoient plufieurs
femmes à la fois , mais que toutes n'avoient
pas le titre d'epoufes ; car il efl dit dans la
genefe , acceperuntjibi uxores^ ex omnibus
quas elegerant'j ce qui attira laxolere de Dieu
lur l'homme qui étoit charnel , dit l'écri-
ture.
Depuis Noé jufqu'^ Abraham on ne voit
point que la pluralité des femmes fûtufitée :
mais Sara ayant été long-temps flérile , ce
qui étoit alors un opprobre pour une femme,
excita Ton mari à connoître fafervante Agar,
dans l'efpérance qu'il auroit d'elle des eri-
fans. Agar ne devint pas pour cela l'époufe
d'Abraham , elle relia toujours foumife à
Sara comme là fervante ; & lorfque Sara
eut mis au monde Ifaac , Agar & fon fils
Ifmaël furent chalTés de la maifon d'Abra-
ham à la foUicitation de Sara , difant que
le fils de fa fervante n'hériteroit pas avec
Ilàac.
Dans le même temps il étoit commun
chez les autres nations d'avoir des concu-
bines ; en effet on voit que Sara femme
d' Abrahiim y fut enlevée par Pharaon roi
d'Egypte , & quelque temps après par
Abimelech roi de Géra. Mais il. paroît? aufii
qu'il étoit dès-lors défendu de prendre }^ur
concubine la femme d'autrui ; car il ne fut
point attenté à l'honneur de Sara , parce que
C O N 847
l'on connut qu'elle éroit femme d'Abraham.
Jacob fut le premier des patriarches qui
eut à-la "fois deux femmes & deux concu-
bines , qui étoient lès fervantes de l'es deux
femmes. Il eut des unes & des autres plu-
fieurs enfans , qui furent tous traités égale-
ment.
Efali fon frère eut à-la-fois trois femmes
d'égale condition. Eliphas, l'un de fes fils,
eut une concubine : c'eft ainfi qu'elle ell
qualifiée ; il n'ell pas dit que ce fut la fer-
vante de fa femme.
Le concubinage fut depuis commun chez
les Hébreux & les Juifs ; il y eut diverfes
loix faites à ce fujet.
Il eu dit au chapitre xjx du Lévitique,
que fi un homme a commerce avec l'efclave
d'autrui , fi elle n'eft pas préalablement ra-
chetée , quoiqu'elle fût noble , tous deux
feront fulfigés parce que cette efclave n'éroit
pas libre ; que pour ce délit l'homme oftrir»
à la porte du tabernacle un bélier.
Le chapitre luivant contient des peines
contre l'adultère & contre la débauche com-
mife avec des parentes ou alliées.
On diffinguoir dès-lorg les concubines des-
femmes livrées à une prolhrution pubhque.-
Le concubinage fut toléré chez les Juifs à
caulè de leur endurcilfement ; mais il y eue
toujours une dillinâion entre les femmes
qui avoient le titre d'époufes légitimes & les
concubines , quoiqu'alors le concubinage {ùz
une efpece de mariage moins folemncl , qui
avoit fes loix particulieres.-
Salomon eutj'ufqu'à fépt cents femmes &
trois cents concubines. Les premières, quoi-
qu'en nombre excefiif , avoient toutes le ti-
tre de reines , au lieu que les concubines ne
participoient point à cet honneur.
On vit quelque chofc de femblable chez
les Perfes. Darius , outre la reine fon époufe,
avoit jufqu'à 365 concubines, dont il fe
faifoit lliivrc à l'armée.
Cette coutume a continué dans tout l'o-
rient. L'empereur de la Chine a dans Cow
palais- jufqu'à deux ou trois mille concuBi--
nes. Le lôphi de Perfe & le grand leigneur'
en ont aulli un très-gra d nombre.-
Les Grecs en uièrent de même que les
Perfes. Alexandre roi de Macédoine , avoir
plufieurs concubines , dont il céda la plus-
belle & celle qu'il chérillbit le plus ,, à-
84S C O N
Appelles qui en étcit devenu amoureux.
Nous paflons ra})ideiTierrt iùr tous ces
temps éloignés , pour venir à ce qui fe pra-
tiquoir chez lesRomains , dont les loix font
encore partie de nos ufages.
On diftinguoit chez les Romains deux
fortes de mariages légitimes , & deux fortes
de co7icubina[res.
Le mariage le plus honnête , étoit celui
qui fe faifoit folemnellement & avec beau-
coup de cérémonie. La femme qui étoit
ainfi mariée étoit nommée uxor, jujiauxorp
conjux y mater-familias .
L'autre forte de mariage fe contraâoit
fans autre formalité que d'avoir eu pendant
-^un an entier une femme dans fa maifon; ce
que l'on app.lloit uxorem ufucapere. La
femme ainii mariée s'appelloit uxor tanthm
ou matrona.
Le concubinage étoit alors tellement au-
torifé , qu'on le confidéroit comme un troi-
fierhe efpece de mariage, qu'on appelloit
-znjuftcs nuptiœ.
Mais ce concubinage étoit de deux fortes.
L'un nommé injuflce nuptice & légitimas, c'é-
toit la liaifon que Ton avoit avec des con-
cubines romaines de naiffance , qui n'é-
toientni fœurs , ni mères , ni filles de celui
avec qui elles habitoient , & qui n'étoient
point de condition fervile.
L'autre efpece de. concubinage , appellée
injuftœ nuptice Ù illegitimce , s'entendoit de
ceux qui l»abitoient avec des concubines
inceflueufes , étrangères ou efclaves.
Numa Pompilîus fit une loi qui défen-
<ioit à la concubine , foit d'un garçon ,
foit d'un homme marié , de contrader un
mariage folemnel , & d'approcher de l'autel
4de Junon ; ou fi elle fe marioit , elle ne de-
voit point approcher de l'autel de Junon,
qu'elle n'eût auparavant coupé fès cheveux
& immolé une jeune brebis. Cette concu-
l>ine y efl défignée par le terme de peliex,
par lequel on -entendoit une femme qui, n'é-
tant point mariée , vivoit néanmoins avec
iin homme comme fi elle l'étoit. Il figni-
fioit y comme on voit , également une con-
cubine fimple & une concubine adultère.
On fe fcrvoit encore de ce terme fous Jules
Céfar & fous Augufle , temps auquel on
commença à fubflituer le mot conçubina à
^'^n,çJLeii te^-ipp pellexi.
C ON
Ainlî , fuivant l'ancien droit le concubin
nage étoit permis à Rome à ceux qui ref^
toientdans le céhbat , ou qui ayant été ma-
riés , ne vouloient pas contrader un fécond
mariage j par coniidération pour leurs en-
fans du premier lit. Mais depuis que la loi
des douze tables &: d'autres loix poftérieures
eurent réglé les conditions pour les mariages,
il fut ordonné que l'on ne pourroit prendre
pour concubines , que des filles que l'on ne
pouvoit pas prendre pour femmes à caule
de la dilproportion de condition , comme
des filles de condition fervile , ou celles qui
n'avoient point de dot, & qui n'étoient pas
les unes ni les autres defîinées à contrader
alliance avec les honnêtes citoyens.
Ainfi les filles ou femmes de condition li-
bre , appellées ingénuce , ne pouvoicnt pas
être prifes pour concubines , cela paffoit
pour un viol ; & il étoit défendu d'habiter
avec elles fur un autre pié que fiir celui
d'époufes , à moins qu'elles n'eufTent dégé-
néré en exerçant des métiers bas & honteux,
auquel cas il étoit permis de les prendre pour
concubines.
On voit Pi|f-Ià que \c concubinage n'étoit
pas ablblument déshonorant chez les Ro-
mains. Les concubines , à la vérité, ne jouif^
foient pas des effets civils par rapport aux
droits de femmes r^ariées ; mais elles ne
difFéroient àts époufes que pour la dignité
de leur état & pour l'habillement : du refte
elles étoient loco uxoris. On les appelloit
femi-conjuges , & le concubinage femi-ma-
trimonium. Le concubinage fècret n'étoit pas
permis par les loix romaines ; & le nom de
concubine , quand le concubinage étoit pu-
blic , étoit un titre honnête & bien différent
de celui de maîtreffe , que l'on appelloit
fcortum.
Jules Céfar avoit permis à chacun d'é-
poufer autant de femmes qu'il jugeroit à-
propos , & Valentinien permit d'en époufèr
deux ; mais il n'étoit pas permis d'avoir plu-
fieurs concubines à-la-fois. Celle qui étoit de
condition libre , ne devenoit pas efclave
lorfque fon maître la prenoit pour concu-
bine; au contraire celle qui étoit efclave de-
venoit libre. La concubine pouvoit être ae-
cfifée d'adultère. Le fils ne* pouvoit pas
époufer la concubine de fon père. *
Suivant l^anciejbi droit romain , il etôit
permis
C O N
permis <ie donner à fa concubine ; elle ne
pouvoit pas cependant être inftituée héritière
univerfelle ; mais feulement pour une demi-
once , qui faifoit un vingt - quatrième du
total. On permit enfuite de donner trois
onces , tant pour la mère que pour les en-
fans , ce qui fut étendu jufqu'à fix onces , &
on leur accorda deux onces ab imefiat, dont
la mère auroit une portion virile : le tout
dans le cas où il n'y auroit ni enfans ni fem-
mes légitimes.
Les enfans procréés des concubines n'é-
toient pas fournis à la puifîance paternelle ,
& n'étoient ni légitimes ni héritiers de leur
père , fi ce n'efl dans le cas où il n'avoit
point d'autres enfans légitimes ; ils ne por-
toient pas le nom de leur père , mais on ne
les traitoit pas de .//5Z/m\, comme ceux qui
etoient \q5 fruits de la débauche ; ils por-
toient publiquement le nom de leur mère &
le iurnom de leur père ; & quoiqu'ils ne
fufTent point de la famille paternelle , leur
^tat n'étoit point honteux , & ils n'étoient
point, privés du commerce des autres ci-
toyens.
hQ concubinage y tel qu'on vient de l'ex-
pliquer , fut long-temps autorifé chez les
Romains : on ne fait pas bien certainement
par qui il fut aboli ; \qs uns difent que ce
fut par Conftantin le grand , d'autres par
l'empereur Léon ; tous deux en effet eurent
part à ce changement.
Conflantin le grand commença à refîrein-
dre indiredement cet ufage , en ordonnant
aux citoyens d'époufer les filles qu'ils au-
roient eues auparavant pour concubines ;
& que ceux qui ne voudroient pas fe con-
former à cette ordonnance ne pourroient
avantager leurs concubines , ni les enfans
naturels qu'ils auroient d'elles.
Valentinien adoucit cette défenfe , &
permit de laifTer quelque chofe aux enfans
naturels.
Ceux qui épouferent leurs concubines fui-
vant l'ordonnance de Confîantin , légitimè-
rent par ce moyen leurs enfans comme l'em-
pereur leur en avoit accordé le privilège.
Juffinien donna le même effet au mariage
fubféquent; mais le concubinage n'étoitpoint
encore aboh de fon temps : on l'appelloit en-
core licita confuetudo , & il étoit permis
à chacun d'avoir une concubine.
Tome Vlll.
C O N 849
Ce ^^xt. Tempereur Léon qui défendit ab-
folument le concubinage par fa novelle ^ i .
laquelle ne fut obfervée que dans l'empire
d'Orient. Dans l'Occident le concubinage
continua d'être fréquent chez les Lombards
& les Germains ; il fut même long-temps
en ufage en France.
Le concubinage eif encore ufité en quel-
ques pays , où il s'appelle demi-mariage y
ou mariage de la main gauche y mariage à
la morganatique : ces fortes de mariages font
communs en Allemagne , dans les pays où
l'on fuit la confeliion d'Augsbourg.
Suivant le droit canon , le concubinage ,
& même la fimple fornication , font expref-
fément défendus : Hccc volumas Domini y
dit S. Paul aux Thefîliloniciens : ut abftineatis
à fornicatione ; & S. Auguflin diffinâ:, 24.
Fornicari vobis non licet y fufficiant vobis
uxores ; &Ji non habetis uxores, tamen non
licet vobis habere concubinas. Ducange ob-
ferve que fliivant plufieurs épîtres des papes,
\çs concubines paroifîcnt avoir été autrefois
tolérées ; mais cela fe doit entendre des ma-
riages , lefquels , quoique moins folemnels ,
ne laifToient pas d'être légitimes. C'efI aufïï
dans le même fens que l'on doit prendre le
dix-feptieme canon du premier concile de
Tolède , qui porte que celui qui , avec une
femme fidèle , a une concubine , eff excom-
munié ; mais que fi la concubine lui tient lieu
d'époule , de forte qu'il n'ait qu'une feule
femme A titre d'époufe ou concubine , à
fon choix, il ne fera point rejeté de la com-
munion. Quelques auteurs prétendent qu'il
en étoit de même des concubines de Clovis ,
de Théodoric , & de Charlemagne ; que
c'étoient des femmes époufées moins folem*
nellement , & non pas des maîtrefîès.
Comme les eccléfiaftiques doivent don-
ner aux autres l'exemple de la pureté des
mœurs, le concubinage e{[ encore plus fcan-
daleux chez eux que dans les laïques. Cela
arrivoitpeu dans les premiers fiecles de l'E-
giife ; les prêtres étoient long-temps éprou-
vés avant l'ordinarion ; les clercs inférieurs
étoient la plupart mariés.
Mais dans le dixième fiecle le concubinage
étoit (i commun & li public , même chez
les prêtres, qu'on le regardoit prefque comme
permis , ou du moins toléré.
Dans la fuite on fit plufieurs loix pouc
Oooo 0
S50 C C N
réprimer ce dc^fordre. li fut dv^fendu au peu-
ple d'entendre la meflè d'un prêtre concu-
binaire ; & l'on ordonna que les prêtres qui
feroient convaincus de ce crime , feroient
dépoiës.
Le concile provincial de Cologne , tenu
en 1260, dénote pourtant que le concubi-
nage étoit encore commun parmi les clercs.
Qtt abus régnoit pareillement encore
parmi ceux d'Efpagne , (uivant le concile de
Valladolid , tenu en 132.2, qui prononce
des peines plus grieves contre ceux dont les
concubines n'étoient pas chrétiennes.
Le mal continuant toujours , la rigueur
des peines s'ell: adoucie.
Suivant le concile de Bâle , les clercs con-
cubinaires doivent d'abord être privés pen-
dant trois mois des fruits de leurs bénéfices ,
après lequel temps ils doivent être privés
des bénéfices mêmes , s'ils ne quittent leurs
concubines ; & en cas de rechute, ils doivent
être déclarés incapables de tous offices &
bénéfices eccléiialHques pour toujours.
Ce décret du concile de Bâle fut adopté
par la pragmatique - fandion , & enfuite
compris dans le concordat.
Le concile de Trente a encore adouci la
peine des clercs concubinaires ; après une
première monition," ils font feulement pri-
vés de la troifieme partie des fruits; après
la féconde , ils perdent la totalité des fruits ,
& font iufpendus de toutes fondions ; après
la troifieme, ilsTont privés de tous leurs
bénéfices & offices eccléfiafiiques , & dé-
clarés incapables d'en pofleder aucun ; en
cas de rechute, ils encourent l'excommu-
nication.
En France , le concubinage eft auffi re-
gardé comme une débauche contraire à
la pureté du chriftianifme , aux bonnes
mœurs , non - feulement par rapport aux
clercs , mais auffi pour les laïques : c'eft un
délit contraire à l'intérêt de l'état. Refpu-
Mica enim imerefi Légitima fobole repleri
civitatem.
Si les ordonnances n'ont point prononcé
diredement de peines contre ceux qui vi-
vent en concubinage , c'efl que ces fortes de
conjondions illicites font le plus fouvent
cachées , & que le miniftere public n'a pas
f:outume d'agir pour réprimer la débauche,
C O N
î\ moins qu'elle n'occafione un fcandale
public.
Mais nos loix réprouvent toutes dona-
tions faites entre concubinaires : c'eft la dil^
pofition des coutumes de Tours, art. z^.G.
Anjou, J43,. Maine, 3^4-- Grandper-
che , art. z 00. Lodunois , ch. xxv. art.
zo. Cambrai , tit. iij. art. y. Celle de
Normandie , art. /\.'3J 6" 45^- défend
même de donner aux bâtards.
La coutume de Paris n'en parle pas :
mais V article z8 n défendant aux mari &
femme de s'avantager , à plus forte raifon
ne permet-elle pas de le faire entre concu-
binaires qui font moins tavoriies , & entre
lefquels la lédudion eft encore plus à
craindre.
L'ordonnance du mois de Janvier 1629 ,
art. z 32. y défend toutes donations entre
concubinaires.
Conformément à cette ordonnance , tou-
tes donations de cette nature entre-vits ou
par teftament , font nulles , ou du moins
rédudibles à de fimples alimens ; car on
peut donner des ahmens à une concubine ,
& aux enfans naturels ; on accorde même
quelquefois , outre les alimens , quelques
dommages & intérêts à la concubine , eu
égard aux circonfi:ances : par exemple, Çi la
fille qui a été léduite efl: jeune , de bonne
famille , & que fa conduite ibit d'iiilleurs
fans reproche \ fi le garçon eft plus âgé
qu'elle , &c.
Ce que le mari donne à fa concubine ne
doit pas fe prendre fur la mafle de la com-
munauté , mais fur la part du mari feule-
ment , ou fur (es autres biens ; ou fi cela
efi: pris fur la maffe delà communauté , il en
efi: du récompenfepour moitié à la feram,-.
Si la concubine donataire efi: une femme
mariée ou une fille livrée à une débauche
publique , la donation en ce cas ne doit
avoir aucun eflFet ; il n'efi: dû ni alimens ,
ni dommages & intérêts.
Les reconnoiflTances faites au profit des
concubinaires font nulles , auffi-bien que
les donations ; parce que de telles recon-
noifTances font toujours réputées fimulées ,
& que qui non potefi dare non poteft confi-^
teri. Voye\ aujf. x^. tit. vij & au code ^.
tit. xxvij. Ricard, des donat.part. I.ch. iij,
fecl, 8. n.4z 6. Dumoulin , fur le conjdl
V
C O N
i^S de Decius. Dupleffis , tr. de la comm.
l'w. I y chap. iij. Cujas , fur la novelle 1 8.
Louet , lett. D. fomm. /j.^. Dupineau ,
nouvelle édition , lii'. VI. des arrêts , ch.
xiij. Plaid, de Gillet , tome I. pag. z8o.
L*lii(l. ^de la jnrifprud. tom. de Terraiibn ,
pag. 45 & 4-8. Caufes célèbres y tom. VII.
pag. ^z. Ferrieres fur Paris, art. z^z.
gloJP. z. n. z6 & fuLP. {A)
CONCUBIN AIRE , f. m. {Jurifpr.)
voye\ ce qui efi dit ci-devant au /Tzof CON-
CUBINAGE. { A )
CONCUPISCENCE , f. f. parmi les
Théologiens , fignifie V appétit , ou le dejir
immodéré ou la convoitife des chofes {q.ïï-
fuelles , inhérent à l'homme depuis fa chute.
Le P. Mallebranche définit la co/2cw/)//r^/2(:(?,
un efïort naturel que les traces , les impref-
lions du cerveau Font fur l'ame pour l'atta-
cher aux chofes fenlibles. L'empire & la
force de la concupijcence font félon lui , ce
que nous appelions \t péché originel.
Il attribue l'origine de la concupifcence à
ces impreffions faites fur le cerveau de nos
premiers parens , au temps de leur chute ,
qui fe font tranfmifes & qui fe tranfmcttent
à leurs defcendans ; car de même , dit-il ,
que les animaux produifent leurs femblables,
& avec les mêmes traces dans le cerveau
( ce qui produit les mêmes fympathies &
antipathies . & la même conduite dans les
mêmes occafions ) ; de même nos premiers
parens ayant après leur chute reçu des tra-
ces fi profondes dans le cerveau , par l'im-
preflîon des objets fenfibles , on peut {uppo-
ier avec raifbn qu'ils les communiquèrent à
leurs enfans. Mais on doit fe borner à croire
ce myflere , fans l'expliquer.
Les Scholaftiques fe fervent du terme
â^appétitconcupifcihle y pour fignifier l'f /z-
vie que nous avons de pofîeder un bien ,
en oppofifion à celui êi appétit ira/cible qui
nous porte à fuir un mal.
S. Auguftin , dans fes écrits contre Julien
évêque d'Efclane //>. ^V. chap. xjp. diflin-
gue quatre chofes dans la concupifcence ; la
néceflité , l'utilité , la vivacité , & le défordre
du fentiment ; & il ne trouve de mauvais
que cette dernière qualité. La concupifcence
confidérée fous ce dernier rapport , .efl ce
penchant que nous avons tous au mal, &
q li refte dans les baptifés & dans les juftés
C O N S51
comme une fuite & une peine du péché ori-
ginel , & pour fervir d'exercice à leur vertn.
Voyei Péché originel. {G)
* CONCURREMMENT , (Jurifpr. )
l'oje^ c/-a/?rfj Concurrence.
* CONCURRENCE , f f. s'emend en
général de l'exercice de la prétention que
plufieurs perfonnes ont fur un même objet :
ièlon la qualité de l'objet , la concurrence
s'appelle rivalité. Voye\ ces acceptions en
Jurifprudence & dans le Commerce.
Concurrence , ( Jurifprud. ) efl
une égalité de droit d'hypothèque ou de
privilège fur une même chofe.
Il y a concurrence d'hypothèque entre
deux créanciers , lorfque leur titre efi de
la même date , & qu'on ne peut connoître
lequel efl le plus ancien.
La concurrence de privilège arrive entre
deux créanciers qui ont Ç.vS\ tous deux en
même temps les meubles de leur débiteur ,
ou lorfque leurs créances font de mêra'é
nature , ou également favorables.
Il y a certaines matières dont la connoif^
fnnce efl attribuée à difFérens juges ; mais
c'efi par prévention entr'eux , & non pas
par concurrence. Voye^ ce qui efi dit ci-de-
rant au mot Coi>i COURS. {A^
CoNCUPvRENCE , en fait de Com.
Ce mot préfente l'idée de plufieurs perfon-
nes qui afpirent à une préférence : ainfi
lorfque divers particuliers s'occupent à ven-
dre une même denrée , chacun s'efforce de
la donner meilleure ou à plus bas prix ,
pour obtenir la préférence de l'acheteur.
On fent au premier coup-d'œil que la
concurrence efl l'ame & l'aiguillon de l'in-
dufirie , & le principe le plus adif du
commerce.
Cette concurrence efl extérieure ou inté-
rieure.
La concurrence extérieure du commerce
d'une nation , confifie à pouvoir vendre au-
dehors les productions de les terres & de
fon indufirie en aufli grande quantité que
les autres nations vendent les leurs , & en
proportion refpedive de la population , des
capitaux , de l'étendue & de la fertifité des
terres. Celle qui ne foutient pas cette con-
currence dans la proportion dont nous ve-
nons de parler , a immanquablement une
puifTance relativement intérieure à la puif-
Oo 000 2.
§51 C O N
fance des autres ; parce que Tes hommes
font moins occupés , moins riches , moins
heureux , dès-lors en plus petit nombre re-
Jativement; enfin moins en trat , dans le
même rapport , de fecourir la république.
On ne peut trop le répéter , la balance du
commerce d\ véritablement la balance des
pouvoirs.
Cette concurrence extérieure ne s'obtient
point piir ia force ; elle eu le prix des ef-
forts que fait l'induftrie pour faifir les goûts
du conlommateur , les prévenir même &
les irriter.
La concurrence intérieure eft do deux for-
tes : Tune entre les denrées étrangères de
même nature , ou de même ulage ; & çeUe-
là privant le peuple des moyens de fubfii-
ter , doit en général être profcrite.. Ceux
qui contribuent à l'introduire , foit en ven-
dant , foit en achetant , font réellement cou-
pables envers lu fociété d'^augmenter ou
d'entretenir le nombre des pauvres qui lui
font à charge.
L'autre elpece de concurrence intérieure
efl celle du travail entre les fujets : elle con-
liiîe à ce que chacun d'eux ait la faculté, de
s'occuper de la manière qu'il croit la plus
lucrative , ou qui lui plaît davantage.
Elle e{l bafe principale de la liberté du
commerce ; elle feule contribue plus qu'au-
cun autre moyen , à procurer à une nation
cette concurrence extérieure , qui l'enrichit
& la rend puifî'ante. La railbn eil fort
limple. Tout^homme eft naturellement por-
té ( je ne dois peut-être pas dire par mal-
heur à s'occuper ) , mais il l'ell: du moins à
fe procurer l'aifance ; & cette aiiance , fà-
laire de fon travail , lui rend enluite fon
occupation agréable: ainii dès que nui vice
intérieur dans la police d'un état ne met
Aes entraves a l'indujftrie , elle entre d'elle-
même dans la carrière. Plus le nombre de
fes produdions eft confidérabie , plus leur
prix eft modique ; &: cette modicité des
prix obtient la préférence des étrangers.
A mefure cependant que Fargent entre
dans un état par cette voie , à melure que
les moyens de lubiifler fe multiplient pour
le peuple , le nombre ou la concurrence des
confommations s'accroît, & les denrées doi-
vent être repréfentées par une plus grande
fomrac : cette augmentation du prix de
C O N
chaque chofe eft réelle , & le premier elTer
des progrès de Tinduftrie : mais un cercle
heureux de nouvelles concun^nces y apporte
les terapéramens convenables. Les denrées
qui font l'objet de la confomraation devien-
nent journellement plus abondantes , & cette
abondance modère en partie leur augmen-
tation ', l'autre partie ie partage infenlible-
ment entre tous ceux qui tont les ouvra-
ges , ou qui en trafiquent , par la diminu-
tion de leurs bénéfices ; la diminution de ce
bénéfice fe trouve enfin compeniée elle-'
même par la diminution de Tint: rêt de l'ar-
gent ; car le nombre des emiprunteurs ie
trouvant plus foihle que celui des prêteurs ^
l'argent perd de ion prix , par une conven-
tion unanime , comime toutes les autres
marchandifes. Cette baiffe des intérêts ell,
comime on le voit , l'effet d'un grand com-
m-ercc : ainfi nous obiervons en paffant que
pour connoître fi une nation qui n'a point
de mines fait autant de commerce que les,
autres , en proportion des facilités, refpec-
tives qu'elles ont pour commercer , il.
iùffit de^ comparer le taux des intérêts de
l'argent dans chacune;' car il, eu certain
que li la concurrence de ces intérêts n'efl
pas égale , il n'y aura point d'égalité dans la,
concurrence extérieure des ventes & de la,
navigation.
Lorfqu'on apperçoit à ces fignes évidens
un accroiffement continuel dans le com-
merce d'un état , toutes Ces parties agifîênt,
& fe communiquent un mouvement égal ;
il jouit de toute, la vigueur dont il ef} fuf^
ceptible.
Une pareille fituation eft inféparable d'un,
grand luxe; il s'étend lùr les diverfes claf-
iès du peuple , parce qu'elles (ont toutes
heureufès : mais celui qui produit: l'aifance-
publique, par l'augmentation du travail.,
n'efl jamais à craindre ; l'ans ccfle la con^
currence extérieure en arrête l'excès , qui fe-^
roit bientôt le terme fatal de tant de proi-
pérités. L'induftrie s'ouvre alors de nou-»
velles routes , elle perfedionne fes métho-
des & fes ouvrages ; l'éccnoniiç du temps.
& dès forces multiplie les hommes en quel-
que façon ; les beloins enfantent les arts y
la concurrence les élevé , & la richeflè des
artifles* les rend favans.
Tels font les effets prodigieux de ce
C O N
principe de la concurrence , fi fimple a Ton
premier afpeâ: , comme le font prefque tous
ceux du commerce» Celui-ci en particulier
me paroît av(,>ir un avantage très- rare , c'efi:
de n'être fujet à aucune exception. Cet ar-
ticle efi de M. V. D. F.
CONCURRENS , adj. pi. ( Hlfi. &
Chron.) dans l'ancienrie chronologie, ei\
le nom qu'on donnoit aux jours qui , dans
les années tant communes que bifïextiles ,
font furnuméraires au-delà du nombre de
femaines que l'année renferme. Voici ce que
c'c{î. L'année ordinaire a cinquante - deux
femaines & un jour , l'année biffextile cin-
quante-deux femaines & deux jours : or
ce jour ou ces deux jqurs furnuméraires font
nommés concurrens , parce qu'ils concou-
rent pour ainfi dire avec le cycle folaire; l^ar
exemple , la première année de ce cycle on
compte un concurrent ^ la féconde deux, la
troifieme trois , la quatrième quatre , la
cinquième fix au lieu de cinq ( parce que
cette année eft bifléxtile , la fixieme fept ,
la (eptieme un , Ùc. & ainfi de fuite. Le
concurrent i répond à la lettre dominicale
E y c'eft-à-dire à l'année où le premier jour
de l'an efl un mardi , & ainfi de fuite. Ces
concurrens s'appellent auflî quelquefois e'pac-
tes du foleil.. On n'en fait plus d'ufage de-
puis l'invention des lettres dominicales. V^oy.
ïiir ce fujet, ïart de vérifier les dates. Paris,
1750. pag. XXX de la préface. (O)
CONCUSSION , 1: f. {Jurifpr.y ap-
pelle en droit crimen repetundarum y efl
l'abus que fiiit de fon pouvoir un homme
confUtué en dignité , charge , commif-
fiôn , ou emploi public, pour extorquer
de l'argent de. ceux- fur lefquelsJl a. quelque
pouvoir.
Il en. efl parlé dans les titres du- digefl-e
& du code, adlegemjuliam repetundarum y
où l'on peut remarquer entr'autres chofes ,
que celui qui donnoit de l'argent pour être
juge au préjudice du ferment qu'il avoit
fait di? n'avoir rien donné , pouvoit être
pourfuivi- comme coupable , auili-bienque
celui qui avoit reçu l'argent ; que le juge
qui fe laiiToit corrompre par argent étoit ré-
puté coupable ào^ concujjion y aulll-bien que
celui qui acheteroit des droits litigieux. Il
étoit même défendu à tous magiilrats d'ac-
t^hït auGuoe.claofe par achat y donation ,
C O N 855
ou autrement , dans les provinces où ils,
étoient étblis , pendant leur adminifiration ,
fous peine de concujjion.
Cette prohibition d'acquérir faite aux:
magiltrats étoit autrefois uhtée parmi nous ;
du moins ils ne pouvoient acquérir dans leur
jurildidion ians permiliion du roi , comme
il paroît par les ordonnances de S. Louis &
de Philippe-lc-bel ; mais cet ulage elt de-
puis long-temps aboh , attendu que les
magiflratures étant parmi nous perpétuelles ,
& non pas annales , ou triennales comme
elles l'étoient chez les Romains , les juges
magiltrats feroient interdits de pouvoir ja-
mais acquérir dans leur pays.
Tout ce qui nous ell refté de l'ancien
ufage , eft la prohibition aux juges d'ac-
quérir les biens qui fe décrètent dans leurs
Ceges.
Il faut encore remarquer que chez les.
Romains le duc ou gouverneur de province
étoit tenu de rendre non-1'eulement les exac--
tions qu'il avoit faites perfonnellemcnt ,.
mais aufli ce qui avoit été reçu par les fubal-*
ternes & domeftiques.
Le crime dâ concujjion n'otoit mis au»
nombre des crimes publics , que quand il
étoit commis par un magiftrat ; & lorfqu'il
étoit commis par une perfonne de moindre
quahté , cen'étoit qu'un crime privé; mais-
cela n ell point ufité parminous, ce n'eft pas
la qualité des perfonnes qui rend [qs cri-
mes publics ou privés , mais- la. nasure des-
crimes.
Les. anciennes ordonnances un peu trop
indulgentes pour les juges , leur laifToient
la liberté de- recevoir , certaines chofes „
comme du vin en bouteilles.
Mais V ordonnance de Moulins art. vcf ET
2.0. défendit aux juges de rien prendre des
parties , linon- ce qui leur efl permis par l'or-
donnance , & aux procureurs du roi de rien-
prendre du tout ; mais cela a été changé
pour, les derniers...
UOrdonnance de B lois y. art. 124. efî:
conçue en- termes plus généraux : elle dé-
fend àtous.ofïîciers royaux &' autres, ayant
charge & commiflion de S. M., de quelque -
état, quahté & condition qu'ils ibient , de
prendre nL recevoir de ceux qui auront af-
faire à eux , aucuns dons & préfens de quel--
.que chofe quece fuit, fur peine de c.ojicujjioii,.
gc.i C O N
Il y a encore pîufieurs autres ordonnances
qui défendent à divers officiers toutes for-
tes d'exadions.
L'accufation pour crime de concujjlon
peut être intentée , non-feulement par celui
contre qui le crime a été commis , mais aufli
par le minifîere public, attendu que le crime
efl: public.
Chez les Romains , il falloir que l'accufa-
tion fût intentée dans l'année depuis l'ad-
miniftration finie ; mais parmi nous l'ac-
tion dure 20 ans comme pour les autres
crimes.
On peut agir contre les héritiers du con-
cuffionnaire , pour la répétition du gain in-
jufte qu'il a fait.
A l'égard de la peine qui a lieu pour con-
cujjlon y elle eft arbitraire comme celle de
tous les autres crimes : quelques concuf-
fionnaires n'ont été condamnés qu'à une
peine pécuniaire, d'autres au bannifTement
ou aux galères , quelques-uns ont même
-été punis de mort ; cela dépend des cir-
conltances.
Voye\ V ordonnance de t ^39 y article
84. y celle iS' Orléans , article 45 , yy ,
233,. Blois , article $^, 2 24 y ^ 57 i le
re'glement du confeil du mois de novembre
zGo2 y art. 45 ^ le dich^onn. des arrêts y
tw mox. concujfion. {A)
^ * CONDAxMNATION, {Ilijl. anc.)
c'étoit une adion du préteur qui , après
avoir vu fur les tablettes des juges quelles
étoient leurs opinions , fe dépouilloit de
fa prétexte , & difoit , videtur fecijfe ;
ou , non jure videtur fecijfe. Les juges qui
dévoient déterminer le préteur , lorfqu'ils
croyoient i'accufé coupable , ne mertoient
qu'un C. fur les tablettes , ce qui figni-
fioit condemno ; le préteur étoit obligé d'é-
noncer le crime & la punition ; par exem-
ple , videtur vim feciffe y atque eo nomine
aquœ & igni y illi interdico. On appelloit
auÛ\ condamnation ce qu'on faifoit payer au
coupable. ^o>'. Tarticle fuivant.La condam-
nation des édifices , condemnatio œdium y
confifloit à détruire la maifon du coupable ,
après lui avoir ôté la vie.
Condamnation, (/«n/pr.) efl un ju-
gement qui condamne quelqu'un à faire ,
donner , ou payer quelque chofe , oy qui le
déclare déchu de fes prétentions.
C O N
Paffer condamnation y c'eft fe défillcr de
fa demande.
Subir fa condamnation y fignifîe être oon-
damné y quelquefois c'elt acquiefcer au ju-
gement ; c'efl en ce dernier lens qu'on
l'entend ordinairement en matière cri-
minelle.
On entend quelquefois aufîî par le terme
de condamnations , les chofes mêmes aux-
quelles la partie efl condamnée , telles
qu'une fomme d'argent , les intérêts &
frais. C'efl en ce fens que l'on dit , ojf'rir 6"
payer le montant des condamnations y ac-
quitter les condamnations.
C'eff un axiome commun , qu'on ne con-
damne perfbnne ùir,& J'entendre , c'eft-à-
dire fans l'avoir mis en demeure de venir fe
défendre ; car en matière civile on donne
défaut contre les défaillans , & en matière
criminelle il y a des défauts & jugemens par
contumace contre ceux qui ne fe préfcntent
pas ; on peut même condamner un accule
abfent à une peine capitale s'il y a lieu , en
quoi notre ufage efl différent de celui des
Roj|Eiains , dont les loix défendoient expref-
fement de condamner les abfens acculés de
crime capital. L. z . cod. de requir. reis. l. 2 .
ff. eod. l. 6. c. des accuf. & /. ^.ff. de
pœnis. Ce qui étoit autrefois obfervé en
France , comme il paroît par les capitulaires
de Charlemagne, liv. VIII. cap. 2.0 z Ù
J54 y rnais depuis l'ufage a changé.
Toute condamnation eu donc précédée
d'une inflrudion , & l'on ne doit pronon-
cer aucune condamnation y même con-
tre un défaillant ou contumace , qu'il
n'y ait des preuves fuffifantcs contre lui ;
&: dans le doute , en matière criminelle , il
vaut mieux abfoudre un coupable que
de condamner un homme qui peut être
innocent.
On prononce néanmoins quelquefois en
Angleterre une condamnation fans formalité
& lans preuve juridique ; mais cela ne fè
fait qu'en parlement , & pour critne de
haute trahifon , que nous appelions ici de
lefe-majefté : il faut même que le cas foit
prefîant , & qu'il y ait des confidérations
importantes pour en ufer ainfi ; car c'efl
l'exercice le plus redoutable de l'autorité
fouveraine : par exemple , fi les preuves ju-
ridiques ipanquent , quoiqu'il y ait d'ail-
C ON
leurs des preuves moralement certaines;
ou bien lorfquel'on veut éviter un conflit
entre les deux chambres, fi l'on ne veut pas
apprendre au public certains (ecrets d'érat,
&c. dans tous ces cas , fans témoins ouis ,
fans interrogatoire, on déclare cet homme
atteint & convaincu du crime : i'acle qui
contient cette déclaration & condamnation^
s'appelle un atteinder. Voyez la féconde
fuite des réflex. pour la maifon d'Hanovre ;
à Lancajhe p tj^-S.
Il n'y a que les juges qui puilfent pro-
noncer une condamnation proprement dite,
car c'eft iniproprement que l'on dit qu'un
homme a été condamné par les avocats
qu'il a conlultés , les avocats ne donnant
qu'un avis par lequel ils approuvent ou im-
prouvent ce qui leur eit expofé ; mais
des arbitres choilis par un compromis peu-
vent condamner de même que des juges
ordinaires.
En Bretagne & dans quelques autres pro-
vinces , les notaires fe fervent du terme de
condamnation , pour obliger ceux qui con-
tradent devant eux: après la reconnoifïànce
ou promelîê de la partie , le notaire ajoute
ces mots, dont nous T avons jugé ù condam-
né'^ ce qui vient de ce qu'autrefois tous les
ades pubhcs étoient rédigés fous les yeux du
juge par les notaires qui faifoient en même
temps les fondions de greffier ; c'efl pour-
quoi les ades paffés devant notaire font
encore intitulés du nom du juge ; les no-
taires font même api^llés juges chartulaires,
& ont une jurifdidion volontaire fur les
contradans ; ce quia encore pu leur donner
lieu de fe fervir du terme condamner.
Tout juge qui a pouvoir de condamner
quelqu'un , a aufli le pouvoir de le déchar-
ger ou abfoudre de la demande ou accufa-
tion formée contre lui.
On préfume toujours que la condamna-
tion eft jufte, jufqu'à ce qu'elle foit anéantie
par les voies de droit , & par un juge i"u-
périeur.
Les condamnations portées par des juge-
mens rendus à l'audience , font prononcées
à haute voix aux parties , ou à leurs avo-
cats & procureurs. A l'égard des affaires
qui fe jugent à la chambre du confeil , il faut
dittinguer les affaires civiles & les afîaires
criminelles.
CON 85^
Dans les affaires civiles , autrefois on
devoit prononcer les jugemens aux par-
ties auflitôt qu'ils étoient mis au grefïè ,
à peine de nuUité , même Ikns attendre le
jour ordinaire des prononciations , fi l'une
des parties le requéroit ; cette formalité a
été abrogée comme inutile par l'ordonnance
de 2 66 j .
Dans les affaires criminelles on pro-
nonce le jugement aux accufés qui font
préfens , & les condamnations à peine
afflidive doivent être exécutées le même
jour.
L'accufé doit tenir prifon jufqu'à ce
qu il ait payé les condamnations pécuniai-
res, , foit envers le roi , ou envers la par-
tie civile.
Les condamnations font ordinairement
perlbnnelles ; cependant en matière de dé-
lits , les pères font relponfables civi-
lement àts faits de leurs enfans étant en
leur puifTance ; les maîtres, des faits de leurs
domefHques , en l'emploi dont ils les ont
chargés.
Il y a même quelques exemples en ma-
tière criminelle, que la peine a été éten-
due fur \ts enfans du condamné , & fur
toutc fa poftérité , en les dégradant de no-
bleflé ou autrement ; ce qui ne fe pratique
que dans àts cas très-graves , comme pour
crime de lefe-majellé. Du temps de Louis
XI, lorfque Jacques d'Armagnac duc de
Nemours eut la tête tranchée le 4 août
1477 aux halles , on mitfde l'ordre du roi
les deux enfans du coupable fousl'échat'aud,
afin que lefang de leur père coulât fur eux.
Les condamnaùons à quelque peine qui
emporte mort naturelle ou civile, n'ont
leur efïèt pour la mort civile , que du jour
qu'elles font exécutées réellement fi l'ac-
cufé efl préfent ; ou s'il eft abfent , il
faut qu'elles foient exécutées par effigie
s'il y a peine de mort, ou par l'appofi-
tion d'un tableau feulement , fi c'eft quel-
que autre peine afflidive qui n'emporte pas
mort naturelle.
Mais les condamnations à^mort naturelle
ou civile annullent le teflament du con-
damné , quoique antérieur à fa condamna-
tion ; parce que pour tefler valablement,
il faut que le teflateur ait les droits de cité
au temps du décès.
2^6 C O N
Les lettres de grâce empêchent bien l'exé-
cution de la fentence , quant à la peine
affli6tive , mais elles ne détruifent pas la
condamnation ni la jflétrifTure qui en refaite;
il n'y a qu'un jugement portant abfolution ,
ou bien des lettres d'innocentation , qui
efîàcent entièrement la tache des condam-
nations.
Lorfque les condamnations font pour
<iélit militaire , & prononcées par le confeil
de guerre , elles n'emportent point de mort
civile, ni de confifcation , ni même d'in-
famie. VojeTi Arrêt, Condamné, Ju-
gement, Sentence , Peine.
Condamnation consulaire , efl
celle qui eit portée par une fentence des
confuls , & qui emporte la contrainte par
corps. Ko7f;(CoNSULS<S' Contrainte
par corps.
Condamnation contradictoi-
re , efl celle qui efl: prononcée contre un
défendeur, qui a été oui par lui ou par fbn
avocat ou procureur , ou en matière crimi-
nelle contre un accufé préfent.
Condamnation PAR CONTUMACE,
efl celle qui efl prononcée contre un accufé
abfent. 7^oje:{ CONTUMACE.
Condamnation par corps , efl
celle qui emporte la contrainte pai- corps ,
telle que celles qui font prononcées en ma-
tière civile contre les fermiers des biens de
campagne , lorfqu'ils s'y font foumis par
leurs baux ; en matière de flellionat , pour
dépens montans à 200 livres & au dcfîîjs ,
pour dettes entre marchands , & en ma-
tière criminelle pour les intérêts & répara-
tions civiles.
Condamnation flétrissante ,
efl celle qui imprime quelque tache au con-
damné , quoiqu'elle ne lui ôte pas la vie
civile, & même qu'elle n'emporte pas in-
famie , comme lorfqu'un homme efl ad-
moneflé.
Condamnation infamante , efl
celle qui prive le condamné de l'honneur,
qui fait une partie de la vie civile : toutes
les condamnations à peine afHidive font in-
famantes. Fbyf:^ Infamie.
Condamnation a^o/n/iid: citramor-
tem, c'efl lorfqu'un homme efl condamné au
fouet , à être marqué & aux galères..
Condamnation pécuniaire*, efl
C O N
celle qui ordonne de payer quelque fbmnic
d'argent, comme une amande , une aumône,
desmtérêts civils , des dommages & inté-
rêts , des réparaxions civiles ; ce terme efl
principalement ufité en matière criminelle
pour dillinguer cts (oncs àt condamnations
de celles qui tendent à peine afflidive.
Condamnation a peine afflic-
TivE , Acy'f;^ Peine afflictive.
Condamnation solidaire, efl
celle qui s'exécute folidairement contre plu-
fieurs condamnés , comme pour dette con-
tradéc lolidairement , ou pour dépens en
matière criminelle. {-A)
CONDAMNÉ , partie. ( Jurifprud.) efl
celui qui a^ fubi fon jugement , foit en ma-
tière civile ou en matière criminelle.
L,e condamne à mort naturelle ou civile
efl déchu des elFcts civils auiîi-tôt que fon
jugement lui efl prononcé , parce que cette
prononciation ell le commencement de
l'exécution , & qu'à l'inflant le condamné
efl remis entre les mains de l'exécuteur de
la haute-juflice.
Mais s'il y a appel de la fentence , l'état
du condamné demeure en fufpens jufqu'au
jugement de l'appel , & même jufqu'à ce
que le jugement qui intervient fur l'appel
lui ait été prononcé.
Si le condamné meurt avant la pronon-
ciation du jugement , il meurt integri ftatûs.
Si par l'événement de l'appel , la fentence
efl confirmée , en ce cas la mort civile a
un effet rétroadii au jour delà prononcia-
tion de la fentence.
Anciennement les Condamnés à mort
étoient privés de tous les facremens ; mais
depuis 1360 , on leur offre le facrement de
pénitence.
Ceux qui font exécutés à mort font ordi-
nairement privés des honneurs de la fé-
pulture.
A l'égard de ceux qui font condamnés
par contumace à mort naturelle ou civile ,
ils n'encourent la mort civile que du jour
que le jugement efl exécuté contr'eux par
elîîgie , attendu que ne pouvant pas leur
prononcer le jugement de contumace , il
ne commence à être exécuté que par l'ap-
pofition de leur effigie. Voye\ ci-devant
Condamnation. ( A)
CONDAPOLI , ( Géç^r. mod. ) ville
forte
C O N
forte d'Alie dans la prefqu'île de Tlnde ,
en-deçà' du Gange , aii royaume de Gol-
-conde.
GOND AVERA, {Geogr. mod.) ville
d'Afie dans la prefqu'île de l'Inde au royau-
me de Cnnate , fur la côte de Malabar.
CONDÉ , (Geog. mod.) petite ville très-
forte de France aux Pays-bas dans le Hai-
nauT , près du confluent de la Haine & de
l'Efcaut. Z. 21, 15 , 33 ; lat. 50, 26, ^5.
§CONDÉ-SUR-ITON,(Geoâ^.) Con-
dati , Condûeum _, bourg de Normandie , à
£x lieues d'Evreux , dans le voiiinage de
Breteuil & de Danville , donné à l'évêque
d'Evreux , par Richard I, roi d'Angleterre ,
duc de Normandie , avant de partir pour
la Terre-Sainte. On croit que ce Condé
€fl celui que l'itinéraire d'Antonin marque ,
entre Noi'iomagum & Darocajfes : voici
un fait qui honore l'humanité.
Un malheureux , pourfuivi pour un paie-
ment de loyer de n^iifon , de la part d'un
huilfier qui en étoit propriétaire , étoit fur
k point de fe voir enlever fa moifïbn par
fon avide créancier ; l'affaire portée devant
un juge compatiflânt , fut décidée par cette
fentence : ^^ parties ouies , nous avons ac-
cordé ade des offres faites par le débiteur
de la fomme de 36 livres.» L'avocat de
l'huiflîer foutient qu'il n'y a point d'offres ;
le juge ajoute tout de fuite , & de ce qu'il a
préfente ment payé ladite fomme... tn même
t-emps il tire de fa poche 3^ livres qu'il met
fur le bureau pour le paiement de l'huiffier ,
& fauve ainfi un malheureux prêt à périr.
Cet excès de généroiité furprit beaucoup ;
on le doit au bailli de Condé y l'une des
juilices de l'évêque d'Evreux , connu par
d'autres adions femblables qui mériteroient
aufîî d'êti'e publiées. Mercure de France y
Octobre y ^JJ3- (C)
CONDÉ-SUR-NOIREAL', (Géo^.) Con-
datumy Condetum & Conditam ad N oral-
luni y gros bourg peuplé en Baffe-Norman-
die , chef-lieu d'un doyenné rural , diocefe
de Bayeux , éledion de Vire , avec mairie
& chatellenie , un des plus confidérables de
k province : il s'y tient fix foires par an; le
commerce y coniifle en cuirs , draps &
coutellerie ; hôpital fondé au XII^. fiecle ,
par N. Turgot : le terrain affez flérile ne
produit que du bted noir , du feigle & de
Tome VIII,
C O N S57
Tavoine. Les proteflans y ont eu un temple
qui ilit démoli en 1680.
Le bourg de Condé a eu fhonneur de re-
cevoir S. Louis , en 125(5 ; c'eft la patrie
d'Enguerrand Signar , confeffeur de Char-
les , duc de Bourgogne , & depuis évêque
d'Aurun , mort en 1485 : ce bourg qui eft
à cinq lieues de Falaife & de Vire , & qua-
tre de Tinchcbray , appartient à M. le comte
de Matignon. ( C)
Condé en Lorraine , [Géog.) Cond^um,
chatellenie en Lorraine , fur la Mofelle ;
c'étoit autrefois un des plus beaux châteaux'
du pays , bâti par l'évêque de Metz , Phi-
lippe de Florence, en 1264. I^ fiJt engagé
par l'évêque Adhemar de Monteil , à
Edouard, comte de Bar, en 132.8; il fut
dans la fuite uni au bailliage de S. Michel.
En 1473, George de Bade, évêque de Metz ,
vendit au duc de Bourgogne la faculté de
rachat , réfervce à (es prédécefîèurs fur
Condé y vingt mille florins du Rhin. Les
ducs de Lorraine , depuis 156 1 , ont joui
paifiblement de cette chatellenie. ( C )
CONDELVAI, f m. ville forte d'Afie
dans [es Indes del'Indoflan, dans le royaume
de Décan fur la rivière de Mangera aux
frontières du royaume de Golconde.
CONDENSATEUR , f m. ( Phyfiq, )
efl le nom que quelques auteurs donnent à
une machine qui fert à condenfer de l'air
dans un efpace donné. On peut y faire tenir
3 > 4 j 5 > & même dix fois autant d'air ,
qu'il en tient dans un pareil efpace hors da
la machine. Voy. CONDENSATION.
Il y a différens moyens de condenfer l'air :
on en peut voir plufieurs aux art. AR-
QUEBUSE A VENT , Ùc. En général les
moyens de condenfer l'air font l'invcrfe des
moyens de le raréfier. Voulez-vous con-
denfer l'air dans un globe creux ; faites-y
entrer de l'air avec un piflon , & adaptez
à l'ouverture intérieure du trou fait au
globe, une fbupape qui permette à l'air
d'entrer , & qui l'empêche de fortir. C'efl
ainfi qu'on condenfe l'air dans un ballon ,■
par exemple. On pourroit aufli par une
opératioii contraire à celle dont on fe fert
pour raréfier l'air dans le récipient de la
machine pneumatique , condenfer l'air dans
ce même récipient ; c'efl ce qu'on verra
avec un peu d'attention ; mais il faut pour
. - • P pppp
cette opération que, k récipient. Ipit biçn
lutté -contre la platjne ,^^ &, qu'il, ftit aflez
de force pour rçùiW , ^^ I^. preffion inté,-
^ieure- de ïa'ix. , condenfé , très-çapabJe de
k .brirçr par Ton effort. Voye^ MACHINE
PNEUMATIQUE. (Ô) - ,^ . .-
. CONDENSATION , Ç f. ,( Phyfiguc, )
a<2;iûn par laquelle un a^rpsçfl rendu plus
denfe , plus compade & plus lourd. Vqy.
Densité & Compression^.-, ;. ,j,i.s_ .,
La condenfanon c.onfifle à rapprocner les
parties d'un corps les unes des. autres,, &ç
augrnenter leur cpnrad , >,a^ coritraire de la
raréfaf^ioa qui les écarte les unes des autres ,
diminue , ,jeyr conraâ,., . & par confëqu^nt
leurçoh^iQn, & rend les corps plus légers
&: plus.. mous. Voye^ Raréfaction.,.
-Woliius &, quelques autres .auteurs r^^T
neignent Tufage du mox àtcondenifadon -Xh
liqle iidion du. froid- , appellant, ^onipvçj^r-
Jivn tout ce.qwi fe fait par Tapplication d'une
force extérieure. Voy. COMPRESSION.
L'air fp condenfé ailément , .{ok par le
froid, foit artiliciellement ; pour l'eau ,
elle ne le condenfé jamais ; & elle pénètre
\ts corps les plus folides , l'or rnême ,, -plutôt
que de rien perdre de fon volume. V^oye^
Eau. ^ -; v .x../'.;
On trouva à l'obfervatoire.rpenjd^nt, le
grand froid de l'année 1^70 , que les .. corps
hs plus durs , jufqu'aux métaux , aùvierre ,
& au mc.rbre même. , étoient fenfiblement
condenlés par le froid , & qu'ils étoient
devenus plus durs & plus ^cafîans qu au-
paravant ; ce qu^ dura julqu'au dégel , qu'ils
reprirent leur premier état. , r- .
L'eau eft le feul fluide quij paraiffe fe di-
later par le froid ; tellement que lorfqu'clle
cft gelée , elle occupe plus de place qu'elle
n'en occupoit auparavant : mais on doit at-
tribuer cet effet plutôt à l'introduâion de
quelque matière étrangère , .comme des par-
ticules de l'air environnant , qu'à aucune ra-
réfadion particulière de l'eau cauféepar le
froid. Voy. FROlD^Cp.NPELATî,ON. .
. Si l'on fait entrer beaucoup d!air dans un
vafe fermé , ce vafe deviendra plus pèfant ;
& f] enfuite oa laiffe échapper l'air ,.;il for-
tira avec beaucoup de violencç ,. .& le vafe
Reprendra ià première pe/àntçur. Ôr , iJfuit
de cette expérier^ce , l?, qu^I'aiç.étoit réçluit
à un moindre volume que celui qu'il occupe
V C O N .
ordj^^aireraenr ,. ,& qu il eft par cQnféquçm;
comprtfîiblc. Pour la mefùre cfe fa comprcf-
fion., ^0}'. Compression fi? Air.
TP. Qu'il efl forri autant d'^ir qu'il en
étoit enitré , ce, que, prouve le rétabliflè-
raent . de la pçf anteur du vafe , dont l'air
comprimé fe, rejUtuç dajis fon. premier état
fila force comprimante en ôtée , ^ confé-
quemment il ell élaftique. voye\ El'AS-
TICITÉ,,.. ;;^;ï V, , '>./. .' ....
1 3?. ...Que puifque le.. poicfs d[u vafe efl
augmenté car l'air irijedé , l'air .e,fl par ccn-
féquent pelant, ^ qu'il preffe perpendicu-
lairement,^;!, l'horizon, les corps en\5irpn-r
naçs y,.. félon les Idix de la gravité. yoye\
Gravit^.-, ,. . .,.,,, -. , .,
4-**^^ _Que c'efl uii figne çejt^itx delà cptri-
prefilon de. l'air, quand,,, en,, ouvrant l'orî-
fice d'un vàifTeau , on obferve qu'il en fort
de;i'air., ^,^.0 ;,,,-.... , >.. m^,, .;iu.»
...Laur.^ony^/T/i?' produit des eSet^ direde-
iiient.pppofes à ceux, 'de l'air raréliç., Le.s
oifeaux. y paroiifep.t plus gai^ &: plus vivans
que dnjis l'ordinnire , Ùc. Chamhers. ( O)
^.CONDIGNITÉ., f f.XViMogXtpé^
rite de condignite you,^ comm.e s'expriment
les. fcholafl;iqu,es , rnériîç de cpndigno. C'eft
Iç mérite auquel Dieu , en vertu de fa pro-
mefîé de la proportion. des œuvres^ avec
fa gr.ace , doit une récompenfe .A titre de
i.uflice. Cette candignite e^cige des condi-
tions de la part de l'homme , de l'ade
méritoire, & de la part de Dieu. Delà
part de l'homme, les conditions font , 1°.
qu'il foit juftc , 1°. qu'il fcnt ençoi-e dans
la. voie. , c'efl-à-dire , fur la terre. L'ade
n;iéritoire doit être libre , moralement bon ,
fjrnaturel diins fon principe , c'efl- à-dire >
fait.par le mouvement de la grâce , & rap-
porté à Dieu. Enfin , de la part de Dieu ,
il faut qu'U y ait une promeffe ou obliga-
tion de récpmpenfer. De ces principes ,
hs. Théologiens concluent que l'homme ne
peut mériter de condigno , ni la première
grâce fandifiante , ni le don de la perfé-
vérance , mais que les juflcs ne peuvent
mériter .la vie éternelle d'un mérite de
condignité. Voye\ GrACE , MÉRITE y
&c. (g)
. CONDINSKI ou CONDORA , (G^og,
mpd.^) pjovince à l'orient de la RujFie avec
titre de du chef Elle cfl remplie de forêts
CON
1^ de montagnes ; les h;iDirnn.s font idolâ-
tres, & pâïcrit au cziir un tribut en fourru-
res & pellereries.
C0NÎ3IT , T. m. (Pharmacie.) on en-
tend par condit ^ eii Pharmacie , la même
choie que l'on entend èii générai par le
mot dç confiture.
' Les Apothicaires confifoient autrefois un
grand nombre de racines ', d'écorces , de
fruits , ùc. qu*ils rcnfermoicnt fous la dé-
nomination de condit ; tant pour les ufages
de la médecine , que pour les délices de la
bouche.
'Mais i\ préfent à peine trouve-t-on deux
ou trois co/24/^fj dans les boutiques àts Apo-
thicaires ; Ils rie gardent guère lous cetre
forme que la racine à^eringium , celle de
fatyriurfi , & celle de gingembre , qu'ils
j'eçoivent toute confite à^s Indes. Voye"^
la manière de confire Tune ou l'autre des
deux premières racines.
Prenez àts racines àt fatyrium ou d'erin-
ginm bien nettoyées & bien mondées , une
livre , par exemple ; faites-les bouillir jus-
qu'à ce qu'elles foient bien ramollies dans
line fuffifante quantité d'eau commune ,
après quoi vous les retirerez de feau & les
égouttercz bien. Vous ferez cuire dans l'eau
de la décodion une livre & demie de fucre ,
que vous clarifierez avec le blanc d'œuf ,
après q^uoi vous y ajouterez vos racines,
'& ferez bouillir le tout eniêmble Jufqu'à
"ce que lé firop ait une confiiîancé fort
épaifîe ; vous verferez le tout , racines &
.firop , dans un pot , que vous ne fermerez
'qu'après un refroidiffement parfait." "*' '
' Les conferves , qu*on pourroit ranger
Ibus le nom générique de condit y diifiê-
rent de l'efpece de confiture que nous ve-
nons de décrire , par le manuel de leur pré-
paration. Voyei Conserve. \b)
' ; *CONDITEUR, {Myth.)^ conditor;
dieii champêtre qui veilloit après les moif-
fons a la récolte des grains, ainfi que fon
nom l'annonce. On appelloit auffi conditor
'le chef des fadions du cirque. Voye^
ClïtbuE. '
- CONDITION , [Gmm. & Jurifp.) tû
une çlaufe qui fait dépendre l*exécution
d'un â(àe de quelque événement incertain ,
ou d^e raccohîplifleniènt dé ijuclque claufe
"paruculîéré V t>ar' e^^ , 'quelcju'un s'o-j
bîi^e de payer une fon-me sy c?.s cu'ei^^
foit encore* diié , '&' qùll né s^bn' trouve pr.s
de quittance ; ou bien', fi celui aii profit dfe
qui l'obligation efl paflec , achève 'lin' ôâ-
vrage qu'il a commencé. ' '" ' '
On peut fuppofer 'des conditions dans
une convention, dans une difpofitiori de
dernière volonté, ou dans un jugement.
II n'y a point de forme déterminée pour
établir une condition ; la plus naturelle efl
celle qui eft conçue dans ces termes , à
condition défaire telle chofe : msisuhQ con-
dition peut auffi être appofée en d'autres
termes équipoliens , félon la nature de la
condition : par exemple y fi telle chofe eft
faite dans uri certain temps , ou au cas que
cela foit fait dans tel teifips y ou pouriu
que telle chofe foit faite y &c.
On diflingue dans un aéb la caufe , le
mode , & la démonilration , d'avec la
condition.
La caufe eft le principe qui fait agir ;
par exemple , je- donne à un tel pour la
bonne amitié qu'il a pour moi ^ cela né
forme pas un ade conditionnel : mais la
caufe finale eft la même choie qu'une con-
dition y comme lorfcju'on donne pour bâtir
une maifon.
Le mode eft aufïî la même chofe que
la caufe finale : c'eft lorfqû'on dit je lègue
à un tel pour achever f à maifon y oii afin
'(^ii^ilpaiefès dettes ; c'eft-là un mode, &
non lihé condition : la différence qu'il y a
dé l'un à l'autre , eft que la condition fait
une partie'efientiellé de l'ade, en forte que
là chofe donnée ou léguée foiis condition
ne peut être exigée qu'après l'accompliiTe-
ment de la condition ; au lieu que le legs
ou la donation qui ne renferment qu^un
mode, peuvent être demandés fans atten-
dre ce qui pourra être fait par la fuite rela-
tivement au mode.
Le mode eft une charge impofée à la con-
vention ou difpofition ; il ne diffère point
de la condition poteftative. Voye^ MoDE.
La démonftratibn eft une défignation de
quelque perfonne ou chofe. Une démonf-
tration vicieufe ne rend pas la difpofition
nulle : par exemple , fi le teftafeur lègue à
un tel fon neveu majeur, &- qlie le neveu
foit mineur , bti qu'il lui ait légué fon che-
val itôîi* , & due le cheval foit d'une adiré
•>;« ntAi- u w. 1 "-Fpppp 2 ''' -^^'
8^0 C O N
couleur , le legs n'efl pas moins valable ,
parce que le reflateur n^a pas fait dépendre
fa difpolition de la qualité du légataire , ni
de la qualité qu'il a donnée à la choie léguée;
la diipofition n'efl pas conditionnelle.
Dans les conventions & difpoiitions dont
l'accompliflement dépend de l'événement
d'une condition , tout demeure en fufpens
comme s'il n'y avoit pas eu de convention
ou de difpolition , jufqu'à ce que la condi-
tion foit arrivée ou remplie , & fi la condi-
tion n'arrive pas, la convention ou difpo-
lition ell anéantie par la claufe même qui
la fait dépendre de la condition : par exem-
ple, dans une vente qui doit s'accomplir
par l'événement d'une condition y l'acheteur
n'a qu'un droit éventuel , & le vendeur de-
meure propriétaire de la chofe vendue , &
fait les fruits fiens jufqu'à ce que la condi-
tion foit arrivée.
L^accomptiflement de la condition donne
«fl'Ct à i'aâe , & cet effet efî: même queîque-
"fois rétro«(^if , fuivant ce qui a été convenu
ou ordonné à ce fujet par l'aûe qui ren-
ferme la condition.
Lorfque la convention ou difpolition efl
déjà exécutée , mais qu'elle peut être réfolue
par l'événement d'une condition y les cho-
ies demeurent dans l'état où elles font, fui-
vant la convention ou difpolition , jufqu'à
ce que la condition foit arrivée ; & dans ce
cas le profit & la perte tombent fur celui
qui jouit en vertu de l'ade ; &: quand la
condition eu accomplie , foit qu'elle con-
firme ou qu'elle réfolve la convention ou
difpofition , le gain & la perte regardent
celui qui fe trouve maître de la chofê.
Les conditions qui fe rapportent au pré-
fent ou au pafïe , produifent leur effet du
moment même de l'ade , de forte que fi l'on
ignore d'abord l'état des chofes par rapport
à la cond'uion y c'eft-à-dire fi elle fe trouve
remplie ou non , l'exécution ou réfolution
de l'ade efl: feulement en fufpens , & la
condition a un effet rétroadif au jour de
l'ade.
Quand, on a appofé quelque condition im-
poflible ou contre les bonnes mœurs , fi
c'efl dans un tefîarnent , elle efl regardée
comnie non écrite ; fi c'efl dans une con-;
xeaiion j, U condition eil noa- feulement
C O N
vicieufe en elle-même , mais elle vicie aulîî
le refle de l'ade.
Pour ce qui efl des conditions inutiles ,
dans quelque ade que ce foit , elles font re-
gardées comme non écrites.
Si celui qui a promis de remplir quelque
condition y vient à décéder avant de l'avoir
fait , fon héritier efl tenu de remplir le
même engagement , fuppofé qu'il foit tel
qu'une perfonne puifTe le remplir pour une
autre , autrement il fe réfoudroit en dom-
mages & intérêts.
Quoiqu'on ait fixe dans l'ade le temps
dans lequel la condition poteflative doit être
remplie , la juflice peut néanmoins proroger
ce délai fuivant les circondances , fur-tout
fi le retardement n'a caufé aucun préjudice
à celui qui a fVipulé la condition y ou que
le dommage puiiîe être réparé.
Si quelqu'une des parties empêche l'ac-
compliflement de la condition pour éluder
l'exécution de fon engagement , la condition
fera cenfée arrivée à fon égard , & la con-
vention ou difpofition fera exécutée.
Le nombre des d iver fes efpeces de con-
ditions que l'on peut' appofer dans un ade
n'efl pas Hmitc ; il y en a autant que de dif-
férentes claufes ; dans les conventions , les
unes font relatives à des événemens palîés ,
ou à venir ; d'autres tendent à obliger quel-
qu'un de donner quelque chofe , ou à faire
ou à nf pas faire quelque chofe. Nous expli-
querons ici feulement les conditions qui ont
un nom particulier.
Condition AFFiRMATivE,efl celle qui
efl conçue en termes pofîtifs ou afîirmatifs :
par exemple , j'infiitue un tel mon héritier
fi un vaiffeau arrive de VAfie ; elle efl op^
pofée à la condition aégative , qui efl coa-
çue en termes négatifs ; comme fi l'on, dit ,
j'inflitue un tel mon héritier s'il n'efl pas
; engagé dans les ordres.. Ces fortes de con-
ditions affirmatives & négatives peuvent
l'une & l'autre être poteflatives , caflielles ,
ou mixtes , & conférées à la volonté, d'un
tiers. V^oyei ci-après CONDITION CA,-
suELLE, Mixte <& potestative, b
Condition négative.
Conditions alternatives ; elles
font de cette efpece lorfque i'ade en contient
plufieurs ,. & que celui à qui elles font impq-
ïéç^ a le. choix de remplir l'une ou l'autre
C O N
de ces conditions. Elles font aulîî alternatives
lorfque de deux conditions cafuelles qui font
flipulées , il fuffit qu'il en arrive une.
Condition casuelle, eft celle dont
l'événement dépend du hazard , comme û
un legs eft fait fous la condition^ nai'is ex
AJm venerit : elle eft appellée en droit non
promijcuay parce qu'elle dépend entièrement
du hazard; à la différence delà poteftative ,
qu'on appelle en droit promifcua ^ parce
qu'elle dépend toujours en partie du hazard.
Vojyei Condition potestative.
Conditions conjointes ; c'efl lorf-
qu'il y a pluiieurs conditions qui doivent être
remphes pour que la difpofîtion ait Ion effet.
Condition dérisoire; on regarde
comme telle une condition qui n'a point d'ob-
jet férieux , aucun intérêt légitime , & .qui
tend à obliger de faire quelque chofe de ri-
dicule , comme fi un homme ordonnoit à
quelqu'un de fe promener dans la ville avec
des cornes fur la tête ; ces fortes de condi-
tions doivent être mifes dans la clalTe des
Conditions inutiles.
_ Condition deshonnete ; on appelle
ainfi celle qui bleffe l'honnêteté ou les bonnes
mœurs , & que les loix appellent probrofa :
telle feroit , par exemple , la claufê qui im-
poferoit à un homme marié la condition de
faire divorce avec fa femme. Ces fortes de
conditions font rejetées dans les tejlamens ;
& Il elles fe trouvent dans une convention ,
elles annullent l'ade. L. lo. ff.de condit. &
demonfir. & l.fiquis 112. §. 3. de légat, i.
Condition dividue , eft celle qui
porte fur un fait qui efl dividu; elle eft oppo-
féc à la condition individue , qui porte fur un
fîiit individu , c'efl-à-dire qui ne fouffre point
de divifion : tel eu le cas où deux légataires
font chargés par forme de condition de conl^
truireune maifon; comme ce fait ne fouffre
* point de divifion , la condition ne doit pas
êtredivifée. ï^oye^ Dumoulin, tr. de divid.
& individ. part. II. n. '^86 ^ les loix ^6 ,
Ê? i z z. au dig. de condit. & demonfir. Ù
^l. t 3'ff' demanum. tefiam..
Condition de Droit ou légale ,
eft celle que la loi impofe à quelqu'un ; elle
eft toujours fuppléée , quand même elle ne
feroit point écrite dans l'ade. Il y a des con-
ditions légales pour les contrats , d'autres
pOMr les teftamens & autres ades ; ces condi-
C O N S5i
tions ne font pas fufpenfives , mais négatives
& réfolutives. V^qy. le tr. de Brufïèl confeiller
de l'empereur Charles V. de conditionibus y
où il traite d'un grand nombre de ces condi-
tions légales.
Condition expresse, eft celle qui eft
exprimée dans l'ade ou dans la loi ; au lieu
que la condition tacite qui n'y ei\ pas expri-
mée fe fupplée. V. Condition tacite.
Condition de fait ; c'eft ainfi qii'on
appelle celle qui a pour objet des faits afîir-
matifsou négatifs , & impofés par l'ade , tels
que la condition de donner ou de faire quel-
que chofe , ou au contraire de ne point don-
ner ou ne point faire telle chofe ; ou ii tel
événement arrive ou n'arrive pas. Les co/2-
ditions défait font oppofées aux conditions
de droit , lefquelles ne font point impofées
par la difpofition de l'homme, mais par celle
de la loi.
Condition fausse , fe dit par op-
polition à condition vraie. Voje:^ ci-après
Condition vraie.
Condition defaturo, efl celle qui fe
rapporte à un événement à venir , comme
quand un teftateur ordonne que l'on don-
nera à un tel une certaine fomrae lorfqu'il
fe mariera : ces fortes de conditions defu-
turo font les feules qui ont un eilet fufpenfîf.
Le g. 3$. Jf. de reh. crédit.
Condition HONNETE oMLiciTE, fe
dit de celle qui porte fur un fait , lequel n'efl
point contraire aux bonnes mœurs : elle efl
oppofée ^ condition déshonnête. V^oyey^ ci-
devant Condition deshonnete.
Condition impossible , efl celle qui
ne peut pas être accomplie : l'impofîlbilité
provient ou ex naturâ rei y comrpe d'empê-
cher le vent ou la pluie , ou de la loi qui dé-
fend de faire ce qui eft porté par la condi^
tion ou du fait de celui qui efl chargé de fa
condition y comme de prouver la légitimité.
Ces fortes de conditions font regardées
comme non écrites dans les teflamens ; & fi
c^efl dans une convention , elles vicient
l'ade. Voye^ ce qu'il efl dit au commence-
ment fur les. Conditions en général.
Condition indivïbue , s'entend Je
celle que chacun efl tenu d'accomplir en
entier, & qui ne peut pas fe divifer entre
ceux qui en font chargés. l^oj€\ ci^devanf
Condition DIVIDUE,
i6^ C O N
Condition inept^., tient quelquefois
■beaucoup de la condidoii dérlfoire'; elle
torme néanmoins encore.un ^rnie particulier,
U marque ,plus d'imbécillité que de fqlie :
telle féroit , par exemple , la condition qu'un
tellattur impoferoit d'enterrer avec lui lès
babits ti Tes livres ; ces ibrtcs àt conditions
font rejetécs. L. z 2 3-JF. de Légat, j.
ÇONDITiaN INVOJ.ONTAIRE, .voye^
Condition nécessaire.
Condition inutile ; on qualifie ainfi
celle qui n'opère aucun eftct , qui cft re-
gardée comm« non écrire , & qui ne peut
liilpcndre ni réfoudre reftét de la conven-
tion ou difpofition , laquelle ett pure &
fnnplc , nonobllant rappofition de la condi-
tion inutile oufupeifiiie ; ce qui arrive lorf-
que la condition cft rejetée comme impolli-
ble ou comme contraire aux loix , à l' hon-
nêteté & aux bonnes mœurs , ou cornme
incapable de produire Ton eliét naturel ;
quand ce n'efl qu'une exprej^ion d'une chofe
inhérente , & qui eft toujours tacitement
fous-cntenduç dans l'ade.
Conditions Jointes, voy. Condi-
moNS. conjointes.
Condition de jurer ou de faire ferment
fur unfaitpafje, préfent , ou à venir y étoit
rqetée chez les Romains dans les teftamens
& autres difpofitions de dernière volonté ;
l. 8 . ff. de condit. inftit. mais elle étoit va-
lable dans les contrats entre-vifs. L. 5^.
J^. de jurejurando. Parmi nous cette condi-
tion eft rejetéc dans tous les ades , foit en-
tre-vifs ou à caufe de mort , excepté dans
les jugemens, parce que la religion du fer-
ment ne devant point être prodiguée, il n'y
a que le juge qui puifle impofer cette con-
dition. Les notaires reçoivent néanmoins
"le ferment des parties. dans les inventaires ,
"& les commifTaires dans les procès-verbaux ,
'enquêtes , & informations ; mais la raifon
eft qu'ils font en cette partie la fondion de
Condition légale , voye^ ci-devant
'Condition de Droit.
Condition licite , eft celle qui n'eft
point prohibée par les Ipix, ;& qui n'eft point
contraire aux bonnes mœurs.
Condition de se marier , foit en
; général , ou avec une certaine peffonne , ou
avec une 'perfonne de tjêlle ville ou tel lieu ,
ç 0 isr
e/l une condition licite ^ ,& qui o*a rien çorj*
tre les •boi;yies maurs , pourvu que ce ne
foit pas avec une perfonrie .indigne.
Condition de n^ point se ma-
rier, eft rejetée clans les télJamens , & elle
annulle les aélcs entre-vifs, comme étant
contraire ârintérct public , qui eft que l'on
procure desiujets à l'état : mais hi' condi-
tion de refter pn viduité^pçut être appofée,
dans un afie , foit entre-vifs qu à 'caule de
mort. -Voye^ ci-après CoNDÏtjbN DÉ
VIDUITÉ.
Condition MIXTE , eft celle qui^eft
partie cafuelle & partie poteftative , c'eft-à-
dire qui dépend à la fois du hazard &: du
pouvoir de celui auquel elle eft impoféé*,
ou lorfqu'elle dépend auffi en partie du fait
d'un tiers. L. unie. §. j .de caducis tollend.
Condition MOMENTANÉE ; on ap-
pelle ainii toute condiition qui peut être ac-
complie par un feul événement, & qui peut
arriver dans un inftant; par exemple,/^ navls
ex AJia venerit : on regarde même comme
momentanée celle qui demande du temps
pour être accomplie, telle que {^condition de
bâtir une maifon , quoiqu'il faille un certain
temps pour la bâtir ; parce que la condition
s'accompht toujours en ce cas dans un feul
inftant, qui eft celui où la maifon eft achevée.
Condition nécessaire , eft celle qui
eft de la nature de l'adc : c'eft ainfi que la
fubftltution vulgaire doit être conçue e;i
termes qui marquent que le premier infti-
tué ne fera point héritier. y^oy£\ Fernand ,
ad le g. ult. cod. de poftjium, hered. injî.
Condition négative, quieftoppo-
fée à la condition ajfirmativè p eft celle qui efl
conçue. en termes négatifs : par exemple, /e
donne à un tel au cas qii 'Une fe remarie pas ;
au lieu que l'affirmative feroit ^u cas qu*il
fe remarie. La négative peut être poteflative,
cafuelle , ou mixte , de même que l'affirtna-
tive. Voyei Condition casuellè ,
MIXTE , & POTESTATIVE.
Condition PENDANTE , c'cft-à-dire
celle qui n'eft pas encore arrivée , auinéan-
inqins n'a point manqué , & d.Qnt Je 'f^vR^
n'eft pas expiré.
ÇONDITIQN possible ; on ne com-
prend pas fqus ce terme toute condition q^î
peut ^tre accomplie de fait , mais feulement
qêIIcs qui, £çuvent l'être jégitimjemept,^^
^ . côH
qùî 'ne fetît p6int prohîb'^'es par les lôîx ou
Confrâîrès aux bonnes mœùr^ ^.
CôîîDiTÏQN :foTESTÂtiVË, elî cette
qui dépend tTu fait Se 'du poûv'oîr (i*e œtùi. au-
quel elle eft impoiee. y ûéîqùes-uhk "ditthi-
giient deux fortes "de cbnânhonspoiefiàiîvlés,
riihë jiufement poteîlative , Fàùtré potçlla-
tivè câfijelle ; & meftiè une tfmïièmè forte
qui éfl: la poteflatlve négative , qui coh-
fifFe dans le pouvoir de ne pas faire quelque
chofe : il eft néanmoins certaih qu'il n'y a
point de conâîtioh purement pbtettàtivé af-
firmative , parce que tiialgré l'intention que
l'on petit avoir d'accornplir une "telle condi-
tion y il peut néanmoins arriver qu'elle man-
que par quelque cas fortuit ; c'elt pourquoi
cette condition èfl àppelîée en droit /ro/n/'A
cua ; il n'y a que la négative qui foit tou-
jours poteftative : car on eil toujours Te maî-
tre de ne pas faire une chofe ; au lieu que
quand on veut l'a faire , fouyent on ne le
peut pias. Çujâs, obf. Uv. XlV. ch. ij.
Co^jyiTlO^ c[e pnvfenti , fe rapporte
aii temps préfent , comme fi l'on dit , j'inf-
titiie mon nevea mon héritier y au cas qu'il
remporte le prix de Vacaderhie.
_ Condition de pr'xttrîto y fe rapporte à
un événement palîe , tel que feroit cette
çlaufe ; je lègue, à un tel au cas qu'il ait rem-
porté le p ri x.V oyez ci-demn t Co ND I TI O N
defuturo.
... Condition rtedôublée : ce terme
u(iré en matière de futilitution , fe réfère or-
dinairement à la condition yz/z/ze liberis def-
cejferit. La condition efl fimple lorfque le
teltareur dit : pinftitae Mc^i'ius ; & s'il
meurt fans enf ans > je lui fuhftitue Sempro-
nius. Mais fi le teftateur dit -.j'iriflitue Mœ-
vius ; Ù s'il meurt fans en/ans y & fes en-
fans fans cnfans , je luifubflitue y &c. c'efî
ce que l'on appelle une condition redoublée.,
parce qu'elle s'applique tant ^u père qu'aux
entans.
Condition réduplicatïve ; eflla
même chofe que redoublée.
Condition résolutive; efl celle qui
par l'événement d'un cas prévu, réfbut &
anéantit fade qui avoit déjà eu fon exécution.
Voy. ci-après CONDITION SUSPENSIVE.
Condition respective , ell celle
qui n'ell pas impôiée purement & limple-
ment , mais relativement à quelqu'un.
C O I^ 8<^3
J^cmôïTÏÔÏÏ RÈSOLÙTïVë , efl celle
d'ont Taf nVéé opère ha réfolution de la difpo-
fitioji ; elle efl oppofée à la condition Juf-.
pénjive y qui tient la difpofition en fuipens
jùfqu'à ce que ta condition fbit arrivée.
CÔNDÏtiON DE SERMENT , voy. <•/-
i/^A'a/zr Condition DE jurer.
Condition successive ; efl celle qui
ne s'accomplit pas dans un feul infiant ni
par un feul fait , mais dont l'exécution doit
fe continuer autant de temps qu'il ell porte
dans l'aâe. Voye\ ci-dei'ant CoiiBlTlOU
momèntanëe.
Condition suspensive; on entend
par ce terme celle qui fait dépendre l'effet &
la validité de Tade d'un événement à venir ;
cette efpece de Condition efl celle que les
loix appellent proprement condition ; car la
réfolutive nefufptnd point l'effet ni l'exécu-
tion de l'ade , mais elle l'anéantit lorfque le
cas efl arrivé; &la condition négative y la
charge & le mode , quand il efl fondé fur
une caufe finale , ne font pas des conditions
proprement dites , leur effet n'étant pas de
fufpendre l'exécution de l'ade, mais de
- fanéantir.
CoNDlTIGÔsI TACITE , efl celle qui efl
inhértnte à la chofe , & qui réfulte de !a na-
ture du contrat ou de la loi, de manière
qu'elle efl toujours fous-entendue, & produit
fon effet comme fi elle avoit été exprimée :
telle efl dans les contrats de vente la garantie
de droit , c'efl-à-dire l'obligation de fmre
jouir de la chofe vendue , qui efl toujours
une condition tacite de la vente, à moins
qu'il ne foit dit qu'elle efl faite (ans garantie.
Condition de viduitéoz/de ne
POINT SE remarier, efl licite , fur-tout
lorfque la perfonne a desenfans d'un premier
mariage ; on préfume que cette condition
eflappofée pour l'intérêt de la famille.
Condition volontaire , efl celle
fans laquelle l'a^e peut fubfifler , & qui pro-
cède feulement de la volonté de celui qui
l'impofe ; la différence de la condition invo-
lontaire ou nécejjaire y qui efl de l'effence
de l'ade pour fa validité. Voye^ ci~dei.'ant
Condition nécessaire.
Condition vraie ; on entend par-U,
:non pas celle qui efl arrivée & qui fe véri-
■fie , mais celle qui peut arriver & fe véri^
fier ; à la d!lï2rence''de la condition fctujfe^
8^4 C O NT
qui efl celle où Te trouve mêlé quelque fait
qui ne peut être accompli parce qu'il eft im-
pofilble.
Condition utile , eft celle qui pro-
duit Ton efîèt naturel , qui eft de fulpendre
ou de réfoudre la convention ou dilpofition :
on l'appelle ainli par oppofition aux condi-
tions inutiles. Voyez ci-devant CONDI-
TION INUTILE.
Sur la qualité & l'effet des différentes con-
ditions ^ on peut voir au digeftele tit. de
condit. Ù demonjîrat. & au code le tit. de
condit. infert. légat, ^fideicom. & plufieurs
autres où il en efl parlé. Cette matière eft
très-bien traitée par M. Furgeole , dans Ton
tr.des teflam. tome II. ch. i'ij.fecf.:Z.(^A)
Condition , {Jurifp.) dans quelques
coutumes où il y a des ferfs & gens de main-
morte ou mortaillables , fignifie les gens de
condition feri'e ou la condition de main-
morte ; par exemple la coutume d'Auver-
gne , chap. xxvij. dit que toutes perfonnes
font francs & de franche condition , encore
-qu'en quelques lieux il y ait àts héritages
tenus à condition de main-morte. Cette
même coutume appelle quelquefois condi-
tion fimplement le droit de main-morte ;
droit de condition y le droit de main-morte
appartenant au feigneur dired ; & condi-
tionne' ou emphyte'ote conditionne' y celui qui
tient en main-morte ; & héritage conditionné
ou fujet à condition y celui qui eiî main-
mortable. Voye^ CONDITIONNÉ. (^)
'*' Condition , {Comm.) terme re-
latif à la qualité d'une marchandife ; li qWc
pêche par quelque endroit ou en quelque
point , la condition , dit-on , en eft mau-
vaife ; fi elle a toute la perfedion qu'on a
coutume d'en defirer , on dit que la condi-
tion en ert bonne. On a fait de condition
le participe conditionné.
CONDITIONNÉ , {Jurifp. ) dans la
coutume d'Auvergne , efl un homme de
ferve condition , de main - morte ou de
fuite. Ce nom paroît venir de ce que dans
l'origine , les ferfs & raain-mortables ont
été foumis aux conditions qu'il a plu au
feîgaeur de leur impofer. Suivant la cou-
tume d'Auvergne , chap. xxvij. toutes per-
fonnes étant & demeurans audit pays font
francs & de franche condition , pofé qu'en
auçyns lieux y ait héritages tenus à condi-
C O N
tion de main-morte"; mais ah pays de Coni-
braille y a aucuns de ferve condition , de
main-morte & de fuite , & les autres francs
& af&anchis. Le feigneur dired qui a audit
pays droit de condition de main-morte ,
fuccede à fon emphy téote conditionné de la-
dite condition féparé & divis de fes parens'
ou hgnagers , qui trépafîé fans defcendans
de fon corps en loyal mariage, à l'héritage
conditionné de ladite condition feulement; le
co;z^/>/o/2/2^'(i'emphy téote conditionné) peut
aliéner & dii'pofer dcfdits biens condition-
nés à ladite condition , & de (qs autres
biens par contrat entre-vifs pur & fimpleà
fon plaifir & volonté ; mai§ le conditionné
ne peut par teftament , contrat de mariage ,
afîbciation , ni autre ade faire héritier ou
convention de fuccéder au préjudice du
feigneur dired ayant le droit de condition /
l'emphytéore conditionné efl tenu à ladite
condition , depuis qu'il efl parti ou divis de
fes frères & fœurs ou autres lignagers ; il ne
peut faire pade de fuccéder par contrat
d'afîôciation ni autrement avec (qs frères
lignagers ou autres , au préjudice du fei-
gneur dired ayant le droit de condition y
pour empêcher que ce feigneur ne lui fuc-
cede à défaut de defcendans en- loyal ma-
riage es biens-meubles de ladite condition.
On ne peut dire ni juger qu'il y ait eu par-
tage entre le conditionné & Çqs frères ou li-
gnagers , par la feule demeure féparée du
conditionné & de fes autres frères ou parens
par quelque laps de temps que ce foit , s'il
n'y a partage formel tait entre le conditionné
& (qs frères ou hgnagers , au commence-
ment de partage par le partement du chan-
teau. Le feigneur dired ayant le droit de
condition y ne lùccede point à la fille mariée
de fon conditionné qui meurt fans defcen-
dans , encore qu'il lui ait été conflitué en
dot l'héritage fujet à la condition ; ce font
les lignagers , & à leur défaut le feigneur,
quant à l'héritage conditionné donné en dot.'
Mais aufïi le feigneur n'efl pas préféré en
la fuccefllon de fon emphytéote conditionné
à ladite condition y à la fille mariée du con-
ditionné y encore qu'il n'y eût point d'autres
enfans du conditionné ; & nonobflant que-
la fille eût été mariée du vivant de fon père
& hors fa raaifon , la fille eft toujours pré-
férée au feigneur dired. \ A)
.' Conditionné,
C O N
Conditionné, ÇComm.) Voyei^ Con-
dition ( Commerce.)
CONDITIONNEL, ad). (Gramm) ce
qui n'eft point ablplu ; ce qui eft fujet à des
reftridions ÔC des conditions.
Les théologiens arméniens foutiennent
que tous les décrets de Dieu , relatifs au fa-
iut ou à la damnation des hommes , font
conditionnels; les Gomariftes au contraire
foutiennent qu'ils font abfolus , &c.
En Logique, \t%propo(itions conditionnel-
les admettent toutes fortes de contradic-
tions , comme , par exemple ^fi ma mule
tranfalpine s'efi envolée , ma mule tranf al-
pine avait des ailes. Koye-^ PROPOSITION.
Chamhers.
Conditionnel, {Jurifp.) fignifietout
ce qui eft ordonné ou convenu fous quelque
condition , foit par jugement , foit par dif-
pofition entre-vifs ou de dernière volonté,
toit par convention ou obligation verbale
& par écrit , fous feing-privé ou devant
notaire; ainfi l'on dit une difpojîtion , infli-
tution ^un legs conditionnels,uneoh\'iga.non
conditionnelle , &:c. /^. CONDITION. (^J
^ * CONDITIONNER, v.ad. CComm.)
c'eft donner à une marchandife toutes les
façons néceflaires pour la rendre vénale : il
a encore une autre acception , il fe prend
pour certaines façons arbitraires, qu'on ne
donne à la marchandife que quand elle eft
furie point d'être livrée, &: que l'acheteur
exige cette façon : il eft encore fynonyme
à ajfortir dans quelques occafions. On, dit
conditionner la foie. Foye:^ SoiE.
§ CONDOM, {Géog.) Condomium Vaf-
conum , ville de Gafcogne , capitale du
Condomois , avec évêché érigé en 13 17
par Jean Clément XXII; cette ville eft
grande, peu peuplée 6c pauvre , faute de
commerce; elle fut prife & ravagée en
i>)69 par Gabriel de Mongommery , chef
des proteftans ; c'eft la patrie de Scipion
Dupleix, huloriographe de France; de
Blaife deMontluc, dont nous avons d'ex-
cellens méinoires hiftoriques; du P. Gai-
chiis de l'oratoire , théologal de Soiftons,
mort en 173 1 , dont les maximes fur la
c/iair furent li eftimées lorfqii'elles parurent
en 1737 , qu'on les attribua à M. MaftiHon ;
& de M. Sabathier , auteur d'un dic-
lionnaire clajjicjue des antiquités, i/j-o^.
Tome VIU.
CON 865
Se de plufteurs autres bons ouvrages.
MM.de l'oratoire y ont le collège &la
peniion où a été élevé M. de Montazet ,
lUuftre archevêque de Lyon : le grand Bof-
fuet a été évêque de Condom.
Le chapitre ne fut fécularifé qu'en i549>
à la requifirion de Henri & de l'évêque
Charles de PilTeîeur.
Le diocefe, qui contient cent quarante
paroift'es &: quatre-vingt annexes, eft un
démembrement de celui d'Agen, au-delà de
la Garonne, Se fuffragant de Bordeaux. (C)
Long. 18 , 2 ; lat. 4 4 .
CONDOM A, f. m. {kifi. nat. QuadrM-
ped.) animal dont on n'a encore vu en
Europe que la tête , armée de fes cornes.
Les habitans naturels du cap de Bonne-
Efpérance, lui donnent le nom de condoma\
Kolbe en fait une defcription au volume,
III de fa difcription du Cap de Bonne-Efpé-
rance , page 42 , fous le nom de chèvre faU'
vage, nom qui paroit lui convenir davan-
tage que celui de firepjiceros , que lui donne
Caïus, dans l'ouvrage de Getner , de qua"
drupedibus , page 2^5 ; car , félon la re-
marque de M. de BufFon , à l'article de cet
animal, édition i/z-ii de 1769, volume
X, pag. 40 j , leftrepftcerosde Pline & des
anciens eft l'antilope, que nous regardons
comme un animal approchant de !a gazelle,
quoique formant un genre particulier.
Le condoma eft un animal de la taille d'un
grand cerf, à jambes fort longues, mais-bien
proportionnées , à fête armée de deux
grandes cornes creufes, applaties, portant
deux arêtes longitudinales, l'une en-defîiis^
l'autre en-deftbus , & quelques rugofités
comme les cornes du bouc, &c non pas
Aqs anneaux ; longues de deux pies à leur
extrémité, droites , mais fléchies de deux
tours de fpirale; il porte au menton une
barbe grife & fort longue; fa queue eft
médiocrement longue ôc atteint jufqu'aux
genoux.
Son poil , fulvant Kolbe , eft blanc fous
le ventre , gris fur le refte' du corps , femé
de quelques petites taches rouges , & coupé
par. une raie blanche qui s'étend le long
du dos , depuisia tête jufqu'à la queue , trois
autres raies blanches coupent celle-ci en-
travçrs ; la première au bas du cou , dont
elle, fait le .tour; ia féconde derrière les
Qqqqî
8é6 C O N
jambes de devant ; &c la trolfieme devant
les jambes de derrière, en faiCant le tour
du corps. Le maflacre que j'ai vu cette
année (1771), chez M. de Mori, caiilier
de la compagnie des Indes , à qui il avoit
C O N
Ittria parvîfolia fzainda cl'.nj. Ion hirharîum
Amhoïnicvm , volume III ^ p. \yj\. ^plan-
che CIX^ fig. A^ eft un g^rand aîbre qui
s'élève à la hauteur de foixante-dix pies;
Ton tronc a douze ou vingt pies de hau-
été apporté, comme venant de l'Ame- teur, fur quatre ou cinq pies de Ji^mefre;
rique, avoit le frontcouvertdepoils courts, il eft couronné par une cime ovoïde d'un
j7 ^ r 'I
roux , avec une raie bUnche en chevron
brifé \ dont la pointe regardoitTocciput.
Maurs. Le condoma Iwbite les montagnes
à\\ cap de Bonne-Efpérance , où il paroi;
être aflez rare, vu ia petite quantité ù.gs
jnairacres qui en font parvenus jufqu'icien
Europe malgré leur grande beauté , &
qui fe font trouvés dans le garde-meuble
de fa majefté.
Rcrnarquis. Le condoma approche ,
comme l'on voit , du bouc par Tes cornes
app'aties & cieufes, & par la barbe qu'il
porte au meiuon; mais il en diffère, en
ce i\\xQ ces cornes porrent deux arêtes, &
qu'elle; font droites 6«: fléchies feulement
. iaiiS é:re roulées en fpirale. Par ces divers
caraék^res , cet animal fe rapproche du gib ,
que nous avons obfervé au Sénégal ; il a
tîîcore la livrée comme le gib, 6c l on peut
regarder ces deux, animaux comme formant
un genre particulier , veinn du bouc , hir-
cus , qui fe range naturellement dans la
fam-l'eàlaquelle je donne le nom de fapiil/e
des hœu/s. ("M. Adanson.J
CONDOMOIS {\.^),Géog. mod. petit
pays de France en Gafcogrte, dans ia Guien-
ne , dont Condom eft la capitale.
CONDOR, voyei CUNTUR.
CONDORÉ (Iles de) , Géog. mod. îles
i'Afie dans la mer des Indes, au midi du
royaume de Camtoye ; les habitans en font
iiLk)là:re'?. Laf. 8 , 4.
GONDOUî , f. m. {Hifi.nat. hot.) on
ecnnoît fous ce nom, dans l'Inde, depu*
k Chine jufqu'au Malabar , en y compre-
ssant les lies m;;luques , trois fortes d'arbres
qui font très-précieux aux habitans de ces
pays, parce que leurs graines , qui font d'un
b^^au rouge de corail, leurs fervent de poids
pour pefer l'argent. Caradérilbns cts trois
«fpeces.
Fremlere tfpcu. CoN'DOîU.
Le vrai condor'i^ ainfi appelle par les
Malays, & tfchonghidji par les Chinois,
gravé par Rurnphe fou& le nom de ce? /u/-
afpeft agréable , une fois plus loneue qve
large, formée par un petit nombre de Ixa fi-
ches alternes, k'ngi'es , cylindriques , écar-
tées fous un angle de quarante-cinq degrés,
difpofées circulairement , à bois blanc d'a-
bord, à aubier blanc , couvert d'une ecorce
cendrée lilTe.
Les feuilles font alterne'? , longues de
huit à neuf pouces , de noitié moins lar-
ges , pinnées fur deux rangs, clcnt le pre-
mier eft de trois à quatre p/ai-es de divi-
fiorw, chacune de cinq à f>x paires de folio-
les, avec une impaire; chaque fobole eft
elliptique, poinfue à fes dtux extrémités,
longue d'un pouce & demi à deux pouces ,
preiqu 'une fois moins large, entière, lilTe»
formée, lui an te, d'un vèrd glauque ou
■i'enârre, relevée en-delfous d'une côtelon-
ciîudinale qui traverié fon milieu en deux
parties inégales, & qui jette de chaque
côté trois nervures ahernes & portées
prefqu'horizontalement fur un pédicule cy-
lindrique extrêmement court; ces feuilles
ont tous les foirs, au coucher du.loleil,.
un mouvement par lequel eiles fe plient,,
c'eft- à-dire, fe ferment, les unes en-defius,,
les autres en-deifous , pour s'épanouir de
nouveau le lendemain au lever duibleil.
Les branches font terminées par un pa-
nicule à deux branches en épi , autTi longues
que les feuilles , dont chaque épi porte cn-
vii on vingt-cinq fleurs, blanches d'abord,,
enfuite jaunâtres, ouvertes en étoile, de
quatre à cinq lignes de diamewe , portées
fur un pédicule cyJindrique égal à leur
longueur.
Chaque fleur efl: hermaphrodite , com-
plète , poly pétale, irréguiicre , légumi-
neufe, pofée au deifous de l'ovaire, loirt
.du diique qui le fupporte. Elle conffte en
un calice persiflant , à tube cylindrique y
court , divifé en cinq dents, en une co-
rolle une fois plus longue, de cinq pé-
tales a(lez égaux & réguliers , elliptiques,,
pomtus, une fois plus lor<gs que larges >,
C O N
d'abord blancs, enfuite jaunâtres, & en
dix étamines diftinéles un peu plus lon-
gues , à anthères jaunes. Du fond du ca-
lice s'élève un petit difqae en pédicule cy-
lindrique, portant un ovaire elliptique
comprimé, termtné par un difque, cou-
ronné par un ftigmate ovoïde, placé fur
un de fes côtés.
L'ovaire en mûriflant devient un légu-
me elliptique très-plat , courbé en forme
de fabre , long de trois pouces , quatre
à cinq fois moins large , d'abord verd ,
enfuite noirâtre extérieurement , jaune in-
téiieurement , s'ouvrant en deux valves
ou battans qui fe roulent en une à deux
fpirales , partagées en cinq à fix loges , qui
contiennent chacune une graine lenticu-
laire , femblable à celle du lupin , ou de
la grandeur de l'ongle du petit doigt , c'eft-
à-dire , de cinq lignes environ de diamè-
tre, liflè, luifante , d'un rouge de corail ,
plus foncé dans fon contour , qui eft tracé
par une ligne circulaire qui y forme une
efpece d'anneau, blanc- jaunâtre intérieu-
rement, attachée d'un côté par un petit
trait au bord fupérieur du légume, & tom-
bant facilement fur la terre qui en eft fou-
vent couverte.
Culture. Le Condori croit communément
dans les provinces méridionales de la Chine,
fur-tout à Chamchia-Hayting, & dans l'île
d'Aymyu ; dans les plaines maritimes , au
bord des forêts. Dès que fes graines tom-
bent fur la terre , elles germent & s'élèvent
en petits arbrifleaux , qui commencent à
ileurir dès la quatrième année : le temps de
leur fieuraifon eft le mois de feptembre.
Qualités. Toute la plante a une faveur
douce & légumineufe.
Ufages. Sqs graines , qui portent propre-
ment le nom de condori , fervent comme
nous l'avons dit, dans toute l'Inde, de poids
pour pefer l'argent, parce qu'elles font plus
égales en gravité qu'aucune autre graine de
plante : dix de ces grains pefent un taél,
c'eft-à-dire, dix gros ou une once& un quart.
Deuxième efpece. AylaRU.
Les habitans dAmboine appellent du
nom à'aylaru & aylalu^ &. lesMalays laga-
pophon, une féconde efpece de condori très-
bien gravée , avec une petite partie de fes
détails , par Rumphe , fous le nom coral-
C O N 897
larid parvifolia primaj dans fon Herbarium
Amboinicum , volume III ^ p. '7J , plan-
che CIX , fig. I , qui ne diffère de la pre-
mière qu'en ce que, 1°. c'eft un arbre un
peu moins grand, de foixante pies au plus
de hauteur; 1°. fes folioles font elliptiques,
pointues aux deux bouts , une fois & demie
à deux fois plus longues que larges; 3^. le
panicule des fleurs eft partagé en quatre
branches en épi; 4^^. les légumes ont huit
pouces de longueur, fur douze à quinze fois
moins de largeur , & douze à quinze loges ;
5*^. fes graines n'ont que quatre lignes &;
demie de diamètre.
Culture, L'aylaru croît, mais en petite
quantité, à l'Ile d'Amboine , fur le rivage
maritime; on le plante, à catjfe de fa forme
élégante & de fon ombre agréable, autour
des maifons, dans les terrains fablonneux
où il croît fort vite en s'étendant beau-
coup ; il confervA une verdure plus vigou-
reufe , & fes graines écarlatesqui fe mon-
trent au milieu de fes légumes ouverts, pré-
fentent un coup d'oeil agcéable.
Ufages. Les orfèvres de ces î'es d'Am-
boine emploient ces graines au défaut de
celles de l'abrus , pour fouder l'or avec les
autres métaux , quoique fa vertu foit beau-
coup moindre pour cet effet.
Ces graines pefent moitié moins que celles
du condori , & il en faut quinze pour égaler
le poids de dix condori.
Troifieme efpece. GONSII.
l^Qgonfii ou gunfi ou gunfchidts Brames,
que les Portugais appellent mangelins, & les
Mollandois mangelyns &weeg-boonen^ a été
fort bien gravé par Van-Rheede , dans fon
Hortus Malabaricus , volume VI^ planche
XIV. p. z6 , fous le nom àe mandsjadi
ou mantsjadi; c'eft Vadenantherai paronina
foliis utrinque glabris de M. Linné , dans
(on S y ftema naturœ , édition il,/'. ^i)4»
Cette troifieme efpece diffère des deux
précédentes parles caraderes fuivans , i**.
l'arbre qu'elle forme eft plus grand , c'eft-à-
dire , de quatre-vingts pies de hauteur en-
viron ; 2". fon bois a le cœur rouge; 3*.
{qs feuilles ont douze à quatorze pouces de
j longueur &une fois moins de largeur : elles
ont quatre à cinq paires d'ailes, chacune à
trois ou fix paires de folioles elliptiques ,
i obtufes aux ds^x extrémités , longues d'un
Qqqqq 2
868 C O N
pouce & demi, une fois moins larges ,
minces, molles, verd-foncé defTus, clair def-
fous ; 4°. l'épi des fleurs qui fort de l'aifl^elle
de chacune des feuilles fupérieures, eft une
fois plus court qu'elles, & porte quarante à
cinquante fleurS , dont les étamines font à
peine égales en longueur à la corolle; 5°.
les légumes ont huit à neuf pouces de lon-
gueur fur une de largeur huit à neuffois
moindre , ôc douze à feize loges ; 6*^. fes
graines n'ont que quatre lignes de dia-
mètre.
Culture. Le gonjîi fe trouve communé-
ment au Malabar , fur-tout autour de Man-
gatti , Cochin,Beikenkour , dans les terres
fablonneufes : il eft toujours verd , il ne com-
mence à porter fleurs qu'à la vingtième
année feulement après celle où il a été femé;
il fleurit en feptembre, & (qs fruits font
mûrs en décembre & janvier; il vit long-
temps, & même au-delà de deux cents
ans.
Qualités. St^ feuilles ont une faveur de
fève , mais légèrement amere ; it^ graines
ont le goût de fève.
Ufagss. Son bois eft employé journelle-
ment à divers ufages à caufe de fa dureté ;
le bas peuple du Malabar en mange les
graines cuites ou. pilées. Ces graines pefent
encore moins que celles d'Amboine ; les
orfèvres s'en fervent pour pefer les ouvrages
d'argent, ils les emploient aufti huraedées
dans l'eau & pilées avec le borax , pour re-
' coller les morceaux brifés des vafes de prix.
Ses feuilles pilées fourniftent une boiflbn qui
appaife les douleurs des lombes.
Remarques. Le cûndori eft li connu & fi
en ufage dans toute Tlnde , qu'il m'a paru
fuperflu d'employer le nouveau nomà^ade-
nanthera , c'eft-à-dire anthère glanduleufe^
que M. Linné a tenté de lui fubftuueren con-
tondant ces trois efpeces , qui , comme l'on
voit, font très-différentes. Ces trois plantes
forment un genre particulier, qui fe range
naturellement dans la première fedion de
la famille des lé^umineufes où nous l'avons
placé. V^. nos Familles des plantes , volume
II., page 3/<y. ('M. Ad AN SON.)
CONI)ORlN, (.m.(Comm.) forte de
peut poids dont les Chinois , particulière-
ment ceux de Canton, fe fervent pour pe- 1
fer Ôt débiter l'argent dans Ls commerce :
C O N
il eft eftimé un fou de France. V. les dicf.
du Comm. 6* de Trév.
CONDORMANT, f. m. {Tkéol.)nom
des feftes ; il y en a eu deux de ce nom. Les
premiers Condormans font du xiij fîecle^
& n'infefterent que l'Allemagne. Ils eurent
pour chef un homme de Tolède. Ilss'aflem-
bloient dans un lieu près de Cologne , &
là ils adoroient , dit-on , une image de Lu-
cifer , 6>c y recevoient fes réponfes & {es
oracles. La légende ajoute qu'un eccléfiaf-
tique y. ayant porté l'euchariftie , l'idole fe
brifa en mille pièces. On les appella Con-
dormans , parce qu'ils couchoient tous en-
fèmble , hommes , femmes , dans la même
chambre fous prétexte de charité.
Les autres , qui s'élevèrent dans le xvj
fiecle , étoient une branche des Anabaptiftes.
Ilsfaifoient coucher dans une même cham-
bre plufieurs perfonnes de difFérens (exes.^
fous prétexte de charité évangélique. f^oy,
les diciion. de Moreri , de Trévoux , & de
Chambers. (G)
, CONDRIEU , (Géog. mod.) petite ville
de France au Lyonnois , près du Rhône,
remarquable par Îqs vins. Long. 22, 2(?.; lot.
4S , iS.
CONDRILLE, f. f. (Hifl. nat. hot,)
chondrilla\ genre de plante dont la fleur eft
un bouquet à demi-fleurons portés chacun
fur un embryon , & foutenus par un caUce
qui eft un tuyaucylindrique. Lorfque la fleur
eft paflfée, chaque embryon devient une fe-
mence garnie d'une aigrette. Tournefort ,.
in^it. rei herb. Voyei PLANTE, (jj
CONDROZ (le), Géog. mod. petit pays
d'Allemagne, au cercle de Weftphalie.,
dans le pays de Liège , dont Huy eft la
capitale.
CONDUCTEUR , f. m. CGramm.J ce-
lui qui en conduit un autre, qui lui fert
de guide ds peur qu'il ne s'égare. Ce terme
fe prend au fimpie &: au figuré. V^oje^ les
articles fuinans..
Conducteur, CPAj/^.J depuis quel-
que temps fe dit aufl[i en parlant d'expé-
riences d'éledricité, d'un corps ifolé, c'eft-
à-dire foutenu fur des cordons de ioie,/ur
duvene, &c. confidéré comme communi-
quant ou tranfmettant à un ou à piufieurs
corps la vertu électrique qvi'il reçoit d'uii.
autrej ainfl luie corde mouiiiée , uae chaînejf,
C O N
un fil-d'archal , & en général tout corps
ële<ftrirable par communication (^voy. ÉLEC-
TRICITÉ), regardé commechargé de tranf-
mettre cette vertu d'un corps à un ou à
plufieurs autres , eft dit un conducteur.
D'après cette définition on pourroit con-
clure que dans un fyftême de corps é!ec-
trifés par un globe, un tube, &c. on devroit
appellerla plupart de cqs corps conducteurs ^
puifqu'ils Ibntprefque tous dans le cas de
fe tranfmettre fucceflivement l'éleclricité ;
cependant ce feroit contre l'ufage , qui ne
leur donne ce nom qu'autant qu'ils font en-
vilagés , ainfi que nous venons de le dire,
comme chargés de cette font^ion. Dès que
cette confidération cefle, ils le perdent , &
rentrent dans la clafle des corps éleélriques
ordinaires.
On appelle encore conducteur ou plutôt le
conducteur^ un corps ifoîé, éleftrifable par
communication , qui reçoit la vertu é'ec-
trique immédiatement d'un globe ou d'un
tube pour fiire différentes expériences,
quoique fouvent il ne ferve nullement à
tranfmettre cette vertu à aucun corps : mai
comme on l'emploie aufîi à cet ufage , au-
quel cas il devient le premier de tous les
conduclzurs , les autres corps quelconque^
éleclrilés ne l'étant que par la vertu éleftri-
qu.: qu'il leur communique , on lui a donné
le nom de cette fonélion en l'appellantfim-
plement le conducteur ^ comme pour dire le
premier de tous. VoyeT^ les Planches de C élec-
tricité , planches phyjîque s.
Avant de rien dire de particulier fur z&s
deitx diffé.ens conducteurs^ il eft à-propos
de rapporter q.ielques faits au moyen def
quels nous ferons en état de déterminer
plus précilement tout ce qu'il faut obfervei
à leur égard.
Ces faits peuvent (e réduire aux trois fui-
vans : 1*^. l'eau, les métaux ÔsTquelques êtres
animés, comme un homme par exemple ,
font ies (e*iles fubflancos connues qui tranf-
metrent l'éleélricité en entier, voy. Élec
TR.ICITÉ ; lesau'^res la tranfmettanr plus im-
parfaitement & pins difficilement, & en
arrêtant d'autant plus qu'elles font plusé'ec-
trifables par frottement yvoy. ÉLECTRICI-
TÉ : iP, cians un corps électrique , ks poin-
tes, les angles, & en général toutes les par-
ties faiiltintes fur fafurface, dontles extcé-
C O N 859
mités font aiguës, font autant d'iffues, ainfi
que nous l'a appris M. FranWin , par où fe
diffipe le fluide éleftrique; &c les aigrette?
de feu que l'on voit à ces parties ne font
formées que par ce fluide qui en fort; car l'é-
leftricité a cela dé remarquable , qu'elle
paflTe & fe fait jour à-travers les pointes &c
les angles des corps , comme le font les
fluides à-travers les ouvertures à^s vafes
dans lefquels ils font retenus. Ainfi de mê-
me qu'un réfervoir , dans lequel fe décharge
une fource qui coule toujours également ,
paroîtra plus ou moins plein , félon qu'il
aura des fentes ou des trous plus ou moins
grands, ou plus ou moins multipliés par où
l'eau pourra s'écouler ; de même en regar-
dant l'éleiftricité fournie par le globe com-
me confl:ante ou toujoijrs la même , elle
paroîtra plus ou moins forte dans le fyflêf-
me de corps éledrilés par ce globe , (eion
qu'ils auront moins ou plus de ces parties
aiguës par où le fluide éîeftrique pourra
s'échapper. Enfin le verre & les autres fubf-
ances éle61:rifablts par frottement, ont la
propriété de repoufler , fi cela fe peut dire,
le fluide éledrique, de façon qu'elles l'em-
pêchent de s'échapper. Ainfl une aigrette
partant de la pointe d'un corps éleftrique
quelconque dans une certaine direAion,
en prendra une autre dès qu'on en appro-
chera du verre , & cette nouvelle direftion
fera telle que l'aigrette parœtra comme lé
fuir. On trouve à la fuite des lettres de M.
l'abbé Noliet , pag. zSJ, un fait obfervé par
cet habyle phyficien , qui confirme pleine-
ment ce que nous venons d'avancer. Il dit
dans cet endroit , qu^il parut évident par ies
aigrettes que donnoient à voir les quatre an-
gles d^iine tringle de fer recouverte d'un tuyau
de verre^ & par la vivacité des étinczlUs quon
en tirolt ^ que cette enveloppe rendait l'élec--
tricité bien plus forte quà iordinaire^ ; de
forte , continue- t-il , qu'ion peut dire que cèjl
tin nouveau moyen de faire prendre ou de con-
fen'er aux conducliUTS une plus grande vertu,.
Ces faits une fois connus, on voit que
par rapport aux conducteurs en général*,
ou lortqu'on veut fimpleinent tranfmettre
• 'éleêlricité d'un corps à un autre , il faut
employer les fubiî'ancês les plus électrifa-
bies par communication qu'il efl: poflible,.
comme l'eau, les métaux,, é-c. L'eau mente.
2jo C O N
a cet avantage , que toutes fortes de fuhC-
tances, comme pierres, bois, &c. qui en
font bien imbues , peuvent devenir par-là
de fort bons conducteurs , quelque peuélec-
tiifables par communication qu'elles foient
d'ailleurs ; parce qu'alors elles ne forment
plus, pour ainfidire, que des efpeces de
i'upports contenant des filets d'eau qui
tranfmettent le fluide éledrique : il faut
auffique les conducteurs foient cylindriques,
cette forme étant de toutes celles qu'on
peut leur donner, celle qui a le moins
de parties angulaires ; qu'ils n'aient en au-
cun endroit de ces parties aiguës , quelque
petites qu'elles foient , par où le fluide
éleftrique puilfe fe diffiper ; 8>C ainii qu'ils
foient fort lifles , ce fluide s'échappant
Ibuvent par les plus petites éminences ou
rugofités ; enfin , pour mieux empêcher
l'éleétricité de fe diffiper , & la rendre en
même temps plus forte, il eft à propos
de recouvrir les conducteurs de tuyaux de
verre ou de rubans de foie bien roulés les
uns pardcffus les autres , fur-tout lorfque
ces conducteurs pafl^ent dans des endroits
où ils ne font pas aflez éloignés des corps
qui peuvent leur dérober l'éleâiricité.
Il fe préfente ici naturellement plu-
fîeurs queftions. On demandera fi quel
que foit le volume de ces conducteurs^ la
quantité de fluide éledrique tranfmife fera
la même; fi pareillement la force de l'élec-
tricité n'augmentera ou ne diminuera pas,
quelle que foit leur longueur; enfin, fi
cette force fera la même dans m\ conducteur
fort long , à la partie la plus éloignée du
globe , félon le cours de l'életlricité , qu'à
celle qui en efl: plus près félon le même
cours. Nous répondrons , quant à la pre-
mière quefl:ion , que le volume efl: ici in-
différent, la quantité d'éleftricité tranf-
mife étant toujours la même , de quelle
grofifeur que foit le conducteur, comme
nous l'avons prouvé M. le chevalier d'Arcy
& moi , dans un mémoire inféré dans le
volume de l'académie de Vannée iy^c) ; en
effet, on s'en affurera facilement en tranf
mettant alternativement l'éleftricité à deux
corps, tantôt par une barre de fer, &
tantôt par un fil de fer fort délié; car,
on verra alors que ces deux corps feront
éledrifés au même degré , foit qu'ils re-
C O Nf
çoivent l'éleclrlci té parla barre, foit qu'ils
la reçoivent par le fil de fer ; ce qui ,
pour le dire en paffant, prouve que le
fluide éieflîique a la propriété de tous
les autres fluides qui <é répandent tou-
jours égalem.ent , quels que foient les canaux
de communication; c'efl-à-dire que dans
plufieurs réfervoirs qui communiquent en-
femble , l'eau, par exemple, efl toujours
de niveau , de quelle groffeur que foient
les tuyaux de communication. De ce prin-
cipe de fait , on tire la léponfe à la troi-
fieme queflion ; favoir , que l'éledricité
ne peut être plus forte à une extrémité
du conducteur qu'à l'autre, puifquefi cela
étoit , elle ne fe diflribueroit pas également,
ce. qui feroit contraire à ce principe : enfin ,
par rapport à la féconde queflion , nous
répondrons que par toutes les expériences
que l'on a faites , on n'a point remarqué que
l'éleftricité diminuât, quelle que fût la
longueur du conducteur , quoiqu'on en ait
employé qui avoient plus de 1300 pies.
Il y a plus : félon ce que dit M. le Mon-
nier le médecin , pag, 463 des mémoires
de C Académie de 1746"^ plus les corps élec-
trifés ont d'étendue en longueur, plus
l'éleftricité paroît forte. Quoi qu'il en foit ,
il eft conflant qu'à quelque diftance qu'on
ait tranfmis l'éleélricité jufqu'ici ( & cette
tranfmiffion s'efl: toujours faite dans un
temps inaffignable) , on n'a pas remarqué
que fa force en fût diminuée.
PafTons à ce qu'on appelle particulière-
ment le conducteur. Ce que nous venons
de dire aies conducteurs en général , par
rapport à leur figure & à la fubflance dont
ils doivent être formés, étant également
applicable à ceux dont il eft aéluellement
queftion , il s'enfuit qu'ils doivent être ,
comme les premiers , de métal ou revêtus
d'une fubflance métallique , de figure cy-
lindrique , &: auffi lifles qu'il eft poflible.
Nous n'ajouterions rien à leur égard , fî
ce n'eft que , devant fervir à différentes
expériences, il eft à-propos de parler de
la grandeur qu'ils doivent avoir pour ac-
quérir & conferver beaucoup d'éleflricité,
C'eft un principe de fait, que plus ces for-
tes de conducteurs font grands, plus les étin-
celles qu'on en tire font fortes ; car il eft:
eflTentiel de remarquer que , quoique la
C ON
qnsrîitc clVkél.icité tranruiiie par r.n corp:
f.y.t !a tnêmè, qr.'il foiî grand pu peut,
l'attraflion, U répn.liîon , & tous les phé-
nomènes de l'ëieél.'icité paroifTerit cepen-
dant p'us conficlérables dans \é grand que
cîan» le peti;. Mais ces phénomènes a;:gmèn-
tent-î!s fe'on '.'aiigmentation dé ia itiafTe
du conducîmr ^ on (împlement félon Tang-
men^ation de la fiirbce? ou , en d'autres
mots , i'huenffté de 1 c!edric;té dans ks
coj-ps, augmcn'^e-t-el!e dans ia ralfon de
leurs mcuTes ou dans celle de leurs furface??
C'ef} nne querrion qui a dcja beaucoup
tK^rct les physiciens, ë>i Tur laquelle ils
i()nt tort partagés. Les uns , comme M.
rab!)é Noilet, penfent que l'éleé^ricité
augmente avec les maiTes, non pas à la
vérité dans la raifon direde de ces mafîes,
mais cependant dans une plus g'ande rai-
fon que celle qui devroit réfulter de la
fimple atigmenta'ion ào.^ furfaces ; enfin,
(f'i une plus i^ande niafle eft fufceptible
d'acquérir plus d'éledlricité qu'rjne plus
petite ; les autres, comme M. ]e Mon-
nier le médecin , penfenr qu'elle augmente
feulement comme les iurfaces , Se c'eft
ce qui à paru réfulter auflî d'un grand
nombre d'expériences que nous avons faites
M. d'Arcy & moi , rapportées dans le
mémoire déjà ci'^é; voycT^ là-deffus V article
ÉLECTRICITÉ. Quoi qu'il en ibit , il eft
toujours mieux d'avoir un grand conducinir
cylindrique , comme nous l'avons dit ; & ,
quand même il ieroit creux , pourvu qu'il
ait une certaine épaifltur , les étincelles
e^ue l'on en tirera feront très-bclîes & très-
forres.
En Allemagne , en Hol!?:nde , & en An-
gleterre, on fe fert ordinaîreménr pouf
conducîâur d uri canon de fufi : maii de
pateils conducteurs ne paroiftent pa'; devoir
nous donner A^^s phénomènes auffi confi
dérabies que celui de M. Franklin , par
c\'emp'e, qui, ainfi qu'il nous l'apprend
dans fés lettres, a dix pies de long h.\\n
pié de dia.'netre. Selon cet auteur ^ lorf-
que fon condttcicur eft bien chargé, on
peut en tirer des étincelles à jirès de deux
pouces de diftance , qui caufent une dou-.
leuraftezfenfibledansla jointure des doigts;
îl eft compote de feuilles de carton for-
mant un cylindre j ôc ces feuilles font re-
CON _ S71
couvertes d'un papier d'Hollande reicvii
en bofTe en pîufîeurs endroits , 6c doré
prefqr.e par-tout.
Pour terminer, nous dirons deux mots
de 1^ m;inîcre dont le conducluir doir re-
cevoir réieflrici'.é du globe ; c'èft à quoi il
nous paroît qu'on n'a pas fait aftez d'at-
tehrion iu.'qn*ici. On fê contente pour
l'ordinaire dé faire toucher légèrement au
g'obe du .clinquant , des galons de métal
em'és, ou quelque chofe de cette nature,
ékvftrifable par communication , qui ne
pviifte poiin ^endommager, & qui ne caufe
que peu ou point de frottement. Les uns
difpofent ces matières de façon qu'elles
embraïïent une certaine partie du globe ;;
& cette pratique paraît la meilleure : les
autres fe contentent de le5 Taire porter dans
un petit efpace. Mais l'éledricité fe dilii-
comme nous l'avons dit plus haut.
pant
par les parties aiguës &c pointues des corps
éleifi^rifés , il s'enfuir qu'il doit stn dilÏÏ-
per beaucoup par tous les angles & toutes
les pointes qui fe trouvent au clinquant
& aux galons , 6^. Auftî , lorfqu'on éie(51rife
un globe , voit-on toutes cqs parties briller
d'un grand nombre d'aigrettes & de gerbes
de feu éleétrique. Pour remédier à celte
diftipation de l'élecTtricité , voici comment
nous nous y prenons. Nous attachons du
clinquant au bord intx;rieur de la mafîè
d'un entonnoir de fer blanc, dont le dia-
mètre eft égal à la grandeur delà partie
du globe qwQ l'on veut embraiTer; nous
faiions déb .rder~ce clinquant d'un demi-
pouce ou en iron, & nous le découpons-
comme à 1 ordinaire, pour quif puillë
4)ofer fur le globe & le toucher dans un
gr.nd nombre de points fans aucun frot-
remen: confidérable ; enfuite nous recou-
vrons le tout par un entonnoir de verre,
dont le burd excédé celui de rentonnoir
àc fer-blanc, d'un" q.uart de pouce ou à-
•péu-près,, afin qu'il puifte être fort près d\i
globe fans cependant le toucher. Par ce
moyen, l'éleét iqué ne peut fe dlftiper
pnf les angles des feuilles du clinquant^
ces feuilles fe trouvant environnées du
verre, qui, comme on l'a vu plus haut,,
repoufte le iîuide é'edrique & l'empêche
de fe diftîper. Nous ne parlerons point de-
là manière d'adapter cetentomioir au cca*
87* CON
ducl:iir^ la chofe étsnt trop facile' pour sV
arrêter. V. MÉTAUX. ÇT).
Conducteur DE LA. Foudre, fP/2>:/?J
c'eft le nom qu'on a donné à des verges de
métal érigées ("urdes bâîimeiis , oir clans les
environs , afin de les garantir des coups de
la foudre.
On n'avolt d'abord eu d'aufre deiïein en
érigeant ces verges métalliques , que celui
de connoître l'éle-flriciré naturelle des nua-
ges : mais le céiebre Franklin penfa bientôt
qu'on pouvoir fe fervir de ce moyen-là^
pour préferver les édifices de<^ dangereux
eâ^ets de la foudre. En effet nous voyons
que la plupart des bâtimens qui ont eu
des verges de méral, érigées fuivanrîes pré-
ceptes de cet ingénieux phyficlen, ont é:é
préfervés de tout accident caufé par la fou-
dre. C'ed ce qui parou bien clairement par
les obfervafions rapportées dans les Tran-
faclions pliilofophiques ^ fur les effets delà
foudre : tout ce qu'on a obfervc à cet égard ,
"indique une loi confiante, qui efl le fon-
dement de l'art que Franklin a trouvé , &
Ton peut dire que ces obfervations lui fer-
vent de démonftration. Voici en quoi cette
loi confifle , & ce qu'on a obfervé.
La foudre ne fait point de ma! , ou au
moins fort peu, à ces édifices, ou à la par-
tie ÔlQS édifices à laquelle répondent àes
verges de métal ; Se d'autant moins de
mal, que les verges font plus épaiffes, hi
que !a chaîne ou la fuite des corps métalli-
ques eft mieux établie, comme nous allons
le dire; elle fait au contraire du dommage
dans les endroits où cette fuite eft inter-
rompue , hi à proportion de la force du
coup.
Toutes les expériences Se toutes les ob-
fervations nous montrent que les verges de
métal qui font un peu élevées , attirent à
^lles de très-loin le feu éleélrique ou la
foudre. Cependant il ne faut pas s'imaginer,
comme quelques perfonnes l'ont fait , qu'on
puiffe attirer tout le feu éle6lrique des nua-
ges, au moyen de ces' verges érigées fur
de hautes tours , enfuite qu'on puiffe diffi-
per un orage, & tellement garantir les en-
virons du lieu où il y a de ces verges , qu'ils
n'aient plus à craindre ni grêle ni tonnerre.
Il faut avouer que cet art ne nous eft point
encore connu, & que nousledefirons en-
CON
core; car les nuages font que'qucfois fi fort
chargés de feu éleftrique , & ce feu a une
telle violence, qu'il paroît que mille pointes
érigées avec àt$- £Onduc?curs très-é;endus,
ne fuffiroient pas pour difliper l'orage &^
l'empêcher de nuire. li ne faut donc pas fe
promettre de trop grands avantages de ces
recherches , qui d'ailleurs font tiès-belles
&c déjà très-utiles , 6>c qui méritent ainfi
toute l'attention des phyficiens.
Cependant fi tout le monde cherchoit
à fe mettre à couvert des rifques & des
dangers communs auxquels on eft expofë,
&: fi , pour cela, on faifoit enforte que
ce torrent immenfe de matière élecfnque
prît cours par {ts conducteurs que la
même nature nous offre , fa voir , les fom-
mets des montagnes & des grands arbres,
& qu'on cherchât à rétablir ainfi l'équilibre,
il arriveroit peut-être qu'en même temps
que chacun travailleroit de fon côté pour
fa fureté propre, on parviendroit enfin à
découvrir l'art de fe garantir généralement.
Ainfi , pour préferver fa maifbn des ra-
vages que la foudre peut y faire , il faut éri-
ger une verge de fer, pointue par un bout,
qui furpafife le fommet de l'édifice de quatre
ou cinq pies , car la foudre traverfant l'ef-
pace qui efl entre les nuages &: la verge ,
eft comme un cylindre de feu très-denfe ,
qui fe fraie un chemin à travers les airs, ert
les écartant , ainfi que les vapeurs humides,
qui brûle , qui renverfe ou qui ébranle tous
les corps qui lui réfiftent : c'eft ce qui paroît
bien clairement par les effets de la foudre
que Franklin a obfervés en Amérique , de
même que par les obfervations que )'ai eu
occafion de faire à Milan depuis peu. Il con-
vient donc de placer ces verges le plus haut
qu'on pourra, &: il ne fera pas inutile de
, dorer trois ou quatre pouces de l'extrémité
pointue, afin de la préferver delà rouille.
On eft ordinairement embarraffé, lorf-
qu'on veutifoler la verge de fer au moyen de
quelques corps életflriques , tels que le verre
ou les réfines; c'eft-à-dire , la féparer du
bâtiment, enforte qu'elle ne tienne qu'à
des corps de ce genre, parce qu'd eft alors
difficile de l'affermir comme il faut. Mais
cet arrangement qui n'eft pas aifé à exécu-
ter , n'eft utile qu'à ceux qui veulent ob-
ferver l'éleélricité des nuages , & n'eft pas
nécei*
C O N
néceflalre, quand on n'a deiTein que de pré-
ferver 1 editice. C'eft pourquoi ii faut dans
ce cas-là , faire porter la verge fur quelque
pierre bien affurée , ou fur un tuyau de
cheminée, ou on l'affermira à l'aide de quel-
ques bras de fer fcellés dans le mur avec
dft plomb. Si l'on établit enfuite une bonne
communication entre cette verge & la terre,
avec du fil d'archal , il feroit auffi ridicule
de craindre les effets de la foudre fur un tel
bâtiment, que d'avoir peur d'être entraîné
par un fleuve rapide, lorfque le quai fur
lequel on eft, & qui borde le fleuve, eft
parfaitement folide.
On a auiîi cherché à découvrir à quelle
diftance horizontale les verges de Franklin
peuvent attirer la foudre , afin de connoître
les dangers auxquels les perfonnes ou les
batimens voifins peuvent encore être expo-
fés ; mais nous fommes encore à cet égard
dépourvus d'obfervations exactes , & je
doute fort qu'on puiffe venir à bout de dé-
terminer cela avec quelque précifion, parce
que l'équilibre qui règne entre le feu éleftri-
que répandu dans les nuages Se la terre ,
peut être dérangé d'une infinité de manières
différentes , fuivant les diverfes circonf-
tances.
Je crois aufîî que les différentes couches
de la terre ne font pas également propres à
tranfmettre le feu éleftrique , &: à le répan-
dre également par-tout. Il y a même des
expériences qui nous indiquent affez claire-
ment, qu'au-deffous de la furface de la
terre, on trouve des lits qui fe chargent ou
fe déchargent plus facilement du feuéleflri-
que les uns que les autres; d'autres au con-
traire plus facilement. De-là vient que cer-
taines régions font fouvent plus frappées de
la foudre que d'autres ; & il peut arriver
que fi l'on n'a pas égard à ces diverfes cir-
conflances , l'art de préferver les édifices
deviendra non-feulement inutile , mais
même dangereux.
Cependant il n'efl pas impofîible de ve-
nir à bout de ces difficultés , ôc de parvenir
à fe mettre à couvert de tout danger , en
prenant de bonnes précautions. On fait ,
par une multitude d'expériences , qu'après
les métaux , l'eau Se les lits de terre humide
font les meilleurs conducteurs du feu éledri-
que, & qu'ils font très-propres à le répan-
Tomc VIIL
C O N S73
dre également par-tout. Tous les édifices
qu'on a cherché à préferver ainii de la fou-
dre, tant en Europe que dans les colonies
Angloifes d'Amérique , l'ont été parfaite-
ment. Ce qu'il y a de plus remarquable à
cet égard, c'efl ce qui a été fait au temple
de S. Paul à Londres ; voy. Us Tranfa-clion^
philofophiqms ^ année lyGc) , n°. 2/ , ôc ce
que le célèbre Félix Fontana a fait exécu-
ter depuis peu aux magafins à poudre de
Florence.
Maintenant que nous avons un détail de
plufîeurs effets de la foudre , Se que nous
avons encore l'expérience de nombre de
bârimens préfervés de fes coups par ces
verges ; il ne nous fera pas difficile de tirer
de-là les meilleures règles qu'on doit fuivre,
lorfqu'on veut exécuter cet appareil.
1°. On érigera, comme nous l'avons déjà
dit , dans l'endroit le plus élevé de l'édifice ,
une verge de fer pointue ; fi c'eft un vafte
bâtiment avec des ailes , ou des corps de
logis qui s'étendent fort loin, comme à la
diftance de cent pies &: plus , il convient
alors d'en ériger plufieurs dans les endroits
les plus élevés.
2°. Il faut que toutes ces verges com-
muniquent entr'elles par un fil d'archal , qui
ira de l'une à l'autre depuis leur extrémité
inférieure. Au refte il n'importe pas que
ce fil d'archal foit fufpendu en l'air , ou
qu'il repofe fur les cheminées , ou fur la
couverture de l'édifice » pourvu feulement
que ce ne foit pas fur du bois. Cette com-
munication d'une verge à l'autre eft très-
utile , premièrement pour faciliter l'écou-
lement du feu éledrique , depuis les nuages
jufqu'à la terre; enfiiite pour prévenir les
inconvéniens qui naîtroient , s'il n'y avoit
qu'un feul fil d'archal, & qu'il vîntàcaffer.
3°. On fera enfuite defcendre un fil
d'archal depuis le bas de la verge, en fui-
vant la pente du toit , & on le laifTera tom-
ber jufqu'à terre, depuis le bord du toîr.
Si le deffus du mur avoit une corniche de
bois, ou quelque chofe d'appprochant qui
fut auffi en bois , il convient d'cloigner le
fil d'archal du mur, à l'aide d'un bras de
fer qui le portera en avant.
4°. Il faut que les verges métalliques aient
plus d'un demi-pouce d'épaiffeur, & que
les fils d'archal aient au moins trois hgnes.
Rrrrr
m c o N
Nous favons par noir.bre de relationç , que
ces fils trop minces ont été fondus & dif-
perfés par la foudre , qui endommage alors
beaucoup les bâtimens. C'eft pourquoi il ne
faut pas économi^r le métal ; d'ailleurs la
dépenfe que Ton fait eft bien compenfée par
la fureté qu'on trouve avec cet appareil ,
& par fa plus grande durée.
5°. Le fil du métal doit exaftement tou-
cher la barre , & y être fortement appliqué
avec des vis ou des rivures : car on a des
exemples récens en Amérique, dans la Ca-
roline méridionale , que les fils qui ne re-
noient les uns aux autres que par des cro-
chets , ou qui étoient compofés d'anneaux,
comme une chaîne, étoient facilement
fondus & difperfés par la foudre.
6°. Il faut faire enforte que les fils qui
vont depuis la verge jufqu'à terre , paffent
dans les angles faillans de l'édifice. Le même
a|)pareil fert de cette façon à préferver le
bâtiment des coups de foudre , qui pour-
roient les frapper par les côtés,
7°. Les fils d'archal doivent augmenter
en épaiffeur , à mefure qu'ils approchent
de terre, & le bout qui les termine doit
avoir la même épaiiïeur que la verge. On
les fixera à quelque pierre fous terre , &
on les prolongera jufqu'â ce qu'ils atteignent
une couche de terre humide; ou ce qui
vaut encore mieux , jusqu'à quelque eau
courante, fi cela fe peut. On aura foin ce-
pendant d'éloigner leur extrémité de deux
©u trois pies des fondemens de l'édifice. Si
l'on obferve tout ce que nous venons de pref-
crire enétabliflfantcet appareil, on peut être
affuré qu'il diifipera très-bien le feu de la
foudre, &: qu'on fera parfaitement à l'abri
de fes coups. C^- ■^« )
Conducteur, infirumentde Chirurgie
dont on fe fert dans l'opération de la taille.
On le fait ordinairement d'acier ou d'ar-
gent. Il y en a de deux fortes , le mâle
& la femelle. Ils ont l'un & l'autre la fi-
gure d'une croix, &: font fort poUs, pour
ne point hleffer la veflie dans laquelle on.
les introduit, ni les parties par où ils paf-
fent. Leur corps eft large d'environ trois
lignes, arrondi en- dehors, plat en-dedans.
La partie poftérieure comprend trois bran-
ches applaties; deux font les bras de la
croix, 6c la troifieme en compcfe la
C O N
tête ou le manche : celle-ci doit être fort
renverfée en dehors, afin de donner plus
d'efpace aux tenettes qu'on introduit entre
les deux. Tout le long de la face plate du
corps ou branche antérieure , règne une
crête dans le milieu d'environ deux lignes
de faillie : cette crête commence peu-a-
peu àès le milieu du manche , afin que
l'opérateur l'apperçoive mieux. Elle finit
Hifenfiblement vers la fin du conduâcur
mâle , & fe termine par une languette lon-
gue de fix lignes relevée & recourbée en-
dedans , appîatie fur les côtés : cette lan-
guette fait l'extrémité definftrument, qu'ors
place dans la cannelure d'une fonde qui
doit être mife auparavant dans la veflie.
La crête dans l'autre efpece de conducteur
ne s'étend pas fi loin ; l'extrémité antérieure
eft un peu recourbée en-dedans, & termi-
née par une échancrure qui lui a fait don-
ner le nom de conduâeur femelle. Voyez
Us figures 4 , & 6. PL XI. de Chirurgie.
La manière de fe fervir de ces deux
inftrumens , confifte à introduire d'abord
le conducteur mâle dans la veffie , à la fa-
veur d'une fonde cannelée, la -tête en-
haut, le dos en-bas; enfuite on retire la
fonde, & l'on glifte le conducteur femelle par
fon échancrure , le dos en-haut fur la crête
du mal. Ces deux inftrumens ainfi intro-
duits > forment par leurs crêtes parallèle-
ment oppofées, une efpece de coulifte
qui fert à conduire les tenettes dans la veflie
pour charger la pierre.
On ne fe fert pas beaucoup de conduc-
teurs pour tailler les hommes ; on leur a
fubftitué le gorgeret. Voye^^ GoRGERET.
Les conducteurs font enul'age pour la taille
des femmes. Voyei^^ Lithotomie des
FEMMES, (r)
CONDUIRE î v. aft. {Gramm.) c'eft
indiquer le chemin en accompagnant lur
la route; mais cette acception a été dé-
tournée d'une infinité de manières diffé-
rentes ; on a dit conduire une voiture ,
conduire dans les bonnes voies., conduire des
eaux, conduire des troupes , &c. Voyei-en
quelques-uns ci-après.
Conduire, (Drapier ou Marchandage-'
toffes.) eiï (y nony me k aune r. Mener dou-
cement l'étoffe Le long de l'aune, fans la-
C O N
tirer j pour la faire courir davantage, c'eft
la conduire bois à bois.
Conduire les eaux, {Hydrauliq.)
La manière de conduire l'eau dans une viile
n'eft pas la même que dans la campagne
& dans un jardin.
Dans une ville on n'a d'autre fujétion
que de fe fervir de tuyaux de plomb , afîez
gros pour fournir les fontaines publiques
& la quantité d'eau concédée aux particu-
liers , en la faifant tomber dans les cuvettes
de diftribution. Si dans la pente des rues
l'eau eft obligée de remonter ou de fe
mettre de niveau après la pente , ou enfin ,
fi l'on foude une branche fur le gros tuyau,
on fait dans cet endroit un regard avec
un robinet pour arrêter cette charge &:
conferver les tuyaux ; cela fert encore à
les vuider dans les fortes gelées.
Dans la campagne on n'a ordinairement
à conduire que des eaux roulantes, après
l'avoir ramalfée par d&s écharpes, des ra-
meaux , des rigoles dans des pierrées ,
l'avoir amenée dans un regard de prife ,
on la fait entrer dans à^s tuyaux de grès
ou de bois, félon la nature du lieu; s'il
y a des con^re-foulemens où l'eau foit
obligée de remonter , on la fait couler
dans des aqueducs, ou au moins dans
des tuyaux affez forts pour y r^ciifter. On
fent bien qu'il feroit ridicule d'y employer
des tuyaux de plomb , qui feroient trop
expofés à être volés , ceux de fer font à
préférer. On les enfoncera de quatre à
cinq pies, pour éviter le vol &c la ma-
lice des payfans.
Le plus difficile à ménager en condui-
ûnt les eaux pendant un long chemin ,
ce font les fonds & les vallées appellées
ventrées ou gorges \ ils fe trouvent dans
l'irrégularité du terrain de la campagne ,
& interrompent le niveau d'une conduite;
alors on eft obligé de faire remonter l'eau
fur la montagne vis-à-vis pour en conti-
nuer la route; c'eft dans cette remontée
que l'eau contrefoulée a tant de peine à
s'élever que les tuyaux y crèvent en peu
de temps.
Soit la montagne A Çfig. i . Hydrauliq.)
d'où defcend l'eau qu'on' fuppofe amené;
depuis la prife par un terrain plat , dan'
des tuyaux de grès ou des pierrées. B e(l
c o N 87î
îa féconde montagne où fe trouve la con-
trepente oppofée à la pente de la première
montagne -4, d'où vient la fource C con-
duite dans des tuyaux degrés. Z>Z) eft le
ventre ou gorge, où l'eau fe trouve forcée
par-tout. jÊ £ eft la ligne de mire ou ni-
vellement pour connoître la hauteur du
contre-foulement B, La c>:)nduite qu'on
pofera dans cette gorge ou fondrière D D ^
fera de fer, ainfi que dans la contrepente
où l'eau force le plus, jufqu'à ce qu'elle
fe foit remife de niveau fur la montagne
jff ; on reprendra alors des tuyaux de grès
ou des pierrées pour éviter la dépenfe ,
jufqu'au réfervoir , parce que l'eau n'y
fait que rouler , & ne force que dans le
ventre & la remontée.
Si dans un long chemin il ferencontroit
deux ou trois contrepentes, ce qui peut
encore arriver en ramaftant des eaux de plu-
fieurs endroits , on les conduiroit de la
même manière. Quand la gorge n'eft pas
longue , comme feroit celle F F de U
figure 2. un bout d'aqueduc ou maftlf
de blocailles eft le meilleur parti qu'on
puifle prendre, & l'eau y roulera de la
même manière que depuis le regard de
prife d ms des tuyaux de grès , ou des pier-
rées continuées fur des maflifs de biocail-
les. Lorfque cette gorge eft longue , & que
le contrefoulemenr eft élevé de vinjttà trente
pies , les tuyaux de fer coi
dureront plus long-temps
laia trei
mèins,
&
Si le contrefoulement étoit plus haut que
cent pies, il faudroit y bâtir un aqueduc,
parce que les tuyaux de fer auroient de la
peine à réfifter; alors le niveau étant conti-
nué par l'élévation de l'aqueduc , l'eau y
rouleroit & y regagneroit l'autre-montagne,
d'oùellerentreroitdans des auges ou tuyaux
juiqu'au réfervoir.
On peut encore éviter un contrefo^l^"
ment, en faifant fuivre une conduite lelo^g
d'un coteau, & regagnant petit-à- petit *.s
niveau de la contrepente: mais il faut qu'il
n'y ait pas un grand circuit à faire dans cett^
fituation a.ppe[\éQ poêle ou bûjfin\ parce qcfi
la longueur d'une conduite anifi circulaire»
quoiqu'en grès ou en pierrée , coûte plu*
que d'amener l'eau en droite ligne pa^
les tuyaux capables de reiiiter au coatre-t
. roulement,
Rrrrr i
§7^ C O N
Dans les jardins, en Tuppcfant l'eau ramaf-
fée flans le réfervoir au haut cVim parc, il
ne fe rencontre pas tant de difficultés : le
terrain y eft drefîe , & les conduites def-
cendent plutôt en pente douce qu'elles ne
remontent. On fe fervira dans les eaux for-
cées de tuyaux de fer , de plomb ou de
bois, fuivant le pays, & même de grès
bien conditionnés , pourvu que la chute
ne pafle pas quinze à vingt pies. Ces con-
duites étant parvenues jufqu'aux balîins ,
on y fera un regard pour loger un robi-
net de cuivre d'une grodeur convenable au
diamètre de la conduite ; on fondera enfuite
debout une rondelle ou collet de plomb un
peu large autour du tuyau , & dans le mi-
lieu de l'endroit du corroi ou maflif du baf-
fin où il pafTe ; afin que l'eau ainii arrêtée
par cette plaque, ne cherche point à fe per-
dre le long du tuyau. Quand ce font des
tuyaux defer,onlespofe de manière qu'une
de leurs brides fcit dans le milieu du corroi ,
ce qui fert de rondelle : cette règle eft gé-
nérale pour tous les tuyaux qui traverfent
les corrois & mafîifs d'un baffin ; comme
auflide ne jamais engager les tuyaux, & de
hs faire paffer à découvert fur le plafond
d'un bafîin.
Dans le centre du baffin , à l'endroit mê-
me où doit être le jet, on foudera fur la con-
duite un^yau montant appelle foucke, au
bout dulpel on foudera encore un écrou de
cuivre fur lequel fe viffe l'ajuftage : il faut
que cette fouche foit de même diamètre
que la conduite : ii elle étoit retrécie, elle
augmenteroit le frottement, & retarderoitla
vîteffe & la hauteur du jet. A deux pies en-
viron par-delà la fouche , on coupera la con-
duite, 6c on la bouchera par un tampon de
chêne , avec une rondelle de fer chaffée à
force au bout du tuyau, ou par un tampon
de cuivre à vis que l'on y foudera. Ces tam-
pons facilitent le moyen de dégorger une
conduite.
Evitez les coudes , les jarrets , & lesan-
gles droits qui diminuent la force des
eaux ; prenez-les d'un peu loin pour en
diminuer k roideur : ôc même il ne fera
pas mal d'employer des tuyaux plus
gros dans les coudes pour éviter les frot-
t€mcns.
Dans les conduites un peu longues &
CO N
fort chargées , on place des ventoufes d*ef-
pace en efpace pour la fortie des vents :
on les fait ordinairement de plomb; on
les branche fur la tige de quelque grand
arbre , en obfervant qu'elles foient de
deux ou trois pies plus hautes que le ni-
veau du réfervoir , afin qu'elles ne dépen-
fent pas tant d'eau ; de cette manière il
n'y a que les vents qui fortent. Quand
après une pente roide les conduites fe re-
mettent de niveau, il faut placer dans cet
endroit des robinetspour arrêter cette char-
ge ; ce qui fert encore à trouver les fautes ,
& à tenir les conduites en décharge pen-
dant l'hiver.
Faites toujours paffer les tuyaux dans les
allées, pour en mieux connoître les fautes,
& y remédier fans rien déplanter ; & les
conduites fous des terraffes ou fous des che-
mins publics, pafteront fous des voûtes
afin de les vifiter de temps en temps. Les
eaux de décharge rouleront dans des pier-
rées faites en chatières, ou dans des tuyaux
de grès fans chemife , quand ces eaux vont
fe perdre dans quelque puifart ou cloaque ;
mais quand elles fervent à faire jouer des
baffins plus bas , on les entourera d'une
bonne chemife de ciment, ou l'on y em-
ploiera des tuyaux ordinaires comme étant
des eaux forcées. Tenez toujours les tuyaux
de décharge, tant de la fuperficie que du fond
d'un baffin , plus gros que le refte de la con-
duite , afin que l'eau fe perde plus vite
qu'elle ne vient, que le tuyau ne s'esgorge
point , & de peur que l'eau paffant par-
deffijs les bords , ne détrempe toutes les ter-
res qui foutiennent le baffin , & n'en affaiffe
le niveau. (K)
Conduire, (Jard.J Voye\ Élever;
Conduire fon cheval étroit ou large 9
terme de manège : étroit fignifie le mener
en s'approchant du centre du manège ; ôc
large, en s'approchant des murailles du
manège. L'écuyer d'académie dit quelque-
fois à l'écolier , conduijci votre cheval^ lorf-
que l'écoher laiffe aller fon cheval à fa
fantaifie.f^
Conduire, en peinture , corriger^ dif-
tribuer. On dit une helU conduite , dans
la diftribution àes objtts, une lumière
bien conduite , &c. pour marquer que ces
C O N
chofes font ménagées avec undifcernement
éclairé. C^J
CONDUIT , {Phyficj. ) canal ou tuyau
de plomb , de fer , de bois , de pierre , &c.
fervant au tranfport de l'eau ou de tout
autre fluide. Voye:[ TuYAU, AqueduC.
On a expliqué à X article Conduire /«
eaux^ ce qui a rapport à cette partie de
l'hydraulique : elle eft une des plus impor-
tantes; il paroît par les aqueducs des an-
ciens qu'ils connoifToient bien cette partie,
& que s'ils étoient moins forts que nous
fur la théorie, ils l'étoientdu moins autant
fur la pratique.
On dit qu'il y a dans la province du nou-
veau Mexique un conduit fouterrain en'
forme de grotte , qui s'étend en longueur
l'efpace de loo lieues. Chambers rapporte
ce fait ; nous ne prétendons point le garan-
iir.(OJ
Conduit , en Anatomie , nom de diffé-
rentes cavités qu'on appelle auffi canal.
Voyei Canal.
Conduit auditif (le), meatus au-
Mtorius , eft l'entrée de Toreille. C'efl: un
conduit cartilagineux , divifé irrégulière-
ment en plufieurs endroits par des cloifons
charnues & membraneufes , à-peu-près
comme les bronches des poumons , fmon
que les fibres charnues du conduit (ont plus
groffes. La partie interne, c'eft- à-dire , du
côté du cerveau , eft offeufe. Il eft tapiflfé
dans toute fon étendue d'une tunique mince
qui vient de la peau , & qui fe continue juf-
que fur la membrane du tympan , où elle
devient plus mince.
Dès le commencement du conduit jufque
ppelqu'à mi-chemin s'élèvent quantité de
petits poils à la racine defquels fort le céru-
Tnen ou cire de l'oreille, qui s'embarrafte
dans les poils afin de mieux rompre l'impé-
luofité de l'air extérieur , & d'empêcher
qu'il ne fe jette trop précipitamment fur la
membrane du tympan.
Conduit cysttque , eft un conduit
biliaire de la grofleur d^une plume d'oie ,
lequel environ à deux pouces de diftance
de ta véficule du fiel , fe joint au conduit hé-
patique , & tous deux enfemble forment le
conduit commun ou cholidoque. Voy&{^
Bile & Cystique.
CONDUITS LAITEUX ^f^ntfW/72,;
C O N 877
canaux membraneux , étroits à leur origine ,
larges dans leur milieu , qui accompagnent
principalement la raafTe blanche des ma- '
melles , & fe retréciftent derechef en allant
au mamelon , vers lequel ils forment une
efpece de communication. Ce font à pro-
prement parler, les tuyaux excréteurs des
glandes, qui compofent les mamelles, &C
filtrent le lait. Non-feulement ces canaux
fourniffent le fuc laiteux à l'enfant quand il
tette , mais encore ils en font les réfer-
voirs quand il ne tette pas. Ils fé termi-
nent dans le mamelon ; là , leurs orifices font
ouverts & fort étroits, &: ily a des auteurs
qui prétendent y trouver des valvules qui
retiennent le lait. D'autres regardent ,
comme fuffifant pour cet ufage , la conf-
triâ:ion fpontanée des orifices, & rejettent
les valvules.
Ces tuyaux en traverfant la papille , ne
font pas droits ; on obferve au contraire
qu'ils font ployésen zig-zag ;ce qui fait que
quand la papille n'eft point gonflée , le lait
ne peut s'échapper. Les différens plis fervent
de valvules. Toutefois quand on prefle for-
tement la racine du mamelon , les vaifîeaux
fe redreffent , & la liqueur peut couler. Cela
arrive , lorfqu'en conféquence du chatouil-
lement que la langue de l'enfant y excite
en tettant , le tifl^u fpongieux de la papille
s'enfle. Alors les plis difparoilTent , les
tuyaux deviennent droits, &le lait fort de
leur cavité.
Ces tuyaux , avant d'arriver au mame-
lon, s'anaftomofent en plufieurs endroits.
Parce moyen le lait , quand il eft arrêté dans
quelques vaifteaux obftrués peutpafter par
des voies détournées.
Cette importante obfervation eft due à
M. Nuck. Les conduits laiteux compolént
la plus grande partie du mamelon auquel
ils aboutififent ; mais cela n'empêche pas
qu'il n'y ait une fubftance fpongieufe inter-
pofée entre les conduits.
Conduit urinaire , dans les femmes ,
eft fort court; il eft tapi fl"é intérieurement
d'une tunique très-mince , & enfuite d'une
autre de fubftance blanche : cette der-
nière donne partage à phifieurs petits ca-
naux qui viennent de certaines lacunes
qu'on y obferve, &: ces petits canaux dé-
i chargent une matière claire & vifqueufe.
Syg C O N
qui fert à enduire l'extrémité du conduit
urinaire. Ckambcrs. (L)
CONDUIT A VENT , ( ArchiteBure. )
en bâtimens, font des foupiraux ou lieux
fou terrains oii les vents fe confervent frais
& froids , 6c font communiqués par des
tubes, tuyaux ou voûtes dans les chambres
ou autres appartemens d'une maifon, pour
les rafraîchir dans les temps où il fait trop
chaud.
Ils font fort en ufage en Italie , où on les
nomme vcntidotti ; en France on les nomme
pri/'ons des vents , ou palais d^Eole. {P )
Conduite d'eau, ( Hydrauli(jue.J
eft une fuite de tuyaux pour conduire
l'eau d'un lieu à un autre , que Vitruve
appelle canalis fluclilis . Si les tuyaux font
de fer, on la nomme conduite de fer ; s'ils
font de plomb conduite de plomb ; s'ils font
de terre ou de grès cuit , conduit de terre
ou de poterie ; enfin s'ils font de bois , on
l'appelle conduite de tuyaux de bois, f^oyei
.Tuyau. fP J
* CONDUITE, f. f. ÇGramm.) c'eft
l'ordre que l'on mer dans fes aftions , relatif
au but que l'on s'eft propofé. Si les actions
font coniëquentes, la conduite eft bonne;
fi elles ne font pas conféquentes , la conduite
eft mauvaife. Il eft évident qu'il ne s'agit que
dune bonté ou d'une méchanceté virtuelle,
& non morale. Pour que la conduite foit
moralement bonne ou mauvaife , il faut que
le but foit bon & honnête , ou déshonnéte
ou mauvais; d'où il s'enfuit que la conduite
virtuelle peut être mauvaife quoique le but
foit bon , & bonne quoique le but foit
mauvais. Conduite a encore quelqu'autres
acceptions relatives aux verbes conduire ,
diriger.
Conduite, f. f. terme d^ horlogerie ; il
fignifie une tringle de fer , qui porte à (es
deux extrémités des roues appellées molettes,
voye:^ MoLETTE. Les conduites fervent:
dans les grofies horloges à transmettre le
mouvement à des diftances de l'horloge
trop grandes pour qu'on pût le faire par
les moyens ordinaires , comme par exem-
ple, pour faire mouvoir une aiguille qui
marqueroit l'heure fur un cadran , éloigné
de l'horloge de lo à 12 toifes. En géné-
ral on appelle dans une grolîe horloge con-
duites , la partie qui fert à faire tourner
C O N
des aîgijiiles qui en font fort éloignées ; foit
que ces conduites fo\em faites comme nous
venons de le dire , foit qu'elles le foient au-
trement.
^ CONDUR , CG^og. modj petite ville
d'Afie, dans la prefqu'ile de l'Inde en-deçà
du Gange , au royaume de Bifnagar.
CONDYLE , f. m. terme d'Anaiomie,
c'eft le nom que les anatomiftes donnent à
une petite éminence ronde, à Textrémité
de quelques os. Voye-^ Os. Telle eft celle
de la mâchoire inférieure, qui eft reçue fur
l'apophyfe tranfverfe de l'os des tempes.
Voyei^ Os TEMPORAL.
Quand cette éminence eft large, on la
nomme tête. Voyei TÊTE. Chambers,
(TJ
* CONDYLEATIS, CMythol.J Cur^
nom de Diane , adorée à Condyleis en
Arcadie. Ce furnom flit changé dans la fuite
en celui à* ap a ne lie me n qui veut à'ire étran'
glée, parce que des jeunes gens lui mirent
par paft^e- temps une corde au cou; irré-
vérence qui les fit lapider par les Ca-
phiens , 6c punition qui déplut à la déefle
qui fil avorter toutes les Caphiennes, ^à
qui l'oracle confeilla de rendre les honneurs
funèbres aux jeunes gens, &c d'aopaifer
leurs mânes.
CONDYLOIDE, 2ià].enAnatomieJe
dit àes parties relatives à des éminences
appellées condyles. Voye\ CoNDYLE.
Les trous condyloidiens ^'k
Les fojfes condyloïdien- C de r occipital,
nés., V. Occipital. fZ,)J
CONDYLOME , f. m. ( Chirurgie. ) eft
une excroiftance qui vient quelquefois à la
tunique interne de l'anus , & aux mufcles
de cette partie , ou au col de la matrice.
Ce mot vient du grec kwS'\jk'( , article ou
jointure., parce qu'ordinairement le condy-
lome a des rides ou plis femblables à ceux
àts jointures.
Le condylome par fucceflion de temps
devient charnu , & poufle quelquefois une
efpece de tige en-dehors : & alors on l'ap-
^qWq ficus. Voyez ficus.
Les condy lorries font fouvent des fymp-
' tomes de maux vénériens , & dégénèrent en
chancres û on les néglige. On emploie effi-
cacem.ent à leur cure des oublions mercu-
rielles , àc des efcarotiques propres à les
CON
confumer ; maison les extirpe encore mieux
par la ligature ou l'incifion , fi la firuation
ou la nature de la partie le permet. Il faut
quelquefois procurer la falivation au ma-
lade pour faciliter la cure & la rendre
complète.
CoND Y LO M E,eflauifi quelquefois fyno-
nyme à condyU. F^oje:^ CoNDYLE. C^)
CONE , r. ni. on donne ce nom en géo-
métrie , à un corps folide , dont la bafë ert
un cercle , & qui fe termine par le haut en
une pointe que l'on appelleyo/;7/wcr. f^oyei
F/, des coniq.fg. 2. Vojeiaul/i Solide &
Tronqué.
Le càm peut être engendré par le mouve-
ment d'une ligne droite K M, qui tourne
autour d'un point immobile K , appelle
fommet ,enrarant par fon autre extrémité la
circonférence d'un cercle M N, qu'on
nomm.e fa bafe.
On appelle en général axe du cône , la
droite tirée de fon fommet au centre de
la bafe.
Quand l'axe du cône eft perpendiculaire
à la bafe , alors ce iblide prend le nom
de cône ; fi cet axe eft incliné ou oblique ,
c'eft un cône fcalene : les cônes fcaLenes
fe divifent encore en obmfangles & acu-
tangles.
Si VaxeAB Cfig.J-J eft plus grand que
le rayon C i? de la bafe , le cône eft acutan-
gle ; s'il eft plus petit , le cône eft obtufan-
gle; enfin c'eft un cône rectangle , quand l'axe
eft égal au rayon de la bafe.
Quelques auteurs définiflent en général
le cône une figure folide , dont la bafe eft un
cercle comme C D [ fig. j . ) , & qui
eft produite par la révolution entière du
plan d'un triangle rectangle CA B , autour
du côté perpendiculaire A B ; mais cette
définition ne peut regarder que le cône
droit , c'eft-à-dire , celui dont l'axe tombe
à angles droits fur fa bafe.
Afin donc de donner une defcription du
cône , qui convienne également au cône droit
& à l'oblique , fuppofbns un point immo-
bile A , {fig. 4. ) au-dehors du plan du cer-
cle BDÈC ; & foit tirée par ce point une
ligne droite AE , prolongée indéfiniment
de part & d'autre, qui fe meuve tout-au-
tour de la circonférence du cercle : les deux
furfaces engendrées par ce mouvement ,
CON 879
font ^^ptWéQS furfaces coniques ; & quand
on les nomme relativement l'une à l'autre ,
elles s'appellent àç.s furfaces verticalement
oppofées ou oppofées par le fommet ^ ou fim-
^\txx\^x\\ fur faces oppofées.
Voici les principales propriétés du cône.
1°. L'aire ou la furface de tout cône droit ^
faifant abftradion de la bafe ,eft égale à un
triangle , dont la bafe eft la circonférence
de celle du cône .^ & la hauteur le côté du
cône. VoyeT^ TRIANGLE. Ou bien , la fur-
face courbe d'un cône droit eft à l'aire de fa
bafe circulaire , comme la longueur de l'hy-
pothénufe A C( fig. 3 . ) du triangle reftan-
gle générateur eft k CB , bafe du même
triangle, c'eft-à-dire, comme le côté du
cône au demi-diametre de la bafe.
D'où il fuit que la furface du cône droit eft
égale à un fedeur de cercle , qui a pour
rayon le côté du cône, & dont l'arc eft égal
à la circonférence de la bafe de ce foîide :
d'où il eft aifé de conclure que cet arc eft à
360 degrés , comm.e le diamètre de la baf*
eft au double du côté du cône.
On a donc une méthode très-fimple de
tracer une furface ou un plan , qui enve-
loppe exaftement celle d'un cône droit pro-
pofé. Car fur le diamètre de la bafe A B y
l'on n'a qu'à décrire un cercle ÇPL des ce-
niq.fig. 6".); prolonger le diamètre jufqu'en
C , en forte que A C {bit égal au côté du
cône ; chercher enfuite une quatrième
proportionelle aux trois grandeurs z AC^
AB y 160^; & du centre C, avec le rayon
C A , décrire un arc Z) £ , qui ait le nom-
bre de degrés trouvés par la quatrième pro-
portionnelle; alors le fedeur C D £ , avec
le cercle A B , fera une furface propre à
envelopper exadement le cSne propofé,
A-t-on un cône droit tronqué , dont on
voudroit avoir le développement? que l'on
porte le côté de ce cône de A en F ; que
l'on décrive un arc G H avec le rayon F',
& que l'on cherche enfuite une quatrième
proportionnelle à 360*^, au nombre de de-
grés de l'arc G H; &; au rayon C F ; afin
de déterminer par ce moyen le diamètre
du cercle IF^ ôc l'on aura une figure
plane , dont on pourra envelopper le cône
tronqué.
Car C DB A E , enveloppera le cône
entier; C G i*^ J .fl^ enveloppera le cù/ie
S8o C O N
retranché ; il faut donc que DB EHIG
foit propre à envelopper le cône tronqué.
1.°. Les cônes de même bafe & de même
hauteur font égaux en folidité. Foye:^ Py-
ramide.
Or il eft démontré que tout prifme trian-
gulaire peut être divifé en trois pyramides
égales; & qu'ainfi une pyramide triangulaire
eft la troifieme partie d'un prifme de même
bafe & de même hauteur.
Puis donc que tout corps multangulaire
ou polygone , peut être réfolu en folides
triangulaires ; que toute pyramide eft le
tiers d'un prifme de même bafe & de même
hauteur ; qu'un cône peut erre confidéré
comme une" pyramide infinitangulatre ,
c'eft-à-dire , d'un nombre infini de côtés ;
& le cylindre comme un prifme infini-
tangulaire, il eft évident qu'un cône eft le
tiers d'un cylindre de même bafe & de
même hauteur.
L'on a donc une méthode très-fimple
pour mefurer la furface & la folidité d'un
cône : par exemple pour avoir la folidité d'un
cône, il n'y a qu'à trouver celle du prifme
ou d'un cylindre de même bafe &: de même
hauteur que le cône ( Voye^^ PRISME &
Cylindre J ; après quoi Ton en prendra le
tiers , qui fera la folidité du cône ou de
la pyramide. Si la folidité d'un cylindre
eft 6o')'59i96o pies cubes, on trouvera
que celle du cône vaut 201864320 pies
cubes.
Quant aux furfaces , on a celle d'un cône
droit en multipliant la moitié de la cir-
conférence de la bafe par le côté de ce
cône , & ajoutant à ce produit l'aire de la
bafe.
Si Ton veut avoir la furface &c la foli-
(Jité d'un cône droit tronqué AB CD
{fis- 7- ) 5 ^^ hauteur C H &: les diamètres
des bafes A B , CD, étant donnés , on
déterminera d'abord leurs circonférences :
enfuite on ajoutera au quarré de hauteur
Ç H le quarré de la différence A H des
rayons ; & extraifant la racine quarrée de
cjette fomme, on aura le côté A C d\i cône
tronqué : on multipliera enfuite la demi-
fomme des circonférences par le coté A C,
^ cette multiplication donnera la furface du
çgnp tronqué.
CON
Pour en avoir la folidité on fera cVabord
cette proportion ; la différence A H des
rayons eft à la hauteur C^du cône tron-
qué , comme le plus grand rayon AF Q(k
à la hauteur F E à\i cône entier ; cerre hau-
teur étant trouvée , on en fouftraira celle du
cône tronqué , & l'on aura la hauteur £ G du
cône fupérieur. Que l'on détermine pré-
fentement la folidité du cône CED &: celle
du cône AEB , &c que l'on ôte la première
de la féconde, il reftera la folidité du cône
tronqué ACDB.
Sur les ferions du cône , voye^ CONI-
QUE; fur le rapport des cônes &. des cy-
lindres, vojq Cylindre -, & fur les cen-
tres de gravité & d'ofcillation du co.ig,
voyeT^ Centre.
Le nom de cône fe donne encore à d'au-
tres folides, qu'à ceux dont les furfaces font
produites par le mouvement d'une ligne
autour de la circonférence d'un cercle : il
s'étend à toutes les efpeces de corps que l'on
peut former de la même manière , en pre-
nant une courbe quelconque pour circonfé-
rence de la bafe.
La méthode pour déterminer la folidité
d'un cône oblique , eft la même que celle
pour déterminer la folidité du cône droit ;
tout cône en général eft le produit de fa
bafe par le tiers de fa hauteur , c'eft-à-
dire, par le tiers de la hgne menée du
fommet perpendiculairement à la bafe.
Dans les cônes droits , cette ligne eft l'axe
même; dans les autres, elle eft différente
de l'axe.
Mais l'a furface du cône oblique eft beau-
coup plus difficile à trouver que celle du
cône droit ; on ne peut la réduire à la me-
fure d'un feâieur de cercle, parce que dans
le cône obhque toutes les lignes tirées du
fommet à la bafe , ne font pas égales. Voye^
le mémoire que M. Euler a donné fur ce
fujet , dans le tome Ides Nouv. mêm. de Pê"
tersbourg. Barrow, dans fes Lecliones geome-
trlcce , donne une méthode ingénieufe
pour trouver la furface d'un cône qui a pour
bafe une ellipfe, lorfque ce cône fait por-
tion d'un cône droit. Voici en deux mots fa
méthode. Du point où l'ajçe du cône droit
coupe l'ellipfe, il imagine des perpendicu-
laires fur les différens côtés du cône ; &
comme ces perpendiculaires font égales,il n'a
pas
C O N
pa? de peine à prouver que la folicUté du c6n&
elliptique eft égale au produit de fa (urface
par le tiers de l'une de ces perpendiculaires.
Or cette même lolidité eft autîi égale au
tiers de la hauteur du côm , multiplié par la
bafe elliptique. Donc comme la perpendicu-
laire ci-deffus défignée eft à la hauteur du
ro/ze, ainft labafe elliptique eft à la iurface
cherchée.
On appelle en optique , cône de rayons ,
l'aftemblage des rayons qui partent d'un
point lumineux quelconque , & tombent
fur la prunelle ou fur la furface d'un verre
ou d'un miroir. Voye^ Rayon, f OJ
CÔNE, terme de botanique; voyez ci-
après CONTFERE.
CÔNE ( Chymie. ) efpece de moule de fer
fondu , dans lequel les chymiftes verfent les
fubftances métalliques ( appellées régules
dans ce cas ) qu'ils fe propofent de fépa-
rer de leurs fcories par l'opération qu'ils
nomment en latin prcecipitatio fuj'oria.
Foyei RÉGULE , PRÉCIPITATION, &
Fusion.
Ce moule a la forme d'un cône renver-
fé ; &c c'éft de cette forme qu'il tire fon
nom 6c fon ufage. Une fubftance métalli-
que quelconque étant plus pefante que les
fcories dont on la fépare , 6c étant immif-
cibieavec ces fcories, doit, lorfque l'un &c
l'autre de ces corps font en belle fonte dans
un même vaiffeau , en gagner le fond , dès
que le feu ne les agite plus. Et la forme co-
nique du moule dont nous parlons , eft
très-propre à raftembler le régule en une
mafle qu'on peut facilement féparer des
fcories. ( 3 )
CONEPATE ,f. m. ( Hifl. nat.quadr.)
animal quadrupède du Mexique , décrit &
figuré fous ce nom , par Hermandez, dans
fon Hiftoire du Mexique , /?. 3 3 2 , foufrle
nom de conepalt. Catesbi en a fait graver &C
enluminer une bonne figure , fous le nom
et putois d^ Amérique^ dans fon Hi flaire na-
turelle de la Caroline , vol. II -,p, & planche
LXII. M. Brifton dans fon Règne animal
des quadrupèdes , impriméen 1756 ,/». aio ,
le défîgne par le nom à^ putois rayé; muflela
nigra tcenis in dorfo albis , . . . . putorius
ftriatus. Enfin M. de BufFon en a fait graver
deux bonnes figures , au vol. II, page. x^8
de ion Hi flaire naturelle^ édition z/i-/a,
TomeniL
CO N 881
imprimée en 177CS fous le nom de conepate,
C'eft, félon lui, le tepemantla q le Fernan-
dez décrit datis fon }fifloire de lu Nouvelle
Efpagne^page 6^, ri^' 16'.
Cet animal reflemble affez au putois par
la grandeur, mais il a le corps plus ramafte,
le mufeau plus effilé , à-peu-près comme
celui du rat, ou delà iburis, Toeil très-vif.
Sa queue, qui eft tournie de longs poils,
lîérilTés comme ceux du renard, atteint
jufqu a fa tête , c'eft-à-dire , qu'elle eft
auffi longue que fon corps, fur lequel elle fe
relevé en arc , à-peu-près comme celle de
l'écureuil. Ses doigts font au nombre de
cinq à chaque pié , Sc vraifemblablement
tous à la même hauteur.
Il a fur fon poil à fond noir cinq bandes
blanches qui s'étendent longitudinalement
de la tête à la queue.
Variétés. Il paroît que cet animaléprouve
quelques variétés dans (ts couleurs. Celui
qu'on appelle vulgairement fcunck , dans
laNouvelle-Yorck, &: que les Anglois qui
font dans ce pays nomment polekat , 6c
les Suédois fiskatte , eft quelquefois tout
blanc , & pour l'ordinaire noir , avec trois
bandes blanches. Il a la grofleur & la forme
de la martre ^ &: les yeux étincelans la nuit,
C'eft , félon M. de Buffon , cet animal que
le père Charlevoix appelle enfant du diable ,
bête puante. Hifloire de la Nouvelle France ,
volume III, page 33 J. Il a le poil gris
avec deux raies blanches , formant un ovale
fur le dos.
Mœurs. Le conepate fait (qs petits égale-
ment dans des terriers , & dans des creux
d'arbres. Les oifeaux font fa nourriture
ordinaire ; il brife leurs œufs 6c mange leurs
petits. S'il entre dans un poulailler, il y
porte le ravage; il vit auffi d'infeéles 6c de
fruits fauvages.
Cet animal ne répand aucune odeur pen-
dant qu'il eft tranquille , mais lorfqu'il eft
chaffé, foit par les hommes, foit par les
chiens , il court tant qu'il peut , ou grimpe
fur un arbre , 6c lorfqu'il eft trop preffé ,
il commence d'abord comme les chats par
hérifTer fon poil , 6c rehaufler fon corpiS
de manière à le rendre plus étrange par
fa rondeur, 6c plus terrible par fa gran-
deur extraordinaire. Si cet air menaçant ne
uftit pas pour épouvanter fon ennemi , »1
S ssss
88t CON
emploie un moyen infaillible ; il lui préfente
le derrière, &: lui lance tantôt l'urine in-
fefte, tantôt une vapeur qui fort de quel-
ques conduits fecrets , &: qui font l'une &
l'autre d'une odeur fi forte, que l'ait en
efl; empeftë au point qu'elle fuffoque , &
que les chiens font obligés de lâcher prife ;
il y en a cependant qui enfoncent le nez
dans la terre pour renouveller leurs atta-
ques, jufqu'à ce qu'ils aient tué le puant ;
mais rarement par la fuite fe foucient-ils de
pourfuivre un gibier fi défagréable , qui les
fait fouffrir pendant quatre ou cinq heures.
Tous les animaux qui «fe trouvent dans
l'atmofphere de cette vapeur , éprouvent
la même fenfation ; les bœufs èi. les vaches
beuglent en courant de toutes leurs forces.
Kalm nous apprend qu'un de ces puants,
apperçu la nuit dans une cave à fes yeux
ctincelans, par une femme qui le tua , rem-
plit la cave d'une odeur telle, que non,
feulement cette femme en fut malade pen-
. dant quelques jours , mais encore que le
pain, la viande, &i les autres provifions
que l'on confervoit daivs ce fouterrain , fu-
rent tellement infedés , qu'on n'en put rien
conferver , & qu'il fallut tout jeter de-
hors. Une goutte de fon urine qui jailli-
roit dans les yeux , éteindroit la vue ; lorf-
qu'il en tombe fur le« habits , elle leur
imprime une odeur ii forte, qu'il eft très-
difficile de la faire paffer ; il faut plus d'tin
mois pour l'enlever entièrement d'une
étoffe.
Ufages. On apprivoife quelquefois ces
animaux quand ils iont encore jeunes : ils
J&iivent leur maître comme les animaux do-
meftiques , & conservent leur vivacité en
devenant doux. Comme ils ne lâchent leur
urine &: leur odeur infefte que lorfqu'on les
preffe , ou qu'on les bat , ou lors que la peur
eu l'intérêt de leur confervation les forcent
à avoir recours à ce moyen de défenfe , ils
ne font pas incommodes.
Sa chair eft délicate & d*un très - bon
goût , approchant de celui du cochon de
feit. Àufii les Américains en tuent-ils quel-
quefois ; mais ils ont la précaution de les
Yuider auffi-tôt , ou d'en féparer la velîie ,
afin que la chair ne prenne pas l'odeur de
l'urine. Ils en emploient la peau à faire des
kîujcjCes, Les Européens n'en font aucun cas
CON
à caule de fon épaifleur &c de la longueur de
fon poil.
Remarques. Le conepatc a comme l'on
voit , beaucoup de rapport avec le putois,
par la grandeur , la forme &: l'odeur , & il
en feroit une efpece , s'il avoit comme lui
le cinquième doigt ou le pouce plus haut
que les autres doigts; mais comme tous les
auteurs qui l'ont décrit ou figuré , fe taifent
fur ce caraftere plus effentiel qu'ils ne l'ont
cru, & que leurs figures les placent tous à
la même hauteur , nous penfons qu'il pour-
roit faire un genre d'animal particulier ,
voifin du putois & de la civette, dans la
famille que j'appelle \a famille des chats ou
des lions. { M. Adanson. )
* CONFARRÉATION , f. f. ( HijL
anc. ) cérémonie romaine qui confiftoit à
faire manger , en préfence de dix té-
moins , d'un pontife , ou d'un flamine
diale , d'un même pain ou gâteau aux
perfonnes que l'on marioit , &: qui defti-
uoient leurs enfans au facerdoce. Voye:^
Mariage.
La canfarréation étoit la plus facrée des
trois manières de conférer le mariage, qui
étoient en ufage chez les Romains : elle étoit
appel'îée confarréation , du gâteau falé , à
farre & molâfald. Cette cérémonie fouf-
traifoit une fille à la puifïance paternelle :
elle ne dura qu'un temps. Quand un mariage
contracté par la confarréation lé rompoit ,
on difoit qu'il y avoit diffarréation. On
offroit auffi dans la diffarréation le gâteau
lalé.
La confarréation & la diffarréation avoient
chacune leur formule &; leur cérémonie. On
prétend qu'on répandoit fur les viâiimes une
portion du gâteau.
^ONFECTEUR, cenfeâor , { Hiftoirc
ancienne. ) forte de gladiateur chez les an-
ciens Romains , qu'on louoit pour fe battre
dans l'amphithéâtre contre les bctes féroces»
Foyei Gladiateur.
Les confecieurs s'appelloient ainfi, ^ coU'
ficiendis bejiiis^ à caufé qu'ils maffacroient
& tuoient les bêtes. Les Grecs les appel-
loient '7rtt.§ci^K9i , c'eft- à-dire , téméraire ,>
déterminé ; d'où les Latins ont emprunté les
noms et p arabe lani &: de parabolarii. Les
chrétiens étoient q^uelquefois condamnés à.
CON
ces fortes de combats. Voye:^^ le Diction, de
Trévoux & Chamhtrs. (G)
CONFECTION , f. f. ( Pharm. ) On a
donné en pharmacie le nom de confection
à certaines compofitions officinales qui font
du genre des éleéluaires dont elles ne diffé-
rent ni par leur confiftancej ni par le ma-
nuel de leur préparation. Voye\ ÉLEC-
TUAIRE.
On trouve dans les dirpenfaires un aïTez
grand nombre d'éleâ:uaires décrits fous le
nom de confection , qui prefque tous font
ftomachiques & cordiaux ; ce qui feroit
croire que c'étoit principalement à ceux de
cette efpece qu'on donnoit originairement
ce nom. Il ^tn trouve cependant auffi , mais
très-peu , qui font narcotiques : il y en a
même un qui eft purgatif.
De toutes les conférions décrites dans la
pharmacopée univerfelle de Lémery (en-
viron 30) , il n'y en a que trois qui foient au-
jourd'hui en ufage parmi nous ; fa voir la con-
fection hyacinthe & alkermhs , qui font
toutes deux réputées cordiales &: ftoma-
chiques , & la confection tiamec qui eft pur-
gative. Nous allons donner la compofition
de ces trois préparations.
Confection hyacini/ie réformée de Lémery.
1^ des hyacinthes préparées , une once &
oemie ; du corail rouge préparé , de la terre
figillée, du fantal citrin , de chacun une
once ; de la rapure de corne de cerf, fix
gros ; de l'os de cœur de cerf, de la racine
de tormentille , de fraxinelle , des feuilles de
diftame de Crète , du faffran , de la myrrhe ,
des rofes rouges , des femences d'ofeille ,
de citron , de pourpier , de chacun trois
gros ; des yeux d'écreviftes- préparés quatre
fcrupules ; «Jesécorces extérieures de citron ,
d'orange aigre , de chaque quatre fcrupules ;
du mufc , de l'ambre-gris , de chacun dix
grains ; du (irop de kermès , une once ; du
ifirop d'œillet , trois liv. ^V. B. que la livre
dont fe fert Lémery n'eft que de douze
onces.
Si jamais les médecins galéniftes firent une
préparation monftrueufe , on peut bien dire
que c'a été la confection d'Iiyacinthe : tous les
éloges qu'on lui a donnés, & qu'on lui
donne encore tous les jours, ne font rien
en fa faveur ; & malgré les corredlions qu'on
a faites à la defcrrption que nous avoient
C O N S83
laifTée \e% anciens, on peut afîurer hardi-
ment que cet élecluaire ne peut pas avoir
une grande vertu , fur-tout à la dofe où on
le donne ordinairement : il liiffit pour s'en
convaincre de jeter les yeux fur la nature
des poudres, & fur la quantité & la qualité
qui fert à les incorporer.
La poudre eft compofée de végétaux, à
qui l'on a accordé une vertu aftrigente ,
tels que la tormentille , les rofes rouges ou
cordiales , tels font la racine de fraxinelle ,
le fantal citrin , le faflfran , les feuilles de
diftame , le myrrhe ; pu enfin vermifuge ,
(car on attribue auifi cette propriété à' la
confection hyacinthe ) comme les fem.ences
de citron, de pourpier, d'ofeille : les autres
poudres font réputées abforbantes ; &C
quelques-unes le font en efi>2t', favoir ,
le corail &c les yeux d'écreviftes , la corne
de cerf & l'os du cœur du même animal ,
font du genre des remèdes qu'on appelle
incrajfans.
Il y a une autre efpece d'ingrédiens dont
les vertus médicinales, je crois , ne font pas
trop bien connues; je veux dire les terres
argileufes , qui font le bol d'Arménie & la
terre figillée.
Je ne parle point de l'ambre-gris ; ni du
mufc ; on ny en met jamais.
Quant aux pierres précieufes qui entroient
autrefois dans cette préparation , Lémery
les a toutes retranchées à l'exception des
hyacinthes. Je ne fais pas trop pourquoi il a
fait grâce à celles-ci : les raifons qui ont fait
rejeter les émeraudes , les faphirs , dévoient
faire rejeter aufli les hyacinthes ; mais fans
doute -que comme elles donnent leur nom
à cette confection^ il n'a pas ofé les en bannir.
La poudre qui réfulte des ingrédiens
énoncés , & qui eft connue dans les bouti-
ques , fous le nom d'efpece de confection
hyacinthe , pourroit avoir de bons effets
dans certains cas , donnée au poids d'un
demi-gros ou d'un gros : mais il n'arrive
jamais qu'on prefcrive ces efpeces ; on a
toujours recours à la confection^ c'eft-à-dire
à une petite portion de la poudre , & une
très-grande au contraire de firop. En effet,
la dofe ordinaire de ce remède étant d'un
gros , le malade à qui on le prefcrit ne prencï
que 12 grains de la poudre , & 60 grains
de iiiop. Ajoutez à cela, que la plupart
Sssss z
884 9 ^ N.
de celle qui fe débite à Paris, &c qui vient
pour la plupart de Montpellier & de Lyon ,
eu faite avec le iirop de limon , firop acide
qui ne manque pas de faturer les alkalins
terreux , fur la vertu defquels on ne peut
plus compter. 11 eft vrai que la plus grande
parue des apothicaires de Paris, conformé-
ment à la defcription corrigée par Lémery
ne fe fervent que deiîrop d'osiUet, ou même
d'un firop blanc , c'eft-à-dire , fait avec
l'eau commune & le fucre ; en ce cas les
abforbans confervent toute leur propriété :
mais comme il en entre une fi petite quan-
tité dans la dofe que l'on prelcrir ordinaire-
ment de cette confidion , on ne doit pas
beaucoup compter fur eux.
La cQn/ec/ionkyacinihepzffe pour fortifier
le cœur, l'eftomac & le cerveau; elle tue
les vers, & a, dit-on, la propriété d'arrê-
ter le cours de ventre & le vomiiTement.
On pourroit en faire prendre hardiment
jufqu'à une demi-once ; à cette grande dofe
même , le malade ne prendroitque 48 grains
delà poudre.
Confection alkcrme. La confcciicnalkerme
étoit aufii dans fon origine une préparation
très-imparfaite ; & Méfué qui en eft l'auteur ,
y avoit fait toutes les fautes que feront
toujours ceux qui mélangeront différentes
drogues fans être infiruits des principes
de la chymie. En effet cet auteur faifoit
infufer de la foie crue , teinte avec le ker-
mès , dans du fuc de pommes & dans de
l'eau-rofe ; il faifoit enfuite cuire avec du
iucre cette infufion en canfiftance de firop :
quoi de plus contraire à l'art que d'em-
ployer de l'eau-rofe , que l'on doit enfuite
faire évaporer ? Pourquoi falloit-il que la
foie fût teinte avec le kermès } ne valoit-il
pas mieux fe fervir du kermès lui-même. De
quelle utilité peut être une infufion de foie ?
Il y a long- temps que Zwelfera fait fentir le
ridicule d'une pareille préparation , &: à pré-
fent il n'eft plus queftion dans les boutiques,
de la confeclion alkcrme de Méfué ; plufieurs
auteurs l'ont corrigée ; nous allons la donner
telle qu'elle eft dans la pharmacopée de Paris.
If. grains'de kermès une once , fantal ci-
trin une once & demie , bois d'aloès demi-
once, bois de rofe un, gros & demi, des
rofes rouges fix gros, de la canelle trois
onces 3 du caffia-lignea trois gros, ^elaco-,
CON
chenille deux gros , des perles orientales pré-
parée§ , du corail rouge préparé , de chaque
une once, des feuilles d'or un fcrupule ;
faite 5 du tout une poudre fine .-enfuite prenez
firop de kermès quatre onces , que vous
ferez chauffer au bain- marie , & pafferez à
travers un tamis ; après quoi ajoutez-y fucre
blanc une demi-once ; faites un peu épaiifir
le firop, &: y ajoutez lorfqu'il fera prefque
refroidi de la poudre fufdite quatre gros :
mêlez bien le tout, & la confection fera faite.
On a rejeté avec raifbn de cette compofi-
tion le lapis la\uli , toujours au moins fuf-
peâ: par le cuivre qu'il contient , malgré la
correélion prétendue opérée par fa calci-
nation.
Les feuilles d'or font fans doute deman-
dées ici pour fuivre un ancien ufage, car
jamais or ne fut fi inutilement employé.
La dofe de cette confcBion cft d'un demi-
gros, mais on pourroit hardiment la poulTer
jufqu'à demi-once; car on n'apperçoit pas
les inconvéniens qu'il y auroit à craindre
de l'adminifiraLion d'une pareille dofe , &
l'on peut obferver en général que les méde-
cins font trop timides dans l'adminiftration
des remèdes purement altérans , & que c'eft
parce qu'ils ne \ts donnent qu'à de tiès-
foibles dofes, que ces remèdes font le plus
fouvent inutiles.
• La confection alkerme efl: un affez bon
ftomachique & cordial : c'efl à ce dernier
titre qu'elle efi: le plus communément en
ufage : elle entre prefque dans toutes les po-
tions cordiales, &: fait un ingrédient très-
utile.
Confection hamec de Lémery : prenez de
raifins mondés une demi-livre , du poly-
pode de chêne concafTéune once & demie ,
de l'épythimie une once, des feuilles d'ab-
fynthe , de rofes rouges , de thym , des f e-
mences d anis , de fenouil , de la fumeterre ,
de chacun demi-once; du gingembre ôc du
fpicanard, de chacun deux dragmes ; faites
bouillir le tout dans trois pintes de petit-
lait & une pinte d'eau de fumeterre , jufqu'à
diminution de moitié ; difix)lvez enfuite
dans la colature bien exprimée , du miel
écume &: du fucre blanc , de. chacun une
livre & demie ; cuifez le tout enfuite jufqu'à
la confifiance d'un élecluaire mou; puis,
après avoir retirée la baffine de defîus le
C O N
feu , di/Toîvez-y de la pulpe de cafTe huit
onces , de celle de pruneaux fix onces ; ajou-
tez-y fur la fin de poudre de myrobolas ci-
trins ,de féné mondé , de chacun trois onces ,
de l'agaric trois onces , des trochifques
alhandal, de la rhubarbe, de chacun une
once & demie ; de la fcammonée , femence
de violette, de chacun une once; du fel
de fumeterre Ôscd'abfynrhe , de chacun trois
gros : faites-en une conficîion félon l'art.
La confocrion hamcc eil un purgatif hydra-
gogue très-efficace , à la dofe de deux gros
jufqu'à fix ; elle a été fur-tout célébrée pour
les maladies vénériennes &; les maladies de
la peau : mais fa grande amertume en rend
l'ufage prefque impoffible à la plupart àts
malades, b)
CONFÉDÉRATION, f. f. {Gramm.\
Jfifi. anc. & moâ. ) alliance ou ligue entre '
djfférens princes & états. Voye\ LlGUE &
Alliance.
Confédération fe dit aufli en Pologne ,
pour les ligues ou aflbciations que font
entr'eux les nobles & les grands en Pologne ,
même fans l'aveu du fouverain, &: quel-
quefois contre (qs vues , pour maintenir la
liberté de la république. Ce mot efl: tiré du
latin cum , avec , enfemble ; &c fœdus ^
alliance ou traité. ÇG^J
CONFÉRENCE, f. f. (Jurifprud.) 2.
dans cette matière deux fignifications diffé-
rentes. Il fe prend pour le rapprochement &
la comparaifon qui eft faite de différentes
loix. Il y a, par exemple, des conférences
du droit romain avec .le droit françois , une
conférence à^s ordonnances, oiiGuenoisa
rapproché les difpofitions des différentes
ordonnances qui font intervenues fur chaque
matière , une conférence des coutumes par
le même auteur , pour faire voir le rapport
& la diverfité des coutumes entr'elles ;une
conférence de Bornier fur les ordonnances
de Louis XIV , où il a rapporté fous chaque
article les difpofitions des anciennes ordon-
nances , &; plufîeurs autres conférences feiA-
blables.
Conférence fe prend au/fi , en termes de
palais , pour une ailemblée compofée de
magiftrats ou d'avocats, & quelquefois des
uns &c des autres, dans laquelle on traite
des matières de jurifprudence.
On peut voir dans M. Auzanet, les mi-
CON 885
moires & arrêtés qui font fortis des confé-
rences célèbres qui fe tenoient chez M. le
premier préfidentde Lamoignon, pour par-
venir à rendre la jurifprudence uniforme :
les conférences de la bibliothèque publique
de l'ordre des avocats font auffi connues ;
une partie des queffions qui y ont été
agitées dans le commencement de fon infti-
tution, a été imprimée & inférée dans le
fécond tome des œuvres de M. Duplefîls,
fous le titre de confuUations. {^ )
CONFÉRER, ÇJurifpr.J on ait tnm2.'
tiere bénéhciale conférer un bénéfice , c'eft-
à-dire , en donner des provifions. Les pa-
trons laïques & eccléfiaftiques qui n'ont
que la fimple nomination ou préfeatation,
ne confèrent pas le bénéfice , non plus que
ceux q^ui. ont fimplement le droit d'élec-
tion ; il n'y a que le collateur ordinaire ou
le pape qui confère véritablement, ^oye^^
BÉNÉFICES COLLATIFS , & ci- devant
Collateur, Collation. f^J
CONFESSEUR, f. m. (Hl^I. eccléf &
T/î^Wo^. J chrétien qui a profeiïé hautement
&: publiquement la foi de Jéfus-Chrifi:, qui
a enduré des tourmens pour la détendre
jufqu'à la mort exclufivement, & qui étoit
difpofé à la fouffrir.
On donne à un faint le nom de confef-
feur^ pour le diftinguer des apôtres, des
évangéliftes , des martyrs , &c, Voye^
Saint & Martyr.
On trouve fouvent dans l'hiftoire ^clé-
fiaftique le mot confejfeur , pour fignifier
un martyr. On a donné dans la fuite ce
nom à ceux qui , après avoir été tourmentés
par les tyrans, ont vécu & font morts en
paix. Enfin on a appelle confejfeurs ceux
qui après avoir bien vécu, font morts en
opinion de fainteté.
On n'appelloit point, dit S. Cyprien ,du
nom de confejfeur , celui qui fe préfentoit
de lui-même :au martyre & fans être cité,
maison le nommoix profeffeur. Si quelqu'un
par la crainte de manc/jer de courage &C
de renoncer à la foi , abandonnoit fon bien ,
fon pays , &c. &. s'exiloit lui-même volon-
tairement , on l'appelloit extorris , exilé.
Confejfeur eft auflî un prêtre fécuiier ou
religieux, quia pouvoir d'ouir les pécheurs
dans le facrement de pénitence, Si de leur
donn«r rabfolution.
S8(5 C O N
L'églife l'appelloit en latin confeffarîus ,
pour le diftinguer de confcjjor , nom con-
facré aux faints. Les confcjj&urs des rois de
France , fi an en excepte l'illuftre M. l'abbé
Fleiiry , ont été conflamment Jéfuites , de-
puis Henri IV. Avant lui, les Dominicains
& les Cordeliers étoient prefque toujoius
confijjeurs des rois de France. Les confej-
fcurs de la maifon d'Autriche ont auffi été
pour l'ordinaire des Dominicains & de^
Cordeliers ; les derniers empereurs ont jugé
à propos de prendre des Jéfuites. Diclionn.
di Trév. & Ckambers. ÇGJ
CONFESSION, f. f. (Hift. eccléf, &
Théolog.) eft une déclaration , un aveu , une
reconnoiflance de la vérité , dans quelque
fituation que l'on ie trouve.
La confejfion , dans un fens théologique ,
eft une partie du i'acrement de pénitence :
c'eft une déclaration que l'on fait à un prêtre
de tous (e^ péché« pour en recevoir l'abfolu-
tion. Foye\ ABSOLUTION.
La confejfion doit être vraie , entière , dé-
-taillée , & tout ce qui s'y dit doit être en-
ieveii dans un profond filence , fous les
peines les plus rigoureufes contre celui qui
iera convaincu de l'avoir révélée. VoycT^
RÉVÉLATION. Elle eftdedroitdivin nécef-
faire à ceux qui font tombés après le bap-
tême. Elle étoit autrefois publique ; mais
l'églife pour de très-fortes raifons , ne l'exige
plus , depuis un grand nombre de fiecles ,
Ôc n'a retenu que la confejfion auriculaire
qui eft de toute ancienneté.
Les théologiens catholiques & les con-
troverfiftes, comme Bellarmin , Valentia,
&c. foutiennent que fon ufage remonte
jufqu'aux premiers fiecles. M. Fleury avoue
que le premier exemple de la confejfion gé-
nérale que l'on trouve , eft celui cîe S. Eloi ,
qui étant venu en âge mûr , confefta devant
un prêtre tout ce qu'il avoit fait depuis fa
jeuneffe. Mais il paroît par les pères grecs des
premiers fiecles , & même par l'hiftoire de
Neélaire , fi fouvent obje^lée aux catholi-
ques , par les proteftans, que la confejfion
auriculaire étoit en ufage dans l'églife dès
la première antiquité. L'églife affemblée
dans le concile quatrième de Latran (^année
121 5J â ordonné que tout fidèle qui feroit
parvenu à l'âge de difcrétion , confeflferoit
CO N
Anciennement les meubles de celui qui
étoit mort après avoir refufé de feconfeffer,
étoient confifqués au profit du roi, ou du
iéigneur haui-jufticier, ainfî qu'il eft dit
dans les établifiTemens de S. Louis, c. 89.
Quand quelqu'un étoit décédé inteftat ,
ou fans avoir laifTé quelque chofe à l'églife,
on appelloit cela mourir déconfés , c'eft-à-
WxQ^fans confejfion. Le défimt étoit pré-
fumé ne s'être point confefTé, ou- au cas
qu'il fe confefTât, on lui refufoit l'abfolu-
tion, s'il ne donnoit rien à l'églife : ainfi il
étoit toujours réputé mort déconfés , c'eft-
à-dire , fans conjéffion, Voyei les notes de
M. de Lauriere , fur le chapitre Ixxxix ci-
devant.
Il étoit d'ufage de temps immémorial
dans les provinces de France qui font ré-
gies par le droit coutumier , de ne point ac-
corder la confefjîon aux criminels qui étoient
condamnés à mort; quoique dans les pays
de Languedoc & ailleurs elle ne leur fût
point refufée.
L'ufage particulier du pays coutumier
fut condamné par le concile de'^'ienne, &
le pape Grégoire XI en écrivit à Charles V
pour le faire abolir. Philippe de Mazieres ,
l'un ét% confeillers de ce prince, lui per-
fuada de faire réformer cet ûfage qui lui
paroifToit trop dur, à quoi Charles V étoit
toutdifpofé : mais ayant fait mettre lachofô
en délibération dans fon parlement, il y
trouva tant d'oppofition, qu'il déclara qu'il
ne changeroit rien là-defTus de fon vivant.
Les repréfentations qui furent faites fur
cette matière par le feigneur de Craon à
Charles VI l'engagèrent à afTembler les
princes du fang , les gens dugrand-confeil ,
plufieurs confeillers du parlement , du châ-
telet , & autres , par l'avis defquels il donna
des lettres le 12 février 1396, qui abolif-
fent l'ancienne coutume , ordonnent d'offrir
le facrement de pénitence à tous ceux qui
feront condamnés à mort, avant qu'ils par-
tent du lieu où ils font détenus , pour être
menés au lieu de l'exécution; & il efl
enjoint aux miniftresde la juftice , d'induire
les criminels à fe confefTer , au cas qu'ils
fuffent fi émus de trifteffe qu'ils ne fongeafTeat
point à le demander.
Cette loi fut pratiquée <îès 1397 pour
fès péchés au moins une fois l'an, f ^ J 1 des moines qui avoient accufé faufiement
C ON
le duc d'Orléans d'avoir jeté un fort fur
Charles VI.
L'ordonnance de 1670 , tu. xxvj. art. 4.
porte que le facrement de confejjlon fera
offert aux condamnés à mort, & qu'ils feront
affiftés d'un eccléfiaftique jufqu'au lieu du
fupplice.
li n'eft pas permis à un confeflTeur de ré-
véler la confejjlon de fon pénitent , &: il ne
peut y être contraint. Can. Jacerdos , diji.
vj. & capit. omnis extra depœnit. & rcmlf-
Jionib. f^ojeiPapon , liv. XXIV. tit.vij.
Carondas , rep. liv. VII ^ ch. clxxviij.
Un confeiïeur n'eft pas non plus tenu ,
& ne doit pas révéler les complices du cri-
minel qu'il a confefTé, parce qu'outre le
fecret qu'exige la confefjîon , une telle ré-
vélation ne feroit qu'un oui- dire qui ne
feroit pas une preuve contre les complices :
M. d'Héricourt tient mêifie que l'on ne
pourroit pas fe fervir contre un accufé d'un
papier fur lequel il auroit écrit fa confejjion ,
quoiqu'il s'y reconnût coupable du crime
dont il feroit accufé. {A)
Les Indiens, au rapport de Tavernier,
ont auffi chez eux une efpece de confejjlon
& de pénitence publique. Il en en de
même des Juifs. Ces derniers ont des for-
mules pour ceux qui ne font pas capables
de faire le détail de leurs péchés ; ils en ont
d'ordinaire une compofée félon l'ordre de
l'alphabet : chaque lettre renferme un péché
capital, & qui fe commet le plus fréquem-
ment. Ils font ordinairem.ent cette confejfion
le lundi , le jeudi , & tous les jours de jeûne ,
aufîi bien que dans d'autres occafions. Quel-
ques-uns la difent tous les foirs avant de fe
coucher, & tous les matins quand ils fe
lèvent. Lorfque quelqu'un d'eux fe voit
près de la mort, il mande dix perfonnes
plus ou moms félon fa volonté, dont il faut
qu'il y en ait un qui foit rabbin , Se en leur
préfence il récite la confejfion dont on vient
de parler. Voye^ Léon àk Modene, cér&m.
des Juifs.
Confejfion defoi,e{ï une lifte ou dénom-
brement &: déclaration des articles de la foi
de l'églife. Voje^ Foi.
La confejjlon d'Ausbourg eft celle des
Luthériens , préfentée à Charles-Quint en
Î530. F<?ytf{^ Au GS BOURG.
* £ Au concile de Riraini les Ariens
C O N 8S7
préfenterent aux évêques catholiques une
formule ou confejjlon de foi , qui portoit
en tête: Le 21 mai 359, fous le confulat
de .... & ils vouioient qu'on fe contentât
de cette formule , fans avoir égard aux pré-
cédens conciles , & à toutes les autres
formules. Les évêques orthodoxes recon-
nurent facilement par l'infcription ou date ,
que c'étoit la dernière formule de Sirmich
qui étoit mauvaife. Ils la rejetèrent &
fe moquèrent avec raifon de l'infcrip-
tion : înfcriptionem quce prcejixa erat fidei
fupra recitatœ magnopere dérijerunt , dit
Socrate dans fon Hifioire cccléjîafiiquc ,
livre II , chap. 37.
Confession, terme de Liturgie & d'hif-
toire eccléjiaflique , étoit un lieu dans les
églifes , placé pour l'ordinaire fous le grand
autel , où repofoient les corps Aqs martyrs
& des confefleurs. Diction, de Trév. &
Chambers. {G)
Confession, ( Jurifprud.J eft une
déclaration ou une reconnoifiance verbale
ou par écrit de la vérité d'un fait.
La confejfion faite en jugement eft appel-
léejudiciclle ; elle a lieu dans les déclara-
tions qui font faites par une partie à l'au-
dience ou dan5 un interrogatoire , foit en
matière civile ou criminelle.
Lorfqu'elle eft faite hors jugement ,
comme dans un aéle devant notaire, elle
appellée extrajudicielle.
En matière civile , la confejfion judicielU
fait une preuve complète contre celui qui
l'a faite ; confcjfus in judicio pro judicato
habeiur , l. ff. de confejf. mais elle ne nuit-
point à un tiers. *
On ne divife point ordinairement la con-
fejfion en matière civile , c'eft-à-dire , que
celui qui veut s'en fervir ne peut pas en in-
voquer ce qui eft à fon avantage , & rejeter
ce qu'il croit lui être corîtraire ; il faut ou
prendre droit par toute la déclaration , ou:
ne s'en fervir aucunement. Henrys rapporte
néanmoins dans fa ftxieme queftion pof-
thume , deux cas où la confe^ion fe divife^
en matière civile j favoir , lorfqu'il y a une-
forte préfomption contraire au fait que l'oii'
ne veut pas divifer , ou lorfqu'on a une
preuve teftimoniale de ce même fait. Ul
* y a même la loi x^yC.dernier^S'. depo^t^
888 C O N
qui permet de divifer la déclaration , cela
dépend des circonftances.
Au contraire en matière criminelle on
peut divifer la confejjion de l'accu Té ; mais
elle ne fert pas de conviftion parfaite contre
lui , parce qu'on craint qu'elle ne foit l'effet
du trouble 6^ du défefpoir ; elle fait feule-
ment un commencement de preuve, &
peut donner lieu de faire appliquer l'accufë
à la queflion , quand il fe trouve d'ailleurs
quelques autres indices contre lui : en quoi
notre jurifprudence eft beaucoup plus îage
que ceÙe de bien d'autres nations. Par exem-
ple, chez les Juifs on condamnoit à mort
un accufé fur fa feule déclaration , fans
qu'il fût befoin de témoins : c'eft ce que
nous apprenons dans l'évangile , oii l'on
voit que Jéflis-Chrift ayant répondu qu'il
étoit le Fils de Dieu , les princes des prêrres
s'écrièrent: Qiiidadhuc dejîderamus tejiirno-
nium ? ipjicnim audivimus de ore tjus. Ce
fut fur cette réponfe qu'ils condamnèrent
injuftement comme coupable, celui qui eft
la juftice & la vérité même.
Il en étoit de même chez les Romains ;
l'accu fé pouvoit être condamné fur ia feule
déclaration , de même que le débiteur en
matière civile.
La confcjfion faite par un accufé à la quef-
tion, peut être par lui révoquée, fans qu'elle
foit confîdérée comme un nouvel indice ni
comme une variation de fa part ; on pré-
fume que la violence des tourmens a pu
lui faire dire des chofes qui ne font pas
véritables.
Pour ce qui eft de la confejjion que fait
un'criminel condamné à mort , elle ne fait
pas preuve contre un tiers , parce que le té-
moignage d'un criminel condamné ejR: fuf-
peél, & qu'il pourroit par défefpoir &: par
méchanceté chercher à envelopper dans fon
malheur quelques perfonnes auxquelles il
voudroit du mal; fa déclaration fait feule-
ment un commencement de preuve.
Pour que l'on puiffe tirer avantage d'une
conjejfion contre celui qui l'a faite , il faut
qu'elle ait été faite librement par une per-
fonne capable ; de forte que fi c'eft un mi-
neur, il faut qu'il foit afllfté de fon tuteur
où curateur ; fi c'eft un fondé de procu-
ration , la procuration doit être fpéciale : il
faut aufli que la confejjion foit certaine &
C O N
déterminée , qu'elle concerne un fait qui
ne foit pas évidemment faux, &c qu'il n'y
ait pas erreur dans la déclaration.
Enfin fi la confejjion , même en tnatiere
civile, eft faite devant un juge incompé-
tent, elle n'emporte pas condamnation,
elle fait feulement un commencement de
preuve. Il en eft de même de la confejjion
faite hors jugement.
C'eft encore une maxime en matière de
confejjion ou reconnoifiance , que qui nort
poîijrdare , nonpotefl confiteri j c'eft- à-dire ,
qu'on ne peut pas avantager par forme de
recounoift^ance des peribnnes prohibées ,
auxquel'esil eft défendu de donner. V^oye:^
la loi I. & J. 6* /. J . § 3 .Jf. de conjejj: la
loi unique au code eod. l. penult. ff. de
cejj. bon. & l. 66^. jj. de re judic cap, iv
extrade jud. Chorier furGuypape,/?. j//,
Boyer, dlcij. Z2)9- Belordeau /^f/. C. art,
I '. Henrys, iome I. llv. IV. ch. vj. quefî,
86\(A) ^ ^
CONFESSIONNAL , f. m. (Hlfl. eccU-
faft.J eft une efpece de niche en boiferie ,
fermée d'une porte à jour ou grillée , ÔC
plricée dans une églife ou une chapelle, où
le confefteur eft affis pour entendre les pé-
nitens , qui fe placent à genoux dans deux
autres niches en prie-dieu , ouvertes , & pra-
tiquées aux côtés de la niche du confefteur ,
qui les entend par une petife fenêtre grillée.
CONFESSIONISTES ou PPvOTES-
TANS , fub. m. pi. f ifi/?. eccléf) Luthé-
riens ainfi appelles de la confeffion de foi
qu'ils préfenterent à l'empereur Charles-
Quint à Augsbourg en 1530, d'oij on
l'a nommée la conjejjion d" Augsbourg ,
Sleidan. Les catholiques allemands ne les
nommèrent point autrement dans les ades
de la pabi de Weftphalie. Voyei^ CONFES-
SION d'AuGSBOURG, au mot AuGS-
BOURG. Voyei û'î/^ProTESTANS. f G J
CONFESSOIRE, {Jurijprud.) voyei
Action confessoire.
* CONFIANCE ,{.i.{ Gramm. ) eft un
effet de la connoiffance &: de la bonne opi-
nion que nous avons des qualités d'un être
relatives à nos vues , à nos befoins , à nos
deffeins, & plus généralement à quelque in-
térêt marqué , qui confifte à nous en repofer
fur lui quelquefois plus parfaitement que
fur nous-même , de ce qui concerne cet
intérêt
C ON
intérêt. Cette définition eft générale , &
peut s'appliquer à confiance prifë au fimple ,
& confidérée par rapport aux êtres intelii-
gens & aux êtres corporels.
* CONFIDENCE , f. t (Gramm.) eft
un effet de la bonne opinion que nous
avons conçue de la difcrérion & des iecours
d'une perlbnne, en conféquence de laquelle
nous lui révélons des choies qu'il nous im-
porte de laifîer ignorer aux autres; d'où il
s'enfuit que la confidence, perd fon carac-
tère, & cèlfe plus ou moins à marquer de
l'eftime , à mefure qu'elle devient plus
géiiéiale.
Confidence, (Jurifpr.) eft une paftion
fimoniaque & illicite , & une elpece de
fidéicommis en matière bénéficiale , qui a
lieu lorfque le titulaire d'un bénéfice ne l'ac-
quiert qu'à condition de le conferver à un
autre, 6>c de lui réfigner dans \in certain
temps; ou lorfqu'il conferve le titre pour
lui , mais à la charge de donner les fruits
du bénéfice en tout ou en partie au réfi-
gnant , au collateur, ou à quelque autre
perfonne défignée dans la convention.
On dit communément que la confidence
efila fœur de la Jîmonie , parce qu'en effet
rien n'approche plus de la (imonie que la
confidence ^ &: qu'il y a de la fimonie dans
ces fortes de padions , puifque c'eft traiter
de quelque chofe de l'pirituel pour un objet
temporel.
Le premier exemple que Ton trouve de
confidence en matière de bénéfice , eft celui
du nonce Tryphon, lequel en 918 confen-
tif , contre les règles, de n'être ordonné
que pour un temps patriarche de Conftan-
tinople , Sl d« remettre cette dignité à
Théophilafte fils de l'empereur Romain I ,
dit Lecapcne, quand il feroit en âge de la
pofîeder. Il n'avoir alors que leize ans.
On voit aulii dans Froiffart un autre
exemple fameux de confidence , qui eft à
peu près du même temps que le précédent.
Herbert, comte de Vermandois, s'étant em-
paré de l'archevêché de Rieims pour fon
fils Hugues qui n'étoit encere âgé que de
cmq ans, convint avec Odalric , évêque
d'Aix , que celui-ci feroit les fondions
épifcopales de l'archevêché de Rheims juf-
qu'à ce que Hugues fût en âge ; & en
actendant on accorda à Odalricla jouiffance
Tome VIII,
C ON 889
de l'abbayis de S. Thimothée, avec une
prébende canoniale.
Ce défordre fut fort commun en France
dans le xvj fiecle, & fur-tout vers la fin;
plufîeurs grands bénéfices , & même des
évêchés , étoient poffédés par des féculiers ,
par des hérétiques , par des femmes , aux-
quels certains eccléfiaftiquesconfidenti aires
prêtoient leur nom.
Cependant les loix canoniques &c civiles
fe font toujours élevées fortement contre
un fi grand abus.
Le concile de Rouen, tenu en 1501 ,
oblige les confidentiaires , & même leurs
héritiers , à reftituer les fruits qu'ils ont
induement perçus.
Les bulles dé Pie IV & de Pie V des
17 oftobre 1564, & «5 Juin 1569, mar-
quent les préfomptions par leCquelles on
peut établir la confidence ; favoir , 1'*'. lorf-
qu'après la réfignation le réfignant continue
à percevoir les fr^iits du bénéfice ; 1^. fi le
réfignataire donne procuration au réfignant
ou à (qs proches pour padèr les baux du
bénéfice, & en recevoir les fruits ; 3^^. ii
le réfignant fait tous les frais des provihons,
& autres expéditions de fon réfignataire ;
4^. fi celui qui a employé le bénâ^ce pour
un autre , ou qui s'y eft employé, s'ingère
enfijite dans la difpofition des chofes qui
concernent le bénéfice.
Mais comme ces bulles n'ont point été
reçues en France , ni enrégiftrées dans au-
cune cour fouveraine, les juges qui connoif^
fent des conteftations où il peut fe trouver
des queftions de confidence ^nQàoiVQwi ad-
mettre que les préemptions qui font de
droit commun; il faut qu'elles foient juris
& de jure : or la troifieme de celles qui font
marquées dans les bulles dont on a parlé
eft fort équivoque , fur-tout fi c'étoit un
oncle qui eût fait les frais des provifions
pour fon neveu ; & que celui-ci n'eût aucun
bien ; la dernière de ces préfomptions eft
très-foi ble : cela dépend donc beaucoup ûqs
circonftances & de la prudence du juge.
Le concile de Bourges, tenu en 1584,
déclare les bénéfices , obtenus ou donnés
par voie àb confidence, vacans de plein droit,
&: oblige à la reftitution ceux qui en ont
perçu les fruits ; &: non feulement il prive,
les confidentiaires de tous les bénéfices ou
Ttttt
g5?o C O N ^ C O N
penfions qu'ils poiTcclent, mais même les! en fcene ; Couvent même la fimplicité de la
déclare incapables d'en obtenir d'autres. fable , la pompe du fpeâiacle , &, comme
L'édit du mois de Septembre 1606, art.
I , porte que pour ôter les crimes de (imo-
nie & de confidence^ qui ne font que trop
communs en ce royaume , fi quelqu'un eft
déformais convaincu pardevant les juges
sauxquels la connoiiTance en appartient, d'a-
voir commis fimonie, ou de tenir bénéfices
en confidence , il fera pourvu auxdits béné-
fices comme vacans , incontinent après le
jugement donné; favoir par nomination du
roi , fi le bénéfice efl du nombre de ceux
auxquels il a droit de nommer par les con-
cordats ; ou par les ccllateurs ordinaires ,
s'ils dépendent de leur collation.
Cette difpofition fe trouve rappellée dans
Y art, 18 de l'ordonnance de 1669 ; elle
veut de plus qu'il foit procédé févérement
contre les perfonnes qui auront commis les
je l'ai dit , !a néceflité de remplir un théâ-
tre immenfe , qui fi^ns cela auroit paru
défert, foilicitoient ce concours de témoins;
&c'eft ce qui formoit le chœur. Mais le
chœur n'étoit pas feulement occupé à rem-
plir l'intervalle des a£i:es par ks chants &
fa patitomime , il étoit confident de la
fcene , & alors un feul de (ts perfonnages
parloit au nom de tous.
Son emploi le plus important étoit de
former l'intermède. Frappé de ce qu'il avoic
il entretenoit par (es réflexions 6c
vu
par fes chants pafiionnés , l'émotion des
fpeélateurs; il réfumoit la moralité de l'ac-
tion théâtrale , & la gravoit dans les efprirs;
ami des bons , ennemi des médians , il con-
foloit les malheureux , vifiimes de leiu- im-
prudence , ou jouets de la deftinée. Le
crimes de fimonie & de confidence , &c que i chœur avoir donc fon avantage comme té
les preuves de ces crimes.foient reçues (iii- : moin, ou nécefiairejou vrairemblable;mais
vanr les bulles & confiitutions canoniques ; comme confident intime, il étoit fouvent
jfurce faites; ce qu'il faut néanmoins entendre déplacé. II. eft dans les mœurs de tous les
feulement des bulles reçues dans le royaume.
Peleus, ^^^y?. i2y y dit qu'on ne peut con-
traindre un confidenîiaire à réfigner un
pays & de tous les temps , d'avoir un ami ,
ou un homme affidé à qui Ton fe confie ;
mais il ne fera jamais vraifemblable qu'on
bénéfice, à moins qu'il n'y ait une promefife prenne un peuple pour confident de fes
par écrit ; &i en efi^et, on n'eft pas admis à
vérifier la confidence par la feule preuve tef-
limoniale ; mais el!e efi: admile Icrfqu'il y
a un commencement de preuve par écrit ;
autrement il feroit prefque toujours impof-
fible de prouver la confidence ^ attendu que
ceux qui la commettent ont ordinairement
foin de déguifer leurs conventions , 2* de
cacher la confidence.
Le juge royal peut connoitre de la con-
fidence incidemment au pcfTefToire du bé-
néfice.
Le titulaire confidentiaire ne peut pas
s'aider de la pofl^efiîon triennale , parce
qu'il n'eft pas pofi[ibIe qu'il n'ait eu con-
noiffance de la confidence. Rebuffe , de
vacif. poffejf. 2 ai. (AJ
CONFIDENT, te, fubft. fPoc/T^ Dra-
matique. ) Dans la tragédie ancienne il y
avoit deux fortes de corfidens ; les uns pu-
blics, les autres intimes. Parla nature de
l'aftion théâtrale, qui étoit communément
une calamité ou quelqu'événement politique,
une foiUe de témoins y pouvoient être mis
fecrets les plus intimes, de fes crimes les
plus cachés , comme dans l'Orefte & la Phè-
dre. Il n'eft pas plus naturel <le voir une
troupe de gens témoins des complots les plus
noirs, & des crimes les plus atroces, ne ja-
mais s'oppofer à rien, ck fe lamenter (ans
agir.
Le partage étoit fait naturellemenr , & de
lui-même , i\ Euripide eût voulu l'obferver^
entre la nourrice de Phèdre & le chœur
ô.es femmes de Trézene : celles-ci doivent
être confidentes de l'égarement, de la dou-
leur hc des remords de Phèdre, fans en
favoir la caufe; mais la honte de fa palîion,.
la noirceur de fon impofture, ne dévoient
être révélées qu'à fa nourrice , c'eft une
diftinflion que les Grecs n'ont jamais faiie
avec aftez de (bin.
Notre théâtre , en renonçant à l'ufage du
chœur, aconfervéles((9A-yz../f/zjllnrimes,mais
il en a porté l'abus jufqu à un excès ridicule.
On aura de la peine à croire que jufqu'aux
premières pièces de Corneille , les nourrices
dans le tragique, comme les fer vantes dana
C O N
le comique, étolent toujours !e m^meper-
fonnanie , fous le nom à'AUfon^ ck qu'A-
lifon ccoit un hoinine avec un mafque &
des habits de femme.
Depuis Corneille , le perfonnage des
confidinus , comme celui des confidcns , a
été décemment rempli ; mais fi les. grands
poètes ont fu y attacher de l'importance &
de rincérêt , comme au perfonnage de Néar-
que dans Polieufte , d*Exupere dans Héra-
clius, de Pilade dans Andromaque, d'A-
comat dans Bajazet, de Narcille dans Bri-
tannicus , d'Œnone dans Phèdre , d'Omar
dans Mahomet , &c. ils ont auffi quelque-
fois eux-mêmes trop négligé ces rôles fu-
balternes ; & cette négligence efl: de tous
leurs exemples le plus fidèlement fuivi.
Dans la tragédie , comme dans les vieux
romans , prefque pas un héros ne paroît
fans un conjidint à fa fuite, & ce confident
eft communément aufli dénué d'efprit que
d'intérêt : il ne fait prefque jamais que
penfer, ni que dire : rien de plus froid que
{^s, réflexions, rien de plus mal reçu que
ÎQS, avis. Comme le héros doit toujours
avoir raifon , le confident a toujours tort,
ôc l'un brille aux dépens de l'autre. Le plus
fouvent le confident ne hazarde quelques
mots que pour donner heu à réphque ,
& pour empêcher que la fcene ne foit un
trop long monologue; tantôt il fait d'avance
tout ce qu'on lui apprend , tantôt il n'a
aucun intérêt à le favoir ; fans pafilions &:
fans influence , il écoute pour écouter ; &:
l'on n'a d'autre raifon de l'inftruire de ce
qui fe paflTe , que le befoin d'en inllruire le
fpeftateur.
Mais c'eft bien pis lorfque le confident
fe mêle de fe paflionner : fes furprhes ,
fes alarmes , fes exclamations : Quoi fei-
gneur! Mais feigneuri O cieli eft-
il pofiible ! deviennent encore plus
ridicules par le ton faux & l'aâiion gauche
qu'il y met. En général plus une adion efi
vive 6c pleine , moins e;le admet de confi-
dens. Voy. ci-dej[us CrœvR. (M.Mar-
MONTEL.)
CONFIDENTIAIRE, voye^ Part, pré-
cédent Confidence (Jurifpmd.)
CONFIGURATION , f. f. (Phyfiq.)
forme extérieure ou furface qui borne les
C O N 891
'corps, Scieurcionne une figure particulière.
Foj'f;^ Figure 6- Surface.
Ce qui fait la diifércnce fpécifique entre
les corps, félon plufieurs philofophes, c*eft
la ^\yex(é confi'^uration t<. la diverfe fitua-
lion des parties. Selon ces phi'ofopiies , les
élémens de tous les corps font les mêmes ;
par exemple , ceux de l'or & du plomb : la
différente manière dont ces élcmens font
arrangés , eft tout ce qai conftitue la difl^é-
rence de l'or & du plomb. Voilà pourquoi!
Defcartes difoit : Donnez-moi de la matière
& du mouvement ^ & je ferai un monde -^
ce que nous expliquerons plus bas.
Le fentîment des philoTophes dont il
s'agir n'eft pas (ans vraifeniblance-, quelle au-
tre diff^érence pouvons-nous imaginer entre
les corps , que cel!e qui réfulte de la figure
& dé la dlfpofition différente de leurs par-
ties? Car en vertu de cette différence , ils
pourront, 1°. réfléchir des couleurs diffé-
rentes, &: par conféquent être différemment
colorés, voje^ Couleur; 2,*^. lip^ourront
avoir différens degrés de molefle , de du-
reté , ou d'élaflicité. VoyeT^ ces mets. Ce-
pendant cette hypothefe pour expliquer la
différence des corps, élude la queftion plu-
tôt qu'elle ne la réfout , il refte toujours
deux difficulrés confidérables. En premier
lieu, on peut demander quels font en géné-
ral les élémens ou particules compofantes
des corps ; fi l'on dit que ce font des corps,
on n'avance point ; car ces corps auront
eux-mêmes des particules ou élémens , &
ne feront point par conféquçnt les particu-
les ou élémens primitifs des corps qui tom-
bent fous nos fens : fi Ton dit que ce ne
font point des corps , on dit une abfurdité;
car comment concevoir qu'avec ce qui n'eft
point corps , on fafte un corps .'' Des deux
côtés les diflicultés font à-peu-prcjs égales,
yoye:{ CORPS.
En (écond lieu , fuppofons que les par-
ticules des corps foient des corps ; ces
particules (uit-c'les une dureté primitive,
ou leur vient-elle de la preflîon du fluide ?
d^ux qucftions également difficiles à ré-
Ibudre. f^oye:^ l'article DuRETÉ.
Il réfulte de ces réflexions, que nous
ne voyons & ne connoiffons , pour ainfi
lire, que la furface des corps, encore très-
imparfaitement , 6c que le tifl^u intérieur
Tt ttt 1
Spi C O N
nous en échappe : c'eft fans doute parce '
qu'ils nous ont été donnés uniquement pour
nos befoins & qu'il neû pas nëceflaire pour
nos befoias que nous en fâchions davantage.
Au refte , quand Defcartes difoit, don-
nez-moi de la matière^ &:c. ce grand philo-
fophe ne prérendoit pas nier, Gommeront
ait quelques impofteurs, que la matière
fût créée , ni qu'elle eût befoin d'un fou-
verain moteur; il vouloit dire feulement
que ce fouverain moteur n'employoit que
la figure & le mouvement pour compo-
fer les différens corps ; mais cette opéra-
tion eft toujours l'ouvrage d'une intelli-
gence infinie.
Configuration, (Aflronom.) fitua-
tion des planètes les unes par rapport aux
autres, fe dit principalement des fateltires
tie Jupiter , que l'on ne pourroit diftinguer
l'un de l'autre, fans le fecours d'une figure
où leurs fltuations refpe6live;s font mar-
quées ; on la trouve pour tous les jours
dans Xa ÇonnoïjJ'ance, des temps , dans le
■NauiicMIf^lmanach , & dans les Ephémé-
rides de Vimm.
Pour former ces configurations , on fe
contente de calculer , une fois le mois ,
les longitudes des fatellites vues de Ji.piter,
par le moyen des tables qui fe trouvent
clans M. Cafîîni, & dans mon expofition
du calcul afironomique : le refte fe fait par
le moyen d'un inftiument de l'invention
de M. Caffini,que. nous appellonsyW/7^3e,
& qui eft repréfenté dans nospL d'^flron.
fig, 6 , Suppl. des planches. On voit d'a-
bord l'éclipîique divifée en douze (^^v\es :
une alidade tranfparente, que l'on fait ordi-
nairement de corne , & qui eft repréfentée
par ACB ^ tourne autour du centre CT; elle
ie place fur le point ^,011 répond la lon-
gitude géocentrique de Jupiter ,. connue par
une épiiéméride , ôsc s'arrête au moyen
d'une pince marquée en -D., La figure fup»-
pofe, par exemple, la longitude de Jupiter
de 9' li^ pour le premier mai 1759. Les
quatre cercles intérieurs font des cercles de
carton qui doivent être mobiles autour du
c-entre C; \U repréfentent les orbites des
quatre fatellites, divifées en jours , par les
tables dont nous venon dé parler. On cal-
cule par ces mêmes tabv s la longitude jovi-
«entrique de. chacun des-quatre fatellites,
C ON
pour le premier jour du mois ; on trouve,
par exemple, pour le premier mai 1559,
les longitudes fuivantes , o^ 24^^ pour le 4*
fatelhte; 2* 25"^ pour le y^ y 11^ pour le
2^, & 10' 13 «1 pour le premier; on place
le chiffre i de chaque cercle vis-à vis de cette
longitude calculée; le chiffre 1 de l'orbite'
du 4« fatellite répond à o^ 24^, &c. alors
la firuation du point i par rapport à l'ali-
dade ACB, fait voir la firuation appa-
rente à chaque fatellite par rapport à Jupi-
ter , le premier du mois , pour un obfer-
vateur qui eft fîtué fur le prolongement de
l'alidade ACB toujours dirigée vers la terre.
La fituation des points marqués 2 fur cha-
cune des quatre orbites , fait voir la pofî^
tion des quatre fatellites le 2 à pareille heure;:
il en eft de même à tous les autres jours du
mois. Par ce moyen l'on formera la confia
guraiion des quatre fa'tellites , telle qu'on la*
voit fur la ligne E F ^ au bas de la figure 5,
où Jupiter eft fuppofé en /; le point 4 de
l'orbite du troificme fatellite étant de huit
lignes â droite de l'ahdade AB , m'apprend
que je dois placer le troifieme fatelhte huit
hgnes à gauche de Jupiter, fur la ligne des-
bandes E F, c'eft-à-dire , fur le prolonge-
ment d'une ligne obfcure que l'on apper-
çoit dans le miheu du diîque de Jiipiter:.
elle eft dirigée fenfiblement dans le fens de
l'équateur de Jupiter. Voye^ RoTATiON,
& dans le plan des orbites des quatre fatel-
lites, quiparconféquent ne quittent runais^
fi ce n'eft d'une > rès-petite quantité ,1a ligne^
droite paralte'e aux bandes de Jupiter: l'on
figurera ainfi Jupiier accompagré de fes^
quatre fatelliies , à-peu-près ttl qu'il paroî^
dans une lunette de quinze pies, qui ren-r
verfe les objets. Les cercles font difpofés
pour une figure, redreflee.
Les fatellites i & 3 font au-deftbus de la>
ligne des bandes , parce qu à caufe de l'in-.
clination d&fi orbites., les fatellites paroiA--
fentun peu vers le nord dans un des demi-
cercles de leur révolution : tant que le.
fatellite eft entre los i.^^- & 4* 15*^ de lon^-
gitude ;.ou au defîbusde. la ligne des nœuds.
N N, que nous avons marquée fur le jovi*»
labe ,. il paroit toujours un peu plus fep--
tentrional que l'orbite de. Jupiier , &: cela,-,
d'autant plus , qu'il eft plus éloigné deSi
points A^5, ou de la ligne NN,.
C O N
Le chifFre qui indique le fa^ellite fiir la
Egne de configuration , le met enn e Jupiter
& le point qui marque le place du fatellite ,
quand on voit fur le jovilabe que !e fatellite
fe rapproche de Jupiter , comme da^^s notre
figure : au contraire , on met le chef au delà
du point , quand le fatellite s'éloigne de
Jupiter.
On comprendra la raifon de ces configu-
rations^ 'en confidérant que la ligne C A
marque le rayon qui va de notre œil au
cçntre de Jupiter; la ligne C B marque le
rayon qui va de Jupiter à la terre : ainfi
les fatellites nous pa-'oîtront plus ou moins
éloignés de Jupiter , fuivant qu'ils feront
plus ou moins éloignés de l'alidade BCA
fiir laquelle nous voyons toujours le cen-
tre de Jupiter; il n'importe point qu'ils foient
plus ou moins avancés le lon'j: de cette ligne
C ^ ; il ne s'agit que de leur diftance à l'ali-
dade ou à la ligne. On marque dins les
configurations les temps oi!i chaque fatellite
paroi: fur le difque de Jupiter, ou fe trouve
caché derrière le difque ; cela eft facile ,
parce que la largeur de l'alidade eft égale
à celle de Jupiter même : ainfî quand le
point eft fous l'alidade , on juge que le
fatellite eft derrière Jupiter , ou qu'il pa-
roît fur fon difque.
On trouvera dans la féconde édition
de mon Ajlronomic , un femblable inftru-
ment pour faire la configuration des fatel-
tites de faturne ; mais on en fait fi rare-
ment ufage , & on les voit fi difficilement ,
qu'il feroit inutile d'en placer ici la defcrip-
tion. {M. DE LA Lande.)
CONFINER un héritage ou un terri-
toire , {Juri/pr.) c'eft en marquer les con-
fins ou limites. Voye^ ci-après CoNFiNS.
Anciennement confiner fignifioit quelque-
fois reléguer quelqu'un des confins d'un cer-
tain territoire. Voye\ BanNIR. (A)
CONFINS , f. m. pi (Jurifpr.) font les
hmi'.es d'un héritage, d'une paroifie , ou du
territoire d'u le dîmerie , d'une feigneurie ,
juftice , &c. fines agrorum feu territorù. Il
ne faut pas confondre les bornes avec les
confins. On entend par confins lei 1 mites
d'un -héritage ; au lieu que les bornes font
à^s figues extérieurs qui fervent à mar-
quer les limites.
La loi des douze tables avoit ordonné de
C O N 8;^^
laifter'un efpace de cinq pies de large entre
tes héritages appartenans à différentes per-
fonnes ; ce qui formait un fentier de com-
munication par lequel chacun pouvoir aller
i fon héritage , & même tourner tout-
autour , fans palier fur celui du voifin. Ces
fentiers étoient appelles viœ agrariœ , &. cet
efpace de cinq pies ne pouvoir être p"ef-
crit.ll paroit que l'objet des décemvirs, en
obligean' chacun delaifl'ercet epace autour
de fon héritage, étoit que l'on pw faci-
lement labourer à la charrue fans anticiper
fur le voifin , & aufli pour que la diftinc-
tion des héritages fût mieux nurqiiée. Il y
a apparence que les deux propriéu^.ires qui
avoient un héritage contigu à l'autre, dé-
voient laifier chacun la moitié de cet efpace
de cinq pies.
Mamilius , tribun du peuple , fit dans la^^
fuite une loi appellée de ion nom Ma.mUia,.
& par corruption , qui conformem..'nt à la^
loi des douze tab'es , ordonna qu'il y
auroit un efpace de cinq à fix pies entre
des fonds voifins l'un de l'autre , & qui
régloit les différends qui s'élevoient à c©
fujet entre des particuliers.
Il eft auffi parlé de cet efpace de cinq
pies dans la loi dernière au code Théodo-
îien , finium regundorum., qui en ce point
paroit avoir fuivi la- lo^i des douze tables.-
La loi quinque pedum^ nu coàe Jinium'
regundorum.^ énonce auffi que l'eipace de
cinq pies qui fépare les héritages , ne peut
pas fe prefcrire ; ce qui fuppofe que cet
ufage de laiflerun efpace de cinq pies entre ;
les héritages étoit encore obfervé.
11 étoit cependant d'utage de mettre des ,
bornes chez les Romains; ce qui femble-
roit fuperflu au m. «yen de cet efpace de cinq
pies , mais les bornes pouvoient toujours
fervir à empêcher que l'on ne déplaçât le
fentier de féparation.-
Quoi qu'il en fbit , il eft certain que
depuis l^ng-temps il n'eft plus d'ufage que
les différens propriétaires d'héritages voi-
fins laifiént un eîpace entre leurs hé; itages,-.
à m.oins que l'un ne faileune muraille ou--
un f()fTé,.oune plante une haie ; hors ce-'
cas , chacun laboure- jgîqu'à l'extrémité de-'
fon héritage , ce qui ne fe peut faire à la-^
vérité Ikns que la m; itie de ia charrue pofe^
fur l'héruage du voifin ; ce qyi eft regardé-'
S9^ CON
comn''e une fervitude néceiTiIre &c réci-
proque entre voifins.
Les autres clifpofitions du tkrc fini um
rtgundorum , font que dans une vente l'on
ne coniîdere point les anciens confins ^\w?m
ceyx qui ibnt défignés par le contrat , parce
que le propriétaire qui vend une partie de
Ton fonds peut changer les limites ou con-
fins , & les déterminer comme il le juge à
propos ; qu'ils peuvent pareillement chan-
ger par le fait &: le confentementdes diffi-
rens propriétaires qui fe fuccedent ; que
quand il s'agit de régler les confins ou limi-
tes , on a égard à U propriété & polTeffion,
& que pour la mefiire des terres le juge
commet un mefureur (ce que nous appel-
Ions aujourd'hui arpenteur ^^ l'ur le rap-
port duquel il ordonne enfuite que les bor-
nes feront pofées ; que fi pendant le pro-
cès l'un des contendans anticipe quelque
choie fur l'autre, il fera condamné non feu-
lement à rendre ce qu'il a pris , mais encore
à en donner autant du fien \ qu'on peut fe
pourvoir pour faire régler les C9nfins lorf-
qu'il s'agit d'un modique efpace de terrain ,
de même que s'il étoit plus confidérable ;
enfin, que l'on ne prefcrit les confins ou
limites que par l'efpace de trente ans.
La pofition des confins peut être établie
de trois manières , ou par les bornes , ou
par titres , ou par témoins ; par bornes ,
lorfqueron en reconnoît qui ont été mifes
d'ancienneté, voyeT^ BoRNES; par titres,
lorfque l'étendue de l'héritage ou du terri-
toire y eft marquée ; & par témoins , lorf-
que les témoins difent que de temps immé-
morial , ou depuis un tel temps , ils ont
toujours vu un tel jouir , labourer , ou di-
mer jufqu'à im tel endroit.
On entend auffi fouvent par le terme de
confins , les tenans &: aboutifl^ans, c'eft-à-
dire, les endroits auxquels un héritage tient
de chaque côté. Il y a des confins immua-
bles, tels qu'un chemin, une rivière ; d'au-
tres font fujets à changer, tels que les hé-
ritages des particuliers; non feulement il
arrive changement de propriétaire & chan-
gement de nom , mais fouvent même les
héritages qui confinent changent de nature ;
une pièce de terre eft partagée en plufieurs
portions , ce qui étoit en bois ou vigne eft
mis en terre, aut contra \ c'eft pourquoi
CON
on ne rai:ro!r avoir trop d'attention à b'eri
expliquer tout ce qui peut défigner les cor fins.
Il eft même bon de marquer les anciens
& nouveaux conf.ns , c'cft-à-dire , d'expli-
quer que l'héritage tient à un tel , qui
étoir au lieu d'un tel. Il y a des terriers
où l'on* appelle ainfi les confins de l'un à
l'autre , en remontant jufqu'au titre le plus
ancien.
Pour mieux reconnoître \es confins ," xi
faut les orienter , c'eft-à-dire , les défigner
chacun parafpe(5i du foleil ; par exemple,
en parlant d'un héritage ou territoire , on
dira: tenant d'une part ^ du côté d'orient y
au chemin qui conduit de lieu à tel autre ;
d'un bout , du côté du midi , à la rivière ;
d'autre part du coté d'occident , à Pierre
ViaLircl ^ au lieu de Simon Hugonet , qui
étoit au lieu de Jean ; d"" autre bout , du
côté du fcptentrion , a la terre de Nicolas
Rocke , qui étoit ci-devant en bois.
L'ufage de marquer les confins dans les
terriers n'a commencé que vers l'an 1300 »
& en d'autres endroits vers l'an i4')0.
L'ordonnance de 1667 , tit. ix , art. j ,
veut que ceux qui forment quelque de-
mande pour des cenfives ou pour la pro-
priété de quelque héritage, rente foncière,
charge réelle , ou hypothèque , déclarent,
à peine de nullité , par le premier exploit ,
le bourg , village ou hameau , le terroir
ou la contrée , où l'héritage eft fitué, fa
confiirance , fes nouveaux tenans & abou-
lifTans , du côté du feptenirion , midi ,
orient, occident , &c. enforte que le dé-
fendeur ne puide ignorer pour quel héri-
tage il eft aftigné.
Dans les déclarations ou reconncifl^ances,
aveux Si dénombremens , contrats de
vente, baux à rente , échanges, baux à
ferme , & autres aftes concernant la pro-
priété ou pofieflion d'un héritage ou ter-
ritoire , il eft également important d'en
bien déMgner les confins , pour en aflurer
l'étendue. (A)
CONFIRE, v. aa. ( Confifeur. ) c'eft
donner à un fruit , à une plante , ou à une
herbe une forte de préparation , en Tin-
fufant dans du fucre , firop, eau-de-vie , ou
vinaigre, pour leur donner un goût agréa-
ble , ou pourles conferver plus long-temps.
Voyei CoKFiT & Confiture.
CO N
CONPIRE , terme de Chamoifeur , Pel-
leterie , &c. c'eil donner une certaine pré-
paration aux peaux de mouton, d'agneau,
de lièvre , &c. dans une cuve appeilée
confit , avec du Tel , de l'eau , de la farine,
&c. Ainii , l'on dit , // faut confire ces
peaux c'eft-à-dire , il faut les mettre dans
le confit avec les ingrédiens néceflaires pour
les préparer. Voyei CfiamoiSEUR.
CONFIRMATION, f. f. (Théolog.J^
facremçnt de la loi nouvelle , qui , outre la
grâce fandifiante , confère à l'homme bap-
tifé des grâces fpéciales pour confeffer cou-
rageufement la foi de Jefus-Chrift ; c'efl: la
définition qu'en donnent quelques théolo-
giens catholiques.
Ils font divifés fur ce qui conftitue la
matière effentielle de ce facrement; les uns
veulent que ce foit la feule impofition des
mains , &: que l'ondlion du fainf chrême
ne foit que matière accidentelle ou inté-
grante ; c'eA le fentiment du P. Sirmon &
de M. de Sainte-Beuve. Les autres comme
Grégoire de Valence foutiennent que les
apôires employoient & rimpofirion des
mains & l'ontiion du chrême > mais que
l'ondion eft devenue par l'ufage matière
eifentielle, & l'impofition des mains matière
accidentelle : d'autres réuaiffent en quelque
forte ces deux fentimens , en fou tenant
que l'impofition des mains & l'onftion du
faint chrême font également matière effen-
tielle. Enfin , un quatrième fentiment veut
que Jefus-Chrift ait inftitué l'un &: l'autre
comme matière , en laiifant à l'églife à
ufer félon fa. fageiïe de l'une ou de l'autre.
De ces fentimens le troifieme efi le plus
généralement fuivi.
Selon celui qu'on embralfe fur la matière
de ce facrement , on en prend un fur f!i
forme , c'eft-à-dire , fur l'oraifon ou la prière
qui accompagne rimpofition des mains ou
l'onction du faint chrême.
Parmi les Grecs & dans tout l'orient ,
on donne ce facrement immédiatement
après le baptême ; m;iis dans l'églife d'oc-
cident , on le réferve jufqu'à ce que les
enfans aient atteint l'âge de raifon.
Quoiqu'on trouve des preuves très-fortes
de Ion exiflence dans les aclcs des apôtres ,
ckap. vij^verf. 74 & fuiv. & chap.xlx,
Vtrf, i , Ô£ de fa pratique ou adminiftra-
C O N 895
tion dans Tertullien , /. du baptême , chap,
vij de la réfurreclion de la chair ^ ch. vij ;
dans S. Cyprien, épit. 73 , à Jubaïen, 6*
epifl. y G 2. Janvier dans S. Jérôme, dialog.
contre les lucifériens ^ dedans S. Auguftin,
liv, XV de la Trinit, ch. xxi'j , les luthé-
riens 6>c les calviniftes n'ont pas laiffé que
de le retrancher du nombre des facremens.
II paroît par toute l'antiquité , que les
évêques ont toujours été en droit de con-
férer le facrement de confirmation ; faint
Cyprien & la plupart des pères marquent
très-diftinftement la tradition &: l'ufage de
la confirmation ^ par l'impofition des prélats
de l'églife , depuis les apôtres jufqu'à eux.
M. Feury , & la plupart des théologiens
modernes établiffent comme un caraéltre
diftinftif entre les fondions des prêtres ou
des diacres , & celles des évêques , que les
premiers puiffent adminiftrer le baptême, au
lieu qu'il n'appartient qu'aux évêques de
conférer la confirmation en qualité de fuc-
cefiTeurs des apôtres.
Il eft- certain que parmi les Grecs , le
prêtre qui donne le baptême confère auflî
la confirmation', & Luc Holftenius afifure
que cet ufage eft fi ancien dans l'églife
orientale , que le pouvoir de confirmer eft
devenu connne ordinaire aux prêtres qui
l'ont reçu des évêques. Delà, pour ne pas
condamner la pratique de cette églife , les
théologiens penfent que l'évêque eft le mi-
niftre ordinaire de la confirmation , & que
les prêtres peuvent la donner , & l'ont fou-
vent donnée comme miniftres extraordi-
naires, & par délégation. La confirmation
eft un des trois facremens qui impriment
caradere. VoyeT^ CARACTERE.
On donnoit autrefois la confirmation aux
fêtes folemnelles de Pâque & de la Pente-
côte 5 &: aux approches de la perfécution.
Le concile de Rouen prefcrit que celui qui
donne la confirmation , & ceux qui] la
reçoivent foient à jeum Sur les cérémo-
nies qui appartiennent à l'admlniftration
de ce facrement, on peut voir les anciens
rituels & les théologiens qui en ont traité.
{G)
Confirmation, {Belles-Lettres) en
rhétorique , eft la troifieme partie d'un
difcours , félon la divifion des anciens , dans
laquelle l'orateur doit prouver par loix >
Sc^6 C O N
raifons , autorité ou autres moyens , la
vénré des faits ou des propositions qu'il a
avancés, fol*^ dans la narration , ibit dans fa
divifion. C'eftceque nous 3.ppe]\ons preiivcs
6c moyens. K. DjscourS 6- OraiSON.
La co/7firmniion ei\ direéle ou indireéle :
la prefniere renferme ce que l'orateur a
avancé pour fortifier fa caufe ou dévelop-
per fon fujet : la féconde , qu'on appelle
autrement confutation & réfutation , eft !a
réplique aux obje^f^ions de la partie adverfe.
Voyei Confutation & Réfutation.
On comprend quelquefois ces deux parties
fous le titre général de contention.
Cette partie. eft comme l'ame de l'orai-
fon ; c'eft fur elle qu'eft fondée la princi-
pale force des argumens ; c'efl pourquoi
Ariilote l'apelle t//*; , fides, ce qui fait
impreflîon fur l'efprit des auditeurs , &
concilie leur créance à l'orateur. C'efl: la
partie la plus effentielle de l'éloquence ;
toute l'adrelTe &: toute la force de l'art y
font renfermées , car elle confifte prin-
cipalement à convaincre & à émouvoir.
Dans toutes les quellions qu'on y traire , il
faut autant qu'il eft poffible , remonter à
un principe lumineux , le préfenter à fes
auditeurs par tous les côtés qui peuvent
le faire connoître , &: ne le point quitter
qu'on ne l'ait placé dans fon véritable jour.
On doit defcendre enfuite aux conféqiien-
ces par un chemin droit , & par des liai-
fons naturelles , enforte que l'on voie la
conclufion naître du principe établi dans le
commencement. Ainfi, le but de la confir-
mation eft de prouver une cliofe qui paroît
douteufe , par une autre qui eft tenue pour
certaine.
La forme des preuves eft différente, Se
l'art de l'orateur confifte à entremêler les
enthymêmes aux exemples , aux induftions,
aux dilemmes , & à les revêtir de figures ,
pour ne leur pas donner un air uniforme
qui déplairoit inf^lliblement.
Mais en raffemblant tous les argumens
qui établiflent fa caufe , l'orateur doit être
attentif à les arranger dans un ordre conve-
nable, en mettant au commencement & à
îa fin les meilleures preuves , & les plus
foibles dans le milieu ; c'eft le fentiment de
Cicéron dans fon traité de l'orateur. (GJ
CONFIRxMER , ( Jurifprud. ) c'eft aé-
C ON
clarer ou reconnoître valable un a fie. Une
donation ou un teftament font confirmés par
l'acquief'cement que l'on donne à leur exé-
cution ; ils font aufïi confirmés, & d'une
manière plus fbienmelle , lorfqu'ayant été
débattus de nullité en juftice , il intervient
un jugement qui les déclare valables , &
en ordonne l'exécution.
Le roi confirme des ftatuts & privilèges,
^ autres aifles , par des lettres-patentes;
mais il faut obferver qu'il y a deux maximes
en fait de confirmation : l'une eft que , qui
confirmât nihiL dat , c'eft-à-dire , que la
confirmation n'ajoute rien à ce qui efl con-
firme y fi ce n'eft l'approbation & l'autorité
qu'elle y donne.
La féconde maxime eft, que la fîmple
confirmation d'un aifte qui efi nul de plein
droit ne le rend pas valable, à moins que
l'approbation qui eft faite de l'afte ne fbit
émanée de celui qui avoit intérêt de le con-
tefter ; par exemple , fî le fils exhérédé a
approuvé le teftament de fon père, il ne
peut plus intenter la querelle d'inofficiolîté.
Lorfqu'il y a appel d'une fentence , le
juge fupérieur peut la confirmer ou l'infir-
mer , fi l'appel efl pendant devant une cour
fouve raine : lorfque l'on confirme la fen-
tence, on prononce que la cour met l'appel-
lation au néant , & ordonne que ce dont
el^ appel fortira fon plein & entier effet,
& elle condamne l'appellant en l'amende
& aux dépens ; néanmoins en matière de
grand criminel , la cour , lorfqu'elle con^
firme, dit feulement qu'il a été bien jugé,
mal & fans grief appelle.
Cette dernière forme de confirmer eft la
feule dont les juges inférieurs puiffent ufér>
fpit en matière civile ou criminelle.
On peut confirmer un jugement ou autre
a6le, dans une partie , &: l'infirmer ou dé-
fapprouver dans l'autre.
Voje:^ au code 5 , tit. xvj , /. 74, & ai^
jf. xy, tu. ix,L2. ,& lib. XXIX, tit. vij ,
/. 7, 6- lib. XXXVII, tit. xiv, l.fin.
Dumoulin iwxVart. 5 de Cane. coût, verbo
dénombrement, nn. 8 y &f. Mornac, adleg,
dcjuiifd. & le Prêtre , cent. 4, ch. xlv. {A)
Confirmer i^/i cheval, [Manège.) c'efl
achever de le drefler aux airs du manège.
Voyei Air , Manège , &c. ÇVJ
CONFISCATION , f. f. f /«/-//>r.) eft
l'adjudication
C O N
i*adiuclîcatîon qui fe fait d'une chofe au pro-
fit du fifc , ou de ceux qui en ont les droits ;
c'eft une peine prononcée par les loix
contre ceux qui font coupables de quelque
délit , & qui eft plus ou moins étendue
félon la nature du délit : cetre peine s'étend
fur les héritiers du criminel qui font privés
<ie Tes biens ; ce que l'on a ainfi établi pour
contenir d'autant plus les hommes dans le
devoir , par la crainte de laifTerleur famille
dans l'indigence.
Ceft un ufage reçu chez toutes les na-
tions, mais pratiqué diverfeînent félon les
temps, les lieux &:les circonftances.
Chez les Romains , la confif cation fut
inconnue dans l'âge d'or de la république ,
comme le remarque Cicéron dans l'oraifon
pro domofuâ : Tarn modtratajudiciapopuLi
funt à majorihus conftltuta , ut nepoina ca-
pitis cum pccunïa conjungatur.
Ce fut pendant la tyrannie de Sylla que
l'on fit la loi Cornelia, de profcript, qui
déclaroit les enfans des profcrits incapables
de poiTéder aucune dignité , & déclaroit les
biens confiqués.
Sous les empereurs la confifcatïon des
Kens avoit lieu en plufieurs cas , qui ne font
pas de notre ufage : par exemple , tous les
.'biens acquis par le zx\\x\q kiox^wK confif qués ;
la dot de la femme étoit confifquée pour le
délit du mari ; celui qui avoit accufë ( fans
le prouver ) un juge de s'être Laiffé corrom-
pre dans une affaire criminelle , perdoit fes
biens; il en étoit de même de l'accufé qui
avoit laide écouler un an fans comparoître ,
& fes biens ne lui étoient point rendus,
quand même par l'événement il auroit
prouvé fon innocence : la maifon ou le
champ dans lefquels on avoit fabriqué de la
fauffe monnoie étoient confifqués , quoique
le délit eût été commis à l'infu du proprié-
taire. On confifquoit aufli les biens de ceux
qui n'étoient pas baptifés, de ceux qui con-
fultoient les arufpices , d'un curateur nommé
par coUufion aux biens d'un mineur ; d'un
décurion qui avoit commerce avec fa fer-
vante ; les maifons où l'on avoit tenu des
affemblées illicites , & où l'on faifoit des
facrifices prohibés; celles où l'on jouoitaux
chevaux de bois , qui étoit un jeu défendu ;
les biens de ceux qui fouffroient que l'on
commît fornication dans leur maifon, ou
Tome, VIII,
C O N 897
dans leur champ , de ceux qui étoient con-
damnés aux mines, & de ceux qui fréquen-
toient les fpe<n:acles un jour de dimanche.
On voit par ce détail, que les loix ro-
maines étoient plus féveres que les nôtres
dans bien des occafions ; mais la plupart des
empereurs ne fe prévale ient pas de la ri-
gueur de ces loix. Trajan remettoit entiè-
rement la peine de la confifcatïon ; ce qui
lui a mérité ce bel éloge de Pline : quce pm-
cipua tua gloria efi^fizpius vincitur fifcus ^
eu; us mala caufa nuj'quam e/i ni/ifub bono
principe.
Antonin le pieux en faifoit don aux en-
fans du condamné ; Marc Antonin leur en
remettoit la moitié. Il eft fait mention dans
le digefte de bonis damnât, l. 7. § 3. dune
loi par laquelle Adrien avoit ordonné que
Ç\. un homme condamné à mort laiffoit un
enfant , on donnât à cet enfant la douzième
partie des biens de fon père ; & que fi le
condamné laiffoit plufieurs enfans , alors
tous les biens du père leur appartinffent,
fans que la confifcatïon pût avoir lieu.
Valentinien en fit grâce entière aux en-
fans, ce que Théodofe le grand étendit aux
petits enfans; &au défaut de defcendans,
il accorda le tiers aux afcendans : enfin Jufti-
nien par fa novelle 17, abolit entièrement
le droit de confifcatïon ; il excepta feule-
ment par fa novelle 34, le crime de lefe-
majefté.
En France la confifcatïon a été établie dés
le commencement de la monarchie. Dago-
bert I , dans un édit de l'an 630 , concer-
nant l'obfervation du dimanche , défend
entr'autres chofes de voiturer aucune chofe
par terre , ni par eau, à peine à l'égard ^qs
voitures par terre , de la confifcatïon du
bœuf attaché du côté droit ; on trouve une
femblable ordonnance de Pépin , dont
l'année eft incertaine , mais que l'on croit
être de l'an 744.
Du temps de Philippe V & même avant,
les confifcatïons qui échéoient au roi , dé-
voient être employées à payer les aumônes
dues fur le tréfor. Il n'en pouvoit faire
don à héritage, c'eft-à-dire, à perpétuité
que dans fon grand confeil; il fut même
réglé depuis que l'on ne donneroit plus
les biens confifqués^ mais feulement une
fomme préfixe lur ces biens , lefquels feroient
V V TVV
55^8 C O N
vendus. Le roi devolt mettre hofs de fa maîn
dans l'an & jour les hxQnsconfifqués dans les
terres àQS feigneurs : & les remettre à des
perfonnes qui puffent s'acquitter des devoirs
féodaux , ou en indemnifer les Teigneurs; &
quand il les indemnifoit, (qs officiers fai-
îoient hommage pour lui. La confifcation
des monnoies étrangères fut accordée aux
feigneurs hauts-] uRiciers dans leurs terres ,
JoriTque c'étoient leurs officiers qui avoient
faifi : le roi s'en réferva feulement la moitié ,
déduélion faite furie total du quart accordé
au dénonciateur. Le chancelier ne devoir
fceller aucun don de confifcation qu'il n'eût
déclaré au confeil ce que la chofe donnée
pouvoit valoir par an.
A Limoges y la confifcation appartenoit
au vicomte , à moins que quelques habitans
ne fulTent depuis 30 ans en pofïeffion de les
percevoir.
A Ville-Franche en Périgord , les biens
d'un homicide condamné à mort apparte-
-noient au roi , fes dettes préalablement
payées ; mais lorfqu'un hoinme y étoit
pendu pour vol, fes dettes payées, le roi
prenoit dix francs fur fes biens , & le refte
paffoit à (ts, héritiers.
A Langres , la veuve d'un homme exé-
cuté à mort pour crime repre: ait les biei
& fon douaire, Se partie dans les acquêts
& dans les meubles, comme elle eût tait ii
fon mari tût mort naturelkment. S\ e'étou
une femme qui fût exécutée à moi t poui
crime , l'évêque de Langres avoit par droit
de confifcation la- portion des bitns du
iTiari , que les héritiers de cette femme au-
roient eue fi elle fût morte naturellement
avant lui.
Lorfqu'un bourgeois ou habitant de Tour-
nay blelloit ou tuoit un étranger qui l'avoit
attaqué , il n'étoit point puni , & fes biens
n'étoient point confifqués ; parce que les
biens d'un étranger qui en fe défendant au-
roit tué un bourgeois ou un habitant, de
Tournay, n'auroient pas été confifqués^ ainfi
que cela eft expliqué dans des lettres de
Charles V du iq janvier 1370.
A Avefnes , oùlafeigneurieétoit partagée
entre le dauphin 6t d'autres feigneurs , en
cas de contravention par rapport au vin ,
Fàmande étoit pour les feigneurs particu-
lier sjÔC le- vin étoit pour le dauphin.
C O N
n y avoît auffi un ufage finguîierà Saînf-
Amand-en-Peuple , diocefe de Tournay;
anciennement les maifons des bourgeois qui
étoient condamnés à mort étoient brûlées ,
au moyen de quoi leurs biens n'étoient pas
confifqués ; mais il fut ordonné en 1 366 que
les maifons ne feroient plus brûlées , & que
leurs héritiers ou ayans caufe , pourroient
les racheter , payant dix livres pour une
maifon de pierre , & 60 fols pour une maifon
de bois ou d'autre matière.
Les confifcations avoient été deftinées
pour les dépenfes de l'ordre de l'Etoile , 6c
pour les réparations du palais; mais en 1358
Charles V,lors régent du royaume , ordonna
qu'elles feroient employées pour la rançon
du roi Jean.
L'ufage n'eft pas encore uniforme dans
tout le royaume.
Dans les pays de droit écrit , la confifca-
tion n'a pas lieu, fi ne n'efl pour crime de
lefe-majefté divine & humaine. Il faut auffi
en excepter le parlement de Touloufe , dans
tout le reffort duquel la confifcation a lieu
fuivant le droit commun ; mais ce parle-
ment réfervoit autrefois la moitié des biens
du condamné à fes enfans. PréJentement il
e leur accorde que le tiers : la femme du
, ondamné eft admiie au partage de ce tiers
avec les enfans ; & quand 11 n'y apointd'en-
fans, elle profi'e ieule de ce tiers; elle
n'en perd pas ntéme la. propriété en fe re-
mariant.
A l'égard du pays ôourumier , on diftin-''
gue les courûmes en cinq clalîes par rapport
à la confifcation.
La première tft compofée de quelques
coutumes , qui ne l'admettent que dans le
cas du crime de lei.e-majefté divine &: hu-
maine : telles lont les coutumes de Berry,
Touraine , Laudunois , la Rochelle , An-
goumois , Calais , Boulenois , Lille , Tour*
nay , Cambray , Bayonne , Samt-Sever.
La féconde eft des villes d'Arras , Lille,
&: Saint-Omer, où par un privilège parti-
culier la confifcation n'a lieu qu'en deux cas ,
fa voir pourhéréfie & lefe-majefté.
La troifieme eft des coutumes qui admet-
tent [-a. confifcation pour les meubles feule-
ment , & non pour les immeubles , telles
;.que les coutumes de Normandie , Bretagne y,
C O N
An]ou , Maine , Poitou , Ponthîeu V le
Perche.
La quatrième comprend la coutume de
Paris , & les autres coutumes femblables qui
forment le plus grand nombre, lefquelles
polent pour maxime que, qui confifque. le
corps confifque les biens.
La cinquième clafle enfin eft compofée
des coutumes qui n'ont point de difpoiition
fur cette matière, &:dans lefquelles laco/z-
fifcation n'a point lieu, à moins qu'elle ne
foit projaoncée dans les pays où la confifca-
tion efl: admife : elle a lieu au profit du roi
pour les biens fitués dans l'étendue des jufli-
CQs royales , &: au profit des feigneurs hauts-
jufliclers , pour les biens qui font fitués dans
l'étendue de leur haute- juftice, quand même
la condamnation auroit été prononcée par
le juge royal; de manière que les biens
d'un condamné peuvent appartenir partie
au roi , &c partie à différen's feigneurs , cha-
cun d'eux n'ayant aucun droit de prendre
que ce qui eft firué dans fa haute-juftice;
mais fur les confifcaùons qui appartiennent
aux feigneurs hauts-] ufticiers , on levé une
amende au profit du roi , pour réparation
du crime envers le public.
On prélevé auffi les dettes du condamné
fur les biens confifqués.
Lorfqu'un ufufrultier jouit de la haute-
juftice , il a les confifcaùons , attendu qu 'elles
font parne des fruits.
11 eft encore à remarquer que dans cette
matière , les dettes aftlves fuivent le domi-
cile du condamné : mais les meubles ne fui-
vent pas la perfonne ni le domicile du con-
damné ; ils appartiennent au roi , ou autre
feigneur dans là juftice duquel ils fe trouvent
de fait , de forte que s'ilyenadansplulieurs
juftices appartenantes à différens feigneurs,
chacun ne prend que les meubles fitués dans
fa juftice , comme cela le pratique pour les
immeubles.
On trouve cependant une décifion du con-
feil , du premier décembre 1742, qui adju-
gea au fermier du domaine de Paris-tous les
meubles d'un condamné domicilié à Paris ,
mérae ceux qu'il avoit à Verfailles , à l'ex-
cluiion du fermier du domaine de Verfailles ;
mais cela fut fans doute fondé fur ce que
le roi eft également feigneur de Paris & de
yerfailles, ainfi cela ne détruit point le
C O N §5,^
principe que l'on a pofé , qui n'a lieu que
entre deux feigneurs différens.
Il y a feulement une exception pour le
crime de lefe-ma^efté , où la confifcatiort
appartient toujours au roi feul, fans aucun
partage avec les feigneurs ; elle eft même
dévolue au roi , omiffo medio , c'eft-à-dire ,
à Texclufion du feigneur dans la juftice du-
quel le procès auroit été fait.
La confifcation des condamnés pour fauf-
fêté commife au fceau des lettres de chan-
cellerie , appartient à M. le chancelier.
Dans les pays où la confifcation eft admife,
& où l'on tliit la maxime , qui confifque U
corps confifque les biens ^ toute condam-
nation qui emporte mort naturelle ou
civile , emporte aufli de plein droit la con-
fifcation.
Mais pour que la confifcation dài lieu , il
faut que le jugement foit irrévocable , &
que la mort civile foit encourue , & pour
cet effet que le jugement foit commencé à
être exécuté; ce qui fe fait , pour les juge-
mens contradiftoires , par la prononciation
à Taccuié ; & pour les jugemens par con-
tumace , par le procès-verbal d'effigie , s'il y
a condamnation à mort naturelle; &c par
l'appofifion d'un limple tableau , s'il n'y a
pas peine de mort portée par le jugemenr.
Quand il y a appel de la condamnation ,
l'état du condamné eft en fufpens , tant pour
la confifcation que pour les autres peines ,
jufqu'à ce que l'appel foit jugé.
Si le condamné meurt dans la prifon avant
d'avoir été exécuté , ou bien dans le tranf-
port des prifons du juge fupérieur au pre-
mier juge , la confifcation n'a point liçu.
Si par l'événement la fentence eft con-
firmée , la confifcation aura lieu du jour de
la fentence.
A l'égard des fentences par contumace ,
au bout des cinq ans elles font réputées con-
tradiftoires, & la mort civile, 6c par con-
féquent la confifcation font encourues du
jour de l'exécution de la fentence de contu-
mace : le condamné peut néanmoins obtenir
des lettres pour efter à droit ; ôt fi le ju-
gement qui intervient en conféquence porte
abfolument ou n'emporte pas de confif-
cation , les meubles ôc immeubles fur lui
confifqués lui feront rendus en l'état qu'ils
fe trouveront , fans pouvoir néanmoins
Vyvfv 2.
900 c: O N
prétendre aucune reftitution des fruits des
immeubles , &c.
Dans le cas d'une condamnation par con?-
tumace , les receveurs du domaine du roi ,
les ieigneurs ou autres auxquels la confifca-
tion appartient, peuvent pendant les cinq
années percevoir les fruits & revenus des
biens des condamnés , des mains des fer-
miers & autres redevables ; mais il ne leur
eft pas permis de s'en mettre en pofleilion
ni d'en jouir par leurs mains , à peine du
quadruple applicable moitié au roi , moitié
aux pauvres du lieu , & des dépens , dom-
mages & intérêts des parties.
Le roi ni les feigneurs hauts-jufticiers ne
peuven' auffi, pendant les cinq années de
la contumace, faire aucuadon des confijca-
tions , finon pour les fruits des immeubles
feulement.
Après les cinq années expirées , les rece-
veurs dudoniaine, les donataires &:les fei-
gneurs auxquels la confifcarion appartien-
dra, font tenus de fe pourvoirenjuftice pour
avoir la permiffion de s'en mettre en pof-
lèffion ; & avant d'y rentrer, ils doivent
faire faire procès-verbal de la qualité & va-
leur des meubles & effets mobiliaires ^ ils
en jouiffent enfuite en pleine propriété.
Dans le cas de crimes d'héréiié , lefe-ma-
jefté humaine , péculat, conculïion , fauffe
monnoie, facrilege & apoftafie, la confif-
cation eftacquife du jour du délit.
Le mari ne confifque que fes propres &
la moitié des meubles &: conquêts, quand
il y a communauté. Il en eft de même de
la femme , fi ce n'eft dans quelques cou-
tumes, où fa part de la communauté de-
meure au mari ,. comme dans celle d'Aur
xerre, article 2C}. . '
Sur la confifcation des biens des crimi-
nels , l'oycT^ au digefle , liv. XL VIII. tit.
XX ^^ au code ^ lib. IX ^ uhiqui pajjîm ;
Carondas , liv. VU-, rep. //i.Deijîeifles ,
tom. II,pag. ô'c}^, è)i tom. Ill^p'ag. i iC.
Le Maître lur Paris , art^ i8^. Coquille fur
Ni'vernois , chapitre ij.
Il y a encore plufieurs autres fortes de
confijcations qui ont lieu au profit de diffé-
rentes perfonnes; favoir,
X"^. Celle qui a lieu au profit des traitans ,
comme fubrogés à cet égard aux droits
du roi.
C O N
n en eft de même de la confifcation qui
a lieu au profit des fermiers des mejGTage-
ries, contre ceux qui entreprennent fur leur
privilège & exploitation , & de la confifca-
tion qui a lieu au profit des communautés
des marchands, d'arts &: métiers, contre-
ceux qui entreprennent fur leur état..
Dans toutes ces matières , la confifcation
n'eft pas de tous biens, mais feulement des
effets trouvés en contravention , tels que
les marchandifes &: effets prohibés , les
inflrumens Se outils qui ont (ervi à les fa-
briquer ,, & les charrettes , chevaux , & au-
tres voitures & inflrumens qui fervoient à
les tranfporrer lorfque l'on a procédé à la,
faifie des effets trouvés en contravention.
Ceux auxquels ct-iioxitsào. confifcations-.
appartiennent, ne les ont ^Asjure proprio ^,
mais feulement par conceffion du roi , &C
en vertu des flatuts & réglemens par lui
autorifés fur les marchandiies & effets trou-
vés en contravention aux..iég'emens.
1^. En matière féodale, le vaffal confif-*
que fon fief, c'e(î-à-dire , que ion fitf eft
confifque au profit du dominant , lor(qu'il le-
fait tomber en commife pour caufé de félonie-
ou de défaveu,
3°. La commife de l'héritage taillable >
celle de 1-héritage donné à titre d'emphy-
téofe ,.la commife cenluelle dans les coutu--
mes où elle a lieu , font aufîi une efpece de
.confifcation de l'héritage qui a lieu au profit
du reig.neur. Foyei^^ COMMISE. (A)
CONFISERIE,. f. f. L'an de faire des
confitures de toutes les efpeces .. & plufieurs.
autres ouvrages en fucre,^ comme bifcuits,.
mafTepains , macarons ,. &c. Il femble que'
cet art n'ait été inventé que pour flatter le
goût en autant de façons qu'il pioduit d'ou-
^vrages différens.Jl n'y a pas de fruits , de;
fleurs , de plantes , quelque bons qu'ils
foient naturellement ,à qui il ne puiffe donner
im goût plus flatteur & plus agréable. li
adoucit l'âpreté des fruits les plus aigres , &
en fait des mets délicieux. Il fournit aux
tables des grands feigneurs leur plus bel
ornement. La confifrie peut exécuter en
fucre toutes fortes de deflins , de plans ,,
de figures , 8>c même des morceaux d'archi*
tefture confidérables.
CONFISEUR ou CONFITURIER, f.
mafc. marchand qui fait ôi qui vend àts
C O N
confitures , ou qui en fait venir des pays
étrangers Si des provinces du royaume où
f on excelle à les faire , pour les débiter en
gros 6c en détail.
A Paris les confifeiirs font partie du corps
d'épicerie , qui eft le fécond des fix corps
des marchands. Foyei Épicier.
CQNFIT, f. m. pelletier , ckamoifeur ,
maroquinier^ &c. a deux exceptions ; il fe
dit d'une certaine compofition nécelTaire
pour la préparation des peaux. VoyeT^Us
articles Peaux, ChamOIS, Tannerie,
Maroquin , &c. ,11 fe dit auffi de la cuve
où l'on tient cette prépajatioii.
CONFITURE, fubft. f. CConfifmr.)
nom que l'on donne aux truirs, aux fieurs,
aux racines, & à certains fucsloriqu'ils font
bouillis & préparés avec du fucre ou du
miel, pour les rend-re de garde ou plus
agréables au goût.
Les anciens co/zy^/bzV/zr feulement avec du
miel, aiîjourd'hui oii fe fert plus fréquem-
ment du fucre.
Confitures demi-fiicrées^ font celles qui
^mt couvertes feulement d'un peu de fucre,
afin qu'elles confervent davantage un goût
de fruit.
On réduit routes \ts confitures à huit for-
tes; favoir confitures liquides ^marmelades ,
celées ^ paies , confitures fieches , confierves ,
fruits candis^ & dragées.
Confitures liquides , font celles dont lés
fiuits , ou tout entiers, ou en morceaux,
ou en graines , font confits dans un firop
fluide, tranfparent, qui prend fa couleur
de celle des fruits qui y ont bouilli; il y
a beaucoup d'art à les bien préparer : ii elles
ne font pas affez fucrées , elles fe tournent;
il elles le font t op, elles fe candiffent. Les
plus Q^\vs\its à&s confiitures liquides (omles
prunes, particulièrement celles de mira-
belle , l'épine-vinette , les grofeilles , les
abricots, les cerifes , la fleur d'orange, les
petits citrons verts de Madère , la caffe verte
du Levant, les myrobolans , le gingembre ,
& les clous de girofle, &c..
Les marmelades ïont desefpeces^e pâtes
à demi-liquides , faites de la pulpe des fruits
ou des fleurs, qui ont quelque confiftance,
comme les abricots, les pommes , les poires,
les prunes, les coins, les oranges & le gin-
gembre; la marmelade de gingembre vient
C O N 901
des grandes Indes par la Hollande; on la re-
garde comme excellente pour ranimer la cha-
leur naturelle des vieillards, /^oje^; Marme-
lade.
Les gelées font faites de jus de fruits, où
l'on a fait difl!budre du fucre, &: qu'enfuite
on a fait bouillir jufqu'à une confiftance un
peuépaifle; de forte qu'en fe refroidiflant
il reffemble à une efpece de glu fine tranf^
parente. On fait des gelées d'un grand nom-
bre de fruits , particulièrement de grofeil-
les , de pommes & de roins ; il y a d'autres-
gelées que l'on fait de nde , de poifTon ,
de corne de. cerf, mai elles ne fe gardent
pas, étant fort fujettes à fe gâter.
Les pdtes font une forte de marmelade,
épaifîie par l'ébuilition, au point de garder
toutes fortes de formes , lorfqu'après les
avoir mifes dans des moules elles font fé-
chées a||four. Les plus en ufage font celles
de grofeilles, de coins, de pommes , d'a-
bricots,, de fleur d'orange : on,eftime fort
celle de piflaches; il y en a de gingembre
qui vient des Indes.
Les confitures feches font celles dont les :
fruits, après avoir bouilli dans le firop ,
font tirés , égouttés, & féchés dans im four.
Celles-ci fe font d'un fi grand nombre de
fruits, qu'on ne pourroitles nommer tous :
les plus eftimés font le citron &: l'écorce
d'orange, les prunes, le^ poires, les cerifes,
les abricots , &c.
Les conferves font une efpece de confiture
fécke ^:hne avec du fucre & des pâtes de
fleurs ou de fruits; & les plus en ufage font
celles de bétoine, de mauve, de romarin,
de capilaire , de fleur d'orange , de vio-
lette, de jafmin,,de pilîaches , de citrons
&: de rofes.
Nota, que lés apothicaires entendent fous
le- titre de conferve , toutes fortes de confi-
tures (tche^ ou hquides, préparées avec du
fucre ou du miel pour être confervees,
foit de fleurs, de fruits, de graines, de r; -
cines , d'écorces , de feuilles, &c. V. Con-
serve.
Les candis ou plutôt les _//«/« candis^
font ordinairement des fruits entiers, qui,
après avoir bouilli dans le firop, reftent
couverts de fucre candi , ce qui les fait pa-
roitre comme des cryflaux de différentes
•couleurs & figures, félon les fruits qu'ils
502 C G N
contiennent. Les meilleurs candis viennent
d'Italie, f^oyei Candir.
Les dragées font une efpece de confiture
feche , faite de petits fruits, ou de graines,
ou de petits morceaux d'écorce, ou de ra-
cines aromatiques & odoriférantes, recou-
vertes d'un fucre fort dur ordinairement
très-blanc. Il y en a de beaucoup de fortes ,
diftinguées toutes par leur nom : les unes
font faites de framboife, d'autres d'épine-
vinette, de graine de melon , depiftaches,
d'avelines , d'amandes , de cannelle , d'é-
corce d'orange , de coriandre , d'anis , &
de graines de carvi, &c. Chambers.
CONFLAGRATION, f. f. {Phyfiq.)
fe ditquelquefois de l'incendie général d'une
ville ou de toute autre place confidérable.
Cependant ce mot eft plus ordinairement
reftreint à fignifier ce grand incendie que
la foi nous apprend devoir arriver à la fin
des fiecles , & dans lequel la terre lera con-
fumée par un déluge de feu.
Les Pythagoriciens, les Platoniciens, les
Épicuriens & les Stoïciens paroiiïent avoir
eu quelques idées de cet incendie futur :
mais il feroit difficile de dire d'où ils les ont
tirées , à moins que ce ne foit des livres
facrés, ou des Phéniciens, qui eux-mêmes
les avoient reçues des Juifs.
Séneque dit expreffément : Tempus adve-
niet quo Jîderafideribus incurrent ; & omni
flagrante materia uno igné , quidquid nunc
ex depojito lucet , ardebit. Les Stoïciens ap-
pellent cette diffolution générale îKTrvpacrif ,
inflammation. Il en eft aufli fait mention
dans les écrits de Sophocle , d'Ovide, de
Lucain, &c. Le doileur Burnet , après le
père Tachard & d'autres , rapporte que les
Siamois croient qu'à la fin du monde la
terre fera toute defféchée parla chaleur;
que les montagnes difparoîtront; que toute
la furface de la terre deviendra plate &
unie , & qu'alors elle fera toute confu^née
par le feu. Déplus, les bramines Siamois
foutiennent que non-feulement toute la
terre fera détruite par le feu , mais encore
qu'il en renaîtra une autre des cendres de
la première. Les auteurs ont des fentimens
très-partages, non fur la caufe première
de cet incendie qui eft fans contredit la
volonté divine , mais fur la caufe féconde.
%t% uns croient qu'il fera produit par un ^
C O N
miracle, comme par le feu du ciel. Les au-
tres difent que Dieu produira cet incendie
par des caufès naturelles & agiffantes félon
les loix des méchanique<;. Quelques-uns
penient que l'irruption d'un feu central fuf-
fira pour le produire; îk ils ajoutent que
cette éruption peut arriver de différentes
manières, foit parce que la violence du feu
central fera augmentée, foit parce que les
parties de la terre feront devenues plus in-
flammables, foir parce que l*réfiftance des
couches rerreftres deviendra moindre par
laconfommation des parties centrales, ou
parla diminution de l'adhérence des parties
de notre globe. D'autres en cherchent la
caufe dans l'atmofphere : félon eux , une
quantité extraordinaire de météores s'y en-
gendrant, &: éclatant avec une violence ex-
traordinaire par le concours de ditFérentes
circonftances , fera capable de produire ce
feu. Les Aftrologues l'expliquent par la con-
jonftion de toutes les planètes dans le figne
du Cancer, de même que le déluge arriva ,
félon eux , par la conjoiiftion des planètes
dans le figne du Capricorne. Cela ne vaut
pas la peine d'être réfuté.
Enfin, d'autres ont recours aune caufè
félon eux plus puiffante &: plus efficace. Ils
penfent qu'une comète s'approchant trop
de nous en revenant du foleil, caufera cet
incendie. A la vérité on pourroit craindre
de la part de ces corps quelques boulever-
femens , étant capables par leur mouve-
ment au-travers de l'orbite de la terre , par
leur prodigieufe grofi^eur, & par Imtenfité
du feu dont ils font embrafés dans leur re-
tour du périhélie , de produire les plus
grands changemens & les plus grandes ré-
volutions dans notre fyftême. J^oye^; Co-
mète. '
M. Newton a calculé que la comète de
1680 a dû éprouver dans fon périhéhe une
chaleur 2000 fois plus grande qu'un fer
rouge : fi lorfque cette comète a traverfé
l'orbite de la terre , la terre fe î\\.x. trouvée
proche du point de cette orbite où la co-
mète a pafîe, il ne paroît pas douteux qu'elle
n'eut pu caufer fur la maffe de notre globe
de grandes altérations. Whifton a prétendu
que cette comète , dont la période paroît
être d'environ 575 ans , avoit dû paroître
l'année du déluge , & qu'elle en a peut-étrç
C O N
ètéU caufe. .Quoi qu'il en fo'it dé tous ces
fyftêmes phyfiques , il faut toujours y re-
connoître la volonté divine comme caufe
première : Dieu (aura bien réduire notre
terre en cendres quand il lui plaira; il n'aura
befoin pour cela , ni de feu central , ni de
comète , fa feule volonté fuffira. Et pour-
quoi ne pas vouloir que la fin du monde
& fa deftruflion foit un miracle ? la créa-
tion en eft bien un : il n'eft pas plus difficile
de détruire que de conftruire. Dieu même,
fuivant plufieurs théologiens , ne fait que
créer continuellement quand il conferve. Il
n'a qu'à ceffer de créer pour que tout foit
anéanti. (OJ
CONFLANS-EN-JARNISY, (Géog.)
petite ville de France, en Lorraine, fur les
frontières de la Franche-Comté, au con-
fluent des rivières d'Iron & d'Orn. Long.
23. 3o. lat. 47. 45.
'CONFLIT DE JURISDICTION, {Jurifp.)
c'eft la conteftation qui s'élève entre les offi-
ciers de différentes jurifdiftions, qui préten-
dent refpeélivement que la connoiflance
d'une affaire leur appartient.
Lorfque le conflit eft formé entre deux
jurifdiâiîons inférieures, indépendantes l'une
de l'autre, mais reffbrtiflantes toutes deux
devant un même juge, on peut fe pourvoir
devant ce juge fupérieur, pour faire régler
dans laquelle des deux jurifdiélions inférieu-
res on doit procéder. Si ces deux jurifdic-
tions ne reffortiffent pas l'une & l'autre en
une même cour, il faut fe pourvoir en rè-
glement de juge au confeil; c'eft ce que l'or-
donnance dji68i , titre commun pour tou-
tes les fermes, art. ^y ^ ordonne pour les
conflits qui furviennent entre les juges ordi-
naires &: les élus.
hes conflits qui furviennent entre les deux
chambres des requêtes du palais , font jugé^
par les doyens des deux chambres , auxquels
on remet les pièces.
Si c'eft entre la grand'chambre & une
chambre des enquêtes ou entre deux
chambres des enquêtes , le conflit fe plai-
de au parquet devant les trois avocats
généraux.
A l'égard des conflits formés entre deux
•cours , comme entre le parlement & la cour
des aides, les avocate généraux de la cour
4es aides "viennent au parquet dii parle-
CON 90Î
ment , ou la caufe fe rapporte fJar le minif-
tere d'un fubftitut du procu-eur général du
parlement, & les avoca' s généraux des deux
cours décident; s'ils fe trouvent partagés,
on fe pourvoit au conleil en règlement de
juges. Voye^^ l'ordonnance de 166^^ tit. ij .
art. I. (AJ
CONFLUENT, f. m. (Géog.) lieu où
deux rivières fe joignent &: mêlent leurs
eaux. Voyei Rivière.
Le village nommé Conflans , proche de
Paris , eft ainft nommé parce que c'eft pro-
che de ce village que fe fait la réunion de la
Seine & de la Marne.
Quand deux rivières fe rencontrent, il
faut qu'elles fe joignent pour aller déformais
enfemble avec une direction commune, qui
ne fera ni l'une ni l'autre des deux différen-
tes qu'elles avoient auparavant. L'angle du
confluent^ c'eft-à-dire, celui fous lequel les
deux rivières fe rencontrent, étant pofé, il
eft clair que ft elles fe rencontrent avec des
forces parfaitement égales , la direction
commune qu'elles prendront divifera cet
angle exaftement en deux moitiés égales ;
mais hors de ce cas-là, qui eft unique &
extrêmement rare, l'angle ne fera point di-
viié également, parce que ladireflion com-
mune formée ou réfultante des deux parti-
cuheres , tiendra plus de celle qui aura ap-
partenu à la rivière plus forte que de l'au-
tre; &C cela d'autant plus que l'inégalité de
forces fera plus grande. Donc la dire<ftion
commune s'approchera plus de l'une des
deux particulières que de l'autre ; donc elle
ne coupera pas en deux également l'angle du
, confluent formé par ces deux direftions. Il
s'agit ici de déterminer en général quelle
fera la divifion de cet angle , ou , ce qui eft
le même , la pofition de la diredion com*
mune. Voici, félon M. Pitot, comment on
la détermine.
Les deux rivières ne prennent une direc-
tion, commune , qu'après avoir en quelque
forte combattu, &: s'être mifes en équili-»
bre ; de manière qu'il n'y aura plus de com-"
bat, &; qu'elles fuivront paifiblement le
même cours : la ligne de la direction com-
mune eft l'axe de cet équilibre, puifqu'il fe
fait à fes deux côtés &c fur lui , comme lur
une fuite continue de point d'appui. Les
deux forces des deux rivières font donc-
9Ô4 C O N
égales aux deux côtés de la ligne dedireélion
commune, & il ne faut plus que les expri-
mer algébriquement. Ce font l'une & l'autre
les produits de trois quantités : i *^. la maffe
d'eau de l'une ou de l'autre rivière; 2^.
fa vîteffe; 3°. fa diftance à l'axe de l'équi-
libre; car cette diftance eft à confidérer tou-
tes les fois qu'il s'agit d'équilibre : or ici l'axe
d'équilibre eft la même ligne que la direc-
tion commune.
De ces trois quantités les deux premières
font connues , ou fuppofées connues : refte
la troifteme , que l'on tirera aifément d'une
équation algébrique.
La diftance de l'une des rivières, ou plu-
tôt celle de fon aftion fur l'axe d'équilibre,
étant perpendiculaire à cet axe ou à la ligne
de la diredion commune , ce fera aufli le
iinus de l'angle que fait avec cette direftion
la direiflion primitive de la rivière. On aura
donc Tune des deux parties de l'angle
du conrluent divifé par la direflion com-
mune , &c l'on aura en même temps l'au-
tre partie.
Si les forces que les deux rivières ont par
elles-mêmes , c'eft-à-dire les produits des
mafles par les vîteftes , font des quantités
égales, il eft évident que la diredion com-
mune divife en deux moitiés égales l'angle
du confluent.
Pour prendre de tout ceci une idée en-
core plus nette, il fera bon de voir quelle
fera la pofttion de la diredion commune
par rapport aux direftions particulières ou
primitives , toujours dans la fuppofition de
cette égalité de force des rivières , mais en
y ajoutant celle à^s difFérens angles du
confluent.
Si cet angle eft infiniment petit ou aigu ,
la direction commune fera infiniment incli-
née , ou , ce qui eft le même , parallèle aux
deux direftions particulières , eu même con-
fondue avec elles.
Si l'angle du confluent eft droit , la di-
reftion commune fait un angle de 45 degrés
avec chacune des deux particulières.
Si l'angle du confluent eft infiniment ob-
tus, c'eft-à-dire fi les direftions des deux
rivières ne font qu'une ligne droite, fi elles
fe rencontrent de front, on concevra, ou
qu'il ne fe forme point de diredion com-
mune, ou que s'il y en a une, elle traver-
CO N
fera les deux rivières perpendiculairement à
l'une & à l'autre des deux direélions par-
ticulières.
Doncladire(ftionayantcommencédansle
premier des deux cas extrêmes par avoir la
même pofition que les direftions particuliè-
res , & finifl^ant dans le fécond cas par en
avoir une la plus oppofée à la leur qui foit
poflible , il faut que dans tous les cas
moyens, à commencer par le premier
extrême, elle en ait une toujours plus
différente, & en un mot d'autant plus
différente, que l'angle du confluent fera
plus grand.
Si l'on ne fuppofe plus l'égalité des for-
ces naturelles des deux rivières , il eft clair en
général que la diredion commune n'aura
plus la même pofition à l'égard des deux par-
ticulières, mais qu'elle fe portera vers le côté
le plus fort.
La diredion commune des deux rivières
étant déterminée & connue , lavîtefi!e com-
mune qu'elles prendront ne l'eft pas encore :
cette vîtefte fera , comme dans tous les
mouvemens compofés , moindre que la fom-
me des deux vîteflTes primitives ; & voici
comment M. Pitot le prouve. La vîtefiTe At%
rivières dépend uniquement de la pente du
terrain où elles coulent; que cette pente im-
médiatement après la jonélionfoitla même
qu'elle étoit immédiatement auparavant , il
y aura égalité entre la fomme des deux maf-
iç.s, d'eau multipliée chacune par la viteflTe
particulière qu'elle avoit avant la jondion,
&la fomme des mêmes deux mafies multi-
pliée par la vîtefife commune qui fera après
la jon61ion. De cette égalité exprim.ée algé-
briquement, on tire la valeur de la vîtefiTe
commune , moindre que la fomme des deux
particulières & primitives.
Cela paroît bien contraire à ce que M.
Guillelmini prétend , que l'union des deux
rivières les fait couler plus vite {yoy. Fleu-
ve); mais ilneparloitque des caufes phy-
fiques particulières, que nous ne confidé-
rons pas ici : elles fe combinent avec le
pur géométrique , 6>c le dérangent beau*
coup. Tout ceci eft tiré de Vhijioire acadé-
mique^ ly^S.
On peut rapporter à cet article les expé-
riences de MM. Dufay & Varignon fur les
mouvemens de deux liquides qui fe croi-
fent.
CON
fent. Deux tuyaux étant foudés l*un à l*au-
tre, & fe croif'ant, on fuppofe que l'on
poufle une liqueur dans un des tuyaux , &
une liqueur difïérente dans l'autre ; M. Va-
rignon a prétendu , après des expériences
qu'il avoit faites , que chaque liqueur fortoit
par le tuyau par lequel on l'avoir pouffée ,
& qu'ainfi les deux liqueurs fe croifoienr.
Mais M. Dufay ayant répété cette expé-
rience avec foin , a trouvé que les liqueurs
ne fe croifoient point , qu'elles fe réfléchif-
foienî , pour ainfi dire , au point du con-
cours , pour fortir chacune par le tuyau par
lequel elle n'avoit pas été pouflee. Voyej^
mém. acad. des Scienc. '7j6". fOJ
CONFLUENTE , épithete qu'on donne
en médecine à cette efpece de petite vérole
dont les puftules fe confondent les unes dans
les autres. J^oje/^ Petite vérole.
CONFOLANS, Confoulans ,
{Géogr.) Conjluentes , petite vil!e du Poi-
tou , fur la Vienne , aux confins de la Mar-
che , chef-lieu d'une éleâiion établie par
«dit de 1714, & compofé de 70 paroiiïes ,
patrie d'Antoine D. Rivet de la Grange ,
favant Bénédiftin, mort à Mans en 1749.
JSTous lui devons neuf volumes iii-^.'^. de
rJ^iji^ire littéraire de France.
D. Tarikndier , fon fucceiTeur , lui a
confacré un élcge bien mérité dans le IX
tome de VHifl. Liu.Yûy. Bibl. des auteurs
de Poitou^tom. y^pag. i-ib\ i^'D. le-Cerf,
Bibl. des auteurs de la Congrégaiion de S .
Maur.Long. /<?, 28\lat. 46^, 65. (f)
CONFÔRGIEN , (Giogr.) ville du
Morvan , recette d'Autun , bailliage de
Saulieu , en Bourgogne. Cette terre a été
dans la maifon de Clugny , plus de trois fie-
cles. Henri de Clugny , père de Guillau-
me , évéque de Poitiers , en étoit feigneur
en 1426. Gerfon nous apprend que Hugues
Clugny, baron de Conforgicn , fut fait che-
valier par Louis XI en 1479. Son fils, filleul
de Louis XII , fut fait chevalier par ce bon
rx)i , à la bataille d'Agnadel , en i ^09 :
mais Guillaume de Clugny s'efl: le plus dif-
tingué fous le nom de baron de Conforgien.
H eut part aux combats &: à la gloire de
Henri IV, & fut bîeffé aufiege de Poitiers
en 1569.
Les Genevois l'ayant demandé au roi
pour leur général , contre le duc de Savoie,
Tome J^JIL
CON 905
' en 159O, îl défit fes troupes, tua de fk
main leur commandant, le baron de Faure ,
& conferva la liberté de Genève. Son ar-
mure fut confervée comme un monument
de valeur dans l'arfenal de la république ,
oii on en montre encore aujourd'hui les
pièces. Le château de Conforgien , fous les
Clugny &: les Jaucourt, fervoit de retraite
aux Calviniiîes des environs , iufqu'en
1685. (C)
CONFORMATION , f. f. (Phy^q.)
fe dit de la contexture &: confi/lance par-
ticulière des parties d'un corps quelcon-
que , & de leur difpofition pour former
un tout. Voye^^ CONFIGURATION.
Les newtoniens difent que \ts corps ,
fuivant leur différente conformation , ré-
fiéchiiïent les différentes couleurs de la lu-
mière. Voyei^ Couleur. Chamhers.
Conformation fe dit auffi principalement
en parlant du corps humain , ce qui fait
que ce mot eft principalement d'ufage en
médecine & en anatomie. Une boite eft
un défaut de conformation. Voye^ BoS€E ,
& f article fuivant. (O)
Conformation, (Médecine.) ftruc-
ture , forme , arrangement des diverfes
parties qui compofent le corps humain dans
l'un & dans l'autre fexe.
Cette ftru6lure eft bonne oumauvaife:
elle eft bonne , quand elle fe rapporte à
l'ordre général de la nature , & qu'elle ne
produit aucun mal; elle eft mauvaife quand
elle procure quelque fâcheufe difformité ,
cpeîque inconvénient confidérable , quand
elle pèche en grandeur , en figure, en nom-
bre , en lifuation, &e. & c'eft ce qu'on
appelle vice de conformation.
Ces vices de conformation font de naif^
fance ou accidentels ; quelles que foient
leurs caufes , ils produifent plufieurs mala-
dies organiques, que les médecins ont affez
commodément divifées en quatre claftes.
La première clafife contient les maladies
qui naiffent de la grandeur difproportion-
née de quelque partie; telles font les tu-
meurs contre nature , foit de naiffance ,
foit par accident : ou bien ces maladies
émanent de la petiteffe difproportionnée
d'une partie , qui par cette raifon tombe en
atrophie ; ou encore lorfqu'un bras ou une
jambe font plus courts d'un côté que de
X xxxx
ço6 C O N
l'autre. On voit bien qu'il ne s'agit pas ici *
d'un vice de proportion arbitraire des par-
ties du corps confidérées réparément , &
formant par leur ftruélure ce qu'on appelle
laideur ',ma\s qu'il s'agit d'un défaut de pro-
portion en grandeur ou en petitefle , tel ,
qu'il en réfulte une maladie réelle.
La féconde clafTe comprend les maladies
qui procèdent de la mauvaife figure d'une
partie. Cette mauvaife figure peut exifter
de naiffance , comme le bec-de-lievre , un
doigt fait comme une raie , le crâne ex-
traordinairement alongé, applati , faillant ,
enfoncé , le fternuna creuié en dedans , &
l'épine du dos tortueufe, &c. comme dans
le célèbre Mallebranche ; ou être caufée
par accident , comme par le déplacement
des pièces d'une partie fraélurée.
La troifieme claffe raffemble les maladies
qui confiftent dans le nombre extraordi-
naire de certaines parties , comme dans
celui de quatre ou cinq lobes de poumon ,
de quatre ou de fix doigts , d'un feul rein ,
d'une double matrice, &c.
La quatrième claffe renferme les mala-
cîies qui ont leur fource dans la fituation
déplacée des parties ; telles font de naiffance
le nombril qui ne fe rencojitre pas à fa place
ordinaire, le dérangement, la tranfpofition"
de quelque vifcere ; ou accidenteliement ,
les luxations , les hernies , &c.
Mais il y a plufieurs maladies particuliè-
res de conformation , qu'on ne peut guère
rapporter à aucune des claffes précédentes ;
telles font , par exemple : i'^. les maladies
qui tirant leur origine d'un défaut d'arti-
culation, ou d'un manque de quelque orga-
ne, , comme du manque des yeux , de la
langue , &c. ou de robflru<f^ion naturelle de
quelqu'autre organe , comme du nez , des
creilles, &c. 2^. Les maladies qui de naif-
fance , ou par accident , proviennent de la
cohérence des parties qui doivent être fépa-
rées-, par exemple , des doigts, des paupiè-
res , des lèvres unies , du conduit de la pu-
deur, &c. 3*^. On connoît des maladies de
conformation qui réfultent de l'imperfora-
tion d'un canal defliné à être ouvert, d'une
ouverture de ce canal percée ailleurs que
dans l'endroit ordinaire , ou de deux ouver-
tures' au lieu d'une ; le reftum &: l'urètre
fourniffent quelquefois ces trois exemples.
C ON
4**. Dès maladies qui dérivent de COnftruC-
tion ou d'alongement contre nature d'une
partie membraneufe; le prépuce préfénte
quelquefois ces deux cas. 5*. On apporte
encore en naiffant des vices de conforma^
tien , qui confiflent en excroiffances de
diverfe figure , couleur, grandeur , confif-
tance , & qui paroiffent fur plufieurs parties
du corps : ce font-là ces maladies de pre-
mière formation , dont les uns penfent
qu'on doit entreprendre la cure , & d'autres
qu'il n'y faut pas fonger : opinions égale-
ment fauffes, pu'.fque s'il y a de ces fortes
d'indifpofitions qu'on ne peut détruire fans
récidive &c fans péril , l'expérience prouve
qu'il y en a d'autres qu'on traite fans retour
avec le plus grand fuccès. 6°. Enfin on a vu
àts maladies compliquées avoir pour prin-
cipe plufieurs vices de conformation réunis'
dans un même fujet, à divers égards, tant
intérieurement qu'extérieurement.
La cure palliative ou radicale de ce grand
nombre de maladies mentionnées jufqu'ici ,
requiert les lumières combinées les plus
étendues de la médecine, de la ehirurgie ,
& de l'anatomie: tout nous apprend que
l'art eft long , la vie courte, le corps fujet
à mille infirmités, même dès fa première'
origine ; & que pour comble de maux,
l'efprit partage fouvent fans remède les vices"
de conformation du corps. Cet article, efi de
M, U chevalier de J AU COURT.
Conformation, (Chinirg.) l'art de
rapprocher dans les fraftures les bouts des
os rompus , en embraffant le membre avec
les mains, & en cas d'efquilles adhérentes
aux autres parties , &qui ne nuifent point
à la cure , en les pouffant doucement dans
leur place avec les doigts.
Les chirurgiens , après avoir fait l'exten-
fion & la contre-extenfion néceffaire pour
remettre en place les os frafturés , doivent
procéder à la conformation. On la fait foit
avec la paume des mains, le gras des pou-
ces , ou les doigts; foit même dans cer-
tains cas avec les infirumens , comme le
tire-fond , l'élévatoire & autres. De quel-
que façon qu'on faffe cette conformation , il
fautautant qu'il eflipofïible, que la force, qui
tend à replacer lés pièces fraélurées, foit diri-
gée de manière à ne point pouffer les chairs
contre, des pointes d'os ou desj efquilies ;
C O N
on évitera, par cette précaution , des folu-
tions de continuité , & des divulfions qui
pourroient caufer de fâcheux accidens,
A l'égard du degré de force qu'on emploie
pour agencer & replacer les os, il doit être
proportionné , i". à la folidité 6c à l'épaif-
leur des os, qui réfiftent d'autant plus qu'ils
font plus épais &: plus folides ; i^. à l'épaif-
feur des chairs, puifque cette épaifTeur di-
minue l'effet de la prelfion fur Ics os : enfin ,
la force de cette preflion doit être propor-
tionnée à la quantité du déplacement fuivant
l'épaiffeur. Pour finir la cure, quand la con-
formation eft faite , on maintient l'os réduit
par l'appareil &laiîruation. Tout cela s'écrit
& fe conçoit à merveille ; mais on ne fait
pas affez combien l'exécution requiert quel-
quefois pour le fuccès , de lumières réunies ,
d'adreffe & d'habitude. ArdcU de M. le
Chevalier DE JaucoURT.
Pour donner à cet article l'étendue dont
il eft fufceptible , nous obferverons qu'il
le trouve une fi grande juftefl'e dans les
proportions du corps humain , que c'eft
fur cela qu'eft fondée toute la (cience des
méchaniques. De là font venues les me-
fures de poulies , de palme , de coudée ,
de pas , &c.
La tête avec le col fait la fixieme partie
du corps ; la mefure de la face eft la lon-
gueur de la paume de la main. La hauteur
du front fait la grandeur du nez. La gran-
deur du nez fait celle de l'oreille.
Le corps , quand il n'eft ni trop gras ,
ni trop maigre , a de hauteur cinq fois fa
largeur.
La diftance qu'il y a du moyen doigt
d'une main jufqu'au même doigt de l'au-
tre main , le bras étendu en croix ,. eft la
hauteur du corps.
Dix fois la longueur de la main fait
encore la hauteur du corps.
Le centre de la figure humaine fe trouve
jufte à la jointure antérieure des os pubis.
De ce point le corps fe divife en deux par-
ties égales , dont chacune comprend un
cercle parfait. Le centre du cercle fupérieur
fe trouve à l'endroit qui répond à la bafe du
cœur , & le centre du cercle inférieur fe
trouve vis-à-vis la jointure du genou.
La même fymmétrie fe rencontre auffi
dans les bras étendus ; car ft l'on met la pointe .
C O N 907
du compas fur le plis du bras , &: que l'on
porte l'autre pointe à l'extrémité du grand
doigt de la main , on décrit un cercle , dont
le diamètre va jufqu'au milieu de la poi-
trine , entre les deux clavicules , enforte
que les bras étendus comprennent deux cer-
cles parfaits qui viennent fe toucher entre
les deux clavicules.
La fymmétrie des os de la main de l'en-
fant , eft dans la même proportion relative
que lorfqu'il eft parvenu à un âge parfait :
de forte qu'à mefure qu'il croît , cette même
partie porte toujours la dixième partie de
la hauteur de fon corps , ce qui n'arrive
pas dans les autres os du corps ; car , ex-
cepté ceux du pié , ils varient tous fuivant
les divers accroiftemens.
Dans l'homme fait , la partie fupérieure
du corps eft plus courte que l'inférieure. Le
contraire fe remarque dans les enfans. Ils
ont la partie fupérieure plus longue.
Une autre différence entre l'enfant &
l'homme fait, c'eft que l'homme fait a de-
puis la jointure des épaules jufqu'au coude ,
&c depuis le coude jufqu'au haut du pouce ,
auftî bien que depuis l'extrémité d'une
épaule à l'autre , la mefure de deux têtes,
au lieu que l'enfant n'a que la mefure d'une
tête. Une autre différence encore , c'eft
que la tête d'un enfant d'un an , n'eft qu'un
cinquième de la hauteur de fon corps , &C
que la largeur de fes épaules eft égale à la
longueur de fa tête , au lieu que dans l'hom-
me fait , la tête eft d'une huitième partie
du corps , & que la largeur des épaules eft
deux fois plus grande que la longueur de
la tête.
Le point fermé, tant des perfonnes faites
que des enfans , contient en fa rondeur la
longueur du pié.
La conformation des parties du corps ,
lorfqu'on les confidere feules &: en elles-
mêmes, eft un autre genre de proportion.
La tête , pour être bien proportionnée en
foi , doit être plutôt un peu grofte que petite,
d'une forme ovale , plate par les côtés, mé-
diocrement avancée en devant & en arrière.
Le vifage doit être plus long que large &
avoir du relief. Chez les anciens les vifages
longs étoient regardés comme les plus beaux,
c'eft ce qui fe voit par les ftatues antiques.
Le vifage de Not|-e-Seigneur eft. re^réfegil^
"'■' ■ " KxTixx i - ' "
~jn:u ét^-^i
9o8 C O N
fort long clans tous les anciens tableaux, i
Le front doit ét;eboffu, mais très-peu.
Les fourcils doivent chacun former une
arcade & être fuffifamment garnis de poils.
Les paupières doivent être bordées de
poils doux &: longuets.
Les yeux doivent être grands & bien
fendus.
Les joues pleines , fermes Se rondelettes.
La bouche petite.
Les lèvres médiocrement avancées , &
leurs bords vermeils.
Les oreilles petites & bien plaquées.
Le menton un peu arrondi.
Le col dégagé des épaules.
Les épaules plates & bien couchées.
La poitrine large, ample & élevée par-
devant en forme de hotte.
Les bras ronds & charnus, un peu plats
en dedans, & allant en groffiiïant depuis
. le poignet jufqu'auprès de la jointure du
coude.
Les mains im peu graffes &: longues , les
doigts grêles &: dégagés , avec de petites
foifettes au bas de chaque doigt fur le deffiis
de la main quand elle eft ouverte , & de
petites bofTes au dedans de la main.
La conformation du ventre eft d'^re
«levé aux femmes (k moins élevé aux hom-
mes. Il en eft de même de ce qu'on ap-
pelle la croupe.
Les cuiftes & les jambes font auffi plus
grofles aux femmes qu'aux hommes.
La taille eft plus fine aux femmes & les
hanches font plus avancées , les hommes
l'ont plus longue que les femmes.
Les jambes, tant aux hommes qu'aux
femmes, doivent être médiocrement lon-
gues, & garnies d'un gras qui n'ait point
trop de faillie : les femmes cependant les ont
ordinairement plus grofles que les hommes,
ce «[ui n'eft pas une perfeélion.
Les pies doivent être menus & dégagés ,
mais d'une longueur médiocre.
La nature varie beaucoup dans la confor-
mation de chacune de ces parties ; &c pour
commencer par la tête , il y en a de pointues
& pyramidales : on en voit de quarrées ,
de rondes, d'ovales , de larges , d'étroites ,
de grofles , de petites ; il y en a de plus
plates par derrière , & de celles-là les unes
îbnt tout-à-fait plates , les autres le font
C O N
feulement en haut, les autres plates en bas
feulement ; & d'autres enfin plates en haut
& en bas , mais de manière que cet appla-
tifiement eft interrompu par une rondeur
horizontale, enforte que ce font deux ap-
platiflemens l'un fur l'autre.
Les fronts font ou grands , ou petits, ou
convexes , ou plats , ou creux , 6c parmi les
convexes on en voit de bofiTus en forme de
calebafl^es. Il y a des fronts quarrés, il y en
a de bifcornus , de larges , d'étroits , de
longs , de courts : il y en a qui ont une
éminence de chaque côté , aux uns plus
apparente , aux autres moins.
Les fourcils font ou droits , ou en arcade,
ou longs , ou courts, ou minces, ou épais,
ou unis, ou raboteux. Ils font ou prefque
joints l'un à l'autre, ou médiocrement le-
parés , ou très-féparçs. »
Les nez ne font pas moins différens entre
eux. Il y en a de longs , de courts , d'en-
foncés & de faillans. II y en a de rabattus
jufques fur la lèvre fupérieure , & quelque-
fois prévue jufques fur l'inférieure, comme
s'ils ailoient entrer dans la bouche. Il y en
a de droits , de bofl'us, de ronds & d'aigus.
On en voit de plats pardeflus comme une
règle , de gros au milieu , de gros par le
bout , de déliés proche les fourcils , de
déliés par en bas , & gros par en haut.
Quelques-uns font un peu appiatis fur le
haut comme un cachet. D'autres font rabo-
teux en cet endroit comme feroit une petite
plaque inégalement élevée par les bords. Il
en eft de relevés plus haut ou plus bas qae
le miheu , de relevés fur le milieu ou aqui-
lins , de retroufles en pié de marmite ,
de recourbés en bec de corbin , & de
plats ou camus.
Les nez varient auflî beaucoup par rap-
port aux narines; car elles font ou évafées,
ou étroites , ou entre deux. Il y en a de
hautes , de bafles , de retrouflees, de ra-
battues. On en voit dont le defllis , au lieu
d'être de niveau avec la colonne du nez , eft-
cintré en forme d'arcade , & laifle voir
prefque tout le dedans de la cloifon du nez.
Les yeux font ou petits ou grands, ou
médiocres. Ils font ou enfoncés, ou à fleur
de tête , ou comme fortant de la tête, ou
tenant le milieu entre ces deux excès. Ils
font ou gris , ou bleus, roux , noirs ^ 6'c,
CON
Les paupières font ou fans cils , ou revê-
tues de cils , & ces cils font , ou longs , ou
courts , ou toufus , ou clair-fetnés.
La bouche eft grande , ou petite , ou
médiocre; faillante , ou enfoncée.
Les lèvres font ou relevées , ou plates ,
ou entre deux. On en voit d'égales , enforte
que l'une n'avance point fur l'autre ; d'iné-
gales , enforte que la fupérieure déborde
fur l'inférieure , ou l'inférieure fur la fupé-
rieure. Il y a des lèvres renverfées en dehors,
d'autres rabattues en dedans. Il y en a de
grolTod-ôc de menues.
Les joues font ou pleines, ou creufes ,
ou jouflues , fermes , mollaffes , &c. La
pomette des joues eft ou médiocrement ,
ou exceffivement faillante.
Le menton eft ou long , ou court ; retiré
en arrière, avancé en devant, de niveau
avec la lèvre inférieure. Il eft avec un petit
creux au bout, ou fans ce creux. On le voit
quelquefois pointu ou rond. La pointe en
eft relevée en forme de menton de bonis ,
ou (implement pointue.
Les oreilles font ou larges ou étroites ,
ou médiocres , ou faillantes ou plaquées ,
ou gro/fes ou déliées.
Le col eft long ou court , maffif ou
grêle.
La poitrine eft ample o« étroite, plate
ou relevée.
Les épaules font couchées en arrière ou
voûtées , larges ou étroites.
La taille eft ou grofle 6>c ramaflee , fine &
déliée , ou courte ou longue.
Les hanches font ou élevées , ou dépri-
mées.
Le derrière eft avancé ou rabattu.
Les jambes font grêles ou maflives, lon-
gues ou courtes , ou d'une mafle médiocre :
fur quoi il eft à remarquer que , lorfque le
col eft long, les jambes & les oreilles font
longues auflî.
Les pies font longs ou courts , gros ou
menus, larges d'afliette , ou droits, ou
entre deux.
De ces différentes conformations , tant
pour la tête que pour le refte du corps, i;
n'en eft aucune qui ne foit dans l'ordre de
la nature par rapport aux autres parties, &
qui n'ait avec ces mêmes parties une propor-
tion nécefîdire. Si, par exemple, une per-
C O N 5,09
fonne eft d'une taille groife & courte , la
même forme fe remarquera dans chacun de
fes membres , on lui trouvera les bras courts
& gros , les mains larges & groffes , les
doigts courts &:gros. Uneperfonnequi fera
grande & déliée aura les membres longs &
menus ; celle qui fera d'une taille médiocre ,
les aura pareillement médiocres.
De tous les hommes , il eft bien rare d'en
trouver deux qui fe reffemblent entièrement
pour le vifage , ou pour la ftature, ou la
voix. Chaque vifage eft formé de forte que ,
■ quelque laid qu'il paroifte , pourvu qu'il
ne foit point défiguré par quelque accident,
on nefauroit, fans le rendre difforme, y
rien changer pour le rendre plus beau , parce
que dans fa laideur même , la nature a ob-
fervé une fymmétrie fi exadle , qu'on ne
peut raifonnablement y rien trouver à redire.
Si, par exemple, on prétendoit alongerle
nez d'un camus , on ne feroit rien que de
difforme , parce que ce nez étant alongé ,
n'auroit plus de fymmétrie avec les autres
parties du vifage , lefquelles étant d'une
certaine grandeur &: ayant certaines éléva-
tions ou certains enfoncemens, demandent
que le nez leur foit proportionné. Ainfi ,
félon certaines règles très- parfaites , un
camus doit être tel , & félon ces règles , c'eft
un vifage régulier,' qui deviendroit monf-
trueux , fi on lui faifoit le nez aquirn.
Ceci fait voir qu'on ne doit jamais regar-
der dans un homme comme des défauts
réels , les défauts apparens de fon corps ,
parce que fouvent ce qu'on croit un défaut,
eft une perfeélion au jugement de la vérité.
Quand la nature forme un vifage, elle y
garde des mefures qui ne fauroient com-
pofer qu'un tout très-parfait par rapport aux
deffeins qu'elle a. Que les hommes en ju-
gent ce qu'il leur plaira : que les François ,
par exemple, méprifent les nez camus ôc
les petits yeux , que les Chinois les eftiment,
ce font des bizarreries de l'efprit humain;
mais fi l'on en revient aux principes , on
trouvera qu'il y a divers ordres de beauté,
comme il y a divers ordres dans l'architec-
rure. Ainfi la nature ayant garde de fçs
règles, le vifage le plus laid kAios yeux eft
auflî parfait & régulier dans fon efpece,que
celui qui nous paroît le plus beau.
Ilefttrès-vrài que la nature s'écarte quel-
9îo C O N
quefois eflTentiellement des règles qu'elle fem-
ble fe prefcrire , & dès-lors il peut bien ré-
fulter des difFonnités réelles. Dans la forma-
tion de l'homme , par exemple , il lui arrive
quelquefois de s'arrêter dans fa carrière, &
l'on voit des extrémités qui n'ont pu fe dé-
velopper entièrement. lien eft de même de
toutes les autres parties.
* Au refte, tous les peuples ne s'accordent
pas fur ce qui fait la beauté du corps. Les
Tartares félon le voyage du fieur Aubry de
la Mottraye, en Europe, ne trouvent pas
qu'une perfonne foit belle , fi elle n'a les
yeux petits & enfoncés , le nez large & plat,
le vifage écrafé , la taille ramaffée , fur-tout
pour les femmes.
Chezles Maures, les nezles plus à l'uni du
vifage font les plus beaux ; les plus grofTes
lèvres paflent auffi pour les mieux faites.
C'eft une beauté aux dames de la Chine
d'avoir le pié plus petit que le naturel ; &
pour cela , quand une fille a paflle trois ans ,
on lui rabat les orteils fous la pointe du pié ;
on lui applique enfuite une eau qui confume
les chairs, & on enveloppe le pié de plu-
fieurs bandages, jufqu'à ce qu'il ait pris fon
pli. Les femmes fe refifentent toute leur
vie d'une telle opération , & peuvent à
peine marcher. Les fouliers proportionnés
àleurspiés , font ficourts8>c fi étroits, qu'ils
le feroient trop pour un enfant de deux
ans.
Les dames de la Chine fe piquent auffi
de petits yeux ; mais en récompenfe elles
aiment à avoir de grandes oreilles^ bien
larges & bien pendantes. Cette prétendue
perfeftion eft tellement du goût des Chi-
nois , qu'une fille en qui jelle ne fe ren-
contre pas , trouve difficilement à fe marier.
Voye^^ le voyage autour du monde par M.
le Gentil.
Il y a des peuples ( ce font les Gordiens )
où c'eft un fi grand mérite d'avoir un gros
ventre , que quand ils choififiTent un roi ,
ils prennent garde fur-tout qu'il foit extré-
inement ventru.
Il y en a d'autres ( ce font les Spartes ) au
contraire , où l'on n'eftime que les gens
maigres & décharnés. {P)
Co^FORMATlOî^ externe des os,{Anat.)
on entend par-là tout ce qu'on peut y remar-
quer fans les cafter , coimi^ le volgn^ç.la;
C O N
T figure, les différentes parties extertles, &
la couleur des pièces ofleufes.' ("PJ
CONFORMISTES ( Non-)., (car on
ne dit point ce mot fans la négation ) s'en-
tend en Angleterre de ceux qui fuivent un
rit différent du rit anglican, tels que font
les Presbytériens & les Quakers.
* CONFORMITÉ, f. f. CGramm.J
terme qui défigne l'exiftence des mêmes
qualités dans plufieursfujets diflerens. Voilà
ce qu'il a de commun avec rejjemhlance^
Mais rejfemblance fe dit des fujets intellec-
tuels &c des fujets corporels. Par exemple ,
ily a beaucoup de rejfemblance entvMes deux
penfées , entre ces deux airs , entre ces deux
vif âges y entre leurs façons d'agir ; au lieu
que conformité ne s'applique qu'aux objets
intelleéluels , & même plus fouvent aux
puiftances qu'aux aâ:es. Il femble qu'il ne
faille que la préfence d'une feule & même
qualité dans deux fujets pour faire de la
reffemblance ; au lieu qu'il faut la préfence
de plufieurs qualités pour faire conformité.
Ainfil'on dit, ily a conformité entre ces deux
projets ; il y a conformité entre leur ma^
niere d*agir & depenfer ; ily a conformité
dans leurs caractères. Ainfi reffemblance peut
s'employer prefque par-tout où l'on peut
fe fervir de conformité; mai^ il n'en eft pas
de même de celui-ci.
CONFORTE-MAIN , f. m. (Jurifpr.)
Lettres de conforte-main , font une commif-
fion du roi obtenue en chancellerie par un
feigneur féodal ou cenfier , qui n'a point
droit de juftice attaché à fon fief, à l'effet
de pouvoir, en vertu de ces lettres, faire
faifir ou conforter , c'eft-à-dire , corrobo-
rer la faifie déjà faite par le feigneur fur le
fief de fon yaflal , ou fur un héritage
cenfuel.
.Quelques-uns prétendoient autrefois que
le feigneur féodal avoit une juftice foncière ,
en vertu de laquelle il pouvoir fur fon feul
ma.ndement faire faifir par le miniftere d'un
huifller : mais pour fortifier ce mandement
quelques feigneursobtcnoient des lettres de
conforte-màin , & l'huiffier , tant en vertu
du mandement du feigneur qu'en vertu de
ces lettres , procédoit à la faine ; ou bien la
faifie étant faite en vertu du mandement du
feigneur , on appofoit la main du roi en
vertu des lettres de conforu-main. Ceft
CO N
alnfi que l'explique Bacquet , tr. dit droits
dejujiicty chap. iv y n. 23. Il en efi auffi
parlé clans la coutume cl'Angoumois,tfr;. m,
& dans celle d'Auvergne, chap. xxij^ art. 2 .
Berri,«V. v, art. nG. Blois, art. 2,^1 &:
dansdu Tillet,/»<zg". 2/. On trouve la formé
de ces lettres dans des anciens protocoles
de chancellerie.
Imbèrt dans ta pratique , liv. /, chdp. ij.,
dit qu'on avoit coutume, & principalement
en Saintonge, d'ufer d'une claufe dans les
conforte-mains que les feigneurs féodaux
obtenoient de la chancellerie ou du iené-
chal de Saintonge ; ce qui nous fait voir en
palTant , que les fénéchaux donnoient ÔlQs
lettres de conforte- main auffi bien que la
chancellerie. Il étoit mandé par cette claufe ,
de conforter la main-mife du feigneur, d'a-
journer les oppofans ou refufans , pour
dire les caufes de leur refus ou oppofition,
l'exploit & la faifîe tenant nonobftant oppo-
fition ou appellation quelconque , & fans
préjudice d'icelles ; fur quoi Imbert remar-
que que cela n'étoit pas raifonnable; i''.
parce que c'étoit commencer l'exécution ,
1^. que c'étoit procéder nonobftant l'appel
dans un cas oùcelan'eft pas permis par les
ordonnances : qu'auffi par un arrêt du 10
mai 1526, rendu fur l'appel de l'exécution
de lettres royaux qui conten'oient une telle
claufe , il fut dit qu'il avoit été mal pro-
cédé & mal exécuté par le fergent, & dé-
fendu de plus ufer de telles claufes.
Au furplus la forme de prendre à^s lettres
de conforte-main qui étoit vicieufe &: inu-
tile , n'eft plus ufitée préfentement. Le fei-
gneur qui n'a point de juftice & qui veut
i'aifir , doit s'adreffer au juge ordinaire du
lieu où eft iîtué le fief fervant, ou l'héritage
qu'il veut faire faifir, & obtenir de ce juge
commiffion à cet effet : cela fuffit pour la
validité d'une telle faifie , & le feigneur n'a
pas befoin de lettres de conforte-main. Voy.
la coutume de Ribemont, art. 20. Du-
pleffis , titre des fief s ^ liv . /^, chap. iij . (A)
CONFR AIRIE,f. m. ( Ififi. eccUf ) con-
grégation ou fociété de plufieurs perfonnes
pieufes , établie dans quelque églife en l'hon-
ntur d'un myftere ou d'un faintque ces per-
fonnes honorent particulièrement. 11 y a
des confrairies du Saint-Sacrement , de la
fainte Vierge , de St. Roch , &c. dont
C O N 9tt
quelques-unes font établies par des bulles
du pape Se ont des indulgences. Dans les
provinces méridionales de France , fur-tout
en Languedoc, il y a des confrairies de pé-
nitens, de la paflion , &c. Voye^ PÉNI-
TENS. {A)
CoNFRA.iRIES,(/tt/-//^r.)el1es peuvent
être établies fans le confénterriént de l'éve-
que , ilfauterf outre des lettres patentes du
roi , bien & duement vérifiées.
Les biens des confrairies font fujëfs aux
mêmes règles que ceux des autres commu-
nautés poUr leur adminiftration ; mais ces
biens ne forment pas de bénéfices : c'eft:
pourquoi le juge royal a droit d'en connoî-
tre, de même que des queftions de pré-
féarice entre deux confrairies.
Chacun de ceux qui font membres d'une
confrairie , doit porter fa part des chargés
communes, à moins qu'il ne foit exempt
de quelques-unes , comme d'être marguil-
lier. Au refte on peut en tout temps fe retirer
d'une confrairie, Se par ce moyen l'on eft
quitte des charges pour l'avenir. TV. de la
pol. t. I y liv. II ^ tit. xij. (A)
CONFRERES, f. m. pi. noni qu'on
donne aux hommes qui font d'une confrai-
rie. Les co/i/rerei ont entr'eux'des officiers
qu'ils fe choififiTent , comme un aclminiftra-
teur pour régir les deniers provenans des
réceptions, quêtes, &c.
CONFRONTATIOÎSr, f. f.{Jurifpr.)
eft la repréfentation d'uneperfonne ou d'une
chofe vis-à-vis d'une autre. Dans le Lan-
guedoc & quelques autres provinces , on'
l'appelle acarement ou acaration.
L'ufage le plus ordinaire de la confron-
tation , eft , en matière criminelle , pour
repréfenter à l'accufé les témoins qui ont
dépofé contre lui, afin qu'ils le reconnoif-
fent & qu'ils déclarent fi c'eft de lui qu'ils
ont entendu parler dans leur dépbfition ;
que l'accufé puiflfe fournir contre eux fes
reproches , s'il en a , & les témoins y ré-
pondre.
C'étoit la coutume chez les Hébreux ,
que les témoins mettoient leurs mains fur la
tête de celui contre lequel ils avoient dé-
pofé au fujet de quelque crime , ce qu'ils
pratiquoient en conféquence d'un précepte
1' du Lévitique, cA. xxiv , v. 14. C'eft de-là
quedansl'hiftoiredeSufanneil eft dit, que
911 CO N
les deux v'e'illards qui l'accuferent mirent '
leurs VAâ'msùir Ùl tcte; cela fervoit de con-
firmation de leur déponiion , 6c teiioit iieii
chez eux de bi confrontation dont on uie
aujourd'hui.
Nous lifons dans Dion , liv. LX, que du
temps de l'empereur Claude , un foldat
ayant accufé de confpiration Valérius-Afia-
ticus, il prit à la confrontation pour Afia-
ticus un pauvre homme qui étoit tout chauve;
ce qui tait voir que la confrontation étoit
auiîi ufitée chez les Romains, & que pour
(éprouver la fidélité des témoins , on leur
confrontoit quelquefois une autre perfonne
au lieu de l'accule.
On en ufa de même dans un concile des
Ariens, où S. Athanaié fut accufé par une
femme de l'avoir violée. Thimothée prêtre
fe préfentant à elle, & feignant d'être Atha-
nafe , découvrit la fourberie des Ariens &
l'impoflure de cette femme.
Le recollement des témoins n'étoit point
en ufage chez les Romains ; mais on y pra-
tiquoit la confrontation.
Elle a pareillement lieu fuivant le droit
canon, & fe pratique dans les officiahtés;
comme il réfulte du chapitre prafcntium
xxxj extra de tefiihus & atteflationibus.
On pratiquoit en France Va confrontation
dès le premier temps de la monarchie. En
effet , on voit dans Grégoire de Tours ,
liv, VI., f, 363 , que Chilperic , lequel
coMimença à régner en 450 , ayant inter-
rogé lui-même deux particuliers porteurs
deleitresinjurieufesàS. M. manda un évê-
que qu'on vouloit en rendre complice , les
confronta les uns aux autres, même à ceux
qu'ils chargeoient par leurs réponfes.
Il y a plufieurs anciennes ordonnances
qui font mention de la confrontation des
témoins.
Celle de François I , en i «;. j6 , chap. ij ,
art. 4 , en prefcrit la forme : mais comme
ce n'étoit qu'une loi particulière pour la
Bretagne , nous ne nous arrêterons qu'à
celle de 1539, qui eft générale pour tout
le royaume.
Elle ordonne, tfr/. 74 & fuii/. que lesté-
moins feront recollés & confrontés à Tac-
cufé dans le délai ordonné par juftice , félon
la diftance des lieux , la qualité de la ma-
tière & des parties, à moins que l'affaire ne
C ON
fût fi légère, qu*il n'y eût lieu de recevoir
les parties en procès ordmaire ; que dans
les matières fujettes -dco-nfrontation ,le5 ac-
cufés ne feront élargis pendant les délais
qui feront donnés pour faire la confronta-
tion ; que , quand les témoins comparoîtront
pour être confrontés , ils feront d'abord
recollés enl'abfence de l'accu fé ; &: que fur
ce qu'ils perfifteront, & qui feraà la charge
de l'accufé , ils lui feront aufîi-tôt con-
frontés féparément 6ià part l'un après l'au-
tre ; que pour faire la confrontation., l'ac-
cufé 6c le témoin comparoîtront devant le
juge, lequel en la préfence l'un de l'autre,
leur fera faire ferment de dire vérité ; qu'en-
fuite il demandera à l'accufé s'il a quelques
reproches à fournir contre le témoin qui
eft préfent, &: lui enjoindra de les dire
promptement , qu'autrement il n'y fera plus
reçu; que (i l'accufé n'allègue aucuns repro-
ches & déclare ne le vouloir faire , & fe
vouloir arrêter à la dépofitiondes témoins,
ou s'il demande un délai pour fournir fes
reproches , ou enfin s'il a mis par écrit
ceux qu'il auroit allégués fur le champ; dans
tous ces cas il fera procédé à la lefture de la
dépoiition du témoin pour confrontation ,
après laquelle il ne fera plus reçu à propolér
aucun reproche ; que les confroutations't^hes
& parfaites , le procès fera mis entre les
mains du miniflere public pour prendre des
conclufions , &c.
L'ordonnance de 1670 contient un titre
exprès des recollemens &; confrontations ,
qui efl: le quinzième. Il eft dit que fi l'accu-
(aiion mérite d'être inftruite , le juge or-
donnera que les témoins feront recollés en
leurs dépofitions , & fi befoin èft , confron-
tés à l'accufé ; l'ordonnance dilji befoin efi ,
parce que fi les témoins fe rétraCloient au
recollement & qu il n'y eût plus de charges
contre l'accufé , il feroit inutile de lui con-
fronter les témoins.
Il eft ordonné que les témoins feront re-
collés & confrontés; la dépofition de ceux
qui n'auront point été confrontés , ne fera
point de preuve s'ils font décédés pendant
la contumace. lien eft de même s'ils font
morts civilement pendant la contumace ,
ou fî , à caufe d'une longue abfence, d'une
condamnation aux galères ou bannifîement
à temps, ils ne p CUV oient être confrontés,
fuivant
C ON
fuivant ce qui eft dit Ut. xvij , an. ix& i^.
Voyez aujji ci-après les articles CONFRON-
TATION FIGURATIVE 6* LITTÉRALE.
Dans les crimes qui peuvent mériter peine
affliftive, le juge peut ordonner le recol-
lement & la confrontation des témoins , fi
cela n'a pas été fait, & que les dépofidons
chargent confîdérablement l'accufé.
En voyant le procès , on fait iedlure de
la dépofition des témoins qui vont à la dé-
charge de l'accufé, quoiqu'ils n'aient été
ni recollés ni confrontés , pour y avoir par
les juges égard.
Les accufés qui font décrétés de prife de
corps , doivent- tenir prifon pendant le
temps de la confrontation , & l'on doit en
faire mention dans la procédure , û ce n'efl:
que les cours en jugeant l'appel en ordon-
naflent autrement.
Les confrontations doivent être écrites en
un cahier féparé ; & chacune en particulier
paraphée & (ignée du juge dans toutes les
pages, par l'accufé & par le témoin, s'ils
îaventou veulent figner, finon l'on doit faire
mention -de la caufe de leur refus.
L'accufé étant mandé après le ferment
prêté par lui & par le témoin en préfence
l'un de l'autre, le juge les interpellera de
déclarer s'ils fe connoiflfent.
On fait la leélure à l'accufé des premiers
articles de la dépofition du témoin , conte-
nant fon nom , âge , qualité & demeure, la
connoilTance qu'il aura dit avoir des parties,
& s'il eft leur parent ou allié.
L'accufé eftenfuite interpellé par le juge
de fournir fur le champ fes reproches contre
le témoin , û aucuns il a ; & le juge doit l'aver-
tir qu'il n'y fera plus reçu après avoir entendu
left ure de la dépofition , & fon doit, en faire
mention.
Les témoins font enquis de la vérité des
reproches , & tout ce que l'accufé & eux
difent doit être rédigé par écrit.
Après que l'accufé a fourni (qs reproches ,
ou déclaré qu'il n'en veut point fournir, on
lui fait letlure de la dépofition & du recol-
lement du témoin , avec interpellation de
déclarer s'ils contiennent la vérité, & fi l'ac-
cufé eft celui dont on a entendu parler dans
{es dépofitions & recollement , & tout ce
qui eft dit de part & d'autre doit pareille-
ment être écriv
Tome VJII,
CON 91 j
L'accufé n'eft plus reçu à fournir des re-
proches contre le témoin , après qu'il a en-
tendu lefture de fa dépofition ; il peut néan-
moins en tout état de caufe propofer des
reproches, s'ils font juftifiés par écrit.
Si l'accufé remarque dans la dépofition
du témoin quelque contrariété ou circonf-
tance qui puiflTe éclaircir le fait & juftifier
fon innocence , il peut requérir le juge d'in-
terpeller le témoin de les reconnoître, fans
pouvoir lui-même faire interpellation du
témoin ; & ces remarques , interpellations ,
reconnoiffances & réponfes , foiit aulfi ré-
digées par écrit.
Quoique l'accufé refufe de répondre aux
interpellations qui lui font faites , on ne
laifiTe pas de procéder à la confrontation à\i
témoin.
Si le témoin que l'on veut confronter eft
malade , la confrontation fe fait en fa mai-
fon, & pour cet effet on y transfère l'accufé.
Les experts entendus en information fur
ce qui ellde leur art, doivent être confron-
tés comme les autres témoins.
On obferve les mêmes formalités dans
les confrontations qui font faites des accufés
ou compHces les uns aux autres. Ils peuvent
fournir des reproches les uns contre les au-
tres : mais cette confrontation ne doit être
faite qu'après celle des témoins.
Lorfque dans un même procès il y a des
accufés laïques prifonniers dans les prifons
royales , & des accufés clercs dans les pri-
fons de l'ofl^cialité , & qu'il s'agit de les
confronter les uns aux autres , on amené
les accufés & complices laïques des prifons
royales à l'officialité ; & Decombes dit qu'en
pareil cas la confrontation des laïques à^ac-
cufé clerc, fut faite par les deux juges,
c'eft-à-dire par le juge laïque &: par l'ofH-
cial conjointement : mais que la confronta-
tion de l'accufé clerc aux laïques, fut faite
par le juge laïque feul , les accules étant
laïques. Voye:[ Imbert , liv. III. xiij. De-
combes, recueil des procédures de Pofficia-
lité; Bornier fur Us titres xv & xvij de
l'ordonnance.
Confrontation des Accusés les
uns aux autres , voyez ci-devant à la fin du
mot Confrontation.
Confrontation des Complices,
voye:^ ibid,
Yyyyy
^T4 C O N
Confrontation D'ÉciirTURES,ftfy.
^/-<^ev<zn?COMPARAISON d'écritures.
Confrontation d'Experts, v.a-J^-
yantpers lafindumotCoi^FRONT ATIOti.
Confrontation FiGURATivE,eft la
confrontation que l'on fait d'un témoin à
l'accufé, fans néanmoins lui repréfenter ce
témoin. Elle a lieu lorfque le témoin eu
décédé ou abfent pour caufe légitime , &
fe fait par l'affirmation tacite de la dépofi-
tion du côté de la partie civile , s'il y en
a une, ou à la requête de la partie publi-
que; fauf à l'accufé à propofer (es repro-
ches , s'il en a quelqu'un à oppofer pour
fa juftifîcation , & pour atténuer la dépo-
sition. On demande donc à l'accufé s'il a
connu le témoin défunt ou abfent , s'ill'efti-
moit homme de bien, s'il veut &. entend
s'en tenir à fa dépofition; & après fes ré-
ponfes à chaque queftion, qui doivent être
rédigées par écrit avec les reproches , s'il
en a propofé, on lui fait lecture de la dé-
pofition du témoin : c'eft enfuite à la partie
civile, s'il y en a une, ou au miniftere pu-
blic , à juftifier s'il fe peut par a6les ou au-
trement , ce qui éioit de bonnes vie &
mœurs du témoin défunt ou abfent, afin
de faire tomber les reproches. Il eft parlé
de cette confrontation figurative , dans le
jîyU du parUrmiit de Touloufc par Cayron,
/. 11^. tit. xviij^ ce qui s'appelle acaration
figurative , félon le bngage du pays. Il y a
des exemples que Va cor^rontation figurative
s'eft aulB pratiquée en certains cas dans les
autres parlemens , ainfi qu'il fut obfervé
dans le procès de MM. de Cinqmars&de
Thou, en 1641: on fit même dans ce pro-
cès une efpece de confrontation figurative,
Mon/ieur , frère du roi , ayant une déclara-
tion à faire , avoit obtenu du roi qu'il ne fe-
roit point confronté aux accufés. M. le chan-
celier reçut la dépolition avec les mêmes for-
malités avec iefquelles on a coutume de pren-
dre la dépofition des autres témoins ; on
prit feulement de plus la précaution de la
relire à Monfieur en préfence de M. le chan-
celier & de fept ou huit conieillers d'état
ou maîtres des requêtes , qui la fignerent
avec lui après qu'il eut perfifté avec fer-
ment à ce qu'elle contenoit; &c comme le
droit & les ordonnances veulent que tout
témoin foit couffonié^L le procureur gêné-
C O N
rai crût que dans ce cas il fallolt ufer d«
quelques formalités pour fuppléer à la cotz-
Jrontation ; & pour cet effet il requit que
la déclaration de Monfieur lui fût lue après
que les accufés auroient déclaré s'ils avoient
des reproches à fournir contre lui , ce qu'ils
pourroient faire avec plus de liberté en l'ab-
fence de Moniieur, qu'en fa préfence; qu 'en-
fuite les reproches &: réponfes des accufés
lui feroient communiqués : ce qui fut or-
donné par arrêt, &; exécuté par M. le chan-
celier.
L'ordonnance de 1670 ne parle pas nom-
mément de \2. confrontation figurative ; mais
elle dit, tit. xv. art, 8. que la dépofi-
tion des témoins non confrontés ne fera
pas preuve , s'ils ne font décédés pendant
la contumace ; ce qui fuppofe que dans ce
cas il y a quelque formahté qui tient lieu
de la confrontation ordinaire. Et dans le
titre xvij, art, 22.. & 2j. il cû parlé de la:-
confrontation littérale ^ qui eft la même
chofe que la confrontation figurative. Voyez
ci-après CONFRONTATION LITTERALE,
& Bornier, fur ïart. 8 . du tit. xv.
Confrontation LiTTÉRALE,eft celle:
qui eft faite à l'accufé de la dépofition d'un
témoin, qui après avoir été recollé en fa
dépofition, efl décédé ou mort civilement
pendant la contumace de l'accufé ; dans ce
cas, au lieu de confronter à l'accufé la per—
fonne du témoin, on lui confronte feule-
ment la dépofition, dont on lui fait lefture:
en la forme ordinaire pour les confronta"
tions. On en ufe de même pour les té-
moins, qui ne peuvent être confrontés à
caufe d'une longue abfence , d'tne con-
damnation aux galères ou banniiTement à
temps , ou quelque autre empêchement lé-
gitime , pendant le temps de iacontiimace.
Dans cette conjrontaiion littérale , les
juges ne doivent, avoir aucun égard aux re-
proches , s'ils ne font juflifiés par p'eces,.
Voyei rordonnancede 1 6'yo , tit. xvij . art,
Z2&2J , &: ci-devant CONFRONTATION
FIGURATIVE. f^J
Confrontation de Témoins, voj,
a-^tv. Confrontation. C^J
Confrontation en ToIirbe ou
TuRBE, l'efaitlonqueTacculéfoupçonne le
temom de faufleié; il peut requérir qu'on
.montre avec luL d'autres perfonnes au.
C O N
témoin , afin devoir fi le témoin reconnoîtra
Taccufé , ou fi fauiîëment il accule l'un pour
l'autre. Il dépend de la prudence du juge
de le permettre quenquefois ; au lieu d'ufer
-de cette confrontation par turbe. , on pré-
lente feulement une autre perfonne au lieu
de l'accufé , pour voir fi le témoin le re-
connoîira. Voyi'^^ Defpeiffes , tom. II. part.
I, lit. vil/, n. 1 1 . ÇAJ
* CONFUS, ad).CGram.Jl\ défigne
toujours le vice d'un arrangement , foit na-
turel , foit artificiel de plufieurs objets , &:
il fe prend au fimple & au figuré : ainfi il
y a de la confufion dans ce cabinet d'hijfoirc
naturelle ; il y a de la confufion dans cespen-
fécs. De l'adjedlif confus, on a fait le fubf-
t2LX\ù( confufion. ha. confufion n'eft quelque-
fois relative qu'à nos facultés ; il en eft de
même de prefque toutes les autres qualités
& vices de cette nature. Tout ce qui eft
fufceptible de plus ou de moins, foit au
^noral , foit au phyfique, n'eft ce que nous
€n alTurons que félon ce que nous fommes
nous-mêmes.
CONFUSION, ÇJurifpr.) à' actions &
de étroits , eft lorfqu'une même perfonne
réunit en elle les droits adifs & paffifs qui
concernent un même objet. Cette confufion
opère l'extinélion des droits & allions; elle
a lieu lorfque l'héritier pur & fimple, le
légataire ou donataire univerfel , fe trou-
vent créanciers ou débiteurs du défunt au-
quel ils fuccedent : mais l'héritier béné-
Ificiaire a le privilège de ne pas confondre
ies créances.
Il y a aufiî confufion de droits , lorfque
le propriétaire du îowd^ dominant devient
propriétaire du fonds fervant. V^oy. leg. de-
bitori , ^\ de fidejuff. l. Licet cod, ad leg.
yk/c/V. Belordeau, Utt. A. art. 22. & lett.
C. art. 2,2, - Defpeiftes , tom. I. part. IV.
lit. vj. Brodeau fur Louet, lett. Y.fomm.
»-. (A)
Confusion, (C/îjm/e.) Leschymiftes
modernes défignent par ce mot le mélange
de plulieurs différentes fubftances , qui ne
contraftent point d'union chymique; tel que
celui qui conftitue les poudres pharmaceu-
tiques compoTées, les potions troubles, &c.
Les corps mêlés par confufion peuvent être
ieparés par des moyens méchaniques ; les
JBgrédiens d'une potion trouble , par exem-
CO N ^i^
pie, par la réfidence ou repos, ceux dune
poudre compo'ée , par le lavage, &c.
Les différentes fubftances mêlées par con-
fufion , jouifiTent chacune de toutes leurs
qualités fpécifiques , foit phyfiques , foit
chymiques, foie médicinales.
C'eft par ces deux propriétés que la con"
fiifion diffère de la mixtion, qui n'eft pas
difir>luble par les moyens méchan'ques, &:
qui ne laifie fubfifter aucune des propriétés
ipécifiques des corps mixtionnés. Voye\
Mixtion.
Quelques chymiftes emploient le mot de
confufion pour exprinser la façon d'être de
différentes fubftances très- analogues entre
elles , & fi intimement mêlées , qu'elles ne
fauroient être féparées ni par les moyens
méchaniques , ni par les moyens chymiques:
l'eau & le vin , deux diverfes huiles efifen-
tielles , deux liqueurs vineufes différentes,
comme le vin &c la bière , &c. conftituent
par laur mélange une confufion de cette
claffe.
Cette co/2////K)/zconfifte évidemment dans
une diftribution exafte & uniforme des
parties d'un des corps , confondues parmi
les parties de l'autre. Or cette diftribution
uniforme dépendant de l'extrême analogie
des divers corps confondus , il eft clair que
la confufion dont nous parlons peut être re-
gardée comme une efpece d'agrégation,
puifque le formel de ce dernier genre d'u-
nion confifte dans l'homogénéité à^s, par-
ties. Voye:^ la nature & les propriétés de
l'agrégé, au mot ChYMIE, pag. ^02 &
fuip.
M. Henckel , qui a compté la confufion
parmi les elpeces de la conjomftionchymi-
que , regarde comme des confufions l'union
de diverfes fubftances métalliques entr'elies ,
celle de diverfes terres vitrifiées enfemble,
celle des huiles effentielles avec les huiles
par expreflion, &c. ( voy. fon appropriation^
(t6i. III. ) mais la plupart de ces unions
pouvant être détruites par des précipitans ,
elles rentrent dans la claffe des mixtions,
Foye:{ MiXTîON.
Quelques anciens chymiftes ont employé
fort miproprement le mot de confufion dans
le même fens que nous prenons aujourd'hui
ceux àefolution , difj'olution , combinaifon ;
- mais c'eftla vraie diifoluiionchymique qu'ils
Yyyyy %
91 (^ C O N
rnt prétendu exprimer 'par le nom de con-
f'ufion : ainfi ce n'eft que le mot qu'on peut
leur reprocher, hts Phyficiens expliquent
la difiblution par la confujion ; ils ont afluré
que l'union des corps folubles n'étoit qu'une
confujion , en prenant cette expreflion dans
le premier fens que nous lui avons donné
dans cet article : c'eft la choie qu'on a droit
de reprocher à ceux-ci. (h)
CONFUTATION , f. f. (Rhétoriq. )
paitie du difcours qui , félon la divifion
des anciens , confifte à répondre aux ob-
jeftiops de Ton adverfaire, 6>c à réfoudre
iès difficultés.
On réfute les objeftions , foit en atta-
quant & détruifant les principes fur lefquels
Tadverfaire a fondé {^% preuves , foit en
montrant que de principes vrais en eux-
mêmes , il a tiré de faufles conféquences.
On découvre les faux raifonnemens de fon
adverfaire, en faifant voir tantôt qu'il a prou-
vé autre chofe que ce qui étoit en queftion ,
tantôt qu'il a abufé de l'ambiguité des ter-
mes, ou qu'il a tiré une concluiion abfolue
& fans rertriftion de ce qui n'étoit vrai que
par accident, ou à quelques égards, &c.
On peut de même développer les faux
raifonnemens dans lefquels l'intérêt, la paf-
{îon , l'entêtement, &c. l'ont jeté; relever
avec adieiTe tout ce que l'animofité & la
mauvaife foi lui ont fait hazarder ; quelque-
fois il eft de l'art de l'orateur de tourner
les obje^iions de forte qu'elles paroifTent ou
ridicules, ou incroyables , oucontradifloi-
res entr'elles, ou étrangères à la queftion.
Il y aaufli des occafions où le ridicule qu'on
répand fur les preuves de l'adverfaire, pro-
duit un meilleur effet que fi l'on s'attachoit
à les combattre férieufement. Cette partie
du difcours comporte la plaifanterie, pourvu
qu'elle foit fine , délicate , & ménagée à
propos. VoyCT^ RÉFUTATION. (G)
CONGE, f.m.f/T/y?. anc. & Pharm.)
en latin congius ; forte de mefure des an-
ciens, qu'on croit être la même que le chus
ou le choa attique , qui contenoit neuf li-
vres d'huile , dix livres de vin , & treize
livres & demie de miel , félon Galien. Caf-
tel , kxic.
Les Littérateurs ont diftingué le congé
romain du congé attique , & ils ne font point
d'accord fur la capacité refpe<^ivede cha-
C O N
cune de ce^ mefmes. Rieger , introducl.
Le galon des Anglois , qu'ils appellent
congius en latin , qui eft une mefure fort
en ufage chez leurs apothicaires , & dont H
eft fouvent quefiion dans l'ancienne phar-
macopée de Londres & dans celle d'Edim-
bourg, contient huit livres d'eau, ou qua-
tre pintes de Paris, {b)
CONGÉ , f. m. fùramm.J d'eu en gé-'
néral une permiffion qu'un fupérieur ac-
corde à fon inférieur de faire une chofe ,
par laquelle celui-ci encourroit un châti-
ment s'il la faifoit de fon autorité privée.
Congé, [Hift.anc &mod. &Ar( mil.)
c'étoit anciennement, comme aujourd'hui^
une permifiîon donnée aux fotdats de s'ab-
fenter de l'armée , ou de quitter tout-à-
fait le fervice. On en diflinguoit de plu-
fieurs fortes chezles Romains , comme parmi
nous.
Le congé ahfo lu mérité par l'âge & le fer-
vice , & accordé aux vétérans , fe nomraoit
mijjiojujîa & honcfla ; ils pouvoient en con-
féquence difpofer librement de leurs per-
fonnes.
Le congé à temps éidit appelle commeatus^
quicorique abandonnoit l'armée fans cette
précaution étoit puni comme déferteur,
c'efl-à-dire battu de verges & vendu comme
efclave.
11 y avoit une efpece de congé ahfolu qui ,
quoique différent du premier, ne laiffoit
pas que d'être de queîqi:e confidération ;
parce que les généraux l'accordoient pour
raifon de bleffures , de maladies &: d'infir-
mités. Tire-Live & Ulpienen font mention
fous le titre de mijjîo caufaria. Ce congé
n'excluoit pas ceux qui l'avoient obtenu des
récompenfes militaires.
La troifieme efpece de co/z^e étoit de pure
faveur , gratiofa mijjio ; les généraux la don-
noient à ceux qu'ils vouloient ménager :
mais pour peu que la république en fouifrît^
ou que les cenfeurs fufTenr de mauvaife hu-
meur, cette grâce étoit bientôt révoquée.
Enfin il y en avoit une quatrième vérita-
blement infamante , turpis & ignominiofa
mijfio. C'eft ainfi qu'au rapport d'Hirtms
Panfa , dans l'hifloire de la guerre d'Afrique^
Céfar , en préfence de tous les tribuns &c
des centurions , chaffa de fon armée A.
Avenius^ homme turbulent, ôc qui avoi-t
C O N
commis des exa«£lions ; & A. Fontéius ,
comme maavais citoyen & mauvais officier.
Sous les empereurs, Augufte fir deux de-
grés du co/z;^^ légitime; il appeila le pre-
mier exaucloratio , privilège accordé aux
foldats qui avoient fervi le nombre d'années
prefcrit par la loi , & en vertu duquel ils
étoient dégagés de leur ferment , & affran-
chis des g;irdes > des veilles , des fardeaux ,
& en un mot de toute charge militaire ,
excepté de combattre contre l'ennemi : pour
cet effet, féparés des autres troupes , oc vi-
vans fous un étendard particulier, vexillum
vsteranorurn , ils attendoient qu'il plût à
l'empereur de les renvoyer avec la récom-
penfe qui leuravoit été folemnellement pro-
mife; & c'étoit le fécond degré qu'ils appel-
XçnempUna mijjîo. Augufte y avoit attaché
une récompenlè certaine &: réglée, foit en
argent, foit en fonds de terre, pour empê-
cher les murmures &: les féditions. Mém. de
racad. tom. If^.{G)
Congé , ( Jurlfpr. ) fignifie quelquefois
décharge , renvoi ; quelquefois il figniiie/'er-
mijjlon; quelquefois auffi il fignifie une pro-
cédure faite pour avertir un locataire de
Jonir dans le temps qui efi indiqué.
Congé d'adjuger, eft un jugement
portant qu'un bien faifi réellement fera
vendu & adjugé par décret quarante jours
après ce jugement. Lorfque les criées font
faites , Se que les oppofitions à fin d'annuller
& de charge , s'il y en a , ont été jugées ,
on obtient le congé d'adjuger-^ cela s'ap-
pelle interpofer le congé d'adjuger. Au par-
lement & aux requêtes du palais on ne
reçoit plus d'oppofition à fin d'annuller ,
de dirtraire, ou de charge , après le congé
d'' adjuger : il faut que la fa i fie réelle foit
enrégiilrce un mois avant l'obtention du
congé d'' adjuger ; autrement, & faute d'a-
voir fait cet enrégiftrement dans le temps
qui vient d'être dit, un privilégié pourroit
, évoquer la faifie réelle aux requêtes du pa-
lais , nonobfiant l'interpofition du congé
d'adjuger. Quoique le jugement qui l'ac-
corde permette d'adjuger quarante jours
après, Tadjudicanon ne fe fait que fauf
quinzaine , & après cette quinzaine on
accorde encore quelquefois plufieurs remi-
{qs , fuivantque le bien paroît porté plus ou
moins à fa valeur.
CON 917
Congé faute de coNctuRF. , eftun
défaut qui fe donne contre l'intimé, faute
par fon procureur de figner l'appointement
de conclufion dans un procès par écrit
dans le temps &c en la manière portée par
l'art. / r). du tic. xj. de l'ordonn. de 1667.
Congé de Cour , fignifie reni'oi de la
demande ; cour eft pris en cet endroit pour
toute jurifdi<flion en général.
Congé déchu de l'appel, c'eft le dé"-
faut que prend l'intimé à l'audience lorfque
l'appeilant ne fe préfente pas. Le terme congé
fignifie que l'intimé eft renvoyé de l'inti-
mation ; & décliu de l'appel ., que l'appeilant
eft déchu de fon appel ; ce qui emporte la
confirmation de la fentence.
CONGÉFAUTE DE VENIR PLAIDER, eft
un défaut qui fe donne à l'audience au dé-
fendeur contre le demandeur qui ne compa-
roit pas, ni perfonne pour lui. Ce congé
emporte décharge de la demande.
Congé faute de se présenter, eft
un ad:e délivré au procureur du défendeur
fur le regiftre des préfentations , contre le
demandeur qui ne fe préfente pas dans les
délais portés par l'ordonnance.
Congé d'entrée, eft un acquis que les
commis des aides délivrent , à l'effet de pou-
voir enlever des vins ou autres marchandi-
(ts , & les faire entrer dans une ville fujette
aux droits d'aides.
Congé de rExMUAGE , eft une permif-
fion que l'on prend au bureau des aides pour
tranfporter des vins d'un lieu à un autre ;
fans ce congé , les vins & la voiture qui
les tranfporte , pourroient être faifis &
confifqués.
Congé , en fait de marine , eft une per-
miffion de l'amiral , ou de ceux qui font
par lui prépofés , de mettre des vaiflTeaux
& autres batimens de mer à la voile , après
que la vifite en a été faite , & qu'il ne s'y
eft rien trouvé en contravention. Suivant
l'ordonnance de la marine , aucun navire
ne peut fortir des ports du royaum.e pour
aller en mer fans prendre un congé de l'a-
miral , qui doit être enrégiftré au greffe de
l'amirauté. Ce congé doit contenir le nom
du maître, celui du navire, fon port, fa
charge, le lieu de fon départ, & celui de
fa deftination.
CoN&£ , en fait d( louage , eft une décla-j
5i8 C ON
ration que le propriétaire ou le principal
locataire d'une maifon , ferme , ou autre
héritage, fait à un locataire ou à un fous-
locataire, fermier ou fous-fermier, qu'il ait
à vuicler les lieux pour le terme indiqué par
ladite déclaration.
On appelle auffi <:on^/ la déclaration que
celui qui occupe les lieux fait au propriétaire
ou principal locataire , qu'il entend fortir à
un tel terme.
Le congé y foit de la part du bailleur ou
de la part du preneur , doit être donné
quelque temps d'avance ; & ce temps eft
différent , félon l'importance de la loca-
tion , afin que chacun ait le temps de fe
pourvoir.
Pour un logement dont le prix eft au-
deffous de 200 livres , il fumt de donner
congé Ç\\ femaines avant le terme avant le-
quel on veut fortir ou faire fortir.
Si le bail eft de 200 livres & au-deffus ,
il faut que le congé foit donné trois mois
.d'avance.
Si c'eft \ine maifon entière , ou une por-
tion de maifon avec boutique , il faut donner
congéHx mois d'avance.
Pour une ferme de campagne, le congé
idoit être donné un an d'avance.
Un congé donné verbalement ne fuffit
pas , (i on l'accepte à l'amiable , il faut en
faire un écrit double; fi on refufe de l'ac-
x:epter, il faut le faire fignifier par un huif-
iier , avec affignation devant le juge du do-
jnicile pour le voir déclarer valable pour le
terme indiqué.
Quand il y a un bail par écrit, il n'eft pas
.jîécefTaire de donner congé à la fin du bail ,
parce que l'expiration du bail tient lieu de
congé : mais fi le preneur continue à jouir
j)ar tacite léconduftion , alors pour le faire
l'ortir il faut un congé, Voy. Bail TACITE ,
RÉCONDUCTION.
Congé DU Seigneur, eft la permiffion
flue le feigneur donne à ion vaftal ou à fon
renfitaire , de difpofer d'un héritage qui eft
^nouvant de lui. {AJ
Congé , ( Comm. ) eft encore une licence
ou une permiffion qu\in prince, ou {q% offi-
■ciers en fon nom donnent &: accordent
à quelques particuliers de faire un com-
•^erce qui eft interdit aux autres , tels que
C O N
font dans le Canada les congés pour la traite
du caftor.
Ces congés pour faire la traite avec deux
canots , & dont le roi s'eft réfervé vingt-
cinq par an en faveur des vieux officiers
ou pauvres gentilshommes du Canada , aux-
quels ils font diftribués par le gouverneur
général , durent un an : celui qui en obtient
\m peut le faire valoir lui-même , ou le cé-
der à un autre pour le faire valoir fous fon
nom; & leur prix ordinaire , quand on les
vtx\à. , eft de 6co écus. Trévoux , Ckambers
& Dicllon. du com.
Congé AU menu, (Cowm.) on nomme
ainfi à Bordeaux les permiflions données
aux marchands par les commis des grands
bureaux àç.s, fermes du roi, pour faire char-
ger fur les vaiffeaux qui font en chargement
des marchandifes en détail.
Congé , ÇComm.) fe dit pareillement
dans les communautés des arts &: métiers ,
des permiflions par écrir que les garçons
& compagnons font tenus de prendre 0^^%
maîtres chez qui ils travaillent lorfqu'ils en
fortent, pour juftifier que c'eft de leur bon
gré qu'ils les quittent, que le temps pour
lequel ils fe font engagés chez eux eft fini ,
& que les ouvrages qu'ils ont entrepris font
faits ; & défenfes faites aux autres maîtres,
fous peine d'amende , de recevoir les com-»
pagnons fans ces congés. Dicîionnaire de
Comm. (G)
Congé Ç aller au J , ckei les rubanicrs
& autres artifans. Lorsqu'un maître prend
un nouvel ouvrier , il eft obligé d'aller chez
celui d'où l'ouvrier fort , s'informer du fujet
du départ de l'ouvrier, favoir s'il n'eft pas
dû au maître qu'il quitte , s'arranger au
gré de tous trois pour le paiement , re-
lativement au temps qu'il le gardera : fans
cette précaution, le maître prenant un nou-
vel ouvrier fe trouveroit chargé &c refpon-
fable , en fon propre & privé nom , de tout
ce qu'il peut devoir au précédent maître qu'il
a quitré, depuis le dernier chez qui l'on a été
au con^é.
CONGÉABLE , {Jurifpr.) Foye^ I>o-
MAINE CONGÉABLE.
CONGÉDIER , ( Vénerie.) V. Aban-
donner.
CONGÉLATION, f. f. {Phyjîque.)c\h
la fixation d'un fluide , ou la privation de
C O N
<à nloViUté naturelle par Taftion du froid ;
ou enfin c'eft le changement d'une fubftance
fluide en un corps concret , folide & dur ,
qu'on appelle glace. VoycT^ Glace &
Froid.
Les Carréfiens défînifient la congélation ,
le repos ou l'immobilité d'un fluide durci
par le froid. Cette définition fuit allez natu-
rellement de l'idée qu'ils ont ck la fluidité ,
puifqu'ilsfuppofent que c'eft le mouveinent
continuel des parties du fluide entr'elles qui
la conftitue. f^oye-^ Fluide.
En. effet , l'opinion de ces philofophes
fur la congélation efl, que l'eau ne fe con-
gelé que parce que fes parties perdent
leur mouvement naturel, & adhèrent for-
tement les unes avec les autres. VoycT^
Solidité.
Les principaux phénomènes de la congé-
lation font i*^.Qae l'eau & tous les fluides,
excepté l'huile , fe dilatent en fe congelant,
c'efl-à-dire , qu'ils occupent plus d'efpace,
& qu'ils font fpécifiquement plus légers
qu'auparavant.
L'augmentation du volume de l'eau par
la congélation fournit matière à beaucoup
d'expériences; & il efl à-propos d'exami-
ner ici , & de fuivre la nature dans cette
opération.
Le vaifTeau B D ÇPl. de Pneiim. fig.
ao.) remp'i d'eau jufqu'à E , étant plongé
dans un vale où il y ait de la glace mêlée avec
du fel R ST V, l'eau s'élève d'abord de
£ jufqu'en F; ce qui paroi t venir de la con-
denfation fubire du vaiffeauqui a été promp-
tement plongé dans un milieu froid : bien-
tôt après l'eau fe condenfe à fon tour, &:
defcend continuellement de F jufqu'à ce
qu'elle foit en G, où elle s'arrête pendant
quelque temps ; mais bientôt elle reprend
des forces , venant à fe dilater, elle s'élève
de G en H; de là bientôt après , parun vio-
lent mouvement , elle s'élève en I; &
alors l'eau paroit en jff toute trouble , ref-
iemblant à un nuage , & c'efl alors qu'elle
commence à fe congeler, & fe convertit en
glace. Il faut ajouter que , pendant que la
glace fe durcit de plus en plus , & qu'une
partie de l'eau contiguëau cou du vaifîéau j9
fe congelé , l'eau continue toujours à s'éle-
ver de/ vers Z?, & elle s 'écoule enfin du
vaiffeau qui la conterwit.
CO N ^ip
l". Que non-feulement les fluides per-
dent de leurpefanteur fpécifique dans la con-
gélation, mais qu'ils perdent auffi de leur
poids abfolu ; de forte qu'après qu'ils font
dégelés on les trouve fenfiblement plus légers
qu'avant leur congélation ; ce qui peut venir
de leur diffipation , parce qu'il y a lieu de
croire qu'il fe fait une efpece de tranfpiration
même des corps glacés.
3^. Que l'eau glacée n'efl pas auffi tranf-
parente que quand elle efl fluide , &c que les
corps fe voient moins nettement.
4^. Que l'eau s'évapore prefqu'autant
quand elle efl glacée , que quand elle eft
fluide.
5^. Que l'eau ne fe congelé point dans le
vuide , 6c qu'elle demande pour fe glacer la
préfence & le conta(fl: immédiat de l'air.
6^. Que l'eau bouillie &: refroidie fe con-
gelé aiifli vite que celle qui n'a pas bouilli.
7''. Que quand la furface de l'eau efl cou-
verte d'huile d'olive , elle ne fe congelé pas
fi promptemenî que quand il n'y en a point *,
ôc que l'huile de noix l'empêche de fe glacer
à un froid violent, ce que l'huile d'olive ne
feroit point.
8^. Que Tefpritde vin , l'huile de noix ,
& l'huile de térébenthine , fe congèlent ra-
rement.
9°. Que la furface de l'eau qui fe congelé
paroît toute ridée ; que ces rides font quel-
quefois parallèles , ik d'autres fois comme
des rayons qui viennent d'un centre , &C^
tendent à la circonférence.
Les théories îk les hypothefes différentes
par lefquelles on explique ce phénomène
font en grand nombre : les principes que dif-
férens auteurs ont pofés là-deffus fe rédui-
Çenx à ceux-ci ; fa voir , ou que c'efl quelque
matière étrangère qui s'introduit dans les
interfiices du fluide , & que par fon moyen
le fluide fe fixe & augmente de volume, &c^
ou que quelque matière naturellement
connue dans le fluide en eft chaffée , & que -
le fluide efl fi'ié par la privation de cette
matière , &c.
Selon d'autres, c'efl une altération qui
arrive aux particules qui compofent le
fluide , ou d'autres parties que le fluide
contient.
Tous les fyftêmes connus fur la congéla-^-
tion p,euvent fe réduire à queiques-uns de-
9iO C O N
ces principes : les Cartéfiens qui l'attribuent
au repos des parties du fluide qui étoient au-
paravant en mouvement , expliquent la con-
gélation par la matière fubtile qui s'échappe
de dedans les pores de l'eau; ils loutiennent
que c'eft l'aclivité de cette matière éthérée
ou fubtile qui mettoit auparavant en mouve-
ment les particules des fluides , & que dès
que cette matière s'échappe il n'y a plus de
fluidité.
Quelques autres phllofophes de la même
fefte attribuent le changement de feau en
glace , à une diminution de la force & de
Tefficaciré ordinaire de la matière fubtile,
eau fée par le changement delà température
de l'air; car cette matière fubtile ainfi alté-
rée , n'aura plus aflez d'énergie pour mettre
en mouvement les parties du fluide comme
de coutume.
Lqs Gafl!endifl:es Si les autres philofophes
corpufculaires, attribuent avec aflez peu de
clarté la congélation de l'eau à l'introduâiion
d'une multitude de particule!» frigori^ques ,
qui s'introduifant en foule dans le fluide , &
s'y difl:ribuant de tous côtés , s'infinuent dans
les plus petits interflices quife trouvent entre
les particules de l'eau , empêchent leur
mouvement accoutumé, & les fixent en un
corps dur & folide qu'on appelle glace, C'eft
de l'introduftion de ces particules que vient
l'augmentation du volume de l'eau, ôc fon
plus grand froid , &c.
Ils fuppofent cettej^ntrodudiondes parti-
cules frigorifiques elientieile à la congéla-
tion^ comme ce qui la caradérife & la
diftingue de la coagulation : la dernière eft
produite indifféremment par un mélange
chaud ou froid, tandis que la première ne
doit fon origine qu'à un mélange froid. Voy.
COAGULATIOM.
Il eft fort diflicile de déterminer de quel
genre font les parties frigorifiques , & de
quelle manière elles produifent leur effet :
c'eft aufli cette difliculté qui a fait produire
plufieurs fyftêmes.
Quelques - uns ont dit que c'étoit l'air
commun qui dans la congélation s'introdui-
foit dans l'eau , & qui s'embarraflx)it avec les
particules de ce fluide , empêchoit leur
mouvement , & formoit cette quantité de
bulles qu'on apperçoit dans la glace ; que
de cette façon il augmentoit le volume de
C O N
l'eau, & par ce moyen la rendoit fpécifi-
quement plus légère. Mais M. Boyle a com-
battu cette opinion , en prétendant que l'eau
gele dans les vaifleaux fermés hermétique-
ment , & dans lefquels l'air ne peut aucune-
ment s'introduire; cependant il y a autant
de bulles que dans celle qui s'eft congelée en
plein air : il ajoute que l'huile fe condenfe
en fe gelant ; d'où il conclud que l'air ne
peut point être la caufe de fa congélation.
D'autres , ôc c'eft le plus grand nombre,
veulent que la matière de la congélation foit
un fel , foutenant qu'un froid exceflîf peut
bien rendre les parties de l'eau mobiles , mais
qu'il ne fe formera jamais de glace fans fel.
Les particules falines, difent-ils , diffbutes
Si combinées dans une jufte proportion, font
la caufe principale de la congélation , car la
congélation , a beaucoup de rapport avec la
cryftallifation. V, CrystallisATION.
Ils fuppofent que ce fel eft du genre du
nitre , &; que l'air chargé , comme tout le
monde en convient , d'une grande quantité
de nitre , fournit ce fel.
11 eft très-facile d'expliquer comment les
particules du nitre peuvent faire perdre à
l'eau fa fluidité. On fuppofe que les parti-
cules de ce fel font des aiguilles roides &
pointues ; qu'elles entrent facilement dans
les parties ou globules de l'eau ; ces parti-
cules ainfi hériflfées de pointes venant à fe
mêler, elles s'embarraflfent les unes dans^
les autres, leur mouvement diminue peu à
peu , &: il fe détruit enfin totalement.
Cet effet n'eft produit que dans le plus
fort de l'hiver : en voici la raifon ; c'eft que
dans ce teiTjps les pointes du nitre , qui agif-
fent pour diminuer le mouvement , ont plus
de force que la puiffance ou le principe qui
met les fluides en mouvement, ou qui les
difpofe à fe mouvoir. V. Fluide.
L'expérience ii connue de la gîace arti-
ficielle confirme cette opmion. On prend du
falpétre commun , on le mêle avec de la
neige ou de la glace pilée , on fait fondre ce
mélange fur le feu , en plongeant une bou-
teille pleine d'eau dans ce mélange ; tandis
qu'il fe fond, l'eau contenue dans la bou-
teille contiguë à ce mélange fe congèlera ,
quand même on feroit l'expérience dans un
air chaud. On conclut de cette expérience,
que les pointes du fel > par la pefanteur du
mélange
C O N
wêlange Se de ratmofphere , fontîntro-i
duites dansTeau à travers despores du verre.
Il paroît évident que cet effet eft unique-
ment dû au Tel, puifque nous fommes affû-
tés que les particules d'eau ne peuvent point
pafferpar les pores du verre. Dans les co/z^^-
lations artificielles, à quelque endroit qu'on
applique le mélange, foit au fond, aux côtés
ou vers la furface de Peau contenue dans le
verre, il s'y formera une petite lame de
glace. Ce phénom.ene fuit de ce qu'il y a
toujours dans tout le mélange une fuffifante
quantité de particules falines, capable d'em-
pêcher l'aélion delà matière ignée, au lieu
que dans les congélations naturelles,reau doit
ie congeler à fa furface, parce que les parti-
cules falines y font en plus grande quantité.
L'auteur de la nouvelle conjecture pour ex-
pliquer la nature de la glace , fait plufieurs
objeélions contre ce fyfféme. Il ne paroît
point, dit-il, que le nitre entre dans la
compoiîtion de la glace ; car fi cela étoit ,
on rendroit difficilement raifon des princi-
paux phénomènes. Comment , par exem-
ple, les particules du nitre ens'introduifant
dans les pores de l'eau, & en fixant toutes
fes parties , pourroient-elles augmenter le
volume de ce fluide &: le rendre fpécifique-
raent plus léger qu'il n'étoit auparavant ?
elles devroient au contraire naturellement
augmenter fon poids. Cette difficulté, jointe
à quelques autres, fait fentir la néceffité
d'une nouvelle théorie. L'auteur propofe
<lonc la fuivante , qui paroît fatisfaire à l'ex-
plication des phénomènes d'une façon qui
paroît d'abord beaucoup plus facile & beau-
coup plus fimple : elle efl: indépendante de
cette nitroduclion & expulfion de matières
étrangères.
L'eau ne fe congelé que pendant l'hiver ,
parce qu'alors {t% parties plus intimement
unies enfemble s'embarraffent réciproque-
ment l'une &c l'autre , &: perdent le mouve-
ment qu'elles avoient auparavant. L'air , ou
pour mieux dire, l'altération de fon élaftici té
& de fa force , font la caufe de fonunion plus
étroite aux particules de l'eau. L'expérience
démontre qu'il y a une quantité prodigieule
d'air groffier répandu entre les globules de
l'eau : on convient que chaque particule
d'air a une vertu élaftique. L'auteur foutient
que les petits reffbrts de l'air groffier qui eft
Tome VllL
C o N 9îT
mêlé avec l'eau, font beaucoup plus forts
& beaucoup plus tendus dans Phiver que
dans tout autre temps. Quand d'un côté ces
reffbrts viennent à fe débander, tandis que
de l'autre l'air continue à pefer fur la furface
de l'eau, les parties de l'eau preffées & rap-
prochées les unes des autres par cette dou-
ble force, perdront leur fluidité & forme-
ront un corps folide , qui reffera tel jufqu'à
ce que les petits reffbrts de l'air, relâchés
par une augmentation de chaleur , permet-
tent aux parties du fluide , d;.' reprendre leurs
premières dimenfions , &: îaiffent affez d'ef-
pace entre les globules du fluide pour qu'ils
puiffent fe mouvoir entr'eux. Mais ce fyf-
téme a fon foible , &ie principe fur lequel
il efl: fondé peut être démontré faux. Le froid
n'augmente point le reffort ni l'élafliicité de
l'air, au contraire il les diminue. L'air fe
raréfie parla chaleur, & fe condenfe parle
froid; & il efl: démontré en aérométrie ,
que la force élaftique de l'air raréfié , eft à
la force de ce même air , qui eft dans un état
de condenfation, comme fon volume quand
il eft raréfié, eft à fon volume quand il eft
condenfe. Voyei ÉLASTICITÉ & AiR.
Je ne fais pas fi c'eft trop la peine de faire
mention de l'hypothefede quelques auteurs,
dans laquelle ils expliquent d'où vient l'aug-
mentation du volume & la diminution de la
gravité fpécifique de l'eau convertie en glace,
ils foutiennent que les particules de l'eau
dans leur état naturel approchent de la figure
cubique , 6c qu'ainfi il n'y a que très-peu
d'interftices entre les parties des fluides ;
mais que ces petits cubes font changés par la
congélation en autant de fpheres , qui laiflent
entr'elles beaucoup d''efpace vuide. Les par-
ticules cubiques font certainem.ent beaucoup
moins propres à conftituer un fluide , que les
particules fphériques;de même que les par-
ticules fphériques font bien moins difpofées
à former un corps folide que ne le font les
cubiques ; c'eft ce que la nature de la fluidité
& de la folidité nous fuggere affez faci-
lement.
Au fond, pour nous faire une théorie de
la congélation , nous devons recourir , foit
aux particules frigorifiques des philofophes
corpufculaires , confidérées fous le jour &
avec tous les avantages que leur a donné la
philofophie de Newton , foit à la matière
Zzzzz
5)21 C O N
fubtile des Cartéfiens , avec tous les correc-
tifs de M. Gauteron, dans les mémoires de
Vacaiémle royale des Sciences , année
Nous joindrons ici l'un & l'autre fyftême ,
pour iaifîer au iefteur la liberté du choix.
Je commence par le premier. Lorfqu'une
quantité de particules frigorifiques & (alines
s'eft introduite par les pores entre les glo-
bules de l'eau , elles peuvent être fi pro-
ches les unes des autres , qu'elles fe trou-
vent dans leur fphere d'attraâion: il fuivra
de-là que les parties cohéreront enfemble
& formeront un corps folide jufqu'à ce que
la chaleur les fépare, les agite, rompe leur
union & les éloigne affez l'une de l'autre
pour qu'elles ne (oient plus dans la fphere
d'attradion y mais pour qu'elles foicnt au
contraire expofées à la force expullive , &
qu'alors l'eau reprenne fa fluidité. Il paroît
probable que le froid & la gelée doivent
leur origine à leur fubftance faline naturelle
qui nage dans l'air ; en effet tous les fels,
& particuliérementquelques-uns mêlés a^ec
de la neige ou de la glace , augmentent con-
fidérablement la force 64 \ts effets du froid.
On peut ajouter que tous les corps falins
donneur de la roideur &: de la rigidité aux
parties des corps dans lefquelles ils font in-
troduits.
Les obfervations qu'on a faites fur les fels
avec les microfcopes , font voir que les par-
ticules de quelques fels , avant qu'ils foient
réduits en un corps folide , paroiffent très-
fines , ôi ont la figure de petits coins ; c'eft
pourquoi elles fefoutiennent dans l'eau lorf-
qu'elles font élevées , quoiqu'elles foient
fpécifiquement plus pefaniesque l'eau.
Ces petites pointes des fels introduites dans
les pores de l'eau , &: qui font en quelque
manière foutenues par ce moyen, même dans
l'hiver ( quand la chaleur du foleil n'a pas
affez de force pour tenir les fels fufpendus
-<ians le fluide , pour émouffer leurs pointes
ou pour les entretenir dans un mouvement
continuel ); ces petites pointes , dis-je ,
venant à perdre leur arrangement & deve-
nant plus libres de s'approcher les unes des
autres , elles forment alors des cryftaux de
la manière que nous l'avons expliqué ci-
defîus, qui s'introduifant par leurs extré-
mités dans les plus j)etites parties de l'eau ,,
CO N
la convertiflfent de cette façon en un corps
folide , qui eft la glace.
Outre cela, il y a encore une grande
quantité de particules d'air difperfées çà &
là , tant dans les pores des particules de l'eau,
que dans les interftices formés par les glo-
bules fphériques. Les particules falines s'in-
troduifant dans les particules d'eau , en chaf-
fent les petites bulles d'air , celles-ci s'unif-
fant plufieurs enfemble, forment un plus
grand volume & acquièrent par cette union
une plus grande force d'expanfionque quand
elles étoient difperfées. De cette façon elles
augmentent le volume, & diminuent la pe-
fanteur fpécifique de l'eau convertie en
glace.
Nous pouvons concevoir delà comment
l'eau imprégnée de foufre , de fels &: de
terre, qui ne fe diffolvent que difficilement ,
peut être changée en métaux , minéraux ,.
gommes & autres foffiles ; les parties de ces
diflferens mixtes formant avec l'eau une ef-
pece de ciment , en s'introduifant dans les
pores des particules de l'eau , fe trouvent
changées en différentes fubftances. Voye:;^
Sel & Eau.
Quant au fécond fyfiême , comme on
fuppofe que la matière éthérée eft générale-
ment la caufe du mouvement des fluides
(roje^ÉTHER), & que Tair ne doit fon
mouvement qu'à ce même principe, il fuit
de-là que tous les fluides doivent refter dans
un état de repos & de fixité , lorfque cette
matière fubnle perd la force qu'elle doit
avoir. Par conféquent l'air étant moins
échauffé dans l'hiver à caufe de l'obliquité
des rayons du foleil, ilefl piusdenfe &:plus
fixe dans ce temps que dans toute autre fai-
fon. Outre celaons'eff convaincu par plu-
fieurs expériences, ^ue l'air contient un fel
qu'on fuppofe être de la nature du nitre.
Cela accordé, & fuppolàntla condenfation
de l'air, il fuit que les particules du nitre
doivent erre napprochées par la condenfa-
tion de Tair, & qu'au conrraire elles doi-
vent être diviiées & éloignées les unes ô.qs
autres par fa raréfàêtion &i l'a grande fluidité»
Si la même chofe arrive à toutes les liqueurs
qui font faouiées ou qui tiennent un lel en
difiblution, fi la chaleur de la liqueur tient
le fel exaêlement divifé, fi la fraîcheur d'une
cave ou de la glace fait que les molécules
CON
d*un fel diiïbus fe rapprochent les unes des
autres , fe réuniflent plufieurs enfemble &
forment des cryftaux ; pourquoi l'air qui eft
reconnu pour un fluide , feroit-il exempt
de la loi générale des fluides ?
Il eft vrai que le nitre de l'air étant plus
groflier quand il eft froid que quand il fait
chaud , devroit perdre fa vîtefte ; maisauffi
le produit de fa mafte par fa vîtefte, qui
refte la même, augmentant, il aura un plus
grand mouvement ou une plus grande quan-
tité de mouvement. Il n'en faut pas davan-
tage pour que le fel agilTeavec plus de force
fur les parties des fluides. C'eft aufll proba-
blement pour cette raifon que l'évaporation
eft fi confidérable dans un temps de gelée.
Ce nitre aérien doit être la caufe de la
concrétion des fluides : ce n'eft point Pair
ni le nirre qu'il contient qui donne le
nouveau mouvement aux fluides , puifque
c'eft la matière fubtile : donc quand cette
matière fubtile perd fa force, tout le fluide
perd en même temps une partie de fon
mouvement.
Mais la matière éthérée,aflfezfoible d'elle-
même dans l'hiver , doit de nouveau perdre
beaucoup de fa force, agifl^ant contre un air
condenfé &c chargé de molécules de fel aflTez
confidérables ; elle doit donc perdre de fa
force dans le temps froid , &: pour cela elle
a moins d'aptitude à entretenir le mouve-
ment des fluides ; en un mot lorfqu'il gelé ,
on peut regarder l'air comme la glace im-
prégnée de fel , avec laquelle nous faifons
glacer nos liqueurs en été. Probablement
ces liqueurs fe congèlent à caufe de la dimi-
nution du mouvement de la matière éthérée
par fon aélion contre la glace & le fel mêlés
enfemble : alors l'air malgré fa grande cha-
leur n'eft point en état d'empêcher la con-
crétion. Chamhcrs. (M)
La congélation de l'eau diftillée offre des
phénomenesfinguhers , qui indiquentquela
diftillation produit un changement notable
dans la manière avec laquelle les particules
<i'eau & d'air font entrelacées. M. de Caf-
tillon , profeffeur à Berlin, fe trouva avoir
par hazard deux bouteilles d'eau dans un
laboratoire , où il faifoit quelques expé-
riences : elles gelèrent toutes deux pendant
l'hiver ; mais il fut furprls de voir les figu-
res qui s'étoient formées dans la glace de la
CON 925
bouteille d*eau diftillée, tandis que l'autre
n'offroit rien de finguher.
On voyoit au milieu de la glace , un gros
noyau folide & uni, qui avoit à-peu-près
la figure d'une maflTue ; de ce noyau partoient
des filets par étages , qui s'étendoient de
tous côtés , qui étoient régulièrement in-
clinés , &: fuivoient exaélement la convexité
du fond de la bouteille ; ils étoient entre-
mêlés de petits globules d'air. Il y avoit
dans le même endroit d'autres vafes ouverts
qui contenoient les uns de l'eau forte , les
autres différentes folutions qui répandoient
une odeur aftez forte , enforte qu'on ne
pouvoit pas douter que nombre de particu-
les s'en détachaflfent & ne flottafîent dans
l'air. Il crut que ces particules avoient peut-
être pénétré l'eau diftillée qui étoit depuis
long-temps dans ce laboratoire , ou que ce
mélange s'étoit fait à mefure que la glace fe
formoit , & que cette figure fmguliere ve-
noit de là. Pour connoître quelle de ces
fuppofitions avoit lieu, il prit ces deux bou-
teilles , & les porta dans un appartement
chaud, afin de faire fondre cette glace; ilex-
pofaenfuite l'une & l'autre bouteille au froid
pour faire geler l'eau derechef , mais dans
un endroit où il n'y avoit aucune exhalai-
fon : il trouva toujours la même figure fin-
guliere dans la congélation de l'eau diftillée \
tandis que celle avec l'eau commune n'a-
voit toujours rien de particulier. Il reftoit
à favoir fi le mélange ne s'étoit pas fait à la
longue , puifqu'on voyoit clairement par
cette expérience , qu'il ne s'étoit pas fait
dans le temps de la congélation. Il prit pour
cet effet de l'eau commune nouvellement
diftillée , qu'il fit geler , & trouva que
la congélation de cette eau donnoit une figure
affez femblable à celle qui s'étoit formée dans
la congélation àt l'eau diftillée depuis long-
temps, cependant avec cette différence:
les filets de même que les globules, qui fe
trouvoient dans la glace, de l'eau nouvelle-
ment diftillée , étoient plus confidérables
que dans la plus vieille. Ces filets dans la
dernière de ces congélations , paroiflbient
partir d'un centre , & non pas d'un axe
comme dans la première. Enfin le noyau
étojt très-petit dans la congélation à,Q l'eau
nouvellement diftillée , au lieu qu'il étoit
confidérable dans l'autre.
Zzzzz 2
P24 C O N
Ces différences engagèrent M. J. de Caf-
tlllon à examiner la naturedes eaux qu'il avoit
fait geler ^ & voici quel en fut le réfuitat.
Il trouva que l'eau nouvellement diftillée
étoit un peu plus pefante que celle q.uil'étoit
depuis long-temps , &; celle-ci un peu plus
pelante que l'eau commune ; parce que la
première renferme fous un même volume
plus de particules d'eau & moins de parti-
cules d'air que les deux fuivantes. Et quoi-
que l'eau diftillée comienne moins d'air que
l'eau commune , elle donne cependant une
glace qui a un plus grand nombre de bulles
d'air que l'autre ; parce que la diftillation
réduifant l'eau en vapeurs, dégage les parti-
cules d'air de celles d'eau , & c'eft fans
doute la caufe de ces fmgulïeres congélaiions.
11 obferve encore qu'il ne fuffit pas de faire
amplement bouillir l'eau pour produire
une telle glace ; parce que ce degré de cha-
leur , quoique aftez violent , ne fepare point
encore l'air de l'eau , il faut pour cela la
réduire en vapeurs par la diftillation. f^oye^
les Mémoires de racadémie desfciences de
Berlin, pour l'année 1762. (+)
Congélation , en Chy mie ^e{{ une ef-
pece de fixation : elle fe dit du changement
qui arrive à un fluide lorfqu'il devient une
maffe folide ou molle en perdant fa fluidité,
foitque ce changement fe faife par l'air froid,
comme lorfqu'un métal fondu ou de la cire
fondue au feu fe congèlent , ou par de la
glace qui congeleles liqueurs grafles & aqueu-
fes, ou par quelque autre moyen que ce foit,
comme par les acides qui congèlent certaines
liqueurs. Fbyc;^ Coagulation, f^^
Le terme de la congélation y en parlant
d'un thermomètre , eft le point où la liqueur
s'arrête dans le tuyau, lorfqu'on plonge la
boule dans une eau mêlée de glace, Voye{^
Thermomètre. (M)
CON.GELER, c'eftôter la fluidité de ce
qui étoit liquide : des fels moyens , des alka-
lis , des acides , 6ç même des efprits mêlés
avec de la neige ou de. la glace , peuvent
congeler la plupart des liqueurs. On produit
un degré de froid très-confidérable par le
mélange de l'acide du vitriol ou de celui du
nitre avec la neige. On tient cette expérience
de M. Boyle.
M.. Homberg obfefve qu'on en fait un
froid artificiel , en mêlant enfemble parties
con
égalés du fublimé corrofif & du Tel ammo-
niac , avec quatre fois autant de vinaigre
diftillé.
L'art de congeler t{\. une chofe fort agréa-
ble en été, & d'un grand ufage pour faire:
des glaces. {M)
CONGENERE, ad j. en Anatomie ; nonv
des mufcles qui concourent tous à la même
aClion , foit à la flexion où à l'extenfion des.
parties. Voye^^ Mus CLE.
CoNGENERE,fi?o/i7/î.J il fe dit des planâ-
tes comprifes fous un même genre.
CONGERIE, (.Phyjîq.) moi dont on.
s'efl^ fervi quelquefois pour dire ïamas ou
VaJJemèlagede plufieurs particules ou corps,
unis dans une même mafl^e. Ce motfignifie
proprement un tas deplujieurs chef es réunies^
enfemblefans ordre. On ne s'en fert plus.(O)
CONGESTION , f. m. {Médecine, ) ma-
ladie des humeurs.
La congeflion efl l'àmas de quelque mar
tiere morbifique des humeurs, qui fe fait-
lentement dans une partie du corps.
Les humeurs ne pouvant être contenues
dans leurs v/iiTeaux , qu'autant que la ca-
pacité des vaiffeaux le permet , elles doivent
fuivre dans leur circulation le cours qui leur-
eft deftiné par la nature pour les befoins de.:
la vie. Or toutes les fois que ce cours s'ar-
rête, elles fe raflTemhlent néceffairement en,
plus grande quantité dans quelque partie-
du corps, & c'eft cette accumulation qu'on;
appelle congefiion. Elle réfulte 1^. ou de:
l'inaftion de la partie folide, incapable de-
domter & de chaifer la matière qui com--
mence àfe former : i*** ou de la dérivation;
de la matière peccante, déjà formée ailleurs:
dans la partie maintenant affeélée. Cette dé-
rivation fe fait par diverfes caufes que nous .
allons expofer , & qui conftituent le prin-
cipe de toutes les maladies avec matière.
i*^. Les humeurs s'accumulent dans les^
lieux voifins par la folurion de continuité
des vaiflfeaux , comme par des blefTures,
des ruptures , des piquures, &descontu--
fions : 2^. elles fe répandent dans les vaifr
féaux les plus amples, les plus relâchés ,,
ôc qui manquent de loutien ; 3". elles s'é-
panchent au-deflus des parties obftruées ^,
liées , comprimées ; 4^, le défaut , ou la di-
minution du mouvement dans les folides 6i
danslts liquides , forment des congelions i:
C O N
\<*. l'excès du mouvement & le frottement
produifent le même effet : 6^. le manque
d'abforption occafione encore des con-
geftions d'humeurs.
Quand elles font faites , elles caufent Ten-
flure de la partie dans laquelle elles fe font
dépofées , aggravent cette partie & l'appe-
fantiffent , fe corrompent & fe putréfient
par la ftagnation ; elles compriment la par-
tie voifine , rendent fon aftion plus pénible ,
ou la détruifent. Quelquefois les humeurs
ainfi accumulées, s'endurciifent & forment
des concrétions incurables ; d'autres fois elles
dégénèrent en abcès , en fuppuration , en
ichorofités, en coUiquation, «S't^. En un mot,
elles produifent mille fortes de défordres.
Dans le premier genre de caufes de ce
mal énoncées ci-deffus , il faut diriger la
cure, foit à l'ouverture du dépôt, foit à
l'évacuation, fuivant les circonftances.^Dans
le fécond genre de caufes , il faut mettre
en ufage par art des foutiens , des points
d'appui , &. fe fervir en même temps des
corroborans. Dans la troifieme, après avoir
ôté l'obftacle qui procuroit l'obftruftion ou
là compreflion ,* on fe conduira comme
dans le premier cas. Dans le quatrième ,
on doit employer les ftimulans & les dif-
cufîifs. Dans le. cinquième , fuivre une
méthode oppofée , diminuer la violence,
du mouvement , calmer , évacuer. Enfin ,
dans le. fixieme , rendre la matière plus
fluide ,. la faire rétrograder dans de. plus
grands vaiffeaux, animer les fibres par des
Ûqueurs chaudes , tenues , aromatiques ,
appliqueras moy.ens qui tendent à.augmen-
ter l'abforption.
Les congeftions de matières morbifiques
paroiflent ibus tant de faces , que la méde-
cine, pour tâcher de les caraftérifer , fe.fert
des divers termes de colUclion^ fluxion ^
dépôt ^ apofiême , délitefcence , métafiafe ,
toutes expreffions affez fynonymes dans
Tufage., & dont l'art même eft embarrafle à
crayonner la différence avec précifion : voici
L'idée que je m'en fuis faite , & que je fou-
jnets aux lumières des experts.
Je regarde la colUclion & \k congefllon
comme fignifiant abfolument la même cho-
fe; &c tandis qu'elles fe forment lentement,
\^ fluxion fefait promptemenr. Le dépôt n\t
paroît un amas d'humeurs dans quelque
C o N 91 j
partie "<, or^linairement accompagné de dou-
leurs , & fouvent de fluxion. Ce mot eft.
encore particulièrement confacré en chi-
rurgie , pour défigner un àes accldens qui
fui vent quelquefois la faignée. Je définirois
Yapoflêrm^ toute tumeur générale Ats parties
molles contre nature , procédant des matiè-
res humorales , ou réduifibles aux humeurs.
Je crois que Kahces eft cette tumeur parti-
culière contenant du pus , & qui eft une
fuite de l'inflammation. La délite] cence^our-
roit être définie , une rétroceflion de ma-
tière provenant d'épanchemens imparfaits..
La métafl.afi me femble être un tranfport
d'humeurs morbifiques d'une partie dans une
autre , & qui prend le nom de délitefcence^
quand elle furvient aux apoflêmes. Article^
de M. le Chevalier DE Jaucou RT.
CONGIAIRE , f m. [Hifi. anc.) terme
de médaillifte^ don ou préfent repréfenté-
fur une médaille..
Ce mot vient de celui de congé., congius
parce que les premiers préfens que l'on fir
au peuple confiftoient en huile & en vin ,,
qui fe mefuroient par congés. V^. CcNGE.
Le congiaire étoit proprement un pré-
fent que les empereurs faifoient au peuple
romain/ ceux que l'on faifoit aux foldatS
ne s'appelloient point congiaires ^ mais do^
natifs. ^ojqDoNATiF.
L'infcription des congiaires eft congia-r
rium , o u liberalitas..
Tibère donna pour congiaires "^oo pièces
de monnoie à chaque citoyen; Augufte en
donna. 250, 300, 400 ; Càligula donna
deux fois trois cents fefterces par tête. Né-
ron en donna quatrexents,c'eft le. premier
dont les congiaires fo'ient marqués fur les
médailles.. Adrien donna des épiceries, du
baume , du fafran ; Commode^. 725 de-
niers ; Aurélien , des gâteaux de deux livres,
du pain, de l'huile, du porc & d'autres
mets. Voje^ Sesterce. .
Les enfans n'étoient point exclus de cette
libéralité du temps d'Augufte., quoiqu'au-
paravant il n'y. eût que les enfans au-deffus
de douze ans qui y euifent part..
Il n'-eft plus fait mention des congiaires
dans les médailles des empereurs depuis
Quintillus , loit que les moneiaires aient
alors cefte de repréiènter ces fortes de libé-
ralités fur la monnoie, foit que. ces priiKes
9i6 C O N
n'aient pas eu le moyen de deftiner à ces
dépenfes leurs revenus , qui pouvoicnt à
peine fiiffire à foutenir les guerres confidé-
rsbles qui ravagefVient l'empire. fGJ
CONGLETON, ( Géogr. mod.) ville
d'Angleterre, dans la province de Ches-
hire , fur la rivière Dan.
CONGLOBÉ , [Médecine. Phyfiolog.)
glande conglobée. V'oyci GLA.NDE.
CO^GLOUEKt.ÇMédecine. PJiyfio-
logie.J glande conglomérée. Voy. Glande.
CONGLUTINATION, f. f. (Phyfiq.)
à la lettre fignifie l'action de joindre ou de
cimenter deux corps enfemble, au moyen
de matières gluantes & tenaces. Voye:;^
Ciment , Glu, &c.
Ce terme s'emploie particulièrement en
■médecine , pour fignifier Vappo/ition ou
{'adhérence de quelque nouvelle fubftance,
ou Vaccroijfement de confiftance dans les
fluides des animaux , afin de les rendre plus
nourriffans. Voye^ ACCROISSEMENT &
Nutrition. fZJ
CONGLUTINÊ, {Médecine. Phyfiolo-
g'ie.) glande conglutinée. ^(t/^? Glande.
CONGO , ( Géogr. mod. G* Comm. )
grand pays de l'Afrique , qui comprend
plufieurs royar.mes ; il eft borné au nord par
;la rivière de Zaïre , à l'orient par les royau-
mes de Macacou & Anzico , parles Mon-
foies, les Jagas, & le Matamba ; au midi
par la rivière de Dende ; & au couchant par
•ia mer. Ce pays eft habité par des Nègres ,
parmi lefquels il y a un grand nombre de
chiétiens. Les Portugais y ont de grands
érabiiffemens. Ce font eux qui l'ont décou-
-vert en 1484; ils s'en emparèrent en 1491 ;
Jeur réfidence principale eft à Loanda; la
-traite des efclaves y eft leur plus important
.^commerce. Les meilleurs nègres font de
San-Sa!vador & de Sondy ; le pays produit
du morfil, de la cire , & de la civette : on
♦y porte des étoffes d'or, d'argent, de ve-
lours , çlu galon , de la vaiftelle de cuivre ,
^^es chapeaux , des armes , des eaux-de-vie,
.des vias , &-C. Il y a dans le royaume du fer
6c du cuivre en mines.
CONGRE , conger^ f. m. {Hifi. nat.
JchthioL) poifîbn de mer fort alongé; il a
ordinairement quatre ou cinq coudées de
longueur , & il eft fouvent de la groffeur
4e la cu^fle d'un homme. Sa peau eft lifte
C O NT
& gHft*ante comme celle de Tanguille , a
laquelle il refîemble beaucoup. L'extrémité
du bec eft charnue *, on voit au deftiis deux
petits prolongemens de même fubftance.
Les dents font petites & les yeux grands;
la couverture des ouies n'eft pas offeufe ,
c'eft une peau qui ne laiffe que deux petits
trous fous les nageoires qui font de chaque
côté. Il y en a une qui s'étend depuis la fin
du cou jufqu'à la queue, & une autre de-
puis l'anus aufti jufqu'à la queue , qui eft
terminée en pointe. Ces deux nageoires font
d'une confiftance ferme, leur bord eftnqir ;
les narines font petites, rondes & placées
près des yeux. Il a une bande blanchâtre ,
formée par un double rang de points , qui
s'étend fur chacun des côtés de ce poiffon
depuis la tête jufqu'à la queue. Le ventre
eft blanc & le dos noir dans les congres
qui refîent contre les rivages; ceux qui font
dans la haute mer on\ le dos blanc comme
le ventre. La chair de ce poiffon eft dure ,
& on n'en fait pas grand cas en France.
Rondelet , XIV'. livre des poiffons. Wil-
lughby , Hifloria pifciurn. Voye^ AN-
GUILLE, PoiSSON.(T)
* Congre (Pêche du). La pêche du
congre eft affez confidérable ; elle fe fait
dans de grands bateaux qui ne font alors
montés que de quatre hommes; elle com-
mence ordinairement vers la faint Jean , &
dure jufqu'après ia faint Michel. Pendant
les trois premiers mois de l'été, les vents
d'oueft y font fort contraires , parce qu'ils
empêchent les pêcheurs de fortir des ports
& petites baies qui font le long de la côte
de l'amirauté de Quimper en Bretagne , ou
fe fait la pêche que nous allons décrire.
Les congres fe prennent entre les rochers;
chaque matelot a trois lignes ; elles font
longues de cent cinquante braftés chacune.,
& de la groffeur des lignes àts pêcheurs
de Terre-neuye ; elles font chargées par le
bout d'un ploinb du poids de dix livres
pour les faire caler ; depuis le plomb jufqu^à
cinquante braftes , il y a vingt-cinq à trente
piles d'une braffe de long , éloignées cha-
cune d'une brafTe & demie , garnies d'un
claveau , amorcé d'un morceau de la chair
du premier poifton qu'ils prennent quand
ils commencent leur pêch^ , foit fêchp »
orphie y aia(juereau , ^c.
C O N
Il faut , pour la faire avec fuccès , une
mer baffe &f fans agitation , & que le bateau
foit à l'ancre. Les pécheurs d'Audierne ,
après leur pèche finie, reviennent de temps
à autre à la maifon ; au lieu que ceux de
rîle des Saints , qui partent de chez eux le
lundi , n'y reviennent ordinairement que
Ig famedi. Le nombre des équipages d'un
bateau pour faire cette pèche neû point li-
mité, ils font tantôt plus, tantôt moins, &
le plus fouventjufqu'à fept ou huit hommes.
Quand ils font leur pèche , ils relèvent
leurs lignes de deux heures en deux heu-
res , pour en ôter le poifTon qui s'y trouve
arrêté.
Les pécheurs font à la part ; le maître &
le bateau ont chacun une part & demie , &
les autres matelots de l'équipage chacun
une part feulement.
Ceux qui achètent des congres pour les
faire fécher , les ouvrent par le ventre de-
puis la tête jufqu'au bout de la queue ; on
levir laiffe la tête, on ne les fale point; on
fait des taillades dans les chairs qui font
épaiffes , pour faciliter à l'air le moyen de
les deffécher plus aifément ; on paffe un bâ-
ton d'une extrémité du corps du poiffon à
Tautre pour le tenir ouvert, & on le pend
à l'air. Quand ils font bien fecs , on en fait
des paquets de deux cents livres pefant ,
qu'on envoie à leur deftination; ils paffent
ordinairement à Bordeaux pour le temps
de la foire.
Le produit de cène pêche efî fort dimi-
nué; elle monte cependant année com-
mune à mille quintaux ; autrefois le congre
ne fe vendoit que douze à quinze livres au
plus ;lequintalauiourd'hui paffe vingt livres,
& le cent va quelquefois jufqu'à dix écus :
ce poiffon fec déchoit confidérablement du
poids dans la sarde & dans le tranfport.
CONGRÉGATION, f f. {Phy/iq.) efl
un terme dont s'eft fervi M. Grew pour
fignifîer le plus petit degré de mélange des
parties d'un mixte, c'efl-à-dire, celui par
lequel les parties du mix^e n'entrent point
les unes dansles autres , ou n'adhèrent point
enfemble, mais fe touchent dans un point.
Harris.
Cet auteur penfe que les particules de
tous les fluides fe touchent , ou que leur
cohéfion n'efl qu'une congrégation. Quel-
C O N 9^7
que fentiment qu'on fuive fur la nature des
fluides, on ne peut fe difpenfer de conve-
nir que les particules de ces corps peuvent
fe mouvoir librement entre elles , & cèdent
avec facilité au mouvement qu'on leur im-
prime ; auffi plufieurs auteurs croient- ils
que les particules ont peu d'adhérence , &c
fe touchent par un très - petit nom'nre de
points. C'efl ce qui fait que ces mêmes '
auteurs les ont confidérées comme des glo-
bules très-petits, qui fe touchent, & qui
peuvent gliffer les uns fur les autres ,,& être
déplacés facilement. Mais cela ne fufïït pas
pour nous donner une idée de la nature
des fluides , & pour expliquer les phéno-
mènes qu'on y obferve , comme l'égalité
de prefTion en tout fens. VoycT^ Fluide ,
Pression, Hydrostatique, Adhé-
rence, &c.(0)
Congrégation , {Hift, mod.) efl ime
affemblée de plufieurs perfonnes qui for-
ment un corps, mais finguîiérement d'ec-
cléfîafliques. VoyeT^ ASSEMBLÉE, &c.
Ce terme s'emploie plus particulière-
ment des diiFérens bureaux de cardinaux
commis par le pape , &: diflribués en plu-
fieurs chambres pour la direélion de cer-
taines affaires ; comme font les différentes
commiflîons ou bureaux des affaires qui font
portées au confeil d'état V, Cardinal.
La première efl la congrégation du Joint
office ^ ou \ inquijition , compofée de douze
cardinaux & même davantage , félon qu'il
plaît au pape ; on y joint plufieurs prélats
& théo'ogiens de divers ordres religieux ,
qui portent le titre de confulteurs de Cin-
quijîtion : le cardinal qui enefl fe chef, tient
le cachet ou fceau de l'inquifition. La fé-
conde , celle qui a une jurifdi(^ion fur les
évêques & fur les réguliers ; elle connoît
àes différens qui naiffent en Italie entre
les évêques & leurs diocéfains, & même
entre les moines &; religieux, elle répond
aux confuîtations que lui font les évêques :
elle efl compofée de plufieurs cardinaux
habiles dans les matières canoniques. La
troifieme e([ celle de V immunité eccléjiaf-
tique , établie pour favoir fi certains dé-
linquans doivent jouir de cette immunité ,
c'eft-à-dire , fi l'on doit les prendre dans
l'églife ou non, lorfqu'ils s'y font retirés :
outre pluileurs cardinaux qui y préfident y-
928
C O N
CO N
«lie
teu
! a encore un clerc de chambre, un ^ud'i- i grégatwns de Cluni , de S. Vannes, 6c de
r de rote , & un référendaire. La qua- S. Maur, toutes trois de bénédidlns. Voyc'^
Blancs-
-trieme eft celle à\x concile^ pour expliquer
Jes difficultés qui naiffent fur celui de Trente,
qui eft leïkrnier coniiU général. La cin-
quième eft celle des coutumes , cérémo-
nies , préiéances , canonilàtion ; on l'appelle
la congrégation des rits. La fixieme eft celle
de la fabrique de S. Pierre ; elle connaît
des legs pour œuvres pies , dont une partie
appartient à l'églife de S. Pierre. La fep-
tien^e eft celle des eaux, cours des rivières,
ponts &: chauffées. La huitième , celle des
fontaines & des rues , dont le chef eft le
cardinal camerlingue, La neuvième celle de
Vindex , qui eft chargée de révilion des
livres ou imprimés, ou à imprimer. La
dixième eft le confeil d'étar , pour toutes
les affaires qui concernent le domaine du
pape &: de l'églife, &: fe tient fouvent de-
vant fa fainteté : on l'appelle la confulte.
L'onzième eft la congrégation de bono regi-
mine Ç àw bon gouvernement :J le cardinal
rieveueftlepréfidentde ces deux^ernieres.
La douzième eft celle de la monnoie, qui
donne fon avis fur les monnoies déjà battues
ou à battre , & qui met le prix à toutes celles
des princes étrangers. La treizième, celle des
évêques^ où l'on examine les fujetsqui doi-
vent être promus aux évêchés d'Italie, elle
iè tient en préfence du pape. La quator-
zième eft celle des matières confîftoriales ,
dont le cardinal-doyen eft le préfident. La
quinzième eft celle de propaganddfide (de la
propagande ) établie pour régler ce qui
concerne les miflions. Il y a encore la con-
grégation des aumônes , qui a le foin de ce
qui concerne la fubfîftance de Rome & de
tout l'état de l'Eglife. Ces congrégations
changent quelquefois, félon la volonté des
papes , qui en établiffent de nouvelles félon
l'exigence des cas ; comme dans les autres
pays des fouverains créent des tribunaux ou
commiffions à temps & pour certaines
affaires. ÇG) Ça)
Congrégation fe dit auffi d'une com-
pagnie ou fociété de religieux, qui fait par-
tie d'un ordre entier , & forme plufteurs
monafteres ou mailons religieufes fous une
môme règle & fous un même chef; telles
que la congrégation de France pour les cha-
noines réguliers de S. Auguftin , les con'
les articles BÉNÉDICTINS &
MANTEAUX ; nous y avons parlé des fer-
vices que l'ordre de S. Benoit a rendus &
rend encore aux lettres & à l'églife. Il ne fera
peut-être pas inutile de donner ici la hfte
des ouvrages confidérables que font ou
qu'ont fait Aq^ Bénédiftins actuellement
vivans , dont la plupart font de la congré-
gation de S. Maur , & les autres de celle
de S. Vannes. Voici les principaux : Ihif-
toire littéraire delà France, la colledlion des
hiftoriens de France , le Gallia chriftiana ;
la nouvelle diplomatique , l'art de vérifier
les dates , l'hiftoire des Gaulois , l'hiftoire
de Bretagne, celle de Languedoc, l'hif-
toire des auteurs facrés 6c eccléliaftiques ,
les ouvrages nombreux &: favans de dom
Calmet, l'ouvrage de dom. Charles Wal-
mefley fur le calcul intégral , les ouvra-
ges de D. Prudent Maran , &: plufîeurs
éditions des pères , &c. Nous n'indiquons
ici qu'une partie de ces travaux ; mais nous
faififfons avec plaifir l'occafion de rendre
juftice à cette favante congrégation, qui ne
paroît point déchue de fon ancienne ardeur
pour le travail , qui rend à la littérature de
vrais fervices par fes ouvrages , & donne
à l'églife &: aux autres ordres religieux un
exemple bien digne d'être imitée. (O)
Congrégation fe dit encore d'une
affemblée de perfonnes pieufes en forme
de confrairie, comme en avoient particu-
lièrement les jéfuites en l'honneur de la
Vierge , &c. Voye^ CoNFRAlRiE.
Congrégation de Pénitence ,
voyei PÉNITENCE.
Congrégation de la sainte Tri-
nité , voyei Trinité.
Congrégation de l'Immaculée
Conception, voy. Immaculée Con-
ception.
Congrégation de Latran , voyc^
l'article LatRAN.
CONGRÈS , f. m. (Hift. modj fe dit
d'une affemblée de députés ou d'envoyés
de différentes cours , réunis pour traiter de
la paix, ou pour concerter ce qui peut être
avantageux à leur bien commun.
Le congrès de la Haye qui fe tint pen-
dans le cours de la guerre terminée en 1697
par
CO N
par le traire de Rirvich , étoit composé
des ambafladeurs de France, & des envoyés
de tous les princes ligués contre la France.
Nous avons eu depui-^ , les congrès de
Cambrai & de Soifibns , dans lefquels
rien ne fut ni réglé , ni décidé. Charnbirs.
Congrès, {Jurlfpr.) c etoitune preuve
juridique à laquelle on avoir recours au-
trefois dans les cauTes de mariage, lorf-
qu'on en prérendoit la nullité pour fait
d'impuifiance.
Cette forte de preuve , inconnue dans le
droit civil auifi bien que dans le droit cano-
nique, avoit été introduite dans les ofîicia-
lités vers le milieu du xvj fiecle.
On en attribue l'origine à l'eiFronterie
d'un jeune homme , lequel étant accufé
d'impuiffance , offrit de faire preuve du
contraire en préfence de chirurgiens & de
anatrones. L'official trop facile ayant déféré
à fa demande , cette preuve , toute contraire
qu'elle étoit à la pureté de nos mœurs , de-
vint en ufage dans les officialités , & fut
même autorifée par les arrêts-
Cette preuve fcandaleufe fe faifoir en pré-
fence de chirurgiens & de mairones , nom-
més par l'official.
On a depuis reconnu l'indécence d'une
telle preuve, & le peu de certitude même
que l'on en pouvoir tirer : c'eft pourquoi
l'ufage en fut très-fagement défendu par
un arrêt du parlement du i8 février 1677,
rapporté ?ix\ journal du palais. ÇAJ
CONGRIER , f. m. ( Jurifpr. ) du latin
congregare. Le droit de congrier eft la fa-
cuhé que quelqu'im a de faire une efpece
de garenne à poiifon dans une rivière- Le
congrier eft une enceinte formée par de
gros pieux enfoncés dans la rivière, joints
l'un près de l'autre , &: fortant hors de l'eau.
Ce terme efl: ulité en Anjou , comme il
paroît par un aveu du 23 novembre i ^98 ,
où un valTal reconnoît devoir à fbn fei-
gneur une certaine redevance , pour avoir
<lroit de congrier en la rivière de Sartes,
dont il eft fait mention dans le gloj/aire de
M. de Lauriere ; mais la note eu de M.
Galland. {AJ
CONGRUE , C Jurifpr. ) voye^ Por-
tion CONGRUE.
CONGRUENCE, f. f, (MéiaphJ éga-
Tomc VIII,
C O N 919
îlté & fimilltude de deux chofes. Par exem-
ple , deux triangles femblables &: égaux
fontcongruens. Suppofezpareillement deux
corps humains où fe trouvent les mêmes
qualités & les mêmes dimenfions , un tout
correfpondra exa<ftcment à l'autre , Se cha-
que partie à la partie fembiable. La co/z-
gruencc confifte donc dans l'identité des
quantités &: des qualités. Prenons les deux
triangles congruens ; chaque ligne delà cir-
conférence de l'un eft égale à la pareille de
l'autre , les quantités des angles font les
mê.mes, & la grandeur d'une aire couvre
exaftement celle de l'autre. Voilà pour les
quantités. 11 en eft de même pour les qua-
lités, iavoir de l'efpece , des lignes, de la
proportion des angles, &c. de là réildte la
pollîbilité de leur flibftitution. Vous dé-
montriez quelque chofe t'ur i'un , mettez
l'autre à fa place , votre démonft ration pro-
cédera toujours de même. C'tft ce qu'on
fait fouvent en géométrie, où la cougmence
& l'égalité des bornes des figures fert dans
plufieurs théorèmes. On appelle borne ou
limite .^ ce au delà de quoi on ne conçoit
plus rien qui appartienne au fu jet. Par exem-
ple , on ne fuppofe dans la ligne qu'une
étendue en longueur. Ses bornes font donc
fes deux derniers points; l'un à une extré-
mité , l'autre à l'autre , au delà defquels on
n'en fauroil afîigner d'autres qui appartien-
nent à la ligne. En largeur , elle n'a point
de bornes concevables , puifqu'cn exclut de
la ligne l'idée de cette climenfion. Voyer^
Coïncidence.
Cette notion de la coagruence s'accorde
avec l'ufage ordinaire & avec la fignifica-
tion reçue par les mathématiciens. Euclide
fe bornant à la notion confufe de la con-
gruence , s'eft contenté de mettre entre les
axiomes cette propofttion : Qiiœjihi mutub
congruunt , ea inter fe ctquaiia funt. Or il
paioît par l'application de cet axiome *
qu'une grandeur appliquée à l'autre lui eft
congruente , lorfque leurs bornes font les
mêmes: ain{i,ruivanîla penfée d 'Euclide^
ime ligne droite congrue à une autre, ii
étant po/ee fur elle , les points de fes extré-
mités, &: tous ceux qui font placés entre
deux , couvrent exactement les points qui
y répondent dans la ligne pofée deftbus.
hQ.% géomètres donc qui définirent la con*
Aaaaaa
930 C O N
grucnce par la coïncidence des bornes, "fui- |
vent l'idée d'Eiiclide. Quoique cet ancien
ne fe ferve de la congruencc que pour prou-
ver 1 égalité des grandeurs , il Tuppcfe pour-
tant dans fa notion la reffemblance jointe à
l'égalité , car il ne démontre l'égalité par la
congruencc que dans les grandeurs fembla-
bles , & il eft même impoflible de la dé-
montrer dans d'autres grandeurs. Mais il
s'en eft tenu à la notion de la congruencc ,
qui répondoit à Ton axiome fufdit , fans
l'approfondir davantage. C'eft ce qui arrive
.pour l'ordinaire dans nos idées confufes.
nous ne tournons notre attention que fur
ce dont nous avons befoin ; &: négligeant
le refte, il femble qu'il n'exifte point. Mais
des yeux philofophiques qui fe propofent
d'épuifer la connoiffance des fujets , cher-
chent dans une notion non feulement ce
qu'elle a d'utile pour un certain but , mais
en général tout ce qui lui convient & la
caradérife. C'eft-là le moyen d'arriver aux
notions diftinftes & compleîtes. Article
de M. FORMEY,
CONGRUISME, f. m. (rA<:W.) (M
B. l'anglois porte congruit^, que j'ai cru
devoir rendre par congruifmc ; terme très-
ufité dans nos théologiens , pour exprimer
le fyftéme dont il s'agit ici;) fyftême fur
l'efficacité de la grâce , imaginé par Suarez ,
Vafquez, ôc autres qui ont voulu adoucir le
lyftême de Molina. Voye^ MoLiNiSME.
Voici l'ordre que ces théologiens mettent
dans les décrets de Dieu , & en même temps
toute la fuite de leur fyftême. i°. Dieu,
de tous les ordres polîibles des chofes, a
choifi librement celui qui exifte mainte-
nant, & dans lequel nous nous trouvons,
1^. dans cet ordre Dieu veut, d'une ro-
lonté antécédente , le falut de toutes fes
créatures libres , mais à condition qu'elles
le voudront elles-mêmes : 3°. il a réfolu
de leur donner des fecours fuffifans pour
acquérir la béatitude éternelle ; 4'*'. il con-
noît , par la fcience moyenne , ce que cha-
cune de ces créatures feia dans toutes &
chacune des circonftances où elle fe ren-
contrera , s'il lui donne telle ou telle grâce :
5*^. fuppofé cette prévifion, il en choifit
quelques-unes par une volonté de bon plai-
fir , & par un décret abfolu & efficace :
é'^, il donne à celles qu'il a choifies de la ,
C O N
forte , & non aux autres , une fuite de grâ-
ces qui ont un rapport de convenance ou
une congruité avec la difpofition de leur
libre-arbitre & de leur volonté : 7*^. il con-
noît par fa fcience de viiion , qui font
celles qui doivent être fauvées , qui font
celles au contraire qui feront réprouvées :
8°. en conféquence de leurs mérites ou
démérites , il leur décerne des peines ou
des châtimens éternels. Tout ce fyflême ,
par rapport à l'efficacité de la grâce , fe
réduit donc à dire que Dieu , qui connoît
parfaitement la nature de la grâce, &i les
difpofitions futures de ia volonté dcThomme
dans les clrconftances où il fe trouvera ,
lui donne des grâces par lefquelles , en
vertu de leur congruité ou convenance avec
fa volonté confidérée dans ces circonflan-
ces , il fera toujours infailliblement , quoi-
que fans être néceffité , ce que Dieu vou-
dra qu'il fafTe ; parce que la volonté, félon
le langage des congruiftes , choifit toujours
infailliblement, quoique librement , ce qui
paroît le meilleur , dès qu'elle eft aidée de
ces fortes de grâces. ÇGJ
CONGRUISTES , iubft. mafc. pluriel ,
(Thcol.J théologiens auteurs ou défenfeurs
du fyftcme appelle congruifmc. V. CoN-
GRUISME. (G) -
CONGRUITÉ, f. f. (rAe'o.) conformité
ou rapport de convenance d'une chofe avec
une autre ; de la grâce avec la volonté.
Les théologiens diftinguent deux fortes
de congruité : l'une intrinfeque, qui vient
de la force & de l'énergie intérieure de
la grâce , & de fon aptitude à incliner le
confentement de la volonté : cette con~
gruité eft l'efficacité de la grâce par ele-
même.
L'autre , intrinfeque , qui vient de la
convenance de la proportion de la grâce
avec le génie , le caractère , les penchans
de la créature , conjointement avec la vo-
lonté de laquelle la grâce doit agir , fuppofe
telles ou telles circonftances prévues dcDieu
par la fcience moyenne, & dans lefquel'es
il accordera telle ou telle grâce, afin qu'elle
ait fon effet. C'eft cette dernière efpece de
congruité qu'admet Vafquez , elle eft la
bafe de fon fyftême. Tournel , degrat.part,
11^ quaft. V. art. 11 , paragr. 4. (Cr)
CONI , {Géogr, mod.) ville très-forte
CO N
d'Italie dans le Piémont, capitale du pays
du même nom , au confluent de la Geffe &
de la Sture. Lono;. 2jS , 20 ; lut. 44, 23.
* CONJECTURE , f. f ( Gram. ) ju-
gement fondé fur des -preuves qui n'ont
qu'un certain degré de vraifemblance, c'eft-
à-dire fur des circonftances dont l'exiftence
n a pas une liaifon aflez étroite avec la chofe
qu'on en conclut, pour qu'on puiiïe afl'u-
rer poiirivement que les unes étant, l'autre
fera ou ne fera pas : mais qu'eft-ce qui met
en état d'apprécier cette liaifon ? l'expé-
rience feule. Qu'eft-ce que l'expérience ,
relativement à cette liaifon ? Un plus ou
moins grand nombre d'eiïais , dans lefquels
on a trouvé que telle chofe étant donnée ,
telle autre l'étoit ou ne l'étoit pas; enforte
que la force de la conjecture. , ou !a vrai-
femblance de la conclutîon, eft dans le rap-
port des événemens connus pour , aux évé-
ncmens connus contre : d'où il s'enfuit que
ce qui n'eft qu'une foible conjecture pour
l'un , devient ou une conjecture très-forte ,
ou une même démonftration pour l'autre.
Pour que le jugement celTe d'être conjec-
tural , il n'eft pas néceffaire qu'on ait trouvé
dans les eiTais que telles circonftances étant
préfentes , tel événement arrivoit tou-
jours , ou n'arrivoit jamais. Il y a un
certain point indifcernable où nous cefTons
de conjeflurer, & où nous affurons pofitive-
ment; ce point, tout étant égal d'ailleurs,
varie d'un homme à un autre , & d'un inftant
à un autre dans le même homme , félon l'in-
térêt qu'on prend à l'événement, le carac-
tère, & une infinité de chofes dont il eft im-
pofTible de rendre compte. Un exemple jet-
tera quelque jour fur ceci. Nous favons par
expérience j que quand nous nous expofons
dans les rues par un grand vent , il peut nous
arriver d'être tués par la chute de quelque
corps; cependant nous n'avons pas le moin-
dre foupçon que cet accident nous arrivera:
le rapport des événemens connus pour, aux
événemens connus contre , n'efl: pas affez
grand pour former le doute & la conjecture.
Remarquez cependant qu'il s'agit ici de
l'objet le plus important à l'homme , la con-
fervation de fa vie. Il y a dans toutes les
chofes une uniré qui devroit être la même
pour tous les hommes, puifqu'elle eft fon-
dée fur les expériences, 6c qui n'eft peut-
CON 93t
être la même ni pour deux hommes , ni
pour deux aiflions de la vie , ni pour deux
inftans : cette unité réelle feroit celle qui ré-
fulteroit d'un calcul fait par le philofophe
ftoïcien parfait , qui fe comptant lui-même
& tout ce qui l'environne pour rien, n'au-
roit d'égard qu'au cours naturel des chofes;
une connoilfance au moins approchée de
cette unité vraie , & la conformité des fen-
timens & des actions dans la vie ordi-
naire à la connoiflance qu'on en a , font
deux chofes prefqu'indifpenfable pour conf-
tituer le cara6lere philofophique ; la con-
noiflance de l'unité confti tuera la philofo-
phie morale fpéculative ; la conformité de
fentimens & d'aélions à cette connoiflance,
conftituera la philofophie morale pratique.
CONIFEREfARBREj,adj. ^//?. nat.
bot. Les boraniftes appellent arbres conifè-
res tCQMTiqni portent des fruits de figure co-
nique , comme le cèdre du Liban , le pin,
le fapin , lepicéa, la mélèze, &c. On pré-
tend que' ces arbres font à l'épreuve de la
corruption & des imprelîions du temps :
mais c'eft beaucoup trop prétendre; & ce
feroit alTez de dire , que ces fortes d'arbres
font, chofes égales, généralement moins
fujets à la pourriture & à la corruption que
les autres , à caufe que leur bois eft plus com-
pare, plus fohde , & qu'ils font remplis de
fève , ou d'un fuc abondant, gra« &c amer.
Il paroît qu'ils viennent prefque tous d'une
femence; & Bodœus de Stapel, dans fon
commentaire fur Théophrafte , dit avoir
fouvent eflayé fi les arbres conifères^ ne
pourroient point fe reproduire en en plantant
un jet ou une branche en terre , mais qu'ils
n'ont jamais bourgeonné , &: que toutes fes
peines ont été infru^tueufes. Il eft fur qu'on
n'a pas aflez multiplié les expériences en ce
genre , Oc je crois que Stapel eft dans l'erreur.
Le fruit des arbres co/zi/érci porte en Bo-
tanique le nom de cône., qui défigne àts
fruits écailleux, fecs & durs, faits en forme
de pyramide, contenant pour l'ordinaire
deux femences fous chaque rejeton. Ray
comprend aufli fous ce nom , fans égard
à la figure pyramidale , les fruits qui font
compofés de plufieurs parties cruftacées ,
ligncufes , étroitement unies , & s'ouvrant
quand le fruit eft mCir , comme celui du
cyprès. Ludwig adopte le fentiment de fon
Aaaaaa z
5>3t C O N
compatriote , ôc définit un cône , un
fruit compofé d'un amas fort ferré de cou-
ches ligneufes , attachées à un axe commun,
dont les interftices font remplies de femen-
ces. Ainfi quoique , fuivant Saumaife , un
fruit ne mérite le nom de cône que lorfqu'il
à une bafe ronde , & qu'il eft terminé en
pointe , Tufage a prévalu fur la dénomina-
tion tirée de la figure, &C ce feroh un grand
bonheur s'jI n'étendoit pas plus loin fon
empire à d'autres égards. Article de M. le
Chevalier de J AU COURT.
QOm\.^(Géogr. mo^J petite ville d'Ef-
pagne en Andaloufie, fur le golfe de Cadix.
• CONIN, (Géogr. mod. ) ville de la grande
Pologne au palatinat de Pofnanie.
CÔNING, f m. (Hifl. nat. îchthyolog.)
Les habirans à^% Moluques donnent ce nom
& celui de luccesje-coning à un poiflTpn qui
a été fort bien gravé & enluminé par Coyett,
au n°. i6y de la première partie de fon
recueil des poljfons d'Amboine.
Il a le corps elhptique , médiocrement
alongé , &c comprimé par les côtés , pointu
aux deux extrémiiés , deux fois plus long
^ue profond , la tête, les yeux &c la bouche
grande.
Ses nageoires font au nombre de fept ,
favoir, deux ventrales , médiocres, arron-
dies , placées au deffous des deux peélo-
rales, qui font auffi grandes, arrondies ; une
dorfale fort longue, comme fendue en deux,
plus baffe devant que derrière ; une der-
rière l'anus triangulaire , obtufe , un peu
plus profonde que longue , & une à la
queue, arrondie. De ces nageoires deux font
épineufes, favoir la dorfale , dont les onze
premiers rayons font fimples; & celle de
îanus , dont le premier rayon antérieur efl
limple.
Son corps eft blanc-jaunâtre , tigré de
taches rondes , petites , jaunes plus fon-
cées, comme dorées, & femées de chaque
côté de quatorze taches en lignes circulai-
res , noires , inégales &. fans ordre. Les
rayons épineux de la nageoire dorfafe font
noirs; la prunelle des yeux eft blanc-fale
ou jaunâtre , entourée d'urne iris verdâtre.
Mœurs. Le coning fe pèche dans la mer
d'Amboine , vers les rivages limoneux &
vaf^nix.
Remarque. Ce polffou forme avec l'an-
C O N
. niko un genre particulier dans la famille
des fcares où nous l'avons placé. ( Aï.
Adanson )
CONINGINNE, f. m. (Hifl. nat. Ich-
thyolog.) poifTon des îles Moluques, pafta.'
blement deflîné &C enlum.iné fous ce nom ,
par Coyett , au n'^. i6o de la première par-
tie de fon recueil des poijfons d^Amboine,
Il a le corps court , elliptique , très-com-
primé par les côtés , pointu aux deux ex-
trémités , une fois plus long que profond ;
la tête, la bouche & les yeux petits; les
écailles petites, couvrant la tête ainfi que
le corps.
Ses nageoires font au nombre de fept>
favoir, deux ventrales petites, pointues,
fituées au deftbus des deux peélorales qui
font médiocres; une dorfale aifez longue^
plus haute devant que derrière; une der-
rière l'anus prefque auffi longue, plus bafïe
devant que derrière , & une à la queue ,
fourchue jufqu'aa milieu de fa longueur.
Son corps eft violet, avec une ligne noire
furie milieu de chacun de (qs côtés. Sa tcte
& i'çs nageoires font jaunes; la prunelle de
(qs yeux eft rouge,entourée d'une iris jaune.
Mœurs. Le coninginne eft commun dans
la mer d'Amboine , autour des rochers.
Remarque. Il forme avec le paning wxi
genre de poifTon particulier dans la famille
des fpares. ( M. AdansoN .)
CONJOINT , adj. (Mufique.) titra-
corde conjoint^ eft dans l'ancienne mufique,
celui dont la corde la plus grave eft à l'unif-
fon de la corde la plus aiguë du tétracorde,
qui eft immédiatement au defîbus de lui.
C'eft ainfi que dans le fyftême des Grecs, le
tétracorde Synnemenon étoit conjoint ait
tétracorde Mefon. F". TÉTRACORDE. (S}
Le fyftême de la mufique ancienne étoit
compofé de quatre tétracordes,y?«r re mi^
mi fa fol la .fji ut re mi , mi fa fol la , dont
le premier & le fécond _, ainfi que le troi-
fieme & le quatrième, étoient conjoints y
c'eft-à-dire , avoientla corde /wi commune;
au lieu que le fécond & le troifieme étoient
disjoints, & n'avoient point de cordes com-
munes , puifque le fécond finilToit par le fon
/^ , & le tr(ùfieme commençoit par le fon
//. Ko/f^ Gamme. (O)
Dans la mufique moderne on appelle /j/ïr
degré conjointyia. marche dune note à cella
CO N
^uî la fuit immédiatement , fur le p^us voi-
fm degré au deffus ou au defifous d'elle. V.
Degré. (S)
Ainfi le chant ut re mi re mi fa mi re mi
fa fol fa mi n ut , eft par degrés conjoints.
V. Disjoint. (O)
Conjoints , adj. pris fubft. { Jurifpr,)
on appelle de ce nom ceux qui font unis par
le lien du mariage.
On confiéere leur état avant &c après le
mariage.
Avant le mariage, les futurs conjoints
peuvent fe faire tels avantages qu'ils jugent
à propos.
Depuis le mariage , ils n*ont plus la même
liberté: dans les pays de droit écrit, ils ne
peuvent s'avantager que par teftament; dans
la plupart des pays coutumiers, ils ne peu-
vent s'avantager ni entre- vifs, ni à caufe
de mort.
Onconfidere aufli l'état des conjoints par
rapport "â la communauté de biens, quand
elle a lieu entr'eux; par rapport à l'autorifa-
tion de la femme, & à la faculté d'efter en
jugement ; & enfin pour les reprifes à^i con-
joints en cas de décès de l'un d'eux.' f^oje:^
Communauté, Douaire, Préciput,
Reprises , Donation entre Con-
joints.
Conjoints. On donne auffi cette qualité
à ceux qui ont droit ou quelque titre com-
•mun , tels que font des colégataires ; ils peu-
vent erre conjoints en trois manières diffé-
rentes, fa voir, rt , vcrbis.^ ou bien rc & verbis.
Ils font conjoints re feulement , lorfque
la même chofe ed léguée à chacun d'eux
nommément, comme fi le teftateur dit :jc
lègue mx mai fan de Paris à Titlus ,ye lègue
ma maifon de Paris à Mœvius.
■ Ils font conjoints verbis tantum ., lorfque
la même chofe leur eft léguée par une même
phrafe , mais divifément : par exemple y'e
lègue à Titius & à Mœvius ma maijbn de
Paris , à chacun par moitié.
Enfin ils font conjoints re & verbis , lorf-
que le tedateur dit : je lègue à Titius & à
M XV lus mx maifon de. Paris.
Le droit d'accroidement a lieu entre ceux
q.n font conjoints re , ou re & verbis ; mais
non pas en-re ceux qui ne font joints que
yerbis tantum. Voyez inflit. lib. jj, tit. ij ,
& ^i«/7iO/AcC?v.OISS£?.lENT, (Jurlfp.) {A)
CON 93Î
CONJONCTIF , IVE , adj. :erme de
Grammaire , qui fe dit particulièrement de
certaines particules qui lient enfembie ua
mot à un mot, ou un fens à un autre fcns ;.
la conjonftion & eft une conjonclive ^ oa
l'appelle auffi copulative.
La disjonftive eft oppofée à la copulative.
Voyci Conjonction.
En fécond lieu , le mot conjonclifs. été
fubftitué par quelques grammairiens à celui
de fubjonftif, qui eft le nom d'un mode
des verbes , parce que fouvent les temps du
fubjon<^V!f font précédés d'une conjonélicn -,
mais ce n'eft nullement en vertu de la con-
jonftion que le verbe eft mis au fubion(flif ,
c'eft uniquement parce qu'il eft fubordonné
à uneaflirmationdireèle, exprimée ou fous-
entendue. L'indicatif eft fouvent précédé
de conjonctions , fans ceft^er pour cela d'être
appelle indicatif.
On doit donc conferver la dénomination
du fubjonclif; l'indicatifaffirme dire(51:ement
& ne fuppofe rien , au lieu que les termi-
nai fons du fubjonclif font toujours fubor-
données à un indicatif exprimé ou fous-en-
tendu. Le fubjonclif eft ai nfi appelle, dit Prif-
cien, parce qu'il eft toujours dépendant de
quelque autre verbe qui le précède , quod
alteri v&rbo omnimodo fuhjungitur. Perilb-
nius dans (qs notes fur la Minerve de Sanc-
tius,obferve que l'indicatif eft fouvent pré-
cédé de conjonctions, &; que le fubjonftif
eft toujours précédé & dépendant d'un
verbe de quelque membre de période. Etiam
indicatii'us conjuncliones dum , quum ,
quando , quanquam fi ^ &:c. fibi prczmljfas
habet , & velm^Jximcfibifubjungitalterurn
verbum. At fubiunciivi proprium eji omni^
modo., & fernper fubj ungii'crbo alterius com-
niaiis. Perijhnius in Sanclii Aîineri'd. 1. 1 ,
c. xiij , n. I. Ainfi confetvons le terme de
fubjonClif, 8c regardons-le comme mode
adjoint & dépendant , non d'une conjonc-
tion , mais d'un fens énoncé par un indicatif,
in
CONJONCTION , f. f. terme de Gram-
maire. Les conjonclions font de petits mots
qui marquent que l'efprit , outre la percep-
tion qu'il a de deux objets, apperçoit entre
ces objets un rapport ou d'accompagne-
ment , ou d'oppofition , ou de quelque autre
efpece : l'efprit rapproche alors en lui-même
9M C O M ^
ces objcf; , & les confidere lun pir rapport
à l'autre i'e\on cette vue particulière. Or le
mot qui n'a d'autre office que de marquer
cette confidération relative de l'efprit ,
eft appelle conjonction.
Par exemple , iî je dis que Ciccron &
Qninti/ien font les auteurs les plus Judi-
cieux de r antiquité ^ je porte de Quintilien
le même jugementque j'énonce de Cicéron ,
voilà le motif qui tait que je rafTemble Ci-
céron avec Quintilien , le mot qui marque
cette liai Ton èft la conjoncîion.
Il en eft de même fî l'on veut marquer
quelque rapport d'oppofition ou de difcon-
venance ; par exemple, fi je dis qu'il j a un
avantage réel à être influât ^ &: que j'ajoute
enfuire fans aucune liaifon qu'i/ ne faut pas
que la fcience infpire de l'orgueil ^ j'énonce
deux fens l'éparés : mais fi je veux rappro-
cher ces deux fens , & en former l'un de ces
enfembles qu'on appelle /^/rior/e^ , j'apper-
çois d'abord de la difconvenance, & une
ibrre d eloignement & d'oppofition qui doit
le trouver entre la fcience &c l'orgueil.
Voilà le motif qui me fait réunir entr'eux
ces deux objets, c'eft pour en marquer la dif-
convenance; ainfi en les rafifemblant j'énon-
cerai cette idée accefibire par la conjonftion
mais\, je dirai donc qu'iZ j' a un avantage
réel à être infiruit ^ maisqiCilm faut pas que
cet avantage infpire de C orgueil ; ce mais
rapproche lesdeuxpropofitionsou membres
de la période, & les met en oppofition.
Ainfi la valeur de la conjoncîion confifte
à lier des mots pour une nouvelle modifica-
tion ou idée accelToire ajoutée à Tun par
rapport à l'autre. Les an.iens grammairiens
ont balancé autrefois , s'ils placeroient les
conjonctions au nombre des parties du dif-
cours , & cela par la raifon que les conjonc-
tions ne repréfentent point d idées de chofes.
Mais qu'eft-ce qu'être partie du difcoiirs,
dit Prifcien ? « finon énoncer quelque con-
» cept , quelque affeélion ou mouvement
>» intérieur de l'efprit: » Quidenim efialiud
pirs orationis , niji vox indicons mentis
concepium id ejl cogitationcm ? (Prifc. lih.
Xî.fub initio.) Il eft vrai que les conjonc-
tions n'énoncent pas comme font les noms ,
<\ç% idées d'êtres réels ou métaphyfiques ,
mr.is elles expriment l'érat ou afFeclion de
rei'prit entre une idée & un? autre idée,
CON
entre wnt p^opofition Se une autre- propo-
fition ; ainfi les conjonclions fuppofent tou-
jours deux idées 5c deux propofitions , &c
elles font connoître l'efpece d'idée acceiïbire
que l'efprit conçoit entre l'une & l'autre.
Si l'on ne regarde dans les conjonclions
que la feule propriété de lier un fens à un
autre , on doit reconnoître que ce fervice
leur efi: commun avec bien d'autres mots :
i'^. le verbe, par exemple, li» l'attribut au
fujet : les pronoms lui , illes , eux.^ le^ltM^
les , leur , lient une propofition à une autre ;
mais ces mots tirent leur dénomination d'un
autre emploi qui leur efi: particulier.
1°. Il y a auffi des adjectifs relatifs qui
font l'ofiice de conjoncîion^ tel eft le relatif
qui^ lequel ^ laquelle : car outre que ce mot
rappelle &c indique l'objet dont on a parlé,
il joint encore &: unit une autre propofition
à cet objet, il identifie même cette nouvelle
propofition avec l'objet ; Di^u que nous
adorons e(l tout-puiff'ant; cet attiîbut , eji
tour-puifjant , efi: affirmé de Dieu en tant
qu'il eft celui que nous adorons.
Tel , quel , talis , qualis ; tan tus , quan^
tus^ tôt ^ quoty &c. font auffi l'office de
conjonction.
3**. Il y a Az% adverbes qui, outre la pro-
priété de marquer une circonftance de temps
ou de lieu, fuppofent de plus quelqu'autre
penfée qui précède la propofition où ils fe
trouvent : alors ces adverbes font auffi l'of-
fice de conjoncîion : tels font afn que : on
trouve dans quelques anciens , & l'on dit
même encore aujourd'hui en certaines prt>-
vinces , à celle fin que, ^^Z hune finemfecun-
diim quem , où vous voyez la prépofirion &
le nom qui font l'adverbe , & de plus l'idée
acceffiairedeliaifonik de dépendance. Il en
eft de même de , à caufe que , propterea
quod. Parce que , quia ; encore, adhuc ;
déjà , jam , ces mots doivent être confidérés
comme adverbes conjonclifs , puisqu'ils font
en même temps l'office d'adverbe & celui
de conjonction. C'eft du fervice des mots
dans la phrafe qu'on doit tirer leur dénomi-
nation.
A l'égard des conjonctions proprement
dites, il y en a autant de fortes , qu'il y a
de différences dans les points de vue fous
lefquels notre efpritobferve un rapport entre
un mot & unaiilÉifiEiOt , ou entre une penfée
C O N
& une autre penfée; ces différences font
autant de manières particulières de lier les
propofitions & les périodes.
Les Grammairiens, lur chaque partie du
difcours , obrervent ce qu'ils appellent Us
accidsns ; or ^ ih en'remarquent deux fortes
dans les conjonctions : i°. la fimpHcité &: la
compofition ; c'eft ce que les Grammairiens
appellent la figure. Ils entendent par ce ter-
me , la propriété d'être \\n mot fimple ou
d'<3tre im mot compofé.
Il y a à-Q^ conjonctions JimpUs , telfts font
&^ou^ mais^fi^ car, ni^ aujjl, or, donc,^c.
Il y en a d'autres qui font compofées, à
moins que , pourvu que , de forte que , parce
que , par confcqucnt , ôic.
2°. Le fécond accident des conjonctions ,
c'eft leur fignification , leur effet ou leur va-
leur ;c'eft ce qui leur a fait donner les divers
noms dont nous al'ons parler , fur quoi j'ai
cru ne pouvoir mieux faire que de fuivre
l'ordre que M. l'abbé Girard a gardé dans fa
grammaire au traité des conjonctions Çles vé-
ritables principes de la langue françoifc ^ocij
difc. ) L'ouvrage de M. l'abbé Girard eft
rempli d'obfervations utiles , qui donnent
lieu d'en faire d'autres que l'on n'auroit
peut-être jamais faites, fil'on n'avoit point
lu avec réflexion l'ouvrage de ce digne aca-
démicien.
I ''.Conjonctions copulatives. E^,
/zi, deux conjonctions qu'on appelle copula-
tives ^à^x\v\K\ copulare ,]o\ndre , afTembler,
lier. La première eft en ufage dans l'affir-
mation , & l'autre dans la négative ; /'/ n'a
ni vice ni vertu. Ni vienJ5i du me des Latins ,
qui vaut autant que &~non. On trouve fou-
vent & au lieu de ni dans les propofitions
négatives , mais cela ne paroît pas exa(ft :
Je ne connoijjois pas Almani^or & V amour.
J'aimerois mieux ni l'Amour. De même
la poêfie n admet pas Us exprejp.ons & les
tranfpojltions particulières ., qui ne peuvent
pas trouver quelquefois leur place en profe
dans le flyle vif& élevé. Il faut dire avec le
P. Buffier, la poêfie n admet ni exprejfion
ni tranfpofition , ikc.
Obfervez que comme l'efprit eft plus
prompt que la parole , l'emprefîement d'é-
lioncer ce que l'on conçoit, fait fouvent
fupprimer les conjonctions ., ôi fur-tout les
copulatives ; attention , foins ^ crédit y ar-
CON 935
I geniifaîtout mis en ufage pour , ôfc. cette
j fuppreflion rend le difcours plus vif. On
peut faire la même remarque à l'égard de
quelques autres conjonctions , fur-tout dans
le ftyle poétique , & dans le langage de la
pafllon & de r-enthoofiafme.
•2°. Conjonctions augmentatives
ou AdvEPvBES conjonctifs-augmen-
TATlFS. De plus , d'ailleurs ; ces mots fer-
vent fouvent de tranfition dans le difcours.
3". Conjonctions alternatives.
i Ou , finon , tantôt. Il faut qaune porte foit
ouverte ou fermée ; UfcT^cu écriie\. Pra^
tiquei La vertu, f non vous fere:^ mallieu-
reux. Tantôt il rit , tantôt il pleure-, tantôt
il veut , tantôt il ne veut pas.
Ces conjonctions , que M. l'abbé Girard
appelle û//<;r/2j/iv£i, parce qu'elles manquent
une ahernative , une diftinflion ou fépara-
tion dans les clîofes dont on parle ; ces con-
jonctions , dis-je , font appellées plus com-
munément disjonctives» Ce font des conjonc-
tions , parce qu'elles uniffent d'abord deux
objets , pour nier enfuite de l'un ce qu'on
affirme de l'autre ; par exemple , on confi-
dere d'abord le foleil 6c la terre, & l'on dit
enfuite que c'eft ou le foleil qui tourne au-
tour de la terre , ou bien que c'eft la terre
qui tourne autour du loleil. De ir.ême en
certaines circonftances on regarde Pierre ôc
Paulcomme les feules perfonnes qui peuvent
avoir tait une telle asflion ; les voilà donc
d'abord confidérés enfemble , c'eft la con^
jonction ; eniuite on les déiunit , fi l'on
ajoute c'efl ou Pierre ou Paul qui a fait
cela , c'eft Cun ou c'eft l'autre.
4°.CONJONCTIONS HYPOTHÉTIQUES.
Si , foit , pourvu que , à moins que , quand ,
fauf. M. l'abbé Girard les appelle hypothé'
tiques , c'eft-à-dire , condùiionnelles , parce
qu'en effet ces conjonctions é.aoncent une
condition , une fuppofition ou hypothefe.
Si ; il y a y? conditionnel , vous deviendre:^
favaiit fi vous aimi\ V étude : fi vous aime'^
Cétude , voilà l'hypothefe ou la condition.
Il y auny^de doute , je m fo-ifi , &:c.
H y a encore unyz qui vient à\ifc Aq%
latins ; // eÇt fi ftudieux , qu'il deviendra fa^
vant ; et fi eft alors adverbe ,y^c adeb , à ce
point, tellement.
Soit ^five ',foit goût , fait raifon ,foit ca-
price j // aime la retraite. On peut aufîi re-
5)3<î CO N
garder (oit,/rvSy comme une conjonciion
alternative ou de cllil:inâ:ion.
SaiifàèWgnQ une hypothefe , mais avec
reftriftion.
«5°. Conjonctions adversatives.
Les conjonclions adi'crfadvts raiTemblent
les idées, &: font lervir l'une à contreiîalan-
cer l'autre. Il y a îept conjonctions adverfa-
tivcs : mais , quoique , bien que , cependant ,
pourtant , néanmoins , toutefois.
Il y a des conjonctions que M. l'abbé Gi-
rard appelle extcnjives^ parce qu'elles lient
par extenfion de i'ens; telles iom jufque ,
encore , <?^/// ^ même , tant que , non plus ^
enfin.
Il y a ào.^ adverbes de temps que l'on
-peut auifi regarder comme de véritables con-
jonclions ; par exemple , /o7y^«e , quand ^
des que , tandis que. Le lien que ces mots
expriment, confifte dans une correfpon-
dance de temps.
6*^. D'autres marquent un motif, un but ,
une raifbn , afin que ^ parce que ., puifaue ^
car^ comme ^ cujjl ^ attendu que ^ d^ autant
que : M. l'abbé Girard prétend (/. II , pag.
a^o. ) qu'il faut bien diftinguer damant que
conjonthon qu'on écrit {'ansapoftrophe, &
^'tf«^<î«r adverbe, qui efl: toujours féparé de
que par plus , mieux ou moins , d'autant
plus que ^ & qu'on écrit avec l'apollrophe.
Le P. Joubert, dans Ton didionnaire, dit
aufîi d'autant que , conjond^ion ; on l'écrit ,
dit-il, fans apoftrophe, quia^quoniam. Mais
M. l'abljé Régnier, dans fa grammaire,
écrit d"* autant que ^zor{]ondi\on aved'apof-
trophe , & obferve que ce mot, qui autre-
fois étoit fort en ufag:;, eft renfermé aujour-
d'hui au ftyle de chancellerie &:de pratique;
pourmDi je crois que d'' autant que ^ Sau-
tant mieux que font le même adverbe, qui
de plus fait l'office de conjonciion dans cet
exemple, que M. l'abbé Girard cite pour
faire voir que d'autant que eft conjonc-
tion fans apoftrophe ; on ne devoit pas Jî
fort le louzr , d^ autant quHl ne le méritoit
pas-, n'eft-il pas évident que d'autant que
répond à ex eo quod , ex eo mom^ento /ecun-
dum quod , ex eâ ratione fecundiim quam ,
& que Ton pourroit auffi dire , d'autant
mieux qu'il ne le méritoit pas. Dans les pre-
mières éditions de Danet on avoit écrit
d'autant que lans apoftrophe , mais on a cor-
CO N
rigé cette faute dans I édition de 17ÎI ; îa
même faute eft aulïl dans Richelet. Nicot ,
dicfionnaire 1606, écrit toujours d'autant
que avec l'apoftrophe.
7°. On compte quatre conjonclions con^
c/z{/$vej, c'eft-à-dire , qui fervent à déduire
une conféquence , donc , par conféqucnt ,
ainfi^ partant : mais ce dernier n'eft guère
d'ufage que dans les comptes où il marque
un réfultat.
S^. Il y a des conjonclions explicatives ,
comme* lorfqu'il fe préfente une fimiîitude
ou une conformité, en tant que , J'avoir y,
fur-tout.
Auxquelles on joint les cinq expreffions
fuivantes qui font des conjonclions compo"
fées , de forte que, ainflque , de façon que ,
c'eft-à-dire , Jt bien.
On obferve des conjonclions tranfîtives ,
qui marquent un pafl?.ge ou une tranfition
d'une chofe à une autre , or^au refte , quant
à ^ pour., c'eft-à-dire , à l" égard de\ comme
quand on dit : fun ejl venu ; pour l'autre ,
il eft demeuré.
9^. La conjonciion que : ce mot eft d'un
grand ufage en françois, M. l'abbé Girard
l'.appelle ^conjonciion ccnduclive , parce
qu'elle fert à conduire le iens à fon complé-
ment : elle eft toujours placée entre deux
idées , dont celle qui précède en fait tou-
jours attendre une autre pour former un
("ens , de manière que l'union des deux eft
néceiTaire pour former une continuité de
fens ; par exemple , il eft important que Cort
fait inftruitdefes dei^oirs : cette conjonciion
eft d'un grand ufage dans les comparaisons ;
elle conduit du terme comparé au terme
qu'on prend pour modèle ou pour exemple :
les femmes ont autant d'intelligence que les
komm&s, ^lors elle étoit comparative. Enfin,
la conjondion que fert encore à marquer une
reftrittion dans les propoiitions négatives ;.
par exemple, il ne^fait mention que d'un
tel prédicateur .y fur quoi il faut obferver
que l'on préfente d'abord une négation ,
d'où l'on tire la chofe pour la préfenter
dans un fens affirmatif excluiivemenrà tout
autre : // /z'y avait dans cette affemblée que
tel qui eut de Vej'prit; nous n avons que peu
de temps à vivre , & nous ne ctierchons qiià
; le perdre. M. l'abbé Girard appelle alors
^ cette conion(^ion reftriclive,
Àt»
C ON
Au fond cette conjonclion que n'eft fou-
vent autre chofe que le quod des latins ,
pris dans le fens de hoc. Je dis que vous
êtes fage , dico quod , c'eft-à-dire dico hoc
ncmpe^ vous êtes fage. Que vient aufli quel-
quefois de quant ou de quantum ou enfin
de quot.
Au refte on peutfe difpenfer de charger
fa mémoire des divers noms de chaque forte
de conjonclion , parce qu'indépendamment
de quelqu'autre fonftion qu'il peut avoir ,
il lie un mot à un autre mot, ou un fens
à un autre fens , de la manière que nous
l'avons expliqué d'abord : ainfi il y a des
adverbes & des prépofîtions qui font aufli
des conjonctions compofécs^ comme afinquc^
para que ^ à caufc que , &c. ce qui eft bien
différent du (impie adverbe & de la (impie
prépo(ition , qui ne font que marquer une
circonftance ou une manière d'être du nom
ou du verbe. Ç FJ
Conjonction, en Afironomie , fe dît
de la rencontre apparente de deux planètes
dans le même point des cieux , ou plutôt
dans le même degré du zodiaque. V^oye:^^
Planète, Phase, 6*c.
Pour que deux a(^res foient cenfés en
conjonclion , il n'eft pas néce(raire que leur
latitude toit la même; il fuffit qu'ils aient
la même longitude, ^oj^^ Longitude 6*
Latitude.
Si deux aftres fe trouvent dans le même
degré de longitude &: de latitude ; une ligne
droite tirée du centre de la terre , par celui
de l'un des aftres , pa(rera par le centre de
l'autre. La conjonclion alors s'appellera co/7-
jonction vraie & centrale.
Si la ligne qui paffe par le centre des
deux aftres , ne paffe pas par le centre de
la terre, on l'appelle conjonclion partiale :
fi les deux corps ne fe rencontrent pas pré-
cifément dans le même degré de longitude,
mais qu'il s'en faille quelque chofe , la con-
jonclion eft dite apparente. Ain(î lorfqu'une
ligne droite, que l'qn fuppofe pa(rer par
le centre des deux aftres , ne pade pas par
le centre de la terre , mais par l'œil de l'ob-
fervateur , l'on dit que la conjonclion eft ap-
parente. Du refte les aftronomes fe fervent
a(rez généralement du mot de conjonclion^
pour exprimer la (ituation de deux aftres ,
dont les centres (e trouvent avec le centre
Tome VIIL
CON . 937
de la terre dans un même plan perpendr-
culaire au plan de l'écliptique. Voy. ECLIP-
TIQUE.
On divife auftî les conjonctions en gran-
des , & en très-grandes. Les grandes co/z-
j onctions fontcellesqui n'arrivent qu'au bout
d'un temps con(idérab!e , comme celle de
Saturne & de Jupiter , qui arrivent tous les
vingt ans.
Les conjonctions très-grandes font celles
qui arrivent dans des temps extrêmement
éloignés; comme celle des trois planètes
fupérieures , Mars , Jupiter &: Saturne ,
qui n'arrive que tous les «joo ans. Cette
conjonction eft arrivée en 1743 : ces trois
planètes furent vues enfemble , plufieurs
mois , dans la conftellation du lion : mais
elles ne fe trouvèrent que fucceflivement
à la même longitude , & en oppofitioii
avec le foleil; favoir. Mars le 16 Février,
Saturne le 21 , & Jupiter le 28 ; ce qui ne
fait qu'un intervalle de douze jours, &: ce
qui arrive très-rarement : l'œil placé fuc-
ceflivement fur chacune de ces planètes,
auroit donc vu dans le même ordre trois
conjonctions de la terre au foleil. On trouvera,
dans Thiftoire & les mémoires de l'acadé-
mie de 174] , un plus ample détail fur ce
fujet. Au re(ie on ne fe fert que peu ou
point de cette diftinélion des conjonctions
qui n'eft fondée que (ur des notions ima-
ginaires des prétendues influences des corps
céleftes , dans tels ôc tels afpefts. Voye^ In-
fluence.
Il eft bon de remarquer encore que pour
que deux aftres foient en conjon3ion par
rapport à la terre , il faut qu'ils fe trouvent
tous deux d'un même côté par rapport à
la terre ; au lieu que dans Koppofition la terre
fe trouve entre-deux. C'eft une fuite de la
définition ci-de(fus.
La conjonclion eft le premier ou le prin-
cipal des afpefts , ôc celui auquel tous les
autres commencent ; comme roppofition
eft le dernier, & celui où ilsfini(fent. Voy»
Aspect 6- Opposition.
Les obfervations des planètes dans leurs ^
conjonctions font très-importantes dansl'Af-
tronomie; ce font autant d'époques qui
fervent à déterminer les mouvemens des
corps céleftes , les routes qu'ils tiennent 5
6>i. la durée de leurs cours.
Bbbbbb
93^ C O N
Les planètes inférieures , lavoir Venus
^ Mercure , ont deux fortes de conjonc-
tions. L'une arrive lorfque la planète Te
trouve entre le foleil & la terre , & par
confëquent fetrouvele plus près de la terre;
on la nommç conjonction inférieure : l'autre
arrive quand la planète eft le plus éloignée
delà terre qu'il eft poffible, c'eft-à-dire que
le foleil fe trouve entre la terre & elle ;
on appelle cette conjorkftion , conjonction
fupéricurs.
La lune fe trouve en conjonction avec le
foleil tous les mois. Voye:^ LuNE & MoiS.
On appelle fes conjonctions &c fes oppofî-
tions du nom général àQ Jjfygies. V'oye:^
Sysygie. Il n'y a jamais d eclipre de foleil
que lorfque fa conjonction avec la lune fefait
proche les nœuds de l'écliptique , ou dans
ces nœuds même. VoycT^ ÉCLIPSE. (O)
CONJONCTIVE, f. f. C^nat. ) pre-
mière tunique de l'œil, autrement nommée
alhuginécy parce qu'elle forme ce qu'on ap-
pelle le blanc de l'œil qu'elle couvre. Elle
"s'unit avec les deux paupières , paroît dans
toute fon étendue après qu'on a levé les
mufcles orbiculaires de ces voiles des yeux ,
& s'avance jufqu'au haut de leurs parties
internes. Faifons connoître un peu plus au
long fon origine, fa ftrufture , & fon
«fage : nous ferons courts , & nous dirons
tout.
La figure fphérique de nos yeux, & leur
eonnexion libre au bord de l'orbire par le
moyen de la conjonâii'c ., leur permet d être
mus librement de tous côtés, .félon la (irua-
tion de l'objet que nous voulons voir. Cette
tunique eft mince, blanche dans fon état
naturel, membraneufe, nerveufe, vafcu-
leufe , lâche , & flexible. Elle prend fon
origine du périofle qui recouvre les bards
de l'orbite, & s'étend fur toute la partie an»-
térieure du globe, jufqu'àr l'extréir.iié de la^
fclérotique , où elle fe joint à la cornée
qu'ele couvre d'un tiers de ligne, ou d'une
demi-ligne.
Elle eft el'e-méme recouverts extérieure-
ment d'une autre membrane très-fine &:
très-polie , à laqr.elle elle eil: fi étroitement
adhérente , qu'elles paroiflent ne faire
er.femble qu'une feule membrane , quoi-
qu'il y en ait réellement deux diftintles ,
qu'il eft aifé de féparer. L'une d'elles eft ,.
C O M
comme on Ta dit , une continuation du pé»
riofle de l'orbite , & l'autre cje la membrane
interne des paupières.
Ces deux membranes font douées d'ua
fentiment exquis , &: entre-tiffues de quan-
tité de vaifîéaux fanguins , lâchement atta-
chés , au point de repréfenter par leur gon-
flement dans les violentes ophtalmies fur-
tout, le blanc de l'œil comme une exeroif-
fance charnue d'un rouge très-vif.
Ce feit mérite d'être remarqué , non
feulement parce qu'il peut paroître difficile
à concevoir à plufieurs pcrfonnes , mais-
même en impofer à un oculifle inattentif
ou fans expérience, qui pourroit regarder
cette maladie comme une excroifl^nce incu-
rable de la cornée elle-même. M. "Wool--
houfe, à qui cette cruelle inflammation de:
la conjonctive n'éîoit pas inconnue, em-
ployoit d'abord les remèdes généraux pour-
la diffiper ; après lefquels il mettait en pra-
tique de légères (carifications fur ces vaif-
feaux-, ce qu'il appelloit {^.Jaignée de L'œil \\
mais nous n'oferions trop approuver Tufage
de ce rem.ede , à caufe de la délicatefîe de.:
l'organe.
Pour ce qui concerne la légère inflam-
mation de la conjonctive , procédant dufim-*
pie relâchement de Çts vaifleaux fanguins,.
elle eft facile à guérir dans fon commence--
ment ; car en bafllnant fouvent les yeux,
avec de l'eau fraîche, les vaifleaux reflerrés •
par cette fraîcheur repoufîent la partie rouge-
du fang qui s'y étoit introduite en les di--
latant.
Voici quel efl: l'ufage de la conjonBive,.
1°. Elle aflujettit ou affermit le bulbe de-
l'œil , fans diminuer aucunement fon' ex-
trême mobilité. 1°. Elle empêche que les
corps étrangers n'entrent dans l'intérieur de-.
l'œil. 3°. Elle aide par fon poli à rendre in--
Isiifible la fridion des paupières fur les par-
ties de l'œil qu'elle couvre. Voye^^ ŒiL..
Art. de M. UCh. DE JaUCOVRT,
* CONJONCTimE., i\ f. [Gram. )i
coexiflence dans le temps de pkifieurs faits-
relatifs à un autre qifils modifient, foit;
en bien , loit en mai ; ff les faits é.oient.
coexiflans dans la chofe , ce feroient A&s cir-
confl:ances ; celui qui a profondément exa*
miné la chofe en elle-même feulement, en
connoîtra toutes les circonflances , mais ii.
C O N
pourra n'en pas connoître toutes les conjonc-
tures ; il y a même telle conjoncture, qu'il eft
impoihble à un homme de deviner, & ré-
ciproquement, tel homme connoitra par-
faitement les conjeciures , qui ne connoitra
pas les circonftances. V. l'article CIRCONS-
TANCE, & le corrigez l'ur celui-ci, en ajou-
tant après ces mots , plus ou moins fâcheux ,
ceux-ci,p/tti ou moins agréable^les conjonctu-
res feroient, s'il étoit permis de parler ainfi,
les circonftances du temps, & les circonf-
tances feroient les conjonctures de la chofe.
CONIQUE, adj.( Géom. ) fe dit en gé-
néral de tout ce qui a rapport au cône ,
qui lui appartient , ou qui en a la figure. On
dit quelquefois les coniques, pour exprimer
cette partie de la géométrie des lignes cour-
bes, où l'on traite àt^feclions coniques.
Conique , { Géom. ) feclion conique .,
ligne courbe que donne la i'eftion d'un cône
par un pian. Voye^ CONE 6- SECTION.
hQ<ifections coniques font l'ellipfe , la para-
bole & l'hyperbole , fans compter le cercle
& le triangle , qu'oapeut mettre au nombre
^t^feclions coniques : en effet lecercleeft la
feftion d'un cône par un plan parallèle à la
ba.fe du cône; &: le triangle en eft la feftion
par un pUn qui paife par le fomtnet. On
peut en conféquence regarder le triangle
comme une hyperbole dont l'axe tranfverfe
ou premier axe eft égal à zéro.
Quoique les principales propriétés des
/estions coniques foient expliquées en parti-
culier à chaque article de l'elùpfe, delà pa-
rabole &cde l'hyperbole ; nous allons cepen-
d mt les expofer toutes en général , &comme
fous un même point de vue , afin qu'en
'le> voyant plus rapprochées , on puifTeplus
-aifément fe les rendre familières : ce qui eft
néceffaire pour la haute géométrie , l'aftro-
nomie , la méchanique , &c.
i. Si le plan coupant eft parallèle à quel-
que plan qui paflé par le fommet & qui
coupe le cône ; ou ce qui revient au même ,
il le plan coupant étant prolongé rencontre
à la fois les deux cônes oppofés , la feftion
de chaque cône s'appelle hyperbole. Pour
repréfenrer fous un même nom les deux
courbes que donne chaque cône,lefqueiles
ne font réellement enfemble qu'une feule &
cîême courbe, on les appelle hyperboles
«^pojèes.
C O N 939
' 2. Si le plan coupant eft parallèle à quel-
que plan qui pafl'e par le fommet du cône ,
mais fans couper le cône ni le toucher, la
figure que donne alors cette feélion eft une
ellipfe.
3. Si le plan pafiTant parle fommet, & au-
quel on fuppoiè parallèle le plan de la fac-
tion, ne fait fimplement que toucher le
cône , le plan coupant donnera alors une
parabole.
Mais au lieu de confidérer lesfe&ions co^
niques par leur génération dans le cône ,
nous allons , à la manière de Defcartes &
des autres auteurs modernes, les examiner
par leur defcription fur un plan.
Defcription de T ellipfe. H^I , C fiS' '2 >
conique. J étant deux points fixes fur un plan;
fi l'on fait pafiTer autour de ces deux points
un fil IH B , que l'on tende par le moyen
d'un crayon ou ftylet en B , en faifant mou-
voir ce ftylet autour des points H ^ /juf-
qu'à ce qu'on revienne au même point B ,
la courbe qu'il décrira dans ce mouvement
fera une ellipfe.
On peut regarder cette courbe comme ne
différant du cercle qu'autant qu'elle a deux
centres au lieu d'un. Auffi fi l'on s'imagine
que les points H , I {q rapprochent, l'el-
lipfe fera moins éloignée d'iui cercle, ik en
deviendra un exaâement , lorfque ces
points H & I {q confondront.
Suivant les diftérentes couleurs que l'on
donnera au fil B ffl, par rapport à la dif-
tance ou longueur HI , on formera difi^é-
rentes efpeces d'eilipfes ; 5c toutes les fois
qu'on augmentera l'intervalle HI, & la lon-
gueur du fil HB I, en même raifon , l'el-
lipfe reftera de la même efpece ; les limites
des différentes elîipfes font le cercle , Ôi la
ligne droite dans laquelle cette courbe fe
change lorfque les points H &c I font éloi-
gnés à leur plus grande diftance ; c'eft-à-
dire , jufqu'à la longueur entière du fil. La
différence frappante qui eft entre le cercie,
qui eft la première de toutes les elîipfes, &c
la ligne droite ou ellipfe infiniment alongée
qui eft la dernière, indique allez que toutes
les elîipfes intermédiaires doivent être au-
tant d'efpeces d'eilipfes différentes les unes
des autres ; & il feroit ailé de le démontrer
rigoureufement.
Dans une ellipfe quelconque DFKR^
Bbbbbb z
940 C O N
{fig. i4.)\q point Ceft appelle /e centre \ les
pomts H^I^Us foyers-, D K, le grand
axe ou /'^-re tranfperfe, ou bien encore
leprincipal diamètre ou le principal diamètre
tranjverfe ; FR /^pe/i/aATé. Toutes les lignes
paiîant par C font nommées diamètres : les
lignes terminées à deux points de la circon-
férence, & menées parallèlement à la tan-
gente ÀîiA , au ibmmet d'un diamètre ,
font les ordonnées à ce diamètre. Les par-
ties comme Mv, terminées entre le fom-
met M du diamètre , & \ef ordonnées , font
les<zÂya/7^-J. Le diametremené parallèlement
aux ordonnées d'un diamètre , eft fort dia-
mètre conjugué; enfin .la troifieme propor-
tionnelle à un diamètre quelconque , & à
ion diamètre conjugué eft \s paramètre de ce
diamètre quelconque. Voje^ CENTRE,
Foyer, Axe, Diamètre, &c.
Propriété de Pellipfe. i°. Les ordon-
nées d*un diamètre quelconque font toutes
coupées en deux parties égales par ce dia-
mètre.
2°. Les ordonnées des axes ou diamètres
principaux font perpendiculaires à ces axes.
Alais les ordonnées aux autres diamètres
leur font obliques. Dans les ellipfes de dif-
férentes efpeces , plus les ordonnées font
obliqres fur leur diamètre à égale diftance
de l 'axe, plus les axesdifferent l'un de l'autre.
Dans la même ellipfe, plus les ordonnées
feront obliques fur leurs diamètres, plus
ces diamètres feront écarrés des axes.
3°. Il n'y a que deux diamètres conjugués
qui foient égaux entr'eux; & ces diamètres
MG, FT^Îoni tels que l'angle FCM^
FCV.
J^» L'angle obtus VCM , des deux dia-
mètres conjugués égaux , eft le plus grand
de tous les angles obtus que forment en-
tr'eux les diamètres conjugués de la même
ellipfe \ c'cft le contraire pour l'angle aigu
VCB.
'?''. Les lignes (jlP è>cvB étant des demi-
ordonnées à un diamètre quelconque MG,
le quarré de y. P eft au quarré dty B , coinme
le reétangie M (Ji. + /t/ jff eft au reélangle
Mv-h V G. Cette propriétéeft démontrée par
MM. de l'Hôpital, Guifnée, &c.
6°. Le parameire du grand axe , qui fui-
Yant la définition précédente doit être la
.n<)i&me proportionnelle aux deux axes,
CO N
eft auflî égala l'ordonnée TWJfj?^. /j.^,"
qui paffe par le foyer /.
7°. Le quarré d'une demi-ordonnée
quelconque P/x à un diamètre M G (fig.
/4. ) , eft moindre que le produit de l'ab-
cifte M fz par le paramètre de ce diamètre,
C'eft ce qui a donné le nom à l'ellipfe ,
(».u4'if , fignifiant défaut.
b''. Si d'un point quelconque B (fig. ij .}
on tire les droites B ff àc B I aux foyers ,
leur fomme fera égale au grand axe ; &: ft
l'on divife parla ligne B a l'angle 75 /Tque
font ces deux lignes , en deux parties éga-
les, cette ligne B a fera perpendiculaire à
l'ellipfe dans le point B.
cf°. Un corps décrivant l'ellipfe D FK
autour du foyer H ^ eft dans fa plus grande
diftance à ce foyer //", lorfqu'il eft en K /
dans fa plus petite lorfqu'il eft en Z>; 6i
dans {qs moyennes diftances , lorfqu'il eft:
en F ^ en È,
10°. De plus cette moyenne diftance-
Fffèi. EH Qd égale à la moitié du grand-
axe.
11°. L'aire d'une ellipfe eft à celle du
cercle circonfcrit Z)/7zK , comme le petit
axe eft au grand axe. Il en eft de même de
toutes les. parties correfpKjndantes MIKy
miK de ces mêmes aires. Cette propriété
fuit de celle-ci , que chaque demi-ordon-
née AfJ de l'ellipfe, eft à la demi-ordorr-
née mlà\x cercle dans la raifon du petit axe
au grand. Ce feroitle contraire, fi l'on com-
paroît un cercle à une ellipfe circonfcrite ,.
c'eft-à-dire , qui auroit pour petit axe le
diamètre de ce cercle.
12°. Tous les parallélogrammes décrits
autour des diametresconjugués des ellipfes ,
font égaux entr'eux. Le parallélogramme
A^yS'{fig. ;^.J par exemple, eft égal au
parallélogramme e|.,3. M. Euler a étendu-
cette propriété à d'autres courbes. Voyelle
premier volume de rhifloire françoife de /'o»
cadémie de Berlin , ty^S.
13°. Si la ligne droite 5 JpafTant par l'urt
des foyers , fe meut en telle forte que l'aire
qu'elle décrit foit proportionnelle au temps,
le mouvement angulaire de B Hauteur de
l'autre foyer, lorfque l'ellipfe ne diffère pas
beaucoup du cercle , eft fort approchant
d'être uniforme ou égal. Cardans une ellipfe
qui diffère peu d'un cercle , les. fedeuxs
C O N
quelconques B iDy FI D, &c. font entre
eux à très-peu près comme les angles cor-
refpondans B HD. Foye:{ Jnft. Afiron. de
M. le Monnier, pag. Soè" & fulv.
Defcription de la parabole. YLK (^fig.
iS.) fecl, coniq. eft une équerre dont on fait
mouvoir la branche Y L le long d'une règle
fixe Y I; P/" eft un fil dont l'extrémité eft
attachée en -X^ à cette équerre , &: l'autre en
/" à un point fixe F. Si pendant le mouve-
ment de cette équerre on tend continuel-
lement le fil par le moyen d un ftylet P, qui
fuive toujours l'équerre , le ftylet décrira la
courbe appe'lée parabole.
La ligne L /eft nommée la directrice , F
le foyer ; le point T qui divile en deux
parties égales la perpendiculaire FI à la
directrice , eft le fommet de la parabole.
La droite T F , prolongée indéfiniment ,
Taxe.
Toute ligne comme n i parallèle à l'axe,
eft appellée un diamètre. Les lignes comme
H l terminées en deux points H, /del'el-
lipfe, & menées parallèlement à la tangente
au fommet d'un diamètre , font les ordon-
nées à ce diamètre. Les parties / cj font les
abfciftes. Le quadruple de la diftance du
point iau point F^ eft le paramètre du dia-
mètre / n : d'où il fuit que le quadruple de
FTe{{ le paramètre de l'axe, qu'on appelle
auffi le paramètre de la parabole.
Propriété de la parabole. i°. Les ordon-
nées à un diamètre quelconque , font tou-
jours coupées en deux parties égales par ce
.diamètre.
a°. Les ordonnées à l'axe lui font per-
pendiculaires, & font les feules qui foient
perpendiculaires à leur diamètre ; les autres
font d'autant plus obliques , qiie le diamè-
tre dont elles font ordonnées, eft plus éloi-
gné de l'axe.
3°. Le quarré d'une demi-ordonnée quel-
conque ^ /, eft égal au redangle de l'ahf-
-cifle correfpondante i ^, par le paramètre
du diamètre i n de ces ordonnées : c'eft
de celte égalité qu'eft tiré le nom de la
parabole , TjpaCofJiy ftgnifiant égalité ou
cowparaijbn.
5^. Le paramètre de la parabole, c'eft-
à-dire , le paramètre de l'axe , eft égal à
. l'ordonnée à l'axe , laquelle pafte par le
C O N 941
foyer jp, & fe termine de part & d'autre à
la parabole.
5^. La diftance P Fà^wn point quelcon-
que P de la parabele au foyer F y eft égale
à la diftance P Z du même point à la di-
redrice L I; cette propriété fuir évidem-
ment de la defcription de la courbe.
6^. Lorfque l'abcift^e eft égale au paramè-
tre , la demi-ordonnée eft aufli de la même
longueur.
7^. Les quarrés de deux ordonnées au
même diamètre, qui répondent à deux difte-
rens points de la parabole , font entre eux
dans la même proportion que les deux abf-
cilTes de ces ordonnées.
S^. L'angle k i n entre la tangente A ^ au
point quelconque i, & le 'diamètre in au
même point, eft toujours égal à l'angle / /
-F, que cette tangente fait avec la ligne i
F tirée au foyer. Ainfi ^{\ H i l repréfente
la furface d'un miroir expofée aux rayons
de lumière , de manière qu'ils viennent pa-
rallèlement: à l'axe , ils feront tous réfléchis
au point F ^ où ils brûleront par leur réu-
nion : c'cit ce qui a fait qu'on a nommé ce
point-le/q/^r. Voye^ MlROlR ARDENT.
9*^. La parabole eft une courbe qui s'étend
à l'infini à droite & à gauche de fon axe.
10^. La parabole , à m:;fure qu'elle s'éloi^
gne du fommet , a une diredion plus ap-
prochante du parallelii'me à l'axe , Se n'y
arrive jamais qu'après un cours infini.
11*^. Si deux paraboles ont le même axe
& le même fommet, leurs ordonnées à
l'axe répondant aux mêmes abfciftes, feront
toujours entre elles en raifon fous-doublée
de leurs paramètres, ainfi que les aires ter-
minées par ces ordonnées.
ii"^. La valeur d'un efpace quelconque
/ q H, lenfermé entre un arc de parabole,
le diamètre/^ au point/', &: l'ordonnée Hl
au point H., eft toujours le double de l'ef-
pace i h //"renfermé entre le même arc i H^
la tangente i h, ^ le parallèle h H à i q-,
ou ce qui revient au même, l'efpace i H q
eft toujours les deux tiers du parallélogram-
me circonfcrit.
13^. Si d'un point quelconque iif de la
parabole , on mené une tangente H m à.
cette courbe, la partie / m comprife jentce
le point où cette tangente rencontre encore
un diamètre quelconque & le point i fora-
94Î C O N
met de ce diamètre, eft toujours égale à
rabfcifle ; ^, qui répond à rordonnée q H
de ce diamètre pour le point H,
14^. Toutes les paraboles font fembla-
bles entre elles & de la même efpece, ainfi
que les cercles.
1^^. Si l'on fait paiTer un diamètre par
le concours de deux tangentes quelcon-
ques , ce diamètre divifera en deux parties
égales la ligne qui joint les deux points de
contaél: : cette propriété efl: commune à
toutes les ficiions coniques.
Defcription de C hyperbole. La règle / B
T Cfîg' 16". J eft attachée au point fixe /,
autour duquel elle a la liberté de tourner.
A l'extrémiré T de cette règle eft attaché
ini fil H B T", dont la longueur eft moindre
que / T; l'autre bout de ce fil eft attaché à
un autre point fixe H, dont la diftance au
premier / eft plus grande que la différence
qui eft entre le fil & la rx^gle /T", & plus
petite que la longueur de cette règle. Cela
pofé , fi pendant que la règle / T tourne
autour du point /, on tend continuelle-
ment le fil par le moyen d'un ftylet qui fuive
toujours cette règle, ce ftylet décrira la
cou'be appelée hyperbole.
Les points H^ /font appelles les foyers.
Le pohît Cqui divife en deux parties égales
l'intervalle I If, eft le centre. Le point D
qui eft celui où tombe le point H , lorfque
la règle / T tombe fur la ligne ///, eft le
fommet de l'hyperbole. La droite D K dou-
ble de Z) C , eft l'axe de tranfverfe ; la figure
SKL égale & femblabie k B D T, que l'on
décriroit de la même manière en attachant
la règle en If, au lieu de l'attacher en /,
feroit l'hyperbole oppofée à la première.
Le rapport qui eft entre la difiance des
points //&/, & la différence du fil à la
règle , eft ce qui caraélérife l'efpece de
l'hyperbole.
Il y a une autre manière de décrire fhy-
perbole , qui rend plus facile la démonftra-
tion de la plupart de (es propriétés. Voici
^ette méthode.
LL^M M (fig. ly.) étant deux droi-
tes quelconques données de pofition qui fe
<:oupent en un point C , ^ c D d C un
parallélogramme donné , fi l'on trace une
courbe e D h qui ait cette propriété qu'en
inenant de cbacui) de it% points e les pa-
C O N
ralleles e d, ScecklL6cMM,\e paral-
lélogramme c e d C ion égal au parallélo-
gramme D c C d, cette courbe fera une
hyperbole.
La courbe égale & femblabie à cette
courbe que l'on décriroit de la même mar
niere dans l'angle oppofé des lignes M M y
L L , iéroitl'hyperbole oppolé.
Les deux hyperboles que l'on décriroit
avec le même parallélogramme entre les
deux autres angles qui font les complé-
mens à deux droits des deux premiers ,
feroient les deux courbes appellées les
hyperboles conjugées aux premiers. VoyeT^
Conjugué.
Le point C oiJ les deux droites M M y
L L, ie rencontrent, eft le centre de tou-
tes ces hypothefes.
Toute ligne paflant parle centre, & ter-
minée aux deux hyperboles oppofées , eft
un diamètre de ces hypeiboles. Toutes les
droites menées parallèlement à la tangente
au fommet de ce diamètre &; terminées
par l'hyperbole , font des ordonnées à ce
diamètre , & les parties correlpondantes
du prolongement de ce diamètre , lefquel-
les font terminées par le fommet de ce
diamètre & par les ordonnées , font les
abfciftes.
Un diamètre quelconque de deux hyper-
boles oppofées , a pour diamètre conjugué
celui des hyperboles conjuguées qui a été
mené parallèlement aux ordonnées du pre-
mier.
Le paramètre d'un diamètre quelconque,
eft la troifieme proportionnelle à ce diamè-
tre & à fon conjugué.
Les lignes L L, M M font appellées les
afymptotes , tant les hyperboles oppofées
que les conjuguées. V. Asymptote.
Propriétés de L'' hyperbole, i^. Les ordon-
nées à un diamètre quelconque font tou-
jours coupées en deux parties égales par ce
diamètre.
1^. Les ordonnées à l'axCsfont les feu-
les qui foient perpendiculaires à leur dia-*
mètre ; les autres l'ont d'autant plus obli-
ques , que le diamètre eft plus écarté de
l'axe ; & en comparant deux hyperboles de
différentes efpeces , les diamètres qui feront
à même diftance de l'axe , auront des ordon-
nées d'autant plus obliques, que la diitérence
C O N
de fangk L C M à. Ton complément fera
plus grande.
3*^. Le qiiarrë d'une ordonnée a un dia-
mètre quelconque eft au quarré dune autre
ordonnée quelconque au même diamètre ,
comme le produit de rabfciffe correfpon-
fiante à cette première ordonnée par la
fomme de cette abfciiïe & du diamètre , eft
au produit de l'abfcifTe correfpondante à la
féconde ordonnée , par la fomme de cette
abfciffe & du diamètre.
4^. Le paramètre de l'axe tranfverfe efi
ëgal à l'ordonnée qui pa/Te par le foyer.
5°. Le quarré d'une demi-ordonnée à un
diamètre eft plus grand que le reftangîe de
rabfcifîe correfpondante par le param.etre
de ce diamètre. G'eft de cet excès appelle
en grec yxrfCoA», qu'eft venu le nom de
Vhj'peibole.
6°. Si d'un point q-^elconque B Çfig. iS.)
on tire deux lignes B H , B /aux foyers ,
leur différence fera égale au grand axe ; ce
qui fuit évidemment delà première defcrip-
tion de l'hyperbole.
j^. Si l'on divife en deux parties égales
l'angle H B I ^ compris les deux lignes qui
vont d'un point quelconque aux foyers, la
ligne de biffeftion fera tangente à l'hyper-
bole en B.
8". Les lignes droites L L ^ MM {^fig.
ly.) dans lelquel'es font renfermées les
deux hyperboles, oppolées à leurs conju-
guées, lontaiymptoies de ces quatre hyper-
boles ,. c'eft-à-dire qu'elles en approchent
continuellement fans jamais les rencontrer,
mais qu'elles peuvent en approcher de plus
près que d'une dillance donnée , fi petite
qu'on la fuppofc
9*^. L'ouverture de l'angle que font lès
afymptotes ào.^ deux hyperboles oppofées ,
c^srafiérife Pefpece de cette hyperbole. Lorf- I
que cet angle eft droit , l'hyperbole s'appelle
cquilatere , à caufe de fon axe {latus tvanf-
vsrfum) &: fon paramètre ' latus rectum^ ■
font égaux entre eux. Cette hyperbole eft
à l'égard des autres , ce que le cercle eft à
regard àes eliipfes. Si par exemple fur le
même- axe , en variant l'axe conjugué , on :
Conftruit différentes hyperboles , les or-
données de ces différentes hyperboles qui
auront les- mêmes abfciifes , feront à l'or- j
donnée correfpondante de Thyperbole équi- }
C O N ^ 943
latere , comme l'axe conjugué eft à l'axe
tranfverie.
io°. Si par le fommet d'un diamètre
quelconque on tire une tangente à l'hy-
perbole , l'intervalle retianchéfur cette tan-
gente par les afymptotes , eft toujours égal
au diamètre conjugué.
11°. Si par un point quelconque m de
l'hyperbole CfiS- ^9'J ^i^ 'i""^ ^ volonté
des lignes K m H y r m R qui rencontrent
les deux afymptotes, on aura M R=m r,
HE ^^ m K : ce qui fournit une manière
bienfimple de décrire «ne hyperbole, dont
les afymptotes C Q^ CT 1 oient données ,
& qui palfe par un point donné m : car me-
nant par m une 1 gne quelconque K m I/l,
& prenant H E^^m lù^^ point E fera a
l'hyperbole. On troilHM de même un
autre point AI de l'hyperbole , en menant
une autre ligne rm R ^ hn prenant M R'='
m r; & ainfi des autres.
ii*^. Si fur l'une des afymptotes O M
{fis- '7'J l'<^^^ prend les parties CI, Cil,
C II l ^C I V, c V^ &CC. qui foient en pro-
greftîon géométrique, & qu'on mené par'
les points Cl, Cll\ Cl II, CIV, les
parallèles l'i.Ilx, III ^ , IF^, V6,
&c. à l'autre afymptote, les eip ces J2 ,
7/3 , III ^ , IV 6, V6\ &c. feront tous
égaux. D'où il fuit nue lî l'on prend les
parties , C/, C// , CJ//, &:c. fuivant 'or-
dre des nombres naturels ; les eTp.ces i 2,
II j ,. 77/4 ,. &:c. repréfenteront le^ loga-^
rithmes de ces nombres.
De toutes les propriétés àes/eclions co-
niques, on peut conclure, i^. que ces cour-
bes font toutes enfemble un fyftême de
figures régulières , teliénient liées les unes
aux autres, que chacutie peut dans le paf-
fage à l'infini , changer d'efjiece & deve-
nir fuccefîivement de toutes les autres. Le
cercle, par exemple , en cha'ngeant infini-
ment peu le plan coupanr, devient une
ellipfe ; & l'ellipfeen reculant fon centre -
à l'infini, devient une parabole, dont la
pofition étant enfuite un peu changée, el!e:
devient la première hyperbole : toutes ces
hyperboles vont enfuite en s'élcvant , jul-
qn'à fs confondre avec la ligne droite ^ qui
eft le côté du cône.
On voit , 1^. que dans le cercle 'e-pn--
rametreeft doubî<î de .a- cliftance du foirv-^
0.
Cela pofé , voici comment on peut réduire
cette équation à repréfenter quelqu'une des
fcclïons conique'^ e': oarricnlier.
Soit y-l- — + — =;^, on aura ;[ ^
ai
rpq *
7 7
44 C O N C O N
met au foyer ou centre; dans Tellipre , \t\yy'\pxy^bxx\Qx\a
paramètre de tout diamètre eft à l'égard
de cette diftance dans une raifon qui eft
entre la double & la quadruple ; dans la
parabole , cette railan eft précifément le
quadruple, & dans l'hyperbole la raifon
paffe le quadruple.
3^. Que tous les diamètres des cercles
& des ellipfes fe coupent au centre 6c en
dedans de la courbe; que ceux de la para-
bole font tous parallèles entre eux & à
l'axe , que ceux de l'hyperbole fe coupent
au centre , auifi biep que ceux de l'ellipfe ,
mais avec cette différence que c'eft en
dehors de la courbe.
On peut s'inftruire des principales pro-
priétés àts feâi^is coniques ^ dans V appli-
cation de ra/gcWmà la géométrie , par M.
Guifnée : ceux ^^voudront les apprendre
plus en détail , auront recours à l'ouvrage
de M. le marquis de l'Hôpital, qui a pour
titre , traité analytique desfeclions coniques:
enfin on trouvera les propriétés âesfeclions
'coniques traitées fort au long dans l'ouvrage
in-folio de M. de la Hire , qui a pour titre,
fcciiones conicœ. in noi.'em libros diftribut(2\
mais les démonftrations en font pour la
plupart trè;-longues , & pleines d'une îyn-
thefe difficile 6c embarraftee. Enfin M. de
la Chapelle , de la fociété royale de Lon-
dres , vient de publier fur cette matière un
traité inftmdif 6c aiTez court , approuvé
par l'académje royale des fciences.
Le<;fec7ions coniques , en y comprenant
le cercle , compofent tout le fyftéme des
lignes du fécond ordre ou courbes du pre-
mier genre , la ligne droite étant appeilée
ligne du premier ordre. Ces lignes du fé-
cond ordre ou courbes du premier genre,
font celles xlans l'équation defquelles les
indéterminées x , y, montent au fécond
degré. Ainfi , pour repréfenter en général
toutes hsfeciions coniques , il faut prendre
une équation dans laquelle x,y, montent
au fécond degré , 6c qui foit la plus com-
pofée qui fe puiffe ; c'eft-à-dire , qui con-
tienne, outre les quarrés x x ^yy, i^. le
plan xy , z". un terme qui renferme x
linéaire ,3*. un terme qui contienne y
linéaire , oc enfin un terme tout conftant.
Ainfi réquation générale à^s feciions coni-
ques (çii. ^ ]metr«, &c.
4 4 "^ b X X 7-+ca: +
a = o. Equation qu'on peut changer en
celle-ci.
:{:{•{• A X X •\' B x-^ C === o. On verra
facilement que les nouvelles coordonnées
de la courbe font ^ , 6c une autre ligne u
qui eft en rapport donné avec x , de forte
qu'on peut fuppofer a; = m w; ainfi l'équa-
tion pour les coordonnées { , « , fera
:^ l"^ D u u'\' Fu-\- G ^=0.
Or, i^. fi Z) = (9, la courbe eft une pa-
rabole : 2°. fi 7) eft négatif, la courbe efl
une ellipfe ; 6c elle fera un cercle , li
Z? = — I, 6c que l'angle des coordonnées
;{ 6c M Ibit droit : 3°. fi X) eft pofitif, U
courbe fera une hyperbole. Au refte , il
arrivera quelquefois q^ue la courbe fera ima-
ginaire , lorlque la valeur de ;{ en a fera
nn3ginaîre.
C'eft ainfi qu'on pourroit parvenir à don-
ner un traité vraiment analytique àts/ec
tions coniques ; c^'eft-à-dire , où les proprié-
tés de ces courbes feroient déduites immé-
diatement de leur équation générale , 6c
non pas comme dans l'ouvrage de M. le
marquis de l'Hôpital , de leur defcription
fur un plan. M. l'abbé de Gua a fait fur
ce fujet de fort bonnes réflexions dans fon
ouvrage intitulé , ufage de Vanalyfe de
Defcanes , 6c il y trace le plan d'un pareil
traité.
M. le marquis de l'Hôpital , après avoir
donné dans les trois premiers livres de fon
ouvrage les propriétés de chacune des/^c-
tions coniques en particulier , a confacré le
quatrième livre à expofer les propriétés qui
leur font communes à toutes : par exem-
ple , que toutes les ordonnées à un même
diamètre foient coupées en deux égale-
ment par ce diamètre , que les tangen-
tes aux deux extrémités d'une même or-
donée aboutiffent %u même point du dta-.
Les
Cp N
Les anciens avoient confidérë d'abord
îes fcctions coniques dans le cône où elles
font nées y & la meilleure manière de trai-
ter ces courbes , feroit peut-être de les en-
vifager d'abord élans le cône, d'y chercher
leur équation , &:de les trani'porter enfuite
fur le plan pour trouver plus facilement
par le moyen de cette équation leurs autres
propriétés ; c'eft ce que M. de la Chapelle
s'cft propofé de faire dans l'ouvrage dont
nous avons parlé.
Quelques auteurs , non contens de dé-
montrer les propriétés Aîtsjeciions coniques
fur le plan , ont encore cherché le moyen
de démontrer ces propriéiés , en confidé-
rant \esfec7ion:> coniques dans le cône même.
Ainfi , M. le Marquis de l'Hôpital a con-
facré le fixieme livre de fon ouvrage à faire
voir comment on retrouve dans le folide
les mêmes propriétés à^sfeclions coniques
démontrées fur le plan : il a rempli cet
objet avec beaucoup de clarté & de fim-
plici;é. Dans cet article, nous avons envi-
îagé les feciions coniques de la manière qui
demande le moins d'apprêt, mais qui n'eft
peut-être pas la plus nat.ielle: la méthode
que nous avons fuivie convenoit mieux à
un ouvrage tel que celui-ci ; & celle que
nous propofons conviendrc it mieux à un
ouvrage en forme fur X^'^ feciions coniques.
Voy. les articles CoURBE, LiEU , CONS-
TRUCTION, &c.
Pour démon.rer les propriétés des fec-
lions coniques dans le cône , il eft bon de
prouver d*abord que toute fcclion conique
eft une courbe du fécond ordre , c'efl-à-
dire, où les inconnues ne forment pas une
équation plus haute que le fécond degré.
Cela peut fe prouver très - aifément par
l'algèbre , en imaginant un cercle qui ferve
de bafe à ce cône, enfailànt les ordonnées
xle la feclion conique parallèles à celle du
cercle, & en formant des triangles fem-
blables qui aient pour ibmmet commun
celui du cône , &; pour baies les ordonnées
parallèles , &c. Nous ne faifons qu'indi-
quer la méthode. : les lefteurs intelligent
la trouveront fans peine ; & les autres
peuvent avoir recours à la théorie des
ombres dans l'ouvrage de M. l'abbé de Gua
qui a pour titre , ufages de Vanalyjï de
De/canes, &c.
Tome VIII.
C O N 945
Cela bien démontré, il eft vifible que la
fedfion d'un cône par un plan qui le tra-
verfe entièrement, ne peut être qu'une
ellipfe ou un cercle ; car cette fedion ren-
tre en elle-même , & ne fauroit êtfe par
conféquent ni hyperbole , ni parabole : de
plus , fon équation ne monte qu'au fécond
degré , ainfi elle ne peut être que cercle
ou ellipfe. Mais on n'a pas trop bien dé-
montré dans quel cas la feftion eft un cer-
cle ou une ellipfe.
i*^. Elle eft un cercle , lorfqu'elle eft pa-
rallèle à la bafe du cône.
2*^. Elle eft encore un cercle , lorfqu'elle
forme une feftion fous-contraire, & lorf-
qu'elle eft de plus perpendiculaire au trian-
gle paffant par l'axe du cône , &c perpen-
diculaire lui-même à la bafe ; cela eft dé-
montré dans plufteurs livres. Voye^ Sous-
CONTRAIRE.
3°. Il eft aifé de conclure de la démonf-
tration qu'on donne d'ordinaire de cette
propofifion , &c qu'on peut voir , (i l'en
veut, dans \q traité des feciions coniques ^c
M. de la Chapelle , que toute feélion per-
pendiculaire au triangle par l'axe , & qui
ne fait pas une feclion fous-contraire , eft
une ellipfe. Mais ft la feâ:ion n'eft pas per-
pendiculaire à ce triangle , il devient un
peu plus difficile de le démontrer. Voici
comment il faut s'y prendre.
En premier lieu , fi dans cette hyper-
bole la feclion conique palfe par une autre
ligne que celle que forme la feâ:ion fous-
contraire avec le triangle par l'axe , il eil
ailé de voir que le produit des fegmens
de deux lignes tirées dans le plan de la
courbe ne fera pas égal de part & d'au-
tre ; & qu'ainiî la courbe n'eft pas ua
cercle , puifque dans le cercle les produits
des fegmens font égaux.
En fécond lieu , fi dans cette même
hyperbole le plan de la courbe pafle par
une ligne que forme la fe(îlion ibus-con-
traire avec le triangle par l'axe , il n'y a
qu'à imaginer un autre triangle perpendi-
culaire à celui-ci, & paflant par l'axe ; on
verra aifément, i*^. que ce triangle fera
ifocele ; i^. que la fe^ion de ce triangle
avec la feftion fous-contraire , fera para-
lelle à la bafe; 3*^. que par conféquent le
plan dont il s'agit étant différent de la
Cccccc
^46 C O N,
fea; on fous-contraire (hyp.) , coupera ce
nouveau triangle fuivant une ligne oblique
à la bafe; & il eft très-aifé de voir que
les fegmens de cette ligne font un produit
plus grand que celui des fegmens de la
ligne parallèle à la bafe. Or , ce fécond
produit eft égal au produit des fegmens de
la fedion fous-contraire , puifque cette fec-
tion eft un cercle ; donc le premier pro-
duit eft plus grand ; donc la fedion eft
une ellipfe. Je ne fâche pas que cette pro-
pofition ait été démontrée dans aucun livre.
Ceux qui travailleront dans la fuite fur les
coniques , pourront faire ufage des vues
qu'on leur donne ici. (0_)
CoMQUE, ea artillerie , fe dit d'une
pièce d'artillerie dont Tame eft plus large
vers la bouche que vers la culaftci
Les premiers canons étoient coniques ,
félon Diego Ufano ; c'eft-à-dire que l'in-
térieur de l'ame de la pièce finiftbit en
pointe , & que l'ame de la pièce alloit en
augmentant iufqu'à fa bouche; Cette figure
h'étoit guère convenable à faire agir la
poudre fur le boulet avec tout l'effort dont
elle eft capable. D'ailleurs , les pièces fe
trouvoient , par cette conAru^ion , avoir
moins de métal à la partie où elles ont le
plus de befoln , c'eft-à-dire , à la culafle.
Aufti , cette forme n'a-t-el!e pas duré long-
temps ; on trouva qu'il étoii plus avanta-
geux de faire l'ame également large dans
toute fon étendue : c'eft ce qu'on obferve
encore aujourd'hui. Voye^ Canon. CQ.J
* CONISALUS, f. m. (Mytli.) dieu
des Athéniens dont parle Srrabon > èc que
Ton conjefture être le même que Priape.
Voyci Priape.
CONISE , f f. {Hifl. nat. bot.) conyia,
genre de plante à fleur compofée de fleu-
rons découpés portés fur des embryons , &
foutenus par un calice écallleux ordinaire-
ment cylindrique : les embryons devien-
nent dans la fuite des femences garnies
d'aigrettes. Tournefort , infi.rei heri>. V.
Plante. (I)
ComSE,CMat. W^.J La fumée de la
conife chafîe les bêtes vénimeufes , les
moucherons ôcles puces, félon Diofcoride.
D'ailleurs , il n'eft d'aucun ufage en- mé-
decine , quoique quelques auteurs lui aient
attribué la propriété d'exciter les- règles j,
C O N
de poufter par les urines , &c. & qu'elle
puilTe être de quelque utilité dans les lo-
tions contre la galle , les dartres , &c. (F)
* CONISTERIUM, (Hifl. anc.JXiA
dans les gymnafes où l'on raflTembloit de la
poufliere dont les athlètes fe fervoient
après s'être frottés d'huile , afin de pouvoir
fe prendre plus facilement. On l'appelloit
Xw'^ft chez les Grecs , & chez les Latins^
pulverarium. Celle dont on fe fervoit ve-
noit d'Egypte. Voye^ Gymnase.
CONITZ , {Géogr. mod.) ville de la
Pruflfe Polonoife , à quinze milles de Dant-
zic. Il s'y fait du commerce..
CONJUGAISON, f. f. terme de Gram^
maire, con/ugatio : ce mot ûgmûe Jonc-
tion, ajjemblage. R. conjungere. l^TLCon/w-
gai/on eft un arrangement fuivi de toutes,
les terminaifons d'un verbe, félonies voix,,
les modes , les temps, les nombres, & les.,
perfonnes ; termes de Grammaire, qu'il faut-
d'abord expliquer.
Le mot voix eft pris ici dans un fens.
figuré : on perfonnifie le verbe y on liû;
donne une voix , comme fi le verbe par--
loit ; car les hommes penfent de toutes
chofes par refl'emblance à eux-mêmes ; ainft;
la voix eft comme le ton du verbe. On.
range toutes les terminaifons des verbes
en deux- claffes différentes; i^. les termi-.
naifons , qui font connoître que le fujet^
delà propofition fait une acl:Jon, font dites.
être de la voix active , c'eft-à-dire, que
le fujet eft confidéré alors comme agent ;;
c'eft le fens afrif : i^-. toutes celles qui font,
deftinées à indiquer que le fujet de la pro-
pofition eft le terme de l'adion qu'un autre.-
fait , qu'il' en eft le patient , comme difent
les philofophes ; ces terminaifons font dites.
être de la voix pajjive , c'eft-à-dire , que îe.
verbe énonce alors un fens paftîif. Car il;
faut obferver que les philoibphes & les
grammairiens fe fervent du mot^^'/fV, pour
exprimer qu'un objet eft le terme ou le but
d'une action agréable ou défagréable qu'un
autre fait , ou du fentiment qu'un autre a :
' aimer f es parens , parens font le terme ou,
l'objet du iexiiviXienX. i!! aimer. Amo , j'aime ,,
amavi, j'ai aimé, amabo , j'aimeiai, font
de la voix aâive ; au lieu que amor, je fuis
aimé, amahar^ j'étois. aimé , amahor , je
ferai aimé 5 font de la. voix çaftive. Amans. ,
C ON
«ceîm qui aime , eft de la voix aftîve ] mais
amatus , aimé , eft de la voix paflive. Ainfî
de tous les termes dont on fe fert dans la
conjugaifon , le mot voix eft celui qui
a le plus d'étendue ; car il le dit de chaque
mot , en quelque mode , temps , nombre
pu perfonne que ce puifte être.
Les Grecs ont encore la voix moyenne.
Les grammairiens difent que le verbe
moyen a la Signification a<flive ô>c paftive ,
& qu'il tient une efpece de milieu entre
Ta^lif & le pafîit : mais comme la langue
grecque eft une langue morte, peut-être ne
connoît-on pas aufîi bien que l'on croit la
voix moyenne.
Par modes on entend les diflPérentes ma-
nières d'exprimer l'aélion. Il y a quatre
principaux modes, l'indicatif, le fubjonc-
tif , l'impératif, & l'infinitif, auxquels en
certaines langues on ajoute l'optatif.
L'indicatif énonce l'aftion d'une manière
ablblue , comme faime , fai aimé ,j^avois
aimé^ f aimerai; c'eft le ieul mode qui forme
des propofitions , c'eft-à-dire , qui énonce
des jugemens ; les autres modes ne font
que des énonciations. Voyes;^ ce que nous
difons à ce fujet au mot Construction,
oii nous faifons voir la différence qu'il y
a entre une propofition & une fimple
énonciation.
Le fubjonélif exprime l'aiflion d'une ma-
nière dépendante, fubordonnée, incertaine,
conditionnelle , en un mot, d'une manière
qui n'eft pas abfolue , & qui fuppofe tou-
jours un indicatif: quand / aimerais ^ afin
que faimajje ; ce qui ne dit pas que y aime ,
ni que faie aimé.
L'optatif que quelques grammairiens ajou-
tent aux modes que nous avons nommés ,
«xprime l'aftiôn avec la forme de defir &:
de fouhait : plût à Dieu qu^il vienne. Les
Grecs ont des terminaifons particulières
pour l'optatif. Les Latins n'en ont point ;
mais quand ils veulent énoncer le fens de
l'optatif, ils empruntent les terminaifons du
fubjonâiif , auxquelles ils ajoutent la parti-
cule du defir utinani , plût à Dieu que.
Dans les langues où l'optatif n'a point de
.terminaifons qui lui foient propres , il eft
inutile d'en faire un mode îéparé du fub-
jondif.
L'impératif marque Taâiion avec la forme
c O N ^^1
de commandement, ou d'exhortation, ou
de prière; prens , piens^ va donc.
L'infinitif énonce l'aftion dans, un fens
abftrait , &: n'en fait par lui-même aucune
application finguliere & adaptée à un fujet;
aimer, donner , venir; ainfi il a befoin ,
comme les prépofitions,les adjedlifs , &c,
d'être joint à quelqu'autre mot , afin qu'il
puifte faire un fens fingulier & adapté.
A l'égard des temps, il faut obferver que
toute aftion eft relative à un temps, puif-
qu'elle fe pafîe dans le temps. Ces rapports
de l'aftion au temps font marqués en quel-
ques langues par des particules ajoutées au
verbe. Ces particules font ces ftgnes du
temps ; mais il eft plus ordinaire que les
temps foient défignés par des terminaifons
particulières , au moins dans les temps fim-
ples : tel eft l'ufage en grec , en latin , en
françois , &c.
Il y a trois temps principaux ; i^. le
préfent, comme amo ^ j'aime; iP. le pafte
ou prétérit, comme amavi^ j'ai aimé; 3^.
l'avenir ou futur, comme amaho , j'aimerai.
Ces trois temps font des temps (impies
& abfolus , auxquels on ajoute les temps
relatifs ^ combinés, comme ye lifois quand
vous êtes venu , &c. VoyeT^ Te M PS, termi
de Grammaire.
Les nombres. Ce mot, en terme de Gram-*
maire , fe dit de la propriété qu'ont les ter-
minaifons des noms ôc celles des verbes »
de marquer fi le mot doit être entendu
d'une feule perfonne , ou fi l'on doit l'en-
tendre de plufieurs. Amo y amas , amaty
j'aime , tu aimes , il aime ; chacun de ces
trois mots eft au fingulier : amamus , ama-
tis , amant, nous aimons , vous aimez,
ils aiment ; ces trois derniers mots font
au pluriel , du moins félon leur première
deftination ; car dans l'ufage ordinaire on
les emploie aufli au fingulier : c'eft ce qu'un
de nos grammairiens appelle U fingulier
de politejje. Il y a aufli un fingulier d'au-
torité ou d'emphafe ; nous voulons , nous
ordonnons.
A ces deux nombres, les Grecs en ajou-
tent encore un troifieme , qu'ils appellent
duel : les terminaifons du duel font defti-
nées à marquer qu'on ne parle que de deux.
Enfin , il faut favoir ce qu'on entend par
Us £>erfonnes grammaticales ; & pour cela
Cccccc 1
5)48 C O b^
il faut obferver que tous \ei objets qui peu-
vent faire la matière du difcours font i^.
ou la perfonne qui parle d'elle-même ; amo,
j'aime.
2^. Ou la perfonne à qui l'on adreiïe la
parole ; amas , vous aimez.
3°. Ou enfin quelque autre objet qui n'eft
ni la perfonne qui parle , ni celle à qui l'on
parle ; rex amat populum , le roi aime le
peuple.
Cette confidëration * des mots , félon
quelqu'une de ces trois vues de l'efprit , a
donné lieu aux Grammairiens de faire un
ufage particulier du mot de perfonne par
rapport au difcours.
Ils appellent première perfonne celle qui
parle , parce que c'eft d'elle que vient le
difcours.
La perfonne à qui le difcours s'adreiTe
Q^iZ^^eWée la féconde perfonne.
Enfin , la troifieme perfonne ^ c'eft tout ce
qui eft confidéré comme étant l'objet dont
-la première perfonne parle à la féconde.
Voyez combien de fortes de vues de l'ef-
prit font énoncées en même temps par une
feule terminaifon ajoutée aux lettres radi-
cales du verbe : par exemple , dan« amare^
ces deux lettres a^m ^ font les radicales ou
immuables ; fi à ces deux lettres j'ajoute o,
je forme amo. Or en difant amo .^ je fais
connoître que je juge de moi, je m'attribue
le fentiment d'aimer ; je marque donc en
même temps la voix , le mode , le temps ,
le nombre , la perfonne.
Je fais ici en paffant cette obfervation ,
pour faire voir qu'outre la propriété de
marquer la voix, le mode, la perfonne,
&c. & outre la valeur particulière de cha-
que verbe , qui énonce ou l'effence , ou
l'exiflence, ou quelque adion , ou quelque
fenriment , &c. le verbe marque encore
ra(ftion de l'efprit qui applique cette valeur
à un fujet, foit dans les propofitions, foit
dans les fimples énonciations ; & c'efl; ce
qui diflingue le verbe des autres mots , qui
ne font que de fimples dénominations. Mais
revenons au mot conjugaifon.
On peut aufli regarder ce mot comme
un terme métaphorique tiré de l'adlion
d'atteler les animaux fous le joug au même
char &; à la même charrue; ce qui emporte
toujours l'idée d'affemblage , de liaifon , &
C O M
de jonélion. Les anciens Grammainens fe
font fervi indifféremment du mot de con/w
gaifon , & de celui de déclinaifcn , foit eii"*
parlant d'un verbe , foit en parlant d'un
nom : mais aujourd'hui on emploie decLi'
natïo & declinare, quand il s'agit des noms ;.
& on fe fert de conjugatio & de conjugare^
quand il eft queflion des verbes.
Les Grammairiens de chaque langue ont
obfervé qu'il y avoit des verbes qui énon-
çoient les modes , les temps, les nombres
&:les perfonnes, par certaines terminaifons,
&: que d'autres verbes de la même langue
avoient des terminaifons toutes différentes,
pour marquer les mêmes modes , les mêmes
temps , les mêmes nombres , &: les mêmes,
perfonnes : alors les Grammairiens ont fait
autant de claffes différentes de ces verbes ,
qu'il y a de variétés entre leurs terminai-
fons , qui malgré leurs différences , ont ce-
pendant une égale deftination par rapport
au temps , au nombre & à la perfonne.
Par exemple , amo , amavi , amatum ,
amare ; j'aime , j'ai aimé , aimé, aimer ;
moneo , monui , monitum , monere ^ aver-
tir ; lego , Ugi.^ Uctum , Légère , lire ; audio ,
audivi., auditum y au dire ., entendre. Ces
quatre fortes de terminaifons différentes-
entre elles , énoncent également des vues
de l'efprit de même efpece : amavï.^ j'ai aimé,
monui , j'ai averti 'ylegi , j'ai lu ; audivi.^ j'ai
entendu : vous voyez que ces différentes
terminaifons marquent également la pre-
mière perfonne au fmgulier & au temps
paffé de l'indicatif; il n'y a de différence
que dans raâ:ion que l'on attribue à cha-
cune de ces premières perfonnes, & cette
aftion eft marquée par les lettres radicales
du verbe , am.^ mon , leg , aud.
Parmi les verbes latins, les uns ont leurs
terminaifons femb'ables à celles à^amo , les
autres à celles de moneo .^ d'autres à celles
^ audio. Ce font ces claffes différentes que
les grammairiens ont appellées conjugaifons.
Ils ont donné un paradigme , Tx^âS'ityuA,
exemplar ., c'eft-à-dire un modèle à chacune
de ces différentes clafTes ; a'mû amare eft le
paradigme de vocare , de nunciare , &: de
tous les autres verbes terminés en are : c'efl
la première conjugaifon.
Monere doit être le paradigme de la fé-
conde conjugaifon , félon les rudimens der
C O M
la m^tho^e de P. R. à caufe de Ton Alpin
monitum ; parce qu'en effet i! y a dans cette
conjugal fon un plus grand nombre de verbes
qui ont leur fupin terminé en itum , qu'il
n'y en a qui le terminent comme doclum.
Légère eft le paradigme de la troifieme
conjugaifon ; 6c enfin audire l'eft de la qua-
trième.
A ces quatre conjugaifons des verbes
latins , quelques grammairiens pratiques en
ajoutent une cinquième , qu'ils appellent
mixte , parce qu'elle eft compofée de la
troifieme & de la quatrième ; c'eft celle des
"verbes en ère , io ; ils lui donnent accipere^
accipio pour paradigme ; il y a en effet dans
ces verbes des terminaifons qui fuivent lé-
gère , & d'autres audire. On àliaudior, au-
diris , au lieu qu'on dit accipior ^acciperis ^
comme legeris , & l'on dit accipiuntur ,
comme audiuntur , &;c.
Ceux des verbes latins qui fuivent quel-
qu'un de ces paradigmes font dits être régu-
liers , & ceux qui ont des terminaifons par-
ticulières ^ font appelles anomaux ^ c'efl-à-
dire irréguliers ^ (R a, privatif, & ro/^of ,
règle. ) comme fero , Jers ^ fert ; vola , vis ,
vult ^ &c. on en fait des lifles particulières
dans les rudiraens ; d'autres font feulement
défeBifs, c'efl-à-dire, qu'ils m:înquent ou
de prétérit ou de fupin , ou de quelque
temps , ou de quelque perfonne , comme
oportet y pœnitet , pLuit ^ &c.
Un très-grand non bre de verbes s'écar-
tent de leur paradigme, ou à leur prétérit,
ou à leur fupin; mais ils confèrvent toujours
l'analogie Utine ; par exemple, /on^are fait
au piétéritybn^i , plutôt (\\xt fonavi\ dare
fait dediy hx. non pas davi , Sec. On fe
contente d'obferver ces différences , fans
pour cela regarder ces verbes comme des
verbes anomaux. Au refle , ces irrégulari-
tés apparentes viennent de ce que les Gram-
mairiens n'ont pas raporté ces prétérits à leur
véritable oiigme; c-àxfonui vient dejonere^
de la troifien»e conjugaifon , 6i non defo-
nare: dedi efl une lyncope de dedidi pré-
térit de dedere.. Tuli , latum , ne viennent
point de fero. Tuli qu'on prononçoit touli ,
vient de tollo ; fufiali vient dtfuflulo ; &
latum\\^x\x de ta*» par fyncope de T<t«»,
Juffero > fubfiimo.
L'auteur de Novitius dit que latum vient
G O N 949
du prétendu verbe im»fité , lare , lo , mais
il n'en rapporte aucune autorité. yoyey[
Vos s lu s , de art. gramm. t. JJ^ p. iSo.
C'eflainfi que /^i ne vient pas du verbe
fum : nous avons de pareilles pratiques en
françois; je vas ^ /ai été , /irai , ne vien-
nent point d'aller. Le premier vient de pa-
dcre, le fécond de l'italien ^a/a, & le troi-
fieme du latin ire.
S'il eût été poiîible que les langues euf-
fentéié le réfuhat d'une affemblée générale
de la nation , &: qu'après bien de difcuf-
iions &c de raifonncniens , les philofophes
y euffent été écoutés &^ euffent eu voix
délibérative ; il eu. vraifemblable qu'il y au-
roifeu plus d'uniformité dans les langues.
Il n'y auroit eu , par exemple, qu'un feule
conjugaifon & un feul paradigme , pour
tous les verbes d'une langue; mais comme
les langues n'ont été formées que par une
forte de métaphyfîque d'inflinft & defenti-
ment, s'il efl permis de parler ainfî; il n'efl
pas étonnant qu'on n'y trouve pas une
analogie bien exa6le , & qu'il y ait des irré-
gularités : par exemple, nous défîgnons la
même vue de l'efprit par plus d'une manière;
foit que la nature des lettres radicales qui
forment le mot , amené cette différence , ou
par la feule raifondu caprice & d'un ufage
aveugle ; ainfi , nous marquons la premiet e
perfonne au fîngulier, quand nous difons
/aime ; nous defignons aufïi cerre première
perfonne en difantyV^/z/V , ou bien/« reçois^.
ou je prends , &c. ce font ces différentes
fortes de terminaifons auxquelles les verbes
font affujettis dans une langue , qui font les
différentes conjugaifons ^ comme nous l'a-
vons déjà obfervé. Il y a des langues où les
différentes vues de l'efprit font marquées
par des particules , dont les unes précèdent
Se d'autres fuivent les radicales : qu'importe
comment, pourvu que les vues de l'efprit
foient diftinguéeî avec netteté , & que l'on
apprenne par ufage à connojtre les fignes
de ces diftinélions.
Parmi les auteurs qui ont compofé des
grammaires pour la langue hébraïque 5
les uns comptent fept conjugaifons , d'au-
tres huit : Mafclef n'en veut que cinq y
& il ajoute qu'à parler exactement , ces-
cinq devroient être réduites à trois. Quin~
que illa. y accurate loquendo , ad trcs effint
950 C O N
rcducenitz. Gramm. hebraîc, chap. îv , n.
Nous nous contenterons d obferver ici
que les verbes hébreux ont voix aftive S
voix paffive. Ils ont deux nombres, ie fin-
gulier & le pluriel; ils ont trois perfonncs,
& en conjurant on commence par la troi-
fieme perfonne , parce que les deux autres
font formées de celle-là , par l'addition de
quelques lettres.
En hébreu, les verbes ont trois genres
comme les noms , le genre mafculin , le
féminin, &: le genre commun ; enforte que
l'on connoit par la terminaifon du verbe , fi
l'on parle d'un nom mafculin , ou d'un
nom féminin; mais dans tous les temps la
première perfonne eft toujours du genre
commun. Au refte , les Hébreux n'ont point
de genre neutre ; mais lorfque la même ter-
minaifon fert également pour le mafculin
ou pour le féminin , on dit que le mot eft
du genre commun ; c'eft ainfi que l'on dit
en latin , hic adoUJcens , ce jeune homme ,
& hcec adoUfcens , cette fille ; civis bonus ,
bon citoyen, & cli-'is hona , bonne citoyen-
ne ; & c'eft ainft que nous difons , fage ,
utik , fideU , tant au mafculin qu'au fémi-
nin; on pourroit dire aufli que dans les
autres langues , telles que le grec , le latin ,
îe françois , &c, toutes les terminaifons
des verbes dans les temps énoncés par un
feul mot font du genre commun ; ce qui ne
{ignifîeroit autre chofe finon qu'on fe fert
également de chacune de ces terminaifons ,
foit qu'on parle d'un nom mafculin ou d'un
nom féminin.
Les Grecs ont trois efpeces de verbes par
rapport à la conjugaifon ; chaque verbe eft
rapporté à fon efpece fuivant la terminaifon
^w'thême. On appelle thême^ en termes de
grammaire greque , la première perfonne
du préfent de l'indicatif. Ce mot vient de
^i^Y\[ji.i pono^ parce que c'eft de cette pre-
mière perfonne que l'on forme les autres
temps ; ainfi l'on pofe d'abord , pour ainfi
dire, ce préfent, afin de parvenir aux for-
mations régulières des autres temps.
La première efpece de conjugaifon eft
celle des verbes que l'on appelle barytons ,
de &a.fvi , grave , Ôi de -ûvos , ton , accent ,
parce que ces verbes étoient prononcés avec
i'accent grave fur la dernière fyilabe, ôc
C O N
' quoique aujourd'hui cet accent ne fe mar-
que point , on les appelle pourtant toujours
harytom \ ré/: a» tendo ; ti.ott« verbero, font
des verbes barytons.
2. La féconde forte de conjugaifon eft:
cel.'e des verbes circonflexes : ce font des
verbes barytons qui foutfrent contraflion
en quelques-unes de leurs terminaifons, Sc
alors iis font marqués d'un accent circon-
flexe; par exemple «-^ctTraei amo , eft le ^tf-
ryton , &Ca>etTCt) le circonflexe.
Les barytons & les circonflexes font
également terminés en « à la première per-
fonne du préiènt de l'indicatif.
3. La troifieme efpece de verbes grecs ^
eft celle des verbes en {h , parce qu'en effet
ils font terminés en ^/ , ùynfum.
Il y a fix conjugaifons des verbes bary^
tons ; elles ne font diftinguées entre elles
que par les lettres qui précèdent la termi-
naifon.
On diftingue trois conjugaifons de verbes
circonflexes: la première eft des barytons
en fi» : la féconde de ceux en «w , & la troi-
fieme de ceux en « : ces trois fortes de
verbes deviennent circonflexes par la con-
traction en ft».
On diftingue quatre conjugaifons des ver-
bes en ui ; & ces quatre jointes à celles des
vQxht^barytons^ & à celles des circonflexes,
cela fait treize conjugaifons dans les verbes
grecs.
Tel eft le fyftême commun des grammai-
riens; mais la méthode de P. R. réduit ces
ixQ]zQ conjugaifons à deux : l'une des verbes
en â qu'elle divife en deux efpeces : ï. celle
des verbes qui fe conjuguent fans contrac-»
tion , & ce font les barytons : .celle de ceux
qui font conjugés avec contra<flion , & alors
ils font appelles aVco/2^^A;«5. L'autre conju"
gaifon des verbes grecs eft celle des verbes
en fjA.
Il y a quatre obfervations à faire pour bien
conjuguer les verbes grecs: il faut obferver la
terminaifon. Cette terminaifon eft marquée
ou par une (impie lettre , ou par plus d'une
lettre.
1. La figurative , c'eft-à-dire la lettre qui
précède la terminaifon : on l'appelle aufl[i
caraclériflique , ou Lettre de marque. On doit
faire une attention à cette lettre , i. au pré-
fent, 2. au prétérit parfait,, ôc 3. au futur
CO N
de rrndîcatlf aftif ; parce que c'efl: de ces
trois temps que les autres font formés. La
fu bdivifion des conjugaifons , & la difiinc-
tion des temps des verbes, fe tire de cette
lettre figurative, ou caraclériflique..
J. La voyelle , ou la diphtongue qui pré-
cède la terminaifon.
4. Enfin , il faut abferver l'augment. Les
lettres que l'on ajoute avant la première
fyllabe du thème du verbe , ou le change-
ment qui fe fait au commencement du ver-
be, iorfqu'on change une brève en une lon-
gue , eft ce qu^on appelle augmeni ; ainii il
y a deux fortes d'a-ugmens. i. L'augment
fyllabique qui fe fait en certains temps des
verbes qui commencent par une confonne,
par exemple, ivT.a , verbero , eft le thème
fens augment ; mais dans s rvTrQw , verbera-
baniik eft l'augment fyllabique ,. qui ajoute
«ne fyllabe de plus à Tt;'7rr&.
2. L'augment temporel fe fait dans les
verbes qui commencent par une voyelle
brève , que l'on change en une longue ,
par exemple 'j'-f 161, tralio , ii^u0V , trakcbam.
Ainfi , non feuleinent les verbes grecs
ont des terminaifons différentes , comme
les verbes latins ; mais de plus ils ont l'aug-
ment qui fe fait en cerrains temps.,, ^ au
commencement du mot,.
Voilà une première différence entre les
verbes grecs &: les verbes latins.
2. Les grecs ont un mode de plus ; c'êft
Foptatif , qui en grec a des. terminaifons
particulières, différentes de celles du fub-
jonélif ; ce qui n'eft pas en latin..
3. Les verbes grecs ont le duel, au lieu
qit'en latin ce nombre eft'confondu avec îè
pluriel, Les Grecs ont un plus grand nom-
bre de temps; ils ont deux aoriftes, deux
futurs , & un pau là- pôfi futur dans le fens
paflïf , à qpoi les latins ibpplée.nt. par. des
adverbes.
4. Enfin , les Grecs n*ont ni fUplns, ni
gérondifs proprement dits; mais ilsen font
bien dédommagés par les différentes termi-
naifons de l'infinitif, & par les différens
participes. Il y a. un infinitif pour le temps
{>réfent,.un autre pour le futur premier,
lin autre pour le futur fécond , un pour le
premier aorifte , un pour le fécond, un
pour le prétérit parfait ; enfin , il y en a
«n. pour le paulà-pofi-futur ^ ^ de plus il
C O N cji
y a autant de participes particuliers pour
chacun de ces temps-là.
Dans la langue allemande, tous les verbes
l'ont terminés en en à l'infinitif, fi vous eu»
exceptez feyn , être , dont l'e fe confond
avec Vy. Cette uniformité de terminaifon
des verbes à l'infinitif, a fait dire aux Gram-
mairiens , qu'il n'y avoit qu'une feule con^
juga'îfon en allemand ; ainfi il fuffit de bien
favoir le paradigme ou modèle fur lequel on
conjugue à la voix active tous les verbes
réguliers , & ce paradigm.e , c'eft lieben ,.
aimer; car teile eftla deftinaiion des verbes
qui expriment ce fentiment , de fervir de-
paradigme en prefque toutes les langues t
on doit enfuite avoir des liftes de tous les.
verbes irréguliers.
J'ai dit que le lichen étoit le modèle des;
verbes à là voix active ; car les al'emands-
n'ont point de verbes paffifs en un feul mot:
tel eft auffi notre ufage , &: celui de nos
voifins : on fe fe.rt d'un verbe auxiliaire-
auquel on joint le fupin qui eft indéclinar-
ble, ou le participe qui fe décline..
Les Aliemands ont trois verbes auxiliai-
res ; hahen ,. avoir ; feyn , être ; werdtn ^
devenir. Ce dernier fert à former le futur
de tous les verbes actif> ;.il fert aufli à for-
mer tous les temps de.s verbes paffifs , conr
jointement avec le participe du verbe; fur
quoi ilfaut obferver qu'en allemand, ce par-
ticipe ne, change jamais, ni pour la différence
des genres > ni pour celle des nombres; il
garde toujours la mém.e terminaifon.
A^l'égard de, l'anglois , la manière de con-
juguer les verbes de cette langue n'eft point
analogue à celle des autres langues : je ne fai
Ç\ ejle eft auffi facile qu'on le dit pour un
étranger qui ne fe contente pas d'une fim-
ple routine , & qui \q.\\X avoir une connoif-
fance raifonnée de cette manière de conju-,
guer. W,3.\\\s , qui étoit anglois , dit que
comme les verbes anglois ne varient point
leur terminaifon , la conjugaifon qui fait,
dit-il , une fi.grande difficulté dans les autres
langues , eft dans la fienne une affaire très-
aifée,. &: qu'on en vient fort aifément à
bout, avec le fecours de quelques mots ou
^verbes auxiliaires. V^erhorum ficxio feu con-
jugatio , qucs, in reliquis Un guis maximam
fonitur difficultatem, apudAnglos hviffimo
negotio pcragitur.y., verborum a/i^uot auxir
9u € O M
Liarium adjumemo ftre totum opus perficî-
îur. W al lis , gramm. ling. ang. chap. viij
d& vtrho.
C'eft à ceux qwi étudient cette langue à
décider cette qucftion par eux-mêmes.
Chaqn^; verbe anglois femble faire une
claffe à part; la participe prépofitive to , eft
comme une eCpece d'article deftiné à mar-
quer l'infinitif; de forte qu'un nom fubftan-
tif devient verbe , s'il eft précédé de cette
particule : par exemple , murder, veut dire
meurtre , homicide ; mais to murder^ fignifie
tuer: li/t^e(?on; toUft^ enlever: Love ^
amour, amitié, affeélion; to love ^ aimer,
&c. Ces noms fubftantifs qui deviennent
ainfî verbes, font la caufe de la grande dif-
férence qui fe trouve dans la terminaifondes
infinitifs ; on ptut obfeiver prefque autant
de terminaifons différentes à l'mfinitif, qu'i!
y a des lettres à l'alphabet, a, ^, c, ^, e,
/, g , &c. toflea , écorcher ; to roh , voler,
dérober ; to jind , trouver : to love , aimer ;
to quaff\ boire à longs traits ; to jog^ fecouer,
poufîer ; to cath , prendre , faifir ; to thank^
remercier , to call, appeller ; to /<z/72, battre,
frapper; to rum^ couàr; to help ^ aider;
to wear ^ porter; to lojf^ agiter; to reft ^ le
repofer; to know , favoir; to box ^ battre à
coups de poing; to marry^ marier, fe marier.
Ces infinitifs ne fe conjuguent pas par des
changemens de terminaifon , comme les
verbes des autres langues; la terminaifon de
ces infinitifs ne change que très-rarement.
Ils ont deux participes ; un participe pré-
fent toujours terminé en ing^ liaping^ ayant,
being , étant ; & un participe paffe terminé
ordinairement en e^ou V, loped , aimé:
mais ces pariicipes n'ont guère d'analogie
avec les nor-es ; ils font indéclirubles , &
font plutôt des noms verbaux qui fe pren-
nent tantôt fubftantivement &■ tantôt adjec-
tivement : ils énoncent l'acfion dans unfens
abftrait; par QXQm'^Ae^ your marrying Ç\^n\-
fie votre marier^ l'adion de vous marier
plutôt que votre mariant. Corning eft le par-
ticipe de to corne , arriver, & fignifie l'ac-
iion d'' arriver , de venir , ce que notre par-
ticipe arrivant ne rend point. Les Anglois
difent his coming ^ fon arrivée, fa venue,
fon aftion d'arriver ; &. l'idée qu'ils ont
alors dansl'efprit, n'a pas la même force
,^ue cçlle de la penfée que i)o.us avons quand
CON
nous ^\Çon^ venant , arrivant. C'eft de la
différence du tour , del'ifnag'nation, ou de
la différente manière dont reljjrir eft aff^:;clé,
que l'on doit tirer la différence des idiotif-
mes & du génie de; langues.
C'eft avec l'infini; if&c avec les deux homs
verbaux ou participes dont nous venons de
parler, que l'on conjugue les verbes ang'ois,
parle fecours de certains mots &c de quel-
ques verbes auxiliaires. Ces verbes font pro-
prement les feuls verbes. Ces auxiliaires font
to hâve , avoir \ to be^ être ; to do , faire , &c
quelques autres. Les perfonnes fe ma-quent
par les pronoms perionnels i, je ; ifiou , tu;
he, il ; j/ie, elle : &: au pluriel we , nous ;
you^ vou- ; they .^ Us ou elles , fans que
cette différence des pronoms apporte quel-
que changement dans la terminail'cndunom
verbal que l'on regarde communément
comme verbe.
Les grammaires que l'on a faitC'^ jusqu'ici
pour apprendre l'Anglois, du moins celles
dont j'ai eu connoifl^ance , ne m'ont pas paru
propres pour nous doaner une idée jufte de
la manière de conjuguer des Anglois. On
rend l'anglois par un équivalent françois ,
qui ne donne pas l'idée jufte du tour littéral
anglois, ce qui eft pourtant le point que
cherchent ceux qui veulent apprendre une
■ingue étrangère; par exemple, i do dine^
on traduit je dîne ; thou dofl dine , tu dînes;
he dois dine^ il dîne : i marque la première
perfonne ; do , veut dire faire ; & dine y
dîner ; il faudrolt donc traduire , je ou mol
faire dîner ^ tu fais dîner , // ou lui fait
dîner. Et de même there is , on traduit au
fingulier , il y a ; there ^ eft un adverbe qui
veut dire A/, & is eft la troifieme perfonne
du préferrt du verbe irrégulier ^ to behx. arc
fert pour les trois perfonnesdu pluriel ; ainfî
il falloit traduire there is , là eft , & there are^
ià font , & obfervçr que nous difons en
françois , il y a.
Le fens paflRt s'exprime en anglois ,
ccmime en allemand & en françois, par le
verbe fubftantif, avec le participe du verbe
dont il s'agit , i am loved, je fuis aimé.
Pour fe familiarifer avec la langue an-
gloife , on doit lire fouvent les liftes des
verbes irréguliers qui fe trouvent dans les
grammaires , & regarder chaque mot d'un
verbe çonjime un mot particulier, qui a une
ijgnificatio.î>
C O N
fîgnification propre ; par exemple, / am , je
fuis ; thou art , tu es ; he is , il eft ; we are ,
nous iommes; je are , vous êtesj they are,
ils font , &c. Je regarde chacun de ces
mots-là avec la fignification particulière ,
& non comme venant d'un m3me verbe.
Am , lignifie ////.y , coramtfun iigniikfokii,
ainlî des autres.
Les Efpagnols ont trois conjugaifons , qu^ils
diftinguent par la terminaifon de l'infinitif.
Les verbes dont Pinfinitif eft terminé en ar ,
font la première conjugaifon : ceux de la
féconde fe terminent en er : enfin , ceux
de la troiiieme en /r.
ire c O N J U G A I S O N.
J{ma,r , aimer.
Indicatif présent.
Singulier,
Jimo j'aime.
Jimus , .... tu aimes.
Amat , .... il aime.
Vlttriel.
Jimamos , . . . nous aimons.
jimais vous aimez.
v^m^» , . . ... ils aiment.
ne CONJUGAISON.
Corner ,
. . . . manger
Indicatif présent.
Singulier.
Como , ,
Cornes ,
Corne ^ .
. . . " je mange
. . . tu manges
. . . il mange
Fluriel.
Comemos , . . nous mangeons.
Cornets , . . . . vous mangez.
Comen , ... ils mangent.
CON 5,53
ils ont quatre auxiliaires, haver , tener,
fer ôc ejîar. Les deux premières fervent à
conjuguer les verbes adtifs , les neutres &
les réciproques : fer &c ejlar font deftinés
pour la conjugaifon des verbes pallifs.
La manière de conjuguer des Elpagnols,
eft plus analogue que la nôtre à la manière
des latins. Leurs verbes ne font précédés
des pronoms perfonnels , que dans les cas
où ces pronoms feroient exprimés en latin
par la raifon de Ténergie ou de l'oppoiition.
Cette fuppreiTion des pronoms vient de ce
que les terminaifons efpagnoles font allez
connoîtrc les perfonnes.
llle CONJUGAISON.
Subir ^ .... monter.
Indicatif présent.
Singulier.
Suho ..... je monte,
Subes , ... tu montes*
Sube , . . . .il mon ce.
Tluriel.
Subimos , . . nous montons.
Subis ,.,'.. vous montez,
Suben ..... ils montent.
Ce n'eft pas ici le lieu de fuivrc toute la
conjugaifon , ce détail ne convient qu'aux
grammaires particulières; je n'ai voulu que
donner ici une idée du génie de chacune
des langues dont je parle par rapport à la
conjugaifon.
Les Italiens, dont tous les mots, fi l'on
en excepte quelques prépofitions ou mono-
fyllabes , finiflent par une voyelle , n'ont que
trois conjugaifonsy comme les Efpagnols. La
première eft en are; la féconde en ëre long
ou en ère bref; Se la troifieme en ire.
On doit avoir des liftes particulières de
toutes les terminaifons de chaque conjugai-
fon régulière, rangées par modes, temps,
nombres & perfonnes ; en forte qu'en met-
tant les lettres radicales devant les terminai-
fons, on Conjugue facilement tout verbe ré-
gulier. On a enfuite des Uftes pour les irré-
guliers , fur quoi Pon peut confulter la mé-
thode italienne de Veneroni, //2-4°. 1688.
A l'égard du françois, il fcut d'abord ob-
Tome VIII.
ferver que tous nos verbes font terminés à
l'infinitif ou en er, ou en />, ou en air, ou
en re , ainfi ce foui mot technique er-ir-oir"
re , énonce par chacune de ces (yllabes , cha-
cune de nos quatre conjugaifons générales.
Ces quatre conjugaifons générales font
enfuite mbdivifées en d'autres à caufo des
voyelles , ou des diphthongues , ou des con-
fonnes qui précèdent la terminaifon générale;
par exemple, er eft une terminaifon générale,
mais fi er eft précédé du fon mouillé foible ,
comme dans envo-yer, ennu-yer, ce fon ap-
porte quelques différences dans la conjugai-
fon; il en eft de même de re , ces 2 lettres
font quelquefois précédées de confonnes,
comme dans vaincre , rendre , battre , Scc,
Je crois que plutôt de fatiguer l'efprit &
la mémoire de règles , il vaut mieux donner
un paradigme de chacune de ces quatre
conjugaifons générales , & mettre enfuite au
deifus une Mfte alphabétique des verbes que
l'ufage a exceptés de la règle.
Dddddd
^54 CON
Je crois auflî que Ton peut s'épargner la
peine de fe fatiguer après les obfervations
que les grammairiens ont faites fur les for-
mations de temps; la feule infpe6tion du
paradigme donne lieu à chacun de faire fès
remarques fur ce point.
D'ailleurs, les Grammairiens ne s'accor-
dent point fur ces formations. Les uns com-
mencent par l'infinitif: il y en a qui tirent
les form.;itions de la première pcrfonne du
préfent de l'indi